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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 33 - Témoignages du 26 février 2013


OTTAWA, le mardi 26 février 2013

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 9 h 30 pour étudier la teneur des dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013.

Le sénateur Larry W. Smith (vice-président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le vice-président : Honorables sénateurs, aujourd'hui nous poursuivons notre étude de la teneur des dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013.

[Traduction]

Ce matin, nous sommes heureux d'accueillir Scott Vaughan, commissaire à l'environnement et au développement durable. M. Vaughan est accompagné de deux cadres du Bureau du vérificateur général du Canada, Kimberley Leach et Trevor Shaw. M. Vaughan a été nommé à ce poste en mai 2008, mais il embrassera bientôt de nouveaux défis et poursuivra de nouveaux objectifs, alors nous sommes particulièrement reconnaissants de l'avoir avec nous, aujourd'hui.

Scott Vaughan, commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada : Merci beaucoup. En plus de Kimberley Leach et Trevor Shaw, je suis accompagné d'autres collègues du BVG, nommément, George Stuetz, Liohn Donenfeld-Sherer, Jocelyne Therrien et Véronique Dupuis.

Le rapport que nous avons déposé il y a trois semaines examine plusieurs activités et programmes environnementaux qui visent à appuyer le développement durable des ressources naturelles.

Étant donné le rôle central des ressources naturelles dans l'économie canadienne, la protection environnementale doit évoluer avec le développement économique. Je trouve inquiétantes les lacunes que nous avons constatées dans la gestion des programmes fédéraux de ressources naturelles.

[Français]

Je vais parler d'abord de nos aires marines protégées. Il est important de protéger les pêches commerciales et les espèces marines comme les baleines et les tortues ainsi que leurs habitats pour soulager les pressions croissantes qui touchent nos océans et écosystèmes.

Au cours des 20 dernières années, le gouvernement fédéral a réalisé des progrès limités quant aux engagements qu'il a pris pour protéger la biodiversité marine du Canada.

Pêches et Océans Canada et Parcs Canada ont établi 10 aires marines protégées, mais le réseau nécessaire pour protéger les espèces et les écosystèmes marins n'existe toujours pas.

De fait, le Canada a protégé moins de 1 p. 100 de ses océans et des grands lacs, mais il s'est engagé à une cible de 10 p. 100.

[Traduction]

Nous avons noté des progrès à plusieurs égards par rapport aux aires marines protégées au Canada, mais la protection reste en deçà de ce que prévoit la Loi sur les océans.

Étant donné que les mesures de conservation n'évoluent pas aussi vite que les pressions qui s'exercent sur nos océans, le gouvernement doit terminer le réseau d'aires marines pour protéger les espèces et les écosystèmes marins du pays.

[Français]

Les déversements de pétrole provenant de plateformes de forage en mer sont un risque important pour l'environnement marin. Notre audit a porté sur les offices des hydrocarbures extracôtiers Canada/Terre-Neuve-et- Labrador et Canada/Nouvelle-Écosse, et sur l'appui que leur fournissent les ministères fédéraux.

[Traduction]

Nous avons constaté qu'au quotidien, ces offices ont adéquatement géré les impacts environnementaux des activités pétrogazières extracôtières, mais avec leurs partenaires fédéraux, ils doivent faire plus pour se préparer pour un déversement majeur de pétrole.

Nous avons noté plusieurs lacunes qui limitent la capacité des offices à prendre en charge la gestion de l'intervention si les exploitants ne réagissent pas de façon appropriée en cas de déversement majeur de pétrole. Par exemple, les offices et les entités fédérales n'ont pas testé leurs plans communs ou leur capacité conjointe, et leurs rôles et responsabilités ne sont pas toujours clairement définis dans leurs plans d'intervention.

Ce rapport aborde aussi les garanties financières et les plafonds de responsabilité absolue dans quatre secteurs qui relèvent de la compétence du gouvernement fédéral : les mines dans le Nord, les marées noires provoquées par des pétroliers, les plateformes de forage en mer, et le nucléaire.

[Français]

Nous avons constaté que les limites de responsabilité des entreprises associées aux déversements provenant de plateformes de forage en mer et aux accidents nucléaires ne sont pas à jour et sont beaucoup plus basses que celles d'autres pays.

[Traduction]

Le gouvernement fédéral doit réviser ses plafonds de responsabilité absolue pour les installations nucléaires et le secteur du pétrole et du gaz extracôtiers.

Nous avons noté des systèmes adéquats quant aux garanties financières de l'ordre d'environ 11 milliards de dollars que détient le gouvernement pour couvrir le coût projeté de la remise en état des sites une fois ces installations fermées. En revanche, nous avons relevé plusieurs lacunes au plan de la surveillance des 500 millions de dollars que détient le gouvernement en garanties financières sur les mines exploitées dans le Nord du pays. Il s'agit notamment de garanties insuffisantes et de manques importants sur le plan des inspections réglementaires requises.

[Français]

Ce rapport inclut aussi une étude sur les subventions fédérales au secteur des combustibles fossiles. Lors des réunions du G20, en 2009, le Canada s'est engagé à rationaliser et à éliminer graduellement les subventions inefficaces visant les combustibles fossiles. Nous avons constaté que le gouvernement fédéral a agi selon cet engagement.

[Traduction]

Les dépenses fédérales directes au profit du secteur des combustibles fossiles ont diminué depuis 2000, et une part importante du soutien vise les technologies propres. Parallèlement, l'étude a montré que d'autres mesures fiscales restent en place et procurent un soutien important à l'extraction des combustibles fossiles.

Monsieur le président, je suis également heureux de présenter le rapport annuel sur les pétitions environnementales. Cette année, nous avons reçu 23 pétitions visant à obtenir de ministres fédéraux de l'information sur une gamme d'enjeux environnementaux.

[Français]

Les pétitionnaires voulaient savoir comment le gouvernement tient compte des répercussions sur l'environnement des activités proposées, des consultations publiques et de la transparence des processus décisionnels.

[Traduction]

La question de la toxicité des substances utilisées dans la fracturation hydraulique du gaz de schiste, et du peu d'information fournie au public sur ces substances, revient régulièrement dans les pétitions. Il y a 200 000 puits de fracturation hydraulique au Canada, et ce nombre est censé doubler au cours des 20 prochaines années. Parce que le secteur du pétrole et du gaz est exempté de l'exigence de déclarer les rejets de polluants, le gouvernement ne peut savoir si les Canadiens sont adéquatement protégés.

[Français]

Monsieur le président, en conclusion, les lacunes signalées dans ce rapport exposent les Canadiens à un risque de dommages environnementaux importants et aux coûts qui s'y rattachent. Je crains que ces lacunes n'empêchent le développement des ressources naturelles et la bonne intendance de l'environnement d'évoluer au même rythme.

[Traduction]

Cela termine, monsieur le président, ma déclaration d'ouverture. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Vaughan. Votre rapport couvre divers éléments. L'un des aspects qui me frappent est la difficulté de faire en sorte que les ministères et les personnes concernées travaillent ensemble. Il semble y avoir un problème de cloisonnement. D'après ce que vous avez étudié, formulerez-vous des commentaires sur ce cloisonnement et des recommandations pour faire en sorte que ces groupes travaillent ensemble? Cela pourrait-il être une façon d'améliorer le rendement?

M. Vaughan : Oui, cela est effectivement l'une de nos observations, et pas seulement dans ce rapport. Au cours de mes cinq années passées à ce poste, j'ai pu constater à maintes reprises que la collaboration à plusieurs ministères était difficile, et nous comprenons pourquoi. Lorsque vous travaillez dans un ministère, on vous encourage à produire vos rapports à l'intention de ce dernier, et les fonctionnaires font leur possible à cet égard. Cependant, nos vérifications portent souvent sur des enjeux transversaux touchant à plusieurs ministères, voire à de nombreux ministères. Pour donner un exemple précis, la vérification que nous avons préparée au sujet du secteur de l'exploitation extracôtière de pétrole et de gaz touchait les deux offices, Transports Canada, le ministère des Pêches et des Océans, Environnement Canada et la Garde côtière canadienne. Or, nous avons dit avoir constaté une confusion d'une ampleur surprenante au sujet du partage des responsabilités dans l'éventualité d'un déversement majeur de pétrole. C'est l'aspect mise en garde de cette vérification.

