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OLLO - Comité permanent

Langues officielles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Langues officielles

Fascicule 7 - Témoignages du 4 juin  2008 - Séance du matin


BATHURST, NOUVEAU-BRUNSWICK, le mercredi 4 juin 2008

Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui à 10 heures pour étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi.

Le sénateur Maria Chaput (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente: Je m'appelle Maria Chaput et je suis sénateur représentant le Manitoba. Je préside le Comité sénatrial des langues officielles. Le sénateur Andrée Champagne du Québec est la vice-présidente de ce comité.

[Traduction]

Nous avons avec nous le sénateur Lowell Murray, de l'Ontario.

[Français]

À ma gauche, madame le sénateur Losier-Cool, et le sénateur Eymard Corbin, tous les deux du Nouveau- Brunswick. Je vous remercie de votre présence.

Le Comité sénatorial des langues officielles étudie afin d'en faire rapport de façon ponctuelle l'application de la Loi sur les langues officielles, ainsi que des règlements et instructions qui en découlent.

Le comité a entrepris l'étude de la culture afin de mieux comprendre les enjeux des communautés francophones en situation minoritaire et leur engagement en faveur de l'affirmation de la diversité culturelle. Les arts et la culture font partie des principaux axes de développement des communautés francophones et acadienne à travers le pays. Bathurst est au coeur même de l'Acadie, et c'est pourquoi nous avons choisi de tenir nos audiences publiques ici. Nous nous rendrons également à Tracadie. Le comité a décidé de venir écouter ce que les Acadiens ont à dire sur la situation de la langue et de la culture propre à l'Acadie.

[Traduction]

Nous sommes ici aujourd'hui parce que nous voulons entendre le point de vue de divers groupes, associations et personnes des communautés francophone et acadienne. Nous voulons entendre votre témoignage, car cela aidera le comité à parvenir à une meilleure compréhension du statut de la culture francophone dans votre province.

Sur ce, je vais maintenant souhaiter la bienvenue aux deux témoins. Notre premier témoin est M. Stephen Brunet, maire de Bathurst. J'ai appris qu'avant d'être élu, M. Brunet a été enseignant à Bathurst, que vous avez été élu la première fois en 2004, puis reconduit en 2008. Le passage de l'enseignement à la vie politique doit être très intéressant.

Après M. Brunet, nous entendrons la déposition de M. Frenette.

[Français]

Monsieur Frénette occupe le poste de maire adjoint de la municipalité de Petit-Rocher et il est conseiller depuis 2004. Il est membre du comité exécutif de la Commission d'urbanisme de Belledune et il est aussi un des membres fondateurs de la Galerie Roche.

[Traduction]

Stephen Brunet, maire, ville de Bathurst: Merci beaucoup de m'avoir invité à vous rencontrer ce matin. Premièrement, je dois vous souhaiter à tous la bienvenue à Bathurst.

[Français]

Bienvenue à Bathurst, le centre du Nord.

[Traduction]

Je crois que nous sommes situés, du point de vue géographique, au centre, et pour cette raison, nous sommes devenus le centre de services pour tout le Nord du Nouveau-Brunswick, notamment la partie nord-est de la province.

Nous sommes véritablement une communauté bilingue. Je reviens tout juste du Tim Hortons, où il y a une journée de camp, et je me suis procuré un t-shirt que je n'ai d'ailleurs même pas regardé, n'empêche que le mien est en français, et il y en avait d'autres qui étaient en anglais. Je n'ai même pas songé à ce genre de choses. J'ai pris le premier t-shirt et servi du café pendant les deux dernières heures. En effet, j'ai servi du café à bien des clients qui me l'ont demandé en français et d'autres qui ont fait leur commande en anglais aussi.

Comme vous pouvez le constater, ma langue principale est l'anglais. Je suis né à Lachine, au Québec, et mon père était totalement francophone. Nous avons déménagé ici car ma mère était originaire de cette région du monde. J'ai étudié en français au début de ma vie, et ensuite nous avons déménagé dans une communauté anglophone où j'ai enseigné l'anglais pendant 34 ans. J'ai par ailleurs pris part à la vie politique pendant 12 années avant de devenir maire. J'ai été élu quatre fois conseiller municipal ici.

Nous sommes fiers de dire que nous sommes la première ville bilingue du Nouveau-Brunswick. Moncton aime bien à le prétendre, mais elle a tort. C'est nous qui le sommes, et nous le resterons.

Nous fournissons tous nos services dans les deux langues. Nos réunions ont lieu tous les lundis soir, et un lundi par mois, nous tenons une audience publique ordinaire où sont offerts des services d'interprétation simultanée. Nous avons une cabine d'interprétation. Notre hôtel de ville a été construit en 2003, et il a été conçu en vue de la prestation de services dans la langue officielle de son choix. Nous ne sommes pas qu'une ville, nous sommes une communauté, voire une région. C'est une précision très importante.

Je préside le forum des maires, qui regroupe les maires de Bathurst à Belledune, et nous sommes six. Quatre sont francophones et deux, anglophones. Nous nous réunissons une fois par mois pour discuter d'enjeux communs et la langue de choix, c'est-à-dire la langue dans laquelle le maire ou son représentant choisit de s'exprimer, est la langue utilisée. C'est ce qui fait notre grande richesse.

Nous avons une forte population acadienne dans cette région du monde, et elle est différente, à mon sens, des francophones québécois, et en raison de ces différences, nous sommes uniques. Je pense que notre communauté y est très attachée. Par exemple, vous pourriez venir à Bathurst une journée comme aujourd'hui et si vous ne deviez pas travailler, vous pourriez loger à cet hôtel et aller vous promener à Bathurst pour la journée.

Si vous aimez le golf, sachez que nous avons deux terrains de golf. Si vous préférez aller marcher le long de la plage, nous avons trois plages. Si vous voulez prendre part à d'autres types d'activités, nous avons un petit musée et un certain nombre de choses à faire en ville. Vous pourriez aussi vous rendre au village historique acadien et vivre l'expérience de la culture et de l'histoire riches du peuple acadien. Nous allons mettre au point un musée virtuel que les gens pourront visiter sur notre site web et y voir des artéfacts acadiens. Le ministère du Patrimoine canadien nous a versé une subvention de près de 400 000 $, et notre collège communautaire a regroupé des artéfacts pour le musée virtuel qui représentent la culture acadienne depuis ses débuts. Nous en sommes très fiers.

Je parlais à l'instant au sénateur Corbin, qui a fréquenté l'école sur la colline, et c'est encore une très, très bonne école, très dynamique qui compte plus de 1 000 étudiants qui font leurs études en français.

Nous avons aussi de nombreux étudiants bilingues qui fréquentent cette école, sans oublier qu'il y a deux campus. Nous avons une école secondaire anglophone et une école secondaire francophone, les deux étant distinctes. Il en va de même pour le secondaire de premier cycle et certaines écoles primaires. Nous avons des systèmes éducatifs distincts et des autobus de transport distincts. Les élèves se rendent à l'école à bord d'autobus distincts, mais la fin de semaine, ils se retrouvent au même parc pour faire de la planche à roulettes. De la même manière, vous verrez les mêmes jeunes des deux écoles au cinéma, côte à côte. Peut-être fréquentent-ils des écoles différentes, mais ils partagent le reste de la journée ensemble, naturellement. Cela ne pose aucun problème.

De temps à autre, il y a des querelles entre ESN et BHS, mais à Miramichi, où j'ai grandi, nous avions des batailles entre Chatham et Newcastle. C'était le même genre de choses. Nous avions ce type de rivalité entre des équipes sportives et entre, comme vous le savez, ceux qui courent après les filles de Chatham alors qu'ils ne devaient pas le faire. C'est la même chose ici. Nous avons une petite communauté, où tout le monde connaît tout le monde, et tout semble bien marcher.

De temps à autre, il y a des radicaux des deux côtés qui interviennent pour dire que telle chose ou telle autre n'est pas acceptable sur le plan linguistique. Par exemple, nous hissons les quatre drapeaux. Nous avons le drapeau du Canada, celui du Nouveau-Brunswick, celui de l'Acadie et l'Union Jack. Ce n'est que récemment que nous avons hissé l'Union Jack au centre municipal, ce qui a fâché quelques personnes. Je ne comprends pas pourquoi, mais le nombre est très faible. J'ai à peine reçu quelques appels téléphoniques à ce sujet.

En fait, ce sont des anciens combattants qui m'ont demandé de hisser ce drapeau. Nous célébrons le Jour du Souvenir à l'intérieur du centre municipal, car les anciens combattants commencent à vieillir et quand nous tenions nos célébrations à l'extérieur, ils avaient froid et nous n'avions pas de place pour les asseoir. Immanquablement, il y en avait toujours un qui s'évanouissait. Pour éviter cela, nous avons décidé de tenir les célébrations du Jour du Souvenir ici. Nous avons érigé une copie conforme de notre cénotaphe qui fait partie de notre centre municipal. C'est ainsi que certains d'entre eux nous ont demandé de hisser l'Union Jack, car c'est sous ce drapeau qu'ils ont combattu, et j'ai dit que c'était un des quatre drapeaux officiels de la province du Nouveau-Brunswick. Les quatre flottent sur l'Assemblée législative. Donc, des gens se sont offusqués de cela, mais c'est un problème mineur, puisque le nombre de personnes qui se sont senties offusquées est faible.

Nous venons d'avoir des élections, et à mon conseil siègent des personnes dont le nom est Roy, Doucet, Comeau, Ferguson, Young, Wiseman, Gammon et Anderson. Avec ces noms, on se serait attendu à ce qu'il y ait un partage égal entre francophones et anglophones, mais ce n'est pas le cas. En effet, je n'ai que deux conseillers qui peuvent parler le français à l'heure actuelle, deux sont bilingues. Un des conseillers, Gammon, dont le nom est très anglophone, et l'autre, c'est Roy. Le reste du conseil ne parle pas français, et cela montre que les gens acceptent le fait que tant que vous travaillez au sein de la communauté, vous travaillez pour le bien de tous; quant à la langue, c'est bien, ce serait bien d'être servi dans sa langue, et c'est ce que nous nous efforçons de faire à l'hôtel de ville. En ce qui concerne les noms au sein de notre communauté, si vous prenez le bottin téléphonique, vous y trouverez des noms comme le mien Brunet, mais j'ai grandi dans un système éducatif anglophone, en dépit de mon nom francophone. Ce n'est pas très différent, mais il y a une petite particularité. Cela semble être la norme. En effet, si vous prenez le bottin téléphonique, vous y trouverez le nom Arseneau, mais si vous appelez la personne, vous constaterez peut-être que c'est un anglophone unilingue, ou encore un francophone unilingue. C'est ainsi qu'est faite notre communauté et c'est ainsi qu'elle reste cimentée.

Je crois qu'il n'y a pas beaucoup de boutiques à Bathurst où vous ne pourriez pas être servi dans la langue officielle de votre choix. C'est très important, et les commerçants savent que leur entreprise est à but lucratif et qu'ils doivent servir leur clientèle ici. Pour servir cette clientèle, on doit être en mesure de le faire dans la langue de choix.

Cela semble être communément admis, car je m'entretiens avec des gens dans nos magasins qui me disent qu'il leur arrive presque tous les jours de tomber sur quelqu'un qui n'est pas de Bathurst. Il peut s'agit d'un visiteur de Caraquet ou de Miramichi, ou encore d'une autre région, surtout que nous avons un grand établissement de soins de santé ici.

Notre grand établissement de soins de santé est bilingue et dessert Miramichi aussi bien que Tracadie ou Shippagan. Il les dessert très bien. Nous avons un très bon système de soins de santé, de très bons services.

Vous aviez une question au sujet des immigrants. Nous n'en avons pas beaucoup dans notre communauté à l'heure actuelle. Il est clair que nous en avons déjà eus, de nombreux professionnels, mais hier encore j'ai reçu la visite d'un couple du Mexique qui aimerait venir s'établir à Bathurst, mais nos politiques d'immigration sont trop contraignantes et trop rigoureuses. Ce sont des gens qui ont beaucoup de difficulté à être admis au Canada. Ces deux jeunes viennent tout juste de finir une année d'étude au collège communautaire, au sommet de la colline, et ils ignorent comment ils pourraient revenir au Canada.

Ils ont aimé leur séjour ici, ils sont restés ici une année et maintenant, leurs visas étant échus, ils doivent rentrer chez eux, et je trouve triste de dire qu'ils auront de la difficulté à revenir au Canada.

Mon gestionnaire vient tout juste d'épouser une fille de Madagascar, mais elle n'est pas citoyenne canadienne. Imaginez les vraies difficultés auxquelles ils se heurteront avant qu'elle ne devienne citoyenne!

Nous voulons vraiment accueillir des immigrants au Canada. Pour cela, nous devons changer les règles d'une façon ou d'une autre. Nous devons rendre le système plus convivial.

Je suis allé à une conférence sur l'immigration à Halifax. Bon nombre de personnes se sont levées pour dire qu'elles sont prêtes à accueillir des immigrants, qu'elles aimeraient bien que des immigrants viennent s'établir dans leur collectivité, idéalement, mais que la situation sur le terrain est très difficile.

La population diminue énormément dans le Nord du Nouveau-Brunswick. Nos jeunes nous quittent pour aller vivre dans les grands centres du Canada. Il en va de même dans bon nombre de collectivités. Quatre-vingt-dix pour cent des étudiants qui sortent du collège communautaire, sur la colline, partent du Nouveau-Brunswick pour aller travailler à Fort McMurray, Vancouver, Toronto ou d'autres villes éloignées. On se demande vraiment pourquoi ils partent ainsi une fois leurs études terminées. Il nous est bien difficile d'essayer de garder nos gens ici.

Partout en ville, vous verrez des affiches « nous embauchons » dans les vitrines. Les entreprises cherchent actuellement des travailleurs. Mais ces travailleurs ne gagnent peut-être pas 25 ou 30 $ l'heure, non plus que 45 ou 50 $ comme à Fort McMurray. Dans le secteur du tourisme, par exemple, les gens qui se sont occupés de vous à votre hôtel ne gagnent pas 45 $ l'heure. Alors, comment les inciter à rester?

Nous exigeons néanmoins que les travailleurs de première ligne parlent les deux langues officielles, qu'ils soient très polis et très professionnels, souvent sans être rémunérés en fonction de ces exigences.

