Aller au contenu
AGEI - Comité spécial

Vieillissement (Spécial)

 

Délibérations du Comité sénatorial spécial sur le
Vieillissement

Fascicule 11 - Témoignages du 2 juin 2008 - séance du matin


SAINTE-ANNE, MANITOBA, le lundi 2 juin 2008

Le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement se réunit aujourd'hui à 9 h 2 pour examiner, afin d'en faire rapport, les incidences du vieillissement de la société canadienne et d'en faire rapport.

Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, messieurs et mesdames les membres du public, je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial spécial sur le vieillissement.

Notre comité examine les incidences du vieillissement de la société canadienne. Les enjeux complexes du vieillissement préoccupent les gouvernements depuis de nombreuses années. Ils se font cependant plus pressants à mesure que le nombre des personnes âgées augmente du fait d'une plus longue espérance de vie et du vieillissement de la génération d'après-guerre. Comme les programmes et les services publics destinés aux aînés sont essentiels à leur bien-être, il nous incombe en tant que parlementaires, de veiller à l'entière satisfaction de leurs besoins.

Nous sommes venus à Sainte-Anne pour entendre divers intervenants nous parler des incidences du vieillissement de notre société et plus particulièrement nous dire ce qu'ils pensent de notre deuxième rapport provisoire déposé au Sénat le 11 mars dernier. Le rapport met l'accent sur le vieillissement actif, les travailleurs âgés, la retraite et la sécurité du revenu, le vieillissement en santé, le vieillissement à l'endroit de son choix et la distribution régionale des frais de santé liés au vieillissement.

Sainte-Anne est le cinquième arrêt de notre tournée pancanadienne et nous avons hâte d'entendre les témoignages d'aujourd'hui, lesquels vont, j'en suis sûre, nous aider à élaborer un ensemble complet de recommandations pour notre rapport final.

Pour la première table ronde de la matinée, nous avons le plaisir d'accueillir, de la Villa Youville, M. Jean Balcaen; de Santé Sud-Est Inc., M. Aurèle Boisvert; du Centre Taché et Foyer Valade, M. Charles Gagné; et du Conseil communauté en santé du Manitoba, Mme Annie Bédard. Merci à tous d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui.

Nous commencerons par les déclarations préliminaires, pour, ensuite, passer aux questions des membres du comité.

Jean Balcaen, président, Villa Youville : Madame la présidente, en mon nom personnel et au nom de l'organisme que je représente, je tiens à vous souhaiter la bienvenue à la Villa Youville. Nous sommes heureux que vous ayez choisi Sainte-Anne comme point de rencontre et de consultation avec la communauté manitobaine. Votre choix de tenir cette audience dans un centre de services aux aînés est tout indiqué considérant le thème des présentations. Nous vous souhaitons une agréable journée parmi nous.

Nous aimerions, dans un premier temps, émettre un commentaire général concernant le deuxième rapport intérimaire de votre comité daté du mois de mars 2008. Cet important recueil d'enjeux et d'options par rapport à la population vieillissante nous brosse un portrait fidèle de la situation des aînés à travers le pays. La réalité décrite dans le document rejoint les expériences vécues par les aînés du Manitoba. De toute évidence, le constat est le même indépendamment de la province de résidence. Nous tenons donc à ajouter notre voix à votre rapport provisoire et, par le fait même, en ratifier le contenu, nous rallier aux identifications des enjeux présentés, et appuyer les propositions de modifications qui y sont avancées. Nous souhaitons que l'existence même de ce document soit le prélude d'un effort soutenu de participation et de collaboration entre tous les intervenants concernés par la condition des aînés au Canada afin que tous ensemble, nous continuions d'être soucieux de mener à bien ce dossier.

Le chapitre 5 de votre rapport provisoire traite de vieillir à l'endroit de son choix. C'est dans ce même esprit que nous aimerions ce matin porter votre attention sur la nécessité de tenir hautement prioritaire la dualité linguistique canadienne en ce qui a trait au maintien de la qualité de vie des aînés de langue française. La plupart du temps, qui parle langue, ne peut pas dissocier de celle-ci l'expression de la culture qui l'accompagne. Les deux forment un tout.

La Villa Youville, dont je suis président, existe depuis 43 ans et se fait un devoir depuis le tout début de s'occuper plus particulièrement des aînés francophones provenant de la région sud-est, des autres régions de la province, ainsi que pour environ 20 p. 100 d'entre eux, de la région urbaine de Winnipeg. Désignée officiellement organisme francophone il y a 15 ans, notre organisation a su se démarquer au fil des années en prodiguant toute sa gamme de services dans les deux langues officielles. Cette reconnaissance de notre compétence linguistique par le gouvernement manitobain ne venait en sorte que confirmer la raison d'être pour laquelle la Villa Youville avait initialement vu le jour. Nos prédécesseurs ont reconnu l'importance, pour la clientèle, d'être servie dans sa langue et de vivre dans un milieu qui lui est familier. Il est reconnu et accepté que de pouvoir fonctionner dans la langue de notre choix est un atout important dans la recherche d'une qualité de vie.

Souvent, quand le temps est venu de déménager dans une institution de santé de longue durée, l'heure est à la tristesse. On associe souvent ce changement d'adresse à de l'isolement, à l'arrivée dans un monde inconnu où l'on ne connaît personne. Pour un francophone, cela représente souvent un déracinement complet, un nouveau village, une nouvelle ville, une culture différente, un langage inhabituel, une pratique religieuse différente, et cetera. La langue et le bagage culturel de la nouvelle résidence contribuent principalement au sentiment de détachement et à la perte de connectivité avec sa communauté d'origine.

La sensibilité culturelle et linguistique que l'on retrouve dans une résidence pour les francophones, va contrebalancer la tension associée au déménagement. À la Villa Youville, par exemple, l'arrivée en institution, bien que stressante, constitue une entrée dans une nouvelle communauté, mais aussi des retrouvailles avec de vieilles connaissances. Lors de l'admission d'un nouveau client, il est habituel d'assister à de typiques retrouvailles où les embrassades sont authentiques et les démonstrations de connexions antérieures sont évidentes. Souvent, les gens se reconnaissent comme anciens voisins, associés en affaires, cousins lointains ou encore personnalités ayant assumé un certain rôle dans la communauté francophone manitobaine. Ces liens culturels et linguistiques sont, une quasi-garantie de l'adaptation du client à son nouveau milieu et de son intégration à sa nouvelle communauté. Dans bien des cas, les gens qui vivaient en isolement à la maison retrouvent en quelque sorte leur communauté. Ils sont réunis à nouveau avec ceux et celles qu'ils avaient l'habitude de côtoyer. Ils réintègrent leur réseau de connaissances, et soudainement, leur admission dans une institution de soins longue durée contribue à se sentir comme partie intégrante d'un regroupement qu'ils croyaient avoir perdu à jamais.

Une extension importante de ce phénomène que nous venons de décrire est que la réintégration à leur communauté francophone continue à s'effectuer via les visiteurs de l'institution. Ces derniers qui, pour la plupart, proviennent des mêmes patelins apportent à leur tour la version courante des faits extérieurs à la communauté de la Villa Youville. Les visiteurs de l'extérieur agissent comme ligne de vie avec la grande communauté francophone. On s'informe de nos connaissances communes, on se tient au courant de qui fait quoi, et on se fait juge des projets du conseil municipal. Somme toute, c'est comme si on était toujours là dans notre village en train de participer pleinement à son épanouissement. Tout ce qu'il y a de différent est que nous résidons à une nouvelle adresse.

Les nouvelles amitiés qui sont formées entre visiteurs et résidants deviennent aussi importantes que celles qui existent dans leur vie active. Nous n'avons qu'à penser à l'ami d'une connaissance antérieure qui invite sa sœur à rendre visite hebdomadairement à l'un de nos résidants, son nouvel ami, qu'elle a appris à connaître en venant visiter sa mère à la Villa.

En conclusion, il est évident que la langue et la culture jouent un rôle capital dans le bien-être général d'un individu. Il est donc très important de continuer à maintenir les acquis en matière de soins de santé qui sont respectueux de la réalité linguistique et culturelle du bénéficiaire. Une prise de conscience au niveau de l'importance de la sensibilisation continue aux divergences culturelles est intimement liée à la qualité de l'intervention auprès du client.

En terminant, nous aimerions vous remercier de nous avoir invités à prendre part à cette journée de partage d'idées et d'avoir bien voulu entendre nos propos sur le vieillissement. Nous vous applaudissons d'avoir entrepris une telle initiative et nous vous félicitons pour votre dévouement envers les questions relatives à nos aînés.

Aurèle Boisvert, président Santé Sud-Est Inc. : Madame la présidente, bonjour et bienvenue dans la région sud-est du Manitoba. Il me fait plaisir de vous parler des points saillants sur la réalité du vieillissement dans notre région, et ce, en tant que président du conseil d'administration de South Eastman Health/Santé Sud-Est.

[Traduction]

J'aimerais traiter de trois points, soit les services linguistiques, la pauvreté et les soins palliatifs aux personnes âgées.

[Français]

Selon l'Agence de la santé publique du Canada, la culture est l'un des 12 principaux déterminants de la santé. Et lorsqu'on parle de culture, on inclut la langue. La qualité des services de santé que reçoit un patient ou un client dépend beaucoup de sa capacité de communiquer dans sa langue. La communication est, et sera toujours un facteur clé de la santé des individus et de leur communauté. Et ceci est d'autant plus important chez la population vieillissante, car on a tendance à retourner à notre langue maternelle lorsqu'on vieillit.

Selon des recherches, une mauvaise communication entre un client et un prestataire de soins peut entre autres augmenter la probabilité qu'un patient comprenne mal les conseils médicaux ou le traitement prescrit et entraîner une baisse considérable de la qualité du service.

En tant qu'office régional de la santé désigné bilingue, il nous revient d'offrir à notre clientèle des services dans les deux langues officielles, soit en anglais et en français. Par contre, la réalité est que nous avons plusieurs défis à relever pour offrir toute la gamme de services et en français et en anglais, et ce, dû, entre autres, à des contraintes budgétaires.

À Santé Sud-Est, il nous faut des fonds destinés strictement au fait du bilinguisme afin de pouvoir rencontrer notre mandat linguistique. Il n'est plus logique de devoir être en compétition avec nous-mêmes pour affecter un budget à l'offre active des services en français, et ce, au dépourvu de la qualité ou de la quantité des services de santé que nous offrons.

Dans la région du sud-est du Manitoba, si nous avons déjà des difficultés à offrir des services dans les langues obligatoires, combien plus énorme sera le défi d'offrir un service en allemand, en ukrainien ou en espagnol, qui est langue maternelle de notre population unilingue immigrante croissante? Pour cette population unilingue vieillissante, il est aussi important de pouvoir communiquer dans leur langue maternelle afin d'assurer un suivi conformément aux directives du prestataire de soins.

[Traduction]

Le deuxième point sur lequel j'aimerais attirer votre attention est celui du vieillissement dans la pauvreté. Dans notre région, il y a peu d'initiatives de logements subventionnés avec un plafonnement des loyers qui rendrait le logement abordable à la population vieillissante vivant sur une pension de retraite.

Toutefois, quand il existe un plafond de loyer, l'ajout des coûts de logement supervisé en interdit souvent l'accès aux retraités à faible revenu. Le peu de places disponibles rend d'ailleurs encore plus difficile l'accès au logement abordable pour notre population vieillissante.

Qui plus est, avec l'augmentation du coût des matériaux de construction, les entrepreneurs ont du mal à implanter des complexes de logements abordables pour nos retraités à faible revenu. Ils doivent en effet rentrer dans leurs frais, si bien qu'il faut augmenter les loyers ou les prix de vente.

Les personnes âgées sont coincées : elles ne peuvent se permettre de payer le prix accru du logement et des services de soutien. Déjà, elles sont confrontées à l'augmentation du coût de la vie avec une pension restreinte. Comment faire face au coût croissant du logement et des dépenses courants avec de si faibles revenus?

Les personnes âgées méritent de vieillir dans la dignité et d'avoir une qualité de vie abordable à la portée de leurs moyens. Nos parents et nos grands-parents doivent avoir accès à un logement abordable; ils l'ont amplement mérité. Ils ont indubitablement le droit d'avoir un véritable chez eux où ils peuvent trouver un équilibre tant financier que spirituel, émotionnel et intellectuel.

Mon dernier point aujourd'hui est les services de soins palliatifs pour les personnes âgées. Beaucoup de progrès ont été accomplis au niveau fédéral, dans les provinces et dans notre région; mais il y a encore beaucoup à faire. D'après une étude récente de la Coalition pour des soins de vie de qualité du Canada, moins de 37 p. 100 des Canadiens qui se meurent reçoivent le type de soins voulus.

Nombreuses sont les personnes qui, à l'approche de la fin, préféreraient mourir chez elles, entourées de leur famille et de leurs amis, avec le soutien d'un personnel de soins palliatifs. Or, la plupart des gens meurent dans des hôpitaux et des foyers de soins personnels. Notre défi est de veiller à ce que notre personnel soit formé et appuyé afin d'assurer des soins de fin de vie de qualité.

Qui plus est, cette étude nationale indique qu'il peut y avoir des listes d'attente pour ces services essentiels. La question est grave, vu que les patients ayant besoin de soins palliatifs en sont aux derniers stades de leur vie et ne devraient pas avoir à attendre.

Enfin, nous constatons qu'une bonne part des Canadiens qui se meurent n'a jamais accès à des soins palliatifs. Dans notre région, il est indiqué que c'est à cause de la peur, de la stigmatisation et des obstacles administratifs, comme, par exemple, des médecins qui ne remplissent pas les formulaires de renvoi. Avec le vieillissement rapide de la population et l'augmentation des personnes chez lesquelles on diagnostique des maladies avancées, comme le cancer, il est essentiel que tous les Canadiens aient accès au programme, au soutien et au traitement qui leur assurera le confort et la dignité à la fin de la vie.

