Aller au contenu
ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 10 - Témoignages (séance de l'après-midi)


EDMONTON, le mercredi 30 novembre 2011

Le Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd'hui, à 12 h 50, afin d'examiner l'état actuel et futur du secteur de l'énergie du Canada (y compris les énergies de remplacement).

Le sénateur W. David Angus (président) occupe le fauteuil.

Le président : Je déclare ouverte cette réunion spéciale du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.

Nous poursuivons notre étude de l'initiative Let's Talk Energy ici à Edmonton, la grande capitale de l'Alberta. Nous sommes en train de faire une tournée éclair de l'Ouest : hier et avant-hier nous étions à Vancouver, aujourd'hui nous sommes à Edmonton, et demain et vendredi, nous serons à Calgary. Nous examinons en profondeur tous les aspects de l'industrie du pétrole, de même que tous les éléments qui en découlent ou qui y sont associés, et dont il est question dans notre mandat.

Monsieur Vaasjo, bienvenue au comité.

Brian Vaasjo est président-directeur général de la Capital Power Corporation. Il a été nommé directeur de l'exploitation d'EPCOR en 2008 où sa principale responsabilité était la production régionale d'énergie électrique et les opérations hydrauliques. Une de ses responsabilités majeures consistait à renforcer les entreprises concurrentielles de production d'énergie et d'alimentation en eau de la compagnie dans toute l'Amérique du Nord, y compris par l'entremise des initiatives de charbon propre lancées par Brian.

Il est président d'EPLP, qui est maintenant CPILP, depuis son acquisition en 2005. Il est entré chez EPCOR en 1998 à titre de vice-président exécutif et directeur financier et il était à l'origine du PAPE et de l'émission de débentures et d'actions privilégiées par EPCOR.

Chez EPCOR, il était chargé des activités de développement et d'acquisition, des FA, y compris le projet Genesee 3 et la scission-distribution du Fonds de revenu UE Waterheater avant d'assumer le poste de président-directeur général de Capital Power.

Brian Vaasjo, président-directeur général, Capital Power Corporation : Monsieur le président et membres du comité, je tiens à vous remercier de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de comparaître devant vous. Il s'agit d'un projet important pour le Canada et je sais que vous et les membres du comité travaillerez très fort en vue de trouver des solutions qui nous permettent de relever les défis en matière d'énergie auxquels nous sommes confrontés comme pays.

Capital Power a jusqu'ici participé activement au dialogue national sur la politique énergétique du Canada par l'entremise de l'EPIC et a assisté aux réunions tenues à Banff, Winnipeg et Charlottetown. Capital Power Corporation est une compagnie de production d'énergie électrique indépendante en pleine croissance qui possède et exploite des installations situées dans toute l'Amérique du Nord qui génèrent plus de 3 300 mégawatts d'électricité.

Née des installations de propriété municipale d'EPCOR en 2009, CPC connaît énormément de succès à titre de société cotée en bourse à la Bourse de Toronto. Nous comptons tripler la taille de notre portefeuille d'actifs de production d'ici 2020. À l'heure actuelle, nous avons 16 centrales dans différents emplacements entre l'île de Vancouver et la Nouvelle- Angleterre, et nous sommes fiers d'avoir notre siège social ici à Edmonton.

Nos avoirs en portefeuille comprennent des installations de production d'énergie éolienne, de gaz naturel et d'électricité à partir du charbon. Ici en Alberta, le charbon continue à jouer un rôle important parmi les combustibles que nous employons et nous avons joué un rôle de chef de file en nous assurant que nos centrales alimentées au charbon sont parmi les plus propres de toute l'Amérique du Nord. En fait, nous avons été les premiers à introduire en Amérique du Nord la technologie de production d'électricité à partir du charbon supercritique il y a une dizaine d'années avec notre centrale Genesee 3.

Avec TransAlta, nous sommes maintenant propriétaire d'une deuxième centrale de production supercritique, soit le projet Keephills 3 à l'ouest d'Edmonton. C'est un projet d'une valeur de 2 milliards de dollars auquel nous travaillons depuis cinq ans. La construction a commencé en 2007. Nous avons mis en marche les chaudières pour la première fois en mai de cette année. Cette installation est entrée officiellement en production en septembre. Elle est équipée des épurateurs et systèmes de contrôle d'émissions les plus modernes qui soient, y compris un dépoussiéreur à sacs filtrants qui capte 99,9 p. 100 des émissions de particules.

En fait, l'installation de Keephills 3 et nos centrales Genesee réduisent de 80 p. 100 les émissions d'oxyde d'azote et d'oxyde de soufre, et les émissions de gaz carbonique de 24 p. 100, comparativement aux unités conventionnelles. C'est l'équivalent de 190 000 voitures de moins sur les routes ou de la plantation de 100 millions d'arbres. Nous sommes très fiers des efforts que nous avons déployés pour fournir des sources d'énergie plus propre en Alberta.

Un autre nouvel ajout cette année en Alberta est le projet Halkirk de production de 150 mégawatts d'énergie éolienne situé dans l'Alberta centrale du sud. Nous avons également une installation à Goderich, en Ontario qui produit 40 mégawatts d'énergie éolienne, et nous sommes en train de construire ou de préparer des projets en Colombie-Britannique et en Ontario qui permettront de produire 490 mégawatts d'énergie éolienne.

Nous faisons également d'importants investissements dans la production d'énergie plus propre, et ce dans l'ensemble de nos opérations. Par exemple, nous avons reconstruit de fond en comble le centre d'énergie Clover Bar situé dans le secteur est d'Edmonton. Il s'agit du réaménagement d'une friche industrielle sur l'emplacement de l'ancienne centrale électrique le long de la rive de la rivière Saskatchewan Nord.

CPC a investi plus de 260 millions de dollars dans la démolition d'une centrale électrique dépassée et inefficace et l'a remplacée par trois turbines GE alimentées au gaz naturel qui sont à la fine pointe de la technologie. Elles ont une production combinée de 243 mégawatts d'électricité qui sont acheminés au réseau sur demande.

En 2011, nous avons également terminé un projet de rénovation de grande envergure dans nos installations de la Caroline du Nord, projet qui nous a permis de remplacer au moins les deux tiers du charbon utilisé dans ces installations par des combustibles produits à partir de pneus.

Permettez-moi maintenant d'aborder un certain nombre de questions qui pourraient intéresser les membres du comité. Le marché albertain constitue un modèle pour les autres. Voici quelques éléments qui expliquent cette situation.

Ce marché a créé plus de 4 000 mégawatts d'électricité concurrentielle grâce à des sources de financement privées. Selon ce modèle de marché, les risques liés aux investissements ont été transférés des contribuables aux investisseurs. La transparence tarifaire vis-à-vis des consommateurs signifie que les clients comprennent le véritable prix de l'électricité et peuvent rajuster leur consommation en conséquence.

Le président : Pourrais-je vous interrompre une seconde? Je suis du Québec et nous avons une compagnie de service public qui s'appelle Hydro-Québec. Il s'agit d'une société étatique qui produit énormément d'électricité. En Colombie- Britannique, ils ont BC Hydro et cetera.

Certaines personnes dans d'autres provinces qui vont nous renseigner dans le cadre de nos audiences peuvent ne pas savoir qu'il n'existe pas de propriété publique comme dans d'autres provinces.

M. Vaasjo : En Alberta, il existe des compagnies de distribution d'électricité réglementées qui acheminent de l'électricité à votre domicile, ainsi que l'administration de la transmission de l'énergie pour la province, qui est également réglementée, mais la production d'électricité n'est pas du tout réglementée.

Dans ce marché, différentes compagnies de production d'électricité font des offres et les tarifs retenus sont choisis en fonction de la demande qui existe au moment en question et c'est ce tarif-là qui est autorisé.

Le président : Ce système de transmission réglementée est-il de propriété publique? Appartient-il à la province?

M. Vaasjo : Non.

Le président : Donc, ce sont des capitaux privés qui financent l'exploitation du réseau dans cette province?

M. Vaasjo : Sauf que les compagnies de distribution locale — deux d'entre elles, ENMAX et EPCOR, appartiennent à leurs villes respectives.

Le président : Elles appartiennent aux villes?

M. Vaasjo : Oui. Mais les deux sont également réglementées par la Commission des services publics de l'Alberta.

Le président : Donc, il n'existe pas d'équivalent de l'OPG, d'Hydro-Québec, de BC Hydro ou de Manitoba Hydro dans cette province?

M. Vaasjo : Non.

Le président : Je pense qu'ils appliquent davantage votre modèle en Nouvelle-Écosse. Quand nous étions là-bas, nous avons constaté qu'il existe un système hybride.

M. Vaasjo : En fait, il existe un système hybride, jusqu'à un certain point, à la fois en Ontario et en Colombie- Britannique, en ce sens que ce sont des compagnies indépendantes de production d'énergie, comme nous-mêmes, qui offrent de nouvelles sources d'électricité, sur la base de soumissions concurrentielles, la différence étant que nous présentons une soumission chaque heure pour la tarification de l'électricité, alors que là-bas, les gens se concurrencent pour l'obtention de contrats d'achat d'électricité à long terme, qui font ensuite partie du prix de base des compagnies de services publics dans les provinces concernées.

Le président : Voilà qui tire au clair la situation.

M. Vaasjo : Capital Power investit des sommes importantes dans les centrales de cogénération à énergie éolienne, dans les centrales au gaz naturel en cycle combiné, dans les centrales de pointe et dans la production d'électricité alimentées au charbon relativement au marché concurrentiel de l'Alberta. La structure concurrentielle du marché de l'énergie en Alberta offre aux entreprises de fortes incitations à concevoir, mettre au point, construire et exploiter les centrales de manière efficace et novatrice.

Le marché albertain comprend également un cadre efficace de surveillance et d'application, afin de garantir la conformité à l'ensemble des règles de marché applicables par tous les participants. Il existe deux organes distincts dont le travail consiste à enquêter et à imposer des sanctions si besoin est.

L'administration chargée de surveiller le marché contrôle et enquête sur le comportement des acteurs du marché, et soumet ensuite son dossier à l'examen de l'Alberta Utilities Commission. Si cette dernière détermine que les règles n'ont pas été respectées, les entreprises concernées sont tenues de rendre des comptes. Donc, il existe un mécanisme de conformité et d'application permettant de garantir l'intégrité du système.

Sur le plan de l'abordabilité, la conception du marché du détail permet aussi à tous les Albertains de gérer leur exposition aux tarifs du fait de pouvoir signer des contrats avec des compagnies de détail concurrentielles, tout en accédant aux tarifs prévus pour les sociétés en commandite d'accréditives par l'entremise de l'option du tarif réglementé.

Si le consommateur moyen désire signer un contrat de longue durée avec un détaillant, il peut choisir parmi tout un éventail d'options en matière de tarification. Ainsi, les consommateurs qui optent pour l'option de tarif réglementé auront à payer le prix de marché mensuel pour leur électricité, mais ils seront en même temps protégés contre de soudaines fluctuations de tarif en raison d'achats à terme d'énergie sur le marché.

À mon avis, le fait de présenter aux consommateurs des tarifs d'électricité qui soient transparents et réels donne lieu à des efforts de conservation. Les utilisateurs industriels d'électricité peuvent prendre des décisions en fonction de leur utilisation et de l'accessibilité de leurs opérations et, en même temps, les consommateurs ont des choix à faire lorsqu'ils examinent les différentes options énergétiques. Tous ces éléments sont particuliers au marché déréglementé de l'Alberta.

D'un point de vue industriel, le cadre de réglementation albertain prévoit également un degré de certitude concernant les investissements à long terme. Des entreprises comme la nôtre peuvent ainsi élaborer des projets d'immobilisations en sachant que les règles du marché sont susceptibles de rester en place pendant un certain temps. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut dire au sujet de toutes les administrations provinciales et territoriales du Canada, et cet état de choses a une incidence sur les investissements à long terme dans l'infrastructure de production d'électricité à grande échelle.

Les investisseurs et les actionnaires sont plus susceptibles d'investir la majeure partie de leurs capitaux dans des marchés où ils peuvent être sûrs que les politiques vont rester inchangées pendant longtemps. C'est l'une des raisons pour lesquelles Capital Power est extrêmement favorable aux efforts déployés par le gouvernement fédéral en vue d'élaborer des règlements sur le renouvellement du capital-actions à l'égard des génératrices alimentées au charbon.

CPC a également transmis des recommandations constructives sur la façon d'assurer la mise en oeuvre la plus efficace de ces règlements, et ce afin de réaliser les réductions souhaitées de la manière la plus économique pour les consommateurs.

Comme les règlements liés au CST sont axés sur une vision à long terme de la production d'électricité alimentée au charbon au Canada, il existe un degré de certitude à long terme sur le marché — pas uniquement pour nous-mêmes, mais pour tous les autres intervenants. En l'absence de cette certitude, on peut difficilement imaginer qu'une entreprise décide de risquer une bonne partie des investissements de ses actionnaires pour des projets qui peuvent ou non être viables quelques années plus tard. Cela n'a tout simplement pas beaucoup de sens sur le plan commercial.

Les règlements prévoient également des objectifs clairs en ce qui concerne les émissions autorisées et permettent de réduire de façon importante les émissions de gaz à effet de serre et d'autres polluants. Voilà qui aidera le Canada à respecter l'engagement qu'il a pris à Copenhague. Ainsi le tableau est également bien clair pour les investisseurs. Voilà qui est bon à la fois pour l'environnement et pour le marché.

Les règlements établissent également un cadre permettant les investissements dans de nouvelles technologies, y compris le captage et le stockage du CO2. La mise au point de ces technologies voudra dire que des provinces comme l'Alberta qui ont de vastes réserves de charbon pourront considérer le charbon comme une composante importante de leur avenir à long terme.

Nous estimons que nous avons la responsabilité de continuer à exploiter ces réserves de charbon d'une manière qui est respectueuse de l'environnement. Chez Capital Power, nous croyons que nous aurons entamé la création en Alberta d'une autre centrale alimentée au charbon d'ici une dizaine d'années.

À cet égard, Capital Power participe au projet Pioneer qui instaurait un système de captage et de stockage du gaz carbonique à la nouvelle unité Keephills 3, de manière à réduire encore son empreinte écologique liée au gaz à effet de serre. Il s'agit là d'un progrès considérable par rapport à l'objectif fixé.

Enfin, je voudrais aborder la question des interconnexions entre les provinces. La plupart des interconnexions au Canada se font sur l'axe nord-sud, plutôt qu'est-ouest, et la raison en est simple : c'est logique sur le plan économique.

La distance par rapport aux marchés, le coût et la disponibilité des possibilités de production, les relations commerciales, de même que des tracés déjà élaborés et des corridors de localisation sont autant de facteurs qui entrent en ligne de compte quand il s'agit de prendre une décision sur le développement des lignes de transmission. Étant donné les distances considérables entre les centres de charge au Canada, ni pour des raisons économiques ni en tant que politique gouvernementale, il ne conviendrait, à notre avis, de créer un réseau national. En fait, nous estimons qu'un réseau de transmission national nuirait à l'économie.

Je voudrais remercier le comité d'être venu dans notre ville d'Edmonton, en Alberta. Je serais très heureux de répondre à toutes vos questions.

Le président : Monsieur Vaasjo, tous les témoins nous ont dit qu'il n'est tout simplement pas pratique de créer un réseau national est-ouest, mais qu'on pourrait éventuellement établir un réseau allant de la côté atlantique à la frontière du Manitoba, ou quelque chose du genre, et un autre réseau dans cette région. Je ne sais pas. Pour le moment, tout semble marcher en fonction de l'axe nord-sud.

M. Vaasjo : Je dirais qu'il est probable qu'un tel réseau soit créé si certaines conditions sont remplies. Il faudrait peut-être développer d'autres liens dans l'Est, et nous constatons que de tels liens sont en train de s'établir dans les provinces maritimes du côté de la transmission, mais ce sont les parties directement concernées qui l'ont voulu. Ce n'est pas le résultat d'une politique nationale.

Bien sûr, dans bien des cas, les parties prenantes cherchent à obtenir l'appui du gouvernement fédéral, mais de telles initiatives ne sont pas le résultat d'une politique canadienne. Elles découlent du désir d'établir un niveau supérieur de fiabilité pour les régions concernées et ce, de façon plus économique.

Le président : Le nouveau terme à la mode « réseau intelligent » a été utilisé lorsque nous avons commencé à discuter de ces choses-là avec les États-Unis. À votre avis, devrait-il y avoir de multiples réseaux intelligents au Canada?

M. Vaasjo : Oui, certainement. Notre pays compte effectivement des régions ayant des capacités de production d'électricité et nous croyons que le Canada optera de plus en plus pour des réseaux intelligents de même que d'autres technologies et méthodes, à mesure que les conditions économiques liées à bon nombre de ces technologies évolueront.

Le sénateur Mitchell : Quand nous étions en Colombie-Britannique hier et avant-hier, nous avons entendu parler de projets remarquables, comme c'est également le cas, dans cette province, mais ils ont déjà installé 385 000 compteurs intelligents dans les maisons. Avez-vous des projets semblables?

M. Vaasjo : Étant donné que Capital Power est une entreprise en gros, cela ne fait pas partie de nos activités. Par contre, je sais qu'ENMAX fait des expériences dans ce domaine, et qu'EPCOR envisage également de faire cela.

À mesure que la technologie évolue, ce sont des choses qui se font et, en fait, c'est tout à fait logique dans un marché comme celui de l'Alberta. Du point de vue de la vente au détail, cela leur permettra d'établir des différences pour les périodes de pointe et les périodes creuses, de façon à réaliser des économies encore plus importantes grâce aux compteurs intelligents.

Le sénateur Mitchell : Donc, cela peut avoir des conséquences pour la façon de gérer le réseau et pour la production d'électricité?

M. Vaasjo : Tout à fait.

Le sénateur Mitchell : Vous dites que, en 2011, vous avez terminé la rénovation de fond en comble de vos installations en Caroline du Nord, afin de remplacer les deux tiers au moins du charbon utilisé par de la biomasse et des combustibles produits à partir de pneus.

Cela m'amène à aborder la question de la compétitivité et du coût des différents combustibles. Qu'est-ce qui vous a incité à faire cela? Je suppose que le fait d'utiliser des combustibles de remplacement doit être lié à votre compétitivité en tant qu'entreprise.

M. Vaasjo : Il a été prévu que ces installations signent des contrats de longue durée avec Progress Energy, qui est la très grande entreprise locale de génération d'électricité et de câblage aux États-Unis, étant donné que cette dernière avait une autorisation particulière que lui avait accordée la FERC, de telle sorte que ces contrats étaient obligatoires, mais pas nécessairement économiques.

Il est fort probable que ces centrales auraient été fermées. Elles sont assez vieilles. Nous avons été motivés par deux choses : premièrement, l'évolution de la réglementation environnementale aux États-Unis, notamment par rapport aux oxydes d'azote et aux oxydes de soufre. Voilà l'une des choses qui nous a vraiment motivés à rendre leurs opérations plus propres.

De plus, l'utilisation de quantités aussi importantes — comme c'est le cas chez nous — de combustibles produits à partir de pneus et de biomasse signifie que ces centrales sont maintenant écologiques. Nous obtenons des crédits verts et les caractéristiques écologiques de ces installations nous sont payées. C'est justement cela qui les a rendues économiques — c'est-à-dire que, même si elles continuent à utiliser le charbon, elles sont considérées comme des centrales écologiques.

Le sénateur Mitchell : Voilà qui m'amène à ma troisième question, qui porte sur toute la question de la tarification du carbone et des conséquences pour le captage et le stockage du CO2.

Vous parliez tout à l'heure de captage et de stockage du CO2. D'abord, où en est cette technologie à l'heure actuelle, à votre avis? Vous disiez que vous comptiez construire une autre centrale en moins de 10 ans, et je pense que nous devrions être près de la limite de 10 ans. À votre avis, faut-il fixer un prix au carbone et, dans l'affirmative, comment feriez-vous cela si vous étiez premier ministre du Canada ou de la province pendant une journée?

M. Vaasjo : Il y a deux éléments. Chez Capital Power et son prédécesseur, EPCOR, nous avons activement cherché à appliquer de nouvelles technologies de production d'électricité à partir du charbon. Comme je le disais tout à l'heure, nous avons été les premiers à introduire la technologie supercritique en Amérique du Nord et vous comprendrez certainement que, vu les quantités de charbon qui sont en cause, c'était vraiment un projet très risqué.

Nous avons également pris d'autres mesures dans nos installations afin de réduire notre empreinte écologique globale. Par rapport aux autres technologies, qu'il s'agisse d'énergie éolienne, d'énergie solaire ou d'énergie produite à partir du charbon, nous sommes d'avis que ces technologies-là progressent à l'heure actuelle de façon très importante.

Si vous me permettez, je voudrais faire marche arrière afin de préciser quelque chose. L'un des facteurs importants qui nous a donné la confiance d'aller de l'avant était le fait que nous travaillions en étroite collaboration avec le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial à l'élaboration d'une étude d'ingénierie de base d'une valeur de 33 millions de dollars pour une centrale intégrée gazéification/cycle mixte — donc, essentiellement un réacteur de gazéification — qui a débouché sur la création d'une unité de production d'électricité à grande échelle ici dans la province.

