Délibérations du Sous-comité sur la Santé des populations
Fascicule 3 - Témoignages du 27 mars 2009 (séance du matin)
OTTAWA, le vendredi 27 mars 2009
Le Sous-comité sur la santé des populations du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 9 heures pour étudier les divers facteurs et situations qui contribuent à la santé de la population canadienne — appelés collectivement les déterminants sociaux de la santé (sujet : table ronde sur l'infrastructure de la base de données sur la santé des populations).
Le sénateur Wilbert J. Keon (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs et invités, je vous remercie de nous consacrer de votre précieux temps ce matin en vue de nous aider à accomplir cette tâche plutôt monumentale. Nous sommes très optimistes. Nous espérons mener à bien nos travaux et rédiger notre rapport final au cours du prochain mois, après quoi nous comptons le déposer au début du mois de juin. Les délibérations d'aujourd'hui seront d'une importance capitale.
Avant de passer aux présentations, je tiens à préciser que notre objectif est d'encourager la participation de chaque ordre de gouvernement et dans chaque secteur, jusqu'au niveau communautaire. Nous mettrons beaucoup l'accent sur la communauté. Le rapport recommandera une approche pangouvernementale pour le comité du Cabinet du gouvernement fédéral, dirigé par le premier ministre, ainsi que les comités des cabinets provinciaux dirigés par les premiers ministres, les comités municipaux qui s'y apparentent et également les comités communautaires. L'approche recommandée en matière de santé de la population tiendra compte des besoins des organisations et permettra l'intégration horizontale et verticale de toutes les ressources dont les gouvernements, les ONG et les différents secteurs ont besoin pour en assurer l'efficacité.
Je ne vous ennuierai pas davantage avec mes propos; je préfère vous entendre. Mes présentations seront très brèves et, bien entendu, je ne rendrai justice à personne.
Nous avons parmi nous aujourd'hui Odette Madore, analyste et rédactrice principale du sous-comité; le Dr Gregory Taylor, directeur général du Bureau de la pratique en santé publique de l'Agence de la santé publique du Canada; le Dr Cordell Neudorf, médecin hygiéniste en chef à la Régie régionale de la santé de Saskatoon; le sénateur Joan Cook de Terre-Neuve-et-Labrador; Alton Hollett, sous-ministre adjoint à la Direction de l'économie et de la statistique du ministère des Finances de Terre-Neuve-et-Labrador; Vivek Goel, président-directeur général de l'Agence ontarienne de protection et de promotion de la santé; le sénateur Nicole Eaton; Mme Karen Dodds, sous-ministre adjointe, Santé Canada; le sénateur Catherine Callbeck, ex-première ministre de l'Île-du-Prince-Édouard, qui nous fera profiter de sa vaste expérience; Mark Smith, directeur agrégé, Manitoba Centre for Health Policy Repository, Université du Manitoba; Barbara Reynolds, greffière du comité, celle qui gère mon quotidien. Le sénateur Art Eggleton, ancien maire de Toronto et ancien président du Conseil du Trésor, se joindra à nous sous peu.
Aussi, nous avons Mike Sheridan, chef de l'exploitation, Inforoute Santé du Canada Inc.; Jean-Marie Berthelot, vice-président des programmes à l'Institut canadien d'information sur la santé; le sénateur Lucie Pépin, du Québec, vice-présidente du sous-comité et infirmière également; Jean Harvey, directeur de l'Initiative sur la santé de la population canadienne à l'Institut canadien d'information sur la santé; Michael Wolfson, statisticien en chef adjoint, Statistique Canada, qui est aussi un de mes vieux amis. Le sénateur Andrée Champagne sera des nôtres un peu plus tard également.
Enfin, nous avons Christine Burton, directrice, Politique rurale et développement stratégique, Agriculture et Agroalimentaire Canada; et Michel Frojmovic, MCIP, RPP, directeur, Acacia Consulting and Research, Fédération canadienne des municipalités.
Nous vous avons préparé quelques questions afin de tenter de circonscrire le débat, et je me suis également entretenu de façon préliminaire avec certains d'entre vous à ce sujet. Dans un premier temps, si le cœur vous en dit, vous pourrez aborder les quatre questions ou encore une seule. Au fil de nos discussions, j'essaierai de vous ramener à la question particulière, parce que Mme Madore doit voir à la tâche colossale de réunir, si possible, les observations en un tout cohérent.
Cela étant dit, nous commencerons par les modèles axés sur la communauté. J'ai parlé récemment avec Michael Sheridan, qui avait des choses intéressantes à dire au bout du fil. Je lui demanderai de présenter ses observations d'abord, après quoi tous pourront y aller des leurs.
Mike Sheridan, chef de l'exploitation, Inforoute Santé du Canada Inc. : Je serai bref car le sous-comité a soumis à l'attention du groupe un certain nombre de questions de fond qu'il est important d'aborder.
J'ai deux observations. Premièrement, je parlerai du modèle utilisé pour promouvoir et accélérer l'élaboration et l'adoption de dossiers de santé électroniques au Canada. Le président a fait remarquer qu'il faut inciter tous les ordres de gouvernement à participer. Je crois qu'Inforoute a connu un certain succès grâce au modèle qu'elle a décidé d'appliquer.
Deuxièmement, je parlerai de ce que les dossiers de santé électroniques peuvent apporter aux données et renseignements qui pourraient servir à la création d'un système d'information sur la santé de la population. D'entrée de jeu, il nous faut clairement reconnaître que les données requises pour faire le suivi des résultats d'ensemble obtenus en matière de santé de la population et pour soutenir l'analyse et la recherche vont bien au-delà des renseignements cliniques sur les soins de santé.
En ce qui concerne le modèle d'Inforoute, les premiers ministres du Canada ont compris la nécessité de tirer parti du potentiel des technologies de l'information. Ils ont convenu à l'unanimité de travailler ensemble à l'élaboration d'une infostructure pancanadienne de la santé pour améliorer l'accès des Canadiens aux soins de santé tout en augmentant la qualité des soins et en réduisant les temps d'attente. Les premiers ministres ont également reconnu qu'un engagement national serait la meilleure façon de relever ce défi et de trouver des solutions qui permettraient de relier entre eux les systèmes des divers établissements et cliniques.
Inforoute est un organisme sans but lucratif qui est financé par le gouvernement fédéral et qui « appartient », en quelque sorte, aux 14 sous-ministres de la Santé. Inforoute n'est pas un organisme subventionnaire. C'est un investisseur stratégique qui travaille auprès des provinces et des territoires. Nous jouons un rôle actif dans la planification des projets et dans la conception et le déploiement des systèmes mais, dans les faits, nous ne construisons, ne possédons et n'exploitons pas ces systèmes. Ce sont les provinces et les territoires qui s'occupent de ces choses.
L'investissement conjoint est une condition des accords de financement, et cela nous permet de mobiliser des fonds supplémentaires provenant d'autres gouvernements. Pour garantir la notion de valeur et atténuer les risques, nous avons instauré un processus de financement par étapes, chaque projet devant produire des résultats spécifiques et atteindre des cibles déterminées avant de recevoir les fonds.
Nous mesurons aussi les résultats et les avantages qui en découlent. À ce jour, Inforoute a approuvé des investissements d'un peu plus de 1,5 milliard de dollars pour plus de 270 projets en cours ou terminés. Le modèle repose sur la collaboration et la coopération, deux éléments clairement essentiels à notre réussite.
Par ailleurs, je pense que les dossiers de santé électroniques peuvent, et doivent, fournir des possibilités uniques de promouvoir la recherche, les politiques, les analyses et une meilleure compréhension des résultats en matière de santé. Les systèmes de dossiers de santé électroniques ont été conçus avant tout pour améliorer l'accès aux soins, la sécurité, la qualité et la productivité dans la prestation des soins cliniques. Je pense que l'avenir s'annonce fort prometteur pour ces systèmes et la contribution qu'ils apporteront aux renseignements sur la santé tout au long de la vie, de même qu'aux renseignements intégrés sur la santé de la population.
Nous nous sommes fixés pour objectif, d'ici 2010, de mettre les dossiers de santé électroniques de 50 p. 100 des Canadiens à la disposition des professionnels de la santé reconnus qui leur dispensent des soins. Cela signifie qu'ils auront accès à des données sur le client et sur le fournisseur, à l'imagerie diagnostique, aux résultats des tests de laboratoire, à la liste des produits pharmaceutiques prescrits, aux rapports cliniques ou aux données sur l'immunisation. En fixant cet objectif, nous avons accordé une grande priorité à l'architecture commune des systèmes qui a été adoptée par les provinces et territoires ainsi qu'aux normes relatives aux données et aux renseignements qui permettront l'interopérabilité entre les systèmes d'information sur la santé.
Les nouveaux fonds prévus dans le budget fédéral de 2009 permettront d'accroître les investissements faits pour mettre en oeuvre et utiliser les systèmes de dossiers de santé électroniques dans les bureaux des médecins. Ils permettront également d'améliorer les normes d'interopérabilité et de faire progresser la mise en oeuvre de solutions de santé, principalement en ce qui concerne les portails destinés aux patients.
Même si notre pays a fait de grands progrès pour favoriser et accélérer l'élaboration et l'adoption des dossiers de santé électroniques, il reste beaucoup à faire, y compris créer les interfaces qui permettront d'optimiser les données consignées dans ces systèmes cliniques pour permettre leur utilisation dans le système de soins de santé. Je demeure optimiste à cet égard et je crois qu'il est possible de le faire, et qu'on doit le faire. À l'heure actuelle, Inforoute travaille en étroite collaboration avec l'Institut canadien d'information sur la santé, Santé Canada, Statistique Canada, l'Agence de la santé publique du Canada et un certain nombre de partenaires dans les provinces et les territoires pour régler des questions pratiques et politiques afin d'optimiser les investissements dans les dossiers de santé électroniques et ainsi mieux répondre aux besoins en données et en renseignements associés à leur utilisation dans le système de santé.
Michael Wolfson, statisticien en chef adjoint, Statistique Canada : Je me permets de commencer par quelques observations qui portent sur la première question que vous nous avez soumise pour étude, c'est-à-dire si le Canada dispose ou non d'un ensemble clair d'indicateurs nationaux sur la santé des populations et si ces indicateurs sont propices à la mise en œuvre d'une politique sur la santé des populations.
Je dirais d'abord que les indicateurs sont utiles en tant que données simples qui peuvent être examinées ou suivies dans le temps mais je me permets d'insister, au nom de ceux qui comme moi travaillent au bureau national des statistiques, sur le fait que les indicateurs ne sont pas comme des fruits suspendus à un arbre; ils exigent d'avoir un système d'information sous-jacent. Par conséquent, je parlerai autant, sinon plus, du système d'information sous-jacent aux indicateurs que des indicateurs à proprement parler.
Prenons par exemple l'espérance de vie. Nous ne pourrions connaître cette donnée si nous n'avions pas de recensement de la population et si nous n'avions pas les données sur l'état civil, tout particulièrement les registres de décès. Je pense que le Canada a fait d'énormes progrès pour ce qui est du développement de ses systèmes d'information sur la santé au cours des 10 dernières années; on n'a qu'à penser à la création de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, à la croissance importante de l'Institut canadien d'information sur la santé et aux divers ensembles de données administratives et de programme fournis au Canada par les gouvernements provinciaux en particulier. Nous n'en sommes qu'aux balbutiements et n'avons pas encore fait tout le chemin qu'il aurait fallu pour pouvoir rassembler ces données administratives en des « parcours » de patients.
Le diagramme qui vous a été distribué illustre l'optique du cycle de la vie. Il est absolument essentiel de tenir compte de cycle de la vie pour comprendre la santé de la population et l'incidence des différentes interventions au fil du temps. Cela s'explique tout bonnement parce qu'un geste posé aujourd'hui peut ne pas transparaître avant des années, si on pense par exemple à l'activité physique ou au tabagisme. C'est bien connu que ces comportements ont des effets cumulatifs sur la santé ou que leurs effets prennent un certain temps avant de se manifester.
Une des autres percées importantes dont j'aimerais parler et qui se rapporte tout particulièrement à la question des disparités, c'est que nous avons réussi récemment à faire le lien entre le recensement de 1991 et les registres de décès, c'est-à-dire un suivi de la mortalité, si on veut, financé par l'Initiative sur la santé de la population canadienne. Ces données nous offrent des possibilités sans précédent, et nous avons déjà commencé à analyser de manière beaucoup plus approfondie l'étendue et la nature des disparités relevées au pays.
Voilà pour les bonnes nouvelles. D'autre part, je voudrais aborder la question du futur. Je suis d'avis que notre système d'information sur la santé comporte encore des lacunes importantes. Dans mes temps libres, je m'adonne à la microscopie et je ne peux m'empêcher de faire une analogie. Si on pense à l'effet révolutionnaire qu'a eu l'invention du microscope sur nos perceptions du monde, on constate notamment que toute l'idée des microbes n'existait pas avant l'invention du microscope et avant que les gens ne puissent voir ces choses. On pourrait en dire autant de nos jours de l'astronomie, qui subit des changements au fur et à mesure que se développent de nouveaux télescopes. L'importance fondamentale que je cherche à mettre en lumière est celle des outils d'observation qui sont à notre disposition. Les outils d'observation dont nous disposons dans le domaine de la santé de la population sont encore à l'état naissant. Ils sont loin d'être assez solides, selon moi, pour réellement répondre aux besoins d'une politique rigoureuse et exhaustive. Je vous ferai part d'un exemple de l'exploitation récente de ces nouvelles données pour tenter de mieux comprendre les choses.
Inforoute a le potentiel d'apporter des contributions très importantes du point de vue du dossier de santé électronique. L'idée est de procéder à des observations condensées pour pouvoir ensuite tirer profit de l'expérimentation naturelle. Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il est onéreux de procéder à des essais sur échantillons aléatoires et, de façon générale, ces essais ne sont pas possibles. Toutefois, en raison de la nature de la confédération, nous avons au Canada toutes sortes de politiques mises en œuvre dans différentes parties du pays, et celles-ci devraient pouvoir nous en apprendre.
Je vais vous citer l'exemple intéressant de ces deux chercheures financées par les Instituts de recherche en santé du Canada, ou IRSC — Lynn McIntyre et Valerie Tarasuk. Celles-ci font des recherches sur la question de l'insécurité alimentaire partout au pays. Elles cherchent notamment à déterminer le rôle joué à ce chapitre par l'aide sociale ou l'assurance-emploi. Nous ne pouvons soumettre ce genre de question à l'expérimentation, mais nous en sommes rendus au point où, du moins grâce à l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes et à d'autres données, l'observation est telle qu'il est maintenant possible de commencer à établir des corrélations entre la prévalence de l'insécurité alimentaire — qui représente bien entendu un aspect important de la santé de la population — et différents programmes sociaux, niveaux de générosité ou je ne sais quoi d'autre, dans le temps et dans l'espace au Canada.
Je m'arrêterai ici mais voilà un exemple qui illustre la voie que nous devrions emprunter en ce qui a trait à l'information à notre disposition.
Le président : Merci beaucoup, Michael. M. Berthelot aimerait dire quelque chose.
Jean-Marie Berthelot, vice-président, Programmes, Institut canadien d'information sur la santé : Je veux emboîter le pas à Michael. Il est important de reconnaître que nous réussissons à faire beaucoup de choses quand nous travaillons en partenariat au Canada. Inforoute Santé du Canada connaît actuellement un grand succès grâce à la mise en œuvre des dossiers de santé électroniques, et nous devrions nous en inspirer pour ce qui est de la mise en œuvre d'une structure adéquate d'information en matière de santé de la population.
Tous les partenaires clés sont assis autour de la table. Vous avez le Réseau canadien pour la santé urbaine, le RCSU, Inforoute Santé du Canada, Statistique Canada, l'Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada et les municipalités. Il est important d'étendre davantage les partenariats. Je sais qu'il a été question de modifier les lois, mais il est important d'avoir davantage de partenariats et de trouver des façons d'en faire profiter notre pays. C'est là la véritable façon d'élaborer activement l'infrastructure. Le Canada est fort de ce genre d'expérience.
Tout ce qui est entrepris par le RCSU se fait en partenariat. Aucun mandat ne nous est conféré par la loi, contrairement à Statistique Canada. Par conséquent, il nous faut établir des systèmes sensés et utiles dont se serviront les décideurs, les gestionnaires du système de soins de santé et les responsables de la santé publique en ce qui a trait aux interventions liées à la santé de la population.
Le président : Il y a dans la liste une question à propos des comptes communautaires, que les membres du comité ont eu l'occasion d'examiner directement, ce qui fut très intéressant. Il serait utile, bien que je ne veuille pas trop orienter la discussion, de demander à Alton Hollett de parler tout de suite des comptes communautaires, parce que mon esprit simpliste de chirurgien en est venu à la conclusion qu'il y a là un modèle à reproduire, du moins au niveau communautaire.
Je vous ai distribué ce diagramme parce que je veux votre aide. Sa forme n'est pas encore définitive et change chaque fois que le document est distribué. Deux principes y sont illustrés : celui de l'intégration horizontale de tous les déterminants de la santé en tant que plate-forme, et celui du cycle de la vie qui repose sur cette plate-forme. Comme vient tout juste de le dire M. Wolfson, nous en viendrons un jour à disposer de renseignements « longitudinaux ». Je ne sais pas si ce jour est encore loin, mais c'en sera un merveilleux.
Cela étant dit, je me suis déjà trop étendu. Monsieur Hollett, pourriez-vous nous éclairer?
Alton Hollett, sous-ministre adjoint, Direction de l'économie et de la statistique, ministère des Finances de Terre-Neuve- et-Labrador : Pour un groupe comme celui-ci, ce ne sera pas une mince affaire, docteur Keon.
Ce que je dirais à propos de notre travail — du point de vue de ce que vous tentez de réaliser —, c'est que la voie dans laquelle vous vous engagerez pour élaborer votre système national dépendra beaucoup de ce que vous souhaitez offrir aux gens, de la mesure dans laquelle vous souhaitez obtenir leur participation, des questions auxquelles vous voulez répondre. Voilà ce sur quoi nous nous sommes fondés pour les comptes communautaires; nous nous sommes inspirés de quelques petites choses.
Il y a quelque temps, j'ai travaillé avec un collègue, Doug May — que certains d'entre vous connaissent peut-être — et nous nous sommes rendu compte que dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador, ce qui intéressait la plupart des gens, c'était d'obtenir de l'information à propos de leurs propres communautés. Voilà ce qu'ils connaissent le mieux et ce qui les intéresse. Si vous vivez à Fogo, vous n'êtes pas intéressé par ce qui se passe à Port aux Basques, mais bien par ce qui se passe à Fogo. Si vous tentez d'aborder les enjeux en présentant le portrait de la province dans son ensemble, rien ne va plus. Ces gens veulent entendre parler de Fogo.
Nous avons constaté la rareté des données du genre. Il existe à l'heure actuelle beaucoup de données — sur les tablettes, dans les agences de statistique provinciales, à Statistique Canada et ailleurs —, mais celles-ci ne sont souvent pas connues des autres ni diffusées.
D'une certaine façon, on peut dire que nous avons deux gros problèmes. Il y a d'abord les données existantes qui gisent du côté des agences de statistique et qui ne sont pas partagées. Ensuite, au fur et à mesure que mûrit notre réflexion, nous constatons d'autres lacunes qui doivent être comblées, en dépit des techniques et des méthodes existantes.
Laissant les intérêts personnels de côté, comme chercheurs, nous avons d'abord été attirés par le plan social stratégique de notre province, qui cherchait à accomplir des choses nobles. L'une d'elles était une vérification sociale, un concept attrayant. Ce fut une expérience intéressante qui a depuis été abandonnée. Toutefois, ce faisant, nous avons pu constater un besoin au niveau des données communautaires et l'utilité de ce type de données. Selon notre interprétation du plan social stratégique, nous avons déterminé qu'il fallait un ensemble de données de référence, qui remplirait un double objectif, celui de créer un ensemble de données de référence dont pourraient se servir les gens au niveau communautaire.
Je ne suis pas un spécialiste de la santé, mais je possède une certaine expertise en ce qui a trait au partage de données au niveau communautaire, parce que nous le faisons déjà depuis un certain nombre d'années. Nous savons ce qu'il faut pour y parvenir. Nous savons ce qu'il faut pour en assurer le maintien. Nous savons ce qu'il faut pour établir une crédibilité à cet égard. Nous savons ce qu'il faut pour conférer une importance à ces données aux yeux des membres des communautés. Nous savons également à quel point il est facile de faire un pas de trop dans une direction ou une autre et risquer ainsi de tout gâcher, de perdre l'intérêt des gens.
Une des choses importantes sur lesquelles il faut s'arrêter — et ceci s'applique aux membres de votre comité également, docteur Keon —, ce sont les types de questions auxquelles on veut répondre. Je ne parle pas ici précisément des données qu'il convient de consigner; il s'agit plutôt de déterminer si on veut établir quelque chose sur le diabète et aussi sur le cancer, par exemple. Voilà ce qui serait utile.
Il nous faut examiner quels types de renseignements nous sommes prêts à partager, en partant du principe de leur utilité, tant du point de vue du personnel de laboratoire, des cliniciens et des statisticiens que pour des gens dans les communautés, où se vivent les vrais enjeux et les vrais problèmes de santé. Dans de nombreux cas, il nous faut également déterminer quelles sont les questions techniques d'ordre scientifique et quelles sont les autres.
Je cite souvent en exemple les situations où le premier ministre réunit des hauts responsables afin d'étudier une question et leur demande de réfléchir à l'intégration du développement social et économique, après quoi il s'ensuit une longue discussion où tous s'interrogent sur le sens véritable de cette notion. Quand cessera-t-on de soulever toutes ces notions absurdes que personne n'arrive réellement à comprendre?
Il suffit de se rendre dans une communauté où le secteur des pêches vient de s'effondrer et où les familles éclatent, notamment parce qu'il n'y a pas assez d'argent pour réparer le trou dans la toiture ou qu'un des leurs tente de noyer ses soucis dans l'alcool et ainsi de suite. Ces personnes comprennent clairement les enjeux sociaux et économiques et savent ce que signifie l'intégration. Donc ce que nous avons tenté de faire, c'est d'élaborer quelque chose d'utile au niveau communautaire, tout en établissant les meilleures normes possible compte tenu des ressources à notre disposition. Voilà un enjeu fondamental auquel doit s'attarder ce groupe.
J'aurais encore quelques petites choses à dire. Il nous est arrivé de suivre notre instinct. Nous avons appris que ce n'est pas toujours une bonne idée. Heureusement, nous avons parfois été agréablement surpris.
Par exemple, nous avons été agréablement surpris par les comptes communautaires. Lorsque le Dr May a d'abord élaboré le cadre conceptuel, il a fondé son approche sur le bien-être. Dans bien des milieux, on y verrait là un concept un peu trop axé sur l'émotion et une question que d'aucuns qualifieraient de frivole, bref une approche à laquelle les économistes professionnels et les personnes à la recherche de rigueur devaient renoncer. Toutefois, cette approche nous paraissait sensée parce que les gens dans les communautés s'intéressent aux liens entre l'éducation, la santé et l'environnement, par exemple, et la démographie, le marché du travail et ainsi de suite. Nous étions d'avis que c'était la voie à suivre. Nous avons imaginé le tout sous forme de cadre à l'intérieur duquel ces éléments contribuent tous au bien-être et en fournissent des indicateurs, auxquels s'ajoutent des données connexes et ainsi de suite.
Notre démarche n'avait pas de prétentions intellectuelles. Nous avons emprunté cette voie à l'époque parce que ce cadre semblait répondre à un besoin de la population. Lorsque nous l'avons mis à l'essai, les gens semblaient réellement pouvoir s'y reconnaître et s'en servir dans leurs communautés.
Nous nous réjouissons d'avoir commencé depuis peu à travailler avec des collègues de l'Australie et de l'OCDE. Nous nous intéressons à la commission créée par le président Sarkozy, qui a réuni un groupe de penseurs — certains des plus éminents cerveaux du monde — qui orientent leurs travaux de manière à voir au-delà du PIB et discutent du bien-être en tenant compte d'autres renseignements et caractéristiques vitales et sociétales qui s'ajoutent au PIB. Sans nier son importance, ils tentent d'en arriver à quelque chose de plus précis et de tout mettre en contexte.
Au fond, c'est l'approche que nous avons adoptée. Au départ, nous avons examiné ce qui semblait être les principaux déterminants de la santé. Ensuite, nous nous sommes penchés sur l'économie de production et avons entrepris de créer nos comptes de production — qui n'ont pas encore été rendus publics mais qui le seront —, dans lesquels on tient compte du rôle joué par les divers éléments des processus de production, en les rattachant ensuite à leur dimension humaine.
Nous avons parfois été confrontés à des raisonnements simplistes voulant que le PIB ne soit indicateur de rien, alors qu'il ne faut pas oublier que l'homme ou la femme à côté de vous participe à ce processus de production. Il existe des éléments d'information, comme le revenu gagné par les travailleurs, qui contribue au bien-être de ces personnes, alors nous les avons ajoutés. Nous avons récemment ajouté les ressources naturelles, le capital bâti, le capital de savoir et d'autres choses encore.
Je vais peut-être paraître arrogant, mais dans nos discussions, le Dr May et moi-même en sommes venus à croire que toutes ces têtes réunies à la demande du président Sarkozy font toutes les bonnes choses et se dirigent dans le même sens que nous, mais qu'elles ne sont pas encore parvenues à tout intégrer comme nous avons réussi à le faire. Je ne dis pas que notre modèle est parfait, mais je suis d'avis que c'est un modèle solide que même les spécialistes en la matière auraient du mal à attaquer.