La péninsule acadienne perd une bonne partie de sa population. Je ne connais pas les données du dernier recensement pour Petit-Rocher, ici, mais nous n'avons perdu qu'environ 100 personnes, d'après le recensement, à Bathurst, parce que des gens quittent Saint-Sauveur, Saint-Simon et Robertville pour venir s'installer ici. Les gens viennent vivre ici lorsqu'ils sont âgés. Il s'agit d'une population vieillissante qui vient s'établir ici parce que nous avons à Bathurst des pharmacies, des cliniques médicales, des banques, des services alimentaires et des restaurants à proximité. Un entrepreneur local construit des petites maisons autour de tels services et ces maisons sont louées dès que les fondations sont coulées. Il reçoit de nombreuses demandes d'appartements ou de logements plus petits. Des gens viennent vivre dans notre collectivité; nous ne perdons pas autant d'habitants que dans le Nord du Nouveau- Brunswick, où il y a une véritable hémorragie démographique.

Le Sud de la province en bénéficie également. Si vous allez à Dieppe, vous constaterez que la moitié de la population vient du Nord du Nouveau-Brunswick.

Dieppe est la municipalité francophone de cette région, et un grand nombre de francophones du Nord du Nouveau- Brunswick vont s'y établir, car ils ont de bonnes chances d'y trouver du travail et d'y vivre dans des conditions qui les satisfont. Dieppe est une belle communauté. Elle est située très près de Moncton, près de bonnes autoroutes pour ceux qui veulent aller à Halifax, Saint John ou Fredericton. Ici, nous avons des autoroutes un peu médiocres, ce qui rend les déplacements très difficiles.

Vous avez posé une question au sujet des difficultés que connaissent les interlocuteurs du secteur culturel partout au Canada. Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. Je ne connais pas les difficultés des gens qui vivent ailleurs au pays.

Quelles difficultés connaissent les 90 p. 100 de francophones, de jeunes, qui quittent Bathurst, pour aller vivre à Fort McMurray? J'ai entendu des rumeurs, mais je ne sais pas si elles sont vraies ou si ce ne sont que des rumeurs. On me dit qu'il y a à Fort McMurray des campements distincts pour les francophones et les anglophones. Est-ce vrai? Je n'en sais rien; c'est simplement ce que j'entends dire. Ceux qui partent d'ici peuvent-ils se mêler à la population générale ou sont- ils tenus à l'écart en raison de leur langue, lorsqu'ils déménagent ailleurs au Canada? Cette question me trotte dans la tête, et c'est pourquoi je la pose.

Vous avez également posé une question au sujet de la Loi sur les langues officielles. Je dois avouer que je ne l'ai ni lue ni étudiée. Tout ce que je sais, c'est que nous faisons de notre mieux pour offrir nos services dans les deux langues officielles.

Toute la correspondance qui vient de mon bureau est traduite, et si j'envoie une lettre à un client que je sais francophone, la version française est au recto et l'anglais au verso. Si le client est anglophone, l'anglais est au recto et le français au verso.

Nous avons quotidiennement recours à un service de traduction, et si quelqu'un vient à mon bureau pour placer une affiche pour un concert à venir, je vais placer cette affiche à l'hôtel de ville si elle est dans les deux langues. Si l'affiche n'est que dans une seule langue, je vais demander à ce qu'elle soit traduite ou qu'on m'en fournisse une version dans chaque langue. C'est à ce point que nous avons à cœur de bien servir notre population.

Je vais m'arrêter ici, car mes cinq minutes sont probablement plus qu'écoulées. Vous m'excuserez, mais nous, les anciens enseignants, sommes intarissables.

[Français]

Gaston Frénette, maire adjoint, village de Petit-Rocher: Madame la présidente, je vous souhaite la bienvenue. Je suis sûr que vous allez passer une belle journée, et j'espère que vous allez manger du bon homard.

Je viens d'un petit village de 1 966 habitants qui s'appelle Petit-Rocher. On a perdu 40 habitants dans le dernier recensement. Petit-Rocher a toujours été perçu comme un endroit culturel. On a reçu des artistes comme Willy Lamotte, René Martel, Marcel Martel et Zachary Richard. C'est un lieu d'art et de culture. On a à Petit-Rocher des artistes comme Gilbert Leblanc, qui est un sculpteur de plomb reconnu; Danny Boudreau, qui fait des chansons. C'est lui qui avait fait la chanson pour le 400e de Québec; Denis Richard, avec sa chanson « Petit-Rocher ». Ce sont tous des gens qui viennent de notre région, et on en est fier.

Pour une petite municipalité, on est très bien. Dans un rayon de trois kilomètres par sept kilomètres, on a toutes les infrastructures qu'on veut pour bien y vivre. Ce sont les arts et la culture qui retiennent les gens ici. On se ramasse dans de petits cafés, dans de petites salles de 40 à 50 places, puis on discute de la culture et des arts. Je pense que pour maintenir des petites municipalités, c'est important d'avoir les arts et la culture. Tu peux avoir une mini galerie d'art dans un petit village qui va être aussi profitable qu'une grosse galerie, et c'est à ce niveau que les petites municipalités pourraient avoir de l'aide.

On a parlé tantôt de la Galerie Roche, à Petit-Rocher. C'est une petite galerie qu'on avait mise sur pied avec Gilbert Leblanc. On était tous des bénévoles. À un moment donné, tu ne peux pas être artiste et bénévole, faire les deux, ça prend donc des personnes ou des fonds. Dans une bibliothèque, on devrait être capable de mettre une petite galerie d'art, et ces personnes pourraient travailler ensemble.

Nous autres, on est 99,5 p. 100 francophones à Petit-Rocher. On vit en français. C'est sûr que la majorité est bilingue. La génération avant nous, comme celle de ma mère, ne parlait pas un mot anglais.

Ce qui est le fun à voir, c'est qu'à Bathurst, en ce moment on peut se faire servir dans les deux langues, mais il y a 25 ans on ne pouvait pas. Je me souviens, ma mère venait chez nous et disait: « Bien, je n'ai pas pu acheter ça parce que je ne savais pas comment le demander en anglais. » Mais cela a changé énormément. De plus en plus, on trouve que c'est beaucoup plus francophone.

Je me suis présenté en politique, pour essayer de sauver l'identité du village de Petit-Rocher parce que je crois à l'identité de chaque village. Chaque village a une histoire à sauvegarder. Il peut y avoir des regroupements de municipalités, je n'ai pas de problème avec ça, mais je pense que les petites municipalités devraient garder leur identité.

Une formule qui marche bien dans notre région, c'est celle des commissions. On a une Commission d'urbanisme, qui regroupe des représentants de chaque municipalité, la Commission de police et la Commission des déchets. Dans ce mandat-ci, j'ai l'intention d'avancer et de voir si on pourrait avoir une Commission des arts et de la culture pour la région Chaleur. Avec les commissions, cela marche assez bien et on garde l'identité des petits villages. Les DSL, c'est-à- dire les régions non incorporées, peuvent aussi être représentées sur ces commissions. Je pense que ce serait très important de travailler sur certaines commissions des arts et de la culture pour chaque région.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Brunet, avez-vous des bibliothèques? Avez-vous une bibliothèque publique ou y a-t-il des bibliothèques dans les écoles?

M. Brunet: Chaque école a sa propre bibliothèque, mais nous avons aussi une bibliothèque publique qui se trouve à l'hôtel de ville. C'est une bibliothèque très bilingue. En fait, son conseil est à 80 p. 100 francophone. Un représentant du conseil de ville siège également au conseil d'administration de la bibliothèque. C'est une bibliothèque bien fréquentée. Quand je me rends au bureau tous les jours, je vois des parents accompagnés de leurs enfants, ainsi que des aînés. La bibliothèque a un bon inventaire de livres dans les deux langues.

La présidente: Avez-vous autre chose que des livres? Offrez-vous également de la musique, ou seulement des livres?

M. Brunet: À la bibliothèque?

La présidente: Oui.

M. Brunet: On y trouve surtout un centre d'accès à des ordinateurs. Nous n'offrons pas de musique. Dans notre système scolaire, chaque école a sa propre fanfare, sa propre chorale, ses propres groupes de théâtre et ses propres groupes sportifs.

Les groupes sportifs sont très importants. Bathurst est connue pour son hockey, et nous avons notre propre équipe, les Titans d'Acadie-Bathurst. Cette équipe fait partie de la Ligue de hockey junior majeure du Québec. Elle n'a pas vraiment brillé l'an dernier, mais elle ne s'en est pas trop mal tirée non plus. Elle s'est rendue aux éliminatoires et elle a perdu en deuxième série. Mais elle a participé aux éliminatoires, et elle procédera cette semaine au repêchage. L'équipe appartient à M. Léo-Guy Morissette, et il espère recruter de bons joueurs.

Il y a 35 équipes de hockey qui jouent dans notre centre chaque année, et je dirais que la moitié des gens qui assistent aux parties viennent de la région. Cinquante pour cent ou moins viennent de la ville. Les gens viennent de partout. Ce centre est un véritable lieu de rassemblement. Vous y trouvez des gens de Petit-Rocher, des gens de Caraquet ou du centre-ville qui discutent ensemble.

En ce qui concerne la culture, nous avons une fanfare communautaire composée non pas d'aînés mais de personnes d'âge moyen. Nous avons une fanfare communautaire. Elle a été créée il y a deux ans grâce aux efforts d'un jeune chef d'orchestre. Il a mis la fanfare sur pied, et nous aimons beaucoup sa musique. Il y a deux jours, la fanfare a offert un concert communautaire au profit des soins palliatifs. Notre communauté s'est réunie pour tenir une levée de fonds. Nous avons levé des fonds pour un groupe qui s'occupe de personnes qui arrivent en fin de vie.

La ville de Bathurst compte plus de 100 groupes de bénévoles. Nous en sommes très fiers, mais ces groupes ont beaucoup de difficulté à recruter des membres, car nous perdons une partie de notre population. Par exemple, le Club Richelieu est important à Bathurst. Il appuie l'école ESN et il a adopté un parc au centre-ville de Bathurst. Le Club Rotary est également important ici. Cette fin de semaine, il tiendra une réunion du Rotary International à Bathurst. Je suis invité à prononcer une allocution au petit déjeuner, vendredi matin. Il y aura ensuite un grand tournoi de golf lorsqu'ils seront ici.

Nous accueillons beaucoup de gens qui viennent pour différentes conférences, entre autres.

La présidente: Votre ville a-t-elle une politique en ce qui concerne la culture, les groupes artistiques ou un comité spécial, par exemple?

M. Brunet: Non.

La présidente: Non, pas vraiment?

M. Brunet: Il n'y en a aucun qui me vient à l'esprit. Nous avons une société du patrimoine. Celle-ci s'occupe d'un musée, elle expose des éléments de notre passé, mais pour le reste, pas...

La présidente: Pas vraiment.

M. Brunet: Non, pas de cette façon. Il y a cependant divers groupes. Par exemple, le Club Richelieu a un solide comité francophone. Au Club Rotary, il y a un mélange linguistique. Et il y en a d'autres également. Les Chevaliers de Colomb parlent les deux langues. Il y a de nombreux comités et groupes de bénévoles.

Nous avons une Commission régionale des décharges publiques, qui s'occupe de tous nos déchets. Nous avons également une Commission régionale du tourisme. Nous avons une Commission aéroportuaire régionale, qui s'occupe de notre aéroport. Nous avons une Chambre de commerce régionale. La Chambre de commerce fonctionne dans les deux langues et s'occupe des gens de toute la région. C'est une organisation unique, et nous en sommes fiers, puisque nous avons toutes sortes d'activités régionales, en plus des activités municipales.

Le sénateur Murray: Madame la présidente, je sais que je devrais connaître la réponse à cette question, mais je ne la connais pas. Je vais donc la poser pour qu'elle puisse figurer au compte rendu. Quelles obligations linguistiques les lois du Nouveau-Brunswick imposent-elles aux municipalités?

M. Brunet: Notre province est officiellement bilingue.

Le sénateur Murray: Je le sais.

M. Brunet: Je ne sais pas dans quelle mesure on exige que nous fournissions nos services dans les deux langues.

Le sénateur Murray: La Loi sur les municipalités, ou la loi applicable, quel qu'en soit le titre, n'exige pas que les municipalités, en général, ou certaines municipalités, plus particulièrement, offrent leurs services, tiennent leurs réunions, etc., dans les deux langues, si le nombre le justifie? Il n'existe pas de lois provinciales qui régissent la langue qui doit être utilisée par les administrations municipales?

M. Brunet: Oui, il y en a. Je ne connais pas le libellé exact, mais nous avons dû traduire tous nos règlements municipaux, et si votre population est francophone dans un certain pourcentage, tous vos règlements municipaux doivent être traduits dans les deux langues.

Le sénateur Murray: Je suppose qu'ils doivent être traduits en anglais dans le cas de Petit-Rocher.

M. Brunet: Oui, mais je ne sais pas si c'est nécessaire à St. Stephen.

Le sénateur Murray: Non. Quel est le pourcentage, monsieur le maire?

M. Brunet: Ici?

Le sénateur Murray: Non, quel est le pourcentage, selon la loi du Nouveau-Brunswick?

M. Brunet: Je ne le connais pas. Je n'ai pas cette donnée avec moi, mais je sais que nous nous sommes conformés aux exigences avant même qu'on nous le demande.

Le sénateur Murray: C'est la règle qui s'applique à la publication des règlements municipaux. Mais qu'en est-il de la langue parlée au conseil, par exemple?

M. Brunet: Nous venons de tenir des élections municipales, et tous les citoyens pouvaient présenter leur candidature.

Le sénateur Murray: Je comprends cela parfaitement.

Vous dites que vous avez l'interprétation simultanée.

M. Brunet: Oui.

Le sénateur Murray: Est-ce une fois par mois seulement?

M. Brunet: Oui, une fois par mois.

Le sénateur Murray: C'est une fois par mois lors de la réunion publique?

M. Brunet: Oui.

Le sénateur Murray: Est-ce une réunion du conseil ou une réunion du conseil tenue en public?

M. Brunet: Oui. Toutes les réunions du conseil sont ouvertes au public.

Le sénateur Murray: Vous offrez donc l'interprétation simultanée à ceux qui sont présents. Qui paie ce service?

M. Brunet: Nous en assumons les coûts qui sont d'environ 1 800 $ la réunion.

Le sénateur Murray: En ce qui a trait à la traduction des règlements administratifs, et j'imagine des autres avis publiés par la municipalité, est-ce que la province vous accorde une aide quelconque? Vous offre-t-elle un soutien financier ou technique?

M. Brunet: Quand nous avons commencé à traduire nos règlements administratifs, nous recevions une subvention, mais je crois qu'elle est maintenant épuisée. Nous assumons nous-mêmes les frais lorsqu'il faut modifier les règlements administratifs ou d'autres textes.