Ce travail a été financé à parts égales par l'Alberta, nous-mêmes et le gouvernement fédéral, et nous avons participé, avec le gouvernement de l'Alberta, au processus de 2 milliards de dollars pour ce qui est de chercher du financement pour le projet.

Ce qui est arrivé en Alberta, comme ce fut le cas dans la plupart des provinces, c'est que les prix de l'électricité ont chuté. En l'absence de la chute des prix de l'électricité, nous sommes à peu près certains que nous serions allés de l'avant de manière à créer la première centrale intégrée gazéification/cycle mixte à grande échelle du monde.

Nous nous sommes prouvés que cette technologie est efficace. Nous en étions au point où nous avions déjà conclu certaines ententes commerciales pour la RAH, c'est-à-dire que des compagnies pétrolières et gazières allaient se charger des pipelines pour le carbone. Ce n'était pas une étude d'ingénierie théorique. Nous étions disposés à aller de l'avant et à investir environ 2 milliards de dollars dans la construction de cette unité.

Encore une fois, la chute des prix de l'électricité a grandement diminué notre capacité à mener à bien ce projet.

Même à cette époque, et depuis également, le coût de composantes importantes de l'unité a chuté —la séparation d'air, par exemple. Voilà donc une dépense en immobilisations qui a grandement diminué.

Donc nous nous attendons à ce que la situation progresse par étapes au cours des prochaines années, et qu'entre 60 et 80 p. 100 de la production d'électricité aux États-Unis passe par le charbon, en Chine, c'est 70 p. 100, et cette proportion ne cesse de croître. Quand les pays du monde s'intéressent autant au charbon du fait que ce dernier constitue une de nos principales sources d'énergie, il est clair que quelque chose se produira dans un proche avenir, quand les gens penseront à y réfléchir sérieusement.

Nous étions en Chine il y a environ un mois pour parler avec les responsables de la plus importante compagnie de production d'électricité en Chine, et ces derniers nous ont dit qu'ils prennent des mesures relativement aux oxydes d'azote et de soufre, en particulier. C'est un programme national, et par la suite, ils vont s'attaquer au carbone.

Donc, cela devrait se faire dans les prochaines années et, selon moi, quand la Chine se mettra à investir dans des technologies qui permettront de réduire les quantités de CO2 que par le charbon, vous verrez de très grands progrès dans ce domaine.

Le sénateur Banks : Étant donné que le président a posé sa question concernant la propriété, je voudrais simplement m'assurer que le compte rendu est clair. Donc, votre société est issue de la scission d'EPCOR, n'est-ce pas?

M. Vaasjo : Oui.

Le sénateur Banks : EPCOR n'a-t-elle pas conservé un intérêt résiduel dans Capital Power?

M. Vaasjo : Lors du PAPE, EPCOR a effectivement retenu un intérêt de 72 p. 100, en partie à cause du marché, et en partie à cause...

Le sénateur Banks : De certaines considérations politiques.

M. Vaasjo : Non. En fait, elle a déclaré vouloir ramener à zéro son intérêt, et à l'heure actuelle, alors qu'il ne s'est écoulé que deux ans et demi, cet intérêt n'est plus que de 40 p. 100. Nous l'avons réduit par l'entremise de nos émissions et EPCOR a également procédé à plusieurs reclassements de titres, si bien que son intérêt passera éventuellement à zéro.

Le sénateur Banks : Pourquoi l'éolien? Nous avons souvent entendu parler du caractère peu pratique de l'éolien, du fait qu'on ne peut pas en dépendre pour la charge de base, du fait qu'il n'est tout simplement pas fiable et cause non seulement des ennuis mais toutes sortes de difficultés en matière de relations publiques. Pourquoi donc avez-vous décidé de poursuivre cette option de manière de plus en plus énergique? Est-ce vraiment une solution de rechange pratique pour vous en tant qu'entreprise de production d'électricité?

M. Vaasjo : Nous sommes d'avis que, selon la région, il existe un éventail d'options qui peuvent être envisagées et que, dans chaque région, la solution comprendra le recours à différents types de combustibles venant de différentes sources.

Dans presque toutes les régions, l'éolien peut, jusqu'à un certain point, faire partie de l'ensemble. En grandes quantités, l'éolien peut effectivement créer des problèmes car, en temps normal, le vent n'est pas présent quand il fait très froid ni quand il fait très chaud, alors que c'est justement à ce moment-là qu'on a le plus besoin d'électricité.

Par contre, l'éolien constitue une source d'électricité et, avec une bonne planification en combinaison avec d'autres systèmes complémentaires, il peut constituer une excellente solution, surtout dans des provinces comme l'Ontario, le Québec et la Colombie-Britannique, où ils ont la possibilité de compenser les fluctuations importantes qui sont le propre de l'éolien par des apports d'eau plus importants dans les barrages. Vous savez, ces provinces peuvent plus facilement composer avec des crêtes, par rapport à l'Alberta et la Saskatchewan, par exemple, dont la production d'électricité est davantage axée sur le charbon ou le gaz naturel.

Le sénateur Banks : Un ami m'a envoyé une vidéo l'autre jour d'une éolienne qui avait pris feu. Vous est-il déjà arrivé d'avoir des éoliennes qui prennent feu?

M. Vaasjo : Non.

Le sénateur Banks : C'était assez spectaculaire.

M. Vaasjo : Oui, j'imagine que cela doit être effectivement assez spectaculaire.

Le sénateur Banks : Et si c'est spectaculaire, bien entendu, c'est en raison de l'emplacement, et du fait qu'on ne peut pas vraiment faire grand-chose. Dans l'article qui l'accompagnait, on insistait simplement sur le fait que le plus grave problème pour les fabricants et les compagnies qui entretiennent les éoliennes est le fait que la graisse ne dure tout simplement pas assez longtemps.

S'agit-il effectivement d'un problème d'entretien permanent, à savoir que les lubrifiants qui sont nécessaires quand l'éolienne se met en marche ne durent pas suffisamment longtemps?

M. Vaasjo : La friction est considérable car, même si les pales de l'éolienne sont constituées d'un matériau extrêmement léger, elles sont grandes. On peut sans problème marcher sur l'intérieur de la pale, tellement elles sont grandes.

Donc, le stress est intense et cela cause évidemment la décomposition des lubrifiants mais, notamment dans le cas des plus récentes versions de cette technologie, les problèmes étaient réglés. Il existe à présent des systèmes de roulement étanches qui marchent très bien et devraient durer aussi longtemps que les autres composantes.

Le sénateur Banks : Ma dernière question est un peu impolie. Vous devez vous intéresser au rendement des investissements de vos actionnaires.

M. Vaasjo : Oui.

Le sénateur Banks : Supposons que les changements de réglementation que vous avez évoqués ne soient pas mis en œuvre très rapidement — et je suppose que ma question en est une de pure forme — quelle est la probabilité que vous et d'autres propriétaires d'entreprises de production d'électricité qui procédez actuellement à l'écologisation et à la conversion de certaines installations, preniez toutes ces mesures — je vous ai dit que ma question était impolie — si vous n'aviez pas la certitude que ces changements de réglementation allaient justement vous être imposés très rapidement? Disons que vous seriez moins motivé à faire ces choses-là et à investir tous ces capitaux, n'est-ce pas?

M. Vaasjo : Il ne fait aucun doute que l'incitation à le faire serait moindre. Nous savons que certains changements s'opèrent relativement vite, mais tant pour EPCOR que pour Capital Power à l'heure actuelle, nous sommes d'avis que nous ne sommes pas verts. Nous ne cherchons aucunement à laisser entendre que nous sommes verts, et en fait, nous n'avons pas de stratégie d'écologisation.

Par contre, nous estimons que nos pratiques sont respectueuses de l'environnement, ainsi, lors de la construction de la centrale Genesee 3 nous avions une bonne longueur d'avance, même si, à l'époque, les gens parlaient de carbone et de règlements qui pourraient éventuellement entrer en vigueur dans un avenir lointain; à cette époque, nous avons tout de même décidé de supporter des frais supérieurs de 20 à 30 p. 100 pour la construction de cette centrale. Au cours des 10 dernières années, elle a produit beaucoup moins d'émissions de CO2 qu'une installation conventionnelle alimentée au charbon, et ce, sans que cela nous avantage le moindrement. Nous ne recevons aucun crédit. Donc, pour nous, il n'y a aucun avantage à faire cela.

Le sénateur Banks : S'agissant de la conversion que vous avez réalisée aux États-Unis, dans d'autres circonstances, n'est-il pas vrai qu'il aurait été tentant de continuer à utiliser ces vieilles centrales jusqu'à la fin de leur vie utile, disons jusqu'à la fin d'une période raisonnable de capitalisation?

M. Vaasjo : Pour être juste envers vous, je dirais, en réponse à votre question, que, dans la plupart des circonstances, la réponse serait oui.

À mon avis, la prémisse de votre question est exacte. Dans ce cas particulier, la centrale était suffisamment vieille pour que l'on puisse décider de tout simplement la fermer. Mais, par rapport à la prémisse de votre question, je dirais que vous avez sans doute raison.

Le sénateur Neufeld : À la page 5, vous parlez des 260 millions de dollars que vous avez engagés afin de démolir une centrale inefficace et de la remplacer par des turbines alimentées au gaz naturel qui sont à la fine pointe de la technologie.

Il est évident que les 260 millions de dollars comprennent la démolition. Que serait le coût par mégawatt de l'acquisition et de l'installation de ces trois turbines à l'heure actuelle?

M. Vaasjo : Je dirais que le texte n'est pas tout à fait exact. Le coût du déclassement est venu se rajouter à la somme de 260 millions de dollars qui a été engagée; donc, dans ce cas précis, le coût serait d'environ 1 million de dollars le mégawatt.

Le sénateur Neufeld : Quand vous avez évoqué tout à l'heure les études que vous menez de concert avec le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral sur la production d'électricité à partir du charbon, je ne me rappelle pas du terme que vous avez employé...

M. Vaasjo : J'ai parlé de centrales intégrées gazéification/cycle mixte.

Le sénateur Neufeld : Vous y avez recours tout le temps. Mais nous, non.

Le président : Et le « nous » désigne qui au juste?

Le sénateur Neufeld : Les gens, sauf vous, monsieur le président. Vous parlez constamment de ce type de production d'électricité; je m'en souviens très bien.

Vous dites que la chute des prix vous a découragé plus loin. Quels ont été les prix à cette époque et quel prix serait nécessaire pour que ce soit viable sur le plan commercial dans le monde d'aujourd'hui? Quel prix du mégawatt-heure vous faudrait-il?

M. Vaasjo : Nos projections de prix commençais à environ 80 $ le mégawatt-heure avec une augmentation et ensuite une diminution progressive, mais, ce qui est arrivé au marché de l'électricité dans toute l'Amérique du Nord, c'est qu'il y a eu une forte réduction de la demande, et ici, la demande a stagné. Notre projet dépassait un peu les besoins du marché, mais il reste que les prix ont chuté assez rapidement pour atteindre environ 50 $.

L'autre facteur important est le prix du gaz naturel. Le coût de la production du gaz naturel a beaucoup diminué, et on dirait qu'il va être moins coûteux encore à long terme. Donc, nous assistons à ce qu'on pourrait appeler un virage important, en ce sens que le coût de la production d'électricité tend à diminuer à cause du gaz naturel, si bien que notre centrale intégrée gazéification/cycle mixte devenait à ce moment-là encore moins économique.

Le sénateur Neufeld : Donc, il y avait en réalité deux facteurs importants. Je me posais la question.

M. Vaasjo : Ces deux facteurs ont influé sur le prix de l'électricité.

Le sénateur Neufeld : Il est évident que vous avez une perspective à long terme en ce qui concerne le charbon, et le charbon sera toujours nécessaire pour la production d'électricité — je ne remets aucunement en question cette réalité-là — mais je me demande dans quel type de centrale il sera utilisé. Y a-t-il de nouvelles technologies qui vont être mises en marché? Pensez-vous que la séquestration du carbone ou la récupération assistée des hydrocarbures correspondent à ce type de technologie?

M. Vaasjo : En fait, cette technologie existe déjà. Comme je vous le disais tout à l'heure, nous faisions tout à fait confiance à la technologie que nous utilisions pour gazéifier le charbon, de sorte qu'on n'ait pas à le brûler, en d'autres termes, le charbon est gazéifié et transporté dans un état différent. Cette technologie existe déjà. En fait, ils se servent beaucoup de gazogène en Chine pour créer du diesel.

Donc, nous faisons confiance à la technologie et, en fait, nous nous servons des mêmes réacteurs de gazéification qui sont actuellement utilisés en Chine.

L'autre solution ou possibilité dont il est question dans le cadre du projet Pioneer — c'est un projet auquel nous participons activement en Alberta à l'heure actuelle — consiste à capter le CO2 après la combustion du charbon. Donc, les termes « postcombustion » et « précombustion » sont ceux qu'on emploie généralement, et les technologies appropriées existent aujourd'hui.

Le défi consiste à ramener le coût de ces technologies à un niveau économique et concurrentielle. Le charbon en Alberta est très peu coûteux et accessible.

Le sénateur Banks : Ne possédez-vous pas votre propre charbon?

M. Vaasjo : Si. Le charbon en Alberta est ce qu'on appelle le charbon subbitumineux, et donc il n'a pas de qualité métallurgique. Il n'existe pas vraiment de marché pour ce type de charbon. Comme il n'a pas de véritable valeur marchande, le coût se réduit à celui de la production du charbon, et la centrale est située à l'entrée de la mine.

Donc, nous n'avons pas à nous inquiéter du prix du marché du charbon ni de la situation en ce qui concerne les métaux; donc, non seulement le charbon est-il très peu coûteux, mais il le sera toujours.

Le sénateur Neufeld : Les États-Unis possèdent d'immenses quantités du même type de charbon.

M. Vaasjo : Il s'agit effectivement du même charbon que celui du bassin de la rivière Powder.

Le sénateur Neufeld : En fait, la Colombie-Britannique en a beaucoup également mais nous exploitons le charbon de qualité métallurgique à des fins d'exportation.

Ai-je raison de croire que vous avez dit posséder une capacité éolienne ou peut-être avez-vous dit que vous comptez ouvrir des installations éoliennes en Colombie-Britannique?

Et, si vous me permettez d'ajouter quelque chose, je dois dire que je suis entièrement d'accord avec vous en ce qui concerne un réseau dans tout le Canada. Je ne me suis jamais prononcé en faveur d'une telle possibilité. Même si les considérations économiques sont positives entre des provinces ou des pays différents, comme ce fut le cas entre la Colombie-Britannique, par exemple, et les États-Unis, ce genre de projets va se réaliser, justement parce qu'ils s'appuient sur de solides raisons économiques, et non pas parce que quelqu'un dans une ville lointaine a décidé qu'il faut installer des lignes de transmission d'un bout à l'autre du Canada, pour que nous puissions dire que nous avons un réseau est-ouest semblable à celui des chemins de fer.

J'ai apprécié ce commentaire, et c'est d'ailleurs l'observation qui nous a été faite à plusieurs reprises — encore récemment de la part d'un économiste. Donc, je voulais surtout vous dire que je suis entièrement d'accord avec vous, mais je vous invite maintenant à me parler de votre capacité éolienne en Colombie-Britannique.

M. Vaasjo : Nous avons actuellement un parc éolien en Ontario. Au cours des derniers mois, nous avons commencé la construction — les fondations ont déjà été coulées — d'un grand parc éolien à Tumbler Ridge. Nous avons également deux autres centrales éoliennes qui en sont aux dernières étapes du processus d'obtention de permis.

Ils ont obtenu des APP en Ontario, si bien que nous pensons lancer des travaux de construction dès l'année prochaine. Nous en avons une autre en Alberta dont la construction a commencé il y a deux mois seulement.

Le sénateur McCoy : Comme je me pose un certain nombre de questions concernant la réglementation fédérale visant la production d'électricité au charbon, dont vous parlez à la page 8 de votre texte, j'aimerais explorer plus en profondeur cette question avec vous.

Vous dites que vous travaillez en étroite collaboration avec les autorités fédérales et que vous êtes en faveur du renouvellement du capital-actions. Par contre, il y a eu un certain nombre de critiques assez énergiques de la part de l'Alberta concernant la structure de cette réglementation — en d'autres termes, on dit qu'elle est trop prescriptive.

Je me demande donc si vous pourriez nous fournir d'autres détails concernant la nature de ces critiques et m'expliquer ce que veulent dire les gens qui disent que si le fédéral se contente d'établir des objectifs, les entreprises sont ensuite plus libres et peuvent donc innover afin de les atteindre.

Je ne veux pas vous faire dire des choses qui ne correspondent pas à votre réflexion, et j'essaie donc d'être prudent. Peut-être pourriez-vous développer un peu plus votre réflexion à ce sujet-là?

M. Vaasjo : Avez plaisir. Il s'agit en réalité d'une question très intéressante qui est vraiment d'actualité dans l'industrie à l'heure actuelle.

S'agissant du renouvellement du capital-actions, cela signifie que chacune des unités serait retirée du service après 45 ans, ce qui permet d'établir le profil des émissions lié à la production d'électricité à partir du charbon dans l'ensemble du Canada.

Voilà essentiellement ce qui est inscrit à la partie I de la Gazette du Canada, mais il y a également une certaine marge de manœuvre en ce sens qu'il serait éventuellement possible de garder la centrale en activité pendant un an ou deux de plus; donc, il y a un degré de flexibilité quant aux conditions qui s'appliquent.

Il existe un groupe d'intervenants au sein de l'industrie et sans doute dans les provinces qui ont des centrales à charbon qui diraient que ces règlements ne sont pas suffisamment souples et qu'ils souhaitent par conséquent qu'il y ait une plus grande marge de manœuvre.

Par exemple, la Nouvelle-Écosse a implanté un programme en vertu duquel ils vont réduire les émissions de CO2 de leurs centrales à charbon, mais dans leur cas, ils n'ont pas l'intention de commencer par fermer la centrale la plus ancienne et ensuite celle qui vient après celle-là. Ils ont décidé de fermer les centrales ensemble et il se trouve que l'une des centrales les plus récentes serait celle qu'ils fermeraient en premier lieu.

Donc, ils ont besoin de ce genre de flexibilité; il reste qu'ils répondraient néanmoins aux exigences s'ils acceptaient de fermer les centrales conformément à ce qui est inscrit dans la Gazette du Canada aujourd'hui.

Il existe un autre groupe au sein de l'industrie — et j'avoue ne pas vraiment connaître la position des provinces à ce sujet — qui est d'avis qu'il faut se contenter d'établir des objectifs. En d'autres termes, on établit des cibles pour la réduction des émissions de CO2 et on laisse le choix aux gens quant à la façon de les atteindre. L'une des différences qu'on observe dans ce contexte est le fait qu'on n'a pas une progression vers l'atteinte des objectifs fixés pour 2020. À la place, les centrales continueraient d'être exploitées jusqu'en 2020, avant d'être fermées, et ensuite jusqu'en 2025, avant d'être fermées. C'est donc un concept totalement différent.

Voilà donc le lien entre les trois éléments. Nous sommes de ceux qui estiment qu'il faut un peu plus de marge de manœuvre et qu'il faut tenir compte des excellentes initiatives prises par la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse qui ont simplement besoin d'un peu plus de flexibilité pour être en mesure de faire ce qu'elles font.

Donc, nous ne sommes pas en faveur d'un système en vertu duquel on se contenterait de fixer des objectifs à la place du renouvellement du capital-actions.

Le sénateur McCoy : Donc, c'est une question d'application technologique au fond, n'est-ce pas? D'après la réglementation, vous ne pouvez pas construire une nouvelle centrale et vous ne pouvez pas non plus continuer à exploiter l'ancienne centrale à moins...

M. Vaasjo : Vous pouvez construire une centrale alimentée au gaz naturel ou employer d'autres combustibles. Mais vous ne pouvez pas vous servir de charbon à moins de produire des émissions qui sont essentiellement équivalentes à celles d'une nouvelle centrale alimentée au gaz naturel et, en réalité, ce genre de mesure législative ouvre la porte à des projets de captage et de stockage du CO2 parce que cette dernière prévoit pour des gens comme nous qu'on peut construire la centrale et mener nos activités à condition que nos émissions, à l'aide d'un système de captage et de stockage du CO2, soient équivalentes à celles d'une centrale alimentée au gaz naturel; voilà ce qu'il nous faut pour être en mesure d'aller de l'avant.

Le sénateur McCoy : Ou vous pourriez employer n'importe quelle autre technologie qui vous permet d'avoir le même profil en matière d'émissions qu'une centrale alimentée au gaz naturel.

M. Vaasjo : En fait, il est question uniquement du charbon; d'autres technologies ne sont pas mentionnées.

Vous allez d'ailleurs entendre parler d'une norme pour le gaz naturel qui, en théorie, sera l'équivalent de la norme qui existe pour le charbon. En d'autres termes, cette nouvelle norme sera assortie des mêmes mécanismes, si bien que les conditions seront désormais plus strictes pour le gaz naturel.

Le sénateur McCoy : Quand la CERE, et ensuite la EUB, vous ont donné la permission de construire la centrale Genesee 3, elles vous ont dit que vous pourriez la construire à condition de respecter les conditions relatives à ce profil d'émissions, c'est-à-dire des émissions équivalentes à celles d'une centrale alimentée au gaz naturel, si je me souviens bien.

