Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Langues officielles
Fascicule 1 - Témoignages du 25 novembre 2013
OTTAWA, le lundi 25 novembre 2013
Le Comité sénatorial permanent des langues officielles se réunit aujourd'hui, à 17 heures, pour poursuivre son étude sur l'application de la Loi sur les langues officielles ainsi que des règlements et instructions en découlant, au sein des institutions assujetties à la loi.
SUJET : Rapport annuel du commissaire aux langues officielles 2012-2013
La sénatrice Claudette Tardif (présidente) occupe le fauteuil.
[Français]
La présidente : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des langues officielles ouverte. Je m'appelle Claudette Tardif, je suis de l'Alberta et j'ai le privilège de présider ce comité. J'aimerais inviter les sénateurs à se présenter en commençant à ma gauche.
La sénatrice Champagne : Je suis Andrée Champagne, sénatrice du Québec.
Le sénateur McIntyre : Paul McIntyre, sénateur du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Suzanne Fortin-Duplessis du Québec.
La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Chaput : Sénatrice Maria Chaput du Manitoba.
La sénatrice Charette-Poulin : Marie Charette-Poulin, du Nord de l'Ontario.
La présidente : Le commissaire aux langues officielles a déposé son rapport annuel de 2012-2013 au Sénat le 7 novembre dernier, conformément à l'article 66 de la Loi sur les langues officielles.
Cet après-midi nous recevons le commissaire, M. Graham Fraser, pour discuter des conclusions énoncées dans son rapport. C'est toujours un plaisir de vous recevoir, monsieur le commissaire. Merci beaucoup d'être ici avec nous aujourd'hui.
Nous avons aussi Ghislaine Saikaley, commissaire adjointe, Direction générale de l'assurance de la conformité; M. Sylvain Giguère, commissaire adjoint, Direction générale des politiques et des communications; et Mme Johane Tremblay, directrice et avocate générale, Direction générale des affaires juridiques.
Je cède maintenant la parole à M. Fraser. Ensuite, les sénateurs poseront des questions.
Graham Fraser, commissaire aux langues officielles, Commissariat aux langues officielles : Merci beaucoup, madame la présidente.
[Traduction]
Bonjour, honorables sénateurs. Je suis très heureux de me trouver devant le comité pour faire part de quelques-unes de mes réflexions au sujet du rapport annuel de 2012-2013, que j'ai déposé au Parlement le 7 novembre. Je tiens tout d'abord à saluer la présidente nouvellement élue du Comité sénatorial permanent des langues officielles, la sénatrice Claudette Tardif. Vu vos antécédents d'ardente défenseure des droits des communautés de langue officielle en situation minoritaire au pays, madame la présidente, je suis persuadé que vous saurez éclairer les délibérations du comité au cours de la présente session parlementaire grâce à vos connaissances et à votre expérience.
[Français]
Honorables sénateurs, en février dernier, le premier ministre Stephen Harper m'a demandé d'exercer la fonction de commissaire aux langues officielles pour trois années additionnelles. J'ai été honoré d'accepter. Au cours de mon premier mandat à titre de commissaire, l'une des questions qui m'a souvent été posée était à la fois générale et difficile : comment se porte le bilinguisme officiel? La réponse est souvent décevante : ça dépend.
Mon septième et plus récent rapport tentera d'expliquer un peu plus en détail cette réponse. Le rapport se veut un sommaire de mes sept années en tant que commissaire aux langues officielles. Même si mon mandat a été prolongé pour une autre période de trois ans, j'estime qu'il est utile d'examiner le progrès ou le manque de progrès au cours des sept dernières années.
[Traduction]
À l'aube de mon deuxième mandat, je peux regarder rétrospectivement les réussites de nos enquêtes et de nos interventions proactives. Il y a sept ans, les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont déposé des plaintes à la suite de l'abolition du Programme de contestation judiciaire du Canada. J'ai joué un rôle d'intervenant devant la Cour fédérale et les enquêtes que j'ai réalisées pour donner suite à ces plaintes ont révélé que le gouvernement avait manqué à ses obligations liées à la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Grâce à la mobilisation des communautés de langue officielle en situation minoritaire, une entente à l'amiable a permis la création du Programme d'appui aux droits linguistiques.
L'année dernière, l'enquête sur la nomination d'un vérificateur général unilingue a ajouté une certaine crédibilité à un projet de loi d'initiative parlementaire, adopté à l'unanimité par le Parlement, qui fait en sorte que tous les agents du Parlement doivent désormais être bilingues au moment de leur nomination.
De plus, le travail du commissariat en collaboration avec les institutions fédérales et le comité organisateur des Jeux olympiques d'hiver de 2010 à Vancouver a fait de cet événement présenté dans les deux langues officielles une réussite à tous les égards, sauf pour la composante culturelle des cérémonies d'ouverture.
Les inestimables leçons apprises de cette expérience ont mené à la production d'un guide pratique de promotion des langues officielles à l'usage de toute organisation qui accueille un événement sportif d'envergure au Canada. L'été dernier, les organisateurs des Jeux du Canada à Sherbrooke ont utilisé ce guide et ont clairement réussi à promouvoir les deux langues officielles lors de cet événement national. Cette réussite est la preuve que nous avons accompli de formidables avancées.
[Français]
Je peux également mentionner notre enquête sur la décision de déplacer le Centre secondaire de sauvetage maritime de Québec à Trenton et Halifax, ce qui a fait en sorte que le déménagement soit reporté jusqu'à ce qu'on puisse garantir des services d'urgence en français sur le Saint-Laurent.
En outre, lorsque la décision de CBC/Radio-Canada d'éliminer la quasi-totalité de la programmation locale à la station radio de langue française CBEF, située à Windsor, a généré 876 plaintes en 2009-2010. J'ai demandé à la Cour fédérale si j'avais la compétence d'enquêter sur de telles plaintes. La cour a confirmé ma compétence dans une décision préliminaire.
Mon mandat a aussi été marqué par ce que je qualifierais d'échec évident. Par exemple, le gouvernement n'a pas su reconnaître l'importance d'avoir des juges bilingues à la Cour suprême. J'ai appuyé le projet de loi C-232 qui visait à modifier la Loi sur la Cour suprême puisque je crois fermement que toute personne comparaissant devant la Cour suprême devrait avoir le droit d'être entendue et comprise de tous les juges dans les deux langues officielles, sans l'aide d'un interprète.
Cette année, le commissariat a complété une étude sur la capacité bilingue de la magistrature des cours supérieures dont j'ai présenté les résultats à l'occasion de la conférence juridique de l'Association du Barreau canadien en août. C'était la première fois que mes homologues provinciaux au Nouveau-Brunswick et en Ontario et moi travaillions conjointement sur un projet.
L'incidence de cette étude et ses recommandations sont cruciales pour les Canadiens qui utiliseront le système judiciaire. C'est la raison pour laquelle nous exhortons le ministre de la Justice de donner rapidement suite aux recommandations de l'étude, en étroite collaboration avec ses homologues provinciaux et territoriaux et les juges en chef des cours supérieures.
[Traduction]
Depuis que j'ai amorcé mon mandat en 2006, il y a aussi eu d'heureuses surprises. J'ai observé qu'il y avait beaucoup moins de résistance à l'égard de la Loi sur les langues officielles au sein des institutions fédérales que ce à quoi je m'attendais. Mais de temps en temps, il y a des incidents qui indiquent que les fonctionnaires ne comprennent tout simplement pas ce que signifie d'avoir deux langues officielles avec le même statut.
Le mois dernier, un incident s'est produit ici même sur la Colline qui, à mon avis, était tout à fait inacceptable. La séance d'information des parlementaires sur le projet de loi omnibus C-4 était prévue uniquement en anglais. Une députée unilingue francophone s'est plainte, les fonctionnaires ont soulevé des objections, puis un député unilingue anglophone s'est plaint de ne pas comprendre la discussion. La séance d'information a finalement été reportée au lendemain.
Sincèrement, je pensais que les séances de breffage unilingues étaient chose du passé, comme les machines à écrire et la formule « français à venir ». Je pensais que la décision unanime du Parlement de veiller à ce que les agents du Parlement soient bilingues était une reconnaissance que les Canadiens, sans oublier les parlementaires, bénéficient du droit absolu de recevoir des services de qualité égale dans la langue officielle de leur choix.
Il est franchement décevant qu'une députée ait eu à réclamer un breffage en français en 2013, soit 55 ans après l'instauration de l'interprétation simultanée à la Chambre des communes et 50 ans après la création de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme.
Malgré ces lacunes embarrassantes, la plupart des institutions fédérales et des fonctionnaires veulent faire ce qu'il faut. Parfois, ils ont tout simplement de la difficulté à obtenir les outils dont ils ont besoin et à développer le réflexe de les utiliser. Pour faire sa part, le commissariat a élaboré des outils en ligne que les institutions fédérales et leurs employés peuvent utiliser, notamment : un outil d'auto-évaluation, qui permet aux gestionnaires d'évaluer si leur comportement favorise l'utilisation des deux langues en milieu de travail et, récemment, un outil développé pour élaborer des méthodes de formation linguistique efficaces.
Il y a aussi eu des déceptions. Les plaintes que j'ai reçues, en plus des résultats de nos diverses études et vérifications, me donnent à penser qu'il reste encore beaucoup à faire si nous voulons pleinement respecter les obligations et l'esprit de la loi. Lorsque les « employés fédéraux » fournissent des services aux Canadiens, l'offre active est toujours une exception, et non pas la règle. Il est aussi difficile pour les passagers du transport aérien d'être servis dans la langue officielle de leur choix dans les aéroports canadiens. Trop souvent, des gens doivent le demander et trop fréquemment, lorsqu'ils le font, ils se butent à une incompréhension ou ils doivent subir des délais.
