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AGEI - Comité spécial

Vieillissement (Spécial)

 

Délibérations du Comité sénatorial spécial sur le
Vieillissement

Fascicule 12 - Témoignages du 4 juin 2008 - séance de l'après-midi


VANCOUVER, Colombia-Britannique, le mercredi 4 juin 2008

Le Comité sénatorial spécial sur le vieillissement se réunit aujourd'hui, à 13 h 4, pour examiner, en vue d'en faire rapport, les incidences du vieillissement de la société canadienne.

Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Mesdames et messieurs les membres du public, bienvenue à la suite de la séance du Comité sénatorial spécial sur le vieillissement. Le comité examine les incidences du vieillissement de la société canadienne. Nous sommes à Vancouver cet après-midi pour entendre les témoignages des parties intéressées sur les incidences du vieillissement de la société, et, plus précisément, pour savoir ce qu'ils pensent de notre second rapport provisoire, que nous avons déposé devant le Sénat le 11 mars.

Cet après-midi, nous avons le plaisir de recevoir Mme Penny Bain, secrétaire et directrice du conseil d'administration du BC Centre for Elder Advocacy and Support, ainsi que Mme Charmaine Spencer, membre du conseil du Réseau canadien pour la prévention des mauvais traitements envers les aîné(e)s.

Le comité est très heureux de vous accueillir. Nous allons commencer par vos déclarations préliminaires, puis j'espère que nous aurons le temps de faire une période de questions.

Penny Bain, secrétaire et directrice, conseil d'administration, BC Centre for Elder Advocacy and Support : Merci, sénateur Carstairs. Il y a une chose que j'aimerais signaler : l'organisation que je représente est en pleine restructuration et, elle porte maintenant le nom de Centre for Elder Advocacy and Support, et c'est ce que je vais utiliser pour nous désigner. Vous allez voir cela dans mon mémoire aussi.

Je ne vais parler que pendant quelques instants, et ma collègue, Charmaine Spencer, va faire de même, puis nous allons toutes deux nous mettre à votre disposition pour répondre à vos questions.

Tout d'abord, j'aimerais simplement vous dire que Charmaine et moi sommes ici aujourd'hui pour parler de la question de la violence envers les adultes âgés du Canada. Je m'occupe de cette question en Colombie-Britannique. Charmaine, quant à elle, représente un groupe qui travaille en collaboration et examine la question de la violence envers les aînés à l'échelle nationale.

Nous sommes particulièrement préoccupées par toute la question de la violence envers les aînés. Nous avons remarqué que le premier mémoire, ou le plus récent mémoire de votre comité, ne faisait qu'aborder brièvement la question de la violence envers les personnes âgées, à partir de la page 29, sous l'angle des méthodes possibles pour lutter contre la violence et la négligence. Nous aimerions que la description de la violence faite aux aînés qui figure dans cette section soit beaucoup plus précise quant à la portée et aux répercussions de cette violence. Nous aimerions également que le contenu de la section soit beaucoup plus ciblé et spécifique quant à ce que les leaders du gouvernement fédéral pourraient faire pour rendre plus efficaces les différents aspects du système que nous utilisons actuellement pour régler les problèmes comme celui de la violence faite aux aînés.

Mes observations vont porter surtout sur l'intervention du système de justice pénale. Je sais que le Code criminel du Canada relève du gouvernement fédéral, mais l'administration du système de justice pénale est une responsabilité provinciale. Je veux vous parler de ces questions précises dans le contexte de la Colombie-Britannique, afin de vous montrer comment les leaders pourraient s'y prendre pour régler toute la question de la violence faite aux aînés. Il s'agit non pas nécessairement de modifier les lois, mais plutôt d'offrir une orientation et un soutien aux différentes initiatives provinciales touchant l'application efficace des politiques découlant du système de justice pénale.

Ma collègue va vous parler des recherches et du travail qu'elle a effectués dans une perspective plus large, parce que nous reconnaissons le fait que nous travaillons tous à régler le problème de la violence envers les aînés et à prévenir cette violence dans un contexte plus large que celui du système de justice pénale.

Je ne veux pas lire notre mémoire, que vous avez devant vous, par exemple la description de la violence envers les adultes âgés qui se trouve aux pages 2 et 3. Je veux simplement vous faire remarquer que la violence est une réalité qui dépasse largement la dimension physique, sexuelle et affective, qui sont des aspects qui viennent spontanément à l'esprit.

Dans le cadre de notre programme, une bonne partie de la violence que nous constatons entre dans la catégorie de l'exploitation financière. Il semble que l'un des domaines où les adultes âgés semblent le plus vulnérables et le plus souvent victimes, c'est l'aspect financier de leur vie. On a fait beaucoup de travail dans ce domaine, mais je dirais que, lorsque nous parlons d'exploitation financière, nous parlons par exemple de la fraude téléphonique. Il existe une organisation nationale qui est parrainée par la GRC, qui s'appelle PhoneBusters et qui lutte contre ce problème. Les chiffres fournis par l'organisation montrent que 90 p. 100 des actes de fraude téléphonique perpétrés au pays visent les adultes âgés.

C'est l'un des types de comportement de prédation dont nous parlons lorsque nous parlons de violence faite aux aînés, mais nous parlons également d'une forme d'exploitation financière des adultes âgés qui est le fait de la famille. C'est en grande partie quelque chose qu'on passe sous silence et qui est caché, au même titre que la violence familiale ou la violence faite aux enfants l'est depuis des années.

Je veux insister sur l'exploitation financière et sur l'aspect familial, parce que c'est une question qui rend souvent les gens mal à l'aise, mais les conséquences de ce genre de violence sont à l'origine de beaucoup d'appels et de demandes d'information que nous recevons. Je voulais donc simplement le souligner.

Un autre sujet qui rend souvent les gens en général mal à l'aise, c'est l'exploitation sexuelle des adultes âgés. Ce malaise rend la question difficile à aborder dans le domaine des politiques générales.

Nous parlons également du droit à la protection des renseignements personnels, à la confidentialité, que possèdent les adultes aînés comme tous les autres Canadiens. Il s'agit de droits fondamentaux de la personne dans différents contextes, mais surtout dans le secteur des soins de santé, et ainsi de suite.

Enfin, nous parlons également de négligence, et, comme je me concentre sur le système de justice pénale, bien entendu, il existe des critères très élevés pour établir ce qui constitue de la négligence. Gardez simplement à l'esprit que la négligence fait partie des différentes formes de violence.

Je pense que vous pouvez probablement imaginer les raisons pour lesquelles les aînés deviennent la cible des comportements de prédation des membres de la famille ou de tierces parties qui essaient de profiter d'eux sur le plan financier. Toutes nos préoccupations au sujet des membres de notre société qui sont les moins aptes à se protéger touchent également les adultes âgés qui commencent à avoir des problèmes de santé, notamment. Nous savons, pour avoir consulté des statistiques générales sur les actes criminels, que les gens dont la santé est fragile ou qui ont un handicap sont beaucoup plus souvent la cible de comportements de prédation ou criminels.

Nous savons que le fait de subir de la violence et de la négligence — et ce que je dis est vrai pour tout le monde, peu importe l'âge, mais je parle plus précisément des adultes âgés — a des répercussions extrêmement profondes sur la santé des victimes. Ces actes minent leur confiance en soi, leur estime de soi. Ils peuvent mener à la dépression, parce que, dans de nombreux cas, la relation entre la victime et l'auteur des actes de violence et de négligence est une relation importante.

Les facteurs de stress liés à ces conditions de vie et le fait que les systèmes gouvernementaux qui sont censés permettre de régler ces problèmes ne donnent pas les résultats escomptés engendrent des conséquences très graves sur le plan de la santé. Les problèmes deviennent ainsi cycliques. Vous voyez que si une personne remplace une relation où il y a de la violence par une autre où il y en a aussi, c'est un cercle vicieux, et la capacité de la personne de fonctionner et de s'occuper d'elle-même diminue.

Les activités des 15 dernières années de notre organisation ont été axées surtout sur les personnes âgées, et nous nous sommes occupés soit de victimes, soit de personnes qui sont simplement vulnérables. Nous essayons de leur fournir de l'information juridique et d'intervenir. Nos activités sont financées depuis de nombreuses années par la B.C. Law Foundation.

Nous avons un technicien juridique très compétent qui répond à environ 1 600 appels par année. Dans certains cas, il finit par représenter la personne qui appelle. La majeure partie de son travail consiste cependant à fournir de l'information juridique au téléphone à des personnes qui appellent de partout en Colombie-Britannique.

En plus de ces services d'information juridiques, l'organisation a créé du matériel de formation et offre un certain nombre d'ateliers de formation à des professionnels qui travaillent dans le domaine de la violence faite aux aînés.

Nous avons élaboré une partie de ce matériel grâce au financement que nous avons reçu pendant trois ans du Centre national de prévention du crime. Ça a donné une trousse d'information très détaillée. Les travaux de recherche que nous avons faits pour mettre au point cette trousse sont à l'origine des recommandations dont je vais parler tout à l'heure lorsque j'aborderai des points précis au sujet du système de justice.

Nous venons tout juste de recevoir du financement de la part de la B.C. Law Foundation pour fonder une clinique d'aide juridique. Nous sommes en train d'embaucher un avocat qui pourra représenter des adultes âgés et les aider à faire valoir certains recours judiciaires qu'ils n'arriveraient peut-être pas à faire valoir sans lui, parce que notre régime d'aide juridique provincial est assez limité en ce qui concerne le soutien juridique offert aux victimes.

Les adultes âgés qui sont l'auteur présumé d'un crime peuvent certainement avoir accès à l'aide juridique normale. Cependant, s'ils sont la victime d'un acte criminel, par exemple, l'exploitation financière par un membre de leur famille, et s'ils n'ont pas les moyens d'avoir recours à un avocat, nous allons leur offrir l'une des solutions de rechange possibles dans la province pour ce genre de situation.

Mes observations, pour ce qui touche le centre, ont trait principalement au rôle adéquat du gouvernement fédéral pour ce qui est d'aider les Canadiens à se protéger contre la violence et la négligence. Nous avons formulé ces recommandations en fonction, comme je l'ai déjà mentionné, des travaux de recherche financés par le Centre national de prévention du crime. Depuis, ce centre a changé de priorités, ce qui fait que la dernière fois que nous avons demandé du financement pour poursuivre ce travail, on nous a répondu : « Non, nous ne finançons que des projets axés sur la jeunesse. » C'était l'an dernier. Cette année, le Centre national de prévention du crime ne finance que des projets de prévention de la toxicomanie.

Je dirais donc que, en gros, l'un des messages que j'ai à livrer, c'est qu'on ne semble pas reconnaître, au Centre national de prévention du crime, que la prévention du crime doit toucher tous les groupes d'âge. Ce n'est pas que le gouvernement fédéral ne finance pas d'autres activités dans le domaine, mais c'est que ce centre nous a beaucoup soutenus pendant des années.

Je veux vous donner deux ou trois exemples d'appels auxquels j'ai moi-même répondu. J'ai pris ma retraite, mais j'ai été directrice générale du centre, et, dans le cadre de ce poste, j'ai surtout répondu, à titre de technicienne juridique, à toutes ces demandes d'information au téléphone dont je vous ai parlé déjà, mais j'ai reçu d'autres appels aussi, et je voulais vous donner quelques exemples du genre d'appels que nous recevons habituellement.

La toxicomanie peut être un problème énorme au sein de la population, et j'ai reçu des appels d'adultes âgés qui étaient harcelés et qui étaient victimes d'actes de violence commis par leurs enfants d'âge adulte et toxicomanes. Dans un scénario particulier, je parle d'un petit-fils, mais ça pourrait être aussi le fils de quelqu'un. Lorsqu'un membre de la famille qui est toxicomane sait qu'un membre âgé de la famille dispose de certaines ressources financières, il arrive souvent que cette personne âgée devienne la cible de pressions subtiles, puisqu'il est difficile pour la famille de faire la distinction entre les cadeaux qu'il est naturel pour les grands-parents de faire à leurs petits-enfants ou à leurs enfants et la coercition. Bien souvent, il est très clair qu'on a dépassé les bornes et que la personne âgée craint d'être en danger si elle ne met pas toutes ces ressources à la disposition de l'auteur des actes de violence. De quelle façon le système de justice pénale doit-il intervenir dans ce genre de cas?

Nous recevons souvent des appels de soignants, et surtout de gestionnaires d'établissements qui offrent des soins aux personnes âgées, et ces gens veulent simplement obtenir de l'information. Nous ne représentons pas ces organisations ou établissements. Nous ne représentons que les personnes âgées elles-mêmes, mais, évidemment, nous acceptons de donner de l'information aux membres de la famille et à d'autres personnes.

Un scénario qui est souvent le premier indice qu'un membre de la famille exploite financièrement une personne âgée, c'est le cas où par exemple, cette personne âgée vit dans un établissement de soins et a donné une procuration à un fils d'âge adulte, par exemple. Le fils utilise l'argent de son père ou de sa mère pour lui, même si son devoir est de dépenser l'argent pour répondre aux besoins de son père et de sa mère, ce qui est l'objectif de la procuration. Ce qui va arriver dans ce cas, c'est que nous allons recevoir un appel de la part du gestionnaire de l'établissement qui va nous expliquer que les factures du père ou du grand-père ne sont pas payées; que pouvons-nous faire? Ce qu'il y a là-dessous, c'est un comportement criminel, le détournement des fonds appartenant à la personne âgée.

En Colombie-Britannique, il y a un réseau complexe composé de la régie de la santé, du curateur public et du tuteur. Il y a aussi dans la province des travailleurs sociaux qui s'occupent des victimes. Il y a un certain nombre d'organismes qui peuvent intervenir. Nous avons un réseau au sujet duquel vous allez lire certaines choses dans le mémoire de la Community Response Network Association. Nous avons un système auquel la loi provinciale a conféré le mandat de rassembler les groupes communautaires dans le but d'intervenir en cas de violence envers les aînés.

Il y a un certain nombre de façons d'intervenir dans ce genre de situations au sein du réseau de la santé, du système judiciaire, et, si je peux appeler cela comme ça, du système de soutien social. Je voulais cependant me concentrer sur ce qui constitue une intervention appropriée du système de justice pénale lorsqu'il est clair qu'un acte criminel a été perpétré, et, dans bien des cas, il est tout à fait clair que les gestes posés ne sont pas quelque chose que l'adulte âgé a vraiment approuvé. Bien entendu, ça devient alors une zone grise, comme je dis, lorsqu'il s'agit de relations familiales.

Bien sûr, le système de justice pénale a ses façons habituelles d'intervenir lorsqu'un crime a été commis. Ce que nous avons constaté, dans le cadre des études et des travaux que nous avons effectués, c'est qu'un certain nombre des interventions du système de justice pénale ne sont pas appropriées dans les cas de violence faite aux aînés. Les mesures qui sont la façon normale d'intervenir en cas, disons de vol dans une banque ou dans la rue, ne sont pas nécessairement la bonne façon d'obliger les auteurs de ces actes à rendre des comptes. Grosso modo, nous devons les empêcher de continuer de perpétrer les actes en question et espérer qu'il sera possible de récupérer une partie des fonds.

Nous devons forcer la personne à rendre compte de ses actes et mettre en place un système de protection pour que l'exploitation cesse et pour assurer la sécurité de l'adulte âgé. Enfin, par des recours civils et certains recours pénaux, si tout l'argent n'est pas déjà allé chez le vendeur de cocaïne ou ailleurs, nous devons trouver le moyen de récupérer une partie de l'argent pour le remettre à la personne âgée.

Vous pouvez imaginer que c'est simple : si c'est un crime, c'est un crime et c'est la police qui va s'en occuper. Mais les problèmes découlent du genre de recours qui est le plus naturel pour le système de justice pénale — l'arrestation et la détention, l'application éventuelle d'ordonnances de protection prononcées par le juge au tribunal, et ainsi de suite. Lorsqu'on ajoute aux mesures du système de justice pénale les recours civils comme les ordonnances de protection civile et les poursuites au civil dans le but de récupérer l'argent, tout devient très confus.

En Colombie-Britannique, ce qui est une source de confusion, c'est que les régies de la santé de la province ont, de par la loi provinciale, le mandat d'enquêter lorsqu'il y a une situation de violence ou de négligence, et on mêle souvent ce mandat et les mesures du système de justice pénale, les mesures prises par la police dans une situation donnée. Il y a donc toutes ces questions au sujet de protocoles et de procédures définis il y a peut-être 20 ans par rapport, disons, aux enquêtes en cas de violence envers les enfants. Les cas touchant des personnes âgées ne sont pas traités dans le système avec le bon degré d'attention et de délicatesse.

On n'a pas encore fait la lumière sur certaines des difficultés liées au fait d'essayer de trouver un équilibre entre l'intervention du système de justice pénale et l'intervention des organisations de soins de santé et de travail social dans ce domaine.

Je sais que ça fait un petit bout de temps que je parle, mais me permettez-vous de commenter brièvement certaines des recommandations qui figurent dans le rapport, simplement pour les mettre en lumière?

La présidente : Oui.

Mme Bain : Je suis maintenant à la page 7. Je sais que le rôle des procureurs de la Couronne est toujours un sujet délicat, parce que la Couronne est indépendante. En ce moment, il y a des enquêtes sur la violence familiale, et il y a beaucoup d'hésitation quant à savoir si la Couronne peut être citée à témoigner dans le cadre d'une enquête au sujet des principes qu'elle applique lorsqu'elle rend sa décision concernant une ordonnance de détention, et ainsi de suite. De toute façon, aujourd'hui, nous parlons de la fraude, qui est un domaine de compétence provinciale.

Le rôle du gouvernement fédéral, ça pourrait être de dire qu'il devrait y avoir une certaine uniformité, partout au pays, dans l'accès au système de justice pénale. De dire que, même si l'accès à la justice et l'administration de la justice relèvent des provinces, du point de vue du gouvernement fédéral, nous ne voulons pas voir des personnes âgées vulnérables faire l'objet d'une intervention inappropriée du système judiciaire en raison de certains de ces obstacles.

Les politiques en matière de poursuites. Il est assez difficile de déterminer s'il est dans l'intérêt de la population qu'on porte des accusations pénales dans telle ou telle affaire. Ce que nous aimerions voir, c'est un énoncé stratégique clair de la part de toutes les administrations, de tous les gouvernements provinciaux du pays, selon laquelle il est dans l'intérêt de la population qu'on intente des poursuites lorsqu'un adulte vulnérable a été victime d'actes de violence graves.

Il y a en Colombie-Britannique une politique qui porte le nom de Violence Against Women in Relationships, et ce type d'énoncé en fait partie. Ça signifie qu'on tient compte de la vulnérabilité, de la dépendance, des obstacles à l'accès au système judiciaire des conjointes vulnérables — et ça pourrait être un conjoint, mais c'est une politique qui vise surtout les femmes. Nous aimerions voir adopter une politique du genre par rapport à la violence envers les aînés.

Le rôle de la police. Il arrive souvent que des agents de police nous disent qu'ils ne comprennent pas bien leur rôle. Dans le cadre de la loi provinciale, ils doivent généralement accompagner la personne qui a le mandat d'enquêter, toujours d'après la loi provinciale, et de maintenir la paix. Il se peut aussi que les agents découvrent la preuve qu'un crime a été commis. Ils ont une responsabilité permanente d'application du Code criminel du Canada, même s'ils ont d'autres fonctions par rapport à un incident donné qui a trait à leur rôle, un rôle de protection dans une situation où une autre autorité provinciale a l'initiative.

En Colombie-Britannique, cette autre autorité provinciale, c'est la régie de la santé, selon la partie 3 de la Adult Guardianship Act, ou encore selon notre Public Guardian and Trustee's office.

La participation de la police aux poursuites auxquelles sont partie des adultes vulnérables. Il semble que le rôle de la police est confus, du fait de l'existence de toutes sortes de pressions sur les agents de police, dans les services de police, dans les principes des autorités policières à l'échelon provincial, ainsi que sur la GRC. Je pense qu'il faut faire le même genre d'enquête en cas d'incident qu'en cas de crime, tout en essayant de trouver l'équilibre par rapport aux responsabilités que confère la loi provinciale aux services de police et tout en tenant compte de celles-ci.

Nous aimerions voir l'accent mis sur le respect de la complexité de ce genre de cas et du caractère délicat de la situation de la victime, de la vulnérabilité de la victime, ce qui supposerait de s'assurer que les enquêtes ont lieu dans les services d'enquête, plutôt que de demander à un agent ordinaire de répondre. Nous recevons tellement d'appels de membres de la famille d'adultes âgés qui essaient de les aider ou encore de la part de ces adultes âgés eux-mêmes, qui sont frustrés au plus haut point parce qu'ils ont raconté leur histoire « à la police », mais n'ont obtenu aucune réaction. Nous ne pensons pas que c'est parce que les aînés ne racontent pas les faits exactement comme ils se sont déroulés. Nous pensons qu'il y a tout simplement beaucoup de malentendus et d'échecs de communication, ainsi qu'un manque d'engagement à enquêter dans ces cas.

À Vancouver, il y a une escouade de la fraude composée de dix agents. C'est cependant une ville énorme où les actes criminels perpétrés dans le domaine financier sont très subtils. Ce sont ces dix agents qui se chargent des enquêtes en ce qui concerne tous les actes criminels de nature financière touchant les entreprises ainsi que les cas, par exemple, d'abus de procuration qui font perdre toutes leurs économies à des aînés.

