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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones

Fascicule 11 - Témoignages du 28 janvier 2015


OTTAWA, le mercredi 28 janvier 2015

Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui, à 18 h 51, pour étudier les problèmes liés à l'infrastructure dans les réserves des Premières Nations.

Le sénateur Dennis Glen Patterson (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Mesdames et messieurs, bonsoir. J'aimerais souhaiter la bienvenue à tous les honorables sénateurs et à tous les membres du public qui assistent à la séance du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones ou qui la regardent sur les ondes de CPAC ou sur le Web. Je suis Dennis Patterson, sénateur du Nunavut, et j'ai le privilège de présider les travaux du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones.

Le mandat du comité consiste à examiner les projets de loi et les questions qui touchent les peuples autochtones du Canada en général, mais ce soir, nous allons entendre des témoignages dans le contexte d'un ordre de renvoi précis nous autorisant à examiner, en vue d'en faire rapport, les problèmes et les solutions possibles liés à l'infrastructure dans les réserves, notamment pour ce qui est du logement, des infrastructures communautaires, des options de financement novatrices et des stratégies de collaboration plus efficaces. Nous avons terminé nos audiences sur la question du logement, et notre étude sera maintenant axée sur l'infrastructure.

Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de la Nation des Cris de Manto Sipi, une petite Première Nation qui compte en tout 800 habitants. Elle est située à environ 850 kilomètres au nord-ouest de Winnipeg et à 255 kilomètres au sud-est de Thompson, au Manitoba. La Nation des Cris de Manto Sipi a demandé à comparaître devant le comité afin de discuter d'une proposition élaborée par la communauté concernant le financement d'une initiative d'infrastructure.

Soyez les bienvenus. Avant d'entendre votre témoignage, j'aimerais faire un tour de table et inviter les membres du comité à se présenter à tour de rôle.

Le sénateur Sibbeston : Nick Sibbeston, des Territoires du Nord-Ouest.

Le sénateur Campbell : Larry Campbell, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Fraser : Joan Fraser, du Québec.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l'Ontario.

Le sénateur Ngo : Thanh Hai Ngo, de l'Ontario.

La sénatrice Raine : Nancy Greene Raine, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Lang : Daniel Lang, du Yukon.

Le président : Le Nord est bien représenté ce soir; nous avons un représentant pour chacun des trois territoires.

Chers collègues, je vous demande de bien vouloir accueillir avec moi nos témoins de la Nation des Cris de Manto Sipi, Michael Yellowback, chef, et Daniel Ross, conseiller.

Nous avons bien hâte d'entendre votre exposé, qui sera suivi d'une période de questions. Je vous invite maintenant à prendre la parole.

Michael Yellowback, chef, Nation des Cris de Manto Sipi :

[Le témoin s'exprime dans une langue autochtone.]

Je tiens aujourd'hui à saluer notre peuple, le peuple que nous représentons. Je salue également le président et les membres du comité sénatorial.

Je m'appelle Michael Yellowback et je suis le chef de la Première Nation des Cris de Manto Sipi. Nous comparaissons aujourd'hui devant le comité afin de régler les problèmes auxquels nous sommes confrontés depuis longtemps en matière de logement et les difficultés que nous éprouvons depuis que chaque foyer de Manto Sipi bénéficie de l'eau courante, c'est-à-dire depuis 1998.

Affaires autochtones et Développement du Nord Canada a beau verser des fonds d'immobilisations pour améliorer les infrastructures communautaires centrales et essentielles, il ne fournit pas les ressources financières nécessaires à la rénovation des résidences qui seront reliées à ces services améliorés. C'est là l'un des principaux problèmes auxquels cette Première Nation doit faire face sur le plan des infrastructures.

Par exemple, même si le ministère a investi dans un projet d'immobilisations de grande envergure afin de raccorder la Première Nation des Cris de Manto Sipi au réseau de transport intégré de Manitoba Hydro en 1997, dans le cadre du projet Centre-Nord, et même s'il a financé le projet visant à construire des installations de traitement de l'eau et des eaux usées à Manto Sipi, il n'a pas fourni le financement correspondant pour veiller à ce que nos maisons puissent recevoir ces nouveaux services publics essentiels.

Avant cela, toutes nos maisons disposaient d'un branchement électrique de 15 ampères, lorsque nous étions reliés aux centrales alimentées au diesel de Manitoba Hydro. Avec l'introduction de ces nouvelles lignes de transport d'énergie, nous pouvions être munis d'un service de 200 ampères, mais en même temps, aucun coût n'était prévu pour la rénovation de nos maisons à cet effet. Notre communauté voulait toutefois des services d'eau et de traitement des eaux usées.

Le chef de l'époque a signalé le problème au ministère, et on nous a proposé une avance de 1 million de dollars sur le capital de base accordé à la bande. Ensuite, on a emprunté 769 000 $ à la banque. Cette dette a en quelque sorte ruiné notre Première Nation, mais cela dit, nous reconnaissons les avantages d'avoir l'eau courante. Au nord-est du Manitoba, la Nation des Cris de Manto Sipi a été la première à avoir l'eau courante dans chacun de ses foyers.

En décidant de nous prêter à la demande de notre peuple, nous n'avions plus de fonds pour le logement, et ce, pour une période de 10 ans. Nous avons été contraints à une cogestion. Évidemment, des gens en ont souffert, puisque 70 p. 100 de notre population est âgée de 29 ans et moins. Notre population augmente sans cesse. Notre capital de base pour la bande n'a pas augmenté depuis 30 ans, malgré une augmentation démographique rapide.

