Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales
Fascicule 2, Témoignages, séance de l'après-midi
OTTAWA, le jeudi 16 juin 2011
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 15 h 30, pour étudier les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2012.
Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bienvenue au Comité sénatorial permanent des finances nationales. Cet après-midi, honorables sénateurs, nous allons continuer notre étude du Budget des dépenses de 2011-2012, dont notre comité a été saisi.
[Traduction]
Ce sera la dernière séance que nous consacrerons au Budget principal des dépenses avant la relâche estivale, mais nous continuerons bien entendu de l'étudier au cours de l'exercice. C'est l'une des bizarreries de nos travaux. On nous a renvoyé ce Budget principal des dépenses, et nous continuerons de demander de temps en temps des renseignements sur ses divers aspects.
Mardi dernier, nous avons entendu le Bureau de l'ombudsman de la Défense nationale et des Forces canadiennes. Malheureusement, l'ombudsman des vétérans ne pouvait pas comparaître ce jour-là, mais il a eu l'obligeance d'offrir de témoigner cet après-midi. J'aimerais donc souhaiter la bienvenue au nouvel ombudsman des vétérans, M. Guy Parent.
Chers sénateurs, nous disposons d'une heure seulement pour tenir cette séance. Par conséquent, je vous serais très reconnaissant de collaborer avec moi afin de limiter la durée des questions et des réponses.
Monsieur Parent, la parole est à vous.
Guy Parent, ombudsman des vétérans, Bureau de l'ombudsman des vétérans : Honorables sénateurs, c'est un plaisir pour moi d'être ici. Je vous remercie de m'avoir invité et de me fournir l'occasion de vous donner une idée du travail que mon bureau, le Bureau de l'ombudsman des vétérans, accomplit pour les anciens combattants.
J'aimerais m'excuser de n'avoir pas répondu à la première invitation du comité. Malheureusement, j'avais déjà accepté un rendez-vous qui me permettait de rencontrer la plupart des gens qui représentent les groupes d'anciens combattants partout au Canada. J'avais le sentiment qu'il était important que je sois là. Cependant, je suis ici aujourd'hui pour répondre à toutes vos questions.
Nous avons distribué des copies en français et en anglais des diapositives dont je vais parler. J'ai aussi apporté des fiches de renseignements qui expliquent plus précisément les enjeux que je vais présenter.
[Français]
Même si je ferai ma présentation surtout en anglais, il me fera plaisir de répondre à vos questions ou points de clarification dans la langue de Shakespeare ou de Molière.
[Traduction]
Commençons par la première diapositive qui donne des renseignements généraux sur le bureau. Je n'entrerai pas trop dans les détails, car ces faits sont assez bien connus.
Le bureau a été créé en 2007. Ce renseignement est important, car il démontre la nouveauté de l'organisation et le fait que le mandat du premier ombudsman n'a duré que trois ans. Je l'ai remplacé le 11 novembre 2010 mais, en tant que nouvel ombudsman, mon mandat est différent. On m'a confié un mandat non renouvelable de cinq ans.
Je suis un mandataire indépendant, mais je relève directement du ministre des Anciens Combattants. En fait, mon mandat fait la distinction entre mes deux rôles : celui de conseiller spécial auprès du ministre et celui d'ombudsman représentant les anciens combattants. Il est important de comprendre qu'ils diffèrent.
En tant que conseiller spécial auprès du ministre, je peux communiquer directement avec lui et son personnel afin de l'informer des questions cruciales et urgentes dont il devrait avoir connaissance, sans que moi ou mon équipe ayons à engager un processus d'enquête et de recherche. Ce rôle est très important, et je m'en sers comme moyen d'accéder au bureau du ministre en vue de traiter les dossiers chauds.
Mon mandat ressemble énormément à celui qu'on s'attendrait à voir confier aux bureaux de tous les ombudsmans. Nous sommes là, premièrement, pour informer les clients, pour les renseigner sur les programmes qui sont à leur disposition et les orienter vers ceux qui leur conviennent. Notre premier niveau d'intervention est composé d'employés qui répondent au téléphone et qui dirigent les gens vers les services qui peuvent leur apporter de l'aide, que ce soit à l'échelle provinciale ou, par exemple, auprès de l'ombudsman de la Défense nationale. C'est ainsi que nous déterminons s'ils sont des clients. C'est là le premier niveau.
Deuxièmement, nous aidons les gens en nous occupant de leurs plaintes. Plus tard, je mentionnerai le nombre et le genre de plaintes que nous recevons chaque année. C'est essentiellement ce que font la plupart des ombudsmans.
Souvent, les plaintes personnelles nous permettent de cerner des problèmes systémiques. Dans le cadre de notre mandat, il nous est possible d'étudier ceux-ci, de les passer en revue, de formuler des recommandations à l'intention du ministère et du ministre et, finalement, de rendre ces recommandations publiques si des mesures ne sont pas prises pour résoudre ces problèmes.
Vous remarquerez qu'un élément de mon mandat, en particulier, est lié au Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Étant donné qu'il s'agit d'un tribunal indépendant et que ses décisions sont sans appel, on ne m'a pas confié la tâche de les examiner. Cependant, nous avons effectivement la responsabilité d'examiner les problèmes systémiques liés au Tribunal des anciens combattants (révision et appel), par exemple, ceux liés aux processus, à l'équité procédurale et à ces genres de sujet. Voilà essentiellement mon mandat.
Il est également important de prendre conscience que notre bureau est un bureau de dernier ressort, ce qui signifie que les clients, les anciens combattants et leur famille doivent d'abord se servir des mécanismes d'appel à leur disposition. Toutefois, notre mandat est très précis : dans des circonstances exceptionnelles, lorsqu'un danger imminent menace la situation financière, la santé ou le bien-être des gens ou de leur famille, nous avons le pouvoir d'intervenir afin de les aider à gérer leurs plaintes et de résoudre leurs problèmes. Cette responsabilité doit également être considérée comme faisant partie intégrante du mandat.
La diapositive suivante, c'est-à-dire la quatrième, examine la clientèle du bureau. C'est là où l'on trouve peut-être une zone grise. En fait, il est probablement logique que la bulle que nous voyons ici soit grise. C'est d'ailleurs la plus grosse. Il est important de comprendre la différence entre l'ombudsman des vétérans et l'ombudsman de la Défense nationale, car il y a une distinction entre les deux.
Dans cette diapositive, la clientèle est répartie en quatre sous-groupes. Le plus important, situé à gauche, est composé des vétérans des Forces canadiennes. La grosse bulle grise représente notre clientèle, mais ce sont des clients d'ACC qui pourraient également devenir les nôtres.
La bulle juxtaposée à elle montre les membres actifs des Forces canadiennes. Depuis 2005, ils ont accès aux programmes de prestations d'Anciens Combattants Canada, même s'ils sont toujours en service. En fait, c'est aussi le cas des membres de la GRC.
