Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans
Fascicule 7 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 29 avril 2014
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd'hui, à 17 h 14, pour étudier la réglementation de l'aquaculture, les défis actuels et les perspectives d'avenir de l'industrie au Canada.
Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Je m'appelle Fabian Manning. Je suis un sénateur de Terre- Neuve-et-Labrador et le président du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. Nous continuons aujourd'hui notre étude sur l'industrie de l'aquaculture au Canada. Avant que nous commencions, je demanderais aux sénateurs de se présenter.
La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario.
La sénatrice Hubley : Elizabeth Hubley, de l'Île-du-Prince-Édouard.
Le sénateur Munson : Jim Munson, de l'Ontario, mais comme je le dis toujours, mon cœur demeure au Nouveau- Brunswick.
La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur McInnis : Tom McInnis, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.
Le sénateur Wells : David Wells, de St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador.
[Français]
La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le président : Ce n'est pas la première fois que nos témoins d'aujourd'hui comparaissent devant notre comité. Nous sommes heureux de vous revoir. Je crois savoir que vous avez un exposé à nous présenter. Je vais vous céder la parole, et je suis sûr que nos sénateurs auront des questions à vous poser par la suite.
Ruth Salmon, directrice générale, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture : Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie beaucoup de l'invitation. Je suis ravie d'être de retour. Je suis accompagnée du président de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, Clare Backman. Certains d'entre vous l'ont peut-être rencontré lors de votre voyage en Colombie-Britannique.
Pour ce qui est de mon exposé, on m'a demandé de donner le point de vue de l'industrie concernant l'idée d'adopter une loi sur l'aquaculture et sur son contenu, mais j'aimerais d'abord mettre les choses en contexte. Les huit premières diapositives reprennent l'exposé que j'ai présenté en juin. Je n'élaborerai pas là-dessus, mais j'ai pensé qu'il serait utile de les passer rapidement justement pour replacer les choses dans leur contexte, et je parlerai plus en détail du contenu des autres diapositives.
La première porte sur la situation actuelle et le choix crucial que je crois que nous devons faire en tant que Canadiens; 50 p. 100 des fruits de mer vendus au Canada et dans le monde entier sont maintenant issus de l'aquaculture, et la demande mondiale de fruits de mer augmente à un rythme de 7 à 9 p. 100 par an. Puisque la demande augmente autant, quel est le rôle du Canada? Répondrons-nous à la demande à venir en misant sur l'importation, ou en réaffirmant notre leadership et en développant cette industrie durable? C'est la décision que nous devons prendre, et je sais que le comité se penche sur la question.
La diapositive suivante est importante pour nous, car elle nous rappelle qui nous sommes. Nous sommes des cultivateurs et non des pêcheurs. Selon la définition que propose la FAO, la culture implique une quelconque forme d'intervention dans le processus d'élevage, par exemple l'empoissonnement à intervalle régulier, l'alimentation, la protection contre les prédateurs, comme toute autre entreprise agricole.
Au sujet de la diapositive suivante, je crois que depuis le début de votre étude, on vous a donné les renseignements qu'elle contient à maintes reprises. Cela vous donne vraiment une idée de l'importance de l'industrie — il s'agit d'une industrie de 2,1 milliards de dollars comptant 14 500 travailleurs. Il y a de l'aquaculture dans toutes les provinces et au Yukon. Nous représentons le tiers de la valeur totale de la production des pêches au Canada.
Les deux diapositives suivantes sont celles qu'il est important d'examiner, car vous remarquerez que notre industrie a connu une croissance rapide au cours des années 1980 et au début des années 1990, mais que depuis 12 à 13 ans, la croissance stagne. Dans un contexte où d'autres pays vont de l'avant et que la demande de fruits de mer est très élevée, ce sont des données inquiétantes.
Le tableau de la diapositive qui suit dresse une comparaison entre notre production et celle de nos concurrents. Comme vous pouvez le constater, nous perdons du terrain. Selon les données de 2012 de la FAO, la part de la production mondiale que détient le Canada a baissé de plus de 47 p. 100 depuis 2002. Tout le monde s'entend pour dire que les données de ce tableau sont inquiétantes.
La diapositive suivante contient des renseignements sur les possibilités d'investissement. Toutes les entreprises de nos membres de l'industrie salmonicole investissent à grande échelle. Nous avons été en mesure de rassembler des données. Au cours de la dernière année et demie, plus de 500 millions de dollars ont été investis dans la salmoniculture à l'échelle mondiale, mais moins de 7 p. 100 de cette somme a été investie au Canada. Les directeurs généraux et les PDG de ces entreprises nous disent que les investissements au Canada pourraient facilement atteindre de 20 à 25 p. 100.
La diapositive suivante contient les principales raisons de la stagnation de la production. Comme vous le savez, et je suis sûre que vous n'en êtes pas surpris étant donné que vous faites une étude, notre système de réglementation est trop complexe, incertain, déroutant — certains diront qu'il est fragmenté —, et il limite la croissance et l'investissement. En raison de la structure plurigouvernementale, il y a des chevauchements entre le gouvernement fédéral et les provinces à bien des égards. Nous sommes régis par la Loi sur les pêches, un ensemble disparate de règlements qui ont été établis il y a des décennies pour encadrer la pêche sauvage, soit bien avant que l'aquaculture devienne une activité commerciale.
La diapositive qui suit vous donne une idée de la façon dont l'industrie s'y est prise pour intervenir. De toute évidence, la stagnation préoccupe l'industrie; nous avons pourtant tellement de possibilités au Canada et la demande de fruits de mer augmente. Le marché est florissant.
Nous travaillons tous ensemble — les producteurs de mollusques et crustacés et de poissons à nageoires de partout au pays — à la conception d'une stratégie nationale axée sur trois objectifs pour l'adoption d'un cadre législatif et d'une loi sur l'aquaculture pour le Canada; c'est notre objectif. Parallèlement, nous souhaitons vivement qu'il y ait une réforme réglementaire et une réforme de la politique et des programmes. Je vais expliquer un peu plus en quoi cela favorisera la croissance et la compétitivité.
Je vais maintenant ralentir le rythme un peu, car la diapositive suivante est nouvelle et elle porte sur les raisons pour lesquelles le Canada a besoin d'une loi sur l'aquaculture. Avant tout, il faut comprendre que depuis au moins 30 ans, les études, les rapports de comités et les spécialistes s'entendent pour dire que l'adoption d'une loi est nécessaire. L'automne dernier, le Conference Board du Canada a mené une étude sur les pêches et l'aquaculture et les deux industries sur le plan économique. Il a constaté lui aussi qu'il est nécessaire d'adopter une loi sur l'aquaculture, ce qu'il recommande.
Je vais donner plus de renseignements sur les cinq points suivants, mais à notre avis, ils constituent les éléments essentiels dont il faut tenir compte dans le cadre de l'élaboration d'une loi sur l'aquaculture. Tout d'abord, il faut définir le mot aquaculture.
Ensuite, il faut affirmer un engagement à l'égard de l'aquaculture. Nous pensons que cela affirmerait le rôle moteur que joue le Canada en matière de gestion responsable de l'aquaculture. De plus, une loi réglerait les questions de chevauchement des compétences et fournirait un mécanisme de coopération avec les provinces et les territoires. Nous aurions ainsi l'occasion de mettre à jour les protocoles d'entente. L'adoption d'une loi pourrait remédier à l'incertitude, au manque de clarté et aux incohérences. Comme je l'ai dit, le cadre réglementaire actuel est un ensemble disparate de règlements. Il n'y a pas de thème central.
Par ailleurs, nous pensons qu'une loi sur l'aquaculture est nécessaire pour reconnaître les droits de propriété privée. Les organismes aquatiques qui sont cultivés dans une exploitation aquicole demeurent de propriété privée, ce qui est unique par rapport à la pêche sauvage.
La diapositive qui suit contient de plus amples renseignements sur les points dont je viens de parler. Tout d'abord, il faut définir clairement la notion d'aquaculture, ce qui est très important, car il s'agit d'un type de culture. Encore une fois, nous avons parlé de la définition de la FAO, qui est utilisée dans le cadre des lois sur l'aquaculture qui régissent nos concurrents. Tout le monde définit l'aquaculture de la même façon.
Nous croyons également qu'une loi doit s'appliquer dans le cadre d'une autorité législative fédérale, et qu'elle doit respecter la division complexe des pouvoirs conférés par la Loi constitutionnelle de 1867, en ce qui a trait à l'aquaculture. Nous ne proposons pas l'adoption d'une loi fédérale qui empiète sur les droits des provinces. Je pense qu'il est important de le préciser.
Nous pensons également qu'une loi canadienne sur l'aquaculture devrait orienter l'industrie et les gouvernements, de même que la population et d'autres intervenants. À l'heure actuelle, la gestion des activités aquacoles est régie par la Loi sur les pêches, du point de vue des pêches traditionnelles — sans surprise —, ce qui ne tient pas compte des meilleures façons de se pencher sur les activités d'aquaculture. On n'a pas établi d'ordre de priorité quant à la façon dont le régime réglementaire actuel devrait jouer un rôle dans les activités aquacoles ou à savoir si certains règlements ou pouvoirs devraient avoir préséance sur d'autres. Encore une fois, on parle de clarté, non seulement pour l'industrie et les gouvernements, mais aussi pour tous les intervenants.
