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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 12 - Témoignages du 17 avril 2007


OTTAWA, le mardi 17 avril 2007

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui à 9 h 33 pour étudier, afin d'en faire rapport, les questions relatives à l'équilibre fiscal vertical et horizontal entre les divers niveaux de gouvernement du Canada.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bonjour à tous. Je déclare la réunion du Comité sénatorial permanent des finances nationales ouverte.

Je m'appelle Joseph Day, je représente la province du Nouveau-Brunswick au Sénat, et je suis président de ce comité.

[Traduction]

Le 27 septembre 2006, le Comité sénatorial permanent des finances nationales a été mandaté par le Sénat pour examiner, en vue d'en faire rapport au plus tard le 30 juin 2007, les questions relatives à l'équilibre fiscal vertical et horizontal entre les divers niveaux de gouvernement au Canada. À l'automne 2006, le comité a entendu les témoignages des principaux hauts fonctionnaires des divers ministères territoriaux et provinciaux, de chercheurs du milieu universitaire et d'experts de la politique et des marchés venus des quatre coins du pays. Les audiences se sont déroulées sur une période de six semaines.

Le 12 décembre 2006, le comité a déposé un rapport provisoire intitulé L'équilibre fiscal horizontal : Vers une démarche fondée sur des principes, dans le cadre de son étude en cours des arrangements fiscaux du Canada avec les provinces, les territoires et les administrations municipales.

Le comité n'avait alors pas eu le temps d'entendre les porte-parole de la province de la Saskatchewan, de sorte que c'est avec grand plaisir que nous accueillons aujourd'hui l'honorable Harry Van Mulligen, ministre des Relations gouvernementales de la Sakatchewan. Élu en 1986 pour un premier mandat, par la suite renouvelé en 1991, en 1995, en 1999 et en 2003 — je prends le temps de le féliciter de toutes ces victoires —, M. Van Mulligen a été nommé, en 2006, au portefeuille actuel. Il avait auparavant été ministre des Finances, ministre responsable de SaskEnergy, leader de l'assemblée législative pour le gouvernement, ministre des Services sociaux, ministre responsable des personnes handicapées et ministre responsable des aînés. Il a aussi présidé le comité des comptes publics et celui des sociétés d'État.

Le ministre est accompagné aujourd'hui de M. Jones, sous-ministre adjoint aux Affaires gouvernementales, et de Mme Brady, analyste au ministère des Finances.

Nous croyons savoir que vous devez nous quitter à 10 h 30.

Avant de commencer, le comité tient à exprimer à la population de la Saskatchewan ses sincères condoléances à l'occasion du décès du sénateur Jack Wiebe, qui a été membre de notre comité et de plusieurs autres comités sénatoriaux. Il a très bien servi les intérêts de la Saskatchewan. Tous les collègues se joignent à moi pour vous exprimer toute notre sympathie.

Monsieur le ministre, si vous voulez bien commencer.

L'honorable Harry Van Mulligen, M.A.L., ministre des Relations gouvernementales, province de la Saskatchewan : Je vous remercie de ces propos bienveillants. Ceux d'entre nous, et ils sont nombreux à la table aujourd'hui, qui ont connu Jack savent à quel point c'était de l'or en barre. Tous en Saskatchewan, quelle qu'ait été leur couleur politique, le tenaient en très haute estime parce que c'était le genre d'homme capable de composer avec toutes sortes d'intérêts et de rejoindre bien des gens. Tous l'ont bien aimé comme lieutenant-gouverneur de la province, perçu comme il l'était comme étant une force de cohésion. Il nous manquera, et je vous suis donc reconnaissant d'avoir eu ces bienveillantes paroles à sa mémoire.

Je vous remercie également de m'offrir l'occasion de comparaître pour vous aider dans vos délibérations au sujet d'une question sûrement des plus vexantes pour la fédération, soit de savoir comment il faudrait distribuer et traiter les ressources fiscales au Canada, du point de vue tant de la capacité du gouvernement fédéral que de celle des provinces et des territoires. Comment devrait-on les répartir entre les provinces et les territoires? Je tiens à vous féliciter d'avoir entamé ce travail qui doit vous sembler sans fin. Nous savons gré au Sénat du travail qu'il accomplit dans ce domaine et nous l'en félicitons.

Dans ma déclaration, j'aimerais vous parler de trois grandes questions. Je vais parler de péréquation, notamment. À notre avis, la question de l'équité n'est pas réglée. La deuxième concerne les transferts par habitant et la nouvelle position adoptée par le gouvernement fédéral en matière de transferts de capitaux. Enfin, il faudrait aussi parler du processus fédéral unilatéral. Avec votre permission, je vais les aborder un à un.

Arrêtons-nous d'abord à la péréquation. Il s'agit de la promesse faite par le gouvernement fédéral de faire en sorte que les revenus tirés de ressources naturelles non renouvelables sont soustraits de la formule de péréquation afin de favoriser la croissance économique. Il faudrait aussi préciser que la promesse était inconditionnelle dans le cas de la Saskatchewan et, je présume, pour le reste du pays. Il n'a jamais été question d'un plafond ou de toute autre condition qui aurait pu faire croire à la population que l'engagement n'était pas ferme.

Par cette promesse qui nous a été faite, on reconnaissait que le programme de péréquation revenait essentiellement à ce que les provinces vendent des actifs pour financer des programmes centraux, ce qui n'a pas changé, et que les montants récupérés dans le cadre de la péréquation découragent aussi le développement économique, ce qui est toujours le cas pour la Sasktachewan.

J'aimerais tout d'abord que nous parlions du plafond. La proposition fédérale revient, en fin de compte, à contrebalancer essentiellement l'exclusion des revenus tirés des ressources par l'introduction d'un plafond aux termes duquel tous ces revenus seraient inclus. Pour l'année 2007-2008, certains avantages reviennent tout de même à la Sasktachewan, mais par la suite, il ne leur restera que le coût d'extraction des ressources et elle n'aura pas droit à la péréquation.

