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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

Fascicule 27 - Témoignages du 30 mai 2013


OTTAWA, le jeudi 30 mai 2013

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd'hui, à 10 h 32, pour étudier les conditions de sécurité et les faits nouveaux en matière d'économie dans la région de l'Asie- Pacifique, leurs incidences sur la politique et les intérêts du Canada dans la région, et d'autres questions connexes.

La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Chers sénateurs, le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international poursuit son étude sur les conditions de sécurité et les faits nouveaux en matière d'économie dans la région de l'Asie- Pacifique, leurs incidences sur la politique et les intérêts du Canada dans la région, et d'autres questions connexes.

Nous entendrons aujourd'hui deux témoins par vidéoconférence. Du Conference Board du Canada, nous accueillons Danielle Goldfarb, directrice associée du Centre du commerce mondial, et Hugh Stephens, directeur de Trans-Pacific Connections. Nous sommes censés être en communication avec M. Stephens, mais malheureusement, il a disparu de l'écran. Y a-t-il un problème?

En attendant que le problème soit réglé, madame Goldfarb, m'entendez-vous?

Danielle Goldfarb, directrice associée, Centre du commerce mondial, Conference Board du Canada : Oui, je vous entends. Bonjour.

La présidente : Nous allons attendre un peu avant de commencer, pour savoir ce qui est arrivé du côté de l'autre témoin; il a disparu de l'écran.

Nous avons retrouvé M. Stephens.

Hugh Stephens, directeur, Trans-Pacific Connections : Veuillez m'excuser, j'étais sorti quelques instants.

La présidente : Je vais inviter Mme Goldfarb à faire une déclaration liminaire, après quoi nous entendrons celle de M. Stephens, puis nous passerons aux questions des sénateurs. Je vous souhaite la bienvenue parmi nous.

Mme Goldfarb : Je vous remercie. J'aimerais simplement aborder quelques points que nous avons analysés dans des études récemment publiées par le Conference Board du Canada. Ce sont des études qui traitent de l'incidence de l'économie mondiale sur le Canada et, en particulier, de l'incidence des changements économiques mondiaux sur le commerce extérieur du Canada. En fait, nous avons publié aujourd'hui une nouvelle étude sur les marchés qui seront prioritaires pour le Canada d'ici quelques années.

Mon argumentation comporte trois points. Premièrement, les relations commerciales du Canada sont en train de changer; deuxièmement, les marchés futurs du Canada ne se limitent pas aux marchés habituels; et troisièmement, il nous faut des stratégies commerciales et gouvernementales différentes pour les marchés non traditionnels.

Premièrement, s'agissant de l'évolution des stratégies commerciales du Canada, nous savons que les échanges mondiaux se sont beaucoup développés au cours des dix dernières années, mais que, pendant cette même période, les exportations canadiennes n'ont pas progressé. Autrement dit, le volume de nos exportations est le même qu'il y a 10 ans. Le taux de croissance de nos exportations est chaque année inférieur d'à peu près 5 p. 100 au taux mondial, ce qui n'est vraiment pas une bonne nouvelle pour un pays comme le Canada qui a un marché intérieur limité et qui, par conséquent, a besoin de débouchés à l'étranger pour maintenir son niveau de vie.

Au Conference Board, nous l'appelons la décennie perdue pour les exportations canadiennes. En fait, ça reflète bien les types de marchés sur lesquels les entreprises canadiennes sont implantées. La majeure partie de nos exportations sont destinées à des marchés à faible croissance, et c'est cette surexposition aux marchés à faible croissance, couplée à une sous-exposition aux marchés à croissance rapide, qui explique pratiquement à elle seule pourquoi le Canada a perdu des parts de marché dans le monde entier au cours des dernières années.

Pour autant, tous ceux qui pensaient que le Canada ne pouvait pas réduire sa dépendance à l'égard du marché américain sont vraiment en train de changer d'avis, et la mutation est en train de s'opérer. Les échanges canadiens avec des marchés autres que le marché américain, surtout des marchés à croissance rapide, ont vraiment commencé à décoller. Il suffit de regarder les chiffres pour voir que les entreprises canadiennes ont augmenté leurs exportations vers ces marchés, qu'elles y investissent et qu'elles en importent également des produits et des services.

Cette mutation spectaculaire est due à la croissance rapide des pays en développement et à la faible croissance des pays industrialisés. Les économies des pays industrialisés, qui représentaient près des quatre cinquièmes de l'économie mondiale il y a 10 ans, n'en représentent plus que les deux tiers aujourd'hui, et ce recul devrait nettement s'accentuer avec le temps, d'après les projections actuelles.

C'est une mutation non seulement spectaculaire mais vraiment très rapide, puisqu'elle ne s'est produite qu'en l'espace de 10 ans, ce qui est relativement court. Et cette mutation spectaculaire et rapide devrait s'accélérer.

Nous avons fait des projections sur l'évolution du commerce canadien, et elles montrent que les États-Unis resteront bien sûr notre principal partenaire commercial dans un avenir prévisible. Toutefois, les exportations canadiennes vers le marché américain, qui représentent aujourd'hui environ les trois quarts du total de nos exportations, n'en représenteront qu'un peu plus des deux tiers d'ici à 2025.

En revanche, nos échanges de marchandises avec la Chine vont passer de 3 à 7 p. 100 d'ici à 2025, et ce sera la même chose avec les autres marchés à croissance rapide. Nous prévoyons que les exportations canadiennes vers l'Inde vont plus que doubler et qu'en volume, elles seront comparables à nos exportations vers le Mexique. Nos échanges avec le Brésil devraient également doubler d'ici à 2025.

Il n'y a pas que la répartition géographique de nos exportations qui est en train de changer, il y a aussi la répartition géographique de nos importations qui s'est incroyablement diversifiée en peu de temps. Aujourd'hui, la moitié de nos importations proviennent de pays autres que les États-Unis.

En plus de la répartition géographique de nos échanges, il y a aussi la composition industrielle de nos échanges qui est en train de changer. La croissance rapide des pays en développement a impulsé un boom des ressources au Canada, et malgré le cliché des camions chargés de marchandises canadiennes à destination du marché américain, nous constatons aujourd'hui que les services font partie de nos exportations dont la croissance est la plus rapide. C'est donc une évolution de la composition industrielle de notre commerce.

Deuxièmement, je disais tout à l'heure que les marchés futurs du Canada ne se limitent pas aux marchés habituels. Les marchés qui représentent le potentiel économique le plus important pour les entreprises canadiennes sont bien sûr nos partenaires traditionnels comme les États-Unis et l'Union européenne. Ils comprennent également les économies à forte croissance de l'Inde, du Brésil et de la Chine. Ces marchés comptent déjà parmi nos priorités.

Mais dans l'étude que nous avons publiée aujourd'hui, nous ne nous limitons pas à ces marchés habituels, comme je les appelle. Ce que nous cherchons, ce sont des pays qui sont aussi proches que possible de ce que nous appelons notre zone de confort. Je veux dire par là que le marché doit offrir un potentiel de croissance, mais qu'il doit aussi avoir déjà établi avec le Canada des affinités qu'il sera possible de développer par la suite. Nous avons exclu les pays les plus risqués et les plus petits, car il faut quand même que le marché soit d'une certaine taille.

Nous avons abouti à une liste de pays qui nous éloigne des marchés habituels : l'Indonésie, la Malaisie, la Turquie, la Thaïlande, l'Afrique du Sud, la Corée du Sud, le Chili, le Mexique et bien d'autres, puisque nous avons une liste de 24 pays.

Un certain nombre de nos futurs marchés prioritaires, comme nous les appelons, se trouvent en Asie du Sud-Est, dont l'économie est comparable à celle des États des Grands Lacs, région qui nous est plus familière. Mais d'ici peu, ces deux économies ne seront plus de la même taille. L'Asie du Sud-Est a affiché un taux de croissance de 6 p. 100 par an au cours des cinq dernières années, si l'on ne tient pas compte des effets de l'inflation, et pendant ce temps-là, les États des Grands Lacs ont accusé un taux de croissance négatif. Certes, ce fut une période difficile pour l'économie américaine. Mais ce que je veux dire ici, c'est que ces économies ont un potentiel de croissance bien supérieur à celui de nos marchés traditionnels pour les biens et les investissements.

Nous ne devons donc pas nous limiter à nos marchés habituels et nous ne devons pas sous-estimer le potentiel de ces nouveaux marchés, d'autant plus que nous sommes déjà implantés sur certains d'entre eux. Cette implantation est peut-être embryonnaire, mais nous pouvons la développer, et en tout cas, nous devons mieux connaître ces marchés.

Enfin, nous ne devons pas penser qu'avec les pays qui ne sont pas nos partenaires commerciaux traditionnels, nous pourrons systématiquement utiliser les mêmes stratégies que celles que nous avons utilisées dans le passé. Dans un grand nombre de ces pays, il peut être extrêmement difficile de faire des affaires, et c'est pour cette raison que, dans nos études, nous essayons de trouver des recettes et des stratégies à la fois commerciales et politiques qui sont la clé du succès.

Je vais vous en décrire rapidement quelques-unes avant de conclure. Premièrement, il faut être à la recherche de poches d'ouverture et de croissance. L'économie indienne, par exemple, a la réputation d'être très fermée, mais le secteur automobile de ce pays a affiché un taux de croissance annuel de 20 p. 100 au cours des cinq dernières années. L'industrie automobile est relativement ouverte au commerce et aux investissements canadiens, par conséquent, c'est un secteur où le Canada a du potentiel, puisque c'est un secteur qui nous est relativement ouvert et dont le taux de croissance est extrêmement rapide. Ce n'est qu'un exemple de poche d'ouverture qu'on peut rechercher dans des économies fermées.

