Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles
Fascicule 9 - Témoignages du 17 juin 2010
OTTAWA, le jeudi 17 juin 2010
Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui à 8 h 11 pour étudier l'état actuel et futur du secteur de l'énergie du Canada (y compris les énergies de remplacement), (sujet : l'exploration et le forage pétroliers/gaziers au large des côtes du Canada : la situation actuelle des activités/règles et règlements applicables).
Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles. Nous poursuivons notre étude approfondie du secteur de l'énergie au Canada dans la perspective d'élaborer un cadre stratégique au fur et à mesure que nous avancerons.
Nous nous sommes un peu écartés de notre sujet depuis le 20 avril en raison des événements tragiques survenus dans le golfe du Mexique et mettant en cause la plate-forme de forage Deepwater Horizon. Nous avons tenu une série d'audiences portant sur l'industrie de l'exploration pétrolière et gazière au large des côtes du Canada afin d'établir les faits pour les Canadiens qui éprouvent une certaine inquiétude sinon un sentiment de panique consécutivement aux événements survenus aux États-Unis. Un sondage d'opinion publique a révélé que la moitié des Canadiens étaient favorables à une interruption complète des activités de notre industrie extracôtière, laquelle fait partie intégrante de la trame industrielle du Canada.
Sachant qu'aucune activité de forage n'est poursuivie sur la côte Ouest ou dans l'Arctique, nous avons cru important de présenter les faits. Nous étudions la question depuis le début de juin. Nous sommes ravis d'accueillir aujourd'hui des représentants des sociétés EnCana et Husky. L'EnCana représente l'industrie de l'exploration gazière au large de la Nouvelle-Écosse, et la Husky, l'industrie pétrolière. Nos témoins nous présenteront eux-mêmes leur rôle.
Je suis le sénateur David Angus, président du comité, et je viens du Québec. Sont également présents aujourd'hui Lynn Gordon, notre efficace greffière, Sam Banks, notre recherchiste de la Bibliothèque du Parlement, le sénateur Robert Peterson, de la Saskatchewan, le sénateur Judith Seidman, du Québec, le sénateur Daniel Lang, du Yukon, le sénateur Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique, le sénateur Fred Dickson, de la Nouvelle-Écosse, le sénateur Linda Frum, de l'Ontario et le sénateur Bert Brown, de l'Alberta. Quelques autres membres du comité sont occupés ailleurs ce matin. Malheureusement, en cette fin de session au Parlement, d'autres comités siègent en même temps que le nôtre. Je présenterai nos autres collègues quand ils arriveront.
Honorables sénateurs, je veux vous présenter nos invités. Paul McCloskey est vice-président des Opérations de la côte Est à la Husky Oil Corporation Limited, laquelle, je crois, fait partie du groupe Husky Energy, une grande société qui a fait des affaires à Hong Kong et avec K.S. Li. C'est un de mes grands amis et c'est toujours un plaisir de voir ses auxiliaires venir nous donner un coup de main dans l'accomplissement de notre charge publique à Ottawa. M. McCloskey a été nommé au poste qu'il occupe en 2009. Il compte plus de 30 années de connaissance et d'expérience dans le secteur amont de l'industrie pétrolière. Il est titulaire d'un baccalauréat ès sciences en génie chimique décerné par la Birmingham University et d'un diplôme décerné par la Duke University — les Blue Devils —, où il a suivi un programme avancé en gestion. Il réside à St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador.
Il est accompagné de Al Pate, directeur général des Services d'exploration et de production, poste auquel il a été nommé en 2007. M. Pate compte lui aussi 30 années de connaissance et d'expérience acquises principalement dans le secteur du forage et de la complétion. M. Pate est titulaire d'un baccalauréat ès sciences en génie mécanique décerné par l'Université de la Colombie-Britannique et il réside à Calgary.
Honorables sénateurs, nous pensions au départ tenir une table ronde réunissant les témoins de la Husky et de l'EnCana. Mais les activités pétrolières et les activités gazières sont de toute évidence différentes. Les témoins ont affirmé qu'il serait approprié de séparer les deux, ce à quoi nous avons acquiescé. Nous espérons que cette scission nous aidera à percevoir la différence entre les activités que poursuivent respectivement la Husky et l'EnCana.
Nous entendrons d'abord la Husky. Je crois que M. McCloskey a une déclaration préliminaire à faire. Nous sommes ravis de vous accueillir parmi nous et d'entendre vos sages paroles.
Paul McCloskey, vice-président, Opérations de la côte Est, Husky Oil Operations Limited : Merci, monsieur le président. Au nom de la Husky Energy, je veux vous remercier de l'occasion que vous nous donnez de témoigner devant le comité.
Nous adressons nos condoléances aux familles, aux amis et aux collègues de travail des personnes qui ont péri à bord de la plate-forme Deepwater Horizon. Nos pensées vont également aux communautés de la côte du golfe du Mexique dont la vie a été considérablement bouleversée. Nous suivons de près l'évolution de la situation dans le golfe et nous prendrons en compte, dans nos opérations, les leçons qu'elle nous enseignera.
La Husky poursuit des activités sur la côte Est du Canada depuis 27 ans. Au cours de cette période, nous avons foré en toute sécurité et avec succès plus de 60 puits de développement, d'exploration et d'appréciation. Nous sommes actifs principalement dans une région connue sous le nom de bassin Jeanne d'Arc, située à 350 kilomètres environ à l'est de St. John's. C'est dans cette région que se trouve le champ White Rose, qu'exploite la Husky. Nous avons distribué une carte qui indique les endroits où nous poursuivons nos activités au large de la côte Est du Canada. Je serai ravi d'y revenir plus tard.
Le président : Elle est jointe à la copie de la déclaration préliminaire de M. McCloskey que tous les sénateurs ont reçue.
M. McCloskey : Dans ce secteur, le principal organisme de réglementation est l'Office Canada-Terre-Neuve-et- Labrador des hydrocarbures extracôtiers, l'OCTLHE.
Les eaux du bassin Jeanne d'Arc sont beaucoup moins profondes que celles du secteur du golfe du Mexique où la Deepwater Horizon était positionnée. Le fond y est à moins de 200 mètres. Les eaux y sont également plus froides.
La sécurité et la gérance responsable de l'environnement figurent parmi les valeurs fondamentales de la Husky et elles inspirent sa façon de fonctionner. Ces valeurs sont inscrites dans notre système de gestion opérationnelle. Le système de gestion opérationnelle de l'intégrité de la Husky intègre des pratiques reconnues mondialement en matière de santé, de sécurité et de protection de l'environnement. Elles reposent sur une approche systématique en matière d'anticipation, de reconnaissance et d'atténuation des dangers.
Désireux d'agir avec prudence dans nos opérations en haute mer, nous nous tenons prêts à intervenir en cas de déversement, petit ou grand. Toutefois, nous mettons d'abord l'accent sur la prévention. À cette fin, la Husky et ses partenaires ont consacré des ressources considérables à la mise au point de pratiques sécuritaires et respectueuses de l'environnement. Des mesures de contrôle de puits et de prévention des déversements sont intégrées à toutes nos opérations de forage en haute mer. Non seulement nous nous conformons aux exigences de la réglementation gouvernementale, mais nous nous efforçons de les dépasser.
Si confiants que nous soyons dans la sûreté et l'intégrité de nos activités, nous avons décidé, consécutivement à l'incident survenu dans le golfe du Mexique, de procéder à un examen de nos systèmes de contrôle de puits. Nous nous sommes arrêtés à un certain nombre d'aspects : politiques, procédures, formation, équipement et plans d'intervention d'urgence. Cet examen a confirmé que nos pratiques actuelles de contrôle de puits sont conformes aux exigences de la réglementation ou les dépassent. Mais nous allons maintenant un peu plus loin : nous faisons faire des examens de nos activités de forage par des tierces parties, pour nous assurer la première place dans notre catégorie.
De même, une fois rendus publics les résultats de l'enquête sur les événements du golfe du Mexique, nous en ferons l'examen et tiendrons compte dans nos opérations des leçons qu'on en tirera.
Le processus de planification et de forage d'un puits comporte des examens à de nombreuses étapes, examens qu'effectuent nos équipes à terre et en mer. La conception du puits est soumise à l'examen de l'organisme de réglementation, lequel délivre l'autorisation de forer. Cette autorisation constitue dans les faits notre permis d'exploitation.
Nos installations, et notamment notre équipement de contrôle de puits, font l'objet d'examens et d'évaluations rigoureux de la part de tierces parties afin de nous assurer de notre conformité aux normes les plus élevées.
Les installations de forage sélectionnées pour nos opérations au large de Terre-Neuve-et-Labrador ont passé avec succès le test d'aptitude à fonctionner dans les conditions environnementales difficiles que nous y rencontrons. Chacune doit obtenir un certificat d'aptitude valide délivré par une autorité de certification indépendante et indiquant qu'elle répond à toutes les exigences de la réglementation. Elle doit également faire l'objet d'une attestation de conformité délivrée par Transports Canada. Pendant sa vie utile, l'installation fait l'objet d'inspections périodiques à l'occasion desquelles les systèmes qui se dégradent avec le temps, dont les systèmes de contrôle de puits, sont remis en état et recertifiés.
Des exercices d'urgence ont lieu régulièrement. Ils visent à garder les équipages alertes et attentifs au risque de perte de contrôle du puits et à renforcer la sécurité opérationnelle. Selon sa nature, l'exercice aura lieu chaque semaine, chaque mois ou à l'occasion de chaque descente dans le puits de forage.
Husky utilise aussi les technologies et les procédures de détection rapide les plus récentes, notamment des sondes à double redondance — pour évaluer les puits et les conduites d'écoulement —, des appareils de diagraphie en cours de forage ainsi que la transmission de données en temps réel à des équipes techniques situées sur la côte. Par ailleurs, des logiciels de modélisation de pointe nous permettent de bien évaluer la pression à l'intérieur des puits, et leur débit est vérifié fréquemment.
Notre équipe de forage et de complétion de la côte Est cumule près de 400 ans d'expérience en mer, dont 275 sur la côte Est du Canada. Tous les ingénieurs de Husky qui s'occupent des travaux de forage et de complétion ont reçu la formation réglementaire sur le contrôle des puits, en plus d'obtenir une certification sur les méthodes connexes. Ils ont tous passé du temps sur le terrain pour se familiariser avec l'équipement et pour connaître les implications pratiques liées à l'utilisation des appareils de forage.
Nous avons aussi dans nos rangs un spécialiste en contrôle des puits — un formateur certifié et reconnu à l'échelle internationale.
Bien que nous privilégiions la prévention et la surveillance, nous disposons aussi d'appareils et de méthodes secondaires de contrôle des puits, dont des blocs obturateurs et d'autres procédures de fermeture des puits. Monsieur le président, nous avons joint à nos notes d'allocution le schéma d'un système typique de blocs obturateurs de puits destiné au forage en mer. Je serai heureux de vous en parler lors de la période de questions. L'équipement de contrôle des puits est, tout comme les appareils de forage, certifié par un organisme de certification indépendant reconnu à l'échelle internationale et approuvé par l'organisme de réglementation.
Les blocs obturateurs des deux appareils de forage utilisés en ce moment par Husky comportent des dispositifs de commande hydraulique par pilote — puisque nos activités se déroulent à moins de 200 mètres de profondeur d'eau. Ces systèmes présentent plusieurs redondances, notamment divers postes de contrôle, des conduites hydrauliques interconnectées en surplus ainsi que certaines répétitions en ce qui a trait à la configuration des blocs obturateurs de puits. Le foreur dispose de toute l'autorité nécessaire pour activer les blocs obturateurs de puits afin d'assurer la sécurité de l'exploitation. En fait, tous les employés sont autorisés à activer les blocs obturateurs pour fermer le puits en en cas d'urgence.
Le président : Monsieur, vous avez mentionné le mot clé — employés. J'étais en train de parcourir vos notes. Je ne pense pas que vous y parliez du nombre de personnes qui travaillent dans les installations de forage — à moins que vous ne le fassiez dans votre rapport. Cependant, si ce n'est pas le cas, pouvez-vous nous dire quelques mots sur le nombre d'employés et sur les dispositions prises pour assurer leur de sécurité?
M. McCloskey : Certainement. Le nombre de personnes qui travaillent dans une installation de forage peut varier, selon l'installation, entre 90 et 120 personnes.
Le président : Ce nombre est-il le même qu'il s'agisse d'une plate-forme de forage ou d'une plate-forme semi- submersible?
M. McCloskey : Le nombre d'employés varie entre 90 et 120 personnes sur les plates-formes semi-submersibles. Selon la nature des activités, il y a généralement un équipage de base, qui fonctionne par rotation. Ces personnes travaillent généralement plusieurs semaines au large avant d'être en congé pendant plusieurs semaines, et elles vivent dans les installations. Il y a aussi des spécialistes qui viennent s'occuper de certains éléments du puits. Il peut s'agir d'ingénieurs chargés de la complétion ou de la diagraphie, et ils ne demeurent sur place que pendant la durée de la tâche qu'ils ont à accomplir.
En ce moment, Husky n'exploite que des plates-formes semi-submersibles. Vous avez entendu parler plus tôt d'Hibernia. Cette installation comporte deux plates-formes de forage. Cependant, j'ignore combien de personnes y travaillent.
En ce qui concerne les mesures de sécurité, j'ai parlé du HOIMS — le système de gestion de la sécurité de Husky. C'est le système de gestion globale que nous utilisons, et tous nos entrepreneurs et employés sont tenus de l'appliquer. Nous pourrons parler de ce système plus tard, si vous le souhaitez.