Le côté gauche du diagramme à barres horizontales que voici illustre ce qui a été promis, soit une exclusion totale. Du côté droit, on voit la réalité, en somme ce que nous avons obtenu. Il est très frustrant pour la Saskatchewan d'entendre perpétuellement que cette promesse a été tenue alors qu'en réalité, il n'en est manifestement rien. La colonne de gauche représente à notre avis une approche équitable fondée sur des principes et celle de droite, une autre mesure ad hoc et arbitraire.

La diapositive que voici illustre la façon dont le plafond permet de récupérer nos revenus tirés des ressources. Si ces revenus augmentent de 100 $ par habitant, comme on peut le voir dans la colonne de droite, nos droits à la péréquation baissent tout autant. Il n'y a aucun avantage net pour la Saskatchewan à accroître les revenus tirés de ses ressources. Les problèmes auxquels donne naissance la promesse ne sont pas réglés. Nous sommes obligés d'affecter le produit ponctuel de la vente d'actifs à financer des programmes permanents.

Nous estimons qu'on nous refuse ainsi ce que prévoit le paragraphe 36(2) de la Loi constitutionnelle de 1982, soit le droit à des services comparables à un niveau raisonnable de taxation. Cet engagement ne devrait pas nous obliger à vendre des actifs uniques pour financer des programmes.

La nouvelle formule de péréquation rendra encore plus permanente l'iniquité actuelle, puisque certaines provinces, contrairement à la Saskatchewan, auront elles droit à tous leurs revenus de l'énergie, sans récupération. Nous ne croyons pas que la réforme de la péréquation devrait être mise en oeuvre sans résoudre la question de l'équité. Une entente intervenue avec la Sasktachewan en matière d'énergie est une option qui pourrait rétablir l'équité de la péréquation.

J'aimerais maintenant passer avec vous à la répartition du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. La répartition classique du TCPS reposait sur une taxe par habitant égale, plus des paiements de péréquation qui tenaient compte des points d'impôt transférés aux provinces en 1977. La décision de répartir le TCPS grâce à des paiements égaux par habitant sans tenir compte de la valeur des points d'impôt pénalisera des provinces comme la Saskatchewan qui ont une capacité fiscale inférieure. La nouvelle formule de partage du TCPS enlèvera 800 millions de dollars par année aux provinces moins riches, au profit de l'Ontario et de l'Alberta. La nouvelle formule accentuera à notre avis notre désavantage par rapport aux autres provinces tout en nous empêchant, dans le cadre de la réforme de la péréquation, de profiter du développement de nos ressources.

Voici une diapositive qui illustre l'impact des changements apportés au TCPS. La part du TCPS à laquelle a droit la Saskatchewan — la ligne rouge — n'augmentera pas essentiellement avant 2011-2012. Celle de l'Ontario — la ligne verte — aura alors progressé de 42 p. 100 et celle de l'Alberta — la ligne bleue —, de 90 p. 100 par rapport aux niveaux de 2006-2007.

J'aimerais aussi vous toucher quelques mots du financement par habitant, exclusion faite du Transfert canadien en matière de programmes sociaux. Le gouvernement fédéral a décidé d'utiliser des allocations par habitant égales dans des domaines comme les changements climatiques et le réseau routier national. C'est illogique parce que la population n'est pas un facteur déterminant de ces programmes.

Ainsi, la Saskatchewan est responsable de 9 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre du Canada, mais ne répond que de 3 p. 100 de la population. En d'autres mots, nous avons droit à 3 p. 100 du financement alors que nous sommes à l'origine de 9 p. 100 du problème. Neuf pour cent du réseau routier national se trouvent en Saskatchewan, mais la province n'a droit qu'à 3 p. 100 des fonds pour l'entretenir. Cela a pour effet d'imposer à la Saskatchewan un fardeau plus lourd que celui des autres provinces pour réduire les émissions des gaz à effet de serre et pour entretenir le réseau routier national.

En guise de conclusion, j'aimerais vous faire part de quelques observations au sujet du processus. Le processus intergouvernemental du Canada ne fonctionne plus. Le fédéralisme d'ouverture s'est avéré une rue à sens unique. Durant la dernière année, le gouvernement fédéral n'a pas pris d'engagement multilatéral important en matière de péréquation, de réforme du TCPS ou d'autres questions importantes comme les changements climatiques. Comme les engagements multilatéraux sont inexistants, les gouvernements sont obligés de négocier dans l'arène publique ou par l'intermédiaire de campagnes de publicité sur des sites Web. Ce n'est pas là un mode de négociation utile et il ne sert pas les intérêts des Canadiens.

L'inefficacité du processus intergouvernemental a abouti à une approche à l'égard de l'équilibre fiscal qui ne correspond pas vraiment aux intérêts des Canadiens parce que la réforme de la péréquation ne tient pas compte de l'iniquité du traitement des revenus tirés des ressources non renouvelables. Les fonds fédéraux sont répartis par habitant alors que la population n'est pas le facteur déterminant. Les transferts fédéraux exacerbent désormais de manière radicale les problèmes de développement économique avec lesquels sont aux prises les provinces moins bien nanties.

Il existe un meilleur moyen de travailler dans le sens des intérêts canadiens. Il faut que les gouvernements travaillent ensemble sur une base multilatérale à résoudre les problèmes nationaux comme les changements climatiques, et nous sommes prêts à le faire.

Je demeure à votre disposition pour répondre aux questions.

Le président : Je vous remercie de ce survol. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir abordé la question de la péréquation et du transfert en matière de programmes sociaux. Il se peut qu'on ait des questions à vous poser concernant le transfert en matière d'éducation.

Le sénateur Ringuette : Moi aussi, je vous remercie d'avoir accepté de comparaître devant notre comité. Vous avez fait valoir d'excellents arguments.

J'ai entendu dire que la Saskatchewan est dans une certaine mesure productrice d'électricité. Votre ministère a-t-il examiné les revenus tirés de l'électricité? S'ils étaient inclus dans la formule, quel en serait l'impact sur vos paiements de péréquation?