Il nous faut mettre en place les soutiens permettant de garantir aux individus qui se meurent un accès à des soins de fin de vie adéquats, qu'ils s'éteignent chez eux, à l'hôpital ou dans un foyer de soins personnels. Il y a dans notre région des zones rurales, éloignées géographiquement ou peu peuplées qui constituent un défi supplémentaire. Les résidants doivent se déplacer pour obtenir de l'aide. On nous a récemment rapporté que certains résidants refusent de recevoir des services, y compris un traitement aux rayons palliatif, parce qu'ils ne peuvent se permettre de payer l'essence pour leur voiture.

Notre office régional de la santé s'engage à assurer le bien-être et les meilleurs partenariats possibles dans le domaine de la santé avec des particuliers, des familles et des collectivités. C'est également en partenariat avec le gouvernement que nous pouvons apporter aux Canadiens et à nos résidants les services de soins de santé de qualité et la qualité de vie dont ils ont besoin et qu'ils méritent.

[Français]

Pour terminer, je tiens à vous remercier d'avoir pris le temps de m'entendre ce matin.

Charles Gagné, directeur général, Centre Taché et Foyer Valade : Madame la présidente, je suis directeur général du Centre Taché et du Foyer Valade. Vous allez m'excuser, je n'ai pas eu la chance de préparer un texte écrit, alors je vais simplement compléter ce que mes deux prédécesseurs ont présenté. D'ailleurs, je dois non seulement appuyer la présentation de M. Balcaen et de M. Boisvert, mais c'est certainement une réalité que nous vivons à Winnipeg dans le type de services que nous offrons, soit l'importance des services aux aînés et l'adaptation aux besoins de la population vieillissante de mes deux établissements. Je vais vous parler en tant que directeur général et vous faire part de notre réalité, qui parfois, peut nous garder éveillés la nuit, car notre mandat est de livrer des services à des personnes très vulnérables.

Le Foyer Valade et le Centre Taché sont deux foyers totalisant environ 464 lits. L'un des foyers est mandaté par la province pour desservir la communauté francophone; et l'autre foyer, le Centre Taché, de 314 lits, dessert la population de Winnipeg en offrant des services bilingues. Donc, on dessert principalement les francophones de Winnipeg.

À l'intérieur de ces deux établissements, nous offrons plusieurs services, dont des soins palliatifs, des soins de longue durée, des soins chroniques et nous avons des unités spécialisées pour personnes qui souffrent de démence ou d'Alzheimer. À l'intérieur de l'un de nos établissements, nous offrons aussi des services à une population dite « jeunes adultes », qui est essentiellement une population qui est aux dépens de fournisseurs de services dans des soins de longue durée faute de d'autres résidences à l'intérieur de la communauté pouvant répondre à leurs besoins. Ils ne sont pas dans notre établissement parce qu'ils sont âgés, ils sont là parce que, essentiellement, ils ont besoin de soins et de services.

Ce qui inévitablement garde un directeur général réveillé la nuit parfois, ce sont deux éléments et deux éléments interreliés, le premier étant la qualité des services. Et s'il y a une chose dans le rapport que je vous encouragerais à souligner davantage — et je n'ai fait qu'une première lecture du rapport —, c'est, indépendamment de là où elle reçoit les services, que la personne vieillissante, actuelle ou future, va exiger une qualité de services sans précédent, une qualité de services qu'on n'a pas encore connue. Sachez que c'est, de fait, la première génération de personnes vieillissantes que nous institutionnalisons dans ce qu'on appelle « des établissements de soins de longue durée ». Nous ne savons pas encore comment nous allons nous adapter au vieillissement des baby-boomers. Et on sait très bien que ce qu'ils rechercheront dans les services de soins de longue durée sera très différent de ce que nos parents recherchaient. On doit se poser la question à savoir s'ils vont vouloir le même niveau de services, car la génération des baby-boomers a influencé beaucoup de politiques et continuera d'influencer beaucoup de politiques. J'espère que ce rapport n'a pas été créé simplement pour répondre aux besoins des baby-boomers, car il faut quand même se rappeler que nous avons encore un autre 15 ans avant que les baby-boomers soient reconnus comme des personnes aînées. Il est fort probable que lorsque les baby-boomers auront 75 ans, la notion de personnes aînées sera définie autrement.

Un des éléments qui nous préoccupe présentement, en plus du niveau de la qualité de services, c'est le manque de main-d'oeuvre. La main-d'oeuvre change énormément dans le domaine de la santé; on doit se préoccuper énormément de la formation, du recrutement et de la rétention de cette main-d'oeuvre. Je ne crois pas généraliser, mais la main- d'oeuvre qui se retrouve maintenant dans les foyers de soins de longue durée, surtout au niveau des prestataires de services à la table de chevet — et je parle surtout de la main-d'oeuvre non professionnelle —, est en grande partie une main-d'oeuvre d'immigrants et d'immigrantes nouvellement arrivés au Canada. À Winnipeg, on compare parfois la main-d'oeuvre des foyers à celle de l'industrie du textile d'il y a 40, 50 ans. Au Foyer Valade, comme au Centre Taché, nous sommes en train de perdre ce que j'appellerais l'homogénéité de notre main-d'oeuvre qui, il y a dix à 20 ans, était primordialement francophone, franco-manitobienne et bien établie dans sa communauté, pour maintenant voir une main-d'oeuvre multiethnique, diversifiée, mais qui est à la fois bilingue, et qui, de plus en plus, n'est pas à notre service simplement parce que nous sommes un centre bilingue, mais parce qu'ils recherchent des milieux de travail stimulants.

Alors, c'est le défi auquel font face tous les foyers et même toutes les agences de services dans le domaine de la santé. Ce sera de plus en plus préoccupant, si les stratégies nationales au niveau de la main-d'oeuvre vont vraiment répondre aux besoins des personnes qui, dans les foyers de soins de longue durée, n'ont pas le même attrait médiatique ou politique que, par exemple, des personnes qui ont besoin des chirurgies pour remplacer leur genou ou leur hanche ou pour corriger leur maladie cardiaque. Sachez qu'une dame de 85 ans qui se casse la hanche dans un foyer n'a pas le même attrait, dans le système de santé ou pour le corps médical, qu'une personne de 55, 60 ans. Alors, il va falloir changer énormément cette perception, car on en verra de plus en plus. La qualité des services et la main-d'oeuvre sont deux éléments clés.

Le troisième commentaire que je veux faire, c'est qu'il faut — et à mon avis, ce n'est pas négociable — que les personnes vieillissantes qui demandent des services vivent dans une communauté où on les respecte. On doit respecter le fait que la langue et la culture sont primordiales dans le processus de vieillissement. Prenez ma mère, par exemple, qui n'a jamais été parfaitement bilingue, mais pouvait se débrouiller en anglais; maintenant, elle est résidante dans un de mes foyers et ne parle plus l'anglais. Alors, simplement se faire servir par une personne qui ne peut pas communiquer dans sa langue ajoute à son anxiété, à un niveau qui est absolument surprenant et dont — j'en ai été témoin — je n'avais pas imaginé les répercussions sur la qualité et l'offre des services, et le sentiment d'insécurité que cela apporte à la personne vieillissante.

En plus de la culture, un facteur important de cette communauté est la spiritualité. La génération du baby-boomer va réaliser qu'ils ne sont pas immortels, que tout l'aspect de la spiritualité, de la confessionnalité va prendre une dimension différente; je n'ai pas de doute, que cela prendra de l'importance dans la livraison des soins palliatifs et dans l'organisation de services autour de certaines communautés, car la clientèle va rechercher certains services en rapport à la spiritualité et à la confessionnalité, et il va falloir qu'on l'invente ou qu'on le développe afin de s'adapter à la communauté comme telle.

Je vous félicite pour le rapport, c'est un rapport qui fait une très bonne analyse de la situation actuelle et à venir. Et si j'ai un dernier commentaire à apporter, c'est que si on n'arrive pas à répondre et à s'adapter aux besoins toujours plus exigeants de la clientèle vieillissante, on va constater que le secteur privé accentuera l'écart entre les gens qui peuvent s'offrir ces soins et ceux qui ne peuvent pas se l'offrir. Alors, je crois que c'est une menace à long terme si nous n'arrivons pas, comme système, à offrir un service de qualité à tous les niveaux et à toutes les clientèles vieillissantes potentielles qui feront face à des besoins.

Annie Bédard, directrice générale, Conseil communauté en santé du Manitoba : Madame la présidente, étant donné que mes collègues ont illustré la situation de façon plus concrète, je vais peut-être revenir à des éléments qui touchent les langues officielles.

Madame la présidente, j'aimerais tout d'abord vous remercier d'avoir invité le Conseil communauté en santé du Manitoba à vous présenter nos commentaires sur le rapport de votre comité sur le vieillissement au Canada. J'aimerais vous féliciter pour la qualité du travail que vous avez fait sur un sujet d'aussi grande importance. La tâche que vous avez entreprise est colossale, étant donné la complexité de la situation et le large éventail des options qui s'offrent à nous.

Vous me permettrez aussi de vous souligner — je suis certaine, madame la présidente, que vous partagerez mon opinion —, que vous auriez difficilement pu trouver, à travers tout le pays, meilleur endroit que Sainte-Anne pour aborder les questions relatives au vieillissement et aux services les mieux adaptés à cet âge de notre vie et en particulier lorsqu'il s'agit des membres de communautés francophones en situation minoritaire. La communauté de Sainte-Anne a toujours été une pionnière dans ce domaine. La Villa Youville où vous avez choisi de tenir vos audiences est un exemple éloquent; un décor magnifique, comme vous avez pu le voir, des options de logement variées et adaptées, des services de santé à proximité. Et nous savons qu'ici, à la Villa Youville, la capacité de communiquer dans la langue maternelle du client est un facteur important. En somme, une communauté qui a fait, des services de santé aux aînés, une partie intégrante et dynamique de son économie.

Je suis la directrice générale du Conseil communauté en santé du Manitoba, le CCS; M. Charles Gagné est le président, mais aujourd'hui il portait un autre chapeau, alors je suis la porte-parole de l'organisme aujourd'hui. Le Conseil communauté en santé du Manitoba est l'un des 17 réseaux santé en français que l'on retrouve dans les provinces et territoires où les francophones sont minoritaires.

Mais avant de vous présenter plus en détail l'organisme que je représente, vous me permettrez de revenir sur un commentaire que vous avez déjà entendu concernant l'opportunité que votre rapport reconnaisse plus explicitement les besoins des communautés de langues officielles en situation minoritaire. On en a parlé ici, mais j'aimerais quand même souligner des points pour aller un peu plus dans le pourquoi. Bien sûr, il y a plusieurs témoins qui vous ont souligné que le rapport n'est pas assez explicite quant aux obligations du gouvernement fédéral vis-à-vis des communautés de langues officielles et ont suggéré que votre rapport exhorte le gouvernement fédéral à assumer des responsabilités précises vis-à-vis les communautés minoritaires de langues officielles, comme on vous a invité à le faire pour les Premières nations, les Inuits, les anciens combattants et les détenus de pénitenciers fédéraux. Alors aujourd'hui, comme je le disais, j'aimerais vous entretenir plus sur le pourquoi de cette recommandation et, finalement, vous offrir quelques pistes pour assurer qu'elles se traduisent dans les faits.

Comme vous le savez, la dualité linguistique est aujourd'hui au cœur de l'identité canadienne. Cette caractéristique fondamentale du Canada est inscrite dans la première loi sur les langues officielles adoptée en 1969 et, plus tard, dans la Charte des droits et libertés de 1982, ainsi que dans la refonte de la Loi sur les langues officielles de 1988 et divers arrêts de la Cour suprême donnant une interprétation des droits linguistiques prévus dans la Charte. La refonte de la loi de 1988 a statué, à l'article 41 — et là j'ouvre les parenthèses — que :

Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français et de l'anglais dans la société canadienne.

Comme vous le savez également, il y a une modification de la Loi sur les langues officielles qui a été adoptée en 2005 et qui rend cette obligation « judiciable ». C'est-à-dire que les cas de non-conformité à cette obligation de contribuer au développement des communautés minoritaires de langues officielles peuvent faire l'objet de recours judiciaire. Je ne suis pas juriste, mais on me dit que cette obligation qui est faite au gouvernement fédéral de promouvoir la dualité linguistique et d'appuyer le développement des communautés de langues officielles en situation minoritaire a un caractère quasi constitutionnel. C'est sur la base de ces éléments juridiques que le gouvernement fédéral a une obligation précise d'assurer que les politiques et programmes qui seront développés en matière de vieillissement tiennent compte des réalités vécues par les communautés francophones en situation minoritaire et que ces communautés aient un accès véritable aux programmes qui seront mis en œuvre. Ce fait mérite d'être souligné dans votre rapport, comme on le soulignait tout à l'heure, et c'est pourquoi nous avons besoin de votre appui et de celui de votre comité pour rappeler cette obligation quasi constitutionnelle.

Je vous entends déjà penser et dire que dans le cas du vieillissement, il s'agira bien souvent de responsabilités provinciales touchant les domaines tels que la santé et les services sociaux, ce sont des domaines où le rôle direct du gouvernement du Canada est assez limité. Les secteurs où ce sont les provinces ou les territoires qui ont la responsabilité première, et c'est à ce point-ci que j'aimerais vous parler de l'organisme que je représente : le Conseil communauté en santé du Manitoba. Comme je le disais plus tôt, le CCS est l'un des 17 réseaux membres de la Société santé en français; il a été incorporé en 2004 et a été mis sur pied grâce à un financement initial de Santé Canada via la Société santé en français. Très rapidement, nous avons reçu une reconnaissance officielle du gouvernement de la province du Manitoba comme porte-parole de la communauté francophone dans les secteurs de la santé et des services sociaux. Et nous pouvons dire aujourd'hui que nous sommes ce pont entre les partenaires au provincial et au fédéral, et les besoins de la communauté francophone au Manitoba. Nous avons initié et appuyé nombre d'initiatives visant à répondre aux besoins de nos aînés, mettant à contribution le levier d'argents fédéraux qui ont facilité l'engagement à long terme de la province dans des réalisations qui n'auraient probablement pas été possibles sans le coup de pouce de départ du fédéral.