Les blocs obturateurs de puits peuvent être contrôlés à partir de trois endroits différents sur l'appareil de forage. De plus, ils peuvent être fermés au moyen d'un engin télécommandé. Chaque appareil de forage comporte deux systèmes indépendants d'engins télécommandés. Husky possède aussi un navire d'intervention léger équipé de toute une série d'appareils télécommandés.
Bien que Husky estime que la prévention est la meilleure ligne de défense, nous sommes préparés à réagir s'il devait se produire un déversement en mer. Nous avons un programme d'intervention à trois niveaux en cas de déversement de pétrole — chaque niveau donnant accès à l'équipement et aux ressources nécessaires selon l'ampleur du déversement. À cette fin, nous organisons des séances de formation et des forages réguliers auxquels participent le personnel de Husky, les entrepreneurs, d'autres opérateurs, les organismes de réglementation et d'autres intervenants clés.
Lorsque nous avons voulu obtenir l'autorisation d'entreprendre des activités de forage et de développement en mer dans le champ White Rose, nous avons déployé beaucoup d'efforts pour évaluer les risques liés à la sécurité et à l'environnement. Des études et des évaluations environnementales officielles — dont la modélisation de scénarios de déversement — ont été entamées.
Husky a analysé plusieurs scénarios de déversement. Dans tous les cas, les modèles ont indiqué que le pétrole devrait se diriger vers le grand large. Monsieur le président, tous les habitants de Terre-Neuve-et-Labrador connaissent bien le courant du Labrador, qui descend le long de la côte du Labrador avant de se diriger vers l'Atlantique.
Nos modèles de déversement sont continuellement mis à jour, au fur et à mesure que de nouvelles données océanographiques sont recueillies dans le champ White Rose. Nous avons mis en place un plan complet et fiable de prévention et d'intervention en cas de déversement.
Cela dit, les événements du golfe du Mexique nous rappellent que nous devons demeurer vigilants. Nous allons surveiller ce qui se passe dans le Golfe — à l'instar des autres membres de l'industrie — pour savoir ce qui a mal tourné et déterminer comment nous pouvons éviter que cela se reproduise. Nous allons aussi étudier les mesures d'intervention qui seront prises afin de continuer à améliorer nos plans. Husky et l'ensemble de l'industrie tireront des enseignements de cet événement.
M. Pate et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Le président : Merci beaucoup, monsieur. Je vais passer à la liste des intervenants dans un moment, mais j'userai d'abord de mon privilège — en l'absence du vice-président — pour vous poser rapidement quelques questions. Mon petit doigt m'a dit que vous aviez suivi nos délibérations et que vous aviez lu la transcription de certaines de nos séances. Avez- vous eu l'occasion d'examiner le témoignage des gens de Chevron?
M. McCloskey : Oui, monsieur le président.
Le président : Chevron est la seule autre entreprise de forage et d'exploration pétrolière que nous avons eu l'occasion d'entendre. Ils sont situés un peu plus loin dans le bassin Orphan, et je suppose que vous avez entendu que leurs activités se déroulent en eaux beaucoup plus profondes. Y a-t-il des éléments de l'exposé qu'ils nous ont présenté avec lesquels vous n'êtes pas d'accord ou sur lesquels vous voulez ajouter quelque chose?
C'était notre premier contact direct avec un opérateur. Je pense que c'est à des gens comme vous, qui travaillez au sein de cette industrie, que les Canadiens devraient demander s'il y a lieu d'avoir peur. Devrions-nous être inquiets?
C'est une question générale. Pouvez-vous y répondre?
M. McCloskey : J'en serai ravi.
Le président : À propos, je ne sais pas si mes collègues ont reçu le même document que moi hier — un document d'un pouce et demi intitulé « L'histoire de Chevron ». J'ai cru qu'il s'agissait d'un autre élément de preuve envoyé par Chevron, mais au contraire, ce document a été envoyé par des groupes environnementaux internationaux qui ont reconstitué cette histoire présentée de manière négative. Nous nous efforçons non seulement d'être justes et équitables; notre principal intérêt est de connaître la vérité et de savoir ce qui se passe réellement.
M. McCloskey : Monsieur le président, j'ai lu le témoignage de Chevron. Il contenait de nombreux éléments que vous entendrez à nouveau aujourd'hui. Chez Husky, on ne fait rien qui ne puisse être réalisé de manière sécuritaire, et je pense que les gens de Chevron vous ont fait la même affirmation à plusieurs reprises.
Je dois reconnaître que j'ai déjà travaillé pour Chevron. Mon employeur m'avait affecté à leurs opérations, et je peux témoigner de leur culture de la sécurité.
Le président : Vous êtes peut-être celui qui n'a pas tenu la main courante en descendant les escaliers.
M. McCloskey : Il m'est absolument impossible d'émettre un commentaire à ce sujet. Je tiens toujours la main courante.
Je pense que cette allusion à leur volonté de bien faire les choses et d'agir de manière sécuritaire rejoint l'éthique d'Husky. C'est notamment parce que j'avais constaté que cette entreprise partageait les mêmes valeurs que j'ai choisi de me joindre à Husky. Ils ont beaucoup parlé des précautions qu'ils prennent et du fait que la prévention est essentielle. Husky partage ces valeurs. La prévention est au cœur de nos préoccupations.
Les activités de Chevron diffèrent cependant des nôtres. Ils travaillent en eau très profonde et ils utilisent un navire de forage qu'ils peuvent repositionner à leur guise, alors que nous utilisons des plates-formes semi-submersibles — qui sont ancrées —, parce que nous sommes en eau beaucoup moins profonde.
En outre, certaines des discussions opérationnelles différaient quelque peu. Elles portaient sur les nombreuses façons de faire fonctionner leurs blocs obturateurs de puits. Compte tenu de la profondeur des eaux où nous travaillons et des conditions auxquelles nous sommes exposés, nous employons deux méthodes d'activation, soit l'activation hydraulique — dont j'ai parlé dans ma déclaration — et les engins télécommandés. Toutefois, c'est purement le contexte opérationnel qui dicte la méthode à employer. Il n'y a rien dans leur déclaration que je chercherais à contredire.
Le président : Tout au long de votre exposé, vous avez utilisé le mot « déversement ». Bien entendu, j'ai pratiqué le droit maritime pendant presque toute ma carrière et le terme « déversement » signifiait en général qu'un accident était survenu en lien avec le réservoir de carburant ou la soute à combustible d'un pétrolier ou même d'un transporteur de marchandises solides. Toutefois, j'ai l'impression que vous ne parlez pas tout à fait de la même chose lorsque vous employez ce terme. Nous savons que la situation dans le golfe est attribuable à une explosion qui a tué 11 personnes et qui en a blessé quelque 28 autres, conduisant à une fuite. Quel sens devons-nous donner à ces termes?
M. McCloskey : Je pense que nous ajoutons probablement à la confusion en ce moment. Nous utilisons la nomenclature abrégée « déversement » pour désigner tout rejet dans l'environnement. Toutefois, dans ce que vous venez de décrire, vous avez fait une importante distinction. Il y a ce que nous appelons les « déversements ponctuels », où certaines quantités de liquide sont rejetées dans l'environnement, un point c'est tout. Ensuite, il y a les situations comme celle du golfe du Mexique, où la matière est rejetée en continu. Nous les qualifions de « déversements », mais je vous concède qu'ils sont de nature très différente.
Le président : Leur déversement donne un tout autre sens au terme « puits éruptif ». Encore ce matin, nous pouvons voir les images à CNN. Ce n'est pas qu'un filet de pétrole.
Comme je le disais tout à l'heure, les Canadiens n'ont pas idée de l'étendue des activités; pour leur permettre de mieux comprendre, vous travaillez dans le champ pétrolifère White Rose. Combien d'installations de forage avez-vous? Est-ce une seule?
M. McCloskey : Sur la côte Est, Husky dispose d'une zone d'exploration et de biens d'exploitation; ce sont des endroits où nous avons découvert des hydrocarbures mais où nous n'avons pas encore entrepris de production, et nous avons ensuite des gisements exploités. White Rose est un gisement exploité par Husky. Nous avons récemment entrepris d'exploiter un deuxième gisement appelé North Amethyst, à savoir depuis la fin mai.
Le président : Dans le même secteur?
M. McCloskey : Dans le même secteur, à quelques kilomètres seulement de White Rose. C'est un secteur prolifique pour nous.
Pour appuyer les activités d'exploration et d'exploitation, nous avons une plate-forme pétrolière appelée GSF Grand Banks, qui appuie nos activités d'exploitation. C'est une plate-forme semi-submersible ancrée, avec laquelle travaille Husky depuis un certain temps déjà.
Nous avons une deuxième installation de forage appelée Henry Goodrich, que nous exploitons en vertu d'un accord de partage avec deux autres exploitants, Statoil et Suncor. Selon les modalités du contrat, notre part d'accès est de 30 à 40 p. 100 quand la plate-forme est en marche. En règle générale, nous nous servons de cette plate-forme pour nos activités d'exploration.
En résumé, nous avons deux installations de forage, toutes deux semi-submersibles, toutes deux ancrées; une de ces plates-formes appuie nos activités d'exploitation tandis que l'autre appuie nos activités d'exploration. En outre, nous avons une installation de production, de stockage et de délestage dans le champ White Rose, et nous exploitons le gisement North Amethyst, rattaché au champ White Rose.
Le sénateur Lang : Je vous remercie d'être des nôtres aujourd'hui; votre participation est des plus appréciées.
J'aimerais centrer notre attention sur la question de la réglementation et du minimum requis de la part d'une entreprise comme la vôtre ou de toute autre entreprise, afin de préciser les exigences pour le compte rendu. J'en reviens donc à la question du golfe du Mexique. Bien entendu, c'est pourquoi nous sommes ici, parce que nous en voyons des images chaque jour. Compte tenu des éléments de preuve présentés dans le cadre des audiences à Washington, je commence à comprendre que les entreprises ne sont semble-t-il pas tenues de respecter d'exigences minimales pendant leurs activités de forage. Certains des témoignages récents laissent entendre que le tuyau n'aurait pas été de la bonne taille ou de la bonne épaisseur. Les procédures requises semblent ne pas avoir été mises en application. Au fil des jours, on constate que de nombreuses erreurs ont été commises. Cette comparaison est simpliste, mais lorsque je construis une maison, je suis obligé d'utiliser des madriers de telle dimension plutôt que telle autre. Un inspecteur vient sur les lieux pour s'en assurer.
J'aimerais vous demander si, dans leurs lois et règlements, le gouvernement fédéral et les provinces vous obligent à respecter un ensemble de normes minimales pour ce qui est de la dimension du tuyau du bloc obturateur de puits et pour tous les autres aspects de vos activités?
M. McCloskey : Chacun de nos puits fait l'objet d'une planification distincte en fonction des objectifs. La première étape de planification est celle de l'évaluation environnementale. Ensuite, la planification s'attaque à l'exécution du puits à proprement parler. À cette étape, nous élaborons un plan d'exécution, que nous soumettons pour examen à l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers. C'est une étape obligatoire pour chaque puits. Par exemple, lorsque nous forons de nombreux puits dans un même gisement et dans un même objectif, nous devons soumettre ce plan pour chacun des puits. Ce plan est étudié puis scruté à la loupe. Nous avons souvent à répondre à des questions pour préciser certains éléments du plan. Vient un temps dans toute cette démarche où le plan est jugé satisfaisant et finit par être approuvé.
Il va sans dire que notre équipement doit être certifié et adapté à la nature des activités, et que nos colonnes de tubage et nos pompes à boue conviennent au contexte de forage. Leur convenance est déterminée avant que l'autorisation de forer ne soit donnée. Bien entendu, ce processus est important pour nous, car il établit notre capacité d'exploiter. Sans cette capacité, nous ne pouvons forer de puits.
Pour vous rassurer, il ne s'agit pas d'un programme normatif qui fixe le type de colonnes à utiliser ou encore leur dimension, puisque ces choses dépendent de l'objectif du puits. Nous devons nous en tenir à des normes précises et nous respectons ou dépassons ces normes dans toutes nos sphères d'activité.
Le sénateur Lang : Pourriez-vous préciser pour le compte rendu s'il s'agit de lignes directrices minimales non établies dans la réglementation?
M. McCloskey : L'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers a récemment émis de nouvelles lignes directrices en matière de forage. Elles tendent à ne pas prescrire de paramètres précis, par exemple, en ce qui concerne la taille des colonnes ou les masses volumiques de boue, étant donné que chacun des ces éléments est fonction de chaque puits. Toutefois, je présume qu'il y a des principes généraux de fonctionnement à respecter. Nous devons démontrer que les colonnes sont conçues de manière à résister à la pression caractéristique des zones où nous travaillons et qu'elles sont adaptées à la profondeur des puits que nous forons. Nous devons étayer tous ces paramètres dans le plan que nous sommes tenus de soumettre pour le puits.
Le sénateur Lang : Je n'ai pas beaucoup de temps; je passerai donc à une autre question.
Tout d'abord, s'il survenait un problème et que nous avions à faire face à une situation semblable à celle qui sévit dans le golfe du Mexique, vous avez parlé de votre intervention à trois niveaux en cas de déversement. Avez-vous un plan d'urgence à appliquer au troisième niveau de cette intervention? Avez-vous physiquement démontré, dans le cadre d'un exercice de simulation sur table, par exemple, ce que vous feriez?
Deuxièmement, dans le golfe du Mexique, il semblerait que personne ne soit responsable de prendre les rênes de la situation en cas de désastre. Espérons qu'il n'en soit pas ainsi, mais au bout du compte, s'il survient un déversement, qui est l'autorité responsable alors que des décisions sont prises d'heure en heure?
