Délibérations du Comité sénatorial spécial sur le Vieillissement
Fascicule 2 - Témoignages du 10 décembre 2007
OTTAWA, le lundi 10 décembre 2007
Le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement se réunit aujourd'hui à 12 h 31 pour examiner les incidences du vieillissement de la société canadienne et en faire rapport.
Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Je tiens à vous souhaiter à tous la bienvenue au Comité sénatorial spécial sur le vieillissement. Le comité examine les incidences du vieillissement de la société canadienne.
Nous allons, dans la réunion d'aujourd'hui, nous concentrer sur le logement, le logement-services, le logement en milieu de soutien et les soins à domicile. Vont nous aider à comprendre ces différents sujets Luis Rodriguez et Debra Darke, de la Société canadienne d'hypothèques et de logement; Sharon Sholzberg-Gray, présidente et chef de la direction de l'Association canadienne des soins de santé; Pierre Allard et David MacDonald, de La Légion royale canadienne; Margaret Hall, de l'Université de la Colombie-Britannique; et Marcus Hollander, président de Hollander Analytical Services Ltd, qui comparaît devant nous par vidéoconférence..
Nous allons commencer par le témoin qui comparaît par vidéoconférence, étant donné que la technologie ne fonctionne pas toujours comme nous le voudrions. Nous préférons donc commencer par M. Hollander, étant donné qu'il est déjà là et que nous savons que la connexion est bonne.
Marcus J. Hollander, président, Hollander Analytical Services Ltd., à titre personnel (par vidéoconférence) : J'aimerais remercier le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement de m'avoir invité à vous parler de la recherche que nous effectuons depuis plusieurs années et vous démontrer comment elle peut éclairer le processus d'élaboration des politiques.
La politique nationale actuelle porte surtout sur les soins à court terme et les soins à domicile spécialisés, et il va sans dire que de grands progrès ont été accomplis dans ce domaine, mais le moment est peut-être venu de se demander quel est le meilleur moyen de répondre aux besoins continus ou à long terme des aînés. À notre avis, le comité devrait examiner les deux grandes questions suivantes dans le cadre de ses délibérations : l'importance de mettre l'accent sur un système élargi et intégré de soins aux aînés; et l'importance d'offrir des services de soins et de soutien à domicile.
Je vais aborder ces deux sujets à tour de rôle.
En ce qui concerne les modèles plus intégrés de prestation de soins, les aînés ont de nombreux besoins qui relèvent autant des services de santé que des services sociaux. Dans un monde idéal, le système de soins serait conçu pour répondre à cette diversité de besoins et comprendrait un vaste éventail de services, allant des soins à domicile à des options d'hébergement, aux soins en établissement et aux services gériatriques en milieu hospitalier.
Malgré les efforts déployés à la fin des années 1980 et au début des années 1990 pour mettre au point ce genre de système élargi à l'échelon provincial, les récentes politiques mettent davantage l'accent sur certaines composantes du système, comme les soins à domicile, le logement et les soins en établissement — qui sont bien sûr elles aussi très importantes. Nous croyons que la mise en place de systèmes coordonnés et intégrés de prestation de soins à l'intention des personnes qui ont des besoins constants serait une bonne chose, pour paraphraser Martha Stewart. Ces systèmes sont une bonne chose sur le plan clinique parce qu'ils permettent d'offrir des soins coordonnés et intégrés par le biais d'une vaste gamme de services, allant de la Popote roulante aux centres d'évaluation et de traitement gériatrique en milieu hospitalier.
Ils sont une bonne chose d'un point de vue stratégique, parce qu'il est ainsi possible d'élaborer des politiques à l'échelle du système pour couvrir l'ensemble des services de soins et ce, dans l'intérêt du client.
Ils sont une bonne chose sur le plan économique parce qu'ils permettent de faire des compromis, par exemple entre des services à domicile moins coûteux et des services de soins en établissement ou de soins actifs qui, eux, coûtent plus cher. Les économies ainsi réalisées peuvent servir à optimiser les ressources au sein du système de soins continus — soins à domicile, soins à long terme et options de logement appropriées — et du système de soins de santé en général.
Enfin, ils sont une bonne chose parce que, s'ils sont mis en place efficacement, il serait possible de réduire les coûts ou d'accroître les économies tout en offrant en même temps de meilleurs soins aux clients.
Le mode d'organisation et la structure des systèmes de prestation des soins peuvent avoir des répercussions profondes sur et la qualité des soins reçus et les dépenses du gouvernement au chapitre des soins.
Je vais parler un petit peu de certaines des preuves qui sont ressorties des travaux de recherche que nous avons effectués sur ces différents thèmes. Les services de soins à domicile sont issus de la fusion de services professionnels et de services de soutien. Les récentes recommandations visant à augmenter le financement des soins à domicile pour permettre aux gens de demeurer chez eux reflètent le regain de l'importance accordée aux soins préventifs et de soutien ainsi qu'aux soins à long terme à domicile. En Ontario et en Colombie-Britannique, on recommande d'augmenter les fonds consacrés aux services de soins et de soutien à domicile à long terme de 700 millions et de 200 millions de dollars, respectivement. En Ontario, il s'agit de la stratégie Vieillir chez soi, et en Colombie-Britannique, il s'agit d'une recommandation du conseil du premier ministre.
La rentabilité des services préventifs de soutien à domicile est démontrée. Selon une étude menée en Colombie- Britannique, les soins à domicile de longue durée peuvent prévenir ou réduire les admissions dans les hôpitaux et les établissements de soins de longue durée. Au milieu des années 1990, on a établi une comparaison entre les personnes ne recevant que des services d'entretien ménager et qui étaient touchées par les réductions de services dans deux régions sanitaires et des personnes non visées par les réductions de services dans deux régions similaires. L'année précédant les coupures dans les services, les services offerts pour les personnes touchées par les coupures coûtaient en moyenne entre 4 500 $ et 5 000 $ par personne. Trois ans après les coupures, les coûts comparatifs s'établissaient à 11 900 $ et 7 800 $ respectivement, soit une différence nette de 3 500 $. En moyenne, donc, les personnes touchées par les coupures dans les services coûtaient au système de santé quelque 3 500 $ de plus, trois années après les coupures, par rapport aux personnes non touchées par les réductions de services.
Les coûts totaux sur les trois années ayant suivi les coupures se sont élevées à 28 000 $ et à 20 000 $ respectivement, pour les personnes touchées par les coupures de services et pour celles qui ont continué à en bénéficier. La différence est attribuable en grande partie aux soins actifs et aux services de soins de longue durée en établissement.
Nous avons dirigé plusieurs études sur la rentabilité des soins à domicile, notamment dans l'ouest du Canada. Le résultat constant est le suivant : pour les personnes qui ont les mêmes besoins en matière de soins, les services de soins à domicile coûtent en général moins cher au gouvernement que les soins en établissement. Nous avons également constaté que, dans la majorité des cas, les services de soins à domicile se résumaient à des services de soutien à domicile prodigués par des non-professionnels.
Nous avons également effectué une étude à Victoria, en Colombie-Britannique, et à Winnipeg, au Manitoba, dans le but d'évaluer les coûts pour la société en général, y compris les dépenses directement assumées par les clients et des membres de leur famille. La contribution en temps de la part de parents qui s'occupent de proches coûte l'équivalent du salaire qui serait versé à un soignant rémunéré. Même en utilisant cette perspective sociétale plus large, les coûts d'ensemble étaient moindres pour les clients des services à domicile. La qualité des soins, selon le degré de satisfaction des clients et des aidants membres de la famille, et la qualité de vie du client, étaient égales ou meilleures dans le cas des personnes qui recevaient des soins à domicile. Ainsi, le fait d'opter pour des services de soins à domicile, moins coûteux, n'a pas diminué la qualité des soins.
Sans nier la grande importance de la contribution des soins en établissement, qu'il faut reconnaître et respecter, il peut toujours exister des occasions de remplacer les soins en établissement, qui coûtent plus cher, par des services de soins à domicile, moins coûteux. Certaines études démontrent que les logements en milieu de soutien peuvent également être moins coûteux que les soins en établissement, mais cette question nécessite une étude plus approfondie.
Nous avons également constaté que les économies générées par le remplacement des services en établissement par des services de soins à domicile ne sont pas qu'hypothétiques; elles peuvent réellement être réalisées. Entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 1990, la Colombie-Britannique a réalisé des économies réelles en ralentissant la construction de nouveaux établissements de soins de longue durée et en investissant plutôt dans les services de soins à domicile.
Chose importante ici, les débats actuels sur la politique font ressortir un paradoxe concernant la prestation des services, et dont il semble que l'on ne tienne pas suffisamment compte : bien que les aînés ayant des limitations fonctionnelles requièrent des services médicaux, les solutions les plus appropriées face à leur état de santé sont souvent en grande partie des services de soutien.
Il n'est pas absolument nécessaire de faire appel à un professionnel pour donner un bain à un aîné, lui préparer un repas, le nourrir et veiller à ce que sa maison soit propre et sécuritaire. Ce genre de services de soutien personnels permettent aux personnes trop malades pour faire leurs courses, cuisiner ou prendre leur bain seules de conserver leur autonomie le plus longtemps possible. Ces services peuvent également générer des économies pour le système de soins de santé en évitant les admissions répétées à l'hôpital et le placement prématuré en établissement de soins de longue durée.
Aux termes d'un vaste projet de recherche sur la rentabilité des services de soins à domicile, appelé National Evaluation of the Cost-Effectiveness of Home Care, auquel j'ai eu le privilège de participer, nous avons formulé un certain nombre de recommandations sur la façon dont les services de soins à domicile devraient être structurés. Le rapport de synthèse indique que si l'on veut effectuer rapidement les types de substitution nécessaires pour réaliser des gains d'efficience, alors il faut inclure les soins à domicile dans un système intégré et élargi de soins à domicile et de soins en établissement, souvent appelés soins continus.
L'exercice du contrôle administratif et fiscal sur un tel système intégré et élargi de soins permet aux dirigeants et aux décideurs de prendre les mesures requises pour assurer la transition efficace et rentable des soins actifs et en établissement vers des services de soins à domicile. Si l'on se contente d'augmenter les dépenses consenties aux soins de santé à proprement parler, on risque d'avoir un effet limité, sauf à prendre également des mesures pour remplacer les services de soins en établissement et(ou) de soins actifs par des services de soins à domicile.
En conclusion, nous sommes passés de systèmes provinciaux de prestation de soins au début des années 1990 à des modèles plus régionaux. Aujourd'hui, il existe une grande variété de structures de services de soins, et de nouvelles pratiques exemplaires « faites au Canada » commencent également à émerger en ce qui concerne l'organisation des services de soins aux aînés.
Ce qui semble faire défaut est une vision nationale axée sur des systèmes intégrés de prestation de soins. Il serait utile que les personnes travaillant dans le domaine puissent partager leur expérience et apprendre les unes des autres pour savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
En outre, dans le cadre de nos travaux antérieurs, qui remontent déjà un petit peu en arrière, nous avions constaté que les coûts des systèmes intégrés de prestation de soins aux aînés et aux personnes ayant des déficiences — c'est-à- dire le coût d'un système de soins de santé continus provincial — représentaient la troisième dépense publique en importance dans le cadre du système de soins de santé, après les services hospitaliers et les services de médecin. À l'heure actuelle, nous ne cueillons pas — ou en tout cas nous ne rapportons pas — de données nationales qui nous permettraient de confirmer si c'est toujours le cas. Nous nous attendrions à ce que des modèles intégrés et bien structurés de prestation de soins prolongés aux personnes en ayant besoin demeureraient le troisième plus important poste de dépenses publiques au titre de notre système de soins de santé. Les coûts des médicaments vont, certes, augmentant, mais une importante partie de ces coûts est assumée par les usagers eux-mêmes.
L'élaboration des systèmes de soins de santé les plus appropriés pour les aînés et pour toutes les personnes ayant des besoins continus est un défi qui mérite, à notre sens, de faire l'objet d'un travail actif d'établissement d'une politique nationale.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur Hollander. La parole est maintenant à M. Rodriguez.
Luis Rodriguez, recherchiste principal, Société canadienne d'hypothèques et de logement : Je désire remercier les membres du Comité sénatorial spécial sur le vieillissement d'avoir invité la Société canadienne d'hypothèques et de logement à participer. J'espère que les discussions que nous aurons aujourd'hui enrichiront les travaux du comité. L'exposé que je vous présente aujourd'hui traite des choix de logements pour les aînés, c'est-à-dire les personnes de 55 ans et plus.
Ma présentation se divise en sept parties : satisfaction des aînés à l'égard de leur logement actuel; préférences des aînés en matière de logement; modèle de choix de logements pour aînés et continuum des services d'adaptation et de soutien; vieillissement chez soi et soins à domicile; logement en milieu de soutien et logement-services; planification communautaire; et activités de recherche et de diffusion de l'information sur le logement des aînés prises en charge par la SCHL.
Nos recherches montrent que les Canadiens âgés sont assez satisfaits de leurs logements actuels. Dans le cadre d'une récente enquête nationale, neuf aînés sur 10 — 92 p. 100 — affirmaient que leur logement actuel répondait en général à leurs besoins, par rapport à to 6 p. 100 qui affirmaient le contraire.
Selon cette enquête, les aînés constituant un ménage dont le revenu annuel est inférieur à 20 000 $ étaient beaucoup moins satisfaits de leur logement que leurs homologues, bien que la majorité — 83 p. 100 — de ces aînés à faible revenu aient affirmé que leur logement répondait à leurs besoins. Les propriétaires-occupants vivant dans une maison individuelle non attenante et évaluant leur santé comme étant excellente étaient plus enclins que leurs homologues à dire que leur logement actuel répondait à leurs besoins.
Cette même enquête nationale indique également que 87 p. 100 des personnes âgées de 55 ans et plus disaient prévoir demeurer dans leur logement actuel aussi longtemps que possible, même si leur état de santé changeait. Cette préférence semble prendre de l'ampleur chez les aînés de tous âges.
Les propriétaires-occupants, les personnes qui évaluent leur santé comme étant excellente et celles qui affirment avoir peu de difficultés à payer leurs frais d'occupation ont tous plus tendance à déclarer qu'ils ont l'intention de demeurer dans leur maison actuelle le plus longtemps possible que leurs homologues. Seulement un répondant sur 10 a affirmé qu'il n'avait pas l'intention de demeurer dans son logement actuel.
Les motifs de déménagement varient énormément d'un Canadien âgé à l'autre. Chaque répondant pouvait donner jusqu'à trois motifs, et la somme des pourcentages des répondants qui ont répondu à chaque question donne plus de 100 p. 100. Environ un répondant sur six, soit 17 p. 100, ont dit que le coût de la vie est trop élevé, 15 p. 100 que leur logement actuel devient trop difficile à entretenir, tandis que 14 p. 100 ont dit qu'il n'était pas facile de circuler dans leur logement actuel. Treize pour cent des aînés qui n'ont pas l'intention de demeurer dans leur logement actuel ont déclaré qu'ils étaient prêts à emménager dans une habitation plus petite, et un peu moins, soit 11 p. 100, ont dit n'aimer tout simplement pas le logement qu'ils occupent présentement. Comme on pouvait s'y attendre, les propriétaires sont plus enclins que les locataires à affirmer qu'ils prévoient déménager parce que leur logement actuel est trop difficile à entretenir ou parce qu'ils veulent avoir un logement plus petit.
Que les aînés vivent dans une maison isolée, une maison en rangée ou un appartement, qu'ils soient locataires ou propriétaires, deux principaux choix de logement s'offrent à eux : ils peuvent demeurer où ils sont ou ils peuvent déménager ailleurs. Il se peut que les locataires et les propriétaires qui décident de demeurer chez eux aient à adapter leur logement à leurs besoins changeants. Pour avoir une idée de l'ampleur des besoins, on peut examiner les données tirées de l'Enquête sur la participation et les limitations d'activités (EPLA) menée en 2001 par Statistique Canada. Sur l'ensemble de la population âgée de 65 ans et plus ayant une déficience, presque une personne sur cinq a déjà apporté des modifications à son logement ou a déclaré en avoir besoin. Il se peut qu'elles aussi besoin de faire appel à des services de soutien au fur et à mesure qu'elles vieillissent.
Les propriétaires-occupants peuvent devoir apporter des rénovations importantes à leur logement, telles que l'ajout d'une chambre, d'une salle de bain ou d'une buanderie au rez-de-chaussée d'une maison à deux étages, afin qu'ils n'aient pas à monter d'escaliers. Ils peuvent aussi choisir de partager leur maison avec une personne qui peut les aider dans leurs activités quotidiennes, comme l'enlèvement de la neige et l'entretien de la maison ou agir comme personne de compagnie. Il se peut également qu'ils souhaitent construire un logement accessoire qu'ils pourraient louer pour augmenter leur revenu. Les propriétaires-occupants âgés peuvent aussi se servir de leur avoir propre financier pour arrondir leurs revenus.
Quand ils décident de déménager, les aînés sont souvent motivés par des facteurs qui les poussent à quitter leur logement actuel ou qui les attirent vers une nouvelle maison. Parmi les facteurs qui les poussent à quitter, on trouve une mauvaise conception des lieux ou des dimensions qui ne conviennent plus, la perte du conjoint ou de la conjointe ou le déclin de l'état de santé. Les facteurs attrayants comprennent un logement de meilleure qualité, un meilleur accès aux installations de loisirs, aux commodités ou aux services, un mode de vie plus attrayant, une tranquillité d'esprit et une sécurité accrues, des coûts plus abordables ou la proximité de membres de la famille ou d'amis.
L'éventail des choix qui s'offrent à ceux qui déménagent comprend : l'emménagement dans un logement accessoire, comme un appartement accessoire ou un pavillon-jardin, pour se rapprocher de membres de la famille ou d'amis; l'emménagement dans un nouveau logement situé dans une collectivité regroupant des personnes de tous les âges; ou l'emménagement dans un endroit où ils peuvent vivre près de leurs pairs, comme un complexe adapté au mode de vie des personnes retraitées, un ensemble offrant des services de soutien ou un village-services.
