Délibérations du Comité permanent du
Règlement, de la procédure et des droits du Parlement
Fascicule 2 - Témoignages du 24 octobre 2006
OTTAWA, le mardi 24 octobre 2006
Le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd'hui à 9 h 33 pour examiner une modification à l'alinéa 86(1)h) du Règlement du Sénat (Nom du Comité permanent des affaires étrangères); et, conformément au paragraphe 48(1), la possibilité que, lorsque le Sénat siège, les délibérations de la Chambre haute à l'instar de celle de la Chambre basse, soient télédiffusées ou autrement enregistrées sur bande vidéo afin d'être diffusées en direct ou rediffusées sur CPAC ou une autre chaîne de télévision à des moments opportuns pour les Canadiens.
Le sénateur Consiglio Di Nino (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : La première question dont nous allons traiter ce matin est la modification à l'alinéa 86(1)h) du Règlement, le nom du Comité permanent des affaires étrangères.
Notre premier et unique témoin est le président de ce comité, le sénateur Hugh Segal. Sénateur, vous avez la parole.
L'honorable Hugh Segal : Mon intention, ce matin, est de plaider en faveur d'un modeste changement du nom de notre comité, pour incorporer les mots « et du commerce international » afin que le comité devienne le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Ceci reflète le consensus au sein du comité lui-même.
Mes collègues se rappellent certainement la motion qu'a proposé l'ancien président et l'actuel vice-président, le sénateur Stollery, appuyé par le sénateur Austin à la Chambre. À titre d'information pour le comité, la motion a été adoptée à la Chambre à l'unanimité. Le sénateur Prud'homme, un distingué sénateur indépendant, a aussi parlé en faveur de la proposition.
Le but visé est simple. Le comité a, de toujours, examiné les questions liées au commerce international. Le fait que ce ne soit pas indiqué dans le titre du comité donne l'impression que toutes les questions relatives au commerce devraient relever du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, ou du Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui ont été portés généralement, à traiter des questions liées au commerce intérieur.
Je comprends très bien que, si une motion de voies et moyens était présentée par l'autre endroit au Sénat pour, disons, l'accord sur le bois d'œuvre, l'un ou l'autre de ces comités en serait saisi en temps normal, et elle ne serait pas nécessairement présentée au Comité des affaires étrangères et du commerce international. Le programme du Comité des affaires étrangères et du commerce international serait fonction de renvois du Sénat d'une façon continue, comme cela s'est fait dans le passé.
Je ne voudrais pas donner l'impression qu'un changement de nom élargirait automatiquement le mandat du comité; c'est plutôt qu'il reflèterait ses fonctions passées, serait plus précis et, en tant que tel, serait constructif pour ceux qui souhaitent comprendre le fonctionnement du Sénat et la distinction entre les divers comités qui servent le Sénat.
[Français]
Je n'ai rien de plus à ajouter. Je suis prêt à recevoir les questions de mes collègues, si cela peut vous aider dans vos délibérations.
[Traduction]
Le président : Merci, sénateur. Je suis prêt à recevoir les questions de nos collègues.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Je n'ai pas de réserve à ce qu'on change le nom pour « des affaires étrangères et du commerce international ». Toutefois, est-ce que le comité pourrait, étant donné que vous avez les affaires étrangères d'une part et le commerce international d'autre part, s'adresser à la Direction des comités pour demander les services d'une deuxième personne? Une qui s'occuperait du dossier des affaires étrangères et l'autre du commerce international? Certains comités l'ont fait dans le passé.
Le sénateur Segal : En fait, ce que vous voulez savoir, c'est si cela va nous mener à demander un expert supplémentaire pour nous aider. En général — et je laisse mes collègues qui ont une plus grande expérience dans ce domaine en juger — on demande l'assistance de la Bibliothèque du Parlement. Si on a une question concernant le commerce international, la Bibliothèque va nous envoyer quelqu'un qui a cette expertise. Si on continue de travailler dans le domaine des affaires étrangères, on va continuer à travailler avec les experts que la Bibliothèque nous envoie de temps en temps. On ne va pas demander de personnel supplémentaire. On fonctionnera avec les services que nous offre la Bibliothèque, qui sont suffisants et très compétents compte tenu de nos besoins.
Le sénateur Robichaud : Pour la durée de votre mandat de président de ce comité.
Le sénateur Segal : Voilà, et ce n'est pas entre mes mains.
Le sénateur Robichaud : Si j'ai posé cette question, c'est qu'un comité qui avait d'une part la défense, et d'autre part la sécurité nationale, s'est servi de ce moyen pour avoir des experts dans les deux domaines qui les accompagnent régulièrement.
Le sénateur Joyal : Je m'excuse, je n'ai pas assisté à la première partie de votre présentation. Je constate que ce que vous proposez est d'ajouter « et du commerce international » mais pourquoi ne pas l'appeler le « Comité sénatorial permanent des affaires étrangères, du commerce et de l'aide internationale »? Lorsque je vois le détail dans les sou- alinéas i) à iii), on dit : les traités et accords internationaux, le commerce extérieur, l'aide à l'étranger.
Si vous devez devenir responsable aussi des programmes d'aide internationaux dont la majorité proviennent, je suppose, de l'ACDI, et que vous voulez que le comité reflète davantage ce dont il s'occupe, pourquoi le nom ne reflète- t-il pas aussi l'aide internationale?
Le sénateur Segal : Lors de notre discussion en comité sur cette question, nous avions décidé que la description actuelle, soit « affaires internationales », incluait à la fois la diplomatie et l'aide internationale dans tous nos débats jusqu'à présent. Même si nos collègues au comité n'ont pas discuté votre proposition, sénateur, je suis certain que si le comité propose qu'on ajoute l'aide internationale, nous n'aurons aucun problème avec nos collègues au comité des affaires extérieures.
Je n'ai rien contre cette idée. Les propos que j'ai tenus étaient à l'effet d'ajouter le commerce international. Toutefois, si le Comité du Règlement propose un élément additionnel, je n'y verrai aucun inconvénient.
[Traduction]
Le sénateur Joyal : Je ne me trompe pas en disant que vous vous préoccupez de ce que le programme de soutien que le gouvernement du Canada mettrait en œuvre et administrerait dans ses ententes ou initiatives en vaille la peine.
