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VEAC

Sous-comité des anciens combattants

 

Délibérations du Sous-comité des
Anciens combattants

Fascicule 9 - Témoignages du 4 février 2015


OTTAWA, le mercredi 4 février 2015

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd'hui, à 12 h 2, pour poursuivre son étude sur les répercussions médicales, sociales et opérationnelles des problèmes de santé mentale dont sont atteints des membres actifs et à la retraite des Forces canadiennes, y compris les blessures de stress opérationnel (BSO) comme l'état de stress post-traumatique.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, aujourd'hui nous continuons notre étude sur les blessures de stress opérationnel et autres problèmes de santé mentale dont souffrent les anciens combattants.

[Traduction]

Nos témoins d'aujourd'hui nous viennent du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes. Nous avons le plaisir d'accueillir le lieutenant-général David Millar, chef du personnel militaire; le colonel Hugh MacKay, médecin-chef adjoint, Services de santé des Forces canadiennes; le colonel Andrew Downes, directeur en santé mentale, Services de santé des Forces canadiennes; et le colonel Rakesh Jetly, conseiller en santé mentale, Direction de la santé mentale, Services de santé des Forces canadiennes.

Même si vous êtes assez nombreux, j'espère que vous aurez tous la chance de participer à nos discussions d'aujourd'hui. Lieutenant-général Millar, vous avez des observations préliminaires?

[Français]

Lieutenant-général David Millar, chef du personnel militaire, Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Honorables sénateurs et membres du comité, mes camarades officiers et moi sommes enchantés d'avoir l'occasion de vous parler des problèmes de santé mentale qui touchent les membres actifs des Forces armées canadiennes ainsi que des services, traitements et programmes offerts aux militaires et à leur famille.

Je suis accompagné aujourd'hui, comme le président l'a dit, du colonel Hugh MacKay, médecin-chef adjoint, du colonel Andrew Downes, directeur en santé mentale, et du colonel Rakesh Jetly, psychiatre en chef des Forces armées canadiennes.

[Traduction]

La prestation de soins et de services aux membres des Forces armées canadiennes qui souffrent d'une maladie mentale est une priorité de tout premier ordre pour nous.

Grâce à nos programmes dans ce domaine, nous offrons des soins médicaux complets, et les Centres intégrés de soutien du personnel apportent une aide essentielle pour répondre aux besoins des militaires malades ou blessés. En partenariat avec Anciens Combattants Canada, le Programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel offre un réseau national de soutien par les pairs à ceux qui souffrent de blessures de stress opérationnel et à leur famille. Dans nos bases et nos escadres, les Centres de ressources pour les familles des militaires offrent un éventail de programmes et de services qui aident les familles des militaires, dont de l'information en santé mentale, du counseling à court terme et des services de deuil.

Au sein de nos 44 cliniques médicales — dont 30 offrant des services intégrés spécialisés en santé mentale et 7 Centres de soutien pour trauma et stress opérationnels — nous comptons 455 postes établis. À la mi-janvier 2015, 94 de ces postes étaient occupés par des cliniciens expérimentés dans le traitement de la maladie mentale. On poursuit les démarches visant à pourvoir les postes qui restent vacants mais il s'agit, comme vous le savez, d'une situation en constante évolution et nous sommes constamment en concurrence avec le secteur privé pour attirer les spécialistes en santé mentale dans un contexte où les problèmes à ce chapitre et la stigmatisation prennent de plus en plus d'ampleur partout au pays.

Cependant, nous pouvons aussi diriger nos patients vers plus de 3 000 civils professionnels de la santé mentale qui sont inscrits comme fournisseurs de services aux Forces armées canadiennes pour garantir un accès rapide aux soins.

[Français]

Quant au personnel des Forces armées canadiennes qui a accès aux soins de santé mentale, l'acquisition récente de systèmes de surveillance et de réseautage, lorsque des problèmes sont signalés par les clients, permettra une évaluation rapide de l'issue des traitements, ce qui orientera la modification et l'optimisation de soins individualisés.

L'entrée directe des renseignements sur la santé mentale dans les dossiers électroniques connexes, de façon sécuritaire et confidentielle, améliorera les communications entre les cliniciens de soins primaires et les professionnels de la santé mentale, ce qui renforcera les soins concertés.

[Traduction]

D'autres technologies améliorant directement les soins sont installées dans nos cliniques, notamment des systèmes de réalité virtuelle pour la thérapie d'exposition et des terminaux de télécommunications vidéo haute définition permettant aux spécialistes de la santé mentale d'évaluer et de traiter des patients qui se trouvent dans des lieux éloignés au Canada, ce qui réduit la nécessité de faire voyager le patient ainsi que les temps d'attente.

L'expansion récemment annoncée — et je crois que nous vous avons remis des documents à ce sujet — du programme d'éducation en santé mentale intitulé « En route vers la préparation mentale » offrira des ressources permettant d'améliorer la conception et l'exécution du programme. Cela permettra de continuer à offrir l'instruction propre à la mission, avant et après le déploiement, pour les militaires et leur famille, des cours de perfectionnement adaptés au cycle professionnel, ainsi que le contenu propre aux groupes professionnels pour répondre aux exigences des métiers spécialisés et des armées, dans le but de réduire la stigmatisation. Et ça fonctionne.

[Français]

Nous avons eu la preuve d'améliorations marquées, grâce à l'amélioration des connaissances liées à la santé mentale et des attitudes, et nous avons constaté une diminution constante des stigmates et autres obstacles aux soins. Ces résultats sont encourageants, et plus de 200 membres des Forces armées canadiennes se sont portés volontaires pour participer à la vidéo sur la santé mentale de l'an dernier. Cette vidéo intitulée Vous n'êtes pas seul, qui aborde le caractère honteux de la maladie mentale, montre que nous continuons à faire des progrès afin d'atteindre l'objectif d'éliminer la honte liée à la maladie mentale.

[Traduction]

La plus récente démonstration a eu lieu la semaine dernière durant l'événement de la campagne de Bell Cause pour la cause, qui a eu lieu au quartier général de la Défense nationale, et auquel vous avez peut-être assisté. À cette occasion, le major Réjean Richard a dit qu'il aurait aimé entreprendre 20 ans plus tôt cette démarche qu'il peut maintenant faire parce que la santé mentale devient une préoccupation normale. Pour sa part, le sergent-major Pichard a souligné l'efficacité des soins et des services offerts, pour autant que l'on veuille bien s'en prévaloir.

Durant l'année à venir, le médecin-chef réunira un autre panel d'experts sur la prévention du suicide pour examiner les pratiques exemplaires actuelles dans le domaine. Pour ce faire, on tirera parti du solide programme en place, lequel a été guidé par les travaux de l'ancien panel d'experts réuni en 2009.

Enfin, les Forces armées canadiennes sont déterminées à offrir des soins à la fine pointe, fondés sur des données probantes. Le Centre d'excellence en santé mentale pour les militaires et les anciens combattants du Canada, dont la mise sur pied été annoncée récemment et qui aura comme coprésident le colonel Rakesh Jetly, assis à ma gauche, aura une perspective axée sur l'avenir en ce qui concerne la recherche, l'éducation et les soins cliniques. Les responsables du centre effectueront des recherches sur les aspects uniques de la santé mentale des militaires et des anciens combattants; ils collaboreront avec des experts scientifiques des universités, du gouvernement, du secteur privé, de consortiums de recherche, de l'OTAN et d'autres pays alliés; ils veilleront à ce que les connaissances obtenues grâce à la recherche clinique d'avant-garde se traduisent rapidement par des soins cliniques.