Cependant, on ne vous a pas dit comment vous deviez vous y prendre pour atteindre cet objectif, si bien que vous vous êtes dit : Bon, nous avons le charbon supercritique qui correspond à la technologie la plus moderne, qui est efficace, et nous allons donc simplement ajouter des mesures de compensation écologiques de façon à nous conformer à ce profil en matière d'émissions.

M. Vaasjo : Vous avez parfaitement raison. Je suis étonné de voir tout ce que vous savez au sujet de la centrale Genesee 3.

La différence entre ce dont le gouvernement parle aujourd'hui et la licence que nous avons obtenue pour la centrale Genesee 3 est que nous avons pu acheter des émissions à titre de compensation écologique. Là ce n'est plus le cas. L'une des différences fondamentales dont il est question maintenant, par rapport à ces profils en matière d'émissions, c'est que pour s'y conformer, il faut effectuer une réduction absolue des émissions de CO2.

Nous n'avons pas la possibilité d'acheter des crédits à titre de compensation écologique. C'est ce profil qui s'appliquera à ces centrales.

Le sénateur McCoy : À cette centrale.

M. Vaasjo : À cette centrale ou à des groupes de centrales, selon le degré de flexibilité qu'ils sont prêts à accepter. Dans l'exemple de la Nouvelle-Écosse, cette dernière ne pourra pas acheter des crédits ou bénéficier d'une compensation écologique grâce à l'éolien. Ce profil en matière d'émissions est absolu et ils devront s'y conformer pour l'ensemble de leurs centrales à charbon.

Le sénateur McCoy : Donc, on reproche à cette approche d'être trop inflexible? Nous avons affaire à un petit groupe d'ingénieurs dans la fonction publique à Ottawa qui nous disent comment nous devrions appliquer les technologies ou employer d'autres mécanismes pour respecter ce profil d'émissions.

M. Vaasjo : Je dirais que, en ce qui concerne l'industrie en général et sans doute bon nombre des provinces — vous comprendrez que nous avons eu des centaines d'heures de discussion à ce sujet afin d'essayer de dégager un consensus — ce que vous dites à propos du texte actuel qui se trouve dans la partie I de la Gazette du Canada est tout à fait approprié.

Les recommandations qui émanent à présent des différentes industries et provinces feront l'objet d'un suivi. Il s'agit de prévoir une plus grande souplesse, mais le concept de base est le même. Il y a, évidemment, la question du degré de souplesse qui est nécessaire, et les acteurs au sein de l'industrie ne sont pas d'accord sur ce qui est nécessaire, mais si on prévoit une plus grande souplesse, il est absolument sûr que les provinces et les entreprises voudront y adhérer, tout simplement parce que nous serons parfaitement sûrs de ce qui sera acceptable dans nos centrales, du point de vue de leurs émissions de CO2, pour les 45 prochaines années, ce qui représente un énorme avantage pour nous.

Le président : Monsieur Vaasjo, comme vous l'aurez vu d'après les questions qu'on vous a posées, nous sommes fascinés par l'expérience de Capital Power. Merci infiniment de nous avoir permis de bénéficier de votre expérience.

Nous allons poursuivre maintenant avec nos témoins du CCEMC, soit la Climate Change and Emissions Management Corporation, qui est représentée par Kirk Andries et Eric Newell.

Ces deux messieurs sont des légendes dans le secteur privé de l'énergie en Alberta. Je me souviens d'être venu ici il y a bien des années et de vous avoir rencontrés, me semble-t-il. À l'époque, j'étais en mission avec un homme politique irlandais bien connu. Nous voulions savoir quelle était la situation dans l'industrie du pétrole. Je crois que ses initiales étaient B.M. En tout cas, il est encore à Montréal.

Eric Newell est l'ex-chancelier de l'Université de l'Alberta, poste qu'il a occupé de 2004 à 2008. Il s'agit également de l'ex-président-directeur général de Syncrude Canada Limitée, poste qu'il a occupé de 1994 et 1998, respectivement, jusqu'en 2004. Il a été président de Syncrude de 1989 à 1997.

Avant cela, il a travaillé pour la Compagnie Pétrolière Impériale Ltée de même que pour Pétroles Esso Canada. Il est officier de l'Ordre du Canada et membre de l'Alberta Order of Excellence.

Kirk Andries est directeur général de la Climate Change and Emissions Management Corporation et il se fait rouler en quelque sorte. J'ai son profil biographique dans mon cahier. Nous allons tout de même lui donner son dû, n'est-ce pas, Eric?

Je vous cède tout de suite la parole, monsieur Newell.

Eric Newell, président, Climate Change and Emissions Management Corporation : C'est moi qui vais parler aujourd'hui.

Kirk a d'assez bons antécédents. Il est très calé dans le domaine de l'exploitation forestière, et a occupé des postes de niveau supérieur chez Al-Pac. Il a également travaillé sur la scène internationale dans les secteurs de l'énergie et de l'exploitation forestière. Il a passé quelques années à Washington et c'est actuellement l'un des architectes du modèle de gestion dont je vais vous parler par rapport à la Climate Change and Emissions Management Corporation. Il n'en va pas de même pour moi. On m'a fait entrer à titre de président en 2009.

Premièrement, Kirk et moi aimerions remercier le comité de nous donner aujourd'hui l'occasion de vous parler des mesures que nous prenons pour relever les principaux défis écologiques auxquels notre industrie se trouve confrontée, afin que nous puissions réaliser l'immense potentiel du Canada en matière de ressources énergétiques et nous assurer que l'exploitation de ces ressources est viable.

Je voudrais vous parler surtout de deux organisations. Premièrement, Alberta Innovates-Energy and Environment Solutions Corporation et, deuxièmement, Climate Change and Emissions Management Corporation. Je suis président des deux conseils d'administration, mais nous allons parler davantage du modèle de la Climate Change and Emissions Management Corporation car, selon moi, c'est un modèle tout à fait unique qui peut s'appliquer dans l'ensemble du pays.

Le président : S'agit-il dans les deux cas de sociétés à but non lucratif?

M. Newell : Oui, ce sont deux sociétés à but non lucratif. Energy and Environment Solutions représente la branche technologique du gouvernement de l'Alberta dans les secteurs clés de l'énergie et de l'environnement, et Climate Change and Emissions Management est une organisation plus distincte et plus indépendante du gouvernement; je vais justement vous donner une explication de son fonctionnement.

Si je devais choisir quelques éléments sur lesquels nous aimerions insister aujourd'hui, ce serait les trois éléments suivants : premièrement, que l'Alberta et l'industrie sont soucieux de l'environnement et de la nécessité d'exploiter les ressources de manière responsable. En d'autres termes, nous avons compris l'enjeu. Nous représentons une source importante d'émissions au Canada et nous savons que nous avons un défi de taille à relever pour réduire nos émissions et assurer le développement durable de nos ressources.

Deuxièmement, et je crois pouvoir parler pour à peu près tous les PDG en vous disant cela, nous savons que, pour atteindre les objectifs fixés à plus long terme, nous devrons avoir recours à des technologies qui ont la capacité de transformer les choses. Donc, la technologie est une solution clé à retenir pour l'avenir.

Le troisième élément concerne le modèle d'entreprise unique de la Climate Change and Emissions Management Corporation — un modèle qui marche — et même si nous sommes très jeunes, nous sommes vraiment convaincus de pouvoir réaliser des réductions importantes et nous devrions être pris en compte dans toute architecture que le gouvernement du Canada pourrait élaborer dans l'avenir.

En d'autres termes, quelle que soit l'architecture élaborée par le gouvernement fédéral, cette dernière devrait prévoir des investissements dans un fonds de technologie propre comme celui-ci, en tant que mécanisme de conformité légitime, parce que c'est un excellent moyen de tirer parti des technologies et des ressources.

Le président : À l'intérieur de chaque province et territoire.

M. Newell : C'est exact, Il ne fait aucun doute que le monde a besoin d'énergie. En ce qui nous concerne, c'est la première réalité à laquelle il faut être sensible, car nous possédons une immense réserve stratégique d'énergie au Canada.

Par exemple, les sables bitumineux correspondent à des réserves de bitume aussi importantes que celles du Moyen- Orient. De plus, nous sommes le troisième pays du monde par nos réserves établies. Cela représente une portion très considérable de notre économie, soit au moins 30 p. 100 du PIB de l'Alberta et une part grandissante du PIB du Canada.

C'est une ressource mondiale. Pour les États-Unis, nous constituons à présent la plus importante source d'importations. Ces derniers sont les plus importants consommateurs d'énergie, à raison de 20 millions de barils par jour, et nos importations vers les États-Unis sont passées de 13 à 22 p. 100 au cours des 10 dernières années; selon les estimations, elles représenteront plus d'un tiers d'ici 2030. Je pense même que ce chiffre pourrait se révéler faible.

Il reste que, pour réaliser ce potentiel, nous devons reconnaître que l'exploitation responsable des ressources primaires est essentielle et, à cet égard, nous faisons face à un certain nombre de défis environnementaux.

Je dirais qu'ils sont au nombre de trois. Premièrement, réduire les émissions de CO2 liées à la production d'énergie. Deuxièmement, continuer à réduire l'utilisation de l'eau et à améliorer la qualité de l'eau. Troisièmement, surtout pour les sables bitumineux qui peuvent être exploités à la surface, trouver de bonnes solutions relativement aux bassins de résidus et mieux réussir la remise en état des terrains par la suite.

L'Alberta prend des mesures énergiques dans ces trois secteurs, et je pourrais vous énumérer les nombreuses initiatives qui sont à l'origine du bon bilan de l'industrie à l'heure actuelle, mais ce n'est pas suffisant. Nous savons qu'il faut faire davantage et que nous sommes confrontés à ces défis.

Il existe de nombreuses organisations qui se penchent sur les questions environnementales, mais l'une des deux organisations que j'ai mentionnées tout à l'heure et dont je voudrais vous entretenir brièvement est Alberta Innovates - Energy and Environment Solutions. Cette dernière est née d'une initiative du gouvernement de l'Alberta consistant à regrouper les différents groupes axés sur l'innovation dans la province en vue d'une action plus ciblée, et le vice-premier ministre, Doug Horner, est sans doute celui qui a piloté ce dossier; en somme, il s'agissait de rassembler quatre sociétés sous l'égide d'une administration de gouvernance générale dans le domaine de la recherche et de l'innovation.

L'une des sociétés, celle que je préside, est Energy and Environment Solutions, et il s'agit de la branche technologique du gouvernement de l'Alberta. Elle s'est fixé un objectif ambitieux, car nous souhaitons positionner l'Alberta comme chef de file dans le domaine des technologies énergétiques et environnementales et créer une économie axée sur de plus faibles émissions de CO2 et l'utilisation plus efficace de l'eau.

La deuxième société qui est née de cette initiative du gouvernement de l'Alberta s'appelle la Climate Change and Emissions Management Corporation qui, comme je vous l'expliquais tout à l'heure, constitue une entité plus indépendante. En fait, nous ne nous sommes même pas constitués en société en vertu de la loi provinciale; nous nous sommes constitués en vertu de la loi fédérale, car nous nous sommes fixé comme objectif dès le départ d'établir des partenariats avec des gens oeuvrant dans le domaine loin des frontières de l'Alberta, et même des frontières du Canada, étant donné que les bonnes idées peuvent venir de bien des sources différentes.

À la CCEMC, nous avons un mandat très clair, qui consiste à réduire les émissions de gaz à effet de serre, en premier lieu, et, deuxièmement, à favoriser l'adaptation aux changements climatiques par l'investissement dans de nouvelles technologies.

Le sénateur Banks : Alberta Innovates était autrefois le Conseil de recherches de l'Alberta.

M. Newell : Une de ses composantes, oui. Alberta Tech Futures, qui est l'une des quatre sociétés, englobe Alberta Research Council de même qu'Ingenuity Fund, iCORE et Tech Edmonton; le champ d'activité est donc très vaste.

Chez Energy and Environment Solutions, nous avons quatre grands objectifs stratégiques — d'ailleurs, je devrais mentionner qu'EES est issue de l'Alberta Oil Sands Technology and Research Authority, connue sous le sigle AOSTRA, créée par Peter Lougheed en 1974, et qui a continué d'exister jusqu'en 1999. Cette dernière a grandement facilité l'exploitation des sables bitumineux.

Elle est ensuite devenue l'Alberta Energy Research Institute, que je présidais autrefois, mais ce dernier englobait également d'autres sources d'énergie. Ce nouvel ajout incorpore à présent tous les secteurs environnementaux également.

Les quatre domaines qui sont au cœur de notre action comprennent les technologies énergétiques de même que les technologies environnementales qui vont de pair avec les technologies énergétiques. De nos jours, presque tous les projets de recherche qui portent sur l'énergie comprennent une composante environnementale très importante.

Vous devriez également savoir que nous travaillons énormément dans le domaine des énergies renouvelables et des ressources émergentes. Nous ne considérons pas l'Alberta comme une province combustible fossile; pour nous, l'Alberta est la province « énergie ».

Le quatrième élément est l'eau, et je sais que vous avez parlé à David Schindler ce matin; ce qui est arrivé, c'est que nous avons fusionné l'Alberta Water Research Institute avec Energy and Environment Solutions, de façon à créer un organisme dont le champ d'activité serait plus vaste que l'eau et son lien avec l'énergie. Ce dernier traite de toutes les questions liées à l'eau, et c'est dans le sud de la province que les problèmes sont les plus aigus. À mon avis, l'eau sera le pétrole brut du XXEe siècle; c'est donc un enjeu très, très important.

Je vais passer tout de suite aux changements climatiques, car je crois que le plus important défi que nous avons à relever, parmi ceux que j'ai énumérés, consiste à continuer à accroître la production d'énergie face à l'augmentation rapide de la demande, tout en réussissant à réduire les niveaux absolus d'émissions.

L'industrie a un excellent bilan en ce qui concerne les sables bitumineux. Depuis 1990, nous avons réduit les émissions par baril de 39 p. 100. Ça, c'est la bonne nouvelle. La mauvaise nouvelle, c'est que la production a quadruplé depuis, de telle sorte que le niveau absolu des émissions augmente, et c'est pour cette raison que nous sommes devenus une cible importante, ce que nous comprenons. Voilà donc un défi de taille pour nous, c'est-à-dire augmenter la production tout en réussissant à diminuer les niveaux absolus d'émissions.

J'adore ce tableau, parce qu'il vous indique les raisons pour lesquelles les différentes provinces ont adopté des approches différentes. Le premier élément sur lequel j'attire votre attention concerne le fait que 60 p. 100 des émissions au Canada sont produites par deux provinces, soit l'Ontario et l'Alberta.

Deuxièmement, en Alberta, nous avons une petite population. Ce n'est donc pas la consommation intérieure qui constitue la plus importante source des émissions que nous produisons; c'est plutôt les grandes usines et centrales. Donc, il est tout à fait logique que le gouvernement de l'Alberta ait décidé de commencer par créer un organe comme la Climate Change and Emissions Management Corporation, qui s'intéresse surtout aux grands émetteurs.

Par contre, l'Ontario est davantage axé sur les consommateurs et sa population est plus dense. En Colombie- Britannique, nous avons vu que leur approche consistait à imposer une taxe carbone à la pompe. Il y a donc certaines différences entre les provinces auxquelles il faut être sensible.

Voilà qui m'amène au point que j'ai soulevé en tout premier lieu. Nous avons compris l'enjeu. Nous savons que, pour que le Canada atteigne ses objectifs, il va falloir que nous fassions un travail extraordinaire dans ce domaine, et c'est grâce à la technologie que nous y parviendrons.

Le fondement stratégique ou plutôt l'action de la Climate Change and Emissions Management Corporation vise les grands émetteurs réglementés, et par là je veux dire toute usine ou centrale qui émet plus de 100 000 tonnes de GES par année. Il se trouve qu'il y en a 109, ce qui n'est pas un nombre bien élevé.

L'objectif fixé au départ correspondait à une amélioration de l'intensité énergétique de 12 p. 100 par rapport au niveau de référence opérationnel de 2005, et ils sont obligés d'atteindre cet objectif. Ils sont évalués chaque chaque année en fonction de cet objectif, et ils sont tenus de combler l'écart, soit en apportant des améliorations à leurs opérations — ce qui est difficile — soit en retenant d'autres options.

L'une des options consiste à investir dans les compensations écologiques, et le gouvernement de l'Alberta a créé un marché de la compensation écologique; ainsi ils peuvent acheter des compensations écologiques. La troisième option consiste à investir dans notre fonds de technologie à raison de 15 $ la tonne; c'est ce prix-là qui a été fixé. Tous ces éléments sont explicités dans le Specified Gas Emitters Regulation de 2007.

C'est le fonds lui-même — et je suis content que ce soit le cas — qui perçoit l'argent. À la CCEMC, nous ne sommes pas chargés de la perception. Tout cela passe par l'administration du ministre de l'Environnement.

Si ce modèle est intéressant, c'est parce que ces fonds sont à part, si bien qu'ils ne pourront jamais être versés au Trésor. De par la loi, ils doivent servir à réduire les émissions de gaz à effet de serre ou à investir dans des mesures d'adaptation aux changements climatiques.

La CCEMC a vraiment la structure d'une organisation administrative qui exerce des pouvoirs délégués. Le ministre nomme le président, et c'est tout. Les autres membres du conseil et notre public, pour ainsi dire, sont des représentants des grands secteurs industriels et des citoyens. C'est dans ces milieux que nous trouvons nos membres.

Le ministre retient néanmoins un certain contrôle, bien entendu. Le ministère perçoit l'argent, prépare l'accord de subvention et met l'argent dans un compte en banque; à partir de ce moment-là, nous en sommes responsables.

C'est à nous d'administrer ces fonds. Nous devons solliciter des propositions, les évaluer et les financer, et ensuite assurer le suivi des projets au moyen de la vérification par un tiers, afin que nous nous assurions d'avoir réalisé les réductions d'émissions à effet de serre dont il est question ici. C'est donc un modèle assez intéressant et exhaustif.

La CCEMC a pour mandat d'exécuter la stratégie provinciale relative aux changements climatiques et, chaque année, le ministre précise, dans la lettre qui accompagne l'accord de subvention, comment il souhaite que les fonds soient affectés.

Je peux assurer les membres du comité que nous continuons à retenir les meilleurs projets, mais dans un délai de trois à cinq ans, ils souhaitent que nous affections environ 20 p. 100 des crédits au secteur de l'efficacité et la conservation énergétique et 30 p. 100 des crédits à la réduction du coût du captage et du stockage, et tout particulièrement le captage du CO2; et cela vient s'ajouter aux 2 milliards de dollars en investissements commerciaux dont vous a parlé Brian Vaasjo.

Troisièmement, 50 p. 100 des crédits doivent être consacrés à ce que nous appelons l'écologisation du bouquet énergétique, et là il y a deux volets : premièrement, des changements hautement transformateurs au niveau de la production de combustible fossile et, deuxièmement, les sources d'énergie renouvelable.

Chaque année, nous préparons un rapport annuel à l'intention du ministre. Nous devons également élaborer un plan d'activité. Tout se trouve sur le site Web. Nous sommes parfaitement transparents. Même pour l'évaluation des projets, nous faisons appel à des surveillants de l'équité qui relèvent de notre conseil d'administration, et nous pouvons ainsi suivre la situation.

Il existe aussi un mécanisme nous permettant d'entretenir un dialogue permanent avec le ministre, de sorte que, si nous apprenons qu'il existe de meilleures options pour ce qui est de réduire le coût du captage du CO2, nous pourrions lui dire : Écoutez, envisageriez-vous de modifier votre bouquet énergétique. Il reste que les politiques dans ce domaine relèvent entièrement de la responsabilité du gouvernement. Notre travail consiste uniquement à choisir les meilleurs projets.

Jusqu'à présent, nous avons perçu 260 millions de dollars entre le milieu de l'année 2007 et la fin de 2010, ce qui n'est pas mal étant donné que beaucoup de gens diraient que 15 $ la tonne de carbone est un faible prix, mais c'est cette somme-là que nous avons réunie.

En tant que conseil, notre rôle consiste à gérer les projets, non seulement par rapport à ces trois secteurs fonctionnels, mais aussi en ce sens que nous devons nous assurer que les projets retenus correspondent à tous les éléments de la chaîne d'innovation. C'est ce que vous indique le prochain tableau.

Premièrement, il en faut une bonne proportion qui sont à peu près à l'étape du déploiement commercial ou de la démonstration car, en fin de compte, on va nous évaluer en fonction de notre véritable capacité à faire réduire les émissions de gaz à effet de serre.

En même temps, si nous visons des changements transformateurs, nous sommes bien obligés d'en retenir un certain nombre qui sont à l'étape préliminaire — vous savez, des idées qui peuvent sembler un peu folles. Elles ont la moindre chance de succès, mais c'est là que réside la vraie force intellectuelle.

L'autre aspect clé est cette validation de la réduction des gaz à effet de serre, car l'une des caractéristiques fondamentales de nos fonds de technologie qui permet de les démarquer d'à peu près tous les autres qui existent est le fait que nous ne crions pas victoire dès que les crédits sont versés ou que les projets sont choisis. En fait, nous désignons une personne pour assurer le suivi de chaque projet que nous finançons et nous travaillons avec les responsables du projet pour les aider à garantir le succès de leurs initiatives.