M. McCloskey : Je répondrai à la deuxième question en premier, car elle va droit au cœur du problème. Nous sommes les responsables. Husky le dit très clairement. Lorsque nous recevons l'autorisation de forer, nous jouons le rôle d'exploitant. Ce rôle est assorti d'obligations. Dans l'éventualité fort peu probable d'un accident, cette responsabilité incombe à Husky. Nous avons à rendre des comptes. Nous serions l'autorité responsable de gérer l'incident.
Nous avons une structure et un centre de contrôle des incidents où travaillent des commandants du lieu de l'incident, formés en gestion des situations de crise et d'urgence. Ces personnes seraient responsables de la gestion des ressources déployées pour gérer l'incident. Nous sommes très clairs sur ce point.
Je crois que l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers a décrit dans certains de ses témoignages comment il entend exercer un rôle de surveillance. Nous comprenons que l'office surveillera nos activités, mais que nous serons aux commandes. Ce rôle pourrait changer seulement dans un contexte où l'office détermine que nos mesures d'intervention ne sont pas efficaces et qu'il entend nous remplacer. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que l'autorité responsable, c'est Husky.
La première partie de votre question portait sur notre programme d'intervention à trois niveaux. Pour le moment, nos activités de forage ne pourraient pas nécessiter plus qu'une intervention de niveau deux. Nous n'avons jamais effectué de forage qui aurait pu nécessiter une intervention de niveau trois jusqu'à présent, mais nous disposons de ressources supplémentaires, situées à l'étranger, auxquelles nous pourrions faire appel, au besoin. Si je ne me trompe pas, la Société d'intervention maritime de l'Est du Canada vous a mentionné, mardi, qu'elle a à sa disposition des ressources supplémentaires qu'elle peut mobiliser en notre nom.
Le président : La Société d'intervention maritime de l'Est du Canada a-t-elle signé un contrat avec vous?
M. McCloskey : Nous avons également conclu un contrat avec elle. La Société d'intervention maritime assure la garde et l'entretien d'une partie de notre équipement d'intervention, et c'est elle qui forme nos équipes. Nous rencontrons régulièrement des représentants de la SIMEC — à peu près une fois par trimestre — pour nous assurer que tout est conforme et que l'équipement fonctionne bien.
Donc, pour répondre à votre question, nous n'avons jamais procédé à un forage qui aurait pu nécessiter le troisième niveau d'intervention.
Le président : Je crois qu'il y a un malentendu.
Le sénateur Lang : Je ne comprends pas. Vous avez une stratégie d'intervention de niveau trois, et une stratégie d'intervention de niveau deux. Est-ce que ça veut dire qu'on parle d'un puits qui serait peu profond?
M. McCloskey : Je vais vous expliquer. Vous m'excuserez d'employer encore le terme « déversement », mais en cas de déversement d'envergure relativement faible, nous procédons à une intervention de niveau un, qui sera menée avec de l'équipement que nous avons sur le site. Chacune de nos unités flottantes de production, stockage et déchargement est équipée de matériel d'intervention qui peut être utilisé sur-le-champ.
Une intervention de niveau deux est nécessaire en cas de déversement plus considérable. Dans un tel cas, nous devons avoir recours à de l'équipement d'intervention laissé sur les côtes. En tant qu'exploitant, nous avons acheté notre propre équipement, y compris des barrières et des écrémeurs norvégiens. La SIMEC garde cet équipement pour nous. D'autres exploitants des Grands Bancs ont également de l'équipement à leur disposition, et nous pouvons nous aider mutuellement. C'est à cet équipement ainsi qu'à l'équipement de la SIMEC que nous faisons référence quand nous parlons des interventions de niveau deux.
Une intervention de niveau trois n'aura lieu qu'en cas de déversement de grande envergure. Dans une telle situation, les mesures de niveaux un et deux seraient tout de même mises en oeuvre, mais des ressources supplémentaires seraient appelées en renfort. Les ressources supplémentaires mobilisées pourraient notamment inclure des ressources de la garde côtière, des ressources supplémentaires de la SIMEC en provenance d'autres parties du Canada, ainsi que du soutien apporté par d'autres pays. Nous avons en outre passé un contrat avec Oil Spill Response Limited, une entreprise de Southampton, au Royaume-Uni. Cette entreprise peut envoyer des ressources importantes, y compris deux ou trois avions Hercules, qui peuvent transporter de l'équipement supplémentaire.
Pour ce qui est des délais d'intervention, le niveau un est mis à exécution sur-le-champ, le niveau deux est mis en oeuvre dans un délai d'environ 14 à 16 heures, et le niveau trois, dans un délai de 24 à 48 heures environ.
Le sénateur Lang : Je reprendrai la parole au prochain tour, s'il y en a un, monsieur le président.
Le président : Merci, sénateur Lang. Vous avez mentionné, dans votre première question, l'absence de normes clairement établies et les critiques formulées à la suite de l'incident du golfe du Mexique, qui a donné lieu à l'établissement du fonds de 20 milliards de dollars.
Husky exerce-t-elle des activités dans le golfe du Mexique?
M. McCloskey : Non. Nous n'exerçons aucune activité aux États-Unis, mais nous y avons des intérêts en aval.
Le président : Êtes-vous en mesure de nous expliquer les différences qui distinguent les régimes réglementaires américain et canadien? Nous savons qu'ils sont différents, et qu'il n'y aurait guère lieu de s'inquiéter pour ce qui est de la réglementation canadienne.
M. McCloskey : La question du régime réglementaire du Canada a déjà été abordée devant le comité. Pour ma part, j'ai travaillé à l'étranger à de nombreuses reprises, et le régime canadien est suffisamment rigoureux pour tous les environnements dans lesquels j'ai travaillé.
Il y a des différences importantes entre le régime du Canada et celui des États-Unis. Le Canada fait preuve d'une plus grande rigueur pour ce qui est de la certification de l'équipement. Comme je l'ai dit, nos installations de forage font l'objet d'une inspection quinquennale, et les systèmes essentiels sont passés en revue. Les systèmes de contrôle des puits sont recertifiés tous les cinq ans, et on procède alors à une vérification des fonctions et de tous les éléments des systèmes. Je ne crois pas qu'une recertification soit exigée aux États-Unis. La recertification de l'équipement est une mesure d'assurance supplémentaire que prévoit le régime canadien.
Le président : J'aimerais vous présenter le sénateur Paul Massicotte, de Montréal, qui est arrivé il y a quelques minutes.
Le sénateur Frum : Vous avez mentionné qu'en cas d'intervention de niveau deux, vous utiliseriez un écrémeur norvégien à la fine pointe de la technologie, et que vous seriez responsables du nettoyage. Mais vous êtes libres de choisir la technologie à laquelle vous aurez recours. Si Husky, ou une autre entreprise, ne dispose pas d'un écrémeur à la fine pointe de la technologie, un écrémeur désuet pourrait être utilisé.
Est-ce qu'aucun contrôle n'est effectué relativement à la qualité de l'équipement?
M. McCloskey : Husky prend très au sérieux sa responsabilité à cet égard. Nous avons opté pour de l'équipement à la fine pointe de la technologie quand nous avons fait nos acquisitions et que nous avons conclu des ententes avec d'autres exploitants afin que le matériel d'intervention de chacun soit mis à la disposition de l'entreprise qui en aurait besoin, en cas d'urgence.
Nous avons modernisé notre équipement il y a quelques années. Nous avons également travaillé à l'amélioration d'un ancien système, le système de dragage latéral à un seul navire, qui fonctionnait au moyen d'une pompe à ailettes. Nous avons estimé que cette modernisation de notre équipement d'intervention était nécessaire, car nous devons tenir compte de l'environnement dans lequel nous travaillons. Dans l'Atlantique Nord, les conditions sont souvent rigoureuses. Le système norvégien nous a semblé convenir à nos besoins notamment parce qu'il peut être utilisé lorsque la mer est forte, et que nous sommes susceptibles d'avoir à travailler dans de telles conditions.
On ne nous a pas obligés à faire l'acquisition de cet équipement. Nous l'avons fait parce que nous estimions que c'était la meilleure technologie disponible pour travailler dans l'environnement où nous exerçons nos activités.
Le sénateur Frum : Cela nous ramène encore une fois à la remarque du sénateur Lang selon laquelle aucun règlement ne vous oblige à avoir à votre disposition de l'équipement de nettoyage répondant à certaines normes.
M. McCloskey : Il n'existe aucune norme de ce genre, à ma connaissance.
Le sénateur Dickson : Votre société a-t-elle déjà été responsable d'un déversement dans la région de Terre-Neuve depuis qu'elle y exerce des activités et, le cas échéant, quelle était l'envergure de ce déversement, et qu'avez-vous fait pour y remédier?
M. McCloskey : En 27 ans, nous n'avons jamais été responsables d'un déversement lié au contrôle d'un puits. Le déversement le plus important auquel nous avons fait face s'est produit pendant nos opérations de production. Nous transférions du pétrole de notre unité de production flottante à un pétrolier lorsqu'une défaillance est survenue. Il y a eu un déversement de 30 barils de pétrole brut, et nous avons procédé au nettoyage en utilisant notre équipement en mer. C'est le plus important déversement d'hydrocarbures auquel nous avons fait face.
Le sénateur Dickson : Pouvez-vous nous expliquer brièvement quelle est la nature de votre relation avec la Société d'intervention maritime de l'Est du Canada? A-t-elle des obligations contractuelles envers vous?
M. McCloskey : Oui. Elle demeure à notre disposition pour nous assister dans nos opérations, en tant qu'organisme d'intervention. Elle garde de l'équipement dont Husky a fait l'acquisition; elle nous aide à entretenir cet équipement et elle l'entrepose pour nous. Elle contribue à la formation de nos équipages, et elle collabore avec eux lorsque nous devons avoir recours à l'équipement dont je viens de parler. Elle nous apporte également son soutien lors des activités de forage.
Chaque année les exploitants participent, sur le Grands Bancs, à un forage conjoint appelé « opération Synergie ». Les différents exploitants assument la direction de ce forage chacun leur tour. L'année dernière, c'est Husky qui en était responsable, et cette année, je crois que ce sera Exxon Mobil et Hibernia Development Corporation.
La Société d'intervention maritime a des obligations contractuelles envers nous, mais il s'agit d'un agent contractuel spécialisé, qui assure la prestation de ces services spécialisés.
Le sénateur Dickson : Le gestionnaire de cette société a comparu devant nous hier. Je crois comprendre que, selon le processus en usage, la Société d'intervention maritime de l'Est du Canada n'examine pas le plan de sécurité tant qu'il n'y a pas de déversement. Il n'y a pas d'examen, pas de communications préalables. J'ai trouvé cela plutôt étrange.
M. McCloskey : J'ai remarqué cela en lisant le compte rendu. J'ai essayé d'obtenir des précisions sur le processus, mais je crains de ne pouvoir vous fournir de plus amples explications aujourd'hui. Je serai cependant heureux de vous revenir là-dessus à une date ultérieure et de vous donner des éclaircissements sur cette question.
Le sénateur Dickson : Croyez-vous qu'il serait opportun que la société d'intervention voie le plan avant qu'un déversement ne se produise réellement?
M. McCloskey : Je dois faire attention à ce que de dis. Nous collaborons en permanence avec la SIMEC et nous rencontrons des représentants de la société chaque trimestre. J'aurais imaginé que nos plans de sécurité faisaient l'objet de discussions, mais je ne peux pas vous le confirmer aujourd'hui. J'aimerais vous revenir là-dessus, si c'est possible.
Le président : Ce serait important, et il nous conviendrait très bien, que vous fassiez parvenir les documents pertinents à notre greffière, afin que nous en prenions connaissance et que nous les annexions à notre documentation. Nous avons sourcillé quand on nous a déclaré sans ambages que la SIMEC ne voyait pas le plan, alors que le public accorde une grande importance au fait que ce plan a été examiné et approuvé avant que vous n'obteniez une autorisation et que vous ne commenciez les travaux de forage. La Société d'intervention maritime de l'Est du Canada fait partie intégrante de ce plan, et il nous semble inconcevable qu'elle fasse partie intégrante du plan mais qu'elle ne le voie pas au préalable. On peut espérer qu'il s'agit d'un malentendu, mais il sera important de clarifier la situation.
M. McCloskey : Je suis d'accord avec vous : la situation doit être clarifiée. Je dirai cependant qu'en ce qui concerne nos activités de forage, dans le cadre de l'opération Synergie, notre plan de sécurité tient compte des différents scénarios que nous pouvons envisager. Je dois souligner ce fait, bien que j'aie été surpris par cette affirmation.
Le sénateur Brown : J'ai lu le texte de votre exposé et, à la page 6, vous mentionnez à plusieurs reprises les blocs obturateurs de puits, les procédures de contrôle multiples, et les systèmes de contrôle hydraulique à commande pilote pour les BOP.
Je le rabâche depuis quelques semaines maintenant, mais pourquoi ne pourrait-il pas y avoir plus d'un obturateur de sécurité? En examinant votre diagramme de la dernière page, je me demande pourquoi il ne pourrait pas y avoir un ensemble d'obturateurs empilés les uns sur les autres, ou même alignés horizontalement?
Par ailleurs, quand vous parlez de la redondance qui caractérise les mesures de contrôle, vous indiquez que quiconque fait fonctionner l'engin de forage est autorisé à activer les obturateurs de sécurité. Si je comprends bien, l'obturateur de sécurité a sauté dans le golfe du Mexique. Est-ce qu'il ne serait pas préférable qu'il y en ait plus d'un, et qu'ils soient configurés de manière à ce que l'on ferme d'abord le dernier, puis qu'on ferme ensuite les suivants, en cas d'accident lié à un obturateur de sécurité?