Comme je l'ai déjà mentionné, nos recherches montrent que la plupart des aînés désirent vieillir chez eux, dans un milieu qu'ils connaissent bien, jusqu'à ce que leur santé ne le leur permette plus. Cette situation se traduira par une augmentation des demandes d'adaptation aux logements afin de leur permettre de vieillir chez eux. Elle se traduira aussi par une augmentation des demandes de services d'entretien et de soutien, notamment les soins à domicile et les soins personnels dont se chargeront des membres de la famille, des amis et des voisins, et les fournisseurs de services gouvernementaux et privés n'en seront que davantage sollicités. Encore une fois, selon l'EPLA de 2001, presque les trois quarts des personnes âgées de 65 ans et plus ayant une incapacité ont déclaré recevoir de l'aide d'une ou de plusieurs de ces sources. Environ le tiers de ceux qui reçoivent de l'aide l'ont obtenue d'organismes bénévoles, privés ou gouvernementaux.
Les coûts élevés des réparations et de l'entretien peuvent constituer un fardeau pour les aînés à faible revenu. Ce problème prend particulièrement de l'ampleur à l'extérieur des centres urbains où les ménages âgés sont majoritairement propriétaires — 82 p. 100 par rapport à 68 p. 100 dans les centres urbains —, et où l'ensemble du parc de logements est beaucoup plus vieux, avec 34 p. 100 des habitations construites avant 1961, que celui des centres urbains, dont 29 p. 100 des habitations ont été construites avant 1961.
Vieillir chez soi avec un revenu insuffisant, que ce soit en région rurale ou en région urbaine, peut entraîner une détérioration des habitations et des quartiers du fait que les réparations et l'entretien soient négligés.
Le logement en milieu de soutien se veut une solution prometteuse. Ce type de logement offre aux gens de l'aide dans leurs activités de tous les jours grâce à un cadre de vie sécuritaire, sûr, dynamique et familial, et à la prestation de services de soutien, tels que repas, entretien ménager et activités sociales et récréatives.
Ce type de logement permet aussi aux personnes de maximiser leur autonomie, leur intimité, la prise de décisions et la participation, la dignité ainsi que les choix et les préférences. Il existe diverses formes de logement de soutien selon l'ampleur et le type des services fournis. Les formes de logement en milieu de soutien les plus bonifiées au chapitre des services, tels les logements-services, peuvent constituer une solution de rechange aux soins en établissement. Le logement en milieu de soutien peut s'avérer des plus avantageux pour les personnes âgées qui ont besoin d'aide pour vaquer à leurs activités quotidiennes, qui sont de santé fragile ou qui ont une incapacité, et pour celles qui vivent seules. Il peut aussi être profitable aux aînés qui préfèrent vivre avec leurs pairs dans un environnement où ils peuvent avoir de la compagnie et jouir de la liberté de se consacrer à des intérêts et des modes de vie différents.
Le logement en milieu de soutien peut être offert dans des bâtiments de types et de dimensions variés : petites maisons de plain-pied ou bungalows, maisons partagées par un groupe de huit à 10 personnes, immeubles comportant de nombreux logements, et cetera. Le mode d'occupation des logements en milieu de soutien peut également prendre diverses formes, telles que la location, la copropriété et le bail viager. Un éventail de choix de logement en milieu de soutien est aujourd'hui offert au Canada. Plusieurs provinces ont élaboré leurs propres définitions du logement en milieu de soutien afin de répondre à des circonstances, exigences et objectifs stratégiques précis.
Avec le vieillissement de la population canadienne, nos collectivités — villes, bourgs et villages — devront être plus conviviales pour les aînés. Elles devront donc être mieux adaptées aux besoins des aînés, c'est-à-dire leur permettre de se rendre où ils doivent aller et veulent aller, de participer à des activités récréatives, sociales et communautaires et d'accéder aux services de soutien dont ils ont besoin.
Le but ultime sera de créer des collectivités qui sont accessibles, accueillantes, enrichissantes et favorables au désir généralisé qu'ont les personnes âgées de demeurer autonomes le plus longtemps possible. À cette fin, la SCHL examine les possibilités qu'offrent les stratégies de « croissance intelligente » qui peuvent rendre les collectivités du Canada plus compactes, dans une optique d'utilisation diversifiée du territoire, comportant des rues, des trottoirs et des sentiers bien reliés qui permettent d'accéder facilement aux services de soutien et aux commodités. La SCHL cherche aussi des façons de créer des collectivités viables dans lesquelles on trouvera un choix de logements et de moyens de transport, un éventail de commodités et des lieux publics bien entretenus pour les loisirs et les événements communautaires, ainsi que des communautés durables qui répondent aux besoins des générations actuelles et futures tout en réduisant les incidences sur l'environnement.
À titre d'exemple, on peut citer le modèle d'îlogramme de la SCHL, qui regroupe les meilleures caractéristiques des schémas de rues traditionnels et habituels. Pour y parvenir, on doit aménager un grand réseau de rues collectrices prévues pour une circulation automobile à vitesse moyenne à élevée, qui encadre des îlots d'environ 16 hectares — plus ou moins 40 acres — avec des rues disposées en forme de croissants et de cul-de-sac, pour éliminer le trafic de transit. Un réseau continu de sentiers piétonniers dans des espaces verts offre un accès direct aux parcs, aux commerces et aux installations communautaires. L'îlogramme réduit aussi la superficie du territoire réservée pour les routes, ce qui permet d'aménager davantage d'espaces verts, d'accroître la sécurité pour les automobilistes et les piétons, et de réduire au minimum les incidences sur l'environnement. Le concept de l'îlogramme peut s'adapter plus facilement au vieillissement des générations futures.
La SCHL exerce des activités de recherche et de diffusion de l'information qui s'attaquent aux défis que présentent les logements pour les aînés et proposent des solutions. Les activités de recherche de la SCHL se sont soldées par la création d'un certain nombre de produits d'information intéressants. J'ai apporté des exemplaires du catalogue des recherches et des publications de la SCHL qui concernent les personnes âgées, que je laisserai aux membres du comité. Je me ferai un plaisir de vous fournir des exemplaires des publications qui pourront être utiles dans le cadre de vos délibérations. À la SCHL, nous sommes conscients que le vieillissement de la population canadienne constituera l'un des plus importants défis que devra relever le Canada au cours des 25 prochaines années. Je suis convaincu que les efforts que consacrera le comité sénatorial à ce sujet seront très profitables.
La présidente : Nous allons maintenant entendre Mme Sholzberg-Gray, de l'Association canadienne des soins de santé.
Sharon Sholzberg-Gray, présidente et chef de la direction, Association canadienne des soins de santé : L'Association canadienne des soins de santé (ACSS) remercie le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement de l'occasion qui lui est ici donnée de contribuer à ses délibérations. Nous sommes une fédération d'hôpitaux et d'organismes de santé provinciaux et territoriaux qui représente un vaste éventail de services de santé comprenant les soins de courte durée, les soins à domicile et en milieu communautaire, les soins de longue durée, la santé publique, la santé mentale, les soins palliatifs, les services de toxicomanie, de même que les services offerts aux enfants, aux jeunes et aux familles.
Nous sommes un chef de file en matière d'élaboration et de promotion de solutions politiques en santé qui répondent aux besoins des Canadiens. Notre association nationale se veut la championne d'un système de santé publique qui donne accès à un continuum de services de santé comparables, à la grandeur du Canada. L'ACSS croit que toutes les composantes des services de santé doivent être subventionnées adéquatement, organisées efficacement et interreliées comme il se doit pour fonctionner de manière optimale, assurant ainsi la prestation des soins appropriés dans l'environnement qui convient et en temps opportun.
Comme l'ont souligné des témoins précédents, nous savons tous que les aînés d'aujourd'hui vieilliront plus en santé que ceux des générations précédentes, vivront plus longtemps, devraient connaître une période de morbidité en fin de vie plus courte et auront des idées définies sur le type de services de santé qu'ils souhaitent obtenir.
On a beaucoup parlé de la viabilité du système de santé, surtout dans le contexte de l'évolution démographique de la population. La plupart des discussions publiques sur le sujet ont porté sur l'accès aux soins de courte durée sans explorer suffisamment le besoin en services de soins continus et la corrélation entre toutes les parties du continuum de soins.
J'appuierai à ce chapitre tout ce qu'a dit M. Hollander en la matière.
Le comité nous a demandé de nous pencher sur divers aspects de la question du logement, dont le logement en milieu de soutien, le logement-services et les soins à domicile. Nous aimerions toutefois examiner la valeur essentielle des services de soins continus en tant que groupe. Cela englobe, du côté du logement, le logement en milieu de soutien, le logement avec assistance et les soins à long terme en établissement. Du côté des soins à domicile, il existe une vaste gamme de services de soutien communautaires et de soins à domicile qui sont requis. Ce sont là les supports du système de soins de santé dont on ne reconnaît souvent pas suffisamment la valeur.
Il nous faut dire à répétition qu'il y a un lien entre tous ces services et l'utilisation efficace des lits de courte durée. Le problème des temps d'attente est aggravé du fait que certains lits de soins de courte durée sont occupés par des patients qui pourraient vivre dans des logements en milieu de soutien/logements-services ou dans leur propre maison s'ils recevaient des services à domicile et des services communautaires adéquats, et par des patients qui devraient plutôt être placés dans des établissements de soins de longue durée. L'importance accordée aux temps d'attente dans l'Accord sur la santé de 2004 des premiers ministres était tout indiquée, mais le problème des temps d'attente ne peut être résolu isolément des problèmes liés à la prestation des soins continus.
L'ACSS a élaboré un document pancanadien sur les soins de longue durée en établissement. Nous avons entrepris ce travail car nous estimions que ces soins étaient le parent pauvre du système de soins de santé. Nous y faisons un examen exhaustif du rôle des soins de longue durée en établissement à l'intérieur du secteur des soins continus. Nous y livrons également des recommandations dans le contexte des services de soins continus dont les gens ont besoin — soins à domicile, services de soutien communautaires, soins informels, logement en milieu de soutien et logement avec services. Bien que le document soit en train d'être mis à jour, nous vous en livrons les recommandations, car ceux-ci résisteront à l'épreuve du temps.
Nous avons pris bonne note de l'exposé exhaustif de la SCHL. Cependant, en ce qui concerne le logement, nous soulignerions l'importance de l'adaptation des logements existants pour les aînés, par le biais de travaux de remise en état, d'adaptation ou de réparation d'urgence. Ces programmes sont importants, mais la plupart des aînés en ignorent l'existence. S'ils étaient au courant de ces programmes, y aurait-il suffisamment de ressources pour qu'ils puissent tous y accéder? C'est là une question clé pour le gouvernement fédéral.
Pour ce qui est des logements en milieu de soutien, nous avons entendu parler de différents modèles de logements supervisés et des types de services qui existent à l'échelle du pays. Tous ces programmes ont des noms différents, d'où l'une des difficultés de notre système de soins de santé. Il en résulte que la collecte de données et la recherche sont plus compliquées qu'elles ne devraient l'être. Le logement en milieu de soutien est l'une des solutions, et il faudra que la SCHL y joue son rôle.
Le logement-services est en général inscrit sous la rubrique du logement en milieu de soutien. J'aimerais émettre ici quelques mises en garde relativement à cette catégorie de services d'aide à la vie autonome. La raison en est que je suis préoccupée quant à la qualité et aux genres de choses dont on fait à l'heure actuelle la promotion auprès d'un public non méfiant.
Il est important de souligner que les logements-services offrent généralement de l'assistance pour les activités de la vie quotidienne, ou AVQ, comme l'habillement, le bain et la toilette. L'importance de l'aide varie selon les établissements, et, généralement, on facture des frais de base auxquels peuvent venir s'ajouter des services additionnels moyennant le paiement de frais supplémentaires.
À l'origine, ces établissements attiraient les aînés car ils offraient sécurité, repas en commun, activités planifiées et diverses occasions d'interagir avec d'autres. C'était une bonne chose. Il s'agit d'un groupe de personnes qui sont moins frêles que les résidents typiques des établissements de soins de longue durée.
Les inconvénients majeurs de la plupart des logements-services sont le prix très élevé — on les vante habituellement comme étant des logements luxueux —, la pénurie de professionnels de la santé et le manque de clarté sur la définition des services d'aide à la vie autonome. Ces logements font l'objet d'un marketing agressif avec des promesses de logements luxueux, de personnel dévoué et de satisfaction de tous les besoins des résidents en matière de sécurité et de soins. Certains exploitants de logements-services cherchent à courtiser des résidents âgés à la santé fragile, et, dans certains cas, des patients en soins palliatifs. Les coûts de ce type d'hébergement sont très élevés. Ainsi, seules les personnes fortunées peuvent en bénéficier.
Il nous faut être vigilants pour veiller à ce que les logements-services ne deviennent pas des établissements de soins de longue durée non réglementés offrant des services à la carte. Ils ne sont pas un substitut aux établissements de soins de longue durée et ne devraient pas minimiser l'importance de créer un secteur de soins de longue durée en établissement performant, que l'on appelle cela des soins en établissement, des soins continus ou des centres de soins à long terme. Tous ces centres devraient être fondés sur les principes d'accessibilité, d'abordabilité, de qualité et de comparabilité des soins à la grandeur du Canada.
Ma crainte est que ce secteur de services se propose peut-être d'offrir plus qu'il ne peut en réalité livrer et vise un groupe de personnes plus frêles, qui ne devraient pas s'y trouver. Il s'agit là d'un constat qui devrait servir d'avertissement et de mise en garde.
Nous savons que dans certains cas des établissements de longue durée offrent également des soins de fin de vie. L'Association canadienne des soins palliatifs a dit au comité qu'un établissement de soins de longue durée n'est pas un hospice et qu'il importe de ne pas confondre les deux choses.
Il existe dans ce pays tout un ensemble disparate de services de longue durée et une diversité de frais exigés pour des services et des fournitures, selon la province.
Ce n'est qu'à un âge avancé que la plupart des Canadiens découvrent que ces types de services de santé, auxquels ils croyaient avoir accès du fait de notre régime d'assurance-maladie, ne sont pas offerts globalement dans le système public. Selon la définition de l'assurance-maladie dans notre pays, cela continue de se résumer aux services médicaux et hospitaliers. Je ne dis pas que c'est là une mauvaise chose, mais je tiens à souligner ce fait, qu'ignore souvent le public.
Quand avons-nous tenu un débat dans ce pays et décidé que la maladie cardiaque et le cancer étaient des maladies pour lesquelles il y aurait des services assurés, mais que la démence ou les maladies débilitantes comme la maladie de Parkinson seraient traitées différemment? Nous n'avons pas eu de débat ouvert là-dessus. La personne déclarée atteinte de démence avancée finira probablement par être admise dans un établissement de soins de longue durée, mais les soins n'y seront peut-être que partiellement couverts par le régime public et le patient devra peut-être couvrir des frais de Chambre et de pension. Or, ce ne sera pas le cas si la personne est admise dans un établissement de logement-services où 100 p. 100 des frais sont facturés à l'usager et où le résident paie également des montants additionnels relatifs aux menues dépenses, au ticket modérateur ou à la quote-part.
Je vais maintenant traiter des soins à domicile, car ceux-ci font partie du problème. M. Hollander nous a parlé de l'importance des soins à domicile et des services de soutien communautaires en vue de la réduction de la demande dans les autres volets du continuum de soins de santé et de la réduction des coûts d'ensemble du système de soins de santé.
Les services de soins à domicile englobent une vaste gamme de services de santé qui sont livrés aux clients dans leur lieu de résidence, dont l'évaluation et la gestion de cas, des services de santé professionnels, des soins personnels, l'aide aux tâches ménagères et d'autres services encore. Les soins à domicile offrent de nombreux avantages — les personnes fonctionnent souvent mieux, demeurent plus indépendantes, se sentent normales et apprécient l'intégration sociale que leur procure leur milieu de vie.
L'étendue des soins à domicile offerts en remplacement de soins de longue durée et à titre de maintien/prévention a des incidences majeures sur le secteur des soins de santé de longue durée en établissement. En effet, la prestation adéquate de services de santé à domicile peut réduire considérablement le besoin d'espace en établissement de soins de longue durée. Des chercheurs ont montré que ces aspects particuliers des soins à domicile sont actuellement menacés car les services de substitution des soins de courte durée ont augmenté et ont absorbé la plus grande part des budgets des soins à domicile. Comme les dollars des soins à domicile sont réaffectés aux soins en phase postaiguë, les personnes âgées fragiles et les personnes atteintes de maladie chronique ne reçoivent pas toujours les soins à domicile soutenus et continus dont elles ont besoin ou attendent parfois trop longtemps avant de recevoir de tels soins du fait de cette évolution des usages faits des soins à domicile. Or, en l'absence de services santé à domicile adéquats, l'état de santé de la personne risque de se détériorer, ce qui peut provoquer des hospitalisations ou des admissions hâtives en établissement de soins de longue durée, admissions qui auraient pu être prévenues ou retardées avec un soutien à domicile suffisant.
Dans de nombreuses provinces, les services de soutien communautaires sont inclus comme faisant partie du programme de soins à domicile, tandis que dans d'autres, il s'agit d'une gamme distincte de services et de programmes sociaux et de santé disponibles au sein des collectivités. Ils peuvent être offerts dans toute une gamme de cadres par une combinaison d'organisations publiques, sans but lucratif et privées. Il peut s'agit de programmes de services de répit, de programmes de jour pour adultes, de programmes d'aide aux tâches ménagères, de services de soins personnels, de services de popote roulante, de services de transport à des services de repas et autres — il existe un énorme éventail de services. Tous ces programmes — programmes communautaires et programmes de soins à domicile — peuvent, ensemble, prévenir ou retarder le renvoi dans un établissement de longue durée, valoriser le vieillissement chez soi et réduire la demande de soins actifs. Quel que soit le système élaboré, il nous faut y inclure ce vaste éventail de programmes.
