Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule 24 -Témoignages du 25 octobre 2012
OTTAWA, le jeudi 25 octobre 2012
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 3, pour examiner, afin d'en faire rapport, les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole (sujets : rôle des droits de propriété intellectuelle pour l'innovation en agriculture; et l'innovation dans le système agricole et agroalimentaire de la perspective des producteurs agricoles).
Le sénateur Percy Mockler (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour et merci d'être parmi nous ce matin. Nous avons l'occasion de discuter avec un groupe d'experts composé de quatre témoins.
Au nom du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation à nous faire part de votre vision, de votre opinion et de vos recommandations qui nous permettront d'étudier l'innovation dans le secteur agricole pour l'avenir. Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. On nous a confié le mandat d'étudier l'innovation.
Je m'appelle Percy Mockler. Je suis président du comité et sénateur du Nouveau-Brunswick. J'aimerais d'abord permettre aux sénateurs de se présenter aux témoins.
[Français]
Le sénateur Robichaud : Fernand Robichaud, Saint-Louis-de-Kent, Nouveau-Brunswick. Bonjour.
[Traduction]
Le sénateur Mahovlich : Frank Mahovlich, de l'Ontario.
Le sénateur Plett : Don Plett, du Manitoba.
Le sénateur Buth : Bonjour, je suis JoAnne Buth, du Manitoba.
Le sénateur White : Vern White, de l'Ontario.
[Français]
Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, Québec.
[Traduction]
Le sénateur Braley : David Braley, de l'Ontario.
Le président : Je vous remercie.
Notre comité poursuit son étude sur les efforts de recherche et d'innovation dans le secteur agricole. Le Sénat du Canada a saisi le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts du mandat d'étudier le développement de nouveaux marchés aux niveaux national et international, le renforcement de la viabilité agricole et l'amélioration de la diversité, de la sécurité, de la salubrité et de l'innovation alimentaires.
Honorables sénateurs, le premier panel de ce matin est composé ainsi : Ed Levy, professeur adjoint, Propriété intellectuelle et Groupe de recherche en politiques de l'Université de la Colombie-Britannique; Emily Marden, chercheuse associée et chargée de cours, Propriété intellectuelle et Groupe de recherche en politiques, également de l'Université de la Colombie-Britannique; Andrew Casey, président et directeur général de BIOTECanada; et Steven Fabijanski, président et directeur général d'Agrisoma Biosciences Inc.
Le greffier m'a informé que les premiers à prendre la parole seront MM. Casey et Fabijanski, suivis de M. Levy.
[Français]
Andrew Casey, président et directeur général, BIOTECCanada : Je vous remercie, monsieur le président, honorables sénateurs, c'est toujours un grand plaisir pour moi d'être parmi vous pour témoigner.
[Traduction]
Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter un exposé dans le cadre de votre étude. Je m'appelle Andrew Casey et je suis le président et directeur général de BIOTECanada. BIOTECanada est l'association commerciale nationale et la porte-parole du secteur de la biotechnologie au Canada. Nous comptons environ 250 membres partout au pays et nous représentons trois secteurs. Le secteur biopharmaceutique est sans aucun doute un volet très bien connu de notre industrie, mais beaucoup de nos membres viennent aussi de secteurs agricoles et industriels.
Je suis accompagné d'un représentant d'une de nos compagnies membres, M. Steve Fabijanski, d'Agrisoma. Je vais lui allouer une bonne partie de mon temps puisque je crois que son témoignage sera extrêmement utile au comité dans le cadre de son étude.
Je me suis joint à BIOTECanada il y a seulement trois mois, alors vous avez peut-être l'impression de m'avoir déjà vu. Auparavant, j'ai passé huit ans au sein de l'Association des produits forestiers du Canada. C'est en cette qualité que je me suis familiarisé avec votre comité et le travail que vous entreprenez. Vous avez réalisé une étude considérable du secteur. Je suis très au fait des répercussions constructives et positives que votre étude a eues sur l'industrie et, cela va de soi, sur les politiques gouvernementales. C'est pour cette raison que, alors que j'entame mon nouveau mandat au sein de BIOTECanada, je suis ravi que vous ayez lancé votre étude sur ce sujet précis qui touche mes membres.
Je vais vous présenter une perspective générale avant de vous en donner une plus spécifique, puis je donnerai la parole à mon collègue, M. Fabijanski.
Le défi à relever va croissant. La croissance démographique devrait fixer la population mondiale à 8 milliards de personnes au cours des 10 prochaines années et possiblement à 9 milliards de personnes d'ici 2050. Puisque vous avez étudié le secteur des produits forestiers, vous savez que ce phénomène exerce d'énormes pressions sur notre planète sur le plan environnemental et industriel. Comment allons-nous vivre dans cet environnement en évolution? Des pressions sont exercées sur notre santé. Nous devons trouver le moyen de relever ces défis en vivant différemment, intelligemment et de façon plus efficace.
Je commence à me rendre compte, entre autres choses, que notre secteur, et ses trois volets, offre des solutions pour résoudre certains de ces problèmes. Nous aidons les gens à vivre de façon plus saine. Par exemple, nous venons en aide aux industries qui font pousser des cultures pour répondre à la demande croissante en aliments. Nous produisons des cultures plus saines, et ce, plus rapidement. Elles sont moins vulnérables aux sécheresses et aux parasites, et nous y ajoutons également de nutriments.
Par ailleurs, nous faisons bouger les choses rapidement au sein des industries alors que nous essayons de trouver des moyens de pallier la demande croissante en énergie partout dans le monde. C'est une période stimulante pour notre secteur.
Mes membres représentent un vaste éventail de compagnies. Certaines sont de grandes entreprises bien établies du secteur de la biopharmaceutique mais aussi des secteurs industriels et agricoles, alors que d'autres sont des compagnies émergentes. Nombre d'entre elles sont le résultat des idées excellentes que des gens ont eues et qui sont étudiées en laboratoire. Beaucoup de ces idées sont étudiées dans des laboratoires partagés avec les universités. Quand on examine les autres pays qui appuient leurs secteurs biotechnologiques, on se rend compte qu'il faut se pencher sur les aspects importants que constituent la protection des brevets et la propriété intellectuelle. C'est pour cette raison que nous nous réjouissons du sujet de votre étude.
Lorsque ces idées quittent le laboratoire pour être commercialisées, il faut à tout prix amasser des capitaux, et l'accès aux capitaux est tout à fait essentiel. C'est en offrant des conditions d'accueil ou un solide cadre de politiques dans le pays où ces idées sont élaborées qu'on peut garantir l'accès aux capitaux. C'est pour cette raison que nous saluons cette étude et que nous sommes heureux d'y participer.
Vous allez entendre le témoignage de notre expert en brevets un peu plus tard, mais M. Fabijanski va aussi vous expliquer en détail comment il a concrétisé une excellente idée; il vous parlera aussi du potentiel que représente cette idée pour notre secteur et notre pays.
Sur ce, je vous remercie de nouveau et je serai heureux de répondre à vos questions. Je donne maintenant la parole à mon collègue, M. Fabijanski.
Steven Fabijanski, président et directeur général, Agrisoma Biosciences Inc. : Merci de me donner l'occasion de m'adresser à votre comité. Agrisoma Biosciences est une compagnie qui bénéficie de l'environnement agricole canadien unique. Nous avons mis au point et commercialisé de nouvelles cultures qui offrent des solutions énergétiques et des possibilités accrues aux agriculteurs canadiens. Notre compagnie est canadienne. Nous misons sur la réputation remarquable du Canada quant à son expertise en oléagineuses et nous avons commercialisé une culture qui produit ce que nous appelons de l'huile renouvelable. Il ne s'agit pas d'une huile comestible, mais plutôt d'une huile pouvant remplacer le pétrole tout en répondant aux demandes environnementales en évolution et, comme M. Casey l'a mentionné, en étant une solution pour le transport écoénergétique.
De plus, la production de ces nouvelles cultures cible des régions de terres peu productives et a recours à des techniques entraînant peu de répercussions et présentant une faible empreinte écologique. Notre compagnie offre de nouvelles sources de revenu aux agriculteurs canadiens et de nouvelles possibilités de marchés d'exportation. Notre but était de nous souder à la communauté agricole canadienne unique caractérisée par son grand caractère novateur. Nous voulons travailler avec les agriculteurs canadiens pour réaliser des étapes importantes pour la croissance future de l'agriculture. Nous croyons pouvoir trouver de nouvelles sources de revenu sans perturber la production de denrées alimentaires.
Notre compagnie a été créée en 2001. Nous avons été confrontés à de nombreux défis que nous avons surmontés, faisant de nous, à mon avis, la plus grande compagnie canadienne complètement axée sur la biotechnologie agricole du Canada. Bien que nous soyons de petite taille en comparaison aux multinationales, nous comptons 15 scientifiques professionnels à Saskatoon et 5 cadres supérieurs partout au pays qui travaillent avec les secteurs.
Nous avons pu bénéficier de l'appui d'organismes canadiens tels que Technologie du développement durable du Canada, Agriculture et Agroalimentaire Canada, le Conseil national de recherches ainsi que d'autres organisations fédérales et provinciales qui nous sont venues en aide au cours de la dernière décennie. Nous tenons à créer une nouvelle source d'énergie pour le transport commercial, soit de l'énergie propre et durable qui puisse être cultivée sur des terres agricoles et intégrée à notre secteur du transport commercial, ce qui permettra à notre secteur du transport de passer au vert.
Nous nous servons de notre technologie pour cultiver de l'huile pouvant être utilisée en aviation commerciale. Notre technologie visant à améliorer les cultures à cet égard sert aussi à créer de nouvelles cultures comme de nouvelles variétés de canola qui contiennent de l'huile de plus grande qualité et génèrent ainsi des recettes supplémentaires pour les agriculteurs.
Nous cherchons à commercialiser des produits pouvant être cultivés à grande échelle afin que des agriculteurs dans de nombreuses régions puissent en tirer profit. Nous allions agriculture, énergie et aviation dans une nouvelle chaîne de valeur qui rapporte au Canada.
Notre compagnie est de plus en plus perçue comme étant novatrice non seulement au Canada, mais aussi chez nos voisins du Sud et dans des pays à l'étranger. Nous sommes la seule compagnie au monde qui a été en mesure de démontrer une chaîne de valeur capable de produire du combustible non pétrolier pour moteur à réaction qui est utilisé pour le premier vol d'un avion civil à réaction au monde. Cet événement aura lieu lundi, ici à Ottawa, au laboratoire de recherche en vol du Conseil national de recherches. Il s'agira de la première fois dans l'histoire de l'aviation qu'un vol d'un avion à réaction sera rendu possible sans avoir recours au carburant fossile.
Ce processus a commencé par la culture de la semence à Frontier, en Saskatchewan, pour produire un carburant certifié qui servira lors du vol de lundi. Nous avons géré la totalité de la chaîne de valeur. Nous sommes la seule compagnie et le seul pays au monde qui a réalisé cet exploit.
Nous croyons tout simplement que cette invention démontre ce que l'agriculture peut faire et dans quelle mesure ces innovations agricoles peuvent gagner du terrain et résoudre de nombreux problèmes sociaux. Pour ce faire, il faut absolument avoir recours à des techniques novatrices et appliquer des solutions rapidement. Selon nous, la biotechnologie ne se résume pas à la technologie; la biotechnologie doit être en mesure d'offrir des solutions concrètes à la société.
Ainsi, voici ce que nous prévoyons offrir aux agriculteurs canadiens : une diversification des revenus, soit l'occasion de cultiver de nouvelles cultures commerciales dans des régions où c'est présentement impossible de le faire. Nous allons faire en sorte d'avoir des économies rurales renforcées grâce à de nouvelles activités économiques associées à la production de ces nouvelles cultures énergétiques ainsi qu'à la collecte, la transformation et une possible distribution. Nous allons permettre aux agriculteurs de faire un meilleur usage des ressources terriennes, de capter le carbone, de remettre les sols en état et d'exploiter des terres qui ne produisent pas de denrées alimentaires à l'heure actuelle. Ces nouveaux produits nous permettront de tirer des avantages durables en matière de gaz à effet de serre.
