Délibérations du Sous-comité des Anciens combattants
Fascicule 3 - Témoignages du 6 février 2008
OTTAWA, le mercredi 5 mars 2008
Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 12 h 11, pour étudier les services et les avantages sociaux offerts aux membres des Forces canadiennes, aux anciens combattants, aux membres des missions de maintien de la paix et à leurs familles en reconnaissance des services rendus au Canada.
Le sénateur Joseph A. Day (vice-président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le vice-président : Bienvenue à la réunion du Sous-comité des anciens combattants. Nous sommes heureux d'accueillir aujourd'hui le ministre des Anciens Combattants, l'honorable Greg Thompson. Il vient faire part de son point de vue sur diverses questions touchant les anciens combattants au Canada. En particulier, nous espérons être éclairés par lui sur la mise en œuvre de la nouvelle Charte des anciens combattants, qui est entrée en vigueur en avril 2006, à la suite de l'adoption du projet de loi C-45, qui a suscité beaucoup d'activités ici même au comité. Le titre intégral du projet de loi était : Loi prévoyant des services, de l'assistance et des mesures d'indemnisation pour les militaires et vétérans des Forces canadiennes ou à leur égard et modifiant certaines lois.
La dernière fois où le ministre est venu témoigner devant le sous-comité, soit le 31 mai 2006, il a déclaré que la nouvelle Charte des anciens combattants « offre plutôt une nouvelle voie. Il s'agit d'un document qui vit et respire et qui évoluera en fonction des besoins changeants de nos anciens combattants et de leurs familles. » Cela fait maintenant deux ans et demi que la Charte s'applique. Or, il est raisonnable d'examiner la situation pour déterminer si sa mise en œuvre a été aussi efficace que le gouvernement l'entendait. Peut-être pouvons-nous nous pencher sur certaines des choses qu'il serait possible de faire pour l'améliorer.
Monsieur le ministre a d'abord été élu à la Chambre des communes en 1988. Puis, il a été réélu en 1997, en 2000, en 2004 et en 2006. Tout récemment, il a été porte-parole de son parti pour les affaires touchant l'Agence de promotion économique du Canada atlantique. Auparavant, il a été porte-parole pour les affaires touchant les comptes publics, la santé, le développement régional, le Conseil du Trésor et le développement des ressources humaines.
Le ministre est accompagné aujourd'hui de Mme Suzanne Tining, sous-ministre, Anciens Combattants Canada, ACC, et de Darragh Mogan, directeur général, Politiques sur les programmes et le service, Anciens Combattants Canada.
Monsieur le ministre, je vous demanderais de nous présenter votre déclaration liminaire. Ensuite, nous poserons des questions.
L'honorable Gregory Francis Thompson, C.P., député, ministre des Anciens Combattants : Merci. J'adore la façon dont les choses sont organisées ici; tous les sénateurs se trouvent du même côté.
J'aimerais de reconnaître la présence des gens qui m'accompagnent aujourd'hui et que vous avez présentés. M. Mogan et Mme Tining sont là pour me prêter main-forte.
Monsieur le président, en m'éloignant un peu du protocole, je soulignerai la présence, dans l'assistance, de représentants de la Légion royale canadienne : Jack Frost, le président national, Wilf Edmond, le premier vice-président national et Pierre Allard, directeur du Bureau d'entraide. Je les remercie d'être là parmi nous. Leur travail est important du point de vue des anciens combattants, comme vous le savez bien. Ils défendent ardemment les anciens combattants et nous viennent en aide, à moi et à mon personnel.
C'est un plaisir d'être ici avec vous, aujourd'hui, parmi un groupe de parlementaires qui ont sincèrement à cœur le bien-être des plus grands héros de notre nation.
J'aimerais commencer par vous lire un extrait d'un discours prononcé par le premier ministre britannique David Lloyd George, à peine quelques jours après la fin des hostilités de la Première Guerre mondiale : « En quoi consiste notre devoir? Faire en sorte que l'Angleterre soit un pays où il fait bon vivre pour nos héros. »
Quatre-vingt-dix ans plus tard, sa question et sa réponse sont plus pertinentes que jamais. En quoi consiste notre devoir? À faire en sorte que le Canada soit un pays où il fait bon vivre pour nos héros. C'est pourquoi nous sommes ici, aujourd'hui. Pour examiner ce que nous faisons en tant que pays pour prendre soin de ces valeureux hommes et femmes qui se sont toujours portés à la défense du Canada et pour les soutenir. Pour examiner comment nous honorons les hommes et les femmes qui défendent nos valeurs communes : liberté, démocratie et primauté du droit. C'est très simple; ça ne pourrait pas être plus simple.
Est-ce que nous, Canadiens, en faisons assez pour servir ceux et celles qui nous ont si bien servis? Voilà une question que nous pourrions nous poser. Chacun d'entre nous aura sa propre réponse à la question. Vous aurez vous-mêmes vos propres opinions là-dessus. Vous aurez vos propres opinions et, au cours des 90 prochaines minutes, nous allons certainement aborder à de nombreux égards la question de savoir ce que nous faisons pour nos anciens combattants et ce que nous devons faire encore. Nous sommes d'accord avec les organisations d'anciens combattants là-dessus : il y a encore du travail à faire.
Après tout, comme je le dis souvent, nous ne pourrons jamais en faire assez pour nos anciens combattants, nous ne pourrons jamais en faire assez pour rembourser l'immense dette que nous avons envers eux. Comment pourrions-nous un jour compenser entièrement ces hommes et ces femmes pour les sacrifices qu'ils ont consentis, pour leurs réalisations, pour le fait qu'ils aient accepté de renoncer à tout ce qui leur importait, à quitter leurs êtres chers, leur maison et leur carrière pour servir le Canada? Comment remercier les hommes et les femmes qui étaient prêts à risquer leur propre vie pour défendre notre mode de vie, et pour vous défendre, vous et moi?
C'est dans un esprit de grande humilité que nous entamons un tel débat. Tout le reste semble bien peu important en comparaison. Je dirais tout de même que notre gouvernement peut être fier de ce qu'il a accompli pour les anciens combattants. Je n'hésiterais pas à comparer notre bilan au terme de deux années seulement à celui de tout autre gouvernement dans l'histoire du Canada. Nous avons fait beaucoup de progrès en très peu de temps.
Permettez-moi de vous donner quelques exemples — comme nous le disons souvent, le geste parle mieux que la parole. En à peine deux ans et trois budgets, nous avons déjà réservé 1,6 milliard de dollars de plus pour servir nos anciens combattants, si on compare à ce qui était prévu dans le dernier budget du gouvernement précédent. C'est 1,6 milliard de dollars pour nos anciens combattants, pour leur famille, pour les programmes et services sur lesquels ils comptent. C'est 1,6 milliard de dollars pour mieux servir nos anciens combattants et reconnaître le service remarquable qu'ils ont rendu au pays.
Nous en avons abordé certains des aspects au moment de ma dernière comparution devant votre comité, et le président a rappelé cette date. Nous avons discuté à ce moment-là de la nouvelle Charte des anciens combattants que nous venions tout juste de mettre en œuvre et qui constituait la plus importante réforme des programmes et services pour anciens combattants en plus de 60 ans.
Aujourd'hui, nous pouvons qualifier de succès la mise en œuvre de la nouvelle Charte des anciens combattants depuis deux ans. Nous avons accordé plus de 6 000 indemnités d'invalidité, nous avons approuvé les demandes de services de réadaptation de plus de 1 800 clients — ce qui représente un taux d'approbation de 92 p. 100 — et plus de 1 500 membres des Forces canadiennes et membres de leur famille reçoivent des allocations pour perte de revenus. Nous les aidons ainsi à subvenir à leurs besoins durant le processus de transition.
Tels sont les buts principaux de la nouvelle Charte des anciens combattants, qui est adaptée aux réalités auxquelles font face nos anciens combattants de l'ère moderne. Ce sont des hommes et des femmes qui prennent leur retraite à un plus jeune âge et qui veulent entreprendre de nouvelles carrières valorisantes et productives, après leur carrière militaire. Cela comprend les hommes et les femmes qui ont été blessés, qu'il s'agisse de traumatismes physiques ou mentaux, et qui ne souhaitent rien de plus que de recouvrer la santé, de se remettre sur pied et de contribuer à l'essor de notre pays avec la même détermination que celle qui les a menés à servir dans les forces militaires.
C'est ce que permet d'accomplir la nouvelle Charte des anciens combattants. Il faut encore la peaufiner, mais, comme je l'ai dit la dernière fois, il s'agit d'un « document évolutif. » Un livre ouvert qui évolue en fonction des besoins de nos anciens combattants et de leur famille.