Nous dirions que nous avons là un outil très utile à bien des égards. Je dirais que le cadre que nous avons établi permet de concilier presque toutes les dimensions imaginables, susceptibles d'intéresser les gens.
Vous vous demandez pourquoi je parle autant de cadres? Nous avons appris bien des choses à nos dépens. Il faut donner aux gens la capacité d'interroger les données. Si vous élaborez une macro, vous obtiendrez quelques chiffres; si vous trouvez la base de données et que vous avez du temps et de la patience et que vous êtes encore assez jeune, vous pouvez vous frayer un chemin à travers les données et en repérer un certain nombre qui se révéleront utiles. Tout cela est bien beau pour les universitaires et les statisticiens. Ce n'est pas un problème pour Michael Wolfson, s'il a encore le temps de le faire avant de quitter Statistique Canada — il y a consacré sa vie —, mais au niveau communautaire, ça ne fonctionne pas.
Par conséquent, la démarche sur laquelle repose le travail que nous avons accompli vise à présenter les données de manière à ce que, d'abord, elles rendent compte de la vie des gens et que, deuxièmement, on puisse y accéder de façon intuitive. Si vous voulez avoir de l'information sur la santé, vous n'avez pas besoin d'être clinicien ou chercheur ou d'avoir un diplôme en recherche médicale; tout ce que vous devez savoir, c'est que vous voulez trouver des données sur la santé. Si vous enfoncez ce bouton, vous commencez à obtenir de l'information. Mais nous nous sommes fondés sur des constructions théoriques pour y intégrer les données. Nous nous sommes inspirés de ce que les professionnels estiment être les façons appropriées de présenter ces divers aspects et facteurs pour que ce que nous offrons puisse répondre aux questions avant qu'elles ne soient posées. Et je pense que c'est très utile.
Je fais deux observations sommaires sur les comptes communautaires. Tout d'abord, ça fonctionne bien pour nous et nous en sommes contents. Ils sont reconnus depuis longtemps. Les collectivités les utilisent et les apprécient, et nous en avons de plus en plus la preuve. En effet, ils sont de mieux en mieux enracinés dans les processus bureaucratiques, dans les méthodes de nos écoles de médecine, dans les pratiques des spécialistes — je parle ici du point de vue de la santé — mais aussi chez les développeurs, entre autres.
Je connais peu de gens autour de cette table, mais je sais que le Dr Neudorf a fait du très bon travail, et j'ai une bonne connaissance de ce que d'autres personnes présentes aujourd'hui ont accompli. Vous avez fait les choses à votre façon. Mais il est temps de jeter un coup d'œil à ce qui se passe à l'échelle internationale. Beaucoup de ce qui se fait aujourd'hui ouvrira la voie à ce qui se fera au cours des 35 ou des 40 prochaines années. Le comité doit profiter de ce second souffle; ce n'est pas compliqué ni difficile à faire. Ensuite, nous déterminons le genre de questions auxquelles les données doivent répondre : en d'autres mots, voulons-nous solliciter la participation de la population dans les collectivités, et quelle est la meilleure façon de le faire?
J'ai été invité tellement souvent à parler des comptes communautaires que, pour être honnête avec vous, j'en ai assez d'entendre les mêmes questions sur tous les obstacles — quels sont les bons indicateurs? D'où proviendraient les données? Comment procéderiez-vous pour coupler les données? Nous devons avoir une certaine idée de ce qui serait utile pour la population, afin de pouvoir créer ce mode de communication entre les gens qui ont un problème à régler, les gens, comme à Statistique Canada ou à l'Institut canadien d'information sur la santé, qui cherchent à créer les données et les gens qui essaient de déterminer exactement sur quels éléments il faut se pencher dans tous ces différents domaines.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Hollett. Vous avez fait le tour de la question.
Karen Dodds, sous-ministre adjointe, Santé Canada : La première question porte sur les indicateurs nationaux de la santé des populations et les disparités en matière de santé. J'ai eu la chance d'assister à l'Assemblée mondiale de la santé à Genève à laquelle prenaient part tous les pays membres de l'Organisation mondiale de la santé. Assis à cette table, on comprend bien une chose : nous pensons souvent que la santé revêt une importance cruciale pour les personnes, mais elle est tout aussi importante pour les pays. On pourrait résumer en partie notre discussion sur les déterminants socio-économiques de la santé en disant « la richesse, c'est la santé ». Or, il y a des gens à l'Assemblée mondiale de la santé, des représentants des pays africains, qui portent des chemises sur lesquelles on peut lire « la santé, c'est la richesse ». On se rend compte à quel point on est chanceux d'être ici.
J'ai commencé ma carrière comme chercheuse dans un domaine où j'avais besoin de beaucoup de données, et c'est là que j'ai compris l'importance des données. Habituellement, on dépense plus d'argent pour la collecte des données que pour l'utilisation qui en est faite par la suite, pour leur transposition, « et cetera ». J'ai une ligne de conduite que je répète sans cesse aux gens : il faut recueillir les données une fois, et les utiliser encore et encore. À mon avis, l'une des choses que le comité peut faire, comme M. Hollett l'a indiqué clairement dans son exposé, c'est de bien comprendre que les données doivent être utilisées et qu'elles doivent être disponibles.
Pour ce qui est de la santé, en regardant votre plan horizontal, on constate qu'un large éventail de facteurs influe sur la santé. Nous avons besoin de données provenant d'un grand nombre de domaines. Votre comité peut insister sur la nécessité d'avoir ces données et sur la nécessité pour les gens d'y avoir accès, et sur le fait qu'elles doivent être utilisées à maintes reprises.
En ce qui concerne les disparités en matière de santé au Canada, l'exemple qui est le plus souvent porté à notre attention ou que nous constatons le plus souvent, et que nous étudions le plus à Santé Canada, est celui des disparités entre la population canadienne en général et la population des Premières nations et des Inuits. C'est un écart important auquel il faut s'attaquer. Cependant, comme la population canadienne est de plus en plus diversifiée, il va nous falloir aussi plus de données pour repérer les inégalités et les écarts en santé dont nous ne soupçonnons pas encore l'existence ou à propos desquels nous n'avons pas autant de détails.
Selon des études réalisées, dont certaines ont bénéficié de la contribution de Statistique Canada, si on apporte une correction relativement à la situation socio-économique des Premières nations et des Inuits en ce qui touche la santé, on constate que ces populations ont les mêmes indicateurs de santé que la population non autochtone dont la situation socio-économique est la même. En d'autres mots, il y a des inégalités en santé au Canada qui nous échappent parfois.
Comme l'ont déjà dit mes collègues, c'est un domaine où nous faisons beaucoup de progrès. C'est la première fois que j'entends parler des comptes communautaires à Terre-Neuve, et je pense que c'est un excellent exemple. M. Smith m'a déjà parlé de ce qu'il fait au Manitoba avec le dépôt de données sur la santé de la population. Au niveau fédéral et national, on discute du fait que les partenariats que nous avons établis, comme avec l'Institut canadien d'information sur la santé, l'Inforoute, l'Agence de la santé publique et l'Initiative sur la santé de la population canadienne, ont permis de travailler sur les cadres et les indicateurs de la santé des populations, mais il nous manque beaucoup d'éléments et il nous reste beaucoup à faire.
Je vais sauter à la dernière question — recherche sur les interventions. Une fois en poste, il ne m'a pas fallu longtemps pour constater que c'est un domaine de travail qui nous manque — et je pense que la situation est la même non seulement au Canada, mais partout dans le monde. Je ne fais pas seulement allusion à l'évaluation des résultats des interventions. Je parle de la recherche même, qui permet de comparer des interventions en les considérant comme un élément dont nous avons besoin.
Par ailleurs, en ce qui concerne les enfants, lorsqu'on fait un recensement, on s'interroge souvent sur la quantité de données qu'il faut recueillir. Cependant, sur les plans médical et scientifique, comme nous en savons tellement plus sur des éléments qui ont des répercussions sur toute la vie des enfants, nous devons disposer de plus de données sur les enfants, et reconnaître l'importance cruciale de cette étape de la vie dans le parcours de vie des personnes et d'une population.
Le président : Merci, madame Dodds. Docteur Neudorf.
Dr Cordell Neudorf, médecin-conseil en chef, Régie régionale de la santé de Saskatoon : Je voulais compléter certains des commentaires qui ont été formulés à l'égard de la question sur les comptes communautaires et ce que M. Hollett a dit dans son exposé.
Il y a certainement quelques endroits au pays où l'on essaie tout naturellement de répondre aux besoins des gens qui doivent avoir accès à des données diversifiées pour faire des analyses sur la santé de la population, pour prendre des décisions et pour mener à bien leur travail dans le domaine des programmes et des politiques. Ce serait intéressant de rassembler des responsables de chacun de ces endroits pour pouvoir examiner en profondeur les questions auxquelles ils ont essayé de répondre, comme le disait M. Hollett, le genre de système qu'ils ont établi pour répondre à ces questions, les avantages et les inconvénients qu'ils ont observés ainsi que les leçons qu'ils ont tirées, pour voir s'il est possible de mettre en place la meilleure solution. Cela ne veut pas dire qu'il faudrait nécessairement avoir un système unique pour tout le Canada, mais, en apprenant les uns des autres, on peut espérer que les systèmes utilisés pourront se parler entre eux et que nous pourrons trouver une meilleure solution à partir de tout cela.
Dans le cadre de notre démarche à Saskatoon, ce type d'information faisait l'objet de demandes provenant de trois niveaux différents. Une de ces demandes provenait du milieu de la recherche, où l'on a besoin d'un type d'accès très différent. M. Smith pourra vous parler de ce que le Manitoba a fait à l'égard de ce créneau.
Nous avons reçu de nombreuses demandes de la collectivité. Le type de système que Terre-Neuve a créé au moyen des comptes communautaires, qui est fondé sur l'intuition, est un excellent exemple de ce qu'on peut faire pour présenter les données de manière à ce qu'elles soient faciles à comprendre pour la population.
Nous recevons aussi un grand nombre de demandes provenant d'analystes, de décideurs et de législateurs du gouvernement et d'organismes communautaires, et aucune de ces méthodes ne semble leur convenir. Ils ont besoin d'une certaine quantité de données déjà analysées, mais ils doivent aussi être en mesure de faire certaines recherches, un peu comme les possibilités qu'offrent les portails qu'ont créés l'Institut canadien d'information sur la santé et Statistique Canada.
Nous essayons de mettre au point un outil offrant différents niveaux pour ce qui est de l'aspect et de la convivialité et différents niveaux de sécurité selon le type de personne qui l'utilise. Certaines données destinées à la population seront de source ouverte, et il y aurait divers niveaux de sécurité selon le nom d'utilisateur et le mot de passe entrés.
Nous avons constaté que les données recherchées différaient beaucoup selon le point de référence de l'utilisateur. Si vous faites partie d'une petite collectivité, vous voulez voir des données qui concernent cette collectivité. Si vous habitez dans une grande ville, l'information recueillie au moyen d'un recensement sur une région indéterminée quelconque ne vous intéresse pas puisqu'elle n'a aucun sens pour vous. Vous voulez voir de l'information sur votre voisinage naturel, à laquelle vous pouvez vous identifier. Si vous êtes décideur à un niveau électoral, il se pourrait que vous vouliez consulter l'information par circonscription.
Nous devons créer un système qui soit flexible sur le plan géographique et qui permette de faire la synthèse des données relatives à la santé des populations à différents niveaux et de les présenter de manière à ce qu'elles soient intéressantes pour les personnes qui doivent prendre des décisions. Ainsi, les données abstraites deviendront utiles pour la prise de décisions en matière de programmes et de politiques ainsi que pour la défense d'une cause par la population.
Nous pouvons apprendre de ce qui a été fait aux échelons fédéral, provincial et local afin de créer le meilleur système possible, un système qui présente les divers types de fonctionnalité voulus pour prendre ces décisions et qui est évolutif et abordable. Ce système doit avoir un niveau de sécurité approprié, le niveau de fonctionnalité nécessaire pour l'analyse et l'affichage et le type d'architecture voulu pour supporter toutes ces données tirées de domaines très différents, c'est-à-dire la santé, les services sociaux, l'éducation, et cetera.
Je pense que c'est le bon moment pour le faire, parce que nous disposons de bons exemples à différents niveaux. Notre expérience de la mise en oeuvre est suffisante, et je pense que nous pouvons en tirer des enseignements qui nous permettront de créer quelque chose de mieux.
Le président : Merci.
M. Berthelot : Je veux revenir sur le commentaire formulé selon lequel la santé, c'est la richesse, et parler des difficultés que représente l'élaboration d'un cadre fondé sur de l'information provenant de différents niveaux. Des problèmes ont été soulevés relativement au couplage, à la production d'estimations exactes et à l'assurance que les données voulues soient introduites dans le système.
Nous devons reconnaître que la santé, c'est la richesse, mais l'information sur la santé est un bien collectif. Nous parlons souvent de protéger la vie privée des citoyens, ce qui est essentiel; nous devons le faire. Nous devons toutefois trouver un juste équilibre entre la protection des renseignements personnels et le fait d'utiliser l'information concernant un groupe de la population pour éclairer l'élaboration de nos politiques et de nos stratégies.
Nous devons reconnaître que l'information sur la santé — et je dis « information » parce qu'il s'agit non seulement de la santé mais aussi des services sociaux et du chômage — est un bien collectif. Je sais que certains commissaires à la vie privée un peu partout au pays essaient d'établir un équilibre entre le respect de la vie privée et le bien collectif, mais je ne pense pas que nous allons assez loin. Nous devons utiliser tous les renseignements que nous recueillons à propos des citoyens pour en apprendre davantage sur la société : où nous en sommes, quelle direction nous prenons, comment nous nous tirons d'affaire, où nous nous situons par rapport au reste du pays et par rapport aux autres pays. Cet exercice est essentiel pour faciliter la collecte de cette information.
Je souscris totalement à l'affirmation de M. Hollett selon laquelle nous devons commencer par l'établissement d'un cadre. Nous ne devrions pas partir à la pêche aux données ou faire du forage de données. Nous ne devrions pas simplement obtenir des données et essayer d'y trouver une signification. Nous devrions tout d'abord établir un cadre conceptuel. Celui qui nous a été présenté aujourd'hui sur les stades du cycle de la vie est un début. Il faut absolument établir un cadre pour pouvoir déterminer comment les différentes sources d'information sont reliées, comment elles peuvent éclairer la discussion et comment elles peuvent être utilisées à différents niveaux.
J'aimerais parler des différents niveaux d'information. Il faut reconnaître que les données locales diffèrent des données régionales en ce qui concerne la santé. Les autorités sanitaires ont des besoins particuliers qui peuvent dépasser ceux d'une collectivité ou d'une organisation au niveau provincial. Dans cette optique, le cadre conceptuel ne devrait pas se situer à un seul niveau; il devrait reconnaître le rapport entre ces différents niveaux. Il est très important de tenir compte du fait que, dans les grandes villes, vous devez savoir ce qui se passe dans les différents quartiers.
Le cadre conceptuel qu'on aura établi tiendra compte des différents niveaux auxquels l'information peut être utilisée, et il sera instructif quant au type d'information dont nous avons besoin et à la façon de la recueillir. Par exemple, il ne serait probablement pas très utile de faire une enquête longitudinale au niveau de la collectivité. Les enquêtes longitudinales permettent normalement de comprendre des phénomènes qui sont de nature un peu plus générale. Si vous voulez comprendre les facteurs qui influencent le développement des enfants, ces facteurs ont probablement certains déterminants communs dans l'ensemble du pays. Il est essentiel de procéder à une étude longitudinale, ce que Statistique Canada a fait, pour essayer de comprendre ces facteurs. Cependant, je ne pense pas que vous seriez en mesure de financer la collecte d'information dans le cadre d'une telle étude, même si la taille des échantillons est établie au niveau de la collectivité.
Un cadre bien conçu vous permet de déterminer le type d'information dont vous avez besoin à chaque niveau. Les enquêtes ponctuelles et les données d'administration sont géniales. Les données d'administration englobent tout le monde qui a accès à un service. Elles permettent en fait d'obtenir de l'information au niveau de la collectivité. Grâce à ces données, il est possible de s'intéresser à une région géographique très petite. Toutefois, encore là, vous devez relier vos données à votre cadre.
Pour faire suite aux propos du Dr Neudorf et de M. Hollett, les données doivent être produites de façon stratégique dans un format clés en mains. C'est génial d'avoir des bases de données de recherche, mais lorsqu'un législateur ou un décideur a une question, il a besoin d'une réponse dans trois heures ou dans trois jours, pas dans trois mois ou dans trois ans, une fois que l'article est publié.
Nous devons agir de façon stratégique. D'où l'importance du cadre au regard des questions auxquelles vous essayez de répondre. Dès que vous avez ces questions, vous pouvez établir un cadre, recueillir des données et créer des outils en partenariat avec les différents intervenants. Ces outils évolueront avec le temps; vous ne réussirez pas du premier coup, mais vous essayez de fournir de l'information clés en mains.
Une partie du travail est terminée. Grâce au cadre d'indicateurs de la santé élaboré par Statistique Canada et l'Institut canadien d'information sur la santé, nous avons produit conjointement beaucoup d'information à la conférence des régions sanitaires. Nous devons mettre à profit ce travail.
Nous devons parvenir à un meilleur consensus pour ce qui est de l'information qu'il faut recueillir et de l'information dont nous avons besoin pour éclairer les décisions au niveau municipal, au niveau des régions sanitaires, au niveau provincial et au niveau pancanadien. Cette étape est essentielle pour élaborer le bon système d'information.
Certains intervenants représentés à cette table pourraient jouer un rôle dans différents domaines — l'Institut canadien d'information sur la santé, Statistique Canada et l'Agence de la santé publique. L'Inforoute Santé jouera un rôle de premier plan lorsque le dossier médical électronique sera mis en oeuvre dans les bureaux de médecins et nous permettra de comprendre ce qui se passe dans le domaine des soins de santé primaires. Ils peuvent travailler ensemble pour établir certaines normes, en fonction d'un cadre précis, en ce qui concerne le contenu de l'information que nous devons recueillir.
Nous devons aussi faire la synthèse des données recueillies. Par exemple, de nombreux documents de synthèse ont été produits par le passé dans le cadre de l'Initiative sur la santé de la population canadienne. Que savons-nous de l'indice de masse corporelle au Canada? Est-ce que l'indice de masse corporelle varie d'une province à l'autre? Quelles en sont les conséquences pour les enfants? Savons-nous s'il y a des interventions? L'intervention et la recherche, c'est une chose, mais c'en est une autre de résumer les connaissances que nous avons de l'intervention. Savons-nous quelles interventions fonctionnent? Le cadre doit aussi comprendre un volet portant sur la synthèse des connaissances.
J'ai parlé du niveau auquel les données doivent être recueillies. Nous devons veiller à ce que le cadre ne soit pas simplement une structure d'information; il doit permettre de recueillir de l'information qu'il est possible de transformer en mesures concrètes au niveau approprié.
Le président : Merci. Je donne maintenant la parole à M. Smith, pour qu'il réponde à la question du Dr Neudorf.
Mark Smith, directeur associé, Centre manitobain de la politique de santé (répertoire), Université du Manitoba : Merci beaucoup. Je suis heureux d'être ici.
J'aimerais souligner le fait que, au Canada, nous excellons dans la collecte d'une grande quantité de renseignements détaillés sur les services que nous offrons à nos citoyens et sur les rapports qu'ils ont avec le système de soins de santé, le système d'aide sociale, le système d'éducation et ainsi de suite. Nous ne réussissons toutefois pas très bien à utiliser les renseignements recueillis pour produire de l'information à l'intention des gens qui évaluent les politiques et les programmes et qui prennent des décisions à cet égard.
Dans mon domaine de travail, c'est-à-dire la création de dépôts de données, nous avons compris qu'il faut investir beaucoup de temps pour établir des relations avec le gouvernement en vue d'accroître cette capacité.
Le Dr Taylor m'a rappelé ce matin que, il y a une dizaine d'années, tous les gouvernements provinciaux étaient capables de mesurer les maladies chroniques et d'en faire rapport au niveau provincial. Or, il a fallu que Santé Canada prenne les choses en mains et dise que nous devions accroître cette capacité, non seulement au sein des provinces mais dans tout le pays, par exemple en créant le Système national de surveillance du diabète, qui ne touchait qu'une seule maladie chronique. On travaille depuis 10 ans à l'élaboration de ce système uniquement.
On en est au point où on peut étendre la capacité à toutes les maladies chroniques. C'est ce que nous sommes en train de faire, en collaboration avec l'Agence de la santé publique du Canada. Ainsi, une grande infrastructure a été mise en place et des relations ont été établies entre un grand nombre de groupes, principalement entre le milieu universitaire et le gouvernement. Les gouvernements n'ont pas la capacité nécessaire pour s'acquitter de cette tâche. Ils doivent se tourner vers l'extérieur et renforcer leurs relations de confiance avec les groupes universitaires. Cela ne concerne que le domaine de la santé. Or, on parle des disparités en santé et il faut inclure un grand nombre de ministères, comme les services sociaux, l'éducation et la justice. Il faut bâtir une infrastructure qui permettra de recueillir des données provenant de plusieurs gouvernements et commencer à relier les systèmes entre eux de diverses façons.
Ce processus est actuellement en cours au Canada, par l'entremise de l'IRSS, l'Institut de recherche en services de santé, à Toronto, du Manitoba Centre for Health Policy et de l'initiative de la Colombie-Britannique sur les données démographiques, que l'on a rebaptisée dernièrement. C'est un travail d'élaboration qui se déroule en coulisse et dont nous commençons à pouvoir tirer parti grâce à des mesures comme les comptes communautaires, où l'information peut être analysée et faire l'objet de rapport. Comme l'a souligné M. Hollett, nous avons mis au point les bonnes méthodologies pour le faire, et c'est ce qui est important.
Pendant que nous cherchons un moyen de bâtir cette infrastructure de l'information sur la santé au Canada pour examiner les déterminants sociaux, nous devrions prêter une attention particulière à la façon dont nous soutenons les initiatives provinciales qui visent à rassembler les données pour permettre aux universitaires et aux chercheurs de mettre au point des méthodologies que les gouvernements, les législateurs et les décideurs pourront utiliser.
J'aimerais parler brièvement du dossier médical électronique. M. Sheridan n'a pas tort, mais j'aimerais faire une mise en garde. Au Canada, cela fait probablement deux décennies maintenant que nous travaillons avec de l'information recueillie de façon courante — je parlerais ici d'information de base —, et nous commençons tout juste à vraiment comprendre ce que cette information signifie et comment l'interpréter. Le dossier médical électronique est un tout nouveau bébé, si je puis dire. En fait, il n'est même pas encore né. On ne sait pas encore combien de temps il nous faudra pour comprendre ce que les données nous disent, et pour élaborer les méthodologies voulues afin d'éclairer le travail des législateurs et des décideurs. Je pense que cette aventure va nous prendre encore deux décennies. Nous devrions commencer avec les ressources que nous avons aujourd'hui et continuer en incorporant les nouvelles sources d'information à mesure qu'elles se présenteront. Notre pays doit disposer de cette capacité de base, dans les provinces et à l'échelle nationale.
Le travail d'un groupe comme celui-ci pourrait permettre d'assurer un certain leadership pour ce qui est du développement et de la coordination. À l'heure actuelle, on traite ces questions de façon isolée. La plupart des provinces qui ont cette capacité travaillent seules et ne collaborent pas avec d'autres administrations provinciales. Pourtant, nous avons beaucoup à apprendre de la collaboration, les uns avec les autres et avec des organisations nationales comme Statistique Canada et l'Institut canadien d'information sur la santé, ainsi que des mécanismes de diffusion dont le Dr Neudorf et M. Hollett ont parlé. Cette collaboration est importante, mais les activités qui constituent la base de ce travail, c'est-à-dire recueillir des données et encourager les ministères à travailler ensemble, sont tout aussi importantes.
Le président : Merci beaucoup. Le sénateur Eggleton veut passer à un autre aspect de la discussion.
Le sénateur Eggleton : Merci à tous d'être ici. C'est une bonne discussion; c'est très agréable.
Je ne sais pas si mes commentaires entrent dans cette section ou plutôt dans la section portant sur le couplage des données, ou peut-être dans les deux. Vous nous avez parlé de votre expérience et de ce que vous perceviez comme des lacunes et des besoins. Nous avons entendu M. Sheridan parler de partenariat et le Dr Neudorf parler de la « meilleure solution ».
J'aimerais qu'on discute de la façon d'y arriver. Quelle est l'architecture organisationnelle? Comme je fais partie du gouvernement et que mon rôle est d'aider à l'élaboration des politiques publiques, j'essaie de comprendre comment nous allons passer du point A au point B. La question touche beaucoup d'acteurs, non seulement ceux qui se trouvent dans cette salle et qui représentent les différents paliers de gouvernement. Nous parlons des déterminants de la santé dont traitent en vase clos de nombreux ministères au sein du gouvernement, aux niveaux fédéral, provincial, territorial et local, ainsi que les collaborateurs non gouvernementaux. La question touche beaucoup d'acteurs. Qui devrait être responsable? Comment devons-nous nous organiser? Quelle est l'architecture de l'organisation?
M. Hollett : J'aimerais faire un commentaire qui ne répondra pas directement à votre question, mais, à mon avis, c'est un point important dont il faut tenir compte. Pour que ça fonctionne, les provinces doivent jouer un rôle plus important qu'elles ne l'ont fait jusqu'ici. À l'heure actuelle, c'est Statistique Canada qui sert de dépôt. L'organisation a pris l'initiative d'essayer de rassembler les données pour toutes les provinces. Il y a eu là un grand avantage, mais aussi un inconvénient. Si on essaie de faire en sorte que les gens au niveau de la collectivité et du quartier utilisent les données qui les concernent, comme ces collectivités et ces quartiers font partie d'une province, la province a tout intérêt à participer.