J'aimerais maintenant aborder une question qui est importante pour les décideurs, celle du ticket modérateur. Nous ne parlons jamais de cet élément du système de soins de santé, mais il nous le faut. L'ACSS et ses membres sont d'ardents défenseurs du système de santé publique du Canada. La position de l'ACSS concernant la combinaison publique/privée adéquate dans le financement et la prestation de soins de santé est liée au principe de l'accès aux services de santé fondé sur les besoins en santé et non sur la capacité de payer. C'est une valeur canadienne fondamentale qui ne peut pas être mise en péril. L'ACSS a toujours soutenu une approche fondée sur des preuves en ce qui concerne le moment, le lieu et la façon de financer ou d'offrir des soins privés.
L'ACSS a aussi toujours insisté pour que les services médicalement nécessaires en vertu de la Loi canadienne sur la santé continuent d'être financés par les fonds publics, de même que les services de soins à domicile en remplacement de soins de courte durée. Il s'agit là du palier unique dont nous parlons toujours. Il est efficient et efficace. C'est notre régime de payeur unique. Il nous faut cependant reconnaître qu'il y a place pour le paiement d'un ticket modérateur pour certains services — le service d'aide à domicile pour certains clients, le paiement d'un loyer raisonnable dans les établissements de longue durée et une partie des coûts des médicaments, et je songe ici au programme d'assurance- médicaments onéreux —, à condition que cela ne nuise pas à l'accès.
Il importe qu'il y ait une analyse sociale et un processus équitable en vue de l'établissement des niveaux de ticket modérateur. C'est le point de vue qu'exprimait l'honorable Monique Bégin lors d'une allocution récente à la conférence S.O.S. Medicare 2, à Regina. Il nous faut examiner cela attentivement.
Nous sommes tous au courant des attentes de la génération du baby-boom. Ces personnes vont exiger des services qui répondent à leurs besoins, et il s'agit là de la gamme de services dont je vous entretiens depuis le début de mon exposé. En tant que contribuables de longue date, ces personnes n'apprécieront peut-être pas le fait de devoir payer ces services une nouvelle fois. Cependant, elles appuieront peut-être ces modèles de ticket modérateur à condition que leurs besoins puissent être satisfaits, ou qu'on leur assure qualité et accès et que personne ne se voie privé de l'accès aux services dont il a besoin.
Les décideurs et les planificateurs de politiques doivent dès aujourd'hui prévoir des services de soins continus flexibles et appropriés pour les futures générations d'aînés. Certes, même si les gens vieilliront plus en santé et les dépenses en santé ne devraient pas augmenter aussi rapidement que le nombre des aînés — car, ne l'oubliez pas, la population vieillissante n'est pas en train de faire s'emballer nos coûts —, l'augmentation de la proportion des aînés au Canada signifie qu'il nous faut planifier.
Compteront parmi les options préférées les programmes de répit, de jour et de nuit, les programmes communautaires, les logements en milieu de soutien, les logements-services et une gamme appropriée de services de soins à domicile. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'une génération qui ne souhaite pas attendre pour obtenir des services de soins de courte durée. Il ne faut pas oublier ce volet-là. Tout ce qui pourra réduire le besoin de tels services mérite qu'on y investisse.
Il ne nous faut pas non plus oublier que la pression exercée par les gens du baby-boom se renversera graduellement, et les planificateurs en matière de santé doivent garder en tête l'attrition qui viendra un jour et ne pas créer des systèmes statiques ou surdimensionnés.
Il se pose des défis. Premièrement, il nous faut des options flexibles pour répondre aux besoins. Les familles et les travailleurs d'aujourd'hui ont tendance à être plus mobiles. Les liens familiaux sont souvent maintenus malgré l'éloignement. La structure familiale traditionnelle a changé. Le soutien que les enfants adultes peuvent raisonnablement apporter à leurs parents âgés dépend souvent de la proximité de leurs parents et de leur disponibilité du fait d'obligations professionnelles. Il nous faut donc nous assurer d'offrir des options flexibles et des services appropriés pour les aînés et leurs familles.
Deuxièmement, il nous faut reconnaître que la terminologie et les services offerts dans le pays varient beaucoup d'une région à l'autre. Il nous faut nous concentrer sur la recherche et la cueillette des données appropriées et comprendre les services qui existent. C'est un aspect qui fait l'objet de beaucoup de malentendus.
Troisièmement, il nous faut nous pencher sur l'aspect quote-part et ticket modérateur en matière de soins continus et faire quelque chose pour régler le problème. Nous ne pouvons pas tolérer que dans certaines parties du pays les gens perdent leur maison pour pouvoir payer des services de soins de longue durée ou des programmes de soins à domicile. Il importe de fixer un niveau raisonnable et de recourir à des analyses et à des critères sociaux appropriés.
Quatrièmement, les coûts des médicaments font partie de cet ensemble disparate, et il importe là encore de régler ce problème. Dans certaines provinces, les médicaments sont couverts dans les programmes de soins à domicile, alors que dans d'autres ils ne le sont pas; il en est de même avec les fournitures pour incontinence.
Cinquièmement, il nous faut assurer la réciprocité dans la prestation des services ou la portabilité des services. La portabilité est un principe de la Loi canadienne sur la santé. Cela n'a rien du tout à voir avec le volet soins de longue durée. Si une personne souhaite déménager pour se rapprocher de sa famille, la chose n'est pas possible, car la personne âgée ne peut pas attendre un an pour accéder aux services dont elle a besoin.
En conclusion, il y a plusieurs volets sur lesquels pourrait se concentrer le gouvernement fédéral : une analyse appropriée de la participation financière aux frais dans le secteur des soins continus; la réorganisation du patchwork de services afin qu'il y ait moins de disparités régionales sans, bien sûr, microgérer les systèmes assurés par les provinces; et, peut-être, la reconnaissance du fait que les soins actifs ne sont pas la panacée, que l'on ne peut pas régler les problèmes du système de soins de courte durée sans envisager les soins continus comme constituant un groupe de services.
La présidente : Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à La Légion royale canadienne. Si je comprends bien, monsieur Allard et monsieur MacDonald, vous allez vous partager l'exposé. C'est à vous de décider de la façon dont vous voulez procéder.
Pierre Allard, directeur, Bureau d'entraide, La Légion royale canadienne : Sénateur Carstairs, honorables sénateurs, je tiens, au nom de notre président national, Jack Frost, à féliciter le comité pour le travail qu'il fait pour le compte des aînés. Plusieurs intervenants et études universitaires ont identité un besoin de logements-services pour les aînés. Par exemple, M. Rodriguez a suggéré que le besoin en matière de logements en milieu de soutien devrait augmenter au cours du XXIe siècle, et les statistiques qu'il a citées viennent appuyer cette prédiction.
Qu'est-ce que le logement-services? En termes concis, nous pouvons déclarer que c'est le type de logement qui permet aux gens de maximiser leur autonomie, leur vie privée, leur processus décisionnel, leur dignité et leurs choix personnels. Ce sera peut-être une surprise pour plusieurs de savoir que La Légion royale canadienne est engagée dans le logement-services. En effet, avec environ 150 établissements et plus de 7 500 unités, la Légion est l'un des meilleurs organismes dispensateurs de logements abordables et sûrs pour les anciens combattants et les aînés dans tout le Canada. Permettez que je vous lise une citation qui figure dans le texte que vous avez :
La concentration intense de la Légion royale canadienne sur les besoins de logement locaux peut rendre l'impact national accumulé de ses efforts moins visible que l'activité très en vue des promoteurs de projets pour profit.
Pendant plus de 50 ans, les filiales de la Légion partout au pays ont été la force motrice dans la planification, la construction et l'administration de logements pour anciens combattants et aînés dans les collectivités où les besoins se font le plus sentir. Cet intérêt s'est développé comme une extension naturelle de notre travail communautaire.
Plus récemment, en 1995, nous avons compilé un répertoire national de logements. Quatre années plus tard, nous avons conclu un accord avec Anciens combattants Canada (ACC) pour former un partenariat en vue de répondre aux besoins des anciens combattants et des aînés. À la Légion, les anciens combattants sont notre priorité, mais nous avons découvert que ce qui peut avantager nos anciens combattants peut souvent bénéficier aux aînés. Un bon exemple est le fractionnement du revenu de pension pour les aînés, une excellente initiative.
Suite à cet accord de partenariat avec ACC, nous avons été en mesure, en avril 2000, de doter le Centre d'excellence de logement de la Légion de personnel. Le consultant de la Légion, M. David MacDonald, qui est ici avec moi, est un employé d'ACC. Il est en détachement auprès de la Légion. Nous coordonnons cette activité par l'entremise de notre Comité des anciens combattants, service et aînés, lequel est présidé par le président national de la Légion, M. Jack Frost.
Depuis l'an 2000, le consultant de la Légion a travaillé avec les directions provinciales et filiales de la Légion pour aider dans le développement de logements et pour d'autres questions se rapportant aux biens immobiliers. Le centre de logement assure également la tenue à jour de notre répertoire national de logements de la Légion. Je vais maintenant céder la parole à M. MacDonald.
David MacDonald, consultant, Centre d'excellence de logement de la Légion, La Légion royale canadienne : En plus de ce qu'a déjà mentionné M. Allard, nous fournissons gratuitement des services de consultation pratiques directement aux directions provinciales et filiales de la Légion.
Ces services, comprennent, entre autres, le traitement de questions concernant l'environnement et les changements de zonage; la préparation de demandes de financement pour le développement de projets et de financement de démarrage à l'intention de la SCHL; la préparation de demandes à l'intention de gouvernements municipaux, provinciaux et fédéraux en vue de bénéficier des programmes offerts par ceux-ci; la négociation avec avocats, promoteurs, planificateurs, consultants, évaluateurs et tous les autres intervenants dans le domaine de la construction; des initiatives de planification de projets et leur encadrement, et le travail avec des groupes pour faciliter la planification à tous les stades; et l'examen d'autres questions intéressant l'immobilier, y compris études sur le meilleur usage, négociations de baux, acquisition de terrains, aide dans l'obtention de financement pour des projets, et cetera.
Le centre est intervenu dans la planification et la construction de deux grandes initiatives de logement, les deux complexes ayant ouvert leurs portes en 2007. Le 1er octobre 2001, la Légion a lancé une étude de 24 mois sur la situation des anciens combattants et des aînés en matière de logement. Cette initiative a été financée en vertu d'une subvention pour Initiative sur le secteur bénévole et communautaire d'Héritage Canada. Cette étude a conclu que le plus grand défi auquel sont confrontés les Canadiens âgés de plus de 75 ans est le passage entre une vie autonome dans son domicile et son installation dans un établissement de soins. Nous avons constaté que nombre d'anciens combattants et aînés ne sont pas prêts pour un établissement de soins de longue durée et que beaucoup d'entre eux pourraient demeurer chez eux s'ils bénéficiaient d'un soutien approprié.
L'étude de la Légion parrainée en vertu du programme ISBC a offert certaines recommandations, dont la plupart sont encore pertinentes aujourd'hui, notamment l'instauration d'un programme d'indépendance pour les aînés qui permettrait aux personnes âgées dans le besoin de demeurer chez elles aussi longtemps possible pour éviter le placement en établissement. Cette approche, modelée sur le Programme pour l'autonomie des anciens combattants, dont fait la promotion ACC, permettrait aux aînés de vieillir en place et de retarder la transition plus coûteuse en établissement de soins de longue durée. Nous avons également formulé des recommandations au sujet des programmes de la SCHL et dont je vous entretiendrai un petit peu plus tard.
Un autre projet fort réussi lancé par le Centre d'excellence de logement de la Légion, a été la production d'un guide sur la mise en valeur mobilière. Ce guide générique, pouvant être utilisé par tout promoteur, service de la Légion ou organisation non gouvernementale, a été rendu possible grâce à une contribution financière consentie par ACC. Nous distribuons ce guide gratuitement à toute agence qui s'occupe de logements abordables. Nous en avons remis des copies, en anglais et en français, au greffier, à l'intention des membres du comité.
Quels sont les défis futurs auxquels les gens seront confrontés en vue d'offrir des logements sûrs et abordables aux aînés et aux anciens combattants? Nous appuyant sur notre expérience unique de relations avec les autorités fédérales, provinciales et municipales de partout au pays, nous croyons que la SCHL pourrait jouer un plus grand rôle face à ces préoccupations et défis futurs en matière de logement.
Les programmes de financement de démarrage et de financement d'élaboration de projets de la SCHL sont d'excellents programmes pour les organisations de logements à but non lucratif. La Légion a obtenu de très bons résultats lorsqu'elle a fait des demandes au titre de ces deux programmes. Nous n'avons jamais encore vu refuser une demande préparée par notre bureau, et nous en sommes reconnaissants. Non seulement les ressources financières sont utiles, mais les renseignements requis pour remplir les demandes au titre de ces programmes sont une étape solide dans le processus de diligence raisonnable.
Il est cependant presque impossible pour nos projets sans but lucratif d'être admissibles à l'assurance hypothèque de la SCHL, surtout lorsqu'ils ont été conçus pour être abordables ou présentent une composante logement-services. Nous avons participé à des projets et sommes au courant d'autres projets pour lesquels la participation financière était excellente, mais qui n'ont pas été approuvés pour l'assurance hypothèque de la SCHL du fait que la Société s'inquiète de leur valeur de revente et de leur commercialité en cas de reprise des unités. Celles-ci sont considérées comme étant spécialisées, à la manière d'immeubles qui sont uniques et qui servent des fins précises, comme par exemple les commerces de restauration rapide dont la forme architecturale est leur image de marque. La SCHL estime que le risque est plus grand pour ces unités spécialisées que pour les unités conçues pour le marché général.
Avec une assurance hypothèque de la SCHL, vous pouvez emprunter de l'argent n'importe où. Cependant, sans cette assurance, la plupart des banques à charte n'envisageront même pas de financer ces projets. Étant donné la nécessité que les projets sans but lucratif soient efficients et rentables, ceux qui finissent par être construits réussissent en règle générale très bien. Ils affichent des intervalles entre occupants inférieurs à la moyenne et comptent des listes d'attente solides. Les banques sont en règle générale très désireuses de refinancer ces unités une fois qu'elles ont été construites; elles ne sont tout simplement pas partantes pour offrir le financement de la construction de ces unités pour le marché.
Nous pensons, et c'est ce que montre notre expérience des six ou sept dernières années depuis que notre centre est ouvert, que le programme d'assurance hypothèque de la SCHL ne fonctionne pas vraiment à la manière des autres programmes d'assurance, la société n'étant pas prête à accepter tout risque raisonnable. Par exemple, dans le cas de l'assurance automobile, si le risque évalué est considéré comme supérieur à la norme, alors l'assurance sera consentie, mais la prime sera plus élevée. Dans le cas de l'assurance hypothèque de la SCHL, s'il existe le moindre risque, l'assurance n'est pas disponible. Étant donné que le risque est une réalité inhérente du marché des assurances, notre sentiment est que la SCHL ne fait pas partie du monde des assurances. Nous avons de la difficulté à accéder à son programme, comme c'est le cas de nombreuses initiatives sans but lucratif.
Si l'assurance de la SCHL était plus accessible pour des organismes sans but lucratif, ce serait là un énorme pas en avant. Ce changement à lui seul multiplierait les mises en chantier de logements dans ce marché important, ce qui pourrait satisfaire les besoins d'une population vieillissante comprenant des anciens combattants et des aînés.
Nous avons également parlé de quelques programmes de la SCHL qui réussissent bien et qui sont tout à fait accessibles aux organismes sans but lucratif. Cependant, certains des programmes de la SCHL qui sont, en théorie, des programmes nationaux, ne sont pas toujours disponibles à l'échelle nationale — en tout cas pas dans le même contexte, ni au même degré. Par exemple, bien que le programme de logement fédéral-provincial soit un programme national, il est administré de façon différente selon la région du pays. En Colombie-Britannique, il est administré par l'intermédiaire de la BC Housing, tandis qu'en Ontario, où la responsabilité en matière de logement relève des municipalités, il est administré conjointement par la province et par les 47 municipalités régionales. En Ontario, par exemple, il est possible pour les municipalités de s'abstenir de participer au programme. D'autre part, chaque centre de responsabilité peut établir ses propres critères d'admissibilité. Cela veut dire que, bien que le programme fédéral- provincial d'aide au logement soit considéré comme un programme national, il n'est pas disponible dans la plupart des régions de l'Ontario, par exemple, où les municipalités ont choisi de ne pas y participer.
Notre recommandation serait que la SCHL établisse des lignes directrices en vue d'une stratégie de mise en œuvre nationale, pour veiller à ce que toutes les régions du pays aient un accès équitable aux programmes nationaux de la SCHL, comme par exemple le programme fédéral d'aide au logement.
M. Hollander a parlé de la nécessité de cueillette nationale d'information et d'initiatives nationales. Lorsque sont élaborés des programmes nationaux, il devrait y avoir une stratégie de mise en œuvre nationale pour veiller à ce que toutes les régions du pays aient un accès équitable à ces programmes. Cela permettrait de tenir compte des besoins uniques des différentes régions et provinces. Étant donné la situation économique de certaines régions, il se pourrait qu'il y ait des raisons pour lesquelles les municipalités ou certains secteurs choisissent de ne pas participer, mais il devrait y avoir moyen de veiller à ce que le programme puisse être proposé sous une autre forme afin que les résidents puissent y avoir accès. Si nous allons parler de programmes nationaux, alors ceux-ci doivent être accessibles partout au pays.
Les provinces devraient elles aussi être encouragées à normaliser leurs critères d'admissibilité pour éviter le risque que des fournisseurs nationaux aient à jongler avec 47 critères d'approbation différents, ce qui est en gros ce qui se passe à l'heure actuelle avec l'Ontario dans le cas de la mise en œuvre de ce seul programme dont je viens de vous entretenir.
M. Allard : Il nous faut des programmes nationaux plus flexibles de la part de la SCHL. On nous a dit ce matin que la SCHL recueille des données nationales. Elle devrait également établir une politique qui ait une orientation nationale. Il nous faut embrasser l'idée d'un programme pour l'autonomie des aînés calqué sur le formidable Programme pour l'autonomie des anciens combattants d'Anciens combattants Canada. Voilà qui met fin à notre exposé.