Si nous ne nous limitons pas à nos marchés habituels, nous aurons peut-être la possibilité d'accéder à de nouveaux marchés. Tout le monde courtise la Chine, l'Inde et le Brésil. Si vous savez courtiser certains de ces marchés, vous aurez peut-être la possibilité d'établir des contacts avec des membres du gouvernement et de l'industrie. Dans ces pays, il est parfois indispensable d'avoir des contacts au gouvernement pour pouvoir s'implanter sur le marché.

Il faut bien comprendre qu'il n'y a pas qu'une seule façon de réussir sur les marchés à croissance rapide. Nous pouvons aussi vendre à une multinationale américaine qui y est implantée. Nous pouvons importer de ces marchés, et nous pouvons en choisir un qui nous servira de tête de pont pour d'autres pays de la région, par exemple la Thaïlande pour accéder aux autres pays de l'Asie du Sud-Est.

D'aucuns prétendent aussi qu'il faut être une grande entreprise pour prospérer sur ces marchés. Ce n'est pas vrai. En fait, ce sont les petites entreprises canadiennes qui sont pratiquement le seul moteur de la croissance de nos exportations vers la Thaïlande, l'Inde, Singapour, Hong Kong et le Vietnam. Il est vrai cependant que les petites entreprises ne sont pas toutes bien positionnées face à ces marchés à croissance rapide. Nos recherches nous ont montré qu'il ne suffisait pas d'être au milieu du peloton, qu'il fallait offrir une technologie avant-gardiste, une réputation internationale, la volonté de connaître à fond le marché étranger et une présence sur le terrain fréquente et durable.

Il faut bien comprendre que, même si les accords de libre-échange sont généralement considérés comme le principal outil du gouvernement pour mettre des entreprises canadiennes en contact avec ces marchés et pour faire disparaître les droits de douane, ils ne sont pas le seul outil. Les relations qu'on établit dans ces pays, qui sont extrêmement différents des marchés traditionnels du Canada, sont très importantes.

Il faut que des programmes et des services du gouvernement aident les entreprises canadiennes à mieux connaître ces marchés et à établir des relations avec des partenaires locaux fiables, qui pourront les aider à s'implanter sur ce marché et à bien les connaître. C'est très important que le gouvernement le fasse, car il est sans doute plus important de réussir à établir de telles relations que de négocier des accords sur la propriété intellectuelle, par exemple. Si vous établissez une bonne relation et que vous innovez constamment, cette relation de confiance et cette innovation constante peuvent s'avérer une bonne façon de protéger votre entreprise contre le vol de propriété intellectuelle.

Pour protéger sa propriété intellectuelle et ses chaînes d'approvisionnement, entre autres, il est important d'avoir des mécanismes moins officieux, comme une relation de confiance avec une personne au niveau local. Des politiques gouvernementales peuvent encourager le développement d'un réseau ou des jumelages.

Pour résumer, je dirai que l'économie mondiale a changé radicalement en très peu de temps. Le rôle du Canada est en train de changer de façon radicale aussi. Les débouchés sont nombreux, mais il ne faut pas se limiter aux marchés habituels. Les défis aussi sont considérables, et il faudra que les entrepreneurs et les gouvernements canadiens envisagent des façons différentes de les relever. Merci.

La présidente : Merci, madame Goldfarb. Je vais maintenant donner la parole à M. Stephens.

M. Stephens : Je vous donne le bonjour depuis notre belle province de la Colombie-Britannique. Vous m'entendez bien?

La présidente : Oui, nous vous entendons parfaitement. Vous avez raison, la Colombie-Britannique est une bien belle province.

M. Stephens : Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner. C'est un honneur pour moi. J'ai examiné votre mandat et j'ai constaté qu'il était très vaste puisqu'il englobe tous les aspects de la relation du Canada avec la région de l'Asie- Pacifique. Je me réjouis que vous ayez entamé cette étude, car elle est tout à fait d'actualité et elle est importante.

J'ai des liens étroits avec l'Asie depuis près de 40 ans, parce que j'y ai fait des études, j'y ai vécu et j'y ai travaillé. Depuis quelque temps, j'observe et je commente ce qui se passe dans cette région, à partir de la côte Ouest.

C'est en 1975 que j'ai débarqué pour la première fois en Asie, alors que je commençais ma carrière d'agent au ministère qu'on appelait alors le ministère des Affaires extérieures. J'y avais été envoyé pour apprendre le mandarin, afin de me préparer à une affectation à l'ambassade canadienne à Pékin, où j'ai travaillé de 1978 à 1980, au tout début de nos relations avec la Chine. Par la suite, diverses affectations ministérielles au Pakistan, en Corée et à Taïwan, entre deux séjours à Ottawa, m'ont permis de garder des contacts étroits avec l'Asie et de suivre de près les activités du Canada dans cette région.

En 2001, je suis entré chez Time Warner, le conglomérat américain dans le secteur des médias et du divertissement, comme vice-président principal des politiques publiques pour l'Asie. J'ai travaillé pendant près de 10 ans au siège régional de la société à Hong Kong. Ça a été pour moi l'occasion de prendre du recul, de voir le rôle du Canada à partir de l'étranger, comme le font les autres pays, et d'observer, à partir d'une grande entreprise américaine implantée en Asie, comment le Canada était perçu dans la région.

Je suis revenu au Canada depuis peu, et je suis actuellement cadre en résidence à la Fondation Asie-Pacifique du Canada; je sais que le PDG de cette fondation, Yuen Pau Woo, s'est entretenu avec vous récemment. Je suis aussi vice- président du comité canadien auprès du Pacific Economic Cooperation Council, qu'on appelle le PECC.

Si je vous parle de ma longue expérience de l'Asie, ce n'est pas pour vous faire croire que je suis un spécialiste, car je n'en suis pas. En fait, plus on passe de temps dans une région, plus on se rend compte qu'on a des choses à apprendre. Donc, si je vous parle de mon expérience, c'est parce que cela m'a permis de prendre un certain recul sur l'évolution de la situation et sur l'évolution de nos relations avec cette région, ce qui fait assurément partie de votre étude.

Par exemple, s'agissant de la démocratisation de la Chine, on se demande souvent si le verre est à moitié plein ou à moitié vide. Comme j'ai constaté par moi-même qu'il était complètement vide dans les années 1970, je vous dirai sans hésiter que le verre est à moitié plein et qu'il continue de se remplir. Mais il y a encore beaucoup à faire, et les progrès ne sont pas uniformes.

Quand on adopte une perspective à plus long terme, on voit bien, comme le Canada est en train de s'en rendre compte, que l'Asie est importante, voire cruciale pour le maintien de notre niveau de vie.

Ce n'est un secret pour personne que l'intérêt du Canada pour l'Asie n'a pas été constant. Il a été épisodique, et c'est notre talon d'Achille aujourd'hui. Mis à part l'héritage de nos tout premiers contacts avec l'Asie, essentiellement par le truchement de missionnaires canadiens, c'est à partir des années 1950 que nous avons commencé à établir une solide relation avec l'Asie, d'abord avec le plan Colombo pour l'Asie méridionale, puis avec notre reconnaissance, relativement tôt, de la République populaire de Chine, et ensuite par notre ferme engagement au sein de l'ANASE, de l'APEC, dont nous sommes un membre fondateur, et cetera.

Toutefois, depuis 10 ou 15 ans jusqu'à encore tout récemment, cette relation de bienveillance s'est transformée en ce que j'appelle de l'indifférence bienveillante. Nous nous sommes tout simplement retirés de la scène. Pour toutes sortes de raisons, j'en suis sûr, mais je me réjouis de voir que, depuis trois ou quatre ans, nous essayons de corriger cela.

Toutefois, le simple fait de se montrer sur le terrain, tout en étant un bon point de départ, n'est certainement pas suffisant. Il nous faut regagner la crédibilité que nous avions auparavant. L'Asie n'attend pas que nous daignions montrer le bout du nez. Mais fort heureusement, quand nous le faisons, nous sommes bien accueillis. Cette région a donc conservé une certaine bienveillance à notre égard, sur laquelle nous pouvons encore miser.

En conclusion, j'aimerais simplement ajouter qu'il existe une voie de communication que le Canada pourrait utiliser davantage, et je veux parler de la diplomatie parallèle. À ce propos, j'aimerais parler du rôle du Pacific Economic Cooperation Council, le PECC. C'est une organisation non gouvernementale tripartite, en ce sens qu'elle regroupe des universitaires, des fonctionnaires à titre privé et des représentants du secteur privé. C'est donc une sorte d'organisation qui pratique la diplomatie parallèle, car c'est en fait une cellule de réflexion sur l'ensemble de la région. Cette organisation existe depuis 1980. Le Canada en a été un membre fondateur et continue d'y jouer un rôle actif. Le PECC produit des études et des documents de réflexion sur la région, sur ses défis et sur ses perspectives. Étant partie à la diplomatie parallèle, le PECC est une bonne tribune pour tester de nouvelles idées et développer des réseaux informels dans la région.