Dans le cadre de nos efforts pour que les problèmes de santé mentale en soient plus stigmatisés et que chacun comprenne qu'il est normal d'avoir des journées où on se sent moins bien, nous sommes déterminés à garantir que les militaires souffrant de maladie mentale aient accès aux soins médicaux et aux services de soutien nécessaires pour qu'ils reprennent le service ou les aider à faire la transition vers la vie civile, et à investir dans la recherche afin d'améliorer notre capacité à prendre soin d'eux et à les soutenir.

Merci beaucoup, monsieur le président. Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes vos questions.

Le président : Merci beaucoup, général, pour ces observations préliminaires. Est-ce que l'un de vous aurait quelque chose à ajouter à ce moment-ci?

Lgén Millar : Monsieur le président, si je puis me permettre, Colin vient de me signaler une erreur que j'ai commise dans ma déclaration. J'ai indiqué que des 455 postes en santé mentale, 94 étaient occupés; je voulais dire 94 p. 100.

Le président : Merci d'apporter cette précision. Nous voulons savoir ce qui se fait actuellement au sein du ministère de la Défense nationale en ce qui a trait aux traumatismes liés au stress opérationnel, c'est-à-dire quelle est votre approche clinique et quels sont vos différents services. Nous nous demandons également si des améliorations cliniques sont en voie de développement et si vous êtes au fait d'autres changements fondamentaux qui pourraient être apportés. Nous nous intéressons en outre à l'effet stigmatisant de ce phénomène et au changement de culture qu'il faut opérer. Nous aimerions donc que vous puissiez répondre aux questions des sénateurs en gardant à l'esprit ces aspects particuliers.

Par ailleurs, y a-t-il eu captation vidéo du récent événement Cause pour la cause de Bell? Y a-t-il encore moyen pour nous d'en apprendre davantage à ce sujet?

Lgén Millar : Il y a effectivement eu un enregistrement, et nous pouvons vous en fournir des extraits.

Le président : Cela nous serait très utile. Éventuellement, peut-être à l'occasion de la table ronde sur le suicide, nous pourrons être en mesure de participer plus directement, car ce sont des aspects qui nous préoccupent au plus haut point dans le contexte de notre étude à long terme.

Lgén Millar : Certainement.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci, messieurs, de votre présence aujourd'hui. C'est un honneur pour nous de vous accueillir ici. J'aimerais d'abord que vous puissiez nous en dire davantage sur les progrès réalisés au cours des dernières années dans le cadre des procédures opérationnelles des forces militaires quant à la reconnaissance des différents troubles liés au stress opérationnel et post-traumatique.

Lgén Millar : Merci beaucoup.

À venir jusqu'à tout récemment, la maladie mentale n'était pas une chose que l'on comprenait très bien ou dont on discutait beaucoup au sein des forces, comme dans l'ensemble de la population canadienne. Ce n'est pourtant certes pas un phénomène nouveau, car on parlait déjà à l'époque des deux grandes guerres de traumatisme dû au bombardement, ce qu'on appelle aujourd'hui les troubles de stress post-traumatique. À n'en pas douter, c'était une problématique qui n'était pas bien comprise. Les Forces canadiennes s'enorgueillissent de bien préparer les soldats à combattre grâce à l'entraînement, l'éducation et le perfectionnement, car cela fait bel et bien partie de notre mandat.

Mais nous n'avions pas à l'époque une bonne compréhension des répercussions sur la santé mentale, des traumatismes et des troubles de stress post-traumatique. Je crois que les traumatismes et les expériences vécues en Afghanistan nous ont à nouveau ouvert les yeux quant à la nécessité d'une préparation, d'un entraînement et d'une éducation optimaux de manière à nous donner une plus grande résilience par rapport aux différents types d'épreuves et de traumatismes auxquels nos déploiements nous exposent.

Pour répondre à votre question, madame la sénatrice, nous avons mis sur pied un programme d'éducation et de formation qui vise à rendre les hommes et les femmes membres des Forces armées canadiennes plus résilients, plus conscients des symptômes et des signes de la maladie mentale et mieux aptes à les comprendre, et davantage disposés à demander plus rapidement les traitements dont ils ont besoin.

Ce programme d'éducation et de formation s'amorce dès le recrutement au sein des Forces canadiennes et se poursuit tout au long de la carrière militaire. Il devient prioritaire à l'aube et à l'issue d'un déploiement lorsqu'il y a période de décompression après une opération d'envergure. Le problème de la stigmatisation demeure toutefois entier car nous sommes, un peu comme tout le monde, des gens très fiers qui ne voulons pas montrer nos faiblesses. Dans le contexte de nos efforts pour réduire la stigmatisation et de notre programme d'éducation et de formation, il est important pour nous que les membres des Forces armées canadiennes comprennent bien qu'une blessure mentale n'est pas différente d'une blessure physique. Nous avons des traitements et des programmes accessibles dans les deux cas, et il n'y a par conséquent aucun mal à ne pas se sentir bien et à demander de l'aide. Notre stratégie mise donc principalement sur l'éducation, la formation et la réduction de la stigmatisation.

Colonel Hugh Colin MacKay, médecin-chef adjoint, Services de santé des Forces canadiennes, Défense nationale et les Forces armées canadiennes : J'aimerais ajouter quelques éléments dans la perspective des services de santé. Il y a d'abord les nombreux travaux de recherche que nous avons effectués depuis un certain nombre d'années en vue d'améliorer notre compréhension des répercussions des opérations militaires sur la santé mentale des soldats qui y prennent part. À ce titre, l'étude la plus récente et sans doute la plus importante a été un sondage sur la santé mentale mené pour nous par Statistique Canada en 2013. Ce sondage nous a permis de déterminer que les taux de dépression étaient plutôt stables au sein des Forces armées canadiennes. En revanche, les troubles de stress post-traumatique ont presque doublé par rapport au sondage précédent réalisé en 2002, une hausse sans doute attribuable à nos opérations en Afghanistan.

Nous nous attendons à pouvoir tirer beaucoup plus d'information encore de ce sondage. Nous n'avons pas encore pu en terminer l'analyse, mais nous examinons tous les facteurs liés aux opérations pouvant être à l'origine de problèmes de santé mentale. Nous avons cherché récemment à établir lesquels de ces facteurs sont les plus déterminants. Nous avons ainsi pu constater que 33 p. 100 des problèmes de santé mentale résultant d'opérations sur le terrain sont dus à l'impression de se retrouver dans un environnement dangereux. Environ le quart des problèmes étaient attribuables au fait d'avoir vu des cadavres ou des restes humains. Seulement une très faible proportion — quelque 5 p. 100 — avait été causée par une participation directe au combat.

Grâce à une meilleure compréhension de toutes ces problématiques, nous sommes à même de mieux cibler nos programmes d'éducation pour aider les gens à se faire une meilleure idée de ce qui les attend et des répercussions qui peuvent les toucher.

Par ailleurs, nous avons également mis sur pied des programmes de dépistage. Nous examinons systématiquement les militaires à la sortie d'un théâtre d'opérations afin de détecter dès que possible les problèmes de santé mentale pour orienter les personnes touchées vers les soins dont elles ont besoin. L'effet combiné de ce dépistage et des programmes de sensibilisation qui permettent à chacun de mieux comprendre ce qui lui arrive a été l'un des facteurs à l'origine de l'augmentation du recours à nos services au cours des 10 dernières années, ce que nous estimons très encourageant. Le sondage nous révèle que les militaires sont proportionnellement plus nombreux à se prévaloir des soins offerts en santé mentale. Cela fait partie des aspects que nous avons améliorés.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci. J'aimerais maintenant aborder la question de la transition.