J'imagine que ces dispositifs coûtent très cher, peut-être plus d'un million de dollars chacun. Cependant, compte tenu de leur importance, et de l'envergure des risques que l'incident de BP nous a révélés, la redondance semble revêtir une grande importance.
Vous parlez partout de redondance. Vous contrôlez votre capacité de fermer par différents moyens l'obturateur de sécurité. Cependant, si c'est l'obturateur de sécurité qui saute, la redondance ne sert plus à rien. À mon avis, si vous aviez plus d'un obturateur de sécurité, vous pourriez faire face à pratiquement toutes les situations qui pourraient se produire.
M. McCloskey : D'abord, en ce qui concerne l'incident du golfe du Mexique, je crois que nous ignorons aujourd'hui encore si l'obturateur de sécurité a sauté, ou quelle a été la cause réelle de l'incident. Ce dont vous parlez — la nécessité qu'on puisse fermer un obturateur de différentes façons — fait partie intégrante de la structure des obturateurs.
M. Pate pourrait peut-être vous donner des explications sur le diagramme et vous expliquer comment fonctionnent les blocs obturateurs de puits. Cela vous rassurera peut-être. Il ne s'agit pas d'un dispositif unique, mais d'un ensemble de dispositifs qui ont chacun une fonction légèrement différente et qui peuvent permettre de procéder à l'obturation.
Le sénateur Brown : Je comprends que la valve d'un bloc obturateur peut être fermée de différentes façons, mais il semble que rien n'ait fonctionné dans le cas du golfe. C'est pour cela que je me demande pourquoi il n'y aurait pas plusieurs obturateurs.
Le président : Écoutons les explications de M. Pate. Je crois que c'est une bonne idée, et nos analystes sont impatients de connaître les dimensions de ce BOP. Est-ce qu'il fait 300 mètres?
Al Pate, directeur général, Services d'exploration et de production, Husky Oil Operations Limited : Il fait 120 mètres, monsieur le président.
Le président : Indiquez-nous les dimensions tout en nous décrivant le bloc obturateur.
M. Pate : Je vais vous expliquer comment est configuré le BOP. Nous allons d'abord examiner le diagramme qui représente l'engin de forage. Il s'agit d'un engin de forage flottant semi-submersible, maintenu en place par ancrage. Entre l'engin de forage et le BOP se trouve le tube goulotte, un conduit de 21 pouces de diamètre, qui forme un mur très épais. Sa fonction est de permettre la remontée du fluide à la surface de la plateforme, de manière à ce que celle-ci puisse se déplacer au-dessus du puits.
Ce conduit est relié à ce que nous appelons le tube goulotte inférieur. Si vous regardez du côté droit du diagramme, vous pouvez voir le tube goulotte et un joint flexible. Comme vous pouvez le constater, la plateforme se déplace à la surface. Le tube goulotte et le bloc obturateur doivent donc avoir une certaine souplesse, et c'est à cela que sert le joint flexible.
En dessous se trouve un obturateur annulaire, qui est essentiellement un anneau de caoutchouc. On peut appliquer une pression hydraulique dessus afin qu'il s'enserre autour de la tige de forage, du tubage, du câble métallique ou d'un autre élément d'un puits de forage. Cela peut permettre de colmater une ouverture. Si le puits doit être fermé, cela peut être fait au moyen de cet anneau.
En dessous, il y a ce que nous appelons un connecteur. En cas de besoin, le connecteur permet de séparer le tube goulotte inférieur, c'est-à-dire la partie supérieure, du reste de l'ensemble d'obturateurs. Dans l'éventualité où il faudrait procéder à une déconnexion d'urgence, en raison de la présence de glaces ou pour quelque autre raison que ce soit, il serait possible de suspendre les activités du puits adéquatement, en fermant les BOP, en déconnectant le tube goulotte et le tube goulotte inférieur, puis en éloignant la plateforme. C'est un aspect important de nos activités d'exploitation.
Vous pouvez voir, plus bas, une série d'autres dispositifs d'obturation. Il y a un autre obturateur annulaire, ou un autre anneau de caoutchouc, si vous préférez. Il y a donc une double redondance, un second anneau de caoutchouc. Plus bas encore se trouve une série de mâchoires de sécurité à cisaillement, qui sont conçues pour couper la tige de forage en cas d'urgence. Il y a ensuite trois séries de mâchoires de fermeture sur tige. Il s'agit, grosso modo, de pièces d'acier semi- circulaires, munies d'un joint d'étanchéité de caoutchouc. Ces mâchoires peuvent, elles aussi, se refermer autour de la tige de forage du puits ou d'autres types de tiges. Il y a un encore un autre ensemble de trois mâchoires redondantes.
Votre proposition d'empiler des BOP correspond essentiellement à la structure actuelle. Chacune des mâchoires est conçue pour colmater une brèche en se refermant autour d'un élément en particulier, et il y a des redondances partout, excepté en ce qui concerne la mâchoire cisaillante à fermeture totale, qui est unique. Dans ce cas-ci également, nous pouvons refermer l'anneau afin de colmater une ouverture.
Il y a donc des redondances dans tout le BOP. Pour vous donner une idée de ce que représente cet appareillage, le BOP est composé de plus de 200 tonnes de matériel. Son diamètre interne est de 18 pouces et trois quarts, mais les dimensions totales sont immenses. C'est un appareillage très massif, et il est solidement attaché à la tête du puits, sur le plancher océanique. C'est une pièce d'équipement solide et rigide, conçue pour supporter une charge et une pression énormes. Sa hauteur est de 30 à 50 pieds. C'est une pièce d'équipement extraordinairement imposante.
Pour ce qui est des systèmes à double redondance, nous avons des systèmes hydrauliques distincts, qui peuvent être permutés afin de contrôler n'importe laquelle des mâchoires ou n'importe quel anneau. Le bloc obturateur peut être fermé d'un grand nombre de façons.
Pour répondre à votre question, on pourrait donc dire, d'une certaine façon, que ce qui est déjà en place correspond essentiellement à une série de BOP.
Le président : L'appareillage mesure donc de 40 à 50 pieds de hauteur, et il pèse 200 tonnes?
M. Pate : Oui, et le diamètre intérieur est de 18 pouces et trois quarts. La largeur peut être de 15 pieds, ou à peu près.
Pour ce qui est de la pression que peut tolérer cet appareillage, les obturateurs annulaires peuvent supporter 10 000 livres par pouce carré, ou psi, et les mâchoires peuvent toutes supporter 15 000 psi. C'est du matériel solide et massif, et ces appareils sont conçus pour pouvoir fermer le puits.
Le sénateur Brown : À la lumière de ce qui s'est passé dans le golfe, on pourrait penser que les données étaient inexactes.
Le président : Nous ne savons pas ce qui s'est produit dans le golfe. Laissons cette question de côté.
Le sénateur Brown : Je comprends, mais je disais que, d'après les photographies que j'ai vues, qui ont été prises par le sous-marin qui s'est rendu sur les lieux, il y avait un morceau de tuyau qui était tordu en angles droits. Je n'ai rien vu d'autre dans ces images.
M. Pate : Le morceau de tuyau que vous avez vu était le tube prolongateur qui est situé au-dessus du bloc d'obturation de puits. Encore une fois, je ne peux pas vous dire exactement ce qui s'est produit. Je suis sûr qu'avec nos systèmes, nous sommes capables d'obturer nos puits, si cela est nécessaire.
Le président : Merci. Nous n'avons pas beaucoup de temps. Je suis heureux que vous ayez parlé du bloc d'obturation de puits. Je voulais vous présenter le sénateur Nancy Greene Raine qui vient d'arriver. Tous les autres sénateurs ont été présentés.
Le sénateur Peterson : Merci pour votre exposé. Même en étant prudent, des accidents arrivent. Le président Obama a déclaré au sujet de l'incident du Golfe, qu'il n'y aurait pas de plafond financier. Cela vous paraît-il raisonnable? Comment cette situation va-t-elle modifier vos paramètres de gestion du risque?
M. McCloskey : Pour nous, cela ne change rien en pratique. Avec les règlements actuels, si nous avons commis une faute, il n'y a pas de limite.
Le sénateur Peterson : Vous êtes visés par le même régime?
M. McCloskey : Nous travaillons également selon ces conditions.
Le sénateur Peterson : Vous forez dans des eaux peu profondes, mais si vous étiez obligé de le faire, combien de temps vous faudrait-il pour forer un puits de secours?
M. McCloskey : Il est difficile de généraliser, parce que cela dépend du puits que nous sommes en train de forer et de sa profondeur. Je dirais qu'habituellement pour les puits que nous forons, il faudrait entre 30 et 45 jours plus le temps nécessaire pour amener l'appareil de forage sur place. Cela prendrait peut-être moins de 60 jours au total.
Le sénateur Frum : Merci pour votre excellent exposé. Vous avez souligné au moins deux fois au cours de votre exposé que vous faisiez du forage dans des eaux peu profondes. Le président vous a posé une question au sujet du témoignage de Chevron. Les représentants de cette société ont dit en réponse à une question que j'avais posée qu'il n'y avait rien de magique à propos du chiffre de 5 000 pieds de profondeur. Je me demandais si vous pouviez commenter cette affirmation. Il est évident que si vous avez insisté sur le peu de profondeur des eaux dans lesquelles vous forez, c'est que vous laissez entendre qu'il y a une différence.
M. McCloskey : Premièrement, ce chiffre n'a rien de magique. Je le reconnais.
La différence avec les forages que nous exécutons en eau peu profonde est qu'à cette profondeur, les systèmes hydrauliques qui activent les blocs d'obturation de puits fonctionnent très bien. En fait, le signal n'a pas à se rendre très loin.
En eau profonde, les entreprises ont essayé différentes méthodes pour activer les blocs d'obturation. Ces spécialistes ont probablement fait référence à un système acoustique ou à un mode automatique de fonctionnement. Je pense qu'il est même possible d'activer ces blocs à distance.
Dans notre situation, avec la profondeur de l'eau où nous forons, le système hydraulique fonctionne extrêmement bien parce que le signal hydraulique a une très courte distance à parcourir. Il est même possible qu'il fonctionne mieux que d'autres systèmes comme le système acoustique. En eau peu profonde, le bruit de fond du fonctionnement de l'équipement peut entraîner une interférence avec le système acoustique; par contre, en eau plus profonde, l'interférence est beaucoup plus faible et cette méthode est peut-être plus efficace.
Nous étudions toujours le mode d'activation et nous avons conclu que, pour notre environnement, et comme principale méthode d'activation, la méthode hydraulique était appropriée, mais si cette méthode ne fonctionne pas, nous avons un système de secours qui consiste en un véhicule commandé à distance. Dans le cas de la société Chevron, je peux comprendre que les responsables aient examiné ces différentes méthodes d'activation.
Le sénateur Seidman : Merci d'être venus. J'ai demandé à Chevron quel était son budget de recherche et développement, en particulier pour les cas de restauration; autrement dit, dans le pire scénario d'un déversement majeur. La question portait principalement sur la R-D dans le domaine du confinement et du nettoyage du pétrole. Ses représentants ont déclaré que BP avait l'intention de consacrer 500 millions de dollars de son budget de R-D à la restauration, et j'ai pensé que cela revenait un peu à fermer la porte de l'écurie une fois le cheval parti. Il semble que la R-D ait presque exclusivement visé la question des forages pétroliers.
Pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet du genre de R-D qu'effectue votre société pour ce genre de situation catastrophique?
M. McCloskey : Bien sûr. Ces cinq dernières années, Husky Oil a investi près de 30 millions de dollars en R-D à Terre- Neuve-et-Labrador. De ce montant, cinq millions de dollars environ étaient consacrés à ce que j'appelle les « aspects environnementaux ». Ces aspects vont d'un appui à la mise au point de systèmes de restauration des sites avec un seul navire aux projets touchant l'habitat marin. Nous finançons un centre de réhabilitation des oiseaux de mer. Un bon nombre de nos employés et de ceux qui travaillent sur nos navires d'approvisionnement sont des bénévoles formés pour s'occuper des oiseaux. Cela nous a paru important en cas d'accident.
Cette recherche porte, d'une façon générale, sur les domaines sur lesquels nous avons fait enquête. Nous sommes ouverts à l'idée d'orienter nos investissements sur d'autres sujets de recherche et développement — pour revenir à la remarque précédente du sénateur — dans le but d'améliorer les techniques de restauration ou de confinement. La difficulté consiste à trouver le type d'investissement approprié et l'idée dans laquelle il serait utile d'investir. Nous sommes heureux de poursuivre ce genre d'investissement.
Le sénateur Seidman : J'aimerais poser une autre question, mais je sais que le temps est écoulé. Vous avez parlé d'un plan de réponse de catégorie trois. Les témoins qui ont comparu mardi ont déclaré que ce qui était arrivé dans le Golfe était un accident de catégorie trois et plus. Je n'ai pas compris ce qu'était votre plan de réponse à un accident de catégorie trois.
Serait-il possible, monsieur le président, d'obtenir une réponse à cette question?
Le président : Il va falloir que je déclenche mon dispositif de contrôle du temps, le DCT. Nous allons devoir nous arrêter là parce que je veux donner la parole au sénateur Massicotte, même s'il est arrivé en retard.
Faites un commentaire, parce que nous avons presque abordé cette question, il y a un moment. Je crois que cela serait juste pour le sénateur Seidman.
M. McCloskey : S'il y a des questions auxquelles nous n'avons pas pu répondre aujourd'hui, n'hésitez pas à me les faire parvenir et nous vous fournirons des réponses. Je serai très heureux de le faire.