[Français]

Le sénateur Murray: Monsieur Frénette, savez-vous quelle proportion d'une minorité linguistique est définie par la Loi de la province pour obliger la municipalité d'offrir les services ou d'émettre les publications dans les deux langues. Savez-vous de quel pourcentage on parle?

M. Frénette: Non. Je ne pourrais pas répondre. Je sais qu'il y a des fonds disponibles. Comme nous sommes à 99 p. 100 francophones, on ne s'est jamais arrêté sur la question de traduire en anglais. Mais on sait qu'il y a des fonds. Si jamais cela arrivait, il y a des fonds à la province pour cela.

Le sénateur Murray: Oui.

M. Frénette: je peux vous donner l'exemple de la Commission de l'urbanisme, qui était tout en français, et où on a eu un montant pour traduire les règlements en anglais, mais le pourcentage, je ne pourrais pas vous répondre.

Le sénateur Murray: Dans votre cas, je présume que la minorité anglophone de chez vous sait parler français.

M. Frénette: Oui.

[Traduction]

M. Brunet: J'aimerais revenir à la question du soutien financier. Comme vous l'aurez remarqué, je m'exprime surtout en anglais mais si j'ai un texte rédigé en français devant moi, je peux m'exprimer dans les deux langues. Or, quand j'ai tenté d'obtenir du financement pour pouvoir aller étudier le français, on m'a dit que les politiciens ne peuvent obtenir de financement. Cela m'a étonné.

Quand j'étais enseignant, je pouvais obtenir de l'aide pour faire des études, suivre des cours de français, et sans aucune difficulté, mais depuis que je suis en politique, j'ai appris qu'il n'existe pas de soutien que je pourrais obtenir pour étudier le français. Cela m'a étonné.

Le sénateur Murray: Je suppose que la province du Nouveau-Brunswick offre des cours à ses fonctionnaires, par exemple, et peut-être aussi aux députés provinciaux, mais je n'en sais rien. Les politiciens à Ottawa ont certainement la possibilité d'étudier l'anglais ou le français, selon le cas, aux frais de la princesse. Vous et la province devriez peut-être vous concerter avec le gouvernement fédéral pour mettre en place des arrangements qui permettraient aux dirigeants municipaux qui le souhaitent de suivre eux aussi de tels cours.

Le sénateur Champagne: Je pense que la meilleure façon de procéder ce serait que vous payiez vos cours et que vous obteniez ensuite une déduction d'impôt. Cela réduirait les coûts de moitié. C'est ce que je fais depuis quelques années pour mes cours d'espagnol.

M. Brunet: Oui, j'ai eu un tuteur l'an dernier. C'était très bien, très utile mais il est très difficile pour un maire dont l'emploi du temps est chargé de se libérer pour prendre des cours puisque comme aujourd'hui, j'ai quatre autres engagements. Je vais essayer de nouveau. Je crois que devrais aller m'isoler quelque part.

Le sénateur Champagne: Mais il doit bien y avoir une différence entre « je n'ai pas accès à une source de soutien financier pour payer les cours », « je n'en ai pas réellement le temps » et « je n'en ai pas besoin très souvent ».

M. Brunet: Oh, j'en aurais besoin tout le temps.

Le sénateur Champagne: Alors disons que ce n'est pas parce que le gouvernement ne vous accorde pas l'incitatif pécuniaire.

M. Brunet: Je l'ai fait de toute façon. Je l'ai fait mais c'aurait été bien d'avoir un soutien financier.

Le sénateur Losier-Cool: J'aimerais remercier nos deux témoins d'être venus témoigner aujourd'hui.

Monsieur le maire, j'ai habité Bathurst de 1963 à 1993 et j'ai même à l'occasion fait campagne lors d'élections municipales pour que nous puissions faire élire des représentants francophones. J'ai été très, très étonnée à la dernière élection de voir que le représentant francophone n'avait pas été réélu. Y a-t-il eu une levée de boucliers parmi la communauté francophone? A-t-elle été étonnée?

M. Brunet: Je ne pense pas. Je pense qu'une des choses qui découragent les gens de se lancer en politique municipale, c'est le temps que cela exige, c'est maintenant quatre ans et certaines personnes disent que c'est trop exigeant. Je ne pense pas que la langue ait jamais été un facteur — en tout cas je n'ai jamais eu cette impression. Cela va de soi.

Le sénateur Losier-Cool: Je sais qu'il y a eu des jours de festival et des jours d'accueil, mais il va y avoir des moments où les francophones ont des groupes qui viennent en ville? Y a-t-il moyen pour eux d'obtenir des subventions de la municipalité?

M. Brunet: Nous ne donnons pas beaucoup de subventions de ce genre. Nous évitons de financer les activités culturelles.

Le sénateur Losier-Cool: Mais vous financez les activités sportives.

M. Brunet: C'est que notre budget est très serré. Comme vous le savez, nous avons perdu notre usine, ce qui s'est traduit par une perte d'un million de dollars pour notre budget de fonctionnement. Cela nous a touchés durement. Notre taux d'imposition est le deuxième plus élevé de la province, et nous ne nous déplaçons même plus. Nous avons dû réduire toutes les dépenses qui ne sont pas absolument essentielles en attendant de trouver des solutions à notre problème.

Nous aurions besoin de 33 millions de dollars pour les routes et nous avons dû cesser de financer les équipes sportives qui voyagent, les groupes musicaux, etc. Nous essayons de les aider en leur permettant d'utiliser gratuitement notre centre municipal ou en leur louant à prix réduit, mais nous avons des difficultés financières car nous perdons notre principal employeur.

Le sénateur Losier-Cool: Bathurst semble être une ville bilingue et je sais, je reconnais qu'il y a eu de nombreuses améliorations dans la prestation de services en français ou dans les deux langues officielles.

Lorsque quelqu'un arrive à Bathurst, combien de noms de rue verra-t-il en français, d'après vous?

M. Brunet: Nous avons adopté une politique selon laquelle nous n'inscrivons pas « rue » ou « street », nous inscrivons seulement « O'Neil » ou « Collège », etc. Nous indiquons simplement le nom que portait la rue dans le temps et nous avons enlevé toute mention descriptive.

Le sénateur Losier-Cool: Je veux dire le nom lui-même. Je ne parlais pas du mot « street » ou « rue », mais le nom même des rues.

M. Brunet: Je ne sais pas. Ce sont des noms traditionnels qui existaient avant mon temps. Historiquement, telle rue s'appelait la rue Main ou l'avenue St. Peter. Des gens nous ont demandé de modifier les noms, d'ajouter des accents, mais le conseil de l'époque a décidé de laisser les choses telles qu'elles ont toujours été.

[Français]

Le sénateur Losier-Cool: Quand vous avez une commission, disons la Commission des arts et de la culture, est-ce que ses membres sont des conseillers élus ou est-ce qu'il y a des membres de la communauté qui font partie de ces commissions?

M. Frénette: La Commission d'urbanisme de Belledune fonctionne avec deux représentants d'une municipalité, c'est-à-dire un élu et un non élu. À Petit-Rocher, je suis représentant élu. Il y a un citoyen, un non élu qui siège à ce comité aussi. Chaque communauté a deux représentants, ensuite on a deux représentants pour chaque DSL, qui sont les communautés non incorporées aux alentours des municipalités, ce qui fait qu'on se retrouve dans un groupe de 12 à prendre les décisions pour toute la communauté. Je trouve vraiment que c'est une formule à considérer pour les arts et la culture.

Le sénateur Losier-Cool: Oui, pour inclure tous les membres, pour inclure la communauté. Disons que je prends par exemple le Festival des rameurs, à Petit-Rocher, une activité culturelle assez forte. Est-ce que le conseil municipal donne quelques argents à une activité comme celle-là?

M. Frénette: On participe à la publicité, c'est-à-dire qu'on est leur garantie; s'ils font un déficit, c'est nous autres qui allons les supporter. Tous les employés de la municipalité sont disponibles pendant le temps du festival. Ils s'occupent pas mal de tout. On essaye de subventionner avec un représentant. Il y a un représentant de la municipalité qui est sur le festival aussi, mais on n'a pas de fonds dédiés juste au festival.

Ce que j'ai réussi à faire l'année passée, pour la première fois à Petit-Rocher, suite à une demande de fonds, c'est recevoir 10 000 $ juste pour les arts et la culture à Petit-Rocher. Ils m'ont coupé de 5 000 $, mais j'ai réussi à avoir un petit 5 000 $, ce qui est un début. Au prochain budget, je vais demander un autre 10 000 $, mais avec ce 5 000 $ j'ai été capable de donner un appui à M. Gilbert Leblanc. Il expose présentement ses oeuvres à la bibliothèque de Petit- Rocher, et on a été capable de lui donner un cachet de 500 $. Mais ce petit fonds n'existait pas avant l'année passée. Je pense que ce n'est qu'un début. Chaque municipalité devrait avoir un pourcentage de leur budget pour les arts et la culture, mais cela retombe des États généraux; je pense qu'à Petit-Rocher, ce n'est qu'un début et je suis sûr que ça peut aller plus loin.

Le sénateur Corbin: Je voudrais concentrer une question ou deux sur la jeunesse, anglophone ou francophone. On dit souvent que la mesure de prospérité d'une communauté c'est la capacité de bien former sa jeunesse et par la suite lui donner des moyens de vivre au sein de la communauté.

[Traduction]

Il est évident, d'après ce que disait le maire Brunet, que les jeunes quittent la région en grand nombre lorsqu'ils ont atteint leurs objectifs en matière d'éducation, qu'ils aient obtenu un diplôme universitaire, qu'ils aient appris un métier, ou autre chose. Non seulement cela crée de grandes difficultés pour vos municipalités mais cela nuit également à la capacité du Nouveau-Brunswick de se développer et de devenir plus prospère qu'il ne l'est à l'heure actuelle. Pourquoi partent-ils après avoir atteint un niveau considérable d'éducation? Faites-vous des efforts pour les retenir dans vos collectivités? Quel est le problème fondamental?

M. Brunet: Les anglophones ont très peu de possibilités de poursuivre leurs études postsecondaires dans la région. Le collège sur la colline est francophone, mais je ne peux pas dire qu'on y accueille les anglophones à bras ouverts. Par conséquent, les anglophones qui viennent de finir leurs études secondaires ne peuvent pas poursuivre leurs études ici à Bathurst. L'Université du Nouveau-Brunswick a un campus ici où elle offre un cours de soins infirmiers. Les jeunes partent pour aller étudier à Miramichi, à Fredericton, à Sackville, ou ailleurs et, une fois partis, ils ne reviennent plus.

Ils reviennent peut-être pendant l'été, pour trouver un emploi d'été ou parce que leurs parents sont toujours dans la région et ils sont attachés à ce coin du pays, mais ils repartent et ne reviennent simplement pas.

La même situation existe quant à la population francophone. Je joue au golf avec un jeune qui vient de terminer ses études à l'ESN il y a environ cinq ans. J'ai joué avec lui l'été dernier. Il est aujourd'hui à Fort McMurray, il y a sa propre maison, sa motocyclette, sa voiture, son camion. Financièrement, il se tire très bien d'affaire. La situation serait bien différente s'il était ici parce que la mine fermera ses portes dans quelques années. Notre grosse mine, la Brunswick Mine, n'a plus de matière que pour trois ans d'exploitation. Notre moulin des pâtes et papiers vient de fermer ses portes. Les travailleurs qui étaient employés au moulin se rendent dans toutes les régions du pays pour travailler, mais un bon nombre d'entre eux sont restés ici parce que la mine Caribou vient de commencer son exploitation et ils ont pu trouver un emploi. Cependant, ceux qui s'en vont dans l'Ouest travailler, reviennent ici et ils dépensent leur argent; par contre, leurs enfants, s'ils amènent leurs enfants dans l'Ouest, restent dans l'Ouest pour dépenser leur argent. La génération actuelle, bon c'est un fait, reviendra mais la génération suivante? Non. C'est le problème que vit le Nouveau-Brunswick, c'est un énorme problème, un problème pour lequel je ne connais pas de solution.

Nous cherchons à ouvrir d'autres mines. Des géologues et des prospecteurs cherchent s'il est possible d'exploiter d'autres mines.

Notre industrie forestière éprouve de graves problèmes dans toutes les régions du pays et il faut se demander ce qu'on fait du bois. Nous vivons dans la forêt et il est regrettable d'avoir à avouer que nous ne pouvons pas nous servir de ces arbres du tout, à moins que nous décidions de changer la façon de faire les choses.

Je rentre à peine d'une conférence en Suède. Cinquante-quatre pays y participaient et tous ces pays parlaient de l'utilisation du biocarburant provenant des arbres, disant que le secteur forestier changerait dramatiquement. Ils ne perdent absolument rien en Suède quand ils exploitent un arbre. Ils en font une source d'énergie, pourtant nous ne le faisons pas ici. En Suède, ils emploient des jeunes pour le faire dans le secteur de l'énergie, malheureusement il faut moins d'employés dans le secteur de l'énergie qu'il en faut dans le secteur des pâtes et papiers.

C'est en partie notre problème. Certains des bons emplois — comme je vous l'ai dit ce matin, quelqu'un travaille dans le secteur des services, une personne polie qui s'occupe de vous, mais cette personne n'est pas payée 40 $ de l'heure.

[Français]

M. Frénette: J'ai un autre point de vue là-dessus. Ma fille étudie à l'Université de Moncton, elle a 21 ans, et je suis en train de regarder pour lui acheter un terrain de 7 000 $ à Petit-Rocher, et je lui dis toujours: « Tu peux vivre avec 10 $ de moins de l'heure puis bien vivre dans une petite municipalité avec la mer en face et le bois en arrière, puis avec peu, tu peux bien vivre. » C'est sûr que si tu veux deux autos puis voyager avec la grosse roulotte et tout, que tu vas aller à l'extérieur chercher ton plus gros salaire. Dans son groupe d'amis, il y en a six qui graduent cette année et je pense qu'il y en a quatre qui s'en viennent travailler à Bathurst. Il y en a deux à l'hôpital et l'autre au collège, et je pense qu'il y en a un qui s'en va.