La présidente : Merci. Nous inviterons tout à l'heure les représentants de la SCHL à réagir aux questions que vous avez soulevées ici.
Enfin, je suis heureuse de donner la parole à Margaret Isabel Hall.
Margaret Isabel Hall, professeure adjointe, Faculté de droit, Université de la Colombie-Britannique : J'aimerais aujourd'hui vous entretenir de mon travail passé et courant sur la réglementation des logements en milieu de soutien pour les aînés, travail qui a été parrainé par la SCHL par le passé, et que je poursuis toujours.
L'on œuvre présentement à l'établissement de logements en milieu de soutien pour offrir aux aînés canadiens une solution de logement intermédiaire entre la vie autonomie sans soutien, chez soi, et le milieu hautement réglementé des soins en établissement. J'utilise cette expression « logement en milieu de soutien » pour couvrir toute la gamme des solutions de logement s'inscrivant entre ces deux pôles. Le terme « logement-services » renvoie généralement à des logements en milieu de soutien à l'extrémité supérieure de cette fourchette. Il existe un problème énorme pour ce qui est de la recherche dans ce domaine à cause des différences terminologiques relevées d'un bout à l'autre du pays. J'ai réglé ce problème en établissant tout simplement ma propre terminologie et ma définition de ce qu'est le logement en milieu de soutien et m'y tenant. Il s'agit d'un large parapluie recouvrant diverses combinaisons de services et de types de logements.
L'étude de 2005 portait sur des solutions de rechange à la réglementation de logements en milieu de soutien pour les personnes âgées et les questions devant être traitées dans le cadre de cette réglementation, et à débouché sur la définition de toute une gamme d'options pour les décideurs canadiens. Davantage de détails au sujet de cette étude sont mis en relief dans le document résumant les faits saillants de ma recherche que j'ai fait distribuer.
La tâche pour les organes de réglementation est de faciliter l'offre aux aînés de logements en milieu de soutien qui soient et appropriés et abordables. Il s'agit là d'un aspect clé qui a été identifié par le biais de mes consultations, et il importe que la réglementation ne soit ni trop lourde, reproduisant plus ou moins les soins en établissement, ni trop légère. Pour renvoyer aux commentaires faits plus tôt par Mme Sholzberg-Gray, il importe certainement que des règlements soient établis dans ce domaine. Le logement en milieu de soutien ne devrait pas être considéré comme un domaine non encore exploré et non réglementé par opposition aux établissements de soins. Cet équilibre est très difficile à établir. La réglementation de ce secteur est difficile, et c'est pourquoi les décideurs ici et dans d'autres pays s'y sont butés.
Ma conclusion est que le meilleur moyen d'assurer un équilibre sera de conjuguer diverses approches à la réglementation avec ce que j'appellerais des « initiatives supplémentaires non réglementaires ».
La première de ces options a été un texte législatif exhaustif en matière de logement en milieu de soutien qui s'appliquerait à tous les logements supervisés pour aînés, quel que soit le secteur concerné. Cela couvrirait les volets public, privé à but lucratif et privé sans but lucratif, les logements en milieu de soutien pour aînés étant définis comme des logements avec services destinés aux personnes âgées.
Dans le cadre de mon examen des différentes approches en matière de réglementation adoptées partout au Canada ainsi qu'ailleurs, j'ai constaté que, dans certains endroits, les logements en milieu de soutien pour les aînés fournis par le secteur sans but lucratif sont réglementés différemment de ceux fournis par le secteur à but lucratif. Lorsque je parle d'un texte législatif exhaustif, je parle d'un texte qui n'établirait pas ces genres de distinctions et qui s'appliquerait à toutes les formes de logements en milieu de soutien couvertes par la définition-cadre. Ce texte de loi pourrait imposer des normes minimales pour certains éléments et appliquer ailleurs une approche axée sur la protection du consommateur. Ainsi, les repas pourraient être soumis à des normes imposées par la loi et les coûts à des dispositions axées sur la protection du consommateur, par exemple.
Un des avantages d'une loi complète sur le logement en milieu de soutien serait la clarté relative d'une loi unique pour les fournisseurs, les consommateurs et leurs défenseurs, ainsi que pour les décideurs. La clarté serait précieuse ici, étant donné que l'actuel morcellement de la réglementation du logement en milieu de soutien parmi les différents textes de loi et politiques à l'intérieur des provinces — sans parler des différences entre provinces — crée une confusion considérable quant à la question de savoir quels règlements s'appliquent.
Cette clarté, en plus d'être utile pour les consommateurs, les fournisseurs et les décideurs au sein des provinces, aurait également pour effet de favoriser l'élaboration cohérente et uniforme de règlements entre les provinces et territoires canadiens, autre élément que je considère très important pour deux raisons.
Premièrement, l'uniformité élimine la nécessité de constamment réinventer la roue, car les provinces et territoires peuvent discuter entre eux de leurs expériences et tirer des leçons des erreurs des autres. Dans le cadre de la production de ce rapport, j'ai appris que, dans chaque province, il semblait qu'il se présentait une forme d'initiative entourant le logement en milieu de soutien prise autour de la question épineuse de savoir « Si nous devons avoir cela, comment allons-nous réglementer la chose? ». Il n'y avait cependant presque aucune communication entre les provinces sur ce qu'elles faisaient très exactement. Le problème de nomenclature a été un gros facteur dans tout cela.
Ces processus exigent l'élaboration d'un langage commun relativement au logement en milieu de soutien, travail qui est rendu encore plus difficile lorsque les questions de logement supervisé relèvent, à l'intérieur d'une même province, de textes et de responsables multiples.
Deuxièmement, les Canadiens âgés sont mobiles, et la retraite ou les changements de style de vie qui sont liés à l'âge peuvent les inciter à s'installer plus près de leurs enfants d'âge adulte ou d'autres parents, ou encore dans une région où le climat leur convient mieux.
Les façons actuellement fort divergentes d'aborder la réglementation du logement en milieu de soutien au Canada, avec les divers instruments de réglementation qui existent à l'intérieur des différentes provinces, représentent un défi formidable pour l'aîné qui souhaite obtenir de l'information sur le logement en milieu de soutien et qui envisage, par exemple, de quitter Toronto pour aller s'installer à Victoria. Par ailleurs, le fractionnement des responsabilités en matière de réglementation à l'intérieur des provinces elles-mêmes était tel qu'il était presque impossible pour les consommateurs ou consommateurs potentiels d'obtenir les renseignements qu'ils voulaient et dont ils avaient besoin au sujet de la façon dont le logement en milieu de soutien est réglementé dans leur province.
Le modèle de loi complète était la première de mes options — et il me faut dire que la SCHL a rejeté mon idée que j'appelle cela des « recommandations », estimant que cela était peut-être un peu trop sévère, et c'est pourquoi j'ai choisi de parler plutôt d'» options ». Cette option est celle que j'ai décidé de poursuivre et d'étayer dans le projet auquel j'œuvre présentement pour la SCHL.
Je vais me concentrer sur l'idée d'élaborer une loi complète sur le logement en milieu de soutien, de rédiger une loi type, puis de la faire circuler dans le cadre du processus national de consultation exhaustive, auquel j'espère que nombre d'entre vous participerez afin que je puisse recueillir vos commentaires sur cette approche. Je suis convaincue que les gens auront pour moi beaucoup de conseils et de suggestions sur ce qu'ils aimeraient voir inclus dans une loi de ce genre.
L'une des options extra-réglementaires, dont j'ai également pensé qu'elle pourrait être utile ici, serait l'élaboration d'un régime d'ombudsman des aînés dans chaque province. Chaque province nommerait un protecteur des aînés auquel incomberait la responsabilité des questions de logement des aînés et, peut-être, le mandat d'entendre d'autres préoccupations et d'y répondre. L'objectif serait d'établir un guichet unique facile d'accès auquel on recourrait pour obtenir de l'information, déposer une plainte, obtenir le règlement de différends et ainsi de suite.
Si la chose était économiquement faisable, un réseau de défenseurs des aînés pourrait relever du bureau du protecteur des aînés. Dans le cadre des consultations que j'ai menées auprès d'aînés au sujet de ce projet, l'idée d'un protecteur des aînés et d'un réseau de protecteurs des aînés a été reçue avec enthousiasme.
Je souligne cela car le problème m'a été énergiquement soumis par les aînés avec qui j'ai discuté. Le problème de l'accès à l'information ou de savoir ne serait-ce que par où commencer pour accéder à l'information a été beaucoup mentionné et a été identifié comme étant possiblement le principal problème pour les personnes âgées. Ils ne savent tout simplement par où commencer pour trouver des renseignements sur les options à leur disposition.
La troisième option serait l'élaboration de lignes directrices nationales en matière de pratiques exemplaires. Il s'agirait de créer un groupe de travail national qui serait chargé d'établir des lignes directrices axées sur les pratiques exemplaires. Ici, je me suis appuyée sur l'expérience américaine, et je vais vous en dire quelques mots.
Les Américains sont depuis plus longtemps que nous aux prises avec ce délicat problème qu'est celui de la réglementation du logement en milieu de soutien. Un groupe de travail national a été réuni en 2002,je crois, et chargé de créer des lignes directrices modèles en matière de pratiques exemplaires, car les Américains étaient aux prises avec le problème et constataient qu'ils retournaient sans cesse à leur loi pour la remanier du fait de la difficulté. Nous pourrions peut-être éviter cette étape difficile de démêlement, nous attaquer directement au cœur du problème et créer simplement une base de pratiques exemplaires qui pourrait servir de modèle utile pour les provinces.
La quatrième option serait la création d'un centre d'excellence du logement en milieu de soutien pour les aînés, qui s'inspirerait également de certains des travaux de votre organisation. Il s'appuierait également sur le travail accompli par le groupe de travail national décrit dans l'option trois. Au lieu que le groupe soit simplement démantelé, une fois élaborées les lignes directrices en matière de pratiques exemplaires, le centre national d'excellence pourrait poursuivre le travail entamé par lui.
La cinquième option serait l'établissement d'un système d'agrément non imposé par la loi. Le centre d'excellence élaborerait ce système d'agrément en s'appuyant sur les conseils émanant de consommateurs, de fournisseurs et d'universitaires. Ce centre serait responsable d'administrer l'agrément et de recueillir et de diffuser de l'information au sujet du système d'agrément. Encore une fois, la communication de renseignements aux consommateurs est essentielle au bon fonctionnement du système.
Enfin, la sixième option serait l'établissement d'une base de données centrale dont la facilité d'accès serait indispensable. La création d'une base de données de renseignements centrale accessible par Internet, ou au moyen d'une ligne d'assistance sur le logement des aînés pour ceux qui ne sont pas tout à fait à l'aise avec l'Internet, est essentielle au succès du logement en milieu de soutien comme solution intermédiaire de logement. L'information fournie porterait sur la disponibilité, les coûts et les règles ou conditions de résidence. Un aîné qui souhaite déménager serait en mesure d'obtenir de l'information sur la disponibilité de logements ainsi que sur la façon dont le logement en milieu de soutien est réglementé dans cette province.
En conclusion, la grosse idée qui est ressortie de mon travail, et qui mérite, je pense, d'être soulignée, est le lien entre l'abordabilité et la fourniture d'un nombre adéquat réel d'unités de logements en milieu de soutien abordables, pour maximiser le choix pour les consommateurs et la nécessité d'une moindre réglementation du secteur.
La capacité des consommateurs de voter avec leurs pieds, qui est la théorie qui soutient l'approche de la protection du consommateur par opposition à l'approche axée sur des normes minimales imposées par la loi — comme un établissement de soins où un plus grand nombre d'éléments et de services et de caractéristiques des installations sont explicités dans la loi —, dépend dans une large mesure de la capacité du consommateur d'exercer des choix réels.
Si le modèle du choix du consommateur et de la protection du consommateur est poursuivi dans ce secteur pour éviter de reproduire les normes législatives que l'on trouve du côté des établissements de soins, il est absolument impératif que des choix réels soient offerts aux consommateurs, afin qu'ils puissent faire la distinction entre les différentes unités de logement sur la base de ce qui leur convient, au lieu de prendre tout simplement ce qu'ils peuvent trouver et se permettre de payer.
La présidente : Merci. Avant de donner la parole aux autres pour des questions, j'aimerais savoir si M. Rodriguez aurait quelques commentaires à faire en réaction aux déclarations faites par les porte-parole de la Légion royale canadienne.
M. Rodriguez : Leurs déclarations s'inscrivent à l'extérieur de la portée de mon travail. Peut-être que Mme Darke aimerait y réagir.
Debra Darke, directrice, Développement des collectivités, Société canadienne d'hypothèques et de logement : Je vais m'efforcer de ne pas aller trop dans le détail, mais j'aimerais traiter de deux éléments. Le premier est le commentaire de M. MacDonald au sujet du fait que la SCHL ne soit pas vraiment partie prenante dans le secteur des assurances, étant donné que nous ne sommes pas prêts à assumer des risques. J'aimerais également vous entretenir brièvement des genres d'arrangements que nous avons présentement en place avec les provinces et territoires et qui, comme l'a à très juste titre souligné M. MacDonald, sont largement responsables de l'exécution de la gamme de programmes qui sont disponibles à l'échelle du pays.
Pour traiter en premier lieu de la question de l'assurance hypothèque, nous sommes actifs dans l'offre d'assurance hypothécaire. Comme nombre d'entre vous le savent peut-être, la SCHL exploite son volet assurances sur une base commerciale. Ce faisant, il nous revient d'évaluer le risque et de facturer sur la base de cette évaluation. Lorsque nous souscrivons des prêts, nous examinons la viabilité du projet et évaluons le risque concerné, et notre prime reflétera notre évaluation du risque du projet. De façon générale, plus le coefficient du prêt en fonction de la valeur est élevé, plus la prime d'assurance sur le prêt hypothécaire sera élevée. Nous avons constaté que le coefficient du prêt en fonction de la valeur est une bonne mesure du risque.
Je ne suis pas très au courant des obstacles ou défis spécifiques qui ont été vécus dans le cadre de certains des projets de la Légion et que M. MacDonald a mentionnés. Cependant, à la SCHL, nous nous ferions un plaisir de rencontrer M. MacDonald, M. Allard ou les artisans de ces projets afin d'essayer de mieux comprendre ces derniers et les défis en ce qui concerne l'obtention de financement hypothécaire.
En 2003, la SCHL a assorti nos paramètres habituels en matière d'assurance hypothécaire d'un certain nombre d'assouplissements. Ces assouplissements ont été consentis dans le but précis de favoriser la construction de nouvelles unités de logements abordables. Ces assouplissements ne sont pas disponibles pour chaque projet, mais si un projet répond à nos critères d'abordabilité, nous sommes prêts à les consentir. Il y a toute une gamme d'assouplissements qui sont offerts : nous augmentons le coefficient du prêt en fonction de la valeur que nous sommes prêts à assurer, par exemple. Cela peut être très utile pour les promoteurs de logements abordables, car cela réduit les exigences en matière de capitaux propres pour eux. Nous avons également réduit — et dans certains cas nous avons même consenti une ristourne complète — la prime d'assurance hypothécaire payable. Nous avons également divers assouplissements concernant les taux de couverture des charges financières et d'autres aspects techniques de l'assurance hypothécaire que je ne vais pas aborder ici.
Encore une fois, nous avons partout au pays des employés qui connaissent ces assouplissements et nous nous ferons un plaisir de discuter avec la Légion et d'autres pour les expliquer et voir en quoi ils pourraient peut-être s'appliquer à leurs projets.
Je pourrais peut-être dire quelques mots maintenant au sujet de nos programmes et de la façon dont nous travaillons avec les provinces et territoires.
Il existe à l'heure actuelle toute une gamme de programmes financés par le gouvernement fédéral et qui sont disponibles à l'échelle du pays. Je pense que Doug Stewart s'est entretenu avec le comité il y a environ un an et a expliqué dans le menu détail les différents véhicules grâce auxquels le gouvernement fédéral offre de l'aide au logement.
Je ne vais pas repasser tout cela revue, mais je peux tenter de répondre à vos questions. La plupart des programmes que nous offrons, et il y en a beaucoup, sont livrées par l'intermédiaire des provinces et territoires, et nous faisons cela dans le contexte de certaines ententes multilatérales et bilatérales de haut niveau.
L'Initiative en matière de logement abordable, ou ILA, est un bon exemple. Il s'agit d'une entente multilatérale globale que la SCHL, au nom du gouvernement fédéral, a signée avec toutes les provinces et les territoires, et il y a des accords spécifiques en place avec chaque province et chaque territoire. Ce sont l'entente multilatérale et les ententes bilatérales qui esquissent les paramètres d'ensemble — les objectifs supérieurs, si vous voulez — pour l'investissement. Dans le cas de l'ILA, l'investissement est jumelé par les provinces et les territoires. En conséquence, pendant la durée de vie de cette initiative, le gouvernement fédéral contribuera 1 milliard de dollars, et les provinces et territoires une somme équivalente.
La conception et l'exécution des programmes reviennent aux provinces et territoires dans le contexte des ententes que nous avons signées avec eux. Ces ententes englobent également, bien sûr, un certain nombre d'exigences en matière de comptabilité et de reddition de comptes.
Comme l'a souligné M. MacDonald, les provinces et territoires ont fait des choix différents quant à la façon dont ils veulent livrer ces programmes. Dans certains cas, ils ont choisi de livrer les programmes par le biais de gestionnaires de services municipaux, et M. MacDonald a cité l'exemple de l'Ontario. Il s'agit cependant de programmes nationaux, et il est attendu que cet investissement national soit disponible partout au pays. C'est aux provinces et territoires qu'il incombe de veiller à ce que ce soit bel et bien le cas.
Comme je l'ai dit, je ne vais pas aller plus dans le détail là-dessus maintenant, mais je m'efforcerai certainement de répondre à toutes vos questions.
La présidente : Je ne voudrais pas m'éterniser là-dessus, mais il me faut vous dire que la Légion royale canadienne n'est pas le seul intervenant qui ait soulevé cette question avec nous.