Le côté rassurant, qui répond à la deuxième partie de votre question, est que cette vérification nous a donné l'occasion de faire des recommandations pour inciter les ministères à travailler plus étroitement les uns avec les autres dans le but de départager leurs responsabilités respectives. Si je me fie à tout ce que j'ai entendu au cours des nombreuses réunions que j'ai eues avec les sous-ministres et avec la Garde côtière canadienne, on reconnaît l'existence du problème que vous avez souligné et l'importance de mettre au point une réponse coordonnée.

Le vice-président : Il semble y avoir un exercice d'équilibre entre la politique fournie par le gouvernement et l'exécution proprement dite qu'en font les ministères. Il ne s'agit pas de blâmer l'un ou l'autre des groupes. C'est une question de coordination. À ce titre, vos commentaires sont particulièrement les bienvenus.

M. Vaughan : De toute façon, nous ne nous prononçons pas au sujet des politiques. Nous sommes le Bureau du vérificateur général. Nous examinons toutefois l'aspect mise en œuvre de la question. Notre rôle n'est pas de dire qui a tort. Nous sommes là pour signaler les problèmes et suggérer des recommandations pour les régler et combler les lacunes.

Nous ne nous limiterons pas à celle-ci. Nous agirons de même pour d'autres vérifications où nous constaterons le même problème. Et je crois que vous l'avez bien cerné : il ne s'agit pas d'un problème stratégique, mais bien d'un problème de mise en œuvre.

La sénatrice Callbeck : Il y a deux sujets que j'aimerais aborder avec vous, mais avant ça, j'ai des questions sur les pétitions. Est-ce que n'importe qui peut présenter une pétition? Une pétition doit-elle compter un minimum de noms? Combien de temps le ministère met-il pour y réagir? À quel moment en êtes-vous informé? Est-ce par l'intermédiaire de vos vérifications?

M. Vaughan : Le processus pétitionnaire est en fait un terme impropre, car il émane de la Loi sur le vérificateur général qui, je crois, date de 1995. La pétition peut être signée par une seule personne, alors il ne s'agit pas d'une liste de centaines ou de milliers de signataires. Les résidents canadiens peuvent s'en prévaloir et ils doivent le faire en passant par nous. L'objectif du processus est de permettre aux Canadiens de poser directement des questions au gouvernement fédéral concernant les mandats dont il a la charge.

Essentiellement, nous recevons la pétition et l'acheminons au ministre responsable. Selon la loi, le ministre est tenu d'y répondre dans les 120 jours. À la fin de l'année, nous devons soumettre un sommaire des pétitions traitées et un aperçu du rendement obtenu en termes de réponse.

La sénatrice Callbeck : Si le ministre répond dans les 120 jours, et que la personne estime que la réponse donnée est inadéquate, y a-t-il un suivi ou si le processus s'arrête là?

M. Vaughan : Voilà une excellente observation. Nous interrogeons le demandeur pour mesurer dans quelle mesure la réponse le satisfait. Il y a un haut degré d'insatisfaction — cela a diminué un peu. Plus de 70 p. 100 disent qu'ils auraient préféré recevoir une autre réponse, mais affirment du même souffle être satisfaits du processus.

Ils peuvent récidiver, et certains l'ont fait. Nous avons l'exemple cette année d'un demandeur qui est revenu trois fois à la charge auprès de Santé Canada afin d'obtenir la réponse particulière qu'il recherchait. Je crois que les demandeurs peinent à formuler du premier coup des questions très précises relevant vraiment de la juridiction du gouvernement fédéral, et ils doivent souvent s'essayer une deuxième fois. Cela dépend en grande partie du demandeur.

La sénatrice Callbeck : En page 8 de votre sommaire, vous concluez par une déclaration que je tiens à lire ici, car il s'agit selon moi d'une déclaration très importante :

Compte tenu du rôle essentiel que jouent aujourd'hui les ressources naturelles dans l'économie canadienne, il est primordial que les mesures de protection de l'environnement suivent le rythme du développement économique. Dans ce rapport, nous avons constaté un certain nombre de pratiques encourageantes, mais de nombreuses lacunes également. Lorsque je les ajoute aux lacunes relevées dans nos rapports précédents et que je les inscris dans le contexte des risques et des défis que pose l'exploitation plus poussée des ressources naturelles, je suis inquiet de constater que les mesures de protection de l'environnement ne suivent pas le rythme du développement économique.

Comme je viens de le dire, il s'agit là d'une importante déclaration de votre part. Faites-vous des recommandations au gouvernement?

M. Vaughan : Oui.

La sénatrice Callbeck : Soit. Le gouvernement y donne-t-il suite?

M. Vaughan : Madame la sénatrice, je peux vous affirmer qu'il y a maintenant de nombreux exemples de cela. Notre processus fonctionne de façon à ce que nous puissions faire des recommandations. Ensuite, les ministères visés par nos vérifications répondent aux recommandations formulées : soit ils les acceptent soit ils les rejettent. La plupart du temps, ils les acceptent, et nous reviendrons un certain temps après vérifier s'ils ont fait ce qu'ils s'étaient engagés à faire.

On en a plusieurs exemples. L'an dernier, nous avons dit que les inspections de l'Office national de l'énergie devaient être améliorées, car elles ne suscitaient pas beaucoup de suivi. Dans son budget de 2012, le gouvernement a prévu plus d'argent pour permettre à l'ONE d'améliorer ses inspections.

Nous avions souligné il y a deux ans que l'intervention du gouvernement fédéral lors d'un déversement avait probablement été inadéquate. Le gouvernement a tenu compte de nos commentaires et la Garde côtière canadienne travaille maintenant à la restructuration de son centre de contrôle en vue d'améliorer la coordination des interventions en cas de déversement. Je pourrais continuer, mais je vais m'arrêter là.

Je crois que le système est efficace. Notre bureau est indépendant. Le Bureau du vérificateur général fait des recommandations objectives et impartiales pour aider à régler les problèmes que nous avons identifiés. La plupart du temps, le gouvernement prend les mesures nécessaires pour donner suite à nos recommandations.

La sénatrice Callbeck : Donc, de façon générale, vous êtes satisfaits de la façon dont procède le gouvernement.

M. Vaughan : En vertu du processus actuel, le gouvernement a le plus souvent pris les mesures nécessaires pour répondre à nos recommandations.

Il faut toutefois se poser une question importante : est-ce que le boom que connaît actuellement l'exploitation des ressources naturelles est associé à une expansion similaire en matière de protection environnementale à l'échelle fédérale? À notre avis, à l'échelle globale, la réponse est « non ». Les mesures de protection de l'environnement doivent être renforcées.

« Satisfaits » est un bien grand mot, mais dans le cadre de notre processus, nous identifions les problèmes et nous faisons des recommandations sur la façon de les régler. Le gouvernement s'engage à prendre les mesures nécessaires, puis nous faisons une vérification à cet effet.

La sénatrice Callbeck : Est-ce que votre budget a été coupé au cours des cinq dernières années, ou est-il demeuré stable?

M. Vaughan : Le Bureau du vérificateur général n'est pas sous la responsabilité des ministères. Pour répondre à votre question, le Bureau a réduit volontairement son budget de 8 p. 100 je crois.

La sénatrice Callbeck : Avez-vous votre propre budget?

M. Vaughan : Oui.

La sénatrice Callbeck : A-t-il été réduit?

