Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 39 - Témoignages du 12 juin 2013
OTTAWA, le mercredi 12 juin 2013
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, auquel a été renvoyé le projet de loi C-62, Loi portant mise en vigueur de l'accord définitif concernant la Première Nation de Yale et modifiant certaines lois en conséquence, se réunit aujourd'hui, à 18 h 47, pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Vernon White (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs et aux membres du public qui regardent cette séance du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones sur CPAC ou sur le Web.
Je m'appelle Vern White. Je viens de l'Ontario, et je préside le comité.
Notre comité a pour mandat d'étudier la législation et les affaires concernant les peuples autochtones du Canada. Ce soir, nous examinerons le projet de loi C-62, Loi portant mise en vigueur de l'accord définitif concernant la Première Nation de Yale et modifiant certaines lois en conséquence.
Nous entendrons des témoins des trois organisations suivantes : le ministère des Affaires autochtones et du développement du Nord, la Première Nation de Yale et la Première Nation de Stó:lō. Cette dernière se joindra à nous par vidéoconférence.
Avant d'entendre les témoins, j'aimerais que les membres du comité qui sont ici aujourd'hui se présentent.
La sénatrice Dyck : Bonsoir. Je m'appelle Lillian Dyck, et je suis une sénatrice de la Saskatchewan.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Sénatrice Lovelace Nicholas, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Watt : Sénatrice Watt, du Nunavik.
Le sénateur Demers : Sénateur Jacques Demers, du Québec. Je vous remercie de votre présence.
La sénatrice Seth : Asha Seth, de l'Ontario.
Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l'Alberta.
La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario.
La sénatrice Raine : Sénatrice Greene Raine, de la Colombie-Britannique.
Le président : J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos premiers témoins qui représentent Affaires autochtones et développement du Nord Canada. Il s'agit de Greg Rickford, député, secrétaire parlementaire du ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord, et de Jim Barkwell, directeur principal de négociations, Sud, Traités et gouvernement autochtone.
Monsieur Rickford, nous nous réjouissons à la perspective d'entendre votre exposé, qui sera suivi de questions formulées par les sénateurs. Allez-y.
[Français]
Greg Rickford, député, secrétaire parlementaire du ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien, pour l'Agence canadienne de développement économique du Nord et pour l'Initiative fédérale du développement économique dans le Nord de l'Ontario : Monsieur le président, je vous remercie de me fournir l'occasion de vous parler du projet de loi C-62, Loi portant mise en vigueur de l'accord définitif concernant la Première Nation de Yale.
Ce projet de loi est fort important puisqu'il représente la dernière étape pour ratifier cet accord à titre de traité moderne en vertu de la Loi constitutionnelle de 1982.
[Traduction]
Les négociations préalables à l'accord définitif ont commencé en 1994, au moment où la Première Nation de Yale s'est engagée dans le processus de négociation des traités en Colombie-Britannique. Le dépôt de ce projet de loi marque l'aboutissement de près de deux décennies de discussions en vue de conclure un traité global et de soumettre le projet de loi sur lequel nous devons nous pencher aujourd'hui.
L'accord définitif donne à la Première Nation de Yale l'autonomie gouvernementale et une plus grande indépendance, et il apporte une certitude accrue au sujet de la propriété des terres et des ressources de la région ainsi que sur leur utilisation. Il crée des possibilités pour la Première Nation de Yale et apporte un élément de prévisibilité qui favorise un développement soutenu et une croissance économique dans la province.
L'accord définitif de la Première Nation de Yale est le troisième traité global conclu dans le cadre du processus de négociation des traités en Colombie-Britannique. Le processus de négociation des traités en Colombie-Britannique, dont l'établissement remonte au début des années 1990, permet aux représentants des gouvernements fédéral, provincial et des Premières Nations de s'asseoir à la même table dans un climat de confiance, de respect et de collaboration, sur une base volontaire.
Le processus fonctionne quand le gouvernement et les Premières Nations établissent une voie de négociation définie, cohérente et fiable afin de s'assurer que les accords définitifs sont justes et qu'ils répondent aux besoins des collectivités voisines, des Britanno-Colombiens et de tous les Canadiens.
[Français]
Le résultat escompté et les négociations d'accords définitifs globaux mèneront les collectivités des Premières Nations à être habilitées à prendre leurs propres décisions; être aptes et intéressées à tirer le meilleur parti de l'utilisation de leurs terres et de leurs droits sur les ressources dans le respect de l'environnement; disposer des outils nécessaires pour établir des relations renouvelées avec tous les niveaux de gouvernement; nouer des partenariats stimulants avec des entreprises; et devenir des collectivités plus dynamiques, prospères et autosuffisantes.
[Traduction]
Je suis convaincu, monsieur le président, que l'accord définitif donnera à la Première Nation de Yale les outils dont elle a besoin pour exercer un plus grand contrôle sur sa destinée et de contribuer à une économie canadienne plus robuste et plus prospère.
Plus qu'à personne, le mérite de la conclusion de l'accord définitif revient au chef Robert Hope de la Première Nation de Yale et à son père, le regretté chef Lawrence Hope. Plus précisément, je tiens à les féliciter à la fois pour l'approche juste et posée qu'ils ont adoptée pendant les négociations et pour leur persévérance. En effet, ils n'ont jamais succombé au doute ou perdu de vue l'objectif définitif pendant tout le processus de négociation qui fut parfois truffé d'obstacles.
Monsieur le président, certaines Premières Nations voisines se sont dites préoccupées par cet accord. Des modifications importantes ont été faites au texte de l'accord définitif pour tenter de répondre aux préoccupations de deux groupes Stó:lō concernant les droits de pêche dans la région décrite comme le canyon de cinq milles. En plus de ces modifications, la Première Nation de Yale a offert aux deux groupes des Stó:lō une convention liant les parties afin de leur permettre l'accès aux terres de la Première Nation de Yale.
La proposition de la Première Nation de Yale comprend un certain nombre d'éléments importants : l'accès aux terres de la Première Nation de Yale pour les familles et les personnes identifiées comme étant membres des Stó:lō sans devoir en faire la demande; une durée initiale de la convention de 10 ans; une disposition prévoyant la création d'un groupe de travail mixte composé de membres de la Première Nation de Yale et de Stó:lō possédant une expérience dans les pêches, qui sera investi de la responsabilité de mettre en œuvre de la convention, y compris de s'entendre sur l'identité des familles et des personnes supplémentaires membres des Stó:lō qui auront accès sans devoir en faire la demande; des conditions de renouvellement de la convention basées sur des recommandations du groupe de travail mixte; une clause de résolution de conflit assortie de principes tirés de l'accord définitif et d'autres traités modernes.
Suivant le processus de règlement des différends proposés par la Première Nation de Yale, les parties conviennent de résoudre leurs conflits dans un climat non accusatoire et axé sur la collaboration, tout d'abord en tenant des échanges informels, ensuite, des négociations de bonne foi, et, en tout dernier lieu, en ayant recours à la médiation si nécessaire.
[Français]
Quant aux domaines clés faisant partie de cet accord définitif, il faut noter que l'une des plus importantes traditions pour la Première Nation de Yale est celle de la pêche. En effet, la collectivité occupe un lieu stratégique où le fleuve Fraser se rétrécit pour devenir le canyon du Fraser. Ce rétrécissement naturel du fleuve concentre le passage des poissons migrateurs. En conséquence, plusieurs variétés de saumon du Pacifique abondent dans cette région. La Première Nation de Yale pêche avec succès et de façon durable dans cette région depuis de nombreuses générations. Conformément à sa tradition de gestion rigoureuse, la Première Nation de Yale aura le pouvoir de décider lesquels parmi ses membres pourront pêcher dans les zones désignées de récolte, conformément aux allocations de prises acceptées.
[Traduction]
Monsieur le président, je tiens à préciser que la Première Nation de Yale gérera les zones de pêche uniquement pour ses propres membres. Les autres Premières Nations continueront à respecter le quota établi par Pêches et Océans Canada, comme c'est actuellement le cas. Je tiens également à indiquer au comité que la zone de pêche stratégique, c'est-à-dire le fleuve Fraser, est, et demeurera, un cours d'eau public n'appartenant à aucun intérêt privé. Le cours d'eau demeurera ouvert à tous les pêcheurs autorisés.
Un autre domaine inclus dans l'accord définitif est celui du droit à l'autonomie gouvernementale de la Première Nation de Yale. Une fois l'accord définitif entré en vigueur, la Loi sur les Indiens ne s'appliquera plus à la Première Nation, à ses terres ou à ses membres autrement que pour en déterminer le statut d'Indien. Les dispositions relatives à l'autonomie gouvernementale permettront au gouvernement de la Première Nation de créer des lois et de prendre lui- même des décisions sur les questions qui se rapportent à la préservation de sa culture, à l'exercice de ses droits issus du traité et aux activités de son gouvernement.
À titre d'exemple, la collectivité aura les pouvoirs de créer des lois régissant notamment l'éducation, de la maternelle à la 12e année, les services de protection de l'enfance, les guérisseurs autochtones, ainsi que l'adoption et la garde des enfants de la Première Nation de Yale. La Première Nation aura aussi le pouvoir de légiférer pour conserver et promouvoir sa culture et sa langue, protéger et gérer ses sites patrimoniaux, ainsi que gérer l'accès public à ces sites, et désigner et conserver des artefacts culturels.
[Français]
Le pouvoir de légiférer de la Première Nation de Yale s'appliquera en parallèle aux lois fédérales et provinciales comme dans les autres villes au Canada où les citoyens sont assujettis simultanément aux lois fédérales, provinciales et municipales.
Les lois de la Première Nation auront préséance sur la législation fédérale et provinciale dans les affaires internes de Yale et les aspects qui font partie intégrante de sa culture ou qui sont essentiels au fonctionnement de son gouvernement, notamment les lois régissant l'administration du gouvernement de la Première Nation de Yale et la gestion des terres et des biens.
[Traduction]
Toutefois, les lois fédérales et provinciales auront préséance advenant un conflit dans tous les autres domaines de compétence. À titre d'exemple, les lois fédérales ou provinciales auront préséance dans les domaines comme les services de santé, l'ordre public, la paix et la sécurité, la construction et les travaux publics ainsi que les transports.
Dans certains domaines de compétence, les lois de la Première Nation de Yale doivent respecter certaines normes ou exigences pour être valides, par exemple, pour la célébration du mariage, l'éducation et l'adoption. Seules les lois fédérales s'appliquent dans les domaines d'intérêt national comme le droit criminel, la défense nationale, la propriété intellectuelle et l'immigration.
Monsieur le président, il s'agit d'un accord qui offre aux membres de la Première Nation de Yale un fondement solide sur lequel ils pourront bâtir une collectivité politiquement stable, prospère et dynamique sur le plan culturel. Mais encore, ne me croyez pas sur parole. Examinez les résultats des accords précédents.
Les accords globaux comme celui-ci ont prouvé leur valeur. Ils permettent de clarifier les questions de la propriété et de l'utilisation des terres et des ressources — des précisions qui libèrent le potentiel de croissance et de développement économiques. Ils permettent aux collectivités des Premières Nations de prendre des décisions qui enrichissent la vie culturelle et sociale des gens. Ils mènent au renouvellement des relations entre les gouvernements, ce qui permet de tracer de nouvelles voies pour la coopération, la collaboration et le développement dans tous les aspects de la vie communautaire.
Vingt-six traités modernes et accords sur l'autonomie gouvernementale, couvrant plus de la moitié de la masse continentale de notre pays, ont été ratifiés et sont entrés en vigueur. Ces traités et ces ententes ont permis de conférer à de nombreuses Premières Nations la capacité de prospérer. En Colombie-Britannique, des traités ont donné à la Première Nation de Tsawwassen les pouvoirs d'aménager ses terres à des fins industrielles, commerciales et résidentielles, et aux cinq Premières Nations maa-nulth sur la côte Ouest de l'île de Vancouver, de régir leurs terres et leurs ressources.
Ces exemples de réussite ont enrichi les statistiques récentes qui démontrent que les collectivités qui se gouvernent elles-mêmes connaissent une amélioration du taux d'emploi de 13 p. 100 et une hausse marquée de la participation à la population active de la région, de 12 p. 100. Ces résultats sont tous importants et précieux. Il ne fait aucun doute que ce projet de loi permettra aux familles et à la collectivité de la Première Nation de Yale de prendre leurs propres décisions afin de devenir plus dynamiques, prospères et autonomes.