Afin de connaître du succès, tout le secteur doit travailler avec le gouvernement et avoir l'appui de celui-ci. Nous ne demandons pas nécessairement d'avoir droit à du financement ou à des faveurs spéciales. Nous avons besoin d'aide dans deux grands domaines stratégiques. Tout d'abord, il faut stimuler les investissements du secteur privé dans le secteur agricole canadien et créer des mécanismes pour attirer les investissements privés. Technologie du développement durable du Canada constitue un outil qui nous a rapporté, et je crois qu'il s'agit d'un bon modèle pour l'avenir.
Nous voulons aussi des politiques réglementaires rationnelles pour permettre la commercialisation de nouveaux produits agricoles. Ce processus réglementaire doit se dérouler de façon rationnelle et bien définie afin de donner l'assurance qui nous permettra d'attirer des investissements dans notre secteur. Nous avons aussi besoin d'une politique pour favoriser l'introduction de ces nouvelles cultures industrielles dans le système agricole et pour favoriser leur appui afin que les agriculteurs et les économies locales puissent en tirer profit.
L'absence de politiques clairement définies multiplie les risques associés à notre secteur, de sorte que les investisseurs privés sont face à des investissements moins risqués. En agriculture, le risque technique associé à nos produits est assez faible. Nos produits fonctionnent bien et profitent grandement aux agriculteurs. Le problème est toujours de savoir si nous avons une solide politique réglementaire qui favorise les investissements et permet de commercialiser ces politiques.
Présentement, les technologies agricoles occupent plus de 2,5 milliards d'acres de terre réservées aux cultures partout dans le monde; cela démontre bien que ces technologies sont éprouvées. Elles sont sécuritaires, efficaces et très rentables pour les agriculteurs et les consommateurs. Nous aimerions donc avoir l'appui d'une politique gouvernementale efficace pour intégrer davantage de ces innovations dans l'agriculture et pour favoriser un développement plus important du secteur agricole.
Bref, la biotechnologie offre les avantages suivants à l'agriculture : nous croyons que nous pouvons ajouter une nouvelle valeur à la ferme grâce à de nouveaux avantages économiques et à une diversification des sources de revenu qui est essentielle pour l'économie agricole. Nous pouvons offrir des produits diversifiés, notamment des aliments plus sains, comme le secteur du canola l'a clairement démontré, ainsi que des solutions en matière d'énergie. À l'avenir, l'agriculture pourra offrir à la société des solutions en matière énergétique. Nous pouvons offrir des solutions pour l'environnement, créer un environnement plus propre et permettre la séquestration du carbone dans le sol : il s'agit là d'autant de solutions pour réduire considérablement les gaz à effet de serre et régler les problèmes mondiaux de prix des aliments et d'approvisionnement. Grâce à la diversification des sources de revenu et au renforcement du système agricole, nous pourrons continuer à produire des aliments de grande qualité à des prix abordables.
Merci de votre temps.
Emily Marden, chercheuse associée et chargée de cours, Propriété intellectuelle et Groupe de recherche en politiques, Université de la Colombie-Britannique : C'est un honneur pour M. Levy et moi d'être invités à nous adresser au Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. En guise d'introduction, le Groupe de recherche sur la propriété intellectuelle et les politiques, que nous avons cofondé, est rattaché à la faculté de droit de l'Université de la Colombie- Britannique à Vancouver. C'est un groupe interdisciplinaire qui s'intéresse aux différents régimes de réglementation et de propriété intellectuelle relatifs à la génomique, ainsi qu'aux conséquences de ces régimes.
Depuis sa création en 2006, le groupe a participé à quatre projets financés par Génome Canada et publié des articles sur différents sujets, comme les licences libres, les communautés de brevets, la propriété intellectuelle et la complexité de la réglementation suscitée par les innovations en génomique agricole. Notre projet actuel s'inscrit dans le cadre d'une vaste étude menée à l'Université de la Colombie-Britannique sur la génomique des tournesols qui, entre autres choses, vise le séquençage du génome des tournesols dans le but d'améliorer cette grande famille de plantes. Ainsi, bien que bon nombre de nos exemples actuels concernent les tournesols, nos analyses et conclusions ont des applications très larges.
Je suis associée de recherche et professeure à la faculté de droit de l'Université de la Colombie-Britannique, où je donne entre autres le cours de droit des biotechnologies. J'ai longtemps pratiqué le droit comme avocate au sein d'un cabinet et comme avocate-conseil pour des sociétés biopharmaceutiques.
Ed Levy a enseigné la philosophie des sciences à l'UBC, puis s'est joint à QLT Inc., une compagnie de biotechnologie à Vancouver où il a occupé le poste de vice-président principal, Expansion de l'entreprise, jusqu'en 2002. Il est aujourd'hui professeur auxiliaire au Centre d'éthique appliquée de l'UBC.
Dans le cadre de notre présentation, nous formulerons quelques remarques sur l'importance d'un équilibre entre, d'une part, les approches axées sur les droits de propriété et, d'autre part, celles axées sur la maximisation du partage pour stimuler l'innovation aux premières étapes de la recherche agricole.
Nous présenterons en outre nos observations sur la nécessité de considérer les régimes de réglementation et de propriété intellectuelle comme « complexe » puis, finalement, sur l'importance de fixer des attentes raisonnables en ce qui concerne les perspectives de commercialisation de la recherche et du développement.
À la lumière de nos travaux, nous croyons que l'importance des droits de propriété intellectuelle est indéniable, mais qu'il devrait y avoir un équilibre entre ces droits et le partage des ressources. En outre, cet équilibre dépend à notre avis du milieu concerné et de l'imminence ou non de la commercialisation d'un projet. Nous avons, par exemple, constaté que le fait d'intégrer les connaissances recueillies au domaine public — soit l'absence de propriété intellectuelle — peut se traduire par un degré élevé d'innovations dans un petit milieu de recherche régi par des normes communes.
Parallèlement à ce constat, nous avons par ailleurs démontré que les mécanismes de partage novateurs comme les « sources ouvertes », qui permettent le droit de propriété tout en obligeant le libre partage des travaux de base, peuvent ne pas offrir d'incitatifs suffisants ou le transfert de connaissances suffisamment fiables pour permettre la mise au point de produits de soins de santé commerciaux. Nous sommes heureux de commenter plus abondamment cette question, puisque la « source ouverte » est souvent vue comme un mécanisme permettant de faciliter l'innovation dans les sciences de la vie, de la même manière que ce qui se produit dans le secteur des technologies de l'information.
En ce qui concerne la recherche en agriculture, nous sommes d'avis qu'un meilleur équilibre doit être visé au Canada entre les droits de propriété — qu'ils découlent des obtentions végétales ou du droit des brevets — et le partage dynamique des résultats de la recherche fondamentale. Plus précisément, nous estimons que les gouvernements devraient accorder plus d'attention et de soutien aux mécanismes ayant pour but de faciliter le partage des données de recherche au moment opportun dans le continuum de l'innovation.
Quel est donc ce moment opportun? S'il n'existe aucune règle précise à ce sujet, nous croyons néanmoins que, pour favoriser l'innovation, les données de recherche doivent demeurer accessibles aux stades les plus avancés possible de ce continuum, mais sans qu'il y ait d'impacts négatifs sur l'investissement ou la commercialisation. Il existe de nombreux exemples de cas où des intervenants ont reconnu cette réalité. On sait par exemple que des chercheurs de milieux industriel et universitaire travaillant sur Arabidopsis ont joint leurs efforts afin de créer un consortium pour permettre le partage des données de séquençage et des avancées issues de la recherche industrielle.
La partie représentant l'industrie, Cereon en l'occurrence, s'était au départ opposée à l'idée du partage : puisqu'aucun mécanisme juridique solide n'était prévu, elle craignait de perdre ses droits de propriété. Cependant, après de longues discussions, les parties ont convenu qu'un accès accru pour tous favoriserait l'innovation. Une ressource de recherche commune ne nécessitant pas de mécanismes juridiques solides a finalement été mise sur pied.
À notre avis, c'est au début du continuum d'innovation que le libre partage est le plus important. Par conséquent, nous croyons qu'il faut accroître les politiques de données en génomique agricole. Nous savons que le gouvernement du Canada consacre actuellement des millions de dollars à la réalisation de recherches de haute qualité en génomique agricole. L'immense quantité de données qui en découlent peut servir de nombreuses manières à comprendre, à manipuler et à mettre au point de nouveaux produits agricoles. À l'heure actuelle, le gouvernement subventionne la production de données et en rend souvent leur partage obligatoire. Toutefois, les subventions ne soutiennent généralement pas le partage et ne fournissent ni mécanismes ni programmes à cet égard.
Certaines communautés ont toutefois trouvé des façons de contourner ce problème en créant des consortiums ou en imposant des frais à quiconque souhaite accéder aux données. Dans le secteur qui nous occupe, par exemple, les chercheurs universitaires travaillant sur des tournesols ont formé un consortium dans lequel les partenaires de l'industrie qui s'intéressent aux recherches contribuent au partage des données issues du projet. Cette façon de faire ne garantit toutefois pas que les données demeureront disponibles au terme de la période visée par la subvention.
Nous savons que la plupart des organismes subventionnaires obligent le partage des données de recherche à l'intérieur de délais donnés, sauf qu'en réalité, le partage n'a pas toujours lieu.
Nous sommes également conscients du fait que les chercheurs ou l'industrie peuvent disposer d'information ou faire des découvertes pouvant faire l'objet de droits exclusifs, ce qui doit bien sûr être pris en considération. Si nous considérons les approches de source ouverte qui assurent la disponibilité générale de codes sources sous-jacents, nous nous demandons si l'obligation de garantir la disponibilité continue — pour tout autre usager intéressé — des données et du matériel de départ ne devrait pas être concomitante aux droits exclusifs.
Nous nous employons actuellement à établir une collaboration avec des chercheurs de l'organisation Bioversity, à Rome, et du Fonds fiduciaire mondial pour la diversité des cultures, à Bonn, dans le but de déterminer si les dépôts de germoplasme (c'est-à-dire les banques de semences) existants peuvent servir à faciliter le partage de données. Le Canada, par exemple, dispose du centre Ressources phytogénétiques du Canada, à Saskatoon, qui a conclu un traité international sur le partage des ressources phytogénétiques.
Nous encourageons le comité à se pencher sur les moyens de faire en sorte que le partage fasse partie intégrante du régime de propriété intellectuelle du Canada afin de maximiser l'innovation.
Avant de conclure, nous souhaitons aborder brièvement deux autres points touchant à l'innovation en agriculture. Le premier point concerne la complexité de la propriété intellectuelle et de la réglementation et l'impossibilité de « régler » l'une ou l'autre de ces questions indépendamment de l'autre. Je sais que le comité a grandement entendu parler de cette question.
En général, la réglementation sur la biosécurité (par exemple, la réglementation de végétaux à caractères nouveaux) et la propriété intellectuelle sont considérées comme deux éléments distincts. Toutefois, dans les faits, la propriété collective et les mécanismes de biosécurité se répercutent conjointement sur les incitatifs et résultats potentiels en génomique agricole. Si on tente de modifier l'un de ces deux éléments afin d'améliorer l'innovation, il faut nécessairement tenir compte du second élément.
Ainsi, nous avons vu des cas où une équipe de recherche développe une nouvelle caractéristique agricole pouvant faire l'objet de droits exclusifs mais qui, compte tenu des exigences réglementaires applicables, décide plutôt d'offrir cette innovation à une ressource publique à l'extérieur du Canada.
Enfin, nous commenterons la question des réalités de l'accès à la commercialisation, M. Levy vous en parlera.
Ed Levy, professeur adjoint, Propriété intellectuelle et Groupe de recherche en politiques, Université de la Colombie- Britannique : Enfin, nous commenterons brièvement la question des réalités de l'accès à la commercialisation.
Nous croyons que les efforts des gouvernements pour promouvoir la commercialisation et le transfert de l'innovation reflètent souvent des attentes irréalistes concernant l'ampleur et le moment du rendement des investissements. À titre d'exemple, dans la foulée de l'adoption de la Bayh-Dole Act aux États-Unis, en 1980, les universités canadiennes ont établi des bureaux de transfert de la technologie (BTT) sur leurs campus afin de tirer profit de la « valeur » inhérente aux résultats de recherche. Conséquence? Trente ans plus tard, les recettes découlant de la mise sous licence de résultats de recherche demeurent peu importantes en comparaison des fonds affectés à la recherche. Par exemple, pour 60 p. 100 des universités américaines, les bénéfices des activités de mise sous licence ne couvrent pas les coûts de leurs BTT.
