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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 15 - Témoignages du 5 février 2013


OTTAWA, le mardi 5 février 2013

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 9 h 32, dans le cadre de son étude sur les nouveaux enjeux qui sont ceux du secteur canadien du transport aérien.

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, ce matin, nous poursuivons notre étude sur le secteur canadien du transport aérien. Nous accueillons aujourd'hui John McKenna, président et chef de la direction de l'Association du transport aérien du Canada. Il est accompagné de Michael Skrobica, vice-président principal et chef de la Direction des finances. Messieurs, nous sommes ravis de vous recevoir à nouveau.

Monsieur McKenna, la parole est à vous.

John McKenna, président et chef de la direction, Association du transport aérien du Canada : Bonjour. Merci beaucoup. L'ATAC représente l'industrie du transport aérien commercial depuis bientôt 80 ans. Nous comptons environ 170 membres, des entreprises de toutes les régions du Canada qui offrent des services dans la majorité des plus de 700 aéroports au Canada.

[Français]

Nous avons comparu devant ce comité en 2010 pour vous parler de la viabilité à long terme de l'aviation canadienne. Notre message indiquait qu'un virage important s'imposait dans l'attitude du gouvernement canadien envers le transport aérien. Votre rapport a très bien reflété nos préoccupations et notre souhait de voir le gouvernement canadien considérer notre industrie comme un facilitateur économique essentiel plutôt que simplement comme une source de revenus.

[Traduction]

Nous avons comparu devant vous en 2012 pour commenter plus précisément la question de l'aviation dans le Nord canadien. Ce que nous vous avons principalement signalé, c'est qu'il faut porter une attention particulière aux facteurs politico-économiques dans le Nord et qu'on ne peut utiliser un modèle uniformisé pour cette région. Nous avons proposé trois idées qui seraient, nous l'espérons, incluses dans la politique canadienne touchant le Nord. Premièrement, le principe de l'utilisateur-payeur ne convient pas dans le Nord. Deuxièmement, il faut davantage d'infrastructures, notamment, des pistes pavées, ainsi que de l'équipement de communication et des aides à la navigation améliorés. Troisièmement, il faut une politique de soutien au Nord. Nous vous encourageons à inclure ces idées dans votre prochain rapport.

Nous sommes ravis par le travail accompli à ce jour par votre comité. Nous avons l'impression que le comité croit en l'aviation canadienne et qu'il est convaincu du rôle socio-économique vital qu'elle joue.

Aujourd'hui, nous allons vous parler de la nécessité de mieux superviser la gouvernance des aéroports, ainsi que des responsabilités qui incombent à Transports Canada concernant les aéroports depuis l'instauration de la Politique nationale des aéroports.

Nous ne cherchons pas à mettre en doute le dévouement et le professionnalisme des administrations aéroportuaires canadiennes, mais nous voulons plutôt nous assurer que les Canadiens peuvent compter sur la bonne gestion des actifs, et que le gouvernement du Canada donne à quelqu'un ou à un organisme, quel qu'il soit, le mandat de superviser la gouvernance de cet élément important du patrimoine canadien.

[Français]

Au cours 20 années qui se sont écoulées depuis que l'administration aéroportuaire a été privatisée, les normes de gouvernance ont été révisées dans tous les secteurs clefs de l'économie canadienne. Les secteurs des banques, des télécommunications et du commerce international ont tous vu leurs normes de gestion et d'éthique financière revues pour mieux refléter l'évolution des attentes du peuple canadienne. Tout comme les grandes sociétés canadiennes d'exploitation des ressources nationales, les administrations aéroportuaires canadiennes doivent faire preuve d'une plus grande transparence de leur gouvernance vis-à-vis de la population canadienne.

[Traduction]

Les aéroports forment un élément clé du système de transport canadien; il s'agit d'un instrument économique essentiel, d'un lien vital pour le Nord, d'un lien crucial avec l'étranger et d'un actif canadien majeur. C'est ce que soutient fermement et concrètement votre rapport. D'un point de vue strictement financier, la valeur nette des huit principaux aéroports est passée de 1,2 milliard de dollars, en 1996, à 11,4 milliards de dollars, en 2011. Cette croissance de la valeur s'explique dans une grande mesure par les investissements soutenus que le public voyageur a presque entièrement payés.

Depuis que le gouvernement canadien s'est départi des aéroports dans les années 1990, le mandat du Canada se limite à la sécurité et à la protection. Chez Transports Canada, personne ne répond aux appels des personnes qui se préoccupent des décisions de gestion des aéroports. Les compagnies aériennes et autres exploitants aériens — entre autres, les exploitants des services aéronautiques à l'aéroport et les fournisseurs de services d'entretien et de fret — ont signé des baux à long terme avec le gouvernement fédéral bien avant le transfert des aéroports. Ces entreprises louent les terrains des aérodromes et investissent dans des bâtiments, de l'équipement et d'autres installations qui leur servent à exploiter leurs entreprises.

Il y a quelques années, quand des problèmes ont surgi parce que certaines administrations aéroportuaires imposaient des augmentations de loyer pouvant atteindre 200 p. 100, les locataires n'ont eu aucune autre solution que de s'adresser aux tribunaux pour régler leurs problèmes. On leur avait garanti que rien ne changerait pour eux, malgré la privatisation. Malheureusement, les choses ne se sont pas passées ainsi. Les administrations aéroportuaires ont pris en charge la gestion des baux, mais Transports Canada reste le signataire des baux. Malgré cela, les locataires n'ont personne à qui s'adresser à Transports Canada, concernant, entre autres, l'interprétation des baux. Selon la Politique nationale des aéroports, la PNA, le gouvernement fédéral conserve son rôle de réglementation, mais il est passé de propriétaire et exploitant d'aéroports à propriétaire-locateur.

Selon la PNA, le gouvernement fédéral demeure propriétaire des 26 aéroports indiqués comme faisant partie du Réseau national des aéroports. Cependant, la PNA prévoit qu'ils doivent être loués aux administrations aéroportuaires canadiennes. Ces exploitants locaux sont responsables de la gestion financière et de l'exploitation.