M. Van Mulligen : Je ne suis pas tout à fait sûr de la réponse à cette question, c'est-à-dire de l'effet qu'aurait le programme de péréquation sur les revenus de SaskPower, notre producteur d'électricité. C'est d'ailleurs une excellente question. Je puis vous dire cependant que la position relative de SaskPower par rapport au Manitoba, par exemple, aux imposants revenus de Manitoba Hydro tirés des exportations d'électricité, ne sont même pas comparables à sa capacité. Nous exportons un peu d'électricité, mais notre programme n'est pas conçu pour faire de nous un exportateur net. Nous exportons parfois de l'électricité parce que nous avons un surplus qui peut être absorbé par d'autres juridictions, mais notre programme n'est pas conçu pour que SaskPower soit une source nette de revenus. Le coût de notre service n'est pas, non plus, faible, comme celui du Manitoba ou du Québec, qui disposent d'un potentiel de production hydroélectrique considérable.

Le sénateur Ringuette : À votre avis, les revenus tirés de l'électricité devraient-ils être inclus dans la formule de péréquation? Nous sommes en train d'examiner les annonces qui viennent d'être faites en matière de péréquation. J'estime qu'elles ne contribuent pas à rétablir l'équilibre fiscal parce que certaines provinces comme le Québec — avouons-le — tirent une grande part de leurs revenus de l'électricité. On n'en tient pas compte quand vient le temps de redistribuer la richesse. C'est en ce sens que je vous pose la question.

L'autre source majeure de préoccupation dont il faudrait tenir compte est cette répartition par habitant en matière de santé, d'éducation et, comme vous venez de le souligner, de réseau routier national et d'émissions de gaz à effet de serre. Si je m'y arrête, je constate qu'en matière de transports publics, dans certaines provinces, le financement n'est pas calculé par habitant. Je suppose que le gouvernement fédéral actuel fait beaucoup de manipulation à des fins électorales dans la façon dont il distribue l'argent pour aider les provinces. Résultat : les provinces les moins peuplées sont persona non grata pour cette forme de redistribution. Vous pourriez peut-être nous en parler un peu plus.

M. Van Mulligen : Ceux qui suivent cette question pourraient bien s'interroger sur le mal qu'il y a à prévoir des transferts égaux aux provinces pour le Transfert canadien en matière de programmes sociaux et à les étendre plus tard à tous les transferts en matière de santé. À un moment donné, le gouvernement fédéral a dit que, plutôt que de verser des paiements aux provinces, il va leur transférer des points d'impôt. De la sorte, il réduit ses impôts, et nous devons augmenter les nôtres. D'après lui, l'effet est neutre.

Toutefois, ce n'est pas tout à fait ainsi que cela fonctionne, comme nous le savons. Il est faux de dire que si le gouvernement fédéral réduit ses impôts de deux points, les provinces peuvent augmenter les leurs d'autant et maintenir leurs revenus. L'effet pourrait bien être neutre en Ontario et dans certaines autres provinces en raison de la richesse présente au sein de leur juridiction, mais d'autres qui ont une capacité fiscale inférieure devront augmenter leurs impôts de beaucoup plus de points pour maintenir leurs revenus.

Le gouvernement fédéral affirme que, quoi qu'il en soit, il souhaite simplement faire des paiements de transfert égaux. À notre avis, la formule commence à transférer plus de richesse aux provinces qui l'ont déjà au départ. Cela impose des pressions supplémentaires, peut-être pas aussi fortes actuellement dans le cadre du Transfert canadien en matière de programmes sociaux, mais tout de même sensiblement plus fortes quand on l'étend aussi — si j'ai bien compris, dans sept ans environ — aux transferts en matière de santé. On impose ainsi un très lourd fardeau aux Canadiens.

Selon nous, on creuse ainsi l'écart entre la capacité fiscale de notre province et celle de la province voisine, l'Alberta. L'Alberta a une capacité fiscale inégalée au Canada, ce qui met beaucoup de pression sur nous pour qu'elles soient concurrentielles, pour qu'elles stimulent et renforcent notre économie de manière à offrir à nos jeunes plus de possibilités d'avenir. Il s'agit là pour nous d'un immense défi.

Le fait de changer ultérieurement le régime des transferts limite encore plus notre capacité de livrer une concurrence efficace à l'autre province. Les Canadiens maîtrisent plus facilement la question des transferts par habitant parce qu'ils savent que la Saskatchewan compte beaucoup plus de kilomètres de route que les autres juridictions, mais sans forcément avoir la population pour soutenir ce réseau routier.

Le sénateur Murray : Croyez-le ou non, j'étais là à la première réunion des premiers ministres en 1977 en tant que conseiller du gouvernement du Nouveau-Brunswick, quand M. Trudeau a proposé le financement en bloc accompagné du transfert de points d'impôt aux provinces — de 13,5 points sur le revenu des particuliers et d'un point sur le revenu des entreprises, si je ne m'abuse. Les provinces y ont adhéré parce que M. Trudeau a soutenu, de manière très convaincante, que cela donnerait aux provinces une plus grande marge de manoeuvre pour agir en fonction de leurs propres priorités.

Naturellement, l'Ontario, l'Alberta et les provinces les plus nanties étaient d'accord, mais d'autres provinces qui voyaient que la valeur d'un point d'impôt variait considérablement d'une province à l'autre, ont réclamé, avec succès, qu'il y ait péréquation de ces points d'impôt. Le régime Trudeau en a accepté le principe, et c'est à partir de là que fut établi le financement des programmes établis, le FPE comme on l'a appelé, qui a été maintenu essentiellement jusqu'au milieu des années 1990.

Certains d'entre nous — et certaines provinces — ont affirmé que le transfert de points d'impôt et les arguments employés par le gouvernement fédéral au fil des ans avaient tendance à semer la confusion dans les pourparlers visant le montant que le gouvernement fédéral contribuait à la santé, à l'aide sociale et à l'éducation postsecondaire. Chaque fois que le gouvernement fédéral avançait un montant, il y incluait la valeur de ces points d'impôt qui avaient été transférés 20 ou 30 ans auparavant et qui étaient maintenant prélevés par les provinces.

C'est en ce sens que je me réjouis de la disparition de ces points d'impôt dans la formule. Bien sûr, votre problème concerne les paiements de péréquation qui y sont associés et qui favorisaient votre province et d'autres provinces bénéficiaires. Ces paiements de péréquation connexes ont augmenté avec les années.