Je serai ravi de vous parler plus longuement des sujets qui intéressent actuellement le PECC, notamment le régionalisme ouvert, avec une étude sur les architectures commerciales, ainsi que la croissance inclusive et la cohésion sociale, qui sont un sujet de plus en plus important dans la région. Bon nombre de barrières douanières ont été levées, mais les bienfaits de ces mesures ne se sont pas répercutés sur tous les secteurs de la population. Il y a aussi les dossiers de l'infrastructure et de la connectivité, aussi bien physique qu'humaine, et cela inclut l'énergie, les transports et les services.

En fait, le PECC va tenir, le prochain week-end, sa 21e assemblée générale annuelle, et ça va se passer à Vancouver pour la première fois depuis longtemps. C'est organisé par la Fondation Asie Pacifique du Canada, en parallèle avec le forum Canada-Asie 2013. Nous accueillerons un bon groupe de spécialistes asiatiques et canadiens qui souhaitent se rencontrer pendant trois ou quatre jours la semaine prochaine.

Je vais m'arrêter là pour l'instant. Je serai ravi de revenir sur ce sujet ou sur d'autres qui vous intéressent particulièrement. Je vous remercie.

La présidente : Merci, monsieur Stephens. J'ai une liste de plusieurs sénateurs qui veulent poser des questions.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Ma première question s'adressera à M. Stephens.

Dans un article fort intéressant de la Fondation Asie Pacifique du Canada paru en juin dernier, vous mentionnez que la voix du Canada est plutôt silencieuse auprès des médias en Asie. Quelles recommandations voudriez-vous faire à ce sujet, et de quelle manière les instances canadiennes devraient-elles se positionner selon vous?

[Traduction]

M. Stephens : Je vous remercie de votre question.

Il est indéniable que le monde des médias a évolué et que la présence canadienne en Asie a décliné. On sait que les médias jouent un rôle important quant à façon dont ils présentent aux Canadiens de ce qui se passe dans le monde, dans une perspective canadienne. Bien sûr, les Canadiens peuvent se brancher sur les fils de nouvelles d'autres organisations, mais la représentation des médias canadiens en Asie est très mince, la seule exception étant le bureau que le Globe and Mail maintient à Pékin, depuis les années 1950, qui continue d'être une bonne source d'information. Nous avons des correspondants à Pékin, mais à part ça, je ne pense pas que les médias canadiens aient d'autres antennes en Asie. C'est un problème auquel le gouvernement peut difficilement remédier, car ça relève du secteur privé. Je trouve cela regrettable.

Ce n'est peut-être pas nécessairement la solution que le Canada devrait retenir, mais les Australiens, à qui on nous compare très souvent, s'emploient résolument, par l'intermédiaire d'une société d'État, ABC, à faire entendre leur voix en Asie et à faire savoir aux Australiens ce qui se passe en Asie. L'Australie finance également un réseau, Australia Network, disponible dans toute l'Asie sur la plupart des plates-formes de câbles.

On pourrait comparer cela à une sorte de BBC australienne. Je vous signale en passant que la Chine est en train de faire exactement la même chose, avec sa nouvelle plate-forme en langue anglaise, qui fait entendre la voix de la Chine.

Mais le Canada est absent, et c'est regrettable parce que ce vide n'a pas été comblé adéquatement par le secteur privé canadien. Et le marché en est le reflet direct. Sans la voix de l'Asie et sans présence canadienne sur place, il n'est pas surprenant que les opinions des Canadiens soient modelées par des médias étrangers, ou que les informations qui pourraient les intéresser soient reléguées à la dernière page des journaux. Et réciproquement, la voix du Canada se perd de plus en plus dans la multitude de médias étrangers.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Ma deuxième question s'adresse à Mme Goldfarb.

Selon vous, dans quels pays le Canada pourrait-il affecter son aide internationale de façon stratégique en Asie pour mieux tenir compte des risques en matière de sécurité dans les pays bénéficiaires et de leurs besoins au plan de la croissance économique, pour renforcer le contexte des affaires pour les entreprises canadiennes?

[Traduction]

Mme Goldfarb : Je n'ai pas tout à fait compris votre question. Pourriez-vous la préciser, pour que je puisse y répondre?

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Certainement. L'ACDI est maintenant sous la direction du ministère des Affaires étrangères, et normalement le Canada est un pays qui fournit de l'aide à des pays qui en ont besoin. Je vous demandais si vous aviez une idée de la façon stratégique dont on pourrait envoyer cette aide en Asie et dans quels pays, pour mieux tenir compte des risques en matière de sécurité dans les pays qui sont les bénéficiaires, et aussi en comparaison avec leurs besoins au plan de la croissance économique, pour renforcer le contexte des affaires pour les entreprises canadiennes.

Est-ce qu'on doit tenir compte des pays qui reçoivent l'aide? Est-ce plus bénéfique pour les compagnies canadiennes d'aller dans ces pays?

[Traduction]

Mme Goldfarb : Je ne suis pas une spécialiste des risques de sécurité et des aspects politiques auxquels vous faites allusion dans votre question. Toutefois, je peux vous dire quelques mots sur l'aide internationale, comment nous déterminons les critères qu'il faut appliquer et quelle relation il doit y avoir entre les intérêts commerciaux canadiens et l'aide internationale, ce qui est l'essentiel de votre question, je crois.

Nos politiques de développement ne doivent pas se limiter à une aide financière. J'ai personnellement étudié la question de savoir quelle est la meilleure façon d'aider les pays pauvres. Et ce n'est pas nécessairement une question d'aide financière, car nous savons que les investissements, le commerce et les envois de fonds par le secteur privé sont beaucoup plus importants, de par leur volume, leur incidence sur la pauvreté, et même leur impact sur la croissance de ces pays. Ce ne sont pas des outils parfaits, mais ils sont utiles pour stimuler la croissance économique, ou tout au moins avoir un impact sur la stratégie commerciale et sur les politiques relatives à la suppression des barrières commerciales. Est-ce que les entreprises canadiennes ont intérêt à aller dans les pays qui reçoivent notre aide plutôt que dans les autres? Je suppose que, si vous avez déjà une relation bien établie avec un pays, les portes s'ouvrent plus facilement et que vous pouvez avoir plus facilement accès aux autorités. Pour autant, il ne faut pas oublier que l'aide financière doit être accordée aux pays qui en ont besoin afin d'améliorer la condition des populations.

Nous devons aussi réfléchir à d'autres outils politiques, à part l'aide étrangère, qui pourraient nous aider à améliorer nos relations commerciales. La fusion du MAECI et de l'ACDI aidera peut-être les spécialistes de l'aide internationale, au ministère des Affaires étrangères, à mieux comprendre en quoi l'économie mondiale a changé, ce que ça signifie, ainsi que les relations entre le développement, le commerce et les investissements. Réciproquement, je pense qu'il est important que ceux qui s'occupent de commerce et d'investissement réfléchissent eux aussi aux impacts que cela peut avoir sur la réduction de la pauvreté. Tout se tient, mais il ne faut pas pour autant élaborer des politiques d'aide uniquement en fonction des intérêts commerciaux. Ce n'est certainement pas ce que je recommande.

Si vous voulez parler d'une politique de développement en termes plus généraux, il est sans doute possible d'avoir des politiques commerciales qui favorisent à la fois la réduction de la pauvreté et les intérêts commerciaux du Canada.

Prenez le cas de l'Indonésie, qui est l'un des futurs grands marchés du Canada. C'est un pays pauvre, où il est difficile de faire des affaires. Nous y avons des intérêts commerciaux, et on pourrait certainement faire en sorte que la politique du Canada contribue également à réduire la pauvreté dans ce pays. Il y a certainement des points de convergence entre les deux, mais je ne peux pas vous dire, sans avoir analysé la situation de près, à quels pays précisément nous devrions offrir de l'aide. J'espère avoir répondu à votre question.

La sénatrice Ataullahjan : Quand on parle d'échanges commerciaux, on touche invariablement à la question des droits de la personne, en l'occurrence les conditions de travail. Hier, des témoins nous ont dit que ça ne sert à rien de chercher à faire un lien entre eux le commerce et les droits de la personne. Que lorsque nous parlons de commerce, nous devrions nous limiter à ça, sans aborder la question des droits de la personne, car nos interlocuteurs ont l'impression qu'on veut leur donner des leçons, et ça ne marche pas. Dans ce cas, comment pouvons-nous être sûrs qu'en signant des accords commerciaux, nous ne cautionnons pas la violation des droits de la personne?

Mme Goldfarb : C'est une question très importante. La récente tragédie qui s'est produite au Bangladesh avec l'effondrement d'une usine montre combien il est important de réfléchir à toutes ces questions. Il y a une dizaine d'années, les décideurs canadiens ont éliminé les tarifs douaniers sur les biens provenant des pays les plus pauvres, et ça s'est traduit par une augmentation considérable des importations au Canada de vêtements du Bangladesh. Nous savons tous que des vêtements de la marque Joe Fresh étaient fabriqués dans cette usine. Cette situation soulève deux questions. La première est celle du leadership que doivent exercer les entreprises canadiennes. Ce n'est pas nécessairement une question de politique gouvernementale, et la tragédie du Bangladesh montre bien que les industriels canadiens doivent s'assurer que leurs chaînes d'approvisionnement respectent les mêmes valeurs que leur entreprise ou qu'elles respectent les normes de sécurité au travail en vigueur au Canada.