Au Canada, nous avons un système qu'on appelle le Système national de présentation des statistiques, sous la direction du statisticien en chef du Canada. Chaque province et territoire a un coordonnateur statistique. La plupart des provinces et des territoires disposent de lois sur la statistique qui ressemblent à celle qui régit Statistique Canada, qui leur confèrent le pouvoir de produire des statistiques, de créer des données, de coupler des données et ainsi de suite, de façon professionnelle. Le problème, c'est que le système est faible. Je ne veux offenser personne mais, en même temps, je veux dire ce que je pense. Je pense que le leadership a été faible. Le leadership de Statistique Canada n'a pas été assez fort. Quand les gouvernements provinciaux et territoriaux ont établi des unités pour faire ce travail, ils avaient une vision et des ressources, et les programmes ont bien commencé. Au fil du temps, cependant, alors que ça allait de mieux en mieux pour nous dans les provinces, on a commencé à faire peu de cas de tout ce que nous faisions.
À titre d'exemple, mon organisation contribue à 90 p. 100 de ce qui est présenté au Cabinet. Pourtant, les seules fois où l'on fait mention de l'agence de statistique de Terre-Neuve-et-Labrador au Cabinet, c'est lorsqu'un représentant est sur place pour travailler directement sur quelque chose, ou bien lorsque quelqu'un se rend au Cabinet et que l'on craint qu'il y ait des problèmes; alors là, ils veulent dire que les données leur ont été fournies par nous. Ce n'est pas une question sans importance. Si nous voulons que ça fonctionne, le système doit être assez solide pour que les agences de statistique puissent contribuer là où il le faut, et nous devons rallier les provinces; il faut aussi obtenir l'investissement nécessaire. L'aspect financier lié à certains de ces éléments n'est pas banal. Le fardeau devra être partagé.
Je suis allé en Australie deux fois. Des gens là-bas qui s'intéressaient aux comptes communautaires m'ont fait venir parce qu'ils ne disposent pas d'un système comme celui que nous avons au Canada. Il y a le Bureau de la statistique de l'Australie et quelques bureaux locaux répartis sur le continent australien. Toutefois, avant de partir, le statisticien en chef précédent a établi un mandat formel pour le Bureau de la statistique de l'Australie selon lequel il devait solliciter la collaboration des communautés pour recueillir et échanger des données utiles aux communautés.
La première fois qu'ils nous ont demandé de nous rendre sur place, nous leur avons dit deux choses : d'une part, nous leur avons expliqué comment il est possible d'échanger des données au moyen des comptes communautaires et, d'autre part, nous leur avons assuré qu'il n'y aurait aucune conséquence néfaste s'ils décidaient d'échanger des données. Les États n'ont pas tous une agence de statistique, mais les ministères de la santé et du travail et les autres ministères de chaque État veulent tous garder leurs données pour eux. On nous a fait venir là-bas pour faire bouger les choses et, apparemment, ça a fonctionné, car ils ont fait beaucoup de progrès. J'y suis retourné pour différentes raisons, notamment parce qu'ils voulaient discuter davantage de notre expérience de la mobilisation des communautés pour ce qui est des données.
Bref, pour qu'une démarche de ce genre soit fructueuse, les provinces doivent y trouver leur compte. Il faut être conscient que le travail à faire sera différent, que certaines parties des gouvernements provinciaux et territoriaux doivent être renforcées et que le partenariat entre ces gouvernements et Statistique Canada doit être consolidé. Leur partenariat est passable à l'heure actuelle, mais il n'est pas suffisamment solide.
J'ai été directeur de la Newfoundland and Labrador Statistics Agency pendant 10 ans, et je crois que mes affirmations sont justes. Les lacunes du système ne profitent à personne. Les éléments sont là, mais ils doivent être renforcés. Pour que cette initiative soit une réussite, les gouvernements provinciaux et territoriaux doivent travailler de concert, sans quoi on se retrouvera aux prises avec un système dont les éléments sont incohérents. Et à cause de cela, il pourrait arriver que le gouvernement fédéral propose une nouvelle approche en matière de santé des populations et que les provinces n'y adhèrent pas, alors que les communautés qui ont des problèmes sont situées dans les provinces.
Le sénateur Callbeck : Monsieur Sheridan, vous avez parlé des dossiers de santé électroniques, des progrès que nous faisons et du fait que les premiers ministres ont tous, selon vos dires, convenu d'élaborer ce système de concert.
Mark Smith a mentionné l'expression « de façon isolée », en ce sens qu'il y a beaucoup de cloisonnements. Où en sommes-nous avec ce système? Ensuite, dans vos observations, vous avez dit que l'instauration d'un système commun était une importante priorité. Où en sommes-nous sur ce point?
M. Sheridan : C'est une bonne question. La réussite repose manifestement sur une architecture de systèmes que nous avons mis deux ans à concevoir. Pendant que nous l'élaborions, nous nous sommes dit qu'il devait y avoir un ensemble précis de normes et une procédure établie pour la conservation des données dans les systèmes d'information, et qu'il devait y avoir des normes précises concernant le stockage et la transmission de ces données. Il nous a fallu beaucoup de temps pour nous entendre sur la structure de l'architecture des systèmes, la capacité et le temps dont les gens auront besoin pour la mettre en place au sein de leur administration. Nous en sommes bel et bien arrivés à un consensus au sujet de l'architecture et des normes, et les systèmes et l'architecture servent à mettre en place les systèmes de dossiers électroniques qui sont actuellement mis en œuvre dans les provinces.
Je m'interroge sur la remarque de M. Smith voulant qu'il nous faudra deux décennies pour maximiser l'utilité de l'information pour ce qui est des politiques, de la recherche, de l'analyse, « et cetera », une fois que nous aurons recueilli les données en question et qu'elles seront utilisées à des fins cliniques. J'espère que nous arriverons à faire mieux que ça. Et j'espère que cette initiative nous donnera l'occasion... je ne dis pas que tout sera fait en deux ou en trois ans, mais, vu mon train de vie actuel, je ne serai pas là pour en voir le dénouement, donc je travaille fort pour que cette initiative donne les meilleurs résultats possible à court terme.
À ce stade-ci, nous nous sommes entendus sur la configuration des données et la forme que devraient prendre les normes. En fait, ces systèmes sont actuellement mis en œuvre. Ils ne sont pas tous identiques. Certains ont reconnu qu'il existe des différences au sein du système de soins de santé, mais les fondements, c'est-à-dire l'architecture, sont maintenant établis.
Le sénateur Callbeck : Pourquoi ne peuvent-ils pas être identiques? Je ne comprends pas.
M. Sheridan : La capacité d'aller de l'avant des différentes administrations n'est pas la même; compte tenu de ce qui est en place à l'heure actuelle pour chacune d'elles, des différences fondamentales les séparent. Nous en sommes conscients. Diverses approches ont été explorées.
Le Royaume-Uni, quant à lui, a privilégié une approche de remplacement intégral. Le pays a investi plus de 60 milliards de dollars pour remplacer ses systèmes et les uniformiser. Nous sommes conscients que cette approche ne fonctionnerait probablement pas. C'est pourquoi nous avons opté pour une approche selon laquelle, lorsqu'il est possible de le faire, nous mettons les systèmes à niveau, nous veillerons à ce qu'ils respectent les normes et s'intègrent à l'architecture.
Le sénateur Callbeck : Ils respecteront les normes, mais ne seront pas identiques. Dites-vous que nous n'aurons jamais des systèmes identiques?
M. Sheridan : Non, les administrations n'auront jamais des systèmes parfaitement identiques. Nous aurons un ensemble commun d'architectures dont les dépôts d'images diagnostiques, les systèmes de médicaments et les systèmes de laboratoire nous permettront de conserver et d'échanger des renseignements. Dans chacune de ces administrations, il y aura des dépôts où nous pourrons conserver ces renseignements importants. Ces dépôts seront interopérables et reflèteront une vision et une approche communes, mais ils ne seront pas nécessairement identiques dans chaque administration.
Le président : Il ne reste que sept minutes à cette série de questions. Nous essaierons donc de donner la parole au plus grand nombre possible d'intervenants et nous passerons un peu plus tard à la question de la protection des renseignements personnels. Madame Burton, c'est à votre tour.
Christine Burton, directrice, Développement stratégique et politique rurale, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Au Secrétariat rural, nous ne traitons pas autant de données sur la santé que les personnes assises autour de cette table et nous ne les examinons pas de façon aussi approfondie qu'eux, mais j'espère que notre expérience leur sera utile. En fait, je me reporterai à certains commentaires que M. Hollett et M. Neudorf ont faits.
Le Secrétariat rural fait partie du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, mais je dis souvent que cela est attribuable à un accident de parcours. Nous devions être intégrés ailleurs, mais nous sommes responsables de ce qu'on appelle un « dossier horizontal » et, de ce fait, nous sommes en contact avec des ministères fédéraux et avec nos collègues des gouvernements provinciaux.
Je parlerai aussi brièvement de notre base de données sur les collectivités. Comme l'a mentionné M. Hollett, le bien- être social et économique des collectivités et des particuliers est notre pivot. Dans une collectivité saine, il y a des débouchés économiques, des services économiques, des activités récréatives, des soins de santé, des services d'éducation, « et cetera », ce qui contribue à éliminer les cloisonnements qui nuisent à la compréhension du bien-être des collectivités.
Je dis souvent que donnée n'équivaut pas à information, qu'information n'équivaut pas à savoir et que savoir n'équivaut pas à sagesse. Toutefois, l'acquisition de données est le premier pas vers la sagesse, et c'est à cette faculté que doivent faire appel les décideurs du gouvernement et des collectivités.
Mesdames et messieurs, membres du comité, vous savez pertinemment que cette tâche peut être ardue, et non seulement en raison du volume de données, de leur complexité, de leur diversité et de leurs liens, mais aussi parce qu'il faut déterminer comment les rendre accessibles aux utilisateurs. Elles ne doivent pas uniquement être accessibles au sens propre du terme, mais également compréhensibles, attrayantes et gérables, et elles doivent répondre aux besoins des utilisateurs, notamment les décideurs des instances supérieures du gouvernement ainsi que des administrations locales et des organisations non gouvernementales.
La Base de données sur les collectivités du Secrétariat rural est un outil cartographique en ligne gratuit qui fournit des données cohérentes et fiables de nature socio-économique et démographique sur l'ensemble des collectivités et des régions du Canada, c'est-à-dire plus de 2 200 collectivités rurales au pays. Le Secrétariat rural a conçu cet outil en collaboration avec des partenaires des provinces, des territoires et des collectivités, dans le cadre du soutien permanent apporté par le gouvernement du Canada aux collectivités rurales, parce qu'on considérait qu'un outil était nécessaire pour permettre aux responsables de comprendre la situation de leur propre collectivité par rapport aux autres et ainsi, de prendre des décisions éclairées. Notre base de données comporte plus de 700 indicateurs sur les communautés et les régions. Cependant, ils se fondent sur des données de recensement, ce qui signifie qu'ils s'appliquent aux années 1996, 2001 et 2006. J'ai ressenti de la jalousie quand j'ai entendu parler des comptes communautaires, qui comportent des données pour plusieurs années où il n'y a pas eu de recensement.
La Base de données sur les collectivités comporte un vaste éventail d'indicateurs, dont certains se rapportent à des déterminants non médicaux de la santé comme l'éducation, l'emploi, la structure familiale, le revenu et le logement. Il y a aussi des données sur les collectivités, comme la proportion d'Autochtones, la composition de la population immigrante par région d'origine et le type de collectivités visées, des données ventilées selon le sexe et l'âge, « et cetera ». C'est un outil qui permet de réduire le temps et les ressources nécessaires pour recueillir et analyser des données sur les collectivités, les régions, les provinces et les territoires. Un de ses éléments clés — que les comptes communautaires n'ont pas — est qu'il peut produire des cartes interactives. La plupart des comptes communautaires présentent des tableaux, des graphiques, « et cetera ». Grâce aux outils cartographiques, on peut arriver à susciter l'intérêt des gens qui n'ont pas une grande expérience de l'utilisation des données.
Les collectivités rurales et leurs habitants ont toujours eu besoin de données de qualité sur lesquelles s'appuyer pour prendre des décisions réalistes et éclairées. Il y a plusieurs sources de données locales au Canada, mais les données sur les collectivités étaient assez obscures et complexes. Il leur était difficile de recueillir ces données et d'y avoir accès de façon à pouvoir les utiliser. En les présentant d'une manière dynamique, c'est-à-dire au moyen de cartes, de tableaux et de diagrammes interactifs, on favorise la diffusion et la compréhension des données statistiques, ce qui peut être très difficile pour les gens qui ne travaillent pas quotidiennement dans le domaine.
Partout au pays, on se sert de la Base de données sur les collectivités pour élaborer des programmes, mener des projets d'urbanisme, prendre des décisions et rédiger des propositions. Les collectivités peuvent désormais élaborer des propositions plus précises, qui leur permettent de répondre plus adéquatement aux véritables besoins plutôt que de parer aux problèmes apparents. Elles peuvent mieux cerner les problèmes réels. On s'en sert également à des fins d'enseignement ainsi que pour comparer le rendement des collectivités et créer des profils de développement socio- économique.
À la question de savoir si les autres gouvernements bénéficieraient de l'adoption du modèle des comptes communautaires, nous répondrions oui. Il présente l'information et la structure autour du concept de bien-être. Il contient un grand nombre de données, de renseignements et d'exemples. Il renferme des données sur de nombreuses régions géographiques, alors que nous en offrons seulement sur un nombre limité de régions. On peut chercher de l'information par exemple sur un arrondissement scolaire ou un district de santé donné, ce qui est utile aux collectivités. Il présente une longue liste de données accessibles à partir d'autres sites. De plus, il renferme un plus vaste éventail de données que notre base de données au sujet du nombre d'enseignants, du nombre de bénévoles, de la qualité de l'air, du niveau d'infrastructure, « et cetera ». Nous n'avons pas cela dans notre base, mais nous croyons qu'il est très important de prendre en considération la capacité cartographique de tout modèle susceptible d'être adopté par le gouvernement fédéral.
Un exemple d'outil cartographique en matière de santé qui pourrait intéresser le comité est la carte Web interactive en matière de littératie en santé du Conseil canadien sur l'apprentissage. J'attire votre attention sur ce site en particulier, car il pourrait présenter un certain intérêt pour vous du point de vue de la santé.
On nous a demandé s'il fallait consolider ou rationaliser les efforts de coopération interdisciplinaire, et nous croyons que oui. Le Dr Neudorf a parlé de l'expérience entre les provinces. Je peux témoigner de l'expérience du gouvernement fédéral. Un comité interministériel se penche actuellement sur les moyens d'améliorer la collaboration et de relier nos différentes bases de données. Le volume peut être un problème. Les bases de données deviennent trop lourdes vu le grand nombre de données à gérer. Il y a aussi une question de sécurité et de protection des renseignements personnels. On pourrait se retrouver avec une base de données gigantesque. Nos collègues de RHDCC se sont trouvés aux prises avec cette situation et ils ont dû subdiviser leur base de données en raison de problèmes de sécurité et de protection des renseignements personnels, et parce qu'ils n'arrivaient pas à gérer l'information. La gestion des données peut devenir très lourde, tout particulièrement lorsqu'il y a des intérêts divergents en jeu.
En conclusion, nous estimons que les bases de données qui regroupent des renseignements d'une manière utile pour les collectivités et non seulement pour les statisticiens et les mordus de politique offrent de bonnes possibilités. Nous aimons ce type de données, mais nous essayons de rendre nos données accessibles aux collectivités et aux particuliers pour qu'eux aussi puissent les mettre à profit.
Michel Frojmovic, directeur, Acacia Consulting and Research : Je vous remercie de me recevoir aujourd'hui. Je suis ici en fait en raison de ma collaboration avec la Fédération canadienne des municipalités, qui apporte son soutien au Système de rapports sur la qualité de vie, qui ne sera pas présenté au comité comme un cadre applicable à l'échelle nationale. Je contribue également à la Stratégie d'accès communautaire aux statistiques sociales, une initiative qui vise à fournir des statistiques sociales aux municipalités et aux groupes communautaires à l'échelle locale, et tout particulièrement dans les grandes villes. Voilà quelques exemples de travaux.
Les observations que je souhaite faire concernent les municipalités. Ce que je vais dire reprend ou renforce beaucoup de points qui ont déjà été soulevés, et c'est tant mieux. Deux mots semblent sortir du lot : « géographie » et « infrastructure ». Pour ce qui est de la géographie, il importe de comprendre si on observe des déterminants sociaux de la santé ou des inégalités en matière de santé et de comprendre la situation de la région. Les inégalités à l'échelle provinciale et nationale masquent forcément un grand nombre d'inégalités que nous tentons de comprendre. Il est important de connaître les limites des administrations municipales et de saisir ce dont nous avons parlé plus tôt aujourd'hui, à savoir les limites inframunicipales et les limites des quartiers, des régions, non seulement pour comprendre ces inégalités, vu tout ce que font les administrations municipales, mais également pour tenir compte des déterminants non médicaux de la santé. Il est donc important de regarder les choses sous l'angle des municipalités.
Quand il est question de géographie, les données régionales sont un aspect essentiel. Une administration municipale qui travaille à une initiative municipale doit composer avec des limites et des frustrations : par exemple, elle ne veut pas avoir à orienter les indicateurs dans les données pendant qu'ils sont en cours d'élaboration. Les municipalités ne veulent pas y aller à l'aveuglette. Quand on essaie d'appliquer des indicateurs à l'échelle locale, il apparaît fondamentalement impossible de les mesurer pour différentes raisons. Il est important d'avoir cette forme de sensibilité pour pouvoir comprendre la dynamique à l'échelle locale. D'ailleurs, le recensement saisit parfaitement la dynamique des régions. Le défi consiste donc à rendre compatibles les données sur la santé, tout particulièrement les données administratives, avec les données régionales recueillies par le biais du recensement.
Quant à l'initiative d'Inforoute, une question sur le plan pratique a été soulevée : y aura-t-il, pour l'ensemble des données recueillies, une colonne qui indique une adresse postale ou un code postal, c'est-à-dire un élément qui nous permette de prendre toutes ces données et de les relier aux régions en question. Au bout du compte, c'est la façon dont nous procédons. Nous trouvons quelque chose qui, à partir des données d'admission à l'hôpital et des données connexes, nous ramène au lieu de résidence, ou au lieu de travail de la personne. Voilà ce qui fait que ça fonctionne. En règle générale, lorsque ces renseignements ne sont pas recueillis systématiquement, alors ils sont perdus. Les personnes qui travaillent à ce niveau-là savent que lorsqu'on forme des ensembles de données administratives, le moindre renseignement est crucial. Nous les désignons sous le nom de données administratives parce qu'elles sont recueillies à des fins administratives, et non pas pour les besoins des politiques. Il faut tenir compte dès le départ de leur application en ce qui a trait aux politiques et à la recherche. L'avantage de l'initiative d'Inforoute, c'est que nous en sommes à nos premiers pas. Pour que l'initiative soit une réussite, il faut adapter les nombreux systèmes de données administratives en place. Voilà le défi. Nous recueillons des renseignements sur une région donnée en mettant l'accent sur l'aspect géographique. Nous venons tout juste d'entendre parler des fonctions cartographiques. Les systèmes d'information nous permettent d'intégrer des données sociales et des données sur la santé. Les systèmes d'information géographique ont été conçus à cette fin.
Le Canada s'est beaucoup amélioré sur ce plan au cours des deux ou trois dernières décennies. Il existe d'ailleurs un programme du nom de GéoConnexions, dirigé par Ressources naturelles Canada, qui appuie ce type d'intégration. Ce travail est en cours.
On s'interroge également au sujet de l'accès aux données. J'ai mentionné la Stratégie d'accès communautaire aux statistiques sociales, qui rassemble les diverses organisations des municipalités, les arrondissements scolaires et les districts de santé. La façon dont ils accèdent aux données est très importante. Il existe des outils à cette fin. La méthode de base consiste à appeler directement Statistique Canada, et on pourrait attendre des mois pour obtenir un ensemble de données. Toutefois, il est possible de programmer à distance. Statistique Canada dispose aussi d'un modèle de centre de données de recherche doté d'un accès à distance. Trouver le moyen de permettre aux programmeurs compétents d'assurer cette fonction n'importe où au pays fait partie du défi à relever.
Encore une fois, nous en revenons au point de vue des municipalités dont nous avons beaucoup parlé ce matin. C'est captivant.
Pour ce qui est de l'infrastructure, j'ai essayé de trouver une analogie entre les routes et les autoroutes et ce dont nous discutons aujourd'hui. Il s'agit de construire une infrastructure nationale de données régionales. Ceux parmi nous qui travaillent dans le domaine ne considèrent pas que cette infrastructure soit farfelue; elle est fondamentale. Beaucoup de projets d'infrastructure de données sociales et de données sur la santé sont prêts à être lancés. Toutes sortes d'emplois qui pourraient être assez répartis entre les hommes et les femmes sont associés à ces projets. C'est d'ailleurs une question qui a été soulevée au sujet des investissements dans l'infrastructure.
Je me demandais si l'analogie avec les routes et les autoroutes était convenable. J'aimerais bien que quelqu'un dise qu'elle va trop loin. Cependant, j'ai parfois l'impression que nous nous préoccupons trop de savoir quels véhicules circuleront sur l'autoroute. Est-ce qu'il s'agira de véhicules utilitaires sport ou d'autres types de véhicules?
La première étape dans la construction d'une infrastructure est d'acquérir les droits de passage. On peut s'occuper de tous les autres détails par la suite. Il peut être légitime de se demander si nous voulons construire un réseau ferroviaire ou un réseau pour les voitures et les camions, mais nous avons peut-être déjà la réponse. Il semble que nous n'ayons pas investi dans l'infrastructure de base, à savoir l'acquisition des droits de passage, pour relier de nombreuses initiatives en cours.
L'intégration de données sociales régionales et de données régionales sur la santé à l'échelle locale dans les provinces présente un grand intérêt. Le défi consiste à déterminer comment les intégrer, mais on le fait à l'aide de l'infrastructure. Comment gérons-nous la complexité et la diversité des données? Le danger associé au cadre national est de trop simplifier et de ne pas tenir compte de la complexité à l'échelle locale. Peut-être que le cadre devrait être davantage axé sur la définition d'un ensemble d'objectifs stratégiques et de résultats visés. Même un ensemble rigide d'indicateurs pourrait ne pas porter fruit au final. Et nous aurons alors consacré tout notre temps à concevoir les voitures plutôt que l'infrastructure fondamentale.
Certains points doivent être soulignés du point de vue des administrations municipales. Dans une optique géographique, il est impératif de comprendre comment tout ce dont nous parlons ici se concrétise à l'échelon des municipalités ou des quartiers. Ces considérations semblent essentielles pour comprendre la santé des populations et disposer d'un ensemble d'interventions efficaces. Par ailleurs, du point de vue de l'infrastructure, il convient de se demander comment mettre à profit les investissements des XXIe et XXIIe siècles dans les infrastructures en ne se souciant pas uniquement de l'asphalte.
Vivek Goel, président-directeur général, Agence ontarienne de protection et de promotion de la santé : J'ai travaillé comme chercheur dans le domaine de la santé publique pendant environ dix ans à l'époque où ces initiatives étaient à l'étude. Je suis ensuite devenu administrateur d'université pour me reposer un peu. Je suis de retour pour mettre sur pied une agence de santé publique pour l'Ontario.
Je n'ai pas pu suivre de près les progrès qui ont été faits. Je sens que certains sont insatisfaits, mais la plupart des organisations représentées à cette table n'étaient pas là il y a dix ans. Il y avait Santé Canada et Statistique Canada, et nous avons maintenant l'Institut canadien d'information sur la santé, l'Initiative sur la santé de la population canadienne et l'Agence de la santé publique du Canada. Beaucoup de progrès ont été faits à l'échelle nationale.
Je ne crois pas que nous manquions d'indicateurs. M. Wolfson peut attendre un peu. Je pense que quelqu'un a mentionné qu'il y a 600 indicateurs dans ses données. Les épidémiologistes de la santé publique de l'Ontario ont une liste de 300 indicateurs sur lesquels les services de santé établissent des rapports. Il est certain que nous devons obtenir un consensus. Je crois comprendre qu'il y a eu une autre conférence de concertation sur les indicateurs pancanadiens. J'ai l'impression que les choses vont continuer de bien fonctionner.
Nous ne manquons pas de données; en fait, ce qui nous manque, c'est de l'information et des connaissances tirées de ces données, et la capacité de les regrouper. Ce qu'il nous faut, c'est une idée claire de ce que nous voulons faire avec ces données ou un ensemble défini de questions que nous voulons poser, comme nous l'avons dit plus tôt. Je ne crois pas qu'on puisse poser ces questions avant que les objectifs soient clairs. L'article que vous avez présenté traitait de cet aspect.
À l'heure actuelle, les objectifs en matière de santé au Canada sont une série d'énoncés idéalistes. Toutefois, ils ne tiennent pas compte du plan opérationnel et n'expliquent pas quelles mesures seront prises, auprès de quelles populations et quelles seront les échéances. Inforoute Santé s'est fixé comme objectif d'atteindre 50 p. 100 des Canadiens d'ici 2010. J'ai bien hâte de voir s'il sera atteint. Il s'agit d'un objectif mesurable, et c'est ce qu'il nous manque en ce qui a trait à la santé des populations. On ne peut pas commencer à définir un ensemble d'indicateurs clairs avant d'avoir fixé ce genre d'objectifs.