Lorsque les médecins décident qu'un militaire actif ne peut plus être en service en raison d'un diagnostic de troubles liés au stress opérationnel ou post-traumatique, y a-t-il un suivi par les forces militaires et le ministère des Anciens Combattants relativement aux soins qui lui sont prodigués? On nous a dit qu'il pouvait y avoir une interruption dans les soins et le suivi du dossier. Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est exactement, car les personnes aux prises avec ces graves problèmes de santé ont absolument besoin de traitements continus?

Lgén Millar : Nous collaborons activement avec Anciens Combattants Canada, car nous avons tous deux à cœur l'intérêt de nos militaires. Nous tenons absolument à ce que les soins que nous offrons aux membres des Forces armées canadiennes du point de vue médical, social et familial se poursuivent lorsque le militaire se retrouve dans la vie civile. Depuis leur arrivée récente en fonction, le nouveau ministre et le nouveau sous-ministre ne ménagent pas leurs efforts en faveur du programme de transition. Nous allons d'ailleurs nous rencontrer la semaine prochaine afin d'élaborer une stratégie pour la transition. Nous offrons d'ores et déjà un programme d'aide à la transition de carrière pour les militaires dans le cadre de notre gamme de mesures de soutien aux membres des Forces canadiennes tant du point de vue familial que sur le plan de la santé et de l'emploi.

Nous voulons nous assurer que la famille d'un membre qui quitte les forces reçoit le soutien dont elle a besoin, que la transition est facilitée par une aide au placement, et que l'état médical du membre sortant est suffisamment stable pour qu'il puisse être pris en charge par les cliniques spécialisées d'Anciens Combattants Canada, s'il souffre de troubles de stress post-traumatique, ou par le régime provincial de soins de santé dans les autres cas.

Colonel Andrew Downes, directeur en santé mentale, Services de santé des Forces canadiennes, Défense nationale et les Forces armées canadiennes : Il peut parfois devenir difficile de prodiguer les soins nécessaires aux militaires qui quittent les forces du fait que certains vont s'installer dans des régions éloignées où ils n'ont pas nécessairement accès à toute la gamme des services que nous souhaiterions leur offrir. C'est un élément que je voulais souligner.

En général, les choses se passent de la manière suivante : lorsque nous apprenons qu'un militaire va être libéré dans le cadre du processus de gestion de cas, nous veillons à ce que la responsabilité de ses soins soit transférée à un clinicien compétent en fonction de ses besoins particuliers. Nous mettons vraiment tout en œuvre pour éviter qu'il y ait interruption des soins pendant la transition.

La sénatrice Stewart Olsen : Est-ce que vous prenez les moyens pour que le dossier suive en cas de transfert?

Col Downes : Il y a différents aspects à considérer quant au transfert des dossiers. Il a beaucoup été question de la communication du dossier médical complet de telle sorte qu'Anciens Combattants puisse déterminer l'admissibilité aux prestations et aux services.

Généralement, lorsqu'un militaire est transféré à un autre clinicien pour recevoir des soins ou des services, les éléments pertinents de son dossier sont communiqués à cette fin. Nous procédons toujours de cette manière de telle sorte que le nouveau fournisseur de soins dispose de toute l'information nécessaire. Ce transfert se fait tant pour les médecins travaillant à Anciens Combattants Canada que pour ceux dans le civil.

Lgén Millar : J'ajouterais que nous nous employons actuellement à numériser tous les dossiers. Nous avons toujours conservé nos dossiers médicaux sur papier dans les bases, les quartiers généraux opérationnels ou même les installations médicales aux quartiers généraux nationaux. Lorsqu'un militaire prend sa retraite, nous devons rassembler tous ces papiers pour transférer le dossier à un autre agent, à Anciens Combattants Canada par exemple. Comme l'accumulation de papier rend l'opération fastidieuse, nous procédons à la numérisation des dossiers. Il a été récemment convenu d'accroître nos capacités en la matière de façon à permettre un transfert rapide de ces documents.

Je vous ai déjà parlé de notre collaboration étroite avec Anciens Combattants Canada en vue d'intégrer nos capacités respectives. Nous ne voulons pas que la transition consiste en une simple poignée de main avec Anciens Combattants Canada qui prend charge du dossier lorsqu'un militaire quitte les forces. Nous intégrons actuellement des arbitres et des employés d'Anciens Combattants Canada aux effectifs du médecin-chef adjoint de telle sorte qu'ils puissent avoir accès à ces dossiers et entreprendre sans tarder le processus de libération pour des raisons médicales. Ainsi, Anciens Combattants Canada peut amorcer les procédures administratives de six mois à un an à l'avance pour que les prestations soient directement accessibles et que l'on soit bien au fait des soins qui doivent être dispensés et que la transition se passe pour le mieux.

Il faut aussi noter la disponibilité des dossiers qui est le nœud du problème. À peine 25 p. 100 des militaires qui quittent les forces s'adressent immédiatement à Anciens Combattants Canada pour avoir accès aux soins et aux prestations auxquels ils ont droit. Règle générale, environ 75 p. 100 des militaires libérés vont entreprendre des démarches au bout d'un certain temps seulement. Comme leur dossier médical a déjà été versé aux archives, il faut le récupérer et le faire examiner par un médecin indépendant. Au sein des Forces canadiennes, nous remettons une copie du dossier médical au membre au moment de sa libération pour qu'il l'ait en sa possession.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci pour ces informations.

Le président : Dans ce contexte, étant donné la fermeture de 8 à 10 bureaux d'Anciens Combattants Canada au pays, nous apprenons que Service Canada prend la relève pour ce qui est de l'information à fournir, mais pas pour la gestion de cas. Vous dites que vous transférez le dossier à Anciens Combattants Canada. Est-ce que ce transfert se fait différemment qu'il y a un an et demi?

Lgén Millar : Dans chacune de nos bases et de nos escadres, nous avons un Centre intégré de soutien du personnel qui sert de plaque tournante pour l'administration de l'ensemble des services médicaux, sociaux, financiers et familiaux. Le personnel de ces centres est composé de militaires et de fonctionnaires du ministère de la Défense nationale. Des employés d'Anciens Combattants Canada sont également intégrés à ces centres. Ce sont donc les gestionnaires de cas d'Anciens Combattants Canada, dont Andrew parlait précédemment, qui voient à ce que nos membres obtiennent tous les soins nécessaires au moment de leur transition.

Sénateur, l'autre problématique que vous avez soulevée est celle des anciens combattants qui doivent avoir accès aux services lorsqu'ils ont déjà quitté les forces militaires. Nous concentrons nos efforts sur la transition des militaires qui quittent les forces pour devenir anciens combattants.

Le président : C'est une distinction utile.

Le sénateur White : Vous avez parlé de la recherche, et je conviens que c'est de la plus haute importance. J'essayais de voir si la proportion de nos soldats qui reviennent avec des problèmes de santé mentale est plus élevée qu'elle ne l'était pour d'autres opérations auxquelles nous avons participé. Si c'est bien le cas, savez-vous pourquoi? Est-ce attribuable au genre de mission de combat ou bien au soutien offert à leur retour?