Les administrations aéroportuaires ne sont pas propriétaires de ces actifs nationaux; ce sont les Canadiens qui en sont propriétaires. Le problème, c'est que bon nombre des administrations aéroportuaires ne sentent pas qu'elles doivent rendre compte de leurs décisions de gestion au gouvernement, au public ou au secteur qui en a besoin. On a demandé aux Canadiens de faire aveuglément confiance aux administrations aéroportuaires locales et de les laisser gérer ces actifs comme bon leur semble en application de baux qui peuvent durer 60 ans. Conformément à la PNA, la responsabilité de l'exploitation, de la gestion et de l'aménagement des 26 aéroports considérés comme les plus essentiels au réseau de transport aérien du Canada et qui doivent être désignés comme constituant le Réseau national d'aéroports a été cédée à des administrations aéroportuaires canadiennes en vertu d'accords de location à long terme.

[Français]

La cession aux administrations aéroportuaires canadiennes visait à accroître la viabilité et la compétitivité des aéroports en leur permettant de fonctionner d'une façon plus commerciale et plus rentable, et d'assurer des niveaux de services en rapport avec les exigences et les ressources locales.

[Traduction]

Transports Canada a renoncé à son rôle d'exploitant et de financier du Réseau national d'aéroports, mais il a toujours comme mandat de veiller à ce que les aéroports certifiés soient exploités en toute sécurité, que la sûreté soit assurée et que la gestion soit efficace. Puisqu'il est chargé de la réglementation, le gouvernement continue d'établir les normes de sécurité et de sûreté que tous les aéroports doivent respecter. Les aéroports du Réseau national des aéroports sont administrés par des conseils d'administration qui nomment le président et chef de la direction. La Politique nationale des aéroports précise également que toute administration aéroportuaire canadienne doit être un organisme sans but lucratif dirigé par un conseil d'administration local, que les membres du conseil doivent être représentatifs de la communauté locale et qu'ils ne doivent pas être des fonctionnaires ou des élus, et qu'il y aura des représentants des gouvernements fédéral et provincial au sein du conseil d'administration.

Malheureusement, les compétences en matière de transport aérien sont très rares, au sein des conseils d'administration des aéroports. La participation de la communauté est très importante, mais il est essentiel de connaître le secteur que vous desservez.

La Politique nationale des aéroports précise également que l'assemblée générale annuelle doit être ouverte au public, que les administrations aéroportuaires canadiennes doivent former des comités consultatifs communautaires et que le public doit avoir accès aux principaux documents d'affaires.

En réalité, il y a très peu de transparence dans la gestion des aéroports. Les autorités aéroportuaires gèrent ces actifs publics à leur propre profit. Outre la tenue d'une très brève assemblée générale annuelle, elles n'en font pas plus que les exigences minimales de transparence de la Politique nationale des aéroports.

[Français]

Tout ce que les administrations aéroportuaires sont tenues de faire est de produire des états financiers vérifiés lors de l'assemblée générale annuelle. Les renseignements soutenant les états financiers sont difficiles, voire impossibles à obtenir. Par exemple, les salaires et les dépenses en frais de voyages des cadres supérieurs ne sont pas dévoilés. Les projets d'investissement ne sont supervisés que par l'équipe de gestion interne. Le grand public n'est pas consulté mais simplement informé des grands projets immobiliers, malgré que ces derniers soient financés en grande partie par les frais d'amélioration aéroportuaire payés par les passagers.

[Traduction]

Les coûts d'entretien des infrastructures doivent être imputés au budget d'exploitation de l'aéroport. Plus l'investissement est élevé, moins l'aéroport est efficace, sauf s'il peut faire augmenter le trafic. En conséquence, les redevances d'atterrissage, les frais de stationnement et les loyers des locataires de l'aéroport et de l'aérogare augmentent. C'est le public voyageur qui finit par en payer les frais.

La Politique nationale des aéroports exige aussi que toute administration aéroportuaire canadienne demande à un vérificateur externe de réaliser un examen de son rendement au moins tous les cinq ans. Ce que nous avons constaté, c'est qu'il est extrêmement difficile d'obtenir ces rapports et qu'il n'est pas possible d'invoquer la Loi sur l'accès à l'information à cette fin puisque les autorités aéroportuaires canadiennes sont des sociétés privées et qu'elles ne sont par conséquent pas soumises à la loi.

Nous sommes convaincus que la plupart des aéroports sont gérés selon les plus hautes normes d'éthique, mais il n'en reste pas moins que le gouvernement se soustrait à ses responsabilités et voit maintenant les aéroports comme de simples sources de revenus.

Cela s'accompagne d'un problème particulier dans le Nord canadien. Le gouvernement reste propriétaire du Réseau national des aéroports, mais il a cédé tous les aéroports du Nunavut, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest aux gouvernements territoriaux. Ces aéroports sont essentiels à la subsistance, dans les régions nordiques, mais ils obtiennent très peu de soutien financier de la part du gouvernement canadien. Cela signifie que les utilisateurs des aéroports, notamment les petites communautés locales, doivent financer à eux seuls le réseau des aéroports du Nord. Étant donné l'absence d'autres modes de transport utilisables à l'année, à la différence des autres provinces où le gouvernement fédéral soutient l'infrastructure de transport, nous croyons fermement que le gouvernement devrait offrir un soutien financier aux aéroports du Nord canadien.

[Français]

Une autre inquiétude de taille est que beaucoup d'aéroports n'appartenant pas au réseau national des aéroports sont souvent des équipements-clés de leur région et doivent être protégés. Ces aéroports sont souvent des aéroports satellites desservant les grands aéroports ou ils sont stratégiques par leur mission ou leur emplacement. La propriété de ces aéroports a été transférée aux gouvernements régionaux ou municipaux, à des autorités aéroportuaires locales, à des entreprises privées ou à d'autres intérêts. Ces aéroports ont souvent une grande valeur et sont la proie de promoteurs immobiliers ou des administrations municipales plus intéressés par le potentiel fiscal que par l'attrait économique d'un aéroport. Un gain à court terme peut se traduire en une perte économique énorme à plus long terme.

[Traduction]

Voici les cinq recommandations de l'ATAC.

Premièrement, le gouvernement devrait désigner une personne ou un organisme de contrôle national chargé de superviser la planification à long terme des administrations aéroportuaires canadiennes.