Nous avons un mécanisme de vérification par une tierce partie des réductions de GES car nous savons qu'il faut en fin de compte obtenir de véritables réductions qui peuvent être validées, notamment si nous soutenons qu'il doit s'agir là d'un mécanisme de conformité légitime.

Nous sommes convaincus, d'après ce que nous avons observé et nos antécédents en ce qui concerne la mobilisation de ressources même depuis l'époque d'AOSTRA, et les efforts soutenus des parties prenantes, que nous réussirons à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Donc, quels sont les résultats concrets? La CCEMC est en activité depuis deux ans seulement. C'est alors que le ministre m'a téléphoné pour me demander si j'accepterais d'en être le président. Au cours de ces deux années, nous avons mis sur pied toute la structure de la société, nous avons choisi le conseil d'administration et nous avons déjà eu trois cycles complets de projets.

Comme je le disais tout à l'heure, nous avons perçu plus de 260 millions de dollars et cet argent est versé à raison d'environ 70 millions de dollars par année, même au prix relativement faible qui s'applique à l'heure actuelle.

Pendant ces trois cycles, nous avons retenu 27 projets et affecté environ la moitié de la somme de 260 millions de dollars. Mais la vraie bonne nouvelle — et c'est une indication de la puissance de ces fonds de technologie, c'est que 126 millions de dollars ont permis de mobiliser 632 millions de dollars pour des projets concrets de recherche et de développement, si bien que notre ratio de multiplication est de quatre à un.

Étant donné que nous n'accepterions jamais de financer la totalité d'un projet, nous insistons — et cela fait partie des propositions — pour travailler de pair avec l'industrie et faire participer les partenaires industriels. Non seulement cela nous permet-il de multiplier les capitaux disponibles mais — et j'estime que c'est l'aspect le plus important — nous pouvons ainsi profiter au maximum de nos ressources intellectuelles; de plus, une fois qu'une idée donne lieu à un succès commercial, il est possible d'en assurer le déploiement beaucoup plus rapidement.

C'est un très bon modèle qui a été bien réfléchi, et il convient de rendre hommage à des gens comme Kirk Andries et Bob Savage pour leur contribution à cet égard.

Je sais que ce chiffre peut vous sembler minime pour le moment. Mais les quelques projets de démonstration que nous avons financés jusqu'ici correspondent à des réductions de huit mégatonnes sur 10 ans, et ce uniquement grâce aux projets pilotes de démonstration. Là où on décroche vraiment le gros lot, c'est quand on remporte des succès qui peuvent ensuite être déployés plus largement.

Si nous décidions de liquider la société et de simplement distribuer notre magot, nous aurions plus de 1 milliard de dollars de projets de recherche et de développement, et vous pouvez me croire quand je vous dis que nous arriverons d'ici la fin de l'année prochaine. Voilà l'objectif que nous nous sommes fixé.

Le président : Vous ne pouvez pas dépenser 1 milliard de dollars?

M. Newell : Si, il y a toutes sortes de bons projets.

En tant que conseil, nous administrons un portefeuille et, comme je vous l'expliquais tout à l'heure, nous essayons de bien doser la distribution des crédits pour des projets liés à l'efficacité énergétique; donc, quand nous constatons qu'il existe un écart à combler, nous définissons nos demandes de propositions en fonction de cela, comme nous le faisons davantage en ce moment.

Nous avons lancé deux demandes de propositions pour de grands projets et, en fait, nous allons affecter plus de crédits au prochain projet. Comme vous allez le voir plus tard, il nous faut mettre davantage l'accent sur l'écologisation des combustibles fossiles et le captage du CO2, pour que ces deux secteurs soient bien représentés.

Parfois il est préférable de ne pas lancer des demandes de propositions ciblées si le regroupement approprié des ressources intellectuelles n'est pas disponible. Par exemple, nous étions d'avis que le secteur biologique présentait un énorme potentiel mais, quand nous avons commencé à chercher, nous nous sommes rendu compte qu'il n'existait pas de regroupement logique qui pourrait proposer des projets; par conséquent, nous avons organisé une rencontre à Toronto. Nous avons fait venir des experts mondiaux pour leur demander s'ils estiment que c'est un secteur qui devrait nous intéresser davantage.

D'après eux, nous serions peut-être à même d'atteindre 30 p. 100 de notre objectif. Donc, même s'ils se trompent dans une assez large mesure, c'est tout de même une proportion trop importante pour qu'on puisse se permettre de la négliger. Ainsi nous avons mis sur pied et nous finançons un réseau biologique dont le rôle ne consiste pas simplement à faire fonction de groupe de réflexion ou de centre de recherche, mais plutôt à élaborer des projets de démonstration en fonction du modèle de la CCEMC pour que ces derniers puissent être exécutés grâce à notre financement.

Il y a différentes possibilités. C'est donc ainsi que nous administrons le portefeuille.

Le tableau suivant vous indique où nous en sommes maintenant, au terme de trois cycles, et ce résultat a en fait surpris beaucoup de gens parce qu'il y a bien des sceptiques qui pensaient que cet exercice consisterait à percevoir de l'argent auprès des grands émetteurs et de le rediriger aussitôt après vers eux. En fait, vous constatez ici que la majorité de nos investissements concernent des projets liés aux énergies renouvelables, et certains d'entre eux sont assez intéressants.

Dans le cadre de la prochaine demande de propositions, nous allons réorienter considérablement cette distribution, car une bonne partie des fonds devront viser l'écologisation des combustibles fossiles ainsi que le captage et le stockage du CO2. Donc, nous allons relever ces barres-là et essayer ainsi d'atteindre le bouquet énergétique visé.

Ce qui est intéressant, c'est que dans le cadre de la cinquième demande de propositions qui visait les petites et moyennes entreprises, et qui a déjà été lancée, les compagnies sollicitées ont répondu en grand nombre. Depuis toujours, le conseil sait que les bonnes idées peuvent venir de toutes sortes de sources différentes.

L'un des projets que nous finançons actuellement est mené par un jeune homme de Calgary qui travaille à partir de son garage et, s'il réussit, il sera très riche, et du coup nous réussirons également à réduire de beaucoup les émissions de gaz à effet de serre.

Le tableau suivant vous présente la ventilation des fonds par secteur. Il est vrai que le secteur de la production d'électricité et celui de l'extraction non conventionnelle du pétrole — c'est-à-dire les sables bitumineux — en obtiennent une bonne proportion.

Plus de 90 p. 100 des crédits émanent de trois secteurs. Les plus importants bailleurs de fonds — en d'autres termes, la plus importante source d'émissions — sont les centrales thermiques alimentées au charbon. En deuxième place, il y a les sociétés pétrolières et gazières, y compris les sables bitumineux, et en troisième place, les pipelines.

La bonne nouvelle, c'est que, même si certains de ces secteurs obtiennent un financement assez considérable, étant donné que leurs activités devraient, selon nous, porter leurs fruits, tous les secteurs industriels participent. Nous tenions justement à ce que le modèle prévoie ce genre de participation.

Le tableau suivant vous indique comment nos investissements ont été répartis dans toute la chaîne de l'innovation. Encore une fois, vous pouvez voir que les projets qui sont à l'étape de la démonstration ou de la commercialisation ont la part du lion parce que, comme je vous l'ai fait remarquer, nos résultats seront évalués en fonction de notre capacité à réaliser de véritables réductions des émissions de gaz à effet de serre.

Il est normal que nous souhaitions mettre l'accent là-dessus pendant la période initiale, mais nous en avons tout de même un certain nombre qui correspondent au stade de la transformation, et nous sommes en discussion avec différentes personnes, comme celles de X PRIZE. Nous avons également des liens étroits avec les responsables de Virgin Earth Challenge et Richard Branson, avec un apport de financement de 25 millions de dollars, et il est donc possible que nous établissions un partenariat avec eux.

Nous sommes également très sensibles, au sein du conseil, à la nécessité de récolter les véritables idées de génie et de ne pas opter pour des solutions trop classiques, ce qui peut parfois constituer un danger.

Le tableau suivant présente la ventilation pour les trois demandes de propositions mais, comme je l'ai déjà dit, nous en sommes encore à l'étape préliminaire. Des fois on me demande comment nous mesurons le succès, étant donné que les délais d'exécution peuvent être assez longs quand il s'agit de technologie. Dans le cas de la CCEMC, je dirais qu'il s'agit de savoir si, après un an, nous avons réussi à mettre sur pied une organisation qui fonctionne, qui est active et qui arrive à obtenir de bonnes propositions; à mon avis, nous avons réussi à faire tout cela. À ce chapitre, nous pouvons soutenir le succès de nos efforts.

Après cinq ans, si nous obtenons de très bons résultats, nous devrions avoir un excellent portefeuille de projets stratégiques dont nous savons qu'ils remporteront un vif succès. Après 10 ans, nous allons infléchir la courbe.

C'est un aspect important, parce que je croyais qu'il y aurait énormément de mécontentement ou d'incompréhension au sein du public quant au fait que les progrès technologiques prennent du temps mais, en réalité, d'après les études de marché que nous avons effectuées, les gens comprennent que ce genre de délais d'exécution est normal, ce que nous trouvons assez encourageant.

Je vais donc conclure en affirmant que c'est un modèle unique dont l'un des éléments clés est la structure réglementaire. Le sénateur McCoy vous dira que l'Alberta a été un chef de file dans ce domaine. Tout a commencé en 2003, lors de l'adoption de la Loi sur les changements climatiques. Le Specified Gas Emitters Regulation a ensuite été adopté en 2007, et c'est à ce moment-là que le gouvernement a commencé à percevoir l'argent. La CCEMC a ensuite été créée en 2009.

Nous sommes encore une jeune organisation, mais nous nous sommes fixé des objectifs de rendement. Nous avons fixé un prix au carbone. Je serais le premier à admettre que le prix a sans doute été fixé de façon un peu arbitraire, histoire de nous lancer.

Je crois que, à ce chapitre, l'Alberta mérite des éloges parce que cette dernière a effectivement reconnu que les progrès technologiques prennent très longtemps. Elle s'est dit qu'il ne convenait pas d'attendre que le reste du monde établisse une politique sur les changements climatiques pour se lancer, et cette province a donc décidé de se lancer modestement.

Vous vous souviendrez qu'en 2007 le monde entier en parlait avec beaucoup de passion. Aux États-Unis, il était question d'un système de plafond et d'échange. Des initiatives de très grandes envergures devaient être lancées. Le gouvernement fédéral avait passé un moment critique. Ainsi nous pensions que, dans un très court laps de temps, il serait possible d'inclure un plus grand nombre d'émetteurs et d'élargir la définition d'un grand émetteur. À présent, même ceux dont les émissions dépassent 50 000 tonnes doivent présenter un rapport sur leurs émissions de GES.

Selon moi — et je précise qu'il s'agit là de l'opinion d'Eric Newell —, cela va passer éventuellement à 25 000 tonnes par année. En deçà de cette limite, les problèmes administratifs sont tels que cela n'en vaut plus la peine parce que, tout comme c'est le cas pour la limite de 100 000 tonnes par année, 70 p. 100 des émissions sont produites par les grands émetteurs, et c'est donc un bon exemple de la règle 80/20.

S'agissant des 12 p. 100, ce n'était qu'un objectif. Nous nous doutions que les cibles deviendraient plus strictes, donc tout y est. La politique du gouvernement est telle qu'il est possible de déplacer les leviers à n'importe quel moment.

Quand au prix de 15 $ la tonne, je crois que tout le monde était d'avis qu'il y aurait une augmentation et, même s'il existe une divergence d'opinions, d'aucuns estiment que le prix pourrait éventuellement atteindre 30 $ ou 40 $.

Si Jim Carter était devant vous pour parler du captage du CO2, il vous dirait que, pour qu'un système de captage et de stockage du CO2 soit économique, il faudrait sans doute fixer le prix du carbone à 30 $ ou 40 $ la tonne, alors que d'autres, comme Suzuki, présentent des scénarios exagérés qui fixent le prix du carbone à 200 $ la tonne.

Mais le gouvernement de l'Alberta — et c'est tout à son honneur — n'a pas décidé d'abandonner ses efforts quand d'autres n'ont pas emboîté le pas. Ensuite, il y a eu la récession économique en 2008. Aux États-Unis, et notamment à Washington et ailleurs, ils sont tellement préoccupés par la situation de l'emploi que bon nombre de gens n'y attachent pas beaucoup d'importance.

Au Canada, nous avons connu la même récession, mais nous ne pouvons pas nous permettre de devenir non concurrentiels par rapport aux États-Unis. Ce ne serait vraiment pas très avisé.

Donc, nous avons continué, et il y a des gens qui me disent : « Eric, qu'arrivera-t-il si tout le monde atteint ces objectifs? » Je réponds en disant que nous sommes la seule organisation que j'aie jamais connue dont l'objectif final consiste à ne plus avoir de raison d'être. Donc, ce n'est pas si mal, à mon avis.

J'aimerais conclure en vous disant que l'autre aspect clé de ce modèle est le fait qu'il prévoit un financement durable. Quiconque travaille dans le domaine de la recherche et du développement vous dira que c'est cela qui est essentiel. Comme les fonds sont perçus et affectés à des activités précises, ces derniers ne peuvent être versés au Trésor, ce qui élimine la possibilité de fluctuations importantes.

De plus, le principe de la responsabilisation est intégré à chaque activité du système. C'est vraiment un assez bon modèle. Les grands émetteurs sont responsables, premièrement, du versement des sommes dues et, deuxièmement, de la gestion et de la sélection des meilleurs projets qui vont nous permettre d'atteindre les objectifs escomptés.

Comme je l'ai souvent dit — plus souvent quand je porte ma casquette de partie prenante des sables bitumineux — c'est la technologie qui nous a permis d'arriver jusqu'ici et c'est également la technologie qui nous permettra d'arriver où nous voulons être demain.

Mes trois messages sont donc les suivants : nous sommes soucieux de l'environnement; la solution repose sur la technologie; et, nous avons un excellent modèle. C'est un modèle pour l'ensemble du Canada. Nous sommes en discussion avec les responsables du CTE à Ottawa. En Saskatchewan, ils sont en train d'adapter notre modèle à leurs besoins. Maintenant, Terre-Neuve voudrait aussi nous en parler.

Donc, quoi qu'ils fassent là-bas, vous qui êtes au Sénat devez vous assurer qu'ils ne vont pas se contenter d'adopter des règlements. Assurez-vous qu'ils vont prévoir toute la souplesse nécessaire pour des fonds de technologie, par exemple, car nous devons tirer profit de la force intellectuelle et des ressources que nous possédons pour réaliser de manière responsable l'immense potentiel énergétique du Canada.

Le président : Monsieur Andries, c'est vous qui êtes le directeur? J'avais cru vous entendre dire que vous êtes le président nommé par le gouvernement. Et votre conseil d'administration compte combien de membres?

M. Newell : Nous avons 14 administrateurs à l'heure actuelle.

Le président : Qui les choisit? La direction?

Kirk Andries, directeur exécutif, Climate Change and Emissions Management Corporation : Il y a deux éléments : premièrement, les statuts constitutifs qui précisent qu'un certain nombre de postes d'administrateurs doivent correspondre aux différentes sources d'émissions — en d'autres termes, il faut un représentant du secteur énergétique, un représentant du secteur des pipelines, un représentant de l'industrie forestière, et cetera.

Ensuite, il y a une autre série de postes auxquels sont nommés des membres du public. C'est Eric, en consultation avec d'autres personnes, qui fait certains choix concernant la composition du conseil, car c'est Eric qui doit s'assurer d'obtenir les résultats escomptés. Donc, il veut s'assurer d'avoir la bonne équipe.

Le président : Dans ce cas, ciblez-vous les PDG à la retraite?

M. Newell : Pas nécessairement. En fait, c'est moins dictatorial qu'on pourrait le croire.

Par rapport à notre public ou les membres de la société, ce sont les grandes associations industrielles, et il est donc évident que nous en parlons longuement, et je veux m'assurer d'avoir accès à leurs connaissances.

J'ai travaillé avec AOSTRA à titre de PDG avant de présider l'Alberta Energy Research, et maintenant, cette société, et je peux vous dire que, si ces organes ont eu autant de succès, c'est parce que, au sein du conseil d'administration, leurs membres ont de grandes connaissances technologiques et commerciales et mettent vraiment la main à la pâte et, deuxièmement, nous avons un excellent personnel qui a mis en place de très bonnes procédures pour la sollicitation et l'évaluation des propositions et l'établissement de partenariats avec les différents segments de l'industrie.

Donc, nous avons réussi à faire tout cela. Notre PDG chez Energy and Environment Solutions est M. Eddy Isaacs. Eddy remonte à l'époque du Research Council d'AOSTRA et tout cela, et nous y avons un excellent personnel.

La CCEMC est une société virtuelle. Nous n'avons aucun employé. Nous n'avons pas non plus de local. Tous nos services sont sous-traités.

Kirk dirige les activités sous contrats. Il traite également avec une agence de communication qui s'occupe de cet aspect-là. Nous avons conclu un contrat avec Eddy Isaacs pour faire toutes les évaluations, ce qui veut dire que nos normes sont les mêmes que celles d'EES et de Climate Change.

C'est PWC qui s'occupe de nos systèmes financiers. Nous avons notre propre vérificateur interne, soit Deloitte Touche, et notre avocat-conseil est Rob Seidel, du cabinet Davis, qui est un partenaire national.

Nous étions d'avis que le modèle virtuel serait le plus approprié, du moins au départ, parce qu'on ne sait pas à quel rythme les activités vont s'intensifier, et il s'agit en réalité du moyen le plus économique d'assurer la prestation de tous ces services. Donc, nous sommes bien en deçà de 3 p. 100 — c'est-à-dire que nos coûts administratifs sont bien inférieurs à 3 p. 100 de nos frais; ainsi, nous sommes au régime minceur.

À l'heure actuelle, au prix de seulement 15 $ la tonne, nous récoltons 70 millions de dollars par an. Vous comprenez bien que, si les pays du monde s'activent autant que ce qu'on croyait, nous pourrions récolter une somme beaucoup plus importante. L'un des objectifs que nous avons fixés dans notre plan d'activité consiste, au cours des trois prochaines années, à définir les indicateurs qui devraient nous inciter à engager du personnel, et à quel niveau, mais pour le moment, nous sommes au régime minceur.

Le président : Pas de bureaux, rien?

M. Newell : Non, nous empruntons des bureaux ou des salles de réunion.

Le président : Aux bureaux de vos membres?

M. Newell : En effet.

Le président : Donc vous n'avez pas de bureau?

M. Newell : Mais je dois vous dire ceci : nous avons un conseil d'administration composé de vedettes, et pas une seule personne a refusé d'en faire partie.

Chacun d'entre eux a longuement parlé avec moi des raisons de sa participation au conseil d'administration. Nous voulions profiter de leur expertise, mais leur rôle ne consistait pas à s'assurer que leur secteur d'activité obtienne sa part du financement. On leur a dit : Laissez votre casquette à la porte; vous faites partie d'un groupe et vous êtes là pour choisir les meilleurs projets.

Chacun d'entre eux, sans exception, a accepté cette façon de faire, et il se serait sans doute agi d'une condition pour devenir administrateur; ils s'investissent. Vous pouvez imaginer de quel niveau sont ces personnes, et je peux vous dire que s'il en manque une ou deux à une réunion du conseil, c'est beaucoup.

Le sénateur Brown : J'ai obtenu une réponse à la question que j'ai posée au témoin précédent. Je voulais simplement savoir pendant combien de temps on peut installer des épurateurs et des dispositifs anti-émissions dans une centrale alimentée au charbon, et à quel âge cela devient impossible. J'ai eu ma réponse.

Le président : Désirez-vous poser des questions à ces messieurs?

Le sénateur Brown : Pas vraiment. Je pense qu'ils sont pas mal compétents et qu'ils font un assez bon travail.

Le sénateur Mitchell : En vous écoutant, monsieur Newell — et je vous ai trouvé très convaincant — je me disais que vous devriez peut-être être à Durban cette semaine. Vous seriez un excellent porte-parole — premièrement, parce que vous expliquez si bien les choses et vous parlez des mesures que nous avons prises et, deuxièmement, parce que vous reconnaissez qu'il existe un problème, et les gens qui sont très préoccupés par ce problème trouvent cela extrêmement rafraîchissant.

J'ai l'impression que vous êtes en faveur de l'idée de fixer un prix au carbone. Est-ce que vous considérez cela comme une taxe au fond? En ce qui vous concerne, s'agirait-il d'une taxe sur le carbone et pensez-vous qu'une telle taxe devrait être plus élevée à un moment donné?

M. Newell : C'est une bonne question. Je dirais qu'il ne s'agit pas là d'une taxe sur le carbone, et je vous expliquerai mon raisonnement dans quelques instants.

Je sais que vous avez entendu un point de vue un peu différent de la part de Brian mais, personnellement, je vois mal comment on peut rendre économique le processus de captage et de stockage du CO2 sans fixer un prix au carbone.

Est-ce que 15 $ est le bon prix? J'en doute. Je le trouve faible. J'ai choisi un chiffre au départ, mais je crois que le marché fixera le prix qui lui convient et, comme je vous le disais tout à l'heure, si je me fonde sur le travail effectué par Jim Carter au Carbon Capture and Storage Council, et en tenant compte des progrès que nous aurions à accomplir pour ce qui est de savoir comment réduire le coût, et cetera, au fond, si le prix fixé se situait entre 30 $ et 40 $ la tonne, on pourrait supposer qu'un système de captage et de stockage du CO2 serait relativement économique, surtout si l'on tient compte du potentiel de la récupération assistée des hydrocarbures.