Trop souvent, les dirigeants du secteur public diront quelques mots en français, puis ils continueront de façon ininterrompue en anglais, comme si l'utilisation du français dans un événement public n'était qu'un geste symbolique plutôt qu'une véritable démonstration d'une langue canadienne. Ici à Ottawa, j'ai l'impression que les orateurs, même s'ils sont bilingues, hésitent à prendre la parole en français en public.
De plus, les institutions fédérales ont été incertaines au sujet des mesures pour favoriser la croissance et l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire comme l'exige la modification de 2005 à la Loi sur les langues officielles.
[Français]
Il y a cinq ans, le gouvernement a publié sa feuille de route pour la dualité linguistique qui a pris fin cette année et qui a été remplacée par la Feuille de route pour les langues officielles. Durant ce temps, nous avons connu une période d'instabilité financière, des investissements massifs de la part du gouvernement fédéral dans des projets d'infrastructure, l'examen stratégique et fonctionnel, et le Plan d'action pour la réduction du déficit.
En général, les langues officielles n'ont pas été ciblées, mais à cause des fermetures et des compressions, des dommages collatéraux et des conséquences involontaires ont touché les communautés de en situation minoritaire, ce qui a mené à une érosion subtile du bilinguisme qui est attribuable au transfert de bureaux fédéraux des régions bilingues à des régions unilingues; à la réduction des niveaux de compétence linguistique requis pour les postes bilingues; à la pression exercée sur les fonctionnaires pour produire des documents uniquement en anglais; et à la tendance d'offrir un nombre insuffisant de programmes de formation en français.
Nous observons aussi que la maîtrise des deux langues officielles est décrite comme un atout dans les affichages des postes de haute direction au lieu d'être une exigence. Il arrive aussi qu'elle soit décrite comme une exigence sans être considérée comme telle par la suite. La conséquence de ces réalités est la fragilisation de l'utilisation des deux langues officielles en milieu de travail et la capacité à offrir des services en français et en anglais.
Mon travail, au cours des sept dernières années, m'a appris à quel point le leadership est important dans les institutions fédérales. À titre de commissaire, je vais continuer d'insister sur l'importance d'apprendre la deuxième langue, que ce soit dans le cadre de nos universités ou dans la fonction publique. Et je continue d'affirmer que l'utilisation des deux langues officielles est une compétence clé de leadership.
Qu'est-ce qui nous attend dans le domaine des langues officielles? Quels défis devront être relevés au cours des trois prochaines années de mon mandat? L'immigration et les changements démographiques qu'elle amène sont des questions critiques pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire et pour le pays. Les médias sociaux continueront de transformer la façon dont le gouvernement interagit avec les citoyens.
En effet, le public s'attend plus que jamais auparavant à recevoir une réponse immédiate dans les deux langues officielles. Ils sont à la fois des défis considérables et des occasions formidables en matière de politique linguistique. Nous savons que les Jeux panaméricains auront lieu à Toronto à l'été 2015, ainsi qu'une série de célébrations majeures, dont le point culminant sera le 150e anniversaire de la Confédération canadienne en 2017. Le gouvernement fédéral aura alors l'occasion de faire preuve de leadership et d'un engagement renouvelé.
Pendant les étapes de la planification et la tenue de ces événements, il sera crucial de respecter les besoins des deux communautés de langue officielle.
[Traduction]
Comme l'indique mon rapport annuel, j'ai formulé des recommandations dans les six domaines suivants : la formation linguistique au sein des institutions fédérales; la Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013- 2018 et, plus particulièrement, la nécessité d'un nouveau cadre de gestion et de reddition de comptes; les politiques d'immigration et leur incidence sur les communautés francophones en situation minoritaire; les initiatives visant à élever le niveau de bilinguisme chez les Canadiens et à renverser le déclin du bilinguisme chez les anglophones; la capacité bilingue de la magistrature de la cour supérieure; l'incidence des coupes budgétaires sur la capacité des institutions fédérales à respecter leurs obligations.
Je crois que nous avons maintenant dépassé le point où les Canadiens sont étonnés d'entendre l'autre langue. C'est ce que j'ai pu constater aisément cet été aux Jeux du Canada à Sherbrooke. Les deux langues officielles ont été utilisées de façon interchangeable pendant les cérémonies d'ouverture et ont suscité des réactions semblables chez les personnes présentes.
Nos langues officielles sont l'une des caractéristiques de notre identité canadienne. Nous avons besoin de sentir que les deux langues nous appartiennent et qu'elles font partie de notre identité nationale, même si nous n'en parlons qu'une seule. Nous devons encore relever le défi qui consiste à adhérer pleinement à la dualité linguistique et à en faire une valeur canadienne fondamentale, peu importe la langue que nous parlons.
Le comité se demande sans doute où axer ses efforts alors qu'il entame une nouvelle session. J'ai soulevé un certain nombre de points, notamment les questions sur lesquelles j'ai formulé des recommandations. J'espère que cela aidera le comité à déterminer les sujets méritant son attention.
Sur ce, honorables sénateurs, je conclus mon allocution et c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
[Français]
Je serai heureux de répondre à vos questions.
La présidente : Merci beaucoup, monsieur le commissaire. La première question sera posée par la sénatrice Fortin- Duplessis.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Encore une fois, monsieur le commissaire, c'est toujours un plaisir de vous recevoir devant notre comité avec tous les membres de votre équipe.
Mes questions porteront sur les plaintes. Selon le nombre de plaintes que vous avez reçues depuis 2006 jusqu'à maintenant, je pense qu'il y a quand même une diminution du nombre de plaintes.
M. Fraser : Oui.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Ce serait peut-être rêver en couleur que d'espérer un jour qu'il n'y ait plus de plaintes. Je me demande tout de même s'il y en a moins parce que les gens ne se donnent plus la peine de porter plainte ou bien parce qu'ils croient qu'il y a tout de même une amélioration.
M. Fraser : Effectivement, c'est une question que nous nous posons régulièrement. On a identifié une série de facteurs possibles; vous en avez mentionné deux. C'est assez difficile pour nous d'identifier les raisons pour lesquelles quelqu'un ne porte pas plainte; c'est difficile de questionner les absents. Parmi les facteurs identifiés, il y a la possibilité de l'amélioration. Il y a certains secteurs où, effectivement, on a identifié une amélioration.
Il y a aussi la question de l'ignorance, c'est-à-dire que le public ne sait pas qu'ils ont droit à un service. Par exemple, lorsqu'un aéroport en arrive à accueillir un million de passagers, les passagers qui se sont habitués au fait que cet aéroport n'avait pas cette obligation ne savent pas qu'ils ont maintenant droit à un service dans les deux langues.
Il y a aussi la possibilité d'un désabusement; et il y a aussi le fait que, de plus en plus, le gouvernement fédéral prend contact avec le citoyen par d'autres moyens que le contact personnel. Souvent, quand un individu prend contact avec le gouvernement fédéral, c'est par Internet ou avec des numéros sans frais. C'est plus facile de diriger une personne vers des informations en français ou en anglais sur un site web que devant un comptoir.
Il y a toutefois toujours certains services pour lesquels il est essentiel que le contact se fasse de personne à personne, comme les services frontaliers, par exemple; il y aura toujours des individus pour établir un contact avec les clients. Il y aura toujours des gens qui viendront au bureau de passeport pour bénéficier d'un contact plus personnel. Dans les aéroports, il y aura toujours des passagers voyageant avec Air Canada; ce sont là des endroits où les gens auront des contacts avec des représentants des institutions ayant des obligations.
Certaines institutions ont tout de même apporté des améliorations. On remarque, dans le rapport annuel, que Parcs Canada a fait beaucoup de progrès en ce qui a trait à l'offre active.
En préparation pour les Jeux olympiques, ils ont produit un vidéoclip offert aux employés afin que tous comprennent leur obligation quant à l'offre active et sur la façon de réagir lorsque quelqu'un demande un service dans l'autre langue que celle de l'employé si l'employé est unilingue.
La vérification faite par la suite a démontré des résultats assez impressionnants.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Vous avez fait des vérifications, mais avez-vous vérifié les différents sites web des différents ministères pour savoir au sein desquels ils offrent vraiment le service dans les deux langues officielles?
Si un simple citoyen canadien va sur Internet, il doit pouvoir obtenir une réponse en français — l'anglais ne pose pas problème.
M. Fraser : On n'a pas fait de vérification. C'est un élément intéressant. On traitera de la question des médias sociaux et c'est un aspect qu'on devra regarder.
On a quand même reçu des plaintes dans des cas où il était évident qu'une institution a utilisé Google Translate pour envoyer des informations dans un jargon incompréhensible. Lorsqu'on parle de l'utilisation des moyens technologiques de traduction, j'utilise toujours la métaphore du tracteur. L'invention du tracteur n'a jamais voulu dire que le fermier pouvait s'asseoir et regarder le tracteur faire les champs d'un côté et de l'autre, même si cet outil a amélioré l'efficacité de la production agricole. Lorsqu'on utilise des moyens technologiques de traduction, il faut qu'une personne humaine regarde le produit final.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Selon vous, y a-t-il un niveau acceptable de plaintes? Évidemment, l'idéal serait de n'avoir aucune plainte.