Pour vous illustrer le tout, je vous donnerai un exemple : avec une modeste somme de 60,000 $ du gouvernement fédéral, les promoteurs de projet d'un centre de santé communautaire dans la communauté rurale de Notre-Dame de Lourdes ont pu développer un centre et mettre sur pied une équipe multidisciplinaire, ce qui leur a permis ensuite de mobiliser la communauté autour de ce projet et de réussir une collecte de fonds de presque deux millions de dollars, complétée par un investissement d'un million dollars du ministère de la Santé de la province. Aujourd'hui, la population de cette municipalité rurale — et on sait que les communautés rurales ont souvent plus de difficultés à offrir des services à leur population vieillissante — a accès à des programmes de promotion de la santé et de prévention des maladies, ainsi qu'à des soins de santé dans sa langue.

Je sais que je n'ai pas à vous convaincre de l'impact négatif des barrières linguistiques dans la prestation des services de santé, mais vous me permettrez cependant de vous citer rapidement une présentation intitulée The Impact of Language Barriers on Health Care, donnée par le Dr Alexander Green, associé à la Harvard Medical School, lors du troisième rendez-vous Santé en français à Ottawa en février 2007. L'une des recherches qu'il citait révélait que dans la population hispanophone américaine, presque la moitié des répondants provenant d'un ménage où l'espagnol est la langue utilisée au foyer estimaient éprouver des problèmes de communication avec leur médecin. Selon une autre étude réalisée par le Wirthlin Worldwide Survey, presque 20 p. 100 des répondants disaient s'être abstenus d'avoir recours aux services d'un médecin parce que leur médecin ne parlait pas leur langue, soit l'espagnol. De telles recherches sont importantes parce qu'elles mettent en lumière les principaux impacts des barrières linguistiques sur les soins de santé. C'est-à-dire que les personnes sont moins susceptibles de recourir aux services, elles sont moins susceptibles de comprendre les soins, il y a un risque accru d'erreurs médicales, il y a une moindre qualité des soins, il y a des risques accrus de manquement éthique, et la satisfaction du client est moindre.

Ce sont donc les impacts principaux des barrières linguistiques et c'est pour ces raisons qu'il est important de veiller à ce que les membres des communautés de langues officielles aient accès à des services de santé dans leur langue, comme nous l'avons illustré tout à l'heure avec mes collègues. Ce fait est encore plus vrai dans des catégories de population dont l'état de santé est précaire et dont la maîtrise de l'anglais laisse parfois à désirer.

Le CCS vient de terminer une première étude au Manitoba sur les personnes handicapées francophones, qui inclut bien sûr des personnes vieillissantes ayant des incapacités motrices. Un des principaux constats de cette recherche, outre les services nécessaires pour toute personne ayant une incapacité, est l'importance cruciale de l'accès à des services en français, et ce, afin d'être citoyen, citoyenne, à part entière. En plus de l'incapacité motrice, si on ajoute l'absence de services en français, l'impact sur la qualité de vie et la santé de la personne, cela parle de soi. Ces séquelles résultent en des coûts supplémentaires pour l'État et les familles.

Pour conclure cette section, nous vous demandons d'inscrire dans votre rapport la responsabilité du gouvernement du Canada de contribuer à l'épanouissement des communautés de langues officielles en situation minoritaire. Même si des services comme les services de santé sont d'abord de juridiction provinciale, il est important que le gouvernement du Canada exerce un leadership dans le domaine des langues officielles. Nous estimons que les réseaux Santé en français créés dans chaque province et territoire représentent un modèle de concertation des partenaires dans le respect des juridictions. Ce fait a d'ailleurs été reconnu dans le récent rapport de M. Bernard Lord, qui souligne que les réussites d'organismes de réseautage et de partenariat tels que ceux de la Société santé en français sont des exemples à suivre.

Le CCS du Manitoba est parvenu à devenir le forum de concertation de tous les partenaires intéressés à améliorer l'accès à des services de santé et des services sociaux en français pour les communautés francophones du Manitoba. La concertation mise en place par le CCS permet justement de réaliser des initiatives concrètes, mesurables au bénéfice de nos concitoyens, concitoyennes francophones sans être bloquées par des querelles de juridictions. Plutôt que de déplorer que votre rapport passe sous silence la dimension des langues officielles, j'ai plutôt voulu, ici, vous entretenir du pourquoi il est important que cette dimension figure dans votre rapport final et suggérer comment elle peut être prise en compte dans des domaines dits de responsabilité provinciale.

Le Conseil communauté en santé du Manitoba remercie le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement de l'invitation à présenter aujourd'hui une allocution. Nous croyons que le travail que vous avez entrepris est d'une extrême importance. J'espère que ces commentaires vous seront utiles et nous avons, je pense, bon espoir que les modifications que nous proposons seront bien entendues.

La présidente : Merci beaucoup, madame Bédard.

[Traduction]

Pour commencer, permettez-moi d'expliquer que notre comité a, en fait, choisi de se rendre dans des destinations inhabituelles pour un comité du Sénat. En effet, les comités du Sénat se rendent souvent dans de grandes villes, comme Montréal et Toronto, pas nous.

Quand j'ai commencé à envisager une visite au Manitoba, Sainte-Anne s'est tout de suite imposée. Le sénateur Chaput était bien sûr en faveur du choix, mais je crois que j'ai mis Sainte-Anne sur la liste avant même sa décision, pour la raison qu'on a avancée aujourd'hui : j'estimais très important d'entendre ce qu'avait à dire une collectivité francophone hors de la province de Québec. D'où notre présence aujourd'hui à Sainte-Anne.

Je voudrais vous demander, monsieur Gagné, de nous parler d'un programme au Centre Taché que vous n'avez pas abordé aujourd'hui, mais que j'ai toujours considéré comme unique. Il correspond à l'accent que nous mettons non seulement sur les soins nécessaires mais sur les aidants. J'aimerais que vous parliez brièvement de l'hôpital de jour et du fardeau dont il soulage de nombreux aidants, ceux qui ont la chance de pouvoir assurer à leurs proches les services du Centre Taché.

M. Gagné : Nous commençons juste à explorer comment lier les soins en institution avec les soins dans la collectivité. Pour l'instant, le système de soins de santé fonctionne un peu séparément, la collectivité d'un côté et les institutions de l'autre.

Le centre de soins de jour pour adultes du Centre Taché, le plus important dans la province, dessert environ 300 personnes âgées. Il offre huit programmes sur cinq jours; nous organisons trois programmes du soir visant les personnes qui vivent chez elles, dans leur collectivité ou dans leur résidence et qui veulent sortir une fois par semaine. Elles viennent au Centre Taché, où on leur sert un bon repas et où il y a des activités, des exercices et des rencontres. Le programme aide beaucoup les gens à maintenir leur autonomie.

Chaque matin, quand je me rends au travail à pied, surtout si nous sommes en janvier et qu'il fait moins 40, je suis frappé par la vue de ces personnes frêles, de 80 ou 85 ans, qui descendent d'un autobus de transport en commun — essentiel — avec leur marchette pour se rendre à ce centre de soins de jour pour adultes et je mesure combien il est important de leur donner une bonne raison de se lever le matin. C'est important, parce que l'une des caractéristiques du vieillissement est de ne pas avoir de raison de se lever le matin. Il faut donner aux personnes âgées une raison de sortir du lit le matin et c'est ce que fait le centre de jour de soins pour adultes.

Excusez mon émotion, mais j'ai le sentiment que nous avons échoué dans le domaine des soins de longue durée, car nous éliminons parfois cette raison de se lever le matin pour les personnes âgées institutionnalisées, même dans nos foyers. Il y a de grands progrès à accomplir dans ce domaine. C'est là qu'entrent en jeu les soins spirituels. J'entends le terme dans son acception la plus large.

Je voudrais parler également de l'importance du répit. Assurer un répit aux aidants, c'est les encourager à continuer à s'occuper des personnes qui leur tiennent à cœur. Quand les gens doivent envoyer leurs proches dans des foyers de soins de longue durée, nous leur demandons qui souffre le plus : la personne accueillie dans le foyer ou celle qui reste seule qui doit apprendre à vivre seule? C'est pourquoi un endroit comme le Centre Youville est un exemple extraordinaire. Il serait bon de s'en inspirer ailleurs, notre système en serait considérablement amélioré en termes de continuité des soins et de possibilité de vieillir dans l'endroit de son choix.

Le sénateur Mercer : Vous avez tous mentionné un thème qu'on a évoqué dans de nombreux endroits au pays, notamment dans ceux où vivent des minorités linguistiques, comme Moncton, au Nouveau-Brunswick. On nous l'a mentionné à Moncton, ainsi qu'à Sherbrooke, au Québec. C'est le thème de la disponibilité des professionnels de la santé, médecins et infirmières, qui travaillent en français, ainsi que de leur formation. Je suis intéressé par la question de la formation des médecins et des infirmières de la collectivité francophone au Manitoba.

Nous avons entendu parler des difficultés auxquelles ces professionnels se heurtent au Nouveau-Brunswick parce que, jusqu'à tout récemment, aucune formation en français n'était offerte aux médecins du Canada atlantique. Toutefois, il y a maintenant des étudiants en deuxième année de médecine à l'Université de Moncton, grâce à une coopération entre cette université de Moncton et celle de Sherbrooke. Ils se sont donc attaqués au problème.

La vraie difficulté est que nous ne formons pas assez de gens en médecine; mais elle est décuplée quand on se penche sur le cas des minorités linguistiques dans certaines régions du pays. Peut-être quelqu'un pourrait-il aborder la question et me dire ce qui se passe au Manitoba, pour la communauté franco-manitobaine?

M. Boisvert : J'enseigne au Collège universitaire de Saint-Boniface, secteur français de l'Université du Manitoba.

Nous avons conclu une entente avec l'Université d'Ottawa et l'Université de Sherbrooke, afin de pouvoir y envoyer ceux de nos étudiants qui souhaitent étudier la médecine en français. C'est, selon moi, un pas dans la bonne direction.

Toutefois, il faudrait plus de places pour ces étudiants et ce, pour deux raisons. Premièrement, quand une personne étudie pour devenir médecin, il est possible qu'elle décide de se spécialiser, ce qui est le cas, je crois, dans 50 p. 100 des cas. Il est donc possible qu'elle ne rentre pas dans sa propre collectivité, à cause de sa spécialité. Deuxièmement, quand nous envoyons nos étudiants à Ottawa et à Sherbrooke, ils ont généralement 21 ou 22 ans. S'ils trouvent un partenaire qui habite là-bas, rien ne garantit qu'ils reviendront; il faut donc être très prudent. S'ils reviennent, tant mieux, parce qu'ils reviennent peut-être avec un autre médecin; mais ce n'est pas le cas le plus fréquent. C'est pourquoi il nous faut plus d'occasions d'envoyer un plus grand nombre de nos étudiants dans ces universités.

L'Université du Manitoba devrait avoir un contingentement pour la formation de médecins bilingues. Ce devrait être, à mon avis, l'un des critères. La compétence et les résultats universitaires sont, bien sûr, des critères importants, mais il y a 500, 600, 700 personnes qui demandent à suivre des études de médecine. Un professeur membre du comité de sélection de ces candidats m'a dit qu'une fois le choix réduit à 200 candidats possibles, tous étaient en fait susceptibles de faire d'excellents médecins et qu'ils n'en retiennent que 100. Cela m'amène à penser que l'on pourrait envisager de garantir l'accès à certains de nos étudiants bilingues; cela pourrait devenir un critère, car c'est très important.

Je sais qu'ici, à Sainte-Anne, tous nos médecins sont francophones — une chance incroyable. N'empêche que nous pourrions avoir trois médecins de plus ici. L'idée est de recruter uniquement des médecins francophones ou bilingues, ce qui constitue un énorme défi.

Mme Bédard : Le défi est de taille pour les infirmières aussi. Nous avons maintenant la chance d'avoir un programme en études infirmières au Collège universitaire de Saint-Boniface, mais il n'existe que depuis peu de temps. Là encore, il s'agit de former assez d'infirmières pour répondre à la demande de différents établissements ainsi que des offices de santé régionaux. Le défi demeure.

Il est aussi difficile d'agir au bon moment. Par exemple, lorsque le programme arrive à son terme et que les infirmières cherchent des emplois, il s'écoule parfois beaucoup de temps entre le début de la recherche d'emploi et le moment où les établissements et les offices régionaux de la santé peuvent embaucher ces infirmières. Nous proposons la création d'un fonds pour ces organisations et établissements afin qu'ils puissent embaucher les infirmières étudiantes dès qu'elles sont disponibles à travailler. Si elles ne trouvent pas immédiatement d'emploi, elles iront ailleurs. Elles iront dans un autre établissement et nous perdons parfois ainsi bon nombre d'infirmières qui ont été formées pour devenir des professionnelles bilingues.

Le sénateur Mercer : A-t-on examiné de plus près le programme de l'Université de Moncton, où les étudiants à l'Université de Sherbrooke sont inscrits à Moncton? J'aime bien aussi la relation avec l'Université d'Ottawa. A-t-on songé à adapter le modèle de Moncton au Collège universitaire de Saint-Boniface?

M. Gagné : Certains seraient peut-être prêts à étudier le modèle, mais il y a une difficulté particulière au Manitoba : nous avons déjà une faculté de médecine. Ce n'est pas le cas au Nouveau-Brunswick et l'établissement de liens avec l'Université de Sherbrooke en a été facilité. Il faut donc toujours s'assurer que nous sommes en partenariat non seulement avec l'Université du Manitoba, mais aussi avec la communauté, et avec les établissements de formation. Je vais aussi parfois travailler à l'hôpital général de Saint-Boniface, une institution d'enseignement aussi affiliée à l'Université du Manitoba.