Deuxièmement, le ministre des Transports devrait tenir un sommet national ou, à tout le moins, mener une consultation sur les aéroports auprès des parties prenantes pour faire le bilan de la privatisation après vingt ans et pour apporter les changements nécessaires à la PNA, compte tenu des besoins des administrations aéroportuaires canadiennes et du secteur du transport aérien à prévoir au cours des 20 prochaines années.

[Français]

Troisièmement, tout changement important proposé dans l'usage des aéroports transférés à des gouvernements ou autres intérêts locaux doit être soumis à des consultations publiques et à l'approbation ultérieure par le gouvernement fédéral.

[Traduction]

Quatrièmement, le conseil d'administration de chacun des 26 aéroports du Réseau national d'aéroports devrait compter deux représentants du secteur de l'aviation, dont l'un serait nommé par l'Association du transport aérien du Canada et l'autre, par le Conseil national des lignes aériennes du Canada, soit les deux associations nationales qui représentent les compagnies aériennes.

Le gouvernement fédéral devrait trouver un meilleur équilibre entre les projets d'expansion des aéroports et la nécessité de respecter les modèles d'affaires des utilisateurs, et offrir un soutien financier à l'exploitation des aéroports du Nord.

Je vous remercie de votre attention. Il nous fera plaisir de répondre à toutes vos questions sur cet exposé ou sur tout autre aspect connexe. Nous avons très hâte de lire votre rapport final.

Le président : Merci, monsieur McKenna. Nous aussi. Nous espérons que cette séance est la dernière séance publique que nous tiendrons avant d'entamer la rédaction du rapport.

C'est la raison pour laquelle tout le monde est invité à poser les questions qui ne l'auraient pas encore été et auxquelles les représentants de l'association pourraient répondre.

Monsieur McKenna, je vous suis reconnaissant d'avoir énoncé des recommandations claires. C'est ce que nous attendons de nos témoins — non pas qu'ils se contentent de faire une analyse de la situation, mais qu'ils suggèrent des changements.

Avant de céder la parole au sénateur Doyle, j'aimerais vous présenter notre collègue, le sénateur MacDonald, de la Nouvelle-Écosse, plus précisément de Cap-Breton.

[Français]

Le sénateur Léo Housakos, de Montréal, le sénateur Eggleton, de Toronto, la sénatrice Merchant de la Saskatchewan, le sénateur Mercer, de Halifax, le sénateur Greene, de Halifax, le sénateur Doyle, du Labrador — parfois, je l'appelle sénateur Tremblay.

[Traduction]

La sénatrice Unger, de l'Alberta.

[Français]

Le sénateur Maltais, de la région de Québec et le sénateur Boisvenu qui est avec nous ce matin.

[Traduction]

Le sénateur Doyle : Changez cela : c'est Terre-Neuve-et-Labrador.

Le président : C'est comme quand je vous appelle Tremblay.

Le sénateur Doyle : Monsieur McKenna, il y a quelques années, dans une soumission au Groupe d'étude sur les politiques en matière de concurrence, vous recommandiez l'élimination des taxes, droits et redevances en amont qui sont propres au secteur parce qu'ils font obstacle à l'investissement. Vous disiez que les taxes devraient probablement se limiter aux activités de production, aux profits et aux salaires. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, et nous préciser ce que cela signifie? Je pense que c'était en 2008. Je reviens à quelque chose que j'ai vu en ligne.

M. McKenna : C'était avant mon arrivée. Je vais demander à M. Skrobica de répondre à votre question.

Michael Skrobica, vice-président principal et chef, Direction des finances, Association du transport aérien du Canada : À cette époque, nous estimions — et c'est encore le cas — qu'il ne convient pas de taxer les facteurs de production. Cela va à l'encontre de ce qui a mené à l'établissement de la taxe sur les produits et services. Nous croyons que la taxe sur les produits et services est pertinente. Elle porte sur l'augmentation nette du service offert au client et convient au secteur du transport aérien.

Je vais vous citer des exemples de taxes liées aux facteurs de production.

Parmi les principales, il y a la taxe d'accise sur le carburant. Nous la payons, mais nous ne pouvons pas la récupérer. À cela s'ajoutent d'autres taxes : les taxes de vente et les taxes d'accise provinciales, que les compagnies aériennes ne peuvent récupérer non plus. Ces taxes sont payées et, en général, parce que les entreprises privées doivent les récupérer, c'est le public qui paie. Nous sommes donc désavantagés, par rapport à d'autres pays, en particulier, les États-Unis d'Amérique.

Le sénateur Doyle : Toujours à ce sujet, pensez-vous que les taxes imposées au secteur du transport aérien devraient correspondre davantage à celles qui sont exigées des secteurs du transport par autobus ou par train, ou peut-être des compagnies aériennes à l'étranger?

M. Skrobica : Selon nous, il faudrait vraiment tenir compte de ce qui est imposé aux compagnies aériennes étrangères. Nous constatons un important mouvement des passagers vers les aéroports américains, dans les régions frontalières, parce qu'il en coûte moins cher de partir d'une ville comme Buffalo, près de la frontière canadienne, pour se rendre à d'autres villes des États-Unis. Notre secteur est moins compétitif.

Le sénateur Doyle : Je me posais une question. En ce qui concerne les droits, les loyers et tous les frais à payer à l'aéroport, qu'en diriez-vous si le gouvernement décidait, demain, d'éliminer tout cela et de recourir à l'imposition générale pour couvrir les coûts comme on le fait, disons, à Amsterdam? Je pense que c'est ce qu'ils font là-bas.

M. Skrobica : Nous avons appuyé la TPS, et nous appuyons sans doute la TVH, que l'on continue d'instaurer au Canada. Nous trouvions que la TPS était une bonne façon d'imposer notre secteur. Nous estimons que les taxes propres à un secteur, comme les taxes d'accise sur le carburant, sont une forme de discrimination à notre égard, par rapport à nos concurrents de l'étranger.

M. McKenna : Permettez-moi d'ajouter que ce serait très intéressant, mais que cela ne se produira vraisemblablement pas, car le gouvernement fédéral tire environ un milliard de dollars par année de notre secteur, mis à part la TPS et tout cela. La taxe d'accise lui procure des revenus d'environ 100 millions de dollars, le Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien, environ 600 millions de dollars, et la location des aéroports, environ 300 ou 350 millions de dollars. C'est un milliard de dollars par année qui se retrouve dans les coffres du gouvernement, et je ne pense pas que le gouvernement laissera aller cela; d'après nous, il est réaliste de croire que ce n'est pas sur le point de se produire.