L'un des besoins les plus urgents de nos anciens combattants a trait aux troubles mentaux qui surviennent dans un contexte de combat ou de missions dangereuses ou stressantes. Les souffrances psychologiques inhérentes à leur service sont bien réelles. Elles sont dévastatrices, et tout autant pour les familles de nos anciens combattants qui s'efforcent de composer avec les souffrances que leurs êtres chers ont endurées.
Nous devons nous dévouer à la cause de ces anciens combattants et de leur famille de la même façon qu'ils se sont dévoués, eux, à leurs missions — soit toujours à 100 p. 100. Nous ne pouvons pas demander à des hommes et à des femmes d'aller servir outre-mer sans qu'ils sachent, instinctivement, que nous serons là pour eux lorsqu'ils auront besoin de nous.
La nouvelle Charte des anciens combattants nous aide en ce sens. Par elle, nous les rassurons sur le fait qu'ils auront, eux et leurs êtres chers, tout le soutien voulu. Nous prenons les mesures nécessaires pour composer avec la forte augmentation du nombre de cas de traumatismes liés au stress opérationnel. C'est pourquoi nous allons doubler le nombre de cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel — les cliniques de traitement des TSO comme nous les appelons souvent. Elles exercent leurs activités à l'échelle du pays.
Nous voulons offrir à nos hommes et à nos femmes les soins dont ils ont besoin, et nous voulons qu'ils sachent que nous sommes là pour les aider et qu'ils n'ont pas à souffrir en silence. De même, nous parvenons de mieux en mieux à faire comprendre aux gens ce qu'ils vivent peut-être et à leur faire savoir qu'ils ne sont pas seuls. Nous sommes là à leurs côtés.
Il y a un nouveau programme en particulier qui donne d'excellents résultats. Il porte le nom de Programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel, ou SSVSO, et son fonctionnement est assuré conjointement par nous et par le ministère de la Défense nationale. Le titre est long, mais les objectifs sont clairs et efficaces. Il vise à aider les soldats à composer avec les traumatismes liés au stress opérationnel en ayant recours à des conseillers qui sont leurs pairs. Nos conseillers ont souffert eux aussi de troubles de santé mentale lié au service. Ils font ici cause commune. Ce sont des hommes et des femmes qui comprennent l'impact tragique de maladies comme le syndrome de stress post-traumatique et qui peuvent offrir des séances de counselling individuelles ou en groupe.
Nous savons que ce programme est nécessaire et nous savons qu'il fonctionne. On le constate à la lecture d'un nouveau livre écrit par le capitaine Fred Doucette, du Nouveau-Brunswick, qui a servi en tant que casque bleu de l'ONU en Bosnie. Dans Empty Casing, M. Doucette relate sans complaisance son expérience de casque bleu. Il parle aussi du SSPT, de flashs-back douloureux et d'apparence bien réelle, des cauchemars et de la colère qui l'ont transformé et ont fait de lui, à maints égards, un être vide. D'où le titre, Empty Casing, qui évoque une douille vide.
Le récit souvent sombre de M. Doucette fait au moins voir que, selon lui, le SSVSO représente une « grosse différence » dans la vie de nos soldats et de nos anciens combattants. Comme il a pu le dire récemment à l'Ottawa Citizen, il observe une nouvelle attitude dans les hautes sphères d'Anciens Combattants Canada et du ministère de la Défense nationale, le MDN. « J'ai vu des changements impressionnants », a-t-il dit. Vous verrez d'autres changements et d'autres améliorations. En ce moment même, nous assurons la formation d'autres coordonnateurs en matière de SSVSO et ajoutons du personnel aux bureaux de district d'Anciens Combattants Canada. Le MDN fait de même. Nous faisons en sorte que les services de traitement soient plus efficaces et plus facilement accessibles. Nous ferons d'autres annonces au cours des mois à venir.
Du même coup, nous assurons une présence accrue d'Anciens Combattants Canada et de nos bases des Forces canadiennes. Nous travaillons plus que jamais en étroite collaboration avec le ministère de la Défense nationale, car nous voulons assurer une transition en douceur des membres des Forces canadiennes, les FC, qui quittent la vie militaire et recourent à nos programmes. Il s'agit d'une nouvelle approche qui se fait attendre depuis longtemps.
Récemment, nous avons vu un tableau en couleur portant sur le processus de passage des membres des FC en voie d'être libérés du MDN à Anciens Combattants Canada. L'enchevêtrement de flèches et de lignes explique pourquoi certains anciens combattants ne parviennent pas à obtenir l'aide qui est offerte. J'ai vu le tableau de mes propres yeux. Je n'y comprends rien.
Nous devons simplifier le processus, le rendre plus facile à comprendre et éliminer les trous. Nos anciens combattants ont déjà enduré plus que leur part de difficultés. Au moment d'enlever l'uniforme canadien pour la dernière fois, ils ont consenti assez de sacrifices. C'est à notre tour de les servir.
Pour cela, au cours de la dernière année, nous avons mis en œuvre deux mesures importantes. Il y a d'abord eu la Déclaration des droits des anciens combattants. C'est une chose que les anciens combattants demandaient au gouvernement depuis quatre décennies. C'est une chose que nous avions promise lors de la dernière élection, une chose à laquelle notre gouvernement a donné suite. La Déclaration des droits des anciens combattants garantit à nos anciens combattants que leur gouvernement fédéral les traitera avec respect, dignité, équité et courtoisie. La Déclaration prévoit qu'ils recevront de l'information claire et facile à comprendre à propos des programmes fédéraux qui leur sont offerts et qu'ils recevront tous les avantages et services auxquels ils ont droit — et qu'ils ont mérités.
Pour nous assurer que tout cela se concrétise, nous avons nommé un ombudsman des Anciens combattants, comme promis. En faisant du colonel Pat Stogran le premier ombudsman des anciens combattants au Canada, nous avons choisi quelqu'un qui est capable de défendre avec fermeté nos anciens combattants. Il est déterminé à les défendre et il comprend leurs besoins et les questions qui les touchent. Après tout, le colonel Stogran est lui-même un ancien combattant.
Ensemble, la Déclaration des droits des anciens combattants et la fonction d'ombudsman des anciens combattants font figure de percées. Ce sont deux grandes réalisations pour nos anciens combattants; nous devrions en être fiers. Elles montrent que nous savons allier un geste sans équivoque à la parole.
Avant de terminer, j'aimerais aborder brièvement quelques autres réalisations dignes de mention. La première est la décision que nous avons prise à propos des essais effectués avec l'agent Orange sur la BFC de Gagetown au cours des été de 1966 et de 1967. Rares sont les tâches qui sont aussi difficiles ou si complexes que celle qui consiste à démêler et comprendre ce qui s'est passé à Gagetown il y a 40 ans. À bien des égards, je comprends pourquoi les gouvernements précédents, de toutes allégeances, n'ont pas agi. C'est une question compliquée et controversée qui évoque une mission où des civils ou des militaires à la fois ont été mis à contribution. Une question que le temps et la distance viennent obscurcir.
J'ai souvent comparé la question de l'agent Orange à un casse-tête que l'on pourrait trouver dans le grenier de sa grand-mère et dont certaines pièces manquent ou sont disparues, et on ne pourra jamais voir l'image au complet. Cependant, on ne peut se servir de cette excuse pour refuser d'agir. Nous avons trouvé une façon juste et bienveillante de régler un problème de longue date. Grâce à un programme de 96,5 millions de dollars, à titre gracieux, nous versons une indemnité de 20 000 $ à quiconque a vécu ou suivi un entraînement à la base en question ou encore vivait dans un périmètre de cinq kilomètres de celle-ci au cours des étés de 1966 ou 1967. Le seul autre critère d'admissibilité auquel il faut répondre, c'est d'avoir fait l'objet du diagnostic de l'une des 12 affections pouvant être liées à une exposition à l'agent Orange selon l'Institute of Medicine de la National Academy of Sciences aux États-Unis.
C'est la chose à faire. Bien que nous sachions que la base est sûre et que les essais réalisés avec l'agent Orange n'ont aucun effet à long terme sur la santé, nous savons aussi que, 40 ans plus tard, il subsiste une forme d'incertitude quant à ce qui s'est passé à l'époque. Quarante ans plus tard, de bonnes gens ont perdu la chance de faire la démonstration du tort que cela a pu leur causer. Nous nous en rendons compte et nous avons agi. À la fin du mois dernier, plus de 700 demandes d'indemnisation de 20 000 $ avaient été approuvées.