[Français]
Pour toutes ces raisons, monsieur le président, je demande aux honorables membres d'adopter le projet de loi C-62.
[Traduction]
Le président : Merci beaucoup. Avant que nous passions aux questions, je tiens à mentionner que nous avons reçu des documents envoyés par nos témoins de la Première Nation de Stó:lō, qui font partie du troisième groupe d'experts. J'ai bien peur que nous n'ayons reçu qu'une version anglaise. Par conséquent, si personne n'y voit d'objection, j'aimerais que vous m'autorisiez à distribuer ces documents en anglais.
Aucune objection? Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par la vice- présidente, sénatrice Dyck.
La sénatrice Dyck : Merci, monsieur le président, merci, monsieur Rickford, de votre exposé très clair.
Je vais commencer par vous poser une question très générale. Pour parvenir à ce stade, des efforts ont été déployés pendant 19 ans. Pouvez-vous me dire quel était l'obstacle majeur? Y avait-il un obstacle majeur, ou ce processus exige- t-il, en moyenne, 19 ans de travail en Colombie-Britannique?
M. Rickford : Le processus a été long pour deux ou trois raisons. Un certain nombre d'enjeux concernant des terres particulières dont la propriété a été, dirais-je, contestée par un certain nombre de collectivités de la région ont nécessité des processus de médiation, ce qui est tout à l'honneur des parties en cause. Une partie de ce temps a été consacré à ces processus. Nous sommes évidemment heureux d'être parvenus au stade où nous pouvons apporter les dernières touches à l'accord et permettre à la Première Nation de Yale d'aller de l'avant en fonction de cet accord.
La sénatrice Dyck : Avant de donner suite à cette question, j'ai deux brèves questions à vous poser. Vous avez indiqué que la Première Nation de Yale ne serait plus assujettie à la Loi sur les Indiens et, pourtant, il semble que leur statut d'Indiens inscrits sera encore régi par celle-ci. Est-ce exact?
M. Rickford : Il est normal qu'aux termes de ces accords d'autonomie gouvernementale, cette question soit toujours déterminée par la Loi sur les Indiens.
La sénatrice Dyck : Pourquoi est-ce normal?
Jim Barkwell, directeur principal de négociations, Sud, Traités et gouvernement autochtone, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada : Deux principales raisons motivent cet arrangement particulier. Premièrement, le ministère est ainsi en mesure de confirmer le nombre d'Indiens inscrits auxquels il doit offrir des services et des programmes. Cette question s'applique aussi aux traités. Deuxièmement, du point de vue des membres des Premières Nations, chacun d'eux peut avoir droit à des prestations qui ne sont pas prévues par les traités. En conservant leur statut, ils sont en mesure de s'identifier et de se prévaloir de ces programmes.
La sénatrice Dyck : L'accord conférera à la Première Nation de Yale des terres en fief simple. Est-ce la procédure normale adoptée dans le cadre des négociations, ou la Première Nation de Yale a-t-elle demandé explicitement que les terres lui soient conférées en fief simple au lieu que leur propriété soit accordée à la bande?
M. Rickford : Les titres en fief simple sont la norme.
La sénatrice Dyck : Ils sont aussi la norme. Si vous me le permettez, j'assurerai un suivi en vous posant des questions plus complexes.
Le président : Cela peut-il attendre la deuxième série de questions, si vous n'y voyez pas d'inconvénient?
La sénatrice Dyck : Puis-je amorcer le processus en posant tout de suite une question complexe? Elle concerne le règlement des différends.
Vous avez mentionné que l'un des principaux obstacles avait été le processus de médiation, que les intérêts de la Première Nation de Yale entraient en conflit avec ceux d'autres Premières Nations de la région. Je pense que les Stó:lō étaient préoccupés, entre autres, par le processus de règlement des différends. Quels sont les mécanismes prévus à cet effet? Font-ils partie du projet de loi lui-même, ou sont-ils gérés séparément par l'accord dont vous avez parlé dans votre discours?
M. Rickford : Il y a un peu des deux. Cela n'a rien d'exceptionnel. Ces conflits surgissent constamment dans le cadre de ces accords. La plupart des Premières Nations voisines réussissent à résoudre entre elles les conflits d'intérêts qui les opposent.
Lorsque les problèmes de chevauchement d'intérêts ne peuvent être réglés, le gouvernement du Canada offre aux Premières Nations concernées des services de médiation indépendante afin de les aider à parvenir à un accord. Dans le cas de la Première Nation de Yale, il a été nécessaire de prendre des mesures extraordinaires pour amener les parties à s'entendre, dont deux processus de médiation, le dernier ayant été mené par Vince Ready, un médiateur indépendant très respecté que les deux parties avaient accepté.
Étant donné que je me soucie du temps qui vous est alloué, je devrais ajouter que, comme je l'ai mentionné dans mon exposé, un mécanisme permanent est prévu pour régler tout conflit qui pourrait survenir dans le cadre de l'accord lui-même.
La sénatrice Dyck : Rien dans le projet de loi n'indique que ce processus se poursuivra? Voilà ce à quoi je voulais en venir. Le projet de loi comprend-il des dispositions indiquant que les intérêts divergents seront gérés d'une façon ou d'une autre?
M. Rickford : Un accord donne force de loi au processus de médiation que l'on envisage de mettre en place.
La sénatrice Dyck : Pourriez-vous nous indiquer un article du projet de loi qui traite de ce que vous venez de dire?
M. Barkwell : Oui, le projet de loi donne un poids juridique aux termes du traité lui-même, et ce dernier prévoit de nombreux mécanismes de règlement des différends ainsi qu'un processus de règlement. Cependant, le processus en question s'applique aux trois parties qui ont signé l'accord, à savoir la Première Nation de Yale, le Canada et la Colombie-Britannique.
En ce qui concerne les chevauchements d'intérêts et les problèmes qui pourraient subsister à l'avenir entre la Première Nation de Yale et les Stó:lō, la Première Nation de Yale sera en mesure de définir dans ses lois un processus de règlement des différends qui pourra s'appliquer, lorsqu'il sera nécessaire de répondre aux demandes d'accès des Stó: lō.
Les Stó:lō auraient aussi accès aux tribunaux, un autre processus normal. De plus, le chef Hope a donné la possibilité aux Stó:lō de participer avec lui à un protocole d'entente. Ce protocole d'entente, distinct du traité mais offert aux Stó:lō par le chef Hope, établit des dispositions détaillées sur le règlement des différends qui sont comparables à ce que renferme le traité même. Cela s'appliquerait aux nations Yale et Stó:lō si un tel accord était conclu.
La sénatrice Dyck : J'ai une dernière question.
Le président : Je vous donnerai la parole au prochain tour.
La sénatrice Dyck : Elle a tout à fait rapport avec ce sujet. Le traité entre la Première Nation de Yale, la Colombie-Britannique et le Canada a-t-il été définitivement conclu?
M. Rickford : C'est ce que constitue cet accord.
La sénatrice Dyck : Oui?
[Français]
Le sénateur Demers : Bonjour, monsieur Rickford, votre français est excellent.
[Traduction]
Les représentants des Stó:lō, lorsqu'ils ont comparu devant les comités de la Chambre des communes, ont parlé des droits et titre ancestraux confirmés par un tribunal. Est-ce bien le cas?
M. Rickford : Je vous remercie de cette question. L'accord définitif de la Première Nation de Yale n'offrira pas de façon exclusive... et cela concernera d'abord les pouvoirs législatifs; est-ce mieux? Pourriez-vous répéter la question, s'il vous plaît?
Le sénateur Demers : Les représentants des Stó:lō, lorsqu'ils ont comparu devant les comités de la Chambre des communes, ont parlé des droits et titre ancestraux confirmés par un tribunal. Est-ce bien le cas?
M. Rickford : Les représentants des Stó:lō ont parlé des droits ancestraux dans les territoires traditionnels que les Stó:lō ont revendiqués, soit environ 1,33 million d'hectares.
Les groupes Stó:lō ont revendiqué des droits ancestraux et un territoire commun dans la région du canyon du Bas- Fraser. Les groupes Stó:lō ont des causes civiles en suspens devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique au sujet de leurs droits et titre ancestraux sur les territoires traditionnels qu'ils revendiquent; toutefois, aucune de ces revendications n'a encore été reconnue par les tribunaux.
Le sénateur Demers : Merci. Le Canada devrait-il accepter la modification proposée par les groupes Stó:lō à l'accord définitif de la Première Nation de Yale?
M. Rickford : L'association du traité des Stó:lō a proposé des modifications qui nuiraient au traité de Yale en raison de contraintes impossibles à gérer relativement à la propriété qu'exerce la Première Nation de Yale sur une partie importante des terres visées par le traité, y compris des réserves indiennes Yale existantes. Durant plusieurs décennies, les points de vue opposés des Yale et des Stó:lō n'ont pas été conciliés, même au moyen de plusieurs processus indépendants de médiation récents.
L'exigence relative à une entente sur les territoires partagés représenterait le pouvoir de rejeter le traité pour les Stó: lō.
La sénatrice Raine : Merci beaucoup d'être ici. Je connais très bien la région. J'aimerais obtenir des éclaircissements, si vous voulez bien, au sujet du fait que les Yale font partie des Stó:lō, car les représentants des Stó:lō ont décrit la Première Nation de Yale comme une Nation Stó:lō. Est-ce exact? Quelle importance l'affiliation des deux groupes revêt-elle dans le Processus des traités de la Colombie-Britannique?
M. Rickford : Je vous remercie de la question. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la zone que les Stó:lō revendiquent comme un territoire traditionnel couvre une superficie de 1,33 million d'hectares et les terres de la Première Nation de Yale, d'une superficie de 1 966 hectares, se trouvent à l'intérieur de cette vaste région géographique. Dans la zone du canyon du Bas-Fraser, il y a aussi des parcelles de terre qui deviendront des terres de la Première Nation de Yale, y compris des réserves indiennes que la Première Nation de Yale détient depuis plus d'un siècle.
La plus grande réserve du canyon du Bas-Fraser est détenue au profit d'une bande du groupe Stó:lō. Les groupes Stó:lō revendiquent des droits ancestraux et un territoire commun dans la région du canyon du Bas-Fraser, y compris des parcelles de terre appartenant à la Première Nation de Yale dans cette zone. Les Stó :lō désignent ce secteur comme la pêcherie de « Five Mile ».
La sénatrice Raine : A-t-on envisagé d'exclure la zone visée par ce différend de l'ensemble du traité? Cela aurait-il pu être fait, et le traité pourrait-il tout de même aboutir?
M. Rickford : Le processus des traités de la Colombie-Britannique permet aux Premières Nations de s'identifier pour la négociation d'un traité et prévoit des négociations sur les intérêts. Cela découle des recommandations du Groupe de travail sur les revendications en Colombie-Britannique, composé du Sommet des Premières Nations, du Canada et de la Colombie-Britannique. La bande indienne de Yale est une bande distincte aux fins de la Loi sur les Indiens. La bande de Yale, aussi connue comme la Première Nation de Yale, s'est identifiée comme une entité distincte des Stó:lō, et c'est sur cette base qu'elle a participé au Processus des traités de la Colombie-Britannique. Le Canada respecte la décision de la Première Nation de Yale de s'auto-identifier.
La sénatrice Raine : Vous n'avez pas vraiment répondu à la question. Je sais que ce sont des situations très difficiles, mais est-il préférable de régler cela maintenant et que l'on s'adresse aux tribunaux si nécessaire?
M. Barkwell : Je pense que le secrétaire parlementaire a répondu à une partie importante de votre question. Cependant, pour ce qui est de la suggestion d'exclure ces terres, je tiens à souligner au comité que neuf des seize réserves de Yale sont situées dans le canyon de la pêcherie de « Five Mile ». Je crois que sur le plan de la négociation, les Yale seraient dans une position intenable et inadéquate s'ils proposaient que leurs propres terres de réserve soient exclues d'un accord définitif qui serait négocié avec eux. C'est pourquoi nous devions trouver un équilibre entre les intérêts exprimés par les Stó:lō et la volonté des Yale de conclure un traité qui inclut leurs propres terres de réserve ainsi que d'autres terres publiques provinciales dans cette région.