Je vais en venir au Transfert canadien en matière de programmes sociaux dans un instant. Voilà des semaines déjà que j'essaie de bien cerner la question, mais je n'y suis pas tout à fait parvenu encore. Le gouvernement Martin s'est entendu avec les provinces au sujet du Transfert canadien en matière de santé. Cette entente prévoit, si je ne m'abuse, une croissance de 6 p. 100 jusqu'en 2013-2014 d'un certain montant de base. Qu'est-il arrivé à cette péréquation connexe dans l'entente? Vous ou un de vos fonctionnaires pouvez-vous me le dire?

Erin Brady, analyste, ministère des Finances, gouvernement de la Saskatchewan : Ces points d'impôt continueront de faire l'objet de péréquation jusqu'à ce que soit renouvelé le TCS en 2014-1015. Les fonctionnaires fédéraux ont affirmé projeter à ce moment-là de passer alors également au financement par habitant.

Le sénateur Murray : C'est ce qui a été annoncé dans le dernier budget. La péréquation connexe est maintenue.

Mme Brady : C'est juste.

Le sénateur Murray : Toutefois, quand le gouvernement fédéral parle du montant que représente le TCS, il ne tient plus compte de la valeur des points d'impôt, n'est-ce pas?

Mme Brady : Ils continuent d'être évalués, mais on parle plus couramment des paiements en espèces.

Le sénateur Murray : Il est question de paiements actuellement.

Mme Brady : Effectivement.

Le sénateur Murray : Pour ce qui est du Transfert canadien en matière de programmes sociaux, j'en ai discuté avec certains de vos homologues des autres provinces et je ne saisis toujours pas bien.

Le gouvernement fédéral semble reconnaître qu'il existe un problème de ce côté-là. Il affirme qu'il va augmenter les paiements en espèces versés dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé de 3 p. 100 par année. Il se trouve que j'estime cette augmentation insuffisante en termes d'éducation postsecondaire, mais c'est là un tout autre débat.

Il affirme ensuite qu'une augmentation de 300 millions de dollars du montant de base du TCPS est déjà prévue dans la loi cette année. Je vous cite un document budgétaire intitulé « Rétablir l'équilibre fiscal pour créer une fédération plus forte » :

Pour que l'Ontario, l'Alberta et les Territoires du Nord-Ouest reçoivent le même soutien en espèces par habitant que les autres provinces et territoires, tout en évitant qu'une province ou un territoire ne soit indûment pénalisé par ce changement, le total des transferts en espèces au titre du TCPS sera augmenté de 687 millions de dollars en 2007-2008.

Donc, la loi prévoit déjà 300 millions de dollars et on promet 687 millions de dollars de plus pour, censément, que vous touchiez les mêmes paiements de péréquation, si j'ai bien compris, de sorte que vous recevrez un milliard de dollars supplémentaire.

Puis, en 2009-2010, les paiements commenceront à augmenter de 3 p. 100. En quoi cela vous pose-t-il un problème?

Mme Brady : Notre problème vient de la croissance des transferts.

Le sénateur Murray : Vous parlez du montant de base?

Mme Brady : Non, je ne parle pas du montant de base, mais plutôt du fait que la Saskatchewan sera limitée au plancher. D'autres provinces verront leurs transferts augmenter, mais la Saskatchewan aura droit au plus à 335 millions de dollars, dans le cadre du TCPS. La transition vers le financement par habitant nous coûte si cher que le gouvernement fédéral a avisé la Saskatchewan de faire en sorte que le montant ne tombe pas en deçà du montant prévu cette année. En réalité, notre province n'observera pas de croissance, de sorte qu'elle est placée dans la position difficile d'avoir à faire concurrence à des provinces comme l'Alberta, qui connaîtra une croissance de 90 p. 100 durant cette période, alors que le montant versé à la Saskatchewan pour le TCPS n'augmentera presque pas avant la fin de cette période.

Le sénateur Murray : Est-il plus avantageux de vous comparer à une province voisine ou à ce que vous auriez reçu si la péréquation connexe avait été maintenue? Je comprends ce que vous dites, que les transferts maintiennent votre situation pour un an, mais que rien n'est prévu pour faire progresser la province. Je suppose que c'est le cas de toutes les provinces bénéficiaires.

M. Van Mulligen : Nous sommes très vulnérables à tout autre changement ou distorsion de la capacité fiscale entre la Saskatchewan et l'Alberta. C'est un énorme problème pour la province.

Le sénateur Murray : Puis-je poser une question concernant la péréquation ou préférez-vous passer à autre chose?

Le président : J'aimerais bien que vous posiez la question, mais auparavant, j'aurais besoin d'une précision.

En ce qui concerne le point dont vous venez de discuter en matière de TCPS, j'avais cru comprendre que c'est 3 p. 100 par année jusqu'à la fin de 2014-2015 à compter de 2009, mais que le montant de base de la Saskatchewan a été augmenté cette année-ci pour lui permettre de traverser cette période. Les 3 p. 100 ne s'appliquent pas à votre montant de base, mais plutôt à l'enveloppe globale, d'où le problème. Est-ce que j'ai bien saisi?

Mme Brady : C'est vrai. La base nationale progressera de 3 p. 100, mais la part de la Saskatchewan n'augmentera pas parce qu'elle est plafonnée.

Le président : Je croyais que chaque province aurait droit à une augmentation de 3 p. 100?

Mme Brady : Malheureusement, ce n'est pas le cas.

Le sénateur Stratton : On serait curieux de savoir pour quelle raison la Saskatchewan ne connaît pas de croissance quand on examine ces courbes. Le manque de croissance est-il attribuable à la population? Pourquoi la province n'a-t- elle pas de croissance?

Mme Brady : Le passage au financement par habitant coûte à la province 50 millions de dollars environ par année, de sorte que le gouvernement fédéral a affirmé qu'il protégerait désormais ce montant pour la province. Cependant, chaque année, la valeur de cette protection commence à baisser. La Saskatchewan n'envisage pas de croissance au-delà de ces 335 millions de dollars.

Le sénateur Stratton : La question devient difficile quand on compare la croissance de la population de la Saskatchewan avec celles de l'Ontario et de l'Alberta. N'est-ce pas là le noeud?