J'aurais d'autres observations à ajouter. La semaine dernière, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a déposé un troisième budget comprenant 282 millions de dollars sur trois ans pour l'élargissement des critères d'admissibilité au Programme pour l'autonomie des anciens combattants, à l'intention de plus de 12 000 survivants d'anciens combattants. C'est une bonne nouvelle pour les veuves de nos anciens combattants qui, dans certains cas, ont attendu plus de 25 ans avant de recevoir cette forme d'aide à l'autonomie à domicile. Le volet annoncé permet de venir en aide aux survivants qui en ont le plus besoin et qui peuvent le moins se le permettre. Nous allons verser à ces survivants invalides ou à faible revenu jusqu'à 2 400 $ pour les frais d'entretien ménager et de terrain — afin qu'ils puissent jouir de la qualité de vie qu'ils méritent. C'est une question de respect. Une façon de les remercier de ce qu'ils ont fait.
Cela m'amène au dernier volet de ma déclaration liminaire, soit la juste façon de rendre hommage à nos anciens combattants et à leur famille. Au cours des deux premières années de notre mandat, nous avons multiplié les gestes afin de rappeler le souvenir de leurs sacrifices et de leurs réalisations. Nous avons fait en sorte — en intensifiant les mesures de sécurité et en assurant une présence cérémonielle — de maintenir l'intégrité de notre Monument commémoratif de guerre du Canada et de la tombe du Soldat inconnu, et nous avons fait en sorte que le mémorial du Canada, à Green Park, à Londres, en Angleterre, demeure un hommage digne de nos anciens combattants. Nous avons aussi assuré un financement stable du centre Juno Beach, en France. De même, nous avons dirigé des délégations de Canadiens outre-mer pour marquer des anniversaires spéciaux à Vimy, Passchendaele, Beaumont-Hamel et Dieppe.
Nous avons tenu de nombreuses cérémonies au Canada même pour perpétuer le souvenir des efforts de ceux qui sont prêts à donner leur vie pour leur pays et pour rappeler aux Canadiens à quel point nous sommes choyés de vivre dans ce pays-là — le meilleur au monde. Cette année, nous allons célébrer trois autres anniversaires d'importance. L'année 2008 nous permettra de rappeler aux Canadiens nos trois principaux exploits militaires. Nous marquerons le 90e anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale, le 65e anniversaire de la bataille de l'Atlantique et le 55e anniversaire du cessez-le-feu en Corée. Nous comptons en outre célébrer la première Journée nationale des Casques bleus cette année. Cela couvre pratiquement toute notre histoire militaire en une seule année.
À chacune de ces occasions, nous aidons les nouvelles générations de Canadiens à comprendre le grand passé qu'est le nôtre et à comprendre que la grandeur de notre pays, nous la devons à des hommes et à des femmes ordinaires qui ont accompli des choses extraordinaires. Ce sont des hommes et des femmes qui continuent d'accomplir des choses extraordinaires au service du Canada.
Tel est le grand héritage que l'on nous a légué. La tradition qui nous a été transmise par ce que nous appelons nos plus grandes générations. C'est une histoire, un héritage qui comporte des responsabilités que nous devons assumer. Nous avons un devoir sacré envers nos militaires, soit celui de ne jamais oublier la dette que nous avons envers eux et celui de nous engager à apporter notre soutien à ceux qui portent l'uniforme. Telle est notre mission à nous.
C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui, pour faire en sorte que le Canada soit un pays où il fait bon vivre pour nos héros. N'oublions jamais.
Le vice-président : Merci de nous avoir présenté cet exposé, monsieur le ministre. Toutes les personnes ici réunies, quel que soit le parti politique qu'elles représentent, appuient sans réserve les points que vous avez fait valoir.
Nous apprécions la coopération que nous donne votre ministère. Nous l'avons dit à bon nombre de reprises : le travail que vous faites au Cabinet, ministre des Anciens Combattants, est le meilleur qui puisse se trouver. J'espère que votre sous-ministre, Mme Tining, en fera part aux gens là-bas. Nous l'avons déjà dit, nous allons continuer à le dire. Il faut souligner le travail que vous faites au nom de nos anciens combattants ici au Canada comme ailleurs.
Le premier sénateur dont le nom figure sur ma liste de questionneurs est le sénateur Downe de l'Île-du-Prince-Édouard.
Le sénateur Downe : Merci, monsieur le ministre, d'avoir présenté un exposé détaillé; tout de même, vous avez fait deux omissions qui me préoccupent. Premièrement, pourriez-vous faire le point sur l'examen des services de santé pour anciens combattants, au profit du comité? L'an dernier, des responsables de votre ministère ont comparu devant le comité et affirmé que le ministère allait pouvoir bientôt proposer des options au gouvernement. Pourriez-vous faire le point sur cet examen?
M. Thompson : L'examen est à peu près achevé. Il nous fera voir comment nous allons pouvoir fournir les services à nos anciens combattants à l'avenir. Nous aimerions passer à un système fondé sur les besoins, plutôt que sur des droits.
Si vous regardez notre clientèle aujourd'hui, vous verrez pourquoi cela devrait se faire et pourquoi nous nous engageons dans cette voie. Si vous regardez la manière dont les services sont fournis dans le contexte de la nouvelle Charte des anciens combattants, vous verrez que nous avons déjà adopté cette façon de penser au ministère : c'est tout à fait un système fondé sur les besoins, plutôt qu'un système fondé sur des droits.
C'est une voie dans laquelle nous allons continuer à faire du chemin, mais une partie du travail que nous effectuons aujourd'hui en découle déjà. Ce n'est pas un chemin dont je dirais que nous allons le prendre à l'avenir; nous y sommes déjà.
De même, au sein du ministère, avec les fonds que nous avons, nous croyons pouvoir en faire davantage à l'interne pour progresser dans cette voie, sans modifications législatives ou réglementaires. Il s'agit de se concentrer sur l'idée de mieux servir les anciens combattants compte tenu de ce qu'ont pu nous dire tous les gens qui ont participé à la démarche, y compris le milieu des anciens combattants lui-même, car c'est une chose qui le préoccupe.
Si on songe à l'ancien combattant vieillissant, on s'aperçoit que les soldats de la Seconde Guerre mondiale sont tous octogénaires aujourd'hui, sinon nonagénaires dans certains cas. Comme vous le savez bien, nous en perdons environ 30 000 par année. La semaine dernière, M. Frost m'a dit que cela donnait environ 70 personnes par jour.
Ils arrivent à un moment de leur vie où ils ont besoin des services dont il est question. Nous devons trouver toutes les façons possibles, à l'intérieur des structures que nous avons conçues pour progresser, pour nous assurer qu'ils obtiennent l'aide en question dans les derniers jours de leur vie. Nous faisons quelques progrès à cet égard.
Le sénateur Downe : Si j'ai bien compris le témoignage des responsables de votre ministère l'an dernier, ils devaient formuler des recommandations à l'intention du gouvernement. Le gouvernement a-t-il reçu ces recommandations?
M. Thompson : Je connais la plupart de ces recommandations. Cela me ramène à ma réponse précédente : il s'agit de connaître ces recommandations et de progresser à l'interne, au sein du ministère, afin de reconnaître certaines d'entre elles.
Le sénateur Downe : Votre deuxième omission, et c'est une chose que notre comité étudiera, a trait aux plaintes que nous avons entendues au sujet du Régime d'assurance-revenu militaire (RARM). Quelle est la position de votre gouvernement sur l'idée de déduire du programme d'invalidité à long terme pour anciens combattants les indemnités pour douleurs et souffrances?
M. Thompson : Cette question-là est presque aussi vieille que le Parlement lui-même. C'est une question que de nombreux députés ont soulevée auprès de nombreux gouvernements, libéraux et conservateurs, pour que le programme soit modifié. Essentiellement, vous évoquez une chose que personne n'apprécie en politique — la disposition de récupération.
Il y a plusieurs raisons pour lesquelles il est difficile de progresser sur ce front. Premièrement, il faudrait rajuster le tir en amont. Cela supposerait une restructuration non seulement aux Anciens combattants, mais aussi au sein de tous les organismes gouvernementaux qui se trouvent au pays.
C'est une pratique qui est depuis longtemps établie. Il est difficile de faire valoir publiquement un tel raisonnement. On dit : « Pourquoi faudrait-il m'enlever cela? Je suis invalide; je devrais donc avoir cette petite indemnité de plus. »
Il y a par ailleurs les principes même du programme — et c'est peut-être une question pratique aussi. Certains acteurs du domaine de l'assurance feront valoir que, dans la mesure où vous faites en sorte qu'une invalidité devient lucrative, il en résulte une pression descendante sur le programme dans son ensemble. On pourrait avancer qu'il y a une indemnité qui s'ajoute à ce qu'on a cotisé pour le fait de savoir que, à la fin de sa vie, il y aura ce régime. La disposition de récupération existe donc et aurait à être adaptée — de fait, pour l'ensemble des ministères, le coût d'un tel rajustement se chiffrerait dans les milliards de dollars.