Je pense que les entreprises canadiennes vont faire preuve de plus de leadership face à ces risques, tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Lorsqu'elles veulent faire des affaires dans un pays qui n'a pas les mêmes valeurs que nous en matière de droits de la personne, de conditions de travail, par exemple, elles doivent s'assurer qu'elles ont, sur place, un partenaire de confiance — et j'ai parlé tout à l'heure de l'importance de ces relations. Les industriels canadiens ne doivent pas supposer que tout va bien aller s'ils ne sont pas présents sur le terrain et s'ils ne savent pas ce qui s'y passe. J'estime que c'est leur responsabilité — et c'est aussi leur intérêt — de s'assurer que les risques que posent leurs chaînes d'approvisionnement restent minimes et que, lorsqu'ils entament des relations commerciales avec des pays qui ont des normes différentes, ces normes restent raisonnables, d'un point de vue canadien.

S'agissant des outils à utiliser pour inclure des normes sur les droits de la personne dans les accords commerciaux que nous négocions, les gouvernements pourraient — mais c'est une question très délicate —, aider les entreprises sur le terrain à évaluer les risques que présentent les chaînes d'approvisionnement dont je viens de parler, à établir sur place des relations avec des partenaires de confiance, et à nouer des contacts avec les marchés. Dans ce domaine, le gouvernement pourrait jouer un rôle très positif.

Il existe deux écoles de pensée : certains prônent l'inclusion des droits de la personne dans les accords commerciaux, tandis que d'autres estiment qu'il faut avoir les bonnes politiques pour chaque situation, car l'inclusion de normes environnementales et de normes de travail dans un accord commercial nuit au commerce. Dans ce dernier cas, ça signifie qu'il faut s'adresser à des instances différentes pour ce qui est des conditions de travail, par exemple des organisations internationales. Je ne suis pas une spécialiste en la matière, et nous n'avons pas fait de recherche sur les avantages et les inconvénients de l'inclusion des droits de la personne dans les accords commerciaux.

La présidente : J'ai une longue liste de noms, et je vais donc inviter les témoins à nous donner des réponses plus concises. Ils peuvent aussi nous faire parvenir des réponses écrites, de sorte que tous ceux qui le souhaitent auront le temps de poser leurs questions.

Le sénateur Nolin : Ma première question s'adresse à Mme Goldfarb. Comme vous le savez, le Canada s'est joint aux négociations du Partenariat transpacifique en octobre dernier, et le Japon lui a emboîté le pas en avril dernier. Selon le MAECI, le marché du PTP représente, le Japon exclu, plus de 658 millions de personnes, pour un PIB total de plus de 20 billions de dollars.

Ma première question est d'ordre général. Quels secteurs de l'industrie et quelles régions du Canada sont susceptibles d'être touchés, positivement ou négativement, par des négociations commerciales d'une telle envergure?

Mme Goldfarb : Nous n'avons pas fait une étude spécifique sur le PTP et sur les secteurs industriels qui en profiteront ou non. Toutefois...

Le sénateur Nolin : Excusez-moi de vous interrompre, mais vous pourriez peut-être nous envoyer la réponse par écrit, car je reconnais que ma question est très vaste et que la réponse pourrait, par conséquent, être assez longue. Je vous propose donc de nous envoyer votre réponse par écrit, cela nous serait très utile.

Mme Goldfarb : Étant donné que nous n'avons pas fait d'études là-dessus, je pense que la réponse concernera l'impact sur l'ensemble du pays.

Il est difficile de vous le dire sans avoir fait d'analyse précise, mais nous pensons qu'il y aura des retombées positives non seulement sur le commerce des biens, mais aussi sur le commerce des services. Le Partenariat transpacifique est censé être un accord avant-gardiste, qui va plus loin que nos accords commerciaux actuels. Il va porter principalement sur les questions liées au commerce des services, à la libre circulation des personnes, bref, des questions qui dépassent le cadre des accords commerciaux traditionnels. Toutes les régions du pays qui vendent des services dans le monde entier pourraient bénéficier de cet accord, car dans ce secteur, les retombées pourraient être considérables. C'est pour cela qu'il faut que nous fassions partie des négociations, car c'est un accord commercial qui sera sans doute l'un des plus importants au monde.

Le sénateur Nolin : Monsieur Stephens, sur le même sujet, quels obstacles précis au commerce et aux investissements le PTP devrait-il régler entre les membres signataires de cet accord?

M. Stephens : S'agissant du PTP, j'aurai deux remarques à faire. Il y a d'un côté les 11 partenaires actuels, y compris le Japon. Le Canada a de bonnes relations commerciales avec certains d'entre eux, même parfois des accords de libre- échange. Mais il ne faut pas oublier que le Canada a attendu un certain temps avant de se décider. Ça nous a pris du temps, mais maintenant, nous y sommes. Le PTP est toutefois un processus à long terme, de grande envergure, et les choses avancent. Il pourrait bien y avoir d'autres membres, après le Japon. Et d'un autre côté, il y a les autres groupes commerciaux régionaux, comme le Partenariat économique intégral régional, qui ne comprend pas le Canada, et l'Alliance du Pacifique. Le PTP fait entrer le Canada dans l'arène, en quelque sorte.

Il faut espérer qu'un de ces jours, toutes ces organisations seront regroupées dans un vaste accord de libre-échange Asie-Pacifique.

Pour ce qui est de l'investissement, le PTP est un accord de haut niveau, qui exigera des engagements dans le domaine des marchés publics, et cetera. Je ne suis pas dans le secret de ces négociations, mais le Canada a l'expérience de ces dossiers. Bien entendu, les États-Unis et le Mexique, par l'intermédiaire de l'ALENA, font maintenant partie du PTP. Nous avons des accords commerciaux avec le Chili et d'autres pays.

Même s'il faudra bien évidemment donner des engagements supplémentaires, je pense qu'il faut bien comprendre qu'en ce qui concerne l'investissement, ces engagements seront réciproques. Il nous faudra peut-être restreindre ou ouvrir davantage les possibilités d'investissement dans certains secteurs où nous avons déjà très peu de restrictions, et ça peut être manifestement bénéfique pour le Canada, mais réciproquement, nous aurons plus de débouchés pour les investissements canadiens. L'investissement est le ressort non seulement du commerce des biens, mais aussi du commerce des services, et ça devrait servir de moteur à l'expansion de nos exportations de biens et de services dans cette région du monde qui est en pleine croissance.

Le sénateur Dawson : Un grand nombre de témoins nous ont dit que, plus nous allons vers l'Est, moins il y a de gens qui s'intéressent aux questions relatives à l'Asie-Pacifique, qu'il s'agisse de commerce ou de politique. L'un des objectifs de notre comité est de discuter de toutes ces questions et de faire en sorte qu'on en parle au Canada. Comment, à votre avis, pouvons-nous rehausser le profil de ce dossier et convaincre les politiciens? Nous avons d'abord besoin de convaincre la population parce que les politiciens l'écoutent davantage. Alors comment convaincre les Canadiens que c'est une occasion que nous devons saisir? Nous ne pouvons pas revenir à l'époque de l'indifférence bienveillante. Il nous faut convaincre les Canadiens que ça vaut la peine de s'investir dans ces régions, aussi bien nos gouvernements que nos entreprises qui ont des marchés à explorer et à exploiter.

Que pouvons-nous faire pour faire comprendre aux Canadiens l'importance de la croissance de la région Asie- Pacifique? Comme vous le savez, nous sommes loin de la Colombie-Britannique, nous ne pouvons pas voir la Russie de chez nous.

M. Stephens : Je suppose que c'est à moi que vous vous adressez. Comme je travaille à la Fondation Asie Pacifique, dont je vous ai déjà parlé, je peux vous dire que cette fondation, dont la mission est de rehausser l'image de l'Asie au Canada, a récemment lancé plusieurs initiatives, notamment Le dialogue canadien sur l'Asie, qui se déroule dans plusieurs régions du pays. L'objectif est de mieux faire connaître l'Asie; nous faisons des conférences et nous écrivons sur le sujet. Vous m'avez demandé précisément ce que les gouvernements peuvent faire. Eh bien justement, l'une des choses consiste exactement à faire ce que vous faites, sénateur, c'est-à-dire braquer les projecteurs sur ces questions-là en organisant des audiences publiques et en faisant des études. Et quand je parle des gouvernements, ce n'est pas seulement le Parlement et le gouvernement fédéral. Je parle des trois paliers de gouvernement, car il faut faire participer les gouvernements provinciaux et municipaux. Je constate que des missions commerciales sont organisées de temps à autre par des administrations municipales et provinciales, et je trouve cela utile. Ces administrations envoient leurs entreprises en Asie, et ça aussi, ça fait connaître davantage l'Asie dans nos collectivités.

L'un des éléments importants, c'est d'instaurer un climat propice. J'observe que la Fondation Asie Pacifique du Canada a un bureau à Toronto, donc ce n'est pas seulement une organisation de la côte Ouest. Son conseil d'administration est composé de gens issus de toutes les régions du Canada et de divers groupes linguistiques. Nous faisons ce que nous pouvons, car après tout, la fondation est une création du Parlement, et le gouvernement y joue un certain rôle. Il ne faut donc pas relâcher nos efforts, même s'il est facile de porter son attention ailleurs. Ce n'est pas un exercice à court terme, ni même sur deux ou trois ans. C'est quelque chose qui va nécessiter un changement générationnel, et c'est pour cela qu'il faut sensibiliser les jeunes générations à la culture et aux langues asiatiques, dans les écoles. C'est une responsabilité provinciale, c'est évident, mais c'est quelque chose qu'on pourrait encourager à tous les niveaux.