Bien entendu, les services de police doivent avoir des politiques relatives à leurs pratiques d'affectation des ressources, mais nous avons découvert que le service de police d'Edmonton, par exemple, a une politique qui fait qu'on tient compte des répercussions sur la victime de tel ou tel acte de fraude lorsqu'on décide d'enquêter ou non. Le message que nous aimerions livrer à l'échelle nationale, c'est qu'il s'agit de cas très importants pour les personnes touchées. Ça peut être une question de vie ou de mort, même s'il semble qu'il ne s'agisse que d'argent. Ce n'est pas la même chose que si la CIBC fait un mauvais investissement.

Certains gouvernements provinciaux se sont engagés à surveiller les cas de violence familiale ou de violence faite aux enfants dans leur système, par exemple, de façon à permettre des travaux de recherche, à créer une possibilité et à mettre le problème en lumière. On ne fait rien de cela en ce qui concerne la violence envers les adultes âgés, ce qui fait que tous les cas sont en quelque sorte regroupés et qu'il est très difficile de déterminer quels sont les cas de violence faite aux aînés lorsqu'on regarde les recherches.

Beaucoup de ces obstacles que j'ai mentionnés, comme le fait de pousser la police à enquêter, comme le fait de savoir comment formuler une plainte, et ainsi de suite, ont pour effet qu'on comptabilise dans le système un nombre d'actes criminels de beaucoup inférieur à la réalité. Une fois qu'ils sont comptabilisés, cependant, ils sont très difficiles à repérer.

Le traitement rapide des dossiers auxquels sont partie des adultes âgés au sein de l'appareil judiciaire. C'est quelque chose qu'on essaie de faire pour différents types de cas au sein de l'appareil judiciaire, mais pas dans le domaine qui nous intéresse.

Fournir des ressources suffisantes à la Couronne. Encore une fois, c'est un problème qui touche les provinces, mais, essentiellement, le fait que la Couronne dispose de ressources insuffisantes change quelque chose aux types de cas dans lesquels on autorise les poursuites. Il y avait au Canada un seul agent de police qui se spécialisait dans la détection des cas d'abus de procuration, qui faisait enquête sur ce genre de cas, qui présentait des relevés de comptes bancaires détaillés, entre autres, pour prouver que des actes de fraude importants avaient été commis. Ce n'est pas hors de portée, mais c'est quelque chose de complexe. Ça prend beaucoup de ressources. Le seul facteur qui fait que cet agent de police réussissait à faire condamner les auteurs de crime, c'est qu'ils travaillaient en équipe avec un procureur de la Couronne qui commençait lui aussi à acquérir de l'expérience dans ce domaine et qui avait le temps et les ressources nécessaires pour intenter des poursuites. Les cas peuvent exiger beaucoup de temps et l'utilisation de beaucoup des ressources du tribunal, alors il est tentant pour le procureur de la Couronne de n'intenter des poursuites que si l'issue d'une affaire est absolument certaine.

Les services de police et autres organismes. Il faut faire un certain travail pour s'assurer que les agents connaissent leur rôle par rapport aux différents organismes qui ont le mandat d'intervenir dans leurs collectivités ainsi que pour s'assurer qu'il y ait des protocoles de formation permanente des agents de police et des membres des organismes avec lesquels ils doivent travailler.

Une autre question très préoccupante, c'est celle des protocoles touchant la communication d'informations à la police par les banques et autres institutions financières. Dans bien des cas, les banques ont des politiques très strictes et qui sont fondées sur les lois fédérales et provinciales relatives à la protection des renseignements personnels et de la confidentialité. Ainsi, en gros, si un aîné est victime d'exploitation financière, mais n'a pas donné son consentement quant à la divulgation de telle ou telle information, la banque peut être très réticente à communiquer l'information à la police même s'il est clair qu'un acte criminel est commis.

Les lois fédérales et provinciales prévoient des exceptions qui permettent à des institutions comme les banques d'enfreindre les règles de confidentialité en cas d'actes criminels, mais ces exceptions ne sont pas toujours bien définies, et il y a souvent beaucoup d'obstacles procéduraux internes à cet égard. Ce serait utile qu'il y ait une initiative fédérale visant à aider les banques et les autres institutions financières à élaborer des protocoles et des mesures d'intervention appropriés qui soient fondés sur l'idée que ces organisations ont un devoir public, ainsi que sur la façon dont celui-ci s'inscrit dans le cadre des différentes lois pénales et provinciales, pour que les banques et les autres institutions financières puissent collaborer avec la police de façon plus efficace.

Je reviens à l'exemple de cet enquêteur de la Saskatchewan. Ce qu'il faisait, c'est qu'il tenait régulièrement des réunions avec tous les hauts placés des banques de sa collectivité, et il leur communiquait des tendances qu'avait relevées la police au chapitre de l'exploitation des adultes âgés. Les gens des banques lui fournissaient quant à eux de l'information sur les tendances qu'eux avaient relevées, sans décrire de cas précis. Lorsqu'un cas précis survenait, la personne qui, à la banque, s'apercevait qu'il s'agissait d'un acte criminel et qu'elle devait le déclarer à la police, savait à qui s'adresser. La communication s'en trouvait tout simplement améliorée.

Il y a beaucoup d'organisations sans but lucratif qui ne relèvent pas directement du gouvernement, mais qui reçoivent leur financement dans le cadre du mandat du gouvernement qui a trait au soutien ou aux services offerts aux aînés. Ces organisations doivent elles-mêmes mettre en place des protocoles pour les cas qu'elles doivent signaler à la police.

De même, nous sommes chanceux, ici, parce que le gouvernement provincial offre du financement aux travailleurs des services aux victimes. Ces gens-là ont aussi besoin de protocoles et de formation pour savoir reconnaître les cas de violence envers les aînés et pour savoir comment en faire état, et ainsi de suite.

La justice réparatrice est un concept qu'on envisage souvent comme solution de rechange aux procédures accusatoires et conflictuelles au sein du système de justice pénale. Dans ce domaine, il faut établir des lignes directrices à l'intention des gens qui gèrent le processus et il faut les sensibiliser au besoin de sûreté et de protection de la victime de l'« acte criminel », de la même façon qu'on reconnaît la vulnérabilité de la victime dans les cas de violence conjugale ou de violence envers les enfants.

Nous devons nous assurer que l'information est accessible et qu'on discute de ces problèmes dans les collectivités.

Mettre au point davantage de procédures de surveillance, surtout en ce qui a trait aux soins à domicile; je vais laisser Charmaine parler de cela.

Il y a dans toutes les provinces une forme ou une autre d'indemnisation des victimes d'acte criminel. Ainsi, lorsqu'un acte criminel a été posé, même s'il n'a pas nécessairement fait l'objet de poursuites et que l'auteur n'a pas nécessairement été déclaré coupable, la victime a le droit de demander une certaine indemnisation.

Nous devons tenir compte de certaines des choses supplémentaires dont les aînés ont besoin pour être en sécurité. Ces choses ont trait aux préoccupations relatives à la dépendance dont nous avons parlé. Il se peut que, pour qu'une personne âgée soit en sécurité, elle ait besoin non seulement d'un téléphone cellulaire avec une touche de composition rapide pour le 911 et d'un système d'alarme pour son domicile, mais également que les gens d'un service de soutien interviennent et s'assurent qu'elle n'ait pas à s'adresser à l'auteur de l'acte de violence pour obtenir des soins de santé de base.

Les gens qui s'occupent de programmes comme Block Watch et les autres types de programmes de prévention du crime doivent changer leur façon de voir les choses et ils doivent tenir compte des besoins des adultes âgés. Nous avons besoin de bons programmes d'information visant à montrer aux adultes âgés à déceler et à prévenir les actes de fraude.

Lundi prochain, à l'occasion d'une conférence organisée par une régie régionale de la santé, je vais parler à 40 personnes âgées des procurations et des avantages et inconvénients des procurations et des ententes écrites liées aux soins de santé, au consentement à recevoir des soins de santé ou à ne pas en recevoir, selon le cas. Les adultes âgés doivent bien comprendre ce que cela suppose lorsqu'ils en arrivent à être dépendants d'autres personnes qui prennent les décisions à leur place, et ils doivent connaître les situations dans lesquelles ils peuvent retirer le consentement donné.

Nous avons créé de petites cartes que les agents de police peuvent avoir sur eux en tout temps et qui ont pour but de les aider à déceler les signes de violence. Il s'agit de les aider à déceler les signes de violence, à savoir à qui en parler et quelles sont les responsabilités que leur confère la loi provinciale.

Axer la sensibilisation sur les médecins, les fournisseurs de soins de santé, entre autres.

Enfin, je veux simplement faire remarquer que beaucoup d'actes de fraude consistent en le détournement de pensions gouvernementales, et il faudrait peut-être que la Direction générale de la sécurité du revenu renseigne mieux le personnel de son centre d'appels, entre autres, pour aider les membres de ce personnel à déceler certains signes d'exploitation lorsqu'une personne téléphone au centre d'appels pour parler de ce genre de problème.

Charmaine Spencer, membre du conseil, Réseau canadien pour la prévention des mauvais traitements envers les aîné(e)s : Bonjour. Je m'appelle Charmaine Spencer. Je suis gérontologue à l'Université Simon Fraser, et, depuis 1992, je travaille auprès d'organisations communautaires et je fais des recherches sur les différents aspects de la violence et de la négligence dont sont victimes les personnes âgées. J'ai rédigé près d'une douzaine de publications importantes pour le compte du gouvernement et de groupes communautaires sur les différents aspects de ce problème pluridimensionnel, du point de vue national.

Je suis également coprésidente du Réseau canadien pour la prévention des mauvais traitements envers les aîné(e)s. Le réseau a vu le jour il y a dix ans, et c'est un réseau national de bénévoles et d'organisations locales, régionales et provinciales, de représentants du gouvernement, de fournisseurs de services, d'universitaires, d'aînés et d'autres personnes intéressées, et il est axé sur la prévention, l'éducation et l'intervention efficaces en matière de violence.

Il s'agit du seul réseau national axé précisément sur la violence et la négligence. Notre conseil compte 19 membres anglophones et francophones qui représentent les différentes régions du Canada et qui, ensemble, ont plus de 160 ans d'expérience de ces questions. En gros, nous sommes plus vieux que la confédération.

Je suis ici plutôt à titre de professionnelle du domaine que de membre du conseil, mais j'offre les deux points de vue dans le débat que nous tenons aujourd'hui. Je tiens à féliciter les membres du comité sénatorial des efforts de grande envergure qu'ils ont déployés dans le cadre de la rédaction de leur second rapport provisoire afin de définir les différentes options qui existent dans le domaine du vieillissement au Canada. Le comité a décidé de ne s'occuper que du vieillissement des personnes et du soutien individuel offert aux gens qui vieillissent, mais les tendances générales et les effets cumulatifs qui se font sentir au sein des populations sont tout aussi importants.

Les observations que je vais formuler aujourd'hui appartiennent à trois catégories différentes : les points soulevés dans le rapport provisoire, les lacunes du rapport et les orientations futures du gouvernement. Comme vous avez probablement entendu d'autres témoins le dire, la violence et la négligence dont sont victimes les adultes âgés ont de nombreux aspects, ce qui fait qu'il est difficile de choisir, en quelque sorte, un élément plutôt qu'un autre. Les solutions ne sont pas simples, mais elles existent et elles s'appliquent dans les milieux communautaires ou dans les établissements.

Dans le rapport provisoire, vous parlez du fait qu'il est important de soutenir les efforts des bénévoles, et c'est assurément quelque chose que le Réseau canadien pour la prévention des mauvais traitements envers les aîné(e)s reconnaît. Comme réseau de bénévoles, nous possédons des compétences et des connaissances, mais nous avons besoin d'une infrastructure de soutien pour appuyer le travail que nous faisons à l'échelle nationale dans 13 provinces et territoires et dans tout le pays, c'est-à-dire sur un territoire de plus de 9,9 millions de kilomètres carrés. En ce moment, nous fonctionnons grosso modo à pleine capacité pour ce qui est de nous permettre de faire des choses comme les contributions en nature.

Ensuite, le rapport provisoire parle de la violence et de la négligence dont sont victimes les adultes âgés, surtout lorsqu'ils reçoivent des soins et dans les établissements de soins. Merci beaucoup d'aborder cette question dont on ne parle vraiment pas suffisamment.

A Way Forward est un projet national que mes collègues de six universités différentes et moi venons tout juste de terminer. Nous examinons les approches prometteuses en matière de prévention de la violence dans les établissements de soins. Nous avons constaté que de moins en moins d'aînés vulnérables ont accès aux établissements de soins accrédités, et qu'ils sont de plus en plus nombreux à vivre dans d'autres milieux, dans des résidences-services, dans des foyers de soins personnels, et, au Québec, dans des résidences privées pour personnes âgées.

Dans de nombreuses régions du pays, il y a peu, voire pas du tout, de normes visant ces établissements où les soins sont « moins intensifs ». Ainsi, les gens qui y vivent sont très vulnérables, du moins à la négligence potentielle.

Je sais que le comité parle dans son rapport de ces différentes options de logement où l'on offre du soutien et des soins. Il est très important de comprendre ces modèles et d'évaluer avec soin leur capacité de soutenir les personnes qui vieillissent, ainsi que de reconnaître leurs points forts et leurs limites.

Dans le cadre du projet A Way Forward, nous avons constaté qu'il y a vraiment différents degrés de protection et de surveillance dans les établissements de soins accrédités du pays. Au cours des cinq à dix dernières années, les ministères des gouvernements provinciaux et fédéral, et plus particulièrement les gouvernements provinciaux, l'industrie, les associations de fournisseurs de soins, les syndicats et les organisations de défense des droits ont exprimé des préoccupations grandissantes au sujet de la qualité des soins offerts et du risque de violence et de négligence dans les établissements.

Il faut définir des normes nationales dans les domaines importants que sont la surveillance, la prévention de la violence et la divulgation. Le Code criminel comporte en fait un élément de dénonciation, mais on ne l'a pas vraiment utilisé dans ce domaine.

En même temps, je veux souligner le fait que la violence faite aux aînés dans la collectivité ressemble davantage à d'autres formes de violence familiale que le résultat du stress que vivent les soignants ou qui découlent de la prestation des soins, dont le rapport parle abondamment. La violence peut commencer dès le jeune âge de la personne et continuer lorsqu'elle est âgée, ou encore elle peut commencer seulement lorsqu'elle est âgée. Il faut que nous nous assurions de comprendre beaucoup mieux les facteurs de risque et les facteurs de protection dans ce domaine.

En Nouvelle-Zélande, par exemple, on a commencé à envisager la nature des facteurs de protection. Quelles sont les choses que nous pouvons faire pour réduire le risque de violence ou de négligence? Toutes les stratégies et les initiatives futures du gouvernement en matière de violence familiale doivent se fonder sur notre compréhension et notre conscience des actes de violence dont une personne peut être victime à tout âge, et elles doivent contribuer à cette compréhension et à cette conscience.

Il s'agit d'enjeux intergénérationnels. Comme Penny l'a fait remarquer avec éloquence, il s'agit entre autres choses d'une question de justice. Dans des rapports antérieurs, nous avons mentionné le fait qu'il n'est pas nécessaire pour régler ce problème que le Code criminel comporte une partie spéciale. En même temps, on pourrait peut-être mettre à jour deux ou trois parties du Code criminel. L'article 331, par exemple, qui porte sur le vol par une personne détenant une procuration, pourrait prévoir plus de moyens d'intervention en cas d'exploitation financière et mieux définir ces cas, et il faut aussi, de façon générale, voir cela comme une question de justice.

Pour ce qui est des lacunes potentielles du rapport, il est extrêmement important de reconnaître le fait qu'il existe des liens entre les politiques provinciales et fédérales et de comprendre ces liens, ainsi que leur incidence sur la vulnérabilité des adultes âgés en général, et le risque de violence et de négligence auquel ils font face en particulier.

Pour ce qui est de la recherche, nous commençons à comprendre les risques particuliers auxquels font face certaines populations. Les aînés qui appartiennent à une minorité ethnique, par exemple. Surtout ceux qui sont des immigrants parrainés. Il s'agit notamment de l'isolement, de la dynamique familiale, du renversement des rôles et des possibilités qui s'offrent sur le plan linguistique. Dans certains cas, le fait que le gouvernement fédéral oblige les gens qui parrainent un membre de leur famille à s'occuper d'eux pendant dix ans a pour effet que les immigrants parrainés se trouvent à être très dépendants et vulnérables. Cette exigence a été ramenée de dix ans à trois ans pour les femmes parrainées par leur mari précisément pour cette raison, parce qu'on sait que l'exigence les rend vulnérables.

La politique en vigueur ne tient pas compte de la contribution importante qu'ont faite les immigrants âgés en élevant leurs enfants qui sont ensuite devenus de nouveaux citoyens canadiens ni de ce qu'ils continuent d'apporter à leur famille lorsqu'ils s'installent eux-mêmes au Canada. Le problème qui est créé à l'échelon fédéral est aggravé par la façon dont les gouvernements provinciaux répondent aux demandes d'aide sociale présentées par les immigrants victimes de violence qui se trouvent en situation de rupture de l'engagement de parrainage.

Le comité sénatorial a eu tendance jusqu'à maintenant à envisager les politiques relatives au vieillissement comme une question distincte, ce qui est sensé, vu le mandat qui lui a été confié. Mais en même temps, cette approche a des limites. Nos politiques en matière d'assurance-emploi, de logements abordables et adéquats, de santé mentale et de toxicomanie ont toutes des répercussions sur les jeunes adultes et les adultes d'âge moyen, et ce sont souvent ces politiques qui déterminent s'ils vont dépendre de leurs parents vieillissants en cas de besoin.

On sait très bien que cette dépendance de certains adultes envers leurs parents est un facteur de risque de la violence, y compris l'exploitation financière, et c'est une autre des choses dont Penny a parlé.

Nous constatons que le manque de logements abordables rend les aînés dont le revenu est faible susceptibles de vivre dans un logement inadéquat et vulnérables à l'intimidation et à d'autres formes de préjudice de la part de fournisseurs publics et privés de logement. La menace d'expulsion à laquelle font face les gens qui expriment des préoccupations légitimes au sujet de leur logement est beaucoup plus courante que nous avons tendance à le croire.

Je veux maintenant parler des orientations futures du gouvernement. Au cours de l'année qui vient de s'écouler, le gouvernement fédéral a déclaré que la violence et la négligence dont sont victimes les adultes âgés est un problème important, et il a réservé des fonds pour régler ce problème. Il s'agit d'environ 13 millions de dollars sur trois ans, c'est un premier pas extraordinaire et très important. Il est cependant extrêmement important que ces fonds servent à améliorer nos connaissances et nos pratiques dans le domaine, ainsi qu'à soutenir le travail qui se fait au sein des réseaux, que ce soit à l'échelle locale, régionale ou nationale.

À l'heure actuelle, les efforts du gouvernement fédéral semblent être déployés sans tenir compte des initiatives provinciales, et, ce qui est encore plus important, sans qu'on sache ce qui s'est fait, ce qui se fait en ce moment et ce qui s'est passé auparavant à l'échelle communautaire et du point de vue du domaine professionnel. C'est un environnement dans lequel il est très probable qu'on procède à des initiatives qui font double emploi, qu'on gaspille de l'argent, et surtout, qu'il y ait de la frustration chez les principaux intervenants de la collectivité.

J'aimerais vous donner deux ou trois exemples de situations où cela peut se produire. En 2007, les représentants du programme Nouveaux Horizons ont lancé un appel de propositions relativement à la prévention de la violence, mais apparemment, ils ne savaient pas qu'il y avait au Québec une stratégie de financement des projets dans le domaine qui existait déjà depuis un bon bout de temps. Il était ainsi assez probable que certains projets reçoivent du financement des deux ordres de gouvernement, ce qui veut également dire que des initiatives tout à fait valables n'ont pas été soutenues.

Au cours du mois qui vient de s'écouler, le gouvernement fédéral a lancé un appel de propositions en ce qui concerne la rédaction d'un guide de formation générique sur les problèmes de violence, guide qui pourrait être utilisé par certains groupes nationaux pour la formation de leurs membres. En gros, on parle de gens comme des agents de police, des travailleurs sociaux, des membres d'organisations juridiques et financières comme faisant partie du public cible.

Il faut savoir qu'on a déjà rédigé des guides génériques dans le passé à l'échelon provincial et à l'échelon communautaire. On a fait une bonne partie du travail grâce à des fonds provenant du gouvernement fédéral, et on utilise ces guides dans bon nombre de provinces. Ce que les gens qui ont rédigé la demande de propositions n'ont cependant pas compris, c'est la façon dont leurs groupes cibles, c'est-à-dire la police, le secteur financier, les organismes juridiques et les travailleurs sociaux reçoivent et offrent la formation. À l'échelon régional et à l'échelon national, nous savons comment les choses se passent, puisque nous avons participé à ça dans le passé. L'autre chose qui s'est passée à cet égard, c'est qu'ils n'ont pas compris qu'il existe d'importantes différences entre les provinces sur le plan des ressources et des lois. Ainsi, même si c'est formidable de parler d'approches générales et de choses du genre, il y a beaucoup de différences importantes entre les provinces.

Heureusement, ce genre de lacunes peut être comblée assez facilement, par exemple en ayant un représentant national comme le réseau au sein du groupe de travail sur la violence faite aux aîné(e)s. Nous connaissons bien les enjeux, comme c'est le cas des réseaux provinciaux et des autres organisations qui sont membres de notre organisation. Nous connaissons les principaux acteurs du milieu. Nous savons ce qui s'est fait dans le passé. Nous savons ce qui se fait et ce qui ne se fait pas dans les différentes provinces.

Ainsi, de façon générale, dans ce domaine, les bonnes politiques, par rapport au vieillissement, sont toujours fondées sur de bons renseignements, et nous pouvons contribuer à ce processus. Merci.

