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RPRD - Comité permanent

Règlement, procédure et droits du Parlement

 

Délibérations du Comité permanent du
Règlement, de la procédure et des droits du Parlement

Fascicule no 15 - Témoignages du 30 octobre 2018


OTTAWA, le mardi 30 octobre 2018

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd’hui, à 9 h 35, afin de rédiger et de proposer des modifications au Règlement du Sénat pour établir le Comité permanent de l’audit et de la surveillance.

Le sénateur Serge Joyal (vice-président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le vice-président : Honorables sénateurs, bienvenue à cette session du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. Nous avons le plaisir, ce matin, de poursuivre notre discussion sur notre étude du vingt et unième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, adopté le 27 mars dernier. Ce rapport demandait à notre comité de revoir le Règlement du Sénat pour donner suite à la recommandation du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration visant à créer un comité pour assurer la vérification des dépenses des sénateurs.

Avant de poursuivre, puisque nous siégeons en séance publique ce matin, je vous demanderais de bien vouloir vous présenter.

[Traduction]

Le sénateur Sinclair : Bonjour. Sénateur Murray Sinclair, du Manitoba.

Le sénateur Greene : Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Paul Massicotte, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

La sénatrice Batters : Denise Batters, de la Saskatchewan.

[Français]

Le vice-président : Merci, sénateurs. Nous avons le plaisir de recevoir notre collègue, la sénatrice Lucie Moncion, membre du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration et, en particulier, de ce sous-comité du Comité de la régie interne qui avait étudié la recommandation visant à créer un comité externe de vérification qui aurait la responsabilité de revoir les dépenses des sénateurs en fonction du Règlement administratif du Sénat et de les certifier en conséquence.

[Traduction]

Sénatrice Moncion, c’est un plaisir de vous accueillir ce matin. Nous vous écouterons avec attention — vous connaissez la procédure —, puis nous passerons aux questions ou aux observations des membres du comité. La parole est à vous, sénatrice Moncion.

[Français]

L’honorable Lucie Moncion : Je ferai la première partie de ma déclaration en anglais et la deuxième partie en français.

[Traduction]

Chers collègues, merci de m’avoir invitée à la réunion d’aujourd’hui. Je suis membre du Comité des finances nationales et nos réunions ont lieu à la même heure que les vôtres. C’est pourquoi il m’est difficile d’assister à vos réunions, sans compter la nature des enjeux et des sujets que nous étudions au Comité des finances nationales.

À titre d’information et en guise de contexte sur les raisons de ma présence ici à titre de témoin, j’ai le titre de directrice agréée et je suis membre de l’Institut canadien des administrateurs de sociétés. Au cours des dernières années avant mon arrivée au Sénat, j’ai participé à l’établissement de comités de gouvernance, de ressources humaines et de vérification dans plus de 15 organismes. J’ai occupé la présidence ou la vice-présidence de divers organismes, conseils et comités, notamment l’Université Nippissing, le Collège Boréal, Groupe Média TFO, Direction de l’Ontario, Coopératives et mutuelles Canada, et beaucoup d’autres.

La règle d’or pour les membres de tout conseil ou comité est la suivante : surveiller sans s’ingérer. Pourquoi? Parce que les responsabilités et les obligations d’un membre du conseil d’administration sont très différentes de celles du personnel.

Permettez-moi de revenir brièvement au vingt et unième rapport, qui porte sur la création d’un comité permanent qui se réunirait plus d’une fois par trimestre. Dans nos discussions sur la création du comité de l’audit, nous parlions d’un comité qui se réunirait plus de quatre fois par année et qui pourrait examiner les délibérations à huis clos d’autres comités; surveiller les dépenses et les déplacements des sénateurs; se pencher de sa propre initiative sur toute question qu’il jugerait utile d’examiner. Il aurait essentiellement une indépendance et des pouvoirs supérieurs à ceux du Comité de la régie interne. Il pourrait donc agir de façon indépendante, interpréter des articles du Règlement administratif du Sénat, siéger entre les sessions et embaucher un vérificateur indépendant.

Dans mon discours au Sénat, j’ai indiqué qu’il serait extrêmement préjudiciable d’autoriser la création d’un comité d’audit et de surveillance doté d’un tel mandat, puisque ce comité serait entièrement contrôlé par des sénateurs, aurait des pouvoirs et des responsabilités excédant de loin le mandat et le rôle d’un comité d’audit — donc hors du cadre des pratiques exemplaires pour un tel comité —, aurait un rôle décisionnel plutôt que consultatif et serait chargé de présenter des observations et recommandations au Comité de la régie interne.

Je vais vous présenter des observations dont vous pourrez débattre dans le cadre de votre étude sur la création du comité d’audit.

Observation no 1 : le Sénat manque toujours considérablement de crédibilité et de légitimité dans la population canadienne. Le public doit avoir la certitude que les dépenses sont surveillées, contrôlées et vérifiées.

Observation no 2 : le fait que le Sénat soit un organisme autonome n’exclut pas la possibilité du recours à un organisme de surveillance indépendant. Cela donnerait une légitimité à la volonté du Sénat d’accroître la transparence sur l’utilisation des fonds publics.

Observation no 3 : comme l’indique le vérificateur général dans sa recommandation 52, la « surveillance des dépenses des sénateurs devrait être assurée par un organe [...] dont la majorité des membres, y compris le président, seraient indépendants du Sénat. »

Observation no 4 : ce comité devrait être formé de membres du public compétents en matière financière et de membres du CIBA, et devrait relever du CIBA. Un point de vue indépendant et informé sur les questions financières contribuerait à régler les problèmes de gouvernance. Cette autonomie de pensée en ferait un organe de surveillance de la mauvaise gestion financière.

Observation no 5 : en 2017, le Parlement australien a créé une autorité indépendante d’examen des dépenses parlementaires. Le Royaume-Uni a créé un comité d’audit qui comprend deux membres de l’extérieur, dont le président.

Observation no 6 : Terre-Neuve-et-Labrador a connu des problèmes semblables avec les dépenses des députés et a créé un comité d’audit. Ce comité relève de la Commission de la régie interne de la province et comprend des membres du public ayant des compétences en matière financière.

Observation no 7 : certains de nos collègues du Sénat sont réticents à mettre en œuvre des changements qui pourraient avoir une incidence sur leurs privilèges parlementaires.

Observation no 8 : Nous devons démontrer que nous sommes favorables à la surveillance de professionnels externes, que nous répondons aux besoins de la population et que nous pouvons régler nos problèmes de crédibilité.

Notre objectif est de renforcer la gestion responsable des fonds publics et la reddition de comptes, et d’éviter les situations de conflits d’intérêts ou d’apparence de conflit d’intérêts.

[Français]

Il existe quelques options possibles pour y arriver. Je vous soumets deux options possibles à considérer.

L’option no 1 est de créer un comité de surveillance qui aurait le mandat exclusif de vérification et de surveillance des dépenses et des déplacements des sénateurs, et qui serait composé de membres externes seulement.

La création de ce comité permettrait d’assurer la transparence complète. De plus, l’intégrité des opérations répondrait à une définition plus moderne de l’indépendance et viendrait offrir l’assurance que les règles politiques et procédures sont respectées en ce qui concerne les dépenses des sénateurs. Ce comité serait appuyé par les services d’une firme d’auditeurs externes qui aurait le mandat d’effectuer l’audit interne des dépenses et des déplacements des sénateurs. Ce comité n’empiéterait pas sur les droits et privilèges du Parlement de réglementer ses affaires pour assurer son indépendance dans la vérification des autres affaires qui touchent son fonctionnement. Cette option répond aux recommandations du vérificateur général et aux préoccupations des sénateurs quant à l’indépendance et à la transparence des opérations.

L’option no 2 est de créer un comité de vérification qui assumerait le mandat complet de vérification auquel serait ajoutée la composante de surveillance des dépenses et des déplacements des sénateurs. Ce comité comprendrait majoritairement des membres externes et pourrait comprendre des sénateurs provenant du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration.

Ici encore, la création de ce comité permettrait d’assurer la transparence complète et l’intégrité des opérations, répondrait à une définition plus moderne de l’indépendance et viendrait offrir l’assurance que les règles politiques et procédures sont respectées. Ce comité assumerait le mandat complet de vérification. Ce comité serait appuyé par les services d’une firme d’auditeurs externe qui aurait pour mandat d’effectuer l’audit interne des dépenses et des déplacements des sénateurs et par une firme d’auditeurs externe pour ce qui est de l’audit des états financiers.