Selon les estimations du conseil, il serait possible de récupérer 1,4 milliard de barils de pétrole de plus — ce qui n'est pas une petite quantité — grâce au stockage géologique en aquifère.

Donc, pour vous répondre, sénateur Mitchell, c'était toujours moi qui disait qu'il suffirait que ce soit volontaire, et cetera.

Ici, les gens ne considèrent pas qu'il s'agit d'une taxe, n'est-ce pas? Mais nous savons qu'il existe une autre attitude, et j'ai d'ailleurs essayé de convaincre notre ami, Paul Boothe, qui est sous-ministre à Environnement Canada, de ne pas y voir une taxe. Le gouvernement fédéral a très, très peur d'une taxe sur le carbone. En ce qui le concerne, les élections de 2006 avec Stéphane Dion constituaient un plébiscite sur une taxe sur le carbone et, par conséquent, il ne veut rien savoir.

Encore une fois, la différence d'attitude découle peut-être du fait que nous mettons vraiment l'accent sur les grands émetteurs, et qu'ils comprennent ce que nous sommes en train de faire. Cela ne suscite pas autant de réactions négatives qu'une taxe sur le carbone, où tout le monde se voit en train de payer plus cher à la pompe. Mais, en fin de compte, si nous voulons atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés, tout le monde devra faire partie de la solution d'une manière ou d'une autre; il est donc essentiel de fixer un prix au carbone.

Le sénateur Mitchell : Mais comment faire cela dans tout le Canada? Vous disiez que Terre-Neuve et la Saskatchewan veulent vous parler, mais le fédéral peut-il jouer un rôle relativement à l'implantation de ce genre de régime dans des conditions d'équité et sans intrusion?

M. Newell : À mon avis, il n'est pas nécessaire que le gouvernement fédéral participe directement à de tels efforts si l'on opte pour l'approche des fonds de technologie. Ce chiffre-là est différent. Par contre, s'il s'agit d'une taxe générale qui vise une plus grande proportion de la population, les gouvernements devront nécessairement s'y investir à fond.

Le sénateur McCoy : Merci infiniment pour votre exposé; c'est vraiment une nouvelle positive. Je suis très contente que nous ayons eu l'occasion de la partager avec les membres du comité.

Voilà l'une des options en faveur d'une plus grande flexibilité qu'on pourrait incorporer dans la réglementation sur la production d'électricité à partir du charbon, par exemple, n'est-ce pas?

M. Newell : Je suis d'accord.

Le sénateur McCoy : C'est quelque chose qui nous intéresse, ici en Alberta. Nous aimerions que cette idée soit prise en compte et développée davantage.

Deuxièmement — et c'est un élément que je voudrais approfondir avec vous — vous avez fixé comme critère absolu de réaliser une réduction absolue des gaz à effet de serre. Voilà justement l'un des mythes qui circulent. Les gens disent que vous ne contribuez aucunement à faire diminuer en chiffres absolus les émissions de gaz à effet de serre dans le monde.

Vous, vous dites : donnez-nous 10 ans et nous allons vraiment commencer à infléchir la courbe. C'est un excellent argument.

M. Newell : Oui, c'est cela notre position. Ce mécanisme n'est pas le seul qui va nous permettre d'en arriver là mais, selon les cibles du gouvernement de l'Alberta, d'ici 2020, il devra y avoir une réduction de 17 p. 100, comme ce qui est prévu, mais celles qui nous intéressent directement sont celles à atteindre d'ici 2050. Ce dernier souhaite réduire les émissions de gaz à effet de serre de 200 mégatonnes par année, par rapport au statu quo. Il s'agit d'une réduction effective de 50 p. 100.

Le sénateur McCoy : Je pense que notre cible générale est de 324. Vous dites que vous allez participer à l'atteinte de cette cible?

M. Newell : Oui, nous allons y participer.

Le sénateur McCoy : Est-ce concevable que, à un moment donné, vous disiez : Nous sommes en activité depuis huit ans et, après avoir examiné les diverses technologies, nous constatons qu'il faut déployer davantage un certain nombre d'entre elles?

Vous dites que vous avez déjà réalisé une réduction de huit mégatonnes seulement dans le cadre de projets de démonstration, et qu'il est prévu que ces derniers soient reproduits de façon générale, une fois qu'on aura prouvé leur efficacité.

Allez-vous vous mettre à dire que, maintenant que cette méthode a fait ses preuves, essayons de la diffuser plus largement et de la faire adopter par ceux qui peuvent en profiter? Allez-vous commencer à faire ce genre de choses?

M. Newell : Jusqu'à un certain point, nous faisons déjà ce genre de choses, ne serait-ce qu'en faisant participer nos partenaires industriels à notre action; par contre, s'agissant de propriété intellectuelle, vous aurez peut-être remarqué que nous n'essayons pas de toucher des redevances ou ce genre de choses. Nous y voyons un obstacle.

Si nous décidons de financer un projet, les responsables ont la possibilité de ne pas communiquer cette information pendant un certain temps, mais ensuite il faut que le public en soit informé. Nous essayons d'aller dans cette direction.

Concernant le point que vous avez soulevé, qui est excellent, nous commençons à présent à parler aux sociétés de capital-risque. Il convient de les inclure dans ce contexte parce que, si vous obtenez une bonne idée, eh bien, nous ne sommes pas une banque et nous ne souhaitons pas nécessairement jouer ce rôle; par contre, pourquoi ne pourrions- nous pas être un intermédiaire qui procure du capital-risque?

Il y a une société à Vancouver qui semble être très bonne, et d'autres du même genre. Certaines grandes sociétés pétrolières ont leur propre branche de capital-risque, et nous allons donc commencer à nous y intéresser de plus près.

Le sénateur McCoy : Il existe un groupe d'ex-Canadiens en Californie qui ont récemment mis sur pied un fonds de technologie. Avez-vous parlé à ces gens-là?

M. Andries : Je vais leur parler aujourd'hui.

Le sénateur Neufeld : Merci pour votre exposé. À mon avis, vous avez mis au point un excellent système.

Pour que je sois sûr de bien comprendre, parle-t-on des émetteurs des secteurs de la production d'électricité du pétrole et du gaz, et des pipelines dont les émissions dépassent 100 000 tonnes par année, et ces derniers ont-ils la possibilité d'investir dans des compensations écologiques ou dans un fonds de technologie? Ai-je bien compris, plus ou moins?

M. Newell : Presque. Tous les secteurs d'activité qui produisent des émissions de gaz à effet de serre participent. Il peut s'agir de n'importe quel secteur d'activité — les compagnies de ciment, par exemple. Il se trouve que 90 p. 100 des émetteurs concernés émanent de ces trois grands secteurs.

Donc, premièrement, ils doivent atteindre certaines cibles, soit une amélioration de l'intensité énergétique de 12 p. 100. C'est comme le critère fixé pour les gaz à effet de serre par baril comme unité de production, et ce n'est donc pas une cible absolue à ce niveau-là; il y a un niveau de référence et c'est ce dernier qui constitue actuellement la cible. Mais cela pourra changer, devenir plus exigeant.

Donc, ils ont le choix, premièrement, d'essayer de faire des modifications afin de combler l'écart, et c'est ce que font la plupart d'entre eux mais ils ne vont pas réussir à atteindre la cible parce que cette dernière est rigoureuse même si vous avez pris tout cela au sérieux au fil des ans; à ce moment-là, ils ont deux choix.

Premièrement, ils peuvent acheter des compensations écologiques. Nous venons d'apprendre que le vérificateur général a fait des observations assez critiques au sujet de notre système, mais c'est tout à fait compréhensible. Nous allons finir par combler les lacunes. Donc, ils peuvent acheter des compensations écologiques ou, s'ils préfèrent, ils peuvent investir dans le fonds et, à ce moment-là, ils devront payer 15 $ la tonne.

Kirk, corrigez-moi si je me trompe, mais les compensations écologiques sont généralement assez peu coûteuses — disons, environ 7 $ ou 8 $ la tonne. Si les entreprises décident d'investir 15 $ la tonne dans notre fonds de technologie, je dirais que c'est une bonne indication, comme vous le diraient tous mes amis PDG, que la solution passe par la technologie.

Le sénateur Neufeld : Je me demandais quelle était la distribution. Merci pour cette réponse.

Je vais vous poser une question hypothétique, car beaucoup de gens nous ont dit qu'il faut créer une taxe sur le carbone. Je ne cherche pas à examiner l'emploi du terme « taxe » par rapport à un autre. Supposons que les gens qui y sont favorables réussissent à convaincre le gouvernement fédéral d'imposer une taxe, où devrait aller cet argent?

Je voudrais développer encore ce scénario. L'Alberta, la Colombie-Britannique et l'Ontario sont d'assez grands émetteurs et, s'ils décidaient collectivement de verser l'argent à une autorité centrale pour redistribution, seriez-vous satisfait de cette solution? J'ai du mal à imaginer que vous le soyez, et je vous invite donc à commenter cette possibilité- là.

Dites-moi ce que vous en pensez. S'ils retenaient cette formule, comment ferait-on pour redistribuer l'argent? Il est facile de clamer haut et fort qu'il suffit d'imposer une taxe sur le carbone. C'est après que cela devient compliqué. Comment fait-on pour s'assurer que les crédits permettent de manière concrète d'atteindre les objectifs fixés?

Selon moi, il ne convient pas de tout centraliser dans une grande ville de l'est du Canada, de sorte que quelqu'un là- bas soit chargé de décider comment l'argent sera utilisé. Cela ne me convient pas du tout comme solution. Peut-être pourriez-vous me dire ce que vous en pensez en tant qu'Albertain?

M. Newell : C'est justement la raison pour laquelle je n'ai jamais été d'accord avec un système de plafond et d'échange; cela paraît bien en théorie, bien entendu, mais le diable est dans les détails.

À vrai dire, beaucoup de gens, me semble-t-il, y voient un mécanisme de redistribution de la richesse consistant à transférer l'argent de l'Alberta et de la Saskatchewan à l'est du pays, et c'est ce qui explique la difficulté que nous avons à élaborer une politique nationale sur l'énergie et les changements climatiques.

C'est également la raison pour laquelle nous sommes critiqués ou que les gens ne comprennent pas quand nous disons que nous souhaitons que les fonds de technologie soient considérés comme un mécanisme de conformité légitime. Les gens expriment leur opposition parce que, dans certains cas, ils préféreraient que ce ne soit pas un mécanisme légitime; à ce moment-là, le choix serait d'investir dans des compensations écologiques et ce sont eux qui l'emporteraient. Mais, à mon avis, il faut prendre un peu de recul.

Vu l'ampleur des défis auxquels nous sommes confrontés, si nous décidions un jour d'opter pour un système de compensations écologiques en vertu duquel l'argent finirait dans l'Est, son passage dans le reste du Canada le ferait disparaître tellement vite que ce serait comme s'il n'avait jamais existé. Nous finirons par acheter beaucoup de poudre de perlimpinpin en Russie et cultiver une multitude de forêts au Belize.

Maintenant, si je mets ma casquette de PDG de Syncrude, je peux vous dire, à titre de grand cotisant, si cet argent est versé à un fonds de technologie dont je sais qu'il va favoriser la recherche d'une solution, je ne me sentirais pas si mal. Mais si vous me demandez d'acheter toute cette poudre de perlimpinpin en Russie, eh bien, j'estime que vous vous contentez de m'imposer sur les vices alors que je dois toujours essayer de trouver une solution technologique.

Le sénateur Neufeld : Vous dites que cette taxe, ou plutôt le montant de ce droit — je vais plutôt utiliser ce terme-là — devrait se situer autour de 30 $ pour le captage et le stockage du CO2. Si le gouvernement fédéral optait pour une formule de ce genre et laissait l'argent ainsi réuni dans chaque province ou territoire, tout le monde serait touché, comme vous l'avez si bien dit. Si c'est une initiative fédérale, il faut qu'elle vise tout le monde. C'est-à-dire, à la pompe, au compteur de chaleur, comme en Colombie-Britannique, et que tous les émetteurs soient visés.

Si cet argent restait dans la province de l'Alberta, mettons, quelle serait la position de l'industrie sur une telle éventualité?

M. Newell : Vous voulez dire que l'argent resterait là où les émissions sont produites?

Le sénateur Neufeld : Oui.

M. Newell : Je peux difficilement parler pour l'ensemble des intervenants de l'industrie, mais je peux vous dire que oui, cette solution me conviendrait mieux.

M. Andries : Je voudrais réagir, si vous permettez. C'est justement ce modèle qui a été retenu par l'Alberta. En fait, nous ciblons les sources d'émissions, et il est essentiel que l'argent soit réinvesti dans ces mêmes sources; étant donné que, pour nous, la technologie constitue la solution à l'avenir, c'est là que l'argent doit être réinvesti.

Le sénateur Neufeld : Je suis de la Colombie-Britannique, et comme j'étais au gouvernement quand nous avons créé nos propres taxes et opéré un certain nombre de changements, je peux vous dire que nous ne faisons pas les choses exactement comme vous. La nôtre n'a pas d'incidence sur les contribuables. Les impôts de tout le monde sont réduits...

Le président : Quand vous dites « nos taxes », vous voulez parler de celles de la Colombie-Britannique?

Le sénateur Neufeld : Oui, de la Colombie-Britannique. C'est ma province natale.

Le président : Pour ma part, je suis du comité sénatorial.

Le sénateur Neufeld : Je ne cherchais pas à vous embrouiller.

Le président : Vous avez tout l'après-midi devant vous.

Le sénateur Neufeld : Désolé, monsieur le président, mais d'autres personnes compétentes sont embrouillées comme vous.

Le président : C'est moi qui était à votre place hier.

Le sénateur Neufeld : La province a instauré une taxe neutre. Ici vous misez sur la technologie, et même si nous faisons la même chose en Colombie-Britannique, cela passe par d'autres sources de revenu.

Donc il existe différentes formules. Ce que j'essaie de vous dire, c'est que différentes provinces ont différentes façons de faire, en fonction de leurs émissions et de la source de ces émissions.

Mais je voulais solliciter vos vues sur la question, car je voudrais en discuter avec un collègue un peu plus tard.

M. Newell : Si je peux développer un peu notre idée, nous aimerions que l'argent reste en Alberta, mais vous devez vous rendre compte que, selon le mode de fonctionnement de notre fonds, il nous est possible de financer des projets de recherche et de développement n'importe où. La seule condition qui vise spécifiquement l'Alberta est le fait que la technologie qui est mise au point doit pouvoir être utilisée en Alberta.

Certaines des technologies que nous finançons viennent d'Europe. Il y a une entreprise en Floride qui participe à un de nos projets fort intéressants. C'est la seule condition que nous imposons, mais nous voulons avoir toute la marge nécessaire pour profiter des bonnes idées, qui peuvent venir de partout.

Il convient également de concevoir le système de façon à promouvoir les partenariats parce que nous, aussi, nous parlons aux gens en Colombie-Britannique; par contre, si vous regardez cette carte indiquant la source des émissions et vous superposez la carte démographique de chaque province, vous comprendrez rapidement pourquoi chaque province peut avoir besoin d'une stratégie assez différente.

Le sénateur Banks : Merci infiniment de votre présence. À bien des égards, vous êtes notre héros, monsieur Newell.

Le président : Le père des sables bitumineux.

Le sénateur Banks : Précisément, et celui qui a bien fait les choses, car sinon, ce projet n'aurait peut-être jamais vu le jour. Il a bien fait les choses.

Je n'ai pas de question au sujet des gaz à effet de serre, ni sur le pétrole. Vous avez mentionné l'eau. Nous avons découvert que le département provincial chargé des questions environnementales s'appelle à présent le ministère de l'Environnement et de l'Eau — ce qui est très précis.

Dans votre exposé liminaire, vous avez mentionné en passant un problème précis de pression liée à l'eau dans le sud de la province. De quoi s'agit-il?

M. Newell : Presque toute l'eau de la rivière Bow est attribuée. On entend beaucoup parler de la rivière Athabasca en raison des sables bitumineux mais, en réalité, seulement 7 p. 100 de l'eau de la rivière Athabasca sont attribués. L'ensemble de l'industrie des sables bitumineux utilise 1,3 p. 100 du débit d'eau annuel moyen, ce qui est très faible finalement; mais, dans le cas de la rivière Bow...

Le sénateur Banks : Ou la rivière Milk.

M. Newell : Oui, ou la rivière Milk. Ce sont des problèmes de taille.

Le Water Research Institute, dont Lorne Taylor a été le champion, a fait un excellent travail dans ce domaine. Si vous parlez aux responsables, ils vous diront peut-être qu'ils estiment avoir perdu une part de leur autonomie par suite de la fusion mais, personnellement, je crois que nous pourrons maintenant multiplier les ressources et vraiment nous concentrer sur ce problème.

Le sénateur Banks : Donc, la surattribution de l'eau des rivières du sud vous préoccupe?

M. Newell : Oui, chez Energy and Environment Solutions, absolument. L'eau est...

Le sénateur Banks : Parlons-en justement. Si l'on en croit les glaciologues, la fonte des neiges dont dépend l'Alberta pour combler l'écart entre l'évapotranspiration et la précipitation, qui est toujours insuffisante, ne suffira plus.

L'eau de ces rivières est surattribuée. Il y a lieu de craindre ce qui va se produire quand cette eau arrivera en Saskatchewan. En restera-t-il pour les autres?

La seule chose qui va toujours inciter les gens à faire la guerre, c'est l'accès à l'eau. Nous pouvons nous passer de tout sauf de l'eau. La rivière Milk est d'ailleurs une source de grandes frictions internationales entre les secteurs agricoles du sud de l'Alberta et du Montana. Est-ce un problème sur lequel vous envisagez de vous pencher? Cela fait-il partie de vos responsabilité?

M. Newell : Il ne fait aucun doute que notre action est vraiment centrée sur les questions technologiques, et nous constituons une bonne tribune pour essayer de soulever ces questions, avec lesquelles les politiques ont du mal à composer, justement pour les raisons que vous avez évoquées. Dès qu'il s'agit d'eau, les gens ne réagissent pas de la même façon. Rappelez-vous les protestations vigoureuses des citoyens quand quelqu'un a essayé de vendre un chargement d'eau du lac Supérieur?

Le Water Research Institute a un rôle à jouer dans la définition des politiques mais, dans la mesure où la technologie peut influencer ces dernières, nous avons la possibilité de faire fonction de tribune, un peu comme le Conference Board, si je peux faire cette analogie — pour que les gens puissent se rassembler pour en parler.

Le problème n'est pas tellement qu'il existe une pénurie. C'est plutôt que nous n'avons pas de souplesse en ce qui concerne l'attribution, et certains possèdent des droits historiques auxquels ils refusent de renoncer. Or il faut être en mesure d'optimiser l'utilisation de cette ressource.

Le sénateur Banks : À la fois la rivière Bow et la rivière Milk, et sans doute d'autres rivières aussi, sont surattribuées, à plus de 100 p. 100. Si tous les détenteurs de permis prenaient tout ce à quoi ils ont droit, il ne resterait plus d'eau.

M. Newell : Voilà justement une autre des responsabilités de Kirk. Kirk est directeur général de l'Alberta Biodiversity Monitoring Institute, qui fait un excellent travail dans ce domaine, et il existe un certain recoupement.

Quand nous avons commencé à nous intéresser aux changements climatiques et à nous y lancer pour la première fois, je n'en parlais pas, mais il est certain que l'eau est un enjeu clé.

Le sénateur Banks : Monsieur Andries, menez-vous des études longitudinales sur les débits mesurables?

M. Andries : De l'eau?

Le sénateur Banks : Oui, de l'eau de surface.

M. Andries : Non. Dans le cadre de notre programme de biodiversité, nous surveillons essentiellement les changements qui surviennent par rapport aux habitats et aux paysages, à l'empreinte anthropogénique et aux espèces elles-mêmes, ainsi que la relation entre la performance des espèces et les activités qui sont menées dans ces paysages.

Le sénateur Banks : L'empreinte anthropogénique comprendrait l'extraction à des fins agricoles, j'imagine.

M. Andries : Nous incluons l'agriculture, bien entendu, mais s'agissant de l'eau, nos activités ne portent aucunement sur ce que j'appellerais les principaux réseaux hydrographiques. Nous nous intéressons plutôt aux zones humides. Notre programme de surveillance des zones humides en Alberta est le plus exhaustif qui soit, et nous les suivons du point de vue de la chimie de l'eau, de la présence d'invertébrés et des habitats terrestres qui entourent les zones humides.

Nous avons récemment diffusé le rapport sur l'état de la biodiversité du bassin de la rivière Saskatchewan Sud et, avant cela, nous avons préparé un rapport sur le cours inférieur de la rivière Athabasca, où se déroule, bien entendu, les opérations d'exploitation des sables bitumineux.

Pour vous donner une idée de l'excellence des informations scientifiques que nous fournissons, la mesure que nous employons est celle de l'intégrité — en d'autres termes, l'intégrité du système par rapport à son état si nous n'avions jamais occupé le terrain.

L'indice de référence est 100 p. 100 si nous n'avions jamais occupé le terrain. Dans la zone du cours inférieur de la rivière Athabasca, nous avons observé une intégrité de 95 p. 100 par l'entremise de notre programme.