Les attentes des organismes de financement de la recherche semblent également être très élevées. Par exemple, Génome C.-B., un des centres régionaux de Génome Canada, a prescrit, pour chacun des projets financés, la création d'un comité consultatif sur les affaires chargées d'orienter la commercialisation des résultats. Ces comités ont finalement été dissous ou ont sombré dans l'oubli quand les réalités du processus de développement sont apparues clairement.
Nos exemples ne visent pas à soutenir que les efforts de commercialisation des BTT de Génome Canada ou Génome Colombie-Britannique ont échoué. Et nous ne prétendons pas être des spécialistes de la mesure du rendement. Ce que nous souhaitons, c'est de communiquer notre conviction, née de nos recherches et de notre expérience pratique dans le domaine des biotechnologies, que la situation actuelle est attribuable au fait que les lois applicables au financement de la recherche tiennent trop peu compte de la complexité des processus de transfert et de commercialisation dans les domaines axés sur la recherche, comme la biotechnologie. Nous croyons que nos exemples peuvent offrir des leçons utiles en ce qui concerne tout nouveau programme de financement ou stimulus visant l'innovation dans les domaines de l'agriculture et des forêts sur lequel pourrait se pencher le comité.
Nous remercions le comité de son invitation et serons heureux de discuter plus en détail des questions abordées dans notre exposé.
Le sénateur Buth : Merci beaucoup d'être ici. Nous avons entendu un assez bon nombre de témoins parler des difficultés de passer du laboratoire à la commercialisation. Voilà en partie pourquoi vous êtes ici, pour nous aider à comprendre ce que pourrait faire le gouvernement pour faciliter cela.
Monsieur Fabijanski, vous avez présenté des exemples concrets de la façon dont vous avez réussi à le faire. Pourriez- vous nous dire ce que nous pourrions faire de plus afin qu'il y ait plus de produits novateurs qui arrivent sur le marché au Canada?
Voici la même question sous un angle différent : vous avez parlé de certains des mécanismes que vous avez qui pourraient fonctionner, mais je ne vois pas de recommandations claires pour nous. Que devrait faire notre comité? Que devrait faire le gouvernement?
M. Fabijanski : Je peux seulement parler de notre expérience relativement à la commercialisation de nouveaux oléagineux. Je suis certain que vous connaissez certaines des difficultés qui sont liées à cela.
Je voulais souligner que notre succès est largement fondé sur des investissements passés du gouvernement du Canada dans la recherche sur les oléagineux, qui a débuté au milieu des années 1970, je dirais lorsque le canola a été mis au point. Cette culture que nous avons commercialisée vient en fait d'un programme d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Nous avons assumé la responsabilité de ce programme et avons commercialisé le canola avec l'aide du gouvernement.
Il y a de nombreux exemples de ce genre d'occasions au Canada qui sont surtout limitées par les défis de passer du laboratoire à la commercialisation. Une solution unique nous a été présentée avec les enjeux environnementaux liés à l'utilisation du pétrole; alors nous pouvons examiner la situation d'une façon un peu plus vaste plutôt que de se concentrer seulement sur les aspects de la recherche et de l'agriculture. Nous sommes en mesure d'examiner les besoins de l'ensemble de la société de même que ce que cherche l'industrie, et de synthétiser le tout de façon cohérente. Cela n'a pas été facile à faire.
Présentement, 15 partenaires nous ont aidés à commercialiser les produits. Nous devons encourager les politiques qui permettent les activités multidisciplinaires. L'été dernier, nous nous sommes promenés près de Frontier, en Saskatchewan, avec des agriculteurs; et lundi, nous discuterons avec des gens qui possèdent des avions à réaction à Ottawa. Nous sommes tous liés par ce projet et cette collaboration. L'une des choses que le gouvernement devrait encourager, c'est cette collaboration multidisciplinaire qui permet d'avoir accès à de nouvelles occasions et de nouvelles choses qui ne sont pas très évidentes au départ. Si l'on creuse, on commence à trouver diverses façons dont les industries peuvent coopérer pour élaborer des solutions.
M. Casey : Il faut être reconnaissant envers le gouvernement pour l'appui qu'il a fourni à l'industrie. Il y a eu des investissements importants par le passé, dont M. Fabijanski a parlé, qui ont profité directement à son entreprise et à d'autres de notre secteur.
Pour l'avenir, Agriculture et Agroalimentaire Canada a annoncé que le comité sur la chaîne de valeur des bioproduits que le ministère est en train de créer rassemblera des entreprises qui examineront comment élaborer une stratégie pour l'industrie de la biotechnologie. Le premier accord-cadre Cultivons l'avenir et le deuxième récemment annoncé prévoient des investissements importants pour l'industrie. Tous ces programmes sont les bienvenus et aideront au développement du secteur.
Il faut éviter de cultiver quelque chose seulement à ces premières étapes parce que ça ne prend pas grand-chose pour qu'une idée s'en aille. Nous voulons trouver une façon de garder ces idées au Canada pour que la commercialisation et la création d'emplois aient lieu ici. C'est là qu'entrent en jeu les choses comme la propriété intellectuelle qui doit être au même niveau que les autres pays qui font en sorte qu'elle est protégée et repose sur une base solide. Il faut maximiser ces investissements pour que le capital intellectuel reste dans le pays où il a été développé.
M. Levy : Il n'y a pas une réponse simple et directe à cette question. Nous essayons de rappeler au comité que lorsque de nouvelles structures et de nouveaux accords de financement sont mis en place, il est important de tenir compte de ce que font les bureaux de transfert de la technologie partout au Canada et en Amérique du Nord. Les mesures classiques du succès, comme le rendement des investissements par les redevances, le nombre d'entreprises dérivées et le nombre de brevets déposés ne constituent pas nécessairement les meilleurs indicateurs de ce que devrait être le succès. Nous ne sommes pas des experts dans la mesure du rendement, mais nous avons vu de l'intérieur qu'il y a différentes façons de mettre en place un accord de coopération. Par exemple, le bureau de liaison de l'Université de la Colombie-Britannique a élaboré des nouvelles façons de partager, comme Flintbox. Un autre facteur à prendre en considération, c'est que cela prend souvent beaucoup de temps pour mettre en place des accords de coopération. Il faut élaborer une façon de procéder plus standard.
Le sénateur Buth : J'ai une autre question pour vous tous au sujet des droits des phytogénéticiens. Que devons-nous faire au Canada?
Mme Marden : En réponse à la question que vous avez posée précédemment, je veux ajouter que l'harmonisation de certains de nos règlements sur la propriété intellectuelle avec ce qui se fait dans d'autres pays favoriserait l'innovation canadienne. Les droits des phytogénéticiens peuvent être examinés dans ce contexte. Nous avons adopté la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales de 1978, l'UPOV, qui protège les agriculteurs; et cela peut être une excellente chose. Cependant, elle ne correspond pas avec ce qui se fait dans d'autres pays. Les droits découlant des brevets ont continué d'évoluer pour les obtentions végétales aux États-Unis et dans l'Union européenne. Le Canada permet des brevets pour les obtentions végétales dans certains cas, mais d'une façon indirecte, décidés par la Cour suprême.
Pour répondre à votre question précédente, nous avons besoin d'une plus grande certitude au sujet des droits de propriété intellectuelle au Canada, tant pour le propriétaire afin que les droits découlant des brevets pour les phytogénéticiens ressemblent à ceux des autres pays que pour un solide partage que tout le monde sait qu'il s'harmonise au Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture non seulement au sujet du germoplasme, mais aussi des données.
Je ne veux pas dire que nous devrions adopter la version plus récente, celle de 1991, de la Convention de l'UPOV et changer nos droits pour les phytogénéticiens. Il faut faire une analyse économique des coûts pour les agriculteurs et des avantages pour les phytogénéticiens avant d'apporter des changements. Il faut certainement en discuter puisque la situation au Canada n'est pas nécessairement en harmonie avec celle des autres pays. Je perçois l'aspect réglementaire du même point de vue. Quelles sont les conséquences du cadre pour les obtentions végétales avec de nouvelles caractéristiques sur les phytogénéticiens lorsqu'ils se demandent ce qu'ils ont besoin de faire au Canada par rapport à ailleurs? Si les défis sont trop élevés, il faut alors être une très grande entreprise, et cela devient difficile pour les petites entreprises ou les chercheurs universitaires qui veulent présenter une nouvelle idée. Lorsqu'ils voient la réglementation et les régimes de propriété intellectuelle, ils abandonnent et donnent leurs innovations, ce que nous ne voulons pas nécessairement.
Le sénateur Buth : Est-ce qu'ils donnent leurs innovations parce qu'elles sont plus faciles à commercialiser et qu'il est plus facile d'obtenir ce dont ils ont besoin dans d'autres pays?
Mme Marden : Je parle des universitaires. Leur objectif principal n'est pas nécessairement de lancer une entreprise mais plutôt de mettre en application de grandes idées pour résoudre des problèmes. S'il y a une façon de répandre cette idée qui ne nécessitera pas 10 ans à s'arracher les cheveux pour demander une autre subvention pour faire autre chose, c'est peut-être mieux.
M. Levy : Plus précisément, le groupe de travail sur les tournesols avait comme un de ses buts de trouver un tournesol qui pourrait être utilisé comme carburant et comme aliment. Nous avons fait une étude pour voir comment répandre cette idée, mais c'était un imbroglio.
Mme Marden : Lorsque nous avons présenté les résultats, ils nous ont dit qu'ils allaient abandonner ces recherches. Ce sont des faits intéressants. Cela ne veut pas dire qu'il faut se débarrasser des cadres réglementaires car nous les avons pour une raison. Cependant, le cadre canadien est différent des autres, comme celui de l'Europe. Ce n'est pas que vous pouvez résoudre tous les problèmes, mais il est peut-être temps d'en revoir certains aspects et leurs conséquences sur l'innovation, le sujet qui vous intéresse.
Le sénateur Buth : Avez-vous d'autres observations sur les droits des phytogénéticiens?
M. Casey : Lorsque vous passez à l'étape de la commercialisation et voulez avoir accès à du capital, vous constatez que les investisseurs sont comme des voyageurs capricieux qui cherchent l'hôtel le plus confortable qui laisse un chocolat sur l'oreiller. S'il y a de l'incertitude et un manque de clarté dans un pays, l'argent s'en ira dans un autre pays où il y a une plus grande clarté. Lorsque vous en êtes à cette étape de la commercialisation, il est facile de déménager votre idée dans un autre pays et vous le ferez si vous croyez que c'est ce qui est nécessaire pour la commercialiser.
Le sénateur Buth : Monsieur Fabijanski, serait-il difficile pour vous de déménager? J'imagine que vous pourriez mettre vos choses dans un avion.
M. Fabijanski : Nous ne voudrions pas déménager parce que nous sommes intégrés à ce que nous percevons comme une expertise canadienne. Il faut que vous soyez sur un pied d'égalité avec vos autres partenaires et que vous ayez une protection suffisante contre les économies émergentes, afin qu'il y ait vraiment une situation équitable. Dans une telle situation, le Canada dominera certainement; mais si on est dans une situation désavantageuse, il faudra aussi compenser pour ce désavantage.
Le sénateur Buth : Nous avons besoin d'une émission comme celle du Dragon's Den pour la réglementation et le capital-risque en biotechnologie agricole.
Le sénateur Robichaud : Monsieur Fabijanski, vous avez transformé un genre d'huile végétale en carburant d'avion. D'où est venue la recherche et comment êtes-vous passé à travers la « vallée de la mort »? Voilà la question qu'on nous pose. C'est ce qui nous pose problème.
M. Fabijanski : La recherche tirait son origine au Canada du domaine des oléagineux et de la commercialisation à la ferme. Nous avons un accord de coopération avec deux entreprises américaines qui convertissent des huiles végétales en carburant d'aviation, alors nous avons fait cette collaboration transfrontalière. J'espère que nous sommes sortis de cette « vallée de la mort ». Cette année a été notre première sur le marché. Elle a été petite à bien des points de vue : seulement 6 700 acres de production, et l'an prochain nous en aurons au moins 50 000.