Le sénateur Demers : Je m'adresse à l'un ou l'autre des témoins, ou aux deux. Certains analystes prétendent que la politique étrangère du Canada en Asie devrait s'étendre à toute une gamme d'enjeux et non être axée sur les relations commerciales et les marchés émergents : « Il faut une approche globale qui inclut les questions de politique et de sécurité, si l'on veut démontrer l'engagement et la capacité du Canada. »

M. Stephens : Je suis ravi de répondre à votre question, sénateur. Je suis tout à fait d'accord avec ça. Le commerce est une chose très importante. Comme le dit le vieil adage, le commerce suit le drapeau, ou bien est-ce l'inverse aujourd'hui... Quoi qu'il en soit, c'est un fait qu'on ne peut pas avoir une politique étrangère unidimensionnelle. Pour répondre à ce reproche d'indifférence bienveillante qu'on lui a fait, le Canada a décidé de se montrer davantage sur le terrain. Les ministres y vont dorénavant plus souvent, et le premier ministre a rendu visite à des partenaires importants. Par contre, il faut que ces contacts soient plus réguliers et qu'ils visent le long terme, ce qui nécessite — je sais que le terme est galvaudé — une approche stratégique.

Nous avons toujours eu une approche stratégique à l'égard des États-Unis. Ça fait partie de notre ADN. Nous savons pourquoi c'est important. Nous savons prendre la mesure de toutes les facettes de notre relation avec les États- Unis. Nous devons en faire autant avec l'Asie. Même si c'est une région très disparate, nous devons adopter une approche holistique vis-à-vis de l'Asie.

Vous avez parlé de sécurité. Il faut d'abord faire l'inventaire de ce que nous avons. Nous n'allons pas envoyer en Asie-Pacifique autant de biens de sécurité que les États-Unis, mais dans le domaine de la sécurité, il y a beaucoup de secteurs où le Canada a un rôle à jouer. Je veux parler de la sécurité humaine ou de la sécurité dite douce, le passage de clandestins, les secours humanitaires, et cetera. De nombreux forums sont en train de se constituer, où le Canada pourrait jouer un rôle. Dans les années 1990, nous avons joué un rôle actif dans le conflit de la mer de Chine méridionale, en offrant un forum pour faciliter le dialogue. Ce sont des initiatives qui pourraient être utiles, car il ne suffit pas d'envoyer des missions commerciales à intervalles réguliers. Il va falloir assurer une présence tous azimuts. J'ai parlé des réseaux de diplomatie parallèle où nous devrons jouer notre rôle, où nous devrons être présents. Les gens remarquent vite si vous êtes là pour faire de l'argent rapidement ou bien si vous êtes vraiment engagés. Alors je suis d'accord, ça comprend la sécurité, le commerce et un engagement sur le plan culturel, et cetera.

Le sénateur Wallace : Madame Goldfarb, vous nous conseillez de concentrer nos efforts sur le développement de relations commerciales et économiques avec des pays qui sont proches de notre zone de confort, pour reprendre vos propres termes. Si je me souviens bien, vous avez dit qu'il y avait 24 pays de la zone Asie-Pacifique qui figuraient sur cette liste. J'aimerais donc savoir ce que vous pensez des démarches entreprises par le gouvernement canadien pour développer nos relations avec ces marchés émergents, notamment en Asie-Pacifique.

Pensez-vous que ces démarches soient suffisamment coordonnées? Est-ce que nous concentrons nos efforts sur les pays qui nous offrent le maximum de débouchés ou qui sont un bon complément pour le Canada, en ce qui concerne les services, les ressources et les opportunités à saisir? Est-ce que nous faisons attention à cette complémentarité, ou bien est-ce que nous avons une approche globale et pas toujours axée sur les débouchés réels? C'est vrai, le gouvernement ne peut pas tout faire. Il peut définir un cadre général, faire les préparatifs nécessaires et, au moyen de politiques, ouvrir des débouchés pour le secteur privé canadien, mais ensuite, il faut que ça se concrétise. Il faut que le commerce et l'activité industrielle s'ensuivent. C'est une question un peu décousue, mais ça nous ramène à la stratégie. Est-ce que notre stratégie est suffisamment axée sur le développement des débouchés économiques dont nous avons besoin?

Mme Goldfarb : Je vous remercie de votre question. Je tiens à préciser que les 24 pays que nous désignons dans notre rapport comme les grands marchés futurs du Canada ne sont pas tous en Asie-Pacifique, c'est une liste de 24 pays du monde entier. Il est vrai que la plupart se trouvent en Asie-Pacifique, et qu'on y compte par exemple la Corée du Sud, l'Inde et la Chine.

Quant à savoir si notre stratégie est assez ciblée, c'est une excellente question. Je suis sûre que les fonctionnaires du MAECI, vu le nombre limité de négociateurs commerciaux que nous avons, travaillent d'arrache-pied, car nous sommes en train de négocier tous azimuts. Il serait bon que la politique canadienne soit davantage ciblée. La dernière Stratégie commerciale mondiale élaborée par le gouvernement énumère un certain nombre de régions prioritaires, mais ces régions se trouvent dans tous les coins du monde. Il faudrait que nos efforts soient davantage ciblés. Je pense que c'est surtout dû au fait que le Canada n'a pas vraiment réussi à négocier un autre accord de libre-échange global, depuis celui que nous avons signé avec les États-Unis. Nous sommes apparemment sur le point d'en signer un avec les Européens, et nous sommes en négociation avec le Japon, l'Inde, le PTP et d'autres. Cependant, nous n'avons pas encore signé un accord avec un partenaire d'envergure, et il faut absolument que nous le fassions, car ça servira de précédent à la signature d'accords avec d'autres marchés importants pour le Canada. En effet, ça enverra un message au monde entier que le Canada est capable de signer ce genre d'accord, de négocier en toute bonne foi et de faire des concessions sur des dossiers dits sensibles pour les Canadiens.

On parle souvent des points forts du Canada, et nous devrions négocier des accords alignés sur les points forts de notre industrie. Il ne faut pas oublier que ces points forts ne sont plus du tout les mêmes qu'il y a 10 ans. Aujourd'hui, c'est le secteur des services qui est le ressort de la croissance de notre commerce extérieur. Nos exportations de ressources affichent elles aussi une croissance considérable, ce qui montre bien que la composition de notre commerce extérieur a radicalement changé en 10 ans. Nous ne devons pas négocier des accords commerciaux uniquement sur la base de nos points forts actuels. Nous devons être capables de négocier des accords aussi ambitieux que possible, des accords aussi globaux que possible. Cela nous amènera à découvrir les nouveaux points forts que le Canada aura dans 10 ans et dont nous n'avions aucune idée. Il faut s'assurer qu'on met le cap sur les marchés qui sont les plus importants, qui présentent le plus grand potentiel de croissance pour le Canada et qui nous offrent le plus de débouchés.

Le sénateur Wallace : Je vous remercie. Ce qui nous intéresse plus particulièrement, moi et mes collègues, c'est le lien qui existe entre les politiques du gouvernement et les investissements du secteur privé. Monsieur Stephens, vous avez dit que les entreprises canadiennes n'avaient pas su saisir les opportunités qui existent en Asie-Pacifique, en tout cas pas suffisamment, selon vous. D'autres témoins nous ont dit que les industriels canadiens avaient horreur du risque, beaucoup plus que les industriels d'autres pays. C'est peut-être parce que nous avons l'habitude des marchés américains et européens, que nous avons trouvé là notre zone de confort et qu'il est difficile de s'en écarter.

C'est bien de négocier de nouveaux accords commerciaux qui vont nous ouvrir de nouveaux débouchés, mais que va-t-il falloir faire de plus pour que les entrepreneurs canadiens se lancent à l'assaut de ces marchés? Je sais que nous avons des missions commerciales, et que c'est par elles qu'ils passent, mais quelles initiatives devrait-on prendre pour mieux faire correspondre les politiques commerciales canadiennes et les investissements du secteur privé canadien sur ces marchés?

M. Stephens : Sénateur, c'est vrai que le secteur privé canadien pourrait faire mieux. C'est facile de critiquer. Il ne faut pas oublier que les entrepreneurs doivent au départ s'assurer que ça va être rentable. Tout n'est pas négatif pour autant. Moi je parlais davantage de la présence du gouvernement en Asie, plutôt que du secteur privé. Dans certains secteurs, notamment le secteur financier, certaines entreprises canadiennes sont solidement implantées en Asie depuis de nombreuses années. Ce sont nos porte-étendards. Dans le secteur des TI, Nortel était jadis très actif. C'est sûr que c'est du passé, mais aujourd'hui, les marchés les plus importants de RIM, avec BlackBerry, ce sont les marchés asiatiques. Je pourrais vous donner une foule d'exemples, et il y a bien sûr le secteur des services d'ingénierie. J'observe que ce sont surtout des services, mais il y a aussi des entreprises de ressources, des exportations de ressources.

Ce qu'il faut se demander au sujet des entreprises qui n'ont pas encore fait le grand saut, ou qui en sont revenues, c'est comment on va les inciter à aller exploiter ces nouveaux débouchés. Les industriels répondent toujours qu'il est facile d'exporter aux États-Unis, que ce marché est à leur porte, qu'ils le connaissent bien et que c'est dans leur zone de confort. Comme l'a dit Mme Goldfarb, nos exportations vers les États-Unis vont diminuer, de sorte que les entreprises n'auront pas le choix de s'intéresser à certains de ces marchés, même s'ils sont plus compliqués, plus difficiles. C'est sûr qu'on n'est plus dans la même zone de confort.