La présidente : Merci beaucoup. D'après les deux ou trois derniers paragraphes que vous avez lus, j'ai l'impression que vous pensez qu'ils essaient de réinventer la roue alors qu'elle tourne déjà.

Mme Spencer : C'est peut-être juste, mais c'est mon opinion personnelle.

La présidente : Merci beaucoup.

Le sénateur Cordy : Vos exposés étaient excellents, en passant.

Vous avez parlé de la violence sexuelle dont sont victimes les aînés, et c'est un sujet dont nous n'entendons pas beaucoup parler. À l'occasion, on entend parler de cas d'entrée par effraction dans des maisons et de femmes âgées, surtout, qui vivent seules et qui peuvent être victimes d'agression sexuelle, mais ce n'est pas quelque chose dont nous entendons beaucoup parler.

Pendant longtemps, on a tenu cachée la violence sexuelle dont étaient victimes les jeunes femmes — je parle des femmes en particulier, même si je sais que c'est quelque chose qui peut arriver aux hommes — parce que les femmes pensaient que c'était peut-être leur faute d'une certaine manière. C'était leur faute si on commettait des actes de violence sexuelle à leur égard. Est-ce la raison pour laquelle nous n'entendons pas parler de la violence sexuelle dont sont victimes les aînés à l'heure actuelle?

Mme Bain : Un groupe de chercheurs s'est penché sur cette question il y a deux ou trois ans de cela en Colombie- Britannique. Notre conseiller juridique qui s'occupe de la ligne d'information dont j'ai parlé constate également le même genre de dynamique.

Nous parlons en partie d'un problème générationnel qui touche la culture et les attentes et qui fait que beaucoup de femmes qui appartiennent à une génération de gens âgés ont acquis ce comportement qui consiste à tenir certaines choses honteuses secrètes dans la famille ou dans la collectivité. Leur principale préoccupation était de ne pas faire honte à la famille ou à leur collectivité, et ce qui est arrivé dans bien des cas, c'est que certaines choses n'ont pas été dénoncées et que les femmes étaient réticentes à demander de l'aide à une personne de l'extérieur.

Ainsi, cette dynamique dont on dit qu'elle existe chez les jeunes femmes se manifeste sous plusieurs formes, d'après les histoires et l'expérience des femmes qui ont vécu de la violence sexuelle, non seulement dans leurs relations, mais également dans des contextes où elles étaient dépendantes, s'il s'agit d'une femme, d'un soignant de sexe masculin pour ce qui est de répondre à leurs besoins.

Je vais vous donner des exemples de scénarios dont j'ai entendu parler. Il y a ce que j'appelle, comme d'autres fournisseurs de soins de santé, je pense, un soignant prédateur en série. C'est par exemple un jeune homme qui tient à se joindre à des groupes de personnes âgées. Il fait partie de la ligue de quilles. Il va à l'église avec le groupe, et ainsi de suite. Son seul but, c'est de se lier d'amitié avec une personne âgée qui vit seule. Le motif, c'est en partie d'exploiter financièrement cette personne, mais c'est parfois aussi de l'exploiter sexuellement.

Ce ne sont pas que les partenaires avec qui elles ont des relations intimes qui commettent des actes de violence sexuelle envers les femmes âgées. Il y a aussi ces personnes que j'appelle des prédateurs en série. On entend dans le milieu des soignants des histoires selon lesquelles, eh bien, un homme a pris tout ce que telle ou telle femme possédait et a profité d'elle. Ensuite, il s'est attaqué à une autre, puis à une autre, et ainsi de suite. Qu'est-ce que ça nous dit au sujet de nos services de sécurité et de protection? Que nous ne sommes pas capables de mettre fin à ce genre de comportement en série d'une façon ou d'une autre?

J'ai mis beaucoup d'éléments dans ma réponse, mais il y a aussi du matériel pédagogique. La B.C. and Yukon Society of Transition Houses a produit un vidéo particulièrement marquant dans lequel on présente plusieurs exemples de ce que nous entendons par exploitation sexuelle des adultes âgés, et c'est un scénario beaucoup plus courant que ce que les gens ordinaires peuvent imaginer.

Notre conseiller qui s'occupe de la ligne d'information est un homme, mais il est d'un caractère particulièrement doux, et il est très bon pour créer des liens de confiance avec les clients. Ça prend un peu de temps, parce que, habituellement, les clients téléphonent d'abord pour parler de quelque chose d'autre que de violence sexuelle, mais de quelque chose qui a un rapport avec ça. Ce qui se passe, selon son expérience, c'est qu'il finit par apprendre que la violence sexuelle est un autre des problèmes sous-jacents à la situation que la personne vit.

Mme Spencer : Simplement pour ajouter quelques autres éléments, nous voyons des problèmes de violence sexuelle faire surface dans plusieurs contextes différents. C'est à coup sûr un problème dans les établissements de soins. En fait, certains des cas les plus notoires dont on ait entendu parler se sont produits dans les établissements de soins de Calgary et d'Edmonton. Ce dont il s'agit, dans ces cas-là, c'est habituellement d'un prédateur, d'un membre du personnel qui s'attaque aux adultes de l'établissement qui ont un handicap mental.

Dans les établissements, un autre genre de situation qui se produit — et Penny a abordé cette question, en fait — c'est lorsqu'il y a une femme — c'est habituellement une femme — qui est atteinte de démence, et que son mari cherche à avoir des relations intimes avec elle qu'elle le veuille ou non ou qu'elle reconnaisse son mari ou non. Le personnel des établissements a souvent de la difficulté à savoir comment intervenir dans ce genre de situation.

Parlons de ce qui se passe à l'échelon communautaire. Il y a huit ou dix ans, le Kingston Sexual Assault Centre nous a fait une très bonne publication sur les agressions sexuelles dont sont victimes les femmes âgées, publication qui s'adressait à la fois aux travailleurs du centre et aux femmes âgées qui parlaient des problèmes générationnels, et de toute la question de la peur de dire ce qui s'est passé et du fait qu'une personne ait ou non le devoir de parler des préjudices qu'elle a subis ou qu'elle est en train de subir.

Nous voyons également ce problème faire surface par rapport au trouble du stress post-traumatique. Les psychologues le voient. Encore une fois, ils n'utilisent pas nécessairement les termes « violence », « négligence » et « violence sexuelle ». Ils abordent la question en parlant des relations qu'entretiennent les femmes âgées avec leur conjoint ou avec leur partenaire, habituellement. C'est donc un problème qui fait surface.

Le Réseau québécois pour contrer les abus envers les aînés, ou RQCAA, par exemple, a choisi de faire de la violence sexuelle l'un de ses principaux thèmes pour l'année courante. Ainsi, à l'échelle des réseaux, on reconnaît que c'est l'une des questions qu'il faut aborder dans le domaine.

Le sénateur Cordy : Y a-t-il beaucoup de recherche là-dessus? Au Québec, on voit ça comme un problème important, mais y a-t-il beaucoup de recherche sur la violence sexuelle?

Mme Spencer : Non, il n'y en a pas beaucoup. En fait, l'une des choses que j'ai faites pour les gens du Québec, c'est de rédiger une petite fiche d'information sur ce que nous savons, et il y a beaucoup de lacunes, mais ça aide en quelque sorte à sensibiliser les gens aux problèmes. Je veux dire... Il y a tellement de lacunes dans le domaine. Je le sais. Le domaine est plein de lacunes, et cela en est une autre.

Le sénateur Cordy : J'aimerais que nous parlions maintenant du Centre national de prévention du crime. Je voudrais obtenir une précision. Le centre ne finance plus d'initiatives de prévention du crime chez les personnes âgées; est-ce exact?

Mme Bain : Le Centre national de prévention du crime a fait l'objet d'un processus d'établissement des priorités au cours de l'année et demie ou des deux années qui viennent de s'écouter. Je me suis fait prendre, parce que j'étais en train de rédiger une demande à l'intention du centre avec l'aide du personnel régional. Nous avions rédigé la demande en fonction des priorités qui existaient auparavant. Le centre finançait des initiatives de prévention du crime dans toutes sortes de domaines. Mais ce qu'on me disait dans la lettre que j'ai reçue lorsque la demande a finalement été évaluée, ça a été : nous ne finançons plus d'initiatives de prévention du crime et de la violence chez les aînés; nous nous occupons maintenant de la jeunesse.

Je discutais aujourd'hui avec une personne de nos services provinciaux d'aide aux victimes, et elle me disait que, cette année, la priorité va à la toxicomanie, et nous essayons de deviner quelle serait la priorité l'an prochain. Cependant, le problème, bien sûr, c'est que les représentants d'autres initiatives, par exemple l'initiative sur la violence familiale, qui touche 12 ministères fédéraux, ont dit dans le passé qu'ils n'allaient plus tenir d'activités de prévention du crime, par exemple, dans le domaine de la violence faite aux aînés, qui est liée à la violence familiale, parce que le Centre national de prévention du crime travaille à la prévention de ce genre de crime. Eh bien, si ce n'est plus l'une des priorités du centre, ça signifie que personne ne travaille plus dans le domaine.

À l'heure actuelle, le message qui s'est rendu jusqu'à moi, qui fais partie des gens qui cherchent à savoir ce qui se passe dans le domaine, c'est que le Centre national de prévention du crime établit ses priorités pour une année, et que, en ce moment, celles-ci n'incluent pas la violence faite aux aînés.

Le sénateur Cordy : Il n'y a donc pas de planification à long terme, j'imagine.

Mme Bain : Je ne connais pas les plans du centre.

Le sénateur Cordy : Des 13 millions de dollars sur trois ans dont parle le gouvernement, y a-t-il de l'argent pour des programmes liés à la prévention des crimes dont les aînés sont victimes?

Mme Spencer : La réponse courte, c'est que nous ne savons pas exactement à quoi ces fonds sont affectés ou seront affectés. Cependant, ils vont probablement être répartis entre les différents ministères et être utilisés en fonction des priorités des différents ministères fédéraux.

Je n'ai pas vu de plan général concernant cet argent, et je n'en ai certainement pas entendu parler. Il pourrait très bien y en avoir un, mais, assurément, à l'échelon communautaire ou des réseaux, on a l'impression que cette information se trouve peut-être dans l'un ou l'autre des différents compartiments. Ce genre de dialogue au sujet des objectifs n'a donc pas eu lieu.

Le sénateur Cordy : J'étais à mon bureau la semaine dernière, et j'ai ramassé deux brochures très belles qui portent sur le nouveau programme fédéral sur la violence envers les aînés. À votre connaissance, y a-t-il eu un quelconque dialogue avec les groupes communautaires ou les gouvernements provinciaux sur les besoins à combler en ce qui concerne la violence dont sont victimes les aînés?

Mme Spencer : La réponse courte est non. Pour être juste, dans un sens, nous discutons de cela avec le gouvernement depuis un certain temps. Cependant, les gens qui travaillent au gouvernement changent, les gens à qui sont confiées les responsabilités changent. De plus, je pense qu'il y a un problème d'ordre général qui est le suivant : même si nous discutons, l'idée que nous nous faisons de ce qu'est l'éducation pourrait être différente de celle du gouvernement.

Ça peut être très facile de dire que nous avons besoin de matériel générique alors que nous avons peut-être besoin en fait de types d'information plus complexes à l'intention par exemple d'intervenants spécialisés. C'est peut-être l'une des choses qui pourraient être importantes dans ce domaine et qui, encore une fois, nous aideraient à acquérir davantage de connaissances. Peut-être que cela nous aiderait à améliorer nos pratiques.

Mme Bain : J'aimerais peut-être simplement ajouter quelque chose par rapport à la question que vous nous avez posée, à Charmaine et à moi. Nous sommes d'avis que ce groupe de chercheurs, d'universitaires et d'organisations communautaires du pays, quoique petit, possède beaucoup de compétences spécialisées. C'est un problème d'apparition relativement récente sur l'écran radar, en ce sens qu'il ne reçoit pas le même degré de soutien et de services que, par exemple, la violence conjugale ou la violence faite aux enfants. Ce groupe est relativement petit, mais il y a énormément d'expertise, surtout au sein de l'organisation de Charmaine, pour ce qui est des gens membres de ce réseau. Selon nous, le gouvernement fédéral, lorsqu'il élabore certaines des initiatives en question, pourrait nous demander de formuler des suggestions qui pourraient l'aider à orienter les politiques relatives au financement, l'élaboration des politiques, et ainsi de suite, de façon plus efficace.

Nous sommes là, donc, et nous sommes prêts à mettre notre expertise à profit.

Mme Spencer : En même temps, je pense qu'il est très important de dire qu'il s'est passé des choses vraiment importantes au sein du gouvernement, en dehors, en fait, de cette distribution de fonds. Ressources humaines et Développement social Canada, par exemple, a lancé des DDP dans le but d'obtenir cinq documents d'information pour travailler sur ses propres plans de recherches stratégiques à moyen terme, et ces documents d'information sont donc axés sur la prévalence et l'incidence. Les facteurs de risque font l'objet de l'un de ces documents. Il y en a un autre sur la théorie dans le domaine. Il y en a un aussi sur la pertinence du point de vue de la famille et de la violence lorsqu'on aborde les questions de la violence et de la négligence dont sont victimes des adultes âgés. Le quatrième document porte sur les pratiques exemplaires, et le cinquième, sur l'incidence et les facteurs de risque de violence et de négligence en établissement.

Il s'agit de documents d'information que le gouvernement va utiliser. Il y a donc un ministère qui semble être en mesure de tirer parti de ce qui existe pour constituer son savoir à l'interne et pour élaborer ses plans à moyen terme. Je pense que c'est quelque chose qu'il faut applaudir.

Il y a eu une autre initiative vraiment extraordinaire à l'échelon fédéral-provincial-territorial, et c'est celle du groupe de travail sur la sûreté et la sécurité des aînés, mais avec les efforts qui ont été déployés. Il s'agit d'une collaboration entre différents ministères.

Le problème, cependant, pour ce qui est de ce groupe de travail FPT, c'est que toutes les provinces n'y sont pas représentées. La représentation touche également d'autres questions importantes qui concernent d'autres groupes d'âge, en plus des adultes âgés. Depuis longtemps, ce groupe de travail aide vraiment à faire avancer les dossiers et à faire comprendre les enjeux. Parfois, cependant, l'approche ne semble pas aussi concertée qu'on pourrait le souhaiter, et la discussion entre les différentes parties intéressées et concernées ne semble pas aussi ouverte qu'elle pourrait l'être, et c'est véritablement l'une des choses auxquelles nous pourrions travailler dès maintenant afin d'apporter des améliorations pour l'avenir.

Le sénateur Cordy : Madame Bain, vous avez beaucoup parlé du fait d'offrir une formation à des membres de la collectivité. En plus de former des personnes âgées, nous devons aider les gens dans la collectivité, et vous avez parlé des banques et des problèmes relatifs à la protection des renseignements personnels, ainsi que de la façon de les régler. Vous avez également parlé de former les gens qui travaillent à la Direction générale de la sécurité du revenu et qui s'occupent du RPC et de la SV, afin qu'ils demeurent attentifs aux signes d'exploitation financière. De quelle façon cela pourrait-il fonctionner selon vous?

Mme Bain : Lorsque des personnes âgées utilisent un service d'information téléphonique, l'une des choses que les gens qui travaillent à ce service pourraient faire, ce serait de poser quelques questions supplémentaires. Si quelque chose les alerte, ils pourraient poser davantage de questions et essayer d'aiguiller la personne vers leurs propres processus internes, par exemple, afin de réacheminer le courrier de façon que la personne qui détourne les chèques de l'aîné ne les reçoive plus. Il s'agit là de stratégies internes, mais il y a également la possibilité d'augmenter la capacité d'interventions du personnel en faisant en sorte qu'il connaisse les choses à faire — c'est-à-dire qu'il connaisse la façon d'aiguiller l'aîné qui est victime d'exploitation vers les ressources de sa collectivité. Parce que, bien souvent, les mesures de soutien qu'il faut prendre vont au-delà du simple fait de s'assurer que le chèque parvient à l'aîné à qui il est destiné.

Tout l'objectif de la formation des fournisseurs de services dans la collectivité, que ce soit dans un établissement financier privé ou au sein d'un organisme gouvernemental, par exemple, c'est de s'assurer qu'ils connaissent les signes et les indicateurs, leurs responsabilités au sein de leur organisation, les politiques et les protocoles ainsi que la marche à suivre pour ce qui est de communiquer un cas à d'autres organisations.

Il y a des obstacles à la communication efficace dans toutes les organisations. Le fait d'offrir une formation ciblée est souvent l'un des moyens de régler ce problème de communication. Il s'agit donc d'avoir la volonté de mettre ce genre de programmes en place, et c'est sûr qu'il y a des spécialistes prêts à participer à la prestation de ce genre de formation.

Mme Spencer : Je pense que l'Ontario a conclu une entente avec Service Canada afin d'offrir une partie de cette formation avec les représentants de Service Canada. Il y a donc ce genre de choses nouvelles qu'on essaie et qu'on élabore. Nous n'en entendons pas parler de l'extérieur. Ce n'est que lorsque nous avons l'occasion de discuter avec nos collègues d'ailleurs au pays que nous avons la possibilité de vraiment apprendre ce qu'on essaie et de voir de quoi il s'agit. De voir ce qui fonctionne bien. De voir aussi ce qui échoue, et d'apprendre pourquoi ça ne fonctionne pas. C'est très utile. Encore une fois, la possibilité d'établir un réseau à l'échelle du pays est une chose extrêmement importante dans le domaine. Il y a un peu partout au pays des gens isolés qui possèdent de l'information précieuse.

Il est inutile, cependant, de mettre toute l'information dans un site web ou de tout numériser en format PDF, par exemple, et de présumer que les gens vont savoir où se trouvent les choses, comment elles fonctionnent, et ainsi de suite. C'est un processus beaucoup plus complexe que ça.

Le sénateur Cordy : Malheureusement, nous avons entendu dire où les gens téléphonent lorsqu'ils téléphonent à Service Canada au sujet de leurs prestations de la sécurité de la vieillesse. Ils ne touchent pas les prestations du RPC auxquelles ils ont droit, et la personne qui répond au téléphone s'est fait dire de ne pas informer les gens du fait qu'ils ont droit à des prestations du RPC, ce qui est insensé, à mon humble avis.

La présidente : Ce que vous dites, c'est que c'est une bonne chose que d'échanger des pratiques exemplaires, mais qu'il faut qu'il y ait un dialogue au sujet de ces pratiques exemplaires.

Mme Spencer : Tout à fait, oui.

Le sénateur Mercer : N'y a-t-il pas là-dedans des choses dont la Commission de réforme du droit devrait discuter ou aurait dû discuter?

Mme Spencer : Eh bien, laissez-moi voir.

Mme Bain : Excusez-moi, sénateur Mercer, pourriez-vous préciser votre question? Parlez-vous de la Commission de réforme du droit de la Colombie-Britannique?

Mme Spencer : L'ancienne commission fédérale.

Mme Bain : Je sais que vous avez entendu le témoignage de Laura Watts qui est directrice du Centre for Elder Law Studies au Canada, mais elle est également membre de la Commission de réforme du droit de la Colombie-Britannique. C'est pour ça que je voulais que vous précisiez. Mais, oui, la Commission de réforme du droit du Canada pourrait contribuer à combler certaines de ces lacunes.

Comme, je pense, nous essayions de le dire toutes les deux, il y a beaucoup de choses sous la surface de la réforme du droit lorsqu'il s'agit de mettre les choses en œuvre, et pas seulement les politiques ou les règlements, mais également les mesures que les organismes et les personnes qui ont ces mandats pourraient prendre pour aider les aînés à devenir moins vulnérables et à se prévaloir de leurs recours dans certains systèmes. Ces protocoles qui définissent la façon dont les gens travaillent ensemble sont un élément important et sous-jacent à ce que la Commission de réforme du droit pourrait accomplir.

Le sénateur Mercer : Je suis d'accord avec vous, et la Commission de réforme du droit n'est pas nécessairement la solution, mais celle-ci a toujours joué un rôle de chef de file pour s'assurer que nous, les législateurs, nous tenions au fait de ce qui se passait dans la réalité, sur le terrain.

Maintenant, il y a ces 13 millions de dollars dont nous avons parlé, et nous ne savons pas quelles sont les priorités ou les objectifs à cet égard. Je soupçonne qu'on en a fait l'annonce plusieurs fois, cependant.

Mme Spencer : Ce n'est pas le cas. Le comité en parlait dans le contexte d'une campagne nationale. C'est l'une des choses qui ont été présentées comme étant des possibilités.

L'une des choses que nous avons portées à l'attention du gouvernement, c'est qu'il y a eu des campagnes provinciales dans plusieurs provinces. Nous sommes vraiment heureux de partager cela, et il y aura des occasions de s'inspirer de cela plutôt que d'essayer de créer quelque chose de nouveau. Il s'agit de réfléchir au public cible, aux messages principaux, à la façon de s'assurer que les ressources communautaires sont en place, lorsqu'on lance une campagne de sensibilisation.

Ce n'est pas que nous pensions que ce n'est pas important. Nous pensons que c'est extrêmement important, mais il ne s'agit que d'une pièce d'un très gros casse-tête.

Le sénateur Mercer : Avec 13 millions de dollars, on pourrait faire beaucoup de choses, si seulement quelqu'un avait une idée de ce qu'on veut faire avec cet argent.

Mme Spencer : Je dois applaudir le gouvernement d'avoir proposé cela. Aux alentours de 1995, il y a eu encore une fois d'excellentes occasions dont nous avons pu tirer parti dans le cadre de l'initiative sur la violence familiale. La violence et la négligence dont sont victimes les adultes âgés n'étaient qu'un tout petit élément de l'ensemble, mais ça a vraiment fait réfléchir les gens. La sensibilisation et d'autres choses du genre. Alors je ne vais pas rejeter quoi que ce soit qui contribue à la sensibilisation. Je demande simplement qu'on réfléchisse, d'abord.