Comme l'indique la diapositive suivante, une loi canadienne sur l'aquaculture devrait affirmer de nouveau l'engagement du gouvernement fédéral à l'égard de l'aquaculture, soit de la promotion, de la recherche et de la mise en valeur du secteur aquacole. Notre système actuel ne favorise pas le leadership canadien à cet égard. À l'heure actuelle, les exploitations aquacoles n'ont pas accès à bon nombre de programmes fédéraux qui appuient les exploitations aquacoles. Or, il s'agit d'une industrie alimentaire. Nous produisons un produit alimentaire, et nous croyons que tout comme les exploitations agricoles, nous avons besoin de soutien pour produire un produit alimentaire sain et de qualité.
D'autre part, une loi canadienne sur l'aquaculture devrait définir le rôle des ministères fédéraux de façon claire et cohérente. Je crois que même des représentants du MPO ont admis que la confusion règne dans leur propre ministère. Dans certains secteurs, nous constatons que les choses se précisent.
À l'heure actuelle, le chevauchement des règlements fédéraux, à l'intérieur du système fédéral lui-même et par rapport aux provinces, retarde la prise de décisions; alourdit la collecte de données ou mène au double emploi à cet égard dans certains cas; oblige les exploitants à demander ou à renouveler fréquemment leur permis; et cause de l'incertitude quant aux compétences et au rôle de chaque gouvernement et quant aux responsabilités des exploitants. Une loi contribuerait à dissiper beaucoup d'incertitudes.
Je passe à la prochaine diapositive. Nous avons parlé de l'importance de reconnaître les droits de propriété privée. Nous sommes d'avis qu'une loi sur l'aquaculture devrait établir des mécanismes et un cadre fonctionnel pour favoriser la coopération avec les provinces et les territoires. Cela permettrait au gouvernement fédéral de conclure des accords d'harmonisation, et l'on pourrait déterminer les rôles de chacun et le fonctionnement du processus, ce qui serait tellement important pour nous, les représentants de l'industrie, pour le gouvernement et aussi pour la population. Il faut que la population sache comment les choses fonctionnent pour qu'il y ait une plus grande transparence. C'est ce que favoriserait une loi.
La diapositive qui suit porte sur le soutien pour une croissance durable, car au bout du compte, c'est le grand objectif à atteindre, à notre avis. Tout d'abord, nous croyons qu'on peut améliorer la productivité en réformant la réglementation, les politiques et les programmes. Je crois qu'à cet égard, la ministre Shea et les fonctionnaires du MPO travaillent d'arrache-pied, et ils ont indiqué que l'amélioration de la productivité passe par une réforme réglementaire.
Que comprend une réforme réglementaire? Elle inclut un meilleur accès aux aliments novateurs ou fonctionnels auxquels nos concurrents ont accès, contrairement à nous; un meilleur accès à de nouvelles espèces et à de nouveaux stocks de reproducteurs; des permis pluriannuels en Colombie-Britannique; et un certain nombre de réformes réglementaires qui accroîtraient la diversification et le dynamisme de notre industrie.
De plus, les améliorations de la productivité pourraient aller de pair avec un processus d'approbation de changements transparent et rapide, et les approbations ne se font pas en temps opportun à ce stade-ci. Selon nous, sans même tenir compte de l'adoption d'une loi sur l'aquaculture, c'est un élément qui peut favoriser l'amélioration de la productivité et de la réglementation.
Toutefois, c'est lorsque nous parlons de croissance importante que nous croyons qu'une loi sur l'aquaculture est absolument essentielle. C'est de ce type de certitude que notre industrie a besoin pour favoriser l'investissement; de même que la création de nouveaux sites pour des espèces nouvelles et traditionnelles, d'infrastructures — comme des écloseries, des usines de transformation et des infrastructures de transport —, et de nouveaux emplois. Seule l'adoption d'une loi nous permettra d'attirer des investissements à long terme et instaurera le climat de certitude qu'il faut et apportera les éclaircissements nécessaires, de sorte que nous obtenions 20 à 25 p. 100 des investissements plutôt que 7 p. 100.
La diapositive suivante contient quelques renseignements sur les mesures prises par nos concurrents. Nous n'avons pas fait un examen approfondi de leurs lois. Nous le ferons au cours de l'année à venir, mais je voulais souligner quelques facteurs importants.
La Norvège a adopté une loi sur l'aquaculture en 2005. Elle établit un cadre pour la croissance à venir du secteur. Elle favorise la profitabilité et la compétitivité, et elle couvre tous les aspects de l'aquaculture : l'aquaculture en mer et en eau douce, l'aquaculture terrestre et le pacage marin. Elle est très complète.
La diapositive suivante contient des renseignements sur les mesures adoptées par l'Écosse. Sa loi sur l'aquaculture veille à la gestion à la fois des pêches sauvages et d'élevage et elle a été améliorée en 2013. Elle s'applique non seulement aux produits d'élevage, mais également aux produits sauvages et elle maximise les contributions combinées à l'appui de la croissance économique. De plus, elle tient compte de l'environnement marin dans son ensemble.
La prochaine diapositive porte sur les États-Unis, dont la situation ressemble probablement davantage à celle du Canada, en ce sens que les compétences sont partagées. L'aquaculture est réglementée à l'échelle fédérale et des États. L'activité réglementaire se fait surtout à l'échelle des États. À l'échelle fédérale, l'aquaculture est régie par diverses lois émanant de la FDA, de l'USDA et de l'Agence de protection environnementale.
Encore une fois, quel est l'objectif visé? Il s'agit d'appuyer le développement du secteur et de favoriser la coordination entre les divers départements.
On constate que peu importe le pays qui a adopté une loi sur l'aquaculture, des thèmes bien connus reviennent : coordination, développement du secteur, cadre favorisant la croissance, la profitabilité et la compétitivité et gestion efficace de l'environnement.
C'est ce que nous avons découvert jusqu'à maintenant, et nous en apprendrons certainement davantage au cours des années à venir lorsque nous discuterons avec nos collègues.
La diapositive suivante vous donne un aperçu — et je crois l'avoir présentée en juin, mais ces chiffres sont toujours valables. L'atteinte des résultats réels de notre stratégie nationale, soit la réforme de la réglementation, des politiques et des programmes et l'adoption d'une loi sur l'aquaculture, pourrait se traduire par l'augmentation de la production, des emplois et de l'activité économique. En cinq ans, la productivité résultant de la réforme et des modifications réglementaires pourrait facilement passer de 174 000 tonnes — ce qui correspond à la production actuelle — à 200 000 tonnes, et doubler en 10 ans.
Cela entraînerait une augmentation des emplois et des activités économiques et se traduirait par une croissance des occasions offertes aux collectivités des Premières Nations et côtières. De plus, nous pourrions tirer profit des possibilités non seulement de l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne, mais également de l'accord de libre-échange avec la Corée qui a été signé récemment. Nous sommes très optimistes et nous appuyons le gouvernement à cet égard, mais sans une production accrue, nous ne pouvons vraiment pas tirer pleinement profit de ces excellents accords.
Sur la dernière diapositive, nous disons simplement que nous sommes très reconnaissants du travail de votre comité, qui est essentiel. À notre avis, il est urgent d'agir si nous voulons assurer la croissance et le développement responsables de l'aquaculture, favoriser un climat de certitude et accroître la compétitivité. La croissance — non seulement pour l'industrie — assurera la sécurité alimentaire du Canada et se traduira par l'augmentation de l'emploi et de la prospérité économique dans les collectivités rurales et côtières.
Merci.
Le président : Merci, madame Salmon.
Monsieur Backman, avez-vous un exposé à présenter?
Clare Backman, président, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture : Oui. Merci de l'invitation à témoigner devant votre comité à nouveau. Je suis content d'avoir rencontré quelques-uns d'entre vous, il y a quelques semaines.
Mes commentaires s'appuient sur ma propre expérience et mes 30 ans de carrière. J'ai collaboré avec les deux ordres de gouvernement pour garantir la conservation et la production durable du saumon en Colombie-Britannique. Depuis 15 ans, je travaille à la production durable de saumon dans cette province.
Je vais vous présenter l'exposé que j'ai préparé pour aujourd'hui. L'industrie aquacole admet que la Loi sur les pêches vise à conserver et à protéger les pêches canadiennes par la gestion efficace d'une ressource de propriété publique. La santé des stocks de poissons est importante pour les Canadiens et les nombreuses entreprises qui en vivent.
Mais par sa nature même, la Loi sur les pêches est une série d'interdits; c'est-à-dire d'actes à éviter à moins de détenir un permis ou d'actes réglementés servant à protéger cette ressource. La loi est conçue de manière à autoriser la fermeture saisonnière ou permanente de pêches, à imposer des restrictions ou des conditions à l'égard de l'équipement de pêche et aux prises admissibles, à interdire certains comportements et à imposer des amendes en cas d'infraction.
Toutefois, la loi n'est pas conçue de manière à régler les questions d'élevage du poisson, dans les cas où la ressource est de propriété privée et implique une intervention, comme un empoissonnement régulier, l'alimentation et la protection contre les prédateurs et la maladie. Elle n'est pas conçue non plus pour promouvoir un meilleur accès aux pêches existantes, pour favoriser la croissance d'espèces sous-exploitées ou pour définir les niveaux de croissance qu'il faudrait atteindre en matière de production pour que le Canada puisse soutenir la concurrence sur les marchés internationaux. Les notions de culture, de promotion et de croissance sont fondamentales pour la pisciculture, mais elles n'ont pas de place dans la Loi sur les pêches.
Ce sont là de parfaits exemples du type de réflexion sur laquelle doit reposer la future loi sur l'aquaculture.
La Loi sur les pêches ne tient pas et ne peut pas tenir compte des déterminants de la culture privée qui influent sur les produits aquacoles canadiens et leur compétitivité sur les marchés internationaux. Ces questions constituent pourtant le cœur de notre discussion sur la stagnation actuelle de la croissance du secteur : gérer l'aquaculture canadienne uniquement dans le cadre de la Loi sur les pêches est le moyen le plus sûr de la faire stagner.