M. Vaughan : Mon budget et celui de mes prédécesseurs ont été réduits au cours des trois ou quatre dernières années, avant la dernière vague de réductions budgétaires ministérielles. Nous avions déjà réduit notre budget; nous avions donc déjà « effectué notre paiement ». Notre financement est stable. De façon plus importante, il y a maintenant dans nos services une quarantaine de personnes affectées aux vérifications environnementales, et ce nombre est stable depuis que j'y travaille; nous avons perdu environ quatre employés à temps plein.

La sénatrice Callbeck : Depuis combien de temps travaillez-vous au Bureau?

M. Vaughan : Bientôt cinq ans.

Le sénateur Finley : Mes questions vous sembleront peut-être un peu éparpillées, mais j'essaie de comprendre le contexte des enjeux relatifs aux ressources naturelles et aux catastrophes environnementales. Ces questions soulèvent les passions à tous les niveaux. Je ne savais pas jusqu'à tout récemment que le vérificateur général avait un organisme distinct.

Premièrement, est-ce qu'il y a d'autres organisations qui relèvent du vérificateur général et qui ont un mandat particulier comme le vôtre?

M. Vaughan : Non. En fait, nous faisons partie intégrante du Bureau du vérificateur général. Nous utilisons les mêmes méthodes et les mêmes normes d'assurance. Notre personnel travaille au sein de divers groupes, mais c'est le seul sujet spécialisé. Notre mandat a été établi en vertu d'une loi du Parlement de 1995, dans le but de recueillir des renseignements précis sur les questions relatives à la protection de l'environnement et au développement durable.

Le sénateur Finley : Vous dites que 40 personnes travaillent pour votre bureau. Vous pouvez peut-être m'expliquer une chose. Le domaine des ressources naturelles est maintenant grandement axé sur les technologies et les sciences, du moins je l'espère. La situation est similaire avec l'environnement, même s'il s'agit d'un domaine distinct. De grands enjeux technologiques sont associés à presque tous les domaines scientifiques. Il y a également l'aspect financier, notamment les assurances.

Comment arrivez-vous à avoir un tel niveau d'expertise avec 40 personnes? Est-ce que votre travail est de nature technique et scientifique, ou se fonde-t-il plutôt sur les pistes de vérification? Si vous misez sur les pistes de vérification, avez-vous du mal à gérer les volets scientifiques et technologiques des événements, et à savoir ce qui est bon et ce qui ne l'est pas?

M. Vaughan : C'est une bonne question. Vous avez raison, la science relative à toutes les questions environnementales — comme la toxicité des produits chimiques — est maintenant très sophistiquée et complexe. Les professeurs d'université consacrent tout leur temps à ces questions.

En ce qui a trait à l'étendue de nos travaux, je dirais que la moitié de notre personnel a fait des études en environnement. Nous avons des biologistes, des chimistes, des physiciens et des juristes spécialistes des questions d'environnement. L'autre moitié est composée d'experts en vérification. Par exemple, M. Shaw est comptable agréé. Je crois que ce mariage de personnes d'expérience est fantastique. En fait, les vérifications du Bureau du vérificateur général, fondées sur des données probantes, sont parmi les plus rigoureuses au monde. Des gens du monde entier nous consultent sur notre façon de réaliser les vérifications et de fournir des garanties au Parlement.

Il est très important pour nous de bien faire les choses, pour préserver la réputation du bureau, et parce que nous travaillons pour vous. Cela étant dit, nous ne pouvons pas tout voir. Je crois que vous avez raison; le secteur des ressources naturelles est très complexe, et chaque sous-secteur a son propre domaine de spécialité. C'est très compliqué. Nous ne prescrivons pas des règles de conduite dans tous les domaines. Nous ne disons pas : « Voilà la science que devrait appliquer le ministère. » Nous demandons plutôt au gouvernement : « Que tentez-vous de faire? Quels sont vos engagements? Quels programmes appuyez-vous? Combien coûtent-ils? Est-ce que leurs objectifs ont été atteints? » Si la réponse à la dernière question est « Non », alors nous expliquons l'écart au Parlement et nous recommandons une façon de le combler.

Quarante personnes travaillent pour nous. Si on compare ce nombre aux dizaines de milliers de personnes qui travaillent dans les divers ministères, on ne fait pas le poids. Ce que nous voulons dire, c'est : « Voilà ce que nous pensons que vous devriez faire. » Du point de vue de la vérification, il est beaucoup plus méthodique et juste de dire : « Voilà les objectifs que devait atteindre votre programme. Ont-ils été atteints, oui ou non? »

Le sénateur Finley : Cette question donne lieu à tout un éventail d'autres questions, je suppose. Je suis surpris de voir que 40 personnes — cinq experts en physique, cinq chimistes, biologistes, peu importe — doivent réaliser cette tâche énorme, si on pense à tous les enjeux relatifs à l'environnement et aux ressources naturelles que nous avons connus au cours des 20 ou 25 dernières années. Voilà une première question, et il s'agit plutôt d'un commentaire. Cette tâche me paraît très difficile à réaliser. Comment faites-vous le tri? Avez-vous un système en place à cet effet? Sur quoi se fonde- t-il? Sur la couverture médiatique? Les pétitions? Les dénonciateurs?

M. Vaughan : Je demanderais peut-être à Mme Leach d'élaborer sur le sujet, puisque nous réalisons actuellement un processus de planification stratégique, qui est fondé sur l'importance relative. Notre système se fonde sur l'importance de deux choses. D'abord, quel financement est accordé au programme fédéral et ensuite, quels sont les risques qu'il ne fonctionne pas? La deuxième question ne porte pas tant sur l'aspect financier du programme, mais bien sur son risque d'échec.

Par exemple, le budget des offices extracôtiers est plutôt modeste. Celui de la Nouvelle-Écosse est de 40 millions de dollars, je crois, et celui de Terre-Neuve-et-Labrador est d'environ 80 millions de dollars. Si on compare ces budgets aux milliards de dollars consacrés aux autres programmes fédéraux, le seuil d'importance relative n'est pas atteint. Toutefois, en cas d'accident catastrophique, comme celui de Deepwater Horizon, cet élément devient important.

Nous faisons un tri, ou une planification stratégique, en fonction du risque. Le choix ne se fait pas en fonction de la couverture médiatique. Il tient compte des pétitions, mais n'est pas dicté par elles. Nous passons en revue les programmes fédéraux clés et les risques qui y sont associés.

Le sénateur Finley : Êtes-vous responsable de la décision finale quant au choix du projet ou à sa portée?

M. Vaughan : De nombreux employés du Bureau du vérificateur général s'occupent du processus. Je peux faire une recommandation, mais la décision finale revient au responsable des produits, Neil Maxwell, qui sera commissaire par intérim à partir du mois d'avril. Il examine toutes les vérifications sur le rendement, les vérifications législatives du BVG de même que celles du vérificateur général du Canada. Nous devons respecter un processus étant donné que nous faisons partie intégrante du Bureau du vérificateur général; nous ne pouvons pas nous dissocier des autres secteurs du bureau.

Le sénateur Finley : Je suppose, étant donné que le nombre de personnes au sein de votre équipe de vérification est petit comparativement au grand univers des ressources naturelles et de l'environnement, que vous misez beaucoup sur la confiance. Si vous dites : « Le ministère ABC a promis de faire telle chose, » et que vous faites une vérification ultérieure pour déterminer s'il a tenu sa promesse, je suppose que vous devez avoir confiance en ce qu'il vous dit ou en son opinion quant aux mesures prises. Est-ce que cela vous pose problème?

M. Vaughan : Ronald Reagan disait : « Faites confiance, mais vérifiez. » À titre d'exemple, le chapitre qui vous a été présenté sur les offices des hydrocarbures extracôtiers, qui comprend 25 ou 30 pages, est associé à quelque 10 000 éléments de preuve. Ce sont des rapports. De par la loi, nous avons accès à tous les documents du gouvernement, à l'exception des documents confidentiels du Cabinet. Si nous affirmons quelque chose dans ces rapports, vous pouvez y faire confiance. Le niveau d'assurance est très élevé; tous les rapports du BVG sont fondés sur des données probantes.