Il y a le travail qui se fait au niveau d’un comité de vérification, mais j’aimerais surtout m’attarder à la question de l’audit interne effectué par une firme d’auditeurs externes. Un des problèmes que nous avons depuis le dépôt du rapport du vérificateur général, c’est qu’il n’y a pas eu de suivi ou de vérification des dépenses des sénateurs. Je pense que la dernière remonte à 2013 avec le dépôt du rapport en 2016.

En faisant appel à une firme de vérificateurs externes pour effectuer un audit interne, on reste indépendant, c’est-à-dire qu’aucun employé à l’interne ne pourra être influencé dans le travail d’audit interne. Ce travail serait réalisé par des gens de l’externe qui n’ont aucun attachement à l’institution qu’est le Sénat. Ces personnes sont en mesure de jeter un regard complètement indépendant sur la qualité des dépenses et des pièces justificatives. Ainsi, le Sénat bénéficierait d’une transparence complète en ce qui concerne ce travail.

Enfin, j’aimerais parler de la structure qui existe actuellement au sein du gouvernement fédéral pour chacun des ministères. Cette structure exige l’établissement d’un Comité ministériel d’audit (CMA) indépendant, qui comprend des membres qui ne font pas partie de la fonction publique fédérale. Les principaux secteurs de responsabilités des membres de ce comité sont énoncés comme suit : ils doivent regarder les valeurs et l’éthique, analyser la gestion des risques, établir un cadre de contrôle de la gestion, avoir une fonction de l’audit interne, vérifier les prestations externes des services d’assurance, faire le suivi des plans de la direction, des états financiers et du rapport des comptes publics, et faire rapport sur la reddition de comptes de leurs ministères. Les membres indépendants des comités ministériels d’audit présentent un rapport annuel qui résume les résultats de l’examen que le comité a fait des secteurs de responsabilité, présentent une évaluation indépendante et fournissent des recommandations, au besoin, sur la capacité, l’indépendance et le rendement de la fonction d’audit interne, et présentent entièrement et uniquement les vues des membres indépendants, peu importe l’aide reçue des agents du ministère dans la préparation du rapport.

Je vous remercie de m’avoir invitée à témoigner devant ce comité et je serai heureuse de répondre à vos questions.

Le vice-président : Merci beaucoup, sénatrice Moncion. Nous allons commencer la période des questions.

Le sénateur Massicotte : Je suis ici en remplacement du sénateur Dalphond. J’ai lu brièvement les procès-verbaux des anciennes transcriptions et j’essaie de comprendre. La difficulté lorsque je lis le débat qui dure depuis deux ans c’est qu’on argumente sur la création d’un comité indépendant ou non. Quel est l’objectif? On reconnaît qu’on a un problème réel de conception. Si les dépenses des sénateurs sont approuvées par d’autres sénateurs, cela ne fonctionne pas bien. Il faut trouver une opinion indépendante experte. Qu’est-ce qu’on cherche en particulier? De quel type de dépenses s’agit-il? Certains sont d’avis que la transparence est adéquate pour ce qui est de la publication des dépenses. D’autres disent qu’il faudrait une opinion indépendante et externe pour confirmer que les dépenses sont conformes aux politiques et aux règles mises en place au Sénat. Il y a donc un petit conflit ici. Certains disent qu’il faudrait obtenir l’opinion de personnes indépendantes pour confirmer que l’argent a été bien dépensé, que cela est conforme aux règles, qu’on a fait une révision des règles, qu’on a fait une vérification des dépenses et que cela nous satisfait.

D’après vous, quelle opinion recherche-t-on? Je vois trois options, mais qu’est-ce qu’on va dire? Quelle sera l’opinion des experts?

La sénatrice Moncion : Merci de votre question. Elle est longue, mais j’ai pris des notes.

Quand on parle de l’objectif du comité de l’audit, l’auditeur donne une opinion indépendante de ce qu’il a vérifié, tout comme le fait l’auditeur externe.

Le sénateur Massicotte : Qu’est-ce que l’opinion va dire? Quelle opinion sera exprimée?

La sénatrice Moncion : Cela va dépendre de ce qui est trouvé. Vous aviez une inquiétude en ce qui concerne les règles. L’auditeur indépendant peut donner une opinion sur la validité et la rigueur des règles en place. Si les règles en place sont trop évasives, votre auditeur peut conclure que telle règle peut être interprétée de plusieurs façons. Il y a donc des opinions qui viennent des vérificateurs externes qui font de l’audit interne, qui peuvent venir encadrer davantage le travail de vérification. Qu’est-ce qu’ils vont vérifier? Le mandat de vérification interne serait établi par le comité qui identifierait exactement ce qu’on veut voir auditer.

Le sénateur Massicotte : Je veux m’assurer de bien comprendre. Vous souhaitez que l’expert indépendant confirme qu’il a bien fait la révision des dépenses et qu’elles sont conformes aux politiques, qu’il a fait une révision des politiques et des règles et qu’il confirme qu’elles sont raisonnables et conformes, et qu’il a fait une évaluation sur les valeurs. L’opinion dira que l’auditeur est satisfait et que tout est exact ou, dans le cas contraire, il notera les exceptions. Ai-je bien compris?

La sénatrice Moncion : Au-delà de cela, il y a aussi les vérifications faites sur les différents sénateurs.

Le sénateur Massicotte : Par l’expert indépendant. Vous parlez souvent des dépenses des sénateurs et non des dépenses du Sénat. Donc, l’examen est limité aux dépenses des sénateurs seulement, n’est-ce pas?

La sénatrice Moncion : Pour l’audit interne, oui. On pourrait élargir ce mandat-là. Quand je regarde le travail qui a été fait pour le vingt et unième rapport, c’était en conformité avec ce que le vérificateur général proposait, lui, comme analyse.

Je vais proposer les deux, éventuellement, mais il faut se rappeler qu’il y a aussi le vérificateur externe qui vérifie les états financiers du Sénat et qui s’assure, à la fin de l’année, que les choses sont faites selon les règles de l’art. Donc, lui aussi a un travail à faire dans la vérification des contrôles internes et tout cela. Si on arrive avec un mandat de vérification interne qui est beaucoup plus large, vous pouvez faire vérifier la mise en place des politiques, l’encadrement, les dépenses.

Le sénateur Massicotte : J’essaie de comprendre quel est le mandat que l’on veut confier. J’ai fait des vérifications externes pendant plusieurs années. Le vérificateur externe qui examine les états financiers ne s’intéresse pas du tout au fait que toutes les règles ont été satisfaites. Il remplit son mandat en effectuant les contrôles internes. Son opinion est claire : les états financiers représentent fidèlement les états financiers de l’institution et seulement cela.

Ma deuxième question...

La sénatrice Moncion : Est-ce que je peux répondre à ce petit bout de question? J’aimerais ajouter que l’auditeur externe fera un échantillonnage.

Le sénateur Massicotte : Si on a défini l’opinion qu’on recherche, il faut répondre à la question à savoir s’il a vérifié toutes les dépenses — comme l’ancien vérificateur général — et si l’on est satisfait de l’examen. Est-ce qu’on l’autorise à faire un échantillonnage statistique, qui est une science très bien établie, pour ensuite formuler une opinion? Il ne peut pas dire qu’il a vérifié toutes les dépenses et qu’elles sont toutes conformes. Il peut seulement dire que, selon son échantillonnage statistique, il est à l’aise ou non avec le fait que les dépenses ont été engagées en fonction des règles.

Il ne s’agit pas de vérifier chacune des dépenses, mais plutôt de faire un échantillonnage basé sur une science de probabilités, et de faire en sorte qu’on sera à l’aise avec l’opinion qu’il nous donnera. Est-ce exact?

La sénatrice Moncion : Pas nécessairement. Lorsqu’on établit ce fameux mandat d’audit interne, c’est là où on inscrit les détails, à quel endroit on veut que l’auditeur interne fasse un examen en profondeur.