Colonel Rakesh Jetly, conseiller en santé mentale, Direction de la santé mentale, Services de santé des Forces canadiennes, Défense nationale et Forces armées canadiennes : C'est une excellente question. Nous ne disposons malheureusement pas de données concernant les guerres passées. Nous savons toutefois que bien des militaires éprouvent des difficultés à leur retour de guerre. Nous savons par exemple que les pensions au titre de la Première Guerre mondiale n'ont cessé d'augmenter aux États-Unis, au Royaume-Uni et au Canada jusqu'au début de la Seconde Guerre mondiale. Nous savons que ceux qui prennent part à une guerre en ressentent les effets néfastes du point de vue physique et mental pendant de très nombreuses années. Des travaux ont été menés pour connaître les effets des missions de maintien de la paix sur les soldats incapables d'agir ou d'effectuer certaines manœuvres en raison de règles d'engagement très strictes. On pourrait être porté à penser qu'une mission de combat où chacun peut passer à l'action risque de causer moins de difficultés. Toutefois, en raison de facteurs comme la perte de collègues, les taux sont tout aussi élevés.

Je ne pense pas que nous disposions d'éléments de comparaison valables. Nous savons que, depuis toujours, une minorité importante de ceux qui sont déployés dans une situation mettant leur vie en danger en revient avec certaines séquelles. Parmi les membres du groupement tactique basé à Gagetown en 2007, le taux de TPS se situait à environ 25 p. 100 il y a quatre ans. Les études précédentes n'ont pas produit de résultats semblables pour des militaires en dehors des zones d'opération.

Il y a toujours un impact, qu'il s'agisse d'une mission de maintien de la paix ou de travail humanitaire.

J'étais au Rwanda à l'époque.

Le sénateur White : Oui, en 1988.

Col Jetly : Le fait d'avoir été témoin de ces choses est très difficile aussi. Par conséquent, à mon avis, il existe différents types de traumatismes, que vous soyez un témoin passif ou un participant actif. Je crois que les conséquences psychologiques sont profondes.

Le sénateur White : Merci beaucoup.

J'imagine que le deuxième sujet de recherche doit être de déterminer qui s'en sort le mieux. Est-ce que certaines unités ou certains secteurs des forces armées semblent avoir une moins grande prévalence, même s'ils sont aussi actifs que les autres? Je ne parle pas de comparer les Forces aériennes, la marine et l'Armée de terre. Je parle de comparer des unités précises au sein des forces armées.

Col MacKay : Sénateur, je ne crois pas que nous ayons été en mesure de faire une analyse si détaillée à partir des données des enquêtes que nous avons menées jusqu'à présent, qui nous permettrait de cerner la prévalence dans des unités bien précises. Toutefois, nous avons constaté que toutes les unités ressentent des effets après avoir participé à des opérations comme celle en Afghanistan, que les militaires fassent du soutien logistique dans nos installations au Camp Mirage ou qu'ils manœuvrent des UVA.

Nous avons vu que, au sein des unités des armes de combat, il y a un risque élevé de souffrir de maladie mentale. À partir des données que nous avons pu examiner jusqu'à présent, nous avons vu que les prestataires de soins de santé courent un risque élevé d'être atteints de problèmes de santé mentale. Cependant, nous n'avons pas de données qui nous permettraient de comparer les unités d'infanterie aux unités de blindés.

Le sénateur White : J'ai une brève question, je vous le promets. Je ne la pose pas pour laisser entendre qu'une unité est meilleure qu'une autre. Je la pose parce que j'ai entendu des membres de certaines unités parler du fait qu'ils estiment que tout le monde est atteint d'ESPT. Ce qui est important, c'est de voir si cela devient une maladie et comment les militaires se débrouillent quand ils rentrent chez eux. C'est pour cette raison que je voulais savoir si vous avez constaté cela.

Existe-t-il une pratique exemplaire que nous pourrions adopter pour aider ces personnes davantage?

Col Jetly : Je peux répondre brièvement à cette question. Selon des données américaines très fiables, les leaders de certaines unités combattantes sont capables de reconnaître les cas d'ESPT. L'approche que nous adoptons sur le plan de la sensibilisation et de la transformation de notre culturel consiste à former des leaders qui ne passent pas leur temps à donner des instructions détaillées et futiles, mais de véritables leaders qui connaissent bien leurs subordonnés et qui seront capables de remarquer des changements subtils et de créer un climat qui encourage les membres à chercher de l'aide et à être en santé. Beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte dans la prestation de soins de santé, mais aussi dans l'exemple que donnent les leaders et les pairs. Par conséquent, nous axons nos efforts sur tous ces aspects dans le cadre de la transformation de notre culture.

Le sénateur White : Merci beaucoup. Je vous remercie tous d'être parmi nous.

Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup, messieurs. J'allais justement vous poser une question sur le leadership. À mon avis, nous sommes tous extrêmement impressionnés par la qualité du leadership dans les forces armées, notamment par la formation que reçoivent les leaders. Toutefois, j'aimerais souligner le fait que des différences subtiles d'un leader à un autre pourraient empêcher quelqu'un de discerner un problème.

Voici mon autre question : presque toutes les discussions concernant l'ESPT portent sur les cas qui sont décelés dans le cadre de déploiements à l'étranger. Or, il existe aussi des cas d'ESPT au sein de la GR, par exemple. Les membres de la GR sont déployés parfois, mais nous voyons bel et bien des cas parmi ceux qui ne sont pas déployés, qui ne se sont jamais servis de leur arme et qui n'ont jamais été la cible de tirs. On parle beaucoup, peut-être seulement dans les manchettes — et il ne s'agit ici aucunement d'une critique, parce que beaucoup d'efforts sont déployés au pays pour intégrer des femmes dans les forces armées — de harcèlement sexuel et de harcèlement en général. Prêtez-vous une attention particulière à ce genre d'ESPT, et est-ce que des préjugés différents y sont associés? Faudrait-il que nous les examinions?

Lgén Millar : Absolument. Aujourd'hui, nous avons tendance à associer l'ESPT à des événements traumatisants qui se sont produits pendant des déploiements et des opérations. C'est très vrai. Pour répondre à la première question du sénateur White, au fur et à mesure que nous dissipons les préjugés et que nous encourageons un dialogue concernant les problèmes de santé mentale, nous aidons de plus en plus d'anciens combattants qui n'ont pas été déployés en Afghanistan, mais qui ont été déployés en Bosnie, au Kosovo et en Somalie. Le stress post-traumatique se développe au fil du temps et peut prendre de quatre à sept ans pour se manifester. Au début, les membres que nous accueillions étaient des anciens combattants qui n'avaient pas été en Afghanistan. Maintenant, il est certain que la plupart des personnes atteintes d'ESPT que nous accueillons ont été en Afghanistan.

Cependant, il est certain que l'on peut subir un traumatisme dans le quotidien, que ce soit à cause d'un accident de voiture ou d'un événement émotionnel important ayant une incidence sur sa famille. Ces facteurs, conjugués à un certain nombre d'autres marqueurs biologiques et aussi, peut-être, au fait d'être plus prédisposé aux autres maladies mentales — notamment la dépression et l'anxiété —, créent une suite d'événements qui peuvent exacerber la maladie mentale au point où l'état de stress post-traumatique se manifeste de façons différentes. Par conséquent, comme vous l'avez mentionné, sénateur, le harcèlement sexuel et l'inconduite sexuelle peuvent créer un stress post-traumatique qui peut se transformer en un problème de santé mentale.