L'une des façons qui nous a permis d'y arriver, c'est notre collaboration avec un important partenaire commercial au Canada appelé Paterson Grain. Des collaborations commerciales précoces et solides avec les organisations qui partagent la même vision que vous vous permettent de passer cette étape. Dans notre secteur, je ne pense pas que personne puisse sortir de la « vallée de la mort » dont vous parlez sans un certain nombre de bons partenariats.
C'est une question de règles équitables. Si les règles sont équitables, il y a de bons partenaires qui peuvent se joindre à l'industrie agricole et aux nouvelles entreprises afin d'avoir une équipe gagnante. L'agriculture est vraiment une entreprise d'équipe qu'il faut mettre sur pied.
Le sénateur Robichaud : Vous avez dû quand même vous associer avec des partenaires américains?
M. Fabijanski : C'est exact.
Le sénateur Robichaud : Il n'y avait pas de partenaires au Canada qui auraient pu vous aider à faire ce que vous essayez de faire?
M. Fabijanski : À l'époque où nous étions prêts, il n'y avait personne au Canada qui pouvait accomplir ce dont nous avions besoin. Depuis, la situation a changé. Nous collaborons maintenant avec deux autres partenaires au Canada, mais une grande partie du processus dépend de votre rapidité. En agriculture, si vous ne pouvez pas courir, vous ne devriez même pas être là.
Nous avons dû prendre des décisions selon les meilleurs partenariats disponibles et la capacité d'agir aussi rapidement que possible.
Le sénateur Robichaud : Vous dites que la situation a changé. Il pourrait maintenant y avoir des partenaires pour ce genre d'entreprise au Canada.
M. Fabijanski : Nous avons ces partenaires et nous avons aussi des entreprises américaines qui sont intéressées à venir s'établir au Canada suite à ce que nous avons pu démontrer. La capacité unique du Canada d'offrir une agriculture d'échelle est quelque chose que les gens n'ont pas aux États-Unis. Il est intéressant de savoir que nous recevons plus d'appels de gens aux États-Unis qui disent vouloir travailler avec nous maintenant que nous avons pu lancer tout cela. Nous songeons à faire venir des gens au Canada qui créeront une entreprise ici afin de développer ce secteur.
Le sénateur Robichaud : Monsieur Casey, vous avez dit que l'on devrait encourager la PI à rester au Canada. C'est un peu une situation de « l'œuf ou la poule », n'est-ce pas? Si vous la gardez ici pour certaines choses, vous avez moins de chances de vous rendre à la commercialisation. Est-ce un obstacle?
M. Casey : Je ne suis pas certain d'être d'accord avec ce point de vue. Le capital est mondial et ira là où il obtient le meilleur rendement. Si vous mettez en place les conditions d'accueil dans un pays et qu'il semble offrir la certitude et la clarté au capital, il viendra.
M. Fabijanski a dit qu'ils ont eu des problèmes aux premières étapes, mais nous savons que le marché de capital- risque est beaucoup plus en santé aux États-Unis, ils ont peut-être un plus grand appétit pour les risques précoces. Parfois, il faut aller là-bas pour trouver des partenaires. Lorsque l'on s'approche de la commercialisation et que l'on est sorti de cette « vallée de la mort », on devient un candidat plus attrayant ici.
Vous demandez également comment sortir de cette « vallée de la mort ». Il est important de reconnaître que le gouvernement a mis en place un certain nombre de programmes qui ont aidé l'industrie à franchir cette étape. Une grande partie de cela a bénéficié à l'agriculture et à l'industrie. Les programmes ne visent pas une industrie en particulier, mais ils ont été très utiles. Nous espérons que ces programmes se poursuivront parce qu'ils mettent en place les conditions pour la croissance sans choisir des gagnants et des perdants. Il ne faut pas essayer de choisir les gagnants et les perdants. Il faut laisser le marché le décider pour nous.
Lorsque vous avez une entreprise qui connaît du succès comme celle de M. Fabijanski qui est prête et qui doit passer à la prochaine étape, ce genre de choses peut donner un coup de pouce et être utile.
Le sénateur Robichaud : Vous venez de dire que le capital viendra mais qu'il faut de la certitude et de la clarté. Ne les avons-nous pas déjà?
M. Casey : En ce qui concerne ce que l'on fait avec la propriété intellectuelle et la façon de la protéger, n'oubliez pas qu'une bonne protection de la propriété intellectuelle est un facteur très important pour attirer du capital. Je comprends le point de Mme Marden au sujet de créer une certaine dynamique de partage sur le marché, mais il faut trouver un équilibre et il faut offrir une certaine certitude. Pendant que vous y réfléchissez, n'oubliez pas où ira le capital. Il cherchera des règles équitables, comme M. Fabijanski l'a dit.
Le sénateur Robichaud : Madame Marden, vous avez dit que nous avons besoin d'une approche équilibrée, de maximiser le partage, un partage robuste, un continuum de l'innovation et un cadre juridique solide. Vous avez dit qu'il y avait du partage, mais que vous n'étiez pas certaine s'il allait se poursuivre une fois les subventions épuisées. Pourquoi avez-vous besoin d'une subvention pour partager des données?
Mme Marden : C'est un détail, mais ce que je disais, c'est que nous finançons tous ces projets de recherche en génomique. Par exemple, le séquençage et la cartographie à grande échelle des caractéristiques fournissent les matériaux de base qui permettent de travailler avec les caractéristiques, de développer de nouvelles variétés, et cetera. C'est le travail fondamental pour une grande part de l'innovation.
La génomique crée un volume énorme de données. Ces données sont très utiles pour les gens qui cherchent ces caractéristiques et qui veulent apporter des changements, mais cela coûte très cher d'héberger ces données sur des sites Web. Lorsqu'on obtient des subventions, les subventions peuvent permettre ou exiger le partage des données pendant le cycle de quatre ans des subventions, ou quelle que soit la durée, mais ne fournit pas de l'argent pour continuer à héberger les données.
Si vous parlez aux différentes équipes de recherche, elles se demandent quoi faire avec les données ensuite. Certaines formes de données, cela devient très technique, doivent être envoyées à la GenBank, mais elle n'acceptera que certaines choses. Les autres ne seront pas acceptées. C'est parfois trop dispendieux d'héberger les données ou de les publier.
Lorsque l'on regarde les détails, le partage des données se fait de toutes sortes de façons. On n'a pas besoin de subvention pour continuer à partager les données, mais lorsque la subvention se termine, il n'y a plus d'argent pour ce projet et on se retrouve avec toutes ces données mais pas de fonds pour le laboratoire ou le département qui paiera pour ces sites dispendieux d'hébergement de données. Les données peuvent littéralement être mises sur une tablette, ce qui est, du point de vue du bailleur de fonds, un genre de gaspillage parce qu'on a dépensé beaucoup d'argent pour avoir ces données.
Ce n'est rien de compliqué. Il y a des ressources qui existent, comme la GenBank que j'ai mentionnée, qui sont hébergées par différentes institutions, mais il n'y a pas de plateforme commune. C'est un problème que l'on doit résoudre. Où iront ces données et qui paiera? Il n'est pas nécessaire que ces subventions se poursuivent, mais il faut quelque chose.
La proposition à laquelle je faisais allusion, c'est que nous avons présentement des ressources pour les semences, en particulier, le germoplasme. Le Canada dispose d'une ressource nationale. La plupart des pays en ont. Il y a ces centres internationaux et nationaux créés pour le partage. Pourquoi ne pas songer à les utiliser et à en profiter? Ils ne sont pas très bien financés. Ils sont assez bien utilisés, selon ce qu'ils ont, mais on pourrait aussi en profiter pour inclure les données. Cela vaut la peine d'explorer cette possibilité pour que les avantages du financement investi dans la recherche et le développement demeurent. Voilà là où je voulais en arriver.
Est-ce que cela répond à votre question?
Le sénateur Robichaud : Oui, mais vous êtes à la recherche de fonds.
Mme Marden : Il faudra certains fonds de quelque part.
Le sénateur Robichaud : D'où devraient provenir ces fonds? De l'industrie ou du gouvernement?
Mme Marden : Il s'agira probablement d'une combinaison des deux. Au Canada, prenez le centre Ressources phytogénétiques que nous avons. La plupart des fonds viennent du gouvernement, mais je pense que le centre aurait besoin de plus de financement.
Si nous rendons disponibles plus de nouvelles données que tout le monde peut partager, de quel autre endroit peut provenir ce financement? Malheureusement, je n'ai pas de réponse directe à votre question pour l'instant. La question semble être la suivante : « Puisque tout le monde en profite, est-ce que les autres peuvent contribuer? »
Le sénateur Robichaud : Si nous avions des réponses directes à toutes les questions que nous posons, notre rapport serait simple et irait droit au but. Merci.
Le sénateur Mahovlich : Peut-être que les économies émergentes de pays comme le Brésil, la Chine et l'Inde seraient intéressées. Les a-t-on contactées; est-ce que le gouvernement peut les contacter à ce sujet? Je suis certain que ces pays seraient intéressés à investir dans quelque chose du genre.
Mme Marden : Il y a un traité international sur les ressources phytogénétiques qui a été signé par un certain nombre de pays, dont le Canada. Divers pays en développement sont très intéressés parce qu'ils peuvent obtenir du matériel de ce genre de banques de semences. Oui, ils participent. Qui finance le mécanisme en général? Le Canada a fait sa part, mais il s'agit de trouver un financement équilibré. C'est une situation sur laquelle il faut continuer de travailler, mais elle est très populaire.
Le sénateur Mahovlich : C'est difficile de partager. Dans ma carrière, j'ai eu de la difficulté à partager. Les propriétaires ne voulaient pas partager; personne ne voulait le faire. C'est très difficile.
Le président : Restons sur le sujet de l'agriculture.
M. Casey : Lorsqu'il est question du partage, vous saurez suite à votre étude sur l'industrie des produits forestiers que l'un des défis est que si vous partagez avec les pays émergents comme le Brésil, vous pourriez vous retrouver soudainement devant la situation où ils font pousser des arbres sans branches en huit ans. Tout d'un coup, ils remplacent nos entreprises.
Il faut faire attention que ces choses n'aillent pas trop loin, parce qu'au bout du compte, c'est une économie mondiale et nous sommes les concurrents directs de beaucoup de ces pays également.
[Français]
Le sénateur Maltais : Mes questions s'adressent à M. Fabijanski. Notre comité a pour objectif d'étudier l'innovation agricole. Il semble, d'après ce que vous nous dites ce matin, que ce soit une révolution dans le monde agricole. Je suis très heureux de vous avoir écouté.
À partir de quoi fabriquez-vous ce nouveau pétrole, si on peut l'appeler ainsi? À partir de quel genre de plante?
[Traduction]
M. Fabijanski : La plante que nous utilisons est un oléagineux. C'est un cousin du canola et c'est une culture qui pousse dans des conditions très difficiles dans les régions où le canola ne pousse pas. Étant donné sa ressemblance au canola, il permet aux agriculteurs d'utiliser leur équipement agricole existant pour planter, entretenir et récolter les plants.
[Français]
Le sénateur Maltais : Est-ce que ce type de pétrole peut devenir concurrentiel au pétrole traditionnel?
[Traduction]
M. Fabijanski : Notre but et celui de l'industrie est d'avoir un produit renouvelable qui est concurrentiel du point de vue économique avec le pétrole. Je pense que c'est absolument essentiel. Nous ne croyons pas que l'utilisation de subventions pour soutenir l'industrie des biocarburants est viable lorsqu'elle atteindra son plein potentiel, alors notre but est d'en arriver à ce que l'on considère comme la parité avec le pétrole.
[Français]
Le sénateur Maltais : Avez-vous des exemples d'essais que vous auriez effectués? Par exemple, on sait que les producteurs agricoles utilisent des tracteurs et d'autres types de machinerie. Avez-vous testé ce nouveau pétrole sur des terres agricoles?
[Traduction]
M. Fabijanski : Pour ce qui est d'un test pour la production de la culture, nous en sommes actuellement au niveau commercial. Cette année, nous avons fait cultiver cette plante par 40 agriculteurs dans l'Ouest du Canada. Chacun d'entre eux cultive entre un quart de section et une section, soit 160 ou 320 acres chacun. Avec notre arrangement commercial avec Paterson Grain, tout cela a été regroupé dans des terminaux céréaliers et chargé sur des trains afin d'être transformé en huile. Cette huile est envoyée aux fabricants qui produisent le carburant utilisé pour ces vols.