Mme Brady : Non. Le gouvernement fédéral ne s'est pas engagé à notre égard en fonction d'un plancher par habitant. D'après ce que j'en sais, le plancher est représenté par les transferts totaux à la Saskatchewan.

Le sénateur Stratton : Je n'arrive pas à comprendre la raison pour laquelle l'Ontario et l'Alberta ont une croissance et que la Saskatchewan n'en connaît pas une analogue. La seule réponse qui me vient à l'esprit est la croissance de la population, surtout en Alberta. Je ne comprends pas pourquoi vous n'avez rien alors que les deux autres provinces ont une augmentation, si ce n'est en raison de la croissance de leur population.

Dylan Jones, sous-ministre adjoint, ministère des Relations gouvernementales, gouvernement de la Saskatchewan : L'essentiel est de passer à une formule qui ne tient plus compte de la valeur inférieure des impôts que nous prélevons sur le revenu des particuliers et des entreprises. Par conséquent, un certain écart qui était contrebalancé ne l'est plus, et nous passons au modèle intégral de financement au pro rata de la population, ce qui signifie que les montants auxquels a droit la Saskatchewan chutent sensiblement. Vous pourriez tirer une ligne sur ce tableau pour illustrer le montant perdu en raison de la différence de calcul. Un point crucial est la décision de ne plus tenir compte de la capacité inférieure de la Saskatchewan de financer ces programmes.

Le sénateur Stratton : En raison de l'assiette fiscale diminuée. Vous avez aussi mentionné le financement par habitant.

M. Jones : C'est juste.

Le sénateur Stratton : Il est affecté par la croissance de la population dans les deux autres provinces.

M. Jones : Ce n'est pas le principal facteur.

Le sénateur Stratton : J'en suis conscient, mais c'est tout de même un élément de l'argumentation.

M. Van Mulligen : Nous comprenons tous le principe du financement par habitant, ce qui ne nous pose pas de problème. C'est plutôt la valeur des impôts et le fait reconnu que l'Ontario et l'Alberta comptent beaucoup plus de sièges sociaux et d'entreprises industrielles, ce qui donne un impôt calculé en pourcentage donnant droit à ces provinces à beaucoup plus de financement par habitant ou sous autre forme qu'à la Saskatchewan.

Le président : Nous discutons des initiatives du budget de 2007 dont la mise en oeuvre n'est pas prévue dans un projet de loi. Le Parlement ne s'est pas encore prononcé à leur sujet, mais le comité reviendra sûrement sur la question à mesure que lui sont renvoyés les projets de loi. Je suppose que notre comité examinera en temps et lieu le projet de loi mettant en oeuvre les mesures annoncées dans le budget et que nous vous inviterons à nouveau à venir nous expliquer l'impact de ces diverses initiatives.

M. Van Mulligen : Votre comité gardera certainement un oeil sur cette question, qui porte clairement sur les gagnants et les perdants de la fédération, les problèmes posés par les tensions régionales et ce qui nous semble être un autre déplacement des ressources vers des régions plutôt bien nanties, au détriment des autres. Nous ne serions pas en train d'avoir ce débat si, en 1977, on avait opté pour des paiements en espèces seulement plutôt que pour des points d'impôt. L'évolution de la question mérite d'être suivie.

Le sénateur Murray : Pour ce qui est de la péréquation, il faut décider de la manière de traiter les revenus tirés des ressources naturelles. Depuis les élections de 2004, je crois, M. Harper s'est engagé en Saskatchewan à exclure tous ces revenus de la formule de péréquation. Soit dit en passant, j'ajouterais que M. Layton, du NPD, lui a fait écho, car il ne pouvait pas demeurer muet et laisser croire que M. Harper s'entendait mieux que lui avec le gouvernement néo- démocrate de la Saskatchewan.

L'idée d'exclure les revenus tirés des ressources venait de sources respectables du milieu universitaire. Nous avons entendu le témoignage de M. Ken Boessenkool la première fois que notre comité s'est penché sur la question de la péréquation en 2001-2002. Dans le cadre de cet examen, nous avons analysé les données, mais après coup, et constaté que, bien que l'idée avantage considérablement la Saskatchewan, la Colombie-Britannique et, dans une certaine mesure, Terre-Neuve-et-Labrador, à peu près toutes les autres provinces bénéficiaires seraient durement touchées. En fait, lorsqu'elle est comparée à divers taux d'inclusion, l'exclusion totale produit un plus faible bassin de fonds de péréquation.

Le comité est revenu sur la question en 2006 et est arrivé à la même conclusion à peu près. Comme vous le savez, le groupe provincial-territorial dont je faisais aussi partie a étudié la question et constaté qu'il n'arrivait pas à vraiment justifier une exclusion totale. Il en a plutôt conclu que le meilleur principe était l'inclusion de tous les revenus tirés de ressources naturelles. Ainsi, tous y gagneraient, mais le processus serait coûteux pour le gouvernement fédéral. Le groupe a conclu que, s'il était trop coûteux, il faudrait alors adhérer au principe tout en réduisant proportionnellement dans les provinces sans plafond. Quand le groupe a creusé la question, il a observé que l'exclusion totale, en comparaison avec l'inclusion totale selon la norme de cinq provinces, avantagerait la Saskatchewan de 1,1 milliard de dollars — tout comme Terre-Neuve — et rapporterait 2 milliards de dollars de plus à la Colombie-Britannique.

Tous les autres étaient très durement touchés. La part de l'Île-du-Prince-Édouard reculait de 18 millions de dollars, celle de la Nouvelle-Écosse, de 97 millions, celle du Nouveau-Brunswick, de 51 millions, celle du Québec, de 244 millions et celle du Manitoba, de 34 millions.

Le groupe O'Brien a recommandé que la moitié des revenus tirés des ressources naturelles soit incluse, et le gouvernement a accepté la recommandation, en ajoutant un plafond. J'aimerais tout simplement vous demander de nous préciser officiellement à combien vous aurez droit à partir de cette année, en fonction d'une inclusion de la moitié des revenus sans plafond. Ai-je raison d'affirmer que cela représenterait plus de 600 millions de dollars?