La sénatrice Raine : Je comprends. L'une des préoccupations des gens qui vivent là-bas, c'est de contrôler l'accès et de mettre en place un mécanisme pour permettre aux personnes qui en ont le droit — ils le reconnaissent — d'y aller et d'avoir libre accès au territoire qu'ils utilisent, tout en continuant eux-mêmes de s'en occuper adéquatement. Est-ce l'une des raisons pour lesquelles le traité est si important?
M. Rickford : C'est certainement l'une des parties les plus importantes, dans la mesure où il y a des problèmes et des différends persistants, voire prolongés, relativement à ces questions précises qui, selon nous, ont été examinées.
Le sénateur Watt : Je vais tenter de limiter mes questions le plus possible afin que nous ne restions pas ici toute la nuit.
Je vous remercie de votre exposé. J'aimerais revenir sur la question du mécanisme de règlement des différends dont vous avez parlé. Si j'ai bien compris, vous avez dit que le mécanisme de règlement des différends est un protocole d'entente. Il ne fait pas partie du traité; il est distinct du traité et concerne le traité. Est-ce bien cela?
M. Rickford : Et il est offert par le chef Hope.
Le sénateur Watt : En ce qui concerne le mécanisme de règlement des différends, s'il y a des conflits entre le bénéficiaire du règlement et la Couronne, auront-ils un mécanisme distinct de règlement des différends, uniquement pour composer avec les lacunes quant à la mise en œuvre de l'accord? Je veux que ce soit bien clair.
M. Rickford : Si je comprends bien votre question, la mise en œuvre, le règlement des différends et les chevauchements...
Le sénateur Watt : Je ne parle pas des chevauchements. Je ne parle pas de l'autre conseil tribal. Je parle des bénéficiaires de cet accord. Ont-ils leur propre mécanisme de règlement des différends?
M. Rickford : Oui.
Le sénateur Watt : Est-il distinct de celui qui est lié aux autres groupes concernés?
M. Rickford : Aux Stó:lō. C'est exact.
Le sénateur Watt : Est-il juridiquement contraignant? Il ne fait pas partie du traité. Comment devient-il exécutoire? Vous avez parlé des tribunaux. Je voudrais savoir s'il est juridiquement contraignant ou non.
M. Rickford : Parlez-vous du protocole d'entente?
Le sénateur Watt : Oui.
M. Barkwell : Vous faites référence à une offre présentée par le chef Hope aux représentants des Stó:lō en vue de conclure un protocole d'entente. Dans cette offre, qu'il leur a envoyée en janvier dernier, il a défini les éléments clés et il a parlé du caractère contraignant du protocole d'entente.
Je tiens à rappeler au comité que les Stó:lō n'ont pas encore accepté cette offre; mais il propose que les parties conviennent que le protocole d'entente est exécutoire, qu'il doit avoir, dans les faits, une durée initiale de 10 ans et qu'il pourrait être renouvelé conformément aux recommandations du groupe de travail qui serait mis sur pied.
La réponse à votre question, c'est que les Yale proposent que ce soit un accord exécutoire.
Le sénateur Watt : Vous avez en partie répondu à ma question, mais pas au sujet de l'aspect exécutoire. S'il s'agit d'un texte distinct, d'un protocole d'entente, qui vise les autres groupes concernés, comment peut-il être juridiquement contraignant?
M. Barkwell : Il reviendrait à l'avocat...
Le sénateur Watt : D'après ce que je comprends, d'après ce que vous lisez, il s'agit davantage d'une proposition que d'un texte juridiquement contraignant.
M. Barkwell : Si l'accord aboutissait et que les Stó:lō convenaient avec les Yale de conclure un tel accord, chaque partie serait représentée par un avocat; ces avocats rédigeraient ensemble avec soin les modalités de l'accord pour s'assurer qu'il s'agit d'un accord exécutoire, puisque c'est l'objectif des deux parties. Ce n'est pas le même genre d'accord que ce qui se trouve aujourd'hui dans ce projet de loi, qui est un document protégé par la Constitution. Quoi qu'il en soit, l'objectif est qu'il soit juridiquement contraignant, comme il a été établi et convenu par les deux parties.
M. Rickford : Permettez-moi d'ajouter, sénateur, en tant qu'avocat ayant moi-même préparé de nombreux protocoles d'entente, qu'il y a de très bonnes raisons à cela. Ils servent souvent de fondement, comme vous le savez sûrement, aux accords exécutoires. Dans ce cas-ci, le protocole d'entente aurait cet effet pour une période initiale, tel que prévu par la Première Nation de Yale, afin que le groupe de travail proposé puisse en fait modifier ou reformuler les choses à sa convenance.
Les parties conviendraient de renouveler les modalités du protocole d'entente en conformité avec les recommandations du groupe de travail; c'est quelque peu particulier, mais cela constitue une bonne approche pour résoudre les conflits qui peuvent survenir au fil du temps.
Le sénateur Watt : Je crois que je n'insisterai pas davantage sur cette question. Je pense que nous pouvons accepter que nous ne sommes pas d'accord sur ce point.
La sénatrice Seth : Je vous remercie beaucoup de votre présence et de votre excellent exposé.
Vous avez dit qu'en vertu du processus de règlement des différends proposé par la Première Nation de Yale, les parties conviennent de résoudre les conflits dans un climat non accusatoire et axé sur la collaboration, d'abord en tenant des échanges informels, ensuite, des négociations de bonne foi, et, en tout dernier lieu, en ayant recours au mécanisme de règlement des différends si nécessaire. Qu'arrivera-t-il ensuite? Le gouvernement fédéral interviendra-t-il si le problème n'est pas réglé grâce à la médiation? Je voudrais en savoir davantage à ce sujet.
M. Rickford : Comme je l'ai dit dans mon exposé, le principal objectif est que le règlement de tout différend se fasse dans le cadre du protocole d'entente exécutoire et dans un esprit d'autonomie gouvernementale entre les nations.
Le sénateur Meredith : Je vous remercie, monsieur Barkwell, de comparaître aujourd'hui devant nous, et monsieur Rickford, je vous remercie de votre exposé.
L'un des mots qui ne cessent de revenir, depuis que je fais partie du comité qui traite des questions relatives aux Premières Nations, c'est la consultation. À votre avis, y a-t-il eu suffisamment de consultations entre les deux groupes pour en venir à cet accord, ou aurions-nous pu faire mieux, en tant que gouvernement, pour obtenir davantage d'informations de la part des deux groupes avant d'en arriver à cet accord? J'ai une deuxième question également.
M. Rickford : Au sujet de la consultation, pour que ce soit clair, sénateur, nous ne parlons pas de l'obligation de consulter qui pourrait être comprise au sens de la loi ou en tant que politique dans d'autres mesures législatives du gouvernement fédéral.
L'objectif de ce processus — et selon moi, le Processus des traités de la Colombie-Britannique a fait de l'excellent travail —, c'est de faire participer les parties à un processus qui permet de reconnaître et de concilier leurs terres respectives traditionnelles et, comme nous l'avons dit en répondant aux questions des deux côtés, qui permet d'entreprendre un processus que j'appellerais consultatif, dans la mesure où elles ont soit été en médiation, soit en négociation par l'entremise du processus des traités pour comprendre ce que l'accord définitif proposerait. Dans ce cas- ci, puisqu'il y a des terres en litige, des mécanismes appropriés doivent être compris pour régler les différends, comme je l'ai dit tout à l'heure, qui surviennent de temps à autre en raison du chevauchement entre les Premières Nations.
Le sénateur Meredith : Merci. Craignez-vous que cette mesure législative soit contestée devant les tribunaux? Si elle l'est, quelle sera votre stratégie pour la mettre en œuvre, étant donné qu'il reste deux ans avant sa mise en œuvre complète?
M. Rickford : C'est une bonne question. Nous espérons beaucoup que cet accord ne sera pas seulement finalisé. Il a déjà été examiné par le comité permanent de l'autre chambre. Nous estimons qu'il y a des mécanismes en place pour le règlement des différends et les arrangements à cet égard; nous encourageons donc les parties à utiliser ces options. Je pense qu'elles sont souples, qu'elles sont dynamiques et qu'elles tiennent compte des préoccupations exprimées par d'autres groupes, en particulier les groupes Stó:lō.
Je suppose que la réponse la plus courte à votre question serait que cela pourrait se retrouver devant un tribunal, mais je pense qu'en ce qui nous concerne, il était important d'en arriver à un accord définitif qui respecte le Processus des traités de la Colombie-Britannique, lequel est bien établi, accomplit de l'excellent travail et aide les Premières Nations à régler leurs griefs historiques concernant le territoire et ses ressources grâce à un accord définitif avantageux et utile.
Le sénateur Meredith : Vous parlez d'options. Pouvez-vous nous en dire plus sur les options qui, selon vous, sont offertes à ces deux groupes?
M. Rickford : Nous avons fait allusion, en termes techniques, aux questions soulevées par le sénateur Watt selon lesquelles un protocole d'entente créerait une force exécutoire entre les Stó:lō et les Yale, et qu'un groupe de travail serait mis en place afin de détecter les problèmes au fur et à mesure qu'ils surviennent. Contrairement à un accord permanent juridiquement contraignant, si vous voulez, le protocole d'entente permettrait de disposer de différentes options ou de soulever des enjeux par l'intermédiaire d'un groupe de travail mixte, peut-être pour envisager de nouvelles situations ou un ensemble de circonstances relatif à un quelconque différend.
Le sénateur Meredith : Vous avez mentionné quelque chose à propos de la résolution de conflit. Compte tenu de la rapidité avec laquelle on nous demande, encore une fois, d'adopter ce projet de loi, en ce qui concerne le statu quo touchant la saison de la pêche — on en a déjà parlé —, qu'est-ce qui se passe entre le moment où nous adoptons le projet de loi et celui où il est mis en œuvre? Est-ce que c'est le statu quo, ou bien est-ce qu'il y a une disposition qui s'applique dès maintenant, permettant aux Stó:lō d'avoir accès aux terres de la Première Nation de Yale, où ils pourront aller récolter, et ainsi de suite? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
M. Rickford : C'est une excellente question, sénateur. Je vais demander à M. Barkwell d'y répondre, concernant l'importance du facteur temps concernant les pêches.
M. Barkwell : Je vais répondre à quelques aspects de votre question. Je pense que les membres du comité doivent comprendre que la Première Nation de Yale et leurs voisins Stó:lō ne s'entendent pas depuis fort longtemps. La mésentente existait avant le processus de négociation des traités et se poursuit. Chaque année, quand arrive la saison de la pêche, des problèmes risquent de surgir entre les deux groupes. C'est le ministère des Pêches et des Océans qui gère la pêche. C'est là qu'on établit les quotas, qu'on détermine qui va pêcher là, et quand, et comment la pêche au saumon va se dérouler.
Les choses ne changeront pas cette année. Les règles qui s'appliquent à la Première Nation de Yale et aux Stó:lō sont les mêmes que depuis bien des années. Le traité qui doit prendre effet comporte des dispositions, tout comme l'accord visant les récoltes, qui énoncent des règles légèrement différentes s'appliquant aux membres de la Première Nation de Yale. Les quotas attribués à la Première Nation de Yale en application du traité se fonderaient sur l'abondance, ce qui correspond à un pourcentage des pêches; sur les plans alimentaires, sociaux et cérémoniels, il y a un maximum. Il en est ainsi pour que les pêches continuent dans l'ensemble de ce secteur du Fraser.
Nous avons aussi veillé, dans notre processus de sélection des terres, à ce qu'il reste un endroit ouvert au public pour la mise à l'eau, car cela ne faisait pas partie des quotas de saumon offerts à la Première Nation de Yale. Ainsi, les pêcheurs qui utilisent la voie navigable publique et qui veulent y avoir accès — le fleuve Fraser — pourront y avoir accès.
Nous avons aussi intégré dans le traité, pour répondre autant que possible aux préoccupations des Stó:lō, des dispositions selon lesquelles les pêcheurs des Premières Nations, principalement les Stó:lō, obtiennent un accès raisonnable aux terres de la Première Nation de Yale pour se rendre au fleuve s'ils agissent de façon sûre et responsable, conformément aux critères qui ont été établis dans le traité.