Je vais vous donner un exemple. Si un événement se produit après la période visée par la vérification, nous ajouterons un court paragraphe qui relatera les propos du ministère. Cette partie du rapport n'aura pas été assujettie à la rigueur habituelle des vérifications complètes. Ces cas sont assez rares. Je le répète, les vérifications constituent un instrument important pour fournir une garantie aux membres du Parlement; elles ne se fondent pas sur nos opinions, mais bien sur les données probantes fournies par les équipes du BVG, qui sont formées de personnes travaillantes et très professionnelles. Les Canadiens devraient être fiers de notre système. Nos vérifications sont associées à une garantie. Toutes les affirmations des rapports sont appuyées par des données probantes.

Le sénateur McInnis : En ce qui concerne les garanties financières pour les risques environnementaux, vous avez calculé que le gouvernement fédéral reçoit, de diverses sources, quelque chose comme 11,6 milliards de dollars, et vous avez dit que vous n'étiez pas certain que ce financement serait suffisant pour couvrir les coûts de démantèlement et de restauration. Je crois qu'il doit être difficile de calculer les coûts éventuels, par exemple — que Dieu nous garde — d'un déversement de pétrole provenant du gisement d'Hibernia, d'un pétrolier ou d'un projet gazier désactivé en Nouvelle- Écosse. Comment procédez-vous? Comment faites-vous vos calculs pour affirmer que 11,6 milliards de dollars ne sont pas suffisants?

M. Vaughan : Je peux demander à mon collègue M. Shaw, mais en bref, nous n'avons pas fait les calculs nous- mêmes. Nous avons regardé les modèles et les procédures du gouvernement pour faire ces calculs. Ensuite, nous avons demandé s'ils avaient l'air suffisamment crédible. Nous ne dirions pas : « Le gouvernement a parlé de 11,6 milliards de dollars, mais nous pensons que ce devrait être 12,4 milliards de dollars ». Cependant, nous allons faire preuve d'esprit critique et demander : « Est-ce que cela a l'air d'un processus crédible pour en arriver à ce montant? »

Nous avons dit que, en ce qui concerne les garanties pour le secteur nucléaire, les 11 milliards de dollars avaient vraiment semblé raisonnables compte tenu de toutes les étapes qu'ils doivent suivre. Ils les examinent tous les trois à cinq ans. Nous avons dit que cela donnait l'impression d'être quelque chose de potentiellement rassurant pour les gens.

En revanche, s'agissant des 500 millions de dollars pour les mines au nord du 60e parallèle, nous avons trouvé trois exemples où il y avait un manque à gagner en fonction des propres calculs du gouvernement. Les exploitants miniers étaient censés verser plus d'argent que le gouvernement a reçu. Là encore, nous dirions : « Le gouvernement a dit 500 millions de dollars. Les calculs devraient probablement plus être faits selon la méthode du gouvernement. »

Le sénateur McInnis : De quelle latitude le gouvernement dispose-t-il pour accroître le montant? Le projet est commencé. Comment doit-il procéder?

M. Vaughan : Le principe est le même, au fond que... je suis certain que vous le savez, monsieur. À mon sens, c'est comme faire une mise de fonds sur un appartement de location. Le propriétaire est libre de demander une caution de trois ou quatre mois de loyer. De même, le gouvernement fédéral fixe le seuil des garanties. Il le fait à partir de calculs entre ce que l'exploitant propose — il embauche un expert indépendant pour étudier les montants que l'exploitant et le gouvernement ont proposés pour déterminer ce que le niveau devrait être dans le secteur minier. Nous avons dit qu'il s'agissait d'un bon système. Nous avons aussi dit que les modèles qu'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada utilise sont crédibles et que les systèmes de vérification par un tiers convenaient à la situation. S'il y a des cas où ils sont inadéquats, le gouvernement fédéral peut déterminer qu'il faut exiger un montant plus élevé de cette entreprise en particulier.

Le sénateur McInnis : Je vais maintenant parler du gaz de schiste, qui est du ressort des provinces, même si je suis conscient du fait que le gouvernement fédéral et les provinces mènent actuellement une étude sur la fracturation hydraulique. Les provinces ou le fédéral sont-ils en mesure de donner des garanties à cet égard? J'ai été stupéfait d'apprendre qu'il y avait 200 000 puits de fracturation hydraulique. Qu'arrive-t-il dans ces cas au plan de l'eau potable et des dommages à l'environnement?

M. Vaughan : Il va falloir que je vous revienne sur la question des garanties. Notre mandat consiste uniquement à examiner le gouvernement fédéral. Comme vous l'avez dit, ces questions sont surtout de compétence provinciale, alors les permis sont délivrés par les provinces, ce qui n'est pas de notre ressort.

Il y a deux ans, le bureau du vérificateur général du Québec a fait rapport de questions concernant le processus d'obtention d'un permis et d'autorisation et les garanties qui s'y rapportaient, mais nous pouvons faire un suivi et vous donner des renseignements à ce sujet. Ce que nous avons dit plus généralement est que là où il y a compétence fédérale — et elle est surtout provinciale — par exemple lorsqu'il s'agit de déterminer si les produits chimiques utilisés sont considérés comme toxiques, il est clair que la question relève du gouvernement fédéral. Nous avons posé deux questions : Quels produits chimiques utilise-t-on? Présentent-ils des risques? En ce moment, Santé Canada et Environnement Canada disent qu'ils l'ignorent. C'était aussi simple que cela. Nous l'avons joint comme vérification, car nous avons conclu qu'il n'y avait en ce moment aucun programme de gaz de schiste à auditer à l'échelon fédéral.

Le sénateur McInnis : Oui, c'est une question très chargée qui se rapporte aux aires marines protégées. Apparemment, nous en sommes à 1 p. 100 de ces aires alors que nous devrions être à 10 p. 100 selon certains accords qui ont été mis en œuvre.

Au plan de la procédure, comment créez-vous ces aires? Je présume que les coûts sont associés à tout parc marin ou aire marine protégée. Combien faut-il de temps? En Nouvelle-Écosse, par exemple, il y a une zone vierge sur la rive orientale qui entrerait probablement dans cette catégorie, mais comment ces choses se passent-elles? J'essaie d'imaginer des fonctionnaires qui regarderaient, mais ensuite je pense à Canards Illimités, au Ecology Action Centre, aux fondations et à ces types d'organismes qui ont vu le jour. Comment faire pour accélérer le processus?

M. Vaughan : Mes collègues auront aussi l'occasion de parler, car je peux être un moulin à paroles. Je vais demander à M. George Stuetz d'intervenir.

Le processus est long. Par exemple, dans la réserve de parc national de Gwaii Haanas, il a fallu 20 ans. Pour ce qui est des négociations, en plus des groupes que vous avez mentionnés, il y a les communautés de pêcheurs et ensuite, si les aires marines protégées sont créées, il y a des restrictions. Les communautés sont touchées, alors c'est à la fois une question d'économie et de subsistance. Les Premières nations sont essentielles à ces consultations, qui peuvent durer entre cinq et 20 ans. Les océans sont de compétence fédérale sous le régime de la Loi sur les océans, mais le processus est complexe. Au bout du compte, ce fut un chapitre dans lequel je ne me suis pas beaucoup attaché au 1 p. 100, car chacune des aires marines protégées qui ont été créées est une merveille; les Canadiens devraient en être fiers. Le processus est complexe et les consultations le sont aussi.

Le sénateur McInnis : Est-ce que Parcs Canada en fait partie? S'agit-il d'un parc national, par exemple?