M. Fraser : Très bonne question. C'est une question qu'on se pose. Si l'accès au service dans les deux langues officielles est disponible partout où la responsabilité incombe aux institutions d'offrir ces services et s'il n'y a pas de plaintes, tant mieux. Toutefois, je crois que nous sommes loin de ce point. Ce qui m'inquiète parfois, je me pose la question à savoir s'il y a un écart entre la disponibilité des services, d'un côté, et les plaintes vis-à-vis cet écart, ou le manque de plaintes. On sait que dans certains aéroports il est très difficile de fournir des services dans les deux langues, et on ne reçoit pas beaucoup de plaintes sur ce manque de services. À titre d'exemple, on a reçu très peu de plaintes envers le Centre national des arts. C'est une institution qui, à mon avis, offre un très bon service dans les deux langues officielles. On ne reçoit pas de plaintes contre cette institution car leur service est exemplaire. Si le service est exemplaire partout, c'est bien. Toutefois, l'exercice de faire enquête sur des plaintes est un instrument très utile pour les institutions et l'amélioration de leurs services.
Étant donné les transformations de fonctionnement dans le gouvernement fédéral, restructuration de certaines institutions, l'utilisation de média sociaux, il y aura des défis pour encore un bout de temps.
La sénatrice Chaput : Monsieur le commissaire, c'est toujours un plaisir de vous recevoir au comité. Je vous remercie et vous félicite de votre rapport.
Ce que vous avez réussi à nous présenter dans ce rapport, c'est ce que nous ressentons depuis plusieurs années. Vous parlez d'une érosion, et il est vrai qu'une érosion ne se fait pas en deux ou trois ans; c'est la conséquence de plusieurs années. Vous dites dans votre rapport qu'au cours des 15 dernières années le gouvernement fédéral a apporté d'importants changements à ses modes de prestation.
Depuis longtemps, les changements qui se font au niveau du gouvernement fédéral contribuent à l'érosion de nos services en français. Ce n'est pas parce qu'ils le veulent. C'est pour toutes sortes d'autres raisons, imprévues et non voulues. Je crois qu'il est temps maintenant de voir ce qu'on peut faire.
Ma première question touche les prestations de services au public lorsque le gouvernement fait appel à la sous- traitance, à la dévolution, au partenariat ou à la privatisation. Depuis des années, les communautés de langue officielle demandent au gouvernement fédéral d'inclure des clauses ou des exigences linguistiques lorsqu'on transfère un service du fédéral au provincial. On n'a pas fait beaucoup de progrès avec cette demande, n'est-ce pas? Il n'y a pas encore de conditions lorsqu'un service est dévolué?
M. Fraser : Tout dépend de l'institution. Même lorsqu'il y a une clause linguistique, on procède par contrat. Supposons, par exemple, que le gouvernement fédéral ou un ministère donne un contrat à une compagnie pour offrir un service, et que ce contrat dure, disons, trois ans. Dans le cadre de ce contrat, on estime que les clauses linguistiques n'ont pas été respectées. Cet élément sera considéré dans le renouvellement du contrat et on dira que l'entrepreneur précédent n'a pas respecté cette clause linguistique, on cherchera alors un autre entrepreneur. Cela ne veut pas dire qu'il y aura amélioration, parce que ce ne se sont pas des employés.
Il est toujours plus facile, par des incitations, de la formation linguistique ou des directives, d'avoir un effet réel quand on fait affaires avec des employés que lorsqu'on traite avec des entrepreneurs. Je suis très conscient de ce problème dans les aéroports. Les autorités aéroportuaires ont des obligations, mais il y a des institutions autonomes. Les gens qui ont des contrats pour opérer un restaurant ou d'autres services à l'intérieur sont des tierces parties. C'est donc à deux niveaux d'un ministère gouvernemental.
Plus loin, on arrive à un lien direct avec un ministère fédéral, plus difficile il sera de s'assurer que le service soit livré. Il est plus facile, dans un bureau de poste entièrement consacré au service de la poste par le gouvernement fédéral, de faire en sorte que ce service soit disponible que s'il s'agit d'une succursale dans un magasin.
La sénatrice Chaput : Et si on abuse, monsieur le commissaire, il n'y a pas nécessairement d'évaluation des services qui ont été remis ou offerts à la francophonie? Lorsque le contrat se termine, après trois ou quatre ans, ni le fédéral ni personne n'évalue si les services ont vraiment été offerts dans les deux langues officielles?
M. Fraser : Tout dépend de l'institution. L'entité responsable de la sécurité aux aéroports, par exemple, m'a assuré que non seulement il y aurait une clause linguistique, mais il y aurait une évaluation et des primes qui seraient reliées à leur capacité de livrer le service. Depuis l'octroi de ce contrat, j'ai remarqué une amélioration des services dans les aéroports. Il arrive plus souvent que l'on soit accueilli par un « Hello, bonjour » et même parfois « hello/bonjour, any liquids or gels? ». Tout de même, c'était un exemple qui m'a confirmé que lorsque le leadership d'une institution dit que l'on va s'assurer qu'il y aura une amélioration, on peut voir l'effet de ce leadership.
La sénatrice Chaput : Je ne crois pas, monsieur le commissaire, que cette tendance s'arrêtera, soit celle de confier des services à une tierce partie. Je crois que cette pratique se poursuivra.
Si c'est le cas, quelles seraient les deux conditions majeures qui pourraient être imposées lors de ces transferts afin de s'assurer du respect des services en français — et des services en anglais, au Québec?
M. Fraser : Selon les expériences que j'ai connues, je dirais que c'est important qu'il y ait d'abord une clause linguistique; deuxièmement, une assurance que le ministère qui a signé le contrat exerce une certaine vigilance sur le respect de cette clause linguistique; et idéalement, qu'il y ait une prime financière rattachée au respect de cette clause linguistique, que si une compagnie privée obtient un contrat et qu'elle ne réussit pas à offrir le service, qu'il en résulte un coût financier, qu'il y a une prime qu'ils ne recevront pas.
Madame Saikaley, pensez-vous à d'autres facteurs?
Ghislaine Saikaley, commissaire adjointe, Direction générale de l'assurance de la conformité, Commissariat aux langues officielles : C'est exactement ce que nous avons rapporté dans le rapport annuel. Souvent c'est soit qu'il n'y a pas de clause ou encore qu'elles ne sont ni surveillées ni mises en force.
La sénatrice Chaput : La vigilance serait la responsabilité du fédéral?
Mme Saikaley : Oui, les institutions fédérales conservent leur responsabilité. Ce sont donc les institutions fédérales qui ont cette obligation, même si les services sont offerts par des tiers.
Le sénateur McIntyre : Monsieur le commissaire, soyez assuré que nous sommes toujours heureux de vous accueillir, de vous lire et surtout de vous entendre. Ma remarque s'adresse évidemment à toute votre équipe.
Je note que le Canada compte un demi-million de plus de citoyens bilingues qu'il y a 10 ans. La raison en est plutôt simple, c'est que les francophones deviennent de plus en plus bilingues alors que les anglophones deviennent de plus en plus unilingues.
M. Fraser : Pas à 100 p. 100. Il y a une petite amélioration chez les anglophones. Mais je pense que de ce demi- million, 450 000 sont francophones alors qu'une petite portion est anglophone.
Le sénateur McIntyre : Il y a donc plus de gens bilingues chez les francophones que chez les anglophones.
M. Fraser : Tout à fait.
Le sénateur McIntyre : Ne s'agit-il donc pas là d'un bilinguisme à sens unique?
M. Fraser : On a remarqué qu'en termes de pourcentage, il y a une diminution d'inscriptions dans des programmes de français langue seconde une diminution d'inscriptions dans des programmes de français langue seconde chez les anglophones et surtout chez les jeunes. On a même remarqué, surtout chez les jeunes, une diminution de 24 p. 100 sur une période de 10 ans.
Il y a plusieurs raisons à cela. D'abord, il y a eu un plafonnement dans les inscriptions aux cours d'immersion d'à peu près à 300 000. Durant les années 1980, une étude a fait des projections démontrant que si le système continuait de croître à ce rythme, il y aurait un million d'étudiants en immersion en l'an 2000. Mais dû à un certain plafonnement du financement, le nombre est resté plutôt stable à 300 000.
J'appuie fortement le système d'immersion qui a été un grand système international. Mais un des effets que l'on n'a pas considéré, c'est l'effet néfaste sur les cours de français de base. Les meilleurs étudiants et les meilleurs professeurs sont attirés par l'immersion, et je crois même qu'il y a certaines croyances selon lesquelles l'immersion est la seule façon d'apprendre le français et que si on n'a pas réussi à avoir accès à l'immersion, c'est fini, on ne deviendra jamais bilingue.
Je me considère comme la preuve du contraire puisque je ne suis pas un produit de l'immersion. Les gens de ma génération non plus. Je peux vous nommer beaucoup de gens qui ont appris le français avec les connaissances créées à partir du français de base.
Il y a quand même eu un effet néfaste sur la qualité de l'instruction du français de base et une diminution de l'intérêt. Je crois que ce qu'il faut développer — c'est l'une des choses que j'ai essayé de souligner durant mon mandat —, c'est l'importance d'avoir une espèce de cascade d'incitatifs. Le gouvernement fédéral a une obligation comme employeur d'envoyer le message aux universités que le plus grand employeur au Canada a besoin d'employés bilingues et, de la même façon, les universités ont l'obligation d'envoyer le message aux étudiants et aux écoles secondaires en disant que le bilinguisme est une compétence qu'on valorise.