Le président : Nous allons entendre quelques questions de plus. Nous avons déjà dépassé le temps alloué, et nous avons deux autres panels après celui-ci. Je vais vous laisser poursuivre avec les questions, mais il faut que les questions et les réponses soient brèves, je vous en prie.
Le sénateur Tannas : Rapidement, en réponse à la question du sénateur Watt, vous avez mentionné que le protocole d'entente proposé serait obligatoire. Il serait obligatoire en ce sens que les parties seraient obligées d'utiliser le processus existant pour résoudre les conflits, c'est bien ça? On recourt à la médiation, mais la médiation pourrait échouer, n'est-ce pas?
M. Rickford : Je précise qu'il n'est pas question de médiation obligatoire. Je veux être très clair. L'effet initial de cela dure 10 ans à compter de la date d'entrée en vigueur de l'accord définitif de la Première Nation de Yale.
En signant, les parties conviendraient de renouveler le protocole d'entente, mais ce serait conformément aux recommandations du groupe de travail qui, au fil du temps, pourrait déceler d'autres problèmes.
Comme je l'ai déjà dit, c'est un accord dynamique, et c'est la raison pour laquelle cela reste un protocole d'entente, plutôt qu'un accord obligatoire qui constituerait l'étape suivant le protocole d'entente dans la plupart des processus juridiques. Les parties ont conçu assez judicieusement un processus permettant de traiter des questions qui surgissent.
Le sénateur Tannas : Je veux bien comprendre : si les Stó:lō signent ce qui est proposé, est-ce que le processus proposé pourrait comporter un résultat obligatoire pour les deux parties? Est-ce qu'un conflit pourrait faire l'objet d'une résolution obligatoire?
M. Rickford : Encore une fois, sénateur, cela pourrait éventuellement se produire, mais le protocole d'entente initial de 10 ans donne au groupe de travail l'occasion de résoudre les problèmes qui peuvent surgir.
Le sénateur Tannas : Merci.
Monsieur Barkwell, vous étiez là pour la médiation. Si j'ai bien compris, aux audiences du comité de la Chambre, les représentants des Stó:lō ont dit que la médiation avait échoué. Est-ce ce que vous avez constaté?
M. Barkwell : Je dois préciser que je n'étais pas là comme vous le dites. C'est M. Ready, un médiateur indépendant, qui a mené les choses. Il ne m'a pas fait intervenir, et n'a pas fait intervenir le médiateur provincial non plus. Il était là pour faciliter les choses et pour réunir les représentants de la Première Nation de Yale et des Stó:lō et pour chercher une solution.
Après le processus de mise en présence des deux parties, lequel a duré six mois, il nous a fait savoir que, malgré certains progrès et les efforts déployés pour en arriver au genre d'accord que le chef Hope a par la suite proposé, il y avait des problèmes irréconciliables quant à la propriété des terres en question. C'est ce qui est ressorti de la médiation.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Je vous souhaite la bienvenue.
La Première Nation de Yale et les Stó:lō ont amorcé la négociation du traité au début du processus en Colombie- Britannique, mais ils ont inclus la pêcherie dite de « Five Mile » dans leur énoncé des terres visées.
Pourquoi la Première Nation de Yale a-t-elle obtenu ces terres?
M. Rickford : Merci, madame la sénatrice. Je précise que l'accord de la Première Nation de Yale décrit son droit de récolter le poisson et les plantes aquatiques aux fins alimentaires, sociales et cérémonielles dans un secteur ou des secteurs de pêche bien définis.
Il y a eu des quotas pour cinq espèces. L'accord définitif décrit un processus de négociation des quotas relatifs à d'autres espèces, si c'était nécessaire à l'avenir. Il décrit le rôle que joue la Première Nation de Yale dans la planification et la gestion coopérative des pêches et des questions connexes à votre question.
Dans ce cas, la gestion et la conservation du poisson et des plantes aquatiques, ainsi que de l'habitat du poisson continuent de relever du Canada et de la Colombie-Britannique, conformément à leurs pouvoirs.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Si la Première Nation de Yale adoptait des lois qui entraient en conflit avec les lois provinciales ou fédérales, quelles lois l'emporteraient?
M. Rickford : J'ai énoncé dans ma présentation ce que l'accord lui-même prévoit, ainsi que les domaines qui relèveraient des lois fédérales et provinciales, le cas échéant. Les lois fédérales et provinciales prévaudraient dans les domaines comme les services de santé, l'ordre public, la paix et la sécurité, les immeubles et les travaux publics, la circulation et le transport. Je pense avoir mentionné que les lois de la Première Nation de Yale doivent être cohérentes et répondre à certaines exigences et normes dans certains domaines clés, dont la célébration du mariage, l'éducation et l'adoption.
Pour ce qui est des lois fédérales, elles ne seraient prédominantes que pour les questions d'intérêt national. Il s'agirait du droit criminel, de la défense nationale, de la propriété intellectuelle et, bien sûr, de l'immigration.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Ils seront autonomes, mais devront quand même se soumettre aux lois des autres?
M. Rickford : Eh bien, les lois fédérales et provinciales continuent de s'appliquer dans ces domaines particuliers pour des questions de politique publique dont l'importance est évidente. Nous admettons cela, je pense, mais il ne fait aucun doute que l'accord lui-même doit, en l'espèce, donner à la Première Nation de Yale un outil majeur, non seulement sur le plan de son identité propre, mais aussi sur le plan de la gouvernance et des bienfaits qui en découlent et dont le moindre n'est pas, d'après moi, une économie plus vigoureuse et plus saine pour la communauté.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Merci.
Le sénateur Watt : Même si vous avez mentionné que la compétence demeure partagée entre le fédéral et le provincial, concernant la gestion des pêches, cela signifie qu'ils n'ont pas vraiment d'accord de cogestion. Cela ne fait pas partie du traité.
M. Barkwell : Avez-vous parlé d'écogestion?
Le sénateur Watt : Non, de cogestion.
M. Barkwell : Le chef Hope pourra en parler davantage quand son tour viendra, mais Yale entretient de bons rapports avec le ministère des Pêches et des Océans. C'est une approche très coopérative de la gestion des pêches. Le traité énonce un processus de mobilisation des représentants de Yale et de Pêches et Océans, de sorte qu'ils puissent présenter des recommandations conjointes sur la gestion des pêches pendant une année donnée. Il faut l'approbation du ministre des Pêches et des Océans, mais le processus est coopératif, entre les représentants de Yale et ceux de Pêches et Océans.
Le sénateur Watt : C'est semblable à de la cogestion.
M. Barkwell : Le processus est semblable.
Le président : Merci beaucoup. Madame la sénatrice Dyck, vous pouvez y aller pour une dernière question.
La sénatrice Dyck : Ça va aller; je vous remercie.
Le président : Je remercie les témoins d'avoir comparu. Désolé de vous avoir gardés plus longtemps que prévu.
Nous accueillons maintenant la Première Nation de Yale, représentée par le chef Norman Hope.
Chef Hope, nous sommes impatients d'entendre votre exposé.
Je rappelle aux sénateurs que nous entendrons un troisième témoin tout de suite après, par vidéoconférence. Pour que nous puissions nous en tenir à notre horaire, ou pour rattraper un peu de notre retard, je vous prie de veiller à ce que les questions et les réponses soient précises et concises.
Chef Hope, je sais que vous avez quelques mots à dire pour commencer. Allez-y, je vous en prie.
Norman Hope, chef, Première Nation de Yale : Merci, monsieur le président. Je suis ravi d'être ici. Je remercie les sénateurs de m'avoir invité à venir témoigner devant votre comité. Les 17 dernières années ont été un véritable marathon.
J'aimerais poursuivre dans la même veine que les interlocuteurs précédents, MM. Barkwell et Rickford. Je veux aujourd'hui parler de quelques aspects essentiels. L'un d'eux, c'est que nous ne sommes pas des Stó:lō. Nous ne sommes pas une bande indienne Stó:lō. L'autre point que je veux aborder, c'est l'aspect géographique du secteur, celui qui est source de grande préoccupation pour mes voisins, les Stó:lō.
Commençons par la question de savoir si je suis un Stó:lō, ou si la Première Nation de Yale est une bande indienne Stó:lō. Je vous dis que non, ce n'est pas le cas. Au fil des années, nous avons fait de la recherche sur ce terme, « Stó:lō », et nous avons trouvé diverses versions de ce terme. En général, cela signifie « rivière », ou « peuple de la rivière ».
Il y a diverses façons de l'épeler. Auparavant, on l'épelait S-t-o-l-l-a, et il y avait aussi Stalo. On a aussi entendu une autre prononciation : STA-LOO, avec deux « O ». Il y a un autre terme qui désigne les gens qui vivent en aval, par rapport à nous. Ce sont les Achinko, ce qui signifie « le peuple en aval ».
D'après nos recherches, il y a les groupes de l'Upper Stó:lō, puis ceux du Lower Stó:lō. Divers historiens ont précisé qui étaient des gens de l'Upper Stó:lō et ceux du Lower Stó:lō. Il y avait un autre groupe, appelé les Tait par un individu portant ce nom de famille. À son point de vue, le peuple de Yale pourrait avoir appartenu à ce groupe des Tait, mais je n'en suis pas sûr.
Ce que j'ai vu de plus récent, c'est le terme qu'ils utilisent maintenant : cela s'épelle S-t-o — avec une petite ligne dessus — l-o, avec une autre ligne et un point dessus, ou quelque chose comme ça. C'est un terme établi récemment.
C'est dans les années 1970 que les Stó:lō ont créé cela. Je ne sais pas pourquoi. Dans les années 1970, la bande indienne de Yale était regroupée avec un certain nombre d'autres bandes indiennes de la vallée du Fraser, à des fins administratives. Affaires indiennes nous ont regroupés avec eux, car à cette époque, nous n'avions aucun pouvoir. Nous sommes un petit groupe. Nous ne pouvions pas faire beaucoup d'administration.
Nous avons été regroupés avec les Stó:lō. À ce moment, je pense que c'était le Conseil des Indiens du secteur Chilliwack. Ce groupe administrait autour de 24 bandes indiennes — l'argent destiné au logement, à l'infrastructure, ce genre de choses. Il y a longtemps que nous nous sommes séparés de ce groupe, et il s'est aussi beaucoup fractionné. Ils se sont regroupés quelques fois, mais ils se sont en fin de compte fractionnés en deux grands groupes : le Conseil tribal des Stó:lō et la Nation Stó:lō.
Il y a d'autres groupes, comme la Première Nation d'Union Bar, ou la bande de Peters, les Chehalis — qui ne font pas partie des Stó:lō. Il y en a plusieurs. Les Shxw'ow'hamel, voisins de la bande de Peters, se sont séparés du Conseil tribal des Stó:lō au cours de l'année passée.
Quand les grands chefs Stó:lō disent représenter 10 000 personnes, je mettrais cela en doute. Je ne le crois pas.
Ceux qu'ils appellent les « grands chefs », je ne sais pas quel pouvoir ils ont. Prenez la communauté appelée Scowlitz ou Sioux Warriors, près du lac Cultus.
Le président : Chef, je suis désolé de vous interrompre, mais nous aimerions nous concentrer sur les aspects positifs, plutôt que d'envisager un débat. Je peux vous garantir que notre but n'est pas de susciter un débat entre la bande de Yale et les Stó:lō. Je pense fermement que cet accord comporte pour vous des aspects positifs. Si ça ne vous dérange pas, puis-je vous demander de vous concentrer sur cela, de sorte que nous puissions vous poser des questions à ce sujet?
M. Hope : Je serai heureux de réorienter mes propos.
En ce qui concerne la géographie des lieux, le secteur dont il est question se trouve directement à l'embouchure du canyon du Fraser. Ce sont des secteurs où nous pêchons depuis le début des temps, puis la réserve y a été installée. Nous continuons d'occuper ce territoire, et nous en prenons soin depuis le début des temps. Nous avons entendu toutes les histoires de guerre qui se transmettent de génération en génération.
Le secteur dont nous parlons n'est pas très vaste. Il n'a pas cinq milles de long. Il se trouve à proximité d'un secteur que nous appelons le ruisseau Five Mile.