Le président : Sénateur Massicotte, vous avez deux minutes avant que je déclenche mon dispositif de contrôle.
Le sénateur Massicotte : Je vous demande d'excuser mon retard. J'ai été retenu à un autre comité.
Pour donner suite à une question précédente, la législation canadienne fait en sorte que vous êtes responsables de tous les dommages causés par votre déversement de pétrole. Cette responsabilité englobe-t-elle les dommages économiques, par exemple, ceux des pêcheurs dont les stocks sont en danger ou du gérant d'hôtel dont la plage est polluée?
M. McCloskey : Je dois admettre que je n'en suis pas absolument sûr. Pour ce qui est de la pêche, il y a un programme d'indemnisation sur lequel nous nous sommes déjà entendus. Je serai heureux de revenir sur ce sujet.
Le sénateur Massicotte : Pourriez-vous nous fournir davantage d'information?
M. McCloskey : Certainement.
Le président : Messieurs, comme vous pouvez le constater, c'est un sujet qui nous intéresse beaucoup et nous pourrions continuer à en parler toute la journée. Nous devons passer à nos témoins suivants et je crois que ces messieurs doivent nous quitter. Je vous signale que vous êtes passés à la télévision et que je reçois déjà des commentaires élogieux au sujet de votre témoignage. Merci.
Honorables sénateurs, le sénateur Greene Raine remplace quelqu'un ce matin.
Les témoins du second groupe représentent EnCana. Nous avons le plaisir d'accueillir Malcolm Weatherston. Il est le gestionnaire général du projet Deep Panuke de la Division canadienne de la région du Canada atlantique d'EnCana Corporation depuis 2001. Quels sont les antécédents sociaux d'EnCana?
Malcolm Weatherston, gestionnaire général du projet, Deep Panuke, Division canadienne, Canada atlantique, EnCana Corporation : EnCana est la fusion de deux sociétés, l'Alberta Energy Company et PanCanadian Energy, qui avaient toutes deux leur siège à Calgary.
Le président : Monsieur Weatherston compte plus de 30 ans d'expérience dans le secteur du pétrole et du gaz extracôtier. Il a travaillé dans le génie, la gestion de la construction, la planification stratégique et la gestion générale de projet dans la mer du Nord et dans la région Atlantique du Canada. Depuis qu'il a intégré le projet Deep Panuke, il a obtenu l'autorisation réglementaire, lancé un appel d'offres pour le centre d'exploitation, obtenu l'approbation interne du projet, attribué les principaux contrats et démarré la phase de construction actuelle du projet.
Nous accueillons également William Zukiwski qui occupe le poste de surintendant, forage et complétion, dans le cadre du projet Deep Panuke. Il s'est joint au projet en juin 2009. M. Zukiwski compte près de 40 ans d'expérience dans les opérations de forage dans l'industrie pétrolière et gazière terrestre et extracôtière. Il a travaillé au niveau des opérations de forage jusqu'à la direction dans le cadre de projets en Amérique du Nord, au Moyen-Orient, en Afrique, en Amérique du Sud et en Europe de l'Ouest. Il est entré au service d'EnCana en 1997 pour appuyer les opérations de forage dans l'Ouest du Canada, dans l'ouest de Terre-Neuve-et-Labrador et en Nouvelle-Écosse.
Je tiens à préciser que vous étiez dans la salle lors des témoignages des témoins qui représentaient Husky. Il n'est pas nécessaire de présenter à nouveau ceux qui sont présents. J'ai eu une conversation avec M. Weatherston au début de la semaine. Nous serons éclairés d'ici la fin de son témoignage. Merci d'être venus.
M. Weatherston : Merci de m'avoir invité à prendre la parole devant le comité ce matin. Je suis le gestionnaire général du projet Deep Panuke. Je suis accompagné aujourd'hui par William Zukiwski, un de nos deux surintendants de forage et complétion qui participe activement à la réalisation du projet.
Pour vous décrire le projet, nous avons préparé une déclaration préliminaire. Nous serons ensuite heureux de répondre à vos questions.
EnCana connaît les circonstances tragiques de l'accident survenu dans le golfe du Mexique qui vous ont amenés à nous inviter ici aujourd'hui. Onze vies ont été tragiquement perdues sur la plate-forme Deepwater Horizon. Le déversement de pétrole a des conséquences environnementales dévastatrices. Nous tenons à exprimer nos condoléances aux familles et à ceux qui continuent de souffrir des répercussions de cette tragédie.
Je ne suis pas en mesure aujourd'hui de vous présenter une analyse de la situation dans le Golfe, mais je peux par contre vous expliquer ce que fait EnCana dans le cadre du projet Deep Panuke pour s'assurer, dans la mesure du possible, que nos activités de forage et de complétion reliées à notre projet sont fiables et sécuritaires.
Pour commencer ma présentation générale d'EnCana Corporation, la société qui mène le projet Deep Panuke, je dois dire, pour éliminer tout malentendu, que le nom « Deep Panuke » est quelque peu trompeur. En réalité, ce projet se déroule à environ 45 mètres de profondeur. La plate-forme que nous utilisons actuellement, la Rowan Gorilla III, repose sur le fond de la mer pendant que nous exécutons notre programme de forage et de complétion.
Le siège d'EnCana est situé à Calgary, en Alberta; cette société possède un bureau régional à Halifax en Nouvelle- Écosse où M. Zukiwski et moi travaillons, qui est le bureau de projet de Deep Panuke.
EnCana est une société productrice de gaz naturel novatrice dont la production est axée sur la sécurité et la responsabilité. Elle fournit de l'énergie à des collectivités situées au Canada et aux États-Unis. EnCana est spécialisée dans la production gazière non conventionnelle, ce qui veut dire la production provenant de ressources à terre, principalement en Alberta, en Colombie-Britannique, au Wyoming, au Colorado, au Texas et en Louisiane. Deep Panuke est le projet canadien extracôtier de la société.
Pour Deep Panuke, la sécurité est notre valeur fondamentale et nous travaillons avec diligence tous les jours pour veiller à préserver en permanence un environnement sain et sécuritaire. À EnCana, nous avons une devise en matière de sécurité : « Si nous ne pouvons pas faire quelque chose de façon sécuritaire, nous ne le faisons pas ».
La sécurité des travailleurs est essentielle à la réussite du projet Deep Panuke et il n'y a rien de plus important que cela. Nous avons constamment à l'esprit les répercussions que peuvent avoir nos activités sur l'environnement.
Le but du projet Deep Panuke est d'empêcher tous les accidents, majeurs ou mineurs. Si un accident se produisait, la société EnCana ferait tout ce qu'elle peut pour en atténuer le plus rapidement possible les répercussions afin d'empêcher qu'il ne se reproduise, tout en atténuant les effets sur les personnes, l'environnement et les biens. Nous prenons très au sérieux nos responsabilités en matière de sécurité et de santé environnementales, et nous avons mis au point des programmes, des procédures et des protocoles que je vais vous décrire de façon détaillée dans un instant.
Le projet Deep Panuke se déroule en mer, à environ 250 kilomètres au sud-est d'Halifax, en Nouvelle-Écosse, et à 47 kilomètres à l'ouest de l'île de Sable à une profondeur d'environ 44 ou 45 mètres. Le bassin de gaz naturel de Deep Panuke est situé sur le Plateau néo-écossais, et EnCana Corporation est la propriétaire exploitante de l'installation de Deep Panuke.
Le président : Chers collègues, je vous renvoie à la carte qui était annexée à l'exposé du témoin précédent. Ce n'est pas une carte détaillée, mais elle vous donne une idée d'où se trouve Deep Panuke par rapport au bassin Orphan, où se trouve Chevron, qui n'est pas sur la carte.
M. Weatherston : Merci, monsieur le président. Nous avons commencé par forer et tuber les quatre puits actuels au cours de la phase d'exploration de Deep Panuke entre 2000 et 2003. À l'époque, les puits ont été forés et ont été préparés pour que l'on puisse les utiliser plus tard comme puits de production. Il n'y a rien d'extraordinaire dans le forage qui s'effectue à Deep Panuke. C'est un programme de forage de développement et de complétions axé sur la mise en valeur d'un gisement, pour lequel la géologie et les réservoirs associés sont mieux définis que pour les programmes d'exploration.
Le président : Je vous ai peut-être mal compris monsieur, mais je pense que vous avez dit que le forage n'était pas extraordinaire alors que vous voulez dire exploratoire — deux mots très différents.
M. Weatherston : Excusez-moi. Merci.
Le président : Vous parliez du programme de forage et de complétions.
M. Weatherston : Le programme de forage et de complétions prévoit le forage d'un nouveau puits, la rentrée et la complétion des quatre puits existants. Le nouveau puits sera utilisé pour le stockage sécuritaire du sulfure d'hydrogène et du dioxyde de carbone, qui sont des sous-produits de l'extraction extracôtière.
Le gaz de Deep Panuke est « sec », ce qui veut dire dans le langage des hydrocarbures que c'est un gaz naturel qui n'est pas associé à de gros volumes de liquides libres comme des condensats. Le faible volume des condensats produits à l'installation de Deep Panuke sera traité en mer et utilisé comme principale source de combustible par le centre de production local, qui est la plate-forme d'exploitation du projet. Les condensats ont une consistance similaire à celle du naphte, le combustible utilisé pour les réchauds de camping, par exemple.
Le gaz naturel provenant de Deep Panuke est directement commercialisable et sera transporté par un gazoduc d'environ 175 kilomètres vers un point de connexion qui le reliera au pipeline des Maritimes et du nord-est des États- Unis, à Goldboro, en Nouvelle-Écosse.
Tous les puits seront dotés de têtes de production sous-marines, qui sont des modules de réglage du débit et des dispositifs d'obturation fixés au sommet de chaque puits. Une vanne d'isolement de gazoduc sous-marine sera également installée à environ 50 mètres du centre de production. Cette vanne peut être activée pour isoler le gaz naturel se trouvant dans le gazoduc se rendant au rivage du centre de production et des puits de production. Nous prévoyons commencer à extraire le gaz de Deep Panuke au cours de la seconde moitié de 2011.
Je voulais parler un peu du processus de réglementation pour faire ressortir toute la rigueur du système réglementaire canadien.
Le président : C'est très bien, comme nous en avons déjà parlé. Vous devez comprendre que nous ne sommes pas des spécialistes en génie dans le domaine du forage et de l'exploration des hydrocarbures, mais nous avons réussi à comprendre qu'il y avait une grande différence entre les forages pétroliers et les forages de gaz naturel. S'il y a un déversement de pétrole, il se forme des nappes épaisses et noires de pétrole; alors que dans le cas du gaz — et je sais que je simplifie beaucoup — s'il y avait un déversement, ce ne serait pas une catastrophe environnementale. Le gaz s'évapore dans l'air, je crois, mais il reste les condensats.
Si vous pouviez bien expliquer cette différence pour nous et pour notre rapport, ce serait une excellente chose. Je sais que cela vous semble très simple, mais nous voulons vraiment comprendre quels sont les risques. Nous savons qu'il y a la question de l'inflammabilité et des risques d'explosion, éventualité tout aussi effrayante à envisager compte tenu du nombre de personnes qui travaillent sur vos plates-formes. Je crois que vous comprenez ce que je veux dire.
M. Weatherston : Monsieur le président, voulez-vous que je réponde à cette question?
Le président : Je ne crois pas que vous en parlez dans le reste de votre exposé, et je ne pense pas que cela vous prendra beaucoup de temps. Cela nous permettra de comprendre ensuite un peu mieux le processus de réglementation et le plan d'intervention.
M. Weatherston : Alors, je vais essayer de le faire. Le bassin gazier que nous allons exploiter est un bassin gazier où la pression est normale, avec un très faible niveau de liquides libres. Nous forons dans 45 mètres d'eau. L'équipement essentiel de contrôle des puits dont nous avons beaucoup parlé — comme les blocs d'obturation, par exemple, et les autres systèmes secondaires de contrôle de puits — se trouve sur la plate-forme. Dans notre cas, le matériel essentiel dont nous avons parlé se trouve là et les gens qui travaillent sur la plate-forme y ont accès parce qu'il n'est pas situé sur le fond marin.
En cas de problème grave, par exemple une émission de gaz importante, le gaz monterait du fond marin si l'émission se trouvait à ce niveau ou s'échapperait du bloc obturateur de puits situé sur la plate-forme. Ce gaz serait libéré et volatile et se dissiperait rapidement dans l'atmosphère.
Dans ces circonstances, nous utilisons le premier et le deuxième niveau d'intervention d'urgence. Nous confinons le secteur, évacuons le personnel de façon sécuritaire et essayons d'intervenir de la meilleure façon possible pour arrêter cette émission de la façon la plus rapide et la plus sûre. Je vais demander à M. Zukiwski de décrire en détail un peu plus tard ces mécanismes de contrôle.
Avec une émission de gaz de ce genre, il y a des condensats libres. Dans notre cas, il y a peu de condensats. Il y a environ 3,2 barils de condensats par million de pieds cubes de gaz libéré. Dans les simulations et les tests que nous avons effectués, nous avons constaté que la libération de ces condensats crée une mince couche brillante sur l'eau. Cette mince couche a environ 15 microns d'épaisseur au moment de l'émission du gaz et de l'explosion. Rapidement, en quelques minutes, cette épaisseur tombe à moins d'un micron. C'est un peu comme si on regardait de l'essence s'évaporer sur l'eau; c'est la constitution du produit.
Le président : Voilà une excellente explication. Vous étiez à la page 5 du processus réglementaire d'approbation.
M. Weatherston : Encore une fois, cette explication est peut-être un peu longue et je vous prie de m'en excuser, mais j'ai lu tous les témoignages de nos pairs, je crois qu'il vaille la peine de souligner la confiance qu'on peut avoir relativement au processus réglementaire rigoureux qui est appliqué au Canada.