[Français]
Le sénateur Maltais : Au début de votre intervention, vous avez indiqué que vous faisiez des essais sur un type d'avion en particulier. Est-ce qu'il s'agit d'un prototype ou d'un avion ordinaire?
[Traduction]
M. Fabijanski : Cet avion est un Dassault Falcon 20, un avion d'affaires biréacteur. Il a été doté de différents instruments par le Conseil national de recherches. Il s'agit de son avion de recherche, mais il repose sur une plateforme qui est celle d'un avion à réaction commercial. Il possède des réacteurs conventionnels.
Il s'agit d'un avion dont on se sert dans différents types d'applications, y compris les vols en apesanteur pour former les astronautes. Il s'agit d'un jet commercial opérationnel qui se sert de ce carburant et nous avons fait du travail avec eux par le passé pour faire un mélange avec 50 p. 100 de biocarburant et de kérosène commercial, cet été. Ils ont réalisé six vols et fait des tests d'émissions qui ont montré une réduction importante des émissions associée à l'utilisation de ces carburants renouvelables.
Il s'agit de travail scientifique de collaboration, dont les résultats sont publiés dans différentes revues spécialisées, mais cela dure depuis un certain temps déjà.
[Français]
Le sénateur Maltais : C'est une véritable révolution, en ce sens que vous prenez des sols pratiquement impropres à l'agriculture et vous en faites du pétrole qui sera commercialisé. Les Verts ne pourront pas vous accuser de prendre des terres agricoles pour produire du pétrole comme ça s'est produit dans d'autres secteurs d'activités.
Est-ce que ce genre d'agriculture peut se pratiquer un peu partout au Canada ou est-ce qu'il est spécifique aux terrains que vous avez sélectionnés?
[Traduction]
M. Fabijanski : Nous voyons le potentiel pour cela dans les régions du sud des Prairies. Il y a environ 16 millions d'acres de ce que l'on appelle « la zone aride de sol brun ». On y retrouve une grande quantité de terres mises en jachère pendant l'été et qui restent vides parce qu'il faut procéder à la rotation des cultures et parce qu'on manque de possibilités pour une rotation pratique.
Nous pensons que cette culture vise en grande partie ces zones agricoles arides et chaudes. Nous pensons qu'il y a également de grandes possibilités de transférer cette culture et cette technologie vers les États-Unis ainsi que vers d'autres régions du monde.
Notre objectif est de mettre tout cela au point au Canada, mais aussi de nous tourner vers d'autres marchés pour cette technologie.
[Français]
Le sénateur Maltais : S'il y avait un prix à décerner cette année dans le domaine de l'innovation agricole, je crois bien que c'est à vous qu'on le remettrait. Vous avez fait quelque chose d'extraordinaire et qui est méconnu. Peut-être que c'est connu dans certaines autres parties du Canada, mais c'est quelque chose que j'apprends ce matin.
Le domaine de l'aviation et, en fait, tout domaine qui consomme du pétrole a intérêt à contribuer financièrement et à vous aider car je crois que c'est une voie d'avenir à long terme. Je vous souhaite la meilleure des chances ainsi qu'une grande collaboration du monde financier.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Je trouve cette étude assez difficile, car elle contient beaucoup de terminologie que nous ne connaissons pas très bien et parce que c'est la nature du domaine.
Monsieur Fabijanski, vous avez dit que vous aviez 6 700 acres en production cette année et que vous espériez en avoir 50 000 l'année prochaine. Ai-je bien entendu?
M. Fabijanski : Oui.
Le sénateur Mercer : Ces terres n'ont-elles jamais été utilisées auparavant?
M. Fabijanski : Il s'agit de terres qui sont essentiellement mises en jachère pendant l'été, car la majorité des champs de la région font pousser du blé. Si vous êtes un véritable agriculteur, vous ne pouvez pas cultiver de blé de manière consécutive pendant très longtemps sans avoir des problèmes de maladies et autres. Ces terres sont typiquement mises en jachère et l'avantage, avec cette culture pour la mise en rotation des terres, c'est qu'elle permet de réintroduire du carbone dans le sol, de conserver l'humidité et de donner un coup de fouet au rendement en blé, l'année suivante. Cela fait partie d'une pratique agricole durable dans ces régions. Nous recevons beaucoup d'appui des agriculteurs, car ils reconnaissent qu'ils préféreraient tirer des revenus de terres qui à l'heure actuelle restent en jachère.
Le sénateur Mercer : Je suis d'accord avec eux. Ce qui m'a poussé à poser cette question, c'est que nous parlions d'environ neuf milliards de personnes et disions qu'il fallait faire preuve de créativité pour les nourrir. Vous parlez de cultiver quelque chose qui va remplacer le pétrole — ce qui est également une bonne chose —, mais j'avais peur que nous soyons en train de dépouiller Pierre pour payer Paul. La bonne nouvelle, c'est que cette terre n'est pas en culture à l'heure actuelle.
Cet avion va voler la semaine prochaine et se servira de ce carburant. Cela est très emballant. J'ai hâte d'entendre les résultats des essais de vol, mais quel est le potentiel, du point de vue commercial? Verrons-nous arriver le jour où nos avions à réaction seront alimentés de cette façon, à grande échelle, ou bien cela est-il limité en raison de la disponibilité restreinte de terres?
M. Fabijanski : Le potentiel est double. Je vais revenir à votre première question. Pour nous, il ne s'agit pas de choisir entre la nourriture et le carburant. Environ 50 p. 100 du produit devient de l'huile, 50 p. 100, du tourteau hautement protéique qui sert à l'alimentation animale. En fait, nous produisons de l'alimentation et du carburant à partir de cette culture.
Le sénateur Plett : C'est de mieux en mieux.
M. Fabijanski : Pour ce qui est du potentiel commercial, nous prévoyons entre deux et trois millions d'acres de production au Canada, à une échelle qui représentera environ 800 millions de litres de carburant et environ 3 milliards de dollars d'activités économiques. Les 800 millions de litres de carburant pour avion pourraient vous permettre de faire voler tous les avions des Prairies sur une base de zéro carbone.
Nous sommes conscients de ce débouché. Mais on peut également regarder la chose à plus grande échelle et voir beaucoup de débouchés régionaux pour cette culture qui peut être également appliquée dans différentes régions.
Le sénateur Robichaud : Vous avez répondu à la question sur les résidus une fois que vous avez produit l'huile, mais vous avez dit que vous aviez fait des tests cet été — le carburant et 50/50 — et que vous aviez obtenu une réduction importante des émissions. De combien était cette réduction? Les écologistes pourraient s'en réjouir.
M. Fabijanski : Pour être honnête, elle était supérieure à 50 p. 100; elle avoisinait probablement les 70 p. 100. Je ne suis pas un expert en émissions de gaz à effet de serre. Les chercheurs du Conseil national de recherches ont fait l'analyse et le suivi de l'avion. Cette réduction des émissions a été calculée en faisant suivre cet avion par un avion renifleur qui reniflait les gaz d'échappement des réacteurs en vol. Ils font toutes sortes de choses qui, je l'avoue, sont un peu en dehors de mon domaine et je ne pourrais pas toutes vous les expliquer. Toutefois, les réductions étaient importantes.
Le sénateur Robichaud : C'est très important.
M. Fabijanski : Effectivement.
Le sénateur Braley : J'ai quelques commentaires et vous n'aurez peut-être pas le temps de me répondre, mais la première chose est que tout ce qui concerne la propriété intellectuelle devrait être harmonisé. Cela ne fait aucun doute. Cela a un effet dissuasif sur toutes sortes de choses. Je suis propriétaire d'un grand nombre d'entreprises. Parfois nous déposons des brevets; mais la plupart du temps, nous ne le faisons pas car nous prenons de l'avance et personne ne peut lire ce que nous avons fait. Pour certaines choses, on peut prendre de l'avance de deux, trois, quatre voire cinq années dans l'industrie automobile et ailleurs. Il y a deux côtés à cette médaille. Dans un tiers, voire la moitié de mes cas, nous n'avons pas eu recours à une protection de la propriété intellectuelle.
Je reçois un à trois plans par semaine et j'investis probablement dans un ou deux. J'ai un gros portefeuille de placement. Il n'y a pas de plan d'affaires ici; il n'y a rien qui explique comment vous passez du point A au point B. Les détails sont erronés. Il n'y a pas de fabrication rentable du produit. Je ne sais pas si le coût net de production de ce carburant pour avion est rentable par rapport au produit actuel ou si l'un coûte deux fois plus cher que l'autre. Et si c'est le cas, quels en sont les compromis?
Le capital existe, mais au Canada, c'est strictement le gouvernement qui a développé nos universités. On n'a pas voulu d'investissements privés jusqu'à il y a environ 15 ans. Harvard et Stanford et toutes les universités aux États-Unis ont toutes les compagnies sur place, comme dans une petite enclave. Ils travaillent avec la propriété intellectuelle au fur et à mesure qu'elle est mise au point et ils disent : « Je veux faire ceci; quittez Harvard et joignez-vous à nous. » Voilà comment les choses se font aux États-Unis. Nous avons une base passive, car notre système d'éducation a été mis sur pied d'une façon bien différente du leur. Nous ne disposons pas de ces centres d'influence. Si l'un ou l'autre d'entre vous veut commenter, allez-y.
Le Conseil national de recherches est un avantage pour vous à l'heure actuelle, car un grand pourcentage de la recherche sera envoyé à l'extérieur; cela pourrait atteindre la moitié au cours des cinq prochaines années. Voilà donc une occasion. Je crois également que des fonds de recherche sont en train d'être créés. Vous devriez avoir des sommes privées égales, et c'est de cette façon que les choses attirent l'attention. Plutôt que de prendre cinq ans à faire quelque chose, on le fait parfois en trois ans.
Le sénateur Robichaud : Sénateur Braley, votre micro est allumé. Bien des gens vous regardent et entendent vos commentaires.
Le président : Avez-vous des commentaires dont vous aimeriez faire part au comité?
M. Casey : En réponse au sénateur Braley, vous avez en quelque sorte mis le doigt sur quelque chose que j'avais remarqué lors de mes voyages pour aller rencontrer mes membres; il y a effectivement de grandes idées qui sont développées dans les universités. Le commentaire de Mme Marden, plus tôt, qui disait que bon nombre de ces choses se font en laboratoire et que vous traitez avec des chimistes et des chercheurs qui ne sont pas des gens d'affaires naturels, et pourtant nous mettons au point bon nombre de ces choses dans les écoles de commerce et les facultés de droit.
Pourquoi n'arrivons-nous pas mieux à unir ces trois choses, de manière à ce qu'on puisse sortir des phases initiales, mettre davantage l'accent sur la commercialisation et puiser dans l'expertise qui existe déjà dans ces écoles? Certaines des écoles y sont presque. C'est encourageant. L'Université de la Colombie-Britannique en est une sans aucun doute.
Mme Marden : Oui. À ce sujet, il existe un programme intéressant à l'Université de Colombie-Britannique pour faire cela par le biais du bureau de transfert de la technologie. On y forme des gens qui possèdent ces idées excellentes et nous faisons venir les partenaires potentiels de l'industrie à ces mêmes séances de formation pour essayer de réunir ces gens à l'aide de l'école, des étudiants et des professeurs de commerce. Ce que vous dites est effectivement dans l'air et c'est une excellente idée.
Le sénateur Mercer : Dalhousie, à Halifax, dispose d'un programme semblable.
M. Levy : Il existe également d'autres modèles en cours d'élaboration. À l'Université de la Colombie-Britannique, il y a le Centre for Drug Research and Development et pour ces bases de recherche, vous avez besoin d'un incubateur et d'une filière de développement. Le gouvernement a été extrêmement utile en finançant cela pour que les idées émanant des chercheurs universitaires puissent entamer le processus vers la commercialisation.
Mme Marden : Et ils ont fait venir des montagnes de fonds de l'industrie également, car c'est une excellente idée.
Le président : Mesdames et messieurs les témoins, merci beaucoup de votre information. Avec les commentaires et les questions du sénateur Braley, je vous encourage à regarder la chose à nouveau. Si vous avez des renseignements supplémentaires que vous aimeriez fournir au comité, n'hésitez pas à les envoyer au greffier, M. Pittman.