En ce qui concerne le traité à venir, il porte sur des terres encore moins vastes. Le ruisseau Five Mile, le ruisseau Sawmill, c'est une sorte de frontière entre la Première Nation Yale et les Premières Nations voisines situées au nord. De là, en aval, il y a à peu près un kilomètre de terres octroyées par l'entente. Puis il y a un espace — des terres publiques, je pense bien. Plus loin en aval, il y a d'autres terres octroyées par traité et de petites îles, dans le Fraser. Encore plus loin en aval, il y a un vaste territoire entre les terres octroyées par traité à la Première Nation de Yale. Le secteur qui est en jeu s'en trouve encore plus restreint. Les Stó:lō viennent pêcher et camper sur ces terres, mais leurs traditions changent. Il n'y a plus tant de personnes qui s'y rendent — il y a peut-être une demi-douzaine de campements. Ce n'est pas 10 000 personnes qui souhaitent avoir accès aux terres octroyées par traité à la Première Nation de Yale. C'est plutôt cinq ou six familles. Nous avons réalisé une étude à ce sujet, au cours de la dernière année, alors nous connaissons le secteur. Je veux m'assurer que vous comprenez cela. Ce n'est pas un vaste secteur, et il est encore plus petit en raison des secteurs aux abords qui ne font pas partie des terres octroyées par traité.
Nous n'avons pas pu négocier ces secteurs parce que nous sommes dans le canyon du Fraser. Il y a la laisse de crue et la laisse de basse mer, que nous n'avons pas négociées, faute de pouvoir le faire. Tout à coup, vous vous retrouvez à la voie ferrée du CN, où le terrain est très escarpé. Ils ont sculpté la pente pour y installer la voie ferrée du CN ou du CP. Cela redevient abrupt, puis on arrive à la Transcanadienne. Il n'y a pas de terre à négocier dans des endroits comme ça. De grandes sections bordant le fleuve sont comme ça et n'appartiennent à personne, mais elles restent des accès au fleuve que les gens peuvent utiliser pour exercer leurs droits issus d'un traité.
Je veux aussi que vous compreniez que la Première Nation de Yale ne va pas installer une barrière au milieu du fleuve Fraser. Personne ne peut faire cela. Nous n'avons pas négocié pour la rivière non plus. Nous n'en sommes pas les gardiens. De nombreux Stó:lō exercent leurs droits ancestraux ou leurs droits issus d'un traité. Ils ont mis un bateau à l'eau à Yale, qui est un endroit public. Encore là, nous n'avons pas négocié cet endroit. Nous n'empêchons pas ces gens de faire ce qu'ils aiment et d'exercer leur droit de pêcher. Nous aimerions travailler avec eux. Ils prennent un bateau très puissant pour se rendre dans les canyons et ils installent leur filet maillant. Ils le fixent à la rive du canyon du Fraser, à des terres qui appartiennent à la province ou à la couronne, j'imagine, mais pas à la Première Nation de Yale. Nous n'avons aucun moyen de les arrêter, et nous n'essayerions absolument pas de les empêcher d'exercer leurs droits ancestraux. Nous ne le ferions que s'ils ne se conduisaient pas convenablement, comme s'ils ne respectaient pas quelques règles simples que nous appliquons dans la gestion de nos terres. En tant que gouvernement, nous devons gouverner, et la gestion de la terre fait partie de cela.
Il est très important que vous compreniez que le secteur n'est pas vaste et qu'il y a peu de gens. Je crois fermement qu'il est possible d'en venir à une entente avec ces gens, qui sont mes amis et mes voisins. Je pense que nous pouvons le faire sans violence. Si ces grands chefs continuent de menacer de recourir à la violence, je dirais que cela deviendra un dossier à soumettre à la GRC. Ils ont intérêt à les surveiller, à les suivre et à veiller à ce qu'ils ne viennent pas à Yale avec l'intention d'être malfaisants ou de commettre des actes illégaux.
C'est un dossier pour la GRC, mais je suis prêt à travailler très fort pour en arriver à une entente avec les groupes Stó :lō et avec les gens au sujet de notre cohabitation. C'est mon objectif. Je sais que ce sera difficile et coûteux, et qu'il faudra du temps, à cause des avocats qu'il faudra des deux côtés. Conclure un accord obligatoire sera difficile, mais je suis prêt à y travailler. Ils ont 10 000 personnes à soumettre à un accord, alors que nous sommes peut-être 150. Je l'ai déjà fait. J'ai déjà lié le peuple de Yale au traité.
Je vais inviter les Stó :lō à venir négocier avec nous pour régler cela. Ils ne feront pas partie du traité de Yale comme ils le proposent. Ça ne fonctionne tout simplement pas comme ça. Ils ont le droit de négocier un traité comme le peuple de Yale l'a fait. Nous avons réussi à le faire. Nous sommes demeurés à la table; certains des Stó :lō ne l'ont pas fait. Certains sont restés, mais c'est leur façon de faire des affaires.
Est-ce qu'il me reste du temps?
Le président : Nous pourrions passer aux questions si vous le voulez, chef.
M. Hope : D'accord.
Le président : Vous pouvez encore ajouter quelque chose.
La sénatrice Dyck : Merci de votre présence, chef Hope. Je regardais le projet de loi portant sur la mise en vigueur de l'accord définitif concernant la Première Nation de Yale. Nous n'avons pas l'accord sous les yeux. Je parcourais le relieur, et l'une des premières choses qui me sont venues à l'esprit, c'est que dans votre accord, vous avez accepté la modification de vos droits.
Pourriez-vous nous expliquer ce que cela comporte? Normalement, nous parlons des droits relevant de l'article 35, qui sont vos droits ancestraux ou vos droits issus de traités. À quoi renoncez-vous pour conclure ce traité?
M. Hope : D'après ce que je comprends, les « droits ancestraux » ont été définis au cours de la négociation du traité. Nous aurons maintenant des droits issus d'un traité, plutôt que des droits ancestraux. Il y a une légère différence. C'est généralement ce que je constate.
Je ne pense pas que nous ayons renoncé à quoi que ce soit au cours de la négociation. J'ai déjà parlé avec un autre groupe de personnes, de la bande indienne de Peters, et avec leur conseiller juridique, pendant la présentation visant le traité de Yale, notre traité en général. Ils ont demandé ce qu'il y avait de mal à conclure un traité. Je ne pouvais penser à rien de négatif, et le conseiller juridique non plus. Je ne pense pas que nous ayons renoncé à quelque chose.
La sénatrice Dyck : Selon l'information que nous avons, l'accord définitif concernant la Première Nation de Yale peut être modifié en fonction des droits des autres peuples autochtones. L'accord définitif précise que les dispositions de l'accord définitif peuvent être modifiées, remplacées ou renégociées si un tribunal conclut qu'il porte atteinte aux droits d'autres peuples autochtones, par exemple, les Stó:lō.
Si le traité est signé et que les Stó:lō sont toujours mécontents, est-ce que cela signifie que votre accord définitif comporte des dispositions qui en permettraient la modification en fonction des besoins des Stó:lō?
M. Hope : Non, à moins que les Stó:lō ou un autre groupe démontrent qu'ils ont des droits ancestraux dans le secteur sur lequel nos négociations ont porté. Dans ce cas, à coup sûr, nous négocierions pour adapter le traité en conséquence. Il faut que les droits soient démontrés, et non simplement revendiqués.
La sénatrice Dyck : Il faudrait alors qu'un tribunal tranche.
M. Hope : Je pense bien que oui.
La sénatrice Raine : Merci. Il est bon de vous revoir.
En janvier, vous avez proposé aux groupes Stó:lō un accord renouvelable de 10 ans portant sur l'accès aux terres de la Première Nation de Yale.
Pouvez-vous nous faire part des principes généraux que vous avez inclus dans cette proposition, et énoncer certaines des façons dont l'accord que vous proposez pourrait atténuer les risques de conflits avec les Stó:lō?
M. Hope : Pour rendre les choses attrayantes pour les Stó:lō, j'ai suggéré de créer un groupe de travail composé de membres des Yale et des Stó:lō, tant de la tribu que de la nation. Chaque groupe y déléguerait des techniciens, des gens qui connaissent les pêches et des gens qui connaissent les terres environnantes, le secteur qui entoure les terres, ainsi que les gens. Je pensais véritablement qu'un groupe comme ça pourrait contribuer à la conclusion rapide d'un accord.
Quand ils ont des représentants à la table qui travaillent à négocier un accord, je ne pense pas qu'ils puissent en même temps d'un autre côté faire quelque chose de complètement différent. Ils menacent chaque année de recourir à la violence. S'ils sont à la table de négociation, je ne pense pas qu'ils continueront de menacer de recourir à la violence. Je m'attendrais à ce qu'ils respectent les gens à la table. Je ne sais pas si c'est utile.
Le sénateur Watt : Je n'ai qu'une question. Vous savez que vous devrez vivre avec l'accord et qu'il vous incombera de le mettre en œuvre. Je vous en félicite.
En ce qui concerne le traité que vous avez conclu avec la couronne, les représentants du gouvernement vous ont indiqué que vous ne relevez plus de la Loi sur les Indiens, mais plutôt de cet accord en particulier, qui est un traité, je pense. Vous dites être satisfait de cela. Est-ce que ce traité découle de l'article 35? Est-ce qu'il découle des droits constitutionnels de l'article 35, ou est-ce qu'il est complètement distinct?
M. Hope : Je ne suis pas un avocat. Je pourrai difficilement répondre à cela.
Le sénateur Watt : Je comprends. Merci.
La sénatrice Lovelace Nicholas : J'ai une question à laquelle vous n'avez qu'à répondre par oui ou par non. Cet accord, était-il à prendre ou à laisser?
M. Hope : J'aimerais répondre en un peu plus de mots.
La sénatrice Lovelace Nicholas : D'accord.
M. Hope : Non. Nous avons négocié de bonne foi, tout comme le Canada et la Colombie-Britannique. Les négociations ont été difficiles, longues et coûteuses. Nous croyons avoir poussé le Canada et la Colombie-Britannique au maximum. En ce qui concerne leur mandat, le peuple de Yale l'a trouvé acceptable. Nous l'avons ratifié. Nous pensons que c'est une bonne affaire. Bien entendu, tout le monde a dû faire des concessions, mais je crois que c'est une bonne affaire pour notre peuple, et l'accord a été accepté par la vaste majorité. Ce n'était pas un accord à prendre ou à laisser.
La sénatrice Lovelace Nicholas : Félicitations. Merci.
La sénatrice Beyak : Merci d'être venu, chef.
Vous avez mentionné que, si les Stó:lō ou quelque autre groupe que ce soit ne prennent pas bien soin des terres, s'ils ne gèrent pas les pêches convenablement, ce pourrait être un problème. Que feriez-vous en pareil cas? Avez-vous votre propre corps de police? Appelleriez-vous la GRC, la province? Quelle serait la solution?
M. Hope : Notre communauté est petite. Nous n'avons pas de corps de police. Nous compterions beaucoup sur la GRC et sur le ministère des Pêches et des Océans. Nous faisons les lois. Nous nous attendons à ce que la GRC les applique, et à ce que la Cour provinciale rende des décisions en conséquence. Nous ne pourrions pas avoir notre propre cour.
Pour ce qui est de la gestion, le ministère des Pêches et des Océans est responsable du poisson et de son habitat. Les Premières Nations, dont la Première Nation de Yale, travaillent en étroite collaboration avec eux au sein d'un même groupe, d'un comité comme celui-ci. Les Stó:lō ont plusieurs représentants, tout comme les Tsawwassen, les Musqueam et les fonctionnaires du MPO. Je m'attends à ce que les pêches soient bien gérées. Il faudra deux paliers administratifs, au moins dans la région de Yale : le gouvernement de la Première Nation de Yale et le ministère des Pêches et des Océans, au nom du gouvernement fédéral. Ils gèrent les eaux, le poisson et l'habitat du poisson. Ils n'ont pas compétence concernant la gestion des terres, en particulier les terres de la Première Nation de Yale reconnues par traité. Avec les deux paliers administratifs, nous pouvons veiller à ce que les pêches soient bien exploitées, gérées, surveillées et appliquées et, je l'espère, nous pouvons garantir des pêches agréables et sans violence.