Cependant, d'autres moyens s'offrent au gouvernement pour nous aider à être plus concurrentiels, mais nous ne croyons pas que les loyers des aéroports et ce genre de choses soient très prioritaires pour le gouvernement.

Le sénateur Doyle : C'est bon. Merci.

La sénatrice Merchant : Bonjour, et merci. Nous avons déjà entendu plus d'une fois bon nombre des choses que vous nous avez dites ce matin. Le président m'a présentée comme étant une sénatrice de la Saskatchewan. Dans des endroits comme Regina et Saskatoon, les deux grandes villes de la province, le service n'est pas vraiment bon. Avez-vous une idée de la façon dont nous pourrions obtenir un meilleur service? Ce que je cherche à dire, c'est qu'à partir de Regina, par exemple — la capitale de notre province —, il n'est pas possible de se rendre directement en bien des endroits. Nous devons passer par Toronto, Winnipeg ou Calgary.

Il est difficile d'obtenir des vols sans escale. À partir de Regina, et à partir de Saskatoon, on a ajouté des vols sans escale à destination d'Ottawa, d'où on peut ensuite poursuivre jusqu'à Montréal, je pense. Cependant, ces vols ne sont offerts que de la mi-mai à la mi-septembre, parce que c'est alors qu'il y a davantage de voyageurs.

Quelle est la solution pour des gens comme nous, et pour les gens d'affaires qui se rendent à Winnipeg et qui en partent? Il y a davantage d'activité dans notre province en raison de toutes nos industries primaires. Qu'est-ce que vous suggérez? À qui devons-nous nous adresser pour obtenir un meilleur service?

M. Skrobica : En effet, comme vous le dites, plus les gens se déplacent, plus il y a de service, et c'est ce qui se produit en général l'été. Certaines des réductions de taxes dont nous parlons contribueraient à faire baisser les prix des billets d'avion. En général, dans le secteur du transport aérien, on estime qu'une réduction du prix des billets d'avion de 1 p. 100 entraîne une hausse du trafic passagers de 1 p. 100. Si plus de gens voyagent, il y aura automatiquement plus de choix parce que les compagnies aériennes répondront aux besoins des voyageurs.

À court terme, sans les réductions des taxes imposées à l'industrie, il n'y a pas beaucoup d'espoir qu'on assiste à une augmentation immédiate. Le mieux que nous puissions faire, c'est d'affecter des appareils de plus petit calibre à des itinéraires plus directs. Nous disposons maintenant de petits aéronefs qui peuvent effectuer des trajets plus longs et, par conséquent, offrir un service plus direct.

M. McKenna : Vous pouvez vous consoler avec le fait que la plupart de vos collègues, qu'ils viennent du Québec ou de Terre-Neuve-et-Labrador... ai-je bien compris?

Le sénateur Doyle : Oui.

M. McKenna : ... sont dans la même situation. Demandez aux sénateurs qui prennent l'avion à partir de Québec : il part de là très peu de vols directs à destination des grands aéroports du Canada, à part Montréal, bien entendu. Les transporteurs ont beaucoup de difficultés à composer avec cette situation. Vous n'êtes pas seul dans votre cas.

La sénatrice Merchant : Je le comprends, mais le Canada est vaste, comme vous le savez. Je ne me désole donc pas trop pour ceux qui vivent dans le triangle, car les distances y sont plus courtes. Même s'ils doivent effectuer un changement, je considère tout de même qu'ils bénéficient de vols plus fréquents. Il ne part toutefois que deux ou trois vols par jour de Regina, un le matin et un le soir.

Il faut plus de temps pour arriver ici, parfois six ou sept heures pour aller de Regina à Ottawa. Je doute qu'il faille six ou sept heures à mes collègues de Québec pour venir à Ottawa. Ils peuvent aussi faire le trajet en voiture.

Nous sommes plus loin. C'est frustrant. Nous nous plaignons beaucoup, mais comme nous ne savons pas à qui adresser nos doléances, nous nous plaignons entre nous. Merci beaucoup.

Le sénateur Mercer : Comme le président l'a souligné, c'est l'une des dernières séances que nous tiendrons, si ce n'est la dernière, mais l'attente en valait la peine. Je tiens à vous remercier d'avoir donné ce qui compte parmi les meilleurs rapports et les meilleurs exposés que nous ayons eus. Vous avez formulé des recommandations très sérieuses et très réalisables. Quand le gouvernement examinera votre recommandation no 2 — que le ministre des Transports tienne un sommet national ou, à tout le moins, une consultation avec les parties prenantes —, le ministre pourrait même envisager de confier cette responsabilité au comité dans l'avenir, puisque nous avons déjà fait la moitié du chemin et connaissons bien le sujet.

Je vais maintenant poser mes questions. Il me semble que la gouvernance des aéroports est une sorte de jeu des gobelets; on jette le blâme tous azimuts, mais tout le monde se lave les mains de l'affaire. Je remarque que dans certains aéroports — dont un qui se trouve peut-être à 10 kilomètres d'ici —, on dispose des affiches dans les aires de retrait des bagages indiquant que la livraison des bagages est la responsabilité de la compagnie aérienne. Tout relève de quelqu'un d'autre, sauf de l'autorité aéroportuaire. Il me semble que la gestion de l'aéroport est de la responsabilité de l'aéroport, de l'instant où j'y mets les pieds à celui où je franchis la porte d'embarquement. Les compagnies aériennes ont un rôle à jouer, mais cette situation me semble très particulière.

Vous avez parlé des assemblées générales annuelles, et c'est la première fois que nous abordons le sujet dans le rapport. Ces assemblées sont censées être ouvertes au public. J'essaie de porter attention à ce qui se passe, mais je ne me rappelle pas d'avoir vu un avis invitant les membres de ma communauté à assister à l'assemblée générale de l'autorité de l'Aéroport international de Halifax. Les assemblées générales doivent-elles être annoncées? Les autorités aéroportuaires sont-elles supposées y inviter la population?