Le comité va maintenant passer au second panel. Aux honorables sénateurs, à 9 h 55 je demanderai au comité de passer à huis clos pour cinq minutes avant de lever la séance à 10 heures pile.
Le sénateur Robichaud : Pourquoi passerons-nous à huis clos?
Le président : Il y a un point que j'aimerais aborder avec les membres du comité à huis clos. Nous aurons des détails sur nos travaux futurs. Cela étant dit, nous avons deux témoins.
Messieurs les témoins, au nom du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, j'aimerais saisir l'occasion ce matin pour vous remercier d'avoir accepté notre invitation de venir partager vos commentaires avec le comité, ainsi que vos opinions et vos recommandations au sujet de l'innovation en agriculture.
Honorables sénateurs, nous avons parmi nous Mark Davies, président des Éleveurs de dindon du Canada; et Phil Boyd, directeur exécutif des Éleveurs de dindon du Canada. Le greffier me dit que M. Davies va faire l'exposé, après quoi nous entendrons les questions des sénateurs.
Mark Davies, président, Éleveurs de dindon du Canada : Je vous suis reconnaissant de l'occasion qui m'est donnée. Il s'agit d'un exposé de suivi pour nous. Nous étions ici en février et nous espérons donc pouvoir vous fournir un peu plus de clarté sur les questions posées et sur certaines des questions que nous n'avons pas eu le temps d'aborder à l'époque.
Comme je viens juste de l'indiquer, il s'agit de notre seconde comparution devant votre comité. Nous avons l'intention de nous concentrer sur les derniers développements et initiatives chez les Éleveurs de dindon du Canada et au sein du secteur canadien du dindon et nous voulons revenir sur certains des points de discussion qui étaient ressortis lors de la réunion de février et en dire un peu plus.
L'information sur le contexte et les statistiques sur l'industrie avaient été fournies en février et peuvent être de nouveau distribuées aux honorables sénateurs, s'ils le souhaitent.
Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes les questions qui s'y rapporteront ou qui porteront sur les sujets que nous allons soulever aujourd'hui.
Je vais vous donner un rapide aperçu de la gestion de l'offre. Je suis certain que vous le savez très bien, mais juste pour mettre les choses en perspective, dans le cadre de la gestion de l'offre, les éleveurs de dindon travaillent ensemble pour faire correspondre leur production aux désirs et aux besoins des consommateurs. Le marché est également ouvert à un niveau prévisible de dindons importés. Les transformateurs reçoivent un approvisionnement stable de produits à des prix stables, ce qui leur permet de planifier leur production en conséquence. Les consommateurs reçoivent un approvisionnement fiable de haute qualité, sécuritaire et nutritif à des prix raisonnables et les éleveurs tirent leurs revenus du marché, sans devoir compter sur des subventions directes.
La stabilité de l'industrie canadienne du dindon grâce au système de gestion de l'offre et son environnement basé sur la collaboration ont permis de réinvestir dans des exploitations et dans l'industrie dans son ensemble. Le travail proactif d'ÉDC au chapitre du développement et l'offre de programmes de salubrité des aliments à la ferme et de programmes de soins aux troupeaux pour garantir des normes élevées de salubrité alimentaire et de soins aux animaux y sont pour beaucoup. Il en va de même pour l'investissement dans la recherche de l'industrie de la volaille. Ces développements aident à faire en sorte que les Canadiens puissent savourer des produits de dindon salubres et de haute qualité en provenance d'exploitations canadiennes, et ce, à bon prix toute l'année.
Les éleveurs de dindon canadiens contribuent pour plus de 412 millions de dollars annuellement au PIB canadien et plus de 5 200 emplois sont directement liés à notre industrie.
Nos éleveurs contribuent également environ 60 millions de dollars en revenus fiscaux annuels aux gouvernements fédéral et provinciaux ainsi qu'aux municipalités. Je crois qu'étant donné qu'il s'agit d'une industrie qui repose sur des exploitations agricoles, ses retombées sur le Canada rural vont de soi.
Les investissements dans la recherche créent des bénéfices à long terme pour le secteur et sont importants pour la viabilité à venir de l'industrie en termes d'amélioration de la productivité, d'économie et de compétitivité, d'assurance de la qualité des aliments et des inquiétudes de la société quant aux techniques agricoles et à la production alimentaire, notamment par rapport à l'environnement, aux soins prodigués aux animaux et à la salubrité des aliments.
Lors de notre première visite, nous avions suscité un grand intérêt pour la recherche scientifique entreprise par l'industrie canadienne de la volaille, notamment en ce qui a trait au financement de la recherche, à la façon dont ce financement est complété par le gouvernement et à la façon dont des projets de recherche précis ont permis d'améliorer l'industrie.
Chez ÉDC, nous avons un comité de recherche qui s'intéresse plus spécialement à accroître et à maintenir la recherche sur le dindon, pour le bienfait de l'industrie et du consommateur. La recherche avicole est en déclin depuis les 20 dernières années, en raison de la chute du financement, du nombre de chercheurs et de la fermeture ou de la fusion des infrastructures dans les établissements de recherche, et cela inclut également les établissements du gouvernement fédéral. Bien entendu, cela a créé un énorme défi, comme vous pouvez l'imaginer.
En tant qu'organisme, notre réponse a été de mettre en œuvre une stratégie formelle de recherche des ÉDC qui établit un programme de recherche viable propre aux besoins de l'industrie. Les priorités en recherche qui ont été recensées incluent la santé, le bien-être et la productivité de la volaille; la salubrité et la qualité des aliments; les questions environnementales; et la mise au point de nouveaux produits. Ces fonds de recherche proviennent des revenus généraux de l'organisme — et nous voulons que cela soit clair —, fonds qui proviennent des redevances versées par les éleveurs de dindon sur chaque kilogramme de viande mis en marché.
En 2012, la contribution des ÉDC à la recherche a dépassé les 164 000 $. Cette somme se divise de la manière suivante : un peu plus de 94 000 $ au Conseil de recherche avicole du Canada (CRAC). C'est ce que nous avons créé conjointement avec les Producteurs de poulet du Canada, les Producteurs d'œufs du Canada, les Producteurs d'œufs d'incubation du Canada et le Conseil canadien des transformateurs d'œufs et de volailles, groupe qui représente le volet transformation.
Le mandat du CRAC vise à coordonner la recherche avicole nationale, à obtenir un financement additionnel, à veiller à ce que les fonds de recherche soient utilisés de la manière la plus efficace possible et à offrir une expertise technique à nos éleveurs. Le CRAC gère une grappe scientifique sur l'aviculture pour le compte du secteur avicole, grappe qui réunit des ressources scientifiques et techniques pour appuyer une rentabilité et une compétitivité accrues. Cela réduira le temps nécessaire pour faire en sorte que les nouveaux produits, pratiques et procédés atteignent le marché. En bref, nous avons simplifié le processus pour le mettre à la disposition des éleveurs de la base et de l'industrie de la transformation le plus rapidement possible.
À ce jour, les membres du CRAC ont consacré plus de 2,5 millions de dollars à 50 projets de recherche réalisés dans les universités et dans les laboratoires du gouvernement fédéral partout au pays. Les fonds provenant d'autres sources et qui sont pour la plupart gouvernementales se chiffrent à plus de 10 millions de dollars. La contrepartie des fonds du CRAC est de 4:1. Les sources de financement sont les groupes de l'industrie et, dans certains cas, les entreprises individuelles; le programme Cultivons l'avenir; et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le CRSNG.
L'autre partie couvre 70 000 $ versés à des projets en dehors du CRAC. Il y a eu un atelier sur la recherche sur le dindon, avec des fonds additionnels octroyés par le biais du CRSNG, que je viens juste de mentionner, ainsi que des activités de recherche sur le dindon à l'Université de Montréal et à celle de Guelph.
Les projets appuyés par l'industrie, le gouvernement et les établissements d'enseignement ont contribué aux progrès de l'industrie du dindon, y compris à la biosécurité et à la santé de la volaille, à la salubrité alimentaire, à la qualité de la viande et à la modernisation des pratiques d'élevage.
La science sert de base à nos programmes à la ferme et notre investissement est donc crucial pour veiller à ce que les programmes restent à jour et à ce qu'ils permettent à nos éleveurs de suivre le rythme des progrès technologiques et des demandes de la société.
Notre programme est divisé en deux parties, à savoir le Programme de salubrité des aliments à la ferme et le Programme de soin des troupeaux. À l'heure actuelle, 70 p. 100 des éleveurs sont certifiés pour le Programme de salubrité des aliments; pour ce qui est du Programme de soin des troupeaux, lequel est arrivé plus tard et dont la mise en œuvre a lieu à l'heure actuelle, on parle de 26 p. 100. Il s'agit d'un processus en cours d'évolution et nous espérons atteindre la barre des 100 p. 100 d'ici un an environ.
Ces programmes offrent les connaissances scientifiques à nos éleveurs de dindon, et ce, dans un format utilisable et ils constituent une plateforme pour les programmes de vérification dans les provinces. Les ÉDC fournissent également des feuillets d'information sur les résultats de la recherche qui ont des retombées sur les pratiques à la ferme. Il en existe plus d'une vingtaine disponible sur notre site web. Par exemple, il y en a sur le nettoyage des poulaillers, la qualité de l'eau, la production biologique et sur les marchés à créneaux. D'autres feuillets sont en cours de préparation, le prochain portera notamment sur le compostage.
Si vous me permettez de prendre un moment, j'aimerais vous donner quelques exemples de recherches actuelles comme la durée de la journée et son incidence sur le bien-être du dindon et la productivité. Ce projet de recherche se déroule à l'Université de la Saskatchewan et s'explique par le fait qu'un grand nombre d'oiseaux sont hébergés à l'intérieur. La recherche porte sur la quantité de lumière et sur sa fréquence, ainsi que sur l'intensité que devrait avoir la lumière pour une croissance optimale et pour le bien-être aussi bien de l'oiseau que du producteur.
Il y a également un projet de recherche qui se penche sur les méthodes permettant d'évaluer l'aptitude au transport au sujet de laquelle nous avons entendu d'autres groupes de production exprimer des inquiétudes au cours des dernières années. Le public se concentre là-dessus et il nous incombe donc de prendre les devants.
Parmi d'autres projets, on peut citer les relations génétiques contre l'efficacité de l'alimentation, les caractères de production et les émissions de gaz à effet de serre chez les dindons, projet mené en collaboration avec Hybrid Turkeys, ainsi qu'un projet de recherche sur la viabilité environnementale de la production de dindons.
Pour passer au développement et à la promotion des marchés, l'industrie a dû faire face aux changements survenus dans les préférences du consommateur et a parcouru beaucoup de chemin depuis l'époque où on pouvait seulement acheter un dindon entier à l'épicerie. L'industrie a évolué pour offrir une vaste gamme de découpes de dindon, y compris l'oiseau entier, des poitrines désossées, des poitrines sans peau, des poitrines non désossées, des cuisses, des ailes, et des pilons et différentes sortes de produits hachés. Il s'agit là d'un sujet de conversation, où que l'on aille. Nous avons fait des pieds et des mains pour essayer d'enlever de la tête des gens l'idée qu'ils ne pouvaient manger de la dinde qu'une ou trois fois par an et qu'il ne s'agissait que d'une viande pour les repas de fêtes. Nous essayons d'en faire une viande de tous les jours que le consommateur pourra adopter.
Les éleveurs de dindon se servent de toute une gamme de méthodes de production pour répondre à la demande précise des consommateurs. Il y a notamment l'élevage en liberté, l'élevage en libre parcours, l'élevage biologique et les oiseaux riches en oméga-3. Il est intéressant de constater que le profil démographique changeant du Canada donne la possibilité de mettre au point des produits additionnels pour répondre aux préférences ethniques et les compagnies s'adaptent d'ailleurs à ces changements en mettant au point ces produits. Un des exemples les plus évidents serait celui de l'arrivée des produits de dindon halal. Un certain nombre de sociétés sont en train de faire de la recherche là-dessus actuellement. Cette grande diversité de produits offerts vient renforcer la viabilité de l'industrie canadienne du dindon et lui permet de s'adapter aux préférences changeantes du consommateur.