Par conséquent, dans la formation et les cours de perfectionnement que nous offrons, nous ne mettons pas seulement l'accent sur les traumatismes subis pendant des opérations de combat, comme Colin l'a dit. Nous parlons des traumatismes qui surviennent dans l'ensemble des Forces canadiennes. D'ailleurs, comme Andrew le mentionnera, certains des cas que nous rencontrons ne sont pas de type opérationnel. Encore une fois, ce n'est pas que tous ceux qui prennent part à des déploiements et à des opérations de combat finissent par manifester des signes d'ESPT ou par être atteints d'une maladie mentale. Il est vrai que cela arrive là-bas. Quel était l'événement traumatique à la racine du problème? De tels traumatismes peuvent se produire chez nous aussi.

Col Downes : Comme le général Millar l'a mentionné, nous visons à combattre les préjugés qui sont rattachés aux maladies mentales en général. Nous ne ciblons pas seulement les cas qui résultent d'opérations de combat. Nous examinons la maladie mentale dans le sens large de la santé publique.

La deuxième chose que j'aimerais souligner, c'est que, lorsque nous avons des patients atteints de l'ESPT, parfois il peut être très compliqué de déterminer si c'était le déploiement ou un événement survenu avant le déploiement qui est réellement à l'origine de leur état. Parfois, il arrive que le déploiement mette en lumière des symptômes que le patient offrait avant le déploiement. Par conséquent, il est parfois très difficile d'établir une distinction entre les deux. Quoi qu'il en soit, nous traitons tous les patients de la même manière. Nous combattons les préjugés associés à toutes les formes de maladie mentale. Dans un sondage récent, nous avons trouvé — et le chiffre exact ne me vient pas à l'esprit en ce moment — qu'un nombre appréciable de personnes n'ayant jamais été déployées étaient atteintes de l'ESPT.

Le sénateur Mitchell : Merci. Il y a plusieurs années, j'ai visité le Centre de ressources pour les familles des militaires à Calgary. Vous avez parlé de ce programme dans vos observations, général. À mon avis, il s'agit d'un excellent programme. On m'a signalé que le financement de ces centres dépend du nombre de membres de la Force régulière qui vivent dans la région relevant de leur compétence. Or, dans un endroit comme Calgary, où beaucoup de réservistes ont été déployés et où il n'existe pas de base des Forces régulières, comme c'est le cas dans le Nord de l'Alberta ou dans la région d'Edmonton, à Wainwright, cela pose des problèmes de financement. Le centre est aux prises avec un grand nombre de problèmes, étant donné que beaucoup de réservistes de leur région ont été déployés et ont pris part à des combats, mais que son financement ne dépend pas du nombre de réservistes dans la région. Il dépend du nombre de membres de la Force régulière qui y vivent.

Est-ce que c'est un problème? En êtes-vous conscient? Pourriez-vous nous en parler?

Lgén Millar : Oui, sénateur. Merci. Chose intéressante, d'après nos réservistes et les sondages que nous avons menés, les réservistes semblent faire preuve de plus de résilience sur le plan de la santé mentale que les membres de la Force régulière. C'est très intéressant. Quand j'ai examiné les Études sur la vie après le service et diverses études à avoir été menées auprès des réservistes, cela m'a ouvert les yeux. J'attribue le fait que les membres de la Force de réserve sont plus résilients — et là, c'est seulement mon opinion personnelle —, au fait qu'un réserviste évolue à l'extérieur du milieu militaire — tant sur le plan professionnel que sur le plan familial — et que, en partant, il a vécu un plus grand éventail d'expériences. Dans le milieu militaire, nous vivons les mêmes expériences et nous nous ressemblons tous. Cette expérience en tant que civil, combiné à leur expérience militaire, semble leur permettre de faire preuve de plus de résilience et de souplesse et de mieux s'adapter.

Parmi les réservistes, il n'y a pas autant d'indemnités pour la famille, ni même pour le membre. Cela s'explique surtout par le fait qu'ils ont déjà des liens avec des membres de leur collectivité étant donné qu'ils y vivent et y travaillent en tant que civils. Quand ils sont déployés ou deviennent membres de leur unité, ils deviennent admissibles aux services des Centres de ressources pour les familles des militaires et de nos centres intégrés de soutien du personnel, et ils ont droit à tous les services offerts par les forces armées. Plus tard, quand ils ne portent plus l'uniforme et qu'ils réintègrent la vie civile, ils ont déjà accès à ces services.

Cela dit, et bien que je reconnaisse qu'il s'agit d'une lacune, 85 p. 100 des militaires vivent à l'extérieur de la base, dans leurs collectivités. Nos Centres de ressources pour les familles des militaires se trouvent sur les bases. Il est donc naturel que cela présente des problèmes d'accès. Maintenant, nous intégrons nos centres de ressources pour nos familles aux services que les provinces fournissent aux familles. Nous créons ces liens dans le but de pouvoir adresser nos réservistes et nos membres vivant à l'extérieur de la base à des fournisseurs de services civils tant pour du counseling en santé mentale que pour des services de protection de l'enfance et des garderies. Nous parrainons ces services au moyen des Centres de ressources aux familles militaires. Nous développons ces liens pour qu'il soit plus facile pour les gens d'y avoir accès.

Le sénateur Mitchell : J'aimerais poser une autre question. Tout à l'heure, j'ai parlé de harcèlement au sein de la GR et de cas d'ESPT qui y sont associés : de nombreux éléments de preuve ont été présentés à ce sujet, et le ministre et le commissaire de la GR ont reconnu que c'est bel et bien un fait. D'ailleurs, il y a d'autres cas d'ESPT à la GR. On a fait valoir que, dans une certaine mesure, le manque de ressources est un problème à la GR, mais il s'agit aussi d'une question d'expérience et d'apprentissage.

Serait-il possible de créer une synergie entre les forces armées et la GR? Avez-vous envisagé cette possibilité? Y aurait-il moyen de coordonner les centres et de réaliser ainsi des économies d'échelle?

Lgén Millar : Je vais commencer, ensuite, je vais céder la parole à Andrew.

Nous travaillons en très étroite collaboration avec la GR. Nous leur avons fait part de notre Stratégie en matière de santé mentale pour les Forces armées canadiennes. En fait, la GR est en train de l'utiliser. Nous collaborons également avec elle sur le plan de la recherche et des travaux du comité directeur, qui est composé de représentants des ministères de la Défense nationale et des Anciens Combattants et de la GR. Ce comité se penche sur la manière dont nous nous occupons des anciens combattants — parce que la GR aussi a des anciens combattants. Dans le cadre de ces travaux, nous partageons toutes nos pratiques exemplaires, les fruits de nos recherches et nos programmes.

Les membres de la GR ont aussi accès à nos programmes de soutien par les pairs — à savoir le programme Soutien social; blessures de stress opérationnel — de même que les membres de leur famille. Par conséquent, oui, il existe beaucoup de synergie entre nous.

Andrew?

Col Downes : Merci, monsieur.

Ceci n'est peut-être pas étroitement lié à la question des ressources aux familles, mais j'aimerais simplement souligner certaines des initiatives auxquelles nous collaborons avec la GR, notamment le programme En route vers la préparation mentale, qui a été mis en œuvre dans certains services de police, y compris certains de la GR. Nous avons établi un protocole d'entente conjoint avec la GR et Anciens Combattants pour mettre en commun nos ressources dans nos centres de soutien pour stress opérationnel et le réseau des cliniques TSO d'Anciens Combattants. Par exemple, nous pourrions soigner des membres de la GR atteints de l'état de stress post-traumatique dans nos centres.