Il semble qu'il y ait une perception, fondée ou non, selon laquelle les organismes à but non lucratif qui souhaiteraient construire ce type de logements-services ne parviennent pas à obtenir de financement auprès de la SCHL.
J'aimerais savoir — pas aujourd'hui, mais d'une autre façon — ce que pourrait faire le gouvernement, si la chose est possible, pour que ce financement soit davantage accessible? Y a-t-il une garantie que le gouvernement fédéral pourrait donner de manière à ce que ce type d'assurance soit plus facilement disponible? Comme je l'ai dit, je ne m'attends pas à ce que vous me fournissiez une réponse tout de suite, mais vous pourriez peut-être nous revenir là-dessus et nous dire si la chose est possible?
Mme Darke : Encore une fois, il y a deux éléments qui interviennent ici.
En ce qui concerne l'assurance hypothécaire, si nous pouvions comprendre les préoccupations et les obstacles qu'ont vécu ces groupes, cela nous serait très utile.
En 2003, comme je le disais, nous avons introduit un certain nombre d'assouplissements car différents groupes qui construisaient des logements abordables étaient entrés en contact avec nous. Ces groupes étaient confrontés à des difficultés sur différents fronts, et si nous avons introduit ces assouplissements, c'était pour leur venir en aide sur ce plan.
Pour ce qui est des programmes de subventionnement, ceux-ci, comme je le disais, sont pour la plupart livrés directement par les provinces et territoires.
Dans ces cas, il se peut que les groupes disent qu'ils n'ont pas pu ou qu'ils ne peuvent pas accéder à ces fonds. Il est difficile de savoir pourquoi. Je sais cependant que les intervenants sont très nombreux à vouloir accéder à l'aide qui est disponible. Les provinces et territoires font de leur mieux pour identifier les projets qu'ils seront en mesure d'appuyer. Cependant, dans la mesure où l'intérêt ou la demande de fonds l'emporte sur l'argent disponible, c'est peut-être cela qui détermine si un groupe pourra ou non accéder au financement.
Le sénateur Cordy : Vous avez annoncé la prolongation d'un certain nombre de programmes de rénovation de la SCHL, et dont Sharon Sholzberg-Gray a fait état dans son exposé. Il s'agirait du Programme d'aide à la remise en état des logements, ou PAREL, du Programme de réparations d'urgence, ou PRU, et du programme Aînés adaptés : Aînés autonomes, ou AAAA. Pourriez-vous nous exposer la situation concernant ces programmes et leur prolongation et nous dire si des délais ont été fixés ou si cela est fonction du nombre de personnes qui vont vouloir en bénéficier?
Mme Darke : Vous parlez de ce que nous appelons la suite des programmes de rénovation, et cela englobe le PAREL, que les gens sont nombreux à connaître. Vous avez également fait mention de l'AAAA, du PRU et de quelques autres.
Ces programmes ont été prolongés de deux ans à cette époque l'an dernier. Le financement pour ces programmes sera en place jusqu'en mars 2009. La SCHL va, en 2008, demander au gouvernement quelle orientation adopter quant à l'avenir de ces programmes.
Le sénateur Cordy : Feriez-vous une recommandation au gouvernement quant à savoir si ces programmes devraient ou non être maintenus?
Mme Darke : Oui.
Le sénateur Cordy : Nous avons entendu plusieurs témoins parler de la communication : comment les aînés prennent-ils connaissance de l'existence des programmes en place? C'est là une chose que nous avons entendue dans le contexte non seulement du logement mais de quantité de programmes qu'offre le gouvernement.
Comment s'y prend-on pour informer les gens, dans ce cas-ci les aînés, de ce à quoi ils peuvent avoir droit? Le gouvernement fédéral est tout un dédale, et je sais, en ma qualité de sénateur, que c'est tout un défi que de chercher des réponses aux questions des gens au sujet des programmes qui sont disponibles.
Les renseignements doivent filtrer jusqu'aux gouvernements provinciaux, aux municipalités et aux groupes d'aînés, et un intervenant a parlé d'un protecteur des aînés. Il intervient aujourd'hui quantité de facettes lorsqu'on se penche sur les soins à assurer aux aînés. C'est tout un défi pour une personne âgée de prendre le téléphone ou de s'asseoir devant son ordinateur pour essayer de déterminer à quel ministère s'adresser.
Comment vous y prenez-vous pour livrer vos programmes? Pourriez-vous nous parler un petit peu du rôle du protecteur?
Je pense que la Légion fait un assez bon travail de réseautage au niveau communautaire. Comment vous y prenez- vous? Comment faites-vous pour communiquer?
M. Allard : Il importerait de passer en revue plusieurs initiatives, dont une qui a été lancée en Ontario, et grâce à laquelle il existe un portail unique pour accéder aux renseignements sur les programmes municipaux, fédéraux et provinciaux. Je pense que c'est à Brockville que l'essai a été mené. J'ignore quel est le statut de ce programme à l'heure actuelle, mais c'est une excellente façon de communiquer.
En ce qui concerne l'idée d'un protecteur, nous tentons également de déterminer si nous aimerions préconiser un protecteur des aînés, voire même une charte des droits pour les aînés. Il existe, là encore, un autre défi, en ce que nombre des règlements concernant les soins à assurer aux aînés sont de nature provinciale. Comment envisagez une politique nationale qui puisse rejoindre tous les aînés de partout au pays? Je suis certain que vous êtes confrontés au même défi.
Cela étant dit, la solution en matière de protecteur serait peut-être d'avoir un bureau fédéral de protecteur, doté d'un mandat prescrit par la loi, et qui aurait sous lui plusieurs protecteurs relevant de lui, à un palier secondaire, et qui seraient responsables de certains programmes, comme par exemple les anciens combattants, les Forces canadiennes, les contribuables, les aînés, et cetera.
En chapeautant cette structure d'un mandat explicité dans la loi, l'ombudsman ou le bureau de l'ombudsman disposerait de plus grands pouvoirs pour servir ses fins.
M. MacDonald : Mon bureau au Centre d'excellence de logement de la Légion s'efforce de coordonner ces renseignements et de les rassembler, de manière à ce que, dans mes relations avec les filiales de tout le pays et les administrations, je puisse leur offrir un tout qui tienne compte de tous les paramètres et ainsi de suite.
Cela est très difficile pour moi, et c'est ce que je fais. Je vais en Ontario, par exemple, et j'y constate 47 jeux de règlements différents. Il me faut surveiller de très près de quel côté d'une frontière municipale je me trouve, car les renseignements ne seront pas forcément les mêmes de part et d'autre. Ce sont ces situations qui rendent les choses difficiles. Parfois, lorsque je me rends dans une province, il m'est très difficile de savoir ne serait-ce que quel ministère dans la province est responsable du programme. Puis, lorsque j'apprends quel ministère est responsable, il est très difficile de savoir quelles personnes sont responsables du programme.
C'est là quelque chose que je vis au quotidien, alors je peux comprendre la frustration des gens qui tentent à l'occasion d'obtenir des renseignements à ce niveau. Ce doit être très difficile pour eux, car c'est difficile pour moi.
Mme Hall : Mon idée en ce qui concerne un ombudsman serait d'avoir un protecteur des aînés au niveau provincial. Cela se fonderait en partie sur le modèle américain. Je pense que presque tous les États américains ont un protecteur des aînés; certains s'occupent davantage de logement et d'autres ont un mandat plus vaste qui les amène à fournir des renseignements sur quantité de choses. Tous les bureaux sont implantés au niveau de l'État mais bénéficient de financement fédéral. Voilà quel modèle j'avais en tête.
Au fil de mes consultations très intéressantes auprès des aînés, et qui m'ont beaucoup appris, j'ai été de plus en plus convaincue que cet intervenant, le protecteur, devrait avoir pour mandat plus vaste de traiter de toute la panoplie de questions avec lesquelles sont aux prises les aînés. Ceux-ci ne savent peut-être même pas comment franchir ce premier pas en caractérisant la question — déterminant s'il s'agit d'une question de santé, d'une question de logement ou d'une question d'ordre financier —, sans parler de trouver la personne qu'il faut pour leur venir en aide.
Cette idée de guichet unique et d'intervenant et de bureau de prestige, facilement identifiable comme étant l'endroit où aller avec un problème, me semble tout simplement essentielle ici, et ce pour toute une gamme de questions.
La présidente : Madame Darke aimeriez-vous réagir?
Mme Darke : Oui, je savais que cela allait me revenir.
Je vais tenter de répondre à votre question dans deux contextes. Le premier concerne la promotion des programmes. Vous avez parlé du défi de la communication de la disponibilité des programmes aux aînés. Le deuxième contexte concerne davantage ce dont mes pairs ont parlé : comment traiter des demandes et comment orienter les gens vers la source d'information appropriée. Ces choses sont de nature quelque peu différente.
Je vais commencer avec la question de la promotion. La Société canadienne d'hypothèques et de logement livre directement les programmes de rénovation dans certaines provinces et certains territoires, mais ce n'est pas le cas partout; dans ces endroits où c'est notre responsabilité de promouvoir la disponibilité des programmes auprès des aînés et d'autres pouvant vouloir en bénéficier, c'est nous qui nous en chargeons. Là où c'est la province ou le territoire qui assure l'exécution, la promotion des programmes relève bien sûr d'eux.
Dans le cas des aînés, nous avons, au fil du temps, élaboré un certain nombre d'approches. Vous avez souligné à très juste titre que cela peut être tout un défi. Nous avons constaté que ce qui fonctionne le mieux c'est essayer de veiller à ce que toute une gamme d'intervenants différents soient au courant de la disponibilité des programmes. Les professionnels des soins de santé sont un auditoire qui reçoit souvent des demandes de la part d'aînés au sujet des genres d'aide pouvant être à leur portée. Il s'agit là d'un groupe que nous nous efforçons de sensibiliser à nos programmes, et je citerais à titre d'exemple le programme Aînés adaptés : Aînés autonomes. Les familles et les amis sont encore d'autres groupes qui exercent une influence et auprès desquels les aînés peuvent rechercher conseils et soutien. Nous nous efforçons de les cibler avec certains de nos efforts de promotion, puis il y a les personnes âgées elles- mêmes.
Nous employons diverses méthodes. Nous faisons passer des annonces dans les journaux et quotidiens dont nous pensons que les aînés les regardent; nous préparons des feuillets d'information et de la documentation, et nous efforçons de veiller à ce qu'ils soient disponibles dans les lieux fréquentés par les aînés; et nous entreprenons de temps à autre des études de marché dans le but de déterminer ce qui fonctionne le mieux pour rejoindre cet auditoire particulier. Il existe donc tout un éventail d'approches différentes.
En ce qui concerne le suivi aux demandes, comme je l'ai dit, il intervient là un ensemble d'éléments légèrement différents. Ici encore, nous nous efforçons de suivre plusieurs approches. Par exemple, nous travaillons avec et par l'intermédiaire de Service Canada. Service Canada produit un certain nombre de guides et de résumés des programmes disponibles. Il a, par le passé, publié des guides résumant les programmes à la disposition des aînés, je pense. Nous nous assurons toujours que nos programmes y figurent. Service Canada a un numéro 1-800 O-Canada, et nous fournissons donc un texte, si vous voulez, aux opérateurs. Ainsi, si on les interroge au sujet de différents programmes, ils savent où renvoyer les gens.
La SCHL a elle aussi un no 1-800. Nous obtenons des demandes de toute une gamme de groupes, dont des aînés de partout au pays. Nos propres employés qui assurent ce service de no 1-800 ont eux aussi un script et savent où envoyer les gens. Si la personne se renseigne au sujet du programme de rénovation et qu'elle habite une province où nous livrons ce dernier, alors nous la renvoyons à la personne-contact pertinente à la SCHL. Si elle se renseigne au sujet de l'ILA ou du programme de rénovation dans une province ou un territoire qui en assure l'exécution, alors on lui fournira là encore ces renseignements, et on sera en mesure de renvoyer l'intéressé à l'organisation appropriée.
Nous avons, partout au pays, des employés du Centre de logements abordables de la SCHL. Ces personnes sont très au courant des différents programmes, produits et services de la SCHL ainsi de ce que la province ou le territoire en question a à offrir. Il arrive souvent que nos employés reçoivent des appels et des demandes et ils sont en mesure de renvoyer le demandeur à la personne-ressource appropriée.
Le sénateur Cordy : Monsieur Rodriguez, je sais que vous œuvrez dans le domaine de la politique et de la recherche et vous avez parlé d'un des exemples de votre planification communautaire, l'îlogramme. S'agit-il simplement de choses que vous avez faites ou bien s'agit-il d'initiatives mises en œuvre par la SCHL?
M. Rodriguez : La SCHL a fait un travail de recherche considérable dans ce domaine pour l'ensemble de la population canadienne. Nous nous sommes particulièrement concentrés sur le modèle de l'îlogramme pour vous donner un exemple de la façon dont ces options pourraient fonctionner pour les aînés.
La SCHL a travaillé avec plusieurs municipalités, et le graphique que vous avez dans la documentation que nous vous avons fournie donne l'un des exemples qui a été utilisé par une municipalité canadienne. Il y a à l'heure actuelle trois ou quatre municipalités qui sont en train de poursuivre cette idée. Cela a demandé un effort énorme, mais nous progressons très bien, et nous espérons que la chose va en bout de ligne déboucher.
Le sénateur Cordy : S'agit-il de modèles qui sont en train d'être mis en œuvre?
M. Rodriguez : Oui.
Le sénateur Cordy : Où les met-on en œuvre?
M. Rodriguez : J'oublie le nom de la municipalité au nord de Mississauga, mais nous pourrons vous fournir les renseignements quant à la façon dont nous avons fait la promotion de ce modèle auprès des municipalités. C'est là quelque chose que nous pourrions faire pour vous.
Le sénateur Keon : Merci beaucoup. C'est un sujet tout à fait fascinant. Il est très intéressant que Mme Sholzberg- Gray soulève, comme c'est son habitude, l'interface entre les secteurs public et privé en matière de soins de santé.
Il est intéressant de voir, lorsqu'on parcourt les journaux, qu'on y dit que si une personne est suffisamment riche dans sa vieillesse, alors elle peut acheter tout ce qu'elle veut. Elle peut s'installer dans un de ces projets immobiliers de luxe, et se déplacer d'un étage à l'autre en attendant que ses orteils se recroquevillent, n'est-ce pas? Tout est fourni.
Nous ne devrions pas rejeter cela ni être sarcastiques en la matière, car cela témoigne du génie du secteur privé. C'est beaucoup d'argent, mais cela en dit long sur le génie du secteur privé. Celui-ci s'élève tout simplement au-dessus de la grande mosaïque bureaucratique canadienne et construit quelque chose comme cela et cela tourne au bout d'un an.
Le vrai défi — et M. MacDonald en a très efficacement fait état — ce sont les 47 municipalités de l'Ontario. Il semble que la même chose arrive avec chaque étude à connotation sociale que nous entreprenons au Sénat. Nous nous affrontons à une bureaucratie si suffocante que cela nous donne presque envie de ramasser nos cliques et nos claques et de rentrer chez nous.
Cette question, pour moi, est sans doute l'une des plus complexes qui soient. Il me semble — et j'aimerais que vous tous répondiez — que toute cette question des soins aux aînés, que ce soit chez eux, dans un établissement communautaire ou dans une communauté spéciale que l'on construirait, doit être simplifiée. Il doit exister une douzaine d'options ou moins. Si des gens comme vous pouviez examiner — comme l'a dit Mme Hall — quelques options, vous pourriez ensuite essayer de résoudre ce dilemme au moyen de ces options.
Le sénateur Carstairs devra cerner certaines de ces options avant que ne sorte notre rapport final, mais j'aimerais bien que vous réagissiez les uns après les autres. Parcourez simplement quelles options vous pourriez envisager. Oubliez un instant que la chose pourrait ne pas du tout être abordable. Parlons simplement de ce qui existe, puis quelqu'un pourra aiguiser son crayon et en arriver à quelque chose d'abordable.
Comment pouvons-nous nous occuper de nos aînés sur le plan du logement?
M. Hollander : Je reprendrais en gros certains des points que j'ai soulevés dans ma déclaration.
Nous avons, il y a quelques années, effectué une étude des systèmes de prestation de services à l'échelle du pays destinées aux personnes ayant des besoins de soins continus, et avons constaté une ou deux choses qui étaient plutôt intéressantes. Nous avons relevé le fait que ces personnes avaient clairement besoin de soins de façon continue, et c'était donc là un élément commun. Nous avons appris, en fait, que les services utilisés étaient eux aussi très semblables, et la réaction était donc semblable.
Nous avons relevé exactement ce que vous avez évoqué, soit qu'il y a un décalage au niveau des services ainsi que des politiques différentes. Dans la mesure où les différentes composantes des services qui sont appropriés pour les aînés sont perçues comme étant distinctes, nous continuerons d'avoir les genres de préoccupations et de problèmes qui ont été évoqués du fait des questions d'admissibilité. Il peut y avoir divergence et il peut y avoir des questions de participation financière différente, par exemple.
Le point de vue que je m'efforce de défendre est que le tout peut parfois être plus grand ou plus efficient que la somme des parties, s'il y a un mandat large prévoyant des responsabilités administratives et financières pour toute une gamme de services destinés aux aînés. Nous ne pouvons pas tout couvrir. Il nous faut établir les liens appropriés avec les hôpitaux, les médecins de premier recours et le secteur du logement.
Cependant, nous pouvons avoir un régime de santé avec une large base communautaire et une vaste gamme de services qui soient également intégrés horizontalement et verticalement; en d'autres termes, le système doit englober les services communautaires, les établissements de soins à long terme et peut-être certains services spécialisés et centres gériatriques. Nous avons déjà eu au Canada de tels systèmes, et ils ont assez bien fonctionné.