Si j’examine le travail, je regarde à l’heure actuelle toutes les politiques en place, tous les suivis qui sont faits par les employés qui sont en administration et qui s’occupent des dépenses des sénateurs et toutes les pièces justificatives qu’ils nous demandent, et tout cela. Il y a tout un suivi qui est fait de ce côté, et les employés s’assurent que les dépenses réclamées sont conformes aux politiques. Le vérificateur interne arriverait puis nous, on identifierait sur une période de trois ans...

Le sénateur Massicotte : Mais je l’ai...

La sénatrice Moncion : Vous ne me laissez pas le temps d’exprimer toute ma pensée. Je comprends qu’il y a plusieurs autres idées.

Dans le mandat de vérification interne, vous pourriez demander que toutes les dépenses des sénateurs soient vérifiées sur une période de trois ans. Vous pouvez donner ensuite un échantillon de base, et il y a du travail qui est fait à partir de cet échantillonnage. Lorsque les vérificateurs internes arrivent, ils commencent par avoir une base. Ils vont étudier tant de cas. Si, à l’intérieur de ces cas, ils trouvent des choses non conformes aux politiques, ils vont élargir et augmenter leur échantillon. S’ils en trouvent encore, ils vont élargir à nouveau leur échantillon.

Alors, dire que l’auditeur interne vérifierait toutes les dépenses, ce ne serait pas productif, sauf que c’est un travail qui serait fait de façon indépendante, qui couvrirait une bonne partie des informations, et qui donnerait au public l’assurance raisonnable que ce qui est fait à l’intérieur du Sénat est fait selon les règles de l’art.

Le sénateur Massicotte : La lecture des procès-verbaux me porte à croire que si notre comité pouvait décider de son mandat, de l’opinion qui est recherchée, les réponses seraient très faciles. On pourrait déterminer si on a besoin d’un comité indépendant d’experts pour vérifier chacune des dépenses ou si on peut se fier à un vérificateur externe, ce que je recommande, et si on accepte un échantillonnage statistique. Cela confirmerait exactement l’opinion qu’on recherche.

Ce n’est pas comme au Royaume-Uni ou en Australie, où ils ont mis en place des systèmes totalement indépendants, où la comptabilité doit rendre des comptes directement à eux. C’est lourd. On parle de 3 à 12 millions de dollars de dépenses.

Je pense qu’on devrait accepter un échantillonnage et avoir une opinion plus générique de la part de vérificateurs externes. Parce qu’un vérificateur interne qui rend des comptes à l’interne ne vaut pas grand-chose.

[Traduction]

Le vice-président : Vous vous souviendrez, sénatrice Moncion, que l’audit du vérificateur général sur les dépenses pour une période de deux ans a coûté 28 millions de dollars, car elle portait sur toutes les dépenses des sénateurs, jusqu’aux appels téléphoniques à 0,10 $ ou l’achat d’un timbre de 0,75 $. En fin de compte, cela a coûté 28 millions de dollars aux contribuables. Je me demande si nous pourrions garder à l’esprit, comme le sénateur Massicotte l’a indiqué, le coût de l’intégration de dépenses récurrentes dont le montant total pourrait être bien supérieur au budget total de chaque sénateur. Je pense qu’il y a dans tout cela un élément d’équilibre auquel il faut réfléchir, comme le sénateur Massicotte l’a mentionné. Je pense que vous avez omis de parler des coûts de tout cela. Évidemment, nous voulons nous assurer que tous respectent les politiques et les règles relatives aux dépenses et que nous avons la preuve que les fonds ont été utilisés à bon escient. Toutefois, nous n’atteindrons pas notre objectif si nous allons trop loin. Je pense que les explications du sénateur Massicotte portaient justement sur cet important élément et sur ses répercussions.

La sénatrice Moncion : Je suis tout à fait d’accord avec vous là-dessus. Lorsque je parlais de recourir à un vérificateur indépendant pour les vérifications internes, cela a un coût, mais il ne s’élèvera pas à 28 millions de dollars. On ne dépensera pas autant d’argent pour un budget de moins de 110 millions de dollars. Donc, les coûts d’une vérification interne menée par un vérificateur de l’extérieur ne s’élèveront pas à 28 ou 29 millions de dollars; ce sera beaucoup moins. Ce groupe aura un mandat clair, avec un budget établi en conséquence. Donc, c’est en effet une question d’équilibre.

J’ajouterai que si la vérification interne est menée par un tiers indépendant que le vérificateur général n’aura aucune raison de revenir au Sénat pour faire une vérification comme celle qu’il a faite en 2013.

La sénatrice Seidman : Merci beaucoup de votre exposé, sénatrice Moncion.

J’aimerais poursuivre la discussion dans cette veine, pour donner suite à la question du sénateur Massicotte et au point soulevé par le sénateur Joyal, même si j’ai aussi deux ou trois autres questions.

À mon avis, je pense qu’initialement, personne ne s’attendait à ce que l’étude du vérificateur général coûte 28 millions de dollars. Nous n’avions jamais imaginé cela. En outre, en toute connaissance de l’histoire de cette affaire, des sensibilités et des problèmes de transparence entourant les dépenses du Sénat, il n’en demeure pas moins que le sous-comité indique ce qui suit dans ses recommandations :

Que, à la suite de la création du Comité permanent de l’audit et de la surveillance, les ressources adéquates soient allouées à une fonction d’audit interne;

Toutefois, comment détermine-t-on ce qui constitue des ressources adéquates, et qui est chargé de cette détermination? C’est ma première question. Il est à espérer que l’affectation des ressources serait faite de façon responsable et que les dépenses ne seraient pas disproportionnées.

Lorsque le vérificateur général a présenté rapport que nous n’avions pas tout ce que nous avons actuellement, c’est-à-dire la publication en ligne de rapports trimestriels sur les dépenses de tous les sénateurs, que tout le monde puisse faire un suivi de nos dépenses. En passant, cela représente seulement 4,8 p. 100 du budget total du Sénat. Cela m’amène à ma prochaine question : pourquoi cette fonction d’audit n’inclurait-elle pas la surveillance de toutes les dépenses du Sénat, notamment pour les comités et tout le reste? Quelqu’un à poser des questions sur les dépenses des comités; j’aimerais donc comprendre pourquoi on ne recommande pas d’inclure toutes les dépenses du Sénat.

J’ai une troisième question. Dans vos observations sur un vérificateur externe, je crois avoir compris — je me trompe peut-être, mais vous pourriez donner d’autres explications — que le vérificateur externe... Cette personne aurait-elle davantage intérêt à se protéger et à protéger sa responsabilité personnelle dans le cadre de son travail?

La sénatrice Moncion : Je vous remercie des questions.

Pour ce qui est de la première question sur la fonction d’audit interne, l’affectation responsable des ressources et l’aspect disproportionné des dépenses, il faut savoir qu’avec une telle fonction, une personne sera au Sénat pour faire ce travail. Cette personne ne sera pas isolée; elle travaillera avec d’autres et fera partie du personnel, même si elle aura un travail précis à faire. La question de l’indépendance peut poser problème lorsque la personne chargée de l’audit interne est aussi membre du personnel, même si elle a des responsabilités précises.

Il y a un coût salarial associé à cette fonction, sans compter les congés de maladie et tous les autres avantages d’un poste de ce genre.

On recommande d’avoir recours à une personne de l’extérieur pour que ce travail soit fait par des gens qui ont la formation et les qualifications requises pour mener des audits internes. Il va sans dire qu’une vérification interne entraîne des coûts. Il faut alors chercher à en avoir pour son argent : en quoi consistera le travail, et combien cela coûtera-t-il?

Le coût d’une vérification externe pour le Sénat est de moins de 30 000 $. Quant à un audit interne, j’estime que cela pourrait représenter moins de 75 000 $ par année, ce qui pourrait être beaucoup. Cela dépend. Encore là, cela dépendrait de la portée voulue pour l’audit interne.

Voilà pour votre première question.

Concernant la deuxième question, la surveillance de l’ensemble des dépenses du Sénat, les salaires représentent 70 p. 100 du budget du Sénat. Cet aspect fait donc déjà l’objet d’une surveillance. Les dépenses du Sénat représentent 30 p. 100 du budget. Les dépenses des sénateurs s’élèvent à environ 4,8 millions de dollars, donc près de 5 millions. Lorsqu’on regarde la portée et les coûts associés seulement pour cet aspect, on ne peut se limiter à ce montant de 4,8 millions de dollars. C’est beaucoup d’argent, mais c’est peu par rapport à la taille totale du budget.