J'ai eu des conversations avec des étudiants en immersion qui se sont fait dire de ne pas passer l'examen d'immersion mais plutôt de passer celui de français de base, et qu'ils auraient ainsi de meilleures notes avec un examen plus facile. C'est tout ce que les universités veulent. Pour moi, c'est quasiment une incitation à la médiocrité alors qu'on devrait viser l'excellence.
Il faut établir ce continuum d'apprentissage pour faire en sorte que des étudiants, à travers le pays, aient accès à une formation linguistique de qualité.
Le sénateur McIntyre : Certaines institutions fédérales font souvent l'objet de plaintes répétées, depuis votre nomination, en 2006. Votre rapport annuel indique que vous organiserez une campagne d'information à l'intention du public voyageur — je pense à Air Canada, par exemple — afin de mieux faire connaître ses droits et inciter les institutions fédérales à les respecter.
À quel moment comptez-vous lancer cette campagne d'information?
M. Fraser : Vous touchez un point sensible dans le sens qu'on avait planifié un lancement de campagne plus tôt cet automne, mais on a rencontré un obstacle. On avait un projet pilote planifié pour l'aéroport de Winnipeg. On avait même planifié l'achat d'espace pour une affiche d'information pour le public. Et à la dernière minute, l'aéroport a refusé d'afficher cette information. Elle a renvoyé notre demande à l'Association des aéroports qui, lors de sa réunion annuelle, a décidé, de façon collective, qu'elle ne voulait pas qu'on annonce les droits des voyageurs au public dans les aéroports. Le conseil nous a écrit une lettre selon laquelle cela créerait de la confusion, des attentes de la part du public voyageur que ces droits seraient respectés.
On a donc essayé de trouver d'autres façons d'annoncer ces droits. Il y a une affiche qui existe sur notre site web, mais ce n'est pas nécessairement tous les voyageurs qui penseront aller vérifier leurs droits sur notre site web.
Monsieur Giguère, voulez-vous élaborer un peu plus sur le sujet?
Sylvain Giguère, commissaire adjoint, Direction générale des politiques et des communications, Commissariat aux langues officielles : Effectivement, on a fait un mini-lancement sur le site web, mais évidemment, cela ne touche pas tous les voyageurs. On est en train de produire des dépliants qui vont expliquer les droits des voyageurs, et nous essaierons de les distribuer partout au Canada à des endroits très stratégiques comme des agences de voyage ou des associations communautaires. On aimerait aussi avoir une bannière sur des sites comme Expedia.ca, où les gens vont, en cliquant sur la bannière, arriver sur notre site et voir quels sont les droits des voyageurs.
On est en train d'orienter notre approche de façon différente et ce, avec les mêmes budgets. Par exemple, on examine la possibilité de faire paraître une annonce dans un journal ou d'avoir un panneau publicitaire dans une ville, mais ces éléments sont assez coûteux. Il est possible qu'on se tourne plutôt vers les associations communautaires, les dépliants et les sites Internet que les voyageurs consultent.
La sénatrice Charette-Poulin : Monsieur Fraser, je souscris à ce qu'ont dit mes collègues qui vous félicitent pour votre excellent rapport, et surtout pour le travail que vous faites depuis sept ans. Nous étions tous très heureux de voir que votre mandat a été prolongé de trois ans. Cela vous donne le nombre d'années nécessaires pour vous assurer que vos recommandations soient suivies.
Ma question porte sur le système judiciaire. J'étais particulièrement ravie de votre position sur l'importance pour les juges de la Cour suprême de comprendre directement les interventions dans la langue où elles sont énoncées. Je vous remercie énormément. C'est tellement important!
Vous avez entamé deux projets, l'un au Nouveau-Brunswick et l'autre en Ontario, pour vérifier la capacité des juges d'entendre directement les avocats dans la langue de leur choix. Pouvez-vous nous parler un peu plus de ces deux projets?
M. Fraser : C'est un seul projet qui a été développé conjointement avec mes homologues du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario. On a aussi examiné d'autres provinces afin d'établir la capacité des juges des cours supérieures de comprendre les deux langues officielles. Ce qui nous a frappés, c'est la difficulté à établir cette capacité, parce qu'il n'y a pas d'évaluation de la compétence linguistique des gens qui postulent pour devenir juge, et il n'y a pas vraiment d'évaluation des besoins des tribunaux. On a aussi formulé des recommandations sur la formation des juges. Mme Tremblay pourrait peut-être parler davantage de l'étude et des suivis qu'on est en train de faire.
Johane Tremblay, directrice et avocate générale, Direction générale des affaires juridiques, Commissariat aux langues officielles : Monsieur le commissaire a bien résumé le projet. On a donc examiné deux aspects qui relèvent du pouvoir du ministre de la Justice et qui peuvent avoir un impact sur la capacité de bilinguisme de la magistrature des cours supérieures, c'est-à-dire le processus de nomination des juges et la formation linguistique. On a fait un sondage en ligne auprès des avocats qui pratiquent devant les cours supérieures pour connaître leur perception du niveau de bilinguisme et de la disponibilité des juges bilingues. On a examiné le processus de nomination des juges des cours provinciales, par exemple en Ontario, et on a émis des recommandations qui visent à améliorer le processus de nomination, l'évaluation des compétences linguistiques des candidats et la formation linguistique qui est actuellement disponible.
La sénatrice Charette-Poulin : Est-ce que le bureau du commissaire publiera un rapport sur cette étude précise?
M. Fraser : Le rapport existe. Je l'ai présenté à la réunion annuelle d'été de l'Association du Barreau canadien. J'en ai discuté avec le ministre de la Justice, M. MacKay, et j'ai fait une session de débreffage avec le sous-ministre. Je peux dire que j'ai eu quelques conversations très positives avec le ministre, qui semblait accueillir cela avec intérêt.
Je suis un peu optimiste vis-à-vis cette recommandation parce que c'est arrivé dans un contexte où il y a beaucoup d'intérêt pour toute la question d'accès à la justice. C'est un des thèmes de la juge en chef. Le ministère de la Justice est interpellé par la grande question d'accès à la justice, et je pense que notre rapport tombe vraiment très bien dans ce contexte.
La sénatrice Charette-Poulin : C'est très intéressant parce que l'accès à la justice fait justement partie des assermentations des avocats afin de s'assurer que tout est fait pour que tous les Canadiens et les Canadiennes aient accès à la justice.
M. Fraser : Effectivement.
La sénatrice Charette-Poulin : Dans votre rapport, vous avez parlé de leadership. Je me disais alors que pour préparer le leadership de demain, il faut commencer aujourd'hui. Est-ce que vous avez dit que, dans le système de dotation du gouvernement fédéral, vous remarquez qu'on parle de plus en plus de bilinguisme comme un atout au lieu de la maîtrise des deux langues officielles obligatoires?
M. Fraser : Oui.
La sénatrice Charette-Poulin : Aujourd'hui, quand on choisit des EX-3 ou des EX-4, cela devient la liste dans laquelle seront choisis les sous-ministres, et ces derniers jouent un rôle clé dans leur ministère pour justement s'assurer que les services sont offerts dans les deux langues officielles. Est-ce que vous percevez qu'aujourd'hui, dans le système de dotation du gouvernement fédéral, on s'efforce d'embaucher des gens qui maîtrisent les deux langues officielles à un niveau assez élevé? Et est-ce qu'on embauche des gens des deux cultures de façon équilibrée?
M. Fraser : Quant à votre deuxième question, je ne saurais pas vous dire. Selon les chiffres de la Commission de la fonction publique, plus de 93 p. 100 des postes sont occupés par des gens qui ont réussi leurs tests. Une tendance a été identifiée. Parfois, on réduit le niveau exigé dans certains postes. On ne parle pas de sous-ministres adjoints, mais plutôt de personnel dans des bureaux régionaux. On a parfois tendance à penser que c'est parce qu'il y a un candidat à l'interne, donc au lieu d'exiger un CCC, on choisit un BBB. Parfois, on reçoit des plaintes là-dessus, on fait une enquête et on trouve que, effectivement, le poste devrait être au moins un CBC.
Cela devient plus compliqué pour la nomination du gouverneur en conseil. Si je comprends bien, plusieurs de mes prédécesseurs ont prétendu que toute nomination du gouverneur en conseil devrait être bilingue. On est en train de discuter avec le Conseil privé du besoin d'avoir des critères pour établir quels postes exigent un bilinguisme essentiel et ceux pour qui le bilinguisme n'est pas essentiel.
Par exemple, il y a eu certaines nominations à des postes importants où c'était identifié comme étant préférable. Je ne vais pas les nommer maintenant car ils font actuellement l'objet de plaintes et on fera enquête. Mais si la nature du poste fait en sorte qu'un élément important du travail de cette institution traite de la culture française et de la culture anglaise, ce n'est pas un atout, ce n'est pas préférable, c'est essentiel.
On ne peut pas imaginer un président de CBC/Radio-Canada unilingue qui ne puisse pas comprendre...
La sénatrice Charette-Poulin : L'anglais. Un unilingue français?
M. Fraser : Oui, pour deux réseaux sur quatre de la société. Et je suis prêt à concéder que pour certains postes à l'étranger, à condition que le public voyageur soit servi à l'ambassade, il n'est pas essentiel que l'ambassadeur du Canada en Australie soit bilingue.
C'est préférable, on souhaite toujours que nos ambassadeurs nous représentent dans les deux langues officielles, mais dans le travail quotidien d'un ambassadeur canadien en Australie, peut-être que le bilinguisme est plutôt préférable qu'essentiel.