Dans ce cas en particulier, si des membres actifs déposent des plaintes concernant la façon dont Anciens Combattants Canada administre leurs prestations, moi et mon équipe sommes chargés de nous occuper de ces dossiers.
Comme vous pouvez le constater, la grosse bulle grise comporte deux sous-groupes. Parmi les 91 000 vétérans en service et les 593 000 anciens membres, il y a 66 000 clients d'Anciens Combattants Canada. Il est important de le savoir.
Dans le coin supérieur droit de la diapositive, on retrouve les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale et de la guerre de Corée. Sur ces 155 000 anciens combattants, 64 000 sont des clients d'ACC. On peut imputer cela à leur âge et à leur état de santé, car cette population est beaucoup plus âgée.
La bulle du milieu concerne la GRC. Mon mandat exige que je m'occupe de ses membres. Encore une fois, j'ai mentionné que leurs anciens membres faisaient partie de mes clients, mais c'est aussi le cas de leurs membres actifs qui reçoivent des prestations d'Anciens Combattants Canada. Parmi eux, on compte environ 9 000 clients d'Anciens Combattants Canada.
La dernière bulle, située dans le coin inférieur gauche, montre les clients survivants. Ce sont les personnes qui ont pris soin des anciens combattants pendant toute leur vie, comme les veuves et les conjoints. Dans le cas présent, on fait surtout allusion aux anciens combattants traditionnels qui ont participé soit à la Seconde Guerre mondiale, soit à la guerre de Corée.
En ce qui concerne notre clientèle, si l'on considère les membres des Forces canadiennes, c'est-à-dire la petite bulle bleue, environ 6 000 d'entre eux passent de la vie militaire à la vie civile chaque année, lorsqu'ils prennent leur retraite, et ce chiffre est à la hausse. Je le mentionne, car on dit parfois que la clientèle d'Anciens Combattants diminuera avec le temps mais, en fait, ce n'est pas nécessairement vrai. Chaque année, 5 000 à 6 000 soldats quittent les Forces années, et ils pourraient devenir des clients d'ACC. Il est également important d'en prendre conscience.
Par exemple, les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale meurent à un taux d'environ 1 400 par mois, ce qui est considérable. Cette statistique nous avertit également que nous devrions peut-être veiller à ce que tous les programmes destinés aux anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale soient actualisés et faciles d'accès. Cet aspect est également très important.
Nous allons maintenant passer à l'organigramme.
[Français]
Nos bureaux sont situés à deux endroits, Charlottetown et Ottawa.
[Traduction]
Nous avons des bureaux dans deux villes parce qu'à titre de conseiller spécial, je dois travailler à proximité du ministre, mais en fait, pour l'équipe chargée de l'intervention, il est facile de résoudre rapidement les plaintes que nous recevons en traitant les dossiers en collaboration avec le personnel de Charlottetown, la ville où l'administration centrale d'Anciens Combattants Canada est située. Les choses fonctionnent très bien ainsi.
Notre effectif compte environ 37 personnes, et ce chiffre varie en fonction du nombre d'étudiants que nous employons. Comme la diapositive l'indique, notre organisation comprend trois secteurs d'opération : les communications, l'intervention initiale, qui regroupe le personnel de première ligne, et la recherche et les enquêtes qui se déroulent à Ottawa.
Vous remarquerez qu'à titre d'ombudsman des vétérans, je ne fais pas partie des opérations. Il y a quelques raisons à cela. L'une des principales raisons vise à garantir le caractère transférable du bureau. Si je quittais mon poste demain, les opérations se poursuivraient. Je n'interviens pas dans les opérations sauf, bien entendu, pour planifier leur budget, leurs ressources et leurs activités stratégiques. Une fois que ces éléments sont déterminés, les opérations fonctionnent par elles-mêmes, ce qui me permet de jouer le rôle de porte-parole du bureau et des anciens combattants.
La prochaine diapositive est un peu compliquée, mais elle vous donne une idée de la nature de nos opérations. J'attire votre attention sur le centre de la diapositive, où nous affichons le nombre d'appels que nous recevons. Les statistiques sont approximatives, mais elles sont fondées sur des chiffres réels. Dans le cas présent, nous avons reçu à ce jour environ 26 000 communications. Je tiens à préciser ici qu'il s'agit de communications avec le bureau, et non de plaintes. Certaines d'entre elles peuvent être des appels téléphoniques, des courriels ou simplement des demandes de numéros de téléphone où nos clients peuvent obtenir des renseignements. Il se peut qu'on puisse résoudre rapidement ces requêtes.
À partir de ces communications, nous avons ouvert 5 900 dossiers depuis 2007, dont 120 sont actifs à l'heure actuelle. Nous travaillons sur ceux-ci régulièrement.
Comme vous pouvez le constater, à mesure que les dossiers sortent de la bulle des cas actifs, ils sont transférés dans la zone d'intervention initiale, car c'est là qu'on intervient en premier. Comme je l'ai mentionné auparavant, au bureau de l'ombudsman, les anciens combattants bénéficient de quatre niveaux d'intervention. Le premier consiste à les renseigner et à les orienter. Le deuxième consiste à les aider à déposer des plaintes, que nous réglons en collaboration avec Anciens Combattants Canada à l'échelon le plus bas possible. Le troisième consiste à gérer des dossiers complexes et délicats dont la résolution exige un certain temps en raison des problèmes qu'ils soulèvent sur le plan des règlements, des politiques et des procédures. C'est l'équipe responsable de la recherche et des enquêtes qui s'occupe de ces dossiers à Ottawa. Je parlerai plus tard des normes, mais voici essentiellement ce qui se produit.
Notre système de suivi, qui est mis à contribution dès l'intervention initiale, nous permet de déceler des tendances. Qu'il s'agisse de tendances géographiques ou de tendances liées aux politiques ou aux prestations, celles-ci constituent une précieuse source de renseignements qui nous aide à déterminer les problèmes systémiques sur lesquels nous nous pencherons. Au cours de l'exercice précédent, elles nous ont permis de cerner les problèmes que nous allions devoir régler durant l'exercice à venir. Elles en sont une bonne indication.
Bien entendu, nos employés sont l'autre source de renseignements sur laquelle nous comptons grandement. Souvent, il ne suffit pas de détecter des statistiques dans le système. Je pense que les gens qui travaillent constamment dans ce domaine perçoivent les tendances et sont en mesure de les reconnaître et de les distinguer.
Du côté de la recherche et des enquêtes, vous pouvez voir que nous avons des enquêtes en cours. Il y a peut-être des gens qui ont appelé à vos bureaux au sujet de ces questions. Il s'agit assurément de questions importantes, et nous les examinons cette année. L'une d'elles est le Programme pour l'autonomie des anciens combattants, ou PAAC. Nous nous penchons sur le processus de révision du Tribunal des anciens combattants (révision et appel). Encore une fois, nous ne pouvons pas contester ses décisions, mais nous examinons le processus de révision et, surtout, comment il traite les décisions de la Cour fédérale.