Examiner les dépenses de l’ensemble des comités ne pose pas problème. On a qu’à ajouter cela au mandat du vérificateur externe chargé de l’audit interne. Cela ne coûterait pas très cher et, en fin de compte, on aurait le même échantillonnage et les mêmes conclusions.

En ce qui concerne la responsabilité personnelle, il faut savoir que dans le cadre de son travail, le vérificateur externe met sa réputation en jeu. Cette réputation a une valeur, et s’il travaille pour le Sénat, il y a aussi la réputation et l’assurance associées aux opinions qu’il offre. En outre, il peut être tenu responsable s’il fournit des informations fausses ou incorrectes.

La sénatrice Seidman : Sur ce dernier point, ma préoccupation est de savoir s’il n’y aurait pas un conflit d’intérêts dans le fait que le vérificateur externe se préoccupe de sa responsabilité personnelle et fait le travail avec une compréhension et une attention considérable pour le rôle du Sénat et celui des sénateurs. À mon avis, il pourrait y avoir là un conflit d’intérêts potentiel pour ce rôle précis, en particulier pour un vérificateur externe.

La sénatrice Moncion : Je dois mentionner qu’on ferait appel à deux groupes distincts pour la vérification des états financiers et pour les audits internes. Les vérificateurs externes ne viendraient pas de la même société. C’est le premier aspect.

Lorsque nous recevons des informations des vérificateurs, ils fournissent un avis indépendant, et c’est très important. C’est la première chose qu’ils font lorsqu’ils communiquent avec nous. Donc, le problème d’un conflit d’intérêts ne se pose pas, à moins qu’ils aient un lien quelconque avec un sénateur, notamment s’ils font partie de sa famille. Voilà comment il pourrait y avoir conflit d’intérêts.

J’ai de la difficulté à voir comment il pourrait y avoir un conflit d’intérêts avec une firme externe indépendante chargée de faire des audits internes ou externes.

La sénatrice Seidman : Je pense que certains arguments qui ont été soulevés pendant la préparation du rapport du vérificateur général et après laissaient entendre qu’il ne comprenait pas clairement le rôle des sénateurs. Par conséquent, il pourrait avoir mal compris ou mal interprété certaines dépenses des sénateurs, par exemple les dépenses engagées dans leur région respective. Ce qui me préoccupe, c’est qu’une telle situation pourrait se reproduire avec un vérificateur externe, alors que ces gens pourraient s’inquiéter de leur responsabilité personnelle en cas de mauvaise interprétation du rôle d’un sénateur.

La sénatrice Moncion : Encore une fois, je n’y vois pas de conflit d’intérêts. Je constate toutefois qu’il peut y avoir des interrogations quant à la clarté ou non des différentes règles, politiques et procédures en place. La plupart des opinions relatives à l’examen des dépenses seraient fondées sur la clarté ou l’ambiguïté des règles, des politiques et des procédures qui sont en place.

La sénatrice Seidman : Notre travail est manifestement de nature politique; on pourrait dire que la politique peut toujours être un facteur. Au bout du compte, comment pouvez-vous en tenir compte dans le cas d’un vérificateur externe?

La sénatrice Moncion : Encore une fois, lorsque le vérificateur externe viendra faire un audit interne, il examinera ces aspects, puis il pourrait formuler des commentaires ou des recommandations en fonction de ces constatations. S’il constate qu’une chose n’est pas claire, il recommandera d’apporter des précisions. Donc, dans ce contexte, cela serait ou pourrait être clarifié. Nous pourrions aussi constater que cela ne fonctionnera pas et qu’il faut clarifier les règles pour qu’on n’ait plus à faire cette recommandation. Il s’agit d’y donner suite. Il ne faut pas cacher le problème, mais le régler.

Le sénateur Sinclair : Je veux remercier la sénatrice Seidman d’avoir soulevé la question des conflits d’intérêts. Je comprends le point maintenant, mais il me semble clairement y avoir également un conflit d’intérêts bien réel en demandant à des sénateurs de procéder à une vérification d’autres sénateurs, et cela m’inquiète également. J’essaie de penser à un équilibre entre le fait d’avoir des vérificateurs externes, qui ne connaissent pas le fonctionnement du Sénat, et le fait d’avoir des sénateurs qui se réunissent pour discuter à huis clos et prendre des décisions en cachette qui pourraient être injustes pour d’autres sénateurs.

Et pour cause, quand on pense au processus de vérification qui a eu lieu au Sénat en 2013 et par la suite, je suis stupéfait de voir qu’à partir exactement des mêmes faits, le vérificateur général et le juge Binnie soient arrivés à des conclusions différentes, de même que le juge du procès dans l’affaire Duffy . Ils se sont penchés, dans certains cas, sur les mêmes dépenses. Je me demande comment on peut arriver à un équilibre dans cela. Le Sénat devrait-il publier des règles de clarification ou des règles d’interprétation que les vérificateurs doivent suivre lorsqu’ils examinent les dépenses des sénateurs?

La sénatrice Moncion : Vous avez mentionné tout d’abord que les vérificateurs externes ne connaissent pas le fonctionnement du Sénat. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous sur ce point, car lorsqu’ils effectuent des vérifications externes, ils examinent les chiffres. Ils examinent les dépenses. Ils comparent les dépenses…

[Français]

Un vérificateur externe fait une vérification en fonction des règles en place. Vous avez parlé du juge qui avait fait son interprétation. Si je me souviens bien, le juge a mentionné que les règles du Sénat n’étaient pas claires et qu’elles avaient besoin d’être clarifiées. Le vérificateur externe examine les règles en place et s’assure que les dépenses ont été établies en fonction de ces règles. Même si les règles ne sont pas claires, le vérificateur externe doit se baser sur celles-ci pour faire sa vérification. C’est là qu’on doit faire la différence entre le travail du juge et celui du vérificateur externe par rapport à ces fameuses règles.

Dans le cas où les règles ne sont pas claires, notre rôle, au Sénat, est de les clarifier et d’avoir un encadrement plus facile à suivre, de sorte que cet encadrement puisse être interprété de la même façon par un juge, par un vérificateur ou par un sénateur qui utilise les règles.

Je ne sais pas si j’ai répondu à votre question. Selon moi, plus les règles sont claires, plus elles sont facilement interprétées de la même façon par tout le monde. Dans le cas précédent, je crois que les règles n’étaient pas claires et pouvaient être interprétées de différentes façons. Elles ont d’ailleurs été interprétées d’une autre façon également par les journalistes.

[Traduction]

Le sénateur Sinclair : En tant que juge de procès, je peux vous assurer que toutes les règles sont sujettes à interprétation. Il est très rare d’avoir des règles qui sont si limpides que personne ne peut contester leur signification.

Ce qui m’inquiète, ce sont vraiment les commentaires du juge au procès dans l’affaire Duffy qui a mentionné que les règles avaient assurément besoin d’être clarifiées. Il a également mentionné que les règles mêmes en étaient venues à être interprétées par les sénateurs d’une certaine façon, si bien que les pratiques avaient évolué et qu’il semblait y avoir un consensus entre les sénateurs qu’on pouvait faire certaines choses, ou que certaines choses pouvaient être approuvées ou faites d’une certaine façon, et que ces pratiques devaient être réexaminées, parce qu’elles constituaient le fondement de sa décision. Il a ajouté qu’il pouvait sembler, de prime abord, qu’on n’avait pas respecté les règles, mais qu’en raison de la pratique au Sénat voulant que certaines dépenses soient autorisées, l’accusé avait le droit dans ce cas de faire ce qu’il a fait.

Quand on parle des dépenses des sénateurs, dans quelle mesure les vérificateurs se penchent-ils sur les règles de conduite, sur les pratiques des personnes concernées? Si les sénateurs conviennent en général qu’une telle dépense respecte les règles, même si, de prime abord, ce n’est peut-être pas le cas, que font les vérificateurs dans ce genre de situation?

La sénatrice Moncion : Je dirais qu’un vérificateur recommanderait alors au Sénat de clarifier les règles. C’est ce qu’il ferait. Maintenant, est-ce qu’il le ferait? C’est une autre question en soi. Cependant, lorsque les vérificateurs examinent les règles, qu’ils interprètent les règles, et qu’ils font leur vérification, ils parlent au personnel. Ils ne parlent pas aux sénateurs à moins que la vérification soit faite dans le but express d’avoir leur point de vue. Toutefois, quand ils le font, ils ne sont pas sur place, et ils ne devraient pas savoir par qui ont été faites les dépenses.