Le sénateur Segal : Absolument. Les procès-verbaux du Comité des affaires étrangères pendant la brève période où j'en ai assumé la présidence feront foi du fait que nous avons déjà accueilli la ministre du Développement international. Nous lui avons posé des questions pointues sur l'activité de développement international, particulièrement en Afrique, dans le cadre de notre examen général de l'Afrique. Nous estimions que cela faisait partie du titre général des affaires étrangères extérieures. Cependant, si mes collègues de ce comité estiment que plus de précision sur ce plan pourrait être encore plus utile, je suis sûr que mes collègues du comité des Affaires étrangères n'y verraient aucun inconvénient — d'ailleurs, certains d'entre eux sont ici ce matin.
Le président : À titre d'information, j'aimerais rappeler à tous les sénateurs que l'alinéa 86(1)h) du Règlement du Sénat stipule que le comité des affaires étrangères, dans le cadre de ses responsabilités générales, examine les traités et accords internationaux; le commerce extérieur; l'aide à l'étranger; et les affaires territoriales et côtières. C'est déjà stipulé dans le Règlement du Sénat. Bien entendu, si ce comité souhaite ajouter ou retirer un élément à cette modification au règlement comme le suggère le sénateur Segal, je suis tout disposé à en discuter. Y a-t-il d'autres commentaires?
Le sénateur Andreychuk : Je préfèrerais que nous ne l'ajoutions pas, parce que c'est dans notre mandat. Nous essayons de refléter les activités relatives aux politiques du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Il était entendu que le Comité sénatorial des affaires étrangères reprendrait le volet du commerce quand les deux ministères ont été fusionnés. Ainsi aurions-nous un aperçu clair du mandat du Comité sénatorial des affaires étrangères, et l'espoir que d'autres comités sénatoriaux n'empièteraient pas sur lui.
Lorsqu'il a proposé un renvoi pour l'examen des conséquences de l'évacuation du Liban, le sénateur Segal m'a téléphoné pour me dire que certains enjeux pourraient avoir des implications liées aux droits de la personne et a demandé si j'y voyais un problème. Je savais qu'il allait faire quelque chose qui relève traditionnellement du mandat du ministère des Affaires étrangères, lequel comporte une composante liée aux droits de la personne. Cependant, il a pris garde de ne pas empiéter sur ma sphère d'influence en tant que président du Comité des droits de la personne. Peut-être d'autres comités n'ont-ils pas eu ce genre d'approche.
Je serais en faveur de préserver le nom, parce que nous traitons de questions culturelles et commerciales et relatives à l'étranger. Si nous devons ajouter l'aide, il faudrait énumérer toutes les autres catégories. Nous nous retrouverions avec un titre de dix lignes. Bien que l'aide en soit certainement une partie importante, il est généralement entendu que le ministre des Affaires étrangères est le ministère principal, même si l'ACDI fonctionne de façon assez indépendante.
Le sénateur Joyal : Je ne cherchais pas à dresser la liste de tout ce qui relève des Affaires étrangères et du Commerce international. Comme vous l'avez dit, il y a une composante liée aux droits de la personne, une composante de secours d'urgence et bien d'autres encore. Ce que je cherche, c'est à refléter la division des responsabilités au sein de l'administration publique — puisque le CIDE fixe son propre mandat et à son propre ministre. Pour refléter le mandat et l'approche élargie du comité à l'égard d'au moins deux ministères — je me préoccupe plus de la réalité ministérielle de ce qui existe au sein de l'administration publique que de la liste des responsabilités. C'est pourquoi j'ai soulevé cette préoccupation. Il se trouve que vous, sénateur Segal, supervisez non seulement les affaires étrangères et le commerce international, mais aussi l'ACDI, qui fait partie du portefeuille de notre ministre. En fait, mon intention était de ne pas essayer de tout nommer. Je suis d'accord avec le sénateur Andreychuk que, si nous devions refaire la liste de toutes les composantes, il faudrait tout un paragraphe pour écrire le nom du comité. Je me préoccupe plus de la division de l'administration publique des deux portefeuilles distincts.
Le sénateur Segal : À titre d'éclaircissement aux fins du compte rendu, le seul mandat que m'ait donné le Comité des affaires étrangères, c'est de présenter la proposition qu'examine actuellement le comité. Je n'ai pas d'autre mandat que celui-là
Le président : Nous vous remercions pour cette précision.
Le sénateur Cordy : Je ne vois pas le problème avec le changement de nom, parce qu'il est déjà dans le mandat du comité de traiter du commerce international. Cependant, au moins un comité sénatorial a changé de nom, et il a immédiatement créé un sous-comité à ce comité, avec les coûts que cela implique — et c'est ce qui m'inquiète. Est-ce que vous traiteriez du commerce international au niveau du comité, ou est-ce que vous créeriez un sous-comité?
Le sénateur Segal : Je vous remercie pour cette question, qui est opportune et extrêmement pertinente. Je n'ai noté aucun intérêt chez mes collègues du Comité des affaires étrangères pour la création de sous-comités. En fait, avec les diverses fardeaux qu'a portés notre comité, on aurait pu soutenir qu'il y aurait eu moyen d'utiliser plus efficacement notre temps en établissant des sous-comités. Cependant, je n'ai remarqué absolument aucun intérêt pour cela. Nous avons une solide tradition au comité de travailler en tant que comité plénier, et je n'appuierai aucunement, à part dans des circonstances absolument extraordinaires, la création d'un sous-comité. Le travail en comité plénier reflète l'esprit des délibérations du Sénat et les droits de tous les sénateurs qui sont membres du comité.
Le président : S'il n'y a pas d'autres commentaires, je vais demander que quelqu'un propose l'approbation ou la modification au règlement.
Le sénateur Andreychuk : Je propose de l'adopter telle que proposé.
Le président : Qui est d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : Êtes-vous d'accord que je fasse rapport au Sénat du fait que le comité recommande que l'alinéa 86(1)h) soit modifié de la manière proposée dans la motion qui est devant le comité?
Des voix : D'accord.
Le président : La motion est adoptée.
Le prochain point à l'ordre du jour prendra probablement un peu plus de temps à régler — la motion du sénateur Segal relativement à la télédiffusion des délibérations de la chambre haute. Encore une fois, nous avons le plaisir d'entendre comme premier témoin, mais pas le seul cette fois, l'honorable Hugh Segal, l'un de nos chers collègues.
Le sénateur Segal : Je serai bref, parce que je sais que cette question exigera un débat nettement plus approfondi que ce n'a été le cas du premier point à l'ordre du jour.