Nous avons planifié des enquêtes dans l'avenir concernant les soins de longue durée, la santé mentale et les familles. J'ai adopté un thème pour mon mandat de cinq ans; c'est « Un seul groupe de vétérans ». Je crois fermement que le lieu et la période du service importent peu. Si on risque sa vie pour son pays et qu'on subit des blessures physiques ou des préjudices psychologiques durant le processus, on mérite la reconnaissance des citoyens canadiens. Il est important de reconnaître que tous sont sur un pied d'égalité, qu'ils aient servi durant la Seconde Guerre mondiale, en Corée, en Tanzanie, en Somalie ou en Haïti. Nous ne devrions pas faire de distinction dans les avantages accordés aux militaires, car ce n'est pas eux qui ont choisi de servir dans cette région. C'est important.
Nous ne le mentionnons pas dans cette diapositive, mais nous sommes en train de rétablir un comité consultatif qui sera représentatif d'une part des anciens combattants, et de l'autre, des professionnels de la santé. J'essaie de réunir ces deux groupes afin de mettre en place un bon forum de discussions pour examiner les questions provenant d'ACC, qu'elles soient nouvelles ou qu'elles soient liées à l'interprétation des politiques.
La diapositive 8 porte sur les normes de service. J'ai mentionné au début que notre bureau est nouveau. Les informations recueillies durant les trois premières années ont permis de fixer les points de référence afin de connaître la durée de nos processus. Quand on n'a jamais travaillé avec un ministère, quel est le délai de réponse normal? Comment savoir ce qu'est un délai raisonnable? Il faut quelques années pour cela. C'est ce que nous avons fait les trois premières années. Nous sommes maintenant très satisfaits du type d'intervention comportant les niveaux un, deux et trois. Nous avons établi les normes de service que vous voyez ici. La norme de service pour les demandes d'information et les références est de cinq jours. Pour les plaintes nécessitant des recherches simples, comme pour les cas non confidentiels et non complexes, la norme est de 30 jours ouvrables. Pour les autres plaintes, elle est de cinq mois, soit à peu près le temps qu'il nous faut pour effectuer une enquête ou un examen systémique. C'est assez simple.
Nous instaurerons les normes relatives aux questions d'ordre systémique et aux cas complexes aussitôt que nous recevrons les résultats de notre sondage sur la satisfaction de la clientèle, soit en septembre. C'est ce que nous avons l'intention de faire.
La diapositive suivante porte sur le profil de la clientèle du bureau. Elle fournit quelques informations. On peut trouver des informations plus détaillées dans la fiche de renseignements. On y indique la provenance des plaintes que nous recevons. Comme vous le voyez, la majorité des plaintes proviennent de membres retraités ou d'anciens combattants. C'est assez varié et, encore une fois, tout dépend de la question.
Les sept principales questions sont énumérées ici. Je ne pense pas que ce soit une surprise pour personne. Je serai heureux de répondre à vos questions au sujet de cette liste.
Les plaintes concernant les prestations pour soins de santé sont fréquentes, car les gens veulent y être admissibles et veulent recevoir le meilleur traitement possible. Il s'agit d'une question importante à examiner. Le Programme pour l'autonomie des anciens combattants en est une autre.
Même si les médias et les groupes de défense des intérêts des anciens combattants font beaucoup de battage autour de la Nouvelle Charte des anciens combattants, il est surprenant de constater que nous ne recevons pas tellement de plaintes à ce sujet et, bien sûr, au sujet des soins de longue durée.
La dernière diapositive porte sur le financement. Je crois que je suis ici uniquement pour cette diapo. Voici le financement que nous recevons : un peu plus de 6 millions de dollars par année. Toutefois, une bonne partie de cette somme est conservée par le ministère des Anciens Combattants, car c'est de lui que vient notre financement. Par exemple, il conserve plus d'un million pour la prestation de services ministériels, les installations et ce genre de choses. En fait, notre budget de fonctionnement est d'environ 4 millions. Vous pouvez voir ici comment il est réparti entre les divers éléments.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, voilà qui conclut ma déclaration préliminaire. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président : Je vous remercie beaucoup de votre exposé, monsieur Parent. Même si notre comité est celui des finances nationales, nous devons également nous pencher sur l'appareil gouvernemental. Toute les pages de votre document nous intéressent, pas seulement la dernière, qui porte sur le financement.
Je suis à la page 343 du Budget principal des dépenses. Le budget de fonctionnement du Bureau de l'ombudsman des vétérans y est de 5,874 millions de dollars. Comment ce chiffre se compare-t-il à ceux que vous venez de nous fournir?
M. Parent : Le montant total pour l'exercice financier est de 5 269 230 $. Si vous souhaitez que je clarifie ces chiffres, je peux certainement le faire.
Le président : Il s'agit des fonds dont vous prévoyez avoir besoin pour fonctionner au cours de la prochaine année, soit 5 874 000 $; ce montant est semblable à celui de l'année dernière.
M. Parent : Oui.
Le président : Je voulais obtenir la confirmation que vous aviez besoin de cet argent pour assurer la prestation de vos services.
M. Parent : Oui. C'était très serré cette année. Le seul changement qui a été fait concerne l'utilisation des fonds. Nous avons dû utiliser un montant du budget de fonctionnement pour les salaires.
La co-occupation des locaux de travail par les gens responsables de l'intervention initiale et ceux du ministère des Anciens Combattants à Charlottetown nous a permis d'économiser beaucoup sur le plan du fonctionnement, mais nous avons eu besoin de plus d'employés pour traiter les demandes plus rapidement. Nous avons déplacé des fonds pour les dépenses salariales, mais l'argent est là où il doit être actuellement. Cela ne nous cause aucune difficulté. Ma seule préoccupation concerne ce que nous recevons d'Anciens Combattants Canada par rapport à l'argent qui est retiré de notre budget. C'est toujours une question que nous nous posons : en obtenons-nous assez pour nos services?
J'ai aussi des réserves quant à la perception de l'indépendance. Si vos services proviennent de l'organisation que vous surveillez, êtes-vous indépendant de cette organisation? Je peux vous assurer, personnellement, que notre directeur général a l'entière responsabilité des ressources humaines et qu'il a reçu les pleins pouvoirs liés aux finances et aux ressources humaines. Je crois que les chiffres sont au bon endroit.
Le président : Comment déterminez-vous quel sera votre budget? Qui vous le dit? Le demandez-vous et en discutez-vous ensuite pour savoir de combien d'argent vous disposerez pour les dépenses d'exploitation dans la prochaine année?
M. Parent : Oui. Nous travaillons avec le directeur financier d'Anciens Combattants Canada. Nous vérifions si le budget de fonctionnement de la dernière année était suffisant ou non.
Le président : Combien avez-vous d'employés?
M. Parent : Trente-sept.
Le président : Avez-vous fait l'objet d'un examen stratégique de vos dépenses jusqu'à maintenant?