M. Vaughan : C'est une analogie semblable. Parcs Canada est l'un des ministères et l'autre est Pêches et Océans Canada. Parcs Canada en a deux et Pêches et Océans a les huit autres. C'est la même analogie. C'est comme ce que nous savons concernant Parcs Canada, quand nous allons visiter le parc national du Canada Fundy, ou Banff ou Jasper. On les appelle souvent des parcs marins. Parce qu'il y en a tellement qui ne se trouvent pas sur le bord de l'océan, les Canadiens ont du mal à les visualiser. Bien des personnes au Québec, par exemple, sont allées voir Tadoussac et le Saguenay/St-Laurent. C'est l'une des destinations touristiques les plus importantes au Québec pour voir les baleines. Nous avons dit dans ce chapitre que, en plus de fournir un havre à ces espèces, ces parcs génèrent plus de 150 millions de dollars par année de revenus touristiques. La création de ces aires marines protégées suppose des coûts et des compromis, mais aussi des retombées économiques.

George Stuetz, directeur, Bureau du vérificateur général du Canada : Vous parliez de la façon dont ces aires sont organisées. Il y a Parcs Canada et Pêches et Océans Canada. Environnement Canada a aussi un rôle à jouer, mais nous ne l'avons pas audité.

Le processus qu'ils suivent consiste simplement à cerner un certain nombre de sites potentiels. Ils procèdent à une grande quantité d'évaluations scientifiques pour déterminer ce que ces sites ont ou non à apporter. Ils finissent par en choisir un certain nombre et consultent ensuite l'industrie, les intervenants, les communautés autochtones, d'autres ministères, et cetera, pour connaître leur avis concernant les aspects sociaux, économiques et environnementaux d'un site en particulier.

Ce processus prend habituellement pas mal de temps. Il faut parfois moins de temps pour procéder à l'examen scientifique qu'il n'en faut pour faire des consultations et prendre en compte l'opinion de chacun. À un moment donné, les ministres concernés décident de déclarer l'un de ces sites aire marine protégée et de suivre le processus législatif approprié pour ce faire.

[Français]

La sénatrice Chaput : Ma première question concerne les pétitions. Si j'ai bien compris, lorsque vous recevez une pétition, vous en évaluez la pertinence avant de la faire parvenir à un ministère?

M. Vaughan : En premier lieu, nous déterminons si elle relève de la compétence du gouvernement fédéral, car nous avons reçu des pétitions qui relevaient de la compétence d'autres gouvernements, provinciaux, municipaux ou autres.

La sénatrice Chaput : Si elle n'est pas pertinente, vous la retournez à la personne et vous lui dites que le dossier est clos en ce qui vous concerne?

M. Vaughan : Pour nous, c'est fini, mais nous pouvons faire des suggestions quant à la compétence pertinente pour traiter leur pétition, qu'elle relève du gouvernement provincial ou du secteur privé. Nous proposons des idées quant aux étapes ultérieures qu'ils devront suivre, mais de notre point de vue, ici s'arrête la demande, car elle ne fait pas partie du mandat du gouvernement fédéral.

La sénatrice Chaput : Lorsqu'elle est remise au ministère approprié, celui-ci est responsable d'y répondre. Recevez- vous copie de cette réponse ou est-ce qu'à ce point ce n'est plus de votre responsabilité?

M. Vaughan : Oui, nous recevons copie de la part du ministère ou des ministères. Dans bien des cas, plusieurs ministres doivent répondre, par exemple, une pétition qui concernerait la santé des Canadiens toucherait les ministres de Santé Canada, Environnement Canada et autres ministères.

La sénatrice Chaput : Il se pourrait qu'une pétition touche plusieurs ministères?

M. Vaughan : C'est exact.

La sénatrice Chaput : Mon autre question concerne les garanties financières liées aux risques environnementaux. C'est au chapitre 2. De quelles informations avez-vous besoin pour évaluer la suffisance des garanties financières?

M. Vaughan : Il y a deux façons de faire. Nous avons examiné les processus des ministères pour évaluer les montants des garanties financières. Après avoir examiné le modèle du ministère, nous avons finalement noté qu'il y avait des lacunes dans le processus de détermination des garanties financières pour les mines dans le Nord du Canada. Nous avons fait une vérification du processus de vérification pour déterminer le montant final et nous avons noté les lacunes dans le rapport.

Il y a une deuxième façon de faire. Ce sont les limites et responsabilités absolues. Cela s'applique aux installations nucléaires, aux plateformes de forage en mer et aux pétroliers. Pour ce faire, nous avons comparé des limites et responsabilités d'autres pays. Par exemple, nous avons commencé par évaluer les limites ici au Canada pour les plates- formes de forage et nous les avons comparées à celles de la Grande-Bretagne, de la Norvège, du Groenland et des États-Unis.

La sénatrice Chaput : Et lorsque vous parlez de processus adéquats, est-ce que vous avez un guide général pour les processus et ensuite vous vous ajustez tout dépendant de la situation?

M. Vaughan : Il y a des guides du Secrétariat du Conseil du Trésor pour les systèmes de gestion en général. Il y a aussi les pratiques et les guides de chaque ministère et nous les avons examinés et s'il y avait des problèmes dans les audits, nous les avons notés avec les pratiques ou avec les guides.

[Traduction]

Le sénateur Finley : J'ai une question à ajouter à celles de mon collègue concernant les pétitions. Ma mémoire pourrait me jouer des tours. À mon âge, c'est monnaie courante.

La commissaire à l'environnement et au développement durable peut accepter les pétitions et les utiliser, mais pas le vérificateur général?

M. Vaughan : Permettez-moi de poser la question à Mme Leach.

Kimberley Leach, directrice principale, Bureau du vérificateur général du Canada : Non, le vérificateur général peut aussi les utiliser pour informer ses employés.

Le sénateur Finley : Ce n'était pas très clair. Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Je suis contente d'avoir la chance de vous parler. Le ministère de l'Environnement joue un rôle d'intendance dans l'atteinte et le maintien d'un environnement propre, sécuritaire et durable. On stipule notamment que les programmes du ministère visent principalement l'atteinte d'un environnement propre en minimisant les menaces que représente la pollution pour les Canadiens ainsi que pour leur environnement; un environnement sécuritaire en outillant la population canadienne pour prendre des décisions éclairées quant aux conditions changeantes du temps, de l'eau et du climat.

Le mandat du ministère de l'Environnement est très large. Ce n'est pas seulement une question de risque à évaluer puisqu'il existe beaucoup d'incertitude concernant les questions environnementales et cela inquiète les Canadiens. Et contrairement à un risque, l'incertitude est très difficile à prévoir et à planifier.

Par ailleurs, le ministère de l'Environnement, quand on lit son mandat, ça devrait nous rassurer mais en même temps, à cause de cette incertitude, c'est très difficile d'y arriver au départ. Quand on exploite nos ressources naturelles, beaucoup de coûts sont externalisés et on n'est même pas capable de les évaluer, peut-être pas toujours en tout cas.

Vous avez fait de la vérification et des analyses de conformité. Comment le Canada se compare-t-il avec l'étranger? Vous nous avez dit que d'autres pays venaient voir comment vous faisiez la vérification et que le Canada était un modèle. Comment le ministère de l'Environnement se compare-t-il aux autres dans le monde sur le plan de la mise en place de programmes?

M. Vaughan : Tout d'abord, il y a un mandat dans la loi pour Environnement Canada. Évidemment, c'est très large et c'est clair, c'est de bien protéger la santé des Canadiens et aussi de bien protéger la qualité environnementale. Je crois que la question dépend des dossiers.

Par exemple, le Canada a annoncé qu'il adoptait l'approche des États-Unis pour les changements climatiques, dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Sur ce plan, le Canada a décidé d'adopter l'approche du gouvernement des États-Unis. Il y a d'autres exemples tels les évaluations des substances toxiques, par exemple, où le Canada est vraiment un leader.

L'Union européenne regarde avec grand intérêt l'approche du Canada en ce qui concerne l'évaluation de milliers de substances chimiques qui ont le potentiel de représenter un risque pour la santé des Canadiens. Il y a aussi des approches pour protéger la qualité de l'eau. Par exemple, nous avons noté qu'il y avait des problèmes avec l'approche du gouvernement fédéral pour la surveillance des rivières et des lacs. Une étude a été présentée à la réunion de Davos, il y a trois semaines, et on a comparé le Canada à d'autres pays. Je crois que le Canada figure à la 27e place.