Le projet Deep Panuke fait l'objet d'une surveillance réglementaire élaborée. Ce projet a donné lieu à une évaluation environnementale globale et a été soigneusement examiné par nos organismes de réglementation, l'Office Canada- Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers, l'OCNEHE, et l'Office national de l'énergie, au moyen d'une demande relative à un plan de développement, du dépôt de documents de l'ONE en 2006 et de la tenue d'audiences conjointes jusqu'en 2007.
À la suite de l'approbation du plan de développement de l'OCNEHE et des conclusions de l'évaluation environnementale, EA, il a fallu encore demander deux autres autorisations ou approbations à l'OCNEHE avant de démarrer le programme de forage et de complétion de Deep Panuke.
Premièrement, l'autorisation du programme de forage doit être obtenue pour l'ensemble du programme; dans notre cas, il s'agissait de quatre rentrées dans des puits existants et du forage d'un nouveau puits de refoulement.
Deuxièmement, il faut obtenir une approbation pour chaque puits foré ou rentré, et présenter un programme distinct pour chacun de ces puits. Avant d'obtenir l'autorisation du programme de forage, il faut répondre à une série de conditions réglementaires concernant la sécurité et la protection environnementales, notamment présenter un plan de sécurité, un plan de protection de l'environnement, un plan de suivi des effets environnementaux et un plan d'intervention d'urgence. EnCana a également déposé un ensemble complet de documents pour démontrer que ses moyens financiers étaient conformes à ce qu'exigeait la réglementation.
Enfin, pour ce qui est de l'autorisation du programme de forage, EnCana a déposé une déclaration d'exploitant dans laquelle la société affirmait que le programme et les installations utilisées pour le mettre en œuvre étaient adéquats, que les méthodes d'opération associées étaient appropriées et que le personnel était qualifié, compétent et capable d'effectuer le travail.
Le dernier niveau du processus d'approbation de notre programme de forage et de complétion est l'obligation d'obtenir l'approbation du forage d'un puits ou l'approbation de la modification d'un puits. La demande relative à chaque puits doit fournir des renseignements détaillés sur le programme de forage et de complétion ainsi que sur la conception du puits.
Pour ce qui est de la sécurité, la culture de sécurité d'EnCana est orientée par les politiques de responsabilité sociale d'EnCana, les principes en matière de SSE et le système de gestion de SSE.
Le président : Qu'est-ce que le SSE?
M. Weatherston : SSE désigne la santé et la sécurité environnementales.
Pour notre programme de forage et de complétion extracôtier Deep Panuke, EnCana a élaboré un programme de SSE bien défini en collaboration avec l'entreprise de forage choisie par la société, au cours d'une série d'ateliers sur la sécurité présentés par notre entreprise de forage et les autres fournisseurs de service extracôtiers. Avant de mettre en œuvre notre programme de forage et de complétion, nous avons décidé d'élaborer un thème pour la sécurité. Le thème de la sécurité est « Objectif zéro », ce qui veut dire que notre objectif est de n'avoir aucun incident entraînant un arrêt des activités et aucun déversement au cours du programme. En étroite collaboration avec nos entrepreneurs, nous avons élaboré les « devises de sécurité » qui nous permettront d'atteindre cet objectif zéro : premièrement — ce qui est évidemment important —, la sécurité est notre valeur fondamentale; deuxièmement, il faut protéger l'environnement, la santé et la sécurité en tout temps; troisièmement — très important —, il est obligatoire de cesser tout travail non sécuritaire ainsi que toute situation ou activité non sécuritaire; quatrièmement, il faut repérer, évaluer, analyser et atténuer tous les risques. Nous pouvons parler des outils que nous utilisons pour le faire à l'heure actuelle. Cinquièmement, il y a toujours suffisamment de temps pour travailler de façon sécuritaire — il faut travailler de façon sécuritaire ou ne pas faire le travail; pas de faux- fuyant. Enfin, il faut signaler tous incidents et quasi-incidents.
Tous les travailleurs sont tenus et ont la responsabilité d'intervenir pour arrêter tout travail non sécuritaire conformément au programme de cessation d'activités mis en œuvre sur la plate-forme de forage. Les travailleurs ont été avertis du fait qu'il ne fallait pas attendre qu'il soit trop tard. Les travailleurs savent que leurs préoccupations n'auront pas de répercussions négatives pour eux et qu'en fait, ils seront traités avec respect et qu'on les encourage à agir de cette façon. Nous avons distribué à tout le personnel du projet des cartes de portefeuille laminées qui leur donnent le droit d'arrêter tout travail non sécuritaire. Les principes de sécurité que je viens de décrire sont reproduits sur ces cartes. Nous en avons apportées avec nous aujourd'hui.
Le président : En voici une, et vous en avez une également. Je crois que vous l'avez distribuée à tous les membres du comité. C'est intéressant. Merci.
M. Weatherston : Notre culture de sécurité, combinée aux efforts qu'a déployés le personnel à terre et en mer d'EnCana et de Rowan ont donné des résultats très positifs en matière de rendement de la sécurité depuis novembre 2009, qui a marqué le début de notre campagne de nouvelles complétions. Jusqu'ici, aucun incident n'a entraîné un arrêt des travaux.
Le programme d'évaluation et de gestion du risque de Deep Panuke a été élaboré dans le but de repérer et de gérer efficacement tous les risques de SSE pendant toutes les phases du projet. EnCana croit qu'il faut d'abord reconnaître qu'un risque existe pour pouvoir ensuite l'atténuer. EnCana a procédé à des évaluations du risque approfondies et détaillées portant sur tous les aspects de notre programme de forage et de complétion extracôtier actuel, y compris le forage, les rentrées de puits, les complétions, les tests de puits et les activités de contrôle de puits.
Les mesures d'atténuation relevées au cours de ces évaluations du risque sont transmises au personnel de surveillance de l'équipement de forage sur le site où s'effectuent les travaux. Ces mesures sont analysées et vérifiées sur les lieux avec les travailleurs, à chaque quart de travail, en utilisant des moyens comme le système d'autorisation de travailler, l'évaluation du risque d'une activité, les réunions sur la sécurité préalables au travail et le reste.
Le président : Vous avez utilisé l'expression « rentrées de puits ». Nous avons également entendu dire que pendant la phase d'exploration, des puits sont forés, et bien souvent ensuite obturés pour pouvoir y revenir plus tard. Est-ce bien à cela que fait référence l'expression « rentrées de puits »?
M. Weatherston : Oui.
Le président : Quel est le processus à suivre pour obturer le puits, et y a-t-il un risque, ou est-ce une question stupide?
William Zukiwski, surintendant, Forage et complétion, Deep Panuke, Division canadienne, Canada atlantique, EnCana Corporation : Si je peux aider mon collègue, lorsque les puits sont forés initialement, ils sont également tubés et cimentés. Avant de déplacer l'appareil de forage, nous plaçons des barrières à l'intérieur des puits qui comprennent des barrières mécaniques et des barrières en ciment. Le fait de placer plusieurs barrières dans le puits permet d'en suspendre l'utilisation de façon sécuritaire en attendant qu'il soit remis en activité. C'est ce qu'on appelle la rentrée du puits dans le but de le compléter et de le mettre en production.
Le président : Merci.
M. Weatherston : EnCana privilégie en permanence la sécurité dans ses opérations de forage et de complétion. Ces opérations sont directement supervisées par le personnel d'EnCana. L'équipement de forage loué, Rowan Gorilla III, est fourni par Rowan Companies, une entreprise de forage dans l'Atlantique Nord qui a beaucoup d'expérience.
Jusqu'ici, nous avons terminé la conversion d'un puits de rentrée et sommes en train d'en terminer un second. De plus, nous avons foré un nouveau puits, notre puits de refoulement, qui a été complété. L'ensemble du personnel, les surveillants et le personnel de Rowan Gorilla ont fait l'objet, avant le commencement du projet, d'une formation spécialisée en contrôle des puits particulière au projet Deep Panuke d'EnCana. Nous fournissons également une formation de perfectionnement concernant les cas particuliers que l'on peut rencontrer dans les rentrées de puits, à l'aide de simulateurs qui reproduisent les activités à exercer. On enseigne aux équipes quelles sont les techniques de prévention des éruptions et de contrôle des puits.
En cas de rentrées dans des puits existants, le trou de sonde comporte un minium de deux, parfois trois, barrières de sécurité entre le réservoir et le plancher de forage.
Premièrement, il y a un fluide de complétion à base de saumure à haute pression — chlorure de sodium — qui exerce dans le trou de sonde une pression supérieure à la pression existante dans le réservoir de gaz.
Deuxièmement, il y a, à la surface en dessous du plancher de l'équipement de forage, des vannes hydrauliques qu'on appelle des blocs d'obturation de puits qui sont assez puissants pour bloquer n'importe quel tuyau se trouvant dans le bloc d'obturation de puits ou un trou ouvert pour empêcher tout écoulement à partir du puits. Les blocs d'obturation de puits sont installés avant que débutent les travaux essentiels sous pression sur le puits. Tout le travail effectué dans les puits passe par le bloc d'obturation de puits. Ce bloc d'obturation de puits peut être contrôlé à distance, à partir de deux endroits situés sur la plate-forme de forage en cas d'urgence.
Troisièmement, une vanne de sécurité subsurface à sécurité positive est également installée dans le tube de production — sécurité positive veut dire que le tube ne demeure ouvert que lorsqu'on lui applique une pression hydraulique positive à partir de la surface à l'aide d'un tuyau se trouvant sur l'appareil de forage, ou en mode production, sur l'installation de production. Dans le cas contraire, la vanne se ferme par défaut.
Dans le projet Deep Panuke, il n'y a jamais de conduite directe non contrôlée par laquelle le gaz pourrait se rendre à la surface. Il convient de noter que le bloc d'obturation de puits est situé sur la plate-forme de forage, et non pas sur le fond marin, ce qui en facilite l'accès et l'entretien. Il est beaucoup plus rapide de fermer ces obturateurs de puits que ceux qui se trouvent sur le fond marin.
Le président : Est-ce à cause de la différence qui existe entre la production et la découverte de pétrole et celles du gaz?
M. Zukiwski : C'est une bonne question. La différence qu'il y a avec un obturateur de puits de surface est que ce dispositif est situé en surface alors que le bloc d'obturation de puits sous-marin se trouve sur le fond marin. Il est beaucoup plus rapide de fermer l'obturateur de puits lorsque celui-ci se trouve à la surface.
Le président : Nous comprenons cela. Je me demande si les plates-formes pétrolières ne devraient pas également installer un obturateur de puits à la surface, comme vous le faites.
M. Zukiwski : Dans certains cas, cela se fait, mais lorsqu'il s'agit d'un forage en eau profonde, cela n'est pas possible. Il faudrait un tube prolongateur capable de résister à une très forte pression, et cette technologie n'existe pas encore pour ce qui est des activités de production en eau très profonde.
Le sénateur Massicotte : Quelle est la différence sur en ce qui a trait au temps de réaction? S'agit-il de secondes, de minutes ou d'heures?
M. Zukiwski : De secondes, et il existe un ensemble de normes mondiales établies par API Standards auquel on peut se référer pour les délais nécessaires à la fermeture d'un obturateur de puits de surface et également pour les obturateurs de puits sous-marins. Ce document s'intitule API RP 53, Recommended Practices for Blowout Prevention Systems for Drilling Wells.
Le sénateur Raine : Que se passe-t-il en cas de rupture de la conduite qui va de la plate-forme au réservoir de gaz?
Le président : Dans le tube prolongateur?
M. Weatherston : Dans la colonne d'eau.
M. Zukiwski : S'il y a une rupture de cette conduite, la vanne de sécurité subsurface se ferme. Il y a en outre d'autres mécanismes hydrostatiques. Nous avons une barrière liquide, qui est composée de liquide de forage ou de complétion, ce qui est également considéré comme constituant une barrière. Si cette barrière exerce une pression hydrostatique suffisamment forte, celle-ci sera supérieure à la pression existant à l'intérieur du réservoir et permettra de bloquer le gaz au fond du puits. Aucun gaz n'apparaîtra à la surface.
M. Weatherston : Pendant les opérations de forage et de complétion effectuées à Deep Panuke, nous effectuons régulièrement des exercices de formation en intervention d'urgence sur la plate-forme de forage, pour les cas de rejet de sulfure d'hydrogène, d'évacuation, d'homme à la mer, d'incendie et de contrôle de puits. La compétence des membres des équipes est régulièrement évaluée par les surveillants au cours de l'exercice, et il est possible d'augmenter la fréquence des exercices de formation en cas de besoin. Nous constatons régulièrement une amélioration des temps de réaction.
Pour être sûr que les équipes qui reviennent de congé connaissent bien les procédures de sécurité et d'évacuation, nous effectuons toujours des exercices peu après un changement d'équipe. Les nouveaux arrivants doivent assister à une séance d'orientation axée sur la sécurité et le contrôle des puits, et ils doivent également assister à une séance d'information sur la plate-forme de forage, avant de commencer à travailler.
Pour ce qui est de l'intervention d'urgence en cas de déversement, le projet Deep Panuke a élaboré un plan de gestion d'urgence et un plan de réaction à un déversement qui prévoient des mesures efficaces et cohérentes adaptées à toute situation d'urgence qui peut se produire au cours des phases de forage, de complétion, d'essai, d'installation, de construction, de production et d'opération du projet Deep Panuke. Le plan décrit clairement les mesures à prendre, et structure la réponse appropriée; il précise quelles sont les personnes chargées de réduire, dès le départ et par la suite, les effets de la situation d'urgence.