Je vais étoffer mes observations faites le 5 avril quand la motion a été proposée, et transmise au comité par la suite, en traitant de l'aspect de la légitimité, si je le peux, et des raisons pour lesquelles je pense que des aspects de délibérations de la chambre haute aux stades que le comité voudra choisir de recommander, devraient être télédiffusés, peut-être en commençant avec la période de questions, puis le Feuilleton et au Feuilleton des Avis, afin qu'ils puissent être organisés de manière à être télévisés de façon efficace. La légitimité de notre mode général de gouvernance est établie par le biais de deux ou trois importants piliers.
L'un de ces piliers est que la population a vraiment la possibilité de voir ce que fait un organe législatif, et comment il le fait, l'intensité, l'intégrité et le dur labeur évidents quand les membres de cet organe discutent des enjeux, et la franchise et l'ouverture du débat qui transparaissent lors de l'examen des questions de l'heure.
Même s'il est certain que CPAC affirmera que le nombre de téléspectateurs des comités du Sénat et de la Chambre des communes n'est pas très élevé, la question n'est pas tant le nombre de téléspectateurs; c'est plutôt que les téléspectateurs ont la possibilité d'y aller s'ils le souhaitent, dans le but d'apprendre ce qui s'est passé, ce qui a été débattu et ce qui a été dit.
Je pense que quelles que soient les transitions par lesquelles le Sénat doit passer, ou non, selon le cas, dans les cinq ou dix prochaines années — que ce soit un amendement constitutionnel à un moment donné, relativement à sa composition, que ce soient des lois adoptées par l'autre Chambre ou celle-ci relativement à la durée du mandat, que ce soit un référendum de consultation duquel un premier ministre pourrait choisir des candidats potentiels — où qu'aille ce débat, cet organe législatif a le devoir constitutionnel de continuer de servir jusqu'au moment où la Constitution sera modifiée, ou encore où les pouvoirs sont modifiés en vertu d'une autre décision relativement à ses buts et objectifs.
Je pense que le comité pourrait vouloir réfléchir au meilleur moyen d'y parvenir. On pourra me qualifier de naïf, et du nouveau venu qui ne cherche pas assez à protéger l'institution, mais il est certain que la qualité du débat que j'ai vu à la Chambre, la qualité des échanges pendant la période des questions, tant à l'époque où le gouvernement actuel était à l'opposition qu'à celle où l'actuelle opposition était au pouvoir, était de nature constructive et non partisane, au grand mérite de tout le monde. De véritables informations étaient échangées, les questions visant l'obtention de véritables informations étaient posées. Le débat ne manquait pas d'acuité intellectuelle, mais ce n'était pas toujours dans un esprit partisan ou vindicatif — ce qui, à ce que je comprends, est plus difficile à éviter dans l'autre chambre, en raison des pressions partisanes qui y sont exercées.
À mon avis, la légitimité de cette institution, et donc sa capacité de servir, et son influence dans le système seraient au moins protégées, sinon rehaussées, si la population pouvait syntoniser son poste et observer un échange ou un débat particulier. De plus, je ne pense pas que l'institution n'ait rien à cacher. Quels que soient ses points forts et ses points faibles, ils sont d'intérêt public, et ce, depuis de nombreuses décennies. Bien au contraire, le niveau d'expertise qu'apportent les sénateurs au débat, inspiré de la vie qu'ils mènent en dehors de la politique, ou qu'ils menaient avant la politique, est si convainquant que le fait de ne pas y laisser le public avoir accès, s'il choisissait d'observer le débat, me paraît une façon de nous tirer dans le pied de façon très peu constructive et sans motif.
J'ai mesuré la perception de la Chambre des lords, un organe qui a, au plan de sa légitimité et de ses modes de nomination, au moins tout autant de défis que nous, sinon plus. Je me rappelle que le sénateur Kirby, dans l'allocution qu'il a prononcée à son dernier jour au Sénat, a été assez aimable pour dire que ses enfants, dans la tribune, auraient bien aimé que ce soit une institution héréditaire. Nous n'avons pas ce fardeau. La Chambre des lords, je pense, a nettement rehaussé son image parmi les électeurs du Royaume-Uni rien qu'en rendant ses débats accessibles et ce, depuis bien longtemps.
Je comprends que ce comité doive faire un examen approfondi des coûts que pourraient entraîner l'apport des modifications techniques nécessaires à la Chambre. Je comprends aussi que les télédiffuseurs, pour qui la télédiffusion des débats parlementaires ne serait peut-être pas une importante source de revenus, pourraient craindre qu'on leur demande de faire plus qu'ils n'en font déjà. De mon point de vue, chers collègues, si ce comité voulait, dans sa sagesse, recommander qu'un signal soit rendu accessible pour quiconque souhaite le capter, en comprenant qu'il pourrait bien n'y avoir personne qui fasse ce choix, de la façon la plus pratique et efficace par rapport aux coûts sur une période établie, en commençant peut-être avec des coups d'essais, les périodes de questions et d'autres activités du Sénat, je serais ravi que de ce point départ et de l'initiative qu'il révélerait.
Je ne sous-estime pas un instant les enjeux liés aux coûts. Je sais que l'administration du Sénat et les greffiers au Bureau veulent assurer une gestion responsable et efficace des coûts, et je ne voudrais pas augmenter ce fardeau excessivement, mais je tiens à dire que l'accès à la qualité et au contenu des débats me semble être un droit légitime des électeurs et des contribuables. C'est pourquoi je fais cette proposition au comité.
Le président : Y a-t-il des questions, honorables sénateurs? Personne ne veut confronter le sénateur Segal?
Le sénateur Joyal : Vous avez parlé, sénateur Segal, de la télédiffusion des débats de la Chambre des lords. Il me semble qu'ils diffusent aussi les délibérations de leurs comités.
Le sénateur Segal : Oui.
Le sénateur Joyal : Quand ils diffusent les délibérations de la Chambre, est-ce que la version télédiffusée est éditée, ou intégrale? Autrement dit, quand cela passe sur les ondes, est-ce que c'est simultané, ou est-ce retardé, diffusé plus tard, seulement des extraits des délibérations de la Chambre peuvent être diffusées, selon ce qu'on pense pouvoir intéresser les téléspectateurs?
Le sénateur Segal : Je pense qu'ils ont expérimenté les deux méthodes. Je ne suis pas sûr d'où ils en sont maintenant, mais je crois savoir qu'ils ont essayé les deux.
Le sénateur Joyal : Je ne sais pas, puisque je n'étais pas en Grande-Bretagne à l'époque. Aussi, je n'ai jamais observé comment ils s'y prennent.