C’est l’autre aspect de l’indépendance qui devrait être associé à leur travail. S’ils doivent vérifier les dépenses de 30 sénateurs, on ne devrait pas mentionner qu’il s’agit des dépenses de la sénatrice Moncion, mais plutôt des dépenses du sénateur no 1 ou du sénateur no 35. On devrait leur dire : « Voici les dépenses à examiner. » Il faut que les choses soient faites de manière indépendante. En examinant l’échantillonnage, ils peuvent aussi constater des habitudes ou des façons de faire dans les dépenses. Ils peuvent déceler des pratiques qui leur semblent bizarres, ou des pratiques qui ne sont pas exemplaires, et ils recommanderaient alors une pratique exemplaire.

Le sénateur Gold : Je comprends les préoccupations au sujet des connaissances des vérificateurs externes sur nos pratiques et notre culture. Je penche du côté de l’indépendance, et c’est pour des raisons de transparence.

Je veux poser une question qui porte sur une analogie avec une autre étude de notre comité. Elle a un lien avec la question que le sénateur Sinclair a posée un peu plus tôt. Le Sénat pourrait émettre des documents ou des règles d’interprétation disant : « Voici les tâches d’un sénateur et voici les dépenses qui y sont associées. » Ce ne sont pas des règles, c’est notre interprétation des règles. Cela aiderait les Canadiens à comprendre la façon dont nous nous percevons, et cela aiderait les sénateurs à savoir s’ils respectent bel et bien nos propres pratiques exemplaires. Un vérificateur considérerait-il cela comme une interprétation interne, non législative, de la politique? Cela l’aiderait-il à mieux comprendre comment nous percevons nos rôles et ce que nous considérons comme des dépenses légitimes de fonds publics? Comblerait-on ainsi le vide relatif à « l’ignorance » qu’a un vérificateur externe des pratiques et de la culture particulières du Sénat? Le vérificateur le ferait-il? Est-ce que cela nous serait utile?

[Français]

La sénatrice Moncion : La chose qu’il faut peut-être examiner dans le rôle d’un vérificateur externe, c’est qu’il a le mandat de regarder des chiffres et de donner une opinion sur la qualité des états financiers qui sont présentés. Il doit les interpréter en fonction des règles qui sont en place.

Le rôle d’un sénateur est quand même écrit quelque part. Nous avons des règles par rapport aux activités auxquelles on peut participer ou non, et aux responsabilités qui nous incombent. Alors, ce sont des choses qui sont connues. Toutefois, ils ne connaîtront peut-être pas exactement tout ce que nous faisons en tant que sénateurs, mais ils peuvent examiner les règles tout en essayant de les interpréter le moins possible pour toujours avoir une opinion appuyée par des règles écrites et mises en place.

Le sénateur Gold : Cependant, la question qu’il faut se poser est la suivante : en interprétant les règles, est-ce qu’un vérificateur prendrait en considération un document d’interprétation ou uniquement les règles comme telles?

La sénatrice Moncion : Je ne suis pas auditeur. Je ne l’ai jamais été. C’est probablement un auditeur qui pourrait répondre à cette question. Il y a l’aspect des chiffres et l’aspect du gros bon sens. Je ne sais pas quelle valeur on peut donner à une analyse qui est faite par un vérificateur externe. Celui-ci doit jeter un regard externe sur ce qui se fait au Sénat en comptabilité. En tant que sénateurs, tout ce que nous faisons c’est de présenter des dépenses. Nous ne faisons pas la comptabilité du Sénat. Ce n’est pas nous qui faisons les chèques ou qui déposons l’argent. C’est tout le travail qui se fait au sein de l’administration du Sénat. Il faut comprendre comment on dépense l’argent en fonction des règles en place.

Il y a toute la question de la répartition des tâches. Cela m’amène à vous parler du travail du comité d’audit. Si le comité s’occupe spécifiquement d’examiner les dépenses des sénateurs, il a les mains dans le travail. On doit être là, « nose in », mais on ne touche pas à cela, « fingers out », parce qu’on ne doit pas manipuler les états financiers.

En tout le temps, lorsque j’étais présidente et chef de la direction dans une institution financière, je n’avais aucun mot de passe pour accéder au système informatique. Je ne touchais aucunement au système bancaire parce que je voulais rester complètement à l’extérieur et être blanchie s’il y avait un problème. Par contre, je faisais des vérifications, mais je ne pouvais intégrer aucune transaction. Je ne pouvais faire aucun chèque. C’était totalement indépendant de mes responsabilités. Je vois mon rôle de sénatrice de la même façon où je dois m’assurer que les choses sont bien faites, mais que je n’ai pas les mains en train de faire l’exercice.

C’est là où je vois le problème des sénateurs qui regardent le travail d’autres sénateurs. Non seulement on a le nez dedans, mais on a aussi les doigts dans la paperasse pour voir ce qui se passe alors que notre rôle devrait être beaucoup plus un rôle de surveillance que de participer activement à cette tâche-là.

Cela ne nous dégage pas de la responsabilité de nous assurer que le travail est bien fait sur le plan de la comptabilité, que tout est fait selon les règles de l’art. Nous avons cette responsabilité de vérifier le travail. Si le travail de comptabilité est mal fait, nous en assumerons la responsabilité en tant que personnes publiques. C’est nous qu’on va salir et non les employés qui auront peut-être mal fait leur travail. Parce que les gens qui travaillent à l’administration du Sénat font un excellent travail.

[Traduction]

Le sénateur Massicotte : Si je peux répondre à la question du sénateur Sinclair : si vous vous souvenez bien, le sénateur Joyal a participé très activement à la vérification externe, celle du vérificateur général. Le rôle des sénateurs était mal compris. La controverse découlait en grande partie du fait qu’on n’était pas conscient du rôle que jouent les sénateurs dans la communauté — pas seulement pour représenter la communauté ici, mais vice versa. C’est pourquoi le Sénat est saisi d’un document qui définit sa mission et qu’il doit approuver. C’est un document important, parce que sa mission sera alors claire pour tous. Le troisième paragraphe a été rédigé par le sénateur Joyal et précise clairement que les dépenses liées à notre rôle de représentation au sein de la communauté sont aussi des dépenses admissibles. Je pense qu’il est important de clarifier ce point.

Pour ce qui est du Règlement, depuis que le jugement a été rendu à l’été il y a deux ans, environ 12 d’entre nous ont passé deux ou trois mois à revoir le Règlement de fond en comble, afin de régler le problème du manque de clarté. Je pense que nous avons fait un excellent travail. Ce n’est jamais parfait. Le Règlement contient maintenant des exemples et des points de clarification. Je pense qu’on a beaucoup fait pour clarifier les règles, en donnant des exemples, en précisant ce qui se veut une dépense appropriée.

La sénatrice Batters : Merci beaucoup d’être avec nous, sénatrice Moncion. Vous avez été nommée au Sénat à la fin de 2016, n’est-ce pas?

La sénatrice Moncion : Oui.

La sénatrice Batters : Comme l’a mentionné le sénateur Joyal un peu plus tôt, certains d’entre nous ici aujourd’hui ont passé par tout le processus de vérification du vérificateur général...

La sénatrice Moncion : Je suis heureuse de ne pas avoir été là.

La sénatrice Batters : Oui, parce que je peux vous dire que le vérificateur général a tout passé au peigne fin. J’ai trouvé intéressant de vous entendre dire, lorsque vous parliez avec le sénateur Sinclair, que selon vous, la bonne façon de procéder pour un vérificateur qui s’occuperait d’un dossier de ce genre, est de le faire presque à l’aveugle, de ne pas savoir de qui il s’agit ni de quelles dépenses. Ce n’est assurément pas l’approche adoptée par le vérificateur général. Ses hauts fonctionnaires et lui ont rencontré tous les sénateurs, un à un, de même que leur personnel. Que pensez-vous de cette façon de faire, à la suite de ce que vous avez dit?

La sénatrice Moncion : Son rôle était très différent de celui d’un vérificateur externe. Il était nommé par le gouvernement pour faire ce travail.

La sénatrice Batters : En fait, il l’a été par le Sénat. C’est le Sénat qui l’a invité.