M. Parent : C'est l'une des premières questions que je me suis posées quand j'ai commencé à occuper mes fonctions, en novembre dernier. Où en sommes-nous par rapport au budget et au personnel? Nous avons mis en place le plan intégré des activités et des ressources humaines pour faire des prévisions d'avenir. Je dois dire que durant les trois premières années, il y a beaucoup de succès et d'échecs dans une organisation, car on en modifie la structure et on crée des postes. La situation était un peu instable, si je puis dire.
Je me suis tout de suite demandé si nous avions suffisamment de financement pour faire le travail que nous sommes censés faire et si nous utilisions les fonds à bon escient. Cette année, grâce au plan intégré des activités et des ressources humaines, je crois que nous en sommes là. En septembre, dans notre rapport annuel, nous pourrons indiquer de façon exacte à quoi l'argent a été affecté et si des problèmes se sont posés.
Le président : Indiquerez-vous également s'il y a eu une augmentation du nombre d'employés?
M. Parent : Oui, bien sûr.
Le sénateur Marshall : Lorsque vous vous penchez sur des cas individuels, vos décisions sont-elles exécutoires? Prennent-elles plutôt la forme de recommandations?
M. Parent : Il faut faire une distinction entre les plaintes personnelles des gens et les examens systémiques dans lesquels nous formulons des recommandations au ministre.
En ce qui concerne les plaintes personnelles, nos recommandations sont des recommandations, mais elles prennent la forme d'une médiation. L'agent de première ligne discute du cas avec l'agent du personnel d'ACC qui s'occupe de ce dossier et ils en viennent à une entente. Le rôle fondamental d'un ombudsman est de s'assurer que les gens comprennent la situation et qu'ils sont conscients qu'il existe des circonstances exceptionnelles. Les fonctionnaires et les administrateurs des services ont tendance, après un certain temps, à mettre tout le monde dans le même panier. Notre travail est de nous assurer que les gens comprennent qu'il existe des différences et qu'ils doivent en tenir compte. Il n'y a pas nécessairement de recommandations à cette étape, mais il y a un engagement de médiation afin de trouver une solution.
À l'opposé, sur le plan systémique, nous rédigeons les rapports à l'intention du ministère et du ministre. Il ne s'agit que de recommandations, mais nous donnons au ministère l'occasion d'y donner suite avant qu'elles ne soient transmises au ministre. Nous leur envoyons une copie des recommandations provisoires. Certaines peuvent ne pas être à jour, pertinentes ou même applicables en raison d'éléments que nous ignorons, mais le ministère nous en informera. Ce ne sont que des recommandations.
Évidemment, pour tout ombudsman, le pouvoir est entre les mains du public. Si personne ne donne suite aux recommandations, dans l'intérêt public, nous avons le mandat de rendre publiques les recommandations et la question.
Le sénateur Marshall : Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé des temps de réponse. Nous avons entendu d'autres témoins ici, qui étaient peut-être des représentants d'Anciens Combattants Canada. L'une des questions qu'ils ont soulevées concernait l'amélioration de leurs temps de réponse. Ils nous ont dit que leurs temps de réponse étaient encore loin d'être acceptables.
M. Parent : Oui.
Le sénateur Marshall : Pourriez-vous nous donner une idée des temps de réponse au ministère des Anciens Combattants et au Tribunal des anciens combattants (révision et appel)?
M. Parent : Je pourrai certainement vous fournir des renseignements détaillés à ce sujet un peu plus tard.
Le sénateur Marshall : Et nous dire aussi si, selon vous, les temps de réponse sont acceptables à l'heure actuelle ou s'ils doivent être améliorés.
M. Parent : Nous pouvons peut-être en prendre note et vous transmettre ces informations.
Comme l'ont fait tous les ministères, Anciens Combattants Canada a entrepris une grande initiative de transformation, comme nous le savons tous. Le ministère a été en mesure de faire passer le temps de réponse de 22 à 16 semaines, une différence assez importante. C'est ce qu'il a indiqué.
C'est bien de dire qu'on est passé de 22 à 16 semaines, mais qu'a-t-on fait, au juste? A-t-on modifié la méthode de calcul? A-t-on amélioré l'efficacité du processus? Nous nous penchons là-dessus actuellement. Il est question de la manière de calculer le temps.
Le sénateur Marshall : Je crois que c'est l'information qu'on nous a fournie. J'ai tout de suite pensé que quatre mois, c'est encore trop. J'aimerais beaucoup connaître votre point de vue. Selon vous, quatre mois, est-ce trop long? Les gens du ministère ont estimé qu'il s'agissait d'une amélioration considérable et ils en étaient fiers, mais j'ai pensé qu'il leur restait beaucoup de chemin à parcourir.
M. Parent : Tout dépend des circonstances. La première chose qu'il faut quand les gens présentent une demande de prestations au ministère des Anciens Combattants, c'est d'une preuve de service; elle est importante, et n'est pas toujours facile à obtenir.
La deuxième chose concerne la blessure subie, le diagnostic d'une blessure et son lien avec le service. Nous devons savoir si elle a vraiment été causée pendant le service. Ces choses prennent du temps. Il faut également obtenir la certification de la période de service à un certain moment, par exemple déterminer si la personne était vraiment en Somalie à telle ou telle période.
Si la personne a fourni tous les renseignements nécessaires et qu'ils sont exacts, et si le ministère des Anciens Combattants peut consulter des témoins et des sources, je pense qu'il faut alors faire la différence entre un cas simple et un cas plus complexe pour connaître la durée du processus. Normalement, cela ne devrait pas prendre 16, 12 ou 11 semaines; les prestations devraient être envoyées le plus rapidement possible, car c'est la partie importante.
Le sénateur Marshall : Combien de temps met le Tribunal d'appel des anciens combattants à répondre? En êtes-vous satisfait?
M. Parent : Au Tribunal des anciens combattants (révision et appel), le calendrier pose problème. En effet, le temps d'attente est très long. J'ai avec moi Mme Diane Guilmet-Harris, ma conseillère juridique, et elle s'occupe d'un grand nombre de ces cas.
Le président : Voulez-vous qu'elle se joigne à nous? Il n'y aurait pas de problème; nos réunions sont plutôt informelles.
M. Parent : Oui, si vous voulez avoir une bonne réponse.
Le sénateur Marshall : Certaines des plaintes concernent le temps qu'il faut pour obtenir une décision. Parvenir à la décision est une chose, mais le temps qu'il faut attendre pour l'obtenir en est une autre. D'après ce que vous dites, le Tribunal d'appel se réunit périodiquement, c'est-à-dire que ses membres ne se réunissent pas régulièrement.
Les gens qui ont déposé un appel au Tribunal reçoivent-ils une réponse rapidement ou doivent-ils attendre pendant des périodes déraisonnablement longues?
M. Parent : Vous parlez des appels, et non de la révision?
Le sénateur Marshall : C'est bien cela, je parle des appels.