Je parle avec ces jeunes qui sont de l'âge de ma fille, et puis j'étais entraîneur au soccer et ils veulent tous revenir. Cela ne prend pas grand-chose pour les faire revenir. C'est à nous autres de leur dire: « Tu ne peux pas avoir 35 $ l'heure, mais tu peux en avoir 15 $ et bien vivre «

Je pense que notre région a beaucoup à offrir en tant que nature. Je suis décorateur intérieur, puis je fais beaucoup de maisons dernièrement. C'est vrai qu'il y en a beaucoup qui sont parti à Fort McMurray, mais leurs épouses restent ici et c'est elles qui gaspillent l'argent. Quand le couple s'en va, ce n'est pas bon pour la région, mais quand un s'en va et qu'il revient toutes les trois semaines apporter un paquet d'argent, je pense que la communauté en profite de toutes les manières.

C'est en investissant dans les arts et la culture que l'on peut intéresser les jeunes. Une soirée « vin et fromage » à la galerie d'art, sera une sortie pour eux autres. Ils ne sont pas obligés d'aller dans un gros théâtre ou dans une grosse place pour avoir du fun. Le lendemain, ils peuvent aller marcher sur le bord de la mer ou prendre une marche dans le bois. Cela vaut de l'or. C'est à nous d'éduquer ces jeunes au fait qu'ils peuvent travailler dans la région à moins de salaire, mais bien vivre et y vivre en santé.

Le sénateur Corbin: En ce qui concerne les services de la radio et de la télévision, considérez-vous être bien servis?

M. Frénette: Moi oui, je trouve que c'est très bien. Radio-Canada, pour nous autres c'est bon. Le CKLE à Bathurst et on Max à Bathurst, on a deux stations de radio ici à Bathurst qui desservent les deux langues.

Le sénateur Corbin: Pensez-vous être bien branchés sur l'actualité nationale et internationale avec ces services?

M. Frénette: Très bien.

Le sénateur Corbin: Vous captez des émissions de Radio-Canada?

M. Frénette: Oui, mais le seul problème qu'on a dans le nord, c'est du côté des journaux. On a un journal l'Acadie- Nouvelle; je ne trouve pas qu'il y a assez de journalistes ici à Bathurst pour couvrir toute la région.

[Traduction]

M. Brunet: Nous avons également deux hebdomadaires. The Northern Light est le journal anglais, et L'Hebdo Chaleur est le journal français.

Ce journal a été créé pendant que j'étais maire. Des gens sont venus me demander si je pouvais les aider à créer un journal français; nous avons donc invité Jamie Irving à venir nous visiter, il a accepté la proposition et ils ont créé le journal L'Hebdo Chaleur.

Il y a donc deux hebdomadaires, ce qui est une bonne chose. Évidemment, il y a L'Acadie-Nouvelle et nous recevons le journal de Moncton, le Times & Transcript et le Telegraph-Journal.

Pour ce qui est de la télévision, je ne sais pas vraiment. Je ne regarde pas beaucoup la télé. Bon, je regarde les matches de hockey mais c'est à peu près tout.

Le sénateur Losier-Cool: Y a-t-il des librairies françaises?

M. Brunet: Oui, nous avons des librairies françaises.

Vous avez posé une question un peu plus tôt sur les festivals et j'ai oublié de signaler que nous appuyons divers festivals. Pendant nos journées d'hospitalité, nous leur offrons gratuitement l'espace dont ils ont besoin pour se réunir. Nous leur offrons également des services de lutte contre les incendies et des services de police; le service des travaux publics préparera le terrain et les lieux où aura lieu le festival. Nous offrons donc des services en nature. Lors de la semaine du festival, il y a la soirée acadienne, qui se déroule exclusivement en français, et puis nous accueillons J.P. LeBlanc, qui est un bluesman et un des rares musiciens de blues francophones. Il est excellent.

Le sénateur Murray: Le maire Brunet a dit quelque chose qui m'a fait penser à ce que j'avais oublié. Je crois que vous savez que l'immigration est un dossier qui est partagé entre Ottawa et les provinces. Les provinces ont le droit, si elles désirent s'en prévaloir, de participer au recrutement des immigrants. Je ne sais pas ce qui se passe au Nouveau- Brunswick, mais je sais que certaines provinces ont une politique d'immigration ou un programme d'immigration assorti d'objectifs. Je crois que c'est le cas de la Nouvelle-Écosse, par exemple. Alors, peut-être pourriez-vous vous adresser au ministre ou au ministère provincial.

De plus, je crois que je devrais signaler que le sénateur Chaput et moi faisons partie d'un autre comité sénatorial, soit le Comité sénatorial permanent des finances nationales, qui étudie en ce moment des modifications proposées à la Loi sur l'immigration.

Il y a un arriéré de près d'un million de dossiers, de gens qui veulent venir au Canada, et les lois actuelles stipulent que le gouvernement doit étudier ces demandes en fonction du principe du premier arrivé premier traité. Les amendements proposés par le gouvernement suscitent une assez vive controverse pour des raisons dont je vous ferai grâce. Cependant, les amendements prévoient que les futurs requérants — en fait le ministre pourrait accorder la priorité au traitement des demandes de ceux qui ont des compétences particulières dont on a besoin au Canada. On nous a dit qu'on avait besoin de mineurs, dans le Nord du Manitoba, il s'agirait de compétences du genre qui sont vivement recherchées dans diverses régions du pays.

Une disposition de la loi actuelle stipule que si les immigrants ont reçu une garantie qu'ils auraient un emploi au Canada, cela permet d'accélérer le processus de traitement de la demande.

Je ne sais pas si vos amis qui viennent de recevoir leur diplôme, lorsqu'ils ont terminé leurs études au collège communautaire, avaient des emplois garantis, mais si c'est le cas, ça facilite vraiment les choses.

M. Brunet: Je crois que les emplois garantis c'est une chose, mais il ne faut pas oublier que nos jeunes sont plutôt gâtés et qu'ils veulent obtenir immédiatement des emplois bien rémunérés. Cette génération veut une belle maison, deux véhicules, toutes les fanfreluches qui accompagnent cette nouvelle maison, et les jeunes ne sont nullement disposés à aller travailler, par exemple, dans une ferme sept jours semaine. Ils ne sont pas disposés à travailler les longues heures qui s'imposent dans le secteur des ressources naturelles. Il y a peut-être des immigrants qui adoreraient simplement avoir une ferme. Si vous visitez le Nouveau-Brunswick, vous verrez tous ces champs qui sont vides, rien n'y pousse, et pourtant aujourd'hui on parle d'une pénurie de denrées alimentaires à l'échelle internationale. Il est peut-être un peu tard pour exploiter ces champs, mais des immigrants qui ont la bonne attitude et le bon code déontologique sont nécessaires pour qu'on puisse justement à nouveau relancer le secteur agricole. Il faudra songer à accueillir ces immigrants. C'est très important pour le Canada.

[Français]

Le sénateur Champagne: La culture en général dans vos villes en particulier, est-ce une composante importante sur le plan économique? Je sais qu'un peu partout on annonce, particulièrement dans la Péninsule, des festivals, et vous parliez aussi d'événements culturels que vous avez organisés dans votre petite ville.

[Traduction]

Monsieur Brunet, est-ce que les événements culturels sont importants pour l'économie de votre région? Encouragez- vous financièrement et culturellement ce genre d'événements?

M. Brunet: Nous sommes chanceux puisque nous avons plus de 100 groupes de bénévoles dans la ville. Certains de ces groupes s'occupent uniquement de questions culturelles. Nous avons une Irish Canadian Cultural Association qui a adopté une rue et un parc. Ils organisent des fêtes chaque année pour la société irlandaise. Puis il y a la New Brunswick Scottish Cultural Association, qui a fait la même chose. Ils offrent du haggis et d'autres mets nationaux. Ils ont un groupe qui se réunit et qui célèbre. Ils ont beaucoup de plaisir. Puis évidemment il y a la société micmaque en banlieue de notre ville et dans la ville. Je suis encore une fois invité à leur pow-wow cette année, et je m'y rendrai pour fêter leur culture. Les Mi'kmaq viennent et ils installent un tipi sur le bord de l'eau et ont une fête spéciale. Je suis toujours très heureux de participer à leur pow-wow. Évidemment il y a la Société acadienne du Nouveau-Brunswick qui est très présente à Bathurst, et nous nous réunissons pour participer à diverses activités; nous prenons toutes les mesures pour nous assurer que lors du festival il y a toutes sortes d'activités qui commémorent l'héritage acadien. La société multiculturelle accueille des gens de toutes les régions du monde. Comme ces jeunes qui étaient à mon bureau hier; la première chose qu'ils ont faite lorsqu'ils sont arrivés à Bathurst, c'est de devenir membres de la société multiculturelle.

Nous fournissons des locaux pour leurs réunions et je participe à certaines de leurs activités sociales. C'est vraiment très valorisant de participer à ces activités.

[Français]

Le sénateur Champagne: Monsieur Frénette, je serais curieuse de savoir ce que vous avez à nous dire sur le côté culturel francophone dans votre milieu.

M. Frénette: Pour nous, c'est très important. On travaille présentement sur un concept. Cela fait une couple d'années qu'on travaille dessus puis on a eu des nouvelles dernièrement. À Petit-Rocher, on avait un Centre d'interprétation des minerais, qui est un bâtiment d'à peu près 6 000 pieds carrés sur le bord de la mer. On veut prendre ce centre et en faire un Centre d'interprétation des arts et de la culture en Acadie. On a le Village acadien qui nous a amené le passé, mais à part le Village acadien, où sont nos artistes, en arts visuels comme en musique? On aimerait y amener Édith Butler, tous les musiciens puis leurs créations. Ce serait virtuel, on pourrait voir l'histoire de ces artistes- là, mais pas de leur passé, mais leur présent. Pour nous, les arts et la culture, c'est très important. C'est ce qui nous fait sortir.

Le sénateur Champagne: Considérez-vous que le gouvernement du Canada en fait assez pour vous aider, pour vous permettre de réaliser ce dont vous nous parlez aujourd'hui?

M. Frénette: Pour les arts et la culture, pas beaucoup. Pour le sport, oui. Parce qu'on a de grandes équipes de sport à Petit-Rocher. On a beaucoup de sportifs, des équipes de hockey et de soccer. Pour vous donner un exemple, il y a quatre ans j'ai été élu et j'ai siégé à deux comités égaux, un sur le sport pour développer une infrastructure de 2,6 millions de dollars, puis on avait cette boîte-là qu'on voulait développer. Les deux ont été menés parallèlement, et le projet du sport est en train de se réaliser, mais le projet des arts et de la culture n'a pas grouillé beaucoup. Ce qui fait que la majorité du temps, c'est les artistes eux-mêmes qui s'en occupent. On a tous des idées, mais c'est de les amener à un autre échelon qui est dur, tandis que dans les sports, les parents embarquent, les grands-pères embarquent parce que le petit va jouer plus tard. Les arts, c'est différent, et je pense que ça prend plus de force, plus de fonds dans les arts et la culture. Le sport gagne toujours. M. Brunet le disait tantôt. On a parlé un peu puis tu sais, il a parlé du hockey tout de suite. Il a parlé des Titans. Mais quand ça arrive du côté des arts et de la culture, c'est moins présent.

Le sénateur Champagne: Dans le sport, c'est ce qui fait que votre région est en grand deuil depuis la semaine dernière.

M. Frénette: Exactement.

[Traduction]

La présidente: Je tiens à vous remercier monsieur le maire d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer ce matin.

Le sénateur Murray: J'ai posé des questions sur la Loi sur les municipalités.

La présidente: Voulez-vous obtenir ces renseignements?

Le sénateur Murray: Je crois que quelqu'un pourrait peut-être faire un appel et communiquer avec le ministère des Affaires municipales et vous pourriez peut-être avoir un tout petit paragraphe qui nous renseignerait. J'aimerais avoir ces renseignements. Je devrais avoir ces renseignements, les connaître, mais ce n'est pas le cas. Je le savais auparavant.

Quelles obligations la loi du Nouveau-Brunswick impose-t-elle aux municipalités en ce qui a trait au traitement des minorités linguistiques, qu'il s'agisse de minorités de langue française ou de langue anglaise? Peut-on dire brièvement quelle aide technique ou financière la province offre aux municipalités pour qu'elles puissent s'acquitter de leurs responsabilités?

[Français]

Le sénateur Corbin: Sous ce rapport-là, la préoccupation du sénateur Murray a été résolue, je pense, de la façon suivante: Chaque groupe linguistique a mis sur pied son propre organisme. Par exemple, les municipalités francophones, les villes, et cetera, ont une association qui leur est linguistiquement homogène. Il y a évidemment au- dessus de tout cela une association générale, mais les francophones comme tels ont leur association. Les municipalités reçoivent un soutien financier du gouvernement provincial, certainement au niveau des ressources.

Le sénateur Murray: Oui.

Le sénateur Corbin: Ce serait peut-être le filon à exploiter.

Le sénateur Losier-Cool: Une municipalité bilingue qui veut donner des services dans les deux langues est-elle protégée par le gouvernement provincial qui est un gouvernement qu'on dit bilingue?

Est-ce que les lois provinciales ont certains fonds alloués aux municipalités? Je parle de la ville de Moncton par exemple, ou de Bathurst.

Le sénateur Murray: La question que je pose concerne non seulement les cadres des municipalités qui se veulent bilingues ou qui se considèrent bilingues, mais s'il y a une obligation légale de certaines municipalités, en fonction de la proportion des gens de la minorité linguistique, d'offrir les services, d'émettre les publications bilingues? Quel est l'état de la loi là-dessus.

La présidente: Nous allons obtenir l'information.

[Traduction]

Le sénateur Murray: Je suis convaincu que quelqu'un pourrait nous donner une toute petite note pour faire le point sur la situation.

Le sénateur Corbin: On n'a pas besoin d'avoir tous les détails, mais un paragraphe suffirait pour nous éclairer.

[Français]

La présidente: Cette information, doit-on l'obtenir tout de suite?

Le sénateur Murray: Non. Avant que nous terminions nos séances au Nouveau-Brunswick, j'aimerais savoir.

Le sénateur Corbin: Mais il ne faut pas oublier que le Nouveau-Brunswick est la seule province officiellement bilingue. La seule province au pays avec des droits enchâssés dans la Constitution canadienne, et cela a été un geste volontaire de la province du Nouveau-Brunswick afin de garantir pour toujours les droits de ses citoyens de parler l'une ou l'autre langue et d'être servis dans l'une ou l'autre langue. Le Nouveau-Brunswick n'a pas encore atteint la position suprême de la perfection, mais il est en voie de le devenir. Cela prend du temps.

Le sénateur Losier-Cool: Est-ce que ces droits-là lui donnent une responsabilité vis-à-vis des municipalités? C'est ce que je me demande.

Le sénateur Corbin: Je croirais que oui.