Pour en revenir à votre question, les missions commerciales jouent un rôle important, car elles font connaître le Canada et elles ouvrent des portes, et tout le monde sait que la plupart des transactions qui sont soi-disant entérinées dans ces accords commerciaux sont en négociation depuis des années. Dans certains cas, la mission a pu donner le petit coup de pouce supplémentaire nécessaire, où c'était peut-être une opération publicitaire. Les accords de libre-échange sont utiles en ce sens qu'ils contiennent des procédures d'arbitrage qui contribuent à rassurer les entreprises contre des expropriations injustifiées, qu'ils assurent le respect des garanties juridiques et qu'ils prévoient la suppression des tarifs douaniers. Si le marché vers lequel vous exportez commence à vous jouer des tours, vous pouvez vous adresser à votre gouvernement qui pourra exercer des pressions et recourir à certains mécanismes.

Il est évident que le gouvernement peut contribuer à accroître la confiance des industriels. Au final, c'est l'entreprise qui décide si l'opération sera rentable pour ses actionnaires, compte tenu des risques, entre autres. Comme on l'a dit, il y a toujours un risque quand c'est un marché qu'on ne connaît pas, mais en contrepartie, les profits sont plus grands. Je pense qu'il y aura de plus en plus d'entreprises qui s'intéresseront aux marchés étrangers. Il n'y a pas de formule unique, mais les portes s'ouvrent. Ce qui est plus important, c'est d'instaurer un climat propice, par la signature d'accords d'État à État, et c'est là le rôle très important que les gouvernements doivent jouer pour accroître la confiance du secteur privé.

Le sénateur Oh : Ma question s'adresse aux deux témoins. Récemment, un représentant d'un pays de l'ANASE est venu me voir à mon bureau, et nous avons discuté de commerce extérieur. J'ai été très surpris d'apprendre que les échanges commerciaux du Canada avec Singapour ne représentaient que 0,5 p. 100 de ses exportations annuelles, ce qui est bien inférieur à ce qui se passe dans le reste du monde. Je me rends fréquemment en Asie et en Chine, et j'ai souvent entendu dire que le secteur privé canadien, ou le commerce canadien, était très conservateur. Peut-être que nos entrepreneurs ne savent pas comment s'y prendre pour s'implanter sur un marché asiatique. Par exemple, en ce qui concerne le BlackBerry, le pays qui utilise le plus de BlackBerry au monde est l'Indonésie. Le marché, là-bas, est considérable pour les BlackBerry, mais à Singapour et dans les autres pays de l'ANASE, ces appareils sont en queue de peloton.

Les pays européens sont très présents dans tous les secteurs du marché chinois, de l'industrie automobile à l'alimentation, le commerce, les exportations et le bois de construction. De quelle façon le gouvernement canadien pourrait-il aider le secteur privé à s'implanter sur les marchés de l'ANASE et de la région Asie-Pacifique?

Mme Goldfarb : Comme l'a dit M. Stephens, les entreprises canadiennes ont compris que l'économie mondiale était en train de changer radicalement, avec le ralentissement des économies de l'Union européenne et des États-Unis — surtout l'économie américaine — ainsi que la concurrence accrue de la Chine et d'autres marchés émergents sur le marché américain et même sur le marché canadien. Les entreprises canadiennes cherchent donc d'autres débouchés dans certains de ces marchés à croissance rapide. Je suis d'accord avec M. Stephens pour dire que tout n'est pas négatif. Un grand nombre d'entreprises canadiennes sont déjà solidement implantées sur ces marchés, et cette tendance s'accentue rapidement. Les petites entreprises, surtout, sont de plus en plus présentes sur ces marchés. Cela dit, ce n'est pas encore assez.

Je pense que le gouvernement a un rôle considérable à jouer en matière d'éducation, pour mieux faire connaître les débouchés qu'offre cette région. La signature d'un accord de libre-échange avec les marchés de cette région serait une très bonne façon de montrer aux industriels que ce marché est important et que les portes sont ouvertes. Ce serait un signal. Car on l'a vu dans le passé, dès qu'on signe un accord de libre-échange, les entreprises canadiennes commencent à s'intéresser à ces marchés.

Par ailleurs, nous ne nous en rendons peut-être pas bien compte, mais dans les coulisses, le Service des délégués commerciaux, Exportation et développement Canada et un grand nombre de conseils commerciaux travaillent d'arrache-pied pour créer des réseaux et des possibilités de jumelage pour les entreprises canadiennes. Je pense que le gouvernement pourrait s'engager davantage dans ces activités moins visibles, surtout lorsqu'il s'agit de marchés que les Canadiens connaissent moins bien. Je pense que la réalité économique est telle que les entreprises canadiennes vont être forcées de faire le saut. Même si elles préfèrent se limiter au marché local et refusent de penser aux marchés à croissance rapide à l'extérieur du Canada ou des États-Unis, elles y seront obligées sinon elles feront faillite, car la plupart d'entre elles font face à une concurrence de plus en plus serrée de la part des Chinois, entre autres, sur leur marché américain traditionnel. Elles vont donc être obligées de regarder ailleurs.

M. Stephens : Pour répondre à votre question, je vais parler de l'ANASE et de la Chine. Vous avez parlé d'une très petite part de marché, Singapour. Singapour est bien sûr un marché très petit, avec 3 millions de personnes, mais c'est un entrepôt.

L'ANASE va avoir un marché commun en 2015. Vous avez dit que l'Indonésie était un marché important, mais la Malaisie et la Thaïlande sont aussi des marchés qui comptent de plus en plus. Comme elle va former un bloc plus uni, l'ANASE va représenter un marché potentiellement très important pour le Canada. Nous avons repris nos pourparlers avec cette association, des pourparlers que nous avions entamés il y a plusieurs années mais que nous avions laissé mûrir, en quelque sorte. Donc, ces discussions ont repris. Je sais qu'il y a un nouveau Conseil commercial Canada- ANASE qui est en train de se constituer à Singapour, et ça devrait aider. Il est formé des entreprises canadiennes établies dans la région. Le Canada a récemment nommé un ambassadeur à l'ANASE, et il est important que nous renforcions nos liens institutionnels avec cette organisation. Je suis convaincu que cela va être très utile.

Un certain nombre de pays de l'ANASE, mais pas tous, font partie des négociations du PTP. Tôt ou tard, il faudra, je crois, que le Canada s'engage avec l'ensemble des pays de l'ANASE. Cette organisation a négocié des accords commerciaux avec la plupart de ses grands partenaires commerciaux, et elle est devenue une sorte de plaque tournante des accords commerciaux avec l'Inde, la Chine, le Japon, la Corée, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Tous ces accords sont en train d'être consolidés en un accord « rival », si l'on peut dire, du PTP. Quand je dis rival, c'est peut-être complémentaire, on ne sait pas encore. Pour l'instant, ce sont les deux grands dispositifs commerciaux de la région Asie-Pacifique. Un certain nombre de pays de l'ANASE font partie des deux, mais pas le Canada. Aucun pays de l'hémisphère occidental n'est membre de ce nouveau PEIR, mais s'il prend de l'ampleur, il faudra que le Canada y prête attention.

En ce qui concerne la Chine, il n'y a pas que les Européens, tous les pays du monde essayent de s'implanter sur le marché chinois. Il est très difficile à pénétrer. Que je sache, il n'y a qu'un pays de l'OCDE qui a un accord avec la Chine, c'est la Nouvelle-Zélande, qui est un très petit marché. Je crois savoir que la Chine a fait une offre au Canada pour entamer des discussions sur un accord de libre-échange. C'est vrai qu'on risque d'entreprendre trop de choses à la fois, mais c'est quand même une offre qu'il faut examiner sérieusement, car les Chinois ne la font pas à tout le monde, loin de là. Pour autant, ça ne sera pas chose facile. Nous n'avons pas encore signé un seul des accords commerciaux en négociation, mais l'offre chinoise pourrait être l'occasion pour le Canada de prendre une longueur d'avance sur ses concurrents sur le marché chinois. Je crois comprendre que le gouvernement est en train d'examiner cette offre et qu'il n'a pas encore donné sa réponse officielle, mais il ne faudrait peut-être pas tarder.

La présidente : Merci. Monsieur Stephens, vous avez dit, si j'ai bien compris, que la croissance de nos exportations vers ces nouveaux marchés était due en partie aux petites et moyennes entreprises. Au cours des nombreuses études que nous avons effectuées, des témoins nous ont dit que, comparées aux petites et moyennes entreprises, les grandes entreprises n'avaient sans doute pas autant besoin de soutien des gouvernements pour qu'on leur ouvre des portes. Pourriez-vous nous donner des précisions sur les débouchés qu'offre l'Asie pour les petites et moyennes entreprises? Y a-t-il quelque chose que nous pourrions faire pour les aider, dans le cadre de cette étude?

M. Stephens : Je serais ravi de vous répondre, mais je crois que c'est Mme Goldfarb qui l'a dit, alors je vais la laisser répondre la première.

Mme Goldfarb : J'ai dit que la croissance de nos exportations sur ces marchés était due principalement aux petites et moyennes entreprises, et pas vraiment aux grandes. Je veux parler de l'Inde, de la Thaïlande et des autres petits marchés asiatiques.

Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, il faut bien comprendre que les petites entreprises ne pourront pas toutes réussir sur ces marchés. Une autre étude nous indique que seulement 545 petites entreprises canadiennes représentent 70 p. 100 de nos exportations. C'est donc un très petit nombre de petites entreprises qui réussissent sur ces marchés émergents à croissance rapide. Il faudrait penser un peu plus stratégique vis-à-vis de ces petites entreprises. Si celui qui vient vous voir n'est manifestement pas intéressé à acquérir une connaissance approfondie de l'autre marché et à investir le temps et l'argent nécessaires, ça ne sert à rien. En revanche, il faut donner la priorité aux entreprises qui fabriquent une technologie d'avant-garde et qui sont capables de se tailler une réputation mondiale parce qu'elles ont trouvé un créneau dans une technologie, un produit ou un service particuliers, car il est important que nous les aidions à connaître les marchés locaux, et c'est ce que font nos délégations commerciales, entre autres.

Il faudrait également aller plus loin en élaborant des arrangements plus créatifs. Nous avons constaté, au cours de nos recherches, que certaines entreprises britanniques, par exemple, ont beaucoup bénéficié d'accords de jumelage entre une petite région britannique et une ville chinoise. Ça a donné à ces entreprises accès à un segment du marché chinois qui était complémentaire de leur propre marché. Il faut faire preuve de créativité quand on cherche à établir des relations avec des marchés qu'on ne connaît pas très bien, dans le but de développer ces relations. Le soutien que nous donnons à ces entreprises pour entretenir des relations et pour mieux comprendre le marché ne relève pas seulement des politiques du gouvernement. Beaucoup d'entreprises qui réussissent sur ces marchés à croissance rapide sont des entreprises qui sont capables de s'arrimer à des petites entreprises établies sur ces marchés et de leur offrir une technologie innovante qu'elles pourront vendre. L'une des choses les plus importantes que le gouvernement puisse faire pour aider ces entreprises est de les mettre en contact les unes avec les autres.

La présidente : Madame Goldfarb, j'aimerais poser une autre question. Je pensais m'adresser aux deux témoins, mais en fait mes deux questions sont pour Mme Goldfarb.

En réponse à la sénatrice Fortin-Duplessis, vous avez parlé de l'aide internationale, et une nouvelle qui a récemment fait sensation dans la presse était que nous accordions encore une aide à la Chine, pendant que celle-ci faisait preuve d'une grande générosité à l'égard de l'Afrique et d'autres pays. C'est une nouvelle qui en a choqué plus d'un. Je ne vais pas discuter de la question de savoir si nous devrions continuer de donner une aide à des pays qui, à leur tour, viennent en aide aux autres, et qui ont ensuite un avantage concurrentiel sur nous. C'est un débat que nous avons déjà eu.

Ce qui m'intéresse, c'est le nouveau débat sur un nouveau type d'aide, à savoir le soutien aux entreprises et aux économies. Par exemple, si nous signons un accord commercial avec un petit pays, celui-ci ne sera pas nécessairement en mesure de saisir toutes les subtilités de ce genre d'accord, le rôle de l'Organisation mondiale du commerce, et cetera. Il aura donc besoin d'expertise et de soutien.

Pensez-vous que le Canada devrait se lancer dans ce genre d'aide, que ce serait plus utile au pays bénéficiaire?

Mme Goldfarb : C'est une bonne question. Nous savons que le commerce permet l'amélioration du niveau de vie. Cela implique toutes sortes de mécanismes. Si les négociateurs canadiens ont déjà du mal à faire face à la tâche, avec tous ces accords en préparation, imaginez les défis que ça peut représenter pour un pays pauvre!

Je pense qu'il est important d'aider les pays à s'assurer qu'ils signent des accords commerciaux qui vont leur être bénéfiques, et, non seulement avant la signature mais aussi après, à s'assurer qu'ils sont en mesure de tirer parti des dispositions de l'accord qui leur permettent d'exporter leurs produits vers des pays donnés. Ce n'est pas seulement avant, c'est aussi après la signature de l'accord. Il est crucial que les entreprises puissent en tirer parti.

Nous n'avons pas analysé quels pays en bénéficieraient le plus sur le plan économique, et dans quels cas il vaudrait mieux offrir ce type d'aide plutôt que l'aide traditionnelle au développement. Je ne peux pas vous dire. Par contre, je peux répéter ce que je vous ai dit tout à l'heure, à savoir que le commerce, l'investissement, les envois de fonds et les flux de capitaux privés ont une incidence considérable sur la réduction de la pauvreté. Par conséquent, tout ce que nous pouvons faire pour aider les pays à profiter au maximum de l'économie mondiale et à en tirer les mêmes avantages que les Canadiens est tout à fait positif. Je me garderai toutefois de vous conseiller de privilégier systématiquement ce type d'aide sans avoir fait une analyse plus approfondie de la question.

Le sénateur Robichaud : Vous avez dit que les grandes entreprises, comme RIM, sont bien implantées dans cette région du monde. Vous avez mentionné d'autres entreprises qui se débrouillent bien aussi.

Madame Goldfarb, vous avez dit que l'une des premières choses à faire était de trouver, sur place, un partenaire de confiance. Pour une petite ou moyenne entreprise, quel investissement cela représente-t-il? Je sais que les grandes entreprises n'ont pas ce souci-là, qu'elles ont le temps et l'argent pour aller prospecter le terrain. Si j'étais une moyenne entreprise, par où devrais-je commencer?

Mme Goldfarb : Cette question s'adresse à moi? Je vais y répondre.

Vous avez mis le doigt sur le problème. Ce sont de petites entreprises. Ce n'est donc pas comme les grandes entreprises canadiennes, bien établies, qui peuvent aller sur le marché asiatique en ayant accès à toute l'expertise et à tous les outils nécessaires pour s'implanter sur ce marché. La plupart des petites entreprises n'exportent pas puisque, comme je l'ai dit, elles ne sont qu'un petit nombre à assurer la majeure partie des exportations. C'est un investissement considérable, et c'est la raison pour laquelle, quand on cherche à élaborer une politique pour aider ces entreprises, il faut surtout les aider à nouer des relations.

Par où faut-il commencer? Comme je l'ai dit, une bonne façon d'y parvenir est de s'arrimer à une autre petite entreprise qui est déjà implantée sur un marché à croissance rapide, mais qui a besoin de se démarquer, ou encore de s'arrimer à une entreprise américaine ou à une multinationale implantée sur un marché à croissance rapide, en s'intégrant dans sa chaîne d'approvisionnement. Une autre solution est de participer à des conseils commerciaux comme le Conseil commercial Canada-Chine. Il existe plusieurs conseils commerciaux affiliés à cette région.

Il y a aussi le Service des délégués commerciaux et Exportation et développement Canada. Tous les services offerts par les différents paliers de gouvernement peuvent être utiles à celui qui veut s'implanter sur ces marchés.

Cependant, c'est vrai que c'est très difficile pour une petite entreprise, car il y a beaucoup de programmes différents, et on me dit que certaines petites entreprises doivent embaucher quelqu'un simplement pour les aider à trouver leur chemin dans le labyrinthe de programmes que nous avons au Canada. Il serait sans doute utile de créer une sorte de guichet unique. Il y a aussi de nouveaux mécanismes qui se mettent sur pied, comme les groupes de mentorat, dans lesquels des entreprises qui ont réussi sur ces marchés à croissance rapide conseillent les entreprises qui veulent s'y implanter. Dans certains cas, ce sont des grandes entreprises qui conseillent des petites entreprises, et ça peut être très utile. Il faut bien comprendre, comme vous l'avez souligné, que les problèmes, les défis et les ressources d'une petite entreprise sont bien différents de ceux des grandes entreprises. Il serait bon aussi que le gouvernement aide les petites entreprises qui ont réussi à s'implanter sur ces marchés à aider d'autres petites entreprises à mieux connaître ces marchés. Il est évident que c'est très difficile pour une petite entreprise, d'autant plus que nous leur offrons une vaste gamme de services, mais qu'elles ne savent pas comment en profiter. Ce qu'il faut, c'est leur simplifier la tâche le plus possible en les aidant à établir des contacts locaux.

M. Stephens : J'aimerais simplement ajouter deux points. Pour ce qui est de la capacité d'exporter des petites et moyennes entreprises, je ne travaille plus au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. J'y suis resté pendant de nombreuses années, mais ça fait quand même un certain temps que je n'y suis plus. Je suis sûr cependant qu'ils ont encore toute une série de programmes pour aider les petites et moyennes entreprises à exporter leurs produits, pour s'assurer qu'elles ont la capacité de faire le grand saut, et pour leur tenir la main, le cas échéant, dans les premiers temps de leur implantation sur le nouveau marché. Le gouvernement ne peut pas tout faire non plus. Il faut que l'entrepreneur ait un produit concurrentiel, entre autres. Il se peut aussi que ça ne soit pas seulement de l'exportation, et que ça soit une entente réciproque, quelque chose de plus vaste.

Deuxièmement, Mme Goldfarb a parlé des multinationales. Les investissements asiatiques au Canada sont de plus en plus importants, et ça représente d'excellents débouchés pour les petites et moyennes entreprises. On a récemment parlé du rachat controversé de Nexen par la CNOOC, la China National Offshore Oil Corporation. La CNOOC est en train de s'implanter dans l'hémisphère occidental, précisément à Calgary, et c'est l'une des plus grandes sociétés pétrolières au monde. Elle va traiter avec toutes sortes d'entreprises au Canada, des grandes comme des petites. Ça peut être un débouché très intéressant pour les entreprises qui occupent un créneau bien précis. Si elles réussissent à vendre leurs produits à la CNOOC, ça peut leur ouvrir d'autres marchés, simplement par affiliation. Il y a aussi Petronas, l'énergéticien malaisien, des fabricants japonais, des fabricants chinois, et cetera. Comme je le disais, l'investissement et le commerce, tout se tient.