Le sénateur Segal : Sur le site web de la BBC, j'ai trouvé des extraits de délibérations de la Chambre des lords. Par exemple, le très important débat sur l'application de pouvoirs extraordinaires dans la lutte contre le terrorisme a été un débat très difficile à la Chambre des lords, quand les membres de la Chambre, je pense, ont défendu résolument les libertés civiles et la liberté d'association. Les réseaux du Royaume-Uni l'ont largement rediffusé, parce qu'ils y ont accès. Dans notre situation présente, nos réseaux n'ont pas ce type d'accès.
Le sénateur Joyal : Autrement dit, nous aimerions en savoir plus sur les progrès de leurs expériences, ce qu'ils ont essayé et ce qu'ils ont conclu, et cetera, pour que nous puissions être éclairés sur la manière d'aborder la question.
Je conviens qu'il y a des débats du Sénat que le public canadien devraient pouvoir observer, et je pense à d'autres débats, non pas parce que j'y ai personnellement participé, mais je pense au projet de loi sur la clarté, dont le Sénat a longuement débattu, et je pense que ça a été un débat approfondi. Je pense au débat sur l'extradition, qui a duré deux mois au Sénat, et dans lequel il y a eu des interventions des deux côtés, où le public du Canada pourrait constater que la façon d'aborder les enjeux est différente de celle de la Chambre des communes. Prenons le projet de loi fédéral sur la responsabilité dont sera saisi le Sénat à un moment donné, au sujet duquel des questions précises seront soulevés, et cetera, et je pense qu'il serait important que les Canadiens puissent observer ce débat.
Je ne dis pas que je suis contre, mais pour l'instant, j'aurais des questions. Il y a des moments, au Sénat, où un téléspectateur dirait « rien ne se passe là ». C'est pourquoi je pose la question à savoir si c'est diffusé dans une version éditée. Au début, les gens compareront ce qu'ils voient au Sénat à ce qu'ils voient à la Chambre des communes. Je ne doute pas que nous pouvons soutenir la comparaison.
Ce qui m'inquiète, c'est que certaines délibérations sont de moins grand intérêt, particulièrement quand elles sont d'ordre procédural. Les gens pensent que la procédure est une perte de temps, mais ce n'est pas le cas, et nous le savons bien. Il est important de cadrer une approche délibérative qui englobe l'expression de points de vue contradictoires sur les enjeux. C'est pourquoi j'essaie de comprendre comment cela se fait au Royaume-Uni, pour que nous puissions tirer une leçon de leur expérience avant d'aller de l'avant. Peut-être devrions-nous y aller étape par étape — autrement dit, commencer avec certaines procédures et décider, dans la liste, quels projets de loi sont d'intérêt général et lesquels présentent moins d'intérêt.
Le sénateur Segal : Il ne devrait pas être difficile au personnel du Sénat de produire un bref enregistrement de la diffusion d'une séance de la chambre des Lords pour que tous les sénateurs puissent avoir la possibilité d'y jeter un œil et de déterminer ce qu'ils jugent constructif, et ce qui ne l'est pas.
Le sénateur Joyal : Absolument. Je pense que ce serait une bonne façon de procéder.
Le président : En ce qui concerne les débats et discussions que nous avons, mais particulièrement celle-ci, toutes les questions qui sont soulevées et pour lesquelles nous n'avons pas toutes les réponses, nous chercherons à obtenir celles- ci autant que possible. L'enjeu est simple, et nous obtiendrons les détails pour pouvoir les communiquer à tout le monde.
Le sénateur Joyal : L'autre élément pourrait être le coût. Je regarde notre collègue, le sénateur Smith, quand nous parlons des peuples autochtones; quels sont les coûts envisagés, et je pense que c'est une partie de l'équation que nous devons préciser.
Et puis il y a l'autre question, l'organisation du travail pour nous y adapter, parce que je pense que cela fait partie du tout le processus.
Le président : Tout cela sera fourni; si ce n'est pas suffisant, nous retournerons chercher plus.
Le sénateur Segal : On me dit qu'actuellement, les débats de la Chambre des lords ont lieu de 16 heures à 18 heures; généralement, ils sont télédiffusés selon cet horaire. Ils sont diffusés dans une version éditée. Cependant, la Chambre a diffusé en direct ce qu'elle considère comme des débats d'importance lorsque le pays voulait les voir. Pour cela, c'est la Chambre des communes qui a du être traînée de force dans le monde télévisé. La Chambre des lords a fait preuve de leadership dans ce contexte.
Le président : La rapidité de cette réponse fait foi de l'efficacité de notre personnel.
Le sénateur Segal : C'est un fait.
Le sénateur Andreychuk : Qu'entendez-vous par « éditer » — et par qui?
Le sénateur Segal : Certains raisonnements dépourvus de logique qui n'ont pas rapport au débat sont supprimés pour qu'il y ait une continuité. Je ne pense pas qu'il s'agisse du sujet traité; il s'agit de diffuser quelque chose de cohérent. C'est pourquoi ce n'est pas fait en direct.
Le sénateur Smith : Permettez-moi de vous exposer un raisonnement, auquel j'aimerais connaître votre réaction. Peut-être qu'une façon de caractériser ce que certaines personnes pensent de cet endroit serait de nous dépêcher de comparer les travaux des comités du Sénat à ce que fait la Chambre des communes. Comme j'ai siégé dans les deux chambres, je pense que le travail de comité est beaucoup plus approfondi. Je pourrais vous en donner des exemples, mais je ne pense pas que ce soit contredit.
Certains d'entre nous siègent actuellement au comité sur la Loi antiterroriste. Hier, la Chambre des communes a déposé un rapport, et le qualifier de minimalisme serait généreux. La seule chose qu'ils ont fait, c'est de reporter pour cinq ans deux dispositions qui étaient liées à un mécanisme de temporisation; cependant, seize enjeux que nous avions cernés et qui nécessitent une espèce d'étude et de débat n'ont même pas été mentionnés. Par contraste, notre rapport illustrera certainement une diligence raisonnable et un examen approfondi.
Je reçois régulièrement une rétroaction de M. Tout le monde qui, en faisant du saute-bouton, est tombé par hasard sur des comités sénatoriaux au travail, et qui a eu une réaction positive.