Quand on examine les grands systèmes et le fonctionnement de la biodiversité, on constate que le nord de l'Alberta est en excellent état; le sud de l'Alberta, pas autant.

Le sénateur Banks : C'est une autre histoire.

M. Andries : En effet, mais nous avons fait des choix éclairés concernant les activités que nous voulions poursuivre dans le Sud de l'Alberta, et personne ne remet en question ces choix. Mais ils ont des conséquences.

Le président : S'agissant d'empreintes anthropogéniques, je crois savoir que vous aurez bientôt une vacance au sein de votre conseil, et le sénateur Banks va justement être disponible à compter de décembre. Il apporterait une grande contribution à votre communauté des cerveaux parce qu'il a été bien formé ici et il s'intéresse beaucoup à la question.

Votre travail est fascinant. Vous êtes l'une des organisations virtuelles qui jouent un rôle de plus en plus important, et vous constituez un excellent modèle. Le sénateur McCoy nous a parlé de vous et ce que vous faites est très impressionnant.

Sénateurs, nous accueillons maintenant deux personnes qui représentent le ministère de l'Énergie du gouvernement de l'Alberta.

Merci à vous deux de votre présence. Je crois que vous êtes au courant de la nature de notre travail. Nous poursuivons une étude du secteur énergétique qui a commencé au milieu de 2009, et nous terminons nos consultations auprès des Canadiens, des responsables gouvernementaux et des représentants de toutes sortes de milieux différents d'un bout à l'autre du pays, afin de bien comprendre la grande diversité et les grandes différences qui existent entre les différentes régions du Canada.

Aujourd'hui nous sommes à Edmonton, en Alberta, et nous sommes tout à fait ravis de nous retrouver dans la ville qui constitue le siège du gouvernement de l'Alberta et de pouvoir vous recevoir vous deux qui représentez le ministère de l'Énergie de l'Alberta, soit Mike Ekelund, sous-ministre adjoint par intérim, Initiatives stratégiques, et Kathryn Wood, sous-ministre adjointe par intérim, Électricité, sources d'énergie de remplacement, captage et stockage du carbone.

C'est vous qui allez commencer, monsieur Ekelund.

Mike Ekelund, sous-ministre adjoint, Initiatives stragégiques, Alberta Energy : Il est possible que certaines des informations que nous vous présenterons seront un peu techniques. Kathryn et moi sommes tous les deux des ingénieurs professionnels en exercice, mais nous essaierons de nous en tenir à des informations moins spécialisées.

Je voulais essentiellement aborder trois éléments, c'est-à-dire vous faire un peu l'historique de la situation en commençant par l'expérience de l'Alberta dans le domaine de l'exploitation des ressources, le portrait de la situation en ce moment et ensuite l'orientation que semble prendre la province.

S'agissant de l'histoire récente, de 1948 jusqu'aux années 1970, nous étions essentiellement une province qui produisait du pétrole brut léger, moyen et lourd. Nous avons atteint un sommet de 1,5 million de barils par jour en 1972, mais à partir de ce moment-là, la ressource a commencé à décliner. Cela nous a permis d'acquérir beaucoup d'expérience dans l'exploitation du pétrole, grâce au forage d'un certain nombre de puits dans différentes régions de la province, de même que dans la réglementation des activités pétrolières et gazières.

Nous avons commencé par mettre sur pied la Turner Valley Conservation Board, qui est ensuite devenue la Energy Resources Conservation Board. Nous avons de très longs antécédents dans la conservation des ressources et la réglementation des activités de l'industrie.

Lors du déclin de la production de pétrole conventionnel à compter de 1972, il s'est produit deux choses. Premièrement, la production de gaz naturel est passé de 4 milliards de pieds cubes par jour — il s'agissait essentiellement de gaz naturel qui était le produit résiduaire de l'exploitation du pétrole — à 14 milliards de pieds cubes par jour en 2001, l'année où nous avons atteint un sommet. Ainsi nous sommes devenus essentiellement un producteur de gaz naturel, de telle sorte que nous avons acquis énormément d'expérience dans le forage de puits de gaz naturel, dans la réglementation des puits de gaz naturel et dans l'exploitation des installations de transformation du gaz naturel.

À la fin de l'année dernière, la production de pétrole conventionnel était tombée à 450 000 barils par jour, soit une baisse considérable par rapport à ce sommet. Quand au gaz naturel, la production était passée de 14 milliards à environ 10 milliards de pieds cubes par jour, mais ces 450 000 barils de pétrole par jour sont produits par 40 000 puits ou zones dans des puits, si bien que nous avons un grand nombre de puits de pétrole qui sont gérés par les organes de réglementation et par la province elle-même au cours des 30 ou 40 dernières années. Notre gaz naturel est extrait de plus de 100 000 puits de gaz naturel ou de zones de gaz naturel situés dans des puits.

Dans l'ensemble, le forage de puits de gaz naturel existe depuis le début des années 1900. Je crois que les premiers règlements visant cette activité remontent à 1911 ou peut-être 1914. En 2005, nous avons atteint un sommet, avec le forage de 20 000 puits. En 2010, 10 000 puits ont été forés, ce qui est inférieur au sommet atteint précédemment mais, selon moi, c'est le résultat des changements qui se sont opérés au sein de l'économie.

L'autre chose qui s'est produite, c'est que la production de pétrole conventionnel a diminué. Il y a eu une augmentation de la production de gaz naturel, et l'expansion des activités dans le secteur du gaz naturel, de même que les opérations d'exploitation des sables bitumineux — et j'ai eu la chance d'entendre les témoignages d'Eric Newell, l'un des fondateurs de l'industrie des sables bitumineux, lorsqu'il parlait du fonds de lutte contre les changements climatiques.

Donc, depuis les premières opérations du projet Suncor en 1967, nous avons progressé à un point où la production atteint à présent 1,6 million de barils par jour qui sont extraits de 10 000 puits de production et de cinq grands projets d'exploitation minière des sables bitumineux.

Nous avons également une expérience considérable de la valorisation et du raffinage pétrochimiques. Nous constituons une importante plaque tournante pour la valorisation et le raffinage. Une bonne partie des opérations de valorisation se déroule dans les grands établissements situés près de Fort McMurray, alors que pour les opérations de raffinage, il s'agit, bien entendu, de Refinery Row et du centre industriel de la province ici à Edmonton.

De plus, nous possédons deux des plus grandes unités de captage du monde à Joffre, où l'éthane est transformée en éthylène, et cetera. L'Alberta a une très grande expérience au niveau de la mise sur pied et du développement de ces secteurs industriels.

Nous avons également une grande expérience de l'exploitation du charbon, et ce à compter des années 1880, même si l'exploitation de cette ressource ne s'est pas vraiment beaucoup intensifiée jusqu'en 1960, où nous avons commencé à mettre sur pied un réseau de production d'électricité alimenté principalement au charbon. En 2010, nous avons produit environ 40 millions de tonnes de charbon.

Ma collègue, Kathryn Wood, abordera la question du réseau électrique, de même que la cogénération, l'énergie éolienne, et d'autres éléments; par conséquent, je ne vais pas vous donner de détails à ce sujet.

Si j'ai voulu vous faire cet historique, c'est pour vous permettre de comprendre les changements qui se sont opérés, de même que l'expérience considérable que nous avons acquise dans le domaine de l'exploitation du pétrole, du gaz et du charbon, ainsi que dans la réglementation des activités pétrolières et gazières de 150 000 puits de production, y compris des puits qui ont été forés mais qui ne sont pas actuellement des puits producteurs, et dans la production de milliards de barils de pétrole et de billions de pieds cubes de gaz naturel au cours des dernières décennies.

Je pense qu'il importe de comprendre que nous avons été des chefs de file dans la mise au point et l'application de nouvelles technologies tout au cours de cette période, justement pour nous permettre de mettre en valeur ces ressources et de les gérer de manière appropriée, et cela me semble important par rapport à l'orientation future de la province.

Parmi les exemples d'importants changements technologiques dont j'ai été témoin depuis que j'ai lancé ma carrière d'ingénieur dans les années 1970, mentionnons des techniques améliorées de récupération assistée des hydrocarbures, permettant d'extraire davantage de pétrole de gisements pétrolifères épuisés. C'est une technologie qui a été mise au point et appliquée ici.

Nous possédons également du matériel plus perfectionné pour la prospection sismique, de sorte que nous obtenons de meilleures données géologiques nous permettant de savoir où se trouvent les gisements, mais nous employons également de meilleures techniques sismiques, ce qui permet de réduire les incidences environnementales.

Autrefois, nous établissions de très longues lignes sismiques. Maintenant nous sommes obligés d'avoir un tracé en zigzag, de sorte qu'on n'a plus cette longue ligne visuelle qui nous permet de réduire l'impact sur les loups ou les chasseurs. Il existe des appareils portatifs de prospection sismique; donc, il y a eu des changements technologiques dans ce secteur-là.

Le forage horizontal a changé les choses de façon fondamentale. Il a permis d'améliorer la production et de réduire le nombre d'emplacements de puits qui sont nécessaires. De plus, la récupération est améliorée.

Nous avons également acquis la capacité de produire du méthane de houille maigre. Il s'agit d'une nouvelle technologie. La mise au point de technique de drainage par gravité au moyen de vapeur donne accès au bitume in situ dans le cadre de l'exploitation des sables bitumineux.

Nous avons donc assisté à l'évolution de la technologie au fil des années. Et c'est justement la technologie qui constituera la solution à l'avenir pour le secteur énergétique de la province.

Donc, à quoi ressemble cet avenir? Eh bien, il existe de nouveaux horizons et de nouveaux défis à relever. Les progrès technologiques vont se poursuivre. Ces derniers créent de nouvelles possibilités d'exploitation en Alberta et nous pensons qu'ils permettront également de relever un certain nombre de défis qui sont associés à l'exploitation des ressources.

Nous avons été à même de produire du gaz naturel à partir de filons de charbon. La production de gaz naturel à partir de schistes commence à se développer. Nous avons un petit nombre de puits mais, compte tenu de l'expérience américaine dans les différentes zones de production du gaz de schiste, cette source présente un potentiel considérable.

Étant donné le volume de roches que nous possédons en Alberta, le potentiel que présente le gaz de schiste est vraiment important. L'huile de schiste présente également du potentiel; donc, même si notre production de gaz naturel et de pétrole conventionnel est en baisse selon les résultats futurs et le perfectionnement de cette technologie, il est possible que cette production ne diminue pas ou encore qu'elle augmente avec le temps. Dans le nord-est de la Colombie-Britannique, nous avons observé des changements qui sont dus au gaz de schiste.

Il est certain que la production issue des sables bitumineux devrait augmenter. Selon les plus récentes prévisions du Energy Resources Conservation Board, il est question que la production double d'ici 2020 — en d'autres termes, on passerait de 1,6 à environ 3 millions de barils par jour. Voilà qui va créer certaines difficultés, bien entendu, et nous avons déjà passé un certain temps, en présence de M. Newell, à parler justement de changements climatiques, de gaz à effet de serre et des mesures qui sont prises en Alberta pour s'attaquer à ces difficultés.

Nous croyons également que la production de pétrole conventionnel est susceptible de continuer à baisser, mais ce déclin sera compensé par l'application de nouvelles technologies, si bien que, d'ici 2020, notre production pourrait atteindre 3,7 millions de barils de bitume, de pétrole brut synthétique et de pétrole.

Nous avons été un important fournisseur de pétrole en Amérique du Nord et nous avons aussi contribué à répondre aux besoins mondiaux de pétrole; d'après ce que nous avons pu voir, cela continuera d'être le cas dans l'avenir prévisible.

Si vous regardez les perspectives et scénarios que l'Agence internationale de l'énergie a publiés le mois dernier, vous verrez que, d'après cette dernière, les besoins en matière de ressources de tous types, et de pétrole en particulier, vont être considérables, et ses scénarios s'appuient en grande partie sur des gisements qui n'ont pas encore été mis en valeur, pour des raisons économiques, ou qui n'ont pas encore été découverts.

Donc, le pétrole non conventionnel sera très important, non seulement pour fournir le pétrole qui est attendu, mais aussi pour constituer une source d'énergie si la mise en valeur des autres réserves qui n'ont pas encore été découvertes ou exploitées pose des difficultés à l'avenir.

Ainsi, comme l'a fait remarquer la première ministre Redford, le pétrole devient à présent une ressource stratégique qui nous donne l'occasion de jouer un rôle de chef de file mondial pour ce qui est de répondre à la demande mondiale d'énergie, tout en ajustant nos activités de manière à garantir la pérennité de l'environnement. Elle a déclaré qu'il nous faut devenir un fournisseur international privilégié d'énergie et d'innovation afin de jouer ce rôle stratégique.

S'agissant de l'avenir du secteur, je crois que l'industrie, le gouvernement et les organes de réglementation devront se pencher sur la façon de jouer ce rôle stratégique et ce que nous devons faire pour que nos activités de production soient respectueuses de l'environnement, car ces éléments constituent la clé de voûte de notre capacité à répondre aux besoins mondiaux en matière de pétrole.

Comme je l'ai déjà dit, nous avons acquis beaucoup d'expérience dans la réglementation des activités pétrolières et gazières, entre autres. Nous avons également beaucoup d'expérience dans le secteur des technologies.

L'Alberta a été à l'avant-garde du fait d'avoir décidé de créer des organes comme AOSTRA et d'investir des sommes importantes dans la mise au point d'une toute nouvelle technique, soit le drainage par gravité pour la récupération in situ, ce qui a permis d'accéder à toute la ressource à l'extérieur des mines.

Ce genre de progrès technologique est nécessaire pour la mise en valeur future de nos ressources, et j'aimerais vous donner quelques exemples des succès que nous avons déjà remportés, en espérant que ces succès se multiplient dans l'avenir.

De nombreux citoyens de l'Alberta — représentants de l'industrie, chargés gouvernementaux de réglementation et d'organismes multilatéraux — ont contribué à réduire de 77 p. 100 le torchage du gaz naturel des puits de pétrole depuis 1996, et la ventilation — d'environ de moitié depuis 2000. J'en suis très fier parce que j'ai participé à l'élaboration des « otherwise flared solution gas regulations », mais c'est grâce à toute une panoplie d'outils stratégiques et technologiques, et de changements de réglementation, que nous avons pu modifier de façon importante les quantités de gaz naturel brûlé à la torche.

S'agissant de l'exploitation des sables bitumineux, comme M. Newell vous l'a fait remarquer, avec la transition vers une intensification de l'exploitation in situ, l'intensité des émissions de gaz à effet de serre a diminué de 39 p. 100. Je m'attends à ce que d'autres mesures soient prises afin de maintenir cette tendance.

La remise en état des terrains constitue un important défi. Ceci a toujours constitué une exigence pour les mines d'exploitation des sables bitumineux mais, étant donné que la durée de vie utile des mines est très longue, il faut attendre quelque temps avant qu'il y ait des progrès à ce chapitre.

À mon avis, nous avons franchi une étape assez importante avec l'achèvement des opérations de remblaiement et de plantation au bassin de décantation des résidus no 1 de Suncor; je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de le voir.

Il n'a pas encore reçu un certificat de remise en état. Le bassin a été remblayé et replanté. La croissance est en cours, mais il faudra un certain temps avant qu'elle atteigne un niveau où nous serons en mesure d'accorder cette accréditation. Mais ce site a été remis en état. C'est un progrès assez important, et d'autres vont l'être également dans les mois qui viennent.

De plus, les producteurs ont pris un certain nombre d'autres mesures pour régler le problème des résidus. Suncor travaille à la mise au point de polymères qui aideront à sécher les résidus accumulés, car c'est cela qui présente le plus gros problème. Il s'agit de boues qui ne se décantent pas et qui peuvent donc prendre plusieurs décennies, voire même des siècles, avant de se décanter, si vous ne faites rien.

Si on peut trouver le moyen d'introduire des produits chimiques qui permettront de sécher les résidus plus rapidement, il sera possible de remettre en état les bassins de décantation beaucoup plus rapidement, et ce en traitant l'eau et le sol pour être à même de travailler plus rapidement le sol.

De même, des travaux sont en cours sur les centrifuges; l'injection de CO2 permet d'obtenir le même résultat. Cette méthode permet d'extraire la boue de l'eau et de réduire la quantité de résidus. C'est un domaine important et la CERE a défini une approche relative à la réduction progressive des résidus. À mon avis, c'est un domaine sur lequel l'industrie et le gouvernement doivent continuer de se pencher à l'avenir si nous souhaitons atteindre nos objectifs en matière d'exploitation des ressources.

Nous avons également été des chefs de file dans l'élaboration de normes et de politiques visant un degré élevé de durabilité pendant un certain nombre d'années, et je pourrais aussi vous parler longuement de nos lois sur les gaz à effet de serre et l'approche que nous avons adoptée relativement à la gestion des émissions de CO2. Je crois que M. Newell vous a déjà expliqué tout cela. Cela a donné lieu à une réduction réelle de CO2 de 17 millions de tonnes — je dirais même, un peu plus, car ce chiffre se rapporte à la fin de l'année dernière à la création d'un fonds de plus de 200 millions de dollars et à l'exécution de projets d'énergie propre d'une valeur d'au moins 71 millions de dollars.

Pour nous, c'est un cycle virtuel. Vous avez la possibilité de réduire les émissions de vos installations, d'acheter des compensations écologiques ou d'investir de l'argent dans ce fonds, ces crédits servant ensuite à réaliser d'autres réductions par l'entremise des activités liées aux énergies propres dont vous parlait M. Newell. Il n'y a donc pas d'interférence avec d'autres fonctions stratégiques, leviers ou résultats. La structure s'articule autour de la réalisation de ces objectifs particuliers.

Il y a toujours du travail à faire pour ce qui est de s'assurer de pouvoir compter correctement les compensations écologiques. Voilà qui peut être extrêmement difficile, et nous en avons déjà eu certaines indications dans les évaluations du vérificateur général. Voilà donc l'un des défis pour nous, et je crois que M. Newell a parlé du fait que, dès lors qu'on fait partie d'un système de plus grande envergure qui comporte un plus vaste éventail de compensations écologiques, on se trouve justement confronté à ces difficultés et je crois qu'il faudra surtout trouver une solution en ce qui concerne la vérification des compensations écologiques à l'échelle internationale.

L'Alberta a également investi une somme considérable, soit 2 milliards de dollars, dans des projets de démonstration du captage et du stockage du CO2. Jusqu'à présent, nous avons signé des accords de financement pour trois projets correspondant à un investissement de plus de 1,6 milliard de dollars, et, dans chaque cas, il sera possible de stocker plus d'un million de tonnes de CO2 chaque année.

Le président : S'agit-il des projets auxquels le gouvernement fédéral a déjà affecté des fonds, ou s'agit-il de projets additionnels?

M. Ekelund : Je crois que le gouvernement fédéral participe aux trois projets.

Le président : Ils ont investi une somme importante dans ces projets.

Kathryn Wood, sous-ministre adjointe par intérim, Électricité, sources d'énergie de remplacement, captage et stockage du carbone, Alberta Energy : Il a effectivement investi une somme très importante. Je ne crois pas que les trois bénéficient de crédits fédéraux; deux sur trois en ont eu, et il existe un quatrième projet dont Mike va maintenant vous parler auquel le gouvernement fédéral s'est engagé à participer, mais ces négociations se poursuivent.

Je crois que le gouvernement fédéral s'est engagé à participer au financement de trois projets sur les quatre qui bénéficient d'une aide financière de l'Alberta.

Le sénateur McCoy : Pas au même niveau que l'Alberta.

Mme Wood : C'est exact.

M. Ekelund : Je n'ai pas l'intention de vous donner d'autres détails à ce sujet, vu le temps dont nous disposons et, de toute façon, je ne suis pas l'expert en électricité.

Il est essentiel de comprendre dans quels domaines nous sollicitons des projets de démonstration et, comme vous l'expliquait M. Newell, cela permet de mobiliser des fonds supplémentaires grâce aux compagnies qui investissent. Notre partenaire, le gouvernement fédéral, y participe également et nous visons des projets de démonstration de captage et de stockage du CO2 de différents niveaux techniques et plus perfectionnés.

Sur le plan technique, je sais que cela peut marcher. La technologie évolue avec le temps. En tant que jeune ingénieur, j'ai participé à un projet de captage du carbone qui consistait à injecter le dioxyde de carbone dans des puits situés dans la région de Swan Hills. C'était dans les années 1970.

Ce qu'il faut faire, c'est transformer ces techniques assez rudimentaires de cette époque en approches plus économiques qui vont nous permettre de passer en deçà de 30 $ la tonne, ou même moins, de façon à capter et à stocker des quantités importantes de carbone dans ces réservoirs géologiques.

Le gouvernement compte également travailler en étroite collaboration avec les collectivités et les membres des Premières nations qui sont touchés par les activités d'exploitation pour qu'il y ait des consultations appropriées et des mesures d'adaptation, si besoin est, afin d'atténuer les incidences environnementales. Voilà donc un autre domaine important où le gouvernement devra poursuivre son travail et faire des progrès.