Le président : À mon avis, il serait utile de clarifier la citation de l'année dernière, « Vous n'êtes pas seul », c'est-à- dire la vidéo sur la santé mentale dont nous avons parlé plus tôt sur les préjugés et la transformation de la culture. Pourriez-vous en parler un peu plus longuement? Est-ce que la vidéo a donné de bons résultats? Avez-vous diffusé la vidéo partout au pays?

Lgén Millar : Oui, monsieur le président, nous l'avons fait. Avant « Vous n'êtes pas seul », notre toute première vidéo visait à combattre les préjugés et, du fait que nous comprenions que la maladie mentale était une question personnelle, nous voulions encourager le dialogue à ce sujet. Nous avons donc invité des membres des forces armées à figurer dans une vidéo et à raconter leur histoire, en espérant qu'ils seraient prêts à le faire. En très peu de temps, 200 membres des Forces armées canadiennes avaient répondu à l'appel et étaient prêts à raconter leur histoire sur vidéo. Les participants allaient d'un simple soldat au vice-amiral Norman, le commandant de la marine. Le message de cette vidéo — qui a été diffusée dans l'ensemble des Forces canadiennes sur les réseau étendu de la Défense et sur notre site web, à forces.gc.ca —, c'était qu'il n'y a rien de mal à ne pas se sentir bien et qu'il n'y a rien de mal à chercher de l'aide, et elle invitait donc les gens à chercher de l'aide.

C'était la première d'une série de vidéos. « Vous n'êtes pas seul » était un autre complément à la vidéo visant à dire quels services sont offerts. Nous considérons que la maladie mentale peut être prise en charge et soignée. Vous n'êtes pas seul, car d'autres militaires et familles sont touchés.

L'objectif était également de tendre la main aux familles et aux conjoints. La vidéo a été diffusée au sein des Forces canadiennes et sur notre page Web externe.

Le président : Nous pouvons donc en déduire qu'une bonne partie du personnel militaire et des membres de leur famille ont vu la vidéo, n'est-ce pas?

Lgén Millar : Oui, sénateur.

Le président : Pourriez-vous nous parler un peu de l'événement récent Bell Cause pour la cause? Quel en a été le résultat?

Lgén Millar : Bell Cause pour la cause était animé par Clara Hughes, notre célèbre athlète olympique...

Le président : En patinage de vitesse et en cyclisme.

Lgén Millar : Oui. Elle a vraiment été le visage du discours sur la maladie mentale au Canada. Nous n'avons pas hésité à nous associer à Bell. Si Bell en parle, nous pouvons offrir notre aide et servir de modèle. Je crois que si les Canadiens voient des combattants qui étaient en Afghanistan prêcher par l'exemple et raconter leur histoire sur le trouble de stress post-traumatique, ils devraient tous être à l'aise de parler de maladie mentale. C'est donc afin de parler de santé mentale que nous et bien d'autres nous sommes associés à Bell Cause pour la cause.

Il y a une semaine à peine, Bell a lancé une de ses campagnes Bell Cause pour la cause dans le hall du quartier général de la Défense nationale, et a invité les Forces canadiennes à participer à une table ronde. Nous avions deux membres à la table, à savoir l'adjudant-maître Pickard et le major Richard, qui étaient aux côtés d'un de nos golfeurs de la PGA. Ils se sont donc assis devant un vaste auditoire — la séance était télévisée — pour raconter leur histoire sur le trouble de stress post-traumatique avec lequel ils vivent. Ils ont dit qu'il y a de l'aide, et ont incité les gens à en parler.

Voilà l'événement auquel nous avons participé. Ce jour-là, l'entente de Bell était de verser un pourcentage des fonds à la maladie mentale, en fonction du nombre de gazouillis et de messages textes. Bell a donc recueilli 6 millions de dollars grâce à ce lancement, cinq sous à la fois.

Col Jetly : C'est un projet formidable auquel nous participons maintenant pour la troisième année. L'idée est simplement de causer. Dans notre travail, il faut en parler chaque jour puisque c'est ce qui nous importe, mais l'objectif était d'y consacrer une journée.

Le président : C'est une entrevue. Est-elle uniquement sur les médias sociaux, ou dans les médias traditionnels aussi, pour les plus âgés d'entre nous?

Col Jetly : Je n'ai pas adopté ces plateformes non plus. C'est sur Twitter, sur Facebook et le reste. Si vous regardez en ligne, vous verrez des personnalités, des athlètes, des politiciens, le premier ministre lui-même et tout le monde qui diffuse l'information. C'est vraiment le principe, et la position de Bell est unique en raison des services mondiaux qu'il possède, comme la télévision, la radio, les journaux et ce genre de choses. C'est devenu un grand événement, et nous avons été sollicités il y a quelques années. Bien des porte-parole de la campagne sont des athlètes, comme Clara Hughes et Michael Landsberg. L'an dernier, lorsque Clara a fait son grand tour du pays, elle s'est arrêtée à plusieurs bases militaires.

Le président : Je m'en souviens. C'était dans le cadre du programme.

Col Jetly : C'était le principe; elle s'est arrêtée expressément à certaines de nos bases. Il y a même eu un événement à Valcartier, où nos soldats ont fait un vélothon à ses côtés. L'objectif est de nouer des partenariats et de faire valoir que la maladie mentale touche l'ensemble des Canadiens, et pas juste les Forces armées canadiennes. La démarche est fondée sur la population.

Le président : C'est donc quelque peu thérapeutique pour ceux qui écoutent...

Col Jetly : Tout à fait.

Le président : ... en plus d'être une activité de financement.

Col Jetly : L'événement forme un tout, en effet.

Le président : C'est fort intéressant. Général, vous avez parlé dans votre exposé d'un système d'information et de gestion des résultats signalés par le client — et je pense que le colonel Jetly est le responsable de la question. Je vous remercie de ne pas utiliser trop d'acronymes. Nous pouvons employer le terme complet puisqu'il nous explique un peu ce que vous faites.

Vous avez dit que le système permet un traitement rapide de l'évaluation des résultats. Pourriez-vous nous l'expliquer un peu mieux? Que souhaitez-vous retirer de ce projet particulier?

Col Jetly : Bien sûr. C'est un système de gestion des résultats. Bien souvent, lorsqu'on pense à la dyade clinicien- patient, on se dit qu'il s'agit de deux personnes. Les faits montrent que lorsqu'on demande à un patient comment il va, il se contente souvent de répondre « bien » parce que c'est ce que les Canadiens disent normalement. Puisque nous ne sommes pas certains de savoir comment ils se portent vraiment, il est difficile de prédire dans quelle mesure ils vont bien.

Or, le système informatisé invitera le clinicien et le patient à remplir quelques questionnaires à chaque séance, ce qui permettra de suivre l'état du patient et de savoir s'il répond au traitement comme il se doit, par exemple, de façon à pouvoir modifier l'approche en cours de route.

Par exemple, disons qu'une personne souffre de dépression et décide tôt d'entreprendre seulement une thérapie, parce qu'elle préfère ne pas recevoir de médicaments. Si sa réaction au traitement ne correspond aux attentes après cinq ou six séances, le professionnel peut alors revoir la formule. On peut rapidement modifier le traitement, ce qui est utile au patient et au médecin, mais aussi à la clinique et à l'échelle nationale. Nous savons ainsi clairement dans quelle mesure notre traitement des maladies est efficace et pouvons évaluer les besoins en formation, mais le système permet surtout de modifier la prise en charge de chaque patient.

Anciens Combattants Canada a lui aussi lancé le système, qui fera partie de la transition et permettra de transférer les données entre l'ensemble de nos cliniques.

Le président : C'est un logiciel?