Au cours des quatre ou cinq dernières années, avec la promotion du Consortium national de formation en santé, je crois que nous avons vu davantage d'ouverture au niveau universitaire pour envisager une coopération transprovinciale en matière de formation. Fort heureusement, les universités n'ont plus autant leur vieille mentalité d'isolement et ont moins tendance à protéger leur territoire. Le modèle Sherbrooke-Moncton est souvent cité comme exemple à cet égard. La relation du Collège universitaire de Saint-Boniface avec l'Université d'Ottawa pourrait donner lieu à davantage de possibilités d'apprentissage, d'enseignement et d'études en français pour nos francophones, sans pour autant dégager l'Université du Manitoba de son obligation de former des professionnels qui resteront au Manitoba et de s'assurer que ses programmes de formation reconnaissent le besoin en médecins bilingues. J'en dirais autant pour les médecins autochtones. Je dirais qu'ils en ont la responsabilité.

La présidente : Cette année, l'école de médecine de l'Université McMaster a reçu 24 000 demandes d'admission. Pour l'Université d'Ottawa, c'était 14 000. Cela doit faire comprendre qu'il faut non seulement créer davantage de centres francophones, mais aussi plus d'écoles de médecine.

[Français]

Le sénateur Chaput : J'aimerais tout d'abord commencer par vous remercier tous les quatre. Comme membre de la communauté francophone du Manitoba et sénateur représentant par tradition cette communauté à Ottawa, cela me fait toujours très plaisir d'écouter vos présentations, cela ajoute à ma fierté et rend mon travail encore plus facile au Sénat. Je vous remercie tous les quatre.

Ma question sera d'ordre général et quiconque veut y répondre sera le bienvenu. Lors de vos présentations, vous avez parlé, avec raison, de l'importance de la sensibilité culturelle et linguistique, de la spiritualité et, de plus en plus, le choix pour la personne aînée de mourir chez elle. Alors, afin de permettre ce choix à la personne âgée de mourir chez elle, il y a certains services qui le préconisent. À titre d'exemple, monsieur Gagné, vous avez parlé de ce qui s'appelle en anglais day center, pour les centres urbains. Est-ce qu'il y a un centre ici qui offre ce genre de soins de jour pour les aînés, ou un principe semblable? Je me souviens qu'il a été question du bien-être des aînés. Est-ce une réalité? Il y a un centre ici pour les francophones de la région.

M. Balcaen : Oui, il y a un service de garde de jour pour les personnes âgées. On a près 75 à 80 participants en ce moment. Je sais que c'est très important parce que ma voisine, qui a 95 ans, en bénéficie. Et j'ai eu l'occasion de la conduire ou venir la chercher, après la garde de jour, pour l'entendre parler de ce qui s'était passé pendant toute la journée, du plus petit menu détail et puis de comment elle était contente d'être sortie de chez elle. Elle a 95 ans, elle est très lucide, très active physiquement et je pense qu'une des raisons c'est probablement le service de garde de jour à la Villa Youville.

Le sénateur Chaput : Est-ce que vous avez, ici, un moyen de déplacement semblable à celui du Centre Taché ou est-ce que la personne qui veut venir doit trouver elle-même son conducteur ou son bénévole?

M. Balcaen : Il existe des chauffeurs qui sont rémunérés pour le kilométrage pour conduire ces personnes-là et venir les chercher après.

Le sénateur Chaput : Ma deuxième question concerne les soins à domicile. Je n'ai pas entendu de commentaire à l'égard des soins à domicile et de l'importance de ces soins-là pour que la personne aînée, encore une fois, demeure le plus longtemps chez elle. Est-ce que je pourrais avoir des commentaires sur ces soins à domicile?

M. Boisvert : Dans notre région, quelqu'un qui a besoin des soins à domicile n'est jamais refusé. Les soins à domicile sont extrêmement importants pour nous dans notre région pour des raisons de compassion et de respect, de dignité pour la personne et aussi pour des raisons très pratiques, parce que nous avons le nombre de lits à soins aigus le plus bas dans la province au point de vue de proportion. Nous avons moins de deux lits par 1 000 personnes dans notre région pour les soins aigus. Notre but est donc de toujours garder les gens de notre région chez eux le plus longtemps possible ou, d'une autre façon, de dire de les garder hors de nos hôpitaux et hors de nos institutions à soins à longue durée. Nous avons, je pense, un très bon programme de soins à domicile. Cela ne veut pas dire qu'on ne pourrait pas l'améliorer et que peut-être il arrive un moment où que ceux qui vieillissent vont vouloir mourir chez eux. Les personnes qui donnent ces soins doivent recevoir plus de formation sur les soins palliatifs. La question de la formation de notre équipe envers ces soins est certainement un des défis que nous avons.

Mme Bédard : Je voudrais ajouter, concernant les soins à domicile, soit votre recommandation no 60, je crois, et vous suggérez un programme national. Je pense que c'est extrêmement important. Mais j'ajouterais à cela la formation de personnes ressources bilingues et aussi toute l'importance de l'aspect de confiance. Lorsqu'on reçoit des gens chez nous pour des soins à domicile, l'élément de confiance est très important, d'où l'importance d'offrir des services en français, des services adaptés à la réalité de ces gens-là, pour réduire des erreurs d'éthique, mais aussi des erreurs de compréhension lorsqu'on donne des directions pour les soins à la personne.

M. Gagné : J'appuie les points qui ont été soulevés. Votre section sur le logement, dans votre rapport, est très bien. Cependant, à un moment donné il va falloir qu'on se donne un certain équilibre. Il n'y a pas de doute qu'on peut garder des personnes à domicile si l'État est prêt à financer les soins à domicile. Tous les résidants, chez moi, avec les bonnes ressources, peuvent rester à la maison. C'est juste qu'économiquement, peut-être, ce n'est pas toujours le bon modèle.

Au Manitoba, on a remarqué qu'on veut créer tout un secteur entre celui des soins à domicile et le secteur de soins de longue durée, ce qu'on appelle des résidences pour personnes semi-autonomes. Par contre, on y voit beaucoup de difficultés. Même si on voit beaucoup de potentiel à développer ce secteur, on voit que la communauté ou les citoyens sont sensibilisés aux services à domicile et en font un droit. Et ceux qui sont moins sensibilisés aux services de soins à domicile vont peut-être rentrer dans le secteur de soins de longue durée prématurément. Il y aurait probablement un intermédiaire, à l'intérieur de leur stage de communauté, aux résidences pour personnes semi-autonomes — ce qu'on appellerait, en anglais, « supportive housing ».

Une des difficultés qu'on voit, c'est qu'il n'y a pas nécessairement de coordination. Un des éléments clés dans votre rapport, c'est la difficulté du système à intégrer tous ces services et une certaine peur errante dans le système de sensibiliser les personnes vieillissantes à leur gamme de services. Je suis souvent surpris d'apprendre que des gens avec qui je dois faire affaire ne connaissent pas les services qui sont disponibles à la personne vieillissante et comment nos fournisseurs de services de santé hésitent à sensibiliser cette clientèle par peur d'avoir une demande qui va surpasser la capacité d'y répondre.

Sachez que la communauté ou la clientèle des baby-boomers va nous amener vers une ère de transparence dans les services de santé qu'on n'a jamais connue. Alors par la force des choses, ils vont être sensibilisés, ils vont être informés et ils vont l'exiger, et l'État aura à trouver le bon équilibre économique pour que tout tombe en place afin de mieux desservir la communauté. Je ne suis pas certain si le fait d'en faire plus dans tout fera en sorte de mieux répondre aux besoins. Il faut de mieux coordonner tout ce qui existe et la gamme de ces services, de sorte que l'individu ait des choix et soit conscient de ses choix aux différentes étapes de la vie.

Le sénateur Chaput : Et cette coordination, monsieur Gagné, vous la voyez à quel niveau? Parce que, finalement, on a besoin d'une certaine coordination quelque part pour tous ces services.

M. Gagné : Dans un premier temps, c'est évidemment de juridiction provinciale et au niveau des juridictions, les autorités régionales ou soi-disant régionales, et c'est là où la coordination pourrait se faire. N'empêche, le fédéral a un énorme rôle à jouer non seulement par votre section au niveau de la péréquation et tous les incitatifs au niveau d'impôt, mais une des choses qu'il va falloir qu'on établisse, ce sont des normes beaucoup plus nationales en termes d'un minimum de services. Par exemple, au Manitoba, on a des normes sur les soins de longue durée et les soins à domicile qui sont très différentes de celles du Nouveau-Brunswick. Est-ce quelque chose dans le système au niveau national que l'on veut voir? C'est essentiellement des disparités assez énormes quant aux différents services; ou, est-ce qu'on veut voir une certaine standardisation qui pourrait amener à ensuite influencer les provinces dans leur planification avec le fédéral sur comment on arrive à coordonner cela? Ce n'est pas différent, à mon avis, du grand débat qu'on a eu dans la santé sur les indicateurs de performance et la création des institutions d'information. C'est cette même négociation, je pense, qu'on aura à faire à un moment donné par rapport aux standards de services que méritent les personnes vieillissantes.

[Traduction]

M. Boisvert : Au sujet des soins à domicile, le client qui reçoit les soins — et c'est probablement vrai — crois que ce service est gratuit. Quand les gens sont admis dans un foyer de soins personnels, c'est un service relativement gratuit. Les résidants doivent verser un pourcentage de leur revenu pour y rester. Il y a donc un extrême, avec les soins à domicile, et une autre, pour les foyers de soins personnels et les hôpitaux, où les soins sont gratuits. Toutefois, entre les soins à domicile, le foyer de soins personnels ou l'hôpital, il y a aussi les logements supervisés et les logements avec assistance, qui ne sont pas gratuits, et qui sont même très onéreux pour les personnes âgées.

Il y a donc un problème. Financièrement, il est avantageux de passer directement des soins à domicile à un foyer de soins personnels, plutôt que de passer par le logement supervisé ou avec assistance, où l'on donne toutefois des soins de bien meilleure qualité, dans certains cas. Il faut se pencher sur ce problème. On ne peut pas s'attendre à ce que quelqu'un qui paie un loyer de logement à prix abordable, par exemple, 400 $ par mois, déménage dans un logement supervisé ou avec assistance, sachant que dans un CHSLD, il ne paierait pas plus que son loyer. Or, pour un logement supervisé, il lui faudrait payer 1 000 $, 1 500 $ ou 2 000 $ par mois. C'est trop cher. C'est un grand problème.

La présidente : Vous qui êtes à la table sachez qu'à une certaine époque, je m'occupais de politiques provinciales et je me souviens quand on a lancé les soins à domicile. Je me souviens que les soins à domicile étaient seulement pour les personnes âgées et non pour le rétablissement postopératoire ou pour accélérer la sortie de l'hôpital de quelqu'un qui reçoit des soins de courte durée. En fait, c'était uniquement destiné aux personnes qui étaient en fin de vie. La situation est maintenant complètement renversée. En dollars réels, il reste maintenant moins d'argent pour les soins à domicile des personnes âgées que lorsque le programme a été lancé. Les hôpitaux de soins de courte durée y ont vu quelque chose de très intéressant. L'hospitalisation postopératoire pouvait passer de cinq jours à deux jours, grâce aux soins à domicile. Les frais sont donc assumés par un autre service, si l'on peut dire, et on peut ouvrir des lits de soins de courte durée, ce qui est certes positif.

Notre comité a songé à modifier la Loi canadienne sur la santé pour qu'elle s'applique non seulement aux hôpitaux et aux médecins, mais aussi aux soins à domicile, ce qui veut dire l'argent pourrait venir du gouvernement fédéral.

Que pensez-vous de cette proposition?

M. Boisvert : Je l'appuie tout à fait. Les soins à domicile seront probablement ce qui assurera la durabilité des soins de santé au Canada. Je ne vois pas comment les choses peuvent continuer au rythme actuel, compte tenu des coûts de la santé. Pour moi, les soins à domicile sont l'une des solutions, puisque comme vous l'avez dit, c'est une bonne affaire. Je pense que notre système est ainsi plus efficient. Cela répond aussi aux souhaits des patients qui veulent rentrer chez eux. Je suis tout à fait pour.

M. Gagné : J'appuie aussi cette idée. Il faut toutefois s'assurer que ceux qui prennent soin d'eux-mêmes et qui ne recourent pas aux soins à domicile, soient aussi indemnisés fiscalement, afin que le système soit juste.

Je pense aussi qu'en subventionnant des services, il faudra à un moment donné limiter les choix possibles pour les patients. Ce n'est qu'ainsi qu'on pourra coordonner le système et en assurer l'équité. Je connais des situations où des résidants ont droit à bien plus de ressources en soins à domicile que d'autres. Pour eux, il a suffi d'insister davantage, ou de communiquer avec le ministre.

La présidente : Le comité a une autre préoccupation. Nous avons constaté dans nos déplacements au pays qu'il est très clair que de graves inégalités existent entre les provinces et, par conséquent, entre les Canadiens.

J'ai reçu ce matin sur mon BlackBerry un message : mon adjoint de Winnipeg part pour Calgary, où sa mère est dans un foyer de soins personnels. Il préférerait que sa mère soit dans un foyer semblable à Winnipeg, mais il y a toutes sortes d'obstacles. Il est enfant unique, sans autres proches. Pour les soins à domicile, les soins à long terme et le reste, il n'y a pas de transférabilité. C'est l'une des raisons pour lesquelles notre comité envisage d'élargir la gamme de services actuellement couverts par la Loi canadienne sur la santé.

Le sénateur Cordy : J'aimerais revenir à la question de la pénurie de main-d'œuvre, car il faut certainement voir le système de soins de santé dans son ensemble. On y constate une pénurie, et je pense en particulier aux soins de santé pour les personnes âgées. Et si en plus on pense aux soins de santé pour personnes âgées en français, le problème n'est que plus grand.

Quand j'étais membre du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, des familles francophones faisant l'objet de transfert nous ont parlé. L'un des conjoints était transféré dans une petite collectivité ailleurs au pays. Il était alors très difficile de trouver un médecin de famille qui parle la langue officielle de leur choix. J'aime bien que vous ayez fait le lien entre la langue et la culture. Je n'y avais pas encore songé, mais c'est tout à fait sensé puisqu'il n'y a pas que la langue, il y a aussi les aspects culturels.

Nous avons beaucoup parlé des médecins et, en particulier, du besoin d'un plus grand nombre de médecins. Mais il n'y a pas que les médecins qui prennent soin des personnes âgées il y a aussi les auxiliaires et les travailleurs de la santé.