Le rôle des ÉDC est de créer une plateforme au sein de laquelle les entreprises individuelles, de la ferme jusqu'à la chaîne de valeur, pourront continuer de développer leur propre avantage concurrentiel sur le marché intérieur. C'est ainsi que nous avons mis sur pied le Comité d'expansion du marché du dindon. Ce comité vise à créer des occasions pour nos fermes et entreprises en étudiant les besoins et les désirs des consommateurs et de l'industrie de la restauration, en augmentant la représentation de la dinde dans les magasins et en se servant des médias sociaux comme Facebook, Twitter et YouTube. Nous y sommes très présents à l'heure actuelle. Les gens qui nous y suivent sont de plus en plus nombreux et nous considérons que c'est quelque chose de positif. C'est la voie de l'avenir. C'est la façon dont les gens communiquent entre eux aujourd'hui. Je ne suis certainement pas un expert là-dessus, mais nous avons des gens au sein de notre organisation qui le sont.
Le Comité d'expansion du marché du dindon est composé de producteurs, de transformateurs, de diététiciens, de chefs et de représentants de l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires et du Conseil canadien du commerce de détail. En fait, ils sont en réunion à l'heure où nous nous parlons, à Toronto. Je vais me joindre à eux, avec M. Boyd, après notre départ, il est donc tout à fait à propos de le mentionner à cette étape-ci.
Une autre initiative importante concerne notre image de marque au Canada. Les ÉDC ont reçu l'autorisation d'utiliser l'identification de marque d'Agriculture et Agroalimentaire Canada en novembre 2011, et aussi celle d'utiliser les mots « Élevé au Canada ». Nous avons préféré « Élevé au Canada » plutôt que « Produit du Canada », car notre industrie est en partie fondée sur l'achat de dindonneaux, donc de bébés dindons. Nous en importons des États-Unis. C'était en partie en raison de cela qu'il nous était plus facile de dire « Élevé au Canada ». De plus, à cause de certaines pratiques commerciales au sein de l'industrie de la transformation, on ne pouvait pas dire « Produit du Canada », car le seuil des 100 p. 100 était trop élevé, et cela est dû à la nature de l'environnement commercial d'aujourd'hui. Conséquemment, notre secteur de la transformation était très satisfait de dire « Élevé au Canada », et s'en est accommodé. Cela reflète le fait que même si nous n'avons pas les chiffres exacts, entre 90 et 95 p. 100 de la production, des coûts et des intrants sont canadiens.
Notre site web a des images pour promouvoir le dindon canadien et l'industrie canadienne du dindon, comme on peut s'y attendre.
Nous sommes fiers de notre partenariat avec Banques alimentaires Canada. Je pense que la raison pour laquelle nous avons été invités à comparaître pour la deuxième fois devant le comité remonte au petit déjeuner organisé par Banques alimentaires Canada il y a quelques mois. Nous y étions, et le fait que certains députés étaient aussi présents est très apprécié.
2012 marque la quatrième année consécutive de notre partenariat avec Banques alimentaires Canada. Nous avons parrainé le petit déjeuner que je viens de mentionner et qui s'est déroulé sur la Colline en mai. Nous avons fait un nouveau don de 50 000 $ en octobre 2012, suivi d'un autre de 12 000 $ de la part de trois de nos membres provinciaux, soit de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et du Manitoba. Les conseils de commercialisation provinciaux, par le biais des membres du secteur de la transformation, font également des dons aux banques alimentaires locales d'un bout à l'autre du pays, et ce, à longueur d'année. L'événement médiatique d'octobre avec le secrétaire parlementaire Pierre Lemieux est un autre exemple de la façon dont nous pouvons sensibiliser les gens à cette question, qui préoccupe la société.
Notre engagement envers Banques alimentaires Canada, et envers sa campagne de sensibilisation à la faim, donnera lieu, à notre avis, à un partenariat de longue durée.
Cette campagne est en partie fondée sur les renseignements commerciaux fournis en réponse à des questions posées lors de notre dernière comparution devant votre comité. Espérons que cela va répondre aux requêtes et aux préoccupations qui ont été soulevées.
La consommation figure en tête de liste. Depuis la création de notre conseil en 1974, la consommation de dindon par habitant a été relativement stable, soit environ entre 4 et 4,5 kg par personne. Nous essayons de dépasser ce seuil. Notre pourcentage de la consommation totale de viande au Canada demeure entre 5 et 6 p. 100; cette tendance se maintient.
Il n'y a pas de corrélation entre le prix vif et le prix de détail. Le prix vif augmente depuis 2001 à cause des coûts de production plus élevés, et le prix de détail est établi en fonction des stratégies des détaillants locaux et des réseaux de magasins de détail. Le prix de détail pour les dindons entiers en gros est tombé un peu au fil du temps. Le prix de la dinde de consommation au Canada varie avec le temps et selon la stratégie adoptée par le détaillant, tout comme cela a été le cas aux États-Unis. Depuis 2001, notre analyse a démontré que les prix canadiens sont en moyenne plus bas que ceux aux États-Unis, et ce, au cours de six des 11 dernières années.
Nous pensions qu'il était important de porter ces faits à votre attention, car les critiques vous diront que tout coûte moins cher aux États-Unis. On nous fait normalement ce reproche pendant les temps des fêtes. Mais en examinant la question de plus près, vous trouverez que les détaillants vendent certains produits à perte, ce qui retient l'attention des gens. Mais il faut mettre les choses dans leur bon contexte, et ce faisant, on s'aperçoit que lorsqu'on compare des pommes avec des pommes, nos prix sont les mêmes, sinon plus bas.
Une autre question portait sur les données d'importation et d'exportation. Avec la gestion de l'offre, il s'agit plutôt du marché intérieur, mais le marché canadien du dindon n'est pas fermé. La valeur totale des importations s'élevait à 15 millions de dollars en 2011. Il vaut la peine de mentionner que les gens critiquent la gestion de l'offre, disant qu'il s'agit d'un système fermé et que nous importons plus que certains de nos détracteurs dans d'autres pays. Encore une fois, comparons des pommes avec des pommes.
La valeur totale des exportations s'élevait à 23 millions de dollars. Cela représentait surtout des morceaux de faible valeur qui sont en surplus à la demande du marché canadien du dindon, c'est-à-dire la chair blanche. Nous assistons à un changement de tendance, attribuable en partie aux réalités économiques ayant frappé certaines familles au cours des dernières années, bien qu'au Canada nous nous en soyons mieux tirés qu'ailleurs. La crise économique a touché les familles, de sorte qu'elles ont cherché alors des coupes moins chères. Une bonne partie de la viande brune qui était auparavant exportée demeure maintenant au Canada. Nous voyons ce scénario d'un bon œil puisqu'il commence à mettre au point des produits que l'on n'aurait peut-être pas considérés autrement.
Vous savez sans doute que le coût de l'alimentation est un aspect énorme et volatile de toute entreprise du secteur des protéines, particulièrement celui de la volaille. La volatilité est devenue la norme pour le secteur de l'élevage. Au début de juin 2012, le coût moyen pour la nourriture des animaux en Ontario s'élevait à environ 463 $ la tonne métrique. À l'époque, on pouvait être optimiste vis-à-vis du prix de la nourriture des animaux pour l'année à venir puisqu'on s'attendait à une bonne année. Pourtant, vers la fin de juin, cet optimisme s'est évaporé avec la canicule et la pire sécheresse des dernières décennies qui ont affligé une très grande partie de l'Amérique du Nord, les États-Unis en particulier.
Plutôt que des prix à la baisse auxquels on s'attendait, le coût d'une tonne de nourriture pour animaux est passé à 550 $ tandis que les prix du maïs et du soja ont affiché une hausse dramatique en réaction aux perspectives de récoltes moins élevées. Ces coûts accrus de l'alimentation ont engendré des coûts de production plus élevés pour nos éleveurs et, bien entendu, des prix plus élevés pour les dindons vivants. Avec le temps, nous verrons quel effet tout cela aura sur la chaîne alimentaire et les consommateurs au détail. Pour l'instant, cela demeure la grande inconnue. Cela cause aussi aux détaillants des problèmes, à mesure que les coûts d'alimentation pour les animaux et les prix continuent à augmenter. Ces détaillants doivent s'inquiéter de leurs résultats financiers par rapport à leurs consommateurs; cela ne diffère pas pour nous.
En conclusion, j'espère que nous avons répondu à toutes les questions qui nous ont été posées en février ainsi qu'à nos collègues des Producteurs de poulet du Canada. M. Boyd et moi sommes prêts à répondre à vos questions.
Le sénateur Plett : Messieurs, merci d'être venus. Vous avez sûrement répondu à toutes les questions de février, mais vous avez également soulevé de nombreuses autres questions. Évidemment, je n'en poserai que quelques-unes, pour que mes collègues puissent vous en poser aussi.
Je crois que vous avez dit que le nombre d'éleveurs au Canada est à la baisse. Est-ce bien ce que vous avez dit dans votre exposé?
M. Davies : Non. En fait, le nombre d'éleveurs de dindon est demeuré assez stable au fil des années, dans une marge d'environ 5 p. 100. Nous sommes un petit secteur d'activité, avec environ 545 à 550 éleveurs, plus ou moins. C'est assez standard.
Le sénateur Plett : Et comment sont-ils répartis à travers le pays?
M. Davies : Ils se situent surtout en Ontario et au Québec. Ce pourcentage reflète celui de bien d'autres industries de la volaille, telles que celui du poulet. Monsieur Boyd, connaissez-vous les chiffres exacts?
Phil Boyd, directeur exécutif, Éleveurs de dindon du Canada : L'Ontario produirait environ 42 ou 43 p. 100 du total national; le Québec est de l'ordre de 23 p. 100 du total national; la Colombie-Britannique, l'Alberta et le Manitoba seraient de taille moyenne avec 10 à 12 p. 100; suivis ensuite par la Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Plett : Dans le cas de la production du bétail et du porc, la transformation pose l'un de nos plus grands défis. Comment les processus du dindon et du poulet se comparent-ils à cet égard? Comment sont transformés la plupart de nos dindons?
M. Davies : C'est drôle que vous souleviez cela. Une nouvelle usine vient d'ouvrir en Nouvelle-Écosse il y a deux semaines. On y trouve la première ligne de dindon dédiée dans cette province depuis une quarantaine d'années. C'est un développement très positif pour l'usine de transformation du poulet et du dindon. C'est réparti à travers le pays avec la majeure partie de la transformation et la transformation ultérieure se fait en Ontario, au Québec et un peu dans l'Ouest. À l'heure actuelle, chaque province, à l'exception du Nouveau-Brunswick, a un transformateur qui envoie ses dindons au Québec.
Le sénateur Plett : Alors au Canada, nous transformons ce que nous élevons.
M. Davies : C'est à peu près ça.
Le sénateur Plett : Vers la fin de votre exposé, vous avez mentionné les coûts de l'alimentation des animaux. Cette semaine, j'ai eu la chance de visiter le plus gros éleveur indépendant de porc dans l'Ouest canadien. Il m'a dit qu'un de ses plus grands défis du côté des prix de l'alimentation des animaux, tels que le maïs, est associé à la production de l'éthanol plutôt que la sécheresse. Seriez-vous d'accord pour dire que la production de l'éthanol est un facteur?
M. Davies : C'est un facteur énorme et c'est devenu le point critique. C'est la première année qu'environ 50 p. 100 du maïs, si je ne me trompe, n'a pas servi au système alimentaire ni à bien d'autres choses dans nos vies quotidiennes. Il paraît que s'il fallait que cette production soit indépendante et non subventionnée, son impact serait moins important. Des efforts de lobbying énormes ont été déployés aux États-Unis, auxquels a participé le secteur du dindon, pour soulever certaines des craintes vis-à-vis du programme actuellement en vigueur. Les pressions se font sentir à travers l'Amérique du Nord dans une très grande mesure.
Le taux de conversion est l'un des avantages dont nous jouissons au sein du secteur de la volaille, puisqu'il faut moins de livres ou de kilogrammes de nourriture pour animaux pour produire un kilogramme de viande qu'il en faut pour une plus grosse bête. Il se peut que le fardeau soit plus léger, quoique mes éleveurs sont peut-être en désaccord puisqu'il s'agit d'un fardeau énorme à l'heure actuelle.