Il y a aussi des comparaisons avec l'OCDE, où le Canada est comparé avec les autres pays. Nous avons comparé les approches spécifiques dans les différents dossiers.

La sénatrice Bellemare : La deuxième partie de ma question a trait justement avec le budget des dépenses. Je ne sais pas si vous pouvez répondre à cette question. Dans votre analyse de vérification de conformité, vous avez fait un certain nombre de recommandations et de remarques. On voit qu'au niveau des dépenses budgétaires, il y a quand même eu des augmentations dans le budget total, il y a eu des secteurs où ça a diminué et d'autres où ça a augmenté.

Êtes-vous en mesure de faire des liens entre votre étude de vérification et l'allocation budgétaire du ministère de l'Environnement par rapport à sa mission et à ses programmes? Êtes-vous en mesure de faire des suggestions et dire que finalement, les subventions et contributions ont peut-être trop augmenté par rapport à autre chose?

M. Vaughan : Oui. Je crois que c'est une très bonne question. Il s'agit d'une grande préoccupation. Je peux vous donner quelques exemples parce que quand nous avons examiné les programmes pour ce rapport, évidemment il y a des réactions budgétaires pour 2011 et 2012. Mais jusqu'à maintenant, il est encore difficile pour le ministère d'identifier spécifiquement quels sont les impacts des réductions budgétaires dans les programmes que nous avons évalués. Nous connaissons le budget total du ministère et nous avons une perspective globale du budget pour chaque programme.

Jusqu'à maintenant, c'est encore très difficile de déterminer quels sont les impacts des réductions budgétaires pour le programme de Pêches et Océans Canada pour protéger les écosystèmes marins, par exemple. Finalement, je crois que vous avez raison de dire que c'est très important d'avoir un portrait clair des budgets pour chaque programme et de connaître les impacts des changements dans ces budgets.

La sénatrice Bellemarre : En fait, il y a eu des réductions mais il y a eu des augmentations dans certains secteurs. Il y a peut-être des réallocations à faire, mais je suppose que cela dépasse les limites de votre mandat.

M. Vaughan : Oui, bien sûr, et comme vous l'avez noté, il y a aussi des augmentations dans le budget. Par exemple, j'ai mentionné une augmentation dans le budget pour le Bureau national de l'énergie pour faire les inspections des pipelines. Il y a aussi une augmentation, je crois, dans le budget de la garde côtière canadienne pour des projets d'achat de nouveaux équipements.

Donc, il y a des réductions mais aussi des augmentations, et, parce que les impacts sont encore en cours de se produire, il est difficile d'identifier spécifiquement les budgets finaux. Mais je pense que vous avez raison, madame la sénatrice, car c'est évidemment très important pour avoir une bonne perspective de ce que sont les budgets spécifiques de chaque programme.

[Traduction]

Le sénateur Black : Merci, monsieur Vaughan et merci aussi à vos collègues pour le travail que vous faites, pas seulement aujourd'hui, mais en permanence. C'est un travail très important.

J'ai passé la majeure partie de ma carrière dans le secteur énergétique, alors je comprends très bien l'importance du permis social, et je sais que c'est une question dont vous êtes très conscient. Dans cette optique, et compte tenu des expériences que j'ai vécues pendant de nombreuses années avec le ministère des Pêches et des Océans, Parcs Canada et d'autres organismes du gouvernement fédéral, il est très important que les Canadiens estiment que le travail que vous faites est pertinent. S'ils ne le voient pas de cet œil, tout le concept de l'industrie face aux groupes environnementaux et au permis social s'érode.

Ma question est simple, et je ne veux pas que vous pensiez que j'ai des intentions cachées en la posant : dans quelle mesure l'optique dans laquelle vous examinez les projets est-elle pratique?

M. Vaughan : Je vais laisser Mme Leach vous répondre. Cependant, très brièvement, je pense que nous sommes très pratico-pratiques. Je dirais aussi que nous ne prétendrons pas avoir travaillé dans le secteur énergétique pendant 20, 30 ou 40 ans. Nous faisons appel à une vaste gamme d'experts de l'extérieur qui nous offrent des conseils indépendants.

De plus, nous travaillons d'arrache-pied avec les deux offices des hydrocarbures extracôtiers. Au bout du compte, ils ont parlé de nous en bien tant en public qu'en privé. Par exemple, Max Ruelokke, PDG sortant de l'Office Canada- Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers, quelqu'un pour qui j'ai un immense respect, m'a envoyé une note en privé pour me dire « Je suis convaincu que votre audit permettra d'améliorer les décisions de gestion et les opérations de l'office ».

Nous mettons totalement l'accent sur les aspects pratiques; nous nous tenons loin des hypothèses fondées sur la théorie.

Mme Leach : Je vais parler principalement de l'audit des offices des hydrocarbures extracôtiers, soit le chapitre 1 du rapport. Nous avons entamé le processus il y a deux ou trois ans. Nous avons publié un rapport en décembre 2010 intitulé Les déversements de pétrole provenant de navires, dans lequel nous avons fait des commentaires au sujet de l'état de préparation de Transports Canada et d'autres organismes advenant un déversement majeur de pétrole provenant d'un navire. Nous n'avions pas examiné les plateformes pétrolières dans ce rapport. D'un autre côté, l'ampleur de la catastrophe de la plateforme Deepwater Horizon était sans précédent.

À l'époque, nous étions venus témoigner devant un comité pour discuter du chapitre Les déversements de pétrole provenant de navires. Les gens nous ont posé des questions sur les offices et la situation des activités extracôtières. Voilà un exemple où notre processus de planification stratégique inclurait un tel enjeu. En fait, un décret fédéral nous a demandé de mener un audit sur les offices et de présenter les questions d'importance. Nous l'avons fait en raison de ce décret.

Ce n'est qu'un petit ajout concernant les aspects pratiques.

Le sénateur Black : Comment collaborez-vous avec les organismes de réglementation provinciaux, le cas échéant?

M. Vaughan : C'est une bonne question. Ils ne sont pas présents; ils ne pourront donc pas vous répondre, mais nous avons en fait démarré notre audit sur les offices des hydrocarbures extracôtiers en collaboration avec nos homologues provinciaux, parce que les offices sont de compétence fédérale et provinciale.

Nos homologues provinciaux ont décidé de ne pas poursuivre l'audit pour des raisons qui leur sont propres. Selon ce que j'en ai compris, ils ont décidé de ne pas aller plus loin, parce qu'en vertu de l'Accord atlantique il y a une partie sur la protection des renseignements et que les organismes prévoyaient que cela nuirait à leur capacité d'avoir accès à certains documents. Néanmoins, nous avons décidé de poursuivre l'audit, et j'en suis heureux. Nous avons obtenu la pleine coopération des deux offices et de tous les organismes fédéraux avec lesquels nous avons travaillé.

Voilà un exemple. Nous avions l'intention au départ de mener l'audit en collaboration, mais ce n'a malheureusement pas été le cas. Cependant, je crois que c'est important de le faire lorsque cela touche un domaine de compétence provinciale et fédérale. L'environnement est principalement de compétence provinciale; bref, selon moi, c'est extrêmement important de collaborer avec nos homologues provinciaux dans la mesure du possible.

Le sénateur Black : Est-ce ce que vous avez l'intention de faire ou est-ce que vous le faites déjà?

M. Vaughan : C'est ce que nous faisons en théorie. Ce ne m'est jamais arrivé au cours de mes cinq années, mais ce n'est pas faute d'avoir essayé.

Diverses raisons l'expliquent. Nos méthodologies et nos procédures d'audit prennent au moins 12 ou 14 mois. Nous avons différentes normes. Les calendriers sont différents. Cela revient à la question du sénateur sur le comment et le quand de la planification. La synchronisation de ces éléments est difficile.

Nous avons un accord avec les auditeurs provinciaux en Alberta en vue d'examiner le plan fédéral-provincial et la surveillance continue des sables pétrolifères. C'est prévu pour 2014.