La sénatrice Moncion : Je pense que c’est une bonne chose que cela ait été le choix du Sénat de vouloir que ce travail soit fait.

Les rôles sont très différents.

La sénatrice Batters : Les vérificateurs, au moment de leur vérification — les vérificateurs externes dont nous parlons — devraient-ils savoir à quel groupe parlementaire ou à quel caucus le sénateur appartient? Est-ce que ce serait approprié qu’ils aient cette information?

La sénatrice Moncion : Cela ne devrait pas être pertinent à leur travail, à moins qu’il y ait un problème. Nous fournissons habituellement le nom des gens, mais cela pourrait se faire de façon totalement indépendante. La vérification ne devrait pas être faite parce que le sénateur est libéral ou conservateur ou indépendant. La vérification devrait porter sur les chiffres et les dépenses. On évite ainsi les préjugés personnels au cours d’une vérification. Je ne suis pas certaine que les vérificateurs aient des préjugés personnels en faisant une vérification. Cela ne devrait pas être le cas, et c’est ce qu’ils déclarent lorsqu’on commence à travailler avec eux.

La sénatrice Batters : C’est exact. Dans le rapport du vérificateur général, une bonne partie — environ la moitié des dépenses des sénateurs qui avaient été jugées inadmissibles au départ — ont été par la suite jugées admissibles, selon le juge Binnie, qui les a scrutées en détail. Je dirais donc que les vérificateurs ne se contentent pas de regarder les chiffres, comme vous l’avez mentionné au sénateur Sinclair, mais qu’ils examinent en fait si les dépenses respectent les règles, et la compréhension qu’ils ont des règles peut avoir une incidence importante à cet égard. Êtes-vous d’accord avec cette idée?

La sénatrice Moncion : Je suis d’accord. Toutefois, comme je l’ai mentionné un peu plus tôt, je pense que le Règlement a été vraiment clarifié après la publication du rapport du vérificateur général, et je pense qu’il est plus restrictif. Je trouve que le cadre que nous avons actuellement est très pratique. Nous pouvons de plus confirmer presque chacune de nos dépenses, parce que le Règlement est plus clair.

La sénatrice Batters : Bon nombre d’entre nous trouvaient que le Règlement était très clair avant, mais nous allons sans doute nous entendre pour ne pas être d’accord.

Au cours des dernières années, les sénateurs ont travaillé d’arrache-pied pour améliorer la transparence et la responsabilisation, en particulier après la publication du rapport du vérificateur général, et pendant la période qui l’a précédée. Depuis un certain temps déjà, les sénateurs affichent en ligne tous leurs frais de déplacement et d’hébergement. Les membres du caucus conservateur le font, en fait, depuis quatre ans. De plus, dernièrement, le site web du Sénat a été complètement remanié de façon à ce que la population puisse avoir l’information selon qu’il s’agit de déplacement, d’hébergement ou de contrat. Toute cette information est publiée en ligne pour que les gens puissent en prendre connaissance, et ce, pour chacun des sénateurs. Trouvez-vous que cette mesure importante pour accroître la transparence et la responsabilisation apporte une grande clarté aux dépenses des sénateurs?

La sénatrice Moncion : Tout à fait. Lorsque j’ai pris connaissance du vingt et unième rapport la première fois et qu’on parlait d’avoir un comité de vérification indépendant du Comité de la régie interne, j’étais contre cette idée parce que je me disais que nous fournissions déjà toute l’information. Avec le recul, car on règle toujours les problèmes passés et non futurs, en raison de la situation et du manque de crédibilité du Sénat, je ne vois plus de problèmes maintenant que l’on diffuse l’information et que l’on aille au-delà pour accroître la transparence aux yeux du public. Toutefois, cela m’a pris un bon moment pour en arriver là.

La sénatrice Batters : Vous avez dit tout à l’heure que vous pensiez que certaines règles avaient été clarifiées après la publication du rapport du vérificateur général, ou que des améliorations avaient été apportées depuis. Croyez-vous, en conséquence, que certaines recommandations formulées dans cette partie en particulier du rapport ne sont plus aussi nécessaires qu’elles l’étaient à l’époque de la publication du rapport?

La sénatrice Moncion : Encore une fois, je n’étais pas là à l’époque. J’ai lu le rapport, et je pense — si je me souviens bien — que l’un des problèmes était lié à la résidence principale d’un sénateur et à l’endroit où il passait le plus clair de son temps. Donc, sa résidence principale pouvait se trouver dans une province, mais sans qu’il y aille très souvent. C’était l’un des problèmes liés aux dépenses réclamées, soit que le sénateur vivait plus souvent dans une ville que chez lui. Le problème concernait de nombreux sénateurs. Il a fallu bien expliquer les choses. C’est là où le laxisme s’est produit, sur la façon de comprendre comment les choses fonctionnaient.

Pour revenir à votre question, l’information a fait évoluer le dossier. Nous avons mis en place des règles qui sont bonnes aujourd’hui, qui sont faciles à suivre et à expliquer. Les commentaires ont sans doute amené les explications, car le rapport du vérificateur général a fait en sorte que tous les sénateurs se sont retrouvés sur le banc des accusés, sans qu’il y ait vraiment d’explications fournies. Il faut alors commencer à dire pourquoi.

[Français]

C’est à ce moment-là que vous aviez l’air d’avoir fait quelque chose qui n’était pas correct. Or, ce n’était pas le cas. Toutefois, depuis ce temps, on a mis en place des règles pour encadrer tous ces dérapages possibles.

[Traduction]

La sénatrice Batters : Malheureusement, beaucoup de gens dans la population n’ont pas dépassé le stade malheureux de la fausse perception de culpabilité…

La sénatrice Moncion : Je suis entièrement d’accord avec vous.

La sénatrice Batters : ... alors que dans les faits, certains ont été totalement blanchis des accusations, à la suite d’un examen plus minutieux.

Dans vos activités professionnelles passées, avant d’être nommée sénatrice, aviez-vous déjà travaillé avec le vérificateur général du Canada au sein de l’un des organismes pour qui vous avez travaillé?

La sénatrice Moncion : Non.

La sénatrice Batters : Merci.

Le vice-président : Sénatrice, avant de passer à la deuxième série de questions, j’aimerais vous entendre sur certaines propositions.

Dans le Code régissant les conflits d’intérêts, il y a une disposition qui permet au conseiller sénatorial en éthique de demander au Comité permanent sur l’éthique une directive sur l’interprétation d’une règle. Bien sûr, le comité peut se réunir pour déterminer quelle devrait être la bonne façon d’interpréter une règle, afin que le conseiller sénatorial en éthique soit mieux à même de remplir ses fonctions.

Croyez-vous que cela pourrait être une façon pour le comité de vérification de demander, par exemple au CIBA, le Comité de la régie interne, une interprétation des règles, de demander une directive au CIBA sur l’interprétation des règles? On éviterait ainsi de se trouver dans la situation où le comité de vérification aurait un point de vue, alors que le Comité de la régie interne en aurait un autre, et où il y a une divergence entre les attentes et la pratique au quotidien, comme vous le dites, de l’administration.

C’est déjà prévu dans le Code régissant les conflits d’intérêts, et je peux vous assurer que cela fonctionne. Il est arrivé, je dirais — je vais fouiller dans ma mémoire pour éviter de sortir des chiffres qui ne sont pas exacts —, à cinq ou six reprises que le conseiller sénatorial en éthique demande au comité une directive sur l’interprétation.

Il me semble que cela pourrait éviter qu’il y ait divergence entre l’interprétation du comité de vérification et la pratique au quotidien — la perception qu’on a des règles et le contexte dans lequel elles ont été adoptées. Comme l’a mentionné le sénateur Sinclair, l’intention du Parlement au moment de l’adoption n’est pas toujours claire. Les tribunaux examinent habituellement les débats qui ont eu lieu au Parlement, les témoignages, les propos des experts et des témoins, afin de circonscrire l’intention du Parlement. Croyez-vous que cela pourrait être une façon pour le comité de vérification de régler le problème qui a été soulevé par la sénatrice Seidman et d’autres sénateurs autour de la table?