J'aimerais aborder quelques autres points. J'ai dit qu'il y avait beaucoup de données, mais il est clair qu'il y a aussi beaucoup de lacunes. Je vous signale qu'il y a des lacunes dans les données fondamentales et qu'il faut y remédier avant de s'engager dans de nouveaux domaines. Monsieur Wolfson, à quelle année faut-il remonter pour avoir des statistiques complètes sur la mortalité?
M. Wolfson : 2005.
M. Goel : Nous sommes maintenant en 2009. Ce n'est pas que les données ne sont pas disponibles. Ces questions se rapportent au prochain point à l'ordre du jour. Il reste des questions fondamentales à régler au sujet de l'échange des données de base desquelles on peut dégager des mesures éprouvées qui tiennent compte d'une foule de renseignements concernant par exemple la mortalité et le poids à la naissance. Ces données nous donnent des détails sur des régions géographiques très précises qui nous permettent d'observer les inégalités et les disparités et de suivre de près les programmes et les changements.
Toutefois, nous ne pourrons pas produire de telles données très rapidement. De fantastiques nouvelles possibilités s'offrent à nous, mais nous devons tenter d'obtenir une partie de ces données fondamentales en temps voulu pour pouvoir faire des comparaisons à l'échelle internationale.
Le système des dossiers de santé électroniques sera certainement de grande envergure. J'espère qu'on ne mettra pas 20 ans à y arriver. Je sais que la priorité absolue de la charte d'Inforoute Santé est de produire des systèmes d'information clinique, comme M. Sheridan l'a souligné. Il ne faut surtout pas oublier les utilisations secondaires. Je sais que le système comprendra les six caractères des codes postaux. Nous savons qu'il aura cette fonction, mais quand? Voilà une question importante.
Il importe également de considérer les autres utilisations de ces systèmes. Je vous conseille d'éviter de parler d'» utilisations secondaires des données » lorsqu'il est question par exemple de surveillance de la santé des populations, car ces utilisations sont importantes. Nous tombons dans un piège lorsque nous qualifions les utilisations cliniques et les utilisations liées à la population et à la recherche d'» utilisations principales ». C'est comme si tout le reste devenait secondaire. Il existe bien des utilisations secondaires, et certaines sont aussi importantes que les utilisations principales.
À titre d'exemple, j'ai appris il y a quelques semaines que l'ethnicité était une variable qui avait été abandonnée. Je ne sais pas quel est le statut actuel de cet élément dans le tableau du système de santé publique, et je ne connais pas le fondement de cette décision. Du point de vue de la santé des populations, l'ethnicité est une variable très importante. Je présume qu'il s'agit d'un cas où quelqu'un a décidé que, du point de vue d'un utilisateur principal, il serait difficile de recueillir cette donnée, et que, à l'une de ces tables fédérales-provinciales, cette variable a été abandonnée. Cette optique doit être appliquée à toutes les tables de décision concernant toutes ces élaborations de système.
La question des données locales a été soulevée fréquemment, et je crois qu'il est important de s'assurer que nous disposons de l'information à l'échelle géographique la plus petite possible. Je crois que quelqu'un a dit dans un certain sens que les subdivisions ne permettront pas de cartographier un quartier. Le code postal composé de six caractères est le meilleur code local que nous ayons. La capacité de prendre cette information et de l'analyser de nouveau de différentes manières dans l'ensemble de nos systèmes est importante.
Il est également important pour nous d'apprendre d'autres disciplines — les comptes communautaires ratissent certainement large — et du secteur privé. Consultez une firme comme Environics par exemple; ils pourront tout vous dire sur un côté d'îlot. Ils possèdent les profils des personnes qui y vivent et, à des fins de marketing, ils savent ce qui passe dans chacune de ces maisons. Les méthodes que ces firmes utilisent ne s'appuient pas sur la collecte de toutes ces caractéristiques détaillées pour chaque maison. Elles utilisent les données recueillies dans le cadre du recensement, ainsi que les données qui proviennent de multiples autres sources, puis elles déterminent des valeurs à l'aide de techniques de modélisation afin de créer des profils pour ces quartiers. Nous pouvons en apprendre beaucoup sur le type de travail que nous désirons réaliser pour élaborer les types de rapports qui sont importants au niveau communautaire.
À mon avis, la partie la plus stimulante de ma participation à cette réunion a été l'examen des comptes communautaires. J'ai exploré le site Web. C'est un outil extraordinaire qui présente une foule d'information au niveau communautaire. Cependant, pour bon nombre de ces variables, si je cherche à approfondir un aspect de ma collectivité que je souhaite mieux connaître, la réponse que j'obtiens est qu'il n'y a pas de données de disponibles pour cette collectivité, et on obtient l'information du niveau géographique supérieur, ou parfois de plusieurs niveaux supérieurs. Certaines de ces autres méthodes pourraient être utilisées pour créer ensuite une approximation ou une imputation de ce qui se passe dans une collectivité donnée.
Pour conclure avec la question du sénateur Eggleton concernant l'architecture organisationnelle, je demanderais que l'on ne crée pas d'autres organisations. Nous sommes comblés d'avoir celles qui sont représentées ici, mais nous n'avons pas besoin d'autres organisations dans ce domaine. Je crois, comme l'a dit M. Berthelot, que les partenariats et les modèles doivent être très clairs. Il est important de travailler de concert avec les provinces et les territoires ainsi qu'avec le gouvernement fédéral. Je crois que l'Initiative sur la santé de la population est un modèle qui a bien fonctionné dans le domaine qui nous occupe. Les projets ont été mentionnés à plusieurs reprises ce matin. Il s'agit d'une petite organisation, mais d'une organisation nécessaire dans ces domaines et qui peut aider à jeter des ponts entre les nombreux autres groupes qui travaillent au niveau national ainsi qu'aux niveaux provincial et territorial.
Le sénateur Eggleton : En réponse à cette affirmation, monsieur le président, je tiens à souligner que je n'ai jamais suggéré de créer une nouvelle organisation. Je parlais de ce qui pourrait être fait pour en arriver à un partenariat et de qui pourrait assumer les rôles de direction.
Le président : Nous devons nous pencher sur les questions de l'établissement de liens et de la protection des renseignements personnels. Nous avons jusqu'à onze heures pour ce faire. Les prochains intervenants sont M. Wolfson, M. Berthelot, Mme Dodds et M. Smith. Peut-être que vous quatre pourriez parler de ces deux questions. Autrement dit, parlez de ce dont vous vouliez parler et ajoutez-y les questions de l'établissement de liens et de la protection des renseignements personnels.
La seule chose que je dirais à cet égard c'est que je ne suis pas un spécialiste de la haute technologie, mais que j'ai perdu plus d'heures de ma vie que je n'ose l'admettre à siéger à des comités qui se penchaient sur la question de l'élaboration de dossiers médicaux électroniques et sur le développement initial de l'Inforoute. Il aura fallu cinq ans de travail pour ce faire. Ce qui me renverse, c'est tout le temps que nous avons passé à discuter de la protection des renseignements personnels. Encore une fois, le simple chirurgien que je suis a toujours pensé que c'est le patient qui est le propriétaire de l'information. Laissez-le installer les pare-feu de son choix et divulguer l'information qu'il est prêt à faire verser dans la banque de données, et que la vie continue. Mais, j'imagine que c'est une vision trop simpliste.
M. Wolfson : Je souhaite revenir brièvement sur certains des commentaires qui ont été faits précédemment. Tout d'abord, la question de la petite zone géographique. Nous observons instantanément, à Statistique Canada, que plus la région géographique s'affirme, quand on passe de l'échelle nationale à l'échelle provinciale, puis de l'échelle provinciale à l'échelle municipale, puis de l'échelle municipale à l'échelle de la région sanitaire, plus l'intérêt pour les données augmente. Il ne fait aucun doute que cela est important.
M. Goel a souligné qu'une question se posait au sujet de la disponibilité des données sous-jacentes. Nous devons être prudents et ne pas tenir le recensement de la population, par exemple, pour acquis. Le recensement de la population est composé de deux parties : la partie 2(a), qui est fondamentale et nécessaire pour dresser la liste des circonscriptions et d'autres choses du genre, et la partie 2(b), qui est un sous-échantillon que l'on retrouve dans le formulaire long distribué à un ménage sur cinq. Tous les cinq ans, il y a un débat au sein du gouvernement concernant les éléments qui devraient s'y trouver et la manière dont il sera financé. En fait, pour obtenir l'information dont nous parlons, concernant la santé et les déterminants, il faudrait que la partie 2(b) soit allongée afin de fournir un cadre pour certains types d'évaluation.
Comme, j'en suis convaincu, M. Hollett pourrait nous le dire, c'est une chose de connaître les chiffres de population par industrie et par emploi, mais c'en est une autre de connaître le pourcentage de fumeurs et les données relatives à l'activité physique à l'échelle du quartier. Nous ne les avons tout simplement pas. Dans une certaine mesure, comme l'a mentionné M. Goel, la modélisation peut être utile, mais parfois, il est préférable de ne pas se fier aux approximations inhérentes à la modélisation.
Quelqu'un a formulé un commentaire, je ne me rappelle plus qui, voulant que les trucs relatifs aux quartiers et les trucs longitudinaux ne vont pas ensemble. Pour les membres du comité qui n'auraient pas entendu parler du travail de Clyde Hertzman, de la Colombie-Britannique, voilà un bon exemple de travail au niveau communautaire avec des indicateurs de capacité d'apprentissage. Un suivi des enfants est ensuite effectué pour évaluer les résultats. Il semble que ce soit un processus qui stimule les collectivités qui doivent travailler ensemble.
J'aimerais parler un peu de la protection des renseignements personnels pour aller dans le sens d'un commentaire qui a été fait sur la question du sénateur Eggleton. Je tiens à réaffirmer ce que M. Berthelot a dit au sujet de l'aspect intérêt public des données dont nous parlons. Au cours d'une allocution que j'ai présentée récemment, j'ai obtenu l'accord de tous en disant que la protection des renseignements personnels au pays est entourée d'une aura de peur. En dépit du débat que nous avons eu, je crois que cette peur existe bel et bien. Et j'ajouterais qu'il existe, à mon avis, une peur de l'embarras.
Dans le cadre de mes fonctions à Statistique Canada, nous avons travaillé pendant trois ou quatre ans avec la Loi sur la statistique. Le statisticien en chef a écrit à tous les sous-ministres de la santé du pays pour leur dire qu'un demi- million de personnes nous avaient donné l'autorisation de lier leurs réponses au sondage à leurs dossiers de santé provinciaux et il a demandé aux sous-ministres de nous fournir ces dossiers de santé provinciaux. Jusqu'à maintenant, deux provinces ont signé un protocole d'entente et deux autres sont sur le point de le faire. Cependant, cela prend des années. Et aux termes de la Constitution, les statistiques sont du ressort du gouvernement fédéral. C'est la Loi sur la statistique fédérale qui nous confère le pouvoir de collecter ces données. Nous examinons régulièrement toutes les lois provinciales, et toutes confèrent le droit de divulguer ces données si cela est exigé par la loi, ce qui constitue une ouverture pour Statistique Canada. Malgré tout, les choses semblent s'éterniser. Je peux comprendre que si vous êtes fonctionnaire et peu enclin à prendre des risques, il est plus simple de refuser que de prendre le risque de transmettre les données.
Pour répondre à la question du sénateur Eggleton concernant qui doit assumer la responsabilité de la direction dans tout ceci, je ne suis pas certain d'avoir une bonne réponse, mais il est utile de retourner dans le temps. Au début des années 1990, l'ancien sous-ministre de la Santé, qui faisait alors partie du Comité canadien de l'information, a demandé à Martin Wilk, à titre d'ancien statisticien en chef, d'examiner le système d'information sur la santé du Canada. Martin Wilk n'y est pas allé par quatre chemins. Il a dit dans sa description sommaire que notre système d'information sur la santé se trouvait dans un état déplorable. À titre d'ancien statisticien en chef, il lui aurait été facile de dire qu'il donnerait plus de poids à Statistique Canada. Cependant, il ne l'a pas fait et cela n'a pas été recommandé dans le rapport. Nous avons eu de nombreux débats à cet égard. Il a plutôt recommandé la création de l'ICIS, malgré le fait que l'ICIS n'ait pas évolué de la manière prévue initialement. L'idée de ce rapport était de dire qu'il y avait un trop grand nombre d'acteurs dans l'univers de l'information sur la santé pour que Statistique Canada, un organisme fédéral, joue le rôle de leader. Il fallait créer une sorte de coalition, un partenariat qui rassemblerait autour d'une même table des sous-ministres, des professionnels de la santé et des chercheurs. Dans le rapport, on appelait ce regroupement le Conseil de coordination des renseignements sur la santé. Une recommandation distincte suggérait de créer une organisation qui permettrait de rassembler, par exemple, les données financières et les données sur les patients qui se trouvaient auparavant dans deux organisations distinctes. Nous devons regrouper les dollars et les gens si nous voulons faire une évaluation du rapport coût-efficacité.
Le conseil de l'ICIS est extrêmement efficace et il fonctionne bien. Naturellement, il s'est surtout consacré à la gestion de l'organisation de l'ICIS, ce qui est bien, mais le partenariat avec l'Inforoute — conformément à la directive de la CSM — nous a récemment donné un exemple de la possibilité d'examiner plus largement ce que nous n'appellerons pas utilisation secondaire, mais utilisation par catégorie d'intervenants, par exemple, du nouveau dossier de santé.
J'ai examiné les accords des premiers ministres qui sont entrés en vigueur en 2001-2002 et on y insiste — jusqu'à quel point? Je ne sais pas, je n'étais pas dans la salle, donc je ne connais pas les détails — pour obtenir une meilleure information sur la santé. Le problème, c'est qu'on la reliait à l'obligation de rendre compte, ce qui a immédiatement mis les provinces en colère. Bien qu'il y ait eu d'importants transferts financiers du gouvernement fédéral aux gouvernements provinciaux, il y avait cette autre dimension qui, du point de vue de l'information, n'était peut-être pas très heureuse.
J'ai maintenant l'impression — et je suis tout à fait d'accord avec le commentaire de M. Goel et ceux des autres personnes assises à cette table — que ce n'est pas le moment de créer une autre organisation. Il serait préférable que nous trouvions un moyen d'établir un partenariat entre les principales organisations. Ensuite, il faudra voir qui applique quoi et comment. Il me semble que la Conférence des sous-ministres devrait jouer un rôle clé en l'occurrence. Il faudrait peut-être envisager mettre sur pied un secrétariat pour le partenariat qui se chargerait d'assurer la cohésion de l'ensemble et qui agirait à titre de centre de liaison principal avec la CSM.
J'ai lu l'intégralité du témoignage de Mel Cappe et de Jim Mitchell que le comité a entendu il y a de cela environ un mois. On y a beaucoup parlé en termes de gros programme et on y a fait référence aux prestations pour enfants et à la nécessité pour le premier ministre du Canada et les premiers ministres des provinces de jouer un rôle de leader pour ce genre de choses. Cela peut être tout à fait approprié pour le lancement de programmes, mais l'information doit en tout temps avoir une structure apolitique ou dépolitisée. Elle doit être au-dessus de la mêlée, peu importe les bons mots que l'ancien greffier a eus relativement à l'importance du premier ministre du Canada et du leadership, peut-être uniquement pour mettre les choses en marche. Je crois les avoir entendus utiliser dans leur allocution les mots « à l'insu », et avoir mentionné que cela doit être quelque chose qu'il faudrait tenir pour acquis.
Le président : Monsieur Wolfson, je tiens à vous répondre avant les autres intervenants. Une des possibilités que nous avons envisagées était d'avoir un ministère fédéral du développement humain et les ministres provinciaux correspondants. Je peux vous dire qu'elle ne serait pas bien reçue. Ce sont les principaux comités du Cabinet qui doivent diriger cette initiative. Vous avez parfaitement raison : les spécialistes de l'information n'ont pas du tout à intervenir sur ce plan. Ils peuvent travailler de leur côté.
Nous avons opté pour ce modèle en raison de la productivité. Notre rapport n'en est pas encore à sa version finale. Nous devons la rédiger de telle sorte qu'elle puisse être transmise un jour. Nous écoutons attentivement ce que tous les témoins ont à dire. Je voulais simplement que vous le sachiez.
M. Berthelot : Pour répondre aux commentaires du sénateur Eggleton concernant les personnes qui assumeront le leadership, je crois que le problème de la santé de la population ne porte pas uniquement sur la santé, mais sur la population. C'est très général. À cette époque, je ne crois pas que quiconque ait le mandat d'avoir réponse à cette question.
La santé de la population, en elle-même, est une politique et une science relativement jeune, malgré le fait que la santé publique n'est pas un concept nouveau. La santé de la population et les disparités en matière de santé sont des concepts relativement nouveaux. Le rapport Lalonde a été déposé en 1973. Rien n'avait vraiment été fait avant cette année-là, et on peut se demander s'il était question ou non de la santé de la population. C'est une nouvelle science, et je ne sais pas au juste qui a le mandat d'assumer l'ensemble du leadership.
Cependant, je crois que le leadership est assumé dans certains domaines. L'ICIS et l'Inforoute Santé, de concert avec Statistique Canada, l'ASPC et Santé Canada — je crois qu'il s'agit principalement de l'ICIS et de l'Inforoute Santé —, ont reçu un mandat à la suite de la Conférence des sous-ministres. Ils doivent s'assurer que, pour l'élaboration et la mise en oeuvre du dossier de santé électronique — et, plus particulièrement, ce qu'on appelle le dossier médical électronique, ou encore le dossier électronique du cabinet du médecin —, nous ne visons pas uniquement à nous doter d'un système qui permettrait la transmission de l'information entre les médecins afin qu'ils puissent fournir des soins cliniques aux patients, mais nous songeons aussi à l'avenir. Ces systèmes sont à portée de main. Nous en sommes à l'étape de la mise en oeuvre, mais il s'agit de la deuxième vague de l'important investissement — M. Sheridan peut me corriger — fait dans l'Inforoute Santé. Nous devons penser aux normes de contenu, non seulement aux normes d'infrastructure et aux normes de transmission de messages, mais également à l'information à recueillir. Devons-nous recueillir des données sur l'ethnicité? Et les codes postaux? Devrions-nous valider les codes postaux et la codification géographique de sorte qu'ils seraient déjà prêts à être utilisés dans le système et pour la santé de la population?
Comment faire pour récupérer l'information contenue dans les systèmes axés sur les transactions et créer un dépôt de données dans lequel on pourra regrouper efficacement les données de l'ensemble du Canada, comparer ces données et avoir une compréhension générale des traitements efficaces — pour les cas de diabète, par exemple? Il existe de petites difficultés dont les sous-ministres devraient être informés. Que font-ils que d'autres régions ne font pas? Pour y arriver, il est nécessaire d'avoir un dépôt de données qui est régi par une norme commune.
Est-ce que cela signifie que le dossier de santé électronique et le dossier médical électronique doivent être les mêmes dans l'ensemble du pays? Non. Un des objectifs est d'organiser les soins, et les soins sont organisés différemment. En Ontario, il y a les centres d'accès communautaire; au Québec, il y a les CLSC; et dans les provinces de l'Ouest, il y a les régions sanitaires. Le système est organisé d'une manière tout à fait différente; ainsi, il peut être nécessaire pour un médecin d'obtenir une information précise lorsqu'il doit intervenir.
Cependant, cela ne devrait pas empêcher la création d'un mécanisme — parce qu'il n'est pas nécessaire d'avoir une vraie base de données — qui permettrait de s'assurer que l'information est recueillie selon certaines normes de contenu afin d'avoir des données qui peuvent être utilisées dans le système et de déterminer ce qui fonctionne ou non dans le système, et qu'il y a de l'information sur la santé de la population et, principalement, sur les soins de santé primaires.
Il y a un certain leadership, mais qui a le mandat de créer cette infrastructure sur la santé de la population? L'ICIS serait heureux d'avoir un rôle à jouer, d'être un partenaire. C'est ainsi que nous travaillons. Nous n'avons pas d'autorisation législative. Nous ne pouvons nous prévaloir de la Loi sur la statistique, mais nous pouvons invoquer la bonne volonté. L'information que nous produisons est utile et cela fait 15 ans que nous en produisons avec beaucoup de succès.
Quelqu'un doit être mandaté pour assumer la direction en partenariat avec les principaux intervenants. Statistique Canada est sans doute en bonne position, car elle dispose d'un recensement qu'elle peut décortiquer de différentes manières. Toutefois, au cours des 15 dernières années, l'ICIS a fait office de dépôt des données sur l'information sur la santé. Nous devons inclure les services sociaux, mais je crois que nous devons mandater quelqu'un pour prendre le leadership de cette démarche. Je ne parle pas de créer une nouvelle organisation, nous en avons suffisamment. Nous avons besoin de leadership, de travailler en partenariat plutôt qu'en application d'exigences législatives. C'est ça la solution.
En ce qui a trait au leadership, nous en avons besoin pour la protection des renseignements personnels ou le bien collectif. Nous avons une commissaire à la protection de la vie privée, mais pas de commissaire au bien collectif. Je sais qu'il s'agit d'une image, et je sais que certains commissaires à la protection de la vie privée tiennent compte du bien public. Je ne lis pas tout ce qui s'écrit sur la protection des renseignements personnels, mais je n'ai pas lu un seul rapport qui critique le fait que nous n'utilisons pas l'information recueillie pour prendre des décisions de politique éclairées et élaborer des programmes convenablement étayés pour le bien des citoyens. Ce rôle semble faire défaut. Nous avons besoin de ce rôle de défense des intérêts.
L'ICIS défend les intérêts en matière d'information et c'est pourquoi nous travaillons avec des partenaires : les provinces, les autorités sanitaires et tous les partenaires du système de soins de santé et de la santé de la population. Ce rôle de leadership qui met en évidence la raison pour laquelle nous devons utiliser l'information recueillie sur les individus pour enrichir notre débat de société est essentiel à l'amélioration de l'économie et de la santé de la population.
Ce n'est pas nouveau. Statistique Canada a donné à l'un de ses édifices le nom de Jean-Talon en souvenir de Jean Talon qui a procédé à un recensement de la colonie au début du régime français dans le simple but de se faire une idée de ce qui en ressortirait pour planifier efficacement le développement de la colonie. Le concept de l'utilisation de données globales à l'égard des individus pour le bien collectif fait réellement partie de notre culture. C'est ça le recensement, mais je ne vois pas là un rôle de leadership. Le leadership doit être assumé ailleurs.
Le président : Nous aurons maintenant une discussion de 45 minutes sur un sujet particulier. Nous cédons la parole à Mme Karen Dodds.
Mme Dodds : Comme vous nous l'avez demandé, monsieur le président, j'aimerais revenir sur les questions du sénateur Eggleton et du sénateur Callbeck avant de poursuivre.
Quelle architecture est requise? Je ne suis pas du tout portée sur la technologie. Lorsqu'on m'a parlé pour la première fois de l'Inforoute et que j'ai discuté avec M. Sheridan et d'autres personnes de l'architecture et des normes, j'ai eu beaucoup de difficulté à comprendre de quoi il retournait, puisque j'utilise l'information pour prendre des décisions et élaborer des politiques. J'ai utilisé différentes analogies et je crois que j'utiliserais également celle de M. Frojmovic. Pour moi, la question est de savoir s'il s'agit d'une autoroute ou d'un chemin de fer.
Autrefois, les écartements de voies du chemin de fer étaient différents. Pour poursuivre son chemin, il fallait donc soit changer de voiture, soit opter pour un autre moyen, car il était impossible de passer du système d'une compagnie ferroviaire à celui d'une autre puisqu'il n'y avait pas de normes. L'ensemble des systèmes a été normalisé et on peut maintenant se déplacer.
Si on utilise la vidéoconférence, on est ramené au plus petit dénominateur. Il y a encore des déformations des signaux parce que nous n'avons toujours pas les bonnes normes. Pour moi, l'architecture de l'Inforoute n'est pas semblable à celle d'un édifice. Il s'agit plutôt de choisir entre l'autoroute ou la voie ferrée, ou encore d'opter pour la voie aérienne, puis de déterminer les normes qui s'appliquent.
Quelqu'un a parlé de la conservation et de l'échange des données. À mon avis, l'Inforoute consiste à transférer et à utiliser des données. Il ne s'agit pas d'un instrument pour conserver les données que quelqu'un doit continuellement aller consulter pour les partager. L'Inforoute consiste à transférer et à utiliser les données. Quand on pense à la complexité du système de soins de santé au Canada, je me demande pourquoi nous parlons de « système » alors qu'il n'y en a aucun. Il existe des centaines de milliers de points de services de santé. Il y a de cela deux siècles, des médecins de campagne et des médecins ont commencé à prendre des notes, et c'est ainsi qu'est née la collecte de données. On ne peut espérer tout effacer et recommencer. On doit le faire d'une manière sensible. Le Dr Keon et son équipe avaient, à un certain moment, l'habitude de conserver les données. On doit les mettre à profit. À mon avis, c'est ce que l'Inforoute Santé du Canada a fait en travaillant avec les provinces et le niveau local. À elle seule, l'Inforoute n'est pas garante de succès. Elle doit travailler avec les provinces, et les provinces et l'Inforoute doivent travailler de concert à l'échelle locale.
J'apprécie vraiment votre schéma. Quand je pense à l'Inforoute Santé du Canada, je trouve que nous élaborons d'excellents systèmes sur le système de soins de santé. L'extrémité droite comprendra des données très mobiles et utilisables. Peut-être que très peu d'information sera recueillie sur l'état de santé des personnes. Il est clair que dans la plupart des régions nous obtiendrons des données sur le sexe, quelques données de nature biologique et génétique et presque rien sur le reste.