M. Skrobica : En général, les aéroports publient un avis dans la presse avant la tenue des assemblées générales, qui sont habituellement publiques. Je peux vous dire que l'aéroport d'Ottawa publie régulièrement de tels avis dans les deux principaux journaux locaux.

Malheureusement, le fait est que très peu de gens y assistent.

M. McKenna : Si je peux ajouter mon grain de sel, j'ai remarqué que trop souvent, les avis sont publiés 48 heures avant la tenue de l'assemblée générale, ce qui revient à dire : « Nous vous invitons, mais nous ne voulons pas que vous soyez là. »

Le sénateur Mercer : Voilà qui nous ramène à ce que vous avez dit au sujet de la Politique nationale des aéroports, qui stipule que les autorités aéroportuaires canadiennes doivent demander à un examinateur externe d'effectuer un examen du rendement au moins tous les cinq ans. Or, vous affirmez que vous ne pouvez obtenir d'exemplaire de ces examens. C'est un peu idiot de faire faire l'examen si les principaux intéressés, ou deux d'entre eux, n'y ont pas accès. Ces principaux intéressés, ce sont les citoyens, qui paient soit en achetant leur billet ou en payant leurs impôts.

Nous devrions formuler une recommandation indiquant clairement que ces rapports devraient être rendus publics en temps opportun, sans que ce soit nécessairement au moment du dépôt. Cela vous conviendrait-il?

M. McKenna : Les aéroports n'ont pas tous la même politique à cet égard. Certains sont bien plus ouverts et transparents que d'autres. C'est toutefois le gouvernement fédéral qui paie ces rapports; on devrait donc pouvoir y avoir accès dans le cadre du processus d'AIPRP. On ne s'entend cependant pas sur la question. Il est vain de s'adresser aux employés de Transports Canada; ils nous renvoient à l'aéroport, qui répond qu'il n'y a rien d'anormal. On nous envoie essentiellement promener.

Le sénateur Mercer : Un membre de l'opposition aurait beau jeu de dire que le gouvernement devrait éliminer les frais. Mais comme nous sommes réalistes et membres du Sénat, et non à la Chambre des communes, nous sommes censés réfléchir un peu plus en détail. Si le gouvernement éliminait certains des fardeaux imposés aux aéroports, aux transporteurs aériens et, par conséquent, aux voyageurs afin de faire augmenter les voyages qui, nous le savons, sont à destination du sud de la frontière, avez-vous une idée de la manière dont il pourrait remplacer ce revenu? Le gouvernement, comme vous l'avez indiqué dans votre propre exposé, ne peut abandonner des revenus d'un milliard de dollars sans savoir comment compenser cette perte par une somme équivalente issue des taxes. Il est déjà aux prises avec un déficit colossal.

M. Skrobica : Il y a une solution qu'on pourrait envisager. Environ 4,5 à 5 millions de passagers se rendent au sud de la frontière pour partir en voyage. Si nous pouvions les convaincre de voyager à partir du Canada, la TPS ou la TVH s'appliqueraient à tous leurs billets, ce qui permettrait au gouvernement de remplacer une grande partie des revenus perdus par suite de l'élimination de taxes directes et de mieux accepter l'élimination d'une taxe d'accise sur le carburant, par exemple.

M. McKenna : Le Conseil des aéroports du Canada affirme que ce sont plutôt près de sept millions de personnes qui traversent la frontière. Le problème, c'est que le gouvernement ne croit pas que les passagers profiteront de ces économies s'il annule le loyer des aéroports. On peut effectivement craindre que ce soit le cas. S'il agit de la sorte, le gouvernement doit disposer d'un mécanisme pour veiller à ce que les économies soient transférées aux passagers. C'est facile de dire qu'elles ne seront pas transférées et qu'il n'élimine pas les frais. Il peut toutefois instaurer un mécanisme pour assurer ce transfert.

Le sénateur Mercer : Je crois que vous avez absolument raison. Le problème, c'est que nous proposons d'éliminer des frais, mais rien ne nous garantit que le consommateur paiera son billet moins cher au bout du compte. Peu importe ce que nous faisons, nous devons résoudre ce problème, c'est-à-dire, selon moi, veiller à ce que les consommateurs puissent bénéficier d'une réduction de prix pour pouvoir voyager davantage et à un taux plus économique.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Monsieur McKenna, monsieur Skrobica, je vous remercie tous deux pour votre rapport et votre mémoire qui étaient très intéressants.

Dans votre rapport, les mots « manque de transparence » reviennent souvent. La complexité du sujet est de voir que ce sont des organisations municipales ou provinciales qui gèrent les aéroports, mais elles les gèrent comme si elles étaient privées. Il me semble qu'il y a une espèce de contradiction. Nos gouvernements municipaux ou provinciaux gèrent les deniers des contribuables, et ils le font habituellement avec une grande transparence. Les contribuables veulent savoir où vont leurs impôts.

Sur le plan aéroportuaire, comme il y a beaucoup de taxes, ils veulent évidemment savoir où ils vont. Est-ce que j'ai bien compris votre mémoire?

M. McKenna : Des 700 aéroports canadiens, 26 sont encore la propriété du gouvernement fédéral, le réseau de gestionnaires des aéroports. Le gouvernement demeure propriétaire à part entière de ces aéroports. Ce sont des baux de 60 ans et plus dont la gestion est transférée à des entités régionales. Les autres aéroports, celui de Saint-Hubert au Québec et ceux du Nord, par exemple, ont été transférés soit à des gouvernements municipaux, à des entreprises privées ou à des sociétés commerciales.

Dans le cas de l'aéroport de Saint-Hubert, par exemple, le gouvernement a mis une clause selon laquelle ils doivent l'exploiter en tant qu'aéroport pendant une période de 10 ans, et après, ils pourront faire ce qu'ils veulent avec le terrain. Cette période de 10 ans se termine l'année prochaine et je suis prêt à parier que dans trois ou quatre ans, il n'y aura plus d'aéroport à Saint-Hubert, ce sera vendu à des entrepreneurs. C'est une crainte que j'ai. J'ai écrit plusieurs articles à ce sujet et il me fera plaisir de vous les faire parvenir. Le gouvernement s'est lavé les mains de ces aéroports et ce que je dis, c'est qu'il y a une responsabilité à tenir. Dans le cas de ces aéroports, ce sont effectivement des entités municipales ou autres qui les gèrent.