Diane Guilmet-Harris, conseillère juridique, Bureau de l'ombudsman des vétérans : Une des choses à se rappeler lorsqu'on parle du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), c'est qu'il dépend de la disponibilité de l'avocat du Bureau des services juridiques des pensions. Il faut aussi considérer la disponibilité du client, du BSJP et des conseillers. En ce qui a trait à la révision, si le client souhaite comparaître, il faut alors faire en sorte que ce soit possible, et décider d'un endroit et de ce qui sera fait. Je pense que l'ensemble des facteurs est important.
Lorsqu'on tient une audience, selon la norme de service, on a six semaines pour rendre une décision.
Le sénateur Marshall : Cette norme est-elle habituellement respectée?
Mme Guilmet-Harris : Je pense que oui; on la respecte assez bien.
Le sénateur Callbeck : Vous avez mentionné le Programme pour l'autonomie des anciens combattants. Un grand nombre de gens viennent me voir pour se plaindre de la façon dont il est mis en œuvre. Ce programme comporte deux volets, c'est-à-dire les services d'entretien de terrain et les services d'entretien ménager. Si un ancien combattant et sa femme reçoivent les deux types de services et que le mari décède, la veuve continue-t-elle d'avoir droit aux deux services?
M. Parent : Oui.
Le sénateur Callbeck : S'ils ne recevaient pas les deux services et que l'ancien combattant décède, sa femme peut en faire la demande, car si elle a un faible revenu, elle y est admissible. S'ils ne reçoivent qu'un seul service, qu'arrive-t-il dans ce cas?
M. Parent : Je vois où vous voulez en venir.
Le sénateur Callbeck : Après la mort de l'ancien combattant, elle ne peut pas demander le deuxième service, et cela me semble très injuste. Des femmes me disent que leurs voisines ont droit aux deux services, et me demandent pourquoi elles-mêmes n'y ont pas droit. J'aimerais que vous me l'expliquiez.
M. Parent : C'est une bonne question. En fait, nous discutons avec le ministère en ce moment afin de résoudre ce problème. Nous nous référons à l'article 16.1 du Règlement sur les soins de santé pour anciens combattants. Mme Guimet-Harris peut vous donner des précisions à ce sujet.
Mme Guilmet-Harris : C'était l'un des problèmes. J'ai commencé avec l'ombudsman des anciens combattants en avril 2009, et une des premières questions que j'ai eu à traiter concernait l'interprétation de l'article 16 du Règlement sur les soins de santé pour anciens combattants dont relève le Programme pour l'autonomie des anciens combattants. En raison de la situation que vous avez décrite, le ministère a adopté l'article 16.1 pour remédier à la situation des veuves qui ne recevaient aucun service pendant que l'ancien combattant était en vie.
J'ai fait valoir que la façon dont on interprétait l'article 16.1, c'est-à-dire refuser aux veuves l'accès au second service qu'elles ne reçoivent pas, constitue une interprétation restrictive. Nous en avons parlé à plusieurs reprises avec le ministère, et on n'est toujours pas disposé à créer une interprétation plus large de l'article. Au bureau de l'ombudsman, on est d'accord pour dire que l'interprétation actuelle du ministère n'a aucun sens.
M. Parent : Nous avons un nouveau ministre.
Mme Guilmet-Harris : Oui.
Le président : Au Sénat, le comité des finances sympathise sur ce point; n'hésitez donc pas à nous informer des progrès dans ce dossier.
Mme Guilmet-Harris : À mon avis, nous n'avons pas besoin d'une modification de la réglementation, mais seulement d'un changement de politique.
Le sénateur Callbeck : Je suis heureuse d'apprendre que vous y travaillez, et je vous souhaite d'y parvenir.
Je suis sûre que vous êtes au courant de ce qui s'est passé récemment à l'île du Prince-Édouard, c'est-à-dire que M. Fabien Melanson a mené une grève de la faim qui a duré 10 jours devant le ministère des Anciens Combattants. Je sais que la protection des renseignements personnels vous empêche de commenter des cas précis. Toutefois, il disait qu'en raison d'une erreur d'écriture commise par le ministère, son chèque n'a pas été déposé dans son compte pendant quatre mois, ce qui l'a obligé à déclarer faillite. Il a également perdu sa maison.
Hier, Anciens Combattants Canada s'est excusé, mais d'après ce que dit le communiqué que j'ai en main, les représentants du ministère disent qu'il n'existe aucune façon ou mécanisme pour aider les gens qui se retrouvent dans des situations comme celle de M. Melanson à cause d'une erreur commise par le ministère. Si le ministère commet une erreur, les conséquences peuvent être très graves, comme cela a été le cas avec M. Melanson.
Qu'en pensez-vous? Devrait-on mettre en place un mécanisme ou une façon de l'aider, puisque le ministère des Anciens Combattants est à l'origine du problème?
M. Parent : Comme vous l'avez dit, je ne peux pas commenter les détails du cas, car nous avons les mains liées et nous ne devons rien dire.
Dans le cas qui nous occupe, le problème réside dans le fait que si les conséquences avaient été immédiates, je suis sûr que le ministère aurait probablement réagi différemment. Aujourd'hui — six ans se sont écoulés —, à quel point peut-on établir la responsabilité? Habituellement, si nous commettons une erreur, nous la corrigeons et nous nous excusons. Nous réparons ce que nous pouvons, mais parfois, nous n'avons aucun contrôle sur les répercussions.
On doit s'occuper de chaque cas selon ses mérites; nous devons convaincre le ministère des Anciens Combattants qu'il doit examiner un cas comme celui-ci sans se référer à d'autres cas similaires qui se sont produits auparavant.
Le sénateur Callbeck : Il n'y a pas de mécanisme en place. Il n'existe aucune façon de traiter ce cas.
M. Parent : En ce qui concerne le ministère des Anciens Combattants, il n'y en a pas en ce moment.
Le sénateur Callbeck : À votre avis, devrait-il y en avoir?
M. Parent : J'ai dit qu'il n'y en avait pas en ce moment. Le ministère a des fonds pour les cas urgents. En fait, ces fonds sont utilisés pour prendre soin des anciens combattants sans abri; un programme a été créé pour régler ce problème, car le ministère ne s'en était pas encore occupé. Il existe maintenant un fonds d'urgence pour venir en aide aux gens qui se retrouvent en situation désespérée. Toutefois, dans ce cas précis, cela ne s'appliquait pas; la situation ne justifiait pas l'utilisation du fonds d'urgence. Il s'agit donc d'une des choses que je ne peux pas commenter pour le ministère.
Le sénateur Callbeck : Je ne vous demande pas de commenter ce cas précis; je me renseigne seulement sur ce type de situation. Il y a sûrement toutes sortes de gens qui se retrouvent dans des situations graves. Le ministère a-t-il des responsabilités envers eux?
M. Parent : Je ne peux pas prédire ce qui arrivera dans six ans. Comme je l'ai dit plus tôt, pendant combien de temps le ministère est-il responsable? Il est difficile de répondre sans entrer dans les détails.