Je m'occupe de nos services d'administration, et j'en suis à mon troisième mandat comme chef de ma collectivité, et j'ai toujours fait valoir qu'il nous fallait un financement en fonction de notre population. Comment peut-on assurer la prestation de ce type de services et répondre aux besoins de la population avec de telles iniquités dans le financement?

C'est la raison pour laquelle la plupart des Premières Nations sont dans une situation d'intervention. Certaines d'entre elles n'ont pas les moyens de tirer profit du développement économique pour répondre à leurs besoins. Nous sommes situés dans des collectivités isolées dans lesquelles 80 p. 100 de nos jeunes perdent espoir.

Voici les photos que nous avons distribuées aujourd'hui — on peut y voir de la moisissure, même dans cette chambre où vivent ces deux enfants. Nous avons un capital de base de 381 000 $. Cette somme est loin d'être suffisante pour effectuer ces rénovations.

Cela fait maintenant cinq ou six années d'affilée que le Canada figure parmi les pays où l'on vit le mieux dans le monde. Je n'ai jamais approuvé ce classement, surtout quand on sait que notre peuple vit dans des conditions similaires à celles du tiers monde.

J'aimerais attirer votre attention sur une autre question. Au moment où l'on se parle, la ville de Winnipeg est sous le coup d'un avis d'ébullition de l'eau. Or, chaque jour, les Premières Nations font face à ce type de problème, mais cela ne retient pas l'attention du public. Pourtant, lorsqu'un grand centre urbain est confronté à cette situation, cela fait tout de suite les manchettes.

Je viens d'une organisation qui s'appelle le Conseil tribal du Keewatin. La plupart des collectivités dans cette région sont également aux prises avec ces difficultés. Notre collectivité reçoit des appels tous les jours au sujet du logement. On a réalisé de nombreuses études sur les peuples autochtones, et on a conclu que les choses doivent changer.

Je ne veux pas manquer de respect au Sénat, mais en même temps, je ressens la souffrance que vit mon peuple au quotidien. Les gens doivent s'entasser dans des maisons surpeuplées. On ne verrait pas cela en milieu urbain. Près de 60 p. 100 de nos logements seraient condamnés. Nous avons même un logement qui a été construit en 1969, mais nous avons dû y effectuer des rénovations pour permettre à une famille de six de s'y installer. Une autre famille, qui comptait près de 18 membres, vivait dans une maison de quatre chambres.

Nous avons un énorme arriéré en matière de logement dans notre collectivité. Environ 60 logements devraient y être construits. Au coût d'aujourd'hui, cela représenterait 300 000 $ par unité, alors que le capital de base pour la bande ne s'élève qu'à 381 000 $. Manifestement, il y a quelque chose qui cloche.

Je considère que nos enfants sont notre avenir et qu'ils méritent de grandir dans un environnement sain et confortable, mais ce n'est pas le cas au moment où je vous parle. Je deviens toujours très émotif lorsque j'en parle. Cela fait près de 8 ans que je suis le chef de ma collectivité et près de 10 ans que je m'occupe de l'administration. Quand je vois le gouvernement fédéral accorder des fonds à d'autres pays dans le besoin, j'en suis profondément attristé. J'espère toutefois que le travail accompli par le comité du Sénat permettra d'améliorer les infrastructures des Premières Nations.

Nos infrastructures d'aqueduc et d'égouts ont atteint leur capacité maximale. Nous demandons au ministère de mettre à niveau nos usines de traitement de l'eau et des eaux usées, mais nos réclamations ne sont pas entendues.

Sans vouloir prendre trop de votre temps, j'aimerais que notre conseiller, Daniel Ross, puisse vous dire quelques mots.

Daniel Ross, conseiller, Nation des Cris de Manto Sipi : Vous connaissez à présent la raison pour laquelle nous comparaissons devant vous aujourd'hui. La question des infrastructures dans notre collectivité nous tient vraiment à cœur, car elle influe sur notre mode de vie et sur la façon dont nos enfants grandissent. Ils vivent dans des maisons envahies par la moisissure. Nous préférerions ne pas être témoins de ce genre de choses, et pourtant, c'est ce que nous voyons, jour après jour.

Lorsque le projet Centre-Nord de Manitoba Hydro a été mis sur pied, il aurait fallu, à l'époque, étudier comment y relier les maisons. Il ne suffit pas de brancher la nouvelle ligne de transport d'électricité aux maisons existantes. Il faut d'abord les équiper à cet effet, et cela aurait dû être mieux planifié.

Tout cela a eu des répercussions, et nous en payons la note aujourd'hui. Permettez-moi de retourner un peu en arrière.

Lorsque nous avons installé les systèmes d'alimentation électrique dans nos logements, on ne nous avait pas dit qu'il fallait avoir un ventilateur récupérateur de chaleur dans chaque logement. Nous en subissons aujourd'hui les conséquences. À mon avis, c'est ce qui est à l'origine de toute la moisissure. La chaleur et les vapeurs ne peuvent s'échapper, alors elles causent de la moisissure. C'est de là que découlent tous les problèmes dans nos logements.