Ce sont les 26 aéroports du réseau national que j'ai identifiés tantôt qui sont soumis aux règlements, le conseil d'administration, les assemblées générales publiques. Ces aéroports, qui accueillent plus de 200 000 voyageurs par année, sont les plus stratégiques.

Ce sont donc ces aéroports qui nous inquiètent parce que ce sont des aéroports clés. Les autres nous inquiètent aussi parce que certains sont stratégiques et importants pour le développement de la région. On ne veut pas que soudainement, parce qu'une administration municipale — qui ne croit pas à l'aviation — veut voir sa région se développer plus dans un secteur, elle fasse disparaître cet aéroport, parce que lorsque ce dernier aura disparu, il sera trop tard. Ce sont donc les préoccupations qu'on a.

Le sénateur Boisvenu : Est-ce que vous suggérez un modèle particulier au niveau de la gestion des aéroports, peu importe qui en a la responsabilité? Est-ce que vous penchez davantage vers une approche de privatisation ou vers un partenariat public-privé?

M. McKenna : Dans le cas des 26 aéroports du réseau national, c'est l'administration qui a été privatisée. Ces aéroports demeurent la propriété du peuple canadien. Le gouvernement a clairement la responsabilité de s'assurer qu'ils sont bien gérés. Il devrait y avoir une surveillance plus étroite de ce qui se passe.

En ce qui concerne les autres aéroports, le gouvernement pourrait simplement établir des directives, dicter la marche à suivre, sans se mêler nécessairement de la gestion.

Le sénateur Boisvenu : Il se dépense des milliards de dollars dans les aéroports, surtout dans ces 26 aéroports. Si je regarde Montréal, les sommes d'argent dépensées sont colossales. On s'est peut-être donné des infrastructures qu'on n'a pas les moyens d'entretenir.

M. McKenna : Tout à fait.

Le sénateur Boisvenu : Cela crée une pression énorme sur la vente de billets et fait en sorte que la compétitivité de ces aéroports par rapport aux aéroports américains n'existe plus. Il faudra sortir de ce cercle vicieux où une grande partie des Canadiens vont aux États-Unis pour prendre l'avion, ce qui crée encore plus de pression sur les aéroports canadiens.

M. McKenna : Le modèle doit être revu. La source la plus importante de revenus d'un aéroport, la plupart du temps, c'est les frais d'amélioration aéroportuaires. Les aéroports, surtout ceux du réseau national, sont tous sans but lucratif, ils ne peuvent pas faire de profit et doivent donc réinvestir l'argent. C'est une source de revenus extraordinaire. Ces gens investissent encore et encore. Cependant, les revenus provenant de ces frais d'amélioration aéroportuaires ne peuvent pas être utilisés pour soutenir les opérations, mais peuvent l'être dans des investissements d'immobilisation. Là où le bât blesse, c'est qu'il y a un gros aéroport qui coûte cher à entretenir, ils augmentent donc les autres frais et ils deviennent de ce fait non compétitifs.

Le sénateur Boisvenu : Vous dites que le gouvernement a délégué la gestion des aéroports à des organismes privés qui n'ont pas d'imputabilité devant les Canadiens. Ils doivent s'assurer que les investissements qui sont faits correspondent à la capacité des voyageurs de payer sans augmenter constamment l'écart du coût du billet entre les voyageurs canadiens et américains. Comment nous sortir de cette impasse?

M. McKenna : On dit dans notre mémoire que le gouvernement doit assumer certaines de ces responsabilités.

[Traduction]

Le sénateur Greene : Merci beaucoup de comparaître. Votre exposé m'a beaucoup plu. En ce qui concerne votre première recommandation, selon laquelle le gouvernement devrait nommer une autorité nationale pour superviser la planification à long terme des administrations aéroportuaires canadiennes, j'aime beaucoup votre intention. Je conviens avec le sénateur Boisvenu qu'il s'agit principalement d'affaires provinciales ou municipales. D'une certaine manière, elles me semblent s'apparenter davantage à des services publics. Votre recommandation engendrerait un léger surcroît de bureaucratie. Que penseriez-vous d'en confier la gestion aux commissions d'examen des services publics provinciales?

M. McKenna : Peu importe la manière dont on procède, notre intention première consiste à assurer la protection de ces biens, qui appartiennent au public canadien, en ce qui concerne du moins les 26 principaux aéroports. Le gouvernement doit assurer cette protection.

Quant aux aéroports transférés à d'autres autorités et intérêts, on pourrait établir des directives pour indiquer comment en assurer la gestion sans nécessairement s'y ingérer. Cependant, si une ville propriétaire d'un aéroport décide, par exemple, qu'elle n'en a plus besoin parce qu'il est plus rentable de vendre le terrain et les complexes, il s'agit d'un bien important pour la région, sacrifié pour de bon.

Nous considérons que le gouvernement devrait établir une sorte de rôle de supervision ou un processus dans le cadre duquel cette décision serait prise et approuvée par le gouvernement fédéral. Je ne dis pas que ce dernier, et certainement pas Transports Canada, devrait participer à la gestion de ces installations. Nous avons assez de problèmes comme ça. Je dis seulement qu'il faudrait indiquer à ces gens que nous leur avons confié un bien qu'ils gèrent ou possèdent, mais qu'on s'attend à ce qu'ils agissent dans les règles de l'art et s'ils modifient le mandat ou la mission de ce territoire, ils ne peuvent le faire du jour au lendemain, mais respecter un processus.

Le sénateur Greene : Pensez-vous que les commissions d'examen des services publics provinciales seraient en mesure de le faire?

M. Skrobica : Elles devraient l'être, dans le cas des aéroports ne relevant pas d'autorités aéroportuaires canadiennes. Ces dernières appartiennent toujours au gouvernement fédéral, qui a évidemment encore un rôle à jouer à l'égard de ces 26 aéroports.

Pour les plus petits aéroports transférés aux autorités provinciales ou municipales, il conviendrait effectivement d'instaurer un mécanisme de surveillance géré par le gouvernement provincial.

Le président : J'ai quelque chose à ajouter.

[Français]

Le président : Monsieur McKenna, le Québec n'a pas de conseil dans le sens pancanadien du terme. Si vous avez un problème avec un aéroport à Montréal et qu'un de vos membres a un problème avec le gestionnaire de l'aéroport, où irez-vous en appel s'il y a un blocage et qu'il n'y a pas de négociation possible?