Le plan prévoit également un système clair de communication et d'échange d'information; il fixe avec précision les responsabilités et prévoit une planification et un appui logistique en cas d'accident. Grâce à ce plan, les ressources sont utilisées de façon efficace en cas d'urgence.
Tout le personnel qui exerce des tâches essentielles ou de soutien reçoit une formation au sujet de ses rôles et responsabilités, et participe à des exercices de simulation périodiques de façon à entraîner l'équipe à intervenir lors de différentes situations.
En conclusion, toutes les activités de Deep Panuke s'exercent conformément à nos valeurs fondamentales, à savoir la sécurité et la protection de l'environnement. Nous avons étudié les risques de façon détaillée et utilisé les évaluations du risque pour concevoir et élaborer de nombreuses mesures de sécurité touchant tous les aspects du projet.
Le but général du projet Deep Panuke est d'éviter les incidents et, lorsque cela est nécessaire, d'en atténuer les effets aussi rapidement que possible, tout en minimisant leurs répercussions sur les personnes, l'environnement et les biens.
Nous sommes entièrement engagés à assurer la sécurité des opérations extracôtières. Deep Panuke n'est pas un programme d'exploration extracôtier. Les opérations extracôtières de Deep Panuke consistent à développer un réservoir de gaz naturel connu dans des eaux peu profondes situées au large de la Nouvelle-Écosse.
Le projet Deep Panuke fait l'objet d'une surveillance réglementaire élaborée de la part de l'OCNEHE et de l'Office national de l'énergie. Nous appuyons l'intervention des autorités de réglementation et nous appliquerons intégralement toute directive supplémentaire qu'elles pourraient nous fournir à l'avenir.
Nous vous remercions de nous avoir écoutés aujourd'hui.
Le président : Merci. Je vais passer directement aux questions à cause du peu de temps que nous avons. Pour ce qui est de l'exploitation du gaz au large de la Nouvelle-Écosse, nous savons que vous êtes le principal exploitant, mais n'y a-t-il pas également Exxon Mobil qui travaille dans ce secteur? Êtes-vous les deux principales sociétés?
M. Weatherston : À l'heure actuelle, oui, c'est le cas. Il y a le site Sable.
Le président : Exxon-Mobile ne travaille pas au projet Deep Panuke. Il est au site Sable.
M. Weatherston : Cette société s'occupe du développement du site Sable.
Le président : Ce n'est pas à l'île de Sable, mais dans le secteur.
M. Weatherston : C'est dans le secteur de l'île de Sable, comme nous le sommes. Leurs activités s'exercent sur le côté nord-est et nord-ouest de l'île de Sable.
Le sénateur Raine : Je suis une remplaçante, mais j'ai beaucoup de questions.
Ce projet est-il votre seule opération de forage gazier extracôtier?
M. Weatherston : À l'heure actuelle, pour EnCana Corporation, c'est notre seule activité de production de gaz extracôtier.
Le sénateur Raine : Voyez-vous là un prototype pour les autres réservoirs de gaz extracôtier situés au Canada? Où seraient-ils situés?
M. Weatherston : Si je peux dire quelques mots au sujet de la vision de la société EnCana, je dirais qu'EnCana Corporation s'est progressivement placée dans une position de chef de file pour ce qui est de l'exploitation des hydrocarbures à terre en Amérique du Nord. EnCana s'est progressivement intéressée à l'exploitation des réserves de gaz non conventionnelles, qui sont les réserves de gaz de shale dont nous entendons tellement parler. Cette société continue à s'intéresser à ce développement et à sa vision à long terme.
Le sénateur Raine : Pourriez-vous nous en dire davantage au sujet du puits de refoulement? En quoi est-il différent? Je crois savoir que dans ce cas-ci, vous mettez des choses dans la terre, et je me demande si les blocs d'obturation de puits sont utilisés de la même façon?
M. Weatherston : Oui; en fait, nous sommes heureux et fiers de l'approche que nous avons adoptée pour ce qui est du processus utilisé dans cette installation extracôtière. Nous avons obtenu beaucoup d'appui et de félicitations de nos collègues de l'environnement et des énergies vertes pour ce qui est de la conception de ce projet.
Sans aller trop dans les détails, le puits de refoulement est situé à environ un kilomètre ou un kilomètre et demi du centre de production proposé. Le puits de refoulement est foré à une profondeur de 2 400 mètres. C'est toute une profondeur, mais elle est quand même bien inférieure à celle des réservoirs producteurs de gaz. L'idée est d'envoyer le H2S et le CO2 — les gaz à effet de serre — après compression monophasée dans la structure d'origine. L'avantage de cette technique est que nous n'avons pas besoin de construire une usine de traitement du soufre à terre et que cela réduit l'empreinte environnementale. De la manière dont notre méthode est conçue à l'heure actuelle, elle produit du gaz commercialisable immédiatement à la plate-forme. Toutes ces substances sont rectifiées sur place et stockées de façon sécuritaire et favorable à l'environnement. Le gaz prêt à vendre est transmis à terre sans qu'on ait besoin de construire quelqu'usine que ce soit à terre.
Le sénateur Seidman : Bonjour à vous messieurs, et merci d'être ici.
C'est la première fois qu'on nous parle précisément du gaz, parce que, jusqu'ici, il était question de pétrole. Il y a beaucoup de choses à comprendre en ce qui a trait au fonctionnement. Je sais que lorsqu'il y a une fuite de gaz à cause de la rupture d'un gazoduc, on craint principalement qu'il y ait explosion. Par exemple, lorsque cela se produit à Montréal où j'habite, la municipalité ferme toutes les rues pendant des heures jusqu'à ce que le problème soit réglé.
J'essaie de comprendre ce qui arriverait. Nous avons beaucoup parlé des urgences de niveaux 1, 2 et 3. L'urgence dans le golfe du Mexique est de niveau 3. Dans quelle mesure le gaz est-il combustible ou instable dans le premier cas lorsque survient un bris dans le pipeline ou dans l'eau? Dans quelle mesure le puits de refoulement est-il combustible? Est-il instable? J'essaie de comprendre à quoi ressemblerait une catastrophe équivalente et à quel point nous serions prêts à y faire face.
M. Zukiwski : Si je peux répondre, monsieur le président, je rappelle à tous que la sécurité est primordiale chez EnCana Corporation, et le gaz présente très certainement un danger. Il y a de nombreux détecteurs de gaz sur la plate- forme de forage qui détectent les traces infimes de méthane dans une grande partie du gaz naturel et du sulfure d'hydrogène, qui est une petite fraction du gaz que nous produisons. S'il y a la moindre fuite à la surface, nous serons en mesure de la détecter et de déterminer d'où elle provient. Ainsi, nous pouvons immédiatement cesser les activités, activer les barrières mécaniques, comme les blocs obturateurs de puits ou les vannes de sécurité de fond, et bloquer toute circulation pour prévenir toute explosion éventuelle.
Vous avez posé une question au sujet du puits de refoulement. Lorsque nous injectons du gaz dans le puits de refoulement, notre avons un arbre de Noël sous-marin situé dans le fond océanique et dont les valves sont contrôlées à distance à la surface, mais elles peuvent aussi être contrôlées à partir du fond océanique.
Ces valves situées sur l'arbre de Noël peuvent être activées à distance également s'il y avait une fuite dans l'unité de production ou dans le pipeline. Il y a aussi des valves à sécurité intégrée, de sorte que si nous perdons la pression hydraulique qu'il y a dans ces valves, la perte active un ressort et la valve se ferme immédiatement. La vanne de sécurité de fond sous-marine se fermera immédiatement pour arrêter toute fuite de gaz.
Le sénateur Seidman : Êtes-vous en train de nous dire qu'il n'y a aucun type de catastrophe équivalent concernant le gaz comparé à ce que nous voyons dans le golfe aujourd'hui avec le pétrole? J'essaie de comprendre s'il y a un équivalent. Si les valves à sécurité intégrée peuvent détecter les fuites de gaz et les arrêter, cela veut-il dire que nous ne pourrions pas être témoins du même genre de catastrophe avec le gaz?
M. Zukiwski : Il faut se rappeler les mesures de prévention que nous avons prises pour installer les barrières additionnelles dans le fond océanique et le tubing de production pour prévenir la circulation de gaz ou l'émission incontrôlée de gaz à la surface. C'est grâce à ces mesures de prévention et à ces appareils que nous pouvons mettre fin aux émissions. Il est très improbable que ces appareils aient de nombreuses défaillances en même temps.
Pour faire suite à la question concernant la détection de toute fuite dans un réseau de gaz, nous avons mis en place un plan d'intervention en cas d'urgence sur la plate-forme de forage et un plan sera mis à exécution plus tard dans notre installation de production. Lorsque nous mettons à exécution ce plan d'intervention en cas d'urgence, les gens se rassemblent dans une zone sécuritaire et, si la fuite de gaz est importante, nous évacuons les installations et nous déclenchons une intervention en cas d'urgence, puis des barrières additionnelles se ferment pour éviter que le gaz ne se répande plus loin.
Le sénateur Frum : J'ai deux questions distinctes dans le but de connaître le chiffre magique, à savoir à partir de quelle profondeur est-ce trop profond. Pouvez-vous qualifier l'ampleur du risque dans deux exploitations; l'une qui dispose d'un bloc obturateur de puits à la surface et l'autre qui dispose d'un bloc obturateur de puits en eaux profondes?
M. Zukiwski : Si je peux répondre, monsieur le président, c'est une bonne question. Nous sommes d'avis que si nous pouvons voir l'appareil devant nous, c'est beaucoup plus facile de savoir s'il y a une fuite ou une défaillance. Nous avons la responsabilité de surveiller la sécurité de ces appareils et les procédures opérationnelles connexes ainsi que d'assurer l'entretien préventif de ces appareils.
Quand l'appareil est à la surface, il est plus facile d'effectuer un entretien préventif au besoin. Lorsque nous vérifions le fonctionnement du bloc obturateur de puits, nous pouvons voir qu'il fonctionne grâce aux indications qui figurent dessus. Nous vérifions la pression du bloc obturateur de puits toutes les deux semaines et nous en vérifions le fonctionnement quotidiennement. Nous pouvons examiner le bloc obturateur pour déterminer s'il y a une fuite. Nous surveillons la pression au moyen de jauges et de diagrammes, mais il est beaucoup mieux de pouvoir le voir.
Le sénateur Frum : Ma question à l'autre bout du spectre concerne l'élément humain. Nous passons la plus grande partie de notre temps à parler de l'élément technique, et vous insistez sur cet aspect dans votre carte de sécurité no 3. Quelles politiques avez-vous adoptées à l'intention de l'équipage concernant l'usage de drogues et d'alcool? Est-ce un problème ou si vous avez des politiques d'entreprise?
M. Zukiwski : EnCana Corporation prend très au sérieux l'usage de drogues et d'alcool. Nous avons une politique sur les drogues et l'alcool. De plus, tous les entrepreneurs qui travaillent pour nous ont des politiques sur les drogues et l'alcool. La plupart du temps, notre entrepreneur de forage fait travailler jusqu'à 54 hommes sur notre installation; c'est notre entrepreneur le plus important. L'entrepreneur est extrêmement strict et il a une politique de tolérance zéro à l'égard des drogues et de l'alcool.
Avant de transporter les gens vers la plate-forme de forage, toute odeur d'alcool sera sentie quand ils arriveront à l'hélicoptère. Ils ne pourront pas monter à bord. Il est également probable que leur employeur les licencie.
C'est tolérance zéro pour ce qui est des drogues et de l'alcool.
Le sénateur Frum : À quelle fréquence cela se produit-il?
M. Zukiwski : Nous contrôlons tout le monde avant chaque départ. À quelle fréquence les gens sont-ils surpris en état d'ébriété ou drogués? Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas eu de cas de drogue ou d'alcool dans notre exploitation de la côte Est du Canada.
Le président : C'est un bon point. Le sénateur Lang aimerait obtenir une précision, puis le sénateur Frum a une question. Vous avez du temps pour les deux.
Le sénateur Lang : Pour ce qui est de la politique sur les drogues et l'alcool, administrez-vous régulièrement des tests de dopage?
M. Zukiwski : Oui, notre entrepreneur de forage doit subir des tests de dopage et des alcootests à des moments précis.
Le sénateur Lang : Dans votre exposé, vous avez dit que vous aviez des exploitations en Louisiane. Est-ce votre seule exploitation en mer au monde?
M. Weatherston : Oui.
Le sénateur Lang : Qu'exige de vous l'organisme de réglementation en ce qui concerne votre exploitation au Canada par rapport à vos autres exploitations dans le monde? Vous avez mentionné avoir reçu des félicitations d'organisations qui ne sont pas directement visées par votre exploitation. Le Canada vous demande-t-il de faire des choses différemment par rapport à d'autres exploitations, par exemple, dans le golfe du Mexique ou dans d'autres régions du monde? Dans l'affirmative, qu'est-ce qui est différent?
M. Weatherston : Au cours des 20 dernières années, j'ai travaillé sur la côte Est du Canada et j'ai fait affaire avec des organismes de réglementation à Terre-Neuve-et-Labrador ainsi qu'en Nouvelle-Écosse. Au cours des mes 30 années et plus de carrière, j'ai travaillé presque exclusivement en mer. Je ne me sens pas à l'aise d'essayer d'émettre des hypothèses sur d'autres administrations dans les terres. Cependant, il me fera plaisir de demander à quelqu'un d'EnCana qui connaît les règlements aux États-Unis et dans l'Ouest canadien de répondre à cette question.