Le président : Nous avons hâte d'être invités à un voyage de pêche, chef.
M. Hope : Vous êtes les bienvenus n'importe quand.
Le sénateur Demers : Merci de votre présence, monsieur Hope. Nous avons parlé un peu de hockey avant la partie, car vous êtes un amateur de hockey.
Si le projet de loi portant mise en œuvre de l'accord définitif concernant la Première Nation de Yale n'est pas adopté, quel effet cela produira-t-il sur la Première Nation de Yale? Selon vos réponses, il reste du travail à faire, n'est- ce pas?
M. Hope : Oui.
Le sénateur Demers : Comment voyez-vous cela, monsieur?
M. Hope : Ce serait une grande déception, mais rien ne changera énormément d'ici la date de prise d'effet, en 2015, alors la vie que nous connaissons continue.
Je ne peux pas imaginer un grand changement, mais ce serait très décevant, car nous discutons avec bien des gens qui veulent travailler avec nous en coentreprise. Nous avons hâte d'obtenir les fonds qui contribueront à notre développement économique, et nous avons hâte de ne plus être soumis à la Loi sur les Indiens. J'ai entendu ce qu'on dit — je ne veux pas être irrespectueux — que les Affaires indiennes progressent à pas de tortue. Après 34 ans en tant que chef, je veux que nous passions à autre chose et que nous accédions à l'autonomie gouvernementale. Si cela ne se produisait pas, ce serait terriblement décevant.
Le sénateur Demers : J'ai remarché que vous semblez très sincère; je peux le sentir. Vous ne faites pas cela pour vous- même, mais pour votre peuple. Je peux voir, quand vous parlez de déception, toutes les années que vous avez consacrées à cela. Sentez-vous maintenant que le moment est venu et que nous n'allons plus regarder en arrière? Je peux voir que ce n'est pas tant pour vous-même, sauf le respect que je vous dois; quand nous avançons en âge, nous planifions les choses pour les générations à venir, même si vous êtes 155, 160. Est-ce que vous en êtes à vous dire : « Voilà, nous y sommes », ou bien vous avez encore un peu d'hésitation?
M. Hope : Je suis un peu préoccupé, mais oui, nous y sommes presque. Au début des négociations, nous estimions qu'il s'agissait d'un traité sur les pêches, parce que nous comptons sur le poisson et que nous négociions cela. Le poisson, c'est notre vie. Cependant, au fil du temps, il est devenu de plus en plus évident que ce traité servirait à la jeune génération. Nous avons, au bureau, des jeunes qui travaillent avec nous. Pendant toutes les négociations, même les négociations de très haut niveau, nous avions des jeunes qui faisaient de l'excellent travail. Les jeunes du bureau vivent la transition et, de ce fait, connaîtront le processus de mise en œuvre. Ils travailleront avec des gens de leur âge, je pense. Je vais céder ma place dès que je le peux.
Le sénateur Demers : Merci infiniment.
Le président : Plusieurs personnes souhaitent poser des questions, alors assurez-vous de poser des questions précises, je vous prie.
Le sénateur Meredith : Je suis d'accord avec le sénateur Demers, en ce qui concerne votre sincérité, la transition que vous vivez et votre désir de voir cet accord adopté pour le bien de votre peuple.
L'une de mes questions porte sur les jeunes et sur la façon dont ils participent aux occasions de développement économique. Quels programmes avez-vous mis en place pour veiller à ce que les entreprises puissent démarrer et se maintenir, de sorte que le succès soit assuré pour l'avenir?
M. Hope : Nous avons un groupe que nous appelons le comité de développement économique. Ces gens se débrouillent avec peu de fonds, mais ils ont hâte d'avoir l'argent du règlement et l'argent destiné au développement économique. Avec ce comité, les jeunes membres du conseil d'administration ambitieux attendent déjà avec impatience d'utiliser les ressources naturelles du secteur qui sera nôtre.
Nous avons des conseillers, des comptables et des avocats. Nous estimons pouvoir donner du travail à bon nombre des jeunes. Deux de nos jeunes ont décroché un diplôme, cette année. Nous avons organisé une grosse cérémonie pour eux, l'autre jour. Nous sommes fiers de nos jeunes. Ils sont ambitieux. Ils sont capables de voir que quelque chose de nouveau pourrait se produire au sein de la communauté. Je dois souligner que nos voisins non autochtones ont aussi hâte. Nous avons grandi avec eux. Ce sont eux qui sont nombreux à avoir l'équipement, alors que nous n'avons rien; nous devons donc travailler avec nos voisins. Nous vivons une époque excitante, tant pour les aînés que pour les jeunes.
Je veux mentionner qu'il y a plusieurs années, à Victoria, avec Christy Clark et le ministre Pollock, le traité a été ratifié par l'Assemblée législative. Nous avions deux ou trois représentants de la communauté, dont un type sans grande importance, le chef Robert Hope, qui ont dit, il y a 15 ans : « Concluons une entente » avec la Colombie- Britannique et le Canada. Tout le monde a bien ri. Je dis que les jeunes sont très intéressés à tout cela. Nous avons consulté les gens à chaque étape, parfois mensuellement, pendant des années. Les gens, jeunes et vieux, sont très bien renseignés et ont hâte.
Le sénateur Meredith : Quelle est la valeur projetée de cela, sur le plan de la croissance économique au sein de votre Première Nation? Avez-vous quantifié cela?
M. Hope : Je l'ai fait, mais une importante partie de l'argent du règlement ira au remboursement du prêt que nous avons obtenu pour les négociations.
Le sénateur Meredith : En ce qui concerne la pêche commerciale et tout cela, quels sont les revenus que devrait amener un accès accru aux autres partenaires que vous allez faire intervenir? Avez-vous quantifié cela?
M. Hope : Pas du tout — pas moi —, mais je suis sûr que le conseiller aurait des chiffres sur la façon dont il nous aidera à le faire et nous fera des recommandations.
Le sénateur Tannas : Pour ce qui est du projet hydroélectrique, qui serait sans doute une installation au fil de l'eau, est-ce que le traité s'accompagnerait d'un processus d'approbation différent pour vous, avec les gouvernements provincial et fédéral, et cetera, et avec vos partenaires?
M. Hope : Pas encore. Nous avons négocié la quantité d'eau que nous espérons capter pour créer de l'énergie hydroélectrique, mais BC Hydro ne nous a toujours pas indiqué si elle va acheter l'électricité. Si le gouvernement fédéral ratifie le traité que la Colombie-Britannique a déjà ratifié et que le traité prend effet, il est à espérer que BC Hydro travaillera plus étroitement avec nous pour réaliser cela. Nous disons que nous avons acheté un nouveau réfrigérateur, mais que nous ne pouvons le brancher nulle part.
Le sénateur Tannas : Soixante-huit pour cent des membres de votre bande ont voté pour. D'après moi, les personnes qui ne se sont pas présentées pour voter étaient contre.
M. Hope : C'est juste.
Le sénateur Tannas : Combien de personnes ont voté contre?
M. Hope : Je n'ai pas les chiffres en mémoire. C'était un moment intéressant.
La sénatrice Seth : Merci beaucoup, chef Hope, de toute cette information. Je pense que ma question est un peu la même que celle du sénateur Tannas, mais je la pose quand même. Quelles occasions d'exploitation des ressources voyez-vous dans ce traité? Comment cela va-t-il produire un effet positif sur la Première Nation de Yale? Pouvez-vous nous l'expliquer?
M. Hope : De façon positive; j'espère vraiment qu'il permettra à nos gens de travailler et qu'il nous permettra de collaborer avec nos voisins, le district régional de la vallée du Fraser et la ville de Hope, et que notre niveau de vie s'améliorera. J'aurais toujours aimé que nous ayons des lampadaires, par exemple, comme dans les autres municipalités.
La sénatrice Seth : Qu'est-ce que ce traité apportera à la nouvelle génération? D'après vous, qu'est-ce qui se passera?
M. Hope : Je m'excuse, je n'ai pas compris votre question.
La sénatrice Seth : Qu'est-ce que ce traité apportera à la nouvelle génération? Comment réagiront-ils? Qu'est-ce qui se passera?
Le sénateur Meredith : Qu'est-ce qu'il apportera aux jeunes?
M. Hope : J'espère vraiment qu'en améliorant le niveau de vie des parents, celui des enfants s'améliorera également et qu'ils resteront sur les bancs d'école plus longtemps. Je parle ici de meilleures conditions de vie. Nous avons des gens pauvres qui vont à l'école le ventre vide. Nous espérons pouvoir changer cela en améliorant leur niveau de vie, en créant des emplois et en offrant de meilleurs programmes de formation et en offrant à tous de meilleurs programmes. On veut améliorer les conditions de vie pour que les jeunes puissent continuer d'étudier. C'est ce que je souhaite. C'est ainsi que j'envisage l'avenir.
La sénatrice Raine : J'aimerais que vous nous expliquiez encore une fois comment les familles pourront avoir accès aux endroits où elles avaient l'habitude d'aller pêcher. Recevront-elles un bon accueil dans votre communauté?
M. Hope : Au cours de la dernière année, j'ai participé à des séances de médiation avec leurs grands chefs et leurs avocats et conseillers. J'ai aussi eu des conversations, sans vouloir miner l'autorité des chefs, avec des gens de la communauté qui avaient des craintes au sujet du traité. Nous avons conclu un petit accord, que j'ai appelé un PE basé sur l'amitié et le respect, dans lequel ils ont accepté certaines conditions. C'est un PE. Nous avons accepté de maintenir leur accès.
Nous avons rencontré les anciens, et les familles élargies, et je leur ai dit que je pouvais voir leurs familles pêcher au même endroit pendant des générations. Les choses ne devraient pas changer, mais cela devrait les rendre plus sûres. J'ai l'intention de rencontrer une grande communauté qui a un comité sur le séchage du poisson. Il y a plusieurs familles au sein de cette communauté qui viennent à Yale pour faire sécher le poisson. Nous collaborerons avec eux. Nous allons les rencontrer pour discuter de diverses questions et poursuivre le renforcement de nos liens. Nous avons de bons rapports en ce moment et la situation ne pourra que s'améliorer. Je vois déjà que l'endroit sera plus sûr à l'avenir.
Je pense que j'ai tout dit.
Le président : Je vous remercie beaucoup de votre présence ce soir, chef Hope. Je sais que vous vous êtes déplacé, malgré un court préavis. Je vous remercie du temps que vous nous avez accordé et je comprends la passion qui vous a animé ce soir.
Nous accueillons maintenant notre troisième groupe de témoins, par vidéoconférence, soit le grand chef Joe Hall, président de la Nation Stó:lō. Il est accompagné par Jean Teillet, négociatrice principale et conseillère juridique.
Je m'excuse de notre retard. Ce n'est pas habituel pour le gouvernement d'être en retard, mais je crains que ce ne soit le cas ce soir. Nous avons hâte d'entendre votre exposé, et je vous laisse procéder comme bon vous semble.
Joe Hall, grand chef, président, Nation Stó:lō : Merci, monsieur le président. Tout le monde m'entend bien?
Le président : Oui.
M. Hall : Bonsoir, et je vous remercie de nous permettre de témoigner devant le comité permanent du Sénat. Comme nous n'avons pas beaucoup de temps, je vais être bref et aller droit au but.
Le gouvernement du Canada est sur le point de donner force de loi au traité de Yale, qui empiétera, indéniablement, sur les droits de milliers de membres du peuple Stó:lō. Ce faisant, il viole un des principes les plus fondamentaux et les plus essentiels du processus de négociation des traités, c'est-à-dire que le gouvernement ne ratifiera aucun traité tant que tous les différends liés à des chevauchements ou des territoires communs ne seront pas réglés.
Il conviendrait que vous demandiez au gouvernement pourquoi il viole ce principe fondamental. La Première Nation de Yale est incontestablement une communauté Stó:lō, qui a droit en vertu de ses droits collectifs et de son titre de jouir de la zone de pêcherie Five Mile. Les preuves à cet égard sont incontestables. Malheureusement, le traité lui accordera ainsi le pouvoir, protégé par la constitution, d'agir à titre de gardienne d'un endroit qui appartient depuis des millénaires à tous les Stó:lō.