M. McKenna : Devant les tribunaux.

Le président : Il n'y a aucun système ni à Transport Canada ni à Transports Québec. Donc automatiquement, vous obligez vos membres à aller devant les tribunaux.

M. McKenna : C'est l'exemple que j'ai donné plus tôt. Plusieurs aéroports ont augmenté les loyers jusqu'à 200 p. 100. Les gens ont frappé à la porte de Transports Canada et on leur a dit que le département était fermé. Ces gens ont dû se tourner vers les tribunaux ou des arbitres pour essayer de régler les problèmes. Il n'y a pas d'autorité en place qui s'intéresse aux aéroports particulièrement.

[Traduction]

La sénatrice Unger : Mes questions ont déjà été posées. Merci, messieurs.

[Français]

Le sénateur Maltais : Monsieur McKenna, vous avez dit tout à l'heure que beaucoup de Canadiens vont prendre l'avion aux États-Unis. Il est clair que c'est pour une question de coût. Par contre, le Canada perçoit une taxe désagréable pour les passagers. J'appelle cette taxe « la taxe du prisonnier ».

Lorsqu'on descend de l'avion et qu'on entre dans l'aéroport, on nous réclame 25 $ ou 30 $ pour l'amélioration de l'aéroport. Je suis allé à Vancouver et je trouvais l'aéroport très bien. Je ne voyais pas pourquoi je devais payer, mais je n'avais pas le choix de payer si je voulais revenir à Montréal. Et à Montréal, je devais encore payer. Je me dis que s'ils n'ont pas les moyens d'avoir un aéroport, qu'on nous le dise, on prendra le train.

Cette taxe est difficile à avaler parce que lorsqu'on achète un billet, on n'en parle pas. Ce sont des petites choses qui choquent le consommateur. Ils sont informés une fois dans l'entonnoir et ils ne peuvent plus reculer. Lorsqu'on va à Cuba, les gens sont avisés qu'ils doivent payer une taxe pour sortir du pays, c'est inscrit et bien dit par les agences de voyages. Toutefois, quand on voyage au Canada, on nous prend en souricière. Le consommateur se dit que s'il se fait voler au Canada, la prochaine fois, il passera par les compagnies américaines. C'est une partie de vos problèmes parce que la « taxe du prisonnier » vous cause du tort.

Si vous n'avez pas les moyens de réparer l'aéroport, dites-le-nous, on fera une campagne de financement et on fera les réparations ou non, mais au moins, on sera avisé à l'avance. Il n'y a rien de pire que de tomber dans ce guet-apens.

M. McKenna : Vous faites référence aux frais d'amélioration aéroportuaire qui, normalement, devraient être inclus dans le prix votre billet. Ce n'est pas identifié, mais c'est inclus dans le prix d'achat de votre billet. Ils n'ont pas à vous réclamer des frais à l'aéroport en plus pour cela. Par contre, si c'est le cas, vous vous faites avoir une deuxième fois.

Quand vous achetez votre billet, les frais d'amélioration aéroportuaire sont automatiquement ajoutés et les montants varient selon l'aéroport. C'est l'aéroport qui décide du niveau. Cela peut varier entre 15 $ et 30 $ dépendamment de l'aéroport au Canada, et ce, dans chaque direction.

Le sénateur Maltais : Combien de consommateurs savent qu'ils paient cette fameuse taxe? Je ne peux pas concevoir que la compagnie qui vous transporte en plus d'exiger d'autres taxes, surtaxes, contre taxe et les taxes de bagages, perçoit, en plus, une surtaxe pour l'amélioration de l'aéroport. Ce n'est pas à moi à payer l'amélioration de l'aéroport de Vancouver si j'y vais une seule fois.

[Traduction]

M. Skrobica : Vous ne faites pas seulement allusion aux frais d'amélioration portuaire, mais aux autres frais accessoires également. Dernièrement, l'Office des transports du Canada a promulgué un nouveau règlement concernant la publicité sur les tarifs aériens. Tous les transporteurs aériens en activité au Canada sont maintenant obligés d'indiquer non seulement le prix du billet, mais aussi les frais accessoires. Si on achète un billet par Internet, on peut voir une description faisant généralement état des divers frais avant de conclure la transaction.

L'aéroport de Vancouver a pour sa part entrepris deux séries d'agrandissements et de rénovations très importants. Il a emprunté des sommes d'agent substantielles, totalisant des centaines, voire un milliard de dollars. Il les remboursera au fil de temps, et ce, grâce aux frais d'amélioration aéroportuaire.

Des frais similaires s'appliquent également aux voyages effectués aux États-Unis. Ces frais, appelés « passenger facility charge » ou PFC, sont moins élevés, parce que le gouvernement américain investit dans ses aéroports, alors que le gouvernement du Canada soutire aux siens plus de 300 millions de dollars. Cette façon de faire a une conséquence : la taxe du prisonnier.

[Français]

Le sénateur Maltais : Vous devrez faire de la publicité pour l'expliquer aux Canadiens. Vous devrez dire aux Canadiens en quoi consiste le coût réel du billet d'avion. Les Canadiens préféreront peut-être utiliser les services de compagnies aériennes au Canada. Présentement, les Canadiens comparent les prix entre les États-Unis et le Canada et se contrefoutent de l'amélioration de votre aéroport. Ce qui les importe c'est ce qui leur reste dans leurs poches. Vous avez le devoir d'informer les Canadiens de ce qui est compris dans le coût du billet d'avion. Les taxes, les coûts, les améliorations, les verres d'eau payés entre Montréal et Washington doivent être inscrits. Ce sont des choses qui découragent les Canadiens.

M. McKenna : Nous avons le même discours.

Le sénateur Boivenu : Le coût de la migration des voyageurs canadiens vers les aéroports américains engendre-t-il plus de perte économique que ce que le gouvernement fédéral retire en taxes?

M. McKenna : C'est difficile à mesurer. Mais nous croyons que si l'industrie canadienne du transport aérien est plus compétitive, elle attirera plus de voyageurs. Nous nous disons qu'à moyen terme le gouvernement va compenser par une industrie plus viable, plus rentable et qui va générer davantage de revenus sous forme d'impôts au gouvernement. Mais à savoir s'il y a un coût automatique un à un, je ne pourrais pas le dire.