La présidente: Nous allons maintenant procéder à notre deuxième groupe de témoins. Nous avons avec nous de la Société culturelle régionale Nepisiguit, Mme Diane Leblanc, agente culturelle. Et du Studio Acadie, l'ONF, nous avons M. Jacques Turgeon, producteur exécutif. Comme nous le faisons habituellement, nous allons vous demander de nous faire une présentation d'environ cinq minutes. Si vous n'avez rien d'écrit, pas de problème, parlez-nous du coeur. Dites-nous qui vous êtes et ce que vous faites dans le domaine de la culture, et cetera, et ensuite suivront les questions des sénateurs. Comme vous l'avez vu, habituellement nous avons beaucoup de questions de nos sénateurs et le temps passe très vite.

Diane Leblanc, agente culturelle, Société Culturelle Régionale Népisiguit: Madame la présidente, je suis agente de développement à la Société culturelle régionale Nepisiguit. Notre territoire se situe de Saint-Sauveur à Pointe-Verte. Nos bureaux sont situés à Bathurst. Nous célébrons cette année notre 35e anniversaire. Je pourrais peut-être vous parler des projets, car depuis plusieurs années, on travaille à l'aménagement culturel du territoire parce qu'ici dans la région, il n'y a pas salles de spectacles.

C'est une région quand même petite. On connaît plusieurs petits villages environnants et depuis plusieurs années, on s'aperçoit qu'il y a des centres culturels, des centres communautaires et des Légions royales canadiennes qui ferment leurs portes. On s'est donc associé au Collège communautaire de Bathurst, pour mettre sur pied une salle de spectacle style cabaret de 150 places, parce qu'il n'y en avait pas ici. Étant donné qu'on est un organisme sans but lucratif, on est quand même limité financièrement alors on travaille avec un paquet de bénévoles. On est à peu près une quarantaine de bénévoles actifs. Le Collège communautaire nous a permis de prendre possession, d'une salle qui était anciennement le salon des étudiants. C'est une salle qu'on veut multifonctionnelle, ouverte à la communauté, pas juste à Bathurst, mais à la région. Parce qu'ici, les seuls endroits où l'on peut produire des spectacles, c'est dans les écoles. Nos deux écoles secondaires, anglophone et francophone, ne sont pas équipées pour faire cela. Nous, on fait du spectacle depuis longtemps parce qu'il faut en faire un peu pour générer des profits parce qu'ensuite, on investit dans nos artistes locaux. Il faut trouver des moyens et être ingénieux pour générer un peu de fonds.

On fait partie du Conseil provincial des sociétés culturelles. Il y 13 sociétés culturelles au Nouveau-Brunswick et trois centres affiliés, soit les centres scolaires communautaires. Les sociétés culturelles cette année, au total, ont un budget de 310 000 $ réparti aux 13 organismes. La Société culturelle reçoit en moyenne depuis les quatre dernières années de 25 000 $ à 27 000 $ du ministère du Patrimoine canadien, et ensuite on va dans d'autres programmes, mais c'est celui-là qui est le plus gros. Ce montant est réparti sur cinq versements pendant l'année. Donc vous comprendrez que lorsqu'on est réparti en cinq versements, c'est très difficile de prévoir à long terme ce qu'on doit faire.

Comme je vous dis, nos bénévoles sont très actifs et sans eux ça ferait longtemps que nos portes seraient fermées. Donc voilà pourquoi on s'est tourné vers le collège, qui veut également s'ouvrir à la communauté et qui dit: « Il y a un campus à Bathurst, qui dessert quand même l'ensemble des francophones du nord-est et d'ailleurs. » Donc il y a beaucoup d'activités, et il nous a fallu nous associer avec des partenaires majeurs pour pouvoir continuer.

On a un peu changé notre direction parce qu'avant, on touchait toutes les petites municipalités, mais avec la fermeture de plusieurs locaux qui ne sont pas équipés, bien souvent il faut l'équiper de A à Z quand on a une activité, que ce soit un lancement de livre, un spectacle ou autre. Cela devient très taxant lorsque l'équipement technique finit par coûter plus cher que l'artiste lui-même. Donc c'est un peu notre challenge ici depuis quand même plusieurs années. J'ai été bénévole longtemps et cela fait à peu près 20 ans que je travaille. Je suis la seule employée à plein temps à travers toutes les sociétés culturelles. Le but du Conseil provincial des sociétés culturelles, c'est de mettre des permanences en régions. Donc moi je suis là et je suis passionnée. Il faut être un peu fou pour travailler dans ce secteur, mais j'adore ça. Et tant que j'aurai cette flamme et que les bénévoles m'appuieront, je resterai.

Dernièrement, on a eu, pour le développement de la salle de spectacle « La bébitte », on a embarqué dans l'un des plus gros programmes de Patrimoine canadien qui est « Espace culturelle Canada ». Donc, c'est très exigeant. Encore là, le Collège communautaire nous a prêté des chargés de projet à l'international pour pouvoir faire ces projets, parce que c'est impossible de demander cela à des bénévoles. Donc, on a obtenu un 60 000 $, et ensuite l'APECA a embarqué avec nous. Donc du côté social et économique, on a eu un gros appui. Je vais vous donner la programmation de cet été avec nos artistes acadiens.

Madame le sénateur Losier-Cool, sans doute que vous connaissez Jean-François Breau. Il va être de notre délégation, et les billets se sont vendus en deux jours. Donc dans une petite salle comme celle-là, on voit déjà le côté positif. Notre défi est monétaire et également le fait qu'on soit dans une région bilingue, ce qui n'est pas toujours facile.

Jacques Turgeon, producteur exécutif, Studio Acadie de l'ONF: Madame la présidente, je vous remercie de votre invitation. C'est toujours un plaisir de présenter le Studio Acadie. En guise de rappel, le rôle de l'Office national du film en est un de producteur public et de distributeur public. On essaie d'assumer ces deux rôles-là parallèlement ici, en Acadie. Le Studio Acadie a été créé en 1974 avec la participation importante du cinéaste acadien Léonard Forêt. Depuis sa création, on a produit au-delà de 70 films et coproduit plus de 20 avec des producteurs de la région. Majoritairement des documentaires, mais également des films d'animation.

Pour présenter le studio comme tel, on est installé à Moncton. Il y a quatre employés: une adjointe administrative, une administratrice, une productrice et moi-même comme producteur exécutif. C'est un gain parce que l'administration se faisait auparavant à Montréal, cela a été décentralisé et c'est un plus. On est un studio autonome. C'est sûr qu'on a des appuis de Montréal en animation et en mise en marché, mais on est une structure autonome de production.

Je ne vous donnerai pas un portrait depuis 1974, mais je suis en poste depuis 2002 et depuis 2002, on a produit et coproduit 26 films. Nous travaillons principalement avec un noyau de cinéastes chevronnés qui sont établis en Acadie. C'est sûr qu'on a eu des pertes nous aussi vers Montréal, mais on a quand même un noyau. Je pense à quatre ou cinq cinéastes qui y travaillent de façon permanente. Je pense à Ginette Pèlerin. Je pense à Monique Leblanc. Je pense à Renée Blanchard, qui actuellement produit une série lourde pour Radio-Canada, et je pense aussi à notre ami Herménégilde qui a résisté lui aussi, mais qui a changé un peu d'orientation depuis les deux ou trois dernières années.

On travaille donc avec ces gens-là. Pour le moment, on travaille avec tous ceux qui sont actifs, soit avec des projets qui sont en production, en développement ou à l'étude. On travaille beaucoup avec des cinéastes de la relève bien sûr. On essaie de faire notre travail parce qu'on considère que cela fait partie de notre mandat. Pour compenser, avec les cinéastes de relais, on fait beaucoup de formation. La formation, on la fait au niveau créatif, c'est-à-dire qu'on donne des ateliers sur la scénarisation, la réalisation et sur la postproduction au montage. On donne un bon coup de main aussi pour la formation technique.

Je pense qu'à Moncton actuellement, il y a un studio de montage sonore et de postproduction sonore qui a bénéficié de notre aide parce qu'il y a des gens de Montréal qui sont descendus et qui ont participé à l'établissement de ce studio- là, ce qui permet encore plus d'autonomie dans la région pour la production privée et celle que l'on fait à l'ONF.

Il faut sûrement parler un peu des problèmes, bien sûr. C'est qu'on est aux prises avec des problèmes d'éloignement. C'est sûr que rejoindre les communautés francophones de la Nouvelle-Écosse, ce n'est pas évident. On travaille actuellement beaucoup avec Baie Ste-Marie sur deux ou trois projets, mais disons que c'est difficile. C'est sûr aussi qu'on tente d'établir des contacts autant avec les communautés francophones de Terre-Neuve que de l'Île-du-Prince- Édouard, mais les centres culturels moteurs sont peut-être pas tous axés sur le cinéma et l'audiovisuel, mais plus sur les spectacles.

On a un problème, je ne vous en parlerai pas longtemps, mais on a problème de financement régional, global, national de l'ONF depuis les grosses compressions budgétaires qui ont eu lieu en 1994 ou 1995, où l'on a été sérieusement coupé de 30 à 35 p. 100. Depuis, il n'y a jamais eu de réajustement, contrairement aux autres agences fédérales qui ont pu bénéficier de fonds supplémentaires. Je nomme le Conseil des arts, Téléfilms et Radio-Canada. Nous, on n'a rien eu.

En ce qui concerne la situation actuelle, on a trois films en production, cinq films en développement et cinq films à l'étude. On travaille toujours sur une quinzaine de projets. Je vais vous énumérer quelques projets: en production, on travaille avec Rodrigue Jean, qui vient de Caraquet; Rodolphe Caron, qui est d'Edmundston, et puis Marie Cadieux, qui est de Moncton. On essaie dans la mesure du possible de travailler avec les réalisateurs et les producteurs qui sont à l'extérieur de Moncton. On a beaucoup aidé à mettre sur pied la nouvelle compagnie de Renée Blanchard qui s'appelle « Productions ça tourne ». On a donné un bon coup de main aussi à la formation d'une maison de production à Edmundston, Productions Appalaches, tenue par Rodolphe Caron.

Je voudrais glisser un mot aussi sur le e-cinéma, le e-cinéma étant du cinéma numérique. On a monté un projet-pilote en Acadie qui offre des petites salles, des moyennes salles ou des grosses salles, mais une qualité de projection semblable à celle des salles de cinéma. On arrive avec du son 5.1 Dolby Stéréo, excusez mes lacunes techniques. Alors, on a monté sur cette expérience-là dans cinq municipalités de l'Acadie. On est allé à Edmundston, Kedgwick, Bouctouche, Moncton et Caraquet. Les salles qu'on a équipées varient. À l'Université de Moncton, c'était une salle de 300 places. Et puis on est allé à Bouctouche et à Kedgwick avec des petites salles de 20 à 25 personnes, ce qui permet des projections numériques par Internet. Notre soutien matériel peut passer par satellite ou bien par Internet, qu'on connaît bien. On est en train de procéder à l'implantation d'une sixième à Baie Ste-Marie. C'est un des projets qu'on a avec la Nouvelle-Écosse. On a des gens de Petit-Rocher que j'ai rencontrés il y a trois semaines dans le but d'implanter une salle de cinéma. Et ici aussi dans la région, les gens sont dans la phase deux du projet, si on réussit à le développer.

Alors voilà, on est assez satisfait de ce qui se passe dans le cinéma. On voit une voie intéressante de développement canadien parce qu'on ne compétitionne pas avec les grosses salles de cinéma commerciales, mais on occupe un créneau qui actuellement est occupé par personne, et ça nous permet de rejoindre les régions qui sont éloignées où il n'y aurait pas le nombre suffisant pour établir des salles commerciales rentables.

Si on parle des défis que l'on veut relever, c'est bien sûr qu'on est très près des nouvelles technologies comme des nouvelles plates-formes aussi. On croit qu'actuellement, la production en Acadie se fait principalement pour la télévision traditionnelle. Nous, on espère pouvoir un peu dévier cette production-là vers d'autres choses. Par les nouvelles plates-formes, bien moi j'ai des projets actuellement qui sont prévus pour la production strictement pour le web. Je pense qu'avec les nouvelles plates-formes comme le web, il y a possibilité de décentralisation et de passer à une production différente de celle de la production traditionnelle.

Quant au niveau de technologie, j'ai eu il y a quelques mois seulement une expérience assez intéressante, c'est que j'ai deux jeunes de Moncton qui sont allés suivre un stage à Montréal en technologie d'animation 3-D. À l'ONF, on pense que c'est le bras du futur parce qu'actuellement il se fait 30 productions en 3-dimensions, et on souhaite que l'ONF et ses partenaires puissent devenir un pôle intéressant de développement de cette nouvelle technologie qui pourra s'appliquer dans les salles de cinéma, et dans cinq ans on pense que les télévisions seront équipées pour diffuser en trois dimensions.

On pense qu'il y a place pour des jeunes acadiens afin qu'ils soient au coeur de ce développement. Je vous inviterais à voir notre film en trois dimensions qui passera à Québec pendant les fêtes du 400e, au centre d'interprétation de la Place Royale. C'est avec des lunettes comme la technologie IMAX. Je crois que c'est un très bon film et on souhaite poursuivre ce genre d'expérience, ici en régions.

Notre espoir, c'est que les nouvelles technologies, les nouvelles plates-formes, nous permettent assez aisément de décentraliser. Puis on pense que les grosses institutions actuellement, que ce soit le diffuseur ou autre, ils ont souvent des « buildings » hauts de même, mais on pense que cela pourrait s'étendre plus à l'horizontal qu'à la verticale avec toutes les ressources techniques qui sont à notre portée aujourd'hui. Alors voilà, j'espère ne pas avoir pris trop de temps.

Le sénateur Corbin: Il y a beaucoup de choses à discuter. Je regardais la carte Mme Leblanc. Vous dites que vous couvrez le territoire entre Pointe-Verte et Val Doucet.

Mme Leblanc: Et Saint-Sauveur.

Le sénateur Corbin: C'est donc dire qu'il y a un découpage à partir de là, et ce qu'on appelle la Péninsule acadienne proprement dite a sa propre association culturelle?

Mme Leblanc: C'est ça.

Le sénateur Corbin: Vous ne couvrez pas la partie Shippagan, Caraquet?

Mme Leblanc: Il y a une société culturelle à Shippagan, à Caraquet, à Néguac et à Tracadie-Sheila. Donc il y en a quatre dans la Péninsule acadienne. Notre territoire est grand. Ensuite, il y a Campbellton qui en a une aussi.

Le sénateur Corbin: Vous travaillez ensemble, je présume.

Mme Leblanc: Oui.