Si j'essayais de faire croire à quiconque que nous allons modifier cela, je ne dirais pas la vérité. Je doute que notre gouvernement change jamais cela, sachant ce que nous savons et sachant ce qu'ont fait les gouvernements passés et ce que feront les futurs gouvernements. Il faudrait refaire de fond en comble le régime entier pour qu'un tel changement puisse être apporté. Ce serait trop coûteux.
Le sénateur Downe : J'apprécie votre réponse. Comme je l'ai dit, notre comité va se pencher sur cette question et vous proposera probablement certaines recommandations à cet égard.
Vous avez parlé du Programme pour l'autonomie des anciens combattants et de l'élargissement des critères qui aura pour effet de couvrir 12 000 Canadiens de plus. Ce dont se plaignent les anciens combattants auprès de moi, c'est que, avant l'élection, celui qui était leader de l'opposition à l'époque avait promis une mesure qui aurait pour effet de couvrir tous les conjoints des soldats ayant combattu pendant la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée — autrement dit, 150 000 personnes au Canada. Il en manque donc 138 000. Peut-on espérer que ces personnes soient couvertes un jour?
M. Thompson : Il y a toujours de l'espoir. Le Programme pour l'autonomie des anciens combattants fonctionne vraiment. Il permet aux anciens combattants de demeurer à la maison plus longtemps qu'ils seraient en mesure de le faire normalement et il prévoit également des soins de longue durée pour les anciens combattants.
Vous voyez juste avec le plus grand des deux chiffres que vous avez donnés — avec ce qu'il faudrait pour que ces gens soient couverts. D'après les modifications que nous avons présentées la semaine dernière ou ce qui a été annoncé dans le budget, il y aurait aujourd'hui 30 000 personnes de plus qui bénéficient du programme, en comparaison avec la situation il y a deux ans. À elle seule, cette modification supplémentaire fera que 12 000 à 15 000 veuves environ entreront dans le système.
Ça profiterait aux personnes qui, selon nos recherches, en ont besoin le plus et n'ont pas les moyens de se le procurer. Le nombre le plus grand des deux que vous avez donnés correspond au nombre de personnes qui ont vraiment besoin de cela. Par exemple, toute veuve recevant le Supplément de revenu garanti serait immédiatement admissible à cela. Sinon, si la veuve en question touche déjà un crédit d'impôt pour personnes handicapées, elle serait aussi admissible. Nous ciblons le groupe des veuves qui a le plus besoin d'aide.
Le sénateur Downe : Lorsque j'ai écrit à votre bureau à propos d'anciens combattants qui communiquent avec moi au sujet de l'agent Orange et du programme d'indemnisation, vous avez répondu rapidement et organisé une séance d'information avec Wes McLean, de votre bureau politique, et Garry Doyle, du ministère des Anciens Combattants. La séance s'est révélée très utile. J'ai refilé les informations qu'on m'a données aux anciens combattants en question, qui les ont trouvées très utiles eux aussi.
Le PAAC soulève une préoccupation semblable. Au cours de la dernière élection, celui qui était alors leader de l'opposition, et qui est aujourd'hui premier ministre, a promis d'indemniser tous ceux qui ont été touchés entre 1956 et 1984. Vous comprendrez pourquoi les anciens combattants sont déçus de savoir que la maladie dont ils souffrent maintenant, et dont ils pensent qu'elle pourrait être liée au séjour qu'ils ont fait à titre de militaire à la BFC de Gagetown, n'est pas couverte. Est-il possible que le programme d'indemnisation soit revu?
M. Thompson : Nous nous en sommes tenus à la période allant de 1956 à 1984. Il est question d'herbicides et de défoliants non homologués et non autorisés. Nous l'avons dit clairement au moment de l'annonce. Nous avons précisé la période applicable et nous avons respecté l'engagement pris.
Nous avons choisi les herbicides non homologués et non autorisés parce qu'il y avait les entreprises d'exploitation forestière, les exploitations agricoles, la Société d'énergie du Nouveau-Brunswick et d'autres encore qui utilisaient les herbicides. De fait, à l'époque, il y avait également un programme d'épandage d'herbicides pour lutter contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette au Nouveau-Brunswick. Ça ne pouvait donc porter que sur les défoliants non homologués et non autorisés. C'est la mission d'enquête organisée par le gouvernement précédent qui a établi cela, ce que nous avons respecté. Elle a établi que l'agent Orange était le seul défoliant non homologué et non enregistré à avoir été utilisé. Nous avons honoré cet engagement, nous nous y sommes tenus. Nous avons honoré le groupe de travail qui a été mis sur pied par le gouvernement précédent, et qui avait l'appui d'Andy Scott et de Bill Graham à l'époque. M. Scott était le député à côté de moi. C'était le ministre ayant la responsabilité première de l'établissement de ce groupe du côté du Nouveau-Brunswick.
Le Dr Dennis Furlong a fait sa découverte, qui découlait de travaux approfondis qui ont très bien été menés. Nous n'avons nullement critiqué son travail; nous l'avons simplement laissé œuvrer. Lorsque nous avons conçu le programme, sénateur, nous sommes allés bien au-delà des recommandations du Dr Furlong. Je crois que nous avons fait un bon travail et, comme je l'ai dit, quand on attend 40 à 50 ans pour essayer de régler un problème, ça devient vraiment difficile, étant donné que, rendu là, il y a habituellement des éléments d'information qui ne se trouvent plus. Nous avons adopté une mesure à la fois équitable et généreuse. Je ne crois pas que nous ayons pu faire mieux. Je ne sais pas si le programme obtiendrait la note de 8 sur 10 ou encore un 5 sur 10, mais, pour les familles touchées, c'est à peu près 80 p. 100. Nous ne pouvons faire mieux que cela, et je suis heureux du résultat. L'opposition à la Chambre des communes a appuyé notre façon de procéder.
Le sénateur Downe : J'ai une dernière question. S'il y a un deuxième tour, j'aurai d'autres questions à propos du budget supplémentaire des dépenses.
Il y a là un élément de désaccord, monsieur le ministre. Les anciens combattants ont entendu celui qui est aujourd'hui premier ministre et qui était alors chef de l'opposition, Stephen Harper, tenir les propos suivants à Woodstock, au Nouveau-Brunswick, le 11 janvier 2006 :
Notre gouvernement veillera à indemniser pleinement et équitablement les personnes exposées au défoliant qui a été pulvérisé de 1956 à 1984. Nous divulguerons aux militaires et aux civils toute l'information relative à cette pulvérisation et nous financerons les examens médicaux de quiconque pourrait y avoir été exposé.
Les anciens combattants l'ont entendu dire cela, et vous y étiez peut-être, monsieur le ministre.
M. Thompson : Je me trouvais dans la même pièce pour une raison ou une autre, mais je ne me souviens pas très bien de la raison.
Le sénateur Downe : On a laissé croire aux anciens combattants qu'ils seraient indemnisés, mais, maintenant, et c'est là que réside l'élément de désaccord, qui est dû à la période limitée qui s'applique, il y a une différence. D'autres personnes ont peut-être des observations à formuler; je vais donc m'arrêter là.
Le sénateur Dallaire : J'aimerais passer des questions commémoratives à la question des activités et des besoins actuels. Premièrement, du côté commémoratif, je tiens à profiter de l'occasion pour féliciter le ministère des Anciens Combattants à propos du monument commémoratif de Vimy. Je vous remercie en particulier de la réaction que vous avez eue et des commentaires formulés dans les médias, et j'ai participé à la traduction en français, et de la vitesse à laquelle tout ça a été réglé. On a éliminé l'attitude qui semblait être projetée, soit que la langue française n'était pas aussi importante que la langue anglaise. Certes, cette attitude semble avoir été éliminée au sein de votre ministère.
Je siège au comité consultatif de la conservation du monument commémoratif de Vimy. Récemment, à une réunion, nous avons applaudi la qualité du travail accompli et discuté d'un plan d'entretien du monument ainsi que des coûts d'entretien et de fonctionnement. J'applaudis le fait que vous êtes à étudier l'étape 2 du projet de restauration du monument de Vimy en ce qui concerne le terrain et la proposition à venir à ce sujet. Le plan en question est de tout premier ordre. Ayant servi sur les lieux, et y ayant paradé et ayant visité l'endroit, je crois que la deuxième étape transformera la nature même du monument, qui ne sera plus un simple monument. Ce sera un site à proprement parler, où les gens pourront saisir l'énormité de la bataille, les sacrifices consentis et la signification globale de l'affaire. L'étape 2 donnera un souffle de vie au monument, qui ne sera plus un simple monument commémoratif; il sera interactif. J'espère que l'étape 2 sera financée. Peut-être que ce sera votre projet du 100e anniversaire en 2017, si nous devons attendre jusque là.