Je sais qu'il y a des gens très peu préoccupés de tout ce qui est adopté; il y a eu des occasions où les délibérations auraient été un remède assuré contre l'insomnie. Aussi, la participation n'est pas toujours ce qu'elle devrait être et peut- être ceci poussera-t-il certains d'entre nous à élaborer une stratégie et à nous asseoir derrière quiconque parle, ce genre de chose.
Notre période de questions n'aura jamais l'intensité qu'elle a à la Chambre des communes, pour des raisons que je n'ai même pas besoin d'expliquer. Je vous invite à méditer là-dessus et à me faire part de vos réactions.
Le sénateur Segal : Je ne suis contre aucun de ces arguments, sénateur. De fait, je dirais que lorsque les comités font un travail exceptionnel avec, à la clé, disons, un document modifié dont il doit être débattu au Sénat, il est dommage que le public n'ait pas accès à ce débat très approfondi qui suit sur l'excellent travail qu'ont fait nos comités.
En ce qui concerne la participation et l'image que pourrait en donner la caméra, je soupçonne que cela soulèvera des questions relativement à l'attribution des sièges pendant les débats au Sénat. Dans le cas de la Chambre des lords et de la Chambre des communes britanniques, ils n'ont pas de bureaux ni de sièges. Ils ont des bancs, et les gens se déplacent selon les besoins. Ils n'ont pas un plan de salle aussi rigoureux que le nôtre.
Je ne veux pas dire par là que nous devrions adopter un changement aussi radical, à cause des coûts que cela comporte. Cependant, le fait qu'on veuille s'assurer d'avoir autant de sénateurs que possible quand a lieu la diffusion vient d'autres pressions que les whips subissent continuellement relativement à la participation. Je dirais qu'en soi, ce n'est pas une raison pour ne pas télédiffuser les travaux de l'institution.
De fait, si nous refusions de télédiffuser les travaux de l'institution à cause d'une piètre participation, cela irait dans le sens du débat sur sa légitimité, lequel j'aurais aimé que la télédiffusion nous aide à régler, parce que nous n'avons rien à cacher. Souvent, quand la participation est faible, c'est parce que les sénateurs sont en déplacement pour des engagements publics, ou qu'il y a des postes vacants à la Chambre, ou des exceptions accordées pour que les comités puissent se réunir au même moment que le Sénat, pour un motif particulier.
[Français]
Le sénateur Losier-Cool : Je suis d'accord avec plusieurs des commentaires qui ont été soulevés jusqu'à maintenant. Le sénateur Joyal parlait de la qualité des débats. Je me souviens avoir occupé le fauteuil, lorsqu'on parlait de la Loi sur la clarté ou encore du Nisga'a, et de m'être dit qu'il était dommage que les Canadiens et Canadiennes n'aient pu assister à ce débat. D'un autre côté, alors que j'occupais le fauteuil, il m'est arrivé d'assister à certains débats où je me disais qu'il était heureux que les Canadiens et Canadiennes n'aient vu ce qui se déroulait. Il y a toujours deux côtés.
Allons au-delà du côté de l'organisation du travail et des coûts et demandons-nous pourquoi veut-on que les débats du Sénat soient télévisés? C'est certainement pour rendre aux Canadiens et Canadiennes les services de cette institution. Je ne crois pas qu'on peut bouder cette institution plus longtemps. À travers le pays, les débats sont télévisés.
Quels sont les deux rôles du Sénat? Nous devons nous concentrer sur cette question. Le Sénat a un rôle législatif et un rôle représentatif. On a parlé un peu du rôle législatif, qu'il s'agisse de la période des questions ou des débats.
J'aurais aimé que l'on ajoute à nos discussions de ne pas oublier, lorsqu'on parle du rôle représentatif, les déclarations des sénateurs. Cette partie de nos travaux attirerait l'intérêt les Canadiens et Canadiennes et leur permettrait de constater que les sénateurs de leur région parlent de ce qui se passe dans ces régions. Il reste à savoir comment se feraient les déclarations de sénateurs, au-delà de la question de procédure. Toutefois, il ne faut pas négliger cette partie.
Il faudrait examiner pourquoi tout cela devrait se faire en considérant bien les rôles du Sénat.
Le rôle d'investigation se fait beaucoup au niveau des comités. D'ailleurs, les travaux des comités sont déjà télévisés. Il est vrai, comme vous le dites, sénateur Smith, que les Canadiens regardent ce qui se passe aux comités. Je suis parfois surprise, à mon retour au Nouveau-Brunswick, d'entendre les gens me dire qu'on m'a vue à la télévision et de recevoir des compliments. Il est rare que l'on reçoive des compliments à Ottawa, mais au Nouveau-Brunswick j'y ai droit.
Le rôle représentatif est donc important pour les Canadiens.
Le sénateur Segal : Au Sénat du Canada, on retrouve un pourcentage élevé de femmes, en comparaison avec la Chambre des communes. On retrouve également une représentation des minorités francophones et autochtones. Les débats télévisés, à ce point de vue, pourraient avoir une valeur inestimable. Par le biais de la télévision, la population en général pourrait ainsi prendre conscience de ces aspects.
[Traduction]
Le président : À propos d'une question que j'ai à l'esprit, je pense que quand nous poursuivrons cette discussion, nous devrions nous assurer d'avoir les détails sur les limites de ces télédiffusions, afin de déterminer si les intérêts dont a parlé le sénateur Losier-Cool atteignent ces secteurs régionaux. C'est surtout un aide-mémoire pour nous-mêmes.
[Français]
Le sénateur Tardif : Certains points ont déjà été soulevés. Ce qui me préoccupe, c'est qu'on n'a pas la réponse à ces questions tout de suite. Mais avant de prendre une décision, il faut les considérer. Si je comprends bien, présentement, on n'a que 20 heures de diffusion au Sénat et, c'est en grande partie pour les comités.
Cependant, tous les comités ne sont pas diffusés. Je pense qu'il manque de temps pour diffuser l'ensemble des comités. Le Comité sénatorial permanent des langues officielles est rarement diffusé. Je n'en comprends pas encore les raisons, mais cela dépend peut-être de la disponibilité des salles.
Croyez-vous qu'en diffusant la période des questions et possiblement les déclarations des sénateurs, que cela pourrait diminuer la diffusion des comités? Plusieurs sénateurs disent que c'est en grande partie en comité que le travail du Sénat se fait.