Le fait même de participer à cette discussion fait en sorte que je suis prêt à concéder qu'il y a certains postes pour lesquels ce n'est pas essentiel. Mais pour y arriver, il faut que le Conseil privé discute des véritables critères. On verra avec le projet de loi qui a été adopté pour des agents du Parlement parce qu'on n'a pas encore affiché le poste de la commissaire à la vie privée, Mme Jennifer Stoddart, dont le mandat se termine dans une semaine.
On attend de voir quel sera le processus d'évaluation suivi pour cette première nomination d'un agent du Parlement, dont l'obligation est d'être bilingue selon la loi. Quand on verra ce processus d'évaluation, on pourra savoir comment procéder pour les autres nominations du gouverneur en conseil.
La sénatrice Poirier : Lors de votre conférence de presse, vous avez parlé du travail que vous avez accompli avec vos collègues du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario. Pouvez-vous nous parler des projets qui seront possiblement accomplis avec ces provinces?
J'aimerais aussi avoir votre opinion au sujet de la Nouvelle-Écosse et des Acadiens qui ont perdu leur circonscription protégée. Est-ce qu'il y a des possibilités que vous puissiez intervenir ou venir en aide à la communauté acadienne si elle en a besoin?
M. Fraser : Quant à votre première question, un élément dont on discute conjointement actuellement, c'est la question de l'immigration.
M. Giguère : On a entamé les premières discussions il y a quelques semaines. On aimerait avoir un projet commun avec l'Ontario et le Nouveau-Brunswick pour voir comment on pourrait faciliter ou aider à l'immigration francophone dans ces deux provinces. On est présentement au début du projet, mais c'est une très belle piste parce qu'on a les mêmes buts. Donc c'est bien de travailler ensemble.
M. Fraser : Et je suis très heureux des rapports que j'ai avec mes homologues provinciaux et territoriaux, sauf que j'ai moins de contacts avec la commissaire aux langues officielles du Nunavut. Il y a une nouvelle commissaire aux langues officielles dans les Territoires du Nord-Ouest qui entrera en fonction le 1er décembre, que je n'ai pas encore eu la chance de rencontrer.
Mais comme on dit, ce n'est que le début. J'espère qu'il y aura d'autres projets qu'on pourra poursuivre conjointement. Quant à votre deuxième question, nous sommes toujours disponibles pour donner de l'aide ou des conseils. La disponibilité est toujours là, mais en ce qui concerne la question d'une circonscription provinciale, c'est une question provinciale qui ne relève pas de ma juridiction.
La sénatrice Poirier : Dans votre rapport annuel, vous faites mention des effets possibles des compressions budgétaires sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Avez-vous des exemples concrets qui justifieraient vos craintes et que vous aimeriez partager avec nous?
M. Fraser : Il y a la fermeture de l'Institut Maurice-Lamontagne. Il y a aussi la restructuration de Service Canada pour l'Atlantique. Il y a maintenant une organisation régionale qui fait en sorte que des employés du Nouveau- Brunswick qui auparavant avaient de la supervision au Nouveau-Brunswick se retrouvent maintenant avec de la supervision qui provient de Halifax ou de Saint-Jean, à Terre-Neuve. Les superviseurs n'ont pas d'obligations linguistiques, ce qui rend problématique la question du droit de travailler en français.
Ghislaine, est-ce qu'il y a d'autres exemples qu'on devrait donner?
Mme Saikaley : Il y a plusieurs de ces dossiers qui sont encore sous enquête. Donc on va faire une analyse de tout ce qu'on a trouvé et puis on va probablement inclure cela dans le prochain rapport annuel du commissaire. Mais on est encore à l'étape d'enquêter sur ces différents dossiers.
La sénatrice Poirier : Donc aujourd'hui, au moment où on se parle, on ne sait pas ce qui a eu un impact ou pas?
Mme Saikaley : Non, c'est encore trop tôt pour déterminer cela.
La sénatrice Poirier : On ne sait pas ce que les changements ont causé?
Mme Saikaley : Non.
M. Fraser : Effectivement, une recommandation a été faite au président du Conseil du Trésor et au ministre du Patrimoine canadien d'établir l'incidence des compressions budgétaires imposées dans le cadre du Plan d'action pour la réduction du déficit. Il est question de remettre en lumière les modifications en termes de ressources et de structures de gouvernance du Programme des langues officielles des institutions fédérales, à la fois sur les plans national et régionaux; et l'incidence des compressions budgétaires sur la capacité des institutions fédérales à respecter les obligations linguistiques que leur confère chaque partie de la loi.
Cela fait donc partie de la recommandation de mieux savoir quelle a été l'incidence de ces compressions budgétaires.
La sénatrice Poirier : Nous attendons toujours les résultats de l'impact?
M. Fraser : Oui. Et je dois dire que je n'ai aucune preuve. Je ne leur ai jamais suggéré que les langues officielles soient ciblées dans cet exercice. Je ne prétends pas du tout de la mauvaise foi vis-à-vis le gouvernement, mais ce que je crains, c'est qu'il y a eu des dommages collatéraux suite à des changements de structure et à des éliminations de postes.
La raison pour laquelle on a fait cette recommandation, c'est qu'il est assez difficile pour nous de faire cette évaluation, sauf en fonction des plaintes. Et quand des gens craignent ou subissent certains changements de structure, changement de la nature de leur travail, c'est difficile de ne pas s'attendre à ce qu'ils logent des plaintes. C'est la nature humaine.
C'est pour cette raison qu'on recommande de nous fournir l'information dont on a besoin pour mieux répondre à votre question.
La sénatrice Champagne : Bonjour, monsieur Fraser, quel plaisir de vous accueillir et de vous recevoir.
J'ai été interpellée par une phrase que vous avez dite il y a quelques minutes et je crois que je vais vous apprendre quelque chose qui va peut-être vous faire plaisir. Au cours des deux dernières semaines, j'étais en Europe, dans le monde de la Francophonie. À un certain moment, dans ma chambre d'hôtel, j'ai entendu l'animateur d'une émission de télé dire : « Évidemment, cela voudrait dire aller au Québec. » Une jeune Canadienne absolument ravissante et très intelligente lui a rétorqué que la Francophonie au Canada ne se trouve pas seulement au Québec, mais partout à travers le pays et que d'ailleurs, grâce aux Jeux olympiques, on avait pu découvrir des communautés francophones jusqu'en Colombie-Britannique. J'étais tellement heureuse d'entendre un membre de notre ambassade parler de la Francophonie au Canada d'une façon si chaleureuse et intelligente. Cela m'a beaucoup touchée. Je ne me souviens pas de son nom, malheureusement. Il était écrit au bas de l'écran, mais c'était un nom très long que je n'ai pas pu retenir. On pourrait certainement le savoir par l'ambassade.
La deuxième semaine de mon périple s'est passée chez des gens qui sont constamment en train d'apprendre une autre langue, soit en Moldavie. Je ne savais même pas, au départ, où se trouvait ce pays, j'ai dû fouiller sur des cartes géographiques. C'est un pays à côté de la Roumanie, près de l'Ukraine. Ces gens ont vécu sous les Russes, les Allemands et la Roumanie. En Roumanie, on parle une langue qui a des racines latines, c'est donc plus facile à lire. Les Russes ont été là très longtemps et l'on s'en rend compte, car les conversations contiennent beaucoup de « da » et de « niet ». Dans les magasins, dans les hôtels, tout le monde parle anglais. En ce moment, il y a une reconnaissance de la vie en français en Moldavie. J'ai fait la rencontre d'une dame Gutu, parlementaire et professeure à l'université francophone de cet endroit. J'ai vu de jeunes étudiants faire du théâtre en français. Ces gens parlent roumain, russe et anglais, et le français revient. Ils connaissent déjà trois langues et une quatrième devrait revenir assez facilement.
Pourquoi avons-nous tant de difficulté à faire en sorte que les Canadiens parlent deux langues? On n'est quand même pas plus idiots que les autres. Comment se fait-il que là-bas on parle trois ou quatre langues? Ces gens ont vécu la guerre, sous la houlette de la Russie pendant des années, ce n'était pas tellement facile. Nous avons pu profiter des services de jeunes hôtesses là-bas. Elles parlaient français et en étaient fières. Ils veulent retrouver la Francophonie. Que peut-on faire ici?
J'ai passé deux semaines loin de vous, madame la présidente, et de ce comité, mais je vous avoue que la Francophonie a été très présente dans ma vie pendant ces 12 jours où j'ai été absente.
M. Fraser : Vous touchez un point extrêmement important et la réponse à votre questionnement comporte deux éléments, soit la volonté et la capacité d'apprentissage et les outils pour le faire. Je crois que pour atteindre les résultats que vous décrivez en Moldavie, il faudra une certaine transformation de notre perception de nous-mêmes. Pendant longtemps, les Canadiens anglophones, et même certains Québécois, se pensaient presque Américains. On considérait les États-Unis comme une société riche, dominante et unilingue. Dans cette période après la guerre froide où le pouvoir mondial est en train de se transformer, les jeunes Canadiens sont de plus en plus internationalistes. Cependant, l'immersion n'est pas accessible à tous les jeunes, malheureusement. Il y a des écoles en Colombie-Britannique où pour avoir accès à l'immersion, les parents font la queue toute la nuit comme s'ils essayaient d'obtenir des billets de spectacle pour les Rolling Stones. C'est très anecdotique, mais, au fil de mes voyages et de mon travail, j'ai rencontré des jeunes Canadiens qui ont travaillé en Chine et qui ont appris le chinois; des jeunes Canadiens qui ont travaillé au Japon qui ont appris le japonais; des jeunes Canadiens qui ont travaillé au Vietnam qui ont appris vietnamien; en Amérique centrale, ils ont appris l'espagnol, et en Allemagne, l'allemand. Ils ont tous appris l'autre langue officielle d'abord. La chose qui m'a frappé chez les jeunes qui sont passés par l'immersion, c'est que la question d'apprentissage d'autres langues a été démystifiée. Cela devient un code et cela devient tout à fait naturel d'apprendre une autre langue alors que l'on se trouve dans un pays étranger. De plus en plus, les jeunes Canadiens sont des voyageurs et ils ont une perspective internationaliste.