Je crois que c'est important que les parlements provinciaux et le Parlement du Canada aient une vue d'ensemble la plus exhaustive possible lorsqu'il s'agit d'un programme ou d'un domaine de compétence partagée.

La sénatrice Callbeck : Pour ce qui est du secteur des combustibles fossiles, vous avez parlé de mesures fiscales, et vous avez dit que cela procure un soutien important à ce secteur. Qu'entendez-vous par « important »?

M. Vaughan : C'est un grand honneur pour nous de venir au Sénat. J'aimerais m'assurer que tous mes collègues ont l'occasion de prendre la parole. Voici l'un de nos jeunes et talentueux professionnels qui nous quittera dans un mois. C'est lui qui s'est occupé du gros du travail dans ce dossier, et j'aimerais lui céder la parole.

Liohn Donenfeld-Sherer, professionnel de la vérification, Bureau du vérificateur général du Canada : Pourriez-vous répéter la question? Je m'installais à la table et j'ai manqué une partie de votre intervention.

La sénatrice Callbeck : C'est au sujet du secteur des combustibles fossiles. Votre document dit que « l'étude a montré que d'autres mesures fiscales restent en place et procurent un soutien important à l'extraction des combustibles fossiles. » Qu'entendez-vous par « un soutien important »?

M. Donenfeld-Sherer : C'est difficile de le chiffrer exactement. Le ministère des Finances du Canada, en raison de la nature des mesures fiscales, ne peut tout simplement pas chiffrer le montant de certaines mesures et ne peut pas chiffrer avec précision bon nombre des prévisions.

Je vous donne l'exemple de la déduction pour amortissement accéléré pour le secteur des sables pétrolifères, qui était évaluée à 300 millions de dollars par année. Cette déduction est éliminée progressivement, mais au cours de notre étude cela a représenté environ 1,5 milliard de dollars.

Voici un autre exemple. Il y a les crédits d'impôt sur les actions accréditives, qui ne sont pas exclusifs au secteur des énergies fossiles; un certain nombre de secteurs des ressources naturelles, dont le secteur minier, y ont accès. Au cours de notre étude, cela a atteint un peu moins de 2 milliards de dollars. Le ministère des Finances du Canada n'est pas en mesure de dire exactement le montant qui a été versé aux promoteurs du secteur des énergies fossiles par rapport aux promoteurs du secteur minier.

Ensuite, d'autres déductions pour amortissement accéléré sont disponibles pour le secteur des combustibles fossiles, mais le ministère des Finances du Canada ne les a pas du tout chiffrées. Pour répondre à votre question, nous considérons comme importantes « des sommes potentielles de plusieurs milliards de dollars au cours des cinq dernières années. »

La sénatrice Callbeck : Plusieurs milliards.

Mon autre question porte sur les garanties financières dont il est fait mention dans votre document. Je crois que vous avez dit avoir comparé nos limites avec celles des autres pays et que vous avez dit que nos limites sont inférieures. Je crois que le document mentionne aussi qu'elles sont même inférieures à celles des États-Unis. Nos limites doivent donc être extrêmement basses, si c'est vrai, parce qu'en ce qui concerne le déversement de pétrole de BP dans le golfe du Mexique, le plafond de responsabilité était de 75 milliards de dollars et les coûts se chiffrent maintenant à plus de 40 milliards, n'est-ce pas?

M. Vaughan : Oui. Le plafond de responsabilité absolue aux États-Unis est de 75 millions de dollars. Lorsque la commission de la Maison-Blanche a examiné ce qui s'était passé lors de la catastrophe de la plateforme Deepwater Horizon, l'une des observations était que la limite était absolument inadéquate. Le montant actuellement débattu devant les tribunaux est de 70 milliards. Cependant, il est important de dire que la responsabilité absolue est en gros une limite de responsabilité sans égard à la faute, comme c'est le cas aux États-Unis, puis il y a les coûts qui excèdent le plafond établi pour le Canada atlantique, à savoir 30 millions de dollars. La dernière révision du plafond remonte à plus de 20 ans. Cela ne veut pas dire que ce serait le montant total que les pollueurs devraient assumer, mais pour en obtenir davantage, il faudrait que les tribunaux déterminent qu'il y a eu négligence ou faute.

La sénatrice Callbeck : Est-ce que le gouvernement s'affaire activement à hausser les limites?

M. Vaughan : Oui. Le gouvernement reçoit nos rapports deux ou trois mois avant leur publication. Le ministre des Ressources naturelles, M. Oliver, a dit que le ministère entamerait la révision des plafonds de responsabilité absolue en vue de les arrimer à ce qui se fait ailleurs.

Madame la sénatrice, il y avait également un décalage en ce qui a trait aux installations nucléaires, et la dernière révision à cet égard remonte à plus de 30 ans. La limite se situe à 75 millions de dollars. Le ministère des Ressources naturelles a reconnu que c'est inadéquat, et les autorités ont essayé à plusieurs reprises de changer la donne. Je crois comprendre que cela requiert un changement législatif, mais ce montant devait plutôt être de plus de 900 millions, selon les propres analyses du ministère.

Le gouvernement reconnaît que c'est désuet et inadéquat, et les autorités ont annoncé qu'elles réviseraient les plafonds en vue de les arrimer davantage à ce qui se fait ailleurs.

La sénatrice Callbeck : Est-ce que le plafond a été haussé aux États-Unis depuis le déversement de BP?

M. Vaughan : Le montant a été augmenté. Au départ, il était fixé à 25 milliards, puis il a été haussé à 40 milliards de dollars. Je crois qu'au cours des deux dernières semaines le montant réclamé par les demandeurs atteint maintenant 70 milliards. Je crois que l'examen de la Cour fédérale a débuté il y a deux jours à peine. Les procédures devant les tribunaux ne font que commencer; cela risque de durer un bon moment.

La sénatrice Callbeck : Je parlais du plafond de responsabilité.

M. Vaughan : Pardonnez-moi. Selon ce que j'en sais, le plafond de responsabilité est toujours de 75 milliards de dollars aux États-Unis. La commission de la Maison-Blanche a souligné que c'était totalement inadéquat, mais le plafond n'a pas encore été modifié. Il y a une série de recommandations que je présume que le gouvernement américain adoptera dans l'avenir.

Le sénateur Finley : Je pourrais argumenter avec la sénatrice Callbeck au sujet de la validité de certains rapports, en particulier de notre 28e rang. De plus, bien d'autres rapports affirment que nos limites sont en fait bien supérieures à celles des États-Unis; le plafond ne doit donc pas être extrêmement bas.

J'ai deux ou trois petites questions. Lorsque j'ai demandé si le vérificateur général avait le droit d'accepter des pétitions, n'est-il pas vrai que les vérificateurs peuvent seulement accepter des pétitions qui portent sur des enjeux environnementaux?

M. Vaughan : En vertu de la loi, c'est au sujet de l'environnement et du développement durable. La rubrique qui explique ce qui est compris et ce qui est exclu dans le développement durable est en fait très vaste. Les enjeux relatifs au développement durable peuvent englober des enjeux sociaux, par exemple. Le processus de pétition ne concerne pas exclusivement les polluants et l'eau potable. Par exemple, cela peut également aborder des enjeux économiques.

Sénateur, vous avez tout à fait raison; les Canadiens le considèrent maintenant comme un processus environnemental.

Le sénateur Finley : J'ai une dernière question. Vous avez mentionné utiliser abondamment les études de tiers partis sur des sujets précis, en plus de les consulter énormément. Pouvez-vous me dire combien vous dépensez annuellement, par exemple, en consultants?