L'idée de souligner la bataille de Vimy ici à la maison a été soulevée. Cela ne veut pas dire qu'on construirait un autre monument ici. Il s'agirait plutôt de trouver une façon de souligner la bataille ici, pour que nous n'ayons pas à nous rendre à Vimy pour vivre l'expérience. Il serait peut-être utile de mettre sur pied un petit groupe chargé de travailler en fonction de l'année 2017, qui marquera le 150e anniversaire du pays en même temps, et établirait un lien concret et significatif. Ce ne serait pas nécessairement une reproduction du monument existant, mais il faudrait que ce soit quelque chose d'énorme pour que nous ayons l'impression de bien vivre l'expérience ici.
Je vais terminer en posant la question suivante : pour ce qui est de la tombe du Soldat inconnu, devrait-elle recevoir l'équivalent canadien de la Croix de Victoria? Il faudrait l'envisager. Ayant servi moi-même, je peux vous dire qu'il existe de nombreuses occasions où les soldats posent des actes de courage extraordinaires sans que cela ne soit consigné parce que l'officier n'était pas présent pour observer la chose, parce qu'il a été tué, parce qu'il a été muté ailleurs ou qu'il n'a simplement pas eu le temps de le noter officiellement. Ce serait une façon de reconnaître les centaines de milliers d'actes de bravoure posés par bon nombre de ces soldats, mais qui n'ont jamais été consignés.
J'aborderai maintenant la question du budget. Ma question porte sur le trouble de stress post-traumatique. Il y aura des manifestations qui seront organisées à propos de la mise en œuvre de cet élément du rapport Kirby. Serait-il possible que le centre Sainte-Anne-de-Bellevue à Montréal devienne une clinique ou un institut qui se spécialise dans le SSPT, l'enseignement, la recherche et le développement, avec des lits réservés aux patients souffrant de SSPT? Est-ce que vous envisageriez cela pour l'hôpital Sainte-Anne et en ce qui concerne le rapport du sénateur Kirby?
M. Thompson : J'apprécie les observations que vous faites au sujet de Vimy et de ce que nous pouvons faire dans le cas de la Tombe du Soldat inconnu. Du côté des distinctions et des monuments commémoratifs, c'est important parce que tout est lié, n'est-ce pas?
L'événement organisé à la crête de Vimy était merveilleux. Nous avons parlé de la façon de procéder pour faire perdurer le souvenir. Il y a 5 000 étudiants qui ont défilé sur la colline. Je vais me garder d'en dire trop : vous êtes très favorable aux mesures que nous adoptons du point de vue de la commémoration, mais nous devons faire mieux et travailler en plus étroite collaboration avec nos écoles et nos jeunes, pour nous assurer que ces derniers comprennent notre histoire et les grands sacrifices consentis par tant de personnes.
Dans une autre vie, il y a plus de 38 ans, j'enseignais l'histoire à l'école. Nous faisions un travail exécrable. Nous n'avions pas les aides didactiques qu'il y a aujourd'hui. Les écoles et bon nombre des enseignants font un travail qui est nettement meilleur aujourd'hui qu'il ne l'a jamais été. Nous les appuyons à certains égards — pas tous, car, au bout du compte, il appartient à l'enseignant lui-même de décider à quoi il va s'attacher et quel élément du programme d'études sera mis en valeur.
De manière générale, tout de même, nous faisons un meilleur travail, et ça ressort par exemple dans le cas de Vimy.
Espérons que nous serons tous là en 2017. Je ne suis pas sûr d'être encore ministre à ce moment-là, mais j'espère être en bonne santé, et nous pourrons nous y rendre ensemble.
Pour ce qui est des budgets, nous avons réservé 100 millions de dollars en prenant pour référence le rapport du sénateur Kirby. L'argent sera réparti entre cinq centres au pays. Anciens combattants s'attend à collaborer étroitement à ce dossier, car, comme vous le savez bien, vous êtes parmi ceux qui m'ont signalé la question après mon assermentation. Voilà une question où vous pouvez parler d'expérience. Vous comprenez que nos soldats et nos anciens combattants sont si nombreux à souffrir en silence. Je me souviens que vous me racontiez que, lorsque vous étiez jeune homme, à Montréal, vous alliez à la Légion avec votre père et que cela avait un effet profond sur vous.
Nous appuyons tout à fait l'hôpital Sainte-Anne et ce qu'on y fait. Essentiellement, c'est le bijou de notre organisation du point de vue du traitement du trouble de stress post-traumatique. On y établit les bons modèles et on y fait une recherche de premier ordre. Nous allons continuer à insister sur le financement de cet hôpital.
Le sénateur Dallaire : Vous avez cinq cliniques. Il est à espérer que vous envisagez d'y installer des lits pour les soins critiques immédiats que nous avons indiqués comme étant nécessaires, car, dans les 10 cliniques en ce moment, c'est un besoin qui est réel.
Pour ce qui est de Sainte-Anne, je veux signaler qu'il nous a fallu presque 12 ans pour relancer un programme décent après que la guerre froide eut pris fin, avec des milliers et des milliers d'anciens combattants de la nouvelle génération qui ne recevaient pas de service parce qu'il fallait s'adapter à la nouvelle exigence. Nous avons perdu les compétences parce que nous étions en temps de paix depuis 45 ans. Si jamais nous revenons à la paix, sans un institut qui fait de la R-D et de l'enseignement, il y aura plus de pertes, car ce sera un problème qui appartient au passé et que nous allons abandonner. C'est seulement en créant un tel institut que vous allez garantir que le continuum est là. J'espère qu'on le percevra ainsi; que c'est une chose qu'il faut non seulement aujourd'hui, mais aussi à l'avenir.
Le budget prévoit également une chose que je trouve très intéressante : le renforcement des partenariats avec les Canadiens de souche autochtone. Est-ce lié au ministère des Affaires indiennes et du Nord ou encore est-ce une initiative distincte? À quel rythme progresse vraiment cet instrument qui touche nos Autochtones? Comme je siège à ce comité et que je vois des anciens combattants autochtones et que je souhaite qu'on recrute davantage d'Autochtones, ce serait là un élément capital. Nous ne semblons pas recevoir d'information à ce sujet.
M. Thompson : Nous allons devoir vous fournir davantage de renseignements sur ce que nous faisons, à vous et à vos collègues. J'ai rencontré des anciens combattants autochtones à plusieurs occasions. Ils ont encore un certain nombre de questions à soulever. Entre nous, soyons francs, ils ont des questions à régler. Nous avons cassé la croûte tout juste avant Noël. Ils sont venus de toutes les régions du Canada.
Essentiellement, nous avons passé en revue certaines des questions qui se posent, et je leur ai dit, pendant une discussion honnête que nous avons eue, que, à mon avis, nous pouvons progresser rapidement dans certains des dossiers, mais que d'autres posent davantage de difficultés. Nous sommes à cerner les dossiers où nous pouvons progresser rapidement tout en gardant dans notre mire ceux qui sont plus difficiles. De nombreux Autochtones sont d'avis que les indemnités de rétablissement offertes après la Seconde Guerre mondiale n'ont pas été expliquées correctement et qu'il y a à leur sujet certains problèmes. C'est un des grands dossiers auxquels il faut s'attacher.
En dernière analyse, ils savent que nous sommes sincères et que nous cherchons à régler certains des problèmes au fur et à mesure que nous y sommes confrontés. Dans chacun de mes discours, je n'omets jamais de dire que nous ne pouvons tout réaliser en deux ou trois ans, mais nous faisons des progrès et nous allons sincèrement continuer à travailler avec la communauté autochtone à voir si nous pouvons régler certaines des questions qui restent en suspens.
Le sénateur Dallaire : À titre d'exemple, étant donné l'intérêt toujours plus grand qui est porté à l'Arctique et à l'idée de faire des Rangers canadiens une force permanente plutôt qu'une force à temps partiel, et l'idée de faire appel aux Premières nations, il vous faudra un nouveau processus qui permettra de répondre à cette exigence. Car il s'agira des anciens combattants de la nouvelle génération, avec les difficultés dont il est question là.
Comme vous avez affaire à des êtres humains, vous devez être parfait. À l'inverse de celui qui cherche une aubaine au magasin, vous devez être parfait; si vous ne l'êtes pas, vous en êtes tenu responsable. De ce fait, il y a toujours une pression qui s'exerce sur vous pour que vous en fassiez beaucoup plus.