Le sénateur Sinclair : Si je peux me permettre, vous pourriez vouloir rectifier quelque chose, sénateur. Le conseiller sénatorial en éthique ne demande pas au Comité sur l’éthique une interprétation du Règlement. Si j’ai bien compris, le conseiller sénatorial en éthique a le droit de demander au Comité sur l’éthique une interprétation du code de conduite du Sénat. Une petite précision pour qu’il n’y ait pas d’erreur.

La sénatrice Moncion : C’est la question que j’allais poser.

[Français]

Pour ce qui est des conflits d’intérêts, les dépenses des sénateurs font-elles partie du Code régissant les conflits d’intérêts?

[Traduction]

Le vice-président : Non, ce n’est pas ma question.

[Français]

La sénatrice Moncion : Vous parlez de l’interprétation des règles. Le commissaire pourrait interpréter ces règles. Toutefois, le fait de ne pas suivre les règles en ce qui a trait aux dépenses, est-ce une question de conflit d’intérêts ou de non-respect des règles? Cette question relève-t-elle du code d’éthique parce qu’un sénateur ne suit pas les règles?

[Traduction]

Le vice-président : Elle pourrait, dans certaines circonstances, mais comme vous le savez, normalement les dépenses relèvent du Comité de la régie interne. C’est à lui qu’il revient de déterminer si une dépense a été engagée sans justification adéquate ou à l’encontre du Règlement et la sanction qui pourrait y être associée. Je ne pense pas que dans le règlement administratif de la régie interne, on prévoit des sanctions très précises. Le sénateur en question pourrait être prié de rembourser, par exemple, et d’instaurer un meilleur système de surveillance dans son bureau, quelque chose du genre. Cependant, le règlement administratif ne contient pas d’« infraction » pour laquelle il existe une sanction précise si un sénateur présente des lacunes côté dépenses, à moins qu’il y ait des éléments qui justifient une allégation d’inconduite, ce que le conseiller sénatorial en éthique pourrait ensuite examiner.

Ce n’est pas précisément ma question, comme vous le savez. C’était principalement de combler l’écart entre la responsabilité du comité de vérification d’interpréter le règlement et la façon dont il devrait être interprété. Qui déterminerait qui a raison au bout du compte? Voilà pourquoi j’estime que si le comité de la vérification a un doute concernant l’interprétation de la portée d’un règlement, il devrait demander au Comité de la régie interne, des budgets et de l’administration de lui donner une directive à cet égard. En gros, je propose qu’on essaie de trouver une façon de gérer la situation que les sénateurs autour de la table ont cernée.

La sénatrice Moncion : C’est possible et il faudrait que les membres de votre comité en discutent pour formuler cette recommandation.

Le vice-président : Merci.

Mon autre question se rapporte à un des exemples que vous avez mentionnés dans votre présentation. Vous avez donné l’exemple de Terre-Neuve et celui du Royaume-Uni. Pourriez-vous donner des détails sur la situation au Royaume-Uni et la façon dont on la gère? Je crois comprendre que dans ce cas, la majorité des membres du comité de vérification sont députés et que deux des membres, je pense, sont de l’extérieur. Ces membres sont-ils visés par le privilège parlementaire? Et comment concilier le fait que vous avez des députés ou des lords qui sont visés par le privilège et des membres externes qui pourraient ne pas l’être, parce que ce ne sont pas des parlementaires?

La sénatrice Moncion : Dans mon étude, je n’ai pas examiné le modèle du Royaume-Uni aussi en détail. Je sais qu’il y a deux membres internes et deux membres externes, et qu’on demande à ces personnes d’être complètement indépendantes de la Chambre des lords. Je n’ai pas poussé mon étude plus loin.

Le vice-président : Je pense que nous pourrions peut-être demander à la Bibliothèque du Parlement de se pencher sur la question puisque c’en est une qui est importante. Si nous envisagions ce modèle, nous devrions comprendre ce qu’il implique au chapitre de l’exercice du privilège parlementaire. Nous jouissons des mêmes privilèges qu’au Parlement de Westminster et nous aimerions certainement nous pencher sur cette question précise. N’importe quel sénateur désireux de connaître les implications de l’exercice du privilège parlementaire en ce qui concerne le privilège d’exercer une surveillance de nos propres affaires pourrait nous poser la question. J’aimerais que la Bibliothèque du Parlement nous fournisse des renseignements à cet égard.

La sénatrice Moncion : Le dénominateur commun pour le Royaume-Uni, l’Australie, Terre-Neuve-et-Labrador et le Sénat se rapportait aux dépenses et aux façons d’instaurer un système pour assurer une meilleure surveillance. Au bout du compte, je pense que ces modèles sont relativement nouveaux, sauf peut-être celui de Terre-Neuve-et-Labrador, mais qu’on y travaille, et on verra comment les choses fonctionnent au fil du temps. Le dénominateur commun était les dépenses et peut-être le manque de reddition de comptes y étant associé.

Le sénateur Massicotte : En gros, vous recommandez que le but de cet exercice soit de dire aux Canadiens que l’argent est dépensé judicieusement. C’est l’objectif. J’ai bien compris. Vous avez utilisé les termes « vérificateur externe » et « vérificateur interne ». Selon ma définition, un vérificateur interne est un employé de l’organisme. C’est la même chose ailleurs dans le monde. Un vérificateur externe est un vérificateur qui ne travaille pas au sein de l’organisme. Vous employez les mots « vérificateur interne » parce que, dans votre esprit, vous avez une certaine définition de ce en quoi devrait consister leur mandat. Ils suivront le mandat, quel qu’il soit. Ils sont payés un certain montant. Vous leur dites ce que vous voulez, et ils vous formuleront une opinion en fonction de cela. Le prix variera selon ce que vous voulez, si bien que le mandat est la question principale. Vous dites que nous ne devrions pas faire appel à des vérificateurs externes — au sens où je l’entends — pour vérifier les dépenses et formuler une opinion à un comité qui compte une majorité de membres externes indépendants. C’est bien cela?

La sénatrice Moncion : Pour clarifier un point ou deux, les vérificateurs externes se spécialisent dans les audits internes.

[Français]

Des formations en comptabilité sont offertes en matière d’audits internes avec des gens spécialisés dans ce domaine. Ces personnes ont la désignation d’auditeurs internes. Elles travaillent pour des firmes qui font de l’audit externe, mais aussi de l’audit interne. Lorsque ces firmes d’audit externe envoient une personne faire un audit interne, celle-ci a les compétences et les qualifications académiques et professionnelles pour faire ce travail.

Le sénateur Massicotte : Je ne veux pas rentrer dans le débat à propos du mandat. Je ne suis pas convaincu que le travail de vérification interne est nécessaire pour développer l’opinion recherchée. C’est à quelqu’un d’autre de décider. Effectivement, le comité est majoritairement indépendant. Le vérificateur est aussi indépendant.

La sénatrice Moncion : Oui.

Le sénateur Massicotte : Le vérificateur, qu’il soit externe ou autre, est indépendant et doit rendre des comptes directement au comité.

La sénatrice Moncion : C’est cela.

Le sénateur Massicotte : La vérification est faite après les faits.

La sénatrice Moncion : Tout le temps.

Le sénateur Massicotte : Contrairement au Royaume-Uni ou en Australie, les dépenses sont approuvées avant qu’elles ne soient engagées. Ici, c’est typiquement après les faits.

La sénatrice Moncion : Oui. À l’heure actuelle, toutes nos dépenses sont approuvées par les employés qui sont...

Le sénateur Massicotte : La vérification est faite à l’extérieur.

La sénatrice Moncion : Tout le temps.

Le sénateur Massicotte : Un employé à l’interne ne vaut pas grand-chose s’il rend des comptes à quelqu’un à l’interne?

La sénatrice Moncion : Oui, si c’est un employé à l’interne qui rend des comptes à un comité interne. Son travail a une valeur parce qu’il a quand même son intégrité à titre d’employé, mais l’opinion publique ne sera pas la même si c’est fait de façon complètement externe. Lorsqu’il y a une opinion externe sur nos états financiers, les gens contestent rarement cette opinion et ce serait la même chose avec un auditeur externe qui fait un audit interne.

Le sénateur Massicotte : Je ne suis pas convaincu que la vérification interne répond au mandat qu’on recherche d’un expert qui veille à éviter tout dérapage des dépenses et ainsi de suite. Pourquoi aurait-on un besoin d’un comité de vérification et de surveillance? On crée un comité avec des gens de l’extérieur pour donner seulement un mandat parce que la crédibilité c’est l’expert indépendant, c’est son opinion qui compte. Parce que l’opinion du comité compte beaucoup moins. Pourquoi faudrait-il créer un tel comité? Pourquoi ne pas confier ce mandat seulement au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration? C’est clair. Tout le monde y participe. Le Sénat approuve le mandat. Pourquoi alourdir la bureaucratie?

La sénatrice Moncion : Pour empêcher que certaines recommandations qui figurent dans un rapport d’audit externe soient retirées. Cela donne l’assurance que le travail n’a pas été manipulé parce que ce sont des gens de l’externe qui feront ce travail.

Le sénateur Massicotte : Si on embauchait un des quatre groupes dans le monde qui a une grande expertise dans ce domaine, il n’accepterait jamais d’exprimer une opinion qui a été formulée par quelqu’un d’autre...

La sénatrice Moncion : Comment expliquez-vous l’affaire Enron?

Le sénateur Massicotte : Je ne parle pas d’Enron. Dans ce cas-là, les vérificateurs ont fait une erreur. Ils se sont fait poursuivre. Ils n’ont pas fait leur travail. J’assume à 99 p. 100 qu’ils font bien leur travail et qu’il n’y a pas de poursuite.

La sénatrice Moncion : C’est cela.

Le sénateur Massicotte : Le mandat et l’opinion qu’on recherche sont les éléments clés. Si l’opinion est satisfaisante, pourquoi créer un autre comité?

La sénatrice Moncion : En créant un comité avec des gens de l’externe, on a l’assurance que le travail qui est présenté n’a pas été manipulé. On a déjà cette assurance-là, selon moi.

Le sénateur Massicotte : Au sens des états financiers, tous les vérificateurs des consultations... Aucun comité n’est créé juste pour superviser et confier le mandat. La boîte confie le mandat et le public le croit. Sur le plan des états financiers, aucun comité n’embauche... Je ne sais pas qui on embauche.

La sénatrice Moncion : KMPG.

Le sénateur Massicotte : KMPG est super crédible et professionnel. Il donne une opinion sur les états financiers. Donc, il n’y a pas lieu de s’inquiéter que quelqu’un changerait d’opinion.

La sénatrice Moncion : Non, mais KPMG répond au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, à l’heure actuelle.

Le sénateur Massicotte : Cela fonctionne?

La sénatrice Moncion : Oui, mais on parle de créer un comité complètement indépendant.

Le sénateur Massicotte : Pourquoi est-ce nécessaire de créer ce comité?

La sénatrice Moncion : Il faut demander au sénateur Wells et au groupe qu’il l’a recommandé...

Le sénateur Massicotte : Vous ne voyez pas de raison?

La sénatrice Moncion : Ma première recommandation concerne seulement l’audit interne qui relèverait d’un comité qui ferait un examen avec des gens de l’externe. C’est ma recommandation en ce moment. Cependant, si on décide de créer un comité d’audit externe, il faudrait aussi ajouter le mandat d’audit interne.

[Traduction]

Le sénateur Sinclair : Je dois avouer qu’on aborde beaucoup de petits détails ici. Je veux m’assurer que nous gardions à l’esprit ce que le comité a été chargé de faire. On lui a demandé de se pencher sur les modifications au règlement qu’exige le rapport — il s’agit d’un rapport du Comité de la régie interne, des budgets et de l’administration — qui demandait qu’on crée un sous-comité de la vérification...

La sénatrice Moncion : Pas un sous-comité; un comité permanent.

Le sénateur Sinclair : Désolé, un comité permanent de la vérification, oui — et la question de savoir si une des modifications au règlement devrait porter sur l’ajout de membres de l’extérieur du Sénat à ce comité permanent.

Vous avez tous les deux parlé d’un vérificateur externe, et vous n’êtes pas les seuls. À mon sens, c’est une question complètement distincte. La question de savoir s’il faudrait ou non embaucher un vérificateur externe ou si on devrait charger du personnel d’audit interne de le faire est une question complètement distincte de celle de savoir si des membres externes devraient ou non siéger à un comité permanent. Je veux qu’on continue à penser aux deux questions séparément, sinon on soulève toutes sortes de questions que je ne veux pas aborder.

Pour en revenir à l’argument que je pense que le sénateur Massicotte essayait de faire valoir, la question est la suivante : pourquoi avons-nous besoin d’un comité permanent pour vérifier les dépenses des sénateurs?

La sénatrice Moncion : Pour des raisons de transparence, de transparence complète à l’égard du public, on demanderait à des membres externes de se pencher sur la question.

Le sénateur Sinclair : D’accord. Alors vous croyez que pour être efficace sur le plan de la transparence, le comité doit compter des membres externes?

La sénatrice Moncion : Non. C’est pour des raisons de crédibilité.

Le sénateur Sinclair : D’accord. Alors pour que sa transparence soit crédible, le comité a besoin d’avoir des membres externes?

La sénatrice Moncion : Je dirais que non, mais en raison de la réputation du Sénat, je dirais que cette mesure donnerait aux membres du grand public les renseignements et l’assurance qu’ils cherchent.

Pour en revenir à vos commentaires, je répondais à vos questions, mais si vous retournez à mes deux recommandations, l’une d’elles visait à créer l’organe d’audit et de surveillance des dépenses des sénateurs seulement, avec des membres externes. Si on ne choisit pas cette voie, on pourrait opter pour un comité de vérification complet avec des membres externes. On en revient au vingt et unième rapport, mais il recommandait la création d’un comité permanent sans surveillance externe.

Le sénateur Sinclair : Merci.

Le vice-président : J’ai deux points à soulever, sénatrice Moncion.

J’aimerais lire le paragraphe du Code régissant les conflits d’intérêts auquel je faisais allusion, soit le paragraphe 37(2) :

Le Comité peut, après consultation du conseiller sénatorial en éthique, donner au conseiller des directives générales en ce qui concerne l’interprétation et l’application du présent code, mais non en ce qui concerne l’interprétation de celui-ci et son application à la situation particulière d’un sénateur.

C’est le paragraphe du code auquel je faisais allusion, auquel nous pourrions réfléchir nous-mêmes en cours de route.

L’autre point que je veux soulever — qui est, selon moi, très important — est que la vérification que le vérificateur général a faite du Sénat était une vérification judiciaire et non une vérification de gestion. Je me souviens très bien de m’être levé au Sénat une journée et d’avoir posé la question précise : avons-nous fait l’objet d’une vérification judiciaire — quand je dis « nous », je veux parler de tous les sénateurs visés par ces deux années de vérification — ou d’une vérification de gestion? Nous n’avons jamais eu de réponse claire, mais, à toutes fins utiles, c’était une vérification judiciaire.

Je pense qu’on devrait clairement indiquer dans le mandat du comité le type de vérification qu’on mènera. À mon avis, lorsqu’on opte pour une vérification judiciaire, c’est parce que, une fois qu’on a jeté un coup d’œil aux livres, on se rend compte qu’il faut procéder à ce type de vérification. Si vous partez du principe qu’il s’agit toujours d’une vérification judiciaire, alors les règles sont différentes de ce dont vous parliez ce matin. C’est ce que je veux vous dire.

[Français]

La sénatrice Moncion : Merci de la précision, parce qu’une jurivérification est très différente d’une vérification ordinaire. Si le mandat du vérificateur général était de faire une vérification judiciaire, il avait le droit de mener un examen plus approfondi. S’il a commencé son travail sans avoir le mandat de vérification générale, c’est une chose, mais si on lui avait confié le mandat de jurivérification c’est complètement une autre tâche.

[Traduction]

Le vice-président : Je crois que nous devrions clairement indiquer dans notre rapport le type de vérification auquel nous procédons et le type de système que nous mettons en place pour intégrer la vérification générale ou la vérification de gestion selon les règles normales qu’on suit dans la profession. Cela me semble être un élément clé à déterminer. Merci.

Honorables sénateurs, je regarde l’heure et je constate que nous avons terminé notre séance de ce matin. Bien sûr, je remplace notre collègue, le sénateur Housakos. Je m’attends à ce qu’il occupe le fauteuil à notre prochaine réunion ou à ce que je passe peut-être le maillet au sénateur Sinclair, qui est aussi vice-président du comité. Merci, honorables sénateurs.

(La séance est levée.)

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