Qu'en est-il des services pour les francophones? Je m'intéresse au Manitoba et c'est la raison pour laquelle nous allons dans les petites collectivités et pas à Montréal. Qu'en est-il des travailleurs de la santé qui s'occupent des personnes âgées? Quelqu'un a dit que beaucoup de ces auxiliaires étaient des immigrants qui parlent la langue, mais qui n'ont pas nécessairement la culture. Pourriez-vous nous expliquer ce qu'il en est.

M. Gagné : Nous constatons une évolution démographique de notre main-d'œuvre, surtout chez les non professionnels. C'est du moins ce que j'ai constaté. Nous faisons des progrès pour la formation des professionnels, même s'il nous a fallu du temps pour nous y mettre au Manitoba, avec la création du programme de soins infirmiers du Collège universitaire de Saint-Boniface. Une infirmière diplômée aurait du mal à travailler dans un établissement de soins de longue durée à cause de son inexpérience, le rapport patient-bénéficiaire n'étant tout simplement pas le même.

Même si la question des soins infirmiers est particulièrement problématique, nous constatons de grands changements actuellement pour les travailleurs de la santé accrédités qui, chez nous, sont surtout de nouveaux arrivants. La demande pour ces travailleurs est énorme. Il y a aussi beaucoup de mobilité pour eux. La formation n'est pas coûteuse, les gens peuvent être accrédités et commencer à travailler dans les six mois, selon l'école.

Ici, notre association provinciale, la Société franco-manitobaine, a fait des démarches auprès des gouvernements provincial et fédéral pour augmenter l'immigration francophone au Manitoba et bon nombre des nouveaux arrivants ont choisi de travailler dans le domaine des soins de santé.

Le problème, c'est qu'au niveau local, nous ne pouvons pas faire l'intégration interculturelle nécessaire et nous perdons aussi parfois de la main-d'œuvre, à cause du dynamisme économique.

J'ai un bon exemple : quelqu'un avait été embauché et après trois mois en poste a compris qu'il pourrait faire plus d'argent en appliquant du revêtement de stuc pour une entreprise de construction. Nous avons donc perdu un travailleur de la santé, parce qu'il y avait une demande dans le secteur de la construction où l'on était prêt à donner la formation. Quand l'économie est très dynamique, comme c'est le cas maintenant, il est plus difficile de garder nos employés. Au niveau local toutefois et dans chaque province, il faut faire plus d'efforts au chapitre de l'intégration interculturelle. Nous devons nous assurer que les nouveaux arrivants, les nouveaux Canadiens, aient un sens d'appartenance à la communauté et perçoivent leur emploi, leur carrière, comme faisant partie de la communauté et non comme une étape vers autre chose. Ce sera la clé de notre succès.

C'est un peu injuste. J'ai parfois l'impression que nos personnes âgées sont vulnérables à cause du roulement des travailleurs.

J'ai peut-être été un peu cynique en faisant allusion au secteur du textile des années 1960. Mais c'est parfois l'impression que j'ai. Nous avons parmi notre effectif des gens qui ont de graves problèmes linguistiques tant en anglais qu'en français. Heureusement, les infirmières et leur équipe coordonnent les unités de manière à ce que ce soit efficace pour nos résidants, mais il reste que nous recevons de plus en plus de plaintes de la part des résidants au sujet des difficultés linguistiques du personnel.

C'est nouveau. Ce ne l'est pas, toutefois, pour les grands centres urbains comme Montréal et Toronto. C'est certainement nouveau à Winnipeg. On le verra probablement bientôt aussi dans les collectivités rurales parce qu'on ne peut pas toujours remplacer la main-d'œuvre existante par des travailleurs qui sont nés et qui ont grandi dans la collectivité. Il n'y a tout simplement pas suffisamment de monde.

Le sénateur Cordy : Ce sera certainement un problème pour nous à l'avenir, dans les soins de santé, si l'on veut aussi offrir des services dans d'autres langues que les non officielles.

Il est navrant que les travailleuses en garderie et ceux qui travaillent auprès des personnes âgées soient si mal payés. Il y a beaucoup de roulement parce que ces travailleurs peuvent être mieux rémunérés dans d'autres secteurs.

Je suis convaincue que le Manitoba vit la même chose que d'autres régions. Je suis de la Nouvelle-Écosse et les listes d'attente d'admission en résidence pour personnes âgées sont très longues. Est-ce pareil ici?

M. Boisvert : Très certainement. Nous avons de longues listes d'attente pour les foyers de soins personnels. Les gens se prévalent donc plus longtemps des soins à domicile, ce qui cause des pressions pour les services de soins à domicile.

Nous avons constaté que si nous pouvons donner localement la formation en soins de santé, que ce soit pour des auxiliaires ou des infirmiers ou infirmières auxiliaires, beaucoup resteront dans la région. Je suis en concurrence avec M. Gagné puisqu'il est de la région urbaine. Il est bien difficile d'attirer du personnel dans les régions rurales. Il faut donc offrir des cours localement, dans la région, pour retenir les étudiants. C'est une des façons de combler les besoins en formation.

Le sénateur Cordy : J'ai grandi au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse. J'ai demandé au PDG de l'office régional de la santé comment il recrutait du personnel et comment il le gardait. Il m'a répondu : « Quand les médecins viennent faire leur résidence dans une région rurale, nous nous assurons qu'ils aient une vie sociale excitante, de manière qu'ils trouvent ici une personne à aimer, et qu'ils restent. » Je pense que l'un de vous a fait référence plus tôt à une tactique semblable.

Je m'intéresse aux services bilingues. L'un de vous a dit qu'il fallait des fonds pour les services bilingues, parce qu'ils ont un prix. Certains d'entre vous ont mentionné que les soins de santé sont de compétence provinciale alors que le bilinguisme est de compétence fédérale. Comment veiller à ce qu'il y ait des services bilingues?

Madame Bédard, vous avez dit que le gouvernement fédéral devait jouer un rôle de leadership en matière de langues officielles. Comment nous assurer que le gouvernement fédéral s'acquitte de cette responsabilité, garantie par loi au Canada?

Mme Bédard : Comme je l'ai déjà dit, il y a le modèle de Société santé en français dont le réseau s'étend partout au Canada. Santé Canada peut aussi appuyer les réseaux, en collaboration avec la province. Je ne sais pas si vous avez vu les programmes de Société santé en français, mais l'objectif est de travailler en collaboration avec la province et nos partenaires, comme l'office régional de la santé du sud-est, ici, ou avec M. Gagné, au Centre Taché ou au Foyer Valade, afin d'élaborer une stratégie provinciale d'offre de services bilingues. L'argent du fédéral est essentiel pour les développements des collectivités francophones partout au Canada. C'est presque une question constitutionnelle. Je pense que le réseautage au sein de la province, entre tous les établissements qui offrent ces services, peut faciliter l'offre de services en français.

[Français]

Le sénateur Chaput : Madame Bédard, est-ce que l'argent que vous obtenez pour le réseautage provenait en partie du Plan d'action sur les langues officielles qui n'a pas encore été renouvelé?

Mme Bédard : Non.

[Traduction]

Le sénateur Chaput : Nous parlons du plan des langues officielles au Sénat.

Mme Bédard : C'est ce que je disais tout à l'heure. Dans le rapport qu'il a remis au gouvernement du Canada, Bernard Lord insistait sur l'importance de ce réseautage, sur son efficience et sur tous les résultats qui en découlent, mais le train est maintenant arrêté. Nous ne savons pas quand le plan d'action national sera approuvé; on entend dire que ce sera bientôt. Cependant, les soins de santé et les services sociaux constituent un énorme système, et il faut beaucoup de temps pour établir ces partenariats. Par conséquent, parce qu'il n'y a pas de plan d'action national, le train s'est vraiment arrêté d'une certaine façon, et il faudra du temps pour le remettre en branle.

Cela fait partie du plan d'action national et des fonds fédéraux qui y ont été affectés. Ce n'était que la phase 1, et nous attendons maintenant de passer à la phase suivante pour nous assurer que certains des services seront mis en œuvre.

La présidente : Comme nous le savons, le commissaire aux langues officielles a sévèrement critiqué dans son rapport la semaine dernière l'inaction dans ce dossier.

J'ai un déficit d'ouïe considérable, qui fait en sorte que j'ai du mal à comprendre quiconque parle avec un accent. S'agit-il là d'un facteur qui complique les choses? Pour ma part, même si la personne parle très bien anglais, je ne la comprendrai pas nécessairement à cause de son accent. Je ne peux que supposer qu'il en serait de même pour ceux qui viennent d'Afrique occidentale, par exemple. Il se peut qu'ils parlent couramment français, mais ils le parlent avec un accent différent qui peut faire en sorte que vos clients, monsieur Gagné, aient du mal à les comprendre.

M. Gagne : Oui, cela vaut dans les deux sens, tant pour les résidants que pour certains de nos nouveaux immigrants qui ne parlent peut-être par le même dialecte ou le même type de français. Nos résidants n'ont pas nécessairement l'habitude de cet accent, et, d'un autre côté, nous devons donner des consignes à nos employés et gérer le milieu de travail; dans le cas des nouveaux immigrants, ils ont du mal à comprendre les différences culturelles dans notre façon de faire les choses, et il y a souvent le risque qu'ils ne fassent pas les choses d'une manière sécuritaire.

Je trouve cela malheureux, surtout dans le domaine des soins à long terme, et je sais que nous consacrons beaucoup d'argent à former des professionnels. Aucune entreprise privée ne pourrait survivre avec le peu d'argent que nous consacrons au perfectionnement professionnel dans nos centres, qu'il s'agisse de formation linguistique, interculturelle ou même de la façon d'aborder le service au client. Nous consacrons très peu d'argent à cela parce que nous n'en avons tout simplement pas.

Quand je parle de qualité de service, les clients s'attendent en fait à pouvoir communiquer clairement et à comprendre ce qui se passe. C'est dans cette optique qu'il faut prêter attention aux attentes et aux besoins des clients. Parfois, nous accordons plus d'attention au système qu'à ce que recherchent les clients.

M. Boisvert : Comme nous le savons tous, nos budgets de santé sont très limités. Nous pourrions toujours faire beaucoup plus. Pour l'office régional de la santé, c'est un défi énorme que de devoir choisir entre l'argent consacré aux soins de santé et les fonds destinés aux services bilingues. Je pense qu'il y a là un problème fondamental, et la santé relève sans aucun doute de la compétence provinciale. S'agissant de la langue, c'est là en grande partie une responsabilité fédérale, et je suis persuadé que, dans les régions bilingues, il devrait y avoir des fonds fédéraux pour couvrir les coûts supplémentaires que doivent engager les régions. J'applaudis à ce qui a été fait. C'est formidable qu'on ait décidé, par exemple, de désigner cet établissement comme un établissement de langue française. Cela en dit long sur la qualité du service. Cependant, les coûts qui en découlent ne peuvent pas toujours être imputés à notre budget. Il y a tout simplement trop de concurrence dans la région pour tous les types de services, et il est vraiment malheureux que nous soyons obligés d'assumer ces coûts.

[Français]

La présidente : Honorables sénateurs, passons maintenant à notre deuxième table ronde. Nous avons le plaisir d'accueillir, de la Fédération des aînés franco-manitobains, Mme Thérèse Dorge et M. Gérald Curé et, à titre personnel, le Dr Gérald Gobeil. Merci à tous d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui. Nous commencerons par des déclarations préliminaires, pour ensuite passer aux questions des membres du comité.

Thérèse Dorge, présidente, la Fédération des aînés franco-manitobains Inc. : Madame la présidente, je suis présidente de la Fédération des aînés franco-manitobains, le FAFM. Nous travaillons avec un groupe d'à peu près 1 600 aînés à travers le Manitoba. Notre organisme existe depuis environ 30 ans. Depuis les trois ou quatre dernières années, nous avons eu un surcroît de membres et je crois qu'une des raisons, c'est le programme qu'on peut leur donner. Nous sommes une fédération et un organisme porte-parole officiel qui revendique et représente les intérêts des francophones de 55 ans et plus. Avec ses partenaires, elle contribue à la meilleure qualité de vie et participe en facilitant la mise en place des services en français. Elle vise le plein épanouissement de la collectivité francophone au Manitoba.

Mon collègue Gérard Curé, qui est le directeur de la fédération et moi, nous n'avons pas reçu le rapport avant ce matin. Nous avons appris que nous devions être ici mercredi de la semaine dernière. Si vous avez des questions, nous aimerions y répondre et ensuite nous pourrons vous donner un aperçu du comité et aussi ce qu'on pense de quelques recommandations qui sont faites dans le rapport.

Gérard Curé, directeur général, Fédération des aînés franco-manitobains Inc. : Madame la présidente, je suis le directeur général de la fédération depuis 2002. J'ai essayé d'apporter une nouvelle vision pour la FAFM. On travaille beaucoup en partenariat avec différents comités, dont le Centre de santé Saint-Boniface, qui est un de nos grands partenaires. On essaie de garder les gens actifs à tous points de vue dans leur communauté. Je pense que c'est important de garder nos gens aussi longtemps que possible dans leur communauté. Parce qu'on se rend compte que quand les gens quittent leur village natal ou leur milieu familial pour un lieu inconnu, ils dépérissent très vite. C'est un facteur qui démontre que c'est important de les garder aussi longtemps chez eux.

Le problème actuellement est que les services en français qu'on voudrait avoir pour nos gens dans les petites communautés, n'existent pas. Je pense que c'est quelque chose qu'il faut vraiment regarder afin de donner les meilleurs services et les garder chez eux le plus longtemps possible; les garder actifs, mais aussi leur donner les services nécessaires.

Dr Gérald Gobeil, à titre personnel : Je suis médecin ici à Sainte-Anne depuis 1965, alors cela fera bientôt 43 ans au 1er juillet. J'ai vécu une expérience remarquable avec les médecins que j'ai côtoyé. J'aimerais survoler le sujet du développement des services médicaux dans notre environnement depuis 1948.