Faisons deux suppositions : premièrement, qu'une loi sur l'aquaculture sera élaborée en fonction des exemples cités et, deuxièmement, que le secteur canadien de l'aquaculture continuera d'évoluer dans le respect de la Loi sur les pêches. Et posons-nous la question suivante : comment le secteur aquacole peut-il croître tout en demeurant durable du point de vue de l'environnement?
Tout d'abord, examinons l'expression « durable du point de vue de l'environnement ». La durabilité comporte trois aspects : économique, social et environnemental. Du point de vue économique, les produits doivent permettre aux producteurs de faire des profits pour gagner leur vie. Il faut également savoir que, si la production est excessive, l'offre le sera aussi : les prix baisseront et des exploitations risquent de fermer. La durabilité économique exige que la croissance de la production soit égale ou tout juste inférieure à la croissance des marchés pour que les entreprises soient profitables.
Du point de vue social, on doit tenir compte des éleveurs et de leurs voisins. De combien d'exploitations aquacoles a- t-on besoin pour créer l'infrastructure minimale à l'appui du secteur? C'est-à-dire pour attirer des entrepreneurs, des fournisseurs et des transformateurs de façon que l'entreprise qui produit ne soit pas forcée de gérer tous les aspects du processus par elle-même. D'un autre côté, combien d'exploitations aquacoles peuvent-elles s'établir dans une région avant que des conflits avec d'autres entreprises, les usages publics et les valeurs de conservation entraînent des protestations à l'échelle locale, régionale ou nationale?
Ce sont là des questions dont il faut tenir compte pour définir le rythme de la croissance du secteur. Ce rythme de croissance devrait être intégré au tissu social local ou régional. Toutefois, comme nous l'avons dit, la croissance ne doit pas être limitée uniquement par des questions de conservation pour les générations futures. Les saines pratiques de gestion et la réglementation responsable fondée sur la science doivent nous aider à décider ce qui constitue un risque acceptable.
Du point de vue environnemental, on doit tenir compte des effets physiques, chimiques et biologiques de l'aquaculture sur l'environnement d'accueil, c'est-à-dire la zone se situant immédiatement autour et sous l'exploitation où des changements peuvent être mesurés. Au-delà du champ d'effets mesurables — environ 200 mètres —, les questions concernant les impacts possibles sont davantage de nature sociale qu'environnementale.
Les 10 dernières années ont peut-être été stables en ce qui concerne la croissance de la production aquacole au Canada, mais elles ont été occupées en ce qui concerne les questions environnementales. En 2014, le processus de demande pour un site aquacole en Colombie-Britannique exige au moins deux ans de consultations avec les collectivités et de collecte de données physiques et biologiques. Ce processus tient compte des plans d'utilisation du territoire, du zonage local ainsi que des intérêts de la population locale. La demande complète d'examen couvre les profils de profondeur et de courant, des échantillons de diversité chimique et biologique des sédiments ainsi que des données provenant de sondages taxonomiques des cours d'eau, des plages, des zones infralittorales et du fond marin. Les sondages établissent les populations de base, de l'ormeau à l'otarie, en passant par le varech et le pou du poisson. L'empreinte des déchets organiques provenant de la ferme est modélisée et elle ne doit pas reposer à une profondeur inférieure à l'isobathe de 30 mètres.
Le coût actuel d'une telle demande est d'environ 400 000 $, avant même qu'elle ne soit envoyée au gouvernement pour examen.
Le secteur, le milieu universitaire et le gouvernement ont travaillé de concert à de nombreux projets de recherche pour mieux comprendre les risques de contagion ainsi que les impacts du pou du poisson et des échappées. Leurs travaux ont éclairé la discussion à ce sujet ainsi que les politiques et les conditions relatives aux permis.
Reste-t-il des choses à apprendre? Bien sûr et la recherche se poursuit, notamment sur la séparation des fermes et des habitats du poisson importants et sur le risque que des pathogènes provenant des stocks sauvages contaminent les stocks d'élevage et vice-versa.
Mais cette mesure des impacts biologiques ou sanitaires sur les espèces de passage — comme le saumon qui migre sur de longues distances et qui passe à proximité d'un élevage de saumons — pose une difficulté particulière; à savoir comment mesurer les risques éventuels que présente l'aquaculture et les différencier de la multitude d'autres risques auxquels sont confrontées ces espèces migratoires.
Toutefois, le travail se poursuit et on trouve de nos jours beaucoup plus de résultats de recherche environnementale qu'il y a 10 ans. Par conséquent, les organismes de réglementation ont une bien meilleure idée des risques. Le consensus qui se dégage de ces résultats n'est pas incompatible avec une aquaculture bien réglementée.
Si en ce moment une zone peut recevoir environ six exploitations aquacoles durables du point de vue de l'environnement, il n'y a pas de raison, a priori, que cette même zone ne puisse pas en accueillir d'autres. Les mêmes mesures de durabilité environnementale seront appliquées à chaque nouvelle exploitation potentielle. Les inquiétudes quant aux effets cumulatifs de la multiplication de fermes sur la qualité de l'eau menant à l'eutrophisation — l'apport excessif de substances nutritives —, bien que valides en ce qui concerne les lacs, ne s'appliquent pas aux maricultures, où l'énorme volume d'eau et le plancton indigène réussissent à absorber toutes les substances nutritives. Chaque site doit être évalué de manière autonome pour déterminer si ses impacts locaux sont acceptables et gérables à long terme.
Toutefois, comme nous l'avons déjà concédé, tous les sites d'une zone doivent être évalués dans leur ensemble quant à leur durabilité du point de vue social. Il arrive souvent que l'on atteigne la capacité de charge sociale avant la capacité de charge environnementale.
En conclusion, j'aimerais résumer certains points. Les organismes de réglementation estiment actuellement que l'aquaculture canadienne est durable du point de vue environnemental, tant et aussi longtemps qu'elle respecte les règlements applicables et la Loi sur les pêches. La recherche sur les impacts environnementaux se poursuit, et le consensus scientifique confirme la durabilité de l'aquaculture. De nouvelles découvertes pourraient changer le statut de durabilité, mais après 30 ans de recherche, c'est peu probable. La croissance du secteur, suivant l'examen attentif et l'approbation des nouveaux sites de production durable, peut et devrait reposer sur l'évaluation du risque de chaque site.
Enfin, pour fournir les capitaux nécessaires à la croissance du secteur, les entreprises ont besoin de savoir que l'évaluation de la durabilité environnementale ne sera pas renversée de façon arbitraire. Une loi sur l'aquaculture peut et devrait énoncer les attentes régionales pour soutenir la contribution croissante du Canada à la production aquacole mondiale.
La sénatrice Hubley : Bienvenue à vous deux et merci de vos exposés très instructifs. Nous connaissions certaines informations, mais c'est toujours utile de les réentendre.
Je veux revenir au graphique sur les 12 ans de stagnation, dont nous avons entendu parler durant nos voyages, et au deuxième graphique sur le retard que nous accusons par rapport à la concurrence. La croissance ne sera possible que si nous élaborons une loi qui règle les nombreux problèmes auxquels l'industrie est confrontée présentement.
La situation est-elle grave? Le Canada accuse-t-il beaucoup de retard? Devons-nous agir rapidement pour renverser la tendance?
Mme Salmon : Bonne question. Je vais commencer, et Clare pourra apporter des précisions.
Il est possible d'y aller par étapes. Notre industrie pense être en mesure d'améliorer la productivité sans loi sur l'aquaculture. Sans accroître l'empreinte environnementale ni donner accès à de nouveaux sites, des modifications attendues de longue date seraient profitables. Sans agrandir les sites, nous pourrions changer le type de cage et permettre l'utilisation de nouveaux produits pour favoriser la santé du poisson. La production serait meilleure, sans exiger de nouveaux sites. Au Nouveau-Brunswick, bien des sites sont laissés en jachère à l'heure actuelle, parce que la température de l'eau est trop élevée et que les exploitants n'ont pas accès à divers produits de santé pour le poisson. Les sites sont inexploitables. Vous en entendrez parler davantage lorsque vous irez au Nouveau-Brunswick.
Si ces changements étaient apportés à la réglementation, la productivité pourrait s'améliorer.
Par ailleurs, je pense que la loi sur l'aquaculture et la ferme volonté du Canada pour améliorer la situation sont nécessaires afin d'obtenir des investissements importants.
Concernant la construction de nouvelles usines de transformation, quel est le coût d'un nouveau site, Clare?
M. Backman : Après tout le processus de demande, un site coûte environ 1 million de dollars présentement. Il faut ensuite tenir compte des coûts de l'alimentation avant de récolter le poisson.
Mme Salmon : Pour construire des écloseries et toute l'infrastructure, il faut que le Canada indique d'une manière ou d'une autre qu'il veut voir l'industrie prendre de l'expansion et prospérer. La croissance pourrait se faire par étapes en commençant par améliorer la politique réglementaire et par réformer les programmes. Pour concurrencer les autres pays, l'industrie a besoin d'une loi qui apporte de la clarté et de la certitude.
La sénatrice Hubley : C'est clair que des étrangers investissent au Canada et offrent des occasions à saisir. Dans ma province, l'investissement étranger peut avoir une grande influence. Si l'aquaculture connaît le succès prévu, elle va attirer beaucoup d'investissement étranger, n'est-ce pas? Faites-vous la promotion de l'industrie aquacole auprès des investisseurs étrangers?
Mme Salmon : Je vais faire un commentaire, puis Clare pourra apporter des précisions.