Certaines personnes s'inquiètent de ces investissements étrangers au Canada, mais j'estime que, non seulement ils permettent d'accroître la production au Canada, mais ils offrent aussi aux exportateurs canadiens, petits et grands, la possibilité de développer leurs activités sur les marchés internationaux.

Le sénateur Nolin : J'aimerais poser une question à M. Stephens, mais n'hésitez pas, madame Goldfarb, à m'envoyer une réponse par écrit si vous le jugez nécessaire.

Monsieur Stephens, vous avez nommé quelques pays qui sont déjà des partenaires commerciaux du Canada. Vous avez cité les États-Unis et le Mexique, mais nous pouvons ajouter le Chili et le Pérou, qui participent aussi aux négociations du PTP.

Il existe des barrières au commerce et à l'investissement entre le Canada et certains de ces pays. Pensez-vous que le PTP va contribuer à lever ces barrières?

M. Stephens : Je l'espère bien, sinon, ça ne servirait à rien. Ce sont des négociations extrêmement complexes, et, pour beaucoup de pays du PTP, l'objectif ultime est d'obtenir un meilleur accès au marché américain, ce que nous avons déjà. Si vous prenez l'exemple de Singapour, de l'Australie, du Chili et du Pérou, on sait qu'ils ont déjà des accords de libre-échange avec les États-Unis. Comme vous l'avez dit, nous avons aussi des accords de libre-échange avec certains de ces partenaires. Il devient donc très difficile d'harmoniser tous les accords qui sont en vigueur.

En fait, c'est l'une des principales difficultés des exportateurs. À l'heure actuelle, vous avez un véritable « plat de nouilles » d'accords commerciaux. Quand vous avez des composantes de produits qui viennent de différents pays, quelles règles d'origine doit-on alors appliquer? L'un des objectifs du PTP, et d'autres négociations, est de simplifier tout cela et de trouver une norme commune, pour que celui qui veut exporter dans un pays du groupe sache à quoi s'en tenir et qu'il ne soit pas obligé de faire toutes sortes de contorsions pour y parvenir.

Encore une fois, je ne suis pas dans le secret des négociations. Elles ont été prolongées, et elles se compliquent au fur et à mesure que de nouveaux pays se joignent au groupe, comme ça a été le cas du Japon et, plus récemment, du Canada et du Mexique. En tout cas, il faut l'espérer, car l'objectif officiel est de parvenir à un accord moderne, de haut niveau, qui portera sur les barrières à l'investissement, les problèmes de propriété intellectuelle, les marchés publics et ce qu'on appelle les entraves appliquées derrière la frontière. Les tarifs douaniers, c'est la partie la plus facile. Une fois que votre produit arrive sur le marché, comment faire pour l'acheminer au client sans se heurter à toutes sortes d'entraves intérieures au pays?

Si on parvient à régler ces questions-là, ce sera un grand pas en avant, mais, bien sûr, tout ne sera pas réglé puisque que le groupe ne comprend que 12 pays. Il faudra bien qu'un jour, tout au moins je l'espère, toutes les organisations commerciales s'entendent sur un système uniforme.

Le sénateur Nolin : Madame Goldfarb, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Goldfarb : Pour l'essentiel, je suis d'accord avec M. Stephens. Les tarifs douaniers ne sont pas le seul problème à régler. Dans le passé, les négociations commerciales mondiales et régionales portaient sur des secteurs plus limités. L'objectif, ici, est de lever des barrières moins visibles comme la réglementation et les obstacles à la circulation des personnes, et d'autres entraves à l'investissement, aux services et au commerce. Ce qui est important, c'est que si cet accord aboutit — et il ne faut pas se cacher que la tâche est extrêmement difficile —, il va servir de référence aux autres groupes de négociation. C'est la raison pour laquelle les gens suivent de près l'évolution de cette négociation.

Le sénateur Nolin : Je vous remercie, monsieur Stephens, d'avoir employé l'expression « plat de nouilles », car nous pourrions peut-être l'utiliser dans le titre de notre rapport.

La présidente : Je crois que cette expression appartient à quelqu'un d'autre, il nous faudra donc en trouver une autre.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Ma question s'adresse à Mme Goldfarb.

Vous avez cité certains marchés dans plusieurs domaines, et vous avez parlé de ne pas sous-estimer les autres marchés. Vous avez mentionné que, en Inde, le marché de l'industrie automobile était ouvert. Quand nous avons fait notre rapport sur la Chine, nous avons vu que quand une industrie automobile veut pénétrer un marché, elle commence par ouvrir des usines de fabrication — par exemple, on a vu une usine de Toyota, une autre de Honda et bien d'autres. Nous, au Canada, nous fabriquons seulement quelques modèles de voitures américaines.

Selon vous, est-ce que l'Inde a de l'intérêt pour la fabrication de voitures au Canada, ou serait-elle plus intéressée à nous exporter ses Tata — les voitures indiennes?

[Traduction]

Mme Goldfarb : Nous avons fait récemment une étude sur le marché indien, qui est intitulée Hottest Prospects for Canadian Companies in India. L'Inde n'est pas un grand pays exportateur, de façon générale; en fait, elle importe surtout de l'énergie et des biens.

Vous me demandez ce que l'Inde peut importer du Canada et, inversement, ce qu'elle peut exporter au Canada. Nous avons constaté, dans notre étude, qu'elle commençait à importer beaucoup de pièces détachées. Comme vous l'avez fait remarquer, une grande partie des investissements destinés à ce marché se retrouvent dans l'industrie automobile de ce pays. Je pense que ce secteur présente un vaste potentiel pour le Canada, pour y vendre, pas nécessairement des voitures complètes, mais certainement beaucoup de produits et d'expertise liés à ce secteur.

Par exemple, il y a un équipementier canadien qui vend des silencieux en plastique, qui réduisent le poids de la voiture et réduisent de ce fait la consommation d'énergie. Quand il s'est aperçu que les affaires de ses clients américains commençaient à ralentir, il s'est intéressé au marché indien, il y est allé et, aujourd'hui, il vend son produit aux fabricants indiens. En Inde, la demande est forte pour tout ce qui est éconergétique, et c'est une industrie en plein essor.

Nous devons réfléchir aux moyens de démultiplier notre expertise automobile, car je ne pense pas que nous devrions nous contenter d'importer des voitures. Il faut déterminer au départ dans quels secteurs nous avons de l'expertise, quel créneau on peut occuper dans la chaîne de valeur, à quel niveau de prix nous pouvons être concurrentiels sur ce marché, et où se trouve la poche d'ouverture à exploiter. Comme je l'ai dit, ce marché est très ouvert aux produits écologiques, et l'équipementier qui vend des accessoires permettant de réduire la consommation d'énergie a de meilleures chances de réussir sur ce marché. On peut bien sûr inventorier les points forts du Canada, mais je pense qu'il vaut mieux inventorier les besoins de l'Inde, de la Chine, du Brésil ou des autres pays. Dans quels secteurs sont-ils prêts à accepter notre expertise et nos produits, et dans quels secteurs pouvons-nous être un chef de file mondial pour certains produits et certains services? Nous devons chercher à savoir quels sont les besoins de ces pays et comment nous pouvons y répondre à partir des capacités que nous avons acquises sur ces nouveaux marchés et que nous n'avons pas pleinement utilisées jusqu'à présent.

[Français]

La sénatrice Fortin-Duplessis : Madame, je vous remercie car mon impression était que vous recommandiez d'exporter des voitures, mais vous n'aviez pas précisé qu'il pouvait s'agir de pièces. Alors merci beaucoup de nous avoir éclairés à ce sujet et d'avoir été très explicite.

[Traduction]

Mme Goldfarb : Veuillez m'excuser de ne pas avoir été suffisamment claire au départ.

La présidente : Merci. Je n'ai plus de noms sur ma liste, et c'est l'heure de mettre un terme à cette réunion. Je tiens à remercier Mme Goldfarb et M. Stephens d'avoir témoigné aujourd'hui. Comme vous l'avez constaté, notre mandat est très vaste. Il englobe un grand nombre de pays, et nous voulions entendre des témoins capables de faire le point sur cette région du monde, pour que nous puissions éventuellement recommander de nouvelles politiques. Votre témoignage a été très instructif, et je vous invite à réfléchir à la valeur ajoutée, comme vous dites, que notre comité pourrait apporter au débat sur l'Asie-Pacifique et sur notre politique étrangère dans cette région. Si vous avez des idées, n'hésitez pas à nous les communiquer. Au nom du comité, je vous remercie vivement d'avoir comparu ce matin.

M. Stephens : Merci de m'avoir invité.

Mme Goldfarb : Merci beaucoup.

La présidente : Chers collègues, j'ai deux annonces à faire. Premièrement, nous n'aurons pas de réunion mercredi; vous pouvez donc prendre d'autres engagements ou assister à un autre comité. Deuxièmement, j'aimerais vous rappeler que c'est le 6 juin, une date qui semble convenir à tous, que nous nous retrouverons, après notre réunion du comité, à midi, pour déjeuner avec notre collègue. Sur cette excellente nouvelle, je lève la séance.

(La séance est levée.)


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