Ce faisant, vous pouvez assurer des soins plus harmonisés du fait qu'ils s'inscrivent tous dans le même système. Si une personne a besoin d'un centre de garde de jour pour adultes, d'un service de soutien à domicile ou d'un service infirmier, alors tout cela serait géré par le biais d'un processus de gestion de cas ou de coordination de soins. De la même façon, si un aîné doit se rendre de sa communauté à un hôpital puis à un établissement de soins de longue durée pour retourner à l'hôpital et ainsi de suite, ce sont là des événements difficiles et importants dans la vie de la personne âgée, mais ils peuvent être rendus plus faciles avec une coordination adéquate des soins.
Si nous avons un vaste système assorti d'une bonne coordination des soins, nous n'allons pas forcément régler tous ces problèmes, mais notre expérience nous dit certainement que ceux-ci peuvent être sensiblement amoindris. Par ailleurs, du fait d'être dotés d'un système plus vaste, nous pourrons opérer des choix politiques et financiers tels que nous pourrons en définitive augmenter les économies.
Par exemple, au début des années 1980, nous avons vécu en Colombie-Britannique une grave récession et les revenus gouvernementaux n'étaient tout simplement pas là. Une fois la situation améliorée, nous avons élaboré un modèle de planification et de distribution des ressources. L'important ici est que ce que nous avons fait, par nécessité ou par choix, a été de freiner la construction de lits et de réinvestir dans la collectivité. Sur une base proportionnelle, nous avons pu nous occuper du même nombre de personnes au milieu des années 1980 qu'au milieu des années 1990, mais nous l'avons fait de manière plus efficace car un plus grand nombre d'entre elles se faisaient soigner à la maison à moindre coût.
Il semble que ce soit là quelque chose que nous ayons abandonné au Canada, pour diverses raisons. Malheureusement, j'ai une certaine expérience de ce système en Colombie-Britannique, et je connais des systèmes semblables ailleurs au Canada. Il y avait beaucoup de ressemblances entre ces régimes à la fin des années 1980 et au début des années 1990 dans l'ouest du Canada.
L'une de mes façons de réfléchir à la situation est de déterminer quelle population nous voulons desservir, que ce soit les aînés ou les personnes ayant des déficiences. Quelle est la gamme de problèmes auxquels ces personnes se trouvent confrontées? S'agit-il de problèmes de santé, de problèmes de services sociaux? En gros, quel est le problème, si vous voulez? De quoi ces personnes ont-elles besoin sur le plan soins? Puis il s'agit d'élaborer un système qui fournisse une réponse à tout cela.
Mon approche serait de déterminer si nous pourrions assurer de meilleurs soins et une meilleure efficience au sein du système avec certains de ces modèles plus intégrés ou en permettant aux gens d'en discuter plus en profondeur.
Toute la notion de ces modèles de soins intégrés ne semble pas figurer à l'heure actuelle au programme politique, et une partie de ma déclaration visait à dire que ce devrait peut-être le cas.
Mme Sholzberg-Gray : Premièrement, je suis d'accord avec M. Hollander sur nombre des points qu'il a mis de l'avant. J'aimerais revenir sur les premières remarques du Dr Keon.
La magie des établissements du secteur privé auprès desquels les personnes fortunées peuvent acheter des services est un modèle intéressant, mais vous avez dit, à juste titre, que ce n'est qu'un faible pourcentage des gens qui peuvent en bénéficier. Le comité s'efforce ici de servir les besoins de la très grande majorité des gens qui n'ont pas les moyens de se payer ces services. Bien que cela puisse sembler magique, ce n'est pas si magique que cela, car les gens ne disposent pas des moyens requis.
Voyons ce que nous pouvons nous permettre financièrement comme pays et de quelle manière nous pourrions peut- être travailler ensemble pour réaliser ces choses. Certes, des approches intégrées pour tout le volet soins continus est une piste. Je songe ici au rôle potentiel du gouvernement fédéral.
Jusqu'ici, le gouvernement fédéral, exception faite de son travail en matière de logement par le biais de la SCHL, est vraiment resté à l'écart des soins continus. N'oubliez pas que la Loi canadienne sur la santé est axée sur les soins actifs, mais nous connaissons les liens qui existent, et il n'est nul besoin pour moi de les répéter.
Voilà pourquoi notre association fait activement la promotion d'un engagement par le gouvernement fédéral dans ce domaine des soins continus. Cela est difficile à une époque où les gens essaient de retreindre l'utilisation future du pouvoir de dépenser. Tant que ce pas n'aura pas été franchi, nous ne pourrons pas installer comme il se doit les supports requis.
Voilà pourquoi nous avons recommandé une contribution fédérale à commencer, par exemple, avec 1 milliard de dollars par an pour un programme de soins à domicile, communautaires et à long terme, qui serait assorti d'objectifs pancanadiens. Nous ne voudrions pas microgérer ce que font les provinces, mais les objectifs devraient englober des approches intégrées en matière de soins continus et une reconnaissance que certains éléments de ce secteur des soins continus sont des services de santé. Les services de santé doivent faire partie du financement universel car ils font partie de notre système de payeur unique. Un certain nombre d'entre eux sont des services sociaux, qui peuvent s'inscrire dans des régimes de contribution financière ou d'analyse sociale quant à ceux qui devraient en bénéficier.
Par exemple, il n'est pas possible pour nous, en tant que pays — même si ce serait formidable — de payer pour tous les services d'entretien ménager et de déneigement de tout le monde, ce qui améliorerait l'état de santé de tout ce monde, tout comme nous ne pouvons pas acheter pour tout le monde dans ce pays de la nourriture, ce qui, là aussi, améliorerait l'état de santé de tout le monde. Il nous faut avoir, dans le cadre de cette loi, une analyse sociale ainsi que sanitaire, ce qui constitue une carotte en vue de la participation des provinces.
Au lieu de microgérer ce nouveau programme de soins continus, nous devrions dire que nous voulons atteindre les objectifs que voici : intégration, reconnaissance des services sociaux et tout un éventail de services offerts par un guichet unique.
Le gouvernement fédéral devra s'y engager en recourant à l'Entente-cadre sur l'union sociale, en soulignant que six provinces, qui ne représentent pas forcément la majorité de la population, suffisent pour que le programme aille de l'avant. Il peut y avoir négociations et discussions. Encore une fois, il nous faut reconnaître que chaque province a ses propres besoins et souligner les objectifs généraux. L'idée d'objectifs pancanadiens n'est pas une mauvaise approche, avec une certaine reddition de comptes en vue de réaliser ces objectifs, sans expliciter comment. Nous pourrions alors avoir une gamme de programmes dont pourraient bénéficier certains, par suite d'une analyse sociale, et dont tout le monde bénéficierait par suite d'une analyse sanitaire. Voilà l'une de nos solutions.
Notre association appuie fermement la Loi canadienne sur la santé. Nous avons entendu de nombreux intervenants proposer un investissement massif dans les soins continus en disant : « Inscrivons le tout dans la Loi canadienne sur la santé ». Nous, nous disons : « Ne faisons pas cela ». Veillons à ce qu'il y ait une approche distincte qui reconnaisse la différence entre services sociaux et services de santé et qui tente d'utiliser des ressources minimales pour atteindre cet état de santé meilleur pour le plus grand nombre possible de personnes.
Franchement, dans la plupart des provinces du pays, il existe des approches régionales en matière d'organisation. La plupart des provinces regroupent services de santé et services sociaux, alors ce n'est pas impossible à réaliser. Il existe cette infrastructure régionale.
Il faudra, pour offrir un accès à des services plus ou moins comparables à tous les Canadiens, que le gouvernement fédéral intervienne. Certaines provinces ne voudront pas d'une approche directive. Elles diront : « Donnez-nous simplement l'argent, mais ne nous dites pas quoi en faire ». Cependant, si nous livrons simplement des objectifs de programme généraux, il se pourrait que les provinces y adhèrent.
Vous constaterez que l'Accord des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé de 2004 renferme un programme de soins actifs à domicile. Une raison pour laquelle cela n'est pas plus large est que, sauf erreur de ma part, le gouvernement fédéral a insisté pour que ce soit une couverture au premier dollar, du fait qu'il s'agisse d'une solution de remplacement aux soins de courte durée. Cependant, si nous ne parlons que couverture, nous n'irons pas au-delà des services de soutien à domicile qui permettent aux gens de vieillir sur place. Voilà pourquoi ce débat doit changer.
C'est la raison pour laquelle nous avons ce type de proposition. Nous proposons en vérité que le fédéral dépense davantage d'argent. Nous espérons que, du fait qu'il y consacre de l'argent, les choses soient mieux distribuées au fil du temps. Si nous nous occupons des supports, le système de soins de courte durée sera plus gérable. Nous croyons que ce sera la voie de l'avenir.
Il n'existe dans le monde presque aucun régime de soins de santé public qui n'englobe pas, de diverses façons, services non actifs ainsi que médicaments. Le moment est venu d'aller de l'avant, d'assurer une approche intégrée aux soins continus à l'échelle du pays.
J'espère que je m'exprime clairement en la matière; nous avons abondamment écrit sur le sujet. Nous ne voulons pas microgérer; nous voulons être en mesure de réaliser dans ce pays des objectifs communs.
La présidente : Avant de passer à autre chose et de donner la parole au sénateur Stratton, vous avez souligné le fait que l'Accord des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé de 2004 comportait une composante soins à domicile, tout comme son prédécesseur, l'Accord des premiers ministres sur le renouvellement des soins de santé de 2003. D'après ce que je sais, très peu a été fait autrement que de s'occuper de ces lits pour soins actifs qu'on voulait libérer. En d'autres termes, si l'on pouvait sortir le patient opéré du service de chirurgie, pour le renvoyer chez lui en lui assurant certains soins à domicile, alors c'était une bonne utilisation du service. Ce que je comprends de vos propos à tous les deux, madame Sholzberg-Gray, et monsieur Hollander, est que ce n'est là qu'une toute petite composante des besoins en matière de soins à domicile. Un important groupe de personnes vieillissantes veulent vieillir sur place, mais ne le peuvent pas s'il n'y a pas à leur disposition un « panier » de services de soins à domicile. L'accord ne semblait pas aborder cet aspect.
Mme Sholzberg-Gray : Il nous faut décrire le panier, les objectifs et cerner les différences entre les services sociaux et les services de santé, ce de façon à déterminer où une participation financière par le patient s'imposerait. J'ignore si M. Hollander est d'accord avec moi en ce qui concerne la quote-part. Les gens achètent souvent leurs propres services dans ce domaine également, mais nous convenons que la grande majorité des Canadiens n'ont pas les moyens de s'acheter ces services. Ils requièrent ce que le système public peut appuyer. Il nous faut trouver le moyen de faire plus avec les dollars dont nous disposons. Voilà pourquoi il nous faut une analyse sociale en plus de services de santé qui soient universels.
M. Hollander : La tradition au Canada a été différente selon l'endroit. Dans certaines parties du pays, pour ce qui est des services de soutien à domicile et, en fait, des soins en établissement, il peut y avoir un critère de moyens et pas simplement un critère de revenu. Plusieurs provinces ont des critères de revenu, de telle sorte qu'un système de quote- part est déjà en place dans de nombreux endroits. Il y a en fait peu d'endroits où il n'y a pas de quote-part. Cependant, compte tenu de la réalité, je n'ai aucune objection en la matière. Cela cadre avec la façon dont nous avons fonctionné en Colombie-Britannique.
J'appuie fermement, pour commencer, la nécessité d'une prise de conscience renouvelée au niveau fédéral quant à la nécessité de services intégrés ciblant des populations particulières, notamment les aînés. Tout découle de la façon dont les services sont organisés, les statistiques compilées, et ainsi de suite. Deuxièmement, si, en fait, cette idée jouit d'un accueil favorable de la part du comité et du gouvernement du Canada, alors je me rangerai solidement du côté de Mme Sholzberg-Gray pour dire que l'Entente-cadre sur l'union sociale est peut-être un modèle idéal. Nous ne l'avons pas beaucoup utilisée au Canada, mais ce pourrait être un très bon véhicule pour la collaboration fédérale-provinciale dans le cadre d'une nouvelle initiative jouissant d'un certain leadership fédéral.
N'oublions pas que les provinces livrent déjà ces systèmes. Elles ont une histoire de prestation de soins aux aînés, pour les éléments tant sociaux que de santé. L'infrastructure qui est en place bénéficierait grandement d'un soutien tant politique que financier; cela aurait d'énormes ramifications pour ce qui est des avantages dont bénéficient les aînés.
Partant, ce sont cette prise de conscience quant à la nécessité d'un tel système et le mécanisme pour que la chose puisse se réaliser au Canada qui seraient l'expression, j'en conviens, de l'Entente-cadre sur l'union sociale.
Le sénateur Stratton : Merci. Vos exposés à vous tous ont été très intéressants.
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales s'est réuni la semaine dernière pour se pencher sur le Régime de pensions du Canada, l'accès qu'y ont les gens et la capacité des aînés d'être au courant du RPC.
Le ministre responsable des aînés a au cours de l'année écoulée instauré un programme en vertu duquel on essaie d'identifier des éléments spécifiques pour ramener les choses au niveau local. En d'autres termes, on envoie véritablement des gens du RPC dans des ensembles de logements pour aînés pour y renseigner les gens au sujet des programmes disponibles, car nombre d'entre eux ne sont pas au courant. Cependant, ces chiffres diminuent au fil du temps.
Cela m'intéresserait de vous entendre dire si vous estimez que nous devrions mettre en œuvre un scénario semblable pour les aînés. J'ai connu des parents, amis et ainsi de suite qui ne sont pas au courant des options qui s'offrent à eux; ils vieillissent, et leurs familles ne sont pas au courant des options à leur disposition. Vous dites que vous pourriez envoyer des lettres et faire de la publicité, mais cela ne fonctionne pas nécessairement. En conséquence, comment pouvez-vous joindre ces aînés pour leur dire ce qui est à leur disposition sur le plan des soins à domicile? Comment communiquer directement avec les gens? Cela est essentiel et doit se faire.
Mme Hall : J'ai beaucoup réfléchi à cette question, car j'estime qu'elle est essentielle. J'ai été séduite par l'idée d'un guichet unique bien en vue, identifié comme étant l'endroit où aller avec les demandes d'aînés, quelque chose qui ressemblerait un petit peu à un bureau d'ombudsman. Il importerait par ailleurs que soit menée une vaste campagne publicitaire — avec panneaux publicitaires sur les autobus, affiches publicitaires à l'intérieur des autobus, spots à la télévision et ainsi de suite — annonçant qu'il existe tel bureau avec un no 1-800, semblable aux lignes Jeunesse J'écoute, pour que les aînés puissent poser leurs questions par téléphone. C'est vraiment là la seule façon de diffuser ces renseignements.
Franchement, les personnes qui en ont le plus besoin ne sont pas les aînés actifs, engagés et intéressés, qui se présentent au centre pour personnes âgées et qui assistent aux présentations que je donne au sujet du logement en milieu de soutien. Ces gens-là seraient sans doute en mesure d'obtenir par eux-mêmes ces renseignements d'une autre façon. C'est pourquoi, selon moi, la meilleure façon de procéder est de fournir les renseignements dans les journaux, sur l'extérieur des autobus, à l'intérieur des autobus, et à la télévision, de façon très publique.
Mme Sholzberg-Gray : C'est là la bonne approche à condition que tous les programmes soient bien en place. J'aurais ici une mise en garde à faire : mon association reçoit de nombreux appels d'aînés qui demandent quels sont leurs droits en tant que résident de l'Ontario. Je leur dis qu'ils ont droit à des services de soins de santé en milieu hospitalier et à des soins médicaux, qu'ils auront peut-être à attendre un peu plus longtemps qu'ils ne le souhaiteraient, mais qu'ils ont droit à ces services. Pour ce qui est de leurs autres droits, tout dépend de la région où ils vivent. Peut-être que le centre d'accès aux soins communautaires a épuisé ses fonds, auquel cas ces personnes ne bénéficieront pas de soutien à domicile. Peut-être qu'il n'y a même pas assez d'argent pour les soins à domicile en remplacement de soins actifs. S'il y avait à l'échelle du pays une approche uniforme en ce qui concerne la SCHL, les aînés pourraient peut-être aborder la Société pour se renseigner sur ce qui est disponible et obtenir des renseignements sur les programmes d'adaptation du domicile et ainsi de suite.
Voilà le genre de réponse qu'il me faut donner. J'ignore qui est cette personne brillante qui saurait parfaitement ce à quoi les gens auraient droit. Ces programmes s'appellent des « droits » aux États-Unis. Lorsque les gens me posent ce genre de questions, je leur dis que je ne sais pas; cela dépend de plusieurs facteurs. En l'absence d'objectifs communs, voire même d'objectifs, ne serait-ce que pour ces types de services, il s'agit là de l'un de nos défis; nous ne sommes pas certains à 100 p. 100 des faits.
Oui, les gens ont besoin de plus de renseignements, mais plus il y a de renseignements et de publicité, plus il y a des risques de problèmes. Ma crainte, par exemple, est que le programme de la SCHL en matière d'adaptation de domicile et de réparations d'urgence ne soit en place que pendant une année encore — bien qu'il puisse être maintenu. Si toutes les personnes pouvant en bénéficier étaient au courant de son existence, vous n'auriez sans doute plus d'argent dans la caisse au bout des deux premières semaines de l'année. C'est là une autre question encore : les ressources sont-elles suffisantes?
Je fais simplement cette mise en garde. Il nous faut plus de renseignements, mais il nous faut d'abord savoir ce sur quoi nous renseignons les gens.
Le sénateur Stratton : La personne âgée ne devrait-elle pas avoir le droit de savoir ce qui est disponible, peu importe le reste? J'ai un très cher et vieil ami qui est un grand solitaire. Il vit seul; il n'est ni câblé, ni connecté. Comment une telle personne peut-elle participer?
Même si vous ne savez pas de façon précise à quoi elle a droit, il demeure le problème de savoir comment la joindre. À l'heure actuelle, cela ne se fait pas. Comment faire pour mettre en place un système qui permette cette communication?