Le sénateur Lang : Ce serait intéressant d'entendre quelqu'un de votre organisation qui comprend les différences. Nous essayons de déterminer si des différences existent au Canada, en mer dans le cas présent, et aux États-Unis ou ailleurs. Notre organisme de réglementation travaille-t-il de manière à pouvoir atténuer toute catastrophe du mieux que nous le pouvons, du point de vue de la sécurité?
M. Zukiwski : Mon expérience est plutôt internationale. J'ai connu des systèmes de réglementation dans d'autres régions du monde.
Les organismes de réglementation avec lesquels nous travaillons sur la côte Est du Canada sont beaucoup plus stricts que ceux que j'ai connus ailleurs dans le monde. Ils prennent très au sérieux leurs responsabilités afin de fournir des paramètres solides que les exploitants et les entrepreneurs en forage doivent respecter dans les domaines du forage et de la production, de la santé environnementale, de la sécurité environnementale et des certificats de conformité.
En tant que Canadien, je suis fier de voir à quel point cette industrie canadienne est bien réglementée. J'insiste sur le fait que les organismes de réglementation sont stricts et nous donnent d'excellents objectifs à atteindre.
M. Weatherston : Récemment, nous avons beaucoup parlé de mesures rétrospectives, d'inspection, d'attestation et de certification — montrez-moi ce que vous faites et que vous le faites. Une des caractéristiques du système de réglementation au large des côtes du Canada, c'est qu'il est proactif. Il est davantage proactif pour ce qui est des aspects touchant l'assurance qualité des exploitations au large des côtes. L'organisme de réglementation est avec nous dès les premières étapes — à l'étape de la présentation du plan de d'exploitation —, des années avant qu'on passe à la conception détaillée, à l'acquisition ou à la production.
À chacune des étapes, nous engageons des consultations avec l'organisme de réglementation. Le mieux que nous pouvons faire, c'est d'être proactifs lors de l'étude de définition de ces installations. Comment devons-nous procéder pour assurer une sécurité inhérente dès le départ en ce qui concerne les matériaux, la fiabilité et les redondances du système? Cet engagement auprès de l'organisme de réglementation au Canada commence tôt. Les organismes de réglementation ont un tiers indépendant appelé société d'accréditation qui agit comme leur agent aux étapes de la conception détaillée, de l'évaluation des risques, de la configuration, des stratégies d'exécution, et cetera.
Pendant tout ce temps, et avant de se retrouver devant une plate-forme dans l'océan, il y a eu de nombreux échanges avec l'organisme de réglementation. Cette qualité se traduit au bout du compte par des niveaux élevés de confiance, une intégrité technique et la sécurité des installations en mer. Elle découle de l'engagement pris tôt avec les exploitants pendant la conception, l'acquisition, la production, le contrôle en cours de fabrication ainsi que les procédures précédant la mise en service et celles suivant la mise en service. Les organismes de réglementation participent à tous les aspects au fil du processus.
J'espère que vous êtes confiants que nous sommes réglementés comme il se doit. Nous respectons les organismes de réglementation et, en tout temps, nous nous efforçons de satisfaire aux exigences ou de les dépasser. Nous discutons ouvertement avec les organismes de réglementation des étapes où nous en sommes, de ce que nous faisons et de la façon dont nous réglons les problèmes que nous rencontrons.
Le président : Il ne suffit probablement que d'un mot pour répondre à la question suivante. Les sociétés pétrolières et gazières sont de grandes sociétés internationales. Aux États-Unis, on a laissé entendre que la relation entre les organismes de réglementation et les entreprises de forage n'est peut-être pas tout à fait indépendante. Pouvez-vous nous assurer que la relation au Canada est indépendante? Pourrions-nous faire l'objet d'allégations ou de suggestions selon lesquelles vos entreprises seraient de connivence avec les organismes de réglementation?
M. Weatherston : Je peux vous dire personnellement que je ne suis pas de connivence avec les organismes de réglementation. Je crois que nous avons un respect sain et mutuel pour nos positions respectives.
Le président : Vous savez où je veux en venir?
M. Weatherston : Oui, je le sais. Ils ont pour objectifs de veiller à ce que nous fonctionnions de manière sécuritaire et ayons les niveaux les plus élevés d'intégrité technique et de redondance dans nos installations. Ces objectifs ne sont pas différents des nôtres. À ce sujet, nous sommes sur la même longueur d'onde.
Le sénateur Brown : Un témoin représentant l'une des sociétés nous a dit que l'appareil qu'ils utilisent peut résister à une pression pouvant aller jusqu'à 10 000 livres par pouce carré. Bien sûr, plus le forage est profond, plus la pression de l'eau est élevée. Actuellement dans le golfe du Mexique, il y a environ 90 000 barils de pétrole par jour qui provient du puits. Cette pression doit provenir entièrement de la pression exercée par le gaz, n'est-ce pas? La pression du gaz qui se trouve dans la formation d'où provient le pétrole doit être extrêmement élevée. Pouvez-vous me dire quelle est la pression la plus élevée qui a été enregistrée?
M. Zukiwski : C'est une bonne question. Du côté de la pression de formation, celle qui existe dans toute formation — et surtout dans les réservoirs — est une combinaison de plusieurs choses. C'est le poids de la roche qui se trouve au- dessus de ce réservoir, additionné au poids du fluide contenu dans toute cette roche. Ce poids crée la pression dans le réservoir.
À l'intérieur du réservoir, il doit y avoir ce qu'on appelle la porosité, c'est-à-dire l'espace libre dans les roches, et aussi la perméabilité, c'est-à-dire les liens entre ces espaces libres dans les roches. Imaginez une éponge avec laquelle vous vous laveriez; voilà à quoi ressemble une roche-réservoir, mais d'un angle éclaté.
Le réservoir ne renferme pas nécessairement du gaz et du pétrole. Il peut s'agir de pétrole seulement, de pétrole et d'eau ou de gaz seulement. Il est difficile d'émettre des hypothèses sur le réservoir de BP parce que je ne connais pas sa géologie et que les réservoirs diffèrent partout dans le monde et dans le golfe du Mexique.
Je peux vous parler de notre réservoir. Notre réservoir contient du gaz naturel; il y a un dispositif de déplacement par poussée d'eau à l'arrière, qui se trouve sous le gaz naturel. Notre réservoir a une pression d'un peu moins de 5 000 psi — d'environ 4 820 psi pour être précis. Cela signifie que la lecture du bloc obturateur de puits pourrait être d'environ 5 000 psi. Il faut tenir compte du fait que le gaz, lorsqu'il arrive à la surface, a une pression hydrostatique. Essentiellement, la pression à la surface est d'environ 4 250 psi.
À Deep Panuke, nous utilisons un bloc obturateur de puits de 18 pouces et trois quarts et qui peut résister à une pression de 15 000 psi. Nous n'avons pas besoin d'une capacité de pression aussi élevée, mais il nous faut un bloc obturateur de puits de cette taille en raison des outils que nous utilisons dans le bloc afin d'être en mesure de terminer notre puits à des fins de production. La capacité de pression du bloc est de loin supérieure à la pression du réservoir, mais c'est l'appareil que nous pouvons nous procurer sur les marchés de nos jours.
Le sénateur Brown : Voici ce qui m'inquiète. Est-ce vrai qu'avec chaque puits que vous forez et qui est plus profond que les puits précédents, vous faites face à une plus grande pression provenant de quelque chose — qu'il s'agisse d'eau, de roche ou de gaz?
M. Zukiwski : Tout à fait. Plus le forage est profond, plus le gradient de pression augmente; il n'a pas d'autres choix. C'est la pression de dame nature. Elle vous donnera plus de pression pour chaque mètre de profondeur de forage. Parfois, les pressions qui se trouvent dans la terre seront beaucoup plus élevées que ce à quoi peut résister le bloc obturateur de puits.
Toutefois, la pression hydrostatique que subit ce puits lors du forage est plus élevée que la pression du réservoir. En ce qui concerne la capacité de pression du bloc obturateur de puits, nous essayons de concevoir le bloc obturateur de puits de façon à ce qu'il puisse résister à la pression prévue à la surface.
Le sénateur Brown : Nous étions à Norman Wells il y a un peu plus d'un an, et il y a trois puits au milieu du fleuve Mackenzie. Les gens nous ont dit que le pétrole s'écoule des puits depuis 30 ans sans l'aide d'une pompe, et ils estiment qu'il restera encore 50 p. 100 de la nappe de pétrole lorsque le pétrole cessera de s'écouler sans pompe. Cela m'a fait penser à la pression, qui doit être incroyable.
Le sénateur Massicotte : Pour faire suite à des questions posées plus tôt, j'essaie de mieux comprendre les différences entre un déversement de pétrole et un déversement de gaz naturel. Nous pouvons voir sur CNN à quoi ressemble une éruption de pétrole; évidemment, il y a une énorme différence.
Je sais que vous allez me dire qu'il est peu probable que cela se produise et que vous avez pris toutes sortes de mesures à cette fin. Cependant, même dans votre propre rapport vous indiquez « du mieux que nous le pouvons ». Autrement dit, il y a un faible risque qu'une catastrophe se produise, mais il y a un risque. Pour comprendre, à CNN, on voit le pétrole. En quoi consiste une catastrophe majeure du côté du gaz? Quelle est la conséquence d'une catastrophe si vous avez un problème de gaz?
M. Weatherston : Encore une fois, la probabilité que quelque chose de ce genre se produise est faible. Le nombre de modes de défaillance...
Le sénateur Massicotte : Je comprends cela, mais y a-t-il une possibilité?
M. Weatherston : S'il y en a une, une partie de notre présentation dans le cadre du processus d'évaluation environnementale de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, l'ACEE, consistait à expliquer ces catastrophes possibles. À quoi ressembleraient-elles? Nous avons dû mettre de côté le fait que ça ne pourrait pas se produire et dire que ça c'est produit.
Ce que nous avons, alors, c'est une communication complètement ouverte entre le réservoir de gaz à Deep Panuke et l'atmosphère. À quoi cela ressemble-t-il? Nous tenons compte des dispersions du nuage de particules et de la modélisation de la dispersion de la vapeur d'eau, nous déterminons quelle zone est touchée, nous évaluons les conséquences sur la faune, les oiseaux, les poissons, et cetera.
Si un puits à Deep Panuke avait une défaillance catastrophique, il serait complètement exposé à l'atmosphère et il faudrait définir une zone d'exclusion d'environ un kilomètre autour du puits. Il faudrait maintenir une zone d'exclusion complète dans l'océan autour du puits jusqu'à ce que nous puissions bien fermer le puits et en reprendre le contrôle.
Le gaz s'échapperait assez rapidement et se répandrait immédiatement dans l'atmosphère. La préoccupation majeure dans cette situation, c'est la petite quantité de condensat dont nous avons parlé plus tôt. Ce condensat — et je l'ai vu personnellement — est du pétrole très léger. En guise de comparaison, il ressemble à une bière pils légère, également un produit raffiné.
Lorsqu'il se déverse dans l'océan, il se répand rapidement. Nous avons vu une mobilisation de la dispersion selon laquelle il pourrait atteindre un kilomètre de diamètre. Voilà l'étendue du condensat à la surface. Il se pose sur la surface à environ 15 micromètres et en l'espace de quelques minutes, entre l'évaporation et la dispersion en raison du mouvement de l'océan, il est d'environ un micromètre. À un micromètre, il n'a aucun effet délétère sur les oiseaux de mer ou autre chose de ce genre.
Il y aurait un problème si quelqu'un lançait un mégot dessus, ce que nous ne souhaitons pas. Il existe des plans d'intervention en cas d'urgence pour réagir si cela se produisait. Ils ont été soumis dans le cadre d'un processus d'évaluation environnementale, ils sont exhaustifs et compris par toutes les agences environnementales et tous les autres organismes de réglementation. Puis, les plans d'intervention en cas d'urgence dont nous avons parlé plus tôt — interventions de niveaux 1, 2 et 3 — entreraient en jeu, selon l'importance de l'urgence.
Le sénateur Massicotte : En résumé, il ne semble pas y avoir beaucoup de risque pour l'environnement. Je suppose que le risque touche davantage les vies humaines à cause des explosions, est-ce exact?
M. Weatherston : Oui.
Le sénateur Lang : Pour faire suite à ce point, vous n'êtes pas la première exploitation gazière au large des côtes. À votre connaissance, ce genre d'explosion s'est-il déjà produit ailleurs dans le monde?
Le président : Parlez-vous du gaz?
Le sénateur Lang : Oui, du gaz.
M. Zukiwski : Oui.
Le président : À quel endroit?
M. Zukiwski : Il y a eu une explosion dans le golfe du Mexique. Il y a eu une explosion récemment au large de la côte de la Tunisie; c'était il y a environ trois ou quatre ans, et une plate-forme de forage a été détruite par les flammes. De plus, en Inde, un navire de ravitaillement a heurté une plate-forme, laquelle a pris feu et a brûlé.
Le sénateur Lang : Dans ces cas, à votre avis, a-t-il fallu des jours pour maîtriser l'incendie ou plutôt des mois?
M. Zukiwski : Je dois faire des recherches pour savoir combien de temps il a fallu pour éteindre ces feux et contenir ces puits, mais nous pouvons vous fournir une réponse à ce sujet.
Le président : Merci, messieurs. Il a été extrêmement utile d'entendre votre témoignage ce matin. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de venir ici de la côte Est pour nous parler de ce que vous faites et d'avoir pris des engagements pour nous fournir d'autres données, que vous pourrez remettre à notre greffière. Je vous remercie beaucoup tous les deux.
Je lève la séance. J'aimerais parler aux membres du comité à huis clos pendant quelques instants.
(Le comité poursuit ses travaux à huis clos.)