Nous estimons que des études adéquates auraient dû être réalisées par le gouvernement fédéral et même par Manitoba Hydro avant qu'on ne relie la nouvelle ligne à nos logements. Nous en voyons les effets quotidiennement. Nos logements, comme le chef l'a dit, seraient condamnés si quelqu'un les inspectait. Il faut absolument prendre des mesures draconiennes pour corriger la situation, non seulement dans notre collectivité, mais dans les collectivités avoisinantes également. Chaque fois que nous nous réunissons avec les dirigeants d'autres collectivités, nous discutons de ces situations et des façons d'améliorer les choses. Nous voulons agir, mais comme le chef l'a dit, le ministère fait la sourde oreille. Grâce à l'aide de votre comité et à vos recommandations, quelles qu'elles soient, j'espère que nous pourrons voir des améliorations dans nos collectivités.

Le président : Je vous remercie d'avoir décrit la situation du logement et les difficultés auxquelles vous êtes confrontés avec autant de détails.

J'aimerais vous poser quelques questions sur le projet concernant les écoles, étant donné que nous nous penchons sur d'autres aspects que le logement dans le cadre de cette étude. Je crois savoir que votre collectivité participe à un projet de PPP visant à construire et à entretenir quatre écoles dans quatre collectivités de votre région. Pourriez-vous nous dire où en sont les choses aujourd'hui et si vous faites des progrès?

M. Yellowback : Notre collectivité, Manto Sipi, essaie d'obtenir son école depuis 1997. Nous avons réalisé trois études de faisabilité, dont la première remonte à 1996. Ensuite, nous avons reçu une lettre du ministère en 1998 nous informant que nous pouvions aller de l'avant avec notre projet. Il a fallu plusieurs années pour démarrer le projet, mais en 2005, le ministère nous a donné le feu vert pour entreprendre la construction de notre nouvelle école.

En 2006, on a procédé à la conception architecturale. Le ministère des Affaires indiennes a dépensé plus de 600 000 $ pour cette phase du projet. Si je vous parle de tout cela, c'est parce que nous étions prêts à passer à l'étape de la construction lorsque le ministère a décidé de mettre fin au projet, et ce, même s'il avait investi 600 000 $ dans la conception architecturale. Personne n'a remis cela en question, et 600 000 $ ont été gaspillés.

Plusieurs années plus tard, si je ne me trompe pas, c'était en novembre 2010, j'ai reçu un appel me demandant si nous étions intéressés à prendre part à des discussions au sujet de la construction d'écoles en PPP. Nous avons tout de suite saisi l'occasion, qui comportait également une collaboration avec d'autres collectivités des Premières Nations. On nous a dit qu'il s'agissait d'une façon tout à fait novatrice de construire des écoles sur les réserves. Les pourparlers allaient bon train, et le ministère a même dépensé de l'argent pour tenir ce dialogue, mais au final, le ministère a choisi de ne pas opter pour le PPP pour construire des écoles.

Maintenant, nous collaborons avec trois autres Premières Nations dans le cadre de ce projet de construction d'écoles dans le Nord. On m'a dit que les choses avançaient. En même temps, étant donné ce que nous avons vécu dans notre collectivité, lorsqu'on a mis fin à notre projet en 2006, nous avons tout de même certaines réserves. Nous espérons que la situation ne se répétera pas.

Cela dit, nous nous réjouissons pour nos jeunes enfants, qui auront finalement un nouvel établissement d'enseignement. L'école existante est surpeuplée depuis son ouverture. En 1992, le ministère a installé trois roulottes temporaires ATCO comme salles de classe. Je n'ai toujours pas reçu la réponse du ministère quant à sa définition du mot « temporaire ». Vingt ans plus tard, nous nous servons toujours de ces classes portatives. Il y a trois ans, on a installé cinq autres bâtiments mobiles pour répondre à la demande. C'est la raison pour laquelle notre collectivité et les chefs des trois autres collectivités exercent des pressions pour faire avancer le projet; je suis ravi d'entendre que les choses vont bon train.

Nous avons choisi un coordonnateur de projet, et nous irons de l'avant avec la conception architecturale. Nous nous attendons à ce que les matériaux de construction nous soient expédiés à l'hiver 2017, avec une date d'ouverture prévue de janvier 2019 pour toutes les écoles.

Le président : Merci pour ces renseignements fort utiles.

Le sénateur Sibbeston : J'aimerais revenir aux photos des maisons de votre collectivité que vous nous avez fournies. Ces maisons sont dans un piètre état. On voit ici un plafond qui est complètement pourri. Évidemment, le toit coule et le plancher est en train de se décoller. Certaines personnes trouveraient la situation déplorable. Par contre, il y en a d'autres qui diraient : « C'est quoi votre problème? Vous n'arrivez pas à réparer vos maisons vous-mêmes? Et pourquoi dépendriez-vous du gouvernement fédéral pour tout? Pourquoi comptez-vous sur le gouvernement fédéral pour réparer vos maisons? » La plupart des gens au pays s'occupent de leur propre maison, et ce sont seulement les Indiens et les membres des Premières Nations qui dépendent du gouvernement fédéral pour leurs maisons. Je pense qu'il serait bon que vous expliquiez pourquoi il en est ainsi aux Canadiens qui ne connaissent pas très bien les conditions des Premières Nations dans les régions éloignées du pays.

Personnellement, je viens des Territoires du Nord-Ouest, et je sais très bien comment vivent les peuples des Premières Nations. Il y a à peine une ou deux générations, les gens vivaient dans la forêt, le long des lacs et des rivières. Le gouvernement a amené les gens à se rassembler en communauté, notamment pour l'éducation, mais aussi parce qu'à bien des égards, c'était plus facile à gérer. On a ensuite commencé à leur fournir des logements et ainsi de suite.