On pourrait utiliser le modèle de l'Inforoute puis l'appliquer à l'information que M. Smith m'a donnée relativement au dépôt des données de recherche sur la santé de la population du Manitoba. Outre la base de données sur la santé, il possède également des bases de données sur l'éducation et sur des questions sociales. On pourrait aller d'une case à une autre et se demander avec qui il faut ensuite établir un partenariat, à l'échelle provinciale et locale, pour commencer à transférer et à utiliser ces données. On pourrait utiliser un modèle semblable à celui de l'Inforoute pour ce faire.
Il ne fait aucun doute qu'il est nécessaire d'avoir de l'information sur l'activité aux échelles fédérale, provinciale et locale. Une des choses que nous savons sur ces données est que si l'utilisateur ne les trouve pas utiles et simples d'utilisation, cela ne fonctionnera pas. On doit aller directement à ce niveau de détail. À mon avis, ce sont le transfert et l'utilisation des données qui sont importants. Quelqu'un d'autre a parlé d'établir des ponts et une connectivité. C'est essentiel. En ce qui a trait à l'établissement des liens, Statistique Canada compte des années d'expérience, de crédibilité et de confiance à cet égard. Nous pouvons les mettre à profit.
Pour répéter ce que tant d'autres personnes ont dit, la protection des renseignements personnels est de la plus haute importance. De nombreuses personnes souhaiteront que leur information personnelle en matière de santé et d'autres renseignements personnels demeurent confidentiels. Pour reprendre le commentaire de M. Berthelot, il n'existe pas de commissaire au bien public. Quand je regarde ce qui a été élaboré pour l'Inforoute Santé du Canada, et ça ne fait qu'un an que j'occupe ce poste, je suppose que les gens ont initialement pensé à toutes ses différentes utilisations. Je ne peux m'imaginer que nous fassions un tel investissement en pensant qu'il ne serait rentable qu'aux premières lignes, dans le cabinet du médecin avec un patient en particulier. Je ne pense pas que c'est ce que les gens avaient en tête. Nous devons porter une attention toute particulière à la protection des renseignements personnels, mais cela ne devrait pas nous empêcher d'aller de l'avant. Il ne devrait s'agir que d'une chose parmi toutes celles que nous devons prendre en considération pour poursuivre notre travail.
Le président : Pour des raisons de continuité, je demanderais à M. Smith de formuler ses commentaires. Une pause est prévue à 11 heures, mais nous ne vous couperons pas la parole si vous dépassez de quelques minutes.
M. Smith : Merci, monsieur le président. En ce qui a trait à certains de ces commentaires sur ma prévision selon laquelle il faudra 20 ans pour comprendre ces données, j'espère également avoir tort. Toutefois, la réalité est qu'avant de commencer à les comprendre, on doit d'abord y avoir accès. Nous ne savons pas combien de temps durera ce processus, et nous ne connaissons pas les questions de protection des renseignements personnels qui se poseront.
Pour revenir à votre commentaire selon lequel vous avez une idée très simpliste, à savoir que les données appartiennent aux patients, bon nombre de médecins ne le voient pas de cette façon. Ils croient que les dossiers des patients leur appartiennent. C'est ce dont nous parlons ici : des dossiers électroniques des patients. Nous devons résoudre ce problème. Ensuite, nous devons demander aux gouvernements d'organiser ces dossiers électroniques et de les fournir aux gens qui travaillent avec les données.
Aucune de ces sources de données ne sont transparentes. Il faut beaucoup de temps et d'efforts pour essayer de les comprendre. Où trouvons-nous cette capacité? Réside-t-elle au sein même du gouvernement? En général, mon expérience me dit que non. Les gouvernements doivent former des partenariats avec des gens à l'extérieur du gouvernement parce que, souvent, les gens qui développent la méthodologie pour accomplir cet exercice ne font pas nécessairement évoluer leur carrière au sein du gouvernement. Ils la font évoluer dans des établissements universitaires. Il nous faut ce partenariat pour comprendre les données.
Nous ne voulons pas mettre tous nos oeufs dans le même panier. À ce jour, nous en avons mis beaucoup, pour ne rien enlever à Inforoute. Nous avons dépensé 1,5 milliard de dollars pour créer un important et nouveau système de collecte de données cliniques sophistiqué, mais nous n'avons pas dépensé autant de ressources pour essayer de développer la capacité nécessaire à la transformation des données recueillies au moyen de ces systèmes en connaissances, en compréhension et en sagesse. S'il y a une volonté politique qui peut émaner de notre groupe, c'est que le Canada fait un excellent travail dans la création de systèmes de collecte de données. Ils sont partout. Comment pouvons-nous en faire davantage et créer des systèmes qui transformeront les données en connaissances et en compréhension? Où résidera cette capacité?
Mon autre point, qui a été soulevé par d'autres personnes, c'est que lorsque nous parlons du dossier médical électronique, nous ne faisons qu'aborder la question de la santé. Si nous voulons examiner les déterminants de la santé, nous devons établir ces partenariats avec d'autres organismes qui ne disposent pas de nouveaux systèmes de collecte de données sophistiqués.
Il existe certains modèles au Canada sur la façon de recueillir les données. Nous devons ajouter une couche au- dessus de ces modèles pour nous permettre d'exploiter les données et de les transformer en renseignements pouvant être utilisés par des personnes qui se trouvent dans de petites régions. Le modèle des comptes communautaires est un excellent modèle et un point de départ, mais il ne sera pas la réponse à tous les problèmes. Nous devons surtout veiller à investir à un niveau supérieur à celui de la collecte de données.
Le président : Merci, monsieur Smith.
Nous allons maintenant changer de sujet et parler des écarts dans les données et des indicateurs. Nous parlerons également des Autochtones, des groupes ethnoculturels et des obstacles à l'élaboration d'enquêtes de base.
Monsieur Wolfson, vous avez la parole en premier.
M. Wolfson : Il y a ici trois questions distinctes. En ce qui concerne les données locales ou régionales, deux sources principales constituent la fondation, notamment le recensement de la population et diverses sortes de données administratives. Les données sur la santé et les données de l'état civil en sont les principales, et elles constituent des recensements en soi. Toutefois, les gens soulèvent beaucoup d'autres questions, par exemple, l'usage du tabac, l'obésité, l'inactivité physique et les services sociaux.
J'ai déjà parlé de l'idée de renforcer le recensement de la population, ce qui soulève deux questions : la première concerne les données qui sont utiles directement, et la seconde concerne les données qui peuvent être utilisées comme modèles ainsi que la capacité d'estimer ou d'évaluer à un niveau géographique plus détaillé. Cela commence à paraître technique.
Pour ce qui est des disparités en santé chez les Autochtones, l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes vise environ les deux tiers des habitants qui se sont identifiés comme Autochtones. Nous n'allons pas dans les réserves. Les communautés des Premières nations préfèrent mener elles-mêmes les enquêtes. Ça va, sauf que je m'inquiète un peu au sujet de deux principes fondamentaux du point de vue d'un système statistique national. Le premier principe, c'est que les données doivent être, en grande partie, comparables. Il peut y avoir des éléments précis que ces communautés voudraient adapter à leurs propres besoins. Le second principe, c'est que les données doivent être accessibles et assujetties aux contraintes liées au maintien de la confidentialité des microdonnées, et être fusionnées librement, par exemple, avec l'ESCC. Permettez-moi de souligner que cela ne se fait pas sans heurt actuellement.
Du côté des disparités parmi les groupes ethnoculturels, le recensement est probablement le meilleur outil que nous avons, parce qu'il renferme une série de questions détaillées sur l'identité ethnique. C'est un véritable défi. Mon collègue, M. Sheridan, avait beaucoup à voir avec le recensement dans sa vie antérieure, et il sait mieux que moi qu'il s'agit de l'une des questions les plus difficiles du recensement.
Ce n'est pas suffisant d'avoir les données. Nous avons besoin des personnes qui peuvent les faire parler, qui comprennent comment le faire. Je regrette de devoir dire que les universités ne font pas un bon travail à cet égard. J'ai parlé à des gens d'une université, qui déploraient le manque d'habiletés quantitatives chez les personnes qui y sont acceptées. Une partie du problème réside dans la façon dont elles sont informées, mais une autre partie concerne la question des incitatifs pour une jeune personne à développer de bonnes habiletés quantitatives dans ce domaine. Il n'y a pas de possibilité de carrière après ses études. Si nous sommes pour parler du développement de la capacité, il faut non seulement penser à la formation, mais également à l'endroit où les jeunes personnes pourront trouver un emploi après leurs études. Sans une bonne correspondance, il n'est pas surprenant que les jeunes personnes ne choisissent pas de s'inscrire dans ce domaine d'études.
Dr Neudorf : Si on examine la question des écarts, je suis d'accord avec ce que M. Wolfson vient de dire. Du côté des besoins en infrastructure au niveau local, des processus sont en place afin d'essayer de corriger certains des écarts dans les données; toutefois, nous constatons actuellement la mise sur pied, à un niveau local, d'observatoires sur la santé de la population dans certaines des grandes villes, où il existe divers degrés de liens avec l'université. Cependant, ils se situent surtout dans un environnement de pratiques. Un peu comme dans le cas d'une régie régionale de la santé qui cherche à utiliser les statistiques provenant d'un hôpital, des épidémiologistes, des médecins et d'autres personnes analysent les données sur la santé de la population, étudient les pratiques exemplaires et intègrent les données dans des rapports qui sont utilisées pour surveiller les disparités en santé, les inégalités en santé, et cetera.
Ce qui manque actuellement, c'est une façon de nous assurer que ces types d'observatoires étudient l'ensemble du pays, parce qu'il y a une lacune dans ce genre de capacité analytique dans la plupart des ministères provinciaux. À certains égards, la façon doit aussi être en quelque sorte indépendante de cet ordre de gouvernement. Il doit s'agir, peut-être, d'une entente tripartite entre les autorités provinciales et les autorités locales et régionales en matière de santé ainsi que les universités, pour obtenir la combinaison de compétences qu'il nous faut. La capacité de coordonner ces groupes, de les interconnecter et de s'assurer que toutes les régions du pays ont accès à un tel réseau, comme c'est le cas au Royaume-Uni avec son réseau d'observatoires, serait certainement utile.
Au-delà de ce type d'infrastructure, nous avons également remarqué, lorsque nous avons essayé d'exécuter une partie de ce travail ensemble, que les données normalisées sont une chose, mais que le fait de s'entendre sur de petites géographies locales a constitué un obstacle surprenant. Nous pouvons avoir accès aux données du recensement au niveau d'une petite région, mais pour la plupart des autres données, il n'existe aucune entente sur la sorte de petites géographies nichées qui peuvent être groupées au niveau supérieur. Nous travaillons avec la Stratégie d'accès communautaire aux statistiques sociales et avec le Réseau canadien pour la santé urbaine afin de formuler le genre de proposition dans laquelle nous nous entendrions sur les géographies utiles parmi toutes les villes, à des fins de planification et d'élaboration de politiques au niveau local. Si nous pouvions ensuite tous ensemble, parler aux fournisseurs de données et leur dire quelles géographies sont dignes d'intérêt pour nous, la proposition pourrait être rédigée rapidement, au lieu des demandes indépendantes que nous voyons actuellement.
Ce qui nous manque également, c'est une entente commune sur les indicateurs de l'inégalité, de façon que si nous examinons les disparités en santé, divers indices de défavorisation et diverses mesures du revenu sont utilisés. Nous devons nous entendre sur un petit nombre d'indices et de mesures que le Canada utilisera, et nous assurer qu'ils sont disponibles partout au pays. De même, nous travaillons avec le même groupe ainsi qu'avec l'Initiative sur la santé de la population canadienne, l'ISPC, pour arriver à une entente parmi le groupe de recherche et les analystes au niveau local sur ce que cette mesure pourrait être.
Nous travaillons également avec des groupes des Premières nations au niveau local. Nous trouvons cela complexe, évidemment, en raison des multiples niveaux avec lesquels il faut travailler au sein des bandes, des conseils tribaux, des fédérations des conseils tribaux ainsi que des groupes métis. Au niveau régional, nous avons constaté qu'en travaillant d'abord avec un conseil tribal individuel pour obtenir un protocole d'entente sur l'échange de données, nous avons pu savoir, selon la façon des membres de voir les choses, quelles questions doivent être abordées. Ils nous ont indiqué qu'il existe plusieurs raisons d'examiner les disparités en santé chez les Autochtones. La première, c'est de cesser de considérer la question de la culture autochtone comme un facteur de risque. En fait, lorsque nous procédons à des analyses avec eux et que nous utilisons une approche plus holistique pour trouver le risque attribuable dans ces divers déterminants, dans la plupart des cas, le fait d'être Autochtone disparaît de l'analyse en tant que facteur important, une fois qu'on prend en considération les questions de pauvreté, d'éducation et d'emploi. La vraie question qu'il faut se poser, c'est pourquoi la population des Premières nations est représentée de manière si disproportionnée lorsqu'on parle de pauvreté, de problèmes de logement, de chômage, et cetera.
Pour revenir à ce que certains travaux ont donné dans d'autres pays, et aux résultats de recherches au Canada, il faut examiner les problèmes systémiques sous-jacents entourant la discrimination, les questions raciales et, dans certains cas, cibler les programmes qui peuvent s'avérer très efficaces dans le cas de la population, mais inefficace dans le cas des Premières nations. Au bout du compte, nous augmentons le groupe sur les disparités en santé, même si nous réussissons à apporter des améliorations au niveau de la population.
Le partenariat est l'élément essentiel pour faire participer le conseil tribal au niveau local, dès le départ, pas seulement pour concevoir le projet et planifier les programmes, mais également, autant que possible, pour travailler avec lui afin que le programme soit exécuté par des groupes de Premières nations et que les disparités en santé diminuent.
L'approche que nous adoptons du point de vue des données, c'est de diviser les données en couches et de les relier, dans la mesure du possible, au moyen des données d'auto identification que les Premières nations ont fournies à la banque de données administratives et lors du recensement, et de travailler avec elles par l'entremise, peut-être, d'un identificateur unique contrôlé par les Premières nations; elles contrôleraient alors le moment où les données seraient appliquées ainsi que la façon dont elles le seraient, afin que les données soient utilisées de manière appropriée, et que les Premières nations jouent davantage un rôle de direction.
Le président : Merci beaucoup.
Dr Gregory Taylor, directeur général, Bureau de la pratique en santé publique, Agence de la santé publique du Canada : J'aimerais insister sur un point soulevé précédemment, notamment l'isolation d'une partie de la discussion. J'ai de la difficulté à me concentrer sur la discussion, parce qu'elle semble porter surtout sur l'acquisition de données plutôt que sur la façon d'obtenir davantage à partir des données. On a mentionné quelques fois que nous ne tirons pas vraiment avantage des données existantes qui sont à notre disposition. Mes racines sont celles du simple docteur de campagne auquel Karen Dodds a fait allusion. J'ai adopté une approche plus simpliste au cours de la dernière décennie, pour essayer de mettre sur pied deux ou trois systèmes de surveillance des maladies chroniques. Toutefois, nous ne pouvions pas utiliser les données que nous avions. Nous examinions les problèmes cardiovasculaires et le pays disposait de 80 ou 90 banques de données différentes qui étaient d'intérêt pour la surveillance, mais nous n'avions pas les personnes nécessaires pour accéder à l'information, encore moins pour effectuer une partie de l'analyse axée sur les connaissances.
Quand les dossiers de santé électroniques seront mis en ligne, les vannes s'ouvriront à ces données. Je ne suis pas certain que nous serons en mesure de composer avec cela. Nous avons déjà assez de difficulté à composer avec les données existantes, non seulement à faire l'analyse quantitative, mais également l'analyse qualitative, qui est rejetée lors de la prise de décisions stratégiques. Nous ne faisons pas cela avec les données existantes. Si nous voulons parler de l'accès aux données, nous devons également parler de la mise sur pied de la capacité aux niveaux local, intermédiaire et national, afin de faire quelque chose avec les données, ou il s'agira de données pour données; ça ne fera pas avancer les choses.
Pour ce qui est des lacunes, il semble y avoir une lacune en formation, une lacune en ressources humaines et une lacune dans certains autres éléments qui appuient cette infrastructure à mesure que nous progressons. Si nous ne les corrigeons pas, je ne suis pas convaincu que l'investissement rapportera beaucoup.
Le sénateur Cook : Merci à tous d'être ici ce matin. Je dois dire d'emblée que la mine d'informations que je reçois ce matin me donne du fil à retordre. Vous devez comprendre que, personnellement, je suis une personne très ordinaire qui essaie d'accomplir une chose extraordinaire. Cela dit, je vais poser à M. Wolfson la question qui m'a poussée à lever la main.
Avez-vous dit que Statistique Canada ne se rend pas dans les réserves pour recueillir de l'information?
M. Wolfson : C'est ce que j'ai dit, en effet, mais je devrais probablement apporter quelques précisions. Dans le cas du recensement de la population, nous nous efforçons certainement d'aller dans les réserves, et environ 80 p. 100 des réserves collaborent. Dans le cas de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, nous ne tentons pas de nous rendre dans les réserves ou sur les bases militaires ou dans des régions extrêmement éloignées.
Le sénateur Cook : Ont-ils un service équivalent, c'est-à-dire y a-t-il une personne dans la réserve qui effectue le travail que vous effectuez pour le reste de la population?
M. Wolfson : Santé Canada a financé une initiative appelée l'Enquête régionale sur la santé, une enquête menée dans les réserves, qui est gérée par la communauté autochtone. Je crois que c'est l'Organisation nationale de la santé autochtone, l'ONSA.
Le sénateur Cook : Quelle serait la relation entre les deux entités, Statistique Canada et ce nouvel organisme?
M. Wolfson : Elle est faible. Un organisme appelé l'Institut de la statistique des Premières nations a été créé en vertu d'une loi. Le statisticien en chef est membre d'office du conseil. Je ne connais pas très bien l'ISPN. Il aurait été mis sur pied en grande partie pour traiter des questions d'autonomie gouvernementale et pour recueillir des données dans les réserves, par exemple, en ce qui concerne l'information nationale de type comptée. Il s'agit d'une structure éventuelle, mais je n'en suis pas certain. Vous devriez demander à quelqu'un qui connaît mieux que moi la relation entre l'Enquête sur la santé dans les réserves et l'ISPN.
Le sénateur Cook : Serait-il juste de ma part de présumer qu'il s'agit d'une lacune dans le système, de notre point de vue, puisque nous essayons de rédiger ce rapport?
M. Wolfson : Oui, je crois qu'il s'agit d'une lacune importante.
Le sénateur Cook : Quiconque souhaite répondre à la prochaine question peut le faire. Elle porte sur les pensionnats indiens. Je suis membre de l'Église Unie du Canada et je me débats avec cette question depuis longtemps. Il y a eu les excuses. Nous entendons parler de cercles de guérison et de toutes sortes de mesures conçues pour aider les Premières nations à traverser cette terrible période de leur histoire.
De notre point de vue, estimeriez-vous que ce qui s'est passé dans les pensionnats constituerait, dans notre langage, une disparité en santé parmi ces personnes?
M. Wolfson : Il est incontestable que ces expériences sont fondamentales à la santé, au sens large. Bon nombre de ces expériences ont eu des effets négatifs.
Le sénateur Cook : Quelqu'un a-t-il une solution quant à la façon d'aborder le problème? Nous devons le faire. J'aimerais s'il vous plaît avoir un ou deux avis. Nous sommes en train de préparer un rapport qui est destiné à nous tous. Nous essayons d'examiner les lacunes dans le système et la façon dont nous pouvons mieux servir les gens, tout le monde, peu importe où ils vivent. Quelqu'un doit m'aider à trouver cette feuille de route. Si nous voulons nous aider mutuellement, si nous voulons être idéalistes et avoir un esprit sain dans un corps sain afin d'être à notre meilleur, nous ne devons laisser personne pour compte. Je crois qu'il y a des lacunes dont nous devons parler et corriger pour progresser.
M. Wolfson : Si je peux lancer deux ou trois idées, c'est un exemple dramatique et très douloureux d'un problème de santé ou d'un problème qui a des incidences importantes sur la santé. La question évidente qui me vient à l'esprit est la suivante : Quelles interventions pouvons-nous envisager ou sont actuellement réalisées? Est-ce que celles qui sont actuellement réalisées donnent des résultats? Je crois qu'il s'agit d'une question générale qui touche l'ensemble de nos interventions en santé. Si nous voulons comprendre ce qu'ils font, nous devons avoir une façon délicate de déterminer l'état de santé des gens, ainsi que leur mieux-être général, je crois, dans ce cas-ci avant et après l'intervention. Le statisticien en moi dit que j'aimerais avoir une fondation empirique raisonnablement forte pour être en mesure de juger si les gens se sentent mieux et s'ils vont mieux dans les nombreux aspects qui sont pertinents.
Dans ce cas en particulier, il est absolument essentiel que les communautés des Premières nations participent de près à la définition des résultats. Si je pense davantage en tant que statisticien, le questionnaire ne devrait pas seulement être conçu par Statistique Canada. Quelqu'un qui apprécie toute la profondeur et l'ampleur de ce qu'ont signifié ces expériences devrait également y participer.
Les cercles de guérison peuvent être une bonne idée; ils peuvent donner de meilleurs résultats dans certaines communautés que dans d'autres. Selon moi, la question fondamentale pour essayer de comprendre la situation et la régler consiste à démêler tout ça et à comprendre quel ingrédient a fait en sorte que les cercles de guérison ont donné de meilleurs résultats dans certaines communautés que d'autres, parce qu'il y a fort à parier qu'ils ne donnent pas de bons résultats partout.
M. Hollett : Des groupes autochtones et des Premières nations se sont montrés très intéressés par les comptes communautaires. M. Wolfson a une plus grande expérience que moi; je n'ai vu que deux petits morceaux du casse-tête. D'une certaine façon, je constate ce matin une partie de ce que j'ai déjà constaté. Nous parlons des lacunes sans parler d'abord des besoins. Si on ne sait pas quels sont les besoins, on ne sait pas ce qu'on a. Par conséquent, je dirais qu'on ne peut pas vraiment parler de lacunes à moins qu'une personne ait exprimé un besoin particulier qu'elle comprend bien et qu'elle dise : « Voici tel besoin, et il y a une lacune qui y est associée. »
En général, à mon avis et selon mon expérience, ce n'est pas la bonne façon de commencer. Le problème qui peut être lié aux Premières nations et aux groupes autochtones est le même. Lorsque nous leur parlons, comme je l'ai fait à de nombreuses reprises pendant de longues heures, le problème fondamental, c'est qu'ils croient que nous leur demandons de fournir des données afin de les utiliser contre eux. C'est le premier problème.
Deuxièmement, nous essayons de recueillir des données au sujet de ces groupes, mais nous les recueillons sous notre angle. Lorsqu'on parle avec eux des données dont ils ont besoin, ils s'entendent tous pour dire que la santé est importante, que l'emploi est important, et cetera. Bon nombre des mêmes domaines qui selon nous sont importants sont également considérés comme importants, mais ils doivent s'inscrire dans le contexte de leur vision du monde. Selon notre expérience, ça ne se fait pas de cette façon. Ils ne sont pas vraiment intéressés à nous parler.
Les comptes communautaires leur plaisent, et il y a deux raisons pour cela. D'abord, ils sont d'avis que les comptes communautaires s'intéressent à l'utilisateur — le receveur des données, les gens dont la vie est racontée par les données — et ensuite, les comptes communautaires parlent des données dans un contexte plus large. Ils ne parlent pas uniquement des statistiques sur les crimes ou la santé. Les Premières nations et les groupes autochtones apprécient l'approche qui consiste à parler de tous les différents aspects de la vie dans les communautés.
La semaine dernière, j'ai parlé avec des membres de certaines communautés des Premières nations. Deux semaines auparavant, j'ai présenté un exposé à Toronto, et quelqu'un a commencé à me poser des questions au sujet de la conception de données pour des groupes autochtones à Terre-Neuve. J'ai toujours répondu que je ne le ferais jamais. Je ne le ferais pas, même si Statistique Canada pourrait ou voudrait le faire, pour une raison ou une autre. Toutefois, je n'essaierais jamais de le faire sans avoir obtenu un engagement entier de la communauté, parce que le risque de stigmatiser serait trop grand.
Ce n'est qu'une autre façon de dire, selon moi, qu'on doit vraiment travailler avec eux afin de traiter efficacement avec eux. Je sais qu'il y a des lacunes dans notre province, sans connaître les besoins, je peux dire au moins cela et compromettre ma propre déclaration à cet égard. Nous ne pouvons peut-être pas obtenir toutes les données dont nous avons besoin maintenant; nous pouvons peut-être en obtenir une partie en échange de l'engagement de ces divers groupes, parce qu'ils obtiennent les données dont ils ont besoin, si vous comprenez ce que je veux dire. Je ne crois pas que le niveau de succès sera élevé si on dicte ce qui doit être fait sur le plan de la collecte des données pour les communautés autochtones, si on la considère de notre point de vue seulement. Je crois qu'il serait plus avantageux pour les deux parties d'adopter une approche plus innovatrice.
Le sénateur Cook : Vous avez dit que vous êtes allé en Australie deux fois. Y avait-il une interaction avec les Aborigènes d'Australie lorsqu'ils essayaient de faire leur...
M. Hollett : Il y avait une certaine interaction, mais je ne suis pas vraiment entré en contact avec eux.
Le sénateur Cook : Le pays a-t-il reconnu le besoin ou la lacune?
M. Hollett : Oui. Le problème est similaire : les Aborigènes ont une vision différente du monde et des valeurs différentes; la terre est plus importante, la faune et ce genre de choses sont pareilles à ce que nous avons ici, à l'exception des espèces. Les questions sont très différentes sur le plan social par rapport à l'économie, « et cetera ». Toutefois, je comprends qu'il existe un grand intérêt à faire participer les Aborigènes, et l'Australian Bureau of Statistics est prudent mais proactif à cet égard.