Depuis longtemps, j'ai espéré, et même l'année passée, dans le rapport annuel de l'année passée, j'ai fait la recommandation que le gouvernement développe un programme similaire au programme Erasmus en Europe où une incitation financière impressionnante est offerte aux étudiants pour aller étudier une autre langue dans un pays étranger.
Il y a des programmes d'échange et des programmes d'appui, mais on devrait les améliorer et agrandir le bassin d'étudiants qui ont accès à ces programmes pour les encourager.
La sénatrice Champagne : Je crois qu'avec la Moldavie, nous avons un autre pays francophone, pays membre de l'Organisation internationale de la Francophonie depuis 1996, qui, à la fin du mois, deviendra membre de l'Union européenne, quoi qu'en dise l'Ukraine qui ne veut rien savoir; la Moldavie et la Géorgie vont se joindre à l'Union européenne
Donc, on s'en va vers l'Ouest et j'ai l'impression qu'on aura un autre pays francophone ou du moins francophile.
M. Fraser : Vous parlez de l'Union européenne. C'est une institution qui valorise le multilinguisme. La politique générale de l'Union européenne est la langue maternelle plus deux dans les écoles. C'est une politique explicite pour encourager le multilinguisme. La reconnaissance des langues nationales des pays membres est en soi une incitation au multilinguisme.
La sénatrice Champagne : J'étais là avec l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, et je me suis rendu compte que, de plus en plus, on a là aussi des francophones. On se dit qu'on n'est pas tout seul dans notre petit coin à vouloir parler français.
La présidente : Avant de passer au deuxième tour, si vous le permettez, j'aimerais poser une question à monsieur le commissaire.
La sénatrice Champagne : On va vous le permettre.
M. Fraser : C'est un des privilèges de la présidence.
La présidente : On parle beaucoup de la feuille de route lorsqu'on parle d'appui à la Loi sur les langues officielles. On semble y avoir attribué beaucoup d'importance, et avec raison. Je comprends que cette feuille de route représente un investissement considérable de la part du gouvernement. Nous savons que la feuille de route fut renouvelée pour la période entre 2013 et 2018.
Cette feuille de route peut-elle répondre à tous les défis auxquels on fait face lorsqu'il s'agit de la promotion des langues officielles et du bilinguisme dans notre pays?
M. Fraser : Non, je ne crois pas. Comme vous, je pense que c'est un investissement extrêmement important et dont le gouvernement a raison d'être fier. Cependant, il y a certains phénomènes d'étiquetage. On a remarqué le changement du nom de la Feuille de route pour la dualité linguistique à la Feuille de route pour les deux langues officielles. Il y a aussi l'ajout d'une enveloppe de 120 millions de dollars pour la formation linguistique pour les immigrants, mais qui n'est pas nécessairement dirigée vers les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Je ne dis pas cela pour critiquer la formation linguistique des immigrants. Je crois que c'est un dossier extrêmement important. Toutefois, cela change un peu la donne vis-à-vis les objectifs originaux pour le plan d'action et la feuille de route qui lui a succédé.
Il y a eu certains changements dans le la feuille de route vis-à-vis la formation linguistique, par exemple. On a vu une initiative, dans la feuille de route 2008-2013, où l'école de la fonction publique menait un projet pilote avec 11 universités pour offrir de la formation linguistique aux futurs fonctionnaires. L'objectif visait à faire en sorte que les étudiants puissent réussir leur niveau linguistique avant d'entrer dans la fonction publique. Or, ce projet pilote n'a pas été financé dans la feuille de route la plus récente, et je trouve cela regrettable. Certains éléments de coordination aussi n'ont pas été financés.
D'autre part, j'ai certaines appréhensions. La feuille de route s'applique à, je crois, 17 institutions fédérales. C'est la nature humaine, mais on voit certaines tendances chez des institutions qui ne font pas partie de ces 17 institutions, de dire, « oh, vous savez, on n'en fait pas partie, donc on n'a pas d'obligations ». Or, ce n'est pas vrai. Il y a des obligations pour toute institution fédérale.
Cela fait partie de l'incompréhension que j'ai remarquée dans les institutions fédérales vis-à-vis leurs obligations de prendre des mesures positives pour l'épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Je reconnais volontiers qu'on voit des programmes extrêmement importants au sein de la feuille de route. Je crois qu'une des grandes réussites est dans le domaine de la santé, où on peut voir l'impact des programmes financés par la feuille de route dans les communautés.
La présidente : Si je comprends bien, vous avez indiqué que les institutions fédérales qui ne sont pas identifiées dans la feuille de route réagissent différemment à leurs obligations comparativement à ceux qui en font partie.
M. Fraser : C'est anecdotique, mais c'est une des impressions qu'on avait. M. Giguère peut peut-être qualifier.
M. Giguère : Il est toujours difficile de parler d'impressions. Oui, on était très content de voir la feuille de route revenir en place. On a vu des choses qui se sont concrétisées et d'autres qui ne se sont pas concrétisées.
J'ai un peu de difficulté à parler d'impressions, car ce sont nos impressions. Ce matin, je jasais avec des gens de Patrimoine canadien. J'étais heureux de voir que, malgré les compressions dans l'enveloppe globale, par exemple au niveau des transferts aux provinces pour la formation dans la langue seconde, ils ont réussi à maintenir le même niveau de transfert tout en coupant à l'interne de Patrimoine canadien. On ne sait pas quelles en seront les conséquences.
Plusieurs institutions fédérales sont de très bonne volonté et font tout ce qu'elles peuvent. Toutefois, à un certain point, elles n'ont pas l'argent nécessaire, et c'est là que le bât blesse. L'argent n'étant pas disponible, que fait-on sans argent? On ne peut pas réaliser ce qu'on veut. Je ne peux pas vraiment en dire plus.
La sénatrice Chaput : J'ai une question supplémentaire à celle de la sénatrice Tardif par rapport à la feuille de route. J'ai un peu de difficulté lorsque je pense que certaines sommes d'argent de la feuille de route ne seraient pas dépensées pour appuyer le développement et l'épanouissement des communautés de langue officielle en milieu minoritaire. Je pense, à titre d'exemple, à la formation des immigrants. On dira que 120 millions de dollars sont prévus dans la feuille de route pour appuyer les communautés. C'est beaucoup d'argent. Si cet argent n'appuie pas le développement et l'épanouissement de nos communautés de langue officielle en situation minoritaire, il ne devrait pas faire partie de la feuille de route, n'est-ce pas? Ou alors il faudrait dire qu'il sera dépensé de façon à appuyer les communautés.
M. Fraser : Je suis d'accord que ces 120 millions ne sont pas dirigés à l'appui des communautés. Cette somme est pour la formation linguistique des immigrants français au Québec et anglais dans le reste du pays. C'est pourquoi j'ai compris le changement du nom à Feuille de route pour les langues officielles. Donc, les immigrants qui parlent d'autres langues que nos langues officielles reçoivent de la formation linguistique dans les langues officielles. Cela tombe sous le parapluie de la feuille de route. C'est un changement de vocation pour la feuille de route.
La sénatrice Chaput : Je ne veux pas que l'on pense que je suis contre l'apprentissage d'une autre langue pour les immigrants. Au contraire, je suis totalement d'accord. Il faut en apprendre le plus possible et le plus de langues possibles.
Prenons le contexte manitobain, dans lequel je vis. Si l'argent de la feuille de route est utilisé pour enseigner l'anglais aux immigrants qui viennent au Manitoba, cela n'appuie pas du tout le développement et l'épanouissement de la communauté francophone du Manitoba. Cela fait l'inverse, on creuse l'écart entre les gens qui parlent français et ceux qui parlent l'anglais, on diminue les nombres. On devrait plutôt voir cet argent permettre d'enseigner le français aux immigrants qui ne le parlent pas. C'est ma façon de voir la chose, et je suis mal à l'aise avec cela, monsieur le commissaire.
M. Fraser : J'en prends note. C'est une chose dont j'ai déjà discuté avec l'ancien ministre responsable. J'aimerais tout de même apporter une petite nuance, et c'était avant ce changement, avant ces 120 million de dollars. L'institution Accueil francophone, pour laquelle j'ai énormément de respect et d'admiration, organise pour des immigrants et des réfugiés francophones des cours d'anglais, dans un contexte de formation nécessaire pour la préparation à l'emploi. Je ne sais pas si ces programmes sont éligibles pour ce financement du 120 millions, mais je pense qu'il faut, en tout réalisme, reconnaître que pour avoir un emploi dans l'Ouest canadien, il faut avoir une certaine capacité de parler anglais. Je pense que ce n'est pas nuire à la communauté que de faire en sorte que cet apprentissage soit offert par une institution francophone.
La sénatrice Chaput : Je suis d'accord avec vous, monsieur le commissaire, et je suis consciente de cette initiative qui fonctionne très bien. Il faut que les immigrants de langue française apprennent l'anglais au Manitoba s'ils veulent continuer à vivre au Manitoba, puisque c'est une province majoritairement anglophone.