Le sénateur Segal : J'espère que non. En effet, des négociations doivent avoir lieu avec les officiers du Sénat au sujet de l'horaire de couverture des séances. Si le comité, dans sa sagesse, avance l'idée d'avoir des sessions de la salle du Sénat télévisées, j'espère qu'une discussion aura lieu pour que le temps nécessaire soit ajouté. Et si on a des coûts ou d'autres implications fiscales, il faudra les considérer et prendre la décision par la suite.
[Traduction]
Je serais vexé que la diffusion des débats d'un comité souffre de toute décision de diffuser, par exemple, la période des questions ou d'autres débats du Sénat. Bien que je comprenne et que je respecte le rôle de la chaîne parlementaire, les câblodistributeurs et d'autres qui fournissent, de façon générale, un excellent service au pays, le client serait le Parlement du Canada. Le client devrait avoir le droit de définir les règles et les paramètres, et je sais que c'est plus facile à dire qu'à faire. J'espère que, si nous devions aller de l'avant, nous choisirions de le faire d'une manière qui ne diminuerait aucunement la couverture des comités. Je suis d'accord avec vous, sénateur, j'aimerais qu'il y en ait plus, plutôt que moins.
[Français]
Le sénateur Robichaud : C'est justement le point que je voulais soulever. C'est ce qui arrive à la Chambre des communes. On voit principalement aux actualités télévisées certaines questions posées et certaines réponses données. Je crois que l'on voit beaucoup moins de séances de comités. Ne croyez-vous pas qu'il en serait de même pour le Sénat? Les gens seraient peut-être portés à regarder le cinéma. Si on se présente à la télévision — et vous le voyez bien à la Chambre des communes — cela demande une grande préparation. On n'arrive pas là avec une question qui n'a pas de sens. Certaines personnes diront qu'il est important d'avoir un segment de 20 secondes percutant qui sera repris aux actualités le soir. On ne pourrait pas l'avoir en direct parce que notre période des questions est à peu près en même temps que la période des questions de la Chambre des communes. Cela pourrait poser des problèmes et il faudra faire des ajustements. Ne croyez-vous pas que les comités perdraient l'intérêt que leur portent les Canadiens et les Canadiennes?
Le sénateur Segal : Le risque est certainement là, mais à mon avis, il sera dirigé par la conséquence de ce qui arrive aux comités. Par exemple, si le ministre de l'Agriculture ou des Finances ou le président de la Banque du Canada comparaît à un comité, ce sera toujours perçu comme quelque chose de nouveau, même un comité. Si on a des questions soulevées au Sénat qui ne sont pas tout à fait intéressantes, les nouvelles ne les mettront pas dans les actualités, mais la diffusion sera quand même disponible. L'idée de perdre certaines couvertures des comités parce que la période des questions est plus importante, je doute fortement que cela puisse arriver. La période des questions est intéressante. Mais dans une société libre ce sont les journalistes qui décident ce qu'ils veulent couvrir. On n'a aucun contrôle là-dessus et on ne veut aucun contrôle. Mais dire qu'on va mieux protéger l'intérêt public de nos comités en évitant la couverture du Sénat, pour moi, la logique n'est pas tout à fait claire.
Le sénateur Robichaud : Vous savez qu'on est limité. Il faudra négocier avec CPAC ou le système que nous allons mettre en place. Les heures, normalement, sont déjà limitées. Vous allez pouvoir écouter des séances de comités du Sénat à la télévision, si vous êtes éveillé pendant la nuit vers 2 ou 3 heures.
Il faudra choisir nous-mêmes. On ne laissera pas les médias choisir ce qu'ils veulent faire. Dans ce que nous allons proposer à la télévision, la période des questions tiendra une place importante.
Le sénateur Segal : Je laisse au comité le soin de décider s'il veut proposer seulement une période des questions par semaine, peut-être celle du mercredi. Les autres seront laissées de côté. On peut faire ce que l'on veut, sauf dire que le Sénat lui-même et la période des questions est interdite. On va créer d'autres problèmes et c'est ce que l'on veut éviter.
Le sénateur Robichaud : Je n'ai pas d'objection parce que j'étais à la Chambre des communes et tout était télédiffusé. Mais de loin, c'était la période des questions qui était le point culminant de toute l'activité de la Chambres des communes pour les médias.
Le sénateur Segal : Je n'ai aucun problème avec votre analyse. Ce sera entre les mains de ceux qui négocieront pour nous si on décide d'aller de l'avant.
Le sénateur Robichaud : Vous dites aussi que « le public n'a pas accès. » Peut-être voulez-vous dire que « le public n'a pas suffisamment accès. » Une période des questions télédiffusée donnerait un moyen de plus. Actuellement, le public a accès à tous les débats.
Le sénateur Segal : En écrit, ils y ont accès.
Le sénateur Robichaud : Sur Internet.
Le sénateur Segal : Quelqu'un à Moncton qui veut voir la période des questions du Sénat à la télévision en après- midi ne peut pas la voir. C'est à notre comité de décider si c'est suffisant ou non.
Le sénateur Robichaud : Ce serait d'offrir un autre moyen. Je n'ai pas d'objection majeure à avancer dans cette voie. Il faudra choisir et adapter notre façon d'agir. Si nous commençons avec la période des questions, on ne pourrait pas faire toute la séance. Nous devons changer notre façon d'agir parce que lorsqu'on passe à l'ordre du jour et que vous entendez « reporté, reporté, reporté », les gens vont dire : ils ne font rien au Sénat. Tandis qu'à la Chambre des communes, on ne procède pas de cette façon. Je crois qu'il y aurait des dispositions pour le faire.
Le sénateur Segal : Il peut arriver que le leadership des deux partis décide que tel ou tel après-midi, on organise un débat sur une des questions clés à l'ordre du jour et on reporte les autres. Il y aura une heure de débat pour ceux qui veulent y participer. Vous avez parfaitement raison, la télévision va créer des pressions.
Je ne conteste pas ces propositions. Toutefois, est-ce que, à votre avis, elles ne constituent pas des pressions négatives sur notre responsabilité auprès de la population en général?
Le sénateur Robichaud : Je ne crois pas que ces propositions soient négatives. Vous avez suggéré que le leadership devrait décider. Est-ce que vous voulez vraiment qu'il en soit ainsi?
Le sénateur Segal : Je suis le cadet des sénateurs autour de cette table. On m'a toujours dit que les grandes décisions sont prises par le leadership des grands partis du Sénat. Si je fais erreur sur ce point, j'accueillerai vos conseils avec grand plaisir.
Le sénateur Robichaud : Je ne faisais que soulever la question.