Les investisseurs vont s'intéresser au Canada si le climat est propice. En Colombie-Britannique, il faut des années avant d'obtenir les permis nécessaires pour élever des poissons qui ont besoin de deux ans avant d'arriver à maturité. Ce n'est pas un climat favorable et rassurant en matière d'investissement. Mais je pense que, si ce climat changeait et que le fédéral indiquait clairement que l'industrie a besoin de soutien et de promotion, les investisseurs s'intéresseraient à notre industrie. Nous espérons que le gouvernement prendra des mesures.
M. Backman : Comme Ruth l'a dit dans son exposé, une faible proportion des capitaux disponibles chaque année dans le monde sont investis au Canada. Vous avez tout à fait raison, madame la sénatrice Hubley. Nous voulons attirer davantage d'investissements. Nous aimerions aussi que les Canadiens investissent dans l'aquaculture au Canada.
Ces 10 dernières années, la bonne réglementation et les pratiques saines et durables ont créé les conditions nécessaires à la croissance. Une loi sur l'aquaculture permettrait de savoir ce que l'aquaculture au Canada peut faire de nos jours, en matière de concurrence à l'échelle internationale.
Le sénateur Wells : Je vous souhaite de nouveau la bienvenue, madame Salmon et monsieur Backman.
Nous voulons que le gouvernement améliore la loi et la réglementation et adopte des politiques pour soutenir votre industrie, comme il l'a fait avec d'autres. La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, la LCEE, a notamment été modifiée en 2012. Le Bureau de gestion des grands projets a été mis sur pied en 2007. La réglementation a été rationalisée, et le fardeau administratif réduit. Bien des secteurs ont accès à un guichet unique. La LCEE de 2012 permet de réaliser une évaluation par projet. Je pense que l'industrie aquacole profiterait également de telles mesures.
Comment une loi fédérale distincte sur l'aquaculture pourrait-elle aider votre industrie, en plus des textes sur les bassins hydrographiques?
Mme Salmon : Monsieur le sénateur, le même genre de mesures que toutes celles dont vous avez parlé pourrait aider l'industrie de l'aquaculture. Nous avons besoin d'un guichet unique pour toutes les demandes, au lieu d'un processus fragmenté. Ce serait très simple en principe que le fédéral et les provinces s'entendent sur les responsabilités et sur les délais, mais il y a beaucoup de confusion présentement, même au sein des gouvernements. Il faudrait discuter des rôles à jouer, mais aussi des processus inutiles ou des chevauchements. Une telle loi permettrait de discuter de ces questions.
Toutes les mesures que vous avez mentionnées pour rationaliser et réduire la paperasserie peuvent aider à élaborer une loi efficace. Nous ne demandons pas de partir de zéro, mais d'adopter une loi-cadre pour donner le ton, prendre un engagement concret et établir le fonctionnement ainsi que les rôles et responsabilités. Toutes ces questions sont importantes. Rien de tout cela n'a été réalisé. Une telle loi aiderait notre industrie.
Le sénateur Wells : Et du point de vue d'un exploitant, monsieur Backman?
M. Backman : Cela témoigne des nombreuses préoccupations des exploitants qui doivent composer avec cette réglementation disparate qui est parfois contradictoire ou redondante. En rationalisant ces règlements pour les rendre plus efficients, on reconnaîtra que l'essor de l'aquaculture au Canada exige un cadre législatif en bonne et due forme pour qu'on cesse d'en faire une considération secondaire.
On donnera ainsi à l'aquaculture la place qui lui revient parmi les principaux secteurs de production alimentaire au Canada.
La sénatrice Stewart Olsen : Je me réjouis de vous voir revenir devant nous pour nous proposer quelques solutions quant au contenu d'une éventuelle loi en la matière, comme nous vous l'avions demandé.
Vous avez déjà répondu à l'une de mes questions qui concernaient le coût des nouvelles installations. Vous avez parlé d'environ un million de dollars, sans compter les coûts permanents à assumer jusqu'à la première récolte, soit pendant environ deux ans. Ce sont des sommes qui peuvent faire peur à bien des gens.
Lors de mon voyage dans l'Ouest, j'ai constaté que c'est un secteur qui pourrait intéresser bien des petites localités, mais celles-ci n'ont pas le savoir-faire requis ou ne savent pas où s'adresser pour obtenir du financement ou intéresser des partenaires. Est-ce que votre organisation fait quoi que ce soit pour venir en aide aux petites collectivités ou aux petits entrepreneurs dans cette situation? Il semblait y avoir beaucoup d'intérêt pour les petites exploitations familiales en parcs clos. Est-il possible pour vous de guider ces gens-là en leur indiquant la marche à suivre?
M. Backman : Je peux vous parler plus facilement de la situation en Colombie-Britannique, ma province. Notre association accueille avec plaisir les demandes de renseignements des gens qui souhaitent en apprendre davantage ou investir; nous pouvons les mettre en contact avec des exploitants de différentes tailles. Comme vous l'avez indiqué, il y a beaucoup d'intérêt actuellement pour l'exploitation en parcs clos. Il s'agit d'une forme d'élevage qui exige des investissements considérables, surtout au départ, pour la construction des installations et leur fonctionnement.
Lorsque je parlais d'un million de dollars, c'était pour la mise en place d'une installation d'élevage utilisant des cages de filets. Comme je l'ai souligné, il faut ajouter à cela le coût de l'alimentation et de la main-d'œuvre ce qui, au niveau de fonctionnement actuel d'environ 600 000 poissons, entraîne des déboursés additionnels de 2 millions de dollars. Il faut en outre s'approvisionner en alevins.
C'est très coûteux à démarrer, mais les entreprises du secteur se sont développées tant et si bien que, à titre d'exemple, Marine Harvest est désormais une société ouverte à grand nombre d'actionnaires dans laquelle vous pouvez investir. N'importe qui peut y investir en tout temps en achetant des actions.
Il est possible de le faire à petite échelle et nous nous faisons un plaisir de renseigner les gens qui communiquent avec notre association d'éleveurs de saumons.
Mme Salmon : Lorsque le contexte sera plus propice à la croissance, nous pourrons intervenir de façon plus soutenue pour établir des partenariats. Si une collectivité est intéressée, nous pouvons l'aiguiller vers une entreprise qui souhaite prendre de l'expansion dans ce secteur.
Comme l'aquaculture des mollusques et des crustacés exige beaucoup moins d'investissement, il y a certaines possibilités dans les secteurs qui se prêtent à ce type d'élevage.
C'est donc un peu le rôle que nous pouvons jouer en fournissant ces renseignements généraux aux collectivités intéressées. Nous avons aussi accès à des programmes de formation et pouvons les orienter quant à celle qui leur convient pour le démarrage d'une exploitation. Toute association peut donc être un bon point de départ pour l'établissement de partenariats.
La sénatrice Stewart Olsen : Voilà qui est très utile.
L'un des exploitants que nous avons visités en Colombie-Britannique nous a indiqué qu'il ne payait pas ses employés au salaire minimum; il leur offrait une rémunération beaucoup plus élevée pour les conserver à son service, et c'est exactement le genre d'emplois que nous voulons voir créer. Est-ce que votre association joue un rôle quelconque dans l'établissement de la rémunération? Je sais que c'est difficile de le faire directement, mais exercez-vous une forme de surveillance?
M. Backman : L'entreprise pour laquelle je travaille, Marine Harvest, est un bon exemple. Pour attirer les meilleurs travailleurs, il faut offrir de bons salaires qui permettent d'assurer un niveau de vie décent à l'année longue. Notre dernière analyse a révélé un salaire horaire d'au moins 17 ou 18 $. Tout dépend de l'endroit où vous travaillez et du coût de la vie dans la région, que ce soit en Colombie-Britannique ou ailleurs au Canada.
Pour ce qui est de fixer ce salaire suffisant, il y a différentes façons de le faire. J'ai dit qu'il fallait attirer les meilleurs éléments possible. Notre usine de transformation de Port Hardy est syndiquée, ce qui fait qu'il y a une négociation collective à intervalles réguliers. C'est un peu la réalité moderne de l'aquaculture, surtout au Canada. On est bien loin des emplois au salaire minimum.
La sénatrice Poirier : Merci pour vos exposés. Il en ressort clairement que votre organisation préconise l'adoption d'une loi nationale régissant l'aquaculture afin de rationaliser et de simplifier le processus actuel.
Vous nous avez indiqué que d'autres pays l'ont déjà fait : la Norvège en 2005, l'Écosse en 2013, et les États-Unis dès 1980. Avez-vous des données démontrant que l'adoption de ces lois a eu des effets aussi positifs que ceux que vous espérez ou anticipez pour nous en pareille situation?
Mme Salmon : Cela fait partie du travail que l'on prévoit faire au cours de la prochaine année. Comme je l'indiquais, nous avons procédé à un premier relevé et nous allons discuter avec nos homologues pour essayer de voir quel était le contexte avec lequel ils devaient composer avant l'adoption de leur loi nationale pour nous assurer que la comparaison est valable. D'ici environ six mois, nous serons sans doute mieux en mesure de répondre à cette question à la lumière des informations que nous aurons recueillies.
Si l'on veut établir une comparaison entre le Canada et les autres pays, il faut avouer que l'environnement dans lequel nous évoluons est assez semblable, car notre industrie a un peu les mêmes détracteurs partout dans le monde. Certains soutiennent que le Canada ne va pas de l'avant en raison de la controverse. On peut toutefois noter une controverse semblable dans tous les pays. Pour trouver les différences entre nous et nos concurrents, il faut chercher du côté du cadre réglementaire et de la loi.
Comme certains pays avaient un cadre réglementaire tout à fait valable même avant d'adopter une loi sur l'aquaculture, la portée des discussions ne doit pas se limiter à la loi. Il faut savoir quelle était la situation avant son adoption. C'est ce que nous allons chercher à déterminer.