M. Rodriguez : Je vais vous parler un petit peu de ce que j'ai constaté dans certaines localités. Par exemple, dans le comté de Lambton, en Ontario, les aînés eux-mêmes ont créé un centre communautaire. Ils m'ont confié que les aînés sont le meilleur véhicule pour accéder aux services pour personnes âgées car ils se connaissent tous au sein de la collectivité et se parlent entre eux. Il est parfois possible de créer un réseau qui rejoigne tout le monde au sein de la collectivité.
Dans le cas dont je vous parle, ils ont créé un centre de services où les services sont fournis par les aînés eux-mêmes. Ce sont des personnes à la retraite qui étaient autrefois menuisiers ou électriciens ou autres, et ils offrent quantité de services différents. Les services sont abordables pour les membres de la collectivité car les bénévoles font le travail eux- mêmes.
Cela offre aux aînés la possibilité de participer au processus et de veiller à ce que toutes les personnes âgées de la collectivité soient au courant de ce qui est à leur disposition.
Le sénateur Stratton : J'aimerais toujours savoir comment vous faites pour joindre ce type dont je vous parlais.
M. MacDonald : J'aimerais revenir sur ce qu'a dit Mme Hall, qui est un pas très positif. Cependant, j'y vois un processus en évolution, en mouvance. Et cela doit fonctionner main dans la main avec deux autres éléments. Un de ces éléments est que lorsqu'un aîné appelle tel ou tel intervenant, la personne doit avoir ces renseignements.
La présidente : Elle doit également être à l'autre bout du fil.
M. MacDonald : Oui, il est aujourd'hui très difficile, à moins d'avoir 11 doigts, de parler avec une personne en chair et en os. Il faut que cette personne soit à l'autre bout du fil et qu'elle possède les renseignements requis.
Le deuxième élément est la partie en évolution que je vois. À l'heure actuelle, nous avons une situation telle qu'il existe une multitude d'informations. Il est parfois très difficile de réunir tout cela. Dans ce contexte, à long terme, nous devrions revenir à cette idée de simplifier les choses, en créant une entité nationale telle que l'information devienne moins complexe au fil du temps. Lorsque les aînés appellent cette personne, il lui faut leur dire ce qu'ils ont besoin de savoir, qu'ils appellent depuis l'Alberta, Terre-Neuve ou ma province, l'Île-du-Prince-Édouard; tous ces renseignements devraient être plus ou moins les mêmes où que ces personnes se trouvent au pays. Voilà le problème que nous avons à l'heure actuelle.
En conséquence, une partie du problème est l'accès à l'information, et la deuxième partie du problème est l'accès aux bonnes informations. La troisième partie est en fait l'utilisation de cette information, où qu'on se trouve dans le pays, pour obtenir les services, quels qu'ils soient, qui sont disponibles. Cela aussi est difficile.
Pour revenir à ce que disait Mme Hall, c'est là le morceau qui est idéal, mais il s'agit d'une chose en évolution. Pour que cela fonctionne, il faut que cela aille de pair avec la simplification de l'information au fil du temps afin que celle-ci soit juste et uniforme à l'échelle du pays.
Mme Hall : Faire en sorte que l'information soit disponible est la première étape pour aboutir à ce processus dont vous parlez.
M. MacDonald : Exactement; c'est tout à fait cela.
Mme Hall : Il est sans doute vrai qu'il existe une certaine confusion chez les personnes qui, théoriquement, sont censées fournir l'information. Il y a sans doute chez elles un manque de clarté quant à ce qui est disponible et quant aux différents niveaux et circuits. Il importerait de régler ce problème s'il était exigé que ces renseignements soient fournis aux personnes à l'autre bout du fil. Le difficile processus de clarification ne viendra pas sans qu'il y ait une incitation; c'est ainsi que ce processus sera enclenché.
[Français]
Le sénateur Chaput : Je ne vous annonce rien en disant que nous avons une multitude d'associations, de sociétés, de comités et différents niveaux de gouvernement qui sont préoccupés par l'incidence du vieillissement, surtout à cause des coûts reliés au domaine de la santé. Notre comité se penche sur l'incidence du vieillissement et essaie de regarder, avec l'aide des témoins que nous recevons, tout ce qui se passe dans ce secteur. Je pense — et c'est mon opinion personnelle — que quelquefois, nous mettons tellement d'énergie à nous assurer d'avoir des programmes pour abaisser les coûts dans le domaine de la santé — des programmes pour les personnes âgées —, que nous négligeons de regarder les moyens utilisés pour leur communiquer ces programmes.
J'aimerais me servir d'un cas typique, que je connais assez bien, et repasser les derniers 15 ans de la vie d'un couple pour vous démontrer où sont les faiblesses du système en place. Je ne vous annonce rien, vous le savez déjà, autant sinon plus que moi. Prenons un couple de 85 ans en 2007; ils ont 85 ans et 86 ans et ils ont un revenu total d'environ 25 000 $ par année. L'homme vient du milieu rural — il était fermier — et la dame restait à la maison pour élever les enfants; elle n'a donc jamais été sur le marché du travail. Ils veulent demeurer et ils demeurent toujours à la maison. Avec l'aide des enfants, ils ont pu identifier les programmes nécessaires pour modifier leur vieille maison afin de la rendre accessible et sécuritaire. Ensuite est arrivé un incident où la dame s'est cassée la hanche et elle a eu un accident cérébral. Lorsqu'elle est revenue à la maison, elle a eu besoin de soins à domicile. Certains services ont été donnés durant les premiers mois et c'était suffisant parce que leurs enfants les aidaient aussi. En 2006, le toit de la maison a coulé et ils ont dû le faire réparer. Lorsque je suis allée les visiter, j'ai demandé à l'homme : « Cela vous a coûté cher? » Il a dit : « Oui, 5000 $. Je pensais être repayé, mais ils ont refusé. » J'ai alors demandé : « Où allez-vous prendre l'argent? » Il m'a dit : « Inquiète-toi pas, ça se trouve tout le temps. »
C'est incroyable de voir les offres de cartes de crédit que reçoivent les personnes âgées dans leur courrier. J'ai déjà vu quatre offres différentes sur sa table. Je me suis demandé s'il était pour prendre une autre carte de crédit ou s'il utiliserait un prêt pour rénovations. La protection des personnes âgées me préoccupe; qui les protège lorsqu'à un moment donné, dans la vie, ils sont vulnérables, qu'ils n'ont pas suffisamment d'argent et qu'ils prennent peut-être des décisions qu'ils n'auraient peut-être pas prises lorsqu'ils avaient 65 ans?
Il y a également la question des déplacements de ces personnes, qui demeurent à la maison, qui est très importante afin qu'ils puissent garder leur indépendance.
Encore une fois, ce couple qui reçoit 25 000 $, habite une petite communauté rurale, le monsieur conduit encore sa voiture pour faire ses courses, aller à la poste, à l'église, au club, voir le médecin, 10 à 15 minutes. Cela devient le réseau de vie. Cette personne me demandait, la dernière fois que je l'ai visitée, pourquoi, puisque le comité du sénateur Carstairs se penche sur le vieillissement, ne discuterions-nous pas de quelque chose de spécifique pour eux, les personnes âgées de 85 ans, qui conduisent encore seulement pour effectuer leurs petits déplacements quotidiens, dans un rayon de 10 ou 15 minutes, le jour seulement — ils ne conduisent pas le soir parce qu'ils ne voient pas assez clair —, quand il n'y a pas de tempête? Et même s'ils n'utilisent pas beaucoup leur voiture, ils doivent quand même payer une assurance automobile comme tout le monde, qui leur coûte 1 000 $, ce qui est beaucoup pour eux.
Tout le monde a probablement vu un cas comme celui-là. Je me demande comment on peut en arriver avec des politiques à un niveau quelconque pour s'assurer que ces gens, qui veulent vraiment demeurer à la maison, reçoivent de l'aide là où ils en ont réellement besoin à cette étape de leur vie et non nécessairement en fonction de programmes. Parce que si cela continue ainsi, ce couple pourra mourir à la maison. Je vous lance le défi.
M. Allard : Il existe peut-être une solution disponible à peu de frais. Je suis conscient des recherches faites par M. Hollander et d'autres chercheurs qui établissent que les frais d'hébergement pour les personnes âgées dans un établissement de soins de longue durée sont probablement le double que ce que cela coûterait de leur permettre de rester à la maison tant qu'ils en sont capables.
Si, à l'échelle nationale, on pouvait mettre en place un programme d'indépendance pour les personnes âgées, qui leur permettrait de subvenir à leurs besoins dans leur logement principal, sans avoir le besoin de les héberger dans des endroits de soins de longue durée, ce serait beaucoup plus économique pour le gouvernement, que ce soit aux niveaux provincial ou fédéral.
Il existe déjà un programme en place pour les anciens combattants — le PAAC, le programme pour l'autonomie des anciens combattants — et je pense qu'un programme semblable pour tous les aînés canadiens serait une bonne chose.
J'aime beaucoup aussi le scénario que vous avez décrit pour ce qui est de communiquer avec les personnes âgées. Il faut pouvoir communiquer avec eux afin que les gens comprennent leurs problèmes et quelles en sont les solutions.
Le sénateur Chaput : Je trouve la question d'un ombudsman très intéressante. Une personne âgée devient plus vulnérable et si elle a besoin d'aide, elle parlera peut-être plus librement à un ombudsman qu'à ses enfants. Ce n'est pas facile pour un père d'avoir à dire à ses enfants qu'il n'y arrive plus.
M. Allard : Je suis d'accord avec cette suggestion. Le seul problème que je vois c'est qu'il y a peut-être une prolifération d'ombudsmans. Si on pouvait créer un bureau de l'ombudsman pour les chapeauter, avec un mandat législatif très clair, qui leur donnerait le pouvoir de faire des investigations, avec des subalternes sous le chapeau principal, ces gens pourraient faire les enquêtes nécessaires.
Lorsqu'on examine les besoins des aînés, on n'est pas seulement concernés par des sujets comme la santé, mais aussi par les finances ou les programmes fédéraux en place pour les subventions, tels que la Sécurité de la vieillesse et le Régime de pensions du Canada. Il serait logique que le Bureau de l'ombudsman puisse examiner les choses qui ont des conséquences pour les personnes âgées.
[Traduction]
La présidente : Je vais poser une question au sujet d'une chose qui me préoccupe de plus en plus.
Des personnes qui ont été extrêmement indépendantes tout au long de leur vie sont en train de vieillir. Elles ont, pour la plupart, vécu de façon autonome. Elles ont peut-être vécu avec une famille, et lorsque le conjoint est mort et que les enfants sont partis, elles ont poursuivi le même chemin. Les enfants sont très inquiets car le parent commence vraiment à décliner — il est mentalement alerte, mais physiquement, il est très diminué. Les enfants veulent confier le parent à un établissement de soins de longue durée, mais le parent résiste avec détermination.
Qu'allons-nous faire pour ces gens? Quel est leur droit à une autonomie personnelle? Ces personnes peuvent-elles insister pour demeurer chez elles même si les membres de leur entourage estiment qu'elles ont besoin de plus de soins que ce qui est à leur disposition? Allons-nous protéger leur autonomie et leur permettre de demeurer chez elles si c'est ce qu'elles souhaitent, ou bien allons-nous, en tant que communauté, exiger qu'elles aillent s'installer dans un endroit où elles pourront recevoir l'aide dont elles ont besoin?
Nous commençons tout juste à nous pencher sur cette question, qui prend de plus en plus d'ampleur. L'un d'entre vous pourrait-il répondre?
Mme Sholzberg-Gray : Premièrement, il est clair que la grande majorité des aînés frêles qui vont dans des établissements de soins de longue durée souffrent de problèmes de démence, qui étaient à l'origine de leur placement en établissement, car ces personnes ne sont pas les mieux placées pour prendre des décisions relatives à leur sécurité et à leurs soins. Lorsqu'il y a démence, il se présente des combinaisons de problèmes différents, comme par exemple l'incontinence. Les personnes chez qui on diagnostique la démence ne peuvent pas rester seules chaque jour pendant 20 heures, à supposer qu'elles obtiennent de l'aide quatre heures par jour. Cependant, il n'existe pas tant de programmes de soins à domicile que cela qui offrent quatre heures par jour pour maintenir l'état de santé des bénéficiaires. La plupart de ces programmes prévoient plutôt une ou deux heures par jour ou x heures par semaine ou par mois. Il faudra peut-être que ces personnes soient renvoyées dans des établissements de soins pour assurer leur sécurité, mais j'essaierais néanmoins de leur accorder le droit de choisir.
Puis, il y a la question de ces obligations continues pour les enfants des aînés. Nombre d'entre eux travaillent, élèvent leurs propres enfants ou ont des enfants à l'université. Les obliger à assumer les soins pour leurs parents aînés en faisant les courses d'alimentation, en changeant la literie, en faisant la lessive et de nombreuses autres tâches ménagères leur impose un fardeau injuste.
Or, c'est ce que font de nombreux enfants dans ce pays. Le nombre d'heures que consacrent à des parents des soignants membres de la famille est incroyable. Le système de soins de santé n'aurait jamais les moyens de les payer pour ces heures. Cependant, le système de soins de santé a les moyens d'offrir à ces soignants familiaux un certain secours, sous forme de répit très flexible, et il doit le faire. Nous ne pouvons pas dire aux gens, lorsqu'ils se trouvent en situation d'urgence, que l'on pourra peut-être trouver un moyen d'obtenir de l'aide pour leurs parents d'ici à quatre mois. Les programmes doivent être flexibles, car une personne peut avoir besoin d'aide plutôt plus tôt que plus tard. La flexibilité sera un élément important de ces programmes.
Si des crédits fédéraux vont financer prochainement des programmes du genre, alors l'un des objectifs en matière de soins à domicile, communautaires et à long terme doit être que, tant et aussi longtemps que le coût total engendré est inférieur au coût pour le gouvernement du renvoi en établissement de soins de longue durée, alors la personne devrait avoir le droit de demeurer indépendante.
Il serait très difficile pour les gens de dire qu'ils ont le droit de vivre de façon indépendante chez eux même si cela coûtait 10 000 $ par mois — à moins, bien sûr, qu'ils ne disposent chaque mois d'un tel montant d'argent. Une bonne règle pratique à suivre serait qu'il faille que le coût pour demeurer chez soi soit inférieur au coût du renvoi dans un établissement de soins de longue durée. Cependant, la dignité, le choix et l'indépendance sont des valeurs qui devraient être intégrées dans toute loi. Il importe néanmoins de trouver le moyen de financer cela sans imposer aux familles des fardeaux trop lourds.
M. Hollander : Mon propos est que le système constitue à certains égards la solution. Si nous avons des budgets et des administrations distincts pour le programme de soins à domicile et le programme de soins en établissement, alors nous sommes limités par les ressources disponibles. Or, si nous les combinions à l'intérieur d'un système plus large, alors nous pourrions faire des compromis.
Certaines autorités ont une règle pratique — je ne pense pas qu'il s'agisse d'une politique formelle — qui cadre avec les commentaires de Mme Sholzburg-Gray. En d'autres termes, elles essaient de maintenir les patients chez eux tant que cela ne coûte pas plus cher que le renvoi en établissement.
Lorsque j'étais responsable du régime de soins continus en Colombie-Britannique au milieu des années 1980, c'était cette approche que nous suivions. Nous avions des contraintes budgétaires et nous ne pouvions pas tout couvrir. Cependant, lorsque intervenaient des raisons de compassion, alors nous dépassions parfois le taux.
La création d'économies et l'optimisation des ressources sont des éléments importants. Avec une meilleure optimisation des ressources, alors nous dégageons des fonds excédentaires pouvant être utilisés dans les genres de circonstances qui ont été décrites. Par exemple, dans le cas qui a été évoqué, il y aurait peut-être des fonds supplémentaires pour des soins de relève ou des soins à domicile supplémentaires.
Je ne veux pas dire par là qu'il ne faudrait pas qu'il y ait dans la caisse davantage d'argent au départ. Cependant, nous sommes mieux placés si nous comprenons les besoins des aînés, avons pris les mesures envisageables pour rendre le système de prestation de soins aussi efficient que possible, et pouvons en fournir la preuve. Nous sommes alors munis d'arguments plus solides en vue de l'obtention de fonds supplémentaires. Cependant, si nous continuons d'avoir des systèmes fragmentés, alors nous demeurons aux prises avec des budgets fragmentés, et nous nous trouvons dans l'impossibilité d'opérer les choix qui seraient possibles dans un système plus large.
Mme Hall : Nous avons discuté ici des deux pôles — demeurer seul chez soi ou vivre en établissement de soins. Cet établissement, cette maison de soins infirmiers, remplit d'effroi tout le monde, jeunes et vieux. J'aimerais parler de cette troisième approche intermédiaire, celle du logement en milieu de soutien, et dont j'ai traité.
Lorsque j'ai discuté avec des aînés dans le cadre de mes consultations, ils ont trouvé l'idée de logement en milieu de soutien très intéressante et séduisante. Cela m'a étonné, car le message que j'entends sans cesse est que les aînés veulent demeurer chez eux le plus longtemps possible. Les obstacles dans leur esprit concernent l'information et l'abordabilité. Ils ne savent pas comment s'y prendre pour se renseigner au sujet des logements-services, de ce qui est disponible et de ce dont il s'agit véritablement. Le coût est une grosse préoccupation. Ils disent que s'ils possèdent leur propre maison, au moins ils savent qu'ils pourront y demeurer et contrôler les coûts.
Cela ne m'étonne pas que les propriétaires-occupants étaient le groupe de personnes qui étaient le plus à l'aise avec l'idée de demeurer chez elles jusqu'à la toute dernière minute. Comptent parmi leurs craintes celle de ne pas pouvoir contrôler les coûts une fois installées en logement en milieu de soutien; celle de ne peut-être pas être en mesure de demeurer dans cet environnement stable, qui leur apparaît attrayant aujourd'hui, jusqu'à la fin de leurs jours; la crainte d'augmentations des tarifs; la crainte que leurs propres fonds diminuent, auquel cas où aboutiront-elles? La possibilité de demeurer chez elles les rassure du fait qu'elles puissent alors exercer un plus grand contrôle sur la situation.