Le sénateur Mercer : D'accord. La discussion au sujet des procurations compte beaucoup de gens. Ma mère a 80 ans. Ma sœur a une procuration, et je sais qu'elle fait du bon travail. Je ne suis pas avocat, et ça va peut-être paraître dans ce que je vais dire. Est-ce que ce serait sensé, lorsqu'un adulte âgé donne une procuration à ses enfants, de peut-être la donner à deux enfants plutôt qu'à un seul pour qu'il y ait une espèce de mécanisme de vérification?

Mme Bain : Vous soulevez un excellent point, parce qu'il y a beaucoup d'adultes qui, lorsqu'ils donnent une procuration à un fils ou à une fille d'âge adulte, prennent une décision quant au fait que ce fils ou cette fille est digne de confiance, fiable, et ainsi de suite. Si la personne âgée a plusieurs enfants, ça peut causer des problèmes dans la famille. Ou encore, ça peut être que la personne âgée a pris une décision et dit : « Voilà, c'est la personne en qui j'ai le plus confiance entre les deux. » Il peut ensuite arriver quelque chose non seulement à la personne âgée, mais aussi à la personne qui a obtenu la procuration. En d'autres termes, cette personne peut devenir moins digne de confiance si, disons, son entreprise fait faillite. Elle est alors sous pression. Elle a l'impression, puisqu'elle a cette procuration et qu'elle a donc la possibilité d'accéder à l'argent qui appartient à la personne âgée, qu'elle y a droit, et elle se dit : « Eh bien, ça ne dérangerait pas maman, puisqu'elle souhaite certainement que mon entreprise prospère », ou encore « Ma dépendance est plus importante que tout le reste, et je ne vois pas les besoins du reste de la famille », et ainsi de suite.

En outre, il y a beaucoup d'aînés qui, lorsqu'ils demandent à leur avocat de rédiger une procuration pour eux, ne prennent pas conscience du fait que, dans bien des cas, la procuration est rédigée de façon à n'entrer en vigueur que dans certaines circonstances précises. Parfois, ces circonstances sont les suivantes : « Je vais voyager en Europe pendant six mois. Je veux que quelqu'un s'occupe de mes affaires. Je suis tout à fait compétent et capable de le faire moi-même, mais je ne serai pas ici. » Dans de nombreux cas, cependant, la procuration est exécutée, et le document précise clairement que l'intention est qu'elle entre en vigueur seulement lorsque la personne qui l'a accordée devient incapable de prendre des décisions elle-même.

Dans le passé, il est déjà arrivé que la personne ayant obtenu la procuration ait été en mesure de l'exercer, c'est-à- dire de l'utiliser pour accéder à des comptes bancaires, pour vendre des biens, ou quoi que ce soit d'autre, avant que cet événement ne se soit produit. Bien entendu, ça a beaucoup à voir avec la communication, le fait de connaître certaines choses, l'occasion, l'accès et le fait que l'adulte âgé ait ou non conservé tous les documents nécessaires pour que ce genre de choses se produise.

Il serait possible de mettre en place de nombreux mécanismes de protection, mais il y a beaucoup d'aînés qui ne savent pas qu'ils peuvent révoquer une procuration en tout temps, pourvu qu'ils soient toujours compétents pour le faire du point de vue légal. Ce n'est que lorsqu'ils deviennent légalement incapables de prendre des décisions au sujet de leurs finances qu'ils ne peuvent plus révoquer ou modifier la procuration.

Il faut informer les gens à qui l'on accorde une procuration. Il faut leur dire quels sont leurs devoirs et leurs responsabilités et que ceux-ci ne leur incombent que dans certaines circonstances. Dans bien des cas, tout se passe bien dans les familles. Si quelqu'un essaie de tirer avantage de la situation, les avocats vont souvent proposer, comme vous le disiez, que deux personnes soient chargées de prendre les décisions ensemble. Par ailleurs, dans la province, il y a des ententes de représentation qui ont trait principalement à la prise de décisions relatives à la santé et au fait de décider à l'avance qui prendra les décisions à votre place une fois que vous deviendrez incapable de prendre des décisions au sujet de votre santé, mais aussi au sujet de certaines transactions financières. On a proposé de modifier cette loi provinciale pour faire en sorte que les procurations deviennent le principal document utilisé pour les affaires d'ordre financier et qu'on utilise surtout la représentation pour ce qui a trait à la santé.

De toute façon, la Representation Agreement Act prévoit qu'on charge officiellement des personnes de surveiller la personne qui fait l'objet de l'entente. Le représentant sait donc qu'il doit rendre des comptes à Georges, le beau-frère, ou à quiconque a été chargé de le surveiller pour s'assurer qu'il agit dans l'intérêt de la personne âgée. C'est beaucoup une question d'information.

Je ne sais pas si Laura Watts vous a présenté un exposé sur le genre de changements qui sont en cours dans le cadre de la réforme du droit. Partout au pays, les provinces uniformisent les lois relatives aux procurations de façon que les mêmes lois s'appliquent d'une province à l'autre.

Mme Spencer : Il y a eu dans les provinces de très bonnes initiatives d'éducation de la population dans le domaine juridique, mais, encore une fois, c'est disparate. Ça varie d'une province à l'autre pour ce qui est du fait de sensibiliser les gens en utilisant un langage simple concernant certaines choses, comme les procurations. Les responsabilités des gens. Les effets. Les testaments. D'autres types aussi de documents juridiques importants qui peuvent concerner les adultes âgés.

Ce serait bien de pouvoir offrir quelque chose à l'échelle du pays. L'autre défi, c'est la capacité de diffuser l'information auprès des gens qui en ont le plus besoin. C'est un reflet de la diversité du groupe que forment les aînés à l'échelle nationale.

Mme Bain : Les gens les plus vulnérables à l'exploitation par l'intermédiaire d'une procuration sont ceux qui vivent dans des établissements de soins. Il faut donc qu'il y ait un moyen par lequel des observateurs, par exemple des employés de l'établissement, puissent constater l'existence de preuves que la personne qui a la procuration fait un voyage à Hawaï, sans avantages immédiats pour la personne qui vit dans l'établissement, et ainsi de suite. Autrement dit, une conscience et des systèmes d'alerte pour essayer de mettre fin à ce genre d'exploitation qui découle des procurations.

La présidente : Ce qui semble tout à fait manifeste, cependant, c'est que, même au sein d'une même province, il y a des différences, sans compter les différences qu'il y a entre les provinces.

Mme Bain : Oui.

La présidente : En Ontario, par exemple, je pourrais rédiger certaines directives à l'avance, mais si je m'effondre dans le hall d'entrée d'un foyer de soins personnels, même si je suis résidante de ce foyer, que la personne qui se trouve là compose immédiatement le 911 et que les ambulanciers arrivent, la loi les oblige à me réanimer même s'il y a dans mon bureau un document qui précise que je ne veux pas être réanimée.

Je pense que ce dont vous parlez ici, c'est du fait qu'il y a énormément d'exemples de manque de communication, et je ne parle même pas du fait de faire respecter en Colombie-Britannique les directives que j'ai rédigées à l'avance en Ontario.

Mme Bain : Si vous deviez — Dieu vous en garde — vous effondrer ici, c'est-à-dire en Colombie-Britannique, vos fournisseurs de soins de santé pourraient, en vertu de la Healthcare Consent Act de la Colombie-Britannique, décider de vous donner des soins médicaux ou non dans certaines circonstances, simplement en fonction de ce qu'ils jugent indiqué. Même si les gens qui vous accompagnent à l'hôpital disent : « Nous savons qu'elle a un représentant qu'il faudrait consulter avant de prendre ce genre de décisions », il y a dans la Health Care Consent Act certaines dispositions qui concernent les soins d'urgence.

Mme Spencer : Comme vous pouvez le constater, ce sont là encore certains des multiples aspects des questions qui touchent le domaine. C'est vraiment difficile de voir ça comme une question tout à fait isolée. Elle présente tellement de facettes différentes.

Le sénateur Mercer : Avez-vous des chiffres sur les mauvais traitements subis par les aînés, et plus particulièrement sur l'exploitation financière? Avez-vous une idée de l'ampleur du problème?

Mme Spencer : L'ampleur du problème? Le travail que j'ai fait en 1995, ici, en Colombie-Britannique, portait précisément sur l'exploitation financière, et lorsque vous entendez dire qu'un aîné sur 12 est victime d'exploitation financière, ce chiffre vient d'une étude que j'ai faite. Celle-ci a consisté en des entrevues avec des personnes âgées de toute la province.

Ça n'a pas été une étude de très grande envergure. Seulement 200 personnes âgées y ont participé, alors il faut interpréter les chiffres avec circonspection. Ce qui est positif, c'est que nous avons fait des entrevues, ce qui nous a permis de parler des décisions relatives à leurs finances que les gens doivent prendre tout au long de leur vie et des différents types de relations que les gens entretiennent avec d'autres. Une des choses très importantes par rapport à cette étude, c'est qu'elle a déboulonné tout le mythe selon lequel les personnes qui sont victimes d'exploitation financière sont des femmes de 75 ans veuves et qui n'ont jamais signé un chèque de leur vie. Ça arrive à ces femmes, c'est sûr, mais pas seulement à elles.

Ça peut aussi arriver à un capitaine au long cours dont la femme s'est occupée de toutes les questions financières pendant les 50 années durant lesquelles il a navigué. Ça peut arriver aussi au vieil homme qui vient des Philippines, et qui, de par sa culture, est habitué que les femmes s'occupent des finances et non les hommes, et ainsi de suite.

Nos façons d'évaluer l'incidence de l'exploitation financière, nos connaissances dans ce domaine, sont encore très limitées, selon moi. Il va enfin y avoir une tribune à Ottawa sur le sujet précis de l'exploitation financière, et celle-ci va réunir différents intervenants clés qui vont parler des multiples aspects de la question, ainsi que des solutions possibles. Ça va se passer les 19 et 20 juin prochains.

J'ai parlé tout à l'heure du document d'information sur la prévalence et l'incidence de ce genre de chose. Il se trouve que c'est ma collègue, Gloria Gutman, et moi qui nous occupons de rédiger ce document, et l'une des choses que nous avons examinées, c'est la façon dont on s'y prend pour évaluer l'incidence de l'exploitation financière dans les différentes provinces. En 1999, Statistique Canada a fait une enquête sociale, et il y avait là-dedans quelques questions sur les différents types de violence et de négligence, dont l'exploitation financière. Je me souviens que seulement un faible pourcentage des personnes interrogées ont déclaré avoir été victimes d'exploitation financière. J'ai examiné les questions de l'enquête, et celles-ci portaient sur des choses comme, eh bien, quelqu'un vous a-t-il forcé à modifier votre testament? Ce qui arrive, c'est qu'il faut vérifier d'abord quelle proportion de la population a un testament. Quelle proportion d'aînés ont un testament? Ce ne sont pas les gens dont le revenu est faible. Ce ne sont pas non plus les gens dont le degré de scolarité est faible. Ce sont ceux dont le degré de scolarité est élevé. C'est donc plus haut, plus de revenus et plus de biens.

On peut donc par ce moyen saisir une partie du problème, mais ça ne permet pas de relever tous les cas d'exploitation financière, notamment les cas où quelqu'un siphonne les prestations de la SV. Il peut donc être difficile de définir les multiples aspects mêmes de ce type particulier d'exploitation.

Nous avons des recommandations quant à la façon dont cela pourrait permettre d'acquérir des connaissances dans l'avenir.

Je n'ai pas le document avec moi, mais, la semaine prochaine, une des étudiantes de notre centre défendra une thèse sur l'exploitation financière, et celle-ci est fondée sur les dossiers d'ACC. Elle a examiné les dossiers sur une longue période, et elle a en quelque sorte essayé de déterminer l'incidence de l'exploitation financière et les différentes dynamiques du phénomène, et peut-être aussi les facteurs liés à ça. Je vais lire sa thèse pendant la fin de semaine, en fait. Je vais jouer le rôle d'examinatrice externe pour cette thèse. Nous possédons donc un peu d'information éparse.

Il y a un projet en cours qui porte sur l'exploitation financière au Brunel Institute of Bioengineering du Royaume- Uni. On s'intéresse donc à certaines de ces questions ailleurs dans le monde.

Une partie de cette information va devenir plus précise dans l'avenir. L'une des choses que nous recommandons, c'est de faire en sorte que nous comprenions mieux, au Canada, l'exploitation financière et les facteurs de risque qui y sont liés.

Le sénateur Mercer : Dans le cadre d'une étude sur la pauvreté rurale à laquelle j'ai participé, nous avons appris un terme qu'utilisait une femme qui vivait dans une très petite collectivité des Territoires du Nord-Ouest. Elle a parlé de « houspillage ». Elle a décrit le phénomène de la façon suivante. Elle vivait une situation de violence, et lorsqu'elle en a parlé, comme la collectivité est si petite que l'auteur des actes de violence a des liens de parenté ou un lien quelconque avec tous les autres membres de la collectivité, elle s'est soudainement retrouvée coupée non seulement de cette personne, mais également du reste de la collectivité.

Mme Spencer : C'est exact.

Le sénateur Mercer : Dans les petites collectivités, par exemple dans celles du Nord ou de différentes régions de la Colombie-Britannique, est-ce que c'est aussi ce qui arrive aux aînés qui parlent du fait qu'ils sont victimes de l'une ou l'autre des formes de violence dont sont victimes les aînés?

Mme Spencer : C'est assurément le cas dans les collectivités rurales, et c'est l'une des choses qui, vraiment, empêchent les gens de parler de ce qui leur arrive.

Nous avons écrit certaines choses dans le passé au sujet des sept dynamiques particulières de la violence dans les collectivités rurales, et, fait intéressant, ce que certains auteurs d'actes de violence font, c'est qu'ils installent leur victime qui vient d'une grande collectivité, par exemple Vancouver, dans une autre collectivité, très petite celle-là, essentiellement pour l'isoler.

Lorsqu'on vit dans une collectivité rurale, toutes sortes de choses sont différentes. Le fait qu'il n'y ait pas de banque dans la collectivité peut être un très, très gros problème. Où devez-vous aller pour utiliser un guichet automatique? À la station d'essence et à l'épicerie de l'endroit. C'est donc votre nièce ou votre neveu qui fait vos courses et qui utilise pour cela votre chèque de sécurité de la vieillesse, et il ou elle ne vous apporte rien à manger ni ce qui reste de l'argent.

Encore une fois, il s'agit de comprendre les questions dans le contexte du milieu social, de l'environnement géographique.

Mme Bain : Peut-être puis-je simplement ajouter que, récemment, ce problème a fait surface dans le contexte... vous savez probablement que les aînés qui ont vécu dans les pensionnats indiens reçoivent des indemnisations. Il s'agit de la distribution préliminaire de ces indemnisations. Ainsi, essentiellement, beaucoup de membres âgés de collectivités de Premières nations — exactement le scénario que vous décriviez — reçoivent tout à coup de gros chèques. Nous entendons les histoires qu'ils racontent et que les membres de leur famille racontent, et ainsi de suite, selon lesquels il y a à la fois des problèmes culturels touchant le partage des richesses, pour ainsi dire, et des comportements de prédation. Pour ce qui est de l'aspect culturel, il y a un manque de clarté quand aux droits des adultes âgés de faire des cadeaux plutôt que de se faire enlever l'argent sans être consultés.

En ce qui concerne les comportements de prédation des fournisseurs de services de la collectivité, ça peut être, par exemple, le fait que des Money Marts ouvrent dans les collectivités où beaucoup de gens vont recevoir des indemnisations, simplement parce que les entreprises veulent profiter de la possibilité de faire des prêts et de toucher les intérêts élevés, ou encore de concessionnaires automobiles qui font des promotions, et ainsi de suite.

J'ai parlé tout à l'heure de PhoneBusters ainsi que des chiffres qui indiquent qu'une forte proportion des gens qu'on cible sont des personnes âgées. C'est le même genre de dynamique qui s'installe dans les petites collectivités lorsqu'il y a des possibilités d'exploitation financière.

La présidente : Je n'ai qu'une seule question, en fait, qui découle de ce que vous avez dit, mais également de ce qu'ont dit les témoins qui étaient ici ce matin, et elle porte sur les immigrants parrainés. Vous avez dit que la période de dépendance des conjoints parrainés était passée à trois ans, mais on nous a dit qu'elle n'avait été réduite qu'à cinq ans.

Mme Spencer : Je pense que c'est trois. J'ai peut-être tort, mais je suis assez sûre de ce que je dis. La raison pour laquelle je dis ça, c'est que toutes mes collègues et moi avons rédigé ensemble un chapitre sur les personnes âgées qui appartiennent à une minorité ethnique. Nous parlions précisément de ça.

La présidente : Cela aurait du sens que ce soit trois ans, parce que c'est le temps qu'il faut pour devenir citoyen canadien de plein droit. Je présume que vous recommandez la même chose que les témoins de ce matin, c'est-à-dire que l'on réduise de beaucoup la période de dépendance.

Mme Spencer : Oui. L'une des choses qui ressortent du travail qui a été fait sur la violence, notamment la violence conjugale, dans le cadre des parrainages, c'est que les parrainages ont vraiment créé un rôle de grande dépendance et de grande vulnérabilité pour les femmes. Nous savons pour avoir lu d'autres études que les parrainages créent ce genre de situation. Il y a des changements fondamentaux qui touchent les rôles des membres des familles, des familles étendues, et ces changements favorisent la violence et la négligence.

Pour ce qui est des situations concrètes qui se produisent, imaginez que quelqu'un parmi nous puisse prévoir être en mesure de s'occuper de quelqu'un pendant les dix prochaines années. Pour ma part, je sais que je ne pourrais absolument pas le faire. Même si j'avais les meilleures intentions, même s'il s'agissait d'une personne dont j'aimerais vraiment pouvoir m'occuper. La rupture des ententes de parrainage peut se produire pour des motifs qui échappent à l'emprise des gens.

L'autre chose, c'est qu'il ne s'agit pas seulement de cette règle de dix ans. L'autre partie du problème, c'est l'interface entre les politiques provinciales et les politiques fédérales en ce qui a trait à l'aide sociale. En Colombie-Britannique, l'aide sociale fournie à un immigrant parrainé devient une dette pour le répondant, et cette dette continue d'exister même après le décès de la personne, du répondant. C'est ridicule. On traite les répondants et les personnes qui sont parrainées comme des gens mal intentionnés qui chercheraient à voler le gouvernement. C'est le message sous-jacent.

La présidente : Très sincèrement, je ne suis pas convaincue que c'est constitutionnel, parce que si quelqu'un peut devenir un citoyen canadien après trois ans, comment cette personne peut-elle encore être considérée comme étant dépendante? Mais je soupçonne que bon nombre des gens qui peuvent demander la citoyenneté canadienne ne peuvent l'obtenir parce qu'ils ne parlent pas l'une ou l'autre des langues officielles du Canada. Et cela, en soi, les rend encore plus dépendants, ce qui fait que leur situation est vraiment précaire.

Merci beaucoup à vous deux. Votre témoignage nous a beaucoup éclairés, et ce que vous avez dit nous sera très utile pour la rédaction de notre rapport.

Sénateurs, nous allons maintenant recevoir notre dernier groupe de témoins de la journée, quoique, après ce groupe, quatre personnes vont témoigner à titre personnel, et nous allons également faire une visite de l'établissement. Votre journée ne sera donc pas terminée après le prochain groupe.

Nous accueillons M. Joe Gallagher, directeur principal, First Nations Health Council, ainsi que Mme Lisa Mercure, coordonnatrice des aînés, BC Association of Aboriginal Friendship Centres.

Nous avons eu hier le privilège de rendre visite à la Première nation Sagkeeng du Manitoba et de visiter son établissement de soins à longue durée, et, si j'y étais pour ma part déjà allé, je pense que ça a été en quelque sorte une révélation pour les autres sénateurs. Nous avons aussi eu la très grande chance d'entendre le témoignage des représentants de la Manitoba Association of Aboriginal Friendship Centres. Je vous le dis simplement pour que vous ayez une idée de ce dont nous avons entendu parler déjà, mais nous aimerions entendre de vous tout ce que vous avez à dire, parce que nous avons l'intention de consacrer une partie très importante du rapport que nous allons présenter en septembre aux aînés autochtones.

Monsieur Gallagher, commençons par vous.

Joe Gallagher, directeur principal, First Nations Health Council : En un mot, First Nations Health Council en Colombie-Britannique représente les 203 Premières nations qui habitent dans la province dans le cadre de la mise en œuvre du plan tripartite de santé, qui a récemment été signé par les dirigeants des Premières nations en Colombie- Britannique, le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral. Le premier ministre Gordon Campbell et le ministre fédéral de la Santé, Tony Clement, ont apposé leur signature et, à mon avis, le plan tient compte de beaucoup des questions abordées dans votre rapport. Dans les commentaires que je vous adresserai aujourd'hui, nous parlerons de certaines de ces choses.

L'un des aspects les plus importants du plan de santé consiste à combler les écarts entre les Premières nations et les autres Canadiens. Essentiellement, cela tient à des questions relatives aux déterminants sociaux de la santé et à leur état actuel chez les Premières nations du pays, surtout ici en Colombie-Britannique.

Je vais aborder certains commentaires liés au rapport lui-même et je tenterai de vous communiquer certaines de nos idées à ce sujet.