J'ai mentionné le chiffre de 450 pour le centre du Canada. Si vous voulez parler d'une côte comme de l'autre, soit la Colombie-Britannique ou la Nouvelle-Écosse, il faut ajouter 80 ou 85 $.
Le sénateur Plett : Ma dernière question en est une que je pose typiquement à tous les témoins. Vous avez soulevé certaines de vos préoccupations. À part le maintien de la gestion de l'offre dans notre pays, qu'est-ce que vous nous demanderiez de faire pour venir en aide à votre secteur d'activité? D'après moi, la gestion de l'offre est un aspect considérable, et positif, pour le secteur. À part cela, que pouvons-nous faire pour aider davantage le secteur du dindon?
M. Davies : D'après moi, il s'agit surtout d'appuyer le secteur. Le secteur lui-même, s'il est en bonne santé et en place, a déjà les outils pour bien se gérer, et ce n'est pas pour donner une réponse générale. Nous avons souvent affirmé que la gestion de l'offre elle-même constitue notre outil de gestion des risques d'entreprise, lorsque nous sommes consultés dans le cadre de programmes tels que Cultivons l'avenir, et d'autres versions antérieures de cela. Il y avait différents noms.
On entend toujours l'industrie de la gestion de l'offre parler de programmes et de subventions — s'ils sont nécessaires, c'est bien beau, ça nous ne me pose aucun problème — mais dans notre industrie, c'est du marché que nous l'obtenons. Tant que notre industrie pourra maintenir tous les piliers que j'ai énumérés tantôt, elle demeurera alors une industrie robuste en soi, c'est-à-dire, que nous pouvons exploiter.
Encore une fois, il s'agit peut-être d'une question de sensibilisation. Nous avons de nombreux détracteurs, comme vous avez vu dans la presse depuis les six derniers mois. Il existe diverses versions de la vérité, et donc il faut ressortir les faits et, comme je l'ai dit tantôt, il faut comparer les pommes avec des pommes et s'assurer que les gens comprennent pleinement la gestion de l'offre. Il faut sensibiliser les gens au fait.
Le sénateur Mercer : Merci, messieurs, de votre présence. Vous avez répondu à toutes les questions que nous vous avons posées en février.
Votre exposé a fait état de la demande croissante pour les produits contenant de l'oméga 3 et les produits biologiques. Quelle est la différence du côté de la production? Au niveau de l'exploitation agricole, y a-t-il une grande différence quant à l'élevage des dindons qui répondent aux critères d'un produit biologique ou d'un produit contenant de l'oméga 3? Est-ce que le genre d'alimentation pour animaux ou les conditions d'élevage de cette volaille diffèrent?
M. Davies : Je vais commencer en décrivant les choses qui sont semblables. Les pratiques d'élevage et le bien-être des animaux seront identiques.
Quant aux produits biologiques, la plus grande différence se trouve au niveau de l'alimentation pour animaux, qui normalement ne contient aucun sous-produit de viande. Je n'ai pas les règlements sous les yeux, mais normalement, c'est là où se trouve la différence. On s'attendrait à cela d'après sa description.
Quant aux définitions d'élevage en liberté ou d'élevage en libre parcours, ces choses peuvent varier d'un endroit à l'autre, d'une province à l'autre.
Normalement, c'est un produit qui coûte plus cher à produire et qui répond à la demande d'un marché créneau ou des consommateurs. Espérons qu'on répond à cette demande.
Le sénateur Mercer : Il est évident qu'il faut avoir un plus grand territoire pour élever des dindons en liberté ou en libre parcours.
M. Davies : Oui.
Le sénateur Mercer : La gestion des déchets, j'imagine, devient un plus grand enjeu. Il serait plus facile de gérer tout cela lorsque l'élevage se fait à l'intérieur.
M. Davies : Oui. En effet, dans certaines provinces, comme le Québec, l'élevage doit se faire à l'intérieur. Auparavant, on pratiquait beaucoup l'élevage en libre parcours, dans le sens que les dindons étaient vraiment à l'extérieur, et maintenant l'élevage doit se faire à l'intérieur. Cette situation existe depuis quatre ou cinq ans.
Le sénateur Mercer : Tous les dindons du Québec sont élevés à l'intérieur?
M. Davies : Oui.
Le sénateur Robichaud : Vous dites que l'élevage se fait à l'intérieur au Québec. Pour mieux gérer les déchets?
M. Davies : Comme vous le savez, suite à l'éclosion de la grippe aviaire en Colombie-Britannique et l'exposition au risque, surtout dans les régions où il y a une concentration très forte de volaille — cela s'explique par la nature du secteur — où vous avez normalement une usine de transformation qui se trouve à proximité des éleveurs. D'après eux, il s'agissait d'une question de diligence raisonnable.
Je ne dis pas qu'on ne fait plus d'élevage à l'extérieur au Québec, mais du côté de la production commerciale, tout doit se faire à l'intérieur. Le gouvernement a fourni de l'aide parce que certains éleveurs devaient construire des bâtiments à cet effet. Ces bâtiments seraient pleins d'oiseaux toute l'année et il faut comprendre que ces éleveurs pratiquaient l'élevage en libre parcours depuis des années. Je crois que le Manitoba compte toujours des éleveurs qui font l'élevage en libre parcours à l'extérieur.
M. Boyd : En ce qui concerne la question biologique, selon les normes biologiques canadiennes, les oiseaux doivent avoir accès à l'extérieur pour se qualifier comme oiseaux biologiques. Cela comprend également les composantes de l'alimentation pour animaux, l'absence de médicaments et le genre de choses normalement liées à la production biologique.
Comme M. Davies l'a dit, le coût de production de ces oiseaux est beaucoup plus élevé que celui d'un dindon élevé de la façon traditionnelle. Le prix des marchés de ces dindons est donc plus élevé et le consommateur peut faire son choix.
Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter quelques éléments à la réponse de M. Davies en ce qui concerne les exigences de notre secteur. Je crois qu'il a tout dit en ce qui concerne nos besoins de structure. En ce qui concerne la recherche et l'innovation, un sujet entre autres que nous avons abordé en février, il nous faut une participation gouvernementale cohérente quant à l'accès, aux dépenses et au financement prévus pour la recherche.
Il y a plusieurs joueurs qui se joignent à notre secteur pour financer la recherche, ce qui comprend les gouvernements fédéral et provinciaux : le Réseau des aliments et des matériaux d'avant-garde, le Réseau canadien de technologie et l'Institut agricole du Canada. Ces organismes font tous une contribution, mais notre priorité en matière de recherche et d'innovation, c'est vraiment de travailler de concert avec le gouvernement et ses responsables pour s'assurer de la pérennité de financement afin qu'on puisse faire des percées sur le plan technologique.
Dans le domaine de la recherche, la difficulté, c'est toujours cette nécessité d'adopter une vue à long terme du monde, pour permettre à la recherche qui se fait maintenant de devenir une partie de la vie quotidienne d'une exploitation de dindons. Nous ne pouvons pas nous permettre d'adopter une vue à court terme du monde.
Le sénateur Mahovlich : Et ces dindons sauvages qu'on trouve au nord de Toronto, sont-ils biologiques et comestibles?
M. Davies : Ce n'est pas la première fois qu'on me pose cette question. Ils y sont en grand nombre. En effet, j'ai déjà eu cette conversation avec vous lors d'un dîner.
Le sénateur Mahovlich : Ils sont pires que les chevreuils; il faut être prudents au volant.
M. Davies : Mais le goût est meilleur.
M. Boyd : Ces dindons sauvages, je ne dirais pas qu'ils sont biologiques ou quelque chose de ce genre. Ce sont des dindons sauvages. C'est comme la chasse au gibier, mais ces dindons sont certainement comestibles. Mais la chasse aux dindons exige beaucoup d'habileté. On les voit en très grand nombre.
Le sénateur Mahovlich : Il faut s'asseoir sur une souche d'arbre et attendre.
M. Boyd : Je ne le fais pas moi-même, mais d'après ce que je peux comprendre, la journée peut être très longue.
D'après ce que je peux voir, les Leafs ne vont pas rater les séries cette année.
Le président : M. Mahovlich a encore marqué.
[Français]
Le sénateur Maltais : Pour rassurer mon ami, le sénateur Mahovlich, le dindon sauvage est très bon à manger; on le chasse au Québec, c’est une chasse réglementée. C'est un très bon dindon, d'excellente qualité.
Ma question à nos témoins est la suivante : quel pourcentage des dindons au Québec sont élevés à l'extérieur et non pas à l'intérieur?
[Traduction]
M. Davies : Comme je l'ai dit plus tôt, aucun élevage commercial ne se fait à l'extérieur. Tout doit se faire à l'intérieur. Je crois que c'est la loi qui exige l'élevage à l'intérieur. En ce qui concerne le côté biologique, ou l'élevage en libre parcours, je vais devoir vous répondre plus tard. Je ne suis pas certain de la réponse.
Le président : Vous pouvez fournir ces renseignements au greffier.
Le sénateur Buth : Comme le sénateur Maltais, j'aimerais changer le sujet de conversation pour revenir aux dindons plutôt qu'au hockey. Parfois nous avons tendance à dévier du sujet.
J'ai bien aimé tous les renseignements sur les exportations et les importations. Certains ne se rendent pas compte que la gestion de l'offre comprend ces deux volets. Vous avez parlé d'importations de l'ordre de 15 millions de dollars. Pourriez-vous me dire quel pourcentage ce chiffre représente par rapport au chiffre d'affaires au Canada, et vous pourriez peut-être expliquer ce chiffre de 23 millions de dollars? En ce qui concerne les importations, quel serait le pourcentage par rapport à notre production canadienne?
M. Boyd : Ce montant de 15 millions de dollars provient surtout du produit importé, c'est-à-dire des poitrines désossées sans peau, c'est-à-dire la découpe de la carcasse de dindons ayant la plus grande valeur. On parle du rendement de la carcasse. Ces importations sont l'équivalent d'environ 6,7 millions de kilogrammes de poids vif, ce qui correspond grosso modo à la production de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick ensemble. On parle de 6,7 millions de kilogrammes de poids vif d'une production totale d'environ 190 millions de kilogrammes de poids vif. C'est le pourcentage. Cela représente un pourcentage important, mais ces exportateurs ont accès au marché canadien grâce aux efforts de leurs collègues importateurs de notre côté de la frontière.
La plupart des importations arrivaient traditionnellement au Canada à partir des États-Unis. La situation a changé beaucoup au cours des cinq ou six dernières années, et je dirais que presque 50 p. 100 de ces importations proviennent de l'industrie du dindon du Chili.
Le sénateur Buth : Ma prochaine question allait porter sur la provenance. Pourquoi le Chili?
M. Boyd : On nous dit, et ce n'est pas quelque chose que nous avons vu de nos propres yeux, que la viande provenant des exportateurs chiliens correspond exactement aux critères recherchés par les consommateurs, c'est-à-dire qu'il y a très peu de gaspillage. Le transport est plutôt efficace, prenant un peu plus de temps que le transport en provenance des États-Unis, mais il est certainement faisable moyennant une bonne planification. Il semble que deux ou trois de nos importateurs obtiennent leur viande de ce pays et cela est permis grâce à l'accès minimal au marché d'exportation.
Le sénateur Buth : Quel est l'âge moyen d'un éleveur de dindon? Est-ce que c'est difficile d'attirer de nouveaux éleveurs dans ce secteur?
M. Davis : Non. À l'heure actuelle, la gestion de l'offre dans son ensemble, et l'élevage des dindons en particulier, est très générationnelle. C'est une première chose. Quant à l'âge moyen, je vais deviner un peu et dire que c'est environ 40 ou 45. Beaucoup plus bas que l'âge moyen du producteur au pays. Nous pourrions vérifier ce chiffre. Je suis simplement un peu déprimé parce que j'ai dépassé cet âge maintenant, alors je suis moins tenté de m'y lancer.
C'est l'une des vraiment belles histoires de la gestion de l'offre. Il n'y a aucun problème à maintenir et à faire progresser l'exploitation agricole, le secteur ne semble pas du tout être menacé de cette façon.
Le président : J'aimerais remercier nos témoins de nous avoir fait part de leurs observations. N'hésitez pas à nous envoyer de plus amples renseignements au fur et à mesure que nous étudions cette question.
Nous allons maintenant poursuivre à huis clos pour cinq minutes.
(La séance se poursuit à huis clos.)