S'agissant d'une autre nouvelle initiative, dont vous êtes sans doute déjà au courant, au cours des dernières semaines, nous avons mis sur pied le portail Internet sur les sables bitumineux. Le gouvernement a clairement exprimé sa volonté de faire vérifier les informations relatives aux sables bitumineux, et donc toutes les données s'y trouvent. N'importe qui, où qu'il soit dans le monde, peut prendre connaissance de ces informations et tirer ses propres conclusions.

La première ministre Redford a dit que nous n'avons rien à cacher en ce qui concerne les sables bitumineux et toutes les informations s'y trouvent pour que nous atteignions le niveau de transparence voulu.

Nous devons non seulement réduire l'impact sur l'environnement — et notamment celui qui est mesuré, soit les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi être en mesure de démontrer que nous faisons cela de manière crédible, et ce portail nous facilitera la tâche, à mon avis.

Le dernier domaine est celui d'accès à d'autres marchés, et il en a beaucoup été question dans la presse. Nous sommes d'avis que nous avons intérêt à vendre nos produits — tout un éventail de produits — et ce, sur un très grand nombre de marchés; ainsi notre objectif consiste à établir le meilleur portefeuille possible qui va apporter la meilleure valeur possible à nos citoyens au fil des années.

Nous avons la possibilité de vendre du bitume dilué à Chicago, sur la côte du golfe des États-Unis. Nous avons la possibilité de vendre du bitume et du pétrole synthétique sur la côte occidentale de l'Asie. Nous pouvons également vendre différents types de produits au Canada central. Il y a même eu un discours au cours des derniers jours, me semble-t-il, où il était question d'acheminer nos produits encore plus loin, vers Montréal et même les provinces maritimes.

Donc, il existe des débouchés. Il existe également des possibilités de valorisation et de raffinage, et le gouvernement provincial a vraiment été à l'avant-garde, ayant signé un accord en vertu duquel notre bitume apportant des redevances sera transformé en gazole ici-même au centre industriel de la province, ce qui crée un autre débouché ici, de même que la possibilité de vendre d'autres projets dans l'ouest du Canada et dans d'autres régions également.

Le fait d'avoir accès à différents marchés comporte une valeur stratégique et peut permettre d'optimiser le portefeuille de projets. Je m'attends à ce que la province suive une telle orientation, et nous avons déjà eu des indications par suite de la conférence des ministres de l'Énergie et des Mines et du communiqué de presse qui a été diffusé après, qui énonçait les principes qui devraient sous-tendre une stratégie énergétique canadienne. Notre première ministre a fait savoir qu'elle est très favorable...

Le président : Parlez-vous de la réunion du 19 juillet tenue à Kananaskis?

M. Ekelund : Oui.

Le président : Vous dites que c'était la Conférence de l'énergie, des mines et des ministres...

M. Ekelund : C'était la CMEM, soit la Conférence de l'énergie, des mines et des ministres.

Mme Wood : La Conférence de l'énergie, des mines et des minéraux.

M. Ekelund : Oui, plutôt la Conférence de l'énergie, des mines et des minéraux. Les participants ont diffusé un communiqué de presse concernant les éventuels éléments d'une stratégie énergétique canadienne, soit les objectifs à atteindre, une vision et un certain nombre de produits livrables potentiels, l'idée étant que ce travail continue de se faire à l'avenir, à l'occasion de ces conférences; mais notre première ministre a déclaré qu'elle est tout à fait d'accord sur la nécessité d'établir une stratégie énergétique canadienne.

Le président : Elle a prononcé un discours sur le sujet pratiquement le premier jour de son nouveau mandat.

M. Ekelund : En effet, et je pense qu'elle a même évoqué la possibilité d'une stratégie énergétique nord-américaine dans le contexte de discussions avec Washington.

Je pense que nous entrevoyons déjà une certaine orientation dans ce qui est ressorti de la CMEM, et dans les déclarations de notre première ministre en faveur du processus d'élaboration d'une stratégie énergétique canadienne et d'une stratégie énergétique nord-américaine, et il en va de même pour les secteurs clés dont il est fait mention dans les lettres de mandat des différents ministres.

J'aimerais justement aborder un ou deux de ces domaines clés, et notamment ceux qui constituent une très grande priorité, à savoir que les ministères travaillent ensemble pour mettre en œuvre une initiative visant à faire de l'Alberta un chef de file national dans le domaine de l'efficacité et la durabilité énergétiques.

Il ne fait aucun doute qu'il s'agit là d'une grande priorité pour le gouvernement, et nous allons prendre des mesures pour y donner suite, tout en évaluant notre façon de travailler avec le gouvernement fédéral de manière à garantir que la réglementation sur les centrales alimentées au charbon permettra d'atteindre notre objectif commun, soit la réduction des émissions de CO2 — car c'est cela notre objectif final — et ce, sans qu'il y ait des répercussions indues sur les consommateurs albertains; c'est un aspect qu'il faut absolument prendre en compte dans toute décision stratégique qu'on prend.

Deuxièmement, faire de l'Alberta un chef de file dans l'élaboration d'une stratégie énergétique canadienne, la première ministre a clairement exposé ce en quoi consiste la priorité du gouvernement dans les lettres de mandat. Selon moi, l'action du secteur progressera dans ce domaine.

Comme M Newell vous le disait tout à l'heure, l'industrie a compris l'enjeu. L'industrie sait à présent ce qu'il faut faire en matière de développement durable. Le gouvernement de l'Alberta a clairement fait la voie à suivre à ce chapitre et comprend ce qu'il faut faire maintenant.

Voilà qui termine mon exposé liminaire, et je voudrais maintenant céder la parole à Kathryn.

Le président : L'honorable Ted Morton est votre ministre, n'est-ce pas?

Mme Wood : Oui, Ted Morton.

Le président : C'est le nouveau ministre. Il n'a donc pas assisté à la conférence de Kananaskis?

Mme Wood : Non, c'était le ministre Ron Liepert.

Le président : Avez-vous l'impression que les politiques du ministère de l'Énergie de l'Alberta dont vous nous avez donné les grandes lignes continuent de s'appliquer de la même manière sous le nouveau gouvernement?

Mme Wood : Je dirais que les politiques dont M. Ekelund vous a donné les grandes lignes sont des politiques homogènes. Notre nouvelle première ministre a donné un certain nombre de ces mandats à notre nouveau ministre qui s'inscrivent dans le droit fil du mandat et des orientations qu'avait donnés le ministre Liepert.

M. Ekelund : Peut-être pourrais-je essayer d'apporter un éclaircissement.

Le président : J'apprécierais une réponse un peu plus précise.

M. Ekelund : Je ne suis pas en mesure de vous dire à l'heure actuelle que toutes les politiques de tous les ministères provinciaux seront exactement les mêmes mais celles dont j'ai parlé relativement aux lettres... parce que nous avons reçu nos instructions et, s'agissant d'une stratégie énergétique canadienne, ce travail a déjà commencé et constitue une priorité pour le nouveau gouvernement.

Mme Wood : J'aimerais vous donner un aperçu général du réseau d'électricité en Alberta. Je sais que vous avez déjà reçu les responsables de certaines sociétés et qu'il est probable que vous en receviez d'autres qui sont rattachés à ce marché.

Le marché en Alberta est structuré de façon très différente par rapport au reste du Canada, et j'aimerais donc vous donner un aperçu très général de ce que nous essayons de réaliser et des principes qui sous-tendent notre structure de marché.

Dans l'histoire de la province de l'Alberta, il n'y a jamais eu d'entreprises de services publics qui appartiennent au gouvernement provincial. Il y en a eu qui appartenaient aux municipalités ou à des investisseurs...

Le sénateur Banks : Sauf pour les services téléphoniques.

Mme Wood : Mes excuses. Je songeais aux entreprises de services publics du secteur de l'électricité; vous avez raison. Merci, sénateur Banks.

Dans le secteur de l'électricité, nous n'avons jamais eu d'entreprises de services publics qui appartenaient au gouvernement provincial. Nous avons établi une structure réglementée dans le cadre de laquelle des sociétés comme Alberta Power, maintenant ATCO Power, et Calgary Power, maintenant TransAlta Power, ont investi dans des installations de production, de transmission et de distribution de l'électricité, ainsi que dans les services à la clientèle. Ainsi nous avons des antécédents en matière de réglementation, mais pas en ce qui concerne la présence d'entreprises de services publics appartenant au gouvernement provincial.

Toutes les autres provinces du Canada ont depuis longtemps des sociétés d'État provinciales. Elles n'ont pas toute cette même structure, mais les efforts de restructuration dans les autres provinces ont consisté à élargir l'action de leurs sociétés d'État provinciales pour que ces dernières soient présentes dans un certain nombre de domaines qui sont plus sensibles au marché. Donc, nous n'avons pas eu le même point de départ.

Par rapport à l'implantation dans un environnement concurrentiel, la population a généralement le sentiment que les entreprises de services publics qui constituent des sociétés d'État leur appartiennent, si bien que, pour une société d'État, il est très difficile de devenir active dans un marché. Cela a notamment posé problème à des provinces avoisinantes qui ont voulu faire cette transition et, si nous avons connu plus de succès en Alberta, c'est parce que, me semble-t-il, nos entreprises de services publics appartenaient à des investisseurs.

Nous avons restructuré le réseau en 1996 et avons continué à soutenir ce modèle par l'entremise de différentes mesures législatives et des principes qui définissent notre structure à l'heure actuelle. Si vous me permettez, je vais vous présenter le cycle depuis la production à la distribution sur les marchés de détail en passant par la transmission.

S'agissant de production, notre marché traite uniquement l'énergie. En d'autres termes, nous ne payons rien à personne pour construire des installations. Le fait d'être producteur ne signifie pas que vous allez toucher quelque somme d'argent que ce soit. En Alberta, vous devez produire de l'électricité et la vendre par l'entremise d'un centre de distribution afin de gagner l'argent qui vous permettra de payer vos structures.

Nous n'effectuons pas de paiements pour la capacité à long terme qui garantiraient à qui que ce soit certaines sommes d'argent du fait qu'il ait créé une certaine capacité de production. Nous vous payons uniquement pour l'énergie que vous produisez.

Si vous construisez une centrale alimentée au charbon de 500 mégawatts ou une éolienne de 2 mégawatts, vous ne serez payé que pour l'électricité que vous produisez et ce, en fonction du prix du réseau commun qui est établi chaque heure; ainsi nous établissons le prix du marché chaque heure et, si vous avez produit de l'électricité que vous voulez vendre, vous toucherez le prix établi pour cette heure-là.

Nous vous payons uniquement l'énergie que vous avez produite. Nous vous versons de l'argent chaque heure de l'année, ce qui est très amusant. Il existe plus de 100 producteurs indépendants d'électricité en Alberta et chacun produit de l'électricité chaque heure au cours des 8 760 heures qu'il y a dans une année, et l'exploitant du réseau électrique de l'Alberta gère les flux, les prix, le marché et le système, en s'assurant que tout le monde touche ce montant-là.

Le président : Ne pourriez-vous pas établir une moyenne? Cela semble ridicule.

Mme Wood : L'électricité ne peut pas être emmagasinée. S'il était possible de l'emmagasiner et d'établir la moyenne d'heure en heure, cela faciliterait beaucoup la vie à tout le monde.

Les oranges sont emmagasinables, si bien qu'il est possible d'établir le prix moyen des oranges. Mais ce n'est pas possible pour l'électricité. Les technologies ne sont pas suffisamment avancées pour le moment pour nous permettre d'emmagasiner l'électricité à long terme. Nous travaillons à l'élaboration de technologies de stockage afin d'éliminer les grandes fluctuations.

La plupart des marchés vendent l'électricité sur une base horaire. Dans le nord-est des États-Unis, certains marchés la vendent en fonction d'un délai de 15 minutes; mais nous équilibrons les prix proposés chaque minute de chaque heure et nous vous donnons le prix pour chaque heure de la journée.

Nous avons des heures à prix plus élevé et des heures à prix moins élevé. Les heures de nuit sont basées sur le cours du charbon au jour le jour. Bientôt nous serons dans la période des heures de pointe. D'ici deux heures, les prix vont commencer à monter en prévision de l'heure de pointe du soir, et ces heures font partie de la période de pointe en Alberta. Nos heures de pointe sont généralement fixées en fonction des centrales alimentées au gaz naturel.

Cet aspect de notre marché donne un signal de prix aux investisseurs pour qu'ils sachent quand il convient d'investir. C'est tout ce à quoi sert le signal de prix. Pendant la nuit, le signal de prix peut être de zéro. Si quelques personnes qui possèdent des centrales alimentées au charbon n'ont pas proposé un prix, nous ne verserons rien pour cette heure-là.

Cette année, nous payons en moyenne environ 85 $ le mégawatt d'électricité mais, sur le marché albertain, il est possible d'avoir à payer jusqu'à 999,99 $ pour une heure s'il existe une grave pénurie et une forte demande un jour froid en hiver ou vous devez allumer les lumières parce qu'il fait sombre.

Notre marché fonctionne selon une échelle allant de zéro à 1 000 $. Le prix est établi chaque heure, et on donne un signal aux investisseurs simplement pour qu'ils sachent quand ils devraient investir. À mesure que les prix augmentent, on doit se demander s'il est raisonnable à long terme d'investir dans ce marché. Ce ne sont pas les consommateurs qui paient.

J'y reviendrai dans quelques secondes mais, à titre d'information, je précise que notre réseau de production vise uniquement l'énergie. Dans toutes les autres provinces du Canada, et dans tous les États américains sauf le Texas, il existe un marché de capacité ou un tarif de rachat garanti, ou encore une autre formule.

L'un des avantages de ce marché, c'est qu'il permet de profiter de possibilités de production à haut rendement. Nous ne disons à personne quel combustible doit être utilisé. Nous ne disons pas non plus aux gens où ils devraient construire leur centrale ou quand ils devraient le faire. Nous n'effectuons aucune planification centrale en matière de production d'électricité.

Ce signal de prix est l'unique signal indiquant aux gens où et quand ils devraient construire et ce sont les investisseurs qui prennent ces décisions. Dans notre province, ce système nous a valu beaucoup de succès et j'ai hâte de pouvoir vous le décrire.

Sur le marché de gros, il y a à la fois les producteurs et les consommateurs. Les producteurs offrent leur électricité sur le marché de gros. Les acheteurs, les consommateurs, achètent sur le marché de gros et personne n'est obligé de payer. Si vous voulez conclure un accord d'achat d'énergie, ou si vous voulez un contrat sur différences, vous vous adressez aux grossistes qui vendent sur le marché pour acheter votre électricité. Les seules personnes qui achètent leur électricité au prix du réseau commun d'énergie sont celles qui ont choisi de le faire.

Nous avons 10 ans, presque 11 ans, d'expérience de ce prix du réseau commun, et nous croyons qu'environ 20 ou 30 p. 100 du marché continuent à consommer de l'électricité en fonction de ce prix et à payer ce prix-là et, s'ils font cela, c'est parce que, dans le contexte d'opérations à terme, vous courez le risque de vous retrouver du mauvais côté du marché. Ainsi ils décident de couvrir une partie de leur offre et de laisser flotter le reste.

C'est un peu comme une hypothèque. Certaines personnes préfèrent une entente de longue durée et sont prêtes à payer une hypothèque de sept ans. D'autres préfèrent opter pour un taux flottant. D'autres encore couvrent leur hypothèque en ayant une partie à un taux fixe et l'autre partie à un taux flottant.

Dans notre marché, nous avons des opérations à terme. Il y a une page NGX où...

Le sénateur Banks : C'est quoi NGX?

Mme Wood : Cela signifie « Natural Gas Exchange ». C'est une autre bourse, et en Alberta, NGX établit les normes pour la vente du gaz naturel. Nous lui avons demandé de créer une page pour nous sur l'électricité.

Nous avons des marchés internes. Nous avons des marchés pour les contrats à long terme d'approvisionnement et d'autres aussi. Nous avons plus de 100 participants qui produisent de l'énergie et encore 100 qui sont inscrits pour consommer de l'énergie. Donc, notre marché est dynamique.

Voilà donc les deux caractéristiques. Je voudrais m'assurer d'avoir bien décrit la seconde, concernant notre marché de l'énergie.

Sur le marché de gros, nous appliquons le principe d'un marché concurrentiel juste, efficace et transparent, si bien que nous avons établi des règles sur la façon de faire une offre sur le marché et d'établir les prix. L'administrateur chargé de surveiller le marché, qui joue un peu le rôle du Bureau de la concurrence pour le secteur de l'électricité, surveille le marché et s'assure que les gens se comportent de façon concurrentielle, afin d'éviter que quelqu'un se serve de son pouvoir de marché de façon inopportune, en vue de conserver des prix élevés.

Nous avons donc un système de production juste, efficace et concurrentiel, et ce sont les deux premiers principes qui le sous-tendent.

Le troisième principe est celui de la transmission à accès libre. Comme nous n'effectuons pas de planification centrale en ce qui concerne la distribution de l'électricité, nous estimons que, dans la même mesure du possible, il faut une capacité de transmission dans chaque site de production.

Les producteurs peuvent choisir leur emplacement. Donc, si vous voulez vous servir de la biomasse en Alberta, vous allez choisir un emplacement dans le nord-ouest de la province où se trouve la forêt boréale. Si vous voulez produire de l'énergie éolienne, vous allez opter pour le sud. Il n'est pas possible de déplacer le vent vers l'emplacement des installations de production, et c'est la raison pour laquelle nous disons que la production doit se faire là où se trouve la matière première. Pour notre part, nous facilitons l'acheminement de l'électricité au marché au moyen de la transmission.

C'est une politique qui a suscité certaines controverses en raison des problèmes considérables qui accompagnent la construction de nouvelles lignes de transmission. Il reste que le coût de la transmission est minime, comparativement au coût de la production, et nous étions d'avis qu'une politique plus efficace serait de prévoir que les installations de production puissent profiter de la proximité d'une source de combustible, plutôt que d'imposer des contraintes aux producteurs sur le plan de la transmission. Notre politique s'appuie donc sur la transmission à accès libre.

Nous n'avons aucune politique sur la distribution qui soit différente de celle des autres. La distribution en Alberta est entièrement réglementée, comme dans les autres provinces.

La dernière caractéristique de notre marché concerne le choix des consommateurs. Ainsi, nous avons prévu, dans notre Electric Utilities Act, que tous les résidents de l'Alberta ont le droit de choisir leur fournisseur d'électricité; nous avons donc à présent dans la province 12 compagnies qui assurent des services de détail aux petits clients.

Nous avons un segment de consommateurs qui consomment moins de 250 000 kilowattheures dans l'année. Ce groupe de clients a droit à ce que nous appelons le tarif réglementé et nous nous assurons de la disponibilité d'un tarif réglementé. Quiconque vend son électricité à un petit client doit être titulaire d'une licence, et nous avons 12 détaillants autorisés qui distribuent leurs produits à ces petits clients.

À l'heure actuelle, ils offrent 19 produits différents, soit un produit à prix fixe pour une période de un, deux ou trois ans, un produit à prix flottant, des produits combinés, le gaz naturel et l'électricité, et différents types de frais de sortie. Toutes sortes de produits différents sont maintenant offerts aux consommateurs.

Vingt-huit pour cent des consommateurs en Alberta ont signé un contrat. Cela signifie que 370 000 Albertains ont signé un contrat pour leur approvisionnement en électricité. Ce nombre vient s'ajouter aux petits clients commerciaux, aux clients industriels et aux très grands consommateurs.

Le sénateur McCoy : S'agit-il uniquement de clients résidentiels?

Mme Wood : Les clients résidentiels font certainement partie de cette catégorie, mais il en va de même pour les petits commerces de quartier, comme une boulangerie ou un dépanneur, pour l'église et pour les groupes communautaires.

Depuis que nous avons établi ces quatre grands principes, nous avons acquis 10 ou 11 ans d'expérience, et nous estimons que ce réseau est un succès. Nous avons l'économie qui croît la plus rapidement. Notre consommation d'électricité augmente chaque année d'un volume comparable à l'électricité utilisée par deux villes de la taille de Red Deer. Chaque année, nous ajoutons suffisamment de capacité de transmission et de distribution d'électricité pour desservir deux villes de la taille de Red Deer, et nous sommes d'avis que cette expansion va se poursuivre.

Des sources privées en Alberta ont investi dans 6 400 mégawatts d'électricité depuis 1998. Cela représente plus de 12 milliards de dollars d'investissement, et ce sans des accords d'achat d'énergie de longue durée garantis par un gouvernement.

Au cours de ces 11 années, nous avons assisté à un renouvellement efficace du capital-actions en Alberta. Nous avons ajouté plus de 4 000 mégawatts d'installations de cogénération — c'est-à-dire, la production à la fois de vapeur et d'électricité. À ce chapitre, il y a eu des activités considérables dans la région de Fort McMurray où il est possible, dans le cadre des opérations d'exploitation des sables bitumineux, de se servir de la vapeur produite au fond pour produire de l'électricité, qui est ensuite vendue sur le réseau.

Nous avons ajouté environ 1 000 mégawatts de capacité de production dans le sud de l'Alberta sans tarifs de rachat garantis, parce qu'il est possible de gagner de l'argent sur le marché et d'évaluer les risques au fil du temps.

Les autres ajouts à notre réseau sont des unités alimentées au charbon supercritique et au gaz naturel à haut rendement. Ces unités sont parmi les plus efficaces qui soient disponibles.