M. Van Mulligen : Cela me semble assez proche de la réalité.

Le sénateur Murray : Ce que j'ai comme donnée, c'est 640 millions de dollars.

M. Van Mulligen : Oui.

Le sénateur Murray : Bien que j'apprécie à sa juste valeur votre insistance pour que le gouvernement respecte son engagement d'exclure ces revenus, ce qui fait diminuer votre part ou vous touche le plus durement, ce n'est pas tant l'inclusion de la moitié de ces revenus que le plafond imposé, n'est-ce pas?

M. Van Mulligen : C'est effectivement le plafond.

Le sénateur Murray : On s'était engagé explicitement à ce qu'il n'y ait pas de plafond. J'ignore si l'engagement a été pris en Saskatchewan comme tel, mais une déclaration à cet effet a certainement été faite dans les provinces Atlantiques.

M. Van Mulligen : C'est là où le bât blesse. Il n'y avait aucune condition quand le chef de l'opposition d'alors, c'est- à-dire l'actuel premier ministre, a fait cette promesse en matière de péréquation. Je sais que votre comité également a éprouvé des difficultés au fil des ans à décider de ce que représente cet engagement. Par contre, je sais également que, dans votre rapport, quand il est question des territoires, vous saisissez clairement le principe qui revient à permettre aux juridictions de conserver les revenus tirés des ressources naturelles pour pouvoir investir dans leur économie, en élargir les horizons et la renforcer, et nous estimons que le cas de la Saskatchewan n'est pas très différent. Nous sommes aux prises avec les mêmes problèmes.

Le sénateur Murray : Notre problème était de savoir ce qui était si différent. L'argument avancé par M. Boessenkool, entre autres, est que les revenus tirés des ressources naturelles peuvent s'assimiler à la vente d'un bien immobilisé, qu'ils ne sont pas récurrents. Pourtant, on pourrait également l'affirmer au sujet d'autres revenus. Quoi qu'il en soit, ces revenus sont versés au Trésor public, ils sont intégrés à la capacité fiscale de la province et les provinces les affectent à leurs priorités provinciales. C'est là l'autre argument, et c'est celui que nous avons accepté.

M. Van Mulligen : Je répète que je sais que cette question vous a donné du fil à retordre. Nous allons continuer de croire qu'il existe une différence réelle entre les redevances, les recettes et l'impôt sur le revenu qui reflètent l'économie.

J'ajouterai peut-être que, dans ce cas particulier, il y a un peu de double emploi, comme on dit, c'est-à-dire que les entreprises qui font de l'extraction des ressources en Saskatchewan — les sociétés pétrolières, les producteurs de potasse, ceux d'uranium — paient effectivement de l'impôt sur leur revenu d'entreprise et que les personnes à leur emploi paient aussi des impôts sur le revenu des particuliers, ce dont on tient compte pour établir la capacité fiscale. De plus, on souhaite également inclure les redevances, ce qui consiste à transformer un actif que nous possédons sous terre en actif liquide, à dire qu'il faut en tenir compte. À notre avis, c'est aller trop loin.

À nouveau, on revient à ce principe, ce qui est pour nous une source de frustration. Le comité sénatorial le reconnaît quand il s'applique aux territoires. Le principe a toujours été reconnu puisque, au début de la péréquation, l'Alberta a continué d'avoir droit à des paiements de péréquation, même si à ce stade, elle disposait déjà de recettes relativement élevées tirées de ses ressources naturelles. On reconnaît le principe également, je crois, en ce qui concerne les deux provinces atlantiques dans l'Accord atlantique.

Par conséquent, quand nous voyons toute cette reconnaissance mais qu'on nous impose des règles et des principes qui ne nous accordent pas un traitement équitable, comme les plafonds et tout le reste, nous sommes irrités.

Le sénateur Murray : La Saskatchewan était perdante il y a quelques années sur le plan de la péréquation pour diverses raisons, notamment le fait que vous...

M. Van Mulligen : C'était un problème de fiscalité représentative.

Le sénateur Murray : Dans une certaine mesure, M. Goodale a réglé le problème dans son budget. Bien qu'il ait tourné le dos à la péréquation axée sur la formule en faveur du présumé nouveau cadre, y compris pour l'année précédente, 2004-2005, voilà que la Saskatchewan, qui n'avait droit à rien, touche 652 millions de dollars. C'était là une solution qui a permis d'éviter les foudres de M. Calvert. Vous vous rappelez que M. Martin avait pris un engagement et qu'ils s'étaient rencontrés.

M. Van Mulligen : Toutes les provinces recevaient ce qu'on pourrait qualifier de montant forfaitaire d'Ottawa, dans le cadre de ce programme. Nous étions certes reconnaissants à Ottawa de nous faire ce versement forfaitaire. Cela a également signifié l'extinction de toute réclamation qu'aurait pu faire la Saskatchewan à l'égard des autres compensations recherchées pour la récupération de montants excessifs.

Le sénateur Murray : Tom Courchesne.

M. Van Mulligen : Pour chaque dollar tiré des recettes pétrolières, nos paiements de péréquation étaient réduits de plus d'un dollar, situation dont même le gouvernement fédéral a reconnu l'injustice.

Le sénateur Murray : On en a débattu au Sénat, et le comité avait interrogé M. Goodale à ce sujet.

J'ai une autre brève question.

Le président : Il se fait tard.

Le sénateur Stratton : Monsieur le président, je vous en prie, combien de temps nous reste-t-il avec le ministre?

Le président : Le ministre doit nous quitter à 10 h 30.

Le sénateur Murray : Ma question peut attendre.

Le président : Désolé de devoir vous couper la parole.

Le sénateur Mitchell : Monsieur le ministre, mes questions vont être très précises. Le gouvernement fédéral a fait passer une annonce publicitaire à la télévision, en Saskatchewan, soutenant qu'il avait accordé 878 millions de dollars de fonds nouveaux à la Saskatchewan et que, j'ignore de quelle façon au juste, vous aviez eu droit à une augmentation du financement par habitant. À mon avis, il n'en est rien. J'aimerais bien que vous réfutiez ces affirmations.