Le rapport tient compte de l'étroite corrélation entre les relations sociales positives et la santé physique et mentale; le manque de relations sociales a également été identifié comme un facteur de risque de souffrir de problèmes de santé. Pour les Premières nations, cela est particulièrement vrai : le racisme, direct ou indirect, exacerbe l'isolation sociale et nuit aux possibilités que les personnes accèdent aux programmes de santé et de services sociaux. Il influe aussi sur l'accès à d'autres déterminants de la santé, comme l'éducation, le logement et l'emploi.

Nous parlons de la situation à laquelle beaucoup de gens de notre peuple font face, même lorsqu'ils tentent d'accéder aux services de santé de base. En fonction de leur situation de vie et de l'environnement dans lequel se trouvent les services de santé, beaucoup de gens de notre peuple n'accèdent pas du tout à ces services. Surtout chez nos aînés, les difficultés qu'ils doivent surmonter pour pénétrer dans un système qui n'est pas adapté à leur identité culturelle empêchent la prestation de services de qualité ou même l'accès à ceux-ci.

Le rapport fait aussi allusion à un document intitulé Initiative des collectivités rurales et éloignées amies des aînés : un guide. Chez les collectivités des Premières nations, le développement communautaire dans la réserve est financé par AINC, Affaires indiennes et du Nord Canada, et ne s'inscrit pas dans l'infrastructure destinée à la population générale financée par les municipalités.

Les réseaux d'égout et d'approvisionnement en eau dans les réserves sont souvent inadéquats, tout comme le logement, donc une infrastructure de base est de la plus grande importance pour les dirigeants et les planificateurs des Premières nations. Les établissements spéciaux, les aires de loisirs et autres infrastructures planifiées pour les aînés ne sont pas en tête des priorités lorsqu'on étire les ressources, surtout du fait que les populations des Premières nations comportent plus de jeunes que d'aînés.

Les programmes et les services pour les jeunes sont très en demande à cause du taux élevé de maladies mentales et de problèmes de toxicomanie, qui entraînent, entre autres, un taux élevé de suicide. Or, au bout du compte, l'éventail complet des priorités fait en sorte que, parfois, nos aînés sont oubliés, parce que la priorité tient au logement pour les familles. Si l'on observe notre dynamique et l'importance de la structure familiale, on constate que nous avons un grand besoin de prendre soin des familles en général. Les besoins des aînés qui s'ajoutent se révèlent souvent un fardeau imposé aux collectivités, et habituellement, elles ne s'en acquittent pas très bien. Pourtant, la taille du problème augmente progressivement, car nous perdons des aînés chaque jour.

À la page 13, le rapport indique que les gens sont davantage enclins à profiter des possibilités d'apprentissage à un âge avancé s'ils l'ont fait tout au long de leur vie. Or, encore une fois, ce n'est pas nécessairement vrai chez notre peuple. Les expériences qui découlent des pensionnats indiens, des taux de décrochage élevés et de l'incapacité d'accéder à l'éducation à cause de la pauvreté et du manque de ressources fournies par AINC à des fins de congé d'études postsecondaires, beaucoup des membres de notre peuple n'intègrent pas le système d'éducation — un type de processus qui s'apparente à l'apprentissage continu.

Il faut en faire davantage pour veiller à ce que les gens de notre peuple soient en mesure de profiter d'un apprentissage continu dans un contexte qui est adapté à leurs besoins. La programmation et la conception de programmes, pas seulement l'exécution des programmes, doivent se faire en partenariat avec nos Premières nations, pour que l'on puisse s'assurer que les programmes sont dispensés de façon à ce que les membres de notre collectivité puissent y participer avec succès et accroître les possibilités qu'ils y participent davantage au fil de leur vie.

À la page 15, la recommandation 9 parle d'adapter le programme Nouveaux Horizons pour les aînés, en fonction des besoins des Autochtones. Le programme Nouveaux Horizons pour les aînés prévoit des subventions pouvant s'élever à 25 000 $ pour des projets communautaires qui favorisent la participation des aînés à la vie communautaire pour éviter leur isolement social. C'est une bonne idée, mais un bon nombre de nos collectivités partent de si loin que cette mesure risque de ne pas être pertinente pour elles. Nous avons toujours besoin d'établissements, de moyens de transport et d'un effectif pour réaliser ce genre de choses. Ainsi, il serait peut-être plus approprié que ce genre de ressources soit utilisé pour favoriser la participation de nos aînés à d'autres programmes en place dans des collectivités qui ont besoin de la participation de nos aînés et en tireraient profit.

Cette question tient en grande partie à la programmation liée à nos jeunes; beaucoup de nos collectivités souhaitent intégrer ce point de vue traditionnel à ces programmes, et bien souvent, nous n'arrivons pas à trouver les ressources nécessaires à ce genre de coûts.

À la recommandation 11, on parle de sensibiliser les Canadiens aux avantages de l'activité physique. C'est une recommandation utile, et, dans le cadre de notre Plan tripartite de santé, on retrouve un point prioritaire qui a trait à l'initiative Act Now des Premières nations, laquelle se rattache à une initiative provinciale nommée ActNow, qui vise à aider la Colombie-Britannique à devenir la province la plus en santé et en forme du pays d'ici 2010. Dans le cadre de notre Plan tripartite de santé, nous organisons actuellement des initiatives liées à l'activité physique et à l'amélioration de l'alimentation, qui visent à promouvoir des avantages semblables chez les Premières nations. Dans notre initiative, nous cherchons à prendre en main l'activité physique et l'alimentation tout au long du spectre de la vie de nos collectivités. Nous espérons mobiliser les personnes âgées et les aînés pour qu'ils participent à ces activités.

La recommandation 12 consiste à éliminer les obstacles à la vie active. Dans le cas des Premières nations, il faut tenir compte des obstacles supplémentaires, et tenir compte des différences entre la situation dans les réserves et à l'extérieur. L'accessibilité pour les membres des collectivités est compromise lorsque celles-ci sont éloignées et qu'il n'y a pas d'établissements. Le transport est toujours un immense problème, tout comme la pauvreté, entre autres, qui limite l'accès, pas seulement pour nos aînés, mais pour les familles et les jeunes, sur le plan des loisirs et du sport.

De plus, nous avons une bonne idée des activités de promotion de la prévention, car à mesure que vieillissent nos collectivités, nous voulons faire diminuer le nombre de gens aux prises avec de graves états chroniques en tentant de promouvoir des choix de vie plus sains dès un jeune âge. Nos aînés ont un grand rôle à jouer dans ce dialogue, qui doit avoir lieu.

Dans la recommandation 13, on parle de faciliter la mise en commun des connaissances et des pratiques exemplaires. Or, encore une fois, nous estimons que cette recommandation est très bonne. Notre initiative ActNow est un bon exemple de tentative de travailler à appliquer les connaissances, surtout dans le domaine des activités récréatives traditionnelles et du genre de choses que les collectivités peuvent faire et partager entre elles pour favoriser un style de vie plus actif et sain.

Le rapport parle du logement pour les aînés et du fait que la propriété de leur propre maison peut contribuer à leur retraite. Cela n'a pas beaucoup de sens dans bon nombre de nos collectivités. Dans les réserves, nos aînés ne sont pas propriétaires de leur logement ou, le cas échéant, ils ne sont pas dans une situation où le logement peut être un actif négociable en banque. S'ils possèdent une forme ou une autre de titre foncier, c'est par le truchement d'un certificat de possession qui a une très faible valeur pécuniaire pour l'aîné, à moins qu'ils puissent le transmettre à un autre membre de la bande, ce qui est habituellement la seule façon possible de transférer ce genre d'actifs. Donc c'est quelque chose qui n'a pas beaucoup de sens pour notre peuple.

À la page 31, on énonce ce qui suit : « Lorsque les déterminants de la santé sont positifs pendant toute la vie, les aînés ont un troisième et un quatrième âge plus longs et ont moins d'années en perte d'autonomie. » Encore une fois, ce n'est pas vrai pour les Premières nations à cause des répercussions des pensionnats indiens et de la pauvreté. Les membres des Premières nations ont une espérance de vie plus courte, et les déterminants de la santé comme l'éducation, l'emploi, le logement et la santé sont plus faibles que dans la population en général.

Nous sommes aux prises avec ces éléments cruciaux qui nous permettent de mesurer à quel point nous pouvons améliorer les résultats pour la santé de ces gens, pour que nos aînés aient une meilleure qualité de vie à un âge plus avancé.

À la page 32, on mentionne la nécessité de bonnes chaussures pour l'activité physique. Encore une fois, c'est une difficulté chez les aînés des Premières nations à cause de la pauvreté et des déterminants sociaux auxquels ils font face.

La recommandation 34 parle d'établir un régime national d'assurance-médicaments exhaustif financé par l'État ou par un partenariat public-privé. Pour les Indiens inscrits, cette mesure est en quelque sorte accessible en vertu du programme de services de santé non assurés offert par Santé Canada, mais le programme en soi est inadéquat à cause des limitations des coûts et de l'instruction en matière de politique qui tire son origine de l'échelon national sans tenir compte des disparités régionales. Cela crée une situation dans laquelle le programme des services non assurés ne couvre pas toutes les ordonnances nécessaires, et on a des inquiétudes au sujet de la consommation de médicaments génériques.

La recommandation 35 parle de lancer des campagnes d'information sur la nutrition destinées aux aînés et à la population en général. Nous songeons à le faire dans le cadre de notre plan tripartite de santé. En particulier, nous avons concentré nos efforts sur notre initiative ActNow des Premières nations et sur l'Initiative autochtone sur le diabète, qui relève du gouvernement fédéral. Nous travaillons en partenariat avec le gouvernement fédéral dans le cadre du Plan tripartite pour tenter de mettre en œuvre cette initiative.

Dans la recommandation 36, on parle de veiller à ce que les programmes de soins dentaires pour les anciens combattants et les détenus des pénitenciers fédéraux des Premières nations assument les coûts des prothèses dentaires. C'est une bonne recommandation, mais elle passe à côté de la cible : à cause de la piètre qualité des soins dentaires tout au long de la vie, beaucoup d'Autochtones ont besoin d'une prothèse pendant la majeure partie de leur vie, et la piètre qualité des soins dentaires peut causer des maladies du cœur. Il serait important d'ajouter à cette recommandation que l'élargissement des politiques de soins dentaires non assurés permettent de veiller à ce que des soins adéquats soient dispensés à toutes les étapes de la vie et devraient inclure les soins orthodontiques.

Nous faisons face à beaucoup de difficultés différentes dans le cadre de ce programme de soins non assurés sur le plan des soins dentaires pour les Autochtones tout au long de leur cycle de vie. Ce programme, à l'instar du programme d'ordonnances, est motivé, à l'échelon national, par le besoin de limiter les coûts. Les instructions en matière de politique ont créé un programme qui semble bien beau théoriquement, mais en réalité, il ne réussit pas à répondre aux besoins de notre peuple. Alors, quand les membres de nos collectivités atteignent l'âge d'or, leurs antécédents dentaires sont un problème de longue date.

La section 4.3 fait allusion à la santé, aux ressources humaines ainsi qu'à la spécialisation gérontologique et gériatrique. Le savoir-faire culturel est essentiel chez les fournisseurs de soins de santé qui travaillent auprès des Premières nations. Par savoir-faire, on entend la capacité de comprendre les personnes qui ont fréquenté le pensionnat indien et de travailler auprès d'elles, ainsi que la compréhension de la langue, les traditions culturelles et l'importance de la famille dans la vie de l'aîné. Il faut vraiment savoir observer comment ces choses interagissent et reconnaître que, en Colombie-Britannique, par exemple, nous comptons 203 Premières nations, et ces collectivités ne sont pas toutes pareilles.

Il faut être en mesure de respecter la diversité de ces collectivités et, lorsque des fournisseurs de services travaillent avec des aînés d'une collectivité donnée, ils doivent comprendre son environnement et ce qu'il signifie, sinon, cela devient, encore une fois, un service ou une interaction qui ne profite pas à l'aîné.

À la recommandation 45, on parle d'appliquer les normes de référence en matière de soins palliatifs à domicile pour les anciens combattants, les Premières nations et les Inuits ainsi que les détenus des pénitenciers fédéraux. Il faut faire valoir que les Premières nations doivent diriger ce processus à l'échelon communautaire. Il ne faut pas mettre cela en œuvre à l'échelon d'un ministère national ou régional. Beaucoup de nos aînés ne veulent pas quitter leur domicile, à cause de certaines choses que nous avons mentionnées au chapitre de leur interaction avec le système de santé publique. Ils sont plus à l'aise chez eux, et bon nombre de nos collectivités veulent réussir à trouver des manières de prendre soin de leurs aînés chez eux. Cela s'harmonise mieux avec la culture de notre peuple, et nous devrons trouver une manière d'en faire une réalité.

À la page 39, on aborde le dialogue sur la santé mentale, la maladie mentale et la démence. On mentionne que certains sont aux prises avec une maladie mentale pendant la majeure partie de leur vie. Le comité devrait prendre note du fait que les Premières nations sont aussi aux prises avec des problèmes de santé mentale pendant la majeure partie de leur vie, dont la dépression, les tentatives de suicide, la toxicomanie, le syndrome de stress post-traumatique causé par des facteurs comme les pensionnats indiens. Certains peuvent avoir été victimes de violence physique, psychologique et sexuelle pendant toute leur vie, alors il est extrêmement important d'examiner ces questions et de les prendre en considération pour mesurer l'ampleur de leur signification pour les Autochtones et les collectivités des Premières nations. Les répercussions des pensionnats indiens ne peuvent jamais être sous-estimées, car elles ont un effet sur les nouvelles générations dans nos collectivités. Les aînés touchés ont vécu cette expérience et ont été en butte aux problèmes qui en ont découlé à l'égard de leur interaction avec leur famille, c'est un phénomène dont nous devons être très conscients.

La recommandation 46 parle d'élaborer des outils pour faciliter le diagnostic précoce de troubles mentaux. Encore une fois, on devrait prendre conscience du fait que des outils doivent être élaborés à l'échelle des collectivités, afin qu'ils comprennent les pratiques culturelles et qu'ils tiennent compte des expériences liées aux pensionnats indiens et aux tabous que peuvent entretenir des collectivités au sujet de certaines maladies mentales. Nous croyons qu'il doit exister une meilleure façon de faire, et qu'on ne peut pas élaborer des outils sans égard aux collectivités des Premières nations et à leurs commentaires, selon l'endroit où l'on se servira de ces outils.

La recommandation 47 parle de supprimer le plafond de 3 p. 100 imposé aux services de santé non assurés. Cette recommandation devrait ajouter que les politiques liées aux services de santé non assurés devraient être conçues et mises en œuvre par les Premières nations. Le programme des services de santé non assurés, encore une fois à cause de la limitation des coûts et du fait que les instructions et les politiques sont conçues à l'échelon national n'est pas optimal. En fait, les besoins des Autochtones en matière de services de santé ont plutôt tendance à être déterminés dans le cadre de programmes fédéraux qui dictent quels sont les intérêts supérieurs des Premières nations.

Je vais évoquer les soins dentaires comme exemple. Lorsque j'entends des histoires au sujet du refus d'offrir des soins dentaires, du fait qu'on prend des décisions selon lesquelles la personne est incapable d'assumer sa propre hygiène dentaire de toute façon, de sorte que ce n'est pas une dépense judicieuse de lui offrir ce service, je ne crois pas que j'entends parler de pratiques exemplaires. Donc le programme de services de santé non assurés n'est pas seulement une question de plafond. En Colombie-Britannique, nous constatons déjà que le programme est sous-financé comparativement à ce qu'il en est dans le reste du pays. Ce qui importe, c'est la manière d'offrir les services et les avantages, car il arrive que les personnes essuient un refus et, dans bien des cas, on leur demande de payer à l'avance puis de se faire rembourser par le programme de services non assurés. Les aînés qui ont les moyens de payer leurs lunettes ou leurs soins dentaires, ou je ne sais quoi, à l'avance, sont très rares, même s'ils peuvent en faire approuver le remboursement. Alors voilà un gros problème qui est lié à ce programme.

La recommandation 48 parle d'élargir la catégorie des dépenses admissibles au titre du programme des services de santé non assurés de manière à inclure les coûts liés aux soins des pieds. Cette recommandation devrait être plus générale pour permettre aux Autochtones de déterminer des besoins autres que les soins des pieds. Les personnes qui déterminent les priorités sont loin d'être bien placées pour connaître la nature des besoins à l'échelle communautaire.

L'une des choses que nous reconnaissons dans le cadre de notre plan de santé, c'est que nous devons vraiment changer les choses du tout au tout. Les gouvernements doivent prendre conscience du rôle des Premières nations dans la direction de leurs propres services de santé, et reconnaître que c'est par l'inclusion du modèle de prestation des services communautaires des Premières nations que nous irons vraiment de l'avant et que nous renforcerons notre capacité de répondre aux besoins en santé de notre peuple. Le gouvernement doit mettre un terme à son rôle de concepteur et de fournisseur des programmes, et plutôt se faire le partenaire de gouvernance et le bailleur de fonds dans le cadre de ces initiatives, ce qui permettra aux collectivités de diriger les services comme le souhaitent tous les membres de la collectivité des Premières nations, y compris nos aînés.

À la page 44, on établit des recommandations liées au logement. Il faudrait ajouter une recommandation selon laquelle AINC doit fournir des ressources adéquates pour le logement dans les réserves et à l'extérieur des réserves, car c'est un besoin fondamental chez notre peuple, et le logement influe sur la santé de toutes nos familles et de nos aînés.

La recommandation 55 parle d'accroître le parc de logements supervisés abordables à l'intention des aînés inuits et des Premières nations. Cette mesure devrait être offerte sans égard au lieu de résidence, car beaucoup d'Autochtones finissent par faire face à différents types de problèmes s'ils résidant temporairement dans une réserve ou à l'extérieur.

La recommandation 69 parle de mettre en commun les meilleures pratiques relativement aux services de soins intégrés. L'intégration des services est à la hausse partout au pays, mais les compétences ont rarement l'occasion de mettre en commun leurs expériences. C'est tout aussi vrai pour les ministères : ainsi le ministère des Anciens Combattants offre l'un des meilleurs modèles de soins intégrés au pays, comparativement aux soins que dispense le gouvernement du Canada aux membres des Premières nations. Il faut donc trouver un moyen de faciliter l'échange de renseignements dans d'autres domaines.

L'une des approches étudiées ici en Colombie-Britannique par notre conseil de leadership des Premières nations, un regroupement de tous les organismes politiques des Premières nations qui collaborent, consiste à abattre les cloisons qui font en sorte que l'on aborde un problème lié à la santé, un problème lié à l'éducation, un problème lié au logement et un problème lié au développement économique séparément. Tous ces déterminants sociaux influent sur les résultats de santé des Autochtones dans la province, et ce que nous tentons de faire sur ce plan consiste à abattre les cloisons entre les ministères.

L'une des discussions du conseil de leadership auxquelles j'ai pu assister à Ottawa qui s'est tenue cette année regroupait le comité sur l'inclusion sociale des sous-ministres, présidée par le sous-ministre de la Santé. Dans le cadre de cette discussion à laquelle ont participé des représentants des différents ministères, nous avons pu parler d'une vision légèrement différente de la façon d'aborder les problèmes et les soins relatifs aux collectivités des Premières nations et aux gens dans la province, vision qui, à mon avis, a été acceptée d'emblée avec un vif intérêt par les gens présents.

Maintenant, il faut relever le défi de poursuivre ce dialogue, au moins à l'échelon supérieur, afin que nous puissions compter sur les compétences gouvernementales et les autorités pour tenir ce dialogue. Il faut axer notre discussion sur les collectivités, les intérêts des personnes que nous tentons de servir, et faire passer le dialogue à l'étape suivante, afin que nous puissions apprendre des différents processus. Il faut concevoir une approche plus holistique en matière de santé, mais aussi de déterminants sociaux chez les Autochtones de la Colombie-Britannique.

La recommandation 72 parle d'accroître le parc de logements convenables et abordables à l'intention des Premières nations et des Inuits. D'accord. Il faudrait ajouter « sans égard au lieu de résidence ». Il faudrait aussi préciser que les coûts en santé chez les Premières nations augmenteront au fil du temps, car la majorité de notre population est jeune, et les maladies chroniques, comme le diabète, sont constamment à la hausse. Il faut mettre en place des ressources adéquates pour réagir à ces problèmes maintenant, et à l'avenir, à mesure que notre population vieillit.

Il faut garder à l'esprit que, au moment où les Premières nations cherchent des moyens de réagir à ces problèmes, la gouvernance de nos services de santé a un rôle très important à jouer, et nous avons besoin du soutien des gouvernements fédéral et provincial, qui doivent reconnaître la nécessité de nos efforts pour trouver une nouvelle façon de faire les choses.

Les mesures de prévention que nous cherchons à mettre en place sont des outils dont les collectivités ont besoin pour soutenir notre population grandissante de jeunes et de jeunes familles. Ce faisant, les aînés ont un rôle important, car nous avons toujours appris que, avant d'aller de l'avant, il faut savoir d'où l'on vient, et c'est ce que nous rappellent les aînés. Ils nous enrichissent de ce savoir traditionnel, et le fait que ce savoir n'est pas nécessairement reconnu comme précieux par la collectivité non autochtone présente un obstacle de taille sur le chemin que nous devons suivre dans ce genre de domaine.