Lorsque les membres des Premières Nations vivaient dans la forêt à l'époque, ils étaient très bien. Ils chassaient, trappaient, pêchaient et assuraient leur survie. Toutefois, lorsqu'ils sont arrivés en ville, les choses ont changé. Vivre dans le bois n'est pas comme vivre en communauté. Voilà qui explique un peu la situation; on passe d'un mode de vie à un autre. Les changements sur les plans culturel et social sont assez radicaux. Je pense qu'il serait utile que vous expliquiez aux Canadiens pourquoi vous ne réparez pas tout simplement vos maisons et pourquoi vous vous tournez toujours vers le gouvernement fédéral. C'est parce que cela ne se réglera jamais. Il faudra beaucoup trop de temps.

M. Yellowback : Je vous remercie de votre question.

Premièrement, sachez que lorsque nous avons converti nos logements pour qu'ils puissent recevoir l'eau courante, nous n'avions pas prévu que cela se produirait, car personne ne nous l'avait dit. C'était la première fois que nous avions l'eau courante. Mon collègue a parlé du fait que nous ne disposions pas de ventilateurs-récupérateurs de chaleur.

En même temps, pour répondre à votre question, le capital de base de la bande n'est que de 381 000 $. À partir de là, on soustrait des frais supplémentaires de 27 800 $ et nous devons payer l'assurance, c'est-à-dire 40 000 $. Nous tentons d'obtenir des logements de la SCHL, mais nous devons également passer par le cautionnement. Notre plan d'immobilisations doit sortir de là pour fournir le cautionnement pour les logements de la SCHL.

De plus, nous avons présenté un Plan d'action de la gestion pour rembourser notre dette et une partie de notre plan d'immobilisations est consacrée au remboursement de notre dette totale.

J'aimerais également répondre à une autre question. Nos Premières Nations, surtout dans notre collectivité, tentent de tirer parti de la mise en valeur des ressources dans les collectivités, afin de relever les défis auxquels elles sont confrontées. Toutefois, trop souvent, l'industrie exploite nos ressources sans la participation des Premières Nations. Par exemple, dans le Nord du Manitoba, on extrait des ressources d'une valeur de 3 milliards de dollars. Quelle proportion des profits est envoyée aux Premières Nations? Zéro. Si nous obtenions notre juste part de ces profits, je n'aurais pas besoin de comparaître devant votre comité du Sénat aujourd'hui. Nous avons un gisement de lithium important à environ 10 kilomètres de notre collectivité, et nous essayons d'en tirer parti.

Nous comprenons maintenant que nous devons sortir des sentiers battus. En même temps, nous ne pourrons pas résoudre nos problèmes sociaux tant que les défis et les problèmes de bureaucratie ne seront pas réglés et tant que le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ne nous donneront pas accès aux occasions de développement économique qui nous reviennent.

En ce moment, nous nous concentrons surtout sur le développement économique pour répondre à nos besoins en matière de logement, mais c'est un défi lorsque les obstacles ne font que se succéder.

Le président : Merci. J'aimerais faire un suivi de votre réponse avant de donner la parole à la sénatrice Greene Raine.

Vous avez mentionné le prêt à long terme qui a été obtenu pour installer l'eau courante. Je crois que c'était en 1998, et cela comprenait aussi l'électrification. Dans votre réponse, vous avez également mentionné les problèmes liés à l'acquisition de logements de la SCHL.

D'après ce que je comprends, il y avait un plan visant à convertir certains logements aux termes de l'article 10, c'est- à-dire qu'on aurait converti ces logements afin d'obtenir un revenu de location du Programme d'allocation-logement. Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois qu'on a converti quelque 70 logements. Je crois comprendre qu'on espérait que les revenus de l'allocation-logement aident à rembourser le prêt obtenu pour l'électrification et l'installation de l'eau courante. Pouvez-vous me dire si ce plan s'est concrétisé et si cela vous a aidés?

M. Yellowback : L'obtention de ces deux prêts a créé un fardeau financier supplémentaire pour notre collectivité. Bien sûr, on m'a dit que nous l'avions remboursé à partir de notre allocation-logement aux termes de l'article 10. Toutefois, en même temps, la grande partie du remboursement de notre dette a servi à payer ces prêts au lieu de servir à rénover ces logements.

Il faut comprendre que certains de ces logements ont été construits dans les années 1960, 1970 et 1980. Les 70 logements auxquels vous faites référence sont dans un état pitoyable aujourd'hui, et c'est difficile. Avec les 769 000 $ que nous avons empruntés, et nous ne comptons pas les intérêts que nous avons déjà dû rembourser, c'est très élevé et cela a été très difficile pour nous. Il nous a fallu environ 10 ans pour obtenir une garantie de prêt ministérielle pour avoir accès aux logements de la SCHL aux termes de l'article 95, mais nous avons fait preuve de diligence et nous avons tenté d'obtenir plus de logements.

En ce moment, notre collectivité compte 130 logements. Au cours des quatre dernières années, nous avons construit environ 28 logements, et 5 autres logements seront construits cet été. Mais en même temps, faire affaire avec la SCHL crée une responsabilité supplémentaire, car nous devons rembourser ces fonds. Il ne s'agit pas seulement de ces deux prêts, car nous tentons de régler notre pénurie de logements qui, selon nos estimations, représente environ 60 logements.