Le sénateur Callbeck : Je voulais parler, de façon générale, des gens qui se retrouvent dans ce genre de situation. D'après ce que je comprends, il était malade et n'était donc pas en mesure de faire pression sur le ministère afin d'accélérer les choses.
Le sénateur Runciman : Les médias ont rapporté une autre histoire aujourd'hui. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais il s'agissait d'un amputé de deux membres, une personne qui avait perdu ses deux jambes en Afghanistan. Il avait été retenu par les Forces canadiennes pour faire des analyses de renseignements et on lui a ensuite dit qu'il perdait son travail, car d'après ce que je comprends de l'information de presse, quiconque fait partie des Forces doit être capable de servir au champ de bataille. C'était la justification.
Si une personne pense qu'elle a subi un préjudice et qu'elle ne peut pas comprendre pourquoi on a pris telle ou telle décision, peut-elle référer ce genre de cas à votre bureau?
M. Parent : C'est une très bonne question, car elle concerne directement le Bureau de l'ombudsman du MDN. Comme je l'ai dit plus tôt, tout ce qui concerne la libération des Forces canadiennes de même que les circonstances et les prestations qui en découlent relèvent de la compétence de l'ombudsman de la Défense nationale et des Forces canadiennes.
Toutes les plaintes liées aux soins que recevraient les personnes après leur libération, lors de leur transition au ministère des Anciens Combattants, deviendraient alors notre responsabilité.
Le sénateur Runciman : Vous avez dit plus tôt que les programmes offerts à n'importe quel ancien combattant, qu'il ait servi pendant la Seconde Guerre mondiale ou en Afghanistan, devraient essentiellement être les mêmes. Et je me suis dit que ce n'était pas le cas, puisque les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale recevaient des prestations plus généreuses, si vous voulez, que ceux qui ont servi en Afghanistan. Est-ce le cas, ou était-ce le cas et la situation a été corrigée depuis?
M. Parent : Ce qui a changé, c'est qu'on a introduit un nouveau concept de prestations, représenté par la Nouvelle Charte des anciens combattants. Les anciens combattants traditionnels, c'est-à-dire ceux de la Première et de la Seconde Guerres mondiales et de la guerre de Corée, étaient pris en charge par le programme d'indemnités et recevaient une pension à vie. Toutefois, il faut se rendre compte que les gens qui se sont portés volontaires pour aller à la guerre n'avaient reçu aucune instruction ou éducation et n'avaient pas de fonds de pension. Lorsqu'ils sont revenus au pays, ils étaient pratiquement démunis ou n'étaient pas en mesure de s'intégrer à la société civile et de gagner leur vie. C'était le type de programme qui était en vigueur à l'époque.
La Nouvelle Charte des anciens combattants a introduit le concept de la réinsertion dans la société civile au lieu de la dépendance à vie. Les mêmes avantages sociaux sont maintenant offerts. Parfois, on ne comprend pas très bien la Nouvelle Charte des anciens combattants; pour vous l'expliquer clairement, il faudrait presque que vous invitiez un témoin à comparaître uniquement dans ce but.
Le sénateur Runciman : Ce programme n'a aucune répercussion sur les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, par exemple. Sont-ils toujours pris en charge par le même programme?
M. Parent : La charte a été mise en place en 2005 et est entrée en vigueur en 2006 avec les nouveaux programmes.
Le sénateur Runciman : Vous avez aussi mentionné que des membres actifs de la GRC se prévalaient toujours des services de votre bureau. À quel sujet vous contactent-ils?
M. Parent : Par exemple, un policier blessé dans l'exercice de ses fonctions au cours d'une mission internationale de maintien de la paix à l'étranger peut être admissible à certains des avantages sociaux offerts par le ministère des Anciens Combattants. La GRC, contrairement aux Forces canadiennes, n'offre pas l'universalité du service; elle est tenue de prendre des mesures d'adaptation, ce qui est très différent. Ainsi, une personne pourrait continuer à servir dans la GRC tout en souffrant d'une blessure qui est reconnue par le ministère des Anciens Combattants.
Le sénateur Runciman : Comme vous l'avez mentionné plus tôt, les Forces canadiennes ont leur propre ombudsman, mais vous avez aussi dit que certains membres actifs profitaient de vos services. Pouvez-vous nous préciser?
M. Parent : Il s'agit des mêmes circonstances, par exemple dans le cas d'une personne qui souffre d'une blessure qui ne la limite pas nécessairement pour le déploiement ou l'universalité du service. Toutefois, la blessure est reconnue par le ministère des Anciens Combattants, car elle a changé quelque chose dans la vie de la personne, mais ne lui cause pas de préjudice.
Cela a créé une certaine controverse. En effet, les gens ont quelquefois tendance à ne pas déclarer une blessure en raison d'une disposition concernant l'universalité du service. Même lorsque j'étais en service, je me rendais compte que des gens cachaient leurs blessures, car elles pouvaient mettre leur carrière en jeu. Cela ne veut pas dire qu'ils ne peuvent pas s'adresser au ministère des Anciens Combattants et obtenir une pension. Je crois que cela a commencé en 2004.
Le président : Ce point concernant l'ombudsman de la Défense nationale et vous, l'ombudsman du ministère des Anciens Combattants, a créé une certaine confusion lorsque nous avons accueilli l'autre ombudsman. Vous l'avez expliqué, et cela semble logique. Toutefois, du point de vue de l'ancien combattant ou de la personne actuellement en service — un ancien employé ou un membre actif —, les deux peuvent s'adresser à vous ou à l'autre ombudsman, et une personne qui n'est plus en service, c'est-à-dire un ancien combattant, peut s'adresser à vous ou à l'autre ombudsman, n'est-ce pas?
M Parent : Seulement pour certaines questions.
Le président : Je comprends. Le processus est-il uniformisé pour eux? Avez-vous un protocole selon lequel les personnes que nous désirons servir sont les anciens combattants et les militaires actifs qui ont besoin d'aide? Ils ne parviennent pas à régler leurs problèmes, alors ils s'adressent à vous.
M. Parent : Nous avons un accord mutuel concernant le transfert des dossiers. Tout le monde signe une renonciation à la confidentialité des renseignements. Si les gens nous donnent la permission, nous allons transférer le dossier à l'ombudsman du MDN ou il va nous transférer un dossier.
Il est important de faire la différence entre les deux, car les principes de fonctionnement sont les mêmes, mais le groupe d'employés représenté est assez différent. L'ombudsman de la Défense nationale est un ombudsman institutionnel et organisationnel. Il travaille à l'interne; toutes les plaintes sont dans l'organisme, c'est-à-dire que les deux parties appartiennent à l'organisme.