Par exemple, lorsque nous pensons à certaines de ces mesures de prévention visant à favoriser un mode de vie sain et actif pour les gens, chez nous, cela consiste en grande partie à retourner sur les terres. Faire en sorte que les gens puissent aller à la chasse et faire différentes activités se rattachant au mode de vie d'antan. Il existe aujourd'hui beaucoup d'obstacles qui écartent notre peuple des terres. Si nous pouvons accomplir certaines de ces choses, notre mode de vie s'assainit. Ainsi, nous mangeons plus d'aliments traditionnels, qui sont meilleurs pour les gens et pour la collectivité, contrairement à ce que nous sommes en mesure de payer à l'épicerie, car il faut trouver les aliments le moins chers possible, des choses comme des croustilles et autres aliments bon marché. Chaque fois que nous tentons d'acheter des légumes et d'autres choses qui sont très difficiles à obtenir dans nombre de nos collectivités éloignées, nous devons payer très cher.

Donc la sécurité des aliments et les autres choses dont j'ai parlé sont une grande partie de ce qui est nécessaire pour non seulement appuyer nos aînés et le reste de notre collectivité, mais, encore une fois, trouver des moyens qui sont propres aux Premières nations et à leur capacité à gouverner leurs propres affaires.

Merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion de faire mon exposé devant vous aujourd'hui.

La présidente : Merci de nous avoir présenté un mémoire aussi détaillé.

Lisa Mercure, coordonnatrice des aînés, BC Association of Aboriginal Friendship Centres : Bonjour, mes amis.

[Mme Mercure s'exprime dans sa langue maternelle.]

Je tiens à remercier les Salish du littoral de nous avoir permis de vivre et de travailler ici aujourd'hui, dans leur nation et dans leur territoire. Mon nom est Lisa Mercure. Ma famille maternelle vient du Nord de l'Alberta. Nous sommes en fait Cris Mikisew, mais nous sommes de descendance dénée. Je suis administratrice des programmes pour la BC Association of Aboriginal Friendship Centres. Je vous remercie et vous transmets mes salutations.

J'aimerais remercier la présidente du comité, le Sénat, les membres du comité et les collectivités qui ont contribué au rapport sur le vieillissement du Comité sénatorial : Une population vieillissante : Enjeux et options.

Malheureusement, notre aînée aujourd'hui, sénateur national et membre fondateur du Conseil des anciens de la BC Association of Aboriginal Friendship Centres ne se sent pas bien et est désolée de ne pas pouvoir être présente. Je vais la remplacer aujourd'hui et je vais mettre en lumière certains des enjeux liés à nos collectivités autochtones auxquelles s'attachent les centres d'amitié avec lesquels je travaille.

Je vais juste faire le point sur les centres d'amitié en Colombie-Britannique et présenter un contexte et un historique en bref. En 1972, 11 collectivités ont formé une association collective de centres d'amitié pour offrir un soutien en communication au mouvement grandissant des centres d'amitié.

De 1972 à 1975, la Pacific Association of Communication in Indian Friendship Centres, ou PACIFC, a été établie. Une grande partie de l'effectif, des programmes et des services étaient consacrés aux besoins de notre collectivité autochtone en milieu urbain. Aujourd'hui, nos centres d'amitié se trouvent dans 24 collectivités de la Colombie- Britannique.

Aujourd'hui, notre peuple autochtone a besoin de nouvelles idées et de nouveaux concepts pour réussir à relever les différents défis et à tirer avantage des diverses possibilités de répondre aux besoins de notre collectivité.

La direction de l'association provinciale a permis une participation significative des jeunes en prévoyant des postes assortis d'un droit de vote au conseil d'administration pour des jeunes Autochtones et en permettant à ceux-ci de participer au comité de direction.

Récemment, la direction de l'association provinciale a fait appel à un représentant des aînés, et, en juin 2005, nous avons mis sur pied un conseil des anciens. Il a été fondé par trois membres : George Cook des centres d'amitié de Victoria, Basil Morissette, de la région de Kamloops et Marjorie White, qui travaille à Vancouver. Les trois se rencontrent dans nos centres d'amitié provinciaux. Ils commencent à écouter les discussions et à documenter les problèmes et les préoccupations qu'ils voient dans nos collectivités.

L'Association nationale des centres d'amitié a mis sur pied un comité de sénateurs qui se réunit avant les réunions du conseil d'administration et fait office de comité consultatif. Notre aînée, Mme White, fait partie de ce comité.

Les centres d'amitié sont progressivement devenus une organisation florissante en Colombie-Britannique. Au cours des dix dernières années, nous avons accru notre effectif communautaire; il est passé de 400 employés à temps plein à 850 employés à temps plein. Au cours des dix dernières années, le nombre de centres membres est passé de 21 à 24, et bon nombre d'autres collectivités commencent à manifester leur intérêt.

Nous sommes la plus grande agence de prestation de services sociaux non gouvernementale dans la province, et les YMCA arrivent au second rang. Durant cette période, bon nombre de personnes ont profité des programmes sociaux et des services que nous offrons.

Nos centres d'amitié comprennent aussi 200 membres bénévoles du conseil, et ce groupe offre plus de 16 000 heures de bénévolat à nos collectivités.

Nous croyons que nous commençons à concrétiser notre énoncé de mission en offrant directement des services à plus de 1 300 personnes autochtones et non autochtones chaque jour. L'année dernière, nous avons administré et exécuté 372 programmes différents destinés aux Autochtones en milieu urbain ainsi qu'à ceux qui franchissent le seuil de notre porte.

La réalité actuelle des aînés dans nos collectivités urbaines et dans les centres d'amitié provinciaux est touchée par l'influence soudaine du changement. Nous avons pris connaissance de la force et du soutien que nos centres d'amitié ont offerts à notre collectivité et nous commençons à voir que les défis sont réellement colossaux.

Dans certains cas, nous devons réagir au temps froid en élaborant des stratégies pour soutenir les itinérants qui vivent dans notre collectivité. Certaines collectivités sont aux prises avec une augmentation du taux de suicide chez les adolescents. Dans ces situations extrêmes, les centres d'amitié doivent reposer sur une infrastructure solide pour composer avec les écarts dans les services communautaires.

Toutes les organisations autochtones composent avec un taux élevé du roulement du personnel, surtout chez les travailleurs de première ligne qui vivent les situations les plus stressantes. Les membres du personnel travaillent autant qu'ils le peuvent, et bien souvent, cela ne suffit pas à combler le besoin de programmes supplémentaires adaptés à la culture.

Nous honorons la contribution de tous ceux qui franchissent notre porte. Nos aînés enseignent une philosophie holistique, et c'est pourquoi nous cherchons à réaliser un équilibre entre tous les aspects de la vie : physique, mental, spirituel et psychologique. Pour appuyer l'évolution à ce chapitre, nos organismes doivent intégrer ce modèle holistique et être en mesure de mettre à profit l'orientation de nos aînés.

Le mouvement des centres d'amitié repose sur un code d'éthique qui a toujours été respecté. Le code est un outil élaboré par nos aînés, et il est toujours pertinent.

L'une des demandes qui m'ont été adressées aujourd'hui par mon groupe d'aînés consistait à mentionner les excuses du premier ministre prévues pour le 11 juin au nom du gouvernement du Canada dans l'affaire des pensionnats indiens. Nos aînés ont reçu une indemnité unique de 12 000 $ ainsi que 3 000 $ pour chaque année qu'ils ont passée dans un pensionnat indien; il y avait aussi une indemnisation distincte pour la violence subie par nos aînés.

L'un des points saillants est la promesse d'une commission de vérité et de réconciliation dont le président a été choisi. Elle aura le pouvoir d'exiger la production de documents et, nous l'espérons, sera capable de trouver les sites d'inhumation collective. La commission tiendra des audiences dans les collectivités de la Colombie-Britannique.

Les excuses sont prévues pour le 11 juin. J'espère que cela donnera à toutes nos collectivités autochtones l'occasion de se réunir, de partager un repas, de participer à différentes activités et de célébrer nos survivants.

Les aînés, dans le cadre d'une réunion, ont récemment fait part de certaines de leurs expériences dans les pensionnats indiens. Nos réunions du conseil des anciens regroupent tous les aînés qui participent à nos réunions trimestrielles. Ils voulaient que l'on prenne conscience du fait que ces expériences les affligent jusqu'à ce jour. L'une des aînées a reconnu que des excuses sont un geste très honorable à l'endroit d'une autre personne. C'est comme admettre un tort. Elle estimait être là grâce à sa foi en le Créateur. Elle était une élève, et elle a survécu grâce à cette foi. Aujourd'hui, elle est en santé, mais elle a déclaré qu'elle apprécierait le soutien et aimerait pouvoir soutenir tous les survivants de ces collectivités.

Cela afflige toutes nos collectivités autochtones. À une occasion, un autre aîné a dit que les Autochtones avaient perdu leur langue : cet aîné avait été puni pour avoir parlé sa langue, et c'était le sort réservé à tout le monde. Ils ont perdu cette langue, et leurs enfants ne l'ont jamais apprise. C'est notre culture — qui nous sommes — qui a subi le plus grand tort.

Cela est devenu manifeste dans nos collectivités, où la langue et la culture sont très importantes; c'est là où nous trouvons notre identité. C'est pourquoi je me suis présentée dans ma langue maternelle, pour tenter de toucher à cet aspect et de me souvenir des valeurs que m'ont enseignées les aînés et de me rappeler que la langue est l'essence de notre peuple. Lorsque nous comprenons d'où nous venons, nous sommes en mesure de trouver notre équilibre et de comprendre, grâce aux enseignements, comment être holistiques et de comprendre comment nous pouvons continuer à évoluer.

Notre terre constitue notre plus grande ressource. Les centres d'amitié ne participent pas au processus des traités, mais ils ne sont pas moins conscients de la rupture de liens chez les gens qui passent des réserves aux régions autochtones en milieux urbain, rural ou éloigné et n'ont pas de liens avec les aînés. Nous sommes conscients de la difficulté de la réunification et, pour une collectivité autochtone, d'être capable de reprendre possession de sa langue et de sa culture.

Il y a une fondation culturelle en Colombie-Britannique, et des initiatives comprenant des programmes linguistiques sont en place. Le problème, c'et que notre peuple est composé, encore aujourd'hui, de migrants, et certains d'entre eux n'ont pas de relations avec une personne qui puisse les aider à apprendre la langue et la culture et les orienter durant ce processus.

À mon avis, il est vraiment clair que nos organismes autochtones ont absolument besoin d'un coordonnateur des aînés, afin que chacun d'entre eux puisse soutenir et élaborer des programmes qui répondent aux besoins culturels de nos aînés dans les centres d'amitié.

Une autre initiative dont je voulais vous parler est le First Citizens Fund en Colombie-Britannique. Le First Citizens Fund est un fonds perpétuel en Colombie-Britannique qui sert à promouvoir les initiatives de développement socioéconomique dans les collectivités autochtones. Or, ce fonds prévoit du financement pour le transport des aînés qui couvre en partie les frais de transport des participants à des ateliers et des conférences liés au patrimoine, à la culture et à l'éducation. Un aîné autochtone particulier peut être admissible, tout comme un organisme autochtone reconnu au nom des aînés. Ce fonds n'offre actuellement que 25 bourses de 1 000 $, donc il est clairement insuffisant pour répondre aux besoins.

En Colombie-Britannique, nous sommes très chanceux de tenir une conférence annuelle des aînés. L'année dernière, cela a permis de réunir plus de 4 000 aînés, travailleurs de soutien et organismes. Quarante-quatre organismes ont déposé une demande de financement; la demande totale se chiffrait à 315 630 $ pour aider 489 aînés qui souhaitaient participer à cinq activités culturelles différentes en Colombie-Britannique. Je crois que nous devrions appuyer ce genre d'initiatives.

L'un des plus grands obstacles que doivent surmonter nos aînés touche le transport et la capacité de se réunir et de retourner dans leurs collectivités et territoires pour voir leur famille.

Je voulais aussi vous fournir brièvement le contexte du conseil des anciens. En juin 2005, le mandat du conseil des anciens a été accepté. Le conseil avait pour but de fournir des conseils et une orientation au conseil d'administration de la BC Association of Aboriginal Friendship Centres et tous ses sous-comités. Les membres offrent des conseils et une orientation liés à des questions mises de l'avant par le conseil des anciens, par le comité des conseils d'administration provinciaux et les centres d'amitié membres. Ils partagent leur connaissance et leur sagesse dans le cadre du conseil, de façon à ce que chaque aîné puisse ramener cette connaissance et cette sagesse à son centre d'amitié et partager l'information et les ressources.

Grâce à ce conseil des anciens, nous avons pu commencer à aider nos aînés à demander du financement pour différentes ressources. Manifestement, il n'y a pas assez de programmes linguistiques et culturels. Nous avons reçu une subvention grâce au programme Nouveaux Horizons. Je crois que ce modèle devrait aussi être adopté par nos organismes autochtones, qui sont administrés par des Autochtones pour des Autochtones, et que le comité consultatif qui examine les soumissions et les activités devrait comprendre nos aînés.

Dans le cadre de ce projet, une somme de 25 000 $ est affectée à des mesures visant à aider nos aînés à raffermir leur identité. Nous avons conçu une brochure et des affiches du conseil des anciens, pour qu'il soit visible dans nos collectivités. Nous avons trouvé des exemples pour illustrer la façon dont les centres d'amitié font appel aux aînés dans des conseils consultatifs et pour occuper des postes dans le conseil d'administration. Nous avons également été en mesure de commencer à établir des liens entre nos aînés et nos jeunes, et nous constatons que ce modèle est particulièrement fructueux — soit le soutien intergénérationnel.

Les jeunes et les aînés ont décidé de concevoir un atelier pour la conférence des jeunes en mars, qui a rassemblé plus de 1 000 jeunes Autochtones. Le titre de l'atelier évoquait initialement le soutien aux conseils des anciens en Colombie- Britannique, et nos aînés l'ont changé pour préciser qu'il s'agissait du soutien des jeunes. On commence à voir clairement que le réseautage et le soutien intergénérationnels est un modèle qui fonctionnera dans nos collectivités; nous pourrons entreprendre rapidement la reconstruction de notre langue et de notre culture et intégrer les programmes et les services. Cela serait un modèle à suivre pour tous nos organismes autochtones.

M. Gallagher a mentionné la question de la sécurité alimentaire, et, à mon avis, cela est pertinent chez toutes nos collectivités autochtones. L'une des questions tient à la manière traditionnelle de recueillir des aliments, qui est en train de se perdre dans nos collectivités en milieu urbain. Nous voulons pouvoir assurer l'accessibilité des aliments traditionnels pour nos aînés. Certaines collectivités étaient en mesure d'aller à la pêche pour nourrir les familles. Cette année — et c'est la première fois que j'entends cela depuis longtemps —, il n'y avait pas assez de poissons pour nourrir la collectivité, et, par conséquent, nos aînés s'en sont privés.

Nous avons déjà entendu parler de disparité et du fait que les statistiques en matière de santé chez les Autochtones sont absolument disproportionnées. Il y a un écart colossal entre les taux d'espérance de vie.

Nos aînés veulent pouvoir cueillir et manger des aliments traditionnels. C'est un mode de vie, et il se perd; c'est pourquoi on doit le partager avec les jeunes. Il serait donc important d'obtenir des ressources supplémentaires pour encourager nos aînés à retourner dans leur collectivité ou à commencer à travailler avec nos jeunes sur la manière de réaliser cet objectif.

C'est vraiment un privilège d'avoir travaillé avec notre conseil des anciens, qui m'ont servi de conseillers et d'enseignants pendant ces dernières années. L'un de leurs adages est le suivant : « Partagez un repas, partagez votre savoir et partagez votre culture. »

La présidente : Merci beaucoup.

Monsieur Gallagher et madame Mercure, avant que je passe aux autres, j'aimerais aborder la question des conflits de compétence. Certes, nous en avons entendu parler largement lorsque nous sommes allés à Sagkeeng hier, mais nous l'avons aussi entendu à d'autres endroits.

J'aimerais connaître votre opinion, monsieur Gallagher, à l'égard de ce conseil tripartite, qui semble être une très bonne idée, et de sa capacité de contribuer à régler certains de ces problèmes. Prenez cet exemple très simple : si AINC impose un plafond de 3 p. 100 par année pour les augmentations du financement réservé aux soins de santé dans les réserves, alors que nous savons que les budgets de soins de santé dans les provinces sont souvent à la hausse, de 3,5 à 7 p. 100 par année, comment résoudrons-nous ce conflit de compétence?

Nous avons aussi entendu dire, par exemple, que, dans les réserves, on était censés offrir des soins de niveaux 1 à 3 aux patients qui ont des besoins chroniques, et la province devait se charger des soins de niveau 4, mais que la province ne s'occupe pas des soins de niveau 4. Pourriez-vous nous donner une idée de la façon dont votre modèle pourrait régler certains de ces conflits de compétence?

M. Gallagher : Depuis l'élaboration de notre plan tripartite de santé, beaucoup de choses sont arrivées, et le conflit de compétence est l'une de ces choses que nous devons tenter de surmonter. L'une des déclarations préliminaires du ministre de la Santé provincial consistait à préciser que les services de santé offerts par la province sont accessibles à tous les Britanno-Colombiens, sans égard à leur adresse. Cette déclaration est d'une importance cruciale.

Le système de santé est si vaste que nous devons surmonter d'énormes défis de communication entre le système fédéral et le système provincial. Les gens travaillent isolés les uns des autres depuis si longtemps. Ainsi, notre travail lié au plan tripartite de santé consiste en partie à mettre sur pied un comité de surveillance du plan tripartite, qui comprend des représentants officiels du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial et des dirigeants des Premières nations. Il se penche sur des questions avec une vue d'ensemble et il tente de trouver des façons d'abattre certains de ces obstacles à la communication.

Une partie de la réalité que vit un conseil de santé en Colombie-Britannique, c'est que nous commençons à entamer un dialogue avec tous les directeurs généraux de chaque autorité sanitaire de la province, et cinq d'entre elles servent des régions dans la province. Grâce à ce dialogue, nous invitons nos partenaires fédéraux à se joindre à la discussion, et nous commençons à aborder certains des aspects qui posent problème au chapitre des conflits de compétence. Nous devons avoir un programme clair qui établit les priorités, en fonction des problèmes régionaux, afin que nous puissions déterminer lesquelles ont besoin de notre aide en premier.

Parfois, il suffit d'informer les gens de ce qui doit se passer. Nous avons des exemples de ce phénomène en matière de soins à domicile et communautaires; des collectivités avaient besoin de soins à domicile et communautaires et ne pouvaient pas y accéder par l'entremise de l'autorité sanitaire régionale. Après une discussion avec les responsables de la santé autochtone de la région, les responsables de l'autorité sanitaire régionale ont reconnu qu'il s'agissait de leur responsabilité.

Parfois, c'est aussi simple que cela. À d'autres moments, ce n'est pas si facile. Nous nous efforçons réellement de créer un cadre qui permettra de cerner des problèmes précis liés aux conflits de compétence qui sont des priorités pour une région particulière de la province et de trouver des manières de s'y attaquer.

L'autre chose, c'est que notre processus de planification est maintenant une activité tripartite. Nous parlons du défi qui réside dans l'apprentissage du travail tripartite. C'est vraiment un défi, parce que les gouvernements, pour une raison ou une autre, parlent des langues différentes et refusent de reconnaître les capacités et les ressources de l'autre. En particulier, ils ne reconnaissent pas toujours les ressources des collectivités des Premières nations et leur capacité de jouer un rôle dans la prestation de services de santé. Voilà ce que nous faisons.

L'autre chose que nous abordons en Colombie-Britannique, c'est une nouvelle structure de gouvernance pour diriger les services de santé des Premières nations dans la province. Du moins, d'un point de vue fédéral, à mesure que nous avançons, cela fera basculer vers les Premières nations la responsabilité de la prestation de services, qui sont actuellement offerts dans les régions par la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits.

Je crois que cela entraîne aussi la nécessité de tenir une discussion avec le gouvernement provincial sur la façon dont nous collaborons pour accomplir des objectifs semblables. Nous devons faire en sorte que les ressources et les capacités en matière de services de santé puissent faire l'objet d'une discussion au sujet des besoins en santé des Autochtones des Premières nations sans que l'on doive se préoccuper de savoir si le fournisseur de services est provincial ou fédéral.

Le travail est actuellement à une première étape, et j'espère qu'il contribuera à éliminer les conflits de compétence et à répandre une compréhension collective du fait que nous tentons de régler les problèmes liés à la santé des Autochtones. Les deux gouvernements l'ont reconnu dans de petits secteurs où nous réussissons; c'est grâce au fait que nous nous entendons sur le problème que nous tentons de régler et ne l'abordons pas de notre perspective distincte. Ainsi, nous tentons de créer ce genre d'environnement commun pour collaborer, que nous appelons un travail tripartite.

Je soumets ces observations comme réponse initiale à vos commentaires.

La présidente : Je crois que vous avez dit que — et je ne veux pas déformer vos propos — la province avait reconnu que les Autochtones vivant en Colombie-Britannique, dans les réserves ou non, étaient en fait des citoyens britanno- colombiens.

M. Gallagher : C'est exact, oui.

La présidente : C'est en soi un changement énorme.

M. Gallagher : Oui, c'est vrai. Il faut que les choses se concrétisent. Nous pouvons faire en sorte que le premier ministre le déclare, mais chaque autorité sanitaire qui fournit un service doit le reconnaître et respecter cette déclaration. À partir de là, il s'agit aussi de fournir ce service de manière respectueuse de la culture.

La présidente : Peut-être que nous pourrions l'inviter à se prononcer dans le cadre d'une réunion des Premières nations à Ottawa; il lancerait ainsi le défi à tous les autres premiers ministres d'adopter la même attitude.