Il y a beaucoup d'autres similarités à notre point de vue. Comme bien d'autres, l'entreprise de Clare est également active à l'étranger. Ces entreprises sont bien au fait des différences d'un pays à l'autre. Nous allons nous efforcer d'en savoir plus long pour pouvoir vous fournir une réponse plus détaillée.
Nous avons déjà une petite idée de la situation, mais en parlant aux gens qui sont actifs à l'étranger, nous pourrons mieux vous brosser un tableau plus complet.
La sénatrice Poirier : Est-ce que les autres pays considèrent également qu'il s'agit d'élevage?
Mme Salmon : Tout à fait. C'est la définition couramment utilisée par les Nations Unies. Les références à l'aquaculture dans la loi elle-même s'inscrivent dans le même état d'esprit que la description de la notion d'élevage par l'OAA.
La sénatrice Poirier : À la page 9 de votre présentation, il y a une diapositive présentant les avantages concrets de la stratégie. On y indique textuellement que l'atteinte des résultats réels de notre stratégie nationale « pourrait se traduire par » et ainsi de suite. Ces projections ne sont pas fondées sur les résultats obtenus par d'autres pays, car vous n'avez toujours pas de données à ce sujet, n'est-ce pas?
Mme Salmon : En fait, nous avons des données sur la croissance. Je parlais plutôt des perceptions de ces pays quant aux avantages et aux inconvénients de leur loi sur l'aquaculture. C'est ce qui nous intéresse surtout, car nous sommes au fait des taux de croissance ailleurs dans le monde. Au Canada, la croissance se fait plutôt à un rythme lent et régulier. En Norvège, par exemple, l'industrie est d'une taille huit fois supérieure à la nôtre et sa croissance est beaucoup plus rapide.
Nous ne souhaitons pas nécessairement prendre ce modèle et l'appliquer au Canada. Nous estimons important que la croissance soit progressive et mesurée. Nous devons développer la mise en marché parallèlement à la croissance. Nous visons ici à doubler la production en l'espace de 10 ans, ce qui n'est pas une croissance énorme comparativement à ce qui se fait ailleurs dans le monde.
La sénatrice Poirier : Vous voudriez créer 18 000 nouveaux emplois en 10 ans. Je présume que certains de ces emplois seraient offerts dans des usines de transformation, à la sortie de vos activités d'élevage.
Mme Salmon : Tout à fait.
La sénatrice Poirier : Avez-vous essayé de voir quelles seraient les répercussions en matière de main-d'œuvre? Auriez-vous accès à suffisamment de travailleurs au Canada, surtout si on considère l'âge moyen de la population dans bon nombre de collectivités? Je peux vous dire à ce sujet que certains employés des usines de transformation du poisson de ma région sont dans la cinquantaine et trouvent de plus en plus difficile d'avoir à travailler dans le froid. Ces emplois n'intéressent pas nécessairement les jeunes de la nouvelle génération qui sont un peu plus instruits que leurs aînés, et la rémunération semble stagner au niveau du salaire minimum.
Entrevoyez-vous une pénurie de main-d'œuvre pour combler les postes qui seront offerts dans ces exploitations? Est- ce un problème avec lequel les autres pays doivent composer également, ou est-ce particulier au Canada en raison du vieillissement de notre population?
Mme Salmon : C'est une bonne question, et nous constatons déjà que les ressources humaines constituent un enjeu clé, en ce sens qu'il faut pouvoir attirer des travailleurs et les maintenir dans l'industrie. C'est ce qui explique notamment les salaires élevés versés par Marine Harvest et d'autres entreprises pour attirer des travailleurs dans certaines collectivités éloignées. Il s'agit d'excellents emplois à temps plein, mais ils présentent des caractéristiques et des défis bien particuliers. Le recrutement et le maintien des effectifs ne sont donc pas chose facile. Si nous obtenons le soutien nécessaire à la croissance progressive que nous visons, il nous faudra assortir le tout d'un bon plan en matière de ressources humaines, en plus d'une stratégie de mise en marché. Il y a différents aspects à prendre en considération. La question des ressources humaines en fait assurément partie, notamment pour ce qui est du recrutement et du maintien en poste.
M. Backman : L'industrie vit actuellement une période de transition dans ses efforts pour attirer des travailleurs qualifiés. Une grande partie de ceux qui, comme moi, ont débuté dans l'industrie il y a 25 ans arrivent à un âge où on doit songer à les remplacer. Avec un âge moyen se situant dans la cinquantaine, c'est un peu la même situation que pour tous ces travailleurs dont vous parliez.
Nous parvenons néanmoins à recruter sans cesse de nouveaux travailleurs plus jeunes. Même si nos installations sont en Colombie-Britannique, il nous arrive de tenir des salons de l'emploi sur la côte Est du pays où nous trouvons également des candidats qui s'intéressent à notre industrie.
Dans le but d'améliorer les choses en Colombie-Britannique, nous travaillons en partenariat avec certaines universités en vue d'entreprendre des programmes de formation et d'amener les jeunes qui amorcent des études postsecondaires ou une formation technique à envisager une carrière dans notre secteur. Nous avons également un programme de cours à l'interne.
Certains se rendent compte qu'il leur est possible de trouver de l'emploi sur la côte Ouest, plutôt que de devoir déménager pour ce faire dans les provinces intérieures ou ailleurs. Je pense que nous vivons simplement une étape de transition. Il est un peu difficile à ce moment-ci de combler tous les postes, mais nous mettons tout en œuvre pour y arriver en ratissant plus large dans notre recherche de main-d'œuvre et en collaborant avec les établissements d'enseignement.
Le sénateur Enverga : Votre industrie de 2,1 milliards de dollars m'apparaît déjà assez développée, mais j'ai l'impression qu'il y a une certaine stagnation. Que fait-on avec les bénéfices? Pourquoi ne sont-ils pas réinvestis dans l'industrie aquacole?
M. Backman : À la fin d'une année où elles ont réalisé des bénéfices, les grandes entreprises ayant des installations dans différents pays vont cibler leur réinvestissement en fonction des meilleures possibilités de rendement. Ainsi, la Colombie-Britannique et le Canada ont été laissés pour compte au cours des dernières années alors qu'on a préféré réinvestir dans des endroits ayant un meilleur potentiel de croissance et de rendement. Nous voudrions donc renverser la vapeur.
Nous avons des entreprises rentables qui font notamment l'élevage du saumon, et nous voudrions que ceux qui prennent ces décisions de réinvestissement constatent nos possibilités de croissance, notamment à la faveur d'une réglementation gouvernementale rationalisée et plus efficiente. Nous souhaiterions que les bénéfices réalisés soient réinvestis dans la croissance en Colombie-Britannique.
Mme Salmon : Il y a des entreprises canadiennes qui n'investissent pas davantage chez nous, mais qui le font dans leurs installations à l'étranger. Il y a bien sûr la question de la rentabilité, mais la décision doit être prise en fonction du meilleur endroit pour investir. Et ce ne sera pas le Canada tant que nous n'aurons pas une réglementation offrant toute la certitude et la clarté voulues.
Le sénateur Enverga : Êtes-vous en train de dire que notre gouvernement freine l'expansion de l'industrie aquacole au Canada?
Mme Salmon : Il y a différents facteurs. Nous travaillons à une réforme réglementaire, car il règne à ce chapitre une certaine confusion qui fait en sorte qu'il est difficile et coûteux de faire des affaires au Canada. Si l'on ajoute à cela l'absence d'une loi nationale permettant d'établir une vision et de guider l'industrie en définissant les choses pour qu'elles soient plus claires, on comprend que les entreprises ne souhaitent pas investir dans un climat aussi incertain. Pourquoi voudriez-vous le faire dans un environnement qui vous coûtera plus cher sans toutefois offrir les mêmes perspectives de croissance, alors que vous pouvez investir dans un autre pays ayant adopté une loi pour appuyer l'industrie et promouvoir sa croissance? Nous ne pouvons pas offrir cela aux investisseurs.
Le sénateur Enverga : Il y a déjà un cadre en place. Nous avons une industrie aquacole qui réalise des bénéfices. Pourquoi ne pourrait-on pas ajouter d'autres parcs dans les mêmes emplacements? Y a-t-il un règlement qui vous empêche de le faire ou qui limite votre développement? Y a-t-il quelque chose en particulier qui empêche notre industrie aquacole de se développer?
Mme Salmon : Le développement de l'industrie s'est heurté à bien des embûches. Il y a eu un moratoire en Colombie-Britannique, et il a été difficile d'avoir accès à de nouveaux sites sur la côte Est. Certains ont dû attendre pendant des années pour qu'une simple modification soit approuvée. Il n'est même pas question d'un nouvel emplacement, mais bien d'une simple modification.
Je vais vous donner un autre exemple. Nous avons un fournisseur d'aliments qui a demandé l'homologation d'un ingrédient dont l'utilisation est approuvée dans tous les autres pays du monde où on fait l'élevage du saumon. Deux ans et demi se sont écoulés et sa demande est toujours en suspens dans le système au Canada. C'est le genre de situation qui fait en sorte qu'il devient plus intéressant d'investir ses bénéfices ailleurs.
Le sénateur Enverga : Est-ce la réglementation qui fait obstacle à notre industrie ou est-ce le fait de préoccupations environnementales? Quels sont les principaux éléments qui empêchent nos instances réglementaires de donner le feu vert à un développement plus poussé de l'industrie au Canada?