Le sénateur Corbin: Vous vous rencontrez assez souvent. Alors votre gros problème si je comprends bien, c'est votre financement?

Mme Leblanc: Oui.

Le sénateur Corbin: Est-ce que vous recevez également du financement du côté de la population?

Mme Leblanc: En ce qui concerne la population, on fonctionne avec le recrutement de membres. On récolte des cotisations annuelles. C'est minime. On parle de 10 $. On a à peu près 400 membres. Cela varie entre 400 et 600 membres par année.

Le sénateur Corbin: Et ça vous rapporte quoi?

Mme Leblanc: Cela nous permet d'envoyer des petits dépliants comme celui-ci à nos membres, et on en distribue également dans la région. Ensuite avec le projet, on a obtenu un montant d'Espace culturel Canada qui nous a permis d'ouvrir les portes. Maintenant on s'aligne beaucoup plus au niveau des compagnies d'investissement. On a approché la Fédération des Caisses populaires acadiennes. Ce n'est pas confirmé, mais il semblerait qu'il y aurait un intérêt quand même assez grand.

Il y a beaucoup de travail à faire sur le terrain. Là on est à Bathurst, mais comme je vous dis au niveau des municipalités, elles sont quand même assez petites. Les budgets sont limités en termes de municipalités donc bien souvent, c'est assez difficile d'obtenir des montants puisqu'eux vont regarder aussi pour leur municipalité. C'est peut- être des dons minimes, mais ils n'ont pas les moyens d'offrir des montants substantiels.

Le sénateur Corbin: Merci. Vos manifestations culturelles apportent sans doute un peu d'eau au moulin aussi au niveau des recettes?

Mme Leblanc: Oui. Dans l'année, je dirais qu'on a un budget qui tourne autour de 100 000 $.

Le sénateur Corbin: Combien?

Mme Leblanc: Il est à peu près de 100 000 $.

Le sénateur Corbin: 100 000 $?

Mme Leblanc: Oui, c'est ça. Alors, on n'a pas le choix de s'aligner vers la production. Il faut dire aussi que je suis contente que M. Turgeon soit ici parce qu'au niveau du cinéma, c'est le Festival international du cinéma francophone en Acadie que l'on présente à Bathurst, parce qu'il y a quand même une salle de cinéma à Bathurst. Le problème, c'est qu'il n'y a pas de cinéma en français qui est présenté dans cette salle. Dans cette salle, il y en a cinq. On a tenté par tous les moyens possibles de présenter des films en français, et ça ne fonctionne pas. Donc, on s'est associé avec le FICFA depuis trois ans.

Le sénateur Corbin: Qu'est-ce que le FICFA?

Mme Leblanc: C'est le Festival international de cinéma francophone en Acadie. C'est un festival qui se déroule à Moncton, mais qui vient en régions, et on a la chance une fois par année d'avoir du cinéma international chez nous. Avec la salle au collège, on veut développer justement le concept de e-cinéma. On n'était pas prêt l'année dernière, maintenant on l'est.

Le sénateur Corbin: J'ai toujours considéré qu'il est important que tous les paliers de gouvernement s'impliquent dans leur appui à la vie culturelle du pays, que ce soit local, régional, national et même dans les manifestations internationales parce que cela contribue éventuellement à développer notre caractère identitaire en tant que Canadiens. Vous avez parlé de la piètre contribution de Patrimoine Canada. Le comité autrefois, alors que j'ai eu l'honneur et le plaisir de le présider, a entendu des témoignages à l'effet que le laps de temps entre une demande de financement et l'arrivée du chèque est parfois très, très long. Cela ne prend pas seulement des jours et des semaines, mais des mois et des mois, et par le temps que vous recevez le chèque, vous êtes déjà au bord du déficit des opérations. Est-ce que cela a été votre expérience?

Mme Leblanc: Oui. On a terminé notre année financière à la fin mars et comme je vous disais, c'est réparti en cinq versements. Donc si on allait dans les sept chiffres, lorsque l'on parle de 20 p. 100, ce n'est pas si mal, mais lorsqu'on parle de 27 000 $ et qu'on répartit cela en cinq versements, on avance du mieux qu'on peut. En ce qui concerne du financement comme tel, ce qui arrive, c'est que ça nous cause des problèmes, surtout avec les gros programmes. Il faut s'ajuster à leurs critères, et non pas l'inverse. Parfois, on n'entre pas vraiment dans les critères, mais pour avoir accès à l'Espace culturel, il a fallu que l'on gère une salle. Le collège communautaire nous a donc donné la gestion de cette salle-là. Maintenant il y a un comité de gestion qui va gérer cette salle. Sinon, on n'aurait pas eu de fonds provenant de Espace culturel Canada. Il fallait premièrement que ton principal travail soit de la diffusion. Donc, il faut ajuster nos tires pour rentrer dans les programmes et la plupart du temps, ça ne rentre pas dans nos besoins. Peut-être qu'ailleurs au Canada, ça rentre dans leurs besoins, mais ici en termes de programmes, ça peut prendre une année. Comme là, il fallait acheter l'équipement avant même d'avoir les fonds, donc on a signé des papiers à la Caisse et on a eu des prêts. En ce moment ce sont des marges de crédit, parce que le paiement final de notre année qui vient de finir à la fin mars a été posté cette semaine. Voilà comment on fonctionne, et on est rendu au mois de juin. C'est très difficile de prévoir à long terme, mais dans ces programmes-là, on nous demande de prévoir à long terme.

Au Nouveau-Brunswick les programmes qu'il y a, ce sont des programmes de mieux-être. Là tu peux recevoir 5 000 $, mais c'est seulement une fois dans l'année que tu peux recevoir ce 5 000 $. Il y a d'autres programmes où on n'entre pas dans les critères.

Le sénateur Corbin: Au niveau des représentants, et je ne veux pas prendre tout le temps, mais je voudrais épuiser cette question; Patrimoine Canada a des représentants ici dans la province, dans la région si vous voulez, Atlantique.

Mme Leblanc: Oui, à Moncton.

Le sénateur Corbin: Est-ce que vous considérez que leur collaboration est exemplaire? Parce que, ce que vous nous dites, c'est qu'il y a des pierres d'achoppement en route là. Moi j'essaie de savoir où se situe le problème spécifiquement. Ce n'est donc pas au niveau des représentants.

Mme Leblanc: Pas du tout.

Le sénateur Corbin: Au niveau de Patrimoine Canada?

Mme Leblanc: Non, pas du tout. Parce que lorsqu'on a fait certaines demandes, il y a des fois où on dit: « Ah, ben ce programme-là, essaie dans l'autre programme. ». C'est Mme Deborah Robichaud et Jean-Claude Leblanc qui m'ont donné un gros coup de main. Du côté collaboration, eux font leur travail, mais c'est lorsqu'il y a des demandes écrites à faire, les formulaires, ils doivent également suivre ces critères-là. Ils nous aident du mieux qu'ils peuvent, mais on a due faire appel à des chargés de projets qui eux sont habitués dans le développement international, et d'aller chercher dans les deux, trois et quatre millions. Ils n'en reviennent pas eux-mêmes des exigences de ces formulaires pour des organismes comme le nôtre. On nous le dit.

Le sénateur corbin: Je voudrais faire un commentaire à l'endroit de l'ONF, M. Turgeon. J'ai bien connu Rodolphe Caron, je l'ai connu assez jeune d'ailleurs. Vous dites qu'il est d'Edmundston, mais il est originaire de Caron Brook.

M. Turgeon: Je ne connais pas.

Le sénateur Corbin: Caron Brook, c'est près de Lac Baker en haut d'Edmundston. Et c'est un jeune qui, quand je l'ai connu, m'a toujours épaté. Il avait, si on peut dire, cette idée fixe de réussir dans son domaine. C'est un jeune qui manifestait beaucoup de talent et dont les réalisations ont prouvé qu'il visait la bonne cible. Je voudrais aussi vous dire que quand j'étais député à la Chambre des Communes... j'ai eu à défendre le maintien du bureau des activités de l'ONF à Moncton. Et nous avons réussi. Je crois dans la mission de l'ONF, et je suis déçu d'apprendre qu'on vous a serré la ceinture à ce point. Je crois que ce comité pourrait examiner davantage cette question et faire des recommandations dans le sens dont nous a parlé M. Turgeon. Parce qu'il y a énormément de talent en Acadie, et il faut que nous les appuyions.

M. Turgeon: Rodolphe va sortir un film qui porte sur une sculpteure bien connue en Acadie, Marie-Hélène Allain dans le cadre du FICFA. Le film sera présenté au festival et on espère aussi le faire entrer par le réseau du cinéma. On veut faire une première de manière à ce que le film puisse être vu à la grandeur de l'Acadie.

La présidente: J'aimerais ajouter aux propos de mon collègue le sénateur Corbin, au sujet de ce qui se passe aux ministères et des chèques que vous recevez, et des demandes que vous faites. Ce qui est malheureux, c'est que lorsque le sénateur Corbin présidait la situation était la même, et c'est la même chose en 2008. Alors au niveau de la structure, il y a quelque chose qu'il faudrait changer. Nous sommes très conscients de ce qui se passe. On se le fait dire de part et d'autre, alors je voulais vous assurer que le comité était conscient de cette problématique. Je passe maintenant la parole au sénateur Champagne, vice-présidente de notre comité.

La sénateur Champagne: Monsieur Turgeon, vous nous dites que vous aidez à équiper en numérique des petites salles un peu partout. Si j'ai bien compris, vous avez aussi du nouvel équipement de montage dans vos studios. Est-ce qu'il vous arrive, par exemple, d'investir dans un film que ferait un cinéaste dans votre région en disant: « Bon, ben notre contribution, ce sera le montage que vous viendrez faire chez-nous. » Est-ce que c'est comme ça?

M. Turgeon: Fréquemment. Dans beaucoup de projets, on ne fait qu'une aide technique et d'autres on donne une aide monétaire et technique. On a un programme particulier qui s'appelle l'Aide au cinéma indépendant canadien, qu'on appelle l'ACIC qui donne une aide avec des services techniques. Vous me demandez si un cinéaste m'arrive avec un projet qu'il a tourné, pourrait-il venir monter chez nous?

Le sénateur Champagne: Oui.

M. Turgeon: Aucun problème. C'est du quotidien pour nous.

Le sénateur Champagne: Cela fait partie d'une aide pour laquelle vous ne lui chargeriez pas?

M. Turgeon: Non. Absolument pas. Cela ne fait pas partie de notre investissement.

Le sénateur Champagne: C'est que c'est un coin de la production de nos jeunes cinéastes, où qu'ils soient au Canada, où ils deviennent extrêmement gênés parce qu'alors que l'ONF par exemple reçoit tout ce qu'il y a de mieux comme équipement, ils vont le faire pour rien alors qu'il y a des jeunes investisseurs privés à ce moment-là qui aimeraient bien le faire, mais ils voudraient être payés aussi. Alors, ils ont l'impression qu'une compagnie de la Couronne comme l'ONF qui reçoit tout, enlève le pain de la bouche au secteur privé.

M. Turgeon: Madame Champagne, les équipements coûtent 5 000 $ ou 6 000 $ là. On ne parle plus d'équipement de 200 000 $ ou 300 000 $.

Le sénateur Champagne: Ah oui. Si vous faites de la haute définition, cela coûte quand même assez cher.

M. Turgeon: Je ne suis pas équipé pour faire de la haute définition. C'est laissé au privé. Moi ce que je peux faire, c'est quand ils ont un documentaire, je peux aider les gens. J'ai une station puis un « final cut pro ». Ce sont des équipements qui ne sont pas très dispendieux. Je ne veux pas compétitionner le secteur privé, ce n'est pas mon objectif. Au contraire, je pense qu'auparavant il y avait beaucoup de services qu'on faisait faire comme le « mix » de son. On le faisait au studio de l'ONF à Montréal. Alors, on a aidé ici à Moncton une petite boîte de son qui s'appelle Révoluson. Maintenant les productions, plutôt que de les faire à Montréal gratuitement, j'encourage le monteur sonore qu'on a développé dans le privé à Moncton.

Le sénateur Champagne: Tous les gens de l'industrie privée vous en sont très reconnaissants. Non, je me dis au moins dans ce coin de pays, si de jeunes cinéastes ont besoin d'aide, vous leur donnerez, mais sans couper l'herbe sous les pieds de ceux qui ont investi plusieurs millions de dollars.

M. Turgeon: Puis j'ai des caméras à 3 000 $, 4 000 $, avec lesquelles ils peuvent travailler puis s'amuser. L'unité de Final Cut Pro, coûte à peu près 5 000 $ à 6 000 $, ce sont des jouets plutôt que de l'équipement de haute H.D.

Le sénateur Champagne: Si par exemple la subvention totale qu'ils vont donner était d'un montant qui soit de 50 000 $ et moins, qu'on ne passe pas par ce problème de vous faire cinq versements, est-ce que vous croyez que ce serait une bonne suggestion à leur faire: « Pour l'amour du ciel, faites-leur un chèque. » Il me semble que ce serait plus intelligent et plus économique surtout. Cela vous aiderait-il?

Mme Leblanc: Oui. Ce serait un gros pas de l'avant. Je parle en même temps des 13 organismes qui subissent le même sort que nous.

Le sénateur Champagne: Je pense qu'avec mes collègues, nous pouvons nous engager à en faire la recommandation.

Le sénateur Losier-Cool: Bonjour à vous deux, et merci. Madame Leblanc, vous avez dit que la société culturelle existe depuis 35 ans. Je me souviens des débuts, de Rhéal Roussel et du Père Zoël Saulnier.

Mme Leblanc: C'est ça.

Le sénateur Losier-Cool: Vous êtes là depuis plusieurs années?

Mme Leblanc: Depuis 18 ans.

Le sénateur Losier-Cool: Est-ce qu'il y a un appui continu qui va toujours en augmentant? Suite au financement, est- ce que cela dépend, des portes-feuilles ou de l'économie?

Mme Leblanc: Mais dans les premières années, on parlait de tout près de 60 000 $, ensuite c'est descendu à 40 000 $, à 35 000 $, et là on est rendu à 27 000 $. Depuis quatre ans, le montant stagne. Toutes les sociétés culturelles sont dans le même bateau également.

Le sénateur Losier-Cool: Je crois qu'on a bien identifié que le financement est inadéquat si on veut vraiment développer une culture, une politique de culture. J'ai été touchée tout à l'heure par les deux maires, et surtout par M. Brunet qui a parlé que l'on donne beaucoup au sport. On appuie les sports dès le jeune âge et les parents embarquent dans toutes les activités sportives. Est-ce que vous avez cet appui-là du côté des activités culturelles? Les activités culturelles se portent-elles bien dans la région?