Le sénateur Pépin : Si on veut obtenir l'entière participation du groupe, est-il possible alors de les faire participer, en d'autres termes de les embaucher? Nous avons beaucoup d'exposés de ces communautés et beaucoup d'entre elles sont qualifiées pour travailler à différents niveaux, mais elles ne sont pas incluses. Vous serait-il possible d'inclure quelqu'un de la communauté autochtone dans votre travail? Il sera peut-être beaucoup plus facile après cela d'obtenir leur collaboration et d'avoir accès à l'information dont vous avez besoin.
M. Hollett : Des gens des Premières nations sont souvent venus à mon bureau. Il y a deux obstacles principaux qui les ont empêchés de créer leur propre version des comptes communautaires jusqu'à présent. Le premier obstacle, c'était d'essayer de mettre sur pied l'Institut de la statistique des Premières nations et d'obtenir les ressources pour le faire. Cependant, ils étaient tout à fait d'accord pour travailler avec nous dans la mesure où ils nous ont demandé si nous aimerions travailler avec eux, se rendre dans leurs communautés, apprendre à connaître leur culture, leur économie, leurs enjeux, et mettre sur pied une version des comptes communautaires, modifiée et basée sur ce qui était nécessaire selon eux. Ils voulaient également qu'on la mette sur pied et qu'on la tienne à jour pendant au moins cinq ans.
Il est possible de gagner leur confiance, mais ça revient à ce que j'ai dit : il ne suffit pas de faire quelque chose et de dire que c'est bon pour vous parce que je crois que ça l'est. Il faut aborder la question d'un point de vue différent.
Le président : Il est 11 h 45, et nous sommes à un point essentiel dans nos audiences et délibérations.
Le sénateur Eaton, Michael Wilson, Jean Harvey, Vivek Goel, Michel Frojmovic et Mme Dodds veulent tous prendre la parole. Il y a quelques minutes, Greg Taylor a mentionné la grande réalisation qu'est Inforoute Santé du Canada, le dossier de santé qui versera dans le système une foule de nouveaux renseignements. C'est bien, parce que si on regarde notre diagramme, même s'il n'est peut-être pas parfait, ces renseignements nous aideront sur le plan du système de prestation de soins de santé, du cycle de la vie, « et cetera ». Le problème qui subsiste, évidemment, c'est d'obtenir une connectivité dans les déterminants sociaux de la santé.
Voici ce que nous devons décider au cours des 45 à 60 prochaines minutes. Qui fera quoi? Qui dirigera? Je vais prendre un risque et poser la question suivante : est-ce que nous utilisons les comptes communautaires comme modèle à suivre partout au pays? Je sais que les Autochtones sont intéressés à utiliser ce modèle dans leurs propres communautés, pourvu qu'ils en aient le contrôle. Nous devons discuter en détail de cet aspect.
Sénateur Eaton, vous vouliez sans doute parler de quelque chose de totalement différent, et vous pouvez le faire, mais je voudrais mettre l'accent sur ce sujet.
Le sénateur Eaton : Je serais heureuse d'attendre au prochain point de discussion concernant les dossiers de santé électroniques.
Le président : Nous y sommes.
Le sénateur Eaton : Je voudrais simplement poser une question générale. Ce matin, nous avons beaucoup parlé de l'établissement de normes, de la collecte de données, et de la façon dont elles s'appliquent ou ne s'appliquent pas. J'ai une question plus concrète. De quelle façon pouvons-nous normaliser les meilleures pratiques en matière de soins? Si nous établissons des objectifs pour la santé de la population, de quelle façon une personne au Nunavut et une personne au centre-ville de St. John's peuvent-elles bénéficier des meilleures normes de soins en tout temps? Je sais qu'il existe certaines structures dans les provinces, comme Action Cancer Ontario et d'autres programmes, mais comment pouvons-nous normaliser le tout partout au Canada de façon que si vous venez d'une collectivité qui n'est pas axée sur la recherche, vous puissiez tout de même avoir accès facilement aux meilleures pratiques en matière de soins?
Monsieur le Président, nous avons vu un peu cela dans le projet pilote au centre-ville de Vancouver. Cette question n'était pas tellement de nature médicale; elle se rapportait plutôt à l'ensemble des déterminants de la santé. Lorsque nous avons demandé aux responsables qui d'autre au Canada avait examiné leur projet pilote, ils ont répondu que personne ne leur avait posé de questions à ce sujet. Ils ont reçu des demandes de renseignements provenant d'autres pays comme le Venezuela, le Japon et l'Italie, et si nous procédions à cette étude à grande échelle sur la santé de la population et que nous recueillions beaucoup de données, il me semble qu'il serait honteux que nous ne puissions pas y avoir accès de partout.
Le président : C'est ce que nous essaierons de faire au cours des 45 prochaines minutes, soit de trouver un moyen de faire cela.
Monsieur Wolfson, c'est à votre tour. J'ai remarqué que vous avez toujours l'air d'être sur la corde raide depuis les 30 dernières années, mais vous réussissez toujours à vous en sortir.
M. Wolfson : D'entrée de jeu, je dois dire que je n'essaie pas de répondre à la question de façon précise. Cependant, en réponse aux commentaires précédents concernant les écarts, et j'ai laissé de côté un des plus évidents qui montre qu'à long terme le dossier de santé électronique ou le dossier médical électronique offre un potentiel énorme et doit constituer une pierre angulaire des systèmes d'information dont nous parlons.
En ce qui concerne les dossiers de santé électroniques par rapport aux dossiers médicaux électroniques, il semble qu'actuellement, beaucoup de gens croient qu'il y a une distinction claire entre les deux. L'un d'entre eux correspond au système qui préoccupe principalement Inforoute jusqu'à maintenant, et qui a trait, par exemple, au système de congé des patients ou aux images diagnostiques, ou encore aux médicaments ou aux tests en laboratoire. La façon dont je vois les dossiers médicaux électroniques, et corrigez-moi si je me trompe, se rapporte essentiellement à ce que le médecin fait dans son cabinet lorsque vous allez le consulter. Mon médecin utilise le clavier. Je la rends parfois mécontente parce qu'il semble que j'en connaisse plus qu'elle à propos de ce système. Le côté négatif, c'est qu'elle fait ce travail en texte libre et, d'un point de vue analytique, il sera presque inutile et il constituera un pas important en arrière.
Actuellement en Ontario, lorsqu'un médecin facture le système de soins de santé provincial, il doit détailler sa facturation. C'est ainsi que le Système national de surveillance du diabète a été créé dans tout le pays. Vous connaissez la raison pour laquelle une personne se présente au cabinet d'un médecin de première ligne. Si toute la documentation est en texte libre, même si Google est très efficace, on n'a pas pensé à un moyen de faire une recherche de texte. J'ai lu qu'un médecin pouvait avoir 10, 20 ou même 200 façons différentes d'indiquer le terme « diabétique » dans son tableau de texte libre. Nous ne serons jamais en mesure d'extraire ces renseignements. Si vous n'en avez pas encore entendu parler, on peut avoir de grandes craintes à propos d'un éventuel pas en arrière au lieu d'un pas en avant en ce qui concerne la perte de données.
Je voudrais aborder un autre point qui pourrait être lié aux comptes communautaires en tant que modèle. Jusqu'à présent, la plupart de nos discussions étaient liées à la date en tant que données transversales, un portrait pour cette année, l'année prochaine et l'année suivante. C'est absolument fondamental pour surveiller, pour déterminer où nous en sommes, pour relever les tendances, et pour constater si la situation s'améliore ou empire. Nous n'avons pas discuté autant des données longitudinales, et en particulier des données qui sont liées de façon longitudinale au niveau des personnes. Ce contexte est implicite dans le présent tableau des stades du cycle de vie. Selon moi, il est absolument fondamental que nous accordions au moins une importance égale à ce type d'information.
Il pourrait s'agir d'une formulation davantage technique, mais du point de vue d'une base de données ou du traitement des renseignements, il est plus efficace de simplement inscrire les cycles : je suis allé voir le médecin ce jour- là, j'ai obtenu une ordonnance ce jour-là, j'ai eu une intervention un autre jour, j'ai passé un test en laboratoire. Ces renseignements peuvent être alignés afin de devenir un cycle axé sur le patient et, comme on l'a déjà mentionné, le code postal du patient et les renseignements concernant le fournisseur s'y trouveront. Par conséquent, grâce aux systèmes informatiques modernes et à une formation offerte aux bonnes personnes, nous pouvons étudier la situation avec l'intention d'établir certains comptes communautaires. Nous avons les données concernant les codes postaux, alors nous pouvons étudier les taux d'intervention au moyen de l'indice de défavorisation régionale et observer, comme l'a fait le réseau public urbain du Dr Neudorf, qu'il existe vraiment des écarts importants indiquant que quelque chose ne va pas. Vous pouvez parler mieux que moi des politiques qui ont été adoptées.
En même temps, si nous voulons comprendre ce qui fonctionne bien, les gens sont-ils vraiment dans un meilleur état après un remplacement de hanche? Il faut regarder ce qui arrive à ces gens de façon longitudinale. Si nous voulons faire une planification quelconque ou comprendre quelles interventions fonctionnent bien, nous devons le faire également. La structure actuelle du dossier de santé électronique constitue une préoccupation importante pour moi, qui va au-delà des liens longitudinaux. Le tout sera abordé d'un point de vue biomédical. Toutefois, des gens signalent qu'il faut prendre en compte beaucoup d'autres aspects, entre autres les liens avec d'autres dossiers, qu'il s'agisse de dossiers d'absentéisme scolaire, de notes aux examens scolaires ou de dossiers d'aide sociale. Je crains qu'il y ait encore un écart important ici que j'appellerais, en l'absence d'une meilleure formulation, la description vernaculaire de la santé. C'est une chose que votre médecin vous dise que vous avez une hémiplégie — en réalité, nous avons créé un groupe de réflexion sur des questions relatives à l'invalidité hier, et une personne a abordé ce sujet — mais c'est une toute autre chose que de comprendre, du point de vue des patients, s'ils peuvent contourner la communauté et régler le tout eux- mêmes à l'interne, à l'école ou au travail. Si je ne m'abuse, ce genre de renseignements ne devrait pas être inscrit dans le dossier de santé électronique. Par contre, si nous voulons comprendre la situation des personnes en bonne santé et ce qui a des incidences dans leur vie quotidienne, nous devons absolument trouver des façons d'ajouter ce type de renseignements et de s'assurer qu'ils sont inscrits.
Je vais ajouter quelques brèves observations. Il y avait une question qui a été posée auparavant, la question no 7, qui porte sur les obstacles à l'élaboration d'enquêtes de cohortes. Ces enquêtes sont fondées en partie sur des données administratives. J'ai déjà mentionné qu'il y avait un problème fondamental concernant le consentement à partager des renseignements. Si nous parlons de la collecte de données supplémentaires sur l'état de santé, la capacité de fonctionner et les principales corrélations, le médecin ne vous demandera pas de porter un appareil de surveillance des activités et de déterminer votre niveau d'activité ou d'inactivité physique. L'obésité est la cause principale des problèmes de santé ces temps-ci et le fait d'inscrire les calories gagnées et les calories perdues, combien vous perdez d'un côté et combien de nourriture vous ingérez. La collecte de ces renseignements coûtera cher.
En ce moment, une de mes préoccupations — et deux ou trois personnes en ont parlé — est de savoir à quoi serviront les données. Qui sont les utilisateurs? Quels sont les problèmes ou les questions qui motivent ça? C'est ce qu'on doit se demander en premier et c'est ce qui doit motiver notre réflexion sur le système d'information dont nous avons besoin. Je serais heureux de vous présenter quelques exemples.
Je ne peux pas m'empêcher de lancer une idée qui pourrait vous paraître étrange. J'ai réfléchi à cet aspect dans un contexte différent lors de conversations avec des collègues des Instituts de recherche en santé du Canada, et je remarque que l'idée de grands projets scientifiques a été acceptée depuis des décennies dans le domaine de la physique des hautes énergies et de l'astronomie et, plus récemment, dans le domaine de la génomique, mais que cette idée n'est pas du tout acceptée dans le domaine de la santé des populations. Dans un autre contexte, j'aime dire que Statistique Canada est le cyclotron des sciences sociales. Le dossier de santé électronique pourrait être le cyclotron de la santé de la population ou, du moins, constituer une grande partie de ses assises. Il serait vraiment merveilleux de pouvoir prendre du recul et de réfléchir de façon approfondie à la façon exacte dont nous dépensons l'argent consacré à la recherche. J'aime bien la cosmologie et les magnifiques images que nous renvoient les télescopes spatiaux, mais je crois qu'il serait plus utile sur le plan social d'effectuer des investissements similaires dans la santé de la population et dans la recherche scientifique fondamentale dans ce domaine. C'est ce que j'avais à vous dire.
Le président : Monsieur Wolfson, la question de la recherche est le dernier point que nous devons aborder.
Jean Harvey, directeur, Initiative sur la santé de la population canadienne, Institut canadien d'information sur la santé : J'aimerais reprendre certains des points qui ont été abordés ce matin. La question de savoir comment nous pouvons atteindre notre but a été un sujet de discussion. Il y a de bonnes nouvelles et nous devons les comprendre. Le Dr Neudorf a parlé des indicateurs de disparité. Hier, nous avons tenu une conférence consensuelle au cours de laquelle nous avons examiné les indicateurs qui sont réunis par l'ICIS et Statistique Canada.
Un groupe a été formé par le biais du Réseau pancanadien de santé publique, qui constitue une initiative de l'Agence de santé publique du Canada, l'ASPC; et des groupes d'experts y sont associés. Je fais partie de l'un de ces groupes, le Groupe d'experts sur la promotion de la santé de la population. Nous avons étudié les indicateurs de disparité et d'inégalité. Le travail de ce groupe d'experts a été présenté lors de la conférence consensuelle d'hier. Je crois donc que certaines initiatives se recoupent bien. Le Dr Neudorf a présenté une partie du travail effectué par le Réseau canadien pour la santé urbaine lors de la réunion d'hier.
De nombreux intervenants sont impliqués et nous les avons réunis, et je crois que des liens intéressants se nouent. Je souhaitais mettre l'accent sur ce point et sur le fait que je crois que c'est très positif. La volonté de faire avancer les choses existe dans ce pays.
Je souhaite soulever la question de la recherche interventionnelle. Plusieurs d'entre nous participent aux activités d'un groupe que l'on appelle l'Initiative de recherche interventionnelle en santé des populations du Canada ou l'IRISPC, notamment l'Agence de santé publique, l'IRSC — qui ne témoigne pas devant le sous-comité, mais qui joue un rôle actif au sein de ce groupe —, nous et d'autres organisations. Nous nous sommes engagés à examiner la question de la recherche interventionnelle et la façon de faire progresser ce type de recherche. Vous parliez de lacunes dans les données, une des lacunes concerne assurément la recherche interventionnelle. Ce type de recherche doit être reconnu comme un type de recherche valable. Les gens doivent être mieux formés dans ce domaine, nous devons donc affecter des ressources à la formation et prendre des engagements en ce sens, et considérer la formation comme un élément important qui permettra de faire avancer les choses. On fait du bon travail, et plus nous nous concerterons pour travailler sur ces éléments, plus nous ferons progresser les choses.
Nous avons produit récemment le rapport que vous venez de recevoir en partenariat avec le Réseau canadien pour la santé urbaine et l'Institut national de santé publique du Québec, l'INSPQ. On a de nouveau réuni les éléments pertinents et les partenaires. Il y a de bonnes nouvelles que nous ne devrions pas perdre de vue lorsque nous nous penchons sur ces questions.
Le président : Merci. Docteur Goel?
M. Goel : Il y a un certain nombre d'éléments sur la table en même temps, je vais donc essayer d'aborder certains d'entre eux. Je m'étais pris une note pour parler des grands projets scientifiques, mais M. Wolfson l'a fait avant moi.
Hier, l'Étude sur la santé en Ontario a été lancée. Dans le cadre de cette étude, on mènera une enquête auprès de 150 000 personnes afin de collecter un vaste éventail de données auprès de personnes à tous les stades du cycle de la vie présentés dans le diagramme. Nous recueillerons également des données communautaires sur le lieu de résidence, et nous procéderons à des mesures environnementales et biologiques et stockerons des échantillons. Cette étude fait partie d'une initiative qui réunit des études similaires comportant des ensembles communs de données de base réalisées, je crois, au Québec, en Alberta et en Colombie-Britannique. C'est un exemple de grand projet scientifique.
J'aimerais souligner le fait que les IRSC ont parlé de mener de telles études pendant des années. Les études qui sont menées d'un bout à l'autre du pays sont réalisées sans la participation des IRSC. Vous avez tout à fait raison sur le fait que d'autres communautés, comme celle de la physique et de l'astronomie, ont réussi à trouver comment financer les grands projets scientifiques, et nous devons montrer de quelle manière cela peut être fait dans notre domaine.
J'aimerais que l'on distingue les enquêtes de cohortes figurant au no 7 de la question mentionnée au no 9 sur la recherche interventionnelle. C'est un élément de la collecte d'information de base sur la santé de la population. Comme M. Wolfson l'a mentionné, nous obtiendrons ces données en utilisant diverses méthodes. Nous avons besoin de ce genre d'études, qui sera l'équivalent de ce qu'a été l'étude coronarienne de Framingham dans les 50 dernières années. Il n'y a jamais vraiment eu rien de tel au Canada. Il faudra de nombreuses années pour produire ce genre de données. Il y a ce que nous pouvons faire grâce aux ensembles de données administratives et au couplage des enquêtes et ainsi de suite — ce que nous avons tenté à plusieurs reprises —, et il y a ce que nous pourrons faire dans l'avenir grâce aux dossiers de santé électroniques et à la possibilité de suivre des personnes pendant tout le cycle de leur vie. Nous devons nous assurer d'élaborer l'infrastructure en tenant compte de tous ces aspects et, espérons-le, nous reviendrons pour discuter de la recherche interventionnelle.
En ce qui concerne la question du sénateur Eaton, je crois que c'est une partie très importante de toute cette discussion. Il ne s'agit pas uniquement d'obtenir un plus grand nombre de données ou encore plus d'information. Il s'agit plutôt d'obtenir les connaissances liées à ces données, le résumé des connaissances que l'initiative sur la santé de la population nous permet d'obtenir, de manière à ce que quand vous présentez un rapport, vous puissiez également présenter des stratégies. Cela s'applique aux données recueillies auprès d'une personne, d'une collectivité et d'une population. D'après de nombreuses expériences, nous savons que la mise en œuvre des dossiers médicaux électroniques peut être une réussite uniquement si on ajoute une valeur pour l'utilisateur principal.
Monsieur Wolfson, mon médecin de famille utilise un système dans lequel les recommandations du Groupe d'étude canadien sur les soins de santé préventifs sont intégrées. En fonction de l'âge, du sexe et des antécédents familiaux, elle obtient au premier coup d'œil une liste de recommandations qui s'applique à la personne. Les interactions médicamenteuses et les antécédents d'allergie et ainsi de suite, peuvent être mentionnés à cette étape des soins.
Dans le cadre de cette discussion, selon un modèle de compte communautaire, nous devons réfléchir au fait que si un utilisateur consulte le système pour savoir quoi faire par rapport à la santé et à un facteur de risque associé à la collectivité, non seulement il obtiendra des données, mais il trouvera également le résumé des connaissances à ce sujet. Je sais que l'Agence de santé publique du Canada a accompli beaucoup de travail à ce sujet, tout comme d'autres organisations. Nous devons nous appuyer sur cette infrastructure de connaissances pour faire avancer l'infrastructure de données et d'information.
La dernière chose que je souhaite commenter est la question de la formation et du personnel. Ce point a été soulevé à quelques reprises et je vais reprendre mon rôle de vice-président et doyen de l'Université de Toronto. Il est difficile de former des gens dans ce domaine. Il faut aborder de nombreuses disciplines différentes. Comme M. Wolfson l'a dit, il est difficile de montrer aux gens ce que sera leur cheminement de carrière. Ils peuvent devenir anthropologue ou économiste; les gens viennent d'une foule d'endroits différents. C'est ce genre de formation qu'on veut avoir. Plus on peut en faire en élaborant ces grands projets, plus on peut créer des possibilités de formation.
J'aimerais également commenter cette question par rapport à mon travail avec des étudiants des cycles supérieurs. J'ai constaté que beaucoup d'entre eux deviennent frustrés en tentant de travailler dans ce domaine. Un étudiant essaie de faire sa maîtrise en un an, un an et demi, et il passe 16 mois à recueillir des données. De nombreuses tentatives ont été faites pour améliorer l'accès aux données et ainsi de suite, mais nous décourageons beaucoup de nos étudiants lorsqu'on les amène à travailler dans ces domaines en raison des obstacles auxquels ils doivent faire face pour effectuer leur travail.
M. Frojmovic : Mes commentaires portent principalement sur la question du leadership, mais j'aimerais également aborder la question des lacunes dans les données dans ce contexte. Je suis d'accord pour ce qui est du domaine des données administratives en santé. Je ne suis pas un praticien du domaine de la santé, c'est donc mon point de vue. Selon moi, nous disposons d'une grande quantité de données et la question est plus liée à l'accès aux données et à leur organisation, qu'à l'investissement dans la collecte de données.
Voici mon point de vue sur la boîte à l'extrémité droite représentant 25 p. 100 à la base du diagramme. Si on regarde plusieurs des autres boîtes, on constate que nous avons des problèmes de collecte de données assez fondamentaux. En tant qu'intervenant en matière de données dans le domaine municipal, il m'est impossible de vous dire aujourd'hui combien de personnes se sont rendues dans un refuge parmi la population de sans-abri au Canada, par ville. Il existe bel et bien une base de données pour essayer de recueillir de l'information à ce sujet, mais nous n'avons pas la réponse à cette question.
Nous avons tenté de comprendre la question de l'aide à l'enfance pendant un certain temps. Nous ne pouvons pas dire grand-chose sur le système d'aide à l'enfance. J'ai découvert il y a deux semaines qu'Industrie Canada avait décidé il y a quelques semaines de ne plus essayer de produire de rapports sur les faillites personnelles par municipalité, et encore moins par plus petits sous-ensembles. Je suppose qu'une faillite personnelle peut avoir un assez grand impact sur la santé d'une personne. Cependant, nous ne disposons pas de cette information.
C'est une chose de collecter des données, mais il faut investir pour trouver comment utiliser ces données. Nous semblons encore tomber dans le piège qui consiste à investir nos efforts dans les 25 p. 100 qui, du point de vue des données, touche le régime de soins de santé, alors qu'il faut également représenter les autres 75 p. 100. Dans certains cas, il s'agit de collecter des données de base et de comprendre l'essence de ce qui se passe dans cet environnement. Il ne faut pas perdre ça de vue.
La question connexe du leadership est qu'il y a un danger concernant la boîte du régime de soins de santé parce qu'il y a une tendance à axer les efforts dans ce domaine. Sur le plan des boîtes, celle du régime de soins de santé est la plus grande, mais cela s'explique probablement par le fait qu'elle aurait pu être fractionnée en plus petites boîtes, tout comme les déterminants socio-économiques l'ont été.
Peu importe d'où vient le leadership, ce dernier doit représenter plus qu'une simple boîte. J'aimerais qu'on m'explique pourquoi Statistique Canada ne devrait pas assurer le leadership concernant les données. C'est peut-être pour des raisons impérieuses, mais ça serait un point de départ selon moi, plutôt que de se limiter à ce que le leadership soit assuré par le régime de soins de santé, parce qu'à ce moment-là on perdra de vue tous les autres déterminants, les déterminants qui ne sont pas liés au régime de soins de santé.
Cela me ramène au point soulevé plus tôt à propos des investissements. Si nous cherchons à faire des investissements transformateurs dans l'infrastructure du pays, il ne faut pas investir dans les routes et les ponts. Ça serait de perpétuer les vieux modèles. Les routes et les ponts ont besoin d'être entretenus. Les banlieusards — que Dieu les protège — doivent se rendre dans les villes pour leur travail. Les gens ne veulent pas être pris dans la circulation, mais ce n'est pas le genre d'investissement transformateur qui apportera des changements au pays. Nous avons besoin que quelqu'un assure le leadership de ce type d'investissement, pour l'élaboration de l'infrastructure de données, pour travailler avec les ensembles de données dont nous disposons, pour accéder plus facilement à ces données et pour assurer la collecte d'une plus grande quantité de données de base sur un vaste éventail de questions. Qu'il s'agisse d'itinérance ou de faillites, il y a de nombreuses autres questions dans le secteur social. Le logement social est un autre domaine où nous ne disposons pas de beaucoup d'information. Nous devons avoir une vaste perspective.
Au Royaume-Uni, la responsabilité a été déléguée au cabinet du vice-premier ministre. Pendant la relâche, nous avons tenté de déterminer quel serait l'équivalent au Canada. Il ne semble pas y en avoir. Ils ont agi ainsi au Royaume- Uni parce qu'ils avaient besoin d'avoir une perspective plus large. Comme je ne suis pas dans le domaine de la santé, mon principal commentaire est qu'il faut prendre garde à ne pas se limiter à la boîte des 25 p. 100.
Le président : Vous soulevez un très bon point.
Mme Dodds : Pour revenir à la question du sénateur, j'aimerais souligner que la question de la santé mentale n'a pas été soulevée ce matin et que cette question est cruciale. Nous avons désormais mis sur pied la Commission de la santé mentale et, espérons-le, ils feront des progrès pour atteindre leur objectif qui est d'éliminer les préjugés face à la maladie mentale.