M. Backman : Sur la côte Ouest du Canada, l'industrie a vu le jour au milieu des années 1980, soit il y a près de 30 ans. Pendant près de la moitié de cette période, la croissance de l'industrie a été bloquée en Colombie-Britannique en raison de l'imposition de moratoires, sous une forme ou une autre. L'industrie en est ainsi venue à se dire que le Canada n'était peut-être pas nécessairement le meilleur endroit pour investir en vue d'une croissance future.
Il n'y a actuellement aucun moratoire au Canada. Il s'agit pour nous essentiellement d'adopter une réglementation plus efficiente et de miser sur toutes ces mesures efficaces qui ont été mises en place en réponse aux moratoires et aux études, de manière à aller de l'avant en assurant la croissance de l'industrie à un rythme viable et progressif qui tient compte des aspects sociaux et environnementaux. L'important c'est de croître.
Le sénateur Enverga : Parlant réglementation, j'ai lu quelque part qu'un vaccin norvégien pour le saumon est homologué au Canada, mais pas en Europe. Diriez-vous que notre industrie aquacole est plus ouverte à ce chapitre?
M. Backman : Au Canada, nous devons composer avec des restrictions notamment pour ce qui est des vaccins et des agents thérapeutiques que nous pouvons utiliser pour traiter nos poissons qui ont besoin de soins. C'est parce que notre volume de production insuffisant ne nous permet pas d'effectuer les recherches et le travail fondamental requis pour appuyer l'homologation de certains de ces produits.
Pour tout dire, des pays comme la Norvège ont accès à des agents thérapeutiques beaucoup plus modernes pour la santé de leurs animaux. Avec une base de production plus large, nous pourrions également attirer plus d'investissements en la matière.
Le sénateur Enverga : Sauf pour ce vaccin dont je parlais, tout est encore bloqué au Canada? Il y a davantage de problèmes réglementaires, si l'on fait exception de ce vaccin?
M. Backman : Oui.
Le sénateur Munson : J'aimerais en savoir plus long à propos de ce moratoire. S'agit-il d'un moratoire décrété par le gouvernement de la Colombie-Britannique? Tout le monde semble vouloir demeurer plutôt courtois à ce sujet. Vous vous exprimez vous-même de façon courtoise, mais je perçois une certaine frustration quant à la lenteur des choses. Il y a un moratoire en Colombie-Britannique et j'ai l'impression que vous brossez un tableau plutôt sombre de la situation.
Avec toute cette réglementation, cette bureaucratie et ces dédoublements, pourquoi donc quelqu'un voudrait investir aujourd'hui dans l'aquaculture? Tout cela me semble très coûteux.
Pour que les gens sachent bien de quoi il en retourne, pourriez-vous nous dire pourquoi il y a un moratoire? Je pense connaître la réponse, mais qu'est-ce qui se passe exactement?
M. Backman : Comme je le disais, il n'y a pas actuellement de moratoire, mais il y en a eu toute une série de moratoires qui ont été décrétés par le gouvernement de la Colombie-Britannique. Plus récemment, pendant les quelques années qu'a duré l'enquête sur le saumon sockeye du fleuve Fraser, et quelques années plus tard lorsqu'on examinait les révélations de la Commission Cohen, on a cessé de traiter les nouvelles demandes.
J'essayais de faire valoir que c'est l'une des raisons qui explique l'interruption de la croissance au Canada. Nous avons atteint un certain plateau à ce chapitre.
Le sénateur Munson : Est-ce que le gouvernement fédéral devrait offrir un soutien financier pour aider les gens à s'implanter dans cette industrie dans le contexte que vous nous avez décrit?
M. Backman : L'entreprise pour laquelle je travaille et les éleveurs de saumon de la côte Ouest ne demandent pas d'aide à ce niveau. Nous voulons simplement que l'on établisse les conditions qui nous permettront de maximiser les débouchés et les possibilités d'emploi et d'investissement au Canada. Nous ne demandons pas au gouvernement d'investir directement.
C'est toutefois une aide qui pourrait être la bienvenue pour les gens qui aimeraient s'implanter dans l'industrie. Selon la situation dans chaque région, il y a certes possibilité d'établir des mesures de soutien financier à différents niveaux.
Mme Salmon : Dès que nous pourrons compter sur une industrie d'une certaine taille ayant des possibilités de croissance, nous constaterons des retombées de toutes sortes, notamment sous la forme d'industries nouvelles qui n'existent pour ainsi dire pas aujourd'hui. Clare pourrait sans doute vous donner de meilleurs exemples, mais on pourrait même penser à la construction navale. Il y a tout un éventail de nouvelles possibilités qui pourraient s'offrir, pas seulement dans le secteur de l'élevage, mais pour appuyer une industrie en pleine croissance. C'est là que des économies d'échelle deviendront possibles à la faveur de différentes activités auxquelles nous ne nous livrons pas actuellement.
M. Backman : Ce qu'il nous manque au Canada, surtout sur la côte Ouest, c'est la présence d'industries dérivées qui prospèrent lorsqu'elles se trouvent dans une région en croissance.
Ruth a mentionné la construction navale. Oui, il y a de larges navires que nous appelons des navires à vivier, ou de très grands navires pour déplacer le poisson. Nous achetons actuellement ces bateaux d'autres pays. Il y a également une série d'autres petits navires, notamment des navires de travail, des navires d'entreposage et des navires qui fournissent des services de transport des marchandises. Ils sont tous conçus pour naviguer dans les installations aquacoles, et encore une fois, ils ne sont pas construits au Canada, mais ils pourraient l'être. Il y a toute une industrie de ce côté.
Actuellement, les pièces d'équipement que nous utilisons, notamment les filets, les cadres, et cetera, sont importées d'autres régions du monde. Les industries qui les fabriquent ne sont pas établies au Canada, mais elles le pourraient, et elles pourraient produire ces choses ici, au pays.
Mme Salmon : Ce qui créerait de nouveaux emplois et de nouvelles occasions d'affaires.
Le sénateur Munson : C'est très bien, et ce serait formidable, mais d'importants investisseurs viennent-ils vous voir maintenant pour vous dire qu'en raison de la situation actuelle, ils ne veulent pas prendre de risques?
Mme Salmon : Je sais qu'un grand nombre de mes membres me diront — et Clare peut parler de Marine Harvest — qu'étant donné qu'ils investissent à l'échelle mondiale, ils se retrouvent à la table du conseil d'administration avec leurs homologues du Chili, de la Norvège et de l'Écosse. Lorsque des décisions sont prises au sujet des investissements, le Canada est à la fin de la liste. C'est aussi simple que cela. Si le milieu était différent, si les occasions de croissance existaient, si on offrait une certitude, l'argent serait investi ici. J'ai parlé à certains des PDG des plus grandes entreprises, et je sais qu'ils aimeraient investir davantage au Canada, cela ne fait aucun doute.
M. Backman : Le Canada est un très bon endroit pour l'élevage du poisson. Cette activité est rentable ici. Pour répondre à votre question, ces entreprises, les petites comme les grandes, souhaitent investir davantage dans notre pays. Elles attendent seulement un signal qui leur indiquera que le Canada devient un bon endroit pour ce type d'activités et qu'elles obtiendront un bon rendement sur leur investissement.
Mme Salmon : Nous sommes dans une position enviable, car nous sommes très près de l'un des plus grands marchés de fruits de mer au monde, et nous pouvons produire des poissons frais qui peuvent se retrouver dans un restaurant en moins de 48 ou 72 heures. Nous sommes parfaitement situés pour faire croître cette industrie de façon durable.
Le sénateur Munson : L'industrie aquacole collabore avec les collectivités autochtones. Nous avons pu le constater en Colombie-Britannique, mais on nous a également donné l'exemple de la Nouvelle-Zélande, où les choses vont très bien avec la communauté autochtone. J'ai oublié qui nous l'a dit lors d'une audience, mais on nous a parlé des efforts déployés là-bas pour élaborer un plan de mise en commun et on nous a dit que la Nouvelle-Zélande était un chef de file en ce qui concerne la collaboration avec la collectivité autochtone, et que cela fonctionne très bien. Il me semble que c'est exactement ce qui devrait se produire ici.
M. Backman : Sur la côte du Pacifique, tous les producteurs, notamment Cermaq, Grieg et Marine Harvest, ont établi une relation durable avec les groupes des Premières Nations. Toutefois, ces relations ne sont pas toutes semblables. Je ne peux pas parler de l'expérience de la Nouvelle-Zélande, car je n'ai pas travaillé directement là-bas et je n'ai aucune expérience à cet égard, mais j'ai de l'expérience en Colombie-Britannique. Par exemple, Marine Harvest a cinq ententes distinctes qui visent dix peuples, et chacune d'entre elles est fondée sur la compréhension des désirs de chaque groupe des Premières Nations.
Par exemple, dans la région de Klemtu, il y avait une usine de transformation de poisson qui n'avait pas été en activité depuis des années, et la population voulait la remettre en activité. Cette usine faisait partie des conditions que nous devions respecter pour nous installer là-bas, c'est-à-dire que le poisson devait y être traité pour permettre de créer des emplois. Ensuite, d'autres emplois dérivés ont été créés, ainsi que des activités et de la formation dérivées, et cetera.
Dans la région de Quatsino, la population veut seulement veiller à ce que ses programmes profitent concrètement de notre présence, et avoir l'occasion de créer des emplois à tous les niveaux de l'installation aquacole. C'est la même chose pour la plupart des autres activités.
Il y a deux ou trois ans, une Première Nation de la région de Hope Island nous a abordés et maintenant, nous collaborons étroitement avec ses membres. Ils ont l'intention d'ouvrir une ferme salmonicole près de leur territoire traditionnel, ce qui leur permettrait de revenir vivre à l'année sur Hope Island, car ils ne le peuvent plus depuis des décennies. Ils sont également en communication avec d'autres groupes, et ils participent à des activités liées à un parc éolien.