[Traduction]
Le président : Je soupçonne que les membres du Sénat auront beaucoup à dire sur cette question, y compris le leadership.
Le sénateur Keon : Je serais d'accord, en principe, pour que cette question soit étudiée en profondeur. Pour faire suite aux commentaires du sénateur Joyal et d'autres, je n'ai pas, moi non plus, été très exposé à la politique dans ma vie. J'étais scientifique. Mon expérience de la vie universitaire et à titre de président directeur-général d'une institution me font dire qu'avant d'embarquer dans quoi que ce soit de ce genre, nous devons demander l'avis d'experts, sur les aspects positifs et négatifs de la situation. Nous devrions demander une analyse approfondie de ce qui serait télévisé et ce qui ne le serait pas. De plus, il nous faudrait une description détaillée du processus et du plan de mise en œuvre, si nous devrons rendre jusqu'au bout.
Je ne voudrais pas laisser entendre que le Sénat n'est pas empreint d'une immense sagesse collective. Il y a des gens comme les sénateurs Smith, Segal et d'autres qui ont une vaste expérience de la manière d'exploiter les médias, et cetera. Néanmoins, je ne suis pas sûr qu'il nous serve à quelque chose de débattre ici, en tant que comité, pour essayer de définir une stratégie, un processus, et tout ce qu'on veut. Je pense qu'il nous faut un soutien expert.
Le président : Le sénateur Segal voudra peut-être faire un commentaire. Cependant, je peux assurer le sénateur Keon que le comité a bien l'intention d'examiner la question dans les moindres détails. Nous obtiendrons sans faute l'aide de tous ceux qui, selon nous, devraient pouvoir nous aider à prendre une décision.
Je serais heureux de recevoir des suggestions de tous ceux de nos collègues sur qui, leur avis, pourrait nous conseiller et nous aider à prendre la bonne décision en bout de ligne. J'en discuterai avec mes collègues du comité de direction, mais je vais probablement suggérer que nous envoyions un avis à tous les sénateurs pour les inviter à participer, et aussi à soumettre les noms de ceux qui, selon eux, peuvent faire une contribution active à ce débat. Je prends cet engagement devant vous, sénateur Keon.
Le sénateur Joyal : Si nous devons avoir une approche structurée de la télédiffusion des travaux du Sénat, ce devrait être pour exprimer ce qui distingue le Sénat de la Chambre des communes. En essayant d'aborder la télédiffusion sur le simple principe qu'on veut reproduire ce qui se passe à la Chambre des communes, en fait, on surpolitise le débat.
Nous savons exactement ce qui s'est passé à la Chambre des communes. Les journalistes observent la période des questions en cherchant le conflit du jour et les extraits de 15 secondes, qui feront les manchettes du lendemain matin. Cela fait partie du « jeu politique », et c'est juste.
Cependant, la nature du Sénat n'est pas fondée là-dessus. La nature du Sénat est de creuser plus loin, jusqu'au fond des questions, et de s'efforcer de le faire de façon plus collégiale. C'est là que brille le Sénat, soit dans sa fonction délibérative ou dans s fonction d'étude de politiques.
Bien des sénateurs ici le savent, quand nous somme satisfaits de notre travail, c'est parce que nous l'avons fait dans cet esprit. Quand il y a trop de querelles, nous sommes mal à l'aise. Peut-être est-ce parce que nous ne sommes pas élus, ou parce que nous ne ressentons pas la nécessité de jouer pour la galerie et de montrer que nous étions là. Ceci, pour moi, est une caractéristique fondamentale et positive du Sénat. Cela ne veut pas dire que dans l'exercice de nos fonctions délibératives, le facteur de l'allégeance ne pèse pas son poids.
Si cette allégeance devait définir notre approche de la télédiffusion, alors je pense que cela changerait la nature de la Chambre haute, dans notre Parlement de style Westminster. C'est pourquoi je suis intéressé à savoir comment la Chambre des lords s'y est prise. Il est important d'en tenir compte.
Le deuxième élément à tenir en compte, c'est que, comme l'a dit le sénateur Losier-Cool, nous abordons les enjeux sous divers angles. Ces angles sont du point de vue de la minorité. Nous reflétons mieux la nature compositionnelle de la société canadienne. Il y a plus de femmes, plus d'Autochtones et plus de diversité au Sénat qu'à l'autre Chambre, en raison de notre système électoral. Les enjeux régionaux sont des éléments importants de nos discussions, comme les questions se rapportant aux pêcheries, et cetera.
En ce qui concerne la politique étrangère, nous ne nous arrêtons pas à répondre seulement à la question à savoir si nous devrions ou non rester dans un certain pays ou y aller. Vous savez cela, sénateur Segal, puisque vous êtes le président du Comité des affaires étrangères. Notre approche est plus en termes de l'engagement plus élargi du Canada à l'égard des institutions internationales, et cetera.
Il me semble que la démarche de télédiffusion des travaux du Sénat devrait en tenir compte. Je vais simplifier à l'extrême pour me faire comprendre. Ce n'est pas pour dire qu'à partir de maintenant, c'est la période des questions. Qui va frapper et marquer un but? Qui réussira à faire télédiffuser ses extraits par opposition à ceux de la Chambre des communes? Nous savons comment les nouvelles sont présentées. Ce seront les confrontations les plus vives qui feront l'actualité.
Comme vous l'avez reconnu vous-mêmes, cela changera la nature de notre mode de fonctionnement. Nous devons être conscients qui si nous voulons montrer ce que nous faisons le mieux, ou que nous existons et faisons partie du processus politique, alors nous devrons démontrer que nous jouons notre rôle d'une façon différente du processus politique.
Le sénateur Segal : Si c'est ainsi qu'étaient présentées les recommandations du comité, j'en serais ravi. Je ne vois aucun problème à dire qu'il y a des différences qualitatives et de fond dans la manière dont le Sénat examine des enjeux, et ces différences devraient être reflétées dans la manière dont la télédiffusion est invitée et conçue. Je n'y vois pas le moindre problème.
Le sénateur Andreychuk : Je pense qu'il y a des différences marquées non seulement entre ici et la Chambre des communes, mais aussi entre ici et la Chambre des lords. À mon avis, nous sommes différents à l'extrême, et nous devrions tenir compte de ces différences.
Ce qui me préoccupe, c'est en rapport avec la gestion de cette question. Depuis toujours, c'est quelque chose que nous laisserions aux mains de notre leadership. Nous nous sommes organisés sur la base des partis avec un leadership.