M. Gallagher : Je crois que ce serait une bonne idée.

Le sénateur Cordy : Vous avez parlé des soins dentaires, et je crois que vous avez dit que tout cela était bien beau théoriquement, et, n'étant pas Autochtone moi-même, je supposais que les soins dentaires étaient fournis à tout le monde. Mais vous nous avez raconté le cas de personnes qui se sont fait renvoyer, de personnes qui se sont fait dire : « Eh bien, puisque vous ne prenez pas soin de vos dents de toute manière, à quoi bon? » Est-ce une politique nationale? Comment prend-t-on ces décisions? Parce que je croyais que c'était quelque chose qui avait toujours été offert aux Premières nations.

M. Gallagher : C'est vraiment une conséquence de la politique nationale : les mesures de réduction des coûts font partie du programme public.

Le sénateur Cordy : J'imagine que le fait de ne pas offrir le service réduit les coûts, mais cela n'a aucun sens.

M. Gallagher : Ce genre de choses influe sur l'exécution du programme. En Colombie-Britannique, nous partons d'une situation dans laquelle nous sommes sous-financés dès la case départ comparativement à d'autres provinces, et nous tentons de discuter des solutions dans le cadre de notre Plan tripartite de santé.

Sous le régime d'une nouvelle structure de gouvernance, les Premières nations ne peuvent pas prendre en main quelque chose qui est déjà défectueux et sous-financé. Il faut commencer à neuf, et profiter d'un financement adéquat. Je vais vous donner un exemple du problème du financement national concernant la rémunération des dentistes. Au Canada, le montant payé est de 85 p. 100, je crois, de l'échelle des tarifs. Ainsi, on demande aux dentistes de la province de s'occuper de patients à un taux de 85 p. 100 de leur tarif, alors que leur calendrier de rendez-vous est déjà plein sans la clientèle des Premières nations.

Notre population compte beaucoup de personnes de passage qui sont toujours à la recherche d'un nouveau dentiste; elles arrivent dans la ville et elles tentent de trouver un dentiste. Les cabinets de dentiste sont déjà pleins d'une clientèle qui est prête à payer 100 p. 100 du tarif. Ainsi, notre peuple se voit refuser les services. Les Autochtones ne peuvent pas trouver de dentistes qui sont prêts à leur offrir le service selon le taux national.

L'autre facteur qui découle des initiatives nationales liées à la réduction des coûts, c'est que certaines procédures doivent faire l'objet d'une approbation à l'avance. Puisque nos collectivités sont éloignées, les gens doivent débourser de l'argent et prendre le temps de se rendre à un cabinet de dentiste. Lorsqu'ils arrivent, si on constate que la personne a besoin d'un traitement de canal, elle doit obtenir une approbation, et le dentiste ne lui offrira pas le service avant de l'obtenir; d'ailleurs, il ne percevra que 85 p. 100 du tarif. Ainsi, la personne qui s'est déplacée depuis sa collectivité doit retourner chez elle et revenir plus tard.

La raison pour laquelle le dentiste n'exécute pas immédiatement la procédure tient au fait que, parfois, lorsque la demande d'approbation est traitée, elle finit par être rejetée. Le dentiste qui a déjà offert le service se voit alors contraint d'absorber le coût ou de tenter d'obtenir le paiement du patient.

L'autre chose, c'est que les dentistes recourent maintenant à la surfacturation, ce qui signifie que s'ils obtiennent 85 p. 100 du tarif lorsqu'ils traitent des clients des Premières nations, ils facturent la différence de 15 p. 100 au client qui, parfois, n'est pas en moyen de payer.

Nos jeunes ont besoin de beaucoup de soins préventifs, et dans la conjoncture actuelle, ils ne les obtiennent pas. La relation entre le secteur des soins dentaires et les collectivités des Premières nations est déficiente.

Nous tentons d'organiser une réunion du conseil de santé avec l'association dentaire de Colombie-Britannique pour examiner ce programme et discuter de mesures qui en augmenteraient l'efficacité. Nous voulons mettre de l'avant des recommandations axées sur des choses très précises que nous souhaitons intégrer, si nous sommes capables de négocier la gouvernance de ces services au nom de toutes les Premières nations de la province.

Certaines choses avancent, mais la façon dont le programme est exécuté présente un défi de taille. Beaucoup d'Autochtones ne peuvent pas y accéder. Les soins dentaires sont un des points saillants lorsque nous parlons des services de santé avec les chefs. Ça et les coûts de transport, le transport des patients. Compte tenu de l'endroit où vivent ces personnes et des modalités d'accès au service, toutes ces choses sont couvertes à titre de services non assurés, mais cela ne fonctionne pas aussi bien qu'on le souhaiterait.

Le sénateur Cordy : Je dois dire, je trouve cela très frustrant. La séance d'hier et celle d'aujourd'hui m'ont ouvert les yeux, car je croyais en savoir très long sur ces questions. Mais hier, j'ai visité la collectivité autochtone au Manitoba et j'ai appris que les travailleurs de la santé dans la réserve étaient moins bien rémunérés que ceux qui travaillaient à l'extérieur, et qu'ils ont eu une seule hausse de salaire, de 3 p. 100, en dix ans.

M. Gallagher : Oui.

Le sénateur Cordy : Donc, leur travail est une œuvre altruiste. J'ai appris que les soins dentaires, que je croyais financés par le gouvernement fédéral, présentent d'énormes lacunes, et pour ceux qui en obtiennent, les dentistes sont rétribués à 85 p. 100 de leur tarif. Vous pouvez comprendre les dentistes qui ont déjà une pleine clientèle.

Somme toute, je trouve très frustrant de regarder toutes ces choses, puis d'entendre que nous en accomplissons beaucoup en santé pour les Autochtones, ce qui n'est rien de moins qu'un mensonge.

J'aimerais aussi parler des problèmes de santé mentale et de maladies mentales. Vous avez tous les deux fait allusion aux pensionnats indiens, et je sais que vous avez déclaré que les excuses permettront d'accomplir des résultats considérables, tout comme la Commission de vérité et de réconciliation. Nous avons vraiment porté un dur coup à la culture des Autochtones pour la génération passée, mais aussi pour leurs enfants, qui n'ont pas pu obtenir ce qu'on a enlevé à leurs parents. Comment compose-t-on avec cette situation chez les peuples autochtones?

M. Gallagher : Les excuses auxquelles Lisa a fait allusion, le rassemblement des gens et bon nombre de choses prévues le 11 juin sont conçus pour accomplir cela en partie. Nous espérons que ce sera une bonne chose et que les excuses seront sincères et bien accueillies. Nous craignons que le message ne soit pas bien interprété.

Je déteste adopter un point de vue cynique à cet égard, mais, comme on l'a dit en parlant d'autres questions, le gouvernement n'a pas été très réceptif. Nous regardons d'où nous venons ici en Colombie-Britannique, depuis que notre conseil de leadership a signé l'Accord de transformation pour le changement en novembre 2005 avec le premier ministre Martin. Ensuite, quelques mois plus tard, le nouveau gouvernement a pris le pouvoir. Le premier ministre ne voulait pas entendre parler de l'accord, et il a répudié cette entente. L'entente liait entre elles toutes ces choses : la santé, l'éducation, le logement et l'infrastructure, le développement économique et la conciliation des droits et titres. Ainsi, cette répudiation compromettait la notion d'honneur de la Couronne, et remettait en question son existence même.

Du point de vue des Premières nations, nous sommes préoccupés. Si nous rassemblons notre peuple, espérons que ce sera une bonne journée. Sinon, la question est la suivante : comment réagissons-nous au mauvais accueil de l'annonce?

Lorsque j'écoutais Lisa, j'ai vraiment apprécié le début de son exposé, ce qu'elle a dit au sujet des gens qui ont fréquenté un pensionnat indien et du fait de reprendre contact avec ses racines, en s'exprimant dans sa langue.

Cela m'intéresse, car je suis membre d'une Première nation ici en Colombie-Britannique. Je suis un Salish du littoral. Je viens de la collectivité Sliammon. Elle est située à 100 milles au nord d'ici. Mon père a fréquenté un pensionnat indien, et il s'est fait battre pour s'être exprimé dans sa langue; alors, il ne m'a pas enseigné cette langue. Je suis un exemple de la génération manquante. Après des années de travail dans ma collectivité, mes aînés ont cru bon de me donner un nom sliammon. Je l'utilise avec beaucoup de circonspection. Lorsque je me suis présenté devant le comité, mon intuition m'a dit de ne pas l'utiliser ici. Lorsque je m'adresse à mes semblables, je suis plus enclin à l'utiliser. Ce n'est qu'une question de confiance personnelle à cet égard, en fonction de l'expérience de mon père, et de ce qu'il m'a appris à ce sujet, que ce n'était pas une chose positive pendant longtemps. La situation change petit à petit dans ma collectivité.

Le discours de Lisa au sujet de la raison pour laquelle elle le fait et pour laquelle elle l'utilise était très édifiant, et j'ai beaucoup de respect pour cela et j'apprécie sa reconnaissance du territoire des Salish du littoral.

Les situations qui découlent des pensionnats indiens ont un tel impact, que nous devons être en mesure de les comprendre du point de vue de chaque localité : nous ne pouvons pas tenir des discussions générales et englobantes. J'ai des amis chez moi qui ont quelques années de plus que moi, même certains qui sont plus jeunes que moi, qui ont fréquenté un pensionnat indien. Je les écoute parler de la façon dont ils composent avec diverses choses dans leur vie. Pour ma part, mon père y est allé, et ma mère y est allée, mais pas moi. J'ai fréquenté une école publique à Powell River; par conséquent, nos expériences sont différentes.

Il s'agit de comprendre ce que vivent ces gens et de comprendre comment cela a affecté ma famille et ma vie et ce que je transmets à mon fils. Ainsi, c'est intéressant en quelque sorte de voir comment nous trouvons des solutions. Au chapitre de la santé mentale et du bien-être, la solution consiste en grande partie à changer de cap. Beaucoup de nos semblables nous disent, lorsque nous parlons de problèmes de santé mentale, que nous devons aborder les choses d'un point de vue de bien-être et faire fond sur les forces que nous avons, plutôt que d'aborder les choses du point de vue de la maladie, car nous tentons de surmonter les modalités de traitement de la maladie, et cela ne fonctionne pas pour nous.

La promotion, la prévention et le renforcement de la résilience chez nos jeunes supposent l'intégration de la culture et de la langue et des choses qui sont importantes et essentielles à l'identité de notre peuple. Cela comprend notre lien avec la terre, les ressources et les territoires. Un élément important de cette démarche, c'est que nous tentons de changer de cap et de revenir à ces choses qui ont une valeur pour notre peuple et de retrouver notre identité. Encore une fois, en Colombie-Britannique, qui compte 203 bandes indiennes, nous avons beaucoup de nations qui sont très différentes les unes des autres, mais qui partagent beaucoup de points en commun au chapitre de leurs perspectives spirituelles, par exemple.

Mme Mercure : Vous parliez des excuses liées aux pensionnats indiens et de la santé mentale. L'un des aspects qui contribueront beaucoup à nos collectivités autochtones, c'est le fait qu'elles réussiront à former une seule nation le 11 juin, et qu'elles pourront aider nos aînés et tous ceux qui ont été affectés par les pensionnats indiens, soit chaque Autochtone.

L'effet intergénérationnel influe sur nous à différents niveaux concernant la perte du savoir culturel. La plupart des collectivités ont comme principe directeur que chaque personne a une contribution à faire à la collectivité et un rôle à y jouer; qu'il s'agisse d'un gardien de la langue ou d'un gardien du feu dans la longue maison, tout le monde a un rôle dans notre collectivité. Je crois que certains aînés ne comprennent pas ce que signifie leur rôle et sont perdus depuis très longtemps.

Pour réussir à soutenir ceux qui n'ont pas fait partie de leur collectivité culturelle et soutenir les aînés qui veulent voir quelque chose d'adapté à la culture dans leur organisme autochtone, dans la réserve ou non, toutes nos collectivités doivent former une nation.

Nous entamons une époque de guérison pour toutes nos collectivités, à mon avis.

Le sénateur Cordy : Ma dernière question se rattache aussi à cela, et vous avez mentionné le fait que vous avez tant perdu sur les plans culturel et historique. Je me demande si, dans le cadre des conférences des aînés et au sein du conseil des anciens, on a tendance à tenir des archives historiques et culturelles ou a-t-on entrepris du travail à cet égard? Car les gens n'ont pas accès à beaucoup de choses, que ce soit dans la collectivité autochtone ou à l'extérieur, et beaucoup d'histoires ont été transmises oralement, et ne sont pas inscrites dans les livres.

Mme Mercure : À mon avis, c'est la raison pour laquelle il faudrait instaurer plus de programmes axés sur les aînés et la culture et je crois que cela entraînerait naturellement l'enregistrement de leurs histoires.

Actuellement, nous en sommes à un point où nous devons apprendre correctement nos langues, surtout en Colombie-Britannique. Un tiers de toutes les langues autochtones au Canada tirent leur origine de la Colombie- Britannique, car c'était une plaque tournante il y a des milliers d'années. C'est pourquoi il est important que nous ayons des programmes linguistiques et culturels élaborés par des Autochtones pour des Autochtones, qui s'adressent à tous les groupes autochtones. Nous avons besoin de ça immédiatement.

Nos collectivités éprouvent un sentiment urgent selon lequel nos langues sont en péril. Partant, notre culture est en péril. Il faut tenter de transmettre cette sensibilisation au grand public pour qu'il soutienne les organismes non gouvernementaux et les autres collectivités afin de comprendre où nous en sommes aujourd'hui.

Il y a eu certaines initiatives, exécutées par l'entremise de la fondation culturelle, qui avaient pour but de commencer à recueillir et à enregistrer les langues parlées. Il existe un programme en ligne financé par le First Citizens Fund, mais ce n'est pas assez. Il faut établir un ordre de priorité des projets. Comment faire de la langue d'une collectivité la priorité au détriment d'une autre?

M. Gallagher : Je tiens seulement à faire un commentaire. L'un des aspects importants de notre langue, c'est notre lien avec la terre. J'ai eu l'occasion de travailler dans ma propre collectivité à la négociation d'un traité. L'une des choses que nous avons constatées, c'est que lorsque vous commencez à parler de votre territoire et du lien des personnes avec la terre et que vous explorez cette histoire, vous obtenez des noms de famille, nos noms traditionnels, et leur lien avec les différentes localités dans les territoires et les réalisations passées.

Donc cette réminiscence et le renforcement de notre relation avec notre langue ont réellement noué des liens avec tout ce domaine, c'est-à-dire notre rapport avec nos territoires. Cela s'imprègne dans le tissu social du peuple. Quelles familles ont vécu à quels endroits des territoires, quel était leur mode de vie et les ressources qu'elles contrôlaient, géraient et partageaient? On parle de tout cela dans notre langue. Nos lois et nos enseignements proviennent de là. C'est un exercice très enrichissant qui dépend largement de nos aînés, car ce sont eux qui détiennent la plus grande part de ces connaissances.

Je me souviens de nos activités d'enregistrement des histoires des aînés; en ce qui concerne l'histoire de ma collectivité, nous travaillons vraiment à récupérer, raviver, renouveler et redécouvrir beaucoup de choses et redéfinir l'identité des Premières nations sliammon. C'était donc assez passionnant de pouvoir faire tout ça.

Ce que nous avons trouvé encore plus précieux, c'est que nous avons constaté que nous pouvions recueillir beaucoup d'informations de gens qui ne sont plus avec nous, et il faut réussir à en faire plus de ce côté. Nous organisions des activités axées sur les aînés et nous les amenions sur les terres, à des endroits où ils n'étaient pas allés depuis longtemps. C'était merveilleux de faire jaillir les souvenirs de leur esprit.

Nous devons pouvoir appuyer plus d'événements semblables. On devrait les reconnaître pour ce qu'ils sont, sans devoir les inscrire dans quelque chose d'autre. On devrait être en mesure de le faire, parce que c'est la bonne chose à faire.

Le sénateur Mercer : Merci beaucoup à tous les deux de votre présence. J'apprends continuellement pendant mon voyage. Peut-être que la sincérité des excuses serait accrue si le premier ministre pouvait se soumettre à l'Accord de Kelowna et le reconnaître, mais je ne crois pas que nous verrons cela, malheureusement. Peut-être que mon commentaire était trop politique, mais ça va. Je suis parmi des amis.

J'aimerais parler du diabète pendant un instant. Avez-vous une idée du pourcentage d'Autochtones en Colombie- Britannique qui souffrent du diabète? Ensuite, en ce qui concerne les centres d'amitié, dans les 24 collectivités où un centre d'amitié est établi, offrez-vous des services qui sont directement liés à l'éducation sur le diabète et à la formation visant à aider les gens à gérer leur diabète?

M. Gallagher : La première question concernait le nombre de gens qui souffrent du diabète. L'information qui nous sert ici est tirée du rapport de l'administrateur en chef de la santé publique sur la santé des Autochtones, et un nouveau rapport paraîtra bientôt, je crois, dans les prochains mois. Les statistiques avec lesquelles nous travaillons ici ne sont pas toujours les meilleures, parce que beaucoup de gens ne sont pas comptabilisés. Il y a de nombreuses inexactitudes. On reconnaît que ces données ne sont pas solides. Ainsi, une des choses que nous devons faire dans le cadre de notre plan tripartite est de tenter de prendre en main les données liées à la santé, en plus d'autres données liées aux déterminants sociaux de la santé.

La meilleure façon d'y arriver, c'est de laisser les Premières nations se charger de la tenue et de la génération de ces données. Maintenant, les données sont tirées du gouvernement fédéral et provincial. Je crois que, selon le chiffre qui a été établi, et Michelle me regarde et pourra peut-être le préciser, notre taux de diabète est supérieur de 40 p. 100 à celui de la population non autochtone. C'est le genre de données statistiques que j'ai entendues.

La présidente : Cela équivaut à environ 55 ou 60 p. 100 de la population adulte.

Le sénateur Mercer : Incroyable.

Mme Mercure : Vous avez parlé des centres d'amitié et des programmes qu'ils offrent dans les centres des collectivités locales. Nous ne sommes pas un fournisseur de services locaux, mais les 24 centres communautaires le sont. Dans le cadre des programmes de santé, il existe 94 types de programmes, ce qui équivaut à 18,9 p. 100 de nos programmes.

Ils couvrent beaucoup de terrain, y compris le diabète. Par exemple, la clinique de santé des Autochtones au Tillicum Lelum Health Centre à Nanaimo offre des programmes communautaires qui permettent aux gens d'obtenir des consultations au sujet de choses comme le pied diabétique et de parler à des nutritionnistes et de travailler dans le cadre du nouveau programme intitulé « Honour your health challenge ». Ce n'est pas un nouveau programme, mais les gens se servent de ses ressources pour sensibiliser nos collectivités à la vie saine et à la saine alimentation.

Le sénateur Mercer : Monsieur Gallagher, vous avez mentionné les 203 Premières nations en Colombie-Britannique. Ce chiffre est élevé, et, évidemment, ce n'est pas toutes les collectivités qui obtiennent des soins de santé de qualité. Elles ne disposent pas toutes d'un médecin. Existe-t-il beaucoup d'infirmiers praticiens qui comblent les lacunes, et a-t- on recours à Télésanté pour aider à offrir certains soins de santé?

M. Gallagher : L'un des plus graves problèmes qui accablent la Colombie-Britannique est une pénurie de personnel infirmier. Dans la région sanitaire du Nord, vendredi dernier seulement, on disait qu'un infirmier restait en moyenne en poste dans le Nord pendant six mois, mais on doit débourser tout un salaire annuel chaque fois que l'on tente d'intégrer un nouvel infirmier au système. C'est donc une immense difficulté pour nous ici, encore pire que l'inaccessibilité des médecins.

L'un des points prioritaires du plan tripartite de santé sur lesquels on travaille consiste à créer et à mettre en œuvre un réseau clinique Télésanté complètement intégré pour les Premières nations en Colombie-Britannique. C'est un point prioritaire assez imposant qui présente d'immenses défis, car la connectivité est un grave problème dans la province. Par exemple, il y a dans la province plus de collectivités qui n'ont pas de connectivité que dans d'autres provinces. Nous avons des défis de taille à relever dans tout ce secteur au chapitre de la connectivité.

Avec Télésanté, à un certain point, il faudra établir une connectivité de calibre industriel pour faire tout ce qu'on aimerait grâce à ce genre de technologie. Ainsi, nous avons devant nous un immense défi.

Le gouvernement provincial a insisté sur son engagement lié à la connectivité en Colombie-Britannique. Le gouvernement fédéral traîne de la patte, mais il fait des efforts pour fournir sa part de financement. Santé Canada a libéré des fonds pour appuyer le volet fédéral, en vertu du plan de santé. Nous attendons que d'autres organismes fédéraux, comme Affaires indiennes et du Nord Canada, fournissent leur part.

Ainsi, nous parlons de ce genre de choses, et nous sommes en train de mettre sur pied un centre d'excellence en santé pour contribuer à notre évolution dans ce secteur pour que nous puissions être efficaces. Une quantité de travail loin d'être négligeable est accomplie, afin que les collectivités aient une option pour fournir des soins de santé.

Le sénateur Mercer : Au centre que nous avons visité hier au Manitoba, l'une des choses qui m'ont impressionné, c'est le fait que tous les infirmiers là-bas n'étaient pas nécessairement de la collectivité, mais ils étaient tous autochtones. Y a-t-il un programme en Colombie-Britannique pour aider à inciter les jeunes autochtones à songer à entreprendre une carrière d'infirmier, puisque le besoin est si criant dans la collectivité?