La sénatrice Raine : Je ne sais pas vraiment par où commencer. Il semble que vous êtes dans une situation désespérée.

Avant la connexion au nouveau réseau hydroélectrique, c'est-à-dire lorsque vous étiez connectés au réseau initial alimenté au diesel, les logements étaient-ils en meilleur état? Le nouveau réseau hydroélectrique, la nouvelle plomberie et les nouveaux services d'eau ont-ils créé ces problèmes de moisissure et de détérioration des logements? Les logements étaient-ils en meilleur état avant l'installation des systèmes modernes d'hydroélectricité et d'eau?

M. Ross : Je dirais que non, car certains des logements de l'époque avaient des murs construits en deux par quatre, et maintenant ces murs sont construits avec des deux par six. Toutefois, il fallait pratiquement faire fonctionner la fournaise électrique au maximum pour réussir à les chauffer. À l'époque, le chauffage fonctionnait beaucoup mieux si on utilisait un poêle à bois. On pouvait obtenir plus de chaleur en ajoutant du bois dans le poêle. Cela durait plus longtemps, et ce n'était pas si dispendieux.

En ce moment, lorsqu'il faut faire fonctionner la fournaise pendant les mois d'hiver, dans certaines maisons, la facture d'électricité peut être de 300 à 600 $ par mois seulement pour le chauffage. Certains de ces logements n'ont pas les bonnes portes ou les bonnes fenêtres, et la chaleur s'échappe.

Pour répondre à votre question, à l'époque, si vous utilisiez un bon poêle à bois c'était bien, mais aujourd'hui, je crois que la situation ne s'est pas améliorée.

La sénatrice Raine : Y a-t-il une bonne source de bois de chauffage dans votre région?

M. Ross : Oui. Nous en avons de grandes quantités.

La sénatrice Raine : Nous avons visité des collectivités dans le Nord de l'Ontario, et il semble que les logements en construction n'étaient pas conçus pour le Nord, mais plutôt pour le Sud. Ils semblent peut-être beaux et modernes, mais s'ils ne sont pas conçus pour résister au climat, les problèmes surgiront. Si vous deviez tout recommencer, préconiseriez-vous un autre type de logement?

M. Yellowback : Nous avons répété que le Code national du bâtiment ne correspond pas à notre environnement. Je crois que c'est l'un des défis auxquels nous sommes confrontés. Lorsque nous faisons une demande de logement de la SCHL, nous devons nous conformer au Code national du bâtiment.

La sénatrice Raine : Il me semble, comme l'a dit le sénateur Sibbeston, que lorsque vous viviez dans le bois dans de petites cabanes que vous construisiez vous-même, vous étiez probablement plus confortables que 10 ans plus tard dans une maison moderne au sein d'une collectivité. Il y a quelque chose qui cloche. Notre défi consiste à déterminer comment nous pouvons concevoir des logements durables qui répondent aux besoins de votre peuple.

M. Yellowback : Je vous suggère de consulter nos gens, nos techniciens, car ils connaissent bien notre milieu naturel.

Nous nous sommes rendu compte que lorsque nous tentons d'exprimer nos préoccupations liées à la construction de logements dans nos collectivités, on ne nous écoute pas.

La sénatrice Raine : Pourtant, vous devez accepter ce que ces personnes vous disent, car elles vous donnent l'argent dont vous avez besoin?

M. Yellowback : Oui.

La sénatrice Raine : Que se passe-t-il avec la nouvelle école? Qui en dresse les plans? Conviendra-t-elle à votre milieu?

M. Yellowback : Il y a environ 300 collectivités participantes et nous aurons au moins notre mot à dire. Nous aurons une voix, car l'une des choses qu'on nous a dites, c'est que la construction des quatre écoles suivra une nouvelle approche innovatrice au lieu de...

La sénatrice Raine : Votre innovation?

M. Yellowback : Oui.

La sénatrice Raine : Vous nous avez également fourni des renseignements au sujet de l'augmentation des tarifs d'hydroélectricité, et elle représente un double affront. Il me semble que lorsqu'on vous a offert cette merveilleuse hydroélectricité, on vous a rendus dépendants de cette source d'énergie et elle n'a pas vraiment amélioré votre qualité de vie.

M. Yellowback : En ce moment, ma facture d'hydroélectricité personnelle s'élève bien au-delà de 300 $. Cela dépend de chaque logement. Certaines personnes paient 500 $. Aujourd'hui, nous avons découvert qu'une facture d'électricité s'élevait à plus de 1 200 $ pour un mois.

La sénatrice Raine : C'est la combinaison de l'isolation et de la mauvaise conception qui fait en sorte que lorsque vous ouvrez la porte, toute la chaleur s'échappe, car il n'y a aucune double porte ou double fenêtre.

M. Yellowback : Oui.

La sénatrice Raine : Lorsque vous construisez de nouveaux logements maintenant — vous avez dit que vous aviez bâti 28 maisons au cours des quatre dernières années —, s'agit-il du même type de maison qui a été construite et qui ne convient pas?

M. Yellowback : C'est un peu différent. Comme je l'ai dit, nous devons nous conformer au Code national du bâtiment, mais nous faisons de notre mieux pour nous conformer à ce code et aux lignes directrices de la SCHL.