Ce que je dis, c'est que, pour aider la communauté francophone du Manitoba à se développer, à s'épanouir, et pour ajouter à ces nombres, il faut une formation aussi en français aux immigrants qui nous arrivent et qui ne parlent pas le français. C'est le seul point que je voulais apporter. C'est délicat, je ne voudrais pas qu'on pense que je suis contre une initiative, mais si c'est une initiative qui provient de la feuille de route, il faudrait regarder de quelle façon cette initiative appuie véritablement l'épanouissement et le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
M. Fraser : J'en prends note; c'est un élément qu'on va prendre en considération lorsqu'on fera le travail qu'on envisage faire sur la question de l'immigration, car c'est un des thèmes qu'on va aborder dans les mois à venir, pour le reste de mon mandat. La question de l'immigration, la transformation démographique au Canada, c'est vraiment important pour la dualité linguistique au Canada et pour la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Le sénateur McIntyre : Monsieur le commissaire, j'aimerais aborder avec vous la question des recommandations. Depuis votre entrée en poste, en 2006, vous avez publié sur votre site web le suivi des 47 recommandations formulées dans vos rapports annuels. Si je ne m'abuse, au total, huit de ces recommandations ont été mises en œuvre; 11 ont été partiellement mises en œuvre; 11 n'ont pas été mises en œuvre; et les autres requièrent soit une mise en œuvre à long terme, ou sont trop récentes pour en faire un suivi immédiat.
Cela étant dit, ma question comprend deux volets. Premièrement, en tant que commissaire, êtes-vous satisfait de la mise en œuvre de certaines de vos recommandations? Deuxièmement, comment voyez-vous le cheminement des autres recommandations qui n'ont pas encore été mises en œuvre? Comment voyez-vous ce cheminement pour les trois prochaines années?
M. Fraser : Évidemment, j'aimerais que toutes mes recommandations soient mises en œuvre. Mais je crois que, concernant certaines recommandations, à la suite d'un suivi, nous allons ajuster nos attentes quand nous en apprendrons plus sur le fonctionnement du ministère. C'est le cas avec nos recommandations pour des vérifications ou les plaintes. Parfois un ministère va nous revenir, et on va reconnaître que, peut-être, telle recommandation n'était pas aussi perspicace qu'on le croyait lorsqu'on l'a formulée.
Nous continuons de faire des suivis à nos recommandations. Cela fait partie du dialogue que nous avons avec nos institutions. Pour expliquer plus en détail comment on fait ces suivis, ma collègue peut peut-être apporter des précisions.
Mme Saikaley : Je peux répondre pour les enquêtes de vérifications, mais je pense que la question du sénateur portait sur les recommandations du rapport annuel.
Le sénateur McIntyre : Oui, c'est exact.
M. Giguère : Alors je vais répondre.
Le sénateur McIntyre : Avant que vous répondiez à la question, si je comprends bien, cette année vous avez fait six nouvelles recommandations, et elles sont comprises dans les 47 recommandations.
M. Giguère : Dans le rapport annuel, oui, si ma mémoire est bonne. Nous venons de le faire, et je pense que nous devrions le partager avec vous. Le premier octobre, nous avons revu toutes les recommandations depuis 2006-2007. Par exemple, il y en avait quatre, entre autres, qui étaient considérées comme partiellement mises en œuvre; on les considère maintenant comme étant mises en œuvre.
Une d'elles était une recommandation partiellement mise en œuvre, et on s'est aperçu que c'était impossible de la mettre en œuvre intégralement. On l'a divisé en trois recommandations et on va faire un suivi. Pour une autre, on attendait une réponse; elle est maintenant partiellement mise en œuvre. Pour quelques autres, on attendait également une réponse, et elles ne seront pas mise en œuvre.
En vous donnant cette mise à jour, qu'on vous fera parvenir, vous allez voir exactement où nous en sommes. C'est important de vous ayez la dernière version.
La sénatrice Fortin-Duplessis : De plus en plus d'institutions fédérales font appel à des tiers, par exemple pour la sous-traitance, la dévolution, les partenariats, la privatisation. Elles le font pour réduire leurs coûts d'exploitation, mais les résultats en termes de respect des obligations linguistiques ne suivent pas. Personnellement, je crois qu'il est vraiment important que le Parlement comble le vide juridique qui existe actuellement, et clarifie les obligations linguistiques des tiers.
Quelles solutions proposez-vous pour améliorer le plein respect de l'article 25 de la Loi sur les langues officielles dans l'ensemble des institutions fédérales?
M. Fraser : Effectivement, je pense que, dans la privatisation ou la dévolution, il faut avoir des clauses linguistiques. Il faut que les institutions aient clairement la responsabilité de veiller à faire en sorte que ces clauses soient respectées, que le contrat contienne une prime pour le respect de cette exigence, une prime que le contractant n'aura pas si cette obligation n'est pas respectée.
Il y a également un phénomène que je devrais mentionner, c'est qu'il y a eu quatre projets de loi de suite sur Air Canada qui sont morts aux Feuilleton. Parfois j'ai l'impression que, chaque fois qu'un projet de loi arrive, Air Canada change la structure pour que certains éléments ne soient pas assujettis à la loi.
Actuellement, par exemple, Jazz et les autres parties du réseau aérien Jazz ne sont pas assujettis directement à la loi ou on ne peut pas faire enquête directement sur Jazz, mais Jazz est redevable à Air Canada pour ses obligations. Si on reçoit des plaintes sur les services de Jazz, il faut faire enquête sur Air Canada et sur la façon dont Air Canada a obligé Jazz à respecter ses obligations.
On devrait avoir un cadre législatif pour englober tous les éléments d'Air Canada, car il y a eu certains changements de structure financière et organisationnelle qui ont fait en sorte que, dans certains services, des employés avaient des droits linguistiques. Ensuite, la structure a été modifiée et les mêmes employés qui se rendaient à la même usine pour faire le même travail n'avaient plus ces droits linguistiques, car il y avait un changement de structure chez Air Canada avec la création des nouvelles compagnies à l'intérieur de cette structure.
Il en a résulté, comme je l'ai dit, quatre projets de loi. J'ai récemment tenu une conversation avec la ministre pour l'informer de cette situation et de l'importance d'un nouveau projet de loi, un cinquième, afin de régler la situation.
La sénatrice Fortin-Duplessis : Comme ma collègue a ouvert la porte concernant la Francophonie, que le Canada en fait partie, et que les Canadiens sont habituellement très fiers que nous fassions partie de la Francophonie, j'aimerais vous demander si vous pensez que le fait de faire partie de la Francophonie a une incidence positive sur nos communautés de langue officielle en situation minoritaire?
M. Fraser : C'est une très bonne question, mais je n'ai pas de réponse claire. Le Nouveau-Brunswick, par exemple, est une province qui participe et cela crée une fierté pour les communautés acadiennes; l'Ontario assiste comme observateur sans avoir le même statut dans la Francophonie.
Pour les autres communautés de langue officielle en situation minoritaire, tout dépend de la constitution de la délégation canadienne qui participe à ces congrès. Si des leaders individuels des communautés participent à une délégation canadienne à un sommet de la Francophonie, cela peut être une inspiration pour ces leaders individuels.
Par exemple, le fait que le Nouveau-Brunswick ait été l'hôte d'un sommet de la Francophonie à Moncton, il y a 15 ans environ, a été une grande source de fierté pour la communauté acadienne. Plus loin que cela dans l'histoire, je ne saurais pas vous dire.
La sénatrice Chaput : J'ai une question supplémentaire à poser suite à celle de la sénatrice, et que j'ai trouvé excellente. Ne croyez-vous pas, monsieur le commissaire, que le fait d'être conscient de faire partie d'une francophonie qui va plus loin que notre province, notre pays, et qui est donc une francophonie mondiale, que cela contribue à la fierté de pouvoir s'exprimer en français chez nous?
Quand je discute avec mes petites-filles et que je parle d'une francophonie qui va plus loin que le Manitoba et le Canada, il me semble que leurs yeux s'allument, car elles voient que cela va beaucoup plus loin que chez nous. N'est-ce pas là un élément qui contribue à notre fierté?
M. Fraser : Je crois que c'est extrêmement important pour la Francophonie canadienne de se faire une place dans la Francophonie mondiale, et que c'est important pour les Canadiens de reconnaître que la francophonie existe, que le français est une langue internationale, comme l'espagnol ou l'anglais.
Une des institutions qui a fait beaucoup pour créer ce sentiment de fierté, c'est le Centre francophone des Amériques à Québec. Ce centre offre des programmes pour des jeunes : des programmes de communication, des concours vidéo; leur mandat et leur vocation sont de créer ce sentiment d'appartenance pour un ensemble plus grand que le Québec ou le Canada, donc de créer le sentiment que le français est une langue internationale et que la francophonie offre un sentiment de communauté qui existe.
Un sommet de la langue française a eu lieu à Québec, il y a un an et demi, et on a pu voir un effort particulier afin de faire participer des jeunes à ce sommet. Je pense que cette expérience pour des jeunes de toutes les provinces d'aller à Québec, de voir et de rencontrer des jeunes Africains, des jeunes Européens et des francophones de tous les continents a été une inspiration pour ces gens.
Pour le monde ordinaire, souvent, l'Organisation internationale de la Francophonie est un peu abstraite, comme le Commonwealth l'est un peu pour le commun des mortels. Je ne veux pas trop charrier sur l'importance que cela peut avoir pour des jeunes ou des moins jeunes, mais je crois que c'est un réseau extrêmement important qui peut être une inspiration pour des gens dévoués à la vitalité de la langue française au Canada.