Cela m'amène à la prochaine question : les soldats qui se font tuer. Ils sont là, sur le champ de bataille. Leur conjoint reçoit une somme forfaitaire. Par contre, si le soldat est célibataire, la famille ne reçoit rien. Bon nombre de nos membres de la réserve sont célibataires. Bon nombre de vos anciens combattants de la nouvelle génération seront célibataires parce qu'ils arrivent à peine dans l'armée et que nous allons les envoyer outre-mer dans une année ou deux, et ils seront encore célibataires à ce moment-là. C'est quelque chose qui ne semble pas très bien aller. Les familles ont pris soin de leur enfant, et elles l'envoient au moment où il est encore célibataire. La famille doit continuer à vivre avec ce sacrifice et elle ne reçoit aucune indemnité pour cela. Il doit y avoir un meilleur équilibre — quelque chose qui se situe entre 250 000 $ et rien. Il y a une marge qui permettrait que la famille touche quelque chose pour qu'on vienne en aide aux frères et sœurs et qu'ils puissent vivre avec la perte subie. Pourrait-on envisager cela?
M. Thompson : Merci, général. Vous avez une merveilleuse mémoire institutionnelle. C'est une question qui s'est présentée, une question délicate. Vous avez absolument raison de la présenter de cette façon. L'indemnité forfaitaire libre d'impôt de 250 000 $ s'adressait par la loi aux personnes à charge, aux enfants et aux conjoints ou partenaires. Dans certains des cas, il s'agissait d'un jeune homme ou d'une jeune femme qui n'était pas marié et qui n'avait pas d'enfants. À ce moment-là, l'indemnité n'est pas versée à la mère ou au père. Il n'y a pas de bénéficiaire qui puisse être désigné. De par la loi, c'est prévu pour les conjoints et les personnes à charge.
C'est une question importante. J'y étais sensible au moment de devenir ministre. De fait, vous et moi avons eu une conversation dans mon bureau. Tous les partis ont appuyé la charte. Essentiellement, la charte a été adoptée en une journée, sans aucun débat, à la Chambre des communes. Les gens se sont entendus pour dire que la charte était une bonne chose; elle a obtenu l'appui de tous les politiciens, tous les partis, tous les groupes d'anciens combattants, toutes les associations et ainsi de suite. La nouvelle charte des anciens combattants n'a été mise en œuvre qu'une fois que nous avons pris le pouvoir. Le projet de loi a été adopté en avril ou mai 2005, et nous avons été assermentés le 6 février 2006. Il y a eu un certain nombre de veuves avec enfants et de familles qui n'ont pas obtenu les 250 000 $ parce que la mesure n'avait pas été mise en œuvre. Il y a une chose que j'ai faite moi-même et qui réconfortera bien des gens qui sont au courant, c'est de présenter une proposition au Cabinet, si bien que, à la suite d'un décret, nous avons appliqué le paiement à ces gens-là aussi. Notre raisonnement était le suivant : si nous étions des parlementaires plus intelligents, nous aurions implanté la mesure immédiatement. J'avancerais que le ministère était prêt à l'implanter, mais que quelque chose a fait obstacle, peut-être une élection. Voilà un exemple où on en fait plus que ce qui est prévu pour qu'une telle mesure s'applique aux enfants et aux femmes qui en ont vraiment besoin.
Par ailleurs, du fait des encouragements provenant du MDN, presque tous les soldats contractent maintenant une assurance-vie dans le cadre du RARM, où ils peuvent nommer un bénéficiaire. Ils sont encouragés à le faire du fait d'un cas précis qui a eu lieu.
Moyennant quelques bons conseils, les jeunes hommes et femmes en question auraient probablement opté pour l'assurance. Le MDN fait des pieds et des mains pour s'assurer maintenant qu'ils contractent l'assurance.
Le sénateur Dallaire : Le RARM et tout ce concept sont souvent remis en question. Je crois savoir que les soldats ne peuvent être déployés s'ils n'adhèrent pas au RARM, de sorte que même les militaires mariés y adhèrent. Il existe encore une disparité.
Je sais bien que ça figure maintenant dans la loi, mais l'esprit de la charte adoptée, c'était de vous donner à vous, le ministre, une marge pour manœuvrer. Ce n'était pas pour que le ministère crée d'autres règles encore. Je ferai valoir qu'il est encore possible de rajuster le tir pour que la mesure s'adresse non pas aux personnes à charge, mais plutôt à la famille immédiate et aux personnes à charge.
Le sénateur Banks : J'apprécie la franchise de la réponse que vous avez donnée à la question du sénateur Downe à propos de la disposition de récupération.
Cette réponse-là ne s'applique-t-elle pas aussi à l'interface bureaucratique entre le programme d'invalidité de longue durée du RARM et le programme de réadaptation d'ACC? La Légion nous a recommandé de proposer au gouvernement de trouver une façon d'éliminer cet obstacle et de mieux faire fonctionner ensemble ces programmes. Est-ce que ça peut se faire ou la raison que vous avez invoquée l'empêche-t-elle, soit que vous ne pourriez éliminer la disposition de récupération?
M. Thompson : Je crois que vous faites allusion à la transition et à la coopération entres Anciens Combattants Canada et le MDN pour ce qui est de la façon dont nous fournissons les services à nos anciens combattants. Nous avons beaucoup progressé sur ce point. C'est une question dont nous ne sommes que trop bien conscients. Ce qui a toujours confondu le ministère, c'est la période de transition entre soldats et anciens combattants. C'est là que les gens sont parfois piégés dans la bureaucratie.
Quant à la réadaptation et au soutien dont ont besoin les anciens combattants et leur famille, nous en faisons nettement plus de concert avec le MDN. Maintenant, nous entamons beaucoup plus rapidement les démarches relatives à la retraite de concert avec le MDN, pour que le gens puissent se préparer à la vie civile.
En tant que général, le sénateur Dallaire a toujours qualifié la nouvelle charte de pont jeté entre la vie militaire et la vie civile. Nous renforçons le pont pour que les soldats puissent bien le franchir. C'est vraiment là un de nos principaux défis. Je vous fournirai la documentation voulue sur les progrès que nous réalisons. Je suis satisfait des résultats que nous avons obtenus.
Quant à certaines des indemnités, à l'avenir, vous allez peut-être voir une modification des critères qui s'appliquent obligatoirement en ce qui concerne les cotisations de certains de nos jeunes soldats. Nous sommes en ce moment à planifier une nouvelle charte qui prévoira ce service, si bien qu'il y aura peut-être un certain double emploi qui exigera des raffinements. Nous nous penchons sur cela et nous avons décelé certaines questions à régler.
Quand on s'engage comme soldat, on veut rester soldat jusqu'au moment de sa retraite, dans la mesure du possible, quel que puisse être l'âge en question. Dans le monde militaire, la retraite peut être imprévisible, étant donné les blessures qui peuvent survenir, même au moment de l'entraînement. Si vous évoluez dans une zone de conflit ou une zone de maintien ou d'établissement de la paix, la tragédie peut frapper sans crier gare. Lorsque les soldats deviennent invalides ou subissent une blessure, le MDN, et c'est au crédit du général Rick Hillier, fait maintenant tout en son pouvoir pour les encourager à demeurer au sein de l'appareil militaire. Dans le passé, les soldats nous étaient immédiatement transférés, mais maintenant, le MDN les encourage à rester au sein de l'appareil militaire. Si ça veut dire qu'ils doivent actualiser leurs compétences, c'est ce qu'on fait. Psychologiquement, c'est puissant de la part du MDN. Il dit : « Nous n'allons pas t'abandonner. Ce n'est pas de ta faute que tu as été blessé. » Les gens font un excellent travail pour que cela puisse se faire.
Par ailleurs, nous sommes toujours là pour les gens en question, car certains d'entre eux préfèrent quitter le monde militaire. Tous les ans, il y a environ 4 000 nouvelles recrues. Comme je l'ai dit, nous perdons environ 20 000 anciens combattants par année du vieillissement. Cependant, nous recrutons de 4 000 à 4 500 soldats tous les ans. Le MDN fait tout son possible pour garder en son sein ceux dont une blessure vient modifier la carrière.
Le sénateur Banks : Ma dernière question comporte deux volets. Il y a un bureau que tout le monde appelle « le centre », qui s'occupe de l'interface entre le MDN et votre ministère.
Est-ce une organisation officielle ou officieuse, une rencontre des esprits de part et d'autre? Ensuite, et c'est plus important à mes yeux, vous êtes peut-être au courant de la question que nous avons soulevée à propos des membres du Programme d'entraînement aérien du Commonwealth qui se sont joints à l'Aviation royale canadienne au début de la dernière guerre, puis ont été transférés à des écoles d'aviation privées, en ayant pour tâche de former les pilotes. Le service rendu à ce moment-là n'a pas été comptabilisé. Il est triste de l'apprendre, mais le commettant particulier à propos duquel nous posions la question a trépassé récemment, avant que les avantages auxquels il aurait autrement eu droit lui soient offerts. Il lui manquait dix jours sur les 365 qui sont nécessaires pour être admissible.