De plus, avant la rénovation de nos logements, nous n'avions pas ces planchers spécialisés, c'est-à-dire les tuiles d'aluminium spécialisées, dans les salles de bain des logements de la collectivité lorsque nous les avons rénovés. Au cours des cinq dernières années, nous avons dû rénover la salle de bain d'environ 60 maisons à un coût minimal de 5 000 $ à 10 000 $ par maison.

La sénatrice Raine : Parce que le plancher ne convenait pas?

M. Yellowback : Le plancher, oui. Nous avons vu une toilette pratiquement s'effondrer dans le vide sanitaire.

La sénatrice Raine : Il est évident que le Code du bâtiment ne convient pas à vos maisons.

M. Yellowback : Non.

La sénatrice Raine : Ce que je trouve surprenant, c'est que partout au pays, on peut trouver des maisons de pionniers construites au début des années 1900 qui sont toujours debout.

M. Yellowback : Nous avons une cabane qui a été construite il y a environ 40 ans et qui est située à environ 40 milles en aval de la rivière. Elle est toujours debout et elle est en très bon état.

La sénatrice Raine : Y a-t-il quelque chose qui vous empêche de bâtir ce type de maison aujourd'hui?

M. Yellowback : Oui, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

La sénatrice Raine : Quel serait le coût de ce type de maison comparativement au coût des nouvelles maisons?

M. Yellowback : Elles seraient beaucoup plus économiques.

Nous avons tenté d'ouvrir notre propre scierie pour utiliser nos ressources afin de construire nos maisons, mais la difficulté, c'est de faire en sorte que le ministère reconnaisse ces maisons et s'occupe des rénovations, de la construction de ces maisons, et cetera, car nous avons le potentiel de construire nos propres maisons.

La sénatrice Raine : Quelle est la taille des billes de bois où vous vivez? Conviennent-elles à la construction de maisons en bois rond?

M. Yellowback : Oh oui.

La sénatrice Raine : Pourtant, une maison en bois rond ne serait pas approuvée par la SCHL? Est-ce bien ce que vous me dites?

M. Yellowback : Oui.

La sénatrice Raine : Mon mari et moi avons bâti une maison en bois rond. Nous ne l'avons pas bâtie nous-mêmes, mais nous avons vécu dans une maison en bois rond et c'est la meilleure maison dans laquelle nous avons vécu.

M. Yellowback : Nous avons entendu les représentants d'une autre Première Nation qui ont également contesté cette situation.

La sénatrice Raine : Quelqu'un m'a dit que le problème, ce n'est pas que ce type de maison ne serait pas approuvé, c'est qu'il serait plus dispendieux. Mais vous êtes en désaccord avec cette affirmation?

M. Yellowback : Oui, nous sommes en désaccord avec cette affirmation.

La sénatrice Raine : Parce que vous pouvez utiliser votre main-d'œuvre locale?

M. Yellowback : Oui.

La sénatrice Raine : Je vous remercie beaucoup. Vos réponses ont été très utiles.

La sénatrice Fraser : J'espère que ma question n'est pas fondée sur un manque excessif de renseignements. Il me manque beaucoup d'information, car je ne suis pas membre du comité, j'ai seulement la chance d'être ici ce soir.

Le document que vous nous avez fourni sur l'histoire et surtout sur l'histoire de la construction m'intéresse. Je suis sûre que ce document vient de vous, n'est-ce pas?

M. Yellowback : Oui.

La sénatrice Fraser : À l'époque, des solives portantes ont été coupées pour créer un espace pour les tuyaux. Des colonnes de plomberie n'ont pas été scellées de façon appropriée, ce qui a provoqué des pertes de chaleur et de la moisissure dans le grenier, et cette dernière se condense sous les toits, pourrit le revêtement et cause des fuites. Les revêtements de sol dans les vides sanitaires n'ont pas été scellés de façon appropriée lorsque les conduites d'eau et d'égout ont été installées, ce qui a entraîné le suintement de l'eau et des inondations et, je présume, encore plus de moisissure.

N'aviez-vous aucun recours? Dans le Sud, lorsque des constructeurs font une erreur monumentale, vous pouvez les poursuivre en justice, et parfois, vous pouvez obtenir un remboursement. Avez-vous essayé? Avez-vous été en mesure de le faire?

M. Yellowback : Comme je l'ai dit dans mon exposé plus tôt, la grande partie de nos logements ont été construits dans les années 1960, 1970, 1980 et au début des années 1990. Nous n'avions pas prévu cela lorsque nous avons rénové nos logements, car on m'a dit que jusqu'en 1998, nos logements ne pourraient pas soutenir le nouveau système d'eau et d'égout.

Nous avons fait de notre mieux pour résoudre les problèmes. Étant donné le financement que nous recevons du ministère et les efforts que nous déployons pour résoudre ces problèmes, nous procédons une petite étape à la fois.

Dans l'ensemble, il y a quatre ans, une personne a visité chaque maison pour estimer les coûts liés à la résolution des problèmes que vous avez mentionnés, et la facture s'élevait à près de 500 000 $.

Vous suggérez de poursuivre ces individus en justice, mais le problème, c'est que la majorité d'entre eux font partie de la main-d'œuvre locale. Ils ont reçu une formation, mais en même temps, on m'a dit que conformément aux applications de la SCHL, nous avons des sous-traitants, ce qui est également vrai dans la construction des écoles. Lorsqu'ils ont terminé, nous n'avons aucun recours.