Col Jetly : En effet.

Le président : L'avez-vous acheté d'un autre pays? Qui l'a mis au point?

Col. Downes : Le logiciel a été conçu aux États-Unis, et s'appuie sur les questionnaires habituels en santé mentale. Comme le colonel Jetly l'a mentionné, le système est déjà déployé dans les cliniques du programme de soutien social et de blessures de stress d'Anciens Combattants, ou SSBSO; nous faisons donc la même chose et collaborons avec les mêmes partenaires. En fait, des représentants d'Anciens Combattants nous aident à former notre personnel.

Le président : Si nous allions aux États-Unis, où trouverions-nous la plaque tournante des nombreuses recherches en cours dans le domaine précis qui vous est utile au Canada?

Col Jetly : Il y a bien des plaques tournantes aux États-Unis. Le National Center for PTSD en est un exemple.

Le président : À Washington?

Col Jetly : Non, je pense qu'il est en Virginie ou dans cette région.

Le président : C'est assez près de Washington.

Col Jetly : Mais les plaques tournantes sont nombreuses là-bas. Certains hôpitaux pour anciens combattants comptent 90 000 bassins de patients. C'est donc assez intéressant, y compris dans le secteur de Washington. Aux États- Unis, les systèmes des militaires et des anciens combattants sont différents. Il est bon d'examiner le programme de dossiers de santé électroniques du ministère américain des Anciens combattants.

Le président : Prenons une observation comme celle dont le général a parlé, à savoir que les réservistes ne souffrent pas autant de stress post-traumatique que les autres; pourriez-vous comparer ce que vous observez ici à certaines constatations des États-Unis afin de peut-être en tirer de nouvelles données cliniques?

Col Jetly : Oui, et nous communiquons constamment avec nos collègues à ce sujet.

Pour revenir à un des points précédents, nous avons évolué quelque peu différemment des Australiens et des Américains, car nous n'avons pas participé à un conflit comme la guerre du Vietnam. Donc, nous n'avons pas eu à ressortir des choses qui remontent à 20 ans.

À bien y penser, nous avons la capacité de réagir. Le directeur du National Center for PTSD a déclaré que pour savoir comment traiter le TSPT, il suffit d'aller au nord de la frontière pour regarder ce que font les Canadiens. Nous repartons à neuf pour beaucoup de ces choses. Il y a donc des techniques qui sont utilisées au Canada, mais pas aux États-Unis, comme la décompression dans un tiers lieu, et les États-Unis veulent nous imiter. Les échanges sont nombreux entre l'Australie, les États-Unis et le Canada, et les Pays-Bas collaborent activement avec nous également. Nous mettons en commun des pratiques exemplaires fréquemment.

Le président : Avant de passer au deuxième tour de questions, par rapport à la mise en commun des pratiques exemplaires, avez-vous des programmes avec les premiers répondants, comme des services de police autres que la GR, dont nous avons parlé?

Col Jetly : Lorsque nous avons lancé le programme En route vers la préparation mentale, il a connu un énorme succès. On nous appelait de partout pour nous offrir de l'aide. Nous avons conclu un partenariat avec la Commission de la santé mentale du Canada, qui en assure la direction. La commission a adapté notre programme à la vie civile, en quelque sorte, et elle a entrepris de le mettre en œuvre à l'échelle nationale.

Nous y sommes toujours associés, comme le sont aussi le service de police de Calgary et la division de la GR au Nouveau-Brunswick. Nous nous en occupons, mais en réalité, les services des incendies et les services de police de toutes les collectivités y jouent un rôle. Des gens de l'Alberta viennent de communiquer avec nous pour obtenir de l'aide après le suicide, récemment, de plusieurs premiers répondants. Donc, nous établissons le plus de partenariats possible et nous mettons à profit notre association avec la Commission de la santé mentale du Canada, les associations et les chercheurs du secteur de la santé mentale afin de mettre en œuvre des mesures et mettre en commun certaines pratiques.

Le président : C'est très utile. C'est là une voie d'avenir; beaucoup d'initiatives ont été lancées. Certaines connaîtront plus de succès que d'autres, mais nous resterons en contact avec vous afin de nous tenir au courant des progrès à cet égard.

La sénatrice Stewart Olsen : Ma question porte davantage sur un aspect clinique. Je sais que le TSPT a diverses origines et appellations, mais il existe probablement depuis le début des temps, je crois.

La maladie elle-même — j'hésite à la qualifier de maladie, car je pense que c'est une condition humaine — a-t-elle changé? A-t-elle évolué, ou est-ce seulement qu'on en parle davantage? Notre attitude a-t-elle évolué?

Col Jetly : Elle a évolué. C'est une excellente question. Lorsqu'on regarde des films sur la Première Guerre mondiale — il y a des films formidables —, on voit des gens qui ont des réactions somatiques, des tics faciaux, par exemple. Dans une certaine mesure, ces réactions pourraient être associées à un assaut ou, peut-être, au fait d'avoir asséné un coup de baïonnette au visage d'un adversaire. Plus tard, des gens ont commencé à avoir des comportements et mouvements étranges. Pour les traiter, on a eu recours à l'hypnose et à des choses du genre.

Au fil du temps, la reviviscence des souvenirs — le fait de revivre les événements — est un phénomène plus courant. Cela pourrait être lié aux médias et aux films, par exemple. C'est donc un autre concept. Les cauchemars semblent avoir toujours existé; il y a eu une évolution. À mon avis, les maladies sont souvent le reflet de la culture.

Il y a eu un changement majeur dans la dernière version du DSM, le DSM-5 : depuis 1980, le TSPT est classé dans la catégorie des troubles anxieux. C'était auparavant considéré comme de l'anxiété, mais une catégorie propre aux traumatismes a été créée. Donc, cela ressemble à de l'anxiété, mais il s'agit en réalité d'une maladie unique liée au traumatisme. Nous verrons l'évolution au fil de la discussion ou lorsque nous étudierons d'autres aspects.

Après un traumatisme, la maladie la plus courante est la dépression, en fait. Elle est plus courante que le TSPT; l'aborder sous l'angle du traumatisme changera la donne. Cela évolue à mesure que nous comprenons la maladie, et chaque version du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux précise considérablement les critères diagnostiques.

Le sénateur White : Encore une fois, merci de vos commentaires et de vos réponses. Je suis heureux de constater que l'on met fréquemment en commun les pratiques exemplaires et les pratiques actuelles.

A-t-on créé un groupe de réflexion pour examiner certaines de ces questions? Je comprends l'observation sur la recherche, car si on ne réagit qu'en raison de la gravité de la situation, il est possible qu'on n'arrive pas à agir assez rapidement en ce sens. Certains groupes de réflexion qui ont été créés ailleurs dans le monde pour étudier d'autres enjeux ont réussi à élaborer des stratégies différentes de celles que vous utilisez.

Envisage-t-on la création d'un groupe de réflexion officiel sur la scène internationale? Le cas échéant, qui en assure la direction? Sinon, pourquoi?

Lgén Millar : Notre version de ce groupe de réflexion ne se présente peut-être pas sous cette forme; il s'agit de l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, un consortium dirigé par Mme Alice Aiken, de l'Université Queen's, en collaboration avec le Collège militaire royal du Canada. Le consortium — qui regroupe maintenant 36 universités et se charge de la majorité des activités de réflexion, de recherche et d'appui liées à nos pratiques en clinique dont les médecins ont parlé — a acquis une notoriété à l'échelle internationale et entretient des relations avec un organisme équivalent du milieu universitaire européen. On y étudie de façon extrêmement minutieuse les causes de la maladie mentale, de la condition et du TSPT, pas seulement du point de vue des militaires, mais aussi du point de vue des familles. Le champ de recherche est donc élargi.