Chaque Première Nation a ses propres raisons pour s'engager dans des activités liées aux fermes salmonicoles. C'est très intéressant de voir ces gens atteindre les objectifs qu'ils s'étaient fixés pendant que nous exploitons une ferme salmonicole, que nous apprenons à connaître leur région et que nous réussissons à créer une entreprise profitable pour nous aussi.
Le sénateur McInnis : Lorsque nous avons parlé de l'aquaculture au Canada et de notre place à l'échelle mondiale, j'ai été frappé par une statistique en particulier. Nous représentons 0,28 p. 100 de la production mondiale d'aquaculture. La Chine représente 61 p. 100. Évidemment, ce pays a une plus grande population, mais cela place notre position sur la scène mondiale en contexte.
La Constitution n'a pas seulement un effet sur la réforme du Sénat, mais elle a et aura un effet sur les mesures législatives que vous demandez.
Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne l'adoption d'une loi sur l'aquaculture. J'ai tenté de déterminer le meilleur véhicule que vous pourriez utiliser. Comme je l'ai déjà dit devant notre comité, il devrait s'agir d'une loi parallèle en collaboration avec les provinces. Pour y arriver, vous devriez peut-être tenter d'intégrer cela au programme des ministres fédéraux et provinciaux. C'est un long processus. J'aimerais que toutes les bonnes choses viennent de notre comité. Qui sait? Mais je ne suis pas assez égoïste ou prétentieux pour le croire. Je pense que vous devriez tenter d'intégrer cela au programme.
J'imagine que vous avez une bonne relation de travail avec le MPO? C'est ce que je pensais; elle n'est pas si bonne. Mais votre élément constitutionnel a été établi par, comme vous le savez, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, dans une décision qui énonce clairement que même vos installations piscicoles à enclos ouverts constituent un type de pêche, et non une exploitation agricole. Si vous souhaitez lancer ce processus, je crois qu'il est important de commencer maintenant à l'intégrer au programme.
Madame Salmon, vous avez décrit cela comme étant une mosaïque. Il s'agit d'une série de terribles circonstances. Même au Canada atlantique, c'est différent dans chaque province. En Nouvelle-Écosse, comme je l'ai dit, on utilisera plus tard cette année une toute nouvelle série de règlements, et on n'a même pas consulté les autres provinces de l'Atlantique à cet égard. C'est peut-être du bon travail, et je n'ai pas dit que c'était une mauvaise chose.
Un autre problème concernant l'aquaculture dans notre pays, c'est qu'il y a, par exemple, environ 100 groupes qui s'y opposent d'une façon ou d'une autre, qu'il s'agisse d'associations touristiques, d'associations de pêcheurs, et cetera. Je crois que si nous voulons réussir, au bout du compte, et que si nous voulons bien faire les choses, nous devrons parvenir à un consensus. Je pense que vous avez un rôle à jouer, et je vais vous dire pourquoi, d'un point de vue politique : ils sont plus nombreux que vous. Les politiciens ont tendance à écouter les gens, et les multitudes l'emporteront au bout du compte. Je crois que vous devriez établir un dialogue. Je vous offre seulement mon avis, et je peux maintenant poser une ou deux questions.
Le sénateur Munson a souligné, à juste titre, la façon dont les choses semblaient fonctionner efficacement pour les Autochtones de la Colombie-Britannique et comment ces derniers avaient un emploi et gagnaient plus que le salaire minimum. Ils sont des partenaires dans l'affaire. Collaborez-vous étroitement avec eux?
Au sein d'un groupe de discussion que nous avons mis sur pied à Nanaimo, il y avait, d'un côté, des personnes qui faisaient la promotion de l'aquaculture et de l'autre, des gens qui s'y opposaient. Avez-vous une relation de travail harmonieuse avec eux? Étant donné que vous venez de la Colombie-Britannique, monsieur Backman, avez-vous l'impression que l'aquaculture fait l'unanimité là-bas? Les messieurs en question ont précisément affirmé qu'ils s'opposaient à l'introduction du saumon de l'Atlantique dans les eaux de la Colombie-Britannique. Pourriez-vous répondre à cela?
M. Backman : En ce qui concerne la position des Premières Nations en Colombie-Britannique, il y a des dizaines de Premières Nations qui possèdent des territoires traditionnels sur la côte de la province. Chacune d'entre elles a sa propre approche en ce qui concerne les activités menées sur son territoire. Les cinq groupes avec lesquels nous avons actuellement établi une relation ont décidé, entre eux, dans un consensus au sein de la Première Nation, qu'ils souhaitaient collaborer avec Marine Harvest ou avec les autres entreprises.
Je crois que vous avez visité la Première Nation Ahousaht à Tofino. Ses membres ont atteint un consensus. Il se peut que le groupe voisin n'ait pas pris cette décision, et que ses membres choisissent encore, au sein de leur territoire, de ne pas collaborer avec les exploitants de fermes salmonicoles. Il nous reste encore du travail à faire à cet égard, car nous devons nous engager auprès de ces gens et tenter de trouver une façon de les convaincre de travailler avec nous et de créer une relation positive. Nos activités ne font pas l'unanimité, et je crois que nous devons respecter le droit de chaque groupe de choisir sa position.
J'ai mentionné la bande de Hope Island. Selon le chef de la bande, pendant des années, ses membres n'avaient aucun intérêt pour la salmoniculture. En parlant à d'autres bandes qui collaboraient avec les entreprises et en apprenant de leurs membres ce qui se passait vraiment, ils ont fini par décider qu'ils voulaient tenter l'expérience, comme ils l'ont dit. Nous devrons mener nos activités en respectant non seulement les règlements fédéraux et provinciaux, mais nous devrons également respecter les conditions qu'ils ont établies. Ils ont changé d'avis en observant nos activités au cours des 15 dernières années. Chaque bande accepte la salmoniculture à un niveau différent. Certaines d'entre elles fabriquent même des produits de la salmoniculture; elles sont à l'autre extrémité du spectre.
Mme Salmon : J'aimerais ajouter un commentaire à votre commentaire précédent.
La communication avec les ministres est un bon conseil. Cela fait partie de notre stratégie. Nous essayons de rencontrer tous les ministres provinciaux et de leur parler de ce que nous faisons, afin que notre objectif de faire adopter une loi ne représente pas une menace pour qui que ce soit. C'est ce que nous voulons faire, c'est-à-dire que nous voulons transmettre ce message.
C'est un bon conseil. Nous le suivons et nous rencontrons les ministres un par un.
La sénatrice Raine : Je vous remercie d'être ici. Je m'excuse de mon retard.
Je viens de la Colombie-Britannique, comme vous le savez, et là-bas, un grand nombre de personnes sont tout simplement contre la salmoniculture. Comment allez-vous obtenir l'approbation de ces personnes pour agrandir l'industrie en Colombie-Britannique?
Mme Salmon : Je vais offrir un premier commentaire, et ensuite, je donnerai la parole à Clare, car il travaille sur le terrain et il observe les choses de plus près.
On tient compte d'une série d'éléments pour déterminer où les gens en sont à cet égard. Parfois, ils fondent leur décision sur des renseignements erronés diffusés par les médias. Toutefois, lorsqu'on leur fournit des renseignements exacts, par exemple si on leur donne l'occasion de visiter une ferme aquacole, ils sont prêts à laisser ces renseignements modifier leur opinion. Il y a aussi une poignée de groupes d'opposition qui, même avec tous les renseignements nécessaires, ne souhaitent pas modifier leur opinion. Ils veulent seulement s'opposer. On utilise donc des approches très différentes selon les groupes visés.
L'industrie a travaillé très fort, au niveau communautaire, pour recueillir l'appui et obtenir l'approbation de la population pour exercer ses activités. Je suis certaine que vous avez constaté qu'au sein des collectivités, les gens sont heureux de voir les intervenants de l'industrie s'installer et devenir de bons partenaires, car ils déploient les efforts nécessaires pour obtenir l'approbation sociale et renforcer l'économie des collectivités.
Lorsque les gens disent que nous n'avons pas l'approbation de la population, j'aime tenter de définir ce que cela signifie, car dans les régions où nous exerçons nos activités, nous l'avons obtenue. Lorsque nous menons nos sondages sur les attitudes et les croyances à l'égard de l'aquaculture dans les provinces et un peu partout au pays, les résultats ne sont pas aussi négatifs que vous pourriez le croire, même lorsqu'on s'adresse à ceux qui s'opposent fermement à nos activités.
Vous avez formulé de bons commentaires. Nous devons maintenir le dialogue et continuer de diffuser notre message, car cette industrie, comme Clare l'a mentionné, a seulement 30 ans. Nous avons rapidement modifié nos pratiques exemplaires. Nous en savons tellement plus qu'il y a 30 ans au sujet des meilleurs endroits pour l'élevage de poissons et sur les pratiques exemplaires. Parfois, les gens ont conservé l'image de l'aquaculture à ses débuts. Nous avons commis beaucoup d'erreurs à l'époque.
Nous devons continuer de nous efforcer de diffuser ces renseignements. Comment pouvons-nous y arriver de façon efficace lorsqu'on s'oppose à nos activités? Il faut que nous adoptions une approche différente pour chaque groupe auquel nous nous adressons.
Je crois que nous avons obtenu l'approbation sociale dans les collectivités dans lesquelles nous exerçons nos activités. Mais nous devons déployer des efforts à grande échelle, afin de diffuser les bons renseignements.