La sénatrice Fraser : C'était ma question, car certaines de ces choses, par exemple le fait de couper les solives portantes, devraient vous permettre d'obtenir un remboursement, mais vous n'avez pas été en mesure d'y arriver? Vous ne pouviez pas les poursuivre en justice?

M. Yellowback : Le problème, c'est que dans notre collectivité, lorsque ces maisons ont été construites, nous n'avions pas prévu que nous aurions l'eau courante.

La sénatrice Fraser : Je comprends. Je suis certaine que les gens faisaient de leur mieux pour installer les nouveaux systèmes dans les vieilles maisons, mais il me semble que les choses ont terriblement mal tourné dès le début de ces travaux, et il est malheureux que vous n'ayez pas été en mesure d'avoir des recours à ce moment-là.

M. Ross : J'aimerais ajouter quelque chose en ce qui concerne le suintement de l'eau dans les maisons. Une grande partie du problème était également liée aux conditions du sol.

Notre collectivité est située sur un terrain recouvert de sphaigne et d'argile limoneuse. Lorsque toutes ces maisons ont été reliées au système d'eau et d'égout, on a versé un lit de sable et de gravier sur les tuyaux. Toutefois, l'eau souterraine a suinté dans certaines maisons qui reposaient sur une mauvaise fondation d'argile limoneuse. De plus, cela a causé certains problèmes de moisissure dans les maisons.

La sénatrice Fraser : Essentiellement, l'analyse du sol n'était pas adéquate et n'a pas révélé que le lit de sable ne convenait pas?

M. Ross : C'est exact.

La sénatrice Fraser : Oh mon Dieu. Merci beaucoup.

Le sénateur Lang : J'aimerais revenir sur l'une des affirmations qui ont été faites plus tôt. Avez-vous dit qu'il y avait une scierie dans votre collectivité?

M. Yellowback : Oui.

Le sénateur Lang : Qui possède et exploite la scierie, et qui achète le bois de sciage?

M. Yellowback : Nous avons investi dans une scierie. Nous espérions pouvoir utiliser nos ressources, car nous pensions pouvoir couper notre propre bois. Nous avons formé environ 10 jeunes hommes pour travailler à ce projet, mais en même temps, nous avons seulement reçu un financement limité pour la formation et l'embauche. Nous apportons notre contribution, mais nous avons également des problèmes de financement.

Le sénateur Lang : La scierie est-elle en activité?

M. Yellowback : Oui.

Le sénateur Lang : Vous produisez et vous vendez du bois de sciage?

M. Yellowback : Nous ne vendons pas de bois de sciage.

Le sénateur Lang : Je ne comprends pas vraiment. Il me semble que si vous avez une scierie, vous devriez l'utiliser pour fournir le bois de sciage servant à la construction de vos maisons. Il me semble que c'est un enchaînement logique. Je ne comprends pas vraiment ce qui s'est produit. Depuis combien de temps avez-vous la scierie?

M. Yellowback : Nous l'avons depuis deux ans. Nous ne sommes pas comme ces entreprises de bois d'œuvre. Nous n'avons pas d'équipement de pointe. Nous avons seulement cette petite machine de scierie. Un de nos objectifs à long terme est de récolter le bois qui est à notre disposition dans notre région, mais notre objectif ultime est de construire une unité de logement quand nous aurons récolté ce bois.

Le président : Peut-être que je pourrais donner suite aux questions de la sénatrice Fraser. Il est impressionnant de voir que vous avez eu l'hydro et l'eau courante. Je pense que vous avez dit que vous étiez les premiers de votre région à avoir de l'eau courante, et que vous y avez eu droit en travaillant avec le ministère. Pourtant, vous n'avez pas obtenu les fonds nécessaires pour vous brancher aux réseaux d'électricité et d'alimentation en eau. Je me demande si vous pourriez nous parler de vos relations avec les gens du ministère. Comment avez-vous pu réussir à faire ce pas de géant sans obtenir les fonds nécessaires pour mener à bien le projet?

Pourriez-vous nous décrire vos relations de travail avec eux? Est-ce qu'ils se rendent dans vos communautés pour s'entretenir avec vous? Les choses semblent avoir fonctionné jusqu'à un certain point, mais avoir mal tourné par la suite. Que s'est-il passé?

M. Yellowback : Je ne m'occupais pas du dossier au moment où cette entente a été conclue, mais pendant ces 10 ans, malgré nos efforts constants pour dénoncer la pénurie de fonds, nous avons eu de bonnes relations avec les gens du ministère.

Pour revenir aux prêts, je ne sais pas, mais si j'avais eu à choisir entre le fait d'endetter notre Première Nation davantage et le fait de permettre à nos membres de bénéficier de l'eau courante et d'un meilleur approvisionnement électrique, j'aurais opté pour le dernier. Le reste du Canada bénéficie de l'eau courante depuis le siècle dernier. Jusqu'en 1998, nos membres devaient aller à l'école pour prendre une douche. Nous devions aller dehors pour utiliser des toilettes sèches.

À cause de la manière dont les prêts ont été structurés, pendant 10 ans, nous avons souffert du manque de nouveaux logements et, chaque année, nous avons été obligés de payer un certain montant au ministère pour ces avances de fonds. Par conséquent, nous remboursons encore le prêt de 769 000 $, et nous allons continuer de le rembourser pendant plus de 10 ans. Voilà la situation financière dans laquelle le ministère nous a mis en agissant de cette manière.