Avec les années, nous avons rogné ce que j'appellerais l'indépendance des sénateurs. Vous avez soulevé la question de savoir quels comités seraient diffusés et lesquels ne le seraient pas. Cette question ne semble pas relever d'un consensus du Sénat; c'est un consensus du leadership. Je pensais à une époque avoir le contrôle sur bien des décisions qui sont prises, pour finalement me rendre compte que je n'ai pas de contrôle, parce que tellement de nos pouvoirs ont été lentement rognés. Je ne sais pas comment nous pourrions gérer tout le processus sans le déléguer au leadership, ce qui, à mon avis, le politiserait et rognerait l'indépendance du Sénat.
J'aimerais voir le reflet de la pleine conséquence. En surface, on dirait que les caucus décideraient, mais en pratique, on sait que ce n'est pas ce qui se passe. La question fondamentale est la suivante : dans quelle mesure chaque sénateur aura-t-il plus de contrôle? Certains d'entre nous avons un style différent de celui d'autres pour la participation au Sénat. Certains sénateurs font des pieds et des mains pour ne pas cultiver la presse, d'autres pas. Les femmes agissent devant la presse et les publics autrement que les hommes. Il y a tellement de différences que nous devrions cerner avant de décider de cette question. Je ne veux pas agir sur un acte de foi en me disant que tout se passera bien — et je tiens à ce que ce soit au compte rendu.
Quant à notre méthode de travail, j'espère bien que le personnel et les attachés de recherche pourront cerner les principaux enjeux à débattre, que ce soit le leadership, des comparaisons, et cetera, et dresser une liste de témoins qui pourraient aider le comité dans ses délibérations sur ces questions avant qu'il parvienne à une conclusion. Il faudrait étudier la question pour avoir l'occasion de réfléchir à ce que nos caucus respectifs font pour nous. Ce genre d'étude présente un bon avantage, qui va au-delà de seulement la question de télédiffuser les délibérations de la Chambre haute. Je serais en faveur d'un plan, qui décrive les enjeux et dresse une liste de témoins pertinents pour aider le comité dans ses délibérations sur le sujet. Nous pouvons y contribuer.
Le président : J'aimerais conseiller à mes collègues l'excellent rapport qu'a préparé M. Robertson, l'attaché de recherche de la Bibliothèque du Parlement. Toutes les suggestions qui nous permettront d'avancer positivement seront prises en compte. Je vais m'engager à m'assurer que le comité passe en revue les délibérations de la Chambre. Puisque un enjeu de cette nature concerne chacun de nos collègues, le comité veillera à ce que toutes les opinions soient entendues. Peut-être cela prendra-t-il un peu plus longtemps, sénateur Segal, que vous ne le souhaiteriez, mais le comité y accordera une réflexion approfondie.
Le sénateur Cordy : Nous avons eu un bon début, avec la discussion de ce matin, et les membres du comité sont ouverts à ce concept. Je remercie le sénateur Segal d'avoir présenté cette question sur le parquet du Sénat et à ce comité, parce que le temps est venu pour les sénateurs d'en discuter en détail.
Les médias m'ont demandé, le jour où vous avez exposé cet enjeu devant le Sénat, ce que j'en pensais. J'ai dit à ce moment-là que je ne savais pas encore. Je m'inquiétais des 15 minutes de gloire que recherchent certaines personnes à la Chambre des communes. Je détesterais que cela se passe au Sénat, à cause des aspects positifs du Sénat dont il a été question aujourd'hui. Nous sommes nombreux à avoir assisté à de merveilleux débats à la Chambre, mais comme nous ne sommes pas toujours sûrs que ce seront des débats merveilleux, nous ne pouvons pas nécessairement planifier à l'avance ce qui sera télédiffusé du Sénat. À certains moments, il arrive tout simplement que les débats spontanés sont ce que nous faisons extrêmement bien.
Je n'aime pas à dire qu'il n'y a jamais de parti pris au Sénat, parce qu'il y en a, mais certainement, il y en a moins au Sénat qu'à la Chambre des communes. Bien des gens m'ont dit que lorsqu'ils ont comparu devant le Comité des affaires sociales, ils ne pouvaient pas discerner quel parti chaque sénateur représentait. C'est un commentaire positif sur le Sénat.
Comme l'on dit les sénateurs Keon et Kirby à ce sujet, il est important d'examiner la question en profondeur et de ne rien presser. Quand on présente quelque chose au Sénat, il est sûrement naturel de vouloir que ce soit réglé aussi vite que possible, mais il est important que nous examinions la question attentivement. Plusieurs enjeux ont été exposés ce matin qui doivent être longuement débattus. Peut-être serait-il bon que des membres du comité parlent à des membres de la Chambre des lords, qui vit la situation. Nous n'avons pas examiné l'aspect financier de la télédiffusion des délibérations, alors il faudra aussi en discuter. Merci à vous, sénateur Segal, d'avoir présenté cela.
Le sénateur Segal : La motion découle d'une présentation que j'ai faite à des étudiants de premier cycle à l'Université Queen's. C'était un cours équivalent à sciences politiques 101. Leur professeur leur avait donné pour faire leurs travaux le remarquable ouvrage du sénateur Joyal sur le Sénat, et ils avaient terminé. J'ai parlé des rapports du Sénat qui ont été rendus au fil des années bien avant mon arrivée ici, et de l'importance qu'ils revêtaient pour la politique publique. Après une série de questions, une jeune femme énergique a demandé « Je peux voir les débats de la Chambre des communes à la télévision; pourquoi ne puis-je pas voir les délibérations de la Chambre du Sénat? ». J'ai pu lui donner une réponse philosophique, mais pas structurée. Ce comité prendra le temps de réfléchir aux modalités et caractéristiques de cette question, et je vous en serai éternellement reconnaissant. Cette jeune étudiante de premier cycle peut se féliciter que la question qu'elle m'a posée est maintenant l'objet d'un débat d'un groupe très distingué de personnes.
Le président : Mes chers collègues, je suis sûr que vous serez d'accord avec moi que nous devrions exprimer notre gratitude au sénateur Segal non seulement pour avoir amorcé ce processus, mais aussi pour l'excellent témoin qu'il a été ce matin. Nous avons dépassé un peu le temps que vous nous aviez réservé, et je vous en remercie.
À moins qu'il y ait des questions pressantes, il ne me reste qu'à remercier tous ceux qui ont participé ce matin à cette démarche très intéressante qu'entreprend le comité.
La séance est levée.