De mon côté, l'ombudsman des anciens combattants gère les services d'un ministère offerts à une certaine clientèle. Toutefois, à part la gestion des prestations, il n'y a aucune relation établie entre le client et le ministère, alors qu'une telle relation est établie du côté de la Défense nationale. Souvent, une plainte vise un supérieur parce que le rapport d'évaluation de l'année est inadéquat, mais il vient d'un supérieur. C'est très différent pour le règlement des plaintes; il faut préserver la relation dans la hiérarchie en même temps. Il s'agit de deux mondes différents. Toutefois, dans certains cas, nous travaillons ensemble.
Le seul autre domaine concerne la transition des gens de la Défense nationale à la société civile et nos clients d'Anciens Combattants Canada. Je parlais récemment avec Pierre Daigle, l'ombudsman de la Défense nationale, et nous envisageons un examen systémique conjoint du processus de transition.
Le président : C'est cette zone grise qui nous préoccupe. Par exemple, une personne qui n'est plus employée à la Défense nationale, qui n'est plus assujettie à la chaîne de commandement et ne se préoccupe plus ou ne se plaint plus d'un patron, pourrait s'adresser à l'ombudsman de la Défense nationale ou à l'ombudsman des anciens combattants, c'est-à-dire vous.
M. Parent : Encore une fois, cela dépend du problème.
Le président : Exactement, et c'est ce que nous essayons de vous dire. Nous aimerions être rassurés et être convaincus que vous avez réglé la question, afin qu'on ne se renvoie pas la balle avec les clients en leur disant : « Nous ne nous occupons pas de cela; allez voir l'autre. »
M. Parent : Notre site web et la plupart de nos publications indiquent clairement ce que nous pouvons faire et ce que fait l'ombudsman de la Défense nationale. Nos deux organisations ont également le mandat d'informer et de sensibiliser les gens. Actuellement, l'ombudsman de la Défense nationale le fait grâce à des services d'approche, et j'entends faire la même chose. Autrement dit, j'ai l'intention d'aller vers les militaires actifs et les organisations d'anciens combattants pour leur expliquer la différence. Tout le monde doit bien la comprendre.
Il arrive que les médias confondent les deux. Ils attribuent souvent mes propos à l'ombudsman militaire. Ce n'est rien pour aider.
Le président : Compilez-vous des statistiques sur le nombre d'anciens employés de la Défense nationale que vous avez référés à l'ombudsman militaire parce qu'ils ne s'étaient pas adressés à la bonne personne, et vice versa?
M. Parent : Nous pouvons transmettre cette information au comité.
Le président : Ce serait utile si vous pouviez nous la donner. Les documents que vous remettrez au greffier seront transmis à tous les membres du comité.
M. Parent : Je m'en occupe.
[Français]
Le sénateur Mitchell : Monsieur Parent, je voudrais vous poser plusieurs questions quant aux renseignements que vous avez demandés au gouvernement fédéral. J'ai des notes qui indiquent que l'ombudsman des anciens combattants n'a pas le pouvoir de forcer le gouvernement fédéral à lui communiquer les renseignements que vous demandez.
De plus, contrairement à l'ombudsman de la Défense nationale et des Forces canadiennes, vous n'avez pas reçu de directives ministérielles clarifiant les obligations du ministère en matière de communication de ces renseignements. Pourquoi et quel est le problème?
M. Parent : Si je comprends bien, votre question vise la coopération du ministère des Anciens Combattants à nous donner l'information nécessaire pour régler les plaintes personnelles ou les enquêtes systémiques. Du côté des plaintes personnelles, il n'y a aucun problème à obtenir l'information. Dans le passé, nous avons eu un peu de difficulté à obtenir des renseignements du ministère lorsqu'il s'agissait de documents rédigés par le ministère même, qui faisaient partie de certains dossiers auxquels nous voulions accéder. Depuis ce temps, nous nous sommes engagés avec le ministère pour obtenir des lettres d'entente pour rectifier le problème, mais il y a encore un peu de difficulté de ce côté.
Il y a aussi quelques défis du côté de l'accès à l'information quand on a des requêtes de citoyens qui veulent obtenir des renseignements privés.
Mme Guilmet-Harris : Nous sommes encore en pourparlers avec le ministère pour clarifier et conclure une entente de partage de l'information qui serait acceptable pour les deux parties. Cela fait déjà deux ans que nous sommes en négociation et on ose espérer qu'on pourra conclure une entente de partage d'information. Si le ministère refuse de nous donner des informations, il traiterait au même niveau que si c'était une demande d'accès à l'information, par exemple. Il nous indiquerait que c'est un document confidentiel du Cabinet. Cela nous indiquerait au moins que le document existe sans connaître le contenu du document. Il reste à conclure cela cette année.
Le sénateur Mitchell : Je vous remercie. J'aurais une deuxième question.
[Traduction]
J'aimerais revenir à la question du sénateur Callbeck concernant l'article 16.1.Il est intéressant de savoir que les femmes s'en trouveraient beaucoup plus désavantagées que les hommes. Ce n'est sûrement pas le fruit du hasard, mais nous ne pouvons pas le prouver hors de tout doute.
Combien de personnes seront touchées par cette mesure? Combien de veuves et de veufs seraient admissibles à cette aide si elle était offerte?
M. Parent : Nous pouvons soumettre au comité des données concernant les plaintes que nous avons reçues à ce sujet. Cela ne dresserait toutefois pas un portrait exact de la situation. La communication fait cruellement défaut au ministère des Anciens Combattants. Cela ne m'étonnerait pas du tout que des personnes y aient droit sans le savoir.
À ce sujet, nous avons appris qu'il faut présenter les choses au ministère sous l'angle de l'équité, et non sous l'angle de la réglementation. Dès qu'on touche à l'aspect juridique, on est accueilli par une armée d'avocats qui donnent leur interprétation des règlements. Je ne veux aucunement manquer de respect envers mon collègue. Cependant, si nous pouvons expliquer au ministère qu'il est injuste qu'une veuve soit admissible à un service et pas une autre, et qu'il nous donne raison, il serait possible de travailler à partir de la législation et traiter la question du point de vue de l'iniquité. C'est pour cette raison que nous espérons toujours arriver à une entente avec le ministère à cet égard.
Le sénateur Mitchell : Le nombre de personnes qui pourraient être touchées expliquerait sans doute pourquoi le gouvernement ne veut pas se mouiller. Si seulement quelques plaintes ont été déposées, mais que des centaines de personnes seraient admissibles à cette aide, je parierais que le gouvernement voudrait évaluer les coûts réels s'y rattachant s'il devait leur annoncer qu'elles y ont droit. Ce n'est toutefois pas la chose équitable à faire.
Vous nous avez dit que vous travailliez sur le dossier depuis deux ans. Vous pourrez toutefois traiter avec un nouveau ministre maintenant. S'agit-il strictement d'une décision ministérielle, ou y a-t-il des obstacles structurels au ministère? La culture de l'organisation y est-elle pour quelque chose?