Si on avait compté le temps qu'il a passé à former des pilotes dans le cadre du Programme d'entraînement aérien du Commonwealth, il avait accumulé des années au-delà du minimum requis.
Mme Tining nous dit que le MDN détermine le service militaire. Y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire pour aplanir cet obstacle et qui ferait que vous — en recourant peut-être au Centre — trouviez une façon de redresser une situation qui ne semble pas correcte, ni à moi ni à d'autres personnes?
M. Thompson : Je sais de quel cas vous parlez. Non seulement c'est frustrant, mais aussi c'est d'une grande tristesse — quelqu'un qui, étant jeune, a servi pendant moins de 365 jours et a été laissé à l'écart du système. Je sais exactement de quoi vous parlez. Vous avez décrit la situation exactement comme elle s'est déroulée.
C'est bien le MDN qui établit les états de service. Vous avez raison — pour cette personne-là et pour plusieurs soldats — des hommes et des femmes qui ont porté l'uniforme — pour répondre à la définition particulière dont il s'agit, il faut avoir atteint un nombre de jours qui est beaucoup plus élevé qu'il me paraissait logique à moi. Ce qui rend intéressant le cas que vous avez évoqué, c'est le fait qu'il a continué de servir son pays en s'occupant d'entraînement sous une autre bannière, en faisant essentiellement la même chose au sein d'une organisation différente. C'est un cas qui est frustrant.
Le sénateur Banks : D'une façon ou d'une autre, c'est payé par le gouvernement.
M. Thompson : Je ne sais pas quel était le mode de rémunération, mais ça se faisait à l'intérieur du Commonwealth. C'est frustrant. À un moment donné, espérons-le, le problème des 365 jours pourra être réglé. Nous avons discuté avec des responsables du MDN de la question. Je n'essaie pas de leur refiler toujours la responsabilité, car c'est peut-être une chose que nous pouvons étudier, à savoir la définition d'ancien combattant que nous nous donnons nous-mêmes.
Je ne crois pas me tromper en affirmant que, dans les lois qui nous gouvernent, il n'y a pas de véritable définition d'un ancien combattant à Anciens Combattants Canada, croyez-le ou non. C'est peut-être une chose sur laquelle il faudrait se pencher.
Quand vous parlez du gouvernement, il faut dire que nous sommes tous dans le même bateau. Ce n'est pas seulement un problème qui serait celui du MDN. Aucun de nos prétendus avocats n'est là, mais je crois que, à Anciens combattants, je ne me trompe pas en affirmant que nous n'avons pas de définition précise du terme « ancien combattant. » Nous pourrions peut-être nous attacher à la tâche nous-mêmes.
Quant à l'autre question que vous avez soulevée, l'équipe chargée de la transition a un nom.
Suzanne Tining, sous-ministre, Anciens Combattants Canada : C'est le Centre MDN-ACC, qui existe depuis de nombreuses années. Nous augmentons le nombre d'employés d'Anciens Combattants Canada qui y travaillent. Le but du centre, c'est de conseiller les militaires libérés et leur famille pour qu'ils puissent mieux se retrouver dans tous les services qui leur sont offerts.
Le centre se trouve à Ottawa. Il y a bel et bien un emplacement physique. Nous pouvons prendre les dispositions pour une visite si cela intéresse les sénateurs qui se trouvent autour de la table.
Nous travaillons de concert avec le MDN à accroître la présence du Centre sur le plan géographique, au pays, en l'installant probablement à un certain nombre de bases pour commencer. Ça existe et ça prend de l'expansion.
Le sénateur Nancy Ruth : J'ai quelques questions à poser à propos du SSPT, le syndrome de stress post-traumatique, du dédoublement des centres et de la formation d'un personnel accru dont vous parlez. Le personnel est-il formé pour être sensible aux préoccupations des femmes soldats qui reviennent d'Afghanistan? Le cas échéant, comment une telle formation se fait-elle?
M. Thompson : Je sais que c'est une question que vous avez posée aux responsables la dernière fois où nous nous sommes rencontrés.
Le sénateur Nancy Ruth : J'ai posé cette question-là, oui.
M. Thompson : Sensibilisé aux préoccupations des femmes dans le sens où, dans de nombreux cas, où on a affaire à un soldat, on a affaire à l'unité familiale. La formation que le personnel reçoit pour pouvoir travailler là est très méthodique. Il est sensibilisé à la question. Toutefois, quant à savoir si c'est particulièrement le fait d'être sensibilisé aux préoccupations des femmes, je dirais qu'il n'en va pas autrement, du fait qu'il s'agit de professionnels reconnus dont le travail quotidien touche à la fois les femmes et les hommes. À mon avis, dès le départ, ils sont très sensibles à la question.
Une des beautés de la Charte des anciens combattants, c'est qu'on y insiste sur la famille. Nous parlons d'anciens combattants qui souffrent en silence, mais souvent, ce sont les membres de la famille qui souffrent en silence. Statistiquement, neuf fois sur dix, l'ancien combattant est un homme, mais le destinataire d'une bonne part du counselling qui est offert, c'est la femme ou l'épouse.
Le sénateur Nancy Ruth : Je comprends cela. Je me préoccupe de ce qu'on surveille la situation pour voir s'il y a des plaintes dans la mesure où cela n'est pas pris en considération; s'il faut donc corriger le tir, ça pourrait se faire.
Par ailleurs, il peut y avoir des membres des Forces armées qui sont homosexuels. Il faut donc voir ce que l'on entend par « famille » au moment où le counselling se fait auprès de la famille qu'ils ont, quelle qu'en soit la nature.
Quant aux documents que vous produisez pour les enfants d'âge scolaire pour qu'ils honorent la mémoire militaire du pays, quel est le rôle de la femme dans ces documents et, en particulier, est-il question du rôle accru des femmes au sein de l'appareil militaire pendant la guerre froide? Ça semble être une exclusion énorme. Certaines des femmes militaires qui m'ont parlé disent qu'elles sont simplement oubliées. Je veux seulement le signaler, et je suis certaine que votre personnel va se pencher sur la question.
Je ne me souviens plus très bien comment le sénateur Dallaire a formulé cela, mais il parlait des familles et des femmes célibataires. À un moment donné, j'ai pensé : ah, oui, qu'en est-il de ces femmes qui ont servi pendant la guerre froide? Elles se plaignent constamment du fait que, à titre de femmes célibataires dans l'armée à ce moment-là, elles n'avaient droit à aucun avantage, ni pour elles, ni pour quelque autre membre de ce qu'elles considèrent comme étant leur famille, disons un parent âgé. Ce serait une famille atypique suivant la définition du MDN ou peut-être d'Anciens combattants.
Le sénateur Dallaire : Puis, nous les avons mises à la porte.
Le sénateur Nancy Ruth : Elles s'en préoccupent toujours.
Voulez-vous commenter cette question dès maintenant?
M. Thompson : Tout cela me paraît intéressant, sénateur. Je sais que c'est une question qui est importante à vos yeux.
Pour votre gouverne, et je ne saurais dire si cela m'élève, mais disons que l'Association des infirmières militaires forme un de mes groupes préférés du milieu des anciens combattants. Tous les ans, depuis que je suis ministre, je les amène au Château Laurier pour la Saint-Valentin.
Les femmes sont souvent oubliées dans le système. En règle générale, nous entendons parler des héros de guerre, mais il faut dire que la contribution des femmes est incroyable. Celles qui ont travaillé dans les fabriques d'armements et toute femme qui a été mariée à un soldat méritent probablement une médaille.
Le sénateur Nancy Ruth : C'est aussi le cas des putains qui les ont servis, monsieur le ministre. Toutes les femmes méritent une médaille.
M. Thompson : Je suis toujours prêt à accepter les mises au point, sénateur.
Le sénateur Nancy Ruth : Je suis heureuse de voir que vous êtes sensibilisé à la question.
M. Thompson : Il y a une chose que je veux mentionner, chose qui va vous plaire, je crois, et qui nous ramène à un point que vous avez soulevé plus tôt. On nous a un peu critiqués pour cela. Lorsqu'on qualifie un ancien combattant, essentiellement, il faudrait envisager l'unité familiale. Quand on parle de l'ancien combattant, il ne suffit pas de dire « l'ancien combattant », car il y a son groupe d'entraide — les enfants, la femme, le conjoint, de même sexe ou non. Nous avons prévu dans le dernier budget une chose dont je suis très fier. Nous avons mis de côté 282 millions de dollars pour améliorer le PAAC du point de vue des veuves et des soignants.
Le sénateur Nancy Ruth : Monsieur le ministre, avec le respect que je vous dois, disons que 2 500 $ ne m'achèteraient pas beaucoup de services, surtout si ça se limite au jardinage et au pelletage de la neige. Tout de même, ça existe, et c'est mieux qu'auparavant.