La sénatrice Champagne : J'aimerais relater une des choses qui, je pense, devrait se raccrocher à ce que vous venez de dire, monsieur le commissaire; c'était de voir à Abidjan, en Côte d'Ivoire, en juillet dernier, le Parlement des jeunes. Il y avait là des jeunes de pays africains, de pays européens et du Canada et tous ont eu un débat; les meilleurs sont venus et ont fait un débat devant les parlementaires. Il fallait voir les jeunes de tous ces pays, de toutes ces couleurs et qui avaient une chose en commun : le français; c'était une belle journée.
La sénatrice Charette-Poulin : J'aimerais poser ma question en anglais. Vous avez fait votre présentation en français et en anglais et nous sommes au comité des langues officielles.
[Traduction]
J'aimerais passer à l'anglais, si vous êtes d'accord, monsieur Fraser.
M. Fraser : Je puis vous répondre dans la langue de votre choix.
La sénatrice Charette-Poulin : Deux choses. Premièrement, à la lecture du rapport annuel, j'ai été vivement impressionnée par le fait que vous ayez créé le Prix d'excellence — Promotion de la dualité linguistique. Ce prix a été remis cette année à Justin Morrow qui, au départ anglophone unilingue, s'est installé dans un environnement francophone à l'Université Laval, au Québec, parce qu'il voulait faire du sport à l'université. Il a appris le français comme langue seconde. Maintenant il dirige une organisation appelée Canadian Youth for French. Pouvez-vous me parler un peu de cette organisation?
M. Fraser : Avec grand plaisir. En fait, je reviens tout juste d'une fin de semaine à Québec où, à la pause entre le premier et le deuxième quart de la Coupe Vanier, je suis allé sur le terrain remettre à Justin Morrow le Prix d'excellence — Promotion de la dualité linguistique. C'est un jeune homme impressionnant. Comme vous l'avez dit, il était anglophone unilingue, et il a grandi, comme il aime le dire, dans la capitale de la rhubarbe du Canada, c'est-à-dire à Sheddon, en Ontario, près de London. Il a abandonné les cours de français après la neuvième année; il a joué au football à l'Université Simon Fraser et à l'Université d'Ottawa. Il a été retiré de son équipe, mais il estimait qu'il pouvait encore faire du football universitaire et a présenté une demande à l'Université Laval. Il est allé à l'Université Laval jouer au football et, en même temps, il a appris le français, obtenu un diplôme et gagné deux championnats avec le Rouge et Or. L'apprentissage du français l'avait tellement transformé qu'il a décidé de créer cette ONG appelée Canadian Youth for French. Il a réussi, avec un peu d'aide financière de Patrimoine canadien et d'autres organismes, à mettre sur pied une modeste organisation et à créer un site web. Son conseil d'administration rassemble des gens d'un peu partout au pays. Il s'est lancé dans une sorte d'entreprise missionnaire très personnelle auprès des jeunes et des fonctionnaires fédéraux.
Je l'ai entendu prendre la parole devant les fonctionnaires d'un ministère fédéral et constaté qu'il a le don exceptionnel de persuader lorsqu'il parle de l'importance d'apprendre les deux langues officielles. C'est d'autant plus impressionnant parce qu'il dit ceci : « J'étais un sportif, un joueur de football. J'ai délaissé le français en neuvième année. Je n'ai jamais pensé que le français me servirait à quelque chose. Pour jouer au football, je suis allé à l'Université Laval et cela a changé ma vie. » C'est le genre de témoignage personnel qui émeut et inspire. Il possède l'énergie et l'enthousiasme, et je dirais même, la naïveté, de quelqu'un qui veut changer le monde. J'ai éprouvé, en lui remettant ce prix, une grande fierté d'avoir pu souligner ce qu'il a fait jusqu'à maintenant et ce que j'espère qu'il continuera à faire.
La sénatrice Charette-Poulin : Votre réponse introduit précisément ma seconde question.
À la fin de votre exposé, il y a quelques instants, vous avez dit que nos langues officielles sont l'une des caractéristiques de notre identité canadienne. Nous avons besoin de sentir que les deux langues nous appartiennent et qu'elles font partie de notre identité nationale, même si nous n'en parlons qu'une seule.
Nombre de mes collègues ici présents aujourd'hui ont parlé de la fierté que nous devrions avoir en tant que pays qui a deux langues officielles. Mais qui est responsable de l'élaboration d'un plan de marketing pour stimuler cette fierté chez les Canadiens?
M. Fraser : Je pourrais, bien sûr, vous offrir une réponse purement technique, c'est-à-dire que les langues officielles relèvent du portefeuille de Patrimoine canadien. J'ai été vivement impressionné par la sincérité, l'enthousiasme et l'engagement de la ministre du Patrimoine canadien, qui, manifestement, fait siens ces principes, comme l'a fait son prédécesseur, James Moore. De façon plus générale, c'est la responsabilité de tous et elle ne peut être tout simplement confiée à un seul ministère fédéral.
La sénatrice Charette-Poulin : Vous avez parlé de leadership.
M. Fraser : Oui. L'une des choses que j'ai constatées, c'est que, même si cela n'a jamais été une politique ou un règlement du gouvernement, on tient désormais pour acquis que, pour être le chef d'un parti politique, dans notre pays, il faut pouvoir communiquer avec tous les Canadiens dans la langue officielle de leur choix. Ce n'est plus une question à débattre. Ce n'est pas non plus une question partisane, mais simplement la réalité.
Dans les campagnes au leadership récentes, certains candidats n'ont pu obtenir l'appui nécessaire parce que des délégués unilingues, membres de leur parti, ont conclu que ce candidat, même s'ils l'aimaient et appuyaient ses politiques, ne pourrait survivre dans un débat en français et ne pourrait communiquer avec les Canadiens dans les deux langues officielles. C'est un principe que les partis politiques eux-mêmes ont introduit. Personne ne leur a dit de le faire, c'est simplement devenu une réalité dans la vie publique au Canada.
Je voudrais faire une autre observation, qui concerne ma présence, il y a quelque temps, à une conférence donnée à l'Université d'Ottawa. Il y avait un atelier sur les questions autochtones et quelqu'un a soulevé la question des langues autochtones. Parmi les participants, il y avait Phil Fontaine, l'ancien grand chef des Premières Nations, George Sioui, professeur en études autochtones et Jennifer Rattray, professeure à l'Université de Winnipeg. En réponse à une question concernant les langues autochtones, la professeure Rattray a dit : « Contrairement à MM. Fontaine et Sioui, je ne parle pas ma langue. » Cette phrase me hante depuis, car elle ressentait un sentiment d'appartenance à l'égard de sa langue autochtone traditionnelle. Même si cette langue fait partie de son identité, elle ne la parle pas. Dans une certaine mesure, c'est en réfléchissant à cela que j'ai rédigé cette phrase et répété le fait que les Canadiens doivent ressentir un sentiment d'appartenance à l'égard des deux langues officielles, car elles font partie de leur identité nationale, même s'ils ne parlent pas l'autre langue. Ils devraient être fiers de ce fait, être fiers de l'entendre, et devraient sentir que la présence des deux langues officielles enrichit leur perception de la nature même de notre pays.
La sénatrice Charette-Poulin : Est-ce que la loi habilitante portant création du Commissariat aux langues officielles vous permet de dépenser pour des campagnes de publicité visant à susciter un sentiment de fierté, car vous avez pensé à un prix d'excellence?
M. Fraser : Il est certain que rien ne m'empêche de consacrer des fonds à des activités de publicité. Certains de mes prédécesseurs ont mis au point des jeux à l'intention de la jeunesse. Nous projetons une campagne de publicité sur les droits des voyageurs. À l'occasion, nous avons publié des annonces dans les journaux. Nous avons organisé des tribunes sur la dualité linguistique et la diversité culturelle à Montréal, à Toronto, à Vancouver et à Halifax, non pas dans cet ordre, mais dans toutes ces villes. Tout cela s'inscrit dans le cadre de nos activités publicitaires, qui sont du ressort de M. Giguère et de la Direction générale des politiques et des communications.
La sénatrice Charette-Poulin : Vous auriez dû voir son visage lorsque j'ai posé la question. Il va certainement vous demander de grossir son budget!
M. Fraser : L'une des choses que j'ai apprises à propos de n'importe quel organisme, c'est qu'il y a des choix difficiles à faire. L'un des faits que M. Giguère me rappelle périodiquement est que, si vous faites quelque chose de nouveau, vous devez laisser tomber quelque chose que vous faites déjà. Notre budget n'est pas élastique et ne nous permet pas de faire toutes sortes de belles choses, mais rien ne nous empêche de mener une campagne de publicité.
[Français]
La présidente : Monsieur le commissaire, je tiens à vous remercier, ainsi que votre équipe, pour votre présence ici aujourd'hui. Je vous remercie pour votre rapport annuel de 2012-2013, c'est un excellent rapport qui fait le bilan des sept dernières années en matière de langues officielles et aussi des recommandations que vous nous proposez pour l'avenir.
Votre rapport fait état de plusieurs succès, mais aussi de plusieurs défis auxquels nous ferons face afin de contrer l'érosion du bilinguisme. Je crois que tous ici, membres du Comité sénatorial permanent des langues officielles, avons intérêt à voir à ce que la promotion des langues officielles et de notre dualité linguistique continue à faire partie de notre identité canadienne.
À vous tous, merci beaucoup.
(La séance est levée.)