Il y a, à Sainte-Anne, des médecins en permanence depuis 1948. Le premier fut Dr Francis Patrick Doyle, qui a réussi, par ses efforts, à faire construire un hôpital. Parce que dans le temps, il fallait aller à Saint-Boniface pour faire les accouchements sinon on les faisait à la maison et ce n'était pas vraiment pratique. Alors depuis ce temps, l'hôpital a été réaménagé par étapes, puis agrandi afin d'avoir des salles d'accouchement et, éventuellement, une salle de chirurgie, et bientôt nous aurons deux salles de chirurgie, car il y a deux chirurgiens qui font des consultations et de la chirurgie un jour par semaine chacun. La chirurgie a débuté en 1969 quand le Dr Jos Boucher, de Saint-Baptiste, est venu se joindre à nous alors que nous avions un anesthésiste en la personne du Dr Lemoyne. Le Dr Boucher ne pouvait plus continuer à faire des opérations à Maurice, parce qu'il n'y avait aucun autre médecin pour l'assister, il n'avait pas d'anesthésiste non plus.

L'hôpital, présentement, contient 20 lits dont quatre sont constamment occupés par des malades chroniques qui attendent d'entrer au foyer. Depuis le commencement, il y a eu 13 médecins, dont deux sont maintenant décédés et un autre est à la retraite; un a dû quitter et deux sont des femmes médecins. Tous les médecins sont bilingues et c'est une condition que nous imposons pour qu'un nouveau médecin puisse se joindre au groupe, car nos réunions se font en français, excepté au moment où il y a des personnes de langue anglaise qui y participent.

Nous sommes précepteurs pour des étudiants bilingues neuf mois sur 12. Nous sommes un groupe cohésif par nos convictions religieuses, l'honnêteté, l'intégrité, la sincérité et nos efforts d'instruire les patients sur la prévention et notre dévouement envers tous les niveaux de la société, les jeunes comme les vieux et surtout les vieillards. Nous sommes neuf médecins de famille dont cinq occupent, tour à tour, la garde 24 heures sur 24, et un qui pratique l'anesthésie générale. Deux d'entre nous viennent du Québec, les autres du Manitoba. Nous sommes diplômés des Universités de Sherbrooke, Montréal, Ottawa et de la faculté de médecine de l'Université du Manitoba. Nous tenons à offrir à notre région un service bilingue et nous continuons à développer autant de services hospitaliers que possible. Les cinq médecins sur appel sont compétents dans les cas urgents résultant d'accidents de voiture, des crises cardiaques et de césariennes. Nous avons de bonnes relations avec plusieurs spécialistes de Winnipeg et Saint-Boniface et, si nécessaire, un patient peut être transféré dans un hôpital tertiaire dans un cours délai. Nous desservons quatre cliniques satellites, dont une à Sainte-Agathe, une à Lorette, une à Falcon Lake et l'autre à La Broquerie, et nous desservons aussi la Villa Youville. Nous sommes rendus au point que nous n'acceptons plus de nouveaux patients. Nous avons assez de patients présentement pour employer trois médecins de plus. Alors, on n'a pas le temps de se tourner les pouces au bureau. En passant, nous acceptons à l'urgence 8 000 patients par année.

De pair, avec le progrès de notre clinique et de l'hôpital, en 1965 la Villa Youville — centre d'accueil pour personnes âgées et séniles — acceptait ses premiers clients. Depuis ce temps, il y a eu des agrandissements, dont le plus récent est cette partie dans laquelle nous sommes aujourd'hui. Voilà brièvement l'évolution de la médecine dans notre région de Sainte-Anne et du sud-est du Manitoba.

Je dois vous dire que nous avons des problèmes, en psychiatrie et en soins à domicile, soit qu'il manque les fonds nécessaires pour embaucher les infirmières ou qu'il n'y ait pas assez d'infirmières qui travaillent à cette tâche. Nous n'avons que deux psychiatres qui viennent passer une journée par mois chacun pour les soins psychiatriques. Alors, si on a quelqu'un à référer, il faut souvent attendre un mois avant de le faire, et dans les crises aiguës, il faut absolument qu'on les contraigne soit à l'Hôpital de Selkirk ou à Winnipeg à l'Hôpital général des sciences de santé.

Alors, juste pour dire que la personne qui a décrit l'âge de la retraite comme l'âge d'or, je pense qu'il avait fumé trop de marijuana, il voyait les choses en couleur.

[Traduction]

La présidente : J'étais ravie lorsqu'au début de votre conversation vous ayez parlé du Dr Pat Doyle. Pour les collègues qui se souviennent du sénateur Molgat, le sénateur Molgat et Pat Doyle étaient naturellement les meilleurs amis du monde. J'ai rencontré le Dr Doyle à plusieurs reprises en compagnie du sénateur Molgat. Cela faisait plaisir d'entendre son nom, car lorsque je faisais de la politique au Manitoba, le nom de Pat Doyle était synonyme de Sainte- Anne. Je ne pouvais pas parler de Sainte-Anne sans parler du Dr Pat Doyle dans la même phrase. C'est merveilleux que vous en ayez parlé.

Docteur Gobeil, vous avez spécifiquement parlé de l'absence des services de soins à domicile dans cette collectivité, mais vous n'avez pas donné de détails. J'aimerais que vous nous en parliez en détail, s'il vous plaît.

Dr Gobeil : Je vais vous donner un exemple. La semaine dernière, j'avais une patiente qui souffre de bronchectasie. C'est une maladie très grave. Elle a déjà subi des exérèses pulmonaires bilatérales partielles. Elle doit subir une pustulisation et une percussion deux fois par jour, ce qui l'empêche d'être hospitalisée pour de longues périodes. J'ai demandé que ces services lui soient offerts tous les jours, y compris les weekends. J'ai dû accepter qu'il n'était pas possible dans le cadre du programme d'offrir ces services le weekend, le personnel n'étant pas disponible pour le faire.

Où est le problème? Les infirmières me disent qu'ils n'ont qu'à leur donner des heures et qu'elles travailleront. Or, la personne qui est responsable de l'administration de ces services en particulier me dit qu'il n'est pas possible de trouver suffisamment d'infirmières pour faire la rotation. Je ne sais pas où est le problème réellement, car j'entends une histoire différente de part et d'autre.

La présidente : C'est intéressant, car nous avons en fait visité l'hôpital de Moncton il y a deux semaines, et il s'agit de l'hôpital qui administre le programme extramural, c'est-à-dire les services de soins à domicile. J'ai été assez impressionnée de retrouver sous un même toit les services de soins infirmiers, de spécialistes des troubles respiratoires, d'inhalothérapeutes, de physiothérapeutes, d'ergothérapeutes et de soins palliatifs. Chaque patient avait un dossier, mais ce dossier était transmis au plus grand nombre possible de gens au besoin. Ces services sont offerts à une importante collectivité urbaine et rurale. Il est évident que cela peut fonctionner si les ressources financières et autres sont disponibles, mais c'est un défi de taille pour notre comité, car c'est dans ce domaine qu'on nous dit constamment qu'il faut faire quelque chose, et à ce moment-ci on ne l'a pas fait encore et ce, à l'échelle du pays.

Parlez-moi, monsieur Curé, de certains des programmes que vous offrez et que vous espérez offrir à la communauté francophone.

[Français]

M. Curé : Un des projets qu'on envisage de faire, c'est surtout pour les régions rurales. Parce que nous, on est un organisme provincial qui a 18 clubs affiliés, trois qui sont urbains et 15 qui sont de la campagne. Quand on parle du rural, c'est toutes les régions éloignées, et c'est surtout là où les services ne sont pas adéquats. Le transport pour venir à Winnipeg devient un problème majeur. Alors, on aimerait offrir de meilleurs services dans les régions pour qu'il y ait, au moins, des services adéquats pour ces gens-là. Les services qu'on veut offrir, ce sont les soins à domicile... cela s'applique partout. Si on regarde les activités qu'on fait, c'est surtout des activités pour garder les gens actifs et autant que possible en santé. On offre des cours de nutrition, d'activités physiques, on donne des ateliers pour former des leaders dans les communautés, pour qu'ils puissent aider les gens à se prendre en main et à se garder en bonne santé le plus longtemps possible, des cours d'activités physiques, cela peut être aussi bien la marche, comme cela peut être... On a eu notre assemblée générale annuelle la semaine passée, et justement on parlait de toutes ces choses. On a offert des cours en nutrition, on a offert des cours pour combattre le stress; cela aussi a fonctionné dans certaines localités, puis dans d'autres localités cela n'a pas marché du tout. On a offert un programme de yoga du rire et dans certaines localités, cela est bien parti, mais les gens ont débarqué après la deuxième année. Des fois, ce sont les leaders qui nous manquent et qu'on doit aller chercher. Si on avait un peu plus d'argent pour former les gens chez eux et les garder chez eux le plus longtemps possible. Il y a donc toutes sortes d'activités, on fait des voyages, on organise des Jeux du printemps, on fait une fête estivale dans le cadre du Festival du voyageur. Tout cela pour rassembler les gens pour qu'ils puissent socialiser, se divertir et faire de beaux échanges.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Docteur Corbeil, vous avez parlé des psychiatres et du fait que vous aviez accès à Saint- Boniface, je pense, à Winnipeg, et des partenariats que vous avez là-bas. Je voudrais parler de toute la question de la santé mentale des personnes âgées. C'est très bien que les personnes âgées vivent plus longtemps. Nous savons cependant naturellement que plus les gens vivent longtemps, plus le risque de démence est élevé. Quels services sont offerts aux personnes âgées qui souffrent d'une forme de démence, et est-il facile d'avoir accès à des programmes? Y a- t-il des services de relève pour ceux qui prennent soin de ces personnes âgées?

[Français]

Dr Gobeil : De cette façon, à notre demande, quand on s'aperçoit qu'une personne ne fonctionne pas correctement, on peut demander pour un examen psychogériatrique afin de déterminer à quel niveau elle fonctionne. Pour les personnes qui sont ici au foyer, nous avons un psychogériatricien du nom de Dr Zacharias, qui vient très volontairement nous donner ses opinions, faire ses examens et ses recommandations. Lorsqu'on dépiste des problèmes de maladie mentale, au bureau, il faut les référer. Habituellement, on passe par un psychologue, qui, lui, prépare un rapport. Si le cas est assez sévère, il chemine son rapport vers le psychiatre qui vient à Steinbach une fois par mois. Il y en a deux qui viennent une fois par mois, un qui s'occupe plutôt des jeunes et l'autre des adultes. Il y a des fois où on voudrait agir tout de suite, mais on ne peut pas le faire facilement à cause de l'urgence de la situation et trop souvent, on est presque forcé d'admettre un patient à Selkirk s'il est assez dérangé, surtout quand il s'agit de cas qui ont des idées suicidaires ou des choses telles qu'on ne peut pas se permettre de les garder à l'hôpital ici parce qu'ils peuvent sortir quand ils veulent. Tandis que si on les admet dans un hôpital psychiatrique avec une bonne raison, ils doivent au moins les garder pour 48 heures afin de les examiner puis prendre une décision. Mais le problème, c'est qu'il y a toujours un tabou qui existe avec l'admission, surtout à l'hôpital de Selkirk. Parce que quand on voit des personnes agir follement, dans le village, on a la coutume de dire : « Bien, ils en ont échappé un à Selkirk! »

Les services s'améliorent à la longue, mais je trouve que cela prend beaucoup de temps. On espérerait au moins avoir un centre de santé mentale dans notre région. Dernièrement, j'ai voulu référer un patient au Eden Mental Health Centre à Winkler et j'ai parlé au psychiatre là-bas, puis il a dit : « Cela me fait de la peine, mais ton patient ne vient pas de notre région. » Donc, j'essaie de trouver quelque chose d'autre pour ce patient-là. Il y a des limites, car ils ont leur quota de patients et puis eux aussi ont de la difficulté, les centres de santé mentale sont toujours pleins.

[Traduction]

La présidente : Y a-t-il un centre au Manitoba qui offre des services en français à ceux qui ont des problèmes de santé mentale — je n'arrive pas à penser à un centre qui le ferait?

[Français]

Dr Gobeil : Pas que je sache, non.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Qu'arriverait-il à une personne âgée qui vit à la Villa Youville qui est indépendante, mais qui commencerait à montrer des signes de démence? Elle ne pourrait pas y rester, n'est-ce pas, ou est-ce qu'il y a une aile à cet effet?

[Français]

Dr Gobeil : Oui, nous avons différents niveaux de soins. Ceux qui ont vraiment dépéri au point qu'ils ne savent pas où ils sont, ou qui sont même un peu agressifs physiquement ou verbalement, nous avons une section qui est fermée à clé afin qu'ils ne puissent pas s'évader. Il y en a qui réussissent quand même à sortir, mais avec difficulté. Nous avons quatre niveaux de soins et les pires sont ceux qui ne savent pas où ils sont, qui ils sont ou quelle journée nous sommes. Malgré les services du Dr Zacharias, qui vient volontairement nous donner des conseils, offrir ses idées et ses recommandations, il reste que cela se passe en anglais. Il ne parle pas français. On vient à bout de se comprendre quand même.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Les études révèlent qu'il y a beaucoup de cas de dépression chez les personnes âgées, beaucoup plus qu'on pourrait le croire. C'est en grande partie en raison de leur isolement social. Nous parlons de l'isolement dans les régions rurales, mais une personne âgée peut également vivre isolée au centre-ville de Toronto. L'un de nos témoins précédents parlait d'un programme de jour qu'ils offraient aux personnes âgées. Il a dit que les personnes âgées se demandaient pourquoi elles devaient se lever le matin. C'est un gros problème pour les personnes âgées. Y a-t-il une façon pour un médecin de famille par exemple de diagnostiquer un problème de dépression chez les personnes âgées lors d'une visite?

[Français]

Dr Gobeil : Oui, nous essayons, autant que possible. Nous avons un service qu'on appelle « day care » ici même au foyer, qui fonctionne assez bien. Ce ne sont pas toutes les personnes qui veulent volontairement profiter du service et parfois, il faut les supplier et les conseiller plusieurs fois avant qu'ils acceptent de venir. Ils ont une réticence à venir à ces rencontres. Je pense, que c'est parce qu'il y a le spectre de devenir patient ou résidant ici. Je pense qu'ils essaient de dénier le fait qu'ils n'ont pas besoin de ces soins ou qu'ils pourraient s'en passer.