Nous avons également éliminé environ 1 500 mégawatts de capacité hautement inefficace dans la province. Nous avons également mis hors service neuf centrales alimentées au gaz naturel, dont certaines des unités les plus anciennes, et six unités alimentées au charbon correspondant à 1 500 mégawatts d'électricité produite de la manière la moins efficace, et si ces unités ont été désaffectées, c'est simplement parce que le propriétaire estimait qu'elles étaient inefficaces. Ils pouvaient se dire que cette unité était utile pour les périodes de pointe, quelques jours par année, mais ensuite, ils décidaient de la mettre hors service en se disant que ce serait mieux d'investir dans une unité à haut rendement.

Donc, nous parlons d'un ajout de 6 400 mégawatts et d'une soustraction de 1 500 mégawatts, ce qui correspond à un changement sur le marché de presque 8 000 mégawatts d'électricité. Quand nous avons commencé en 1996, nous n'avions en tout que 8 500 mégawatts. Maintenant notre capacité est de l'ordre de 13 000 mégawatts.

Le président : Cette augmentation correspond à deux villes de la taille de Red Deer, vous dites. Avez-vous réussi à déterminer quelle zone géographique est particulièrement touchée? S'agit-il surtout de Fort McMurray?

Mme Wood : Il y a eu des ajouts importants à Fort McMurray, mais c'est la même chose partout.

Je n'ai pas de chiffres d'ordre géographique, mais nous avons des activités industrielles importantes à Edmonton, et dans notre centre industriel. De plus, dans le corridor nord-sud entre Edmonton et Calgary, il y a également eu beaucoup de développement industriel.

Selon nous, il s'agit d'une croissance généralisée qui touche l'ensemble de la province. Grande Prairie est l'une des villes ayant la croissance la plus importante; donc, force est de constater que cette croissance touche l'ensemble de la province. Il n'y a pas qu'à Fort McMurray qu'on exploite les sables bitumineux. Le reste de la province, voire même le reste du Canada, connaît une croissance qui soutient les opérations d'exploitation des sables bitumineux.

Le président : Vous avez dit que l'économie de l'Alberta croît plus rapidement que celle de n'importe quelle autre province ou territoire du Canada.

Mme Wood : Oui.

Le président : Je me demande si vous êtes en mesure de quantifier cela.

Mme Wood : En ce qui concerne l'électricité, nous estimons avoir un taux de croissance de 3,2 p. 100 mais, dans certaines régions de la province, le taux de croissance de la demande d'électricité est de 6 p. 100 par année.

Le président : Quand vous parlez de l'économie, avez-vous les chiffres relatifs au PIB en Alberta?

Mme Wood : Je n'ai pas avec moi les statistiques sur le PIB; je m'en excuse. Je peux vous dire que la croissance que nous connaissons ici est tout à fait étonnante.

À l'heure actuelle, nous avons, dans le secteur de l'électricité, plus de 1 200 mégawatts de capacité de construction. Nous avons presque 2 800 mégawatts de capacité qui ont obtenu l'autorisation réglementaire, si bien que la construction pourrait commencer n'importe quand. Nous avons également 10 000 mégawatts de plus de capacité qui attendent de recevoir l'autorisation nécessaire — c'est-à-dire, des gens qui ont demandé une connexion de transmission à l'exploitant du réseau électrique. Donc, ces gens-là sont en train d'attendre que les autorisations soient accordées, et cela représente 1 200, 1 300 et 1 400 mégawatts de capacité.

Le sénateur Banks : S'agit-il uniquement d'électricité produite à partir du charbon?

Mme Wood : Non, pas uniquement. Loin de là.

À l'heure actuelle, à cause de l'incertitude concernant la réglementation fédérale sur le charbon, il devient vraiment difficile de lancer une nouvelle centrale alimentée au charbon. Nous devons avoir 1 500 mégawatts de capacité de production alimentée au charbon qui attendent une autorisation.

Il y a une entreprise qui envisage de construire des installations sur l'ancien site Milner; il s'agit de l'entreprise Maxim. Bow City Power propose quelque chose depuis environ 10 ans et, même si rien n'a encore été construit, ils y travaillent toujours. J'ai entendu dire qu'une autre compagnie envisage peut-être de le faire.

Le problème, c'est que tant que la coréglementation fédérale n'aura pas été confirmée et que nous ne saurons pas exactement ce qu'elle signifie ni quelle marge de manœuvre est prévue, il n'y aura pas d'annonce dans les médias de la construction d'une nouvelle centrale alimentée au charbon, à mon avis.

M. Ekelund : Serait-il juste de dire que, d'après nos prévisions, il est plus probable qu'une centrale alimentée au gaz naturel soit construite?

Mme Wood : Le gaz naturel et la cogénération au gaz naturel sera la prochaine étape.

Le défi pour nous — et je crois que vous en avez déjà pas mal entendu parler aujourd'hui — est de faire en sorte que le charbon ne soit pas écarté du panier de combustibles. Nous possédons de vastes réserves de charbon et nous espérons toujours les exploiter à long terme.

En terminant, je voudrais simplement vous dire que cet accroissement des activités de production sans endetter les contribuables...

Le sénateur Banks : Donc, pas de dette restante.

Mme Wood : Non, pas de dette restante. En fait, il s'agit plutôt d'avantages restants pour les consommateurs.

Les actifs qui ont été générés sous le régime réglementé avant la restructuration... nous sommes mandataires en ce qui concerne la restructuration du milieu réglementé, et, en 10 ans, nous avons déjà remboursé 3 milliards de dollars aux consommateurs de l'Alberta pour les actifs en question. Ces actifs continuent d'être exploités et de prendre de la valeur pour l'ensemble des consommateurs de l'Alberta.

Nous sommes en mesure d'affirmer que les installations de production qui ont été construites aux termes de cette réglementation — et je pense que je viens de vous le dire — ont rapporté de la valeur aux consommateurs albertains.

Donc, en ce qui nous concerne, ce marché est un succès. L'Alberta Power Summit se déroule aujourd'hui à Calgary et j'y ai assisté hier. Il y avait des conférenciers de toutes les grandes sociétés de l'Alberta qui estiment que cette structure est viable sur le long terme.

Une fois que la réglementation fédérale sur les centrales alimentées au charbon aura été bien comprise, de manière à créer de la certitude sur le marché, ils seront tout à fait disposés à investir dans ce marché.

Le sénateur Mitchell : Le fait est que vous n'avez pas de tarifs de rachat garantis. Les gens sont rémunérés en fonction du taux horaire. Si je mets un panneau solaire sur mon toit, ai-je automatiquement la possibilité de vous faire renverser les choses pour que je l'achète?

Mme Wood : Nous avons un règlement qui prévoit la microproduction à ce niveau-là. Ce dernier existe depuis trois ans seulement. Plus de 300 résidents de la province ont opté pour l'énergie éolienne, les panneaux solaires, l'énergie solaire ou autre.

Conformément au règlement, nous fournissons le compteur afin que la compagnie de distribution mutualise le coût du compteur. Cela pourrait changer dès qu'il y en aura suffisamment, mais c'est une bonne façon de lancer le processus.

C'est un compteur qui mesure dans les deux sens; donc, nous mesurons la consommation de même que la production d'électricité, et s'il existe un déséquilibre en faveur de la production, d'après nos exigences, vous devez vous faire payer le taux réglementé de l'électricité chaque mois, et le fournisseur réglementé est tenu de vous payer. Je pense que la pratique consiste à effectuer un paiement d'équilibrage au propriétaire de maison une fois par an.

Toujours selon le règlement, il n'est pas question pour le moment d'en faire une source de production; ainsi vous devez établir votre capacité de microgénération en fonction de votre charge. Si vous devez fournir de l'électricité à une seule maison, nous vous demandons de ne pas en produire suffisamment pour desservir tout le quartier.

Nos compagnies de distribution essaient toujours de déterminer comment fonctionne ce flux d'énergie et, par conséquent, nous voulons avoir une certaine sécurité.

Le sénateur McCoy : Il est important de comprendre que, encore une fois, il y a des différences régionales entre les marchés.

Nous possédons cette ressource bon marché qu'on appelle le charbon, qui se trouve partout et qui est de la terre marron. C'est pour cela qu'on appelle ça du charbon subbitumineux. C'est une matière qui est ridiculement peu chère, comme vous l'a dit Brian Vaasjo.

Allons-nous simplement la laisser sous terre? Selon la réglementation actuelle sur le charbon, d'après ce que vous nous dites, vous ne pourrez pas inclure de l'électricité produite par des centrales alimentées au charbon. Dans ce cas, êtes-vous d'accord avec ce que nous avons entendu de la part d'autres témoins, à savoir qu'il nous faut une certaine marge de manœuvre relativement à la réglementation sur les centrales alimentées au charbon que propose le gouvernement fédéral?

Mme Wood : Oui, je suis tout à fait d'accord. À l'heure actuelle, mon équipe travaille en étroite collaboration avec l'Alberta Environment and Water et nous avons rencontré un certain nombre de fonctionnaires d'Environnement Canada, pour qu'ils comprennent ce marché et qu'ils sachent que nous comprenons leur modèle, car nous sommes en désaccord avec celui-ci à plusieurs égards.

Ils ont passé une journée en Alberta la semaine dernière, et mon équipe se rendra à Ottawa dans deux semaines pour poursuivre les discussions avec eux, afin que chacun comprenne les chiffres pour chaque province et ce que cela signifie pour la population de l'Alberta.

La proposition publiée dans La Gazette du Canada laisse entendre que les résidents de l'Alberta paieraient environ 5 $ de plus chaque année à cause de cette réglementation. D'après nos calculs, il s'agirait de 22 $ par mois par résident de l'Alberta. Donc, nos chiffres ne concordent pas. Et la différence est considérable.

Le sénateur McCoy : Donc on passe de 5 $ par an à 500 $.

Mme Wood : Oui. Cela nous a donné du fil à retordre. Nos hypothèses sont très différentes des leurs, mais le fait est qu'ils avaient la même impression en ce qui concerne l'établissement d'un tarif moyen pour l'électricité achetée sur d'autres marchés.

Cela ne s'applique pas au marché de l'électricité. On ne peut pas établir une moyenne économique de ce qui vous manque et l'étaler sur toute l'année. Vous pouvez avoir une pénurie pendant 12 heures alors que tout ira très bien pour le reste de l'année, et c'est la raison pour laquelle nous créons une capacité supplémentaire de production et de transmission. Vous devez être en mesure de desservir la population en fonction du pire scénario, et non pas en fonction de l'heure moyenne.

Le sénateur McCoy : Donc, nous pourrons peut-être parler de nouveau dans un autre contexte et obtenir ces informations pour notre étude sur l'énergie.

Le président : On nous a dit que c'était une surprise. Vous avez tous été pris au dépourvu par cette réglementation et, à la suite de la conférence de Kananaskis, même si cette dernière concernait les ministres de l'Énergie par opposition aux ministres de l'Environnement, n'avez-vous pas eu de discussions préliminaires fédérales-provinciales sur le sujet?

M. Ekelund : Cette question a un caractère politique.

Le président : Il s'agit d'une différence de 500 $ par an.

Mme Wood : C'est peut-être une question d'ordre politique.

Le président : Ce n'était pas voulu. C'est la pratique normale.

Mme Wood : En juin 2010, nous avons été informés de ce à quoi pourrait ressembler la réglementation. Mais nous n'avons jamais rien reçu par écrit. Quand nous avons rencontré les responsables fédéraux de l'environnement, nous leur avons dit ce que nous avons entendu, mais nous n'avons toujours rien reçu par écrit. Nous leur avons expliqué notre position mais, pour une raison ou une autre, le message est parti à droite et à gauche et dans tous les sens, un peu comme au téléphone. Nous n'avons pas reçu le même message.

Le président : C'est l'occasion de nous en parler, parce que nous allons justement nous attaquer au problème.

Mme Wood : Quand nous les avons rencontrés il y a une semaine, ils n'avaient vu aucun de nos chiffres, ni notre évaluation. Le jour où ils ont publié la réglementation dans La Gazette, nous n'avions vu aucun exemple de ce qui était proposé pour l'Alberta en vertu de leur modèle. Donc, le texte a été publié dans La Gazette et, à part leurs idées sur le renouvellement du capital-actions, tous les éléments de leur analyse de la situation en Alberta ont été une surprise pour nous.

Le président : Il y a un certain nombre de députés très importants de l'Alberta, y compris le plus important. C'est ridicule. Vous faites bien de nous en parler ici.

Le sénateur Neufeld : Les grands consommateurs industriels ont-ils droit à un tarif réglementé, ou sont-ils tenus de payer le prix du réseau commun d'énergie?

Deuxièmement, vous avez parlé de plusieurs milliers de mégawatts d'électricité qui pourraient être ajoutés dans un proche avenir. Est-il prévu que cette électricité serve à répondre à des besoins intérieurs ou sera-t-elle destinée à l'exportation?

Mme Wood : Pour répondre à la première partie de votre question, les consommateurs industriels et commerciaux peuvent accepter le prix du réseau commun s'ils le désirent, mais ils ont également la possibilité de signer un contrat avec un fournisseur. Ils peuvent s'adresser directement aux producteurs en vue d'acheter un accord d'approvisionnement à long terme. À notre avis, la plupart des clients industriels ne touchent pas le prix du réseau commun.

Nous savons qu'en vertu des accords d'achat d'énergie touchant les actifs réglementés — et la plupart de ces accords resteront en vigueur jusqu'en 2020, à moins que la centrale ne ferme ses portes plus tôt — le prix de l'électricité est de l'ordre de quatre ou cinq cents.

Si vous avez signé un accord de 20 ans en 2001 au prix de cinq cents, même si vous avez conclu cet accord de 20 ans, nous n'avons pas la capacité de regarder les livres de tout le monde, ni d'exiger que chaque contrat ponctuel soit enregistré quelque part; en conséquence, nous ne sommes pas au courant du prix réel que paient les consommateurs industriels.

Le sénateur Neufeld : Donc, ce sont uniquement les grands clients industriels qui ont pu conclure des contrats à terme, si j'ai bien compris, quand le marché a été créé au départ?

Mme Wood : Non. Il y a eu des mises aux enchères pour permettre aux plus petits clients industriels de faire de même.

Le sénateur Neufeld : Je vous parle des clients industriels; donc, qu'ils soient grands ou petits, il s'agit toujours de clients industriels.

Mme Wood : À vrai dire, un certain nombre de gros clients ont décidé de conclure collectivement un accord d'achat d'énergie; donc, ils se sont mis ensemble pour acheter cette électricité en prévoyant qu'ils puissent éventuellement l'obtenir à quatre cents. Donc, il y a des gens qui ont conclu des marchés très intéressants.

Le sénateur Neufeld : Pour la revendre.

Mme Wood : Certains d'entre eux la revendent mais d'autres la consomment.

S'agissant des producteurs d'électricité qui n'ont pas encore reçu une autorisation, je précise que toute l'électricité produite en Alberta est conçue pour le marché intérieur de l'Alberta. Nous avons des interconnexions minimes avec nos voisins, quelle que soit l'administration concernée. Dans la plupart des provinces, la capacité d'interconnexion peut être de 20 à 30 p. 100, selon la taille de votre marché et de la puissance installée, et cela nous amènerait à établir des interconnexions beaucoup plus importantes que celles que nous avons actuellement.

Nous avons une petite interconnexion avec la Saskatchewan, et une interconnexion plus importante avec la Colombie- Britannique, mais ni l'une ni l'autre n'est suffisante pour qu'on puisse supposer la moindre intention spéculative. Le fait est que ces interconnexions sont utiles pour vendre votre capacité excédentaire ou importer de l'électricité en cas de pénurie mais, en Alberta, il s'agit d'un infime pourcentage.

À l'heure actuelle, c'est moins de 7 p. 100 et, au fil des ans, notre marché a progressé, passant de 8 500 mégawatts à 13 000 mégawatts, alors que nous n'avons pas élargi la capacité de nos interconnexions. Il s'agit d'une véritable contrainte pour ceux qui envisagent l'exportation.

Les exportateurs versent des frais pour le système d'appui; donc, si quelqu'un veut faire de l'exportation, il devra payer des frais de transmission en conséquence.

M. Ekelund : Serait-il juste de dire que l'ampleur de nos interconnexions démontre qu'il est important de pouvoir équilibrer l'approvisionnement et de répondre aux besoins en cas d'urgence, mais que ces dernières ne visent absolument pas à nous donner des possibilités d'exportation?

Mme Wood : L'Alberta est un importateur net et ce, depuis de nombreuses années.

Le sénateur Neufeld : Mais je sais pertinemment qu'il exporte également une certaine quantité d'électricité.

Mme Wood : Nous l'exportons la nuit vers la Colombie-Britannique et nous le rachetons durant les heures de pointe.

Le sénateur Banks : Histoire d'équilibrer la charge.

Mme Wood : En effet.

Le sénateur Banks : Mais c'est un avantage économique pour la Colombie-Britannique, n'est-ce pas? Nous l'achetons à un prix supérieur par rapport au prix de vente.

Mme Wood : Non. Si nous l'achetons à un prix supérieur, c'est parce que nous avons tendance à exporter notre électricité la nuit, où le cours est inférieur, et nous l'achetons le jour quand nous en avons besoin et que le prix du marché est supérieur; ainsi, nous payons un prix plus élevé.

Le sénateur Neufeld : C'est ce qui se produit également en Alberta.

Mme Wood : La Colombie-Britannique en profite.

Le sénateur McCoy : Nous essayons de donner un coup de main, quand c'est possible.

Le sénateur Brown : Je n'ai pas entendu parler aujourd'hui de la réglementation qui s'applique lorsqu'il est question de mettre hors service une centrale alimentée au gaz naturel. Qu'avez-vous comme mesure de protection pour éviter qu'une centrale ne disparaisse subitement, comme celle de Balzac en Californie?

Mme Wood : Je ne suis pas sûre de bien comprendre votre question.

Le sénateur Brown : C'est-à-dire que la centrale alimentée au gaz naturel à Balzac appartenait en partie à California Power, à raison de 33 p. 100, et elle a ensuite demandé la protection en vertu du chapitre 11. On m'a informé qu'ils achetaient l'électricité à la minute et qu'il y avait de grandes fluctuations. C'est à ce moment-là que le prix était très élevé et qu'il était possible de gagner beaucoup d'argent grâce à cela.

À l'heure actuelle, bien entendu, le cours du gaz naturel est bien inférieur. Donc, je ne crois pas qu'il y aura une forte baisse comme ce fut le cas cette fois-là, mais ils ont l'intention de construire trois autres centrales près de Calgary, si j'ai bien compris — une dans chaque coin de la province —, et celle-là est de nouveau en service depuis quelque temps.

Donc, qu'arrivera-t-il s'ils nous disent que leur marge bénéficiaire n'est pas suffisante ici et qu'ils comptent donc fermer la centrale? Avez-vous une protection quelconque qui vous permet d'exiger qu'ils respectent un certain délai avant de mettre la centrale hors service?

Mme Wood : Si un producteur décide d'interrompre la production parce qu'il ne fait pas assez de profit, il en a la possibilité. En Alberta, vous pouvez interrompre la production si vous avez un tube de chaudière qui fuit ou un problème de roulement à billes.

Genesee 3 connaît un problème de roulement à billes, si bien que la centrale a interrompu la production pendant cinq ou six semaines. Si vous voulez interrompre vos activités de production, vous pouvez le faire.

Si vous êtes mis sous séquestre et vos actionnaires ont un problème de financement, si bien que la centrale doit être vendue, je pense qu'il est probable que quelqu'un d'autre l'achète et la remette en service. Donc, l'Alberta perdrait cette électricité pendant un court laps de temps, mais les centrales ne ferment pas simplement parce que le propriétaire est mis sous séquestre. Selon moi, le marché s'ajustera en conséquence.

Le sénateur Brown : Je suis content de le savoir. La dernière fois, l'interruption a duré deux ou trois ans avant que la centrale se remette en activité.

Le président : Nous avons reçu un témoin de Capital Power ce matin, qui nous a dit qu'ils sont sur le point de construire une centrale alimentée au charbon.

Peut-on supposer que tout cela serait assujetti à cette réglementation fédérale mal réfléchie?

Mme Wood : Si vous construisez une centrale thermique qui entre en service après la date à laquelle la réglementation fédérale entre en vigueur, votre centrale y serait assujettie, oui.

Une centrale alimentée au charbon est entrée en service cette année en Alberta, et comme cela s'est produit avant 2015, au moment où la réglementation entrera en vigueur, elle n'est pas tenue de procéder au captage du CO2 pendant 45 ans.

Le président : Veuillez transmettre nos salutations au ministre Morton et lui dire que nous, sénateurs fédéraux, sommes conviviaux. La prochaine fois que nous serons ici, il sera peut-être d'un autre avis. Nous serions ravis de connaître ses vues dans le cadre de notre étude. Nous avions entendu dire qu'il était réticent à le faire, mais nous, pas du tout.

Vous avez tous les deux été formidables et vous vous êtes exprimés avec éloquence sur les sujets que vous avez abordés. Nous vous sommes très reconnaissants de votre présence et nous aurions aimé pouvoir passer plus longtemps avec vous. Nous allons maintenant nous rendre aux laboratoires de Devon en espérant que cela va nous permettre de mieux comprendre.

Mme Wood : J'espère que vous allez profiter de votre visite aux laboratoires. Ils sont formidables là-bas.

Le président : La séance est levée.

(La séance est levée.)


Haut de page