Le sénateur Boisvenu : Est-ce que votre industrie a calculé le coût de la migration des voyageurs canadiens vers les aéroports américains? Parce que si nous voulons convaincre les décideurs politiques de mettre la pédale douce sur la charge fiscale imposée aux voyageurs, il nous faudra des chiffres réels pour déterminer ce que la charge fiscale actuelle engendre comme pertes. Sinon, on risque de travailler sur des hypothèses qui ne sont pas documentées.

[Traduction]

M. Skrobica : Nous n'avons pas réalisé d'étude économique sur la perte engendrée par les voyageurs qui traversent la frontière pour prendre l'avion. Le Conseil des aéroports du Canada a toutefois une étude comprenant des chiffres sur la perte économique au Canada. Voilà qui étayerait les recommandations faites au Sénat à ce sujet.

[Français]

Le président : J'ai demandé au greffier de communiquer avec les associations pour qu'elles nous fournissent des chiffres actuels sur le nombre de passagers transfrontaliers.

J'ai une question complémentaire. On sait que la raison pour laquelle les passagers traversent la frontière, ce n'est pas pour le service ou pour le désir d'aller aux États-Unis. C'est parce qu'ils calculent qu'ils vont économiser de l'argent. Mais lorsque les quatre millions de passagers auront pris l'habitude de traverser la frontière, d'aller à Burlington, Plattsburg, Buffalo ou Bellingham, même si on abolit les taxes et qu'on réduit les charges aéroportuaires, pensez-vous que tous ces passagers reviendront facilement au Canada?

M. McKenna : Pour une personne qui demeure à Windsor en Ontario, c'est plus facile pour elle de traverser la frontière que de se rendre à Toronto pour prendre un vol. On ne pourra certainement pas récupérer tous ces passagers mais d'un autre côté, il y a des Américains qui traversent la frontière pour prendre des vols directs et il n'existe pas beaucoup de chiffres sur cette catégorie de passagers.

L'année passée, le Conseil des aéroports du Canada a dévoilé une étude intitulée L'aéroport perdu dans laquelle il disait que, en termes de nombre de passagers, on perd l'équivalent d'un de nos aéroports moyens au Canada. Ils ont dévoilé tous ces chiffres que vous pourrez consulter. Je ne m'en souviens tout simplement pas par cœur.

Le président : L'exemple qu'ils avaient utilisé, c'est que les quatre millions de passagers — il y a de cela 18 mois — c'est l'équivalent de l'aéroport d'Ottawa. Le cinquième plus important aéroport au Canada est de l'autre côté de la frontière. Et moi ce qui m'inquiète, c'est que lorsqu'on a créé les taxes d'aéroport et les taxes locatives, on s'aperçoit que ce sont toutes des choses mineures. Quand le dollar était à 1,35 $ américain, les gens ne traversaient pas la frontière parce qu'il n'y avait pas de parité. Mais maintenant que le dollar est à parité, ces gens ont toutes les raisons au monde de traverser la frontière.

Le gouvernement doit être en mesure de saisir le fait qu'il encourage les passagers canadiens à aller aux États-Unis et qu'un jour ces passagers ne reviendront pas. Cette perte financière ne deviendra pas temporaire, mais permanente et moi, je dois vous admettre que ça m'inquiète.

[Traduction]

Il n'y a plus de questions. Nous tiendrons demain soir notre dernière séance, au cours de laquelle nous entendrons Éric Lippé, président-directeur général de l'Association québécoise du transport aérien. Nous n'avons pas convoqué d'autres témoins; ce sera probablement donc la dernière séance où nous entendrons des témoins. Nous nous attellerons ensuite à la rédaction du rapport.

Sénateur Greene, si d'ici demain soir, le ministre des Transports jugeait bon d'accepter de comparaître devant le comité, nous serions plus qu'heureux de l'entendre avant de commencer à préparer le rapport. Cependant, comme nous n'avons pas reçu de réponse, je laisse la question entre les mains compétentes de mon vice-président. Je crois qu'il serait préférable qu'il témoigne, mais s'il ne comparaît pas, nous devrons commencer la rédaction de notre rapport, ce qui nous prendra, je l'espère, deux ou trois semaines.

Sur un autre sujet, le projet de loi C-52, qui porte sur le transport ferroviaire, est actuellement devant la Chambre des communes et sera envoyé au Sénat dans les prochaines semaines. Nous nous en occuperons avant de travailler à notre rapport.

Le sénateur Segal a réclamé une étude sur Radio Canada International, et l'affaire nous a été confiée. Je discuterai aujourd'hui des dates possibles avec le sénateur Segal. Je parlerai avec le comité de direction de la date à laquelle nous pourrions tenir une première séance concernant l'ébauche d'un rapport intérimaire et l'établissement d'un échéancier de publication.

Le sénateur Mercer : Pendant la pause, j'ai envoyé un courriel au président concernant une nouvelle qui, à mon avis, soulève une question très préoccupante pour l'économie canadienne et qui relève directement du mandat du comité : il s'agit du niveau des eaux dans les Grands Lacs et de son effet sur les transports dans l'Ouest et le centre du Canada jusqu'au port de Montréal. Je demanderais que le comité de direction se penche sur cette question en vue de peut-être entamer une étude. J'ignore si cette dernière serait aussi longue que celle que nous avons réalisée sur les aéroports, mais c'est une question économique dont les effets se manifestent aujourd'hui, et non à long terme. Les niveaux d'eau ont diminué considérablement. Si les choses ne changent pas bientôt, les bateaux auront de la difficulté à se rendre jusqu'aux canaux, sans parler d'y naviguer. Les économies de l'Ouest canadien, de l'Ontario et du Québec s'en ressentiront. Il est important de s'attaquer au problème.

Le président : Le comité de direction sera plus qu'heureux d'examiner toutes les recommandations d'études.

MM. McKenna et Skrobica, merci beaucoup d'avoir témoigné.

M. McKenna : Si vous effectuez une étude sur le transport ferroviaire, nous vous demanderons probablement de comparaître afin de plaider en faveur de l'établissement de règles du jeu équitables pour tous les modes de transport au Canada.

(La séance est levée.)


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