C'était là un facteur important qui jouait dans leur décision de ne pas poursuivre l'option du logement en milieu de soutien. Cela est venu renforcer mon idée que l'offre d'un nombre suffisant d'unités abordables afin qu'il y ait un choix, ainsi que des règlements en vue de contenir les augmentations de coûts possibles, sont essentiels pour qu'il s'agisse d'une option réelle.
Le sénateur Cordy : Madame Sholzberg-Gray, j'ai été intéressée par les défis que vous avez exposés dans votre mémoire. J'avais déjà entendu parler de quatre d'entre eux dans le cadre de nos travaux relatifs à notre rapport sur les soins de santé, et nous en avons discuté. Cependant, le dernier, soit que les Canadiens ne sont pas libres de se déplacer et de s'installer là où ils veulent pour bénéficier de services de soins continus m'a frappée, car vous avez tout à fait raison.
Dans ma jeunesse, mes oncles et mes tantes habitaient le quartier ou en tout cas pas très loin de nous. Aujourd'hui, les enfants s'aventurent plus loin. On entend souvent les gens de mon âge dire qu'ils vont rester chez eux pour le moment mais que d'ici quelques années ils vont peut-être aller s'installer à proximité de leurs enfants.
Vous semblez dire que si les gens ont de l'argent, ils ont alors une certaine portabilité. S'ils n'ont pas de moyens, alors leur vie n'est pas très portable. La portabilité est l'un des éléments de la Loi canadienne sur la santé.
Pourriez-vous m'expliquer cela un petit peu plus dans le détail, s'il vous plaît?
Mme Sholzberg-Gray : Premièrement, j'ai souligné que la Loi canadienne sur la santé s'applique aux médecins et aux services en milieu hospitalier. Même là, il y a une période d'attente. Nous sommes couverts à cause de notre ancienne province de résidence. Il y a portabilité en vertu de la Loi canadienne sur la santé.
Si l'on regarde la vaste gamme de services dont les aînés pourraient avoir besoin, ce ne sont pas tous des services qui sont couverts par la Loi canadienne sur la santé. Nous parlons des programmes de soins à domicile, des programmes de soutien à domicile et des soins en établissement, comme par exemple les soins en établissement de longue durée. Dans le cas de ces services, les gens doivent attendre. Le problème est qu'ils ne peuvent pas forcément se permettre d'attendre. Différentes provinces ont des délais d'attente différents, certains pouvant aller jusqu'à un an. Cela signifie que si une personne vit dans un établissement de soins de longue durée en Saskatchewan et veut aller s'installer dans une autre province, la personne va avoir un choc car la quote-part en Saskatchewan est peut-être sensiblement inférieure à la quote-part dans l'autre province. Jusqu'à ce qu'un ou deux gouvernements provinciaux perdent ou perdent presque le pouvoir, la quote-part dans certaines provinces de l'Atlantique s'élevait à 4 000 $ ou 5 000 $ par mois, jusqu'à ce que les patients perdent leur maison et épuisent toutes leurs ressources.
La province de l'Ontario applique un critère de moyens financiers. Les aînés ne peuvent pas dépenser plus que le total de leurs prestations de SV et de SRG, et on leur consent en même temps une allocation de menues dépenses afin qu'elles disposent de moyens suffisants. Le problème est de savoir si la personne peut attendre un an ou si elle peut payer 100 p. 100 des coûts dans un établissement privé pendant cette année d'attente; la plupart des gens ne le peuvent pas.
Dans notre document sur les soins à long terme, qui a été endossé par le Conseil consultatif national sur le troisième âge ou CCNTA, nous recommandons ce que nous appelons la réciprocité. Il nous faut trouver le moyen de faciliter des arrangements de réciprocité entre provinces pour que les gens puissent de déplacer d'une province à l'autre. Par exemple, si la Saskatchewan et l'Ontario voulaient négocier une entente, il y aurait des arrangements de réciprocité, et l'on pourrait espérer que toutes les provinces participeraient. Les provinces sont en train de dire qu'elles peuvent s'arranger entre elles, qu'elles se retrouvent à l'intérieur du Conseil de la fédération.
Nous avons pensé qu'il pourrait y avoir des arrangements de réciprocité de manière à ce que, lorsque les enfants ne vivent pas dans la même province que leurs parents, nous puissions faciliter l'établissement de leurs parents à proximité d'eux pour créer un mécanisme de soutien, ce qui réduirait les coûts et améliorerait leur qualité de vie et leur état de santé. Nous voulons trouver un moyen de faire avancer cette idée.
Le sénateur Cordy : Y a-t-il eu des discussions au sujet de votre idée de réciprocité?
Mme Sholzberg-Gray : Non, pas au niveau gouvernemental. Nous avons été impressionnés de constater que le CCNTA avait trouvé l'idée parfaite et l'avait appuyée, entre autres choses. Ce devrait exister. Si nous avions des fonds fédéraux futurs pour ce continuum de soins continus que nous aimerions voir intégrer, et si les provinces voulaient prendre cet argent, alors l'une des conditions serait la réciprocité. Ce continuum englobe toute la gamme des services, allant des options de logement aux soins à long terme en passant par les services de soutien communautaires et les soins à domicile. En bout de ligne, cela permettra réellement d'économiser des ressources du fait de l'aide de la famille.
Le sénateur Cordy : Oui, je suis d'accord. Merci.
Le sénateur Keon : Il est intéressant que ressortent encore une fois aujourd'hui les questions de l'Entente-cadre sur l'union sociale et des services intégrés. Mme Sholzberg-Gray et moi-même discutons des services intégrés depuis 30 ans.
Mme Sholzberg-Gray : Je ne sais pas si je suis suffisamment vieille pour dire cela, mais, oui, je crois que c'est le cas.
Le sénateur Keon : Vous étiez encore aux études.
Mme Sholzberg-Gray : Cela fait peut-être 40 ans.
Le sénateur Keon : Monsieur Allard et monsieur MacDonald, et peut-être madame Hall, le gros problème avec tout cela est que nous n'avons pas au Canada les entités communautaires appropriées pour faire l'intégration sur le terrain, pour réunir tous les morceaux et faire fonctionner les choses sur le terrain au niveau local. Ils y parviennent en Suède et en Grande-Bretagne parce qu'ils ont une structure gouvernementale plutôt simple. Nous, nous avons un régime politique extrêmement complexe — fédéral-provincial-municipal. Certains des peuples autochtones ont par ailleurs leur propre gouvernement.
Connaîtriez-vous une entité communautaire dont vous estimez qu'elle fonctionne bien, ou dont vous avez entendu parler lors d'échanges avec vos pairs d'un peu partout au pays et qui a pu réunir services de soins de santé, d'éducation, sanitaires et de logement et ainsi de suite pour créer un bon environnement pour les gens?
Mme Hall : Il y a quelque chose à Maple Ridge, en Colombie-Britannique.
M. MacDonald : La Légion a une infrastructure de 1 700 filiales réparties dans le pays. Nombre de ces filiales sont installées dans de petites localités, d'autres se trouvant dans de grands centres urbains. Elles ont également 85 années d'histoire de prestation de services à la collectivité. C'est de ce genre d'entité que l'on a souvent besoin. Très souvent, lorsque des projets de la Légion sont lancés dans une région, c'est la Légion qui est le catalyseur. Ces projets ne sont pas généralement tels qu'ils puissent tourner tout seuls. La Légion les lance et d'autres groupes interviennent et tout le monde met la main à la pâte. Certains de ces établissements finissent par offrir tout un menu de services, et c'est ainsi que nous faisons intervenir les gens des soins de santé et des services de transport. Nous faisons modifier les circuits des autobus pour assurer la desserte des établissements de la Légion. Je ne prétends pas un seul instant que la Légion serait l'entité idéale pour s'occuper de cela, mais je dis que la chose est possible.
À Maple Ridge, l'exemple par excellence, nous avons maintenant quatre établissements, ou trois. Il y a un logement- services, il y a un établissement de logements à bail à vie et nous avons également un immeuble à appartements. Tout est en place pour que des aînés en bonne santé puissent s'y installer, y demeurer, puis passer d'un établissement à un autre selon l'évolution de leurs besoins. Je pense qu'il y a des moyens de faire cela.
Lorsque nous lançons des programmes et des politiques d'aménagement, il nous faut être très méfiants de la tendance de sursimplifier les choses. Je trouve que la réalité réside quelque part entre la mesure dans laquelle je considère une chose comme étant simple et la mesure dans laquelle quelqu'un d'autre la considère comme étant compliquée. De façon générale, nous élaborons les politiques de la mauvaise manière. Nous commençons en haut, faisons en sorte que la politique fonctionne, puis, lorsque nous arrivons à la base, nous constatons que des changements doivent être apportés pour que la politique fonctionne bien. Nous serions beaucoup plus efficaces si nos politiques avaient pour point de départ l'homme de 85 ans qui a du mal à faire poser son toit, si nous comprenions ces choses-là et travaillions à rebours.
En bout de ligne, nous aurons élaboré des politiques censées et concrètes car nous aurons discuté avec les personnes qui sont touchées par ces politiques, au lieu d'adapter ces dernières au fur et à mesure, jusqu'au point où, lorsque nous commençons à les administrer, elles ne ressemblent pas du tout à ce que nous avions prévu.
Lorsque nous élaborons des politiques, il nous faut faire en sorte de faire fonctionner ces politiques dans la communauté. Cela fonctionne pour la Légion. Cela fonctionnerait vraisemblablement pour d'autres organisations également.
M. Allard : Je regarde Mme Darke qui est assise ici. Elle est beaucoup plus jeune que moi. Une solution simple serait également d'insister pour que les gens qui élaborent les politiques soient alors chargés de les mettre en œuvre.
Mme Sholzberg-Gray : Il ne nous faut pas oublier les modèles existants. Il existe à l'heure actuelle dans la plupart des provinces un modèle régional de soins, et certains d'entre eux fonctionnent très bien avec des approches intégrées pour toute une gamme de services sociaux et de santé, et nous pourrions donc nous en servir comme base. L'intégration se fait parfois, et vous avez tout à fait raison là-dessus, davantage en haut qu'en bas, et c'est là notre défi. L'objet de la régionalisation est l'intégration.
Si vous me permettez de faire un peu de promo, notre congrès annuel va avoir lieu à Saskatoon, en juin. Il a pour titre : « La régionalisation : Leçons apprises, leçons perdues ». L'on compte déjà plus de 100 propositions de partage de pratiques exemplaires en matière d'approches intégrées aux soins de santé. Il semble que partout au pays il y a quelque chose qui se fait vraiment très bien. Il y a de nombreuses merveilleuses expériences et méthodes d'intégration, et nombre d'entre elles seront présentées. J'encouragerais tout le monde à regarder les meilleures pratiques où qu'elles se trouvent, pour voir si nous ne pourrions pas transférer cette connaissance. Il nous faut faire plus de partage; nous n'en faisons pas assez.
La présidente : Merci. Je vais terminer avec une question. J'espère que vous pourrez me répondre par « oui » ou par « non ». J'ai bien l'impression que ce ne sera pas possible, mais je vais quand m'y essayer.
L'une des questions avec lesquelles nous nous débattons est que, du fait de notre constitution, certaines de ces questions sont dominées par les provinces tandis que d'autres sont dominées par le palier fédéral. Dans ce domaine-ci, y a-t-il, selon vous, un rôle fédéral quant aux mesures à prendre en prévision des besoins d'une société vieillissante et à la facilitation de la coordination des programmes? Non pas, cependant, en dirigeant ces programmes, car ceux-ci sont en règle générale le mieux dirigées par le niveau le plus proche de la prestation des soins. Entrevoyez-vous la nécessité d'une présence fédérale pour offrir ce continuum de soins?
M. Hollander : Je vois bel et bien un rôle pour la présence fédérale. De nombreuses initiatives ont été lancées pour assurer un financement supplémentaire pour certains types de services. Il s'agit là d'un rôle que joue souvent le gouvernement fédéral. D'autre part, cette idée d'un arrangement avec les gouvernements provinciaux leur permettant de travailler ensemble, que ce soit par le biais de l'Entente-cadre sur l'union sociale ou autre, serait peut-être un véhicule.
Toute la prise de conscience quant à la façon d'organiser le régime de soins de santé au Canada fait défaut à l'heure actuelle au niveau fédéral, mais existe au palier provincial, étant donné que ce sont les provinces qui offrent les services. Quelles en sont les composantes clés? Je dirais qu'un volet clé est celui des soins pour les aînés et des autres personnes ayant des besoins de soins continus. Nous avons des services en milieu hospitalier pour les personnes qui ont besoin de soins actifs; nous avons des services médicaux et de soins primaires pour la population dans son ensemble; nous avons des services de santé publique et ainsi de suite. À l'heure actuelle, il semble qu'il y ait un vide au niveau fédéral pour ce qui est de cette notion de prestation de soins aux personnes ayant des besoins de soins continus.
Obtenir simplement que les gouvernements fédéral et provinciaux conviennent ensemble que ce devrait en fait être là une composante importante du régime de soins de santé canadien serait une contribution importante et cela ne coûterait peut-être même pas beaucoup d'argent; ce serait en tout cas un premier pas. Une fois que nous nous serions mis d'accord là-dessus, alors nous pourrions entamer des discussions au sujet des éléments clés ou essentiels ou des principes sous-tendant la chose.
Je vois bel et bien un rôle. En fait, le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle important dans le cadre d'un partenariat avec les gouvernements provinciaux chez qui plusieurs de ces initiatives ont déjà été prises, ainsi qu'en facilitant leur réalisation et en trouvant des moyens d'en arriver à une entente sur la façon de pouvoir ensemble offrir les meilleurs soins possibles et d'y parvenir d'une façon économique.
Mme Hall : En ce qui me concerne, du fait que je m'intéresse à la réglementation, j'estime que le gouvernement fédéral a un rôle très puissant et positif à jouer dans l'élaboration de politiques et de lois modèles. Bien sûr, c'est à chaque province qu'il revient de déterminer la façon de mettre en œuvre des lois dans ce domaine précis. Tirant certaines leçons de l'expérience américaine, l'on peut dire qu'il y a un rôle très positif pour le gouvernement fédéral en vue de faciliter l'échange d'information, ne serait-ce que pour empêcher que l'on ait à réinventer la roue, comme cela semble être le cas à différents niveaux et à différents stades, selon l'endroit, ce qui semble être très contre-productif.
M. Allard : En tant, strictement, que fournisseur sans but lucratif de logements abordables, mes commentaires seront sans doute liés au rôle de la SCHL. J'aimerais souligner que nous nous entendons très bien avec la SCHL. Nous croyons en la collaboration et en l'importance du partenariat. La Société a un certain nombre de très bons programmes. Elle nous a récemment demandé d'afficher sur son site un lien à ses pratiques exemplaires, et nous comptons le faire.
Mme Darke a parlé de la flexibilité qui a été introduite dans l'assurance hypothèque de la SCHL en 2003. Cette flexibilité était liée à un ratio capitaux propres plus élevé pour les fournisseurs sans but lucratif, ce qui est plus difficile dans notre cas. Le gouvernement fédéral pourrait en fait offrir un prêt remboursable dans ce contexte pour combler la différence et faciliter l'obtention de cette assurance hypothèque.
Mme Sholzberg-Gray : Je pense qu'il y a un rôle fédéral. Tout dépendrait cependant de la philosophie du gouvernement au pouvoir. Si le gouvernement estime qu'il y a des compartiments tout à fait étanches dans le cas de certaines questions qui relèvent de la compétence des provinces et d'autres relevant du pouvoir fédéral, sans aucune possibilité d'activités conjointes, alors c'est là un problème. J'aimerais rappeler à tous, cependant, que le pouvoir de dépenser fédéral est un pouvoir qui est reconnu par la Constitution — la Cour suprême. Le gouvernement fédéral est autorisé à dépenser dans les domaines relevant de la compétence provinciale. Je ne suis pas en train de suggérer qu'il faille que le gouvernement fédéral impose cela à l'avenir aux provinces, mais cela lui offre la possibilité de dire aux provinces qu'il versera de l'argent au titre d'un programme si celui-ci permettra d'atteindre certains objectifs pancanadiens sur lesquels tout le monde s'entend, du fait que ce serait une bonne chose pour tous les Canadiens, où qu'ils vivent au pays. Le gouvernement fédéral l'a fait pour l'assurance-maladie, les services médicaux et en milieu hospitalier, la SCHL, et d'autres choses encore. L'on pourrait se demander pourquoi, avec une population vieillissante, compte tenu de l'importance de la santé, des programmes et des soins continus des aînés, le gouvernement fédéra ne pourrait pas aller dire aux provinces : « Nous aimerions vous proposer un nouveau programme. Vous n'êtes pas tenues d'y participer, mais nous le souhaiterions. Si vous acceptez, vous obtiendrez cet argent; et, en passant, si vous avez déjà des programmes qui s'alignent sur les objectifs en question, vous toucherez l'argent de toute façon, car cela s'inscrit essentiellement dans l'Entente-cadre sur l'union sociale. » Nous sommes d'avis qu'il s'agit d'un domaine qui est très important pour les provinces et où le pouvoir de dépenser fédéral serait utile. L'assurance-médicaments onéreux serait encore un autre élément.
Ce que je dirais c'est ceci : utilisez le pouvoir de dépenser fédéral conjugué à l'Entente-cadre sur l'union sociale, et si vous ne prenez pas ces mesures, alors les coûts des soins actifs vont augmenter. Alors à quoi bon ne pas le faire? Si nous ne le faisons pas, cela nuira à la capacité de notre pays de maintenir le programme pour lequel nous avons déjà utilisé le pouvoir de dépenser fédéral.
La présidente : Merci. Je ne vais pas soumettre la question à nos deux derniers invités. Cela les placerait en quelque sorte dans une situation de conflit d'intérêts. Je tiens à remercier chacun d'entre vous d'être venu nous rencontrer ici aujourd'hui. J'espère que vous verrez certaines de vos idées reflétées dans notre rapport final.
La séance est levée.