M. Vaughan : Je peux vous trouver cette réponse, sénateur. Il nous arrive souvent de consulter des gens qui se prêtent gracieusement au jeu. Par exemple, j'ai rencontré le président et plusieurs vice-présidents de l'Association canadienne des producteurs de pétrole. Ces personnes n'étaient pas obligées de le faire, mais elles ont pris deux ou trois heures pour m'expliquer leurs points de vue sur divers aspects. Les équipes poseront normalement leurs questions à des gens au sein d'entreprises, du milieu universitaire ou de groupes. Les coûts seront en lien avec les déplacements. Je peux vous trouver ce montant, mais je présume que les coûts des consultations se chiffrent à environ 20 000 $ par audit. C'est très modeste. Cela se résume normalement à deux rencontres en personne sur deux jours, à quelques échanges et à des mémoires. Nos dépenses relatives aux consultations sont très modestes.

Le sénateur Finley : Conservez-vous des traces de vos consultations, qui relèvent peut-être du domaine public? Pouvons-nous avoir accès à vos dossiers?

M. Vaughan : Ce n'est pas possible, et voici pourquoi. Je suis certain que vous serez à même de le comprendre, sénateur. Lorsque nous menons un audit, nous devons imposer un haut degré de confidentialité au sujet de l'étendue de l'audit, notamment le calendrier des travaux d'audit et la période couverte. C'est important, parce que le BVG tient mordicus à ce que les parlementaires soient les premiers à voir le rapport. Nous recueillons parfois les conseils de gens qui souhaitent conserver l'anonymat. Par exemple, nous avons d'anciens sous-ministres. Ils nous conseillent, mais ils souhaitent demeurer discrets à cet égard. Il y a aussi deux ou trois anciens premiers ministres.

Le sénateur Finley : Je peux le comprendre. Je faisais allusion aux audits passés. Oublions l'année dernière, parce que c'est peut-être encore trop récent, mais je pensais à ce qui s'est passé il y a deux ou trois ans. Par exemple, en tant que sénateurs, nous devons pratiquement le signaler si nous rencontrons par hasard un lobbyiste au cours d'une réception; il faut le consigner. Comment puis-je m'assurer que vos consultations sont justes et que vous ne penchez pas d'un côté ou de l'autre si je ne connais pas les gens que vous consultez?

M. Vaughan : C'est une bonne question. Je suis certain que le bureau a une certaine méthodologie à ce chapitre. Je serai ravi de vous communiquer notre processus en ce qui a trait aux consultations de manière générale ou par l'entremise de contrats.

Je comprends votre point. Nous devons nous assurer de demeurer objectifs et impartiaux. Par conséquent, nous faisons preuve de rigueur en vue de nous assurer d'avoir le plus de points de vue différents. Cependant, en fin de compte, c'est nous qui rédigeons l'audit. Nous ne sommes aucunement redevables envers un groupe ou un point de vue. Nous devons seulement veiller à nous conformer aux normes relatives aux preuves, à l'objectivité et à l'impartialité établies par le gouvernement.

Le sénateur Finley : Je le comprends tout à fait, et je vous en suis reconnaissant. Le Sénat doit fonctionner de manière semblable. Cependant, je dois en gros dévoiler à tout le monde tout ce que je fais, et c'est pratiquement là où c'en est rendu; il s'agit d'enjeux très importants qui suscitent de très vives passions et qui incluent des extrêmes extrêmes, et je tiens à m'assurer dans la mesure du possible que vos consultants permettent un tel équilibre. J'aimerais savoir si c'est votre mandat ou des règlements qui s'appliquent à ce sujet. Serait-il possible de consulter de manière rétroactive la liste des gens auxquels vous avez demandé des conseils ou des renseignements?

M. Vaughan : Sénateur, nous vous reviendrons à ce sujet, et nous y répondrons de notre mieux.

[Français]

La sénatrice Hervieux-Payette : Je m'excuse de mon retard. La question des gaz de schiste nous préoccupe beaucoup, au Québec. Il me semble que cette question n'est pas toujours objective, que l'on soit pour ou contre. En Colombie-Britannique, ils exploitent les gaz de schiste depuis un bon moment. Au Québec, c'est devenu presque une religion d'être contre. J'aimerais pouvoir faire la part des choses. Pouvez-vous me dire si l'on sait comment exploiter les gaz de schiste? Y a-t-il des méthodes sécuritaires? On dit que l'Europe va exploiter le gaz de schiste. M. Obama annonce qu'il va s'en servir, privant le Canada de certaines parts du marché.

Il est important que les Canadiens sachent si le gaz de schiste est une menace ou un avantage. Est-ce que tous les Européens et les Américains se trompent ou n'ont pas la bonne information?

M. Vaughan : Je crois qu'il s'agit d'un secteur où il y a beaucoup d'incertitude. Beaucoup de questions se posent et il y a plusieurs études disponibles à ce sujet. Nous avons examiné le mandat du gouvernement fédéral. C'est un domaine très spécifique l'évaluation des produits chimiques utilisés pour la fracturation hydraulique. Nous avons noté que peu d'information existe au niveau du gouvernement fédéral pour identifier quel est le produit chimique utilisé dans le secteur et quels sont les risques pour la santé des Canadiens et l'environnement.

C'est une partie du mandat du gouvernement fédéral, mais nous avons constaté qu'il n'y a pas suffisamment d'information pour savoir quels sont les risques. Nous ne disons pas dit qu'il y a des risques ou non, nous disons qu'il y a trop peu de données pour bien informer les Canadiens sur la question spécifique de l'utilisation des produits chimiques.

La sénatrice Hervieux-Payette : Monsieur le président, je trouve cela un peu bizarre qu'on dise que le gouvernement fédéral n'a pas d'information. Il y a sûrement des fonctionnaires qui savent lire. Il y a sûrement des études qui ont été faites ailleurs. On n'est pas obligé de réinventer le bouton à quatre trous. Il y a des politiques sur lesquelles on travaille depuis des décennies, dont le dossier médical des patients. Je dis cela parce que le gouvernement fédéral a investi des milliards de dollars dans ce dossier, ainsi que les provinces, et on n'a toujours pas de résultat. Ne pourrait-on pas travailler avec les provinces? Si c'est fait en Colombie-Britannique, une province habituellement responsable face à l'environnement, ne pourrait-on pas se fier sur leur expérience pour prendre des décisions? Les Américains et les Européens ne prennent certainement pas des décisions sans avoir fait des études.

Ne pourrait-on pas sortir du spécifique — l'étude fédérale — et aller vers d'autres études, comme celle du Journal of Medicine, connues et partagées par tous les hommes de science dans le monde? Il me semble que, dans ce domaine, l'information devrait être partagée, ce qui nous permettrait d'évaluer le dossier.

M. Vaughan : C'est probablement une question pour un sous-ministre. Cependant, il y a beaucoup d'études sur ce sujet, dont Resources for the Future, faite à Washington. Je vous la recommande chaudement. C'est au niveau de la littérature, la preuve avec les études indépendantes. Ce groupe a finalisé ce rapport il y a deux semaines.

Cette question de coopération entre le fédéral et les provinces est pour le sous-ministre.

La sénatrice Hervieux-Payette : Je parle strictement des études elles-mêmes. Si on fait des études, on n'ira pas beaucoup plus loin que nos voisins. J'aimerais que vos bureaux nous fassent parvenir la référence exacte de ce qui a été produit à Washington afin que notre greffier nous donne cette information.

M. Vaughan : Avec plaisir. Il y a cette étude, Resources for the Future, mais il y en a d'autres et il nous fera plaisir de vous envoyer la liste des études récentes.

[Traduction]

Le vice-président : J'ai l'impression que les sénateurs ont posé toutes leurs questions, à moins que vous en ayez une dernière.

Monsieur Vaughan, avez-vous un dernier commentaire, car nous sommes conscients que vous partirez pour des cieux plus cléments?

M. Vaughan : Non. Je tiens seulement à vous remercier. C'est un honneur de témoigner devant le Sénat. Nous sommes toujours à votre disposition; nous sommes à votre service. Merci de nous avoir invités. C'est un honneur et un plaisir de venir témoigner devant votre comité.

Le vice-président : Au nom de tous les sénateurs, nous vous remercions d'être venus.

(La séance est levée.)


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