M. Van Mulligen : Si vous vous arrêtez à ce que seraient les transferts fédéraux à la Saskatchewan sur une période de deux ans, pas seulement cette année-ci, mais la suivante également, vous obtenez un tableau bien différent. Vous constaterez que la Saskatchewan serait celle qui recevrait le moins ou presque le moins peut-être en termes de transferts par habitant. Le gouvernement fédéral fonde son calcul, à nouveau, sur un versement forfaitaire de quelque 200 millions de dollars en vertu de la péréquation qui l'an prochain sera nulle. Le calcul inclut aussi une hypothèse de sa part concernant un projet qui pourrait se faire comme ne pas se faire en Saskatchewan et il inclut par ailleurs la part des transferts de la Saskatchewan qui a été reçue par tous les Canadiens, mais ce n'est pas là un calcul qui, si je puis l'exprimer ainsi, est très bien accueilli par la population de ma province.

Le sénateur Mitchell : La deuxième année, y a-t-il réduction nette des montants reçus en trop la première année et y aura-t-il — il y a une réduction nette absolue...

M. Van Mulligen : On calcule que les paiements dépassent 800 millions de dollars. Ce montant baisserait à 400 millions de dollars approximativement.

Le sénateur Mitchell : Donc, année après année, la Saskatchewan verra ses revenus amputés arbitrairement de 400 millions de dollars simplement du fait que le budget est mis en oeuvre?

M. Van Mulligen : Pas dans notre budget comme tel. À nouveau, ce ne sont pas des fonds qui sont forcément destinés à la Saskatchewan. Ils incluent aussi un éventuel investissement d'Ottawa dans une usine de production d'éthanol en Saskatchewan qui compte alors comme un transfert à la province.

Le sénateur Mitchell : On compte comme transfert à la province des investissements qui ne passent pas par votre gouvernement? On mélange les torchons et les serviettes pour essayer de brosser un tableau plus rose, n'est-ce pas?

M. Van Mulligen : On pourrait le voir ainsi, mais il m'est impossible de commenter.

Le sénateur Mitchell : Incroyable! Je vous remercie.

Le président : Je vous remercie de l'avoir souligné, sénateur Mitchell.

Le sénateur Nancy Ruth : Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir pris la peine de venir nous rencontrer. Le sénateur Murray a fait allusion aux propos tenus par M. Harper en 2004 au sujet de l'inclusion des ressources, mais les déclarations de M. Dion au cours des semaines et des mois qui ont précédé le budget selon lesquelles tous les revenus tirés des ressources devraient être inclus m'intéressent également. Vous avez mentionné dans plusieurs articles l'accord rêvé pour la Saskatchewan. Si deux chefs nationaux y sont tout à fait opposés, qu'espérez-vous obtenir et en quoi cela modifierait-il la donne?

M. Van Mulligen : Je suis venu ici aujourd'hui pour faire ce que je fais depuis quelque temps déjà, soit faire en sorte que les Canadiens comprennent les principes en jeu, des principes qui n'ont même pas fait l'unanimité au sein du comité sénatorial. Il s'agit de la question de l'inclusion des revenus tirés des ressources naturelles et de la façon d'en tenir compte dans le programme de péréquation.

Le comité est d'avis qu'ils devraient peut-être tous être inclus, mais que, dans le cas des territoires, il faudrait les exclure. Les territoires ont besoin de se développer, ce que nous reconnaissons tous, et selon moi, c'est vrai également pour la Saskatchewan. C'est une des raisons pour lesquelles je suis venu ici.

Je tiens aussi à souligner que c'est fort bien d'avoir des principes, mais que lorsqu'on voit d'autres raisons que les principes invoqués dans des ententes comme les accords de l'Atlantique ou qu'ils ne sont pas respectés initialement quand le programme est élaboré — nous avons besoin d'un programme de péréquation et nous devrions être en train d'évaluer la capacité fiscale. Toutefois, la capacité fiscale ne devrait certainement pas inclure les redevances que touchent les provinces sur leurs ressources naturelles. C'est une autre raison de ma présence ici.

Je ne suis pas sûr de l'accueil que fera le gouvernement fédéral ou le parti au pouvoir à ces propos, mais ce n'est pas à moi d'en décider. Tout ce que je peux faire, c'est de continuer à défendre notre cause auprès des Canadiens. Je fais appel à leur sens inné de la justice.

Le sénateur Stratton : Monsieur le ministre, vous avez fort bien défendu la cause de votre province. Vous devriez peut-être envisager de vous installer au Manitoba et de nous aider là-bas.

M. Van Mulligen : Je suis parti du Manitoba pour m'installer en Saskatchewan. J'ai encore de la famille là-bas, de sorte qu'il m'est difficile d'avoir un prisme strictement régional puisque j'ai de la famille dans cinq ou six provinces canadiennes.

Le sénateur Stratton : Vous voyez l'Alberta comme nous la voyons du Manitoba. Nous estimons aussi que la Saskatchewan est plutôt bien nantie par rapport au Manitoba, particulièrement maintenant, avec toutes ses réserves de pétrole, de potasse et d'uranium. Disons que nous vous les envions.

Ce qui me préoccupe, c'est le fait que, lorsque vous tentez de trouver une formule efficace, le principe fondamental adopté dans la plupart des études à cet égard est que nul ne devrait avoir une capacité fiscale supérieure à celle de l'Ontario, en somme que celle-ci sert de point de référence.

Quand on mesure la capacité fiscale, on parle de ressources non renouvelables. Nous pouvons comprendre ce raisonnement, bien que, pour avoir la capacité, la raison d'être du plafond est bien évidente.

Quand on mesure la capacité fiscale et que le gouvernement fédéral l'examine, la Saskatchewan soutient à bon droit qu'elle compte plus de kilomètres de route par habitant que toute autre province. Comme j'ai passé une bonne partie de ma jeunesse à travailler en Saskatchewan, je le sais. Quand j'étais jeune travailleur, j'ai roulé ma bosse dans la moitié de la Saskatchewan en faisant du stop.

Cela étant dit, on a droit à certains avantages en agriculture par exemple. Des subventions plutôt imposantes sont versées pour l'agriculture. La Saskatchewan n'en profite-t-elle pas dans une large mesure? Ne profite-t-elle pas d'autres programmes qui doivent sûrement faire partie de cet équilibre, qui est toujours précaire? J'aimerais bien entendre vos explications à cet égard.