À la page 17 de votre discours, vous dites que 96,5 millions de dollars ont été mis de côté pour le programme relatif à l'agent Orange, puis, à la page suivante, vous dites que 700 personnes en ont tiré parti. Ça donne seulement 14 millions de dollars. Qu'est-ce qui est arrivé aux 80 millions de dollars qui restent? Qu'est-ce qu'on en fait?
M. Thompson : Il y a des lignes directrices qui s'appliquent aux statistiques et à ce que ce chiffre devrait représenter. Ma réponse va finir par être plus longue que vous ne le vouliez. Dans la mesure où la maladie figure parmi celles qui sont retenues par l'IOM, on garde le groupe général dont il est question et le nombre de personnes qui seraient atteintes de la maladie; à partir de là, on peut extrapoler le nombre de personnes qui pourraient recevoir cette indemnité de 20 000 $. À l'heure actuelle, 700 indemnités ont été versées, et il y en a beaucoup plus dans le système qui n'ont pas été approuvées et qui, à mon avis, seront approuvées à un moment donné. Il y a ce chiffre-là. Pour être franc, quand tout sera versé, je crois que ça sera moins que la somme d'argent que nous avons mise de côté. Essentiellement, nous prévoyons toujours un certain coussin. Il y a bon nombre de demandes de plus dans le système. Elles font l'objet d'un traitement assez rapide, dans la mesure où on peut affirmer qu'un gouvernement peut agir ou réagir rapidement. Je suis satisfait du rythme de traitement des demandes. Nous avons des gens présents sur le terrain à Gagetown. Il y a toute une équipe de soutien qui traite les demandes. Nous avons tout mis en place pour agir. Au moment de notre rencontre l'an prochain, si nous avons tous la chance d'y être, le chiffre sera plus élevé qu'il l'est aujourd'hui. Cela nous rassure un peu de savoir que nous avons mis de côté assez d'argent pour faire le travail que nous avons dit que nous ferons.
Le sénateur Nancy Ruth : Est-ce que toutes les personnes qui ont besoin de savoir ont reçu un avis?
M. Thompson : C'est une préoccupation qui me touche de près, car 90 p. 100 de la zone de formation se trouve dans le secteur que je représente à la Chambre des communes.
Le sénateur Nancy Ruth : J'ai vu cela.
M. Thompson : Je me suis rendu dans toutes ces localités personnellement et j'ai tenu des assemblées après l'annonce. Les gens, surtout en milieu rural, n'ont pas de Blackberry ou de téléphones cellulaires; ils n'ont pas les moyens de communications modernes que nous avons. J'ai tenu des assemblées pour cultiver des liens dans chacune d'entre elles. Nous avons fait une publicité nationale et ainsi de suite, et c'est un travail qui se poursuit aujourd'hui. Nous allons continuer à nous assurer que les gens sont au fait de la situation. Le programme comportera une date limite.
Le sénateur Nancy Ruth : Quelle est la date limite?
M. Thompson : C'est le 9 avril, si je ne m'abuse. Pendant la période allouée, si un sénateur ou un député souhaite nous aider à diffuser l'information dans des bulletins, je lui demande de nous le faire savoir.
Le vice-président : Merci, sénateur Ruth. J'apprécie vos questions. Ce sont des questions pénétrantes et utiles. Malheureusement, je vais devoir dire aux deux sénateurs qui devaient prendre la parole au deuxième tour que nous allons devoir les oublier, comme ils le soupçonnaient probablement. Selon le Règlement du Sénat, nous ne pouvons siéger si la Chambre elle-même siège. Le fait que le nombre de questions que nous avions nous aurait poussés bien au-delà du temps alloué montre bien l'importance des témoins que nous avons accueillis aujourd'hui. Nous vous remercions de votre franchise. Je vais laisser le dernier mot au président de notre comité, qui est originaire de l'Ontario, mais je me plais à croire que son cœur se trouve dans votre circonscription du Sud-Ouest du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Meighen : Malgré les meilleurs efforts de VIA Rail, la tempête a occasionné un retard de plus d'une heure. Je m'excuse auprès de mes amis des deux côtés de la table de mon retard. Il est bien de voir le ministre, qui est mon député du Nouveau-Brunswick. J'ai déjà travaillé avec les autres témoins à divers programmes qui relèvent d'Anciens combattants. Comme je n'ai pas entendu bon nombre des questions qui ont déjà été posées, si jamais je m'aventure sur un terrain que vous avez déjà exploré, n'hésitez pas à m'arrêter.
J'ai les yeux sur le communiqué de presse du PAAC. Si je comprends bien, si l'ancien combattant touchait une pension d'invalidité ou une allocation d'ancien combattant, mais pas l'indemnité d'entretien ménager ou d'entretien de terrain au moment de son décès ou de son admission dans un établissement de santé, le survivant aura maintenant l'occasion de la recevoir. Qu'advient-il si l'ancien combattant ne recevait pas de pension d'invalidité, ni d'allocation d'ancien combattant, ni encore d'indemnité dans le cadre du PAAC, mais que, à la suite de son décès, son survivant se trouve en butte à de grandes difficultés ou à une situation qui a énormément changé? Aurait-il le droit de tirer parti du PAAC?
M. Thompson : Je vais vous donner une réponse plus longue que celle que vous voulez entendre, mais vous êtes avocat de formation, alors n'hésitez pas à m'interrompre si vous croyez que je prends trop de temps.
Nous avons procédé à certaines modifications internes du PAAC au sein du ministère, au moyen d'une réglementation qui vise à appliquer la prestation en question aux anciens combattants qui en ont besoin. À Anciens Combattants Canada, nous ne pouvons régler tous ces problèmes, et je ne mets la faute sur aucun gouvernement, étant donné que divers partis politiques, deux, surtout, ont formé le gouvernement du Canada. Tout de même, vous allez constater que certains anciens combattants, du fait de ne pas souffrir d'une maladie qui ouvre droit à pension, ne sont pas admissibles au programme le plus efficace et le plus économique que nous ayons, c'est-à-dire le PAAC. Ils doivent souffrir d'une maladie ouvrant droit à pension, ce qui ne semble pas avoir beaucoup de sens.
Ces anciens combattants-là auront accès à nos lits partout au pays. À l'hôpital Sunnybrook, il en coûte environ 100 000 $ par lit pour garder un ancien combattant à l'hôpital, et je crois que la plupart des Canadiens n'hésitent pas à faire les frais de cela. Le fait est que l'ancien combattant en question aurait pu rester à la maison moyennant des frais nettement moins importants du point de vue du gouvernement du Canada et profiter de ces quelques années à la maison, plutôt que dans un établissement. De fait, nous avons modifié certaines des règles internes de manière à pouvoir appliquer aussi le PAAC à certains des anciens combattants qui, en temps normal, ne sont pas admissibles et qui se trouvent à un stade de leur vie où ils sont fragiles. La Légion royale canadienne a pris fait et cause pour les anciens combattants en perte d'autonomie.
J'espère que nous allons pouvoir en faire plus. Voilà l'exemple d'une politique qui n'a pas vraiment de sens, et nous essayons de faire en sorte que les choses aient un sens. Dans le milieu des anciens combattants, à Anciens Combattants Canada, il y a toutes ces classifications qui nous permettent de déterminer si vous allez obtenir une prestation ou non. J'adorerais simplifier cela et faire en sorte que ce soit mieux adapté à la réalité. Au ministère, nous comptons un personnel hautement qualifié et, invariablement, le personnel et les professionnels s'en remettent toujours au guide pour savoir comment il faut traiter cette catégorie-ci d'anciens combattants s'ils n'ont pas eu affaire à une personne de cette catégorie depuis un moment. Nous essayons de simplifier une partie du processus. Pour être bref, en réponse à la question que vous posez à propos des veuves, je dirais qu'elles vont avoir droit à la prestation.
Le vice-président : Monsieur le ministre, madame la sous-ministre, monsieur Mogan, au nom du Sous-comité des anciens combattants du Sénat, nous vous remercions du travail que vous et votre ministère accomplissez pour assurer le bien-être des anciens combattants et de leur famille. Nous espérons pouvoir continuer de travailler avec vous à améliorer cette situation dans la mesure de nos moyens à nous et pour appuyer votre travail là où nous pouvons le faire.
M. Thompson : Merci. Vous dites que j'ai le meilleur travail qui soit au gouvernement, et vous avez raison — c'est bien le cas. C'est un travail remarquable, un travail que j'ai l'honneur de pouvoir faire, et je vais continuer de le faire de mon mieux.
Le vice-président : Nous sommes heureux de savoir que vous occupez ce poste.
La séance est levée.