Pressés de conclure le traité, les négociateurs en chef du gouvernement vous diront que tout a été fait pour tenter de régler le différend territorial. Je suis ici pour vous dire que c'est loin d'être la vérité.
Le gouvernement semble être convaincu qu'il a tout mis en œuvre pour régler la question. Étrangement, il en est venu à la conclusion qu'il fallait rouler les dés et aller de l'avant malgré le potentiel clairement explosif de la situation. Nous sommes très déçus du ministre Bernard Valcourt et du député de la région, Mark Strahl, qui ont négligé de participer activement aux discussions sur cet enjeu important.
Nous avons participé à tous les débats auxquels il nous a été donné de participer. Nous avons suivi toutes les règles et présenté, au fil des années, un nombre incalculable de mémoires au gouvernement, qui semble en avoir fait fi complètement.
La Première Nation de Yale a refusé de négocier aux séances coordonnées par la Commission des traités de la Colombie-Britannique et s'est montrée inflexible avec le médiateur nommé par le gouvernement fédéral, Vince Ready. Le comportement de la Première Nation de Yale à la table de négociations est directement lié au fait qu'elle avait déjà obtenu les approbations initiales du gouvernement. La notion de consultations bilatérales n'existe donc pas dans ce contexte. Le processus de consultations a été, de fait, contaminé. Je pense que c'est ce qui est ressorti aussi des commentaires de M. Rickford lorsque vous l'avez interrogé sur le processus de consultations.
Ce que cela veut dire, essentiellement, c'est que la mentalité du premier arrivé est ce qui a prévalu. Je fais partie de l'Association du traité des Stó:lō Xwexwilmexw qui regroupe sept Premières Nations Stó:lō, qui sont en négociations actuellement parce que nous avons bon espoir de conclure un traité.
La zone de pêcherie Five Mile fait partie de notre déclaration d'intention. La différence repose dans notre approche. Nous respectons les droits collectifs des Stó:lō et l'histoire du canyon, et nous voulons faire de la zone de pêcherie Five Mile une zone protégée où tous les Stó:lō, y compris ceux de Yale, pourront continuer d'exercer leurs droits à perpétuité. Nous participons au processus de négociations des traités depuis aussi longtemps que la Première Nation de Yale.
De toute évidence, une des grandes faiblesses du processus de négociation des traités, et c'est ce qui a de quoi étonner, c'est que le gouvernement fait fi de l'histoire. Les Stó:lō sont allés rencontrer nombre de sénateurs et de députés pour les sensibiliser et leur faire part de leurs inquiétudes. Nous l'avons fait à la demande de nos communautés, ce qui prouve notre volonté d'en arriver à une résolution du problème à la table des négociations.
Quelqu'un a déclaré dernièrement au sein du comité permanent de la Chambre que refuser d'adopter le traité de Yale équivaudrait à accorder un droit de veto aux Stó:lō. C'est tout à fait absurde. Nous n'avons jamais demandé un droit de veto. En fait, nous encourageons le Canada à adopter le traité de Yale, mais en y soustrayant la zone de pêcherie Five Mile jusqu'à ce que le différend soit réglé. Le gouvernement a procédé de cette manière ailleurs au Canada et cela a donné de bons résultats. Le Canada et la Colombie-Britannique accordent à la Première Nation de Yale des terres qui appartiennent de bon droit à tous les Stó:lō. Cela équivaut à du vol.
Les Stó:lō sont pauvres en terres et les réserves qu'ils ont ne leur permettent pas de répondre à leurs besoins économiques et sociaux. Nous protégeons nos terres et nos droits depuis très longtemps. Notre peuple ne se laissera pas faire ainsi.
Tous les parlementaires devront assumer la responsabilité de la décision qu'ils prennent de fermer les yeux sur les questions délicates entourant le traité de Yale, et assumer aussi la responsabilité du conflit qui en découlera et des dommages qui pourraient survenir. Nous avons fait de notre mieux pour régler la question à la table des négociations. Il est triste de voir que le gouvernement de l'heure fait passer la gloire très passagère d'avoir signé un traité avant son échec inévitable devant la Cour suprême.
En insistant sur le fait que les dispositions d'abrogation et de dérogation nous permettront d'aller en cour, le gouvernement confirme que c'est ce qu'il avait en tête. Je vous dis qu'il s'agit là d'une perte de temps et d'argent énorme.
Je m'arrête ici pour permettre à ma collègue, Jean Teillet, d'ajouter quelques commentaires pour clore notre exposé.
Jean Teillet, négociatrice en chef, conseillère juridique, Nation Stó:lō : Bonsoir à tous. J'aimerais d'abord éclaircir quelques faits qui semblent avoir été un peu confus dans les exposés précédents.
J'aimerais mentionner tout d'abord que dans le canyon du Fraser, soit la zone en litige, il y a environ 78 campements de pêche. Nous avons des cartes qui datent de plus de 100 ans — produites pour la plupart par le gouvernement fédéral, soit dit en passant — qui montrent que pendant toute cette période, seulement deux de ces campements appartenaient historiquement à la Première Nation de Yale. Tous les autres appartenaient à d'autres membres de la Nation Stó:lō.
Ce qu'il faut que vous sachiez également, c'est que plus de 50 p. 100 des terres que la Première Nation de Yale obtiendra dans le canyon ne sont pas des terres de réserve. Il est faux de prétendre que toutes les terres dont il est question ici sont des terres de réserve, car ce n'est pas le cas. Ces terres sont en grande partie des terres de la Couronne qui leur ont été concédées.
L'autre élément important, c'est que 60 p. 100 de la pêche vivrière provient du canyon. Cela représente donc toute une manne pour la Première Nation de Yale. Elle obtient des terres de réserve et elle obtient des campements de pêche auxquels elle n'a jamais eu accès ou qu'elle n'a jamais contrôlés par le passé. Comme 60 p. 100 des pêches des Stó:lō seront touchées, c'est un coup très dur pour eux.
Je veux également signaler que le processus de négociation des traités de la Colombie-Britannique comporte de graves lacunes. Il n'y a pas de mécanisme prévu pour régler les différends liés à des chevauchements et des territoires communs. Dans ce cas, nous ne parlons pas d'un chevauchement puisque nous considérons que la Première Nation de Yale fait partie de la Nation Stó:lō. Mais peu importe, il n'y a jamais eu de mécanisme pour régler ce genre de différend au sein du processus de la Colombie-Britannique.
En ce qui a trait au processus de consultations, la faille la plus importante tient au fait qu'ils sont venus nous voir avec un fait accompli. L'entente était déjà conclue lorsqu'ils sont venus nous voir au sujet des terres. Il est à noter que le chef Hope a même admis, lorsqu'il a témoigné devant le comité permanent de la Chambre des communes, que les terres n'ont jamais fait partie des négociations. Il n'avait pas l'intention de le faire, et il vient de vous le dire dans son exposé. Il a dit que ce n'est pas ainsi que cela fonctionne. La Nation Stó:lō ne fera pas partie du traité de Yale.
Comme mon collègue, le grand chef Joe Hall, vient de le mentionner, c'est pourtant ainsi que cela fonctionne dans des dizaines de traités ailleurs au pays. La question des chevauchements et des territoires communs est prévue dans d'autres traités. Pourquoi pas dans celui-ci? C'est une question importante que vous devriez vous poser.
L'autre point que je veux aborder est celui concernant les questions soulevées par des sénateurs au sujet des droits et titre ancestraux. J'aimerais souligner, au sujet de l'article 35, que les droits et titre ancestraux des Stó:lō ne sont pas touchés par la création de réserves. Les droits de pêche sont déterminés par la pratique au moment des premiers contacts. Les premiers contacts ont eu lieu en 1808 lorsque Simon Fraser a descendu le fleuve. Leur titre est établi en fonction de leur utilisation et leur occupation des terres en 1846 lorsque le traité de l'Oregon a été conclu.
Cela signifie que les droits et le titre que nous détenons découlent de notre utilisation et de notre occupation de ces terres depuis une époque où la ville de Yale, les réserves, les Indiens de Yale n'existaient pas. Tout cela est venu plus tard. L'idée voulant que l'on puisse abroger les droits ou le titre des Stó:lō, ou y déroger, en vertu de ce traité prouve que la création des bandes et des conseils a entraîné une confusion au chapitre des concepts. C'est ainsi qu'il faudrait interpréter le traité, c'est-à-dire que nos droits et notre titre ne sont abrogés, mais c'est parce que vous donnez les terres.
La seule mesure d'accommodement qu'on nous offre, c'est un accès. Que diraient les sénateurs qui sont propriétaires d'une maison si on leur disait qu'on leur prend leur maison, mais de ne pas s'en faire, car chaque fois qu'ils voudront venir y faire un tour, ils n'auront qu'à nous présenter une demande de permis et nous déciderons si cela nous convient? C'est exactement ce qui se passe ici. La Première Nation de Yale n'est pas propriétaire de ces terres. Vous les leur concédez. Vous les prenez aux Stó :lō et vous leur dites qu'ils seront maintenant assujettis à ses lois et qu'ils devront lui demander la permission pour y avoir accès. C'est ce que prévoit le PE. Voilà ce qui est inacceptable, car les terres n'ont jamais fait partie des négociations.
J'aimerais également souligner que le PE, qu'il soit juridiquement contraignant ou non, n'est pas ce qui importe. Il s'agit d'un accord de 10 ans seulement; dans 10 ans, il pourrait disparaître complètement, mais le traité s'appliquera pour toujours. L'idée est de faire en sorte que le PE cède le pas au traité, dans le temps et en droit. Le traité aura toujours préséance.
Voilà tout ce qui nous a été offert. On ne nous a jamais donné accès à une tribune appropriée pour régler ces questions.
Je termine sur ce qui suit. Nous avons proposé un amendement pour soustraire cette zone, et croyez-le ou non, il s'agit d'une petite partie du territoire. La majeure partie du territoire que la Première Nation de Yale obtient se trouve au bas du canyon, car c'est là où ses membres habitent et c'est là où se trouve son territoire. Nous ne contestons pas le reste du territoire. Nous contestons seulement la partie qui concerne le canyon, car c'est une question fondamentale pour nous. Cet amendement n'a pas pour effet d'opposer un veto à l'accord; c'est une solution très raisonnable et à laquelle on a eu recours à plus d'une occasion par le passé.
Je vais m'arrêter ici, à moins que le grand chef Hall ait autre chose à ajouter.
M. Hall : Je vais ajouter un élément. Les traités avaient pour but de stabiliser les relations et d'apporter de l'harmonie entre les Premières Nations et le reste de la population. Le traité de Yale rate complètement la cible à cet égard, et pire encore, il crée un horrible précédent pour les autres Premières Nations qui sont encore aux tables de négociation en Colombie-Britannique. C'est une question qui devrait préoccuper tous les politiciens au sein du gouvernement, car ils travaillent encore fort pour conclure d'autres traités dans la province. Nos collègues à la table des négociateurs en chef nous ont fait part de leur consternation au sujet de ce qui arrive à la Nation Stó:lō.
Merci. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Le président : Merci, chef Hall.
La sénatrice Dyck : Vous nous avez fourni beaucoup d'information, et je ne suis pas certaine d'avoir tout très bien compris.
Vous affirmez que les Stó:lō et les Yale appartiennent au même groupe, mais le chef Hope a dit qu'ils ne sont pas des Stó:lō. L'une des questions que je leur ai posées au sujet de l'accord final était si cet accord prévoit des accommodements pour ce qui est des droits des autres peuples, comme le vôtre. Vous pourriez donc vous considérer comme distincts. Il me semble qu'il a dit que l'accord final peut être amendé pour tenir compte de vos droits si les tribunaux rendaient une décision en ce sens.
Est-ce la goutte qui a fait déborder le vase? N'est-ce pas une option convenable?
M. Hall : En ce qui a trait aux jeux de sémantique auxquels on s'adonne ici au sujet des Stó:lō, la mère du chef Hope est originaire de Cheam et son père de Seabird, si je ne me trompe pas. Son grand-père a été le deuxième chef de la Première Nation de Seabird.
La Première Nation de Yale a fait partie du groupe qui a participé à la création de la réserve de Seabird. Nous avons toujours su cela, et le fait qu'on répète qu'ils ne sont pas des Stó:lō et les petits jeux de sémantique, il s'agit en fait du même groupe de gens. Nous les respectons et nous respectons leur droit d'être dans le canyon, et nous allons continuer de le faire parce que nous avons des parents au sein de la Première Nation de Yale.