Mme Leblanc: Ça va bien. On fait notre possible avec les fonds qu'on a, et l'aide qu'on a des bénévoles. Mais je dois vous dire qu'il y a des bénévoles qui sont là depuis très longtemps, avant même que j'y sois et qu'ils ne lâchent pas. Entre autres, il y a Jacques Ouellet et compagnie qui préparent la grande ouverture de notre salle au Collège communautaire.

Mais en gros, je dirais que oui. Mais il faut dire que cette année, on a un petit peu plus de difficulté parce qu'avec tous les événements qui se sont passés cet hiver, il y a eu vraiment une baisse. Les gens étaient très tristes avec toute cette situation-là. Je crois que cela commence à remonter. Nos salles, on les remplit à peu près de 75 à 80 p. 100 de capacité, ce qui est bon. Le cinéma, le FICFA, depuis les deux dernières années, on a atteint des chiffres quand même intéressants; le FICFA nous suit et il vérifie vraiment au niveau de l'assistance, et on a quand même eu plus de gens ici qu'ailleurs. C'est qu'il faut avoir des endroits pour cela. Comme je vous disais, il y a une salle de cinéma qui ne répond pas à nos besoins, donc il faut trouver un autre moyen. Donc: « O.K., vous ne nous ouvrez pas les portes, on va aller ailleurs. » Et puis c'est ce qu'on a fait. Avec une salle de 150 places, déjà là c'est complet pour Jean-François Breau. Il y a d'autres activités qu'on va faire: des lancements de livres, on parle aussi de l'exposition de peintures d'artistes scolaires. L'intérêt pour les sports est une réalité. À Bathurst, on doit dire que c'est une ville sportive, car la plupart des conseillers sont des sportifs. Je n'ai rien contre les sports, mais lorsqu'on parle du Centre régional K.C. Irving, depuis des années, ce sont des parties de hockey des Titans et puis de hockey mineur.

En termes d'événements culturels, cela ne fonctionne pas et ils ont dû annuler certaines activités. Donc avec la bâtisse qu'ils ont là, je trouve qu'elle n'est pas utilisée à son plein potentiel. On nous a fait visiter cette salle au début de la construction, et on nous a demandé des idées, mais on ne les a pas suivies. Maintenant c'est une salle à banquets. Ce n'est pas une salle pour faire des activités. Donc, on a fait l'aménagement du territoire, on a vérifié partout. Avant de s'aligner pour une petite salle, on a quand même regardé ce qui se passait autour. L'arrivée de Mme Anne-Marie Gammon qui va siéger au Conseil de ville de Bathurst va peut-être aider. Elle est la seule qui a mentionné le côté culturel lorsqu'elle s'est présentée. Donc, c'est certain que je crois qu'on va avoir une alliée ici à Bathurst.

Le sénateur Losier-Cool: Parce qu'il faut dire que Caraquet a un centre culturel très moderne.

Mme Leblanc: Oui.

Le sénateur Losier-Cool: Je ne sais pas, la population de Bathurst est plus grande. Et vous avez mentionné aussi l'essoufflement, qui est un terme qui est souvent mentionné en rapport au bénévolat. Que verriez-vous dans une politique culturelle nationale? et là je vais demander aux deux témoins de me répondre, et ce sera ma dernière question.

Mme Leblanc: On a rencontré beaucoup de gens. J'ai été à plusieurs forums et à des tours de table, on a rencontré des gens du Manitoba. Et puis quand on jasait ensemble, bien souvent, nos problèmes étaient semblables, mais peut- être pas à la même échelle. Lorsqu'on leur dit ce qu'on obtient par rapport à eux, et eux des fois ils ont plus, mais ils en demandent plus, tandis que nous, avec ce qu'on a on fait de la magie là. Donc en termes de politique culturelle, je crois que ça doit commencer à la base et puis je pense que la base, c'est les municipalités. Ici, il n'y a aucune politique culturelle dans les municipalités. On a beau demander au niveau national, mais je crois que la base est au niveau municipal, parce que nous avons besoin de l'appui ces gens-là lorsqu'on va chercher des demandes. Si vous parlez de Caraquet, il y a beaucoup de gens qui connaissent le maire Antoine Landry et ça bouge dans ce coin-là. Et puis là il y a des grosses conférences présentement qui se passent à Caraquet et Bathurst. Ce sont des gens passionnés ici, tant au niveau de la politique municipale, provinciale que fédérale. Il faut vraiment qu'on ait cet appui-là.

Mme Leblanc: Je crois que ça devrait commencer par là, puis ensuite...

Le sénateur Losier-Cool: Vous avez employé le mot de sénateur Lapierre. Sénateur Lapierre disait: « Ça prend la passion. C'est de la passion, qu'il y ait des gens qui soient passionnés. »

Mme Leblanc: Oui, c'est ça.

M. Turgeon: En matière de politique culturelle, je pense qu'il y aurait lieu de consulter le rapport des États généraux de la culture qui s'est tenu l'an passé à Caraquet où à peu près tous les aspects de la vie culturelle ont été touchés. Il y a eu des recommandations comme celles que vient de faire Mme Leblanc, d'impliquer les gens de communauté à la base, et de commencer par le commencement. C'est un document, qui je pense, pourrait être bénéfique pour tout le monde.

Le sénateur Losier-Cool: Je pense que nous avons eu des témoins à cet effet-là, qui nous ont parlé du rapport des États généraux.

M. Turgeon: Je voudrais juste ajouter un petit élément dont je n'ai pas parlé pendant ma présentation, mais ce qui a été fort utile pour nous pour le développement culturel, ce sont les initiatives liées au programme interministériel des communautés des langues officielles. Autant avec Radio-Canada, avec le Conseil des Arts, avec l'ONF et avec Téléfilms, de nombreuses initiatives sont nées avec succès grâce à ce programme-là qui a été renouvelé pour une dernière année cette année. On souhaiterait que l'expérience se poursuive, et on peut appuyer cette demande de rapport annuel qui font état des nombreuses activités qu'on a pu mener grâce à ce programme.

La présidente: Alors, il serait important que le PICLO soit reconduit?

M. Turgeon: Oui, très utile.

Le sénateur Losier-Cool: Qu'est-ce qui arrive avec le PICLO en ce moment?

Est-ce la dernière année?

M. Turgeon: Oui.

Le sénateur Corbin: Madame Leblanc du où vous avez dit qu'au Centre culturel de Bathurst, chaque fois qu'il y a eu des d'activités, cela a échoué.

Mme Leblanc: On parle du Centre régional K.C. Irving là.

Le sénateur Corbin: Oui. Vous avez dit que les manifestations culturelles qui y ont été tenues n'ont pas connu tellement de succès?

Mme Leblanc: Non.

Le sénateur Corbin: Est-ce pour tout groupe linguistique et toute langue confondue?

Mme Leblanc: Oui.

Le sénateur Corbin: Est-ce pour les francophones seulement?

Mme Leblanc: Non. Les francophones, je dois vous dire qu'on a eu une activité d'ouverture parce qu'on avait oublié le côté francophone, et nous et le Club Richelieu de Bathurst, on a travaillé ensemble pour faire un événement pour souligner l'ouverture de ce centre-là, et on a rempli à pleine capacité. Donc ici, dans la région, ce sont les francophones, la communauté acadienne qui embarque lorsqu'on veut organiser des choses. Ce n'est pas passif. Je me souviens quand j'avais peut-être 15 ou 16 ans, qu'il y avait le Bathurst Community Band à Bathurst, ou il y avait le TNB, Theatre New Brunswick. Le Theatre New Brunswick ne tourne plus à Bathurst. Le Bathurst Community Concert n'existe plus.

Il y beaucoup de comités multi-culturels, mais en terme d'actifs, c'est pour eux là. Ils vont faire des soupers et des choses comme ça, mais lorsqu'on parle d'une ouverture, lorsqu'on veut faire une activité et la préparer, on a un groupe qu'on va aller chercher et on va s'organiser pour que ce soit rempli. Mais lorsqu'il y a d'autres activités, comme je vous dis il y a eu des concerts qui ont été annulés, c'est très difficile après de remonter la côte et puis d'essayer d'avoir quelque chose. Les gens disent: « Non, si ça ne fonctionne pas la première fois [...] » Je pense qu'il y a un manque d'organisation au niveau culturel ici. On a beau faire le spectacle que tu veux, mais il faut quand même que ce soit organisé et il faut aller chercher des gens qui en font et qui savent ce qu'ils font. C'est dommage parce que c'est très difficile de produire après tant d'échecs. Donc, on s'aligne à plus petite échelle, et c'est beaucoup moins de frais. On ne peut pas, comme société culturelle, assumer un concert à l'intérieur de cet endroit.

Le sénateur Murray: J'ai l'impression, à partir d'une lecture des journaux d'hier et aujourd'hui, qu'on attache beaucoup d'importance dans les écoles francophones de la région aux activités culturelles, dans les écoles de la région, même beaucoup plus d'importance que peut-être dans d'autres écoles avec lesquelles je suis familier.

Par exemple, je lisais dans l'Acadie Nouvelle hier que chez vous, à Nepisiguit, les formations musicales de l'École secondaire Nepisiguit se sont illustrées récemment sur la scène nationale lors du MusicFest Canada, à Ottawa. Donc on dit: Harmusique (44 membres) et Népijazz (16 membres) de l'ÉSN étaient les seuls groupes à représenter la province à ce festival de musique. Un déplacement qui en valait le coût, puisque les jeunes musiciens ont brillé en remportant deux médailles d'argent et une médaille d'or dans la catégorie lecture à vue — jouer une pièce qui leur a juste été présentée cinq minutes auparavant. Ce qui est fort impressionnant.

Mme Leblanc: Il s'agit de l'École secondaire Nepisiguit et l'enseignante est Carmelle Valotaire. Carmelle met beaucoup de temps et de préparatifs. C'est un groupe qui est reconnu depuis plusieurs années.

Le sénateur Murray: Oui, il y a une Carmelle Valotaire.

Mme Leblanc: Oui, parce que nos bureaux sont situés à l'École secondaire Nepisiguit et on travaille beaucoup avec ces gens-là.

Le sénateur Murray: Ils disent que: « certains quitteront l'ÉSN cette année pour se diriger vers des études supérieures. Allain Arseneau, 17 ans, a choisi le programme du musique à l'Université de Moncton ». Et puis à Dalhousie, les enfants, on dit: « Au total, 14 chanteurs de 5 à 14 ans ont enregistré un mini-album de cinq chansons ». Le titre du disque est « Sauver l'environnement, j'apprends à le faire. ». Cent copies ont été mises en marché. L'école a reçu une subvention de 18 000 $ du Fonds d'innovation en apprentissage du ministère de l'Éducation.

Mme Leblanc: Il faut dire sénateur Monsieur Murray que depuis deux ans, on embauche des animateurs communautaires dans les écoles.

Le sénateur Murray: Est-ce que vous êtes impliquée dans cela?

Mme Leblanc: À l'école secondaire, il y a un animateur culturel cette année.

Le sénateur Murray: Oui.

Mme Leblanc: On a ciblé cette école-là parce que ça touche les étudiants de toute la région. C'est une école secondaire qui a un peu plus de 1 000 étudiants. Mais dans les petites écoles dont vous parlez, comme Dalhousie et ces régions-là, cela a aidé grandement ces animateurs communautaires qui mettent un peu plus de vie. Moi je reste dans le petit village de Robertville et également là, il y a eu des projets très intéressants.

Le sénateur Murray: Il y a de quoi vous encourager.

Mme Leblanc: Oui. Parce qu'on reçoit des appels, et justement on a une demande présentement, pour le cinéma.

Le sénateur Murray: Je ne peux pas m'empêcher de mentionner Saint-Joseph de Madawaska cher sénateur Corbin: Les élèves de l'école de Saint-Joseph de Madawaska ont uni leurs efforts dans la présentation de la comédie musicale Annie, la petite orpheline. Et puis l'enseignante Christine Albert-Aucoin a indiqué: « Nous avons traduit tous les dialogues et les chansons du film de 1982. La somme de travail investie par tous les participants est phénoménale ». Une élève, Véronique Babineau, a notamment traduit toutes les chansons en plus de participer activement à l'orchestration des chorégraphies. Cela dit quelque chose sur l'importance qu'on attache aux activités culturelles dans vos écoles.

Mme Leblanc: Oui. Cela demande beaucoup d'implication. Mme Valotaire, si je prends son exemple, fait énormément de bénévolat en plus d'enseigner les fins de semaine. Elle fait des concerts de fin d'année, et elle en produit pour les étudiants. Le théâtre aussi est très fort à l'École secondaire Nepisiguit.

Le sénateur Murray: Oui.

Mme Leblanc: Et également Petit-Rocher.

Le sénateur Murray: C'est de l'avenir, n'est-ce pas?

Mme Leblanc: Oui, c'est l'implication, on parle de l'implication des parents. Nous, c'est surtout des professeurs à la retraite

Le sénateur Murray: Oui.

Mme Leblanc: Je pense entre autres à M. Jean-Maurice Mallet qui est un professeur de musique qui s'implique toujours et qui épaule Mme Valotaire et également M. Bertier Bérubé. Donc ce sont des gens quand même de tous les âges. On voit d'anciens enseignants et étudiants qui vont participer à la remise des diplômes à la fin juin.

Le sénateur Murray: Vous parliez de cinéma, de la demande pour le cinéma. Monsieur Turgeon, qu'en dites-vous?

M. Turgeon: On y est. Cela fait partie du projet de développement des prochaines années. On espère implanter le réseau d'un cinéma un peu partout en Acadie.

Le sénateur Murray: Et dans les écoles?

M. Turgeon: On travaillait plutôt avec les centres communautaires, qui pourraient attirer des gens des écoles.

Le sénateur Murray: Est-ce que vous parlez des centres communautaires scolaires tels que Fredericton et Saint-Jean?

M. Turgeon: Non.

Le sénateur Murray: Ce serait quelque chose d'autre?

M. Turgeon: Les centres communautaires. L'exemple que je vais vous donner est Bathurst. Dans notre implantation du cinéma à Bouctouche, nous travaillons avec la société culturelle, avec qui on fait la programmation et qui nous a trouvé une petite salle. À Caraquet, on est avec le centre culturel dont on a parlé tout à l'heure. À Edmundston, on est avec la bibliothèque publique et puis à Kedgwick, on est avec la Société culturelle des Hauts Plateaux, et puis à Moncton on est avec l'université. Alors, on n'a pas ciblé comme telles les écoles secondaires. Ce n'est pas là pour l'instant, mais cela pourrait être un axe de développement intéressant, mais qui n'était pas dans notre mire actuelle.