M. Gallagher : Il y a beaucoup d'initiatives entreprises à cet égard. Un des indicateurs dans notre plan de santé est axé sur les ressources humaines dans le secteur de la santé et le nombre de fournisseurs de services de santé autochtones dans le système. Il y a différentes initiatives. Le gouvernement fédéral, par exemple, a mis sur pied une initiative de ressources humaines dans le secteur de la santé autochtone dans le cadre de laquelle collabore notre conseil de santé pour inviter les établissements postsecondaires à élaborer de meilleurs programmes qui seraient accessibles aux membres des Premières nations et aux Autochtones qui souhaiteraient entreprendre une carrière en santé. Les soins infirmiers sont un des domaines ciblés.

Il y a d'autres initiatives mises de l'avant par différents organismes en santé des Premières nations, par exemple, pour attirer davantage d'infirmiers, et on établit de nouveaux programmes dans ces secteurs. Il y a encore place à l'amélioration. C'est l'un des points prioritaires de notre stratégie décennale en matière de ressources humaines en santé. Nous devons intégrer non seulement les soins infirmiers, mais aussi d'autres professions de la santé dans la stratégie.

La présidente : J'aimerais vous remercier chaudement tous les deux de vos exposés. Ils étaient excellents, et, monsieur Gallagher, je dois dire que je serais extrêmement honorée si vous nous permettiez d'utiliser votre nom autochtone pour notre publication.

M. Gallagher : D'accord.

La présidente : Il faudrait nous le donner.

M. Gallagher : C'est Kwunahmen.

La présidente : Avez-vous aussi un nom, madame Mercure?

Mme Mercure : Non. En décembre, nous tenons un événement de réunification des familles. Donc en décembre, j'ai été reliée à des personnes. Je connaissais seulement ma famille nucléaire. Or, j'ai récemment appris que j'avais des cousins, que j'avais un oncle, et dans l'une de ces familles, il y a 11 enfants et 17 cousins, donc je suis très heureuse de dire que le processus est entrepris.

La présidente : C'est merveilleux. Je suis heureuse que vous ayez découvert votre famille, madame Mercure. C'est très important, et je vais juste vous raconter une histoire très amusante. Lorsque mon époux m'a demandée en mariage, il a proposé de tenir une très petite cérémonie familiale. Je lui ai dit que je ne pouvais pas avoir un petit mariage familial. « Ah, non? », a-t-il répondu. Je lui ai expliqué que j'avais 150 cousins germains. Il a répliqué : « Personne n'a 150 cousins germains », et moi de répondre : « Eh bien, si votre mère est née dans une famille de 18 enfants, et que votre père est né dans une famille de dix enfants, vous avez 150 cousins germains. » Alors je suis ravie que vous soyez en train de découvrir vos cousins.

Mesdames et messieurs, je pourrais inviter Gregg Schiller, Bonnie O'Sullivan, Joanne Tayler et Steve Ellis à se joindre à nous. La façon de procéder, c'est que chaque personne pourra parler pendant cinq minutes. Il n'y aura pas de questions du comité, faute de temps.

Je crois savoir, monsieur Schiller, que vous représentez le Seniors Advocacy Network de la Colombie-Britannique; veuillez commencer, je vous en prie.

Gregg Schiller coordonnateur, BC Seniors Advocacy Network, à titre personnel : Merci.

Merci de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui. Je travaille ici comme coordonnateur du Seniors Advocacy Network de la Colombie-Britannique. C'est un réseau extraordinaire qui compte plus de 87 bénévoles, tous des aînés originaires de partout en Colombie-Britannique. Ils offrent des services de représentation à des aînés qui sont en butte à des problèmes critiques et complexes. Nos aînés bénévoles ont été triés et ont reçu une formation intensive pour connaître les différentes lois qui touchent les aînés ainsi que leur admissibilité et leurs droits.

La majorité des appels téléphoniques reçus par le Seniors Advocacy Network de la Colombie-Britannique se rattache à des problèmes de mauvais traitements et de négligence envers les aînés qui vivent dans des établissements de soins pour bénéficiaires internes. Certains des problèmes à ce chapitre touchent l'intimidation par le personnel et les gestionnaires d'établissement et les conséquences qu'ils imposent aux membres de la famille qui communiquent leurs préoccupations à l'égard d'un être cher résidant dans l'établissement. Des membres de la famille se sont fait menacer de perdre leur droit de visite s'ils font connaître leurs préoccupations. La garantie de l'accès aux membres de la famille est un droit fondamental qui doit être protégé, pour éviter l'isolement des aînés. La malnutrition survient lorsque les exploitants d'établissements de soins tentent d'économiser de l'argent sur le dos des aînés, en leur servant des sandwichs de l'épaisseur d'une lame de rasoir ou en offrant des plats de viande à des clients végétariens et en ne respectant pas leurs choix.

Voilà certaines des histoires sur lesquelles on a attiré notre attention à de nombreuses reprises, et nous sommes intervenus pour résoudre les problèmes en vue d'assurer le bien-être des aînés bénéficiaires.

Encore une fois, le droit de manger des repas sains et nutritifs est un droit fondamental que tous les Canadiens méritent, peu importe où ils vivent ou à quel point ils sont conscients de leur environnement.

La négligence des aînés dans les établissements de soins comprend des choses comme l'omission de changer ou de laver les aînés qui sont parfois incontinents ou de veiller à ce qu'ils soient bien assis lorsqu'ils ont une sonde d'alimentation.

D'autres situations du même type surviennent lorsque les membres du personnel sont beaucoup moins nombreux que nécessaire. La pénurie de personnel est un problème chronique dans tous les établissements de soins pour bénéficiaires internes.

La violence psychologique et physique survient aussi lorsqu'il y a une pénurie de personnel pour offrir le soutien individuel dont ont besoin les aînés ou lorsque le personnel est épuisé, ou qu'il y a un stress chez les employés. Encore une fois, une meilleure formation et un plus grand nombre d'employés peuvent contribuer à résoudre ce problème.

D'autres problèmes auxquels s'est attaqué le Seniors Advocacy Network de la Colombie-Britannique comprennent le logement abordable et convenable pour les aînés, surtout dans notre ville de Vancouver, qui sera le théâtre des Jeux olympiques, ce qui fait augmenter les prix des logements, qui atteignent des prix exorbitants hors de la portée de la plupart des citoyens ordinaires.

Nous recevons aussi des appels téléphoniques d'aînés qui vivent sous le seuil de la pauvreté. Nous sommes témoins d'un nombre grandissant d'aînés qui vivent dans la rue et qui quêtent de l'argent, à côté des jeunes. Ce n'est pas sécuritaire pour les aînés, ni respectueux à leur égard que de les forcer à être dans cette situation de vie.

Une autre question d'importance pour les aînés consiste à disposer du choix de vieillir chez soi et de profiter d'un soutien à domicile. Malheureusement, cette solution n'est pas toujours disponible à cause du manque de financement et de programmes qui permettraient à cette option de prendre de l'envergure.

Heureusement, notre Seniors Advocacy Network a pu être disponible pour ces aînés qui nous téléphonent et qui connaissent nos services, de sorte que nous pouvons leur offrir le soutien dont ils ont besoin et qu'ils méritent. Sans notre aide, bien des aînés seraient en train de dépérir dans des établissements de soins pour bénéficiaires internes ou ne toucheraient pas leurs allocations et leurs prestations. Nous les aidons à déposer une demande et à obtenir cette aide financière.

Nous espérons que le Seniors Advocacy Network pourra servir de modèle au reste du Canada, qui pourra s'en inspirer pour créer un réseau national d'aînés formés et dévoués pouvant offrir des services de représentation adéquats à d'autres aînés. Si le fédéral et d'autres ordres de gouvernement s'engageaient à offrir un financement à long terme et un soutien à l'égard de notre organisme, en plus de créer un réseau national, seraient grandement appréciés, puisque nous passons d'une subvention à une autre, toujours à court terme. Un engagement à long terme pour financer nos services de représentation bénévoles serait très profitable à tous les aînés.

J'espère que le Comité sénatorial peut recommander l'octroi de soutien financier aux bénévoles qui offrent des services de représentation aux aînés et, en particulier, à notre réseau ici et, plus tard, pour nous aider à construire un vrai réseau national de représentants d'aînés d'un océan à l'autre, puisqu'un nombre grandissant d'aînés éprouvent progressivement l'une ou l'autre des problèmes dont je vous ai fait part aujourd'hui.

J'ai hâte de lire votre rapport final et je suis disposé à répondre à des questions si vous en avez. Merci de votre temps, et je vous souhaite bonne chance lorsque vous ferez la promotion de vos excellentes recommandations visant le mieux-être des aînés partout dans notre merveilleux pays. Merci.

La présidente : Merci. Nous apprécions le travail que vous faites.

Madame O'Sullivan?

Bonnie O'Sullivan, Coordonnatrice des activités sociales, 411 Seniors Centre Society, à titre personnel : Merci de m'inviter à parler ici aujourd'hui. Je m'appelle Bonnie O'Sullivan. Je suis la coordonnatrice des activités sociales ici, au 411 Seniors Centre.

Aujourd'hui, j'aimerais aborder les questions qui concernent les aînés lesbiennes, gais, transgenres, transsexuels, homosexuels et bisexuels. Ici, au 411 Seniors Centre, nous nous axons tout particulièrement sur l'inclusion et, par conséquent, nous avons un comité LGTB qui surveille différents programmes et activités réservés aux aînés LGTB.

Les aînés LGTB sont une minorité invisible dans la société d'aujourd'hui et souffrent moins souvent d'isolation et de discrimination, au sein de la communauté LGTB et dans l'ensemble de la collectivité.

Lorsque nous parlons à des aînés LGTB, il est important de garder à l'esprit que, bien que notre société ait changé considérablement dans l'ensemble au chapitre des lois et des droits chez les personnes LGTB et est devenue plus inclusive, le groupe des aînés LGTB a subi une oppression considérable et a été mis en marge de la société. Par conséquent, comme groupe, ils sont beaucoup plus susceptibles de souffrir d'isolation extrême et il est beaucoup moins probable qu'ils demandent un soutien et de l'aide lorsqu'ils en ont besoin. Leurs expériences antérieures ont souvent créé chez eux un instinct de méfiance et une compréhension tangible et bien enracinée de l'oppression.

Les aînés LGTB font face à des difficultés dans la collectivité générale et dans l'ensemble de la communauté LGTB. De plus, les aînés LGTB ont des types de besoins et de problèmes précis, qui devraient être réglés de façon distincte des besoins et des problèmes de la communauté LGTB en général. Ainsi, il est très important de fournir des services précis et directs aux aînés LGTB.

Au sein de la communauté LGTB, les événements ont tendance à cibler les générations plus jeunes, et quoique je croie que la communauté est disposée à accueillir les aînés LGTB, il est parfois difficile de nouer des liens entre les deux groupes.

Actuellement, à Vancouver, il y a une diversité de programmes et initiatives sans but lucratif émanant du gouvernement qui offrent des événements à l'intention des aînés LGTB. La communauté en place est très forte et bien disposée à participer activement à des exercices et à une formation axée sur le renforcement communautaire.

Je crois que le système de soutien actuel réservé aux aînés LGTB comporte deux grandes lacunes. Premièrement, il faut accéder aux aînés LGTB qui ignorent les services qui leur sont accessibles ou qui hésitent à s'adresser à leurs pairs. Je crois qu'il est d'importance primordiale d'informer les aînés LGTB des services qui leur sont offerts. Il y a un besoin de rejoindre les aînés LGTB et de créer des environnements sûrs, inclusifs et accueillants où ils se sentent assez à l'aise pour participer et partager leurs expériences. De plus, il y a un besoin pressant de tendre la main à des aînés LGTB qui ne sont pas en mesure de participer aux programmes et aux activités actuels, soit parce qu'ils sont confinés chez eux, soit parce que leur expérience de discrimination crée un obstacle à l'accès aux services actuels.

La deuxième lacune tient à l'enregistrement et à la compréhension de l'histoire de la communauté LGTB. Les aînés LGTB ont tracé la voie dans le cadre de la lutte pour les droits de la personne dans notre pays, et leurs expériences et leurs histoires ont une valeur intrinsèque. Je crois qu'il est très important de documenter et d'archiver ces histoires et les vies qui ont révolutionné les droits de la personne au Canada.

Je crois que notre pays a exercé une discrimination systémique à l'endroit des personnes LGTB. Je crois aussi que nous avons certainement de quoi être fiers lorsque nous pensons aux pas de géant qui ont été faits pour instaurer l'égalité des droits chez les personnes LGTB. Je crois que c'est quelque chose dont les Canadiens devraient être fiers et qui devrait être documente, pour que nous puissions le communiquer aux générations à venir.

J'espère que le comité sénatorial peut recommander un soutien financier pour les initiatives réservées aux aînés LGTB, surtout les projets qui sont axés sur la représentation, la sensibilisation, l'éducation, la conservation des données historiques et le pont entre les générations de la communauté LGTB. Je crois que cela va dans l'intérêt des aînés LGTB et de l'ensemble du pays, pour que l'on comprenne d'où nous venons et les changements monumentaux qui sont survenus au chapitre des droits des LGTB dans le pays.

J'ai hâte de lire votre rapport final. Merci de votre temps, et je suis heureuse que votre comité m'ait donné l'occasion de parler ici et qu'il ait créé cette tribune visant à discuter de questions qui sont si pertinentes et importantes pour le pays.

La présidente : Merci de nous avoir rappelé que nous avons fait de grands pas, mais qu'il reste encore du travail à faire.

Nous entendrons maintenant Joanne Taylor. Elle représente le Nidus Personal Planning Resource Centre and Registry.

Joanne Taylor, directrice générale, Nidus Personal Planning Resource Centre and Registry, à titre personnel : Oui. Nous aimons les grands noms. Nous voulons être précis.

Merci, honorables sénateurs, de m'offrir cette occasion. Je suis directrice administrative du Nidus Personal Planning Resource Centre and Registry, anciennement connu sous le nom de Representation Agreement Resource Centre and Nidus Registry, donc notre histoire est longue.

J'aimerais tout d'abord vous transmettre les salutations de notre présidente, qui se serait empressée de venir ici si elle avait pu. Elle s'appelle Patricia Fulton, certains d'entre vous la connaissent peut-être; c'est l'épouse de feu Davie Fulton. Pat milite fort pour les questions relatives aux aînés et elle a fait profiter notre organisme d'un leadership merveilleux.

Dans le cadre de la planification personnelle, on trouve de nombreux outils juridiques, mais le concept tient à la planification, idéalement en prévision d'une maladie ou d'un accident grave, pour que la personne puisse continuer à gérer ses affaires ou à prendre des décisions. Vous entendrez différents termes comme la planification des soins avancés ou la planification en cas d'incapacité. Nous nous servons du terme « planification personnelle » comme d'un terme général.

Notre organisme, un organisme caritatif sans but lucratif, est né d'un travail de réforme du droit au niveau local et du VCC. Bien des membres de cet organisme, que vous avez entendus précédemment, faisaient partie de cette réforme du droit, et les gens ont pris en main différents secteurs qu'ils ont élaborés et sur lesquels ils ont axé leurs efforts. Je crois que nous sommes la seule ressource communautaire au Canada pour le public qui est dévouée à la planification personnelle.

Nous aidons les gens à connaître quelles possibilités se présentent à eux pour planifier et quels outils juridiques ils peuvent utiliser, pas seulement sur le plan technique, mais aussi en pratique. Comment exercez-vous votre autorité? En fait, vous êtes le représentant de quelqu'un d'autre. Nous travaillons en étroite collaboration avec beaucoup des organisations établies ici au 411 pour nous assurer que nous touchons la collectivité générale et que nous transmettons ces renseignements à tout le monde.

J'ai pris connaissance du rapport sénatorial sur la qualité des soins de fin de vie et du rapport de suivi du sénateur Carstairs en 2005. On n'est toujours pas rendu là, et je le répète maintenant en 2008. Je sais que le rapport mettait en lumière la planification des soins avancés, mais j'aimerais juste ajouter quelques idées à ce sujet.

D'une part, notre expérience nous a révélé que tout n'était pas une question de fin de vie et que, en fait, nous ne voulons pas attendre cette étape pour entreprendre cette activité importante. Le ministre de la Santé en Colombie- Britannique révèle que 90 p. 100 des Britanno-Colombiens meurent d'une maladie ou d'une affection chronique. Ces personnes doivent prendre beaucoup de décisions pendant ce cheminement, et elles ont peut-être besoin d'aide. Nous voulons que les personnes nous fassent part de leur volonté et de leurs préférences. Ainsi, si quelqu'un doit agir en leur nom, il lui sera possible de le faire en pleine connaissance de cause.

Nous avons quelque chose de très spécial qu'on appelle entente de représentation. Nous croyons que les autres provinces aimeraient peut-être connaître et adopter notre outil. Nous avons aussi des procurations perpétuelles, et ce sont des outils que les personnes peuvent utiliser pour permettre à quelqu'un d'agir en leur nom, mais il faut encore accomplir du travail à cet égard.

D'autre part, je voulais souligner que je crois qu'il y a une tension, peut-être, ou place à discussion, au sujet de l'opinion des médecins sur l'intérêt d'un traitement ou d'une réanimation en fonction des valeurs et de l'autodétermination du patient et la façon d'aborder le sujet. À mon avis, nous disposons d'une bonne quantité de renseignements de diverses personnes à ce sujet que nous aimerions partager et nous tenons à favoriser cette discussion.

Ensuite, je crois que les témoins précédents en ont parlé, il y a la situation des gens qui n'ont personne pour agir en leur nom, et c'est un problème pour les aînés. À mon avis, peut-être dans une mesure que nous n'avons jamais même imaginée. J'espère que ce secteur, car je crois qu'il augmente compte tenu de la population, ne deviendra pas une industrie, car je crois qu'il est important que la collectivité participe. En particulier, pour les gens qui n'ont personne; voilà le travail de développement communautaire que nous devons accomplir.

Nous menons un projet en partenariat avec le Seniors Advocacy Network de la Colombie-Britannique qui consiste à aller dans les collectivités, à parler de ces questions et à voir comment nous pouvons aider les gens à mettre sur pied un réseau personnel, pour réutiliser le terme, afin qu'ils aient quelqu'un qui peut les dépanner si elles ne peuvent plus parler elles-mêmes et respecter leur volonté.

Alors voilà quelques-unes des brèves questions que je voulais aborder, et j'apprécie vraiment l'occasion qui m'est offerte et j'ai hâte de continuer à lire votre rapport. Je vous remercie au nom de notre présidente, Patricia Fulton, et en mon nom propre.

La présidente : Merci beaucoup et, bien sûr, vous avez fait ressortir une question éthique très importante, soit les discussions qui se tiennent entre les médecins qui, d'une part, disent qu'ils ont fait le serment de ne pas faire de mal, et, d'autre part, les pressions des familles qui, bien sûr, veulent que chaque mesure médicale soit prise, même si cela ne semble pas nécessairement utile. C'est une discussion que nous n'avons même pas entamée dans le pays à ce jour, donc je vous remercie d'attirer notre attention sur ce sujet.

Le dernier, mais non le moindre, Steve Ellis, qui ne représente pas un organisme, mais se représente assurément lui- même. Bienvenue.

Steve Ellis, à titre personnel : Merci. Je vous suis reconnaissant de m'avoir donné l'occasion de parler de quelque chose qui, à mon avis, s'inscrit dans vos quatre principes. En fait, cinq, désolé. Je commence à vous faire penser aux Monty Python, n'est-ce pas? La dignité, l'autonomie, la participation, l'équité et la sécurité, ainsi qu'une pratique particulière que j'ai vue dans un hospice. Cela concerne l'administration de médicaments antipsychotiques à des gens qui n'en ont pas besoin, tout simplement pour les rendre amorphes et réduire la charge de travail dans l'établissement.

C'est une pratique répréhensible, à mon avis, et la plupart des gens ne savent même pas qu'elle a cours. Je n'en savais rien, jusqu'au jour où une très bonne amie à moi s'est essentiellement fait dérober sa personnalité pendant les derniers mois de sa vie qu'elle a passés dans un hospice.

En votre qualité de sénateurs, vous pouvez dénoncer ce problème et vous pouvez vous assurer que l'on ne commette plus ce genre de méchancetés envers d'autres personnes. Je milite contre une seule chose ici, et c'est l'utilisation de médicaments antipsychotiques pour essentiellement dérober aux gens leur personnalité et les réduire à l'état de légume cloué au lit. De toute évidence, cela est causé par les pressions financières qui incombent à de tels organismes, mais je ne crois pas que l'on puisse tolérer que les droits des gens soient bafoués de la sorte, et vous avez une voix pour vous assurer que cela ne se produit plus.

La présidente : J'aimerais vous remercier de cela et, bien sûr, vous avez mis le doigt sur un problème. Je suis révoltée d'apprendre que cela se produit dans un hospice. Je savais que l'on faisait ça dans les foyers de soins de longue durée. J'espérais que les hospices étaient différents, mais merci de nous avoir informés de cela.

Cela m'interpelle dans mon autre rôle, qui, bien sûr, est celui des soins palliatifs, et je peux vous assurer, monsieur Ellis, que je vais enquêter sur cette réalité au sein du réseau d'hospices canadiens.

M. Ellis : Vous pourrez probablement le reconnaître par les médicaments que l'on commence à administrer à ces personnes lorsqu'ils arrivent dans ces établissements, et si on leur donne un antipsychotique, comme de l'halopéridol ou quelque chose du genre, les effets ne se manifestent pas tout de suite. Ainsi, leur famille ne le remarque pas vraiment, peut-être, et c'est tout simplement une pratique révoltante. Puisque je n'étais pas membre de la famille, je n'avais pas le contrôle.

La présidente : Merci de votre témoignage, et je peux vous assurer que le comité ne pourra peut-être pas assurer de suivi à cet égard parce que cela s'inscrit en quelque sorte à l'extérieur de notre mandat, mais j'en assurerai personnellement le suivi.

La séance est levée.


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