M. Parent : J'ai cru bon le mentionner parce que cela nous permettra de repartir sur de nouvelles bases. Nous pourrons faire valoir notre point de vue à quelqu'un d'autre. Parfois, le ministère a une ligne de pensée que ne partage pas nécessairement le ministre. Il faut apprendre à connaître les gens avec qui l'on traite pour être en mesure de les rallier à notre cause et de donner aux anciens combattants ce qui leur revient. Pour pouvoir faire notre travail, nous devons connaître les personnes à qui nous avons affaire, et cela prend du temps.
Comme nous l'avons dit, nous avons délaissé l'aspect juridique pour aborder la question sous un autre angle. Nous pourrions obtenir de meilleurs résultats de cette façon.
Mme Harris : Là où mon opinion diffère de celle du ministère, et c'est d'ailleurs le point chaud du débat, c'est qu'il prétend devoir modifier la réglementation pour offrir ce service supplémentaire. J'estime pour ma part qu'il s'agit simplement d'une question d'interprétation des politiques et qu'aucune modification réglementaire n'est nécessaire. Le ministre pourrait ainsi avoir une grande influence et faire changer les politiques.
Le sénateur Mitchell : Évidemment, le gouvernement veut faire adopter le projet de loi sur les mégaprocès en une journée, mais ce dossier-là traîne depuis deux ans.
Le président : Je vais devoir vous interrompre, sénateur Mitchell. Vos collègues aimeraient eux aussi intervenir. Il ne nous reste que quatre minutes, et les sénateurs Nancy Ruth et Seidman ont des questions à poser.
Le sénateur Nancy Ruth : Est-ce que les revenus des veuves A, B et C sont pris en compte dans le calcul?
Mme Harris : Oui.
Le sénateur Nancy Ruth : Le même critère s'applique aux trois?
Mme Harris : Oui.
Le sénateur Nancy Ruth : Donc, les veuves n'ont pas toutes droit aux mêmes indemnités; celles-ci sont toutes déterminées en fonction du revenu?
Mme Harris : Oui.
Le sénateur Seidman : Je jette un coup d'œil à votre tableau sur les communications et les relations externes, et dans la section opérations, vous dites avoir reçu 26 000 lettres, appels et courriels entre novembre 2007 et juin 2011; est-ce exact?
M. Parent : Oui.
Le sénateur Seidman : Environ 25 p. 100 d'entre eux sont devenus des « cas ».
M. Parent : Oui.
Le sénateur Seidman : J'essaie de comprendre en quoi consistent les autres. Est-ce qu'une demande de renseignements est considérée comme un cas? Comment définiriez-vous les autres communications, les 75 p. 100 qui restent?
M. Parent : Il peut s'agir de demandes de renseignements ou de renvois. Quand un client communique avec nous, nous l'inscrivons dans nos dossiers, mais chaque appel ne devient pas nécessairement un cas. Nous conservons les coordonnées des clients à des fins statistiques, mais nous n'ouvrons pas nécessairement un dossier chaque fois. Un dossier est ouvert lorsqu'il y a une interaction entre le client, le ministère et notre bureau, sinon, nous aiguillons simplement le client vers le mécanisme approprié. Il peut simplement s'informer sur un programme municipal ou provincial. Nos agents de première ligne sont aussi là pour répondre à ces questions. On peut renvoyer le client à l'ombudsman de la Défense nationale, par exemple. On peut également aiguiller une personne vers l'ombudsman de sa province s'il est question, notamment, de soins de longue durée ou de la qualité des soins.
Nous répondons à tous les appels et les consignons tous également, mais ils ne mènent pas nécessairement à l'ouverture d'un dossier. Il est aussi possible qu'on ouvre plus d'un dossier pour une même personne, car chaque dossier ne contient qu'une seule plainte. Donc, si le client dépose trois plaintes sur trois sujets différents, nous allons ouvrir trois dossiers distincts. Autrement, nous ne pourrions pas dégager des tendances, puisque toutes les plaintes seraient regroupées dans un même dossier. C'est une façon de déceler les tendances.
Le sénateur Seidman : Du nombre de clients qui communiquent avec vous et qui n'ont pas de dossier actif, ceux qui demandent des renseignements ou qui sont référés ailleurs, combien reviennent vous voir bredouilles, nécessitant finalement l'ouverture d'un dossier?
M. Parent : Je n'ai pas de statistiques là-dessus, mais je peux vous assurer que la dernière chose que nos agents disent aux clients est « Rappelez-nous si cela ne fonctionne pas ». Il y a toujours un suivi d'effectué, et c'est vrai pour toutes nos interventions. Nous ne nous contentons pas de fournir l'information; nous faisons des vérifications pour nous assurer que les gens ont les renseignements dont ils ont besoin.
Le président : Sénateur Marshall, je vous ai promis que vous pourriez poser une question au deuxième tour. Si vous le voulez, vous pouvez poser votre question maintenant, et M. Parent pourrait y répondre par écrit.
Le sénateur Marshall : Est-ce que cela s'applique à tous les anciens membres et membres actuels de la GRC, ou seulement à ceux qui ont été en mission à Haïti, par exemple, ou qui ont pris part à des missions de maintien de la paix?
M. Parent : Cela s'applique à tous les anciens membres et membres actuels de la GRC.
Le sénateur Marshall : Je ne le savais pas.
Le président : Sénateur Callbeck, si vous voulez poser une question maintenant, nous aurons la réponse par écrit.
Le sénateur Callbeck : Ma question porte sur la section « Profil géographique » dans votre site web, qui indique que vous avez 1 431 clients individuels. De ce nombre, 20 p. 100 proviennent du Canada atlantique, ce qui me semble très élevé compte tenu de la population. J'aimerais savoir comment vous expliquez cette situation.
Le président : Je vous prierais de nous fournir la réponse par écrit.
Le sénateur Mitchell : À la page qui traite du financement, je vois que le budget pour l'ombudsman des vétérans diminue en 2011-2012 par rapport à 2010-2011, mais que celui des services offerts par ACC augmente. Pourquoi donc?
Aussi, il devient de plus en plus évident que lorsque nos troupes seront de retour de leur mission de combat, il est très probable que de nombreux cas de syndrome de stress post-traumatique fassent leur apparition. Ce phénomène s'explique par des raisons techniques et médicales. Avez-vous prévu que cela se traduirait par une augmentation de votre charge de travail? La réduction de votre budget vous paraît-elle sensée dans ce cas?
Le président : Malheureusement, chers collègues, c'est tout le temps que nous avions. Nous vous serions reconnaissants si vous pouviez nous transmettre par écrit les réponses à ces dernières questions.
Je tiens à remercier M. Parent de sa présence. Merci aussi à Mme Guilmet-Harris d'avoir accepté de comparaître à court préavis. Nous l'apprécions. L'ombudsman de la Défense nationale est également venu témoigner devant nous en compagnie d'un avocat, alors c'est juste pour tout le monde. Merci de votre aide. Je vous souhaite la meilleure des chances avec ce très important service que vous offrez aux vétérans canadiens.
M. Parent : Merci. Ce fut un plaisir d'être ici.
(La séance est levée.)