En ce qui concerne les familles, nous avons également un groupe de réflexion appelé l'Institut Vanier. Vous savez que la création de ce modèle découle des difficultés auxquelles les familles de militaires sont confrontées. De nombreuses recherches sur la résilience familiale sont en cours, en collaboration avec les autorités provinciales, afin de déterminer les meilleures façons d'offrir aux familles des membres occupant des postes à rythme opérationnel élevé les services d'appui aux familles qui pourraient être mis en place par les militaires.

Un des groupes de réflexion est l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans, mais comme le colonel Jetly l'a indiqué, à titre de psychiatre en chef et de directeur de la santé mentale, nous faisons appel à nos alliés du Groupe des cinq — Nouvelle-Zélande, Australie, États-Unis et Royaume-Uni — et à leurs groupes de réflexion respectifs pour cerner les pratiques exemplaires.

Col MacKay : Sénateur, la création d'une chaire de recherche en santé mentale chez les militaires, qui collaborera très étroitement avec l'hôpital Royal Ottawa et des partenaires internationaux, vise notamment à réunir des experts internationaux pour examiner les enjeux auxquels nous sommes confrontés.

L'ICRSMV a adopté une approche générale. Le fait d'avoir une chaire de recherche au sein d'un des instituts membres de l'ICRSMV nous permet d'y concentrer les efforts et d'orienter la réflexion sur les enjeux auxquels nous sommes confrontés afin d'améliorer les études et ainsi répondre à nos questions. Cela permet aussi au colonel Jetly de compter sur ces personnes-ressources. Il entretient des liens étroits à l'échelle internationale avec nos alliés et des experts de la recherche en santé mentale chez les militaires.

Le sénateur White : Merci beaucoup.

Le président : Nous avons probablement évité d'aborder le sujet. Nous sommes au fait des travaux de Mme Alice Aiken et de la formidable croissance, ces quelques dernières années, du Collège militaire royal, de l'Université Queen's et de toutes les universités qui participent à cet effort. Nous avons bon espoir que ces travaux se poursuivront et donneront de bons résultats.

Général, dans votre exposé, vous avez utilisé les mots « annoncé récemment ». Un autre exemple est l'initiative de l'Université Queen's et du Collège militaire royal du Canada, qui n'existe que depuis trois ou quatre ans et qui a connu une croissance exponentielle. Beaucoup de programmes dont vous avez parlé aujourd'hui ont été annoncés et mis en œuvre récemment. Vous avez parlé du « Centre d'excellence en santé mentale pour les militaires et les anciens combattants du Canada, annoncé récemment ». Est-ce un organisme de surveillance qui chapeaute les divers programmes que vous avez mis en place?

Lgén Millar : Oui, sénateur. Nous sommes très fiers du jumelage avec l'hôpital Royal Ottawa. Il y a en effet une clinique de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel située à l'hôpital Royal Ottawa, et c'est vers cette clinique que nous aiguillons nos anciens combattants. Nous entretenons des liens étroits. Ce partenariat a été renforcé récemment grâce à l'annonce d'en confier la coprésidence au colonel Jetly. L'autre coprésident est le psychiatre en chef de l'hôpital Royal Ottawa. Ensemble, à titre d'experts dans le domaine, ils chapeauteront les activités liées aux pratiques exemplaires et à la recherche de façon à perfectionner les pratiques cliniques.

Col Jetly : Le centre d'excellence sera situé au quartier général, au ministère des Anciens Combattants, et misera beaucoup sur l'effet de levier. Les trois principaux objectifs seront de mener des recherches, de mieux comprendre les fondements biologiques de la maladie et d'améliorer les traitements.

L'un des enjeux — et l'une des principales contraintes — est l'imposition de limites par rapport aux soins eux- mêmes. Nous devons donc chercher à mieux comprendre les maladies et à améliorer les traitements. Nous traiterons des questions de sensibilisation. Une partie du problème est liée au transfert des connaissances. Un groupe restreint de gens détient un imposant savoir. Comment pouvons-nous le transmettre à l'ensemble des praticiens? Il y a aussi les soins cliniques. Les gens du centre d'excellence se pencheront sur les questions liées à la psychiatrie et mèneront des recherches eux-mêmes. Un psychologue du ministère des Anciens Combattants, un médecin de famille, un travailleur social et un chercheur en sciences biologiques seront du nombre et tenteront d'adopter une approche stratégique, à l'écart des distractions quotidiennes et en fonction d'un horizon de deux ou trois ans. Nous en sommes à mettre en place ces divers aspects, ce qui nous permettra d'examiner le tout sur une période de trois ou quatre ans plutôt que sur des facteurs quotidiens. Nous sommes très enthousiastes à l'idée d'étudier les façons de renseigner les praticiens sur cette approche et de transmettre une partie de ces connaissances.

Le président : Quel sera le lien entre le centre d'excellence, le MDN et le ministère des Anciens Combattants et l'initiative de l'Université Queen's et du Collège militaire royal du Canada?

Col Jetly : Elle fera partie du réseau et sera implantée à notre quartier général, mais en ce qui concerne la relation avec l'ICRSMV, le milieu universitaire et les alliés, les liens du centre seront multiples. Nous avons une excellente relation avec l'ICRSMV, mais si le King's College, au Royaume-Uni, ou l'armée de défense d'Israël manifestent le désir d'étudier un aspect donné, le centre acceptera sans doute de collaborer. L'idée est de mettre en commun les meilleures recherches et les meilleures connaissances, de transmettre ce savoir aux intervenants de première ligne pour que les soldats, les marins et les aviateurs qui en ont besoin y aient accès le plus tôt possible.

Le président : Le centre d'excellence sera principalement chargé du traitement de l'information et de la diffusion...

Col Jetly : Non; il sera chargé des travaux en soi, de la recherche. Nous avons déjà entrepris certains projets de recherche.

Le président : Quand pensez-vous commencer vos activités?

Col Jetly : C'est déjà commencé.

Le président : Nous vous empêchons donc de poursuivre vos travaux, en somme.

Col Jetly : Presque littéralement.

Le président : Merci beaucoup d'être venu. Votre témoignage nous est très utile et nous ferons un suivi à cet égard. Nous avons beaucoup de travail, compte tenu de ce qui se passe actuellement et de ce qui pourrait se passer à l'avenir, et vous aurez un rôle essentiel à jouer.

Nous tenons à ce que vous sachiez que le Sous-comité des anciens combattants et le Sénat en général vous sont très reconnaissants du travail que vous faites pour les membres des Forces armées canadiennes et leurs familles.

Nous vous en remercions.

Lgén Millar : Merci beaucoup, sénateur. Comme nous en avons discuté ensemble, plus on parle des problèmes de santé mentale, plus on les démystifie, plus il sera aisé d'en parler au sein de la population canadienne et des Forces canadiennes. Cela aidera à réduire les obstacles et la stigmatisation et plus de gens se manifesteront et demanderont de l'aide.

Comme le major Richard l'a indiqué, s'il avait osé le faire il y a 20 ans, il n'en serait pas rendu au point où le trouble de stress post-traumatique consume entièrement sa vie. Encore une fois, plus on en parle, plus les gens demandent des soins, plus nous pouvons les aider. Merci beaucoup.

Le président : Poursuivez votre travail en ce sens. La séance est levée.

(La séance est levée.)


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