Le sénateur Losier-Cool: C'est pour présenter des films?

M. Turgeon: Oui, présenter des films. Mais ça peut se faire avec le serveur, les gens, s'il y a des réalisateurs qui sont sur place. Cela marche de façon bidirectionnelle. Ça ne vient pas que de Montréal.

Le sénateur Losier-Cool: Est-ce qu'on présente des films français à la salle de cinéma de Bathurst sur la rue Sainte- Anne?

Mme Leblanc: On a essayé, énormément essayé. C'est pour ça qu'on est très content. On a parlé avec l'ONF et également avec le FICFA, et ce sera notre troisième année cette année. On a commencé à deux jours, on est rendu à quatre. Là, on aimerait avoir une pleine semaine puis sortir en régions. Donc on aimerait s'installer cinq jours à Bathurst et deux jours dans des écoles pour du cinéma plus axé sur la jeunesse.

Le sénateur Losier-Cool: C'est qu'il n'y a pas de demande pour les films français ici?

Mme Leblanc: On a énormément de demandes, mais la SAANB, on nous avait dit qu'on nous réservait une salle, la salle numéro cinq, la plus petite. Et l'année dernière, on nous a réservé la salle numéro cinq, mais on a eu tellement de monde qu'ils nous ont déménagés dans une plus grande. On a dit: « Voilà ». C'est ce qu'on répond à ce qu'ils nous disaient: « Non, ça ne fonctionnera pas des films en français. » On ne parle pas de traduction là, parce que des fois les films en anglais sont traduis trois mois plustard, alors on va voir le film en anglais. Mais non, on ne sait pas ce qui se passe. Je veux dire on essaie, on essaie, et puis on a même essayé à Caraquet avec Louise Blanchard. On était prêt à ce qu'ils nous donnent leur programmation et qu'on la présente là. On a essayé à l'École Nepisiguit, et cela ne fonctionne pas en termes d'équipements. Mais là, ils pourraient probablement régler notre problème.

M. Turgeon: Juste pour une petite minute, le distributeur de film francophone en Acadie, ça n'existe pas, donc, les propriétaires de salles sont pas mal liés aux distributeurs québécois, qui eux ne voient pas de marché suffisant, alors il y a un problème là. On parle aussi qu'à Moncton, il y a très peu de diffusion de cinéma francophone à part à l'université alors que les cinémas commerciaux peuvent diffuser au Blockbuster un immense succès, mais c'est très rare. Ce qui fait que là aussi, il y a ce problème.

Le sénateur Losier-Cool: C'est assez étrange parce que lorsqu'il y a le Festival international de films français, c'est une réussite, les gens y vont.

M. Turgeon: Après c'est fini.

Mme Leblanc: C'est international. C'est des films que les gens vont voir...

Le sénateur Losier-Cool: De très bons films français.

Mme Leblanc: Très bon. On a eu en moyenne 80 personnes, ce qui est beaucoup pour du cinéma où les gens vont venir tenter l'expérience, et puis là on aimerait le faire sur une semaine. Je peux vous dire que si on avait un autre endroit, on aimerait bien ça parce que ça nous coûte quand même des sous. On a une commandite pour toutes nos soirées de cinémas.

M. Turgeon: Je pense que le cinéma va offrir une possibilité de développement énorme à ce niveau.

Mme Leblanc: Parce que je crois qu'il y a un éveil. Il y a même des gens de Bathurst qui se rendent à Caraquet. Même le FICFA, lorsqu'ils ne s'étaient pas présentés ici, il y en qui se sont déplacés à Miramichi. La demande est là. Les gens en mangent du cinéma ici. En tout cas moi, j'espère juste qu'on puisse présenter cette série-là parce que c'est très intéressant. Je vous félicite parce que c'est une des idées intéressantes.

M. Turgeon: On va présenter la programmation qu'on a mise sur pied pour deux périodes. On a des présentations pour le cinéma numérique et puis j'ai également le répertoire de toute la production du Studio Acadie. Je ne voulais pas arriver avec 200 pages de documents, mais si vous avez besoin de savoir ce qui se passe au niveau de la production cinématographique depuis le début, on a tout cela.

La présidente: Madame Leblanc, j'aurais une question pour vous.

M. Turgeon: Certains auront la programmation pour la première partie et d'autres auront celle de la deuxième saison.

La présidente: Il n'y a pas de quoi. Il n'y a aucun doute qu'il se passe beaucoup de choses ici au Nouveau-Brunswick en termes de la culture. Vous avez des associations et des regroupements. Vous avez beaucoup de talent, de créativité et de passion à l'intérieur de vous comme Acadiens. Il me semble que c'est ce qu'on ressent. Moi je suis du Manitoba, et puis souvent je suis jalouse de voir toute cette passion, tout ce qui bouge ici.

Vous avez d'un bout à l'autre du Nouveau-Brunswick des associations, des comités, des regroupements qui fonctionnent avec un petit peu d'argent ici et là. Il n'y a pas de structure où il n'y a pas de commission, il n'y a rien ici au Nouveau-Brunswick qui pourrait vous permettre de vous regrouper un peu plus et de vous assurer que ça continue à se développer et à être appuyé, ou est-ce que vous travaillez chacun dans vos espaces, votre municipalité, votre village?

Mme Leblanc: On a une association provinciale. On a 13 sociétés culturelles.

La présidente: Est-ce à travers le Nouveau-Brunswick?

Mme Leblanc: À travers la province. Ensuite il y a les trois centres scolaires communautaires, Moncton, Fredericton, Miramichi et Saint-Jean. Nous, on est un organisme provincial. J'ai un mémoire qui a été présenté en janvier 2008 à l'Honorable Hédard Albert. C'est parce qu'il y a eu les suivis des États généraux des arts et de la culture.

L'Association des municipalités francophones commence, et on a commencé à identifier un regroupement qui se fait là. Comme le Conseil provincial pilote certains dossiers, mais c'est avec l'Association des municipalités et l'Association des artistes professionnels acadiens, l'AAAPNB.

La présidente: S'il y avait une recommandation à faire pour appuyer ou encourager ce qui a commencé à se faire, ce serait de quelle nature? Est-ce que le Comité sénatorial pourrait recommander quelque chose qui viendrait appuyer tout ça?

Mme Leblanc: En tout cas, dans le cas des sociétés culturelles, c'est au niveau de l'enveloppe budgétaire qui est très minime. Nous si on avait des permanences en régions, cela aiderait parce qu'il y a d'autres sociétés culturelles qui ferment leurs portes. On les connaît tous. Ensuite, c'est par manque de fonds également qu'ils reprennent. Il y en a que c'est trois jours semaines, il y en a d'autres qui ne travailleront pas pendant l'été, pendant quatre mois, des choses comme ça. Ce qui fait que c'est très difficile d'avoir une collaboration, mais on se regroupe quand même aux trois ou quatre mois. Il commence à y avoir des sites Internet et des choses comme ça où l'on peut se regrouper.

Puis des fois un va appeler de l'aide: « T'as eu de l'aide pour le projet d'Espace culturel? » J'ai eu des appels pour me dire: « Peux-tu me donner un coup de main. » On n'a pas le choix de travailler ensemble de ce côté-là pour essayer d'aider tout le monde. Nous autres, on est là pour aider, comme on va demander de l'aide à d'autres régions également.

La présidente: Et vous c'est le fédéral, c'est Patrimoine canadien?

Mme Leblanc: Oui.

La présidente: Est-ce que la province aussi aide à ce niveau-là?

Mme Leblanc: On travaille sur des politiques. Des fois il faut aller sur le terrain. Moi où je suis rendue, je veux voir le concret parce que des études et des forums, on en a eu énormément. Il faut maintenant passer à l'action et puis au niveau de la province, ils ont intérêt à ouvrir leur programme un peu plus parce que c'est limité. Il y a des programmes à 5 000 $, tout simplement.

Il n'y a pas de programmes. On essaie de cibler la Fondation des arts du Nouveau-Brunswick, mais ça, c'est un organisme sans but lucratif qui est séparé. Donc on est en train de s'aligner de ce côté-là, mais au niveau de la province, c'est avec le ministère du Mieux-être, de la culture et du sport. Et encore là, je pense que le sport en prend une bonne partie.

La présidente: Monsieur Turgeon, vous avez bien dit que vous produisez des films à caractère acadien francophone?

M. Turgeon: Exclusivement des documentaires d'animation et quelques rares films de fiction francophone.

Le sénateur Champagne: Lorsque vous faites la production de ces films, qui les écrit, qui s'occupe du côté technique? Est-ce que ça créé des emplois?

M. Turgeon: Oui.

La présidente: Ici même?

M. Turgeon: Oui.

La présidente: Combien?

M. Turgeon: Cela dépend des plateaux. Comme les petits plateaux de fiction qu'on a montés l'été dernier pour un court-métrage, il devait y avoir 20 ou 25 personnes qui ont travaillé là-dessus. Dans un tournage de documentaire, c'est de trois à cinq personnes. Généralement, ce sont des Acadiens, sauf qu'il n'y a pas de bassin de 20 directeurs pour les photos, alors quand que les gens qui sont déjà sur place travaillent sur d'autres choses, on doit aller chercher des ressources à l'extérieur.

La présidente: Des spécialistes?

M. Turgeon: Mais on privilégie tout le temps les techniciens et artistes de chez nous.

La présidente: Est-ce que ça se compare un peu, excusez mon ignorance là, mais nous avons au Manitoba Productions Rivard.

M. Turgeon: Ah oui, je connais bien.

La présidente: Est-ce que vous connaissez Louis Paquin?

M. Turgeon: Oui, très bien.

La présidente: Est-ce que c'est comparable?

M. Turgeon: Oui, mais disons que Louis Paquin est un peu différent qu'en Acadie, le noyau de maisons de production est plus grand que celui dans l'Ouest. Il y a six ou sept maisons de production actives actuellement en Acadie. Dans l'Association des producteurs francophones du Canada, les producteurs acadiens sont majoritaires.

La présidente: Et les gens de chez vous que vous allez chercher pour la production, est-ce qu'ils ont besoin de formation?

M. Turgeon: Oui.

La présidente: Vous les formez de quelle façon?

M. Turgeon: Avec des mentors qui souvent viennent de l'extérieur. Et puis ça fait partie de nos activités courantes. Annuellement, j'ai des ateliers de scénarisation, de réalisation, de direction-photo, de montage sonore. Quand il arrive de nouveaux équipements aussi. En ce moment, on a fait des stages donnés par un directeur photo sur le H.D., qui vient d'entrer. Oui, on est assez actif à ce niveau-là.

La présidente: Pour ce qui est de l'écriture des scénarios, avez-vous des gens chez vous qui peuvent les écrire? Devez- vous aller chercher de l'expertise ailleurs? Faites-vous une formation dans ce domaine aussi?

M. Turgeon: Oui, on fait une formation. Mais j'aimerais juste vous dire une petite anecdote. Que ce soit au primaire ou au secondaire, et pas seulement en Acadie, les gens écrivent avec des fautes rares.Que ce soit à Montréal, à Québec ou que ce soit à Moncton, on a des petits problèmes d'écriture de scénario. C'est général ça.

La présidente: Alors essentiellement, vous faites de la formation, vous suscitez l'imagination. Vous faites de la formation en l'écriture, la formation d'équipement technique, vous faites tout ce genre de choses là dans votre communauté?

M. Turgeon: C'est souvent par des concours. Comme en documentaire, on a un concours qui s'appelle: « Tremplin à l'extérieur du Québec », où l'on fait des courts-métrages documentaires. On en fait deux ou trois par année, mais le stage en écriture se donne auprès de six ou sept qu'on a choisi selon ce qu'ils nous ont envoyé; ils ont ensuite la formation en scénarisation et on en retire un à trois dépendant de ce qu'on a comme budget pour la production.

La présidente: Dans un an, vous rejoignez combien de vos personnes ici là? Que ce soit au sujet de la technique d'écriture de scénario, de production, combien de gens touchez-vous?

M. Turgeon: Une cinquantaine.

La présidente: Et c'est des jeunes dans la plupart des cas?

M. Turgeon: Oui. Même ici, j'ai mis sur pied un concours de deux ou trois ans. Cela a bien marché. C'était pour la relève. Pas pour la première oeuvre, mais pour la deuxième. On dit souvent ça au hockey, que c'est la deuxième saison qui est la plus difficile. On pense qu'en cinéma, ça peut arriver aussi que le deuxième film puisse être plus dur que le premier, ça fait qu'on l'avait fait pour les gens qui en étaient à la deuxième ou la troisième oeuvre.

La présidente: Ma dernière question, s'il n'y avait pas eu décentralisation, si vous n'aviez pas le Studio Acadie ici, est-ce que cela se passerait ainsi? Est-ce qu'il y aurait une cinquantaine de jeunes, d'Acadiens?

M. Turgeon: Non, je pense que le fait que ce soit décentralisé, c'est un plus, j'en suis convaincu.

La présidente: En termes de culture acadienne.

M. Turgeon: Oui. Et puis on fait beaucoup, beaucoup de coproduction. Je vous dirais que c'est quand même assez jeune la production indépendante en Acadie. Les gens qu'on forme en administration de production entre autres, et on a des stages aussi à Montréal. Cela fait dix ans qu'on en fait, et on a une petite idée de comment ça marche, alors on peut faire bénéficier notre savoir-faire aux maisons de production indépendantes.

Il y a un élément qui me tient personnellement à coeur, c'est qu'on a vu qu'il y a très peu de formation académique en matière de cinéma en Acadie, sauf je dirais en animation, il y a le collège communautaire qui donne des formations à Miramichi puis au collège de Tracadie, dans le coin de Tracadie-Sheila. J'ai essayé de mettre sur pied des programmes pour donner un coup de main dans le domaine de l'animation francophone typiquement acadienne parce que les jeunes qui sortent des écoles d'animation s'en vont automatiquement soit à Toronto ou Vancouver ou Los Angeles où la demande est forte. Alors, j'essaie de briser ça. Et puis là depuis trois ans, on produit une dizaine de courts films d'animation. On essaie de poursuivre, ce qui n'est pas évident là. C'est difficile, mais on essaie.

La présidente: Est-ce qu'il y a d'autres questions sénateurs? Je vous remercie beaucoup madame Leblanc et monsieur Turgeon d'avoir accepté de comparaître devant notre comité.

La séance est levée.


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