Si on prend une personne de notre institution qui semble parfaitement lucide, et que vous l'admettez à l'hôpital, je peux vous garantir, que le troisième jour, cette personne devient désorientée; c'est une chose qui revient lentement à la normale après que la personne s'est habituée à l'équipe de soignants et puis éventuellement elle s'améliore, puis on la retourne chez elle. Seulement qu'il n'y a aucun doute que si vous pouvez garder quelqu'un à domicile le plus longtemps possible, le mieux c'est, pour lui, parce que c'est un milieu familier et c'est à ce point là que les soins à domicile deviennent très importants, surtout pour les personnes les plus démunies et les plus malades.

[Traduction]

Le sénateur Cordy : Y a-t-il une pénurie de travailleurs de la santé francophones en psychiatrie, c'est-à-dire des psychiatres et des infirmiers ou infirmières en soins psychiatriques?

[Français]

Dr Gobeil : Très peu sont bilingues. En fait, je connais quelques infirmières qui sont bilingues, et notre psychologue est bilingue, mais c'est tout.

Mme Dorge : Je pense que le comité doit prendre conscience du traumatisme que cela peut créer pour un bon nombre de nos aînés francophones qui habitent dans nos petites communautés francophones et qui sont habitués à vivre en français — et qui, du jour au lendemain, se retrouvent à des centaines de kilomètres de chez eux, en résidence supervisée sans aucun service en français et sans aucun environnement francophone. L'expérience a montré que lorsqu'il y a une volonté politique, il y a des moyens de faire en sorte que les aînés francophones puissent être desservis dans leur langue et leur milieu résidentiel. On parle beaucoup de « home care », de pénurie de personnes aidantes. Il faut qu'il y ait ainsi des mesures incitatives et un peu plus de sensibilisation pour que les résidences puissent offrir de tels services.

On essaie d'empêcher l'isolement chez les aînés. Même si tu les amènes une journée au casino puis le mois après on ne fait rien, ils sont vraiment isolés dans leur petit monde, puis viennent les cas de démence ou de dépressions. Le but de notre fédération c'est d'essayer d'éviter cela. On sait qu'on est une langue minoritaire, mais il faut encore se battre pour avoir des services en français pour nos aînés francophones.

[Traduction]

La présidente : C'est exactement pour cette raison que nous sommes ici à Sainte-Anne ce matin.

Le sénateur Mercer : Je suis également membre du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Nous sommes en train de faire une étude sur la pauvreté rurale. Nous avons découvert — non pas que c'était une grosse surprise — qu'il y avait un manque de services médicaux dans toutes les régions rurales au Canada et qu'il y était difficile d'attirer des médecins praticiens. Cependant, le problème est encore plus grave dans les communautés où il y a une langue minoritaire, que ce soit l'anglais dans certaines parties du Québec ou, ce qui est encore plus probable, le français au Manitoba et dans certaines régions du Nouveau-Brunswick.

Vous avez dit que des internes venaient ici travailler dans le cadre de leur formation. Avez-vous réussi à attirer ces jeunes médecins pour qu'ils restent ici et d'où venaient-ils? S'agit-il de Manitobains, ou viennent-ils d'ailleurs, et est-ce qu'ils viennent ici uniquement pour compléter leurs études de sorte que vous ne les reverrez sans doute plus?

[Français]

Dr Gobeil : Notre fonction comme précepteurs c'est de pouvoir attirer les personnes capables de se joindre à nous. Il y en a quelques-uns qui viennent des provinces extérieures et qui font leurs études ici à Winnipeg. La plupart sont des Manitobains et on voit des élèves de toutes les années, de la première à la quatrième année de médecine. Il y a ceux qui font leur résidence dans des régions rurales comme la nôtre. Si l'on juge qu'ils en sont capables, on leur offre de venir chez nous afin de combler les manques dans notre groupe.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Le sénateur Cordy vous dirait que la réponse, c'est qu'ils aient une bonne vie sociale lorsqu'ils arrivent ici, ce qui n'est pas une mauvaise idée.

On arrive presque à la conclusion que les soins de santé universels ne sont universels que pour les gens qui vivent dans les grands centres, près des hôpitaux, où la langue parlée est leur langue maternelle. Les soins de santé ne sont pas universels pour tous, même pour ceux qui vivent dans des grands centres si la langue est différente de leur langue maternelle.

Ce matin, nous parlions à d'autres témoins du programme de formation à l'Université de Moncton dans le cadre de leur partenariat avec l'Université de Sherbrooke. Je crois comprendre qu'il y a un partenariat entre l'Université du Manitoba et l'Université d'Ottawa et l'Université de Sherbrooke. Ne serait-il pas plus avantageux pour des francophones de l'Ouest du Canada, particulièrement du Manitoba, qu'il y ait un programme semblable à celui de l'Université de Moncton? En fait, ils en sont actuellement à la deuxième année de la formation en médecine. Ils suivent une formation à l'Université de Moncton, mais sont en fait des étudiants de l'Université de Sherbrooke, et la faculté de médecine à l'Université de Sherbrooke supervise le programme à Moncton. Évidemment, l'objectif consiste à former des Franco-canadiens dans la région de l'Atlantique et de les garder dans cette région. Est-ce que cela aiderait à résoudre certains de vos problèmes et peut-être faire venir un plus grand nombre de médecins dans les régions francophones du Manitoba?

[Français]

Dr Gobeil : Je crois qu'il y a un nombre suffisant d'étudiants à l'Université du Manitoba qui sont bilingues et qui viennent déjà de notre région. Le problème c'est que la pratique de la médecine familiale n'est pas tellement attrayante pour eux, à cause des heures prolongées qu'ils s'attendent à pratiquer. Plusieurs d'entre eux s'attendent à travailler de 9 heures à 17 heures, alors que c'est vraiment le contraire qui se passe ici. Et d'autres vont en spécialité, évidemment. Alors on est chanceux quand on peut en attraper un. Si ces personnes étaient formées dans une université francophone, peut-être que les choses changeraient. Par contre, peut-être qu'ils vont être tentés de rester là où ils ont été instruits, aussi, ils ne reviendront pas nécessairement au Manitoba.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Si j'ai bien compris ce que vous avez dit précédemment, la plupart des médecins ici ont une charge de travail maximal et ne prennent pas de nouveaux patients, n'est-ce pas? Que font les gens dans la région s'ils n'ont pas de médecin?

[Français]

Dr Gobeil : C'est un problème vraiment sérieux. Et puis on vient de compléter une étude sur ce sujet. Moi, si je prends un ou deux patients de plus que je suis capable de voir dans le moment, lorsque je vais quitter, les autres vont être obligés de prendre la surcharge de mes patients. Plus j'en ai, moins ils deviendront capables de tous s'occuper d'eux. Mais la clientèle est grandissante. Lorsque nous avons besoin de médecins, c'est surtout avec les vieillards qui, en grande partie, sont beaucoup plus nombreux qu'avant, demandent beaucoup plus de temps pour les examiner correctement puis faire des diagnostics. C'est un vrai problème.

Je ne sais pas ce qui arrive aux personnes qui n'ont pas de médecin de famille. Moi, je serais prêt à prendre de nouveaux patients n'importe quand, mais il faut que je pense aux autres qui sont derrière moi, parce que lorsque je quitterai la place, cela va leur faire 2 000 patients de plus à s'occuper.

C'est la même chose qui se passe dans la ville voisine, Steinbach; ils ont beaucoup plus de médecins que nous et ils ne prennent pas de nouveaux patients. Cela devient un problème. Les patients qui ont besoin de soins médicaux viennent à l'urgence après les heures ou même pendant les heures de bureau et on est obligé de les desservir. Éventuellement, il y en a qui viennent à bout d'entrer dans le système, mais il faut vraiment faire attention, parce que si on veut donner un service adéquat, je pense qu'il ne faut pas se surcharger.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Merci.

Nous allons brièvement parler du fait qu'il était nécessaire d'avoir des activités pour garder les gens actifs et tenter de les attirer dans des centres comme la Villa Youville, non pas comme endroit où vivre, mais comme centre d'activités. À part la Villa Youville, y a-t-il d'autres installations dans la communauté franco-manitobaine spécifiquement conçues pour attirer les Franco-Manitobains plus âgés dans un centre, créer des activités pour les garder actifs tant sur le plan physique que mental et faire les petits voyages collectifs habituels que les gens aiment faire?

Mme Dodge : Je ne pense pas qu'il existe d'autres installations. Saint-Boniface a peut-être un endroit qui offre des programmes de jour. Les programmes sont créés localement et nous pouvons les parrainer ou les encourager. Nous n'avons pas d'argent pour les commanditer, mais nous encourageons les personnes âgées à se rencontrer de façon qu'elles ne soient pas isolées des unes des autres. Notre principale objectif c'est de garder les personnes âgées ensemble.

Pour ce qui est des médecins et des personnes âgées, à l'heure actuelle être médecin c'est une profession tandis qu'il y a quelques années c'était une vocation, les médecins étaient là 24 heures sur 24. Je ne pense pas nous puissions trouver de jeunes médecins qui fassent cela aujourd'hui, car ils ont leur famille et d'autres engagements.

Les gens viennent souvent nous voir pour nous demander de leur trouver un médecin francophone. Même s'il y en a à Saint-Boniface, ils sont rares. À Sainte-Anne, ils sont tous francophones mais les gens ne viennent pas jusqu'à Sainte- Anne; il y en a qui viennent, mais d'autres ne viennent pas.

La présidente : Cela ne semble pas être une bonne idée qu'ils se déplacent jusqu'à Sainte-Anne. Les médecins de Sainte-Anne ont du mal à s'occuper de leurs propres patients.

Mme Dodge : C'est un problème.

La présidente : Docteur Corbeil, je voudrais vous poser très franchement une question. Nous savons qu'il y a des pénuries de gériatres et de médecins de famille d'un bout à l'autre du pays. Jusqu'à quel point est-ce lié au fait que notre système médical, notamment les associations de médecin elles-mêmes, ne reconnaissent pas la valeur des médecins de famille et des gériatres pour ce qu'il s'agit de les rémunérer?

Dr Corbeil : Pouvez-vous s'il vous plaît répéter la question?

La présidente : Nous savons qu'un spécialiste en médecine interne est beaucoup mieux rémunéré qu'un médecin de famille. Nous savons par ailleurs qu'un spécialiste en chirurgie cardiaque est beaucoup mieux rémunéré qu'un gériatre qui s'occupe de nos personnes âgées. Jusqu'à quel point est-ce que cela est à la source de la pénurie de médecins de famille et de gériatres?

[Français]

Dr Gobeil : Je ne crois pas que c'est vraiment un problème, parce que personnellement, je trouve que ma rémunération est adéquate. Nous sommes récompensés moins qu'on devrait l'être, d'après les évaluations de l'Association médicale du Manitoba, car c'est surtout un certain pourcentage de ce que l'association recommande. Mais avec les années, les choses se sont améliorées et je suis certain qu'un médecin qui veut travailler huit heures par jour seulement peut se tirer d'affaire financièrement dans une place comme ici. C'est une question de persistance et puis il y a un don de soi. On n'est pas nécessairement limité aux heures de bureau, parfois il faut les dépasser, mais il faut être prêt à cela. Je pense que la question financière ne devrait pas être un problème.

C'est que si vous êtes à Winnipeg, cependant, c'est très facile pour un médecin en pratique générale d'obtenir, disons, des investigations ou des... Le problème est, aussi, en pratique générale, après 17 heures, si tes patients sont malades, ils vont dans un « walk-in clinic » ou à l'hôpital où ils attendent des heures interminables au point qu'ils quittent l'hôpital avant même de se faire soigner. Mais pour ces médecins-là, ils n'ont pas d'inquiétude, ils savent que leurs patients vont être traités éventuellement. Ici, nous avons un système qui voit à ce que les personnes qui se montrent à l'urgence soient examinées et traitées, puis acheminées vers le médecin qui les voit d'habitude, ou vers d'autres spécialistes à Winnipeg. Nous avons maintenant un contrat spécifique qui dit que tu reçois tant d'argent pour le temps que tu passes à l'urgence, que tu aies 20 ou un patient, il n'y a pas de différence, c'est le fait d'être sur appel.

Dans le temps, quand j'étais plus jeune, on était d'appel 24 heures sur 24, mais on n'avait aucune compensation pour les heures qu'on attendait au téléphone, pour se rendre à l'hôpital ou au chevet d'un malade. Les choses à ce niveau se sont améliorées beaucoup. Alors, je ne vois pas vraiment le problème. C'est peut-être moins attrayant de venir pratiquer dans une situation rurale que de pratiquer à Winnipeg, disons, dans notre cas.

Le sénateur Chaput : Docteur Gobeil, vous venez de dire que c'est peut-être moins attrayant de venir pratiquer ici. Je pense aux gens de l'extérieur qui regardent ce qui se passe ici à Sainte-Anne dans votre clinique où vous avez, en 2008, neuf médecins. Il y a quelque chose que vous faites ici, en termes de recrutement, qui fait que vous avez tant de médecins, des plus jeunes et des un peu moins jeunes comme vous, mais vous les avez quand même, puis ils sont tous bilingues. Qu'est-ce qui fait que ces médecins-là soient venus à la clinique travailler avec vous et pour les gens de cette région? C'est quoi votre recette, d'après vous?

Dr Gobeil : La recette est, premièrement, que nous les invitons à faire des stages pour leur montrer exactement de quelle façon nous agissons. Il ne faut pas oublier que dans notre groupe, il y a une cohésion, il y a un même esprit de travail, il y a le support des autres médecins avec qui on travaille, il y a toutes ces choses-là qui font qu'on a un groupe homogène, malgré nos différences personnelles. C'est très important du fait que moi je me fais demander tous les jours : « Qu'est-ce qu'on va faire quand tu vas être parti? » Je dis : « Ce jour-là n'est pas arrivé encore. Vous traverserez le pont quand on y arrivera. » Par contre, je peux leur garantir que comme leurs dossiers sont ici, que les autres médecins se chargeront de les prendre comme patients et qu'il y en aura des nouveaux.