Mme Teillet : En ce qui a trait à la deuxième partie de votre question, à savoir si l'accord prévoit une solution au problème ou permet aux gens de continuer à exercer leurs droits, nous sommes d'avis que ce n'est pas le cas. L'accord ne mentionne aucun groupe autochtone. Le chef Hope nous a dit lui-même à maintes reprises : « Nous ne vous traiterons pas différemment des autres et il n'est pas question que le nom Stó:lō apparaisse dans notre traité ». C'est ce qu'il nous a dit dans notre prétendue séance de médiation. C'est l'attitude qu'il a eue envers nous.
L'accord contient des dispositions concernant l'accès, mais nous devons obtenir un permis auprès du chef Hope pour pouvoir avoir accès à leurs terres, ce qu'il peut nous refuser pour divers motifs.
Il nous a déjà dit que si quelqu'un laisse des déchets, il pourrait lui refuser le droit de pêcher.
La sénatrice Dyck : Est-ce que vous avez soumis l'amendement que vous proposez lorsque le projet de loi a été discuté à la Chambre des communes?
M. Hall : Au cours des dernières années, nous avons proposé diverses solutions qui pourraient être envisagées. M. Barkwell était présent lorsque nous avons présenté ces solutions. En plus de présenter ces solutions, nous avons fourni une foule de données historiques pour montrer comment nous pourrions procéder. Nous savons qu'il ne peut y avoir d'amendement, parce que le comité permanent a jugé que cela était irrecevable, mais nous espérons qu'un membre ou un sénateur dise : « Cela a l'air simple. »
Nous répétons depuis de nombreuses années que 13 dispositions doivent être modifiées. Nous sommes d'accord pour que le traité aille de l'avant. Le retrait de la zone de pêcherie Five Mile n'a aucune incidence sur la plus grande partie de ce que reçoit la Première Nation de Yale dans le cadre du traité, parce qu'ils n'ont pas de pêcheurs concernés.
Cela change complètement la donne pour les Stó:lō, mais très peu pour la Première Nation de Yale si cela ne fait pas partie du traité. Comme ma collègue l'a mentionné, au sujet des réserves de Yale dont ils parlent, ce que le gouvernement du Canada et celui de la Colombie-Britannique répètent depuis trop longtemps, c'est qu'on accroît notre accès à leurs réserves. Ce ne sont pas leurs réserves. Ces réserves ont été créées pour les Indiens du district de Yale et les Stó:lō en faisaient partie, mais tout à coup, on se retrouve dans une situation où toutes les réserves passent sous leur titre. Le chef Hope l'a dit lui-même que ces terres de réserves ne sont pas utilisables parce qu'elles sont trop abruptes. Je pense que c'est en partie la réponse que vous cherchiez, madame la sénatrice.
Le sénateur Tannas : Je me demande si vous pourriez nous expliquer le concept des campements de pêche. Pourriez- vous nous dire où ils sont situés?
M. Hall : Les 77 lieux dont on parle actuellement sont des endroits où on peut encore pratiquer la pêche. Un certain nombre de points de pêche ont été détruits par la voie ferrée, l'autoroute, et dans une certaine mesure sans doute, par les lignes d'hydro et d'autres services publics.
Les eaux du fleuve sont très agitées dans cette zone. Lorsqu'il y a eu des discussions au sujet du point de débarquement sur la plage publique, qui se trouve dans la ville de Yale, en tournant le coin — si quelqu'un connaît l'endroit — je pense que le chef Hope en a parlé — il faut un bateau puissant pour contourner les tourbillons dangereux qui se trouvent au premier tournant.
Il est important de comprendre que le droit de passage sur les terres pour se rendre aux campements de pêche est restreint, et qu'il n'y a pas seulement 77 personnes qui se rendent à ces campements. Ce sont des familles tout entières. Certaines familles sont plus nombreuses que toute la communauté de Yale qui pêche à un endroit dans un de ces campements de pêche, et qui plus est, les campements de pêche ont des séchoirs. On ne peut pas modifier le processus de séchage, qui est lié à l'étroitesse du canyon, à la chaleur et au vent — on ne peut donc pas déplacer les séchoirs.
Mme Teillet : Je pense que ce que le chef Hall veut dire, c'est que ce sont des terres irremplaçables, absolument irremplaçables. On ne peut déplacer les campements de pêche ailleurs le long du fleuve, parce que le processus de séchage unique par le vent qu'utilisent les Stó:lō dans le canyon ne peut avoir lieu nulle part ailleurs, certainement pas en Colombie-Britannique. C'est quelque chose d'irremplaçable.
Le sénateur Tannas : Le point de pêche se trouverait entre la laisse de basse mer, et assurément plus bas, et la laisse de haute mer, mais sous celle-ci.
Qu'en est-il des séchoirs? Sont-ils situés entre la laisse de basse mer et de haute mer?
Mme Teillet : Nous parlions justement à un des pêcheurs cet après-midi. Il nous disait qu'il faut envisager le tout un peu différemment. Ses points de pêche, pour dire les choses ainsi, sont à cinq endroits différents, et deux d'entre eux ne sont même pas accessibles lorsque le niveau de l'eau est élevé et que les eaux sont agitées. Il ne peut pas s'y rendre. Il peut se rendre à d'autres à un autre moment, et parfois, il ne peut pas s'y rendre du tout. Les séchoirs sont situés plus loin sur la terre ferme, soit sur les terres qui seront données à la Première Nation de Yale dans le traité.
Comme il nous l'a mentionné aujourd'hui, il ne peut pas y avoir accès par bateau très souvent. Même si vous pouvez avoir accès aux points de pêche par bateau, vous ne pouvez pas avoir accès aux séchoirs par bateau. La solution ou l'idée qu'ils se trouvent en quelque sorte sous la laisse de mer ne fait aucune différence. À certaines périodes de l'année, comme en ce moment, naviguer sur le fleuve tient presque du suicide. Je ne sais pas si vous êtes déjà allés dans le canyon, mais les eaux y sont très agitées.
La sénatrice Dyck : J'aimerais revenir à ma question, car je ne comprends toujours pas très bien. En ce qui a trait aux accommodements qui peuvent vous être accordés pour remédier à vos préoccupations dans le cadre de l'accord final, je croyais avoir entendu les autres témoins dire que si vous obtenez une ordonnance du tribunal disant que vos demandes sont valides, l'accord final peut être modifié, mais vous dites que ce n'est pas possible.
Mme Teillet : J'ai sans doute mal compris votre question, sénatrice Dyck, et je m'en excuse. Je parlais des accommodements dans le cadre du processus de consultations.
Si je vous comprends bien, si les Stó:lō vont devant les tribunaux et qu'ils obtiennent une ordonnance confirmant leurs droits et titre dans le canyon, l'accord prévoit qu'il devra être réécrit.
Que contiendra le nouvel accord et qu'est-ce qui se passera alors? Nous ne savons pas si nous serons satisfaits du nouvel accord et si le canyon en sera soustrait entièrement. Nous ne savons pas ce qu'il en résultera, mais ils devront prendre des mesures pour réécrire l'accord ou le modifier, en tenant compte de la décision du tribunal. J'espère que cela répond à votre question.
La sénatrice Dyck : C'est plus clair, en effet. De là l'idée qu'il vous est impossible de participer à un accord contraignant. Vous ne voulez absolument pas participer à un tel protocole d'entente. Vous ne voulez pas envisager un accord contraignant.
Mme Teillet : Le problème avec le protocole d'entente, c'est qu'il concède des terres à la Première Nation de Yale et fait passer le statut des Stó:lō de propriétaires à utilisateurs. Nous nous considérons comme les propriétaires des terres, et le protocole d'entente part du principe que c'est la Première Nation de Yale qui en est la propriétaire. Elle en est la propriétaire et nous en sommes les utilisateurs. C'est le problème fondamental.
M. Hall : J'allais ajouter que ce dont parlait le chef Hope, c'est qu'il y a eu beaucoup d'intimidation pour chasser les pêcheurs, et c'est ce qui crée un malaise lorsqu'on parle d'accords ou de permis qui peuvent être refusés. Pensons au mot « raisonnable ». Nous savons à quel point il est difficile de définir ce mot. En raison de ce qui s'est passé, il est très difficile pour nous de dire oui à un protocole d'entente qui comporte une échéance, dix ans par exemple. Il n'y a aucune garantie que la prochaine administration voudra discuter d'une entente.
La sénatrice Dyck : Merci.
Le sénateur Tannas : Pour poursuivre sur le même sujet, dites-vous que ce ne serait pas possible? Vous ne pourriez pas signer le protocole d'entente, avoir un échéancier de 10 ans, et aller devant les tribunaux? Selon votre interprétation, si vous signez le protocole d'entente, vous ne pouvez pas avoir recours aux tribunaux pour faire valoir vos droits et avoir éventuellement gain de cause? Pourriez-vous avoir les deux?
Mme Teillet : Je ne pense pas que nous ayons envisagé la possibilité d'avoir les deux. Le protocole d'entente nous a été soumis. En fait, c'est la même position que celle adoptée par le chef Hope à partir du tout début, c'est-à-dire que les négociations ne portent pas sur les terres et qu'il s'agit uniquement d'une disposition sur l'accès. Nous n'y voyons aucun avantage. Si nos pêcheurs ne peuvent avoir accès à leurs séchoirs, s'il peut leur interdire l'accès à sa guise, à quoi bon conclure un protocole d'entente avec lui?
Son protocole n'entrera pas en vigueur avant 2015. Je pense que si les Stó:lō entament des poursuites devant les tribunaux, ce sera avant cela.
Le président : Merci beaucoup à vous deux. Je m'excuse encore de notre retard. Merci de vos observations et merci aussi aux sénateurs de leurs questions. Nous allons suspendre la séance quelques minutes, le temps de débrancher, et nous allons discuter du projet de loi C-62.
(La séance se poursuit à huis clos.)
(La séance publique reprend.)
Le président : Le comité convient-il de passer à l'étude article par article du projet de loi C-62?
Des voix : D'accord.
Le président : L'étude du titre est-elle réservée?
Des voix : D'accord.
Le président : L'étude du préambule est-elle réservée?
Des voix : D'accord.
Le président : L'étude de l'article 1, le titre abrégé, est-elle réservée?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 2 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 3 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 4 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 5 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 6 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 7 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 8 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 9 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 10 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 11 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 12 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 13 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 14 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 15 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 16 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 17 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 18 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 19 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 20 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 21 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 22 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 23 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 24 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 25 est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : L'article 1, le titre abrégé, est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le préambule est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le titre du projet de loi est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Le projet de loi est-il adopté?
Des voix : D'accord.
Le président : Est-ce que le comité désire joindre des observations au rapport?
Plaît-il au comité que je fasse rapport du projet de loi au Sénat?
Des voix : D'accord.
Le sénateur Watt : Demandez-vous le consentement pour voir si des membres sont contre ce projet de loi?
Le président : Pardon, sénateur Watt?
Le sénateur Watt : Je ne vais pas voter pour ce projet de loi.
Le président : D'accord. Je vais poser la question de nouveau.
Le sénateur Watt : Je veux simplement m'assurer que le compte rendu témoigne du fait que je n'ai pas voté pour ce projet de loi.
Le président : Je vais revenir en arrière et poser la question de nouveau.
Le projet de loi est-il adopté? Vous pouvez dire non, si vous le désirez.
Le sénateur Watt : Ma réponse est non.
Le président : Le projet de loi est-il adopté?
Des voix : Oui.
Le président : Avec dissidence, n'est-ce pas, sénateur Watt?
Le sénateur Watt : Avec dissidence.
Le président : Est-ce que le comité désire joindre des observations au rapport?
Non? Alors, plaît-il au comité que je fasse rapport du projet de loi au Sénat? J'imagine que c'est toujours le cas.
Merci à tous pour votre travail dans le cadre de cette étude. Je sais que c'était à la dernière minute et que nous étions pressés dans le temps. Il est passé 21 heures. Je vous remercie pour votre excellent travail et cette longue journée. C'est toujours un plaisir de travailler avec vous.
(La séance est levée.)