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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 50

Le mercredi 30 avril 2003
L'honorable Dan Hays, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 30 avril 2003

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant d'aborder les Déclarations de sénateurs et comme nous sommes régis par un nouvel article du Règlement, je voudrais vous rappeler les dispositions relatives aux hommages, prévues à l'article 22, modifié par la motion adoptée le 1er avril de cette année.

Le paragraphe 22(10) du Règlement dit ceci:

À la demande du leader du gouvernement au Sénat ou du leader de l'opposition, la période des «Déclarations de sénateurs» est prolongée d'au plus quinze minutes lors d'un jour donné afin de rendre hommage à un sénateur ou un ancien sénateur...

Le paragraphe 22(11) du Règlement ajoute:

Le Président informe le Sénat du temps accordé à chaque intervention d'un sénateur qui rend un hommage, laquelle ne peut dépasser trois minutes. Aucun sénateur ne peut parler plus d'une fois.

Avant de commencer, honorables sénateurs, je signale que j'ai reçu une lettre de l'honorable John Lynch-Staunton, leader de l'opposition, qui écrit ceci:

Conformément au paragraphe 22(10) du Règlement du Sénat, je souhaite que la période des «Déclarations de sénateurs» soit prolongée le mercredi 30 avril afin de rendre hommage à l'ancien sénateur l'honorable Richard Doyle, décédé le 9 avril 2003.

L'honorable Herbert O. Sparrow: Permettez que j'invoque le Règlement.

Son Honneur le Président: Les recours au Règlement seront entendus à la fin de la période réservée aux affaires courantes, qui précède l'ordre du jour.

Le sénateur Sparrow: Puis-je alors poser une question à la présidence au sujet de sa déclaration?

Son Honneur le Président: Vous le pouvez, mais je dois signaler aux honorables sénateurs que nous utilisons les quinze minutes que prévoit le Règlement pour les hommages. Le leader de l'opposition a demandé à la présidence d'être le premier intervenant à rendre un hommage.

Le sénateur Sparrow: Honorables sénateurs, je comprends cela, mais le Règlement prévoit également que:

Le Président informe le Sénat du temps accordé à chaque intervention d'un sénateur qui rend hommage...

J'imagine que cela doit être fait avant le début des hommages. Le Président doit indiquer combien de temps est accordé, et les interventions ne doivent pas durer plus de trois minutes chacune.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je n'ai pas lu tout l'article du Règlement car je crois qu'il est tout à fait explicite. Il prévoit trois minutes par intervention.

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

HOMMAGES

LE DÉCÈS DE L'HONORABLE RICHARD JAMES DOYLE, O.C.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, les hommages rendus à notre collègue Richard Doyle dans les jours qui ont suivi son décès ont surtout porté, ce qui est fort compréhensible, sur la contribution exceptionnelle qu'il a fait à sa profession, particulièrement au Globe and Mail, avec lequel il a collaboré pendant de nombreuses années et qui bénéficie encore aujourd'hui de ses compétences et de sa compréhension du rôle du journaliste. Bien peu de choses ont été dites ou écrites au sujet de sa carrière de sénateur. Le passage de Dic Doyle au Sénat a malheureusement été trop bref. Néanmoins, ceux d'entre nous qui ont eu le privilège de l'avoir comme collègue, sans égard à l'allégeance politique, ont eu une occasion unique d'apprécier son talent extraordinaire et son admirable éthique du travail et d'en bénéficier.

Il était loyal au caucus sans pour autant renoncer à ses convictions. À n'importe quel débat, il apportait un niveau intellectuel et une précision de pensée qui captait toute l'attention. Il n'a jamais succombé à la tentation de faire des compromis contraires à ses principes, quelles qu'aient été les pressions exercées.

Je réitère les propos que j'ai tenus au moment où il a quitté le Sénat pour prendre sa retraite en disant que Somerset Maugham a écrit un jour que la conscience est la gardienne des règles de la société. Richard Doyle a été le gardien des nôtres.

La porte du bureau de Dic était toujours ouverte. Je n'ai pas compté le nombre de fois où je suis arrivé à l'improviste pour lui demander conseil sur un projet de loi, pour lui demander de m'aider à améliorer un texte ou simplement pour bavarder et tirer profit de sa sagesse.

Les infirmités dont il souffrait ont rendu pénibles ses dernières années au Sénat et les années précédant son décès, mais ses mains sont restées vigoureuses et son esprit est demeuré toujours aussi vif. Nous avons eu notre dernier échange le jour de son 80e anniversaire de naissance, le mois dernier. Peu après, son épouse adorée, Flo, est décédée, et il devait la suivre à peine quelques jours plus tard. Qu'ils reposent tous les deux dans la paix qu'ils ont bien méritée.

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je suis honorée d'exprimer, au nom de madame le leader du gouvernement, le sénateur Carstairs, qui est dans l'impossibilité d'être ici présente aujourd'hui, la tristesse des sénateurs de ce côté-ci à l'occasion du décès de notre ancien collègue Richard James Doyle.

Lorsque nous perdons un camarade que nous aimions et en qui nous avions confiance, la tradition impose souvent un hommage officiel empreint de solennité, de tristesse et de respect. Les adieux ultimes que nous avons faits à notre collègue à Toronto, il y a deux semaines, cérémonie à laquelle certains d'entre nous ont assisté, étaient empreints de cette émotion. En même temps, les éloges joyeux qui retentissaient dans la chapelle du Trinity College et qui ont dominé la réception qui a suivi reflétaient véritablement l'esprit et la personnalité de cet homme talentueux, pétulant, courageux et attachant, cet ancien combattant de l'aviation de la Deuxième Guerre mondiale, ce journaliste extraordinaire, cet officier de l'Ordre du Canada, grand militant de l'alphabétisation et sénateur au Parlement canadien.

Entre le jour où il a fait son entrée dans cette assemblée en 1985 et le jour où il a pris sa retraite, 13 années plus tard, il a apporté une contribution extraordinaire à nos débats et à nos comités. Nous avons partagé une grande expérience au sein de notre comité favori, celui des affaires juridiques et constitutionnelles, lorsque, menés par notre ardent défenseur de la réforme des prisons, le sénateur Earl Hastings, nous avons fait la tournée de certaines des plus célèbres institutions correctionnelles pour tenir des audiences avec les détenus, les directeurs de prison et les gardiens, qui n'avaient pas été inscrits sur la liste des témoins concernant un important projet de loi sur la libération conditionnelle présenté à l'autre endroit. Nous l'avons fait.

(1340)

Les discours qu'il a prononcés en cette enceinte témoigneront pour toujours de sa grande aptitude à jouer avec les mots; de sa grande compassion pour ceux qui souffraient sans qu'il n'y ait eu faute de leur part, comme les victimes de l'hépatite C, ainsi que de sa volonté d'agir en ardent et logique défenseur du Canada, en particulier de l'Ontario et de Toronto, où son nom est inscrit dans l'histoire de notre presse nationale en raison des vingt années qu'il a passées au poste de rédacteur en chef du Globe and Mail, personne d'autre que le fondateur du journal, George Brown, n'ayant occupé ce poste aussi longtemps.

S'il existait un temple de la renommée ou un trottoir spécial marqué des empreintes des grands journalistes, Dic Doyle s'y trouverait parmi les premiers.

Il n'a jamais vraiment aimé le mot «journaliste». Dans le bon vieux temps où il se faisait les dents au Chatham Daily News, c'était un honneur d'être connu comme un rédacteur de presse ou mieux encore, comme un rédacteur aux doigts pleins d'encre. Il suffit de lire le magnifique livre de Dic, Hurly-Burly, pour avoir une idée de la vie exubérante que ce travail lui a permis de vivre et du rôle qu'il a joué en menant le Globe and Mail en tête de file des journaux canadiens.

Il était d'avis que le travail du journaliste devait être basé sur la vérité et les faits. Ceux qui se sont rassemblés pour honorer sa mémoire et transmettre leurs condoléances à sa famille étaient parmi les meilleurs de la profession, depuis un demi-siècle peut-être. Ils avaient été guidés par les conseils, la confiance et la liberté que Dic Doyle leur a accordés à eux et à bien d'autres encore. Mon défunt mari, Mike Gillan, était l'un de ces rédacteurs du Globe and Mail aux doigts pleins d'encre qui a toujours sincèrement admiré le rédacteur, le guide, le sénateur et surtout l'ami.

La vie de Dic n'aurait pas suivi cette voie remarquable sans l'appui et les rires de sa chère épouse, Flo, qui est partie seulement deux semaines avant lui. Ensemble, ils ont laissé à leurs enfants, Judith et Sean et leur merveilleuse petite-fille, Kaelen, de merveilleux souvenirs et un superbe défi: vivre aussi pleinement et courageusement qu'ils l'ont fait, surtout durant la période difficile de la maladie de Dic, au cours des dernières années. Au nom du sénateur Carstairs et de nous tous, nous leur adressons nos plus sincères condoléances et nos meilleurs vœux.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, en tant que rédacteur en chef, Richard Doyle aurait certes corrigé certains des panégyriques prononcés par ses collègues journalistes récemment, tout comme il aurait rayé un mot aussi archaïque et pompeux que «panégyrique» dans mon intervention d'aujourd'hui. Pourtant, il ne pourrait qu'être gratifié en particulier par les expressions de gratitude durable et de respect de la part de ceux qui, plus tôt dans leur carrière journalistique, ont eu la chance de l'avoir comme mentor et ami. Nous avons appris que les idéaux de Dic Doyle et son exemple ont aidé à former la conscience professionnelle de certains de nos journalistes les plus respectés de nos jours.