M. Van Mulligen : Je vous rappelle que je dois partir à 10 h 30.

Le sénateur Stratton : J'en suis conscient, mais j'aimerais tout de même avoir vos explications au sujet de l'agriculture.

M. Van Mulligen : Je vais répondre à ce que vous avez dit point par point, car il y en a beaucoup.

Tout d'abord, en ce qui concerne les subventions à l'agriculture, elles visent à reconnaître le fait qu'il se livre, sur la scène internationale, une guerre commerciale dans le cadre de laquelle les États-Unis et l'Europe soutiennent leurs producteurs agricoles. Le gouvernement fédéral est conscient qu'il doit prendre des mesures au Canada, mais ces mesures sont tempérées par l'attente que les provinces assumeront 40 p. 100 du coût. Je ne suis pas trop sûr de la raison pour laquelle des mesures qui reflètent une politique nationale devraient exiger un pareil taux de participation.

De l'argent est effectivement versé à notre province, mais 40 p. 100 de ces paiements viennent de nos propres revenus. C'est là un énorme problème pour nous, un problème que nous continuons de souligner aux conférences des ministres de l'Agriculture.

Nous avons effectivement des revenus tirés des ressources, mais nous avons aussi des dépenses dont on ne tient pas compte. Nous engageons des dépenses considérables pour obtenir ces revenus de nos ressources. Ainsi, pour exploiter des mines dans le Nord, il faut construire des routes pour s'y rendre. La moitié environ, si ce n'est plus, de notre pétrole en Saskatchewan est du pétrole lourd, de sorte qu'on ne peut l'extraire du sol au moyen d'un chevalet de pompage et l'envoyer directement dans un oléoduc. Il faut le transporter par camion jusqu'à des centres régionaux de traitement, ce qui taxe énormément les routes de la Saskatchewan. Or, on ne tient pas compte de ces programmes.

On s'attend parfois que nous allons simplement vivre du revenu de nos ressources, sans reconnaître les frais que nous engageons à cet égard. Puis, nous regardons du côté de notre voisine, le Manitoba, qui touche de la péréquation et nous nous demandons comment nous pouvons faire mieux. Je ne vois pas vraiment ce qu'il y a à nous envier.

Je crois aussi qu'on devrait accorder un traitement plus équitable aux revenus tirés des ressources naturelles, c'est-à- dire aux revenus tirés des ressources hydrauliques et de ressources non renouvelables. En ce qui concerne les revenus tirés des ressources non renouvelables, nous aimerions un régime fiscal représentatif — soit qu'on évalue ce que devraient être nos revenus, à l'instar de ce qui s'est fait dans certaines provinces dans le passé, comme l'a fait remarquer M. Courchesne. À l'égard des ressources hydrauliques, nous aimerions qu'on utilise le montant réel. Si vous souhaitez faire une estimation faussée et alimenter vos citoyens et vos entreprises en électricité très bon marché et vous en servir pour devancer la concurrence, nous n'en tiendrons pas compte. Nous ne tiendrons compte que de vos revenus.

Le fait de voir des entreprises reluquer le Manitoba en raison de ses très bas tarifs d'électricité nous pose aussi un problème et nous aimerions qu'on en tienne compte dans le programme de péréquation. Par conséquent, c'est aussi une énorme source de préoccupation pour nous.

Je ferai remarquer qu'en Saskatchewan, nous cherchons constamment à garantir à notre population le plus faible coût des services publics — téléphone, hydro, gaz naturel et assurance-automobile — et nous constatons que le très faible tarif d'électricité de cette province est dans les faits subventionné par le programme canadien de péréquation.

Le sénateur Stratton : Il se trouve que je suis d'accord avec ce que vous dites à cet égard. Je vais peut-être me faire lyncher, mais il est vrai que les Manitobains paient un tarif d'électricité beaucoup trop bas. C'est notre pétrole à nous, et nous devrions le mesurer et le vendre à un tarif bien supérieur.

Je persiste à dire qu'en dépit de vos coûts, vous avez des réserves d'uranium qui ont connu une croissance exponentielle par rapport à ce qu'elles étaient il y a quelques années. Il en va de même pour votre pétrole et vos engrais, surtout la potasse.

Le fait également que la richesse créée par ces ressources dans votre province a connu une croissance phénoménale au cours des trois à cinq dernières années contribue aussi à votre problème, et vous en subissez les conséquences.

Je suppose que la question fondamentale à se poser est de savoir si vous ne croyez pas que nous devrions avoir pour base ou pour principe qu'aucune province ne devrait avoir plus de ressources que l'argent qui entre en Ontario. Je crois que tous ont adopté ce principe. On peut conclure des ententes particulières, comme ce fut le cas avec la Nouvelle- Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador.

Votre argument de base pour faire valoir votre cas particulier serait-il d'essayer d'obtenir une entente particulière comme celle de ces deux provinces?

M. Van Mulligen : C'est justement ce que nous faisons à ce stade-ci. En ce qui concerne le plafond, j'ignore s'il s'agit d'une question de principe ou d'une question de réalité politique, mais quoi qu'il en soit, la Saskatchewan est durement touchée.

Le président : Voilà qui marque la fin de la réunion. Je tiens à remercier sincèrement les témoins — le ministre Van Mulligen, Mme Brady et M. Jones — d'être venus et d'avoir soulevé plusieurs points intéressants. Votre déclaration et la documentation que vous nous laissez nous seront très utiles dans nos délibérations.

M. Van Mulligen : C'est moi qui vous suis très reconnaissant, sénateur. Je vous remercie sincèrement de nous avoir donné l'occasion de venir défendre notre cause et de contribuer à vos délibérations.

Le président : À l'intention de nos téléspectateurs, je signale qu'ils peuvent consulter le rapport provisoire sur l'équilibre fiscal horizontal ou la péréquation sur le site web du comité des finances nationales, en cliquant sur « Rapports », et le comité espère produire en cours de route un autre rapport concernant les transferts en général.

Le comité poursuit ses travaux à huis clos.


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