Un grand nombre des interventions faites jusqu'à maintenant vise la promotion de la santé et la prévention des maladies. Il n'y a pas beaucoup d'interventions qui ne sont pas de simples traitements selon un modèle biomédical. On dit aux gens qu'ils n'ont qu'à prendre cette pilule, prendre ce médicament ou suivre tel traitement de physiothérapie et qu'ils se sentiront mieux après. Jusqu'à présent, les interventions dans le domaine du développement de la petite enfance et ce genre de choses consistent plutôt à essayer de prévenir quelque chose ou de retarder quelque chose plutôt qu'à déterminer comment aider la personne à guérir après qu'elle a subi un traumatisme, comme un séjour dans un pensionnat.
Les pensionnats ne sont pas le seul exemple du genre. Nous connaissons l'histoire de tous ces militaires qui souffrent du trouble de stress post-traumatique. Nous ne savons pas ce qui fonctionnera et ce qui ne fonctionnera pas.
M. Frojmovic vient de parler des faillites. Nous savons que la Grande Dépression des années 1920 a eu un impact immense sur la santé. Nous ne connaissons pas la chronologie ni les interventions requises. Nous devons mieux comprendre quels types d'interventions fonctionneront — et je ne parle pas strictement des interventions biomédicales.
Des données nous indiquent que deux choses aideront les Premières nations, peu importe la situation. La première est l'inclusion des Premières nations et la seconde est de leur donner du pouvoir. Des données montrent que dans le domaine de la santé, on améliore les résultats simplement en faisant ces deux choses, sans faire quoi que ce soit sur le plan biomédical. Nous ne connaissons pas les liens de causalité. Cependant, nous savons que s'ils sont inclus et si on leur donne du pouvoir, les résultats en santé seront améliorés.
Je suis préoccupée par la place des dossiers de santé électroniques au programme du sous-comité. Je ne crois pas qu'ils devraient contenir de l'information aussi vaste que celle sur les déterminants de la santé. Les dossiers contiendront bien assez d'information si on couvre les aspects liés au régime de soins de santé représentant 25 p. 100 et quelques autres éléments. Lorsqu'on examine les autres déterminants de la santé, vous avez raison de poser les questions suivantes : Qui doit collecter les données? Qui devrait avoir accès aux données et qui devrait les utiliser? Est- ce qu'un organisme de santé doit être le principal responsable de la collecte de données sur l'éducation et de données sociales d'une population ou est-ce que ça devrait être fait par Statistique Canada, dont le mandat est déjà de recueillir une partie de ces données, et par les comptes communautaires, qui le font déjà? Les questions sont plutôt celles-ci : qui relie ces données et qui est capable d'établir les liens entre elles? Je poserais les questions suivantes : qui collecte les données, qui y a accès et qui les utilise?
Pour revenir à mon premier point, la collecte de données coûte extrêmement cher. Même si nous ciblons notre investissement dans l'Inforoute, ça ne coûtera pas aussi cher que si nous ajoutions le coût de centaines de milliers de points de service.
Dr Neudorf : Je répète que le besoin dont nous parlons, qui est d'améliorer la santé de la population, concerne la collecte d'un vaste éventail de données à l'échelle locale. Je ne saurais suffisamment insister sur le nombre de fois où j'ai vu des études nationales très bien faites n'avoir aucun impact à l'échelle locale. Cependant, si on rend les mêmes données accessibles à l'échelle locale en les répartissant par région de façon logique, tout d'un coup les gens ont le cœur d'apporter des changements.
J'ai assisté à une conférence au Royaume-Uni où ils ont adopté une position ferme en essayant de faire une différence. Ils ont affirmé qu'il fallait une démarche en deux volets, celui de la volonté politique d'apporter des changements et celui de l'appui et de la compréhension publics de la question. Dans le cas de Saskatoon, j'ai constaté que le fait de présenter les données locales de façon sérieuse a eu une incidence sur ces deux volets et a fait ressortir la nécessité de tenir un débat public pour commencer à parler des modifications à apporter aux programmes et aux politiques.
Pour que ces choses se réalisent, les gouvernements fédéral et provinciaux doivent fournir un appui solide et accorder la priorité à ce projet afin que les gouvernements unissent leur voix pour affirmer qu'il faut partager ces données.
Pourquoi devons-nous agir ainsi? Pour affirmer que c'est nécessaire pour le bien-être et le mieux-être. Le Royaume- Uni a lancé le concept des vérifications de l'équité en santé. Ce concept peut être nommé différemment selon les pays. Le concept consiste à tenir compte, lors de la mise en place de politiques, des incidences sur la population, le bien-être ou la santé. Certaines personnes délaissent le terme « santé » parce que ce concept ne vise que 25 p. 100 du système qui appuie ce que nous voulons, c'est-à-dire le bien-être.
Lorsqu'on a atteint ce niveau de priorité, il faut mettre en place un organisme de coordination. Quelqu'un doit s'occuper de la coordination. Il ne s'agit pas nécessairement de collecte ou de prise en charge, mais plutôt de coordination. Il est important que l'organisation chargée de la coordination pancanadienne ne dresse pas de nouveaux obstacles pour l'accès aux données. Cela est essentiel pour faciliter l'accès aux données.
Nous estimons qu'il est très important de s'assurer que l'infrastructure et les outils fournis pour accéder aux données soient significatifs pour trois groupes : la collectivité dans son ensemble, les analystes des politiques et les décideurs, et les chercheurs. Chacun de ces groupes doit pouvoir aborder les données et la façon d'y accéder d'un angle différent, mais cela ne veut pas nécessairement dire qu'il faut avoir différents systèmes. Le système peut être fondé sur un modèle d'architecture commun.
À Saskatoon, le programme des comptes communautaires et le Centre du Manitoba ont travaillé pendant de nombreuses années avec ces groupes pour déterminer quels types d'accès et quelles fonctionnalités leur seraient nécessaires. Si on peut mettre ça en place, je pense que nous pouvons trouver une façon de répondre aux besoins de base.
Je souhaite réagir à l'idée qu'il reviendrait au système de santé de collecter les données. Ce n'est assurément pas ce que nous voulons. Nous avons tendance à accroître nos capacités lorsque nous agissons comme un groupe pour l'analyse et l'investissement dans l'infrastructure. Nous ne collectons pas de données, mais nous avons la capacité de relier les données.
À Saskatoon, on a investi dans les services sociaux, l'éducation, la justice, « et cetera » pour effectuer la collecte de données pour les besoins administratifs locaux. Nous concevons un système qui peut être livré selon un modèle de base de données distribuée. Ils sont propriétaires des données, ils les contrôlent et ont conclu des ententes afin de déterminer qui a accès aux données et l'utilisation qui peut en être faite. Votre rôle, au niveau de la santé de la population, est de relier ces données et de vous assurer que les bons utilisateurs ont un accès adéquat aux données. Nous devons nous concentrer là-dessus.
Le président : Merci beaucoup.
M. Smith : Le Dr Neudorf a présenté avec éloquence une façon de regrouper plusieurs de ces initiatives différentes. La coordination du processus et son uniformisation seront utiles pour faire avancer le programme. Je pense qu'il l'a dit clairement.
M. Berthelot : Pour poursuivre sur ce qu'a dit le Dr Neudorf, vous nous avez demandé si nous étions tous favorables aux comptes communautaires. Pour ce qui est des comptes communautaires canadiens, je crois qu'ils doivent être locaux. Les gens doivent s'approprier le compte et ce compte doit contenir de l'information qui permettra de prendre des mesures concrètes.
Je suis entièrement d'accord avec le Dr Neudorf. Nous ne devrions pas recueillir de données qui existent déjà dans d'autres domaines. La difficulté est de coordonner les mesures et de tenter d'établir ce que j'appellerais une norme minimale pancanadienne qui permettrait aux collectivités de la Saskatchewan de se comparer avec les collectivités de Terre-Neuve. Nous devons obtenir des données locales. Nous n'avons pas besoin de beaucoup d'information sur la pêche à la morue à Saskatoon, mais ça pourrait être nécessaire à Terre-Neuve. C'est une réalité; nous avons besoin de données locales.
Si nous reconnaissons qu'il faut mettre en place un mécanisme de coordination, qui en prendra l'initiative? Nous devons trouver une organisation qui peut agir comme catalyseur, c'est une tâche ardue. La plupart des organisations présentes autour de la table — peut-être à l'exception de la Fédération canadienne des municipalités et du Secrétariat rural — sont des organisations du domaine de la santé. Nous avons tous réussi dans nos domaines respectifs, mais il sera difficile de faire participer les intervenants du domaine de l'éducation et des services sociaux. Le Dr Neudorf l'a fait en Saskatchewan, mais ce sera plus difficile à faire à l'échelle pancanadienne. Nous devons convaincre les gouvernements qu'il y a des avantages à produire des données sur l'éducation lorsqu'il est question de santé de la population.
Il ne faut pas sous-estimer la difficulté. Nous avons besoin d'un genre de catalyseur, une organisation qui peut rassembler les gens qui reconnaissent que ces données sont nécessaires, non seulement pour le secteur de la santé, mais également pour d'autres secteurs, et qui peut élaborer certains types d'ensembles de données ou de normes minimales. C'est une tâche difficile.
Je ne peux pas vous dire qui s'en chargera, ni qui prendra l'initiative. Je peux simplement vous dire ce que, en tant qu'organisation, nous avons fait dans le passé et le rôle que nous avons joué dans le secteur de la santé de la population. L'organisation a joué un rôle dans la promotion des normes et dans l'établissement d'un consensus et d'un cadre, en collaboration avec des partenaires comme Statistique Canada, Santé Canada et les ministères provinciaux de la Santé. C'est le rôle que notre organisation joue; contribuer à l'élaboration d'une norme pour l'infrastructure. Il y a probablement bien d'autres partenaires qui pourraient participer.
M. Wolfson : Moi non plus je ne répondrai pas à la question de savoir qui prendra l'initiative, mais je présenterai ma réflexion sur deux ou trois autres secteurs. Il n'y a pas de ministère fédéral de l'Éducation. Ce qui s'y apparente le plus est RHDCC ou Service Canada. J'ai passé plusieurs années à me préoccuper de notre programme de statistiques sur l'éducation. Les tensions fédérales-provinciales sont, disons, moins bonnes ou plus marquées lorsqu'il est question de collecte de données.
La communication de données dans le domaine de l'éducation pourrait s'avérer très frustrante. Je me souviens qu'à un moment donné j'avais voulu obtenir des statistiques sur l'absentéisme auprès des écoles. Essentiellement, les écoles remplaçaient les données sur le taux d'absentéisme chaque année, de sorte qu'elles ne conservaient pas les données d'année en année.
D'un autre côté, Statistique Canada a, depuis des années, un modèle qui fonctionne très bien dans le domaine des statistiques sur la justice, l'équivalent de la Conférence des sous-ministres de la Santé du Canada. Les sous-ministres de la Justice se réunissent deux fois par année et, pendant une heure ou deux à chaque réunion, ils se mettent dans la peau d'un groupe chargé des statistiques ou des données sur la justice, et ils travaillent avec les responsables de Statistique Canada.
Les sous-ministres de la Justice ont récemment franchi un grand pas en affirmant que nous devrions avoir accès à des micro-données et que nous devrions être en mesure de recueillir les données des tribunaux, des données sur les incarcérations et sur les arrestations, afin d'établir l'équivalent de la trajectoire du patient et pour comprendre ce qui se passe dans le système juridique.
Le logement est également un secteur fondamental. Statistique Canada ne joue pas un grand rôle, à part en ce qui concerne la collecte de données de base par le biais du recensement et qui proviennent largement des données de la SCHL.
De ce qu'on peut tirer de la conversation de ces dernières minutes, chacun de ces secteurs se situe à des niveaux différents au sein des relations fédérales-provinciales et dans le développement de structures pancanadiennes. Si l'on veut tirer une conclusion qui soit un peu utile à cette conversation, je me demande s'il ne serait pas plus sage d'établir des priorités — nous ne pouvons agir sur tous les fronts en même temps — et de choisir les secteurs où des progrès sont plus susceptibles d'être observés à court et à moyen terme, pour ensuite espérer et prévoir que la démonstration et la production de résultats utiles permettra aux autres secteurs d'y voir clair et de réaliser qu'ils doivent se rallier. Cependant, nous ne pouvons nous attendre à ce que tout cela arrive en même temps ni même en parallèle.
M. Sheridan : J'aimerais revenir sur la question de ce qui peut être fait pour optimiser les données cliniques des dossiers de santé électroniques. De nombreuses possibilités s'offrent à nous. J'aimerais rappeler l'analogie que Mme Dodds a utilisée concernant les voies ferrées et l'écartement entre les rails qui est un excellent exemple. Nous devons persévérer dans cette voie et nous avons déjà fait un bon bout de chemin. Nous avons déjà des normes établies concernant les données qui doivent être collectées, mais il existe encore de nombreux éléments supplémentaires et également la question de savoir si nous avons d'autres besoins.
La façon dont les données sont enregistrées et stockées est essentielle pour nous. Nous avons encore beaucoup de travail à faire dans ce domaine. Je m'appuie sur le commentaire du Dr Taylor. Nous avons de nouvelles données, et nous en aurons encore beaucoup d'autres. Comment réagir à cette question en particulier? Bien franchement, je ne crois pas que nous soyons prêts à cela en ce moment, par contre nous devons le devenir et nous devons être prêts rapidement.
Une façon d'y arriver rapidement est l'existence, ou l'inexistence, de ce que nous appelons les entrepôts de données cliniques. Je ne veux pas rentrer trop dans les détails ni dans les spécificités techniques, mais ces données doivent être stockées dans un endroit où elles ne sont pas continuellement consultées comme dans une base de données cliniques. Les données doivent être extraites et entreposées où les gens de la méga science, comme M. Wolfson, peuvent libérer leur immense matière grise et tenter de faire parler ces séries de données pour nous. Ce qui veut dire ramener toutes ces données dans un entrepôt de données cliniques là où l'on peut commencer à recouper les différentes bases de données et les autres systèmes d'information. C'est une étape que nous n'avons pas encore franchie. Nous sommes à l'étape d'étudier les solutions et les champs de compétence qui nous permettront d'aller de l'avant.
Est-il important de faire participer des chirurgiens comme le Dr Keon? Le Canada possède probablement l'un des pires systèmes de dossiers médicaux électroniques relatifs aux soins cliniques qui se trouvent dans les cabinets de médecins. Nous sommes à un niveau de 17 p. 100. D'autres pays comme le Royaume-Uni, l'Australie, la Suède, le Danemark et les Pays-Bas ont atteint un niveau d'utilisation de 90 p. 100. Nous avons beaucoup de chemin à rattraper. Nous commencerons à travailler là-dessus, mais tout se fera de manière progressive.
M. Wolfson dira aux médecins de notre pays qu'ils ne devraient pas utiliser le texte libre. Par ailleurs, je crois qu'il existe de vrais problèmes à cet égard, notamment pour ce qui est de convaincre les médecins et les associations de médecins de l'utilité de ces dossiers médicaux électroniques, non seulement en ce qui a trait aux soins donnés mais également au potentiel de recherche. Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine.
Afin d'optimiser les données des dossiers médicaux électroniques et des dossiers de santé électroniques tels qu'ils sont maintenant, quelqu'un devrait avoir une discussion avec les citoyens du pays quant à l'utilisation de ces données pour enfin écarter tous les problèmes relatifs à la protection de la vie privée. Dans un sondage que nous avons mené, les Canadiens nous ont dit que les dossiers médicaux électroniques et les dossiers de santé électroniques sont très très importants pour améliorer les soins de santé — plus de 90 p. 100 d'entre eux se sont exprimés sur cette question. Oui, la population a des inquiétudes quant au respect de la vie privée, mais elle a d'autres inquiétudes plus importantes. La question de l'amélioration des soins de santé est, à mon avis, un engagement qui doit être pris avec les citoyens canadiens.
Une zone qui reste encore nébuleuse pour moi jusqu'à maintenant concerne les besoins et désirs réels du milieu de la recherche en termes de données et d'information à recueillir pour optimiser la recherche et la méga science. Nous avons vu un changement de dynamique de la méga science vers le client. Nous voyons maintenant que les clients veulent avoir leur mot à dire sur la façon dont leurs soins de santé sont gérés. Je crois qu'ils veulent prendre part aux hauts et aux bas de leur état de santé dus à une maladie chronique et qu'ils cherchent à mieux gérer leur propre santé.
Une autre étape importante dans le processus de prestation de renseignements aux citoyens et d'engagement de la part des citoyens est la notion des portails destinés aux patients et des solutions de santé des clients. Ces outils peuvent être mis en place pour aider les individus à gérer leurs propres soins de santé.
M. Hollett : Je n'ai pas une vision globale de la façon dont vous devez procéder, cependant je ferai quelques observations basées sur mon expérience.
Pour que des initiatives comme les comptes communautaires fonctionnent, vous devez avoir les appuis nécessaires. Ce qui veut dire fournir des données à une variété d'utilisateurs tout en gardant les citoyens comme principal objectif. Pour en revenir à ce que M. Berthelot a dit, vous devez avoir le leadership et la structure publique — ministres et députés — comme soutien. Je crois que les piliers de cette initiative doivent être soutenus par des fonds fédéraux, provinciaux et territoriaux. Bien que Statistique Canada possède une grande variété de données, les données les plus importantes viennent des provinces. Ce type d'approche sera d'une très grande utilité surtout pour les provinces parce que c'est là où les gens sont. Là où les gens sont, c'est là où les problèmes sont, et là où il y a des problèmes c'est là que les mesures doivent être mises en place pour parvenir à des solutions.
Je suis d'accord avec M. Wolfson pour ce qui est de donner aux gens le pouvoir de s'aider eux-mêmes. Pour y arriver, leur participation est nécessaire. M. Wolfson peut avoir une base de données de la taille de la tour du CN et utiliser la technologie la plus pointue, il faut tout de même que quelqu'un en ait besoin. Un groupe doit être mis sur pied, peut-être même dirigé par l'ICIS, et doit avoir le mandat de procéder de façon non traditionnelle. Autrement dit, il faut tenter de comprendre ce qui doit être fait et ensuite travailler avec les gens pour y arriver, sans être contraint par les méthodes du passé.
J'ai remarqué ce matin que nous avons parlé de la santé de la population, cependant, les séries de données dont nous avons vraiment discuté ne portent que sur la santé. Il ne s'agit que d'un élément. La santé de la population doit traiter également d'éducation, de revenus, de dynamiques des populations, et cetera. Si vous voulez tout réunir à l'aide d'une approche qui promeut la santé, un éventail de groupes doit être impliqué, dont un qui aura le mandat de commencer à tout regrouper et qui aura l'assentiment et l'appui de tous pour agir de telle façon. D'après ma propre expérience de travail avec les bureaucraties et les provinces, il est très difficile de tenter d'imposer un simple sentier au milieu d'un grand momentum qui existe déjà. Si vous arrivez à créer un sentier, tout ce à quoi vous pouvez aspirer est qu'il reste intact pendant que le momentum perdure.
Je crois que vous tentez de créer quelque chose de nouveau, même si ce n'est pas bien sorcier. Nous faisons quelque chose de semblable depuis de nombreuses années, et nous sommes encore là. C'est un objectif atteignable et pas trop dangereux. Cependant, vous devez avoir un groupe qui détient le pouvoir de garder le cap. Il est absolument essentiel de définir les produits. Ce qu'une personne de Come By Chance (Terre-Neuve) doit connaître concernant son dossier de santé n'a rien à voir avec ce qu'une personne du domaine de la santé doit savoir quand elle étudie la possibilité de procéder à une opération du cerveau chez un patient. Je ne dis pas qu'il n'y a aucun lien entre ces deux personnes, mais leurs besoins ne sont pas du tout les mêmes.
Vous devez mûrement réfléchir à la définition des produits. L'approche que nous avons adoptée au départ était un peu lourde je crois, mais c'est parce que nous devions agir vite. D'après notre expérience, lorsqu'on demande aux gens ce qu'ils veulent, ils ne savent généralement pas quoi nous dire. Toutefois, si vous émettez une idée pour qu'ils y réfléchissent, ils formulent en général des critiques très productives. Du moment que la critique ne vous dérange pas, vous pouvez rendre tout ce processus très utile. Nous avons fourni une validation de principe et leur avons demandé de nous dire ce qui ne marchait pas. Tout ce que nous avons fait depuis a été fondé sur les critiques, soit de l'intérieur de notre propre groupe, soit de personnes de l'extérieur.
Une approche comme celle-ci se divise en plusieurs étapes : obtenir l'appui, faire avancer le tout à l'aide d'un groupe habilité à faire le travail, déterminer les étapes à suivre et aussi passer à la validation de principe. Une part de l'engagement peut venir des collectivités — et je ne dirai pas lesquelles en ce moment — qui peuvent exprimer ce dont elles croient avoir besoin. Fournir une série de données qui permettra aux gens de dire « je n'aime pas ça, mais je crois que si vous me donnez quelque chose qui pourrait être utile au sens strict, ou cela pourrait être utile plus tard. »
Année après année des gens se sont présentés à moi pour me poser des questions. Nous sommes dans ce domaine depuis longtemps. Si vous n'avez pas l'appui du sommet, laissez tomber. Pour ma part, parler à quelqu'un qui n'a pas l'appui du premier ministre ou d'un sous-ministre influent équivaut à simplement faire preuve de gentillesse. Rien de plus. Je pourrais dire qu'il me fait perdre mon temps, mais je ne le dirai pas.
Vous devez suivre ces étapes et créer une base novatrice pour que les gens puissent faire les choses différemment. Appuyez-vous sur le travail que le Dr Neudorf et moi avons accompli. Regardez-le et voyez qu'est-ce qui peut être utile. J'ai un parti pris, j'aime ce que nous avons fait et je trouve que ça marche. Nous pensons également que nous faisons la bonne chose. La direction que nous avons choisie avec le cadre conceptuel est la même qui fait son chemin tranquillement dans le milieu universitaire international. Elle reflète les données du point de vue de leur application pratique.
Commencez par ce que vous avez déjà, choisissez un groupe tel que l'ICIS pour fournir le leadership et voyez si vous pouvez créer quelque chose de nouveau, quelque chose de différent qui donne des résultats rapidement.
Le président : Pourquoi est-ce que je participe à tout cela? Eh bien, je vais vous le dire. J'étais chirurgien cardiaque. J'ai créé un institut de cardiologie de plusieurs millions de dollars à Ottawa. C'est l'un des meilleurs au monde. Vers la fin de ma carrière, j'ai eu l'occasion extraordinaire d'opérer des gens qui, sans mon intervention, seraient morts au bout de quelques heures. Trente ans plus tard, ils se promènent dans les rues d'Ottawa et ils en sont très heureux.
Cependant, je me suis rendu compte que cela ne suffisait pas. Notre façon d'améliorer la santé de la population n'est pas la bonne. Bien que j'étais un des plus gros utilisateurs de deniers publics quand je dirigeais l'Institut de cardiologie, je me suis également rendu compte que nous n'obtenions pas le rendement maximal pour nos investissements.
Le Canada a dépensé 170 milliards de dollars l'année dernière pour le système de prestation de soins de santé. Cinquante pour cent des gens qui utilisent le système de prestation de soins de santé sont atteints de maladies qui peuvent être prévenues. Je vous donne un exemple : les mélanomes. Il est tout à fait possible de les prévenir. Pendant que les métastases se forment, le patient coûtera au système de soins de santé entre 100 000 $ et 200 000 $ puis il mourra deux ou trois ans plus tard.
D'une façon ou d'une autre, nous nous sommes réunis. Je crois qu'il est de la responsabilité de personnes comme moi, qui ont fait partie du système de prestation de soins de santé, de se réunir et d'amener le changement qui nous donnera une meilleure santé au Canada, un meilleur bien-être et une meilleure productivité. Ces facteurs sont tous interreliés. C'est pourquoi je mets toujours ensemble la productivité, la santé et le bien-être.
Nous voici donc, tentant de décider. Monsieur Hollett, vous avez la souricière, et ceci devrait être répandu d'un bout à l'autre du pays. Toutefois, nous n'arriverons pas à vendre cette idée à tous. Par exemple, je ne crois pas que les Britanno-Colombiens veulent une idée qui vient de Terre-Neuve. J'ai entendu quelqu'un dire que oui, ils sont intéressés? Bien. Vous m'avez eu encore.
Le concept, plus particulièrement en ce qui concerne les peuples autochtones, doit être vendu au niveau de la collectivité ou nous n'y arriverons jamais. Cela revient à rallier le pouvoir politique. Qui seront les grands gagnants de ce projet si nous y arrivons? Ce sera notre système de prestation de soins de santé. Il réussira à annuler la moitié des dépenses dès le départ si tout réussit. En plus du système de prestation de soins de santé, qui seront les vrais gagnants? Les contribuables canadiens.
Je sais que je dépasse le temps prévu aujourd'hui et je ne m'en excuse pas car j'estime que nous devons terminer cette discussion si nous voulons l'inscrire dans notre rapport. Nous étudions ce sujet depuis plus de deux ans. Nous avons besoin du premier ministre, d'un comité du Cabinet, de tous les premiers ministres provinciaux, des comités du Cabinet provinciaux, ainsi que des comités au niveau municipal qui y correspondent et encore plus important, des comités communautaires qui traitent avec ce type de données que nous devons extraire. Ceci permettra aux collectivités de prendre le contrôle de leur propre vie, de leur bien-être et de leur productivité et même de les améliorer parce qu'enfin ils retrouveront la fierté. J'ai vu les couleurs changer à Terre-Neuve parce que les collectivités étaient assez fières pour les changer et non pas à cause de l'argent investi par le premier ministre provincial. Peut-être que cet argent a joué un rôle mais je crois que la raison principale est la fierté communautaire.