Le président : Pourriez-vous nous dire comment vous interagissez avec le ministère, quel est le bureau avec lequel vous communiquez et si des représentants se rendent dans votre communauté?

M. Yellowback : En général, nous communiquons avec le bureau de la région du Manitoba, à Winnipeg. Oui, des représentants du ministère viennent dans notre communauté de temps en temps pour aborder des questions qui nous concernent. Tous les trois mois, nous avons une réunion trimestrielle; ils les appellent des réunions trimestrielles de surveillance et d'intervention de la gestion. Par contre, aucun fonctionnaire de haut niveau du bureau de la région du Manitoba ne vient dans notre communauté, seulement ceux qui sont en bas du mât totémique, si vous me pardonnez l'expression.

Le président : Vous avez indiqué que certains progrès sont réalisés en ce qui concerne le projet d'écoles, même s'ils semblent se réaliser lentement. Au départ, il s'agissait d'un projet P3. Les Premières Nations sont admissibles à du financement par P3 Canada, je crois, mais d'après ce que j'ai compris, il ne s'agit plus d'un projet P3. Savez-vous pourquoi ce n'est plus un projet P3? Pourriez-vous nous décrire les interventions du ministère dans le projet actuel? Savez-vous comment il travaille avec les autres communautés dans votre région?

M. Yellowback : Nous étions follement heureux — surtout du fait que, pendant nos recherches, nous avions discuté des P3 — des avantages dont nous pourrions bénéficier du ministère et des autres intervenants. À notre avis, tout le monde aurait été gagnant. Toutefois, en mai dernier, le ministère nous a annoncé qu'il considérait que ce n'était pas la bonne façon de procéder à cause des problèmes d'entretien et du fait que l'industrie n'avait manifesté aucun intérêt à ce sujet.

Je ne suis pas d'accord. Beaucoup d'intérêt a été manifesté, parce que les grandes institutions financières du Canada m'ont contacté et d'autres importants entrepreneurs de l'industrie nous ont contactés. Selon moi, cela aurait été avantageux pour le Canada, le ministère et les Premières Nations.

Du fait que nous construisons ces écoles de la manière traditionnelle, cela accorde à l'entrepreneur une beaucoup plus grande responsabilité décisionnelle pour construire ces écoles, qui dureront 40 ans.

De la manière dont le projet de la nouvelle école est présentement structuré, tout va bien. Comme je l'ai dit, nous venons d'élire notre nouveau coordonnateur du projet d'école, et je sais que des représentants du ministère ici à Ottawa se sont engagés à construire ces quatre écoles pour nos communautés. Je félicite les personnes qui participent aussi, mais ce n'est quand même pas le projet P3 que nous espérions avoir. Au moins, c'est une nouvelle école pour nos enfants.

Le sénateur Oh : Chef, tout à l'heure, vous avez dit que, dans votre communauté, vous avez un homme qui fait de bons travaux d'entretien. Or, d'après ce que vous nous avez montré, vous avez de la moisissure et des fuites d'eau. Les travaux d'entretien ne sont pas bien faits puisque vos maisons ont ces problèmes. Pourquoi ne vous aide-t-il pas à entretenir vos maisons?

M. Yellowback : Je ne pense pas que j'aie dit que nous avions un bon bilan sur le plan de l'entretien. Nous avons ces problèmes. Tous les jours, nous recevons des appels des membres de notre communauté à ce sujet, et nous en prenons note. En même temps, le financement limité auquel nous avons droit ne nous permet pas de rénover toutes les maisons pour répondre aux besoins des gens.

Nous avons toujours dit que notre priorité est le logement. Nous avons effectué notre planification stratégique, et le logement est notre priorité. Je sais que chaque organisation, y compris le Sénat et même le Parlement, doit penser qu'elle a un bon bilan, mais ce n'est pas le cas. Je félicite les membres de mon personnel pour tout ce qu'ils essaient de faire pour notre communauté, malgré les fonds limités dont nous disposons pour régler tous ces problèmes.

Le sénateur Oh : Est-ce que votre nation a droit à un budget ou à un financement annuel du gouvernement?

M. Yellowback : Oui. Aux termes du Plan d'investissement national dans l'infrastructure des Premières Nations, nous recevons 381 000 $, mais cela ne suffit pas. Avec cet argent, nous devons entretenir nos routes l'hiver, payer nos assurances et notre cautionnement, rembourser l'emprunt et réparer nos routes aussi.

Le sénateur Oh : Donc la seule somme d'argent que vous recevez du gouvernement, c'est 381 000 $?

M. Yellowback : Oui.

Le président : C'est la somme qui est destinée à l'infrastructure et aux logements. Vous recevez d'autres fonds pour l'éducation et d'autres domaines.

M. Yellowback : Oui.

Le président : Pour clarifier, je crois que c'était votre réponse.

M. Yellowback : Pour couvrir nos coûts de fonctionnement et d'entretien — l'éducation et nos bâtiments de fonctionnement et d'entretien.

Le président : Au nom du comité, j'aimerais vous remercier d'être venus de si loin et de l'excellente information que vous nous avez présentée tant de vive voix, que dans les documents que vous avez fait circuler, notamment ces images frappantes. Merci d'avoir bien voulu nous aider dans notre travail.

Sur ce, chers collègues, merci d'avoir été présents. Nous remercions les sénateurs qui ne sont pas des membres réguliers du comité pour leurs contributions.

(La séance est levée.)


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