Je pense que nous offrons des conditions de travail assez faciles à accepter. Dans le temps, j'étais d'appel 24 heures par jour pour une semaine. Il va sans dire qu'à la fin de cette semaine-là, j'étais absolument exténué. Maintenant, il y a encore des journées difficiles pour ceux qui sont d'appel, surtout les semaines de longs congés où il y a plusieurs accidents, mais au moins, celui qui est sur appel sait qu'il ne l'est que pour 24 heures et, après, un autre prendra la relève. En fin de semaine, il y a un échange de garde. On n'est pas absolument contraints à rester chez soi.

On essaie de traiter tout le monde sur le même pied, francophones, anglophones, ukrainiens ou tout ce que vous voulez. Je pense qu'on donne un service assez complet. Il a des personnes qui viennent de Sainte-Agathe, de Saint-Jean- Baptiste, de Vita, de Faulcon Lake, qui viennent de Hadashville, de Beauséjour, il y a des personnes de toutes ces places-là, La Broquerie, un peu partout, qui viennent ici et savent qu'il y a une certaine continuité de services.

Le sénateur Chaput : Une question très brève à vous, docteur Gobeil, et ensuite à madame. En termes de soins à domicile, avec l'expérience que vous avez comme médecin, est-ce qu'il y a eu des progrès dans la livraison de ces services ou est-ce qu'on a plutôt reculé?

Dr Gobeil : Non, c'est vraiment mieux que c'était au commencement.

Le sénateur Chaput : Donc, c'est quand même mieux?

Dr Gobeil : Oui.

Le sénateur Chaput : En termes d'heures et de divers services ou de coordination?

Dr Gobeil : Pour ce qui est d'avoir assez de personnes pour rendre ces services.

Le sénateur Chaput : Madame Dorge ou monsieur Curé, concernant le bénévolat, vous avez sûrement à recruter des bénévoles pour offrir tous ces services et activités. Comment faites-vous le recrutement de bénévoles? Avez-vous de l'aide? Est-ce un bénévole qui recrute d'autres bénévoles, comment est-ce que cela fonctionne?

Mme Dorge : Je crois que les bénévoles c'est nous et puis surtout Gérard. Nous avons une banque de bénévoles. Par exemple, pour les Jeux de printemps à Sainte-Agathe, c'est sont qui ont trouvé leurs bénévoles. C'était fantastique, tout a bien marché.

Si on veut avoir des bénévoles pour un projet de nutrition et qu'il faut les payer, je crois que notre fédération. « Va prendre la rivière ».

La semaine dernière, à notre assemblée générale annuelle, nous avons reconnu environ 40 bénévoles qui ont œuvré toute l'année, en travaillant pour organiser une soirée sociale, un tournoi de golf. Toutes ces choses-là sont faites bénévolement. Nous avons un programme à la radio, Envol 91, tous les lundis matin de 9 à 10 heures, spécialement pour les aînés.

Le sénateur Chaput : Est-ce une radio communautaire?

Mme Dorge : Une radio communautaire qui est animée par des bénévoles, avec des techniciens bénévoles, tout est bénévole.

Comme je disais, on a une banque de bénévoles. Ce sont surtout des personnes à la retraite qui see demandent : « Qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui? On veut faire quelque chose. » Et puis ils sont bénévoles, ils sont à la retraite, alors ils ont le temps.

Le sénateur Chaput : Est-ce que vous payez leurs déplacements, est-ce que vous leur donnez quelque chose ou c'est 100 p. 100 bénévole?

Mme Dorge : Je dirais 99,9 p. 100 bénévole. On paie le déplacement si nous avons une réunion, si ce n'est pas une réunion de bénévoles, mais une réunion du conseil provincial. Pour venir à la réunion, c'est à peu près le seul dédommagement qu'ils ont, en plus d'un dîner. Tout le reste est bénévole.

M. Curé : Si je peux juste ajouter qu'on a 18 clubs qui fonctionnent et de nos 18 clubs, il y a, en majorité, je dirais, entre sept à dix personnes bénévoles qui siègent aux conseils exécutifs. Chaque localité a son club et ce sont tous des bénévoles, donc il n'y a aucune rémunération. Les seuls qui sont rémunérés ce sont les représentants qui siègent au conseil provincial.

On est en train de travailler sur une banque de données, et c'est très difficile parce qu'il y a beaucoup de gens qui déménagent, donc c'est très difficile à mettre à jour. C'est un projet qu'on a entamé cette année. On s'aperçoit que pour le bénévolat, parmi les plus jeunes retraités, c'est plus difficile que les personnes qui sont rendues à un certain âge comme les 65 et plus. C'est plus facile pour ces derniers de faire du bénévolat justement parce qu'ils veulent s'éloigner de l'isolement. Tandis que les personnes qui prennent leur retraite à 55 ans ont fait leur travail pendant X nombre d'années et quand ils arrivent à un certain âge, ne veulent plus faire du bénévolat. Cela vient peut-être dix ans plus tard. Alors oui, il y a beaucoup de bénévolat.

[Traduction]

La présidente : Merci à tous d'être venus ici ce matin. L'information nous a été extrêmement utile.

Honorables sénateurs, nous lèverions normalement la séance, mais nous avons quelqu'un de spécial ici dans l'auditoire à qui je demanderais de bien vouloir se présenter à la table. Nous sommes dans un endroit fort intéressant; je pense que vous l'avez constaté en le traversant. Cependant, nous avons actuellement devant nous l'homme qui a rendu tout ceci possible. Il se trouve être l'époux du sénateur Chaput. Nous allons demander à M. Louis Bernardin de venir se joindre à nous pour nous en dire un petit peu plus long sur les installations dans lesquelles nous tenons nos réunions aujourd'hui.

Parlez-nous un peu de l'élaboration de ce centre et des choses merveilleuses qui s'y passent.

[Français]

Louis Bernardin, directeur, Villa Youville : Madame la présidente, les médecins, pour moi, c'était un gros problème que je ne voulais pas avoir, parce qu'être administrateur d'un hôpital, puis d'une maison pour personnes âgées, c'est déjà assez de problèmes que tu ne veux pas avoir des problèmes avec les médecins et ton personnel. On m'avait offert une job à Churchill, je ne l'ai pas prise parce que leur gros problème à Churchill était de recruter des médecins.

Je voudrais faire un survol de toutes les choses qui ont été dites, parce que je les ai toutes vécues. Je veux commencer par M. Woolen Noyes, qui était pesponsable du Elderly and Infirm Persons' Act, la seule personne qui avait une secrétaire à temps partiel. Nous autres, on voulait construire une maison pour personnes âgées, puis on ne savait pas ce dont on avait besoin. On a donc demandé à M. Woolen Noyes de venir en chaise roulante de Winnipeg pour nous parler de cela. Nous, le comité des Chevaliers de Colomb, on lui a demandé : « De quoi on a besoin? » Pour faire une histoire courte, il a dit : « Il y a seulement vous, de la communauté, qui sachez ce dont vous avez besoin. » On a pris du recul et on a décidé de bâtir 30 « hostels », puis, attachés à cela, 35 motels; on appelle cela des motels, mais ce sont des unités indépendantes, simples ou doubles.

Moi, j'étais « senior operator », « telegraph operator » sur le CNR et j'étais à la station quand ils m'ont logé comme administrateur de l'hôpital. Après, ils sont venus me chercher pour devenir le directeur de la Villa Youville. Je n'avais pas d'expérience, je commençais. J'ai donc commencé à prendre des cours à l'Université de Saskatoon en administration.

Dans notre « hostel », la porte d'entrée c'est une grosse porte pesante, et les gens ont commencé à poser des questions. Parce que moi, je prenais des gens qui étaient approuvés par le département de nursing pour hostel. Quand mon « hostel » était plein, alors je les plaçais dans les motels, dans des unités indépendantes, puis je leur donnais des services comme les repas, les activités. Ces gens-là, dans les motels, sont devenus mes bénévoles pour visiter les gens dans le « hostel ». Mais ils ne savaient pas que la Villa Youville était une maison indépendante; « elderly subsitized » mais indépendante. Alors, un monsieur et deux dames sont venus me voir, sans me ce qu'ils voulaient et ils sont venus discuter avec moi de nos services. Ce qu'ils voulaient savoir, c'est où je prenais mes compétences pour prendre les décisions et prendre du monde du « hostel », puis les mettre dans des unités indépendantes? Le monsieur, en rentrant, avait fait la remarque que la porte était pas mal pesante à ouvrir. Quand la question a été posée, j'ai su pourquoi il était venu me voir : c'est parce qu'il voulait me dire « in a nice way » : « Mêle-toi de tes affaires! » Il a suffit que soit une maison indépendante, et j'ai dit au monsieur : « Mais c'est toi qui l'as dit tout à l'heure, en rentrant, que la porte était pesante. J'ai dit : « Ceux qui peuvent ouvrir la porte, ils vont dans les motels; puis ceux qui ne peuvent pas ouvrir la porte, ils vont dans le nursing. » Alors,cela été réglé avec eux autres.

J'ai beaucoup apprécié les deux comités, d'un bout à l'autre. Vous avez beaucoup parlé sur les soins palliatifs. Mais cela, on l'a facilement avec les soeurs grises. Ce qui fait que cela ne me donne rien de vous en parler plus longuement, parce que les soins palliatifs sont venus avec les soeurs grises. Elles nous ont montré ce qu'étaient les soins palliatifs, comment on faisait ça, puis nous avons continué.

Je vous ai entendus parler de « day care », puis de « care givers and all that ». Nous autres, le « day care », on le faisait sans approbation de personne, parce qu'il y avait des gens qui en avaient besoin. On les faisait venir à la villa, puis on les intégrait dans les programmes existants. Le seul problème, c'est qu'ils étaient tellement bien servis, puis à la maison ils n'avaient tellement pas d'aide, qu'ils voulaient pas les ramener chez eux. On avait une maison à Hadashville qui était un peu un foyer privé pour les Ukrainiens, puis en été, la femme qui avait soin de cette maison-là était tellement surchargée, qu'on prenait des résidants vraiment pesants, « level 3 », et puis on les gardait pour deux semaines. Mais eux aussi c'était pareil, ils ne voulaient pas les reprendre. Cela se faisait en dehors du MHSE Manitoba Health's Commission, on ne pouvait pas faire ça.

J'ai entendu des commentaires sur les soins à domicile. Je suis d'accord avec Dr Gobeil qui a dit que les services de « home care » étaient aussi bien. Je sais que dans les années 1980, ils avaient coupé pas mal le service à domicile. Je trouvais cela déplorable parce que c'est vraiment la route à prendre pour ne pas que ça coûte trop cher, tout simplement, encourager les gens à rester chez eux aussi longtemps que possible.

Il a été question du « level of care ». Il y a les programmes d'accréditation qui dictent la condition des services dans une facilité quelconque, le programme d'ententes est à travers le pays, cela fait qu'on pourrait se fier là-dessus pour mesurer et comparer les services donnés à nos patients.

La démence est certainement un gros problème dans les foyers comme les nôtres, surtout au commencement. Parce que vous savez, « hostel », c'est le premier niveau au nursing et il y en a trois autres après. En quelques mois, nos résidants dépérissaient puis arrivaient à des « 2 », puis des « 3 », puis des « 4 ». Des fois, on était obligés de mettre des crochets aux portes de sortie parce qu'on ne pouvait pas laisser le monde se promener toute la nuit, on ne pouvait pas laisser les portes libres, surtout en hiver. On en a attrapé plusieurs dehors, ils avaient une mauvaise habitude, surtout les hommes, ils ouvraient la porte, il y a une talle de branches là, puis ils allaient uriner en dessous. Vous savez, on avait affaire à une génération qui était pauvre. Parce que chez nous, on avait non seulement la pauvreté, mais aussi un taux d'éducation qui était bas, ce sont des gens qui avaient besoin d'attention, beaucoup qu'aujourd'hui. J'imagine que les générations à venir vont être plus faciles à soigner.

Je vais vous parler encore de la démence; il y avait une dame, Mme Mettai, qui a vécu toute sa vie à Winnipeg. Elle était francophone, elle a marié un Anglais et elle a vécu toute sa vie en anglais. Quand ils ont voulu la placer, ils ont cherché pour une maison française et on était la seule, alors l'ont ramenée à Sainte-Anne. La dame oubliait; vous savez, elle avait tous les signes de démence. Finalement, elle avait quelques piastres, ce qui fait que le programme « Public Cost Fee » a été invité à envoyer un médecin pour faire son évaluation. Le médecin l'a déclarée folle, pas capable de gérer ses affaires personnelles. Quand j'ai su cela, j'étais vraiment fâché pour la simple raison qu'ils sont rentrés par la porte d'en arrière pour évaluer un de mes résidants sans m'en parler. Ils avaient déjà oublié que c'était une maison privée et qu'ils ne pouvaient pas faire cela. Alors, j'ai fait venir un psychiatre de Saint-Boniface, un francophone, et il a renversé la situation. Cela démontre que la langue, c'est très important. En vieillissant, tu redeviens ce que tu étais.

[Traduction]

Voici un bref aperçu des observations qui ont été faites ici aujourd'hui.

[Français]

Je ne sais pas si vous avez des questions. Vous savez, moi j'ai vécu cela toute ma vie. J'hésitais à venir aujourd'hui, pour la simple raison...

[Traduction]

Je voudrais dire autre chose. En fait, j'ajoute actuellement une pièce à notre maison pour que nous puissions prendre soin l'un de l'autre lorsque nous serons rendus là. Les maisons de retraite sont vraiment la dernière option.

La présidente : Oui, mais il ne faut pas oublier que pour ceux qui doivent aller en maison de retraite, il existe des installations comme celles-ci où ils peuvent se sentir à l'aise et utiliser leur langue maternelle, qu'il y a des gens qui s'occupent d'eux de façon respectueuse. Sainte-Anne a beaucoup de chance d'avoir ces installations, et nous vous remercions, monsieur Bernardin, pour votre contribution.

La séance est levée.


Haut de page