Je ne sais pas si c'est le Dr Taylor ou le Dr Neudorf qui a indiqué tout à l'heure que si nous voulons créer une banque de données, nous devons être entourés de gens qui ont les muscles et la main-d'œuvre nécessaires pour la mettre sur pied et pour l'administrer. Nous ne cherchons pas à réinventer la roue. J'ai toujours senti depuis les dernières années — et c'est la première fois que je le dis publiquement — que nous avions besoin de l'ICIS. Je ne crois pas que Statistique Canada puisse s'en charger, monsieur Wolfson, parce que vos activités sont trop complexes. Je crois que vous êtes déjà trop occupé.
Nous devons statuer sur ce point maintenant. Le principal inconvénient concernant la collaboration de l'ICIS et que quelqu'un va certainement dire : « Nous y voici encore. Les responsables de la santé traitent un problème dans lequel ils n'ont que 25 p. 100 d'intérêt. » Le problème qui se pose avec Statistique Canada est qu'ils font ce type de chose depuis déjà trop longtemps et qu'ils éprouvent d'énormes problèmes concernant la protection de la vie privée et d'autres problèmes qui peuvent avoir tendance à leur lier les mains.
Il n'est pas fréquent que nous ayons autant de puissance intellectuelle réunie autour d'une table, donc dites-nous ce que nous devons faire.
M. Goel : Très certainement, je suis d'accord avec votre recommandation. Il ne s'agit pas uniquement de la santé versus des statistiques plus générales parce qu'il existe un autre point critique c'est-à-dire le partenariat entre le fédéral, les provinces et les territoires. La majorité des renseignements qui doivent être colligés se situe aux niveaux local et provincial. La participation des collectivités est importante et tout doit être fait dans le respect des méthodes utilisées pour recueillir des renseignements dans les différentes juridictions et provinces.
Il est également important de revenir sur le point que j'ai soulevé plus tôt, qui parlait des bases de données et des renseignements. Pour ce qui est du défi posé à savoir comment s'occuper des problèmes de santé de la population, nous avons certainement besoin de renseignements et de données, mais nous avons également besoin de partager les connaissances et de vous assurer qu'un leadership existe, à partir du niveau le plus élevé — le premier ministre ou le vice-premier ministre — à chaque niveau juridictionnel qui doit s'attaquer à un problème. Nous avons eu ce type d'expérience en Ontario avec le Conseil du premier ministre sur la santé, qui a duré pendant deux gouvernements et a ensuite disparu. On peut recueillir des données pendant des siècles et toujours avoir des difficultés. Les connaissances sont en place et nous devons agir.
Le président : Nous continuons à dire que nous n'avons pas besoin de plus de données, mais de plus d'action.
Dr Neudorf : Bien sûr, je suis d'accord avec votre recommandation également. Pour revenir sur l'aspect local, lorsque nous avons eu cette idée à Saskatoon, au début nous avons parlé de système complet de renseignements sur la santé communautaire. Très vite nous avons été critiqués par le reste des secteurs qui ont dit « Nous savons ce que vous voulez dire par «santé communautaire» mais il existe toujours le mot «santé», et ce que nous souhaitons c'est un système complet de renseignements communautaires. » Par conséquent, nous avons laissé tomber ce terme, bien que nous n'ayons pas changé le modèle. Il était important pour l'identification du système que les personnes puissent voir qu'il ne traite pas uniquement de santé, mais également de bien-être et d'autres termes utilisés.
Nous avons rapidement appris que l'idée vient de notre comité intersectoriel régional de Saskatoon qui regroupe, à l'échelle locale, tous les secteurs des services sociaux, les organismes communautaires et le conseil tribal. Ils ont demandé à Santé de jouer le rôle de chef de file en les convoquant et en les coordonnant et en donnant naissance à cette idée, parce que Santé avait la majeure partie de l'investissement dans l'infrastructure, l'analyse et l'expérience pour rassembler diverses données sur la santé. Ils ont conservé la propriété des données et, surtout, ils nous ont indiqué les données qu'ils auraient besoin d'utiliser du point de vue de l'éducation, des services sociaux et des organismes communautaires.
Il n'est pas impossible qu'un groupe lié à la santé joue le rôle de chef de file si les autres groupes savent qu'ils n'ont pas seulement un intérêt direct, mais aussi une appartenance à ce groupe, qui est créé de manière à ce que Santé et tous les autres ministères puissent voir comment ils peuvent travailler ensemble pour le mieux-être de la société.
M. Berthelot : Il faut faire attention. Dans votre proposition, vous semblez donner un mandat à l'ICIS. Vous parlez de la base de données dans votre déclaration. On doit faire attention et comprendre qu'il y a un besoin local et que la propriété locale est un besoin. Le rôle de l'ICIS pourrait être d'aider à faciliter la création d'un cadre et d'un consensus au pays, ce qui sera une tâche difficile. Toutefois, on ne peut pas oublier Statistique Canada, qui est un partenaire clé. On doit collaborer avec Statistique Canada, peu importe qui prend la barre. Statistique Canada est l'organisme statistique national du Canada et il possède une grande quantité de données qu'on doit exploiter et utiliser.
Si on avait beaucoup plus de données, on pourrait faire beaucoup plus et on n'aurait pas besoin d'attendre deux ans. De nombreuses choses pourraient être faites avec ce qu'on a. Statistique Canada doit faire partie du groupe, parce qu'il a beaucoup d'informations sur de nombreux secteurs, notamment le recensement. Cependant, en ce qui concerne les commentaires formulés sur la relation fédérale-provinciale, l'ICIS est un exemple de cadre dans lequel on s'écarte un peu des relations officielles conventionnelles. On travaille davantage avec des partenaires. On a des accords bilatéraux avec toutes les provinces. Si on en venait à dépasser cela, on devrait également tenir cette discussion pour s'assurer d'obtenir l'accord des parties. Si on n'obtient pas l'accord des ministères de l'Éducation et des Services sociaux pour collaborer avec les intervenants et déterminer les besoins en matière d'éducation et de services sociaux, on est voué à l'échec.
C'est une possibilité. On est bon dans ce domaine, mais on doit faire attention à ce qu'on demande de faire à l'ICIS. On ne peut pas tout faire.
Le président : Si on vous pousse dans le dos, vous pouvez.
Monsieur Wolfson, combien de fois m'avez-vous dit que j'avais tort? Si j'ai tort, dites-le-moi.
M. Wolfson : Je ne vais pas vous dire si vous avez raison ou tort. Je veux plutôt dire qu'il est important de faire la distinction entre les trois choses qui sont sur la table. La première est l'endroit où se trouvent les données et leur accessibilité. La deuxième est le leadership quant à la manière de recueillir ces données — la vision, l'architecture — et à la collaboration avec tous les éléments clés qui doivent coopérer et partager une vision pour que quelque chose se passe. La troisième est la formulation de commentaires sur les politiques. L'ICIS et Statistique Canada ont la particularité de s'en abstenir. Au fil des ans, le conseil de l'ICIS a tenu nombre de discussions et cette attitude s'est constamment renforcée.
On ne parle pas des politiques ici, ce doit être clair, et je crois que les politiques sont une question importante. Il faut également un centre pancanadien et pansectoriel qui s'occupe de la question des politiques, non pas dans le but de qualifier la politique de bonne ou de mauvaise, mais plutôt de définir nos critères d'évaluation — et je n'en dirai pas plus long.
Je crois que l'ICIS est nettement mieux structuré, avec son conseil, pour gérer la dimension fédérale-provinciale de la santé. L'entreposage des données est différent. Statistique Canada a plusieurs avantages particuliers. Nous nous appuyons sur une loi. On a toujours très bien réussi, et on peut encore le faire, à coupler des dossiers, ce qui est essentiel pour la plupart des sujets dont on parle.
On a surtout parlé des ensembles de données administratives, que ce soit les dossiers médicaux courants, les dossiers de santé électroniques ou les données sur l'aide sociale qui ne sont pas regroupés à l'échelle nationale mais qui le sont dans certaines provinces. Toutefois, n'oublions pas qu'une grande partie des données sur la santé de la population, qui concernent vraiment la santé de la population, sont tirées d'enquêtes comme l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes et, bientôt, de l'Enquête canadienne sur les mesures de la santé.
Dans le domaine de l'éducation, pour prendre un autre exemple, on se bat avec les provinces pour obtenir les données de base sur l'inscription dans les collèges communautaires et les universités ou pour obtenir les résultats des examens. Dieu sait quand on obtiendra ces données du réseau des écoles secondaires.
D'un autre côté, si on jette un œil aux progrès les plus importants qu'on a réalisés dans notre compréhension de la dynamique des jeunes — quels sont ceux qui vont à l'université et pourquoi —, cela vient de l'Enquête auprès des jeunes en transition ainsi que du Programme international pour le suivi des acquis des élèves, ou PISA.
La compréhension ne peut pas aller jusqu'au niveau local, parce que l'échantillon n'est pas suffisamment important, mais cette compréhension dépend essentiellement de la capacité d'enquête de Statistique Canada, qui est inégalée au pays.
Enfin, en ce qui concerne le dépôt des données, j'ai fait sourire mes interlocuteurs la fois où j'ai dit que certaines personnes croient que nous sommes des fanatiques des données. Comme organisation, on a le souci de vraiment parvenir à rendre disponibles non seulement les tableaux ou les données sur le Web, mais aussi les micro-données à l'intention des chercheurs sérieux.
Je vous ferai part de deux idées. D'abord, on s'intéresse activement à l'accès à distance en temps réel. On espère que les logiciels d'aujourd'hui puissent le permettre — ouvrir une session à partir de n'importe où sur le Web. Si vous avez la bonne occurrence et que vous êtes une bonne personne — entre autres choses —, des logiciels filtreront les demandes reçues, les exécuteront et filtreront les données sortantes en veillant à ce qu'aucune d'elles ne soit confidentielle.
La deuxième chose, à laquelle on ne s'attardera pas trop aujourd'hui, c'est qu'à un certain point il pourrait être utile de réfléchir à l'idée de rouvrir la Loi sur la statistique pour se poser la question : devrait-on créer une autre catégorie? À l'heure actuelle, soit on fait partie de Statistique Canada, soit on n'en fait pas partie. La question est : devrait-il y avoir un chercheur ou un analyste désigné? Il faut y réfléchir afin de mettre en application des sanctions pénales en cas de manquement à l'obligation de confidentialité. On parle ici de données de nature extrêmement délicate. On doit être en mesure de distinguer clairement les personnes qui ont vraiment besoin de savoir et dont la bonne foi a été établie, et toutes les autres. On pourrait conclure un contrat avec un chercheur ou un analyste désigné qui résoudrait les problèmes d'accès aux données.
L'ICIS et le conseil pourraient assumer un plus grand rôle. C'est un de leurs avantages particuliers. Aucun de nous ne devrait aborder les politiques, mais ce sont vraiment les questions stratégiques qui doivent guider l'élaboration des systèmes de données et d'information. Statistique Canada a déjà cet énorme avantage dans le couplage de données, la capacité de recueillir les micro-données et les sondages.
J'ajouterai une dernière chose pour que ce soit clair. Dans une certaine mesure, l'ICIS et Statistique Canada demandent tous deux aux provinces de leur fournir leurs micro-données administratives. Les données que nous avons demandées dernièrement, ce qui s'est avéré difficile, sont de nature beaucoup plus délicate que celles que l'ICIS a demandées. Nous ne demandons pas seulement des dossiers médicaux anonymes, nous demandons aussi le nom et l'adresse qui vont avec chacun — le registre des patients.
Pourquoi fait-on cela? Sans cela, nous ne pouvons pas coupler les 500 000 dossiers et plus de l'ESCC — et bientôt, les dossiers sur les mesures de la santé. Nous ne devrions pas être surpris si le processus est plus long et suscite d'autres questions. C'est le saint des saints, les joyaux de la couronne — la partie la plus délicate des systèmes de dossiers médicaux provinciaux.
Le président : Vous devez régler cet aspect tous les deux.
M. Berthelot : Nous devons veiller à ce qu'il n'y ait aucun dédoublement d'effort entre l'ICIS et Statistique Canada. Grâce à la Loi sur la statistique, les données peuvent être entreposées, utilisées de façon sûre et protégées. L'ICIS est à l'œuvre depuis 15 ans, et il possède des données de nature très délicate et d'autres mécanismes, notamment les services de santé publique et les réseaux pour la santé urbaine. Il existe d'autres mécanismes, et ils comportent tous des avantages et des inconvénients. La Loi sur la statistique protège efficacement l'information et la vie privée, mais l'accès aux données cause certains problèmes.
Comme M. Wolfson l'a dit, il y a certaines activités qui doivent relever de Statistique Canada. D'autres, de l'ICIS. Pour d'autres encore, la responsabilité reviendra peut-être au ministre provincial de l'Éducation. Il faut arriver à la table l'esprit ouvert au sujet des responsabilités et du modèle à adopter. Il faut trouver de nouvelles façons de faire et s'asseoir en ayant cela à l'esprit.
L'ICIS et Statistique Canada ne devraient pas mener les mêmes activités. Le statisticien en chef est membre de notre conseil, et nous nous efforçons de faire en sorte que la collecte des données ne soit pas effectuée en double.
En ce qui concerne les points de vue, il y a plus de questions analytiques et stratégiques auxquelles il faut répondre qu'il y a d'analystes au pays. Il est bien qu'un grand nombre de personnes travaillent sur des sujets précis, mais on doit s'assurer qu'il n'y a pas de dédoublement d'efforts dans la collecte d'information. On doit s'assurer que l'information qu'Inforoute Santé du Canada fait circuler sous forme de dossiers médicaux électroniques et de dossiers de santé électroniques, si elle remplace certaines des données que l'on recueille maintenant, est reconnue au moment approprié. On a la responsabilité, à titre d'organisations pancanadiennes et nationales, de s'assurer qu'il n'y a aucun dédoublement. On doit collaborer. On n'obtiendra des résultats qu'en travaillant ensemble.
M. Frojmovic : Il semble que beaucoup pourrait être en jeu ici. Il s'agit peut-être d'un problème de définitions. Qu'est-ce qu'on veut dire lorsqu'on dit que le modèle des comptes communautaires ou qu'un autre modèle est bon pour tout le Canada? Qu'entend-on par leadership?
Statistique Canada, du point de vue des personnes comme moi qui travaillent avec des données, est un élément capital du paysage national. Il est possible d'investir dans ce secteur, et l'organisation de Statistique Canada semble être à la croisée des chemins.
Concrètement, nous tentons d'obtenir les statistiques de l'état civil de 2004 concernant les municipalités, et on nous a dit qu'aucune donnée postérieure à 2003 n'est disponible. C'est tout à fait déplorable. Si on nous dit que l'ICIS peut faire mieux, je suppose que nous pouvons nous en arranger. Toutefois, nous croyons qu'il faut beaucoup plus d'investissements et de soutien à Statistique Canada pour qu'il puisse faire quelque chose d'aussi simple que de mettre à jour les statistiques de l'état civil des six derniers mois. Devoir attendre, comme nous l'avons fait, des données qui datent maintenant de six ans semble totalement inacceptable.
Quant au leadership, d'après la discussion tenue ici entre l'ICIS et Statistique Canada, il semble qu'il faut clarifier qui prend la direction de quoi. Cependant, déclarer que Statistique Canada est trop complexe ou qu'il y a trop de restrictions ne sert à rien; la réponse semble être d'examiner ces restrictions et de renforcer leur capacité, plutôt que de dire qu'il faudrait laisser quelqu'un d'autre essayer. Nous avons une occasion d'investir davantage dans l'organisme statistique du Canada. Tout bien considéré, voilà une occasion à ne pas manquer. Oui, l'ICIS peut assumer un rôle de chef de file, mais il faut d'abord définir cette notion et déterminer le contexte dans lequel on l'emploie.
Concernant la question du modèle, en tant qu'utilisateur des comptes communautaires, il se passe différentes choses. Il y a le modèle du cadre conceptuel, le modèle de la capacité de rassembler toutes les sources de données disparates en un même endroit, et le modèle du logiciel et de l'interface Web utilisée. Chacun d'eux peut avoir des applications ailleurs mais, une fois encore, il faut faire plus attention à ce qui est appliqué partout.
En ce qui concerne la capacité de recueillir des données, c'est particulier à certaines provinces. Terre-Neuve a bien réussi, mais ce n'est pas simple à reproduire. L'interface variera d'un endroit à l'autre. Le cadre lui-même peut être ou ne pas être celui que d'autres Canadiens voudraient. Nous devons préciser l'aspect du modèle à reproduire et définir exactement ce qu'on entend par leadership, parce qu'il y a beaucoup en jeu. Nous sommes résolus à prendre la bonne décision.
M. Smith : Je suis d'accord sur le fait qu'il faut une forme quelconque de leadership exercé d'en haut — par le gouvernement fédéral, l'ICIS et Statistique Canada — mais je suis un peu en désaccord avec notre façon d'examiner la question et la direction qu'elle pourrait prendre. Une grande partie de ces données sont collectées dans les provinces. Les connaissances sur la compréhension de ces données, l'incidence des programmes et l'évolution de la compréhension des données sont là et sur le terrain. Transférer toute cette expertise et ces connaissances locales à un organisme central ne sera probablement pas très pratique.
Deuxièmement, je crois que les acteurs locaux veulent participer au processus. Nous nous sommes rendu compte de ce fait dans le cas des collectivités autochtones également, quand nous leur parlons de leur fournir des renseignements. Elles ne veulent pas seulement qu'on fasse l'analyse et qu'on leur envoie un rapport. Elles veulent prendre part au processus, et les provinces aussi veulent participer au processus. On doit les intégrer d'une manière ou d'une autre. Elles possèdent l'expertise locale, elles ont des relations avec les universités, et elles veulent qu'on en tire parti d'une façon ou d'une autre.
Le gouvernement fédéral et les organismes nationaux comme Statistique Canada et l'ICIS peuvent faire preuve de leadership quant à la façon de faire des provinces. Ils peuvent fournir de l'information sur la capacité, la technique et l'organisation et peuvent faciliter la coordination entre les groupes. C'est très semblable au modèle que Santé Canada a adopté sous la direction du Dr Taylor. Quand Santé Canada a voulu lancer une enquête nationale sur le diabète, il n'a pas essayé de collecter les données de toutes les provinces. Il a plutôt exposé une façon de faire et, par ce processus, a collaboré pour obtenir cette information. Ce processus est très sain pour le pays, parce qu'il permet de développer une capacité dans les dix provinces et les deux territoires, et il fait participer les gens à l'échelle locale. C'est le type de leadership exercé d'en haut dont on a besoin.
M. Hollett : Il faut la participation des provinces. À titre de statisticien en chef de ma province, j'ai constaté au fil des ans qu'une partie du problème vient du fait que beaucoup trop de choses se passent à Ottawa. Nous n'avons pas les ressources adéquates à l'échelle locale, et de la façon dont les choses ont tourné, en particulier ces dernières années lorsque DRHC a eu le problème et que tout s'est vraiment resserré, cela a causé d'énormes difficultés et c'est tout le contraire de ce que nous voulons ici, c'est-à-dire accroître la mise en commun des données. Au contraire, ceci a diminué et, évidemment, Statistique Canada a été isolé dans le processus de recouvrement des coûts, ce qui n'a pas aidé du tout. Les gros ministères fédéraux ou la Banque de Commerce auraient les moyens d'obtenir les données mais, à mon avis, beaucoup d'argent est allé à Statistique Canada; cependant, c'était moitié argent, moitié labeur.
Les provinces doivent avoir un rôle à jouer, parce qu'il est temps qu'elles deviennent responsables en ce qui concerne cette question et qu'elles apportent leur contribution. Ottawa n'est pas directement responsable du bien-être de chaque personne dans chaque collectivité. Il s'agit en partie de responsabiliser davantage les gens à l'égard d'eux-mêmes et de leur donner les outils pour les aider à y arriver. Ils ne peuvent pas faire une opération au cerveau, mais, grâce à l'information et avec un petit coup de main, ils peuvent apprendre à éviter d'en arriver à une telle situation.
J'aimerais qu'avec le temps, les organismes statistiques provinciaux et territoriaux soient partenaires dans ce projet, et que ceux qui ont la capacité et qui ont un rôle à jouer puissent commencer à assumer le rôle qu'on leur avait donné au départ. Les principaux gouvernements sont là, donc l'ICIS, Statistique Canada et chaque province et territoire seraient de véritables partenaires. De cette façon, et ça fait également partie intégrante de l'approche que ce comité et le gouvernement fédéral adopteraient dans la mise en oeuvre, on veut que les premiers ministres participent afin qu'ils comprennent que quelque chose de nouveau est fait et que leur participation est nécessaire. Sans ce soutien, il est difficile pour les gouvernements provinciaux et territoriaux de faire du bon travail, et s'ils ne font pas du bon travail, on revient à la case départ. On pourrait avoir des données, mais personne ne les utiliserait.
Au lieu de parler de ce que nous n'avons pas, nous devons commencer par ce que nous avons. Si nous avions attendu de tout avoir ou d'avoir des données uniques ou ésotériques tirées de fichiers de données en chaîne, nous aurions pu attendre cinq ans alors que nous pourrions probablement les avoir dans 1 an ou 18 mois. Prenons par exemple les comptes communautaires — je ne tente pas de vendre le modèle — vous désirez obtenir des données rapidement, ce modèle est prêt à utiliser. Nous avons versé de l'information pour chaque province. Pour ceux d'entre vous qui n'ont pas vérifié, vous constaterez que la quantité d'information devient de plus en plus importante pour d'autres provinces. Il s'agit d'aller de l'avant.
Cet exercice pourrait comporter une grande faiblesse : celle de s'acharner à trouver ce qui n'est pas là, au détriment de l'obtention de l'information qui y est. En ce qui concerne le cadre des comptes communautaires, c'est une question d'accent. Ce qui figure dans les comptes communautaires actuellement ne fera pas l'affaire pour les Premières nations sans modifications. C'est comme si on avait les données de Vancouver et qu'on voulait les modifier en fonction de ce qui est important pour Vancouver. On ne renforcera pas le secteur des pêches pour Toronto de la même manière.
Il est vrai que ce genre de chose doit être examiné, mais un énorme potentiel est là d'aller de l'avant et de parvenir à des résultats.
Le sénateur Cook : Je tiens à vous remercier, madame Dodds, d'avoir soulevé la question de la santé mentale. Mon premier défi lorsque je suis arrivée ici a été lancé par le sénateur Kirby, et le dernier, par la personne assise devant la table. Ils m'ont mise au défi de faire des choses dont je n'ai jamais rêvé de faire, mais quand je regarde les résultats de De l'ombre à la lumière, je constate que nous avons fait une différence dans la vie des Canadiens, et c'est merveilleux.
Quant au Dr Keon, ça m'a pris un moment pour comprendre où cet homme voulait en venir, ses objectifs et ses buts. Grâce à sa patience — et les nuits où il n'a pas dormi à cause de moi — je pense que je me suis fait une idée de la direction que nous allions prendre pour ce pays. Peu importe que vous l'appeliez l'ICIS, ou autre; peu importe qu'on vous appelle leader ou coordonnateur — le nom est sans importance. J'ai posé une question. Nous avons mis en place un modèle pour la santé mentale, un commissaire, et nous avons créé une table ronde, une commission, avec les gens dont nous avions besoin à cette table pour faire de cette idée une réalité. Pourrions-nous envisager quelque chose de semblable ici puis passer à autre chose? Il y a tellement de sagesse ici; nous pouvons sûrement trouver une table assez petite — pas trop grande, parce que beaucoup d'entre nous parlent beaucoup trop — et faire avancer les choses? Je me fiche de qui la mettra sur pied, pour autant que tous les éléments dont nous avons besoin soient là et que tous fassent preuve d'ouverture et collaborent dans l'intérêt commun.
Merci, monsieur le Président; ce sont mes élucubrations.
M. Wolfson : Je ne veux pas terminer sur une note trop banale, d'abord en ce qui concerne les statistiques de l'état civil, nous avions environ 100 000 $ par année pour faire le géocodage mais l'argent a disparu. Nous avons reçu un financement généreux pour les enquêtes sur la santé. En ce qui a trait aux statistiques de l'état civil, le budget est le même qu'il y a 20 ans. L'autre chose à propos des statistiques de l'état civil et de l'actualité, la dernière fois que j'ai vérifié, l'accord conclu avec Québec a été signé par Maurice Duplessis en 1948. Nous utilisons les microfilms. Nous essayons de passer aux données électroniques en temps réel, mais c'est retardé par d'autres choses avec Passeport Canada, et ainsi de suite. Nous avons la technologie et nous sommes prêts à avancer, comme certaines provinces. Mais l'argent a aussi son importance si on veut y arriver.
Enfin, sur une note moins banale, pour ce qui est des comptes communautaires, j'aimerais qu'on ne perde pas de vue qu'il s'agit d'un cadre. Quand vous dites : « M. Hollett, permettez-moi de connaître les données sur le revenu moyen », la moitié des données est disponible si nous voulons connaître les données sur le tabagisme. Vous ne pouvez pas le faire à petite échelle. Si vous désirez connaître le nombre de crises cardiaques, vous le pouvez. Si vous voulez savoir le pourcentage de survie, vous ne le pouvez qu'en couplant l'incident de la crise cardiaque à l'acte de l'état civil, et nous ne pouvons pas obtenir ce dernier rapidement. Nous pouvons même aller plus loin en disant : « Je veux savoir ce qu'il en est de la revascularisation, des crises cardiaques et de la survie dans ma collectivité », nous ne pourrons pas vous répondre sans les dossiers de santé électroniques. Ce que vous pourrez intégrer dans le cadre des comptes communautaires dépendra du système d'information. C'est un facteur essentiel.
Le président : Merci beaucoup tout le monde. Que Dieu vous bénisse tous. Chacun a apporté une contribution précieuse. Je pense que nous sommes sur le point de savoir ce que nous voulons écrire.
(La séance est levée.)