M. Backman : Pour revenir à ce que Ruth disait, en général, cela revient aux connaissances, c'est-à-dire ce que les gens comprennent et ce qu'ils savent. J'ai personnellement travaillé avec des gens qui s'opposaient résolument à la salmoniculture. Nous les amenons visiter nos installations et nous répondons à leurs questions, et ils changent complètement d'avis. Ils se rendent compte que les renseignements qu'ils avaient obtenus étaient influencés par la crainte. Ils pensaient qu'ils allaient perdre quelque chose si on permettait aux activités de salmoniculture de se poursuivre, mais ils se sont rendu compte que la salmoniculture n'engendre pas d'effets négatifs sur l'environnement et ne cause pas de dommages aux pêches.
Nous faisons l'élevage du poisson et le poisson est une priorité lorsqu'il s'agit de la gestion des sites aquacoles. Cela se voit dans toutes les activités et chez les employés de l'entreprise. Les gens se rendent compte que nos employés sont très préoccupés par l'environnement, les poissons qu'ils élèvent et l'endroit où ils exercent leurs activités.
Il est difficile de diffuser ce message lorsqu'on travaille sur une ferme aquacole 365 jours par année, mais comme Ruth l'a dit, c'est un travail qui n'est jamais terminé. On ne mettra probablement jamais fin à la controverse, car les gens n'ont pas toutes les connaissances nécessaires. Parfois, ils entendent parler d'un problème, mais ils doivent se renseigner sur les deux côtés de la médaille.
L'approbation sociale est une cible mobile. En ce moment, nous avons atteint un niveau d'approbation sociale beaucoup plus élevé qu'il y a peut-être 10 ou 15 ans, mais c'est un travail qui n'est jamais terminé. Nous continuerons d'organiser des rencontres individuelles avec les gens lorsque nous le pouvons, mais tout le monde ne peut pas se rendre sur une ferme conchylicole ou piscicole, et c'est pourquoi nous continuerons de diffuser des renseignements sur les sites web et d'autres médias, et nous poursuivrons les efforts pour renseigner les Canadiens qui pourraient en apprendre davantage sur la réalité des fermes piscicoles.
La sénatrice Raine : Je lis des arguments pour et contre. Les avis sont très polarisés. Il y a beaucoup d'informations qui alimentent la peur à l'égard de toutes les choses terribles qui se passent en Norvège. Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passe en Norvège, ne serait-ce que pour votre entreprise? Y a-t-il des fermes qui sont bien acceptées par la population et sont-elles trop nombreuses? Ont-elles une incidence sur les poissons sauvages de la région? La Norvège est beaucoup plus avancée que nous. J'aimerais que vous m'en parliez, si vous connaissez les réponses.
Nous prévoyons nous rendre en Norvège, donc si vous n'êtes pas à l'aise de me répondre, je ne vous demanderai pas de le faire.
M. Backman : Je suis allé plusieurs fois en Norvège dans le cadre de mon travail pour Marine Harvest. Marine Harvest a des activités en Norvège, j'ai donc visité plusieurs installations là-bas.
Premièrement, il faut comprendre que la production en Colombie-Britannique représente de 60 000 à 70 000 tonnes par an, et si l'on y ajoute les chiffres de la côte Est, la production canadienne tourne autour de 140 000 à 150 000 tonnes certaines années. La production de saumon représente plus d'un million de tonnes par année en Norvège. Vous allez donc y voir des choses extrêmement différentes de ce qu'on peut voir au Canada. Ruth et moi ne prétendons pas aspirer à la même production au Canada. Nous soulignons simplement qu'il y a un grand potentiel inexploité au Canada, qui pourrait faire l'objet d'une croissance gérée avec soin.
Y a-t-il des problèmes en Norvège? Bien sûr. Y a-t-il de la controverse? Bien sûr. Dans mon exposé, j'ai abordé l'aspect social de la durabilité. Ils cherchent aujourd'hui à relocaliser certaines fermes autrefois considérées bien placées, mais qui ne le seraient plus selon la population.
Les Norvégiens ont leur programme des fjords nationaux, qui en fait des zones protégées, tout comme nous avons des zones protégées sur les côtes canadiennes, ils déplacent donc les fermes en conséquence. Ils ne peuvent plus agrandir les fermes situées dans les zones protégées ou les fjords nationaux, vous allez en entendre parler.
Ils sont également confrontés à des problèmes de santé chez le poisson, notamment les parasites externes comme le pou du poisson, qu'ils cherchent à combattre. Vous allez entendre parler des nouvelles façons de lutter contre ce genre de problème.
Par ailleurs, compte tenu de son ampleur, l'industrie de l'aquaculture emploie énormément de gens en Norvège. C'est un immense moteur économique. Vous me demandez si elle est bien acceptée. Du point de vue de son intégration au tissu économique de la Norvège, elle est très bien acceptée, absolument.
Tout comme au Canada, l'industrie là-bas doit continuer de sensibiliser positivement la population à ce qu'elle fait de bien. Vous allez y voir de grandes similitudes avec notre situation.
Mme Salmon : Selon le gouvernement, c'est la deuxième industrie en importance au pays, elle reçoit donc l'appui et la promotion en conséquence.
Lorsque nous sommes allés en Norvège, l'été dernier, nous sommes sortis souper au restaurant, et la serveuse nous a demandé d'où nous venions et pourquoi nous étions là. Nous participions à une conférence sur l'aquaculture. Elle nous a dit : « Oh! L'aquaculture, c'est notre avenir. » Ce n'est qu'un petit exemple. La situation est différente au Canada, où il y a un manque de reconnaissance et d'engagement.
La sénatrice Raine : En Colombie-Britannique, le choix de l'emplacement relève de la province, mais les Premières Nations doivent donner leur d'accord. Les relations sont-elles bonnes entre les Premières Nations et les provinces pour déterminer l'emplacement des nouvelles installations?
M. Backman : Tout à fait. C'est une priorité absolue. J'ai mentionné dans mon exposé que la première chose à faire est de regarder les cartes de la région et de s'interroger sur la viabilité de l'entreprise, ce qui sous-entend d'en discuter immédiatement avec les Premières Nations présentes dans la région ciblée pour s'assurer de leur appui et évaluer les emplacements physiques potentiels dans la région.
On commence par parler et dialoguer avec les Premières Nations, puis il faut s'entendre sur ce que les processus de planification du gouvernement provincial vont permettre.
De nos jours, toutes les entreprises connaissent très bien la marche à suivre.
Le sénateur Munson : Je vous ai parlé tout à l'heure des côtés sombres, mais je vais maintenant vous parler d'espoir. Y a-t-il quoi que ce soit qui pourrait vous porter à croire que le gouvernement va répondre à votre demande d'une loi sur l'aquaculture? Le gouvernement vous donne-t-il des signes qu'il serait prêt à aller de l'avant? On dit de moi que je suis un sénateur libre. Je ne sais pas ce que le gouvernement a dans le collimateur et je ne sais pas ce que mon propre parti a dans le collimateur. Le système, tel qu'il est conçu en ce moment, ne favorise pas l'expression du leadership canadien en recherche, la mise en valeur des sites, la promotion ni le soutien de l'industrie. Y a-t-il quoi que ce soit, dans les activités de lobbying que vous exercez directement auprès du gouvernement, du ministère des Pêches entre autres, qui vous laisse entrevoir une ouverture en vue de l'adoption d'une loi sur l'aquaculture? Nous convenons tous qu'il devrait y en avoir une. Il y a une limite à ce que nous pouvons recommander. En bout de ligne, comme nous le savons tous, la décision reviendra au gouvernement. Y a-t-il une lueur d'espoir pour vous?
Mme Salmon : Nous en avons vu beaucoup depuis deux ans. Nous constatons un véritable changement d'attitude, et nous sommes encouragés par l'appui et l'intérêt que suscitent les concepts de croissance durable et de compétitivité accrue. La ministre Shea en a parlé à maintes reprises, ce qui nous semble encourageant.
Je crois que la priorité du ministère à ce stade-ci est la réforme du régime réglementaire et la résolution des problèmes qu'il croit pouvoir régler rapidement. Je dois dire que nous sommes assez favorables à cela parce que ces améliorations vont se traduire par des gains en productivité.
Il faut continuer de discuter de l'avenir. Nous ne nous arrêterons pas ici, parce que c'est un sujet qui nous tient très à cœur, mais nous croyons que ce gouvernement a envie de voir le secteur renouer avec la croissance.
M. Backman : Oui, il y a une lueur d'espoir. Lorsque nous parlons avec différents groupes du gouvernement, dans divers ministères, Agriculture et Agroalimentaire Canada par exemple, ils reconnaissent qu'il y aurait place à la loi que nous réclamons. Comme Mme Salmon l'a mentionné, le MPO travaille à une réforme du régime réglementaire. Son personnel est déterminé à se doter de la meilleure réglementation possible pour régir nos activités. Nous respectons cela. Nous collaborons avec lui.
Il voit aussi l'occasion d'aller encore plus loin, comme nous l'avons mentionné, afin d'établir une nouvelle conception nationale de ce que l'aquaculture pourrait vouloir dire au Canada. Tout cela viendra en temps et lieu, à commencer par une loi sur l'aquaculture.
Le président : Je tiens à remercier nos témoins de la séance très instructive que nous avons eue ici ce soir. Votre expérience enrichit beaucoup notre étude. N'hésitez pas à nous faire part de tout ce qui vous fait sourciller au cours des prochains mois. Sentez-vous bien libres de communiquer avec nous pour nous informer de vos préoccupations, de vos idées ou de vos recommandations.
Sur ce, je tiens à vous remercier d'avoir comparu ici ce soir, et je remercie mes collègues sénateurs. Nous allons poursuivre nos délibérations à huis clos pour discuter de quelques enjeux. Je demanderais à nos sénateurs de bien vouloir rester assis.
(La séance se poursuit à huis clos.)