Le 16 avril, beaucoup d'entre eux se sont joints à des collègues du Sénat, aux membres de sa famille et à ses amis dans la chapelle du Trinity College à l'Université de Toronto. Le sénateur Fairbairn a décrit la scène. Au service funéraire anglican, le révérend Kenneth Bagnell, un ministre de l'Église unie et journaliste qui avait fait ses classes dans sa jeunesse sous la direction de Dic Doyle au Globe and Mail, a réussi de façon excellente à combiner homélie et éloge funèbre dans le cadre d'un hommage chaleureux à son ami. John Fraser, qui s'est décrit lui-même avec justesse comme le critique du Globe en matière de ballet et qui a été envoyé par Dic Doyle en tant que premier correspondant en Chine communiste, présidait une réception au Collège Massey, où il est maintenant directeur principal. Clark Davey, l'éditeur en chef et l'associé de Dic au Globe, est intervenu, comme l'a fait Michael Valpy, l'un des protégés bien connus de Dic qui travaille toujours pour le Globe. Le sénateur Lynch-Staunton a parlé en notre nom.

Dic Doyle est arrivé au Sénat une semaine après son soixante-troisième anniversaire, en 1985. Lorsqu'on examine sa vie et son travail, je crois qu'on peut dire que sa carrière tout à fait dévouée au Sénat complète parfaitement la carrière de ce garçon d'une petite ville de l'Ontario qui est devenu journaliste, qui a été lieutenant d'aviation du Bomber Command de la Royal Air Force et un éminent rédacteur en chef. Cette expérience de vie, alliée à son discernement, son jugement, son intégrité et son attachement à la vérité, ont été un don précieux pour le Parlement.

Pendant ses dernières années au Sénat, et après sa retraite, il est resté stoïque devant un éventail effarant de problèmes de santé — cancer, problèmes cardiaques et diabète — et il est demeuré vif d'esprit, informé, engagé et toujours avenant lorsqu'on lui demandait de contribuer à la résolution d'un problème ou de faire des observations concernant un projet de texte ou une proposition.

Il n'a cependant pas pu demeurer stoïque devant le décès subit de son épouse bien-aimée, Florence, le 20 mars. S'il n'a pas été en mesure de choisir le moment exact de son propre décès, il était on ne peut plus près à y faire face après une vie aussi remplie et une perte aussi cruelle, et on peut penser qu'il a été libéré lorsque la mort l'a emporté le 9 avril.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, ceux d'entre nous qui ont eu le privilège de siéger avec le sénateur Doyle savent que leur apprentissage en cette honorable enceinte s'est déroulé en présence d'un véritable compagnon. Dic Doyle était un collègue qui faisait devant tous la démonstration de son éloquence héroïque, même en situation d'adversité physique. Chacune de ses déclarations était marquée du sceau du dévouement, de l'intégrité, du respect, de l'équité, de l'amitié, de la vérité et de la justice.

On dit que «la plume est plus puissante que l'épée», et c'était d'autant plus vrai lorsque c'était le sénateur Doyle qui tenait cette plume. L'ancien premier ministre Brian Mulroney a fait un jour l'observation suivante: «Lorsque Dic Doyle haranguait les gens, y compris moi, il ne manifestait jamais la moindre once de malice.» Comme l'ancien premier ministre l'a dit, Dic Doyle a exercé une influence civilisatrice qui s'est notamment très largement fait sentir au Sénat, précisément parce qu'il était si respecté.

La plume du rédacteur était toujours prête, et j'ai souvent vu le chef de l'opposition remettre des projets de notes d'allocution au sénateur Doyle qui, si je peux ainsi dire, «adaptait» le tout. Je suis en effet convaincu que ce n'était pas un imprimatur que réclamait le chef de l'opposition, mais qu'il voulait peut-être obtenir un nihil obstat.

Souhaitons aujourd'hui, honorables sénateurs, que notre ami et notre mentor repose avec les scribes des écritures saintes dans le sein d'Abraham.

L'honorable A. Raynell Andreychuk: Honorables sénateurs, je désire revenir sur le décès du sénateur Doyle. Ceux d'entre nous qui parlent d'éthique, sujet présentement à l'étude au Sénat, devraient tout simplement lire les discours du sénateur Doyle pour déterminer la conduite à adopter en cette Chambre. Le sénateur Doyle a probablement été le sénateur ayant le plus de principes que j'ai connu en cette Chambre. Comme d'autres intervenants l'ont souligné aujourd'hui, il donnait de son temps, et j'ai eu la chance d'occuper un bureau situé près du sien. Il a pris sans que je l'y invite la décision de me communiquer son point de vue, ce qui, comme je l'ai constaté, m'a rendu service dans chaque cas.

Il mesurait ses mots. Il pesait ses mots, car il savait qu'il devrait agir en fonction de chaque mot prononcé dans cette Chambre et les assumer. Ainsi, il ne parlait pas rapidement. Lorsqu'il parlait, il était très posé, très consciencieux et suivait toujours le principe qu'il était ici pour servir, pour servir les Canadiens, et que c'était pour lui un privilège d'être en cet endroit. C'est le message qu'il m'a transmis lors de ma première rencontre avec lui que je n'oublierai jamais. J'espère n'avoir rien oublié.

Il était de ceux qui exprimaient de façon très concise certaines vérités de cette Chambre, que l'on ne voit pas toujours dès le début. Ainsi, il m'avait dit que je verrais peut-être des progressistes- conservateurs et des libéraux au Sénat, mais ce n'était pas ce qui importe lorsqu'on travaille ici. Il voulait que je n'oublie jamais qu'il y a des dépensiers et des économes. Quiconque a siégé au Comité de la régie interne a rapidement été en mesure de savoir de quel côté il se situait. Il s'appliquait énormément à travailler dans l'intérêt supérieur des citoyens.

Si un nouveau sénateur souhaite en savoir davantage sur le sénateur Doyle ou s'instruire sur la façon de se comporter dans cette Chambre, il n'a qu'à passer en revue les merveilleux discours humoristiques qu'il a laissés dans le hansard. Ils sont pleins de sagesse.

Je sais que, lorsque sa femme est décédée, une bonne partie de lui- même est partie avec elle. Comme on l'a déjà dit, son décès est presque arrivé comme une bénédiction, mais toute sa vie a véritablement été une bénédiction pour nous.

(1350)

LA SEMAINE NATIONALE DE LA FORÊT

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, je suis heureux de parler aujourd'hui de l'importance de la Semaine nationale de la forêt, que nous célébrerons la semaine prochaine. Les forêts du Canada jouent un rôle important dans le développement économique et la prospérité de notre pays. Les forêts canadiennes couvrent plus de la moitié de la surface du pays et s'étendent de l'Atlantique au Pacifique. En 2000, l'industrie forestière canadienne a procuré des emplois directs à 373 000 personnes et des emplois indirects à 700 000 autres, et les produits forestiers ont compté pour 20,8 milliards de dollars dans le produit intérieur brut.

Vous savez sûrement que les forêts canadiennes sont bénéfiques à bien des égards à la santé et au bien-être des Canadiens. Les régions boisées abritent près des deux tiers des 140 000 espèces de végétaux, d'animaux et de microorganismes du Canada. Elles offrent des perspectives de tourisme et répondent aux besoins récréatifs d'un nombre croissant de citadins. Les forêts ont également un important effet modérateur sur les conditions climatiques. Elles filtrent notre air et notre eau et reconstituent et régénèrent les sols, empêchant l'érosion.

Cependant, tous ces bénéfices importants sont vulnérables au changement climatique. Le changement climatique touche déjà des pays dans le monde entier, incitant les gouvernements et les organismes non gouvernementaux à prendre des mesures pour nous aider à contrer les effets de ce changement. La température de la surface du globe a augmenté de 0,6 degrés depuis la fin des années 1800. On prévoit qu'elle augmentera encore de 1,8 à 5,8 degrés d'ici 2100.

Les recherches montrent que les variations régionales de température ont entraîné des changements comme le déclin de certaines populations de végétaux et d'animaux, la floraison précoce de certains arbres et l'apparition de nouveaux insectes et parasites. On prévoit que ces variations auront de profondes répercussions sur les forêts du Canada. Des changements importants sont prévus en ce qui concerne la croissance et la survie des forêts: des migrations d'espèces d'arbres et des déplacements d'écosystèmes, des dommages accrus causés aux pousses et le dépérissement des arbres, en raison des dégels hivernaux, un plus grand risque d'incendies de forêt et d'infestation d'insectes, et des dégâts accrus causés aux forêts, en raison des conditions climatiques extrêmes. Ces situations entraîneront à leur tour des conséquences socioéconomiques comme des changements dans l'offre et la valeur du bois, la perte de stock forestier, des changements dans la valeur des terres, la réduction des options d'utilisation des terres, l'aggravation des conflits au sujet de l'utilisation des terres et des bouleversements dans les parcs et les réserves naturelles.

Honorables sénateurs, les effets du changement climatique se font déjà sentir mais, plus ils seront évidents et plus les forêts du Canada seront appelées à jouer un rôle vraiment important et complexe. Des pratiques de foresterie comme le reboisement, par exemple, peuvent contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre, ce qui pourrait influencer l'élaboration de stratégies d'aménagement forestier. Par contre, nos forêts doivent en même temps s'adapter aux nouvelles conditions résultant du changement climatique. Des précipitations ou des pluies moins abondantes, combinées à davantage d'ensoleillement et à une hausse des températures, risquent de créer des conditions d'extrême sécheresse pour nos forêts. L'industrie forestière et les décideurs devront mettre au point des politiques et des pratiques qui permettront de gérer nos forêts de façon durable aux plans social, économique et environnemental. Il nous faut mettre en oeuvre des politiques de ce genre afin de générer des produits forestiers et de contribuer à la vitalité de nos collectivités rurales tout en nous adaptant aux changements du climat et du marché international.

Bref, le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts examine comment l'agriculture, les forêts et les collectivités rurales du Canada pourront s'adapter aux effets du changement climatique. Un rapport préliminaire de ses conclusions sera publié en juin.

LE CENTRE NATIONAL DES ARTS

LE FESTIVAL SCÈNE ATLANTIQUE—LA COMÉDIE MUSICALE ANNE OF GREEN GABLES

L'honorable Elizabeth Hubley: Honorables sénateurs, dans un monde perturbé et miné par les conflits, les dissensions et la maladie, il y a une histoire magique fondée sur l'exubérance de la jeunesse et la vie de famille qui continue de divertir et de réjouir les coeurs. C'est l'histoire d'une petite orpheline aux cheveux roux qui trouve un foyer dans le village fictif d'Avonlea, dans une vieille propriété familiale insulaire appelée Green Gables.

Écrit en 1908 par l'auteure de l'Île-du-Prince-Édouard Lucy Maud Montgomery, le roman Anne of Green Gables est devenu un classique de la littérature pour enfants, il a été traduit et lu dans de nombreuses langues et il a fait la joie d'un nombre incalculable d'enfants et d'adultes du monde entier.

La comédie musicale Anne of Green Gables a vu le jour en 1965, dans le cadre du Festival inaugural de Charlottetown, au Centre des arts de la Confédération alors ouvert depuis peu. Inspiré du roman de L. M. Montgomery, ce spectacle a été écrit par Don Harron et mis en musique par Norman Campbell, sur des paroles d'Elaine Campbell et Mavor Moore.

La comédie musicale Anne of Green Gables est un emblème culturel canadien. De plus, honorables sénateurs, c'est aussi devenu un élément fondamental de l'industrie touristique de l'Île-du-Prince- Édouard. Le Festival de Charlottetown a en effet été désigné l'événement par excellence au Canada pour 2003 par l'American Bus Association, cette association prestigieuse le classant aussi constamment parmi les 100 meilleurs événements en Amérique du Nord.

Depuis la première, qui a eu lieu sur la scène principale du Centre de la Confédération, les artistes de la comédie musicale Anne se sont produits devant environ 3,2 millions de personnes dans le monde entier — à Charlottetown, évidemment, mais aussi dans d'autres villes canadiennes, ainsi qu'à New York, à Londres, en Angleterre, et au Japon.

Honorables sénateurs, je suis fière de vous annoncer que Anne of Green Gables, ce classique intemporel de la comédie musicale canadienne, est actuellement présenté au théâtre Centrepointe, à Nepean, dans le cadre du festival Scène atlantique mettant en vedette des artistes de la côte est. La première de Anne a eu lieu hier soir à guichets fermés, devant un auditoire conquis, et huit représentations seront données jusqu'au 3 mai. Je suis certaine que vous vous joindrez à moi pour souhaiter à toute l'équipe de la production d'Anne of Green Gables une semaine couronnée de succès au Théâtre Centrepointe, de même qu'un été avec des auditoires records à Charlottetown.

Anne Shirley était une petite fille franche et passionnée. Elle aurait sans doute été une bonne parlementaire. Elle croyait passionnément à la famille et au foyer familial ainsi qu'à l'amitié véritable et loyale. D'ailleurs, elle disait de ses amies qu'elles étaient des âmes soeurs.

Honorables sénateurs, en guise de conclusion, je ne puis que répéter les mots de la comédie musicale: «Anne aux pignons verts, ne changez jamais. C'est ainsi que nous vous aimons.»

LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC

LA VICTOIRE LIBÉRALE AUX ÉLECTIONS PROVINCIALES

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, le 30 octobre 1995 et le 15 avril 2003, la plupart d'entre nous ont attendu avec anxiété les résultats électoraux provenant du Québec. Heureusement, dans les deux cas, les résultats ont été positifs pour le Québec et le Canada. Le lien entre les deux est l'honorable Jean Charest, le nouveau premier ministre du Québec.

Aucun d'entre nous n'a vraiment oublié l'engagement de Jean Charest envers le Canada, un engagement qui, pour lui, a toujours transcendé les opinions politiques, un engagement qu'il a éloquemment défendu durant toute sa carrière et dans tous les coins du pays. C'est cet engagement fondamental envers l'avenir du Canada qui a, en fin de compte, conduit Jean Charest à Québec et à sa splendide victoire de la semaine dernière.

Évidemment, honorables sénateurs, cela n'est pas arrivé du jour au lendemain. Le nouveau premier ministre a dû se soumettre à deux tests électoraux provinciaux, attendre cinq ans, travailler d'arrache-pied sans compter ses heures, reconstruire le parti à son image, sans oublier le défi qui consistait à faire taire les inévitables sceptiques et prophètes de malheur. Toutefois, il a surmonté toutes ces difficultés. Je sais que tous les sénateurs l'observeront avec grand intérêt pendant qu'il mettra en place le programme de changements innovateur et audacieux qu'il a présenté aux électeurs durant la campagne, programme que les Québécois ont appuyé avec enthousiasme.

[Français]

Hier, j'ai eu le grand plaisir et l'honneur, en compagnie de notre collègue le sénateur Rivest, d'assister à la cérémonie d'assermentation du nouveau Conseil des ministres. Pour la première fois depuis dix ans, le drapeau canadien était présent dans le Salon rouge.

Dans son article du 14 avril dans le quotidien La Tribune de Sherbrooke, Michel Morin écrivait:

Cette victoire encore insoupçonnée il y a une dizaine de jours, les libéraux la doivent entièrement à leur chef. Il faut reconnaître que Jean Charest a mené une campagne exemplaire. Une campagne qui fera probablement histoire dans les annales politiques du Québec.

Plus loin dans son article, il écrit que la victoire n'est pas celle des libéraux:

[...] elle est celle de leur chef et exclusivement de leur chef, Jean Charest.

[Traduction]

Nous pouvons maintenant nous attendre à ce que le gouvernement adopte des positions sensées et fermes dans tous les domaines et à ce que le Québec, comme l'a dit Jean Charest, joue de nouveau un rôle de chef de file au sein de la fédération canadienne.

[Français]

(1400)

Je souhaite à Jean, à son épouse Michèle et à leurs enfants, Amélie, Antoine et Alexandra mes meilleurs vœux alors qu'il entreprend ce rôle très important pour le Canada et pour l'avenir du Québec.

Je sais que, tout au long de sa campagne, il a pu compter sur l'appui précieux de sa famille afin de pouvoir affirmer sans hésiter: «Je suis prêt.»

[Traduction]

Et il est tout à fait prêt, honorables sénateurs.

Des voix: Bravo!

LE MOIS DU PATRIMOINE ASIATIQUE

L'honorable Vivienne Poy: Honorables sénateurs, comme la plupart d'entre vous le savent, le Sénat a voté à l'unanimité, en décembre 2001, en faveur de la désignation de mai comme Mois du patrimoine asiatique au Canada. Cette décision a été suivie de la signature officielle d'une déclaration, le 21 mai 2002. Au cours de ce mois, le gouvernement canadien a dévoilé une nouvelle affiche en l'honneur du Mois du patrimoine asiatique au cours de la Conférence sur la diversité et la culture. Des célébrations sont prévues dans la plupart des grandes villes canadiennes tout au long du mois de mai.

Les Canadiens d'origine asiatique de partout dans le pays ont été ravis de la reconnaissance officielle de la place qu'ils occupent au Canada. Pour nous, ce mois est une belle occasion de sensibiliser la population canadienne à la contribution des Canadiens d'origine asiatique à ce pays. Des bénévoles travaillent très fort afin de rejoindre leurs communautés et de faire en sorte que le plus grand nombre possible de personnes participent aux événements qui auront lieu.

Nous comptons sur votre collaboration pour assurer le succès de ces efforts. Vous savez certainement que le SRAS a laissé sa marque sur les communautés asiatiques de Toronto, mais je tiens à ce que vous sachiez qu'elles ripostent. Nous unissons nos efforts pour lutter contre le SRAS mais aussi contre un certain langage raciste qui accompagne le syndrome. Vous devez savoir que le SRAS n'est pas une maladie chinoise ou une maladie asiatique. Nous nous unissons pour célébrer nos communautés, et la récente crise nous y oblige plus que jamais auparavant.

Nous invitons tous les honorables sénateurs à manifester leur appui et à exercer leur leadership en participant à ces événements et en les annonçant. Que vous soyez à Halifax, Montréal, Ottawa, Toronto, Winnipeg, Calgary ou Vancouver, j'invite les sénateurs à faire un effort pour participer à au moins un événement au cours du mois de mai. Toutes les activités sont indiquées sur le site Web de Patrimoine Canada, et je ferai parvenir de l'information à vos bureaux.

D'après les résultats du recensement de 2001, les Canadiens d'origine asiatique constituent maintenant près de 10 p. 100 de la population canadienne. Dans des villes comme Toronto et Vancouver, ils forment maintenant une masse critique. On compte plus d'un million de Canadiens d'origine asiatique à Toronto, et près de 700 000 dans la région de Vancouver. Ces dernières années, leur nombre a connu une croissance exponentielle dans les villes un peu partout au Canada, et notamment à Ottawa. Si les mouvements d'immigration se maintiennent, la communauté asiatique continuera de s'accroître. C'est pourquoi ce qui touche cette communauté touche tous les Canadiens, sur les plans social, politique et économique.

Honorables sénateurs, je vous invite à célébrer la force que le Canada tire de ces concitoyens de souche asiatique. La diversité culturelle continue d'enrichir notre nation et, au moment où le Canada ouvre ses portes au monde entier, nous devons la considérer comme un atout unique au Canada.

Au mois de mai, les Canadiens peuvent découvrir le patrimoine asiatique et l'histoire des Canadiens d'origine asiatique. C'est l'occasion de créer de nouveaux réseaux et de nouer de nouvelles amitiés que nous chérirons toute notre vie. Chose certaine, le Mois du patrimoine asiatique aura des répercussions positives sur l'ensemble des Canadiens. Nous sommes tous fiers de notre pays multiculturel et de ses nombreuses réalisations. Avec toutes les crises qui ébranlent les valeurs qui nous sont chères, il est bien que nos leaders communautaires et politiques collaborent pour renforcer les idéaux multiculturels qui forment une partie essentielle de l'identité canadienne.

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence, à la tribune du Président, de Mme Cheryll Hannaford et de Mme Shirley Sharzer, qui ont prêté main-forte à notre ancien collègue, le sénateur Doyle, pendant son séjour au Sénat. Bienvenue au Sénat.


AFFAIRES COURANTES

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

DÉPÔT DU NEUVIÈME RAPPORT DU COMITÉ

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le neuvième rapport du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement, qui traite de son mandat conformément à l'alinéa 86(1)f) du Règlement du Sénat.

[Français]

PÊCHES ET OCÉANS

BUDGET ET DEMANDE D'AUTORISATION À EMBAUCHER DU PERSONNEL ET À SE DÉPLACER—PRÉSENTATION DU RAPPORT DU COMITÉ SUR LES QUESTIONS RELATIVES
AUX STOCKS CHEVAUCHANTS ET À L'HABITAT DU POISSON

L'honorable Gerald J. Comeau, président du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, présente le rapport suivant:

Le mercredi 30 avril 2003

Le Comité sénatorial permanent des pêches et océans a l'honneur de présenter son

QUATRIÈME RAPPORT

Votre comité, autorisé par le Sénat le 6 novembre 2002 à étudier, afin d'en faire rapport de façon ponctuelle, les questions relatives aux stocks chevauchants et à l'habitat du poisson, demande respectueusement qu'il soit autorisé, aux fins de ses travaux, à embaucher tout conseiller juridique et personnel technique, de bureau ou autre dont il pourrait avoir besoin, et qu'il soit autorisé à se déplacer à travers le Canada.

Conformément à l'article 2:07 des Directives régissant le financement des comités du Sénat, le budget présenté au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration ainsi que le rapport s'y rapportant, sont annexés au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
GERALD J. COMEAU

(Le texte du budget figure en annexe à la page 774 des Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand étudierons- nous ce rapport?

(Sur la motion du sénateur Comeau, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DE LA FRANCOPHONIE

DÉPÔT DES RAPPORTS DE LA RÉUNION DE LA COMMISSION DE LA COOPÉRATION ET DU DÉVELOPPEMENT, TENUE DU 25 AU 28 MARS 2003

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, en vertu de l'article 23.6 du Règlement du Sénat, j'ai l'honneur de déposer à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie ainsi que le rapport financier s'y rapportant. Le rapport a trait à la réunion de la Commission de la coopération et du développement de l'APF qui s'est tenue à Ottawa, au Canada, du 25 au 28 mars 2003.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LE SÉNAT

L'ABSENCE DU LEADER DU GOUVERNEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, comme vous pouvez le constater, madame le leader du gouvernement au Sénat a dû s'absenter de la capitale nationale en raison de ses responsabilités ministérielles. Malheureusement pour tous les sénateurs et heureusement pour moi, je ne peux pas répondre au nom du leader du gouvernement au Sénat. Je peux cependant prendre note des questions.

RÉPONSE DIFFÉRÉE À UNE QUESTION ORALE

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer une réponse à une question orale du sénateur Stratton, posée au Sénat le 3 avril 2003, concernant les dépenses totales du gouvernement, les recettes nettes des taxes sur les produits et services et les recettes nettes des cotisations d'assurance-emploi.

LES FINANCES

LE TOTAL DES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT DEPUIS 1993—LES RECETTES NETTES DE LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES DEPUIS 1993—
LES RECETTES NETTES PROVENANT DES COTISATIONS D'ASSURANCE-EMPLOI DEPUIS 1993

(Réponses aux questions posées le 3 avril 2003 par l'honorable Terry Stratton)

L'engagement du gouvernement pour une bonne gestion budgétaire se passe de commentaire. Le présent gouvernement est entré au pouvoir en 1993, déterminé à restaurer l'intégrité de ses finances en réduisant d'abord, puis en éliminant le déficit.

Et c'est exactement ce qu'il a fait. De plus, il l'a fait grâce à une gestion prudente et équilibrée des finances du pays.

Quand les résultats financiers définitifs pour l'année financière 2002-2003 terminée le 31 mars seront publiés plus tard cette année, ils témoigneront que notre gouvernement a enregistré un excédent budgétaire pour la sixième année consécutive. Durant cette période d'excédents budgétaires, le gouvernement a diminué la dette de plus de 47 milliards de dollars.

En outre, comme cela a été annoncé dans le budget de 2003, le gouvernement s'engage à équilibrer le budget ou à le rendre excédentaire, et à diminuer encore la dette publique dans chacune des deux prochaines années. Cela voudra dire que, pendant huit années consécutives, le présent gouvernement aura présenté des budgets équilibrés ou excédentaires.

La maîtrise des dépenses a été LE fondement de la gestion financière du gouvernement. Grâce à l'élimination du déficit, le gouvernement a investi dans des domaines très prioritaires comme les soins de santé, et les compétences et l'innovation. Malgré ces investissements, les dépenses de programmes selon la taille de l'économie représentent environ 12 p. 100 du PIB, ce qui est près du plus bas niveau d'après-guerre et bien au- dessous des 16 p. 100 enregistrés au début des années 90.

Le gouvernement veut s'assurer que ses programmes continuent d'être pertinents, efficaces et abordables. Les dépenses seront réaffectées, d'un degré faible de priorité à un degré élevé. Pour ce faire, il a annoncé dans le budget de 2003 qu'il allait commencer un examen quinquennal permanent de toutes ses dépenses non exigées par la loi.

L'engagement du gouvernement à réduire ses dépenses et à équilibrer son budget lui a permis de procéder à la plus importante réduction d'impôts de l'histoire du Canada. Le budget de 2003 s'est inspiré de cette réduction d'impôts de 100 milliards de dollars sur cinq ans pour procéder à d'autres réductions d'impôts.

Pour répondre à la prétention selon laquelle l'excédent est dû aux recettes nettes de la TPS et au solde cumulatif du Compte d'assurance-emploi, il est faux de dire que l'équilibre budgétaire est attribuable à l'excédent d'une ou plusieurs sources particulières de revenus. L'excédent ou le déficit budgétaire reflète le solde de toutes les recettes et dépenses.

Le Compte d'assurance-emploi existe depuis quelque temps et sa consolidation, sur la recommandation du vérificateur général, avec les livres du Canada remonte à 1986. Le surplus cumulatif est simplement une écriture comptable qui additionne le revenu annuel des cotisations et les transactions relatives aux coûts des programmes.

DÉPÔT DE RÉPONSES À DES QUESTIONS INSCRITES AU FEUILLETON

LA SANTÉ—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose les réponses aux questions nos 44, 45 et 46 inscrites au Feuilleton par le sénateur Kenny.

LES RESSOURCES NATURELLES—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose les réponses aux questions nos 47, 48 et 49 inscrites au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'AGENCE DE PROMOTION ÉCONOMIQUE DU CANADA ATLANTIQUE—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose les réponses aux questions nos 51 et 52 inscrites au Feuilleton par le sénateur Kenny.

L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose les réponses aux questions nos 53 et 54 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET LE COMMERCE INTERNATIONAL—LA LOI SUR LES CARBURANTS DE REMPLACEMENT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement) dépose la question no 84 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.

[Traduction]

(1410)

LE PROGRAMME D'ÉCHANGE DE PAGES AVEC LA CHAMBRE DES COMMUNES

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'aimerais vous présenter un page de la Chambre des communes.

Catini St. Pierre, de London, en Ontario, est inscrite à la faculté des arts de l'Université d'Ottawa, où elle se spécialise en histoire.

Soyez la bienvenue au Sénat.

Des voix: Bravo!

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, il ne s'agit pas nécessairement d'un recours au Règlement, mais il pourrait que cela en soit un. Il concerne — et j'aurais besoin de conseils à ce sujet — la réponse du Président à une question concernant les hommages que je lui ai posée au début de la séance d'aujourd'hui. La disposition concernant les hommages prévoit que le Président informe le Sénat du temps accordé à chaque intervention d'un sénateur qui rend hommage, laquelle ne peut dépasser trois minutes. Aucun sénateur ne peut parler plus d'une fois.

Cette disposition semble indiquer que si plus de cinq sénateurs veulent intervenir, en supposant que chacun parlerait pendant trois minutes, ce qui dépasserait le total autorisés de 15 minutes, le Président doit les prévenir qu'ils ne disposent que d'une minute, ou de deux minutes, selon le nombre de sénateurs désireux de prendre la parole, afin de se limiter à cette période.

Honorables sénateurs, cela soulève un certain nombre de questions. Premièrement, quiconque veut intervenir doit en donner préavis au Président pour qu'il puisse établir une liste. Ce n'est normalement pas la façon dont le Sénat fonctionne. En principe, lorsqu'un sénateur se lève, il est autorisé à prendre la parole.

Son Honneur, dans sa déclaration à mon intention, a dit que la disposition qu'il a lue dans le Règlement stipule que chaque sénateur dispose de trois minutes. Toutefois, si les honorables sénateurs se reportent au rapport du comité concernant ces modifications et à la modification proposée par le sénateur — et c'est là la source de la confusion — ils constateront que la disposition se retrouve textuellement dans le rapport du comité au Sénat.

Le rapport dit que lorsque plusieurs sénateurs veulent intervenir il peut être nécessaire de réduire le temps dont chacun dispose. Notre comité est convaincu que 15 minutes devraient être le maximum et que la permission de prolonger cette période ne devrait être ni demandée ni accordée. Il aurait fallu prévoir quelque chose au cas où il y aurait plus de cinq interventions. S'il y en avait six, il faudrait réduire la durée de chacune.

Son Honneur pourrait-il me dire si j'interprète correctement cette disposition?

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, l'intervention du sénateur Sparrow est plutôt une demande de renseignements qu'un recours au Règlement, mais, comme c'est la première fois que nous appliquons les nouvelles règles pour les hommages, peut-être convient-il d'essayer d'élucider des questions comme celle de l'honorable sénateur.

Dans ses observations, le sénateur Sparrow évoque la possibilité que plus de cinq sénateurs veuillent rendre des hommages, ce qui force à conclure que les sénateurs n'auraient pas trois minutes chacun, ce qui est le maximum prévu par le Règlement pour chacun des sénateurs.

Quant à la liste de ceux qui veulent rendre des hommages, il n'est pas rare que la présidence reçoive des indications des sénateurs par l'entremise du greffier adjoint, qui assure la liaison entre les services du greffier et la présidence, pour qu'elle sache qui entend prendre la parole. Ce fut le cas aujourd'hui et, en réalité, il y avait cinq noms sur la liste que, avec le concours du greffier adjoint, j'ai utilisée pour donner la parole aux sénateurs. Je dois ajouter qu'il y a eu des changements dans la liste pendant le déroulement des hommages.

Si, dans le cours normal des choses, on m'informait, moi ou quiconque occupe le fauteuil, que plus de cinq sénateurs souhaitent prendre la parole, il serait utile, lorsqu'on demande 15 minutes de plus pour des hommages, de préciser, avant d'appeler les déclarations de sénateurs, que les interventions seront de moins de trois minutes. Que je sache, il n'existe dans le Règlement aucune réponse meilleure que celle que j'essaie de vous donner, sénateur Sparrow. J'ose espérer que cela sera utile aux honorables sénateurs.

Le sénateur Sparrow: Son Honneur veut-elle laisser entendre que, si un sénateur souhaite intervenir, il doit en informer la présidence au préalable? Ce serait inhabituel. La courtoisie veut parfois qu'on prévienne le Président qu'on veut prendre la parole, mais ce n'est pas une exigence, et j'espérais qu'on n'impose pas cette condition.

Il est évident que, parfois, un sénateur peut se présenter au Sénat sans savoir qu'il y aura des hommages ce jour-là et arriver pendant ces hommages. Il n'a alors aucune possibilité de prévenir le Président, sauf au moment de prendre la parole. D'une façon ou d'une autre, nous devons élucider la question.

Son Honneur le Président: Vous avez parfaitement raison, sénateur Sparrow, et je conviens qu'il n'est pas nécessaire que les sénateurs soumettent leur nom à l'avance. Il serait sage qu'ils se lèvent suffisamment tôt pour indiquer au Président qu'ils souhaitent prendre la parole, auquel cas leur nom sera ajouté à une liste que le Président aura déjà en mains, grâce aux moyens que j'ai décrits précédemment.

Encore une fois, il s'agit d'une nouvelle règle et il nous faudra apprendre à nous en servir. Si, pour une raison quelconque, les sénateurs la trouvent déficiente, alors, on devra évidemment se pencher à nouveau sur la question et se demander si la règle est bien telle que nous la souhaitions.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, j'ai quelques brefs commentaires sur ce sujet. Je crois comprendre que les sénateurs ne figurant pas sur cette liste le jour dit peuvent toujours prendre la parole à n'importe quel moment par la suite, pendant les déclarations de sénateurs, dans le but de rendre hommage à quelqu'un qui est décédé, qu'il s'agisse d'un sénateur en exercice ou non. Pour avoir suivi le dossier de près, je pense que cette condition avait été acceptée lorsque la nouvelle règle a été adoptée. Personne ne sera exclus. Les sénateurs inscrits dont le tour de parole n'est pas encore arrivé à l'expiration des 15 minutes de cette journée-là peuvent prendre la parole le jour suivant pendant les déclarations de sénateurs pour prononcer leur hommage.

Je voudrais qu'on me corrige si je me trompe.

Son Honneur le Président: Les déclarations de sénateurs font partie de nos affaires courantes, et je comprends la même chose que l'honorable sénateur Prud'homme. Nous avons souvent vu des sénateurs profiter de cette occasion pour rendre des hommages.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'écoute depuis environ une minute et je suis un peu curieuse parce qu'on dirait que les règles ne cessent de se multiplier ici. Lorsque je suis arrivée au Sénat, nous avions environ 80 règles, et il semble maintenant que nous en créions de nouvelles chaque jour. Nous les créons à un rythme tellement effréné que nous en sommes maintenant au point où les sénateurs ne connaissent plus les règles. C'est un phénomène assez intéressant.

En particulier, ma préoccupation est la suivante: dois-je comprendre que nous sommes en train de créer deux catégories de sénateurs, soit ceux qui sont sur la liste et ceux qui n'y sont pas? Autrement dit, y a-t-il des «listés» et des «non-listés»? Dans l'affirmative, j'aimerais savoir quelle est la relation entre les sénateurs qui sont sur la liste et ceux qui n'y sont pas. En outre, j'aimerais savoir quelle est la relation entre les deux catégories, comment on détermine le tour de parole entre les sénateurs qui sont sur la liste et ceux qui n'y sont pas — les non-listés — et aussi comment cet ordre est établi.

Son Honneur le Président: La meilleure réponse que je puisse donner au sénateur Cools, c'est que cela ressemble à ce qui se fait pour les déclarations de sénateurs, c'est-à-dire qu'une période de temps précise est déterminée, soit 15 minutes, avec une limite de trois minutes par intervention.

(1420)

La meilleure réponse que je puisse donner à la question générale du sénateur est qu'il s'agit d'une analogie directe quant à la façon dont nous devrions procéder. Je vous renvoie encore une fois à mes observations au sujet de l'aide que je reçois parfois des sénateurs par le truchement du bureau du greffier, à qui ils téléphonent pour dire qu'ils souhaitent intervenir ou poser une question. Ces communications, en plus de l'indication des sénateurs qui se lèvent pour intervenir à l'appel d'un article des travaux, sont les éléments dont la personne qui occupe le fauteuil ce jour-là doit se servir pour déterminer l'ordre dans lequel interviendront les sénateurs et pour inviter les sénateurs à parler dans cet ordre.

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je voudrais formuler une proposition qui est conforme à la tradition au Sénat et à la façon dont les sénateurs gèrent les travaux de leur institution. J'invite les sénateurs à décourager l'utilisation de telles listes afin que nous puissions revenir à l'ancienne méthode consistant à simplement nous lever pour indiquer que nous souhaitons prendre la parole. Le désordre, le bruit et la passion auxquels donnent lieu les bons débats ne manquent pas d'intérêt.

[Français]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de notre ancien collègue, l'honorable Léonce Mercier.

Il est accompagné du groupe des «Amis de Charles» de la région de Magog-Orford. Ce groupe est composé de professionnels, hommes et femmes, très engagés dans le bénévolat.

J'aimerais également souligner la présence à la tribune de monseigneur Tardy, qui les accompagne. Bienvenue à tous.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

LA LOI SUR LA STATISTIQUE

PROJET DE LOI MODIFICATIF—TROISIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Lorna Milne propose: Que le projet de loi S-13, Loi modifiant la Loi sur la statistique, soit lu une troisième fois.

— Honorables sénateurs, je suis très fière, cet après-midi, de pouvoir prononcer ce qui pourrait être mon dernier discours dans cette Chambre sur la campagne menée au sujet des recensements du passé.

La campagne a fait beaucoup de chemin depuis le début il y a cinq ou six ans. Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a recommandé que le projet de loi soit adopté sans modification. J'exhorte les honorables sénateurs à accepter cette recommandation et à adopter le projet de loi sans plus tarder.

Il ne fait pas de doute que cette période a été très difficile pour tous les intéressés. La question était beaucoup plus complexe que ce que nous pouvions nous imaginer. Les chiffres sont éloquents.

La question a survécu aux mandats de trois ministres, de deux commissaires à la protection des renseignements personnels, d'un groupe d'experts et de deux archivistes nationaux. Elle a fait l'objet de nombreuses réunions publiques d'un bout à l'autre du pays, de plusieurs sondages, de 60 000 pétitions présentées aux deux Chambres du Parlement, de deux motions à l'autre endroit, d'une interpellation au Sénat, de deux renvois au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie et, aussi incroyable soit-il, de sept différents projets de loi, dont deux d'initiative parlementaire que j'ai moi-même présentés ici au Sénat, deux présentés à l'autre endroit par le député de Dufferin—Peel—Wellington—Grey et deux présentés par le député d'Ottawa-Centre.

Nous avons maintenant devant nous, en troisième lecture, le projet de loi S-13, un projet de loi émanant du gouvernement. Les seules constances dans tout ce débat, semble-t-il, sont le statisticien en chef, M. Ivan Fellegi, et moi-même. Nous serions le yin et le yang même si le sénateur Murray dirait sans doute que M. Fellegi et moi- même lui rappelions davantage la querelle entre les Hatfield et McCoy.

Cependant, au XXIe siècle, l'accès à l'information et le droit à la vie privée sont comme le yin et le yang de la politique publique canadienne. Chacun d'eux est approprié dans une certaine mesure et aucune démocratie ne peut bien fonctionner si l'un passe constamment avant l'autre. Il est inadmissible de nos jours au Canada que l'État nous surveille ou que tout soit entouré du plus grand secret. Les questions d'information et de respect de la vie privée reviennent à une question d'équilibre. En fin de compte, je crois que c'est exactement ce que le projet de loi S-13 nous offre.

J'avoue que le projet de loi S-13 donne une grande victoire aux généalogistes et aux historiens, car ils le méritent. En fin de compte, ceux qui ont lutté pour avoir un accès libre aux données du recensement l'ont emporté. Le gouvernement a fondamentalement changé de position lorsqu'il a cessé d'interdire l'accès à jamais pour permettre un large accès à ces renseignements. Pour cette seule raison, ce projet de loi devrait être adopté.

Cependant, pour ceux qui ont de graves préoccupations au sujet du respect de la vie privée, on impose des limites strictes sur la façon dont ces données peuvent être utilisées. Par exemple, dans les 20 premières années après que les données du recensement seront rendues publiques, les gens pourront en prendre connaissance, pourront y avoir accès, mais ne pourront publier que des renseignements d'état civil, qui comprennent le nom, l'âge, les liens par rapport au chef du ménage et les origines nationales. La liste exacte des renseignements d'état civil sera établie par règlement.

De plus, les historiens ou d'autres chercheurs ne pourront avoir accès à ces relevés que si un leader communautaire, un directeur des études ou une personne de ce rang examine la proposition de recherche et peut garantir que cette recherche sera utile à la collectivité.

Un autre élément clé de ce projet de loi est que 92 ans après chaque recensement, le contrôle des relevés sera cédé aux Archives nationales. L'archiviste national du Canada est l'historien de notre pays. Il ne fait aucun doute que sous sa surveillance attentive, ces relevés seront préservés et protégés pour les Canadiens des générations à venir.

L'autre chose clé que ce projet de loi fait, c'est qu'il établit une façon de traiter les futurs recensements. Tous les formulaires des futurs recensements demanderont aux Canadiens s'ils accepteront que leurs renseignements soient entreposés aux Archives nationales et rendus publics après 92 ans. Le traitement de tous les renseignements de recensement futurs sera régi par un consentement informé au préalable. Sans un consentement, les renseignements ne seront pas divulgués.

Je n'interviendrai pas au Sénat pour déclarer aux honorables sénateurs que j'ai le droit de forcer le sénateur Murray à accepter que l'information personnelle qui le concerne soit rendue publique 92 ans après le recensement de 2006. Je n'en ai pas le droit, c'est à lui qu'il revient de décider de la façon dont sera divulguée l'information qui le concerne. Même si le sénateur Murray est absent de cette enceinte pendant quelques minutes, j'espère vraiment qu'il confiera cette information aux Archives nationales. Ce serait une grande perte pour l'histoire de notre pays si les générations futures ne pouvaient obtenir de l'information adéquate sur l'un des plus éminents sénateurs du Canada.

Honorables sénateurs, je manquerais à mes obligations si je ne vous informais pas du ton et de la teneur des discussions qui ont eu lieu lors de l'étude en comité de ce projet de loi.

J'ai commencé mon intervention en parlant du yin et du yang du débat. Les sénateurs qui connaissent les adages populaires savent que, pour qu'il y ait équilibre dans la vie, le yin et le yang doivent coexister. J'assure les sénateurs que le mot «équilibre» a été le terme clé du débat qui s'est tenu en comité. La plupart des personnes qui ont témoigné ont pris une position bien nette, soit d'un côté soit de l'autre, à l'égard de cette question. Le statisticien en chef et l'archiviste national en sont des exemples notables et la vaste majorité des sénateurs qui ont siégé au comité n'ont parlé que d'équilibre. Le sénateur Murray, entre autres, a souligné que ce projet de loi présente un équilibre savamment agencé qu'il ne faut pas perturber. Le gouvernement partage entièrement ce point de vue. En fait, le comité a décidé de ne pas adopter les amendements proposés à l'égard du projet de loi pour la simple raison qu'il n'a pas voulu rompre cet équilibre.

À l'heure actuelle, même si tous les témoins savaient en se présentant aux audiences que ce projet de loi a été élaboré de façon à équilibrer les divers intérêts mis en cause, cela ne les a pas empêchés d'essayer de faire des remous. Le commissaire à la vie privée, George Radwanski, a tenu des propos particulièrement tranchants au sujet du projet de loi. Il ne voulait rien de moins que de s'en débarrasser. Il demeure fermement convaincu que le gouvernement a promis aux Canadiens que l'information qu'ils ont fournie lors des recensements ne sera jamais rendue publique. Il pense encore que l'adoption de ce projet de loi anéantira à jamais la confiance que les Canadiens ont dans les lois sur la protection de la vie privée qui sont censées les protéger.

(1430)

Le sénateur Kinsella: Il a raison.

Le sénateur Milne: Il est intéressant de signaler que le commissaire à l'information ne veut rien savoir de ce projet de loi lui non plus. Par le truchement de la présentation du commissaire adjoint à l'information devant le comité et d'une lettre écrite ultérieurement par le commissaire lui-même, le bureau du commissaire soutient que l'adoption de ce projet de loi serait un grand pas en arrière pour ceux qui réclament un gouvernement ouvert. Le commissaire à l'information croit qu'aux termes de la loi actuelle, les tribunaux obligeront à long terme le gouvernement à divulguer toutes les données historiques des recensements, 92 ans après que ceux-ci ont été tenus, sans aucune réserve. Le commissaire à l'information souhaite que ce projet de loi soit rejeté, de manière à pouvoir porter la cause devant les tribunaux, où il est convaincu qu'il obtiendra gain de cause.

Je crois pourtant qu'un enjeu social important comme celui-là ne devrait pas être laissé au soin des tribunaux canadiens. Il est clair qu'il incombe au Parlement de réaliser un bon équilibre entre les intérêts contradictoires. J'estime que ce projet de loi offre un compromis acceptable et réaliste. Bien que certains des détails de la mesure me déçoivent un peu, je crois tout de même que la grande majorité des généalogistes et des historiens sont d'avis que cette mesure représente un compromis acceptable, réaliste et valable.

On peut diviser en deux groupes le reste des généalogistes. Le premier, qui ne saurait accepter aucun compromis sur n'importe quel point, est prêt à se battre jusqu'au bout car il est convaincu d'avoir raison. Ce groupe estime que l'accès aux dossiers gouvernementaux est un droit fondamental dans une démocratie et qu'on ne saurait y faire le moindre obstacle. Il n'est disposé à accepter que l'accès complet aux données de tous les recensements, 92 ans après leur tenue.

Le gouvernement rejette vigoureusement cette approche. Il n'est pas indiqué d'empiéter sur le droit à la protection des renseignements personnels. En effet, il faut trouver un équilibre.

Enfin, il y a un groupe de généalogistes qui est parfaitement disposé à faire un compromis, mais qui, en toute conscience, ne peut appuyer ce compromis parce qu'il va trop loin, selon lui. Une grande partie de la direction du Canada Census Committee, dont les coprésidents Muriel Davidson et Gordon Watts, appuie cette position. Ce sont eux qui m'ont remis de très nombreuses pétitions que j'ai présentées au Sénat. Je leur dois tout au moins de vous dire où se situe, selon eux, la limite à ne pas dépasser.

Tout d'abord, en janvier 2003, le gouvernement a divulgué les documents du recensement de 1906, permettant des recherches et des publications sans aucune restriction. Le régime juridique qui s'appliquait au recensement de 1906 valait également pour les recensements de 1911 et de 1916. Le Canada Census Committee estime donc que le projet de loi devrait être modifié pour permettre la divulgation complète des recensements de 1911 et de 1916 aussi.

Deuxièmement, selon la version actuelle du projet de loi, il sera désormais demandé aux Canadiens, dans tous les formulaires de recensement, d'autoriser la conservation des formulaires aux Archives nationales, et leur divulgation après 92 ans. Il s'agit de la disposition sur le consentement antérieur éclairé.

Le Canada Census Committee craint que tous ceux qui ne répondront pas à la question d'une façon ou d'une autre, qui ne cocheront pas la case, ne soient oubliés pour toujours dans l'histoire du Canada. Ils demandent une modification du libellé pour garantir que les formulaires de tous les Canadiens seront conservés aux Archives nationales, à moins qu'ils ne cochent la case disant qu'ils veulent être exclus.

Cela étant dit, honorables sénateurs, il s'agit, à mon avis, d'un très bon projet de loi, d'un compromis équitable. La question pourrait probablement être débattue encore très longtemps sans jamais faire l'unanimité. L'unanimité est presque impossible dans un tel cas.

L'essentiel, c'est qu'il s'agit d'un bon projet de loi et qu'il devrait être adopté. Je crois qu'il nous faut l'adopter pour garantir aux Canadiens l'accès à leur histoire.

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au sénateur Milne. Ai-je bien compris que, dès qu'une personne, en cochant une case, interdit la diffusion de ces documents, ceux-ci sont scellés à tout jamais?

Le sénateur Milne: C'est exact.

Le sénateur Comeau: Je remplis les formulaires du recensement depuis déjà un certain nombre d'années. Pour tous les formulaires de recensement que j'ai remplis jusqu'à maintenant, il me semblait qu'il était établi que les renseignements que je fournissais étaient confidentiels. Ils m'appartenaient. Je les transmettais au gouvernement pour l'aider à planifier ses programmes, à tenir des statistiques, ainsi de suite.

Tous les formulaires de recensement que j'ai jusqu'à maintenant signés en privé avec mon gouvernement pourront désormais être consultés par n'importe qui une fois qu'une période de 92 ans se sera écoulée. La promesse ou l'engagement intervenu entre moi et le gouvernement fédéral ne tiendra plus au bout de 92 ans. Est-ce exact?

Le sénateur Milne: C'est uniquement pour les renseignements d'état civil, c'est-à-dire votre nom, votre adresse, et l'appartenance nationale dont vous vous réclamez — je me considère comme étant Canadienne ne — vous et les membres de votre famille. Ces renseignements seront accessibles après 92 ans. Vingt ans plus tard, tous les renseignements seront accessibles.

Le sénateur Comeau: Ainsi, tous les renseignements demandés sur ce qu'on appelle le «formulaire long», sur lequel on retrouve toutes sortes de questions confidentielles — je ne sais pas si le sénateur a eu la chance d'y jeter un coup d'oeil — deviendront publics malgré le fait qu'il y ait un engagement envers ces gens de ne jamais les divulguer. C'est ce que je comprends.

Cela ne permettra-t-il pas également que tout renseignement fourni au gouvernement puisse devenir public après un certain nombre d'années? Qu'arrive-t-il aux renseignements que nous devons fournir lorsque nous remplissons le formulaire en vue d'obtenir notre carte d'enregistrement d'arme d'épaule, qui sont des renseignements encore plus personnels que ceux que l'on trouve sur un formulaire de recensement? Si l'on raisonne que ce sont là des dossiers du gouvernement, on conviendra donc qu'il ne s'agit plus de renseignements privés. Ce sont des dossiers gouvernementaux. S'agit-il là du genre de renseignements qui, après un certain nombre d'années, deviendront publics aux termes de la Loi sur l'accès à l'information?

J'invite le sénateur à prendre connaissance de certains des renseignements que l'on trouve sur les formulaires d'inscription au registre des armes d'épaule pour bien comprendre les répercussions de ce genre de projet de loi qu'on nous demande d'adopter au Sénat.

Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, j'aimerais faire savoir au sénateur Comeau que j'ai déjà vu ces formulaires. On y trouve des questions très délicates. Ces formulaires appartiennent à un secteur tout à fait différent du gouvernement. Ils n'ont rien à voir avec Statistique Canada. Jamais par le passé ils n'ont été transférés aux archives du Canada, et je ne crois pas qu'ils le soient un jour.

Les données du recensement du Canada ont toujours été transférées après 92 ans et rendues publiques après 92 ans. Ce projet de loi ne fait que perpétuer une tradition qui existe dans tous les pays occidentaux.

Le sénateur Comeau: Honorables sénateurs, je crois avoir employé les mêmes termes que le sénateur a employés et qu'ont employés les gens qui ont signé ces pétitions. Je n'ai rien contre des gens qui signent des pétitions pour demander à un gouvernement de prendre des mesures qu'ils jugent importantes. Je n'ai rien à reprocher à ces gens. Cependant, ces dossiers étaient considérés comme des dossiers de l'État. Lorsque ces gens demandent des renseignements, ces derniers deviennent des dossiers de l'État. Si, avec ce projet de loi, nous autorisons la communication de renseignements inscrits dans le recensement que le gouvernement veut garder confidentiels, ne créons-nous pas un précédent? En ce qui concerne les renseignements sur les armes d'épaule, n'est-ce pas exactement le même cas, à savoir que les renseignements deviendraient tout à coup, sous l'effet d'une loi, publiquement accessibles? Ils pourraient l'être dans seulement 10 ans, et non dans 92 ans. Je préviens seulement les sénateurs que nous nous engageons sur une piste où des dispositions législatives et des engagements visant à assurer la protection des renseignements et leur confidentialité sont directement touchés. Je suis certain que même le sénateur en conviendra. Si ces renseignements deviennent partie intégrante des dossiers de l'État, qu'est-ce qui nous empêcherait de lancer une autre campagne la semaine prochaine pour que ces autres dossiers soient rendus publics?

(1440)

Le sénateur Milne: J'informe le sénateur Comeau que, actuellement, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, tous les dossiers de l'État sont du domaine public après 25 ans. J'ignore si cette disposition s'appliquera à l'enregistrement des armes de poing. Quoi qu'il en soit, je sais que tous les dossiers de l'État sont actuellement accessibles au public après 25 ans, et je crois qu'ils devraient l'être.

Le sénateur Comeau: Est-ce à dire que la déclaration de revenus que j'ai remplie il y a 25 ans est aujourd'hui accessible au public?

Le sénateur Milne: Je devrais rectifier et dire que ces renseignements ne sont pas accessibles.

Le sénateur Comeau: Nous devons être très prudents dans la manière de traiter ces renseignements. J'invite l'honorable sénateur à jeter de nouveau un coup d'oeil aux formulaires de demande du registre des armes à feu. On y demande toutes sortes de renseignements. L'honorable sénateur dit que ces formulaires sont accessibles au public après quelques années et qu'ils pourraient être publiés partout. Je suis certain que les gens vont commencer à fournir des renseignements qui ne seront d'aucune utilité au gouvernement, si c'est le genre d'approche qu'il applique aux renseignements de nature très privée et confidentielle fournis par les Canadiens. Nous devons traiter ce genre de renseignements avec beaucoup de prudence.

Le sénateur Milne: S'il s'agissait là d'une question, je pourrais répondre: dans 92 ans.

Le sénateur Comeau: Évitons d'aborder le sujet avec désinvolture. Je ne pense pas qu'on puisse dire que les renseignements personnels perdent leur caractère confidentiel lorsqu'une personne est décédée depuis longtemps. Je pense que nous devons à nos prédécesseurs et à nos ancêtres de respecter la confidentialité de ces renseignements. S'ils ont voulu préserver le caractère confidentiel de certains renseignements les concernant, je ne pense pas qu'il nous soit permis de porter atteinte à la confidentialité de cette information parce que ces personnes sont décédées depuis longtemps. Je ne pense pas que le décès d'une personne abroge le privilège de la confidentialité des renseignements personnels. Nous devons respecter la vie privée des gens, même lorsqu'ils sont décédés.

Le sénateur Milne: Je suis tout à fait d'accord avec l'honorable sénateur, et je ne voulais pas être désinvolte.

Je crois qu'en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, les documents privés d'une personne peuvent être rendus publics 25 ans après son décès. D'autre part, dès qu'une personne décède et que son testament est homologué, ce testament, qui est probablement le document le plus privé que l'on puisse posséder, est automatiquement rendu public et doit être rendu public.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): L'honorable sénateur Milne mélange les pommes et les oranges.

Le sénateur Milne: J'ai suivi l'exemple du sénateur Comeau.

Le sénateur Lynch-Staunton: Lorsque vous rédigez votre testament, vous savez qu'il peut, en fonction de votre lieu de résidence, être rendu public. Vous le savez à l'avance. Mon objection au projet de loi est la suivante: quelque fondamentale que soit l'information à rendre publique, quelles que soient les restrictions quant aux personnes autorisées à accéder à cette information, cela va à l'encontre de l'engagement qui figure dans tous les formulaires de recensement. Permettez-moi d'en faire la lecture. Il s'agit du formulaire long, mais cela s'applique au formulaire abrégé: «La loi protège les renseignements que vous nous donnez. Les renseignements que vous fournissez dans votre questionnaire du recensement sont protégés par la loi. Les employés de Statistique Canada ont prêté un serment de discrétion. Ils sont les seuls à le manipuler. Personne, ni même la police, ni aucun autre ministère, ne peut avoir accès à votre questionnaire. C'est votre droit.» Cela figure dans le formulaire du recensement de 2003.

Ce projet de loi viole une promesse faite par le gouvernement du Canada. Peu m'importe que ce soit seulement un nom, une adresse, une ville ou un numéro de téléphone qui se trouve ailleurs. Peu m'importe que ce soit 92 ans, et peu m'importe que ce soit limité aux universitaires. Pour moi, c'est une brèche. C'est pour cela que je m'oppose à ce projet de loi. Il viole une promesse faite aux Canadiens qui ont rempli ce formulaire. Madame le sénateur n'en convient-elle pas?

Le sénateur Milne: Je répète qu'une promesse de ce genre est faite sur les formulaires de recensement des États-Unis, de la Grande- Bretagne, de la France et de l'Allemagne, et chacun de ces pays finit par rendre publiques les données du recensement.

Le sénateur Lynch-Staunton: Et alors?

Le sénateur Oliver: Ce n'est pas bien pour autant.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Murray, le débat est ajourné.)

LE CODE DE DÉONTOLOGIE ET LES LIGNES DIRECTRICES EN MATIÈRE D'ÉTHIQUE

RAPPORT INTÉRIMAIRE DU COMITÉ DU RÈGLEMENT, DE LA PROCÉDURE ET DES DROITS DU PARLEMENT—AJOURNEMENT DU DÉBAT

Le Sénat passe à l'étude du huitième rapport (intérimaire) du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement intitulé L'initiative du gouvernement en matière d'éthique, déposé auprès du greffier du Sénat le 10 avril 2003.

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, je prends la parole pour lancer le débat sur le rapport provisoire du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement sur les propositions du gouvernement en matière d'éthique.

Depuis que nous sommes revenus des vacances de Noël, notre comité a consacré de nombreuses heures à étudier la meilleure manière de mettre en place de nouvelles règles d'éthique au Sénat. Nous avons entendu de nombreux témoins, et je pense qu'il convient de les nommer. Du monde universitaire, nous avons reçu David Smith, de l'Université de la Saskatchewan à Saskatoon; Dale Gibson, de l'Université de l'Alberta; Maureen Mancuso, de l'Université de Guelph; et Peter Mercer, de l'Université Western Ontario. Nous avons entendu le très honorable Herb Gray et l'ancien sénateur John Stewart, qui nous ont fait part de leur point de vue d'ex-parlementaires. Nous avons entendu lord Williams of Mostyn et Brendan Keith, qui est greffier au registre de la Chambre des lords en Grande-Bretagne. Ils ont parlé au comité de l'expérience britannique. Nous avons également mis à contribution l'actuel commissaire fédéral à l'éthique, Howard Wilson, et deux de ses homologues provinciaux, Robert Clark, de l'Alberta, et Ted Hughes, des Territoires du Nord-Ouest, qui nous ont fait part de leur expérience.

Ce rapport, qui a été déposé le 10 avril auprès du greffier, décrit dans le menu détail le rôle et les fonctions du commissaire à l'éthique. Je parlerai tout à l'heure de nos recommandations, mais je tiens avant tout à porter deux choses à l'attention des sénateurs. D'abord, nous avons mis le Règlement actuel du Sénat en annexe au rapport. Toutefois, votre comité n'a pas encore examiné les règles qui devraient former un code de conduite. Ce rapport ne traite pas de questions spécifiques comme la déclaration des biens détenus par les conjoints, les dons faits aux sénateurs ou les frais de voyage payés par des tiers. Toutes ces questions seront examinées dans la seconde phase de l'étude de ce projet de loi. Ensuite, et plus important encore, votre comité n'a pas pris position sur la question de savoir si le poste de commissaire à l'éthique devrait être créé au moyen d'une loi ou conformément au Règlement du Sénat. J'y reviendrai plus tard.

Les membres du comité se sont entendus sur dix points importants, dont huit sont des recommandations faites au gouvernement sur la création du poste de commissaire à l'éthique. Je vais commenter brièvement ici chacun de ces huit points. Les sénateurs doivent savoir que le comité a peiné sur ces recommandations, dont il a arrêté les moindres détails. Ces recommandations témoignent d'un véritable consensus au sein du comité.

(1450)

En ce qui concerne la création du poste de commissaire à l'éthique, il y a seulement une question que votre comité n'a pas encore réglée. J'espère sincèrement que, lorsque le gouvernement ira de l'avant avec cette initiative, l'esprit, sinon la lettre, de ces huit éléments dont nous avons convenu se reflétera dans les propositions.

Premièrement, «le Sénat, la Chambre des communes et le gouvernement doivent chacun avoir leur propre officier d'éthique». Un des éléments clés qui a sous-tendu le travail de votre comité, c'est l'importance de reconnaître que, conformément à la Constitution, le Sénat est une institution parlementaire indépendante ayant son propre objet et sa propre culture. Le seul fait que les sénateurs soient nommés plutôt qu'élus exige que les règles d'éthique soient établies en conséquence. Votre comité est absolument persuadé qu'un commissaire à l'éthique dont les responsabilités et les loyautés seraient divisées ne pourrait pas servir correctement cette institution. Le seul moyen de s'assurer que le système d'éthique reflète vraiment la réalité du Sénat est d'avoir notre propre commissaire à l'éthique.

Deuxièmement: «Les pouvoirs et les fonctions de l'officier du Sénat doivent être définis dans le Règlement du Sénat et s'exercer dans le cadre des pouvoirs, des devoirs, des droits et des obligations constitutionnels du Sénat.» Le Sénat doit non seulement être une Chambre séparée et distincte du Parlement, mais il doit aussi être une institution indépendante. De plus, les membres du comité croient fermement que le privilège parlementaire confère aux sénateurs le droit de se discipliner eux-mêmes sans ingérence des tribunaux, de la Chambre des communes ou du pouvoir exécutif.

Il ne fait pas de doute que les règles régissant la conduite des sénateurs dans les activités quotidiennes d'un officier d'éthique doivent être contenues dans le Règlement du Sénat et non pas dans une loi. Comme je l'expliquerai plus tard, les membres du comité sont encore profondément divisés sur la façon dont le poste devrait être créé.

Troisièmement: «L'officier d'éthique du Sénat doit être nommé après entente entre la direction des partis reconnus au Sénat et la tenue d'un vote de confirmation au Sénat.» Les membres du comité ont entendu le message très clair que les commissaires provinciaux en matière d'éthique avaient à leur livrer: La force du système dépendra de la confiance que les sénateurs auront dans l'officier d'éthique. Si tous les sénateurs n'ont pas l'impression de pouvoir être ouverts et honnêtes avec l'officier d'éthique, le système s'effondrera parce qu'il ne sera pas utile. En consultant systématiquement les sénateurs des deux côtés au sujet de la nomination du commissaire à l'éthique, le gouvernement peut contribuer largement à ce que le titulaire de ces fonctions jouisse de la confiance nécessaire pour exécuter ce travail délicat.

Quatrièmement: «L'officier d'éthique du Sénat doit avoir un mandat de sept ans.» Une des forces du Sénat, c'est sa mémoire institutionnelle. Le Sénat a en effet été créé parce que les fondateurs de notre pays croyaient que le Canada bénéficierait de l'apport de ceux qui ont une vaste expérience dont on peut s'inspirer. Les membres du comité ne croient pas que le mandat de cinq ans proposé dans le projet de loi suffit pour qu'une personne acquière une expérience caractéristique de cette Chambre du Parlement. Personnellement, je sais qu'il m'a fallu plusieurs années avant d'avoir l'impression d'avoir le pied marin à cet endroit et je ne suis même pas encore certaine de l'avoir.

Par conséquent, le comité a recommandé de porter à sept ans la durée du mandat. Je signale toutefois que nous n'avons pas encore réglé la question de savoir si ce mandat devrait être renouvelable.

Cinquièmement: «L'officier d'éthique du Sénat doit jouir d'une expérience juridique.» Les membres de votre comité sont généralement d'accord pour dire que la meilleure personne pour remplir le rôle de commissaire à l'éthique serait un juge à la retraite, mais cela ne veut pas dire que votre comité recommanderait de ne considérer que la candidature des juges à la retraite. Il serait quand même juste de dire que nous avons tous imaginé ce genre de personne dans ce poste. Il est bien certain que les fonctions de commissaire à l'éthique comportent un aspect juridique important, car le titulaire de ces fonctions sera appelé à évaluer la conduite de sénateurs en fonction de certaines règles, notamment en matière de conflits d'intérêts. Votre comité juge préférable de s'assurer que le candidat choisi ait une certaine expérience juridique.

Sixièmement: «Les règles de conduite, y compris celles qui sont actuellement en vigueur, doivent être incorporées dans le Règlement du Sénat après une étude détaillée.» Cette recommandation ressemble beaucoup à la deuxième, sauf que la perspective est légèrement différente. Il existe déjà des règles détaillées régissant la conduite des sénateurs. Votre comité trouve qu'il serait bon que toutes ces règles soient rassemblées en un tout cohérent. C'est le moyen le plus simple de s'assurer que toutes les questions d'éthique seront traitées efficacement, sans qu'il y ait chevauchement ou disparité, et de manière logique. Pour les raisons que j'ai soulignées plus tôt, le Règlement du Sénat représente le meilleur endroit où verser cet ensemble cohérent de règles, afin de garantir l'indépendance de l'institution qu'est le Sénat.

Septièmement: «L'officier d'éthique du Sénat peut offrir aux sénateurs avis et conseils sur leurs droits et leurs obligations aux termes des règles de conduite.» Ted Hughes, le commissaire à l'éthique du Yukon, a fait remarquer que 10 p. 100 de ses fonctions sont celles d'un policier et 90 p. 100, celles d'un prêtre. Il reste que le régime envisagé sera vraiment efficace s'il sert à mettre de l'ordre dans les affaires des sénateurs afin de prévenir tout conflit d'intérêts.

Votre comité a aussi entendu dire que, même si l'actuel commissaire à l'éthique du premier ministre, M. Howard Wilson, n'a pas d'obligations à l'égard des sénateurs, bon nombre de ceux-ci le consultent afin de bien organiser leurs affaires. Pour que le régime proposé fonctionne correctement, le commissaire à l'éthique doit pouvoir donner des avis et des conseils en toute confidentialité.

Huitièmement: «L'officier d'éthique du Sénat doit faire rapport et formuler des recommandations au Sénat ou à un de ses comités, suivant les modalités prévues par le Règlement du Sénat, mais la décision doit relever en dernier ressort du Sénat.» Je répète: «la décision doit relever en dernier ressort du Sénat.»

Honorables sénateurs, le comité tient à ce qu'il soit absolument clair que nous ne croyons pas que les tribunaux devraient avoir quelque rôle que ce soit à jouer ni dans l'administration du système d'éthique ni dans la prise de décisions à cet égard. Ces questions ne doivent pas être justiciables. Durant son témoignage devant le comité, Peter Mercer, de l'Université Western Ontario, a déclaré que certaines mesures devraient être prises pour que ces questions n'aboutissent pas devant les tribunaux. Sa recommandation clé à cet égard était de structurer le poste de commissaire à l'éthique pour qu'il soit clair qu'il n'est que consultatif et que c'est au Sénat de prendre les décisions finales. Les membres du comité étaient tous d'accord pour que le commissaire à l'éthique n'ait aucun pouvoir décisionnel et qu'il soit totalement soumis à la volonté du Sénat.

Ce sont là, honorables sénateurs, les recommandations que nous avons faites au gouvernement. Et je puis dire que ces questions-là ont recueilli de larges appuis au sein du comité. Je vais maintenant passer, toutefois, à un secteur où les désaccords étaient nombreux au comité.

Légiférer ou ne pas légiférer? Voilà la question. Le poste de commissaire à l'éthique devrait-il être créé en vertu du Règlement du Sénat ou les réalités modernes dictent-elles que nous procédions par voie législative? Franchement, les membres du comité étaient divisés sur cette question.

Comme je l'ai déjà dit, tous les membres du comité croient fermement qu'il faut que les tribunaux interviennent le moins possible dans ce domaine. En tant qu'organe indépendant du gouvernement et du Parlement, il nous incombe de déterminer si la conduite des sénateurs est acceptable. Si le poste est créé par voie législative, il ne fait pas de doute que le risque d'examen judiciaire s'en trouvera accru.

En outre, plus le régime renferme d'éléments dans la loi, plus le risque d'intervention judiciaire est élevé.

(1500)

Certains sénateurs qui siègent au comité sont d'avis que tout risque d'ingérence judiciaire doit être évité et que nous devons protéger le privilège parlementaire à tout prix. Ils soutiennent que c'est aux sénateurs qu'il incombe de protéger nos privilèges. D'autres membres du comité ont une opinion très différente. Certains affirment qu'un système fondé sur une loi donnerait aux Canadiens le système solide, indépendant et transparent qu'ils méritent.

On semblait avoir l'impression, au sein du comité, que divers mandataires du Parlement dont les postes sont créés en vertu d'une loi sont perçus par le public comme étant indépendants. Certains ont laissé entendre que, si le poste de commissaire à l'éthique était créé en vertu du Règlement du Sénat, le public verrait cela comme une tentative pour faire en sorte que les enquêtes sur les questions d'éthique ne sortent pas du Sénat, que j'ai entendu des gens décrire comme étant le «club des vieux copains». Ces sénateurs ont fait remarquer que le public surveille de près tous nos gestes.

Dans son témoignage, Mme Maureen Mancuso, de l'Université de Guelph, a signalé que «deux Canadiens sur cinq n'ont aucunement confiance au Sénat», et que 61 p. 100 des Canadiens croient que la meilleure façon de réduire la corruption au gouvernement serait de créer «une commission à l'éthique indépendante, chargée de faire enquête sur les plaintes du public». Certains sénateurs croient qu'un poste de commissaire à l'éthique créé en vertu du Règlement ne pourrait pas répondre à ces préoccupations très réelles du public.

Comme je l'ai dit au départ, ce rapport est le fruit d'efforts considérables de la part du comité. Chaque mot a été soigneusement pesé et représente un consensus au sein du comité, même s'il ne s'agit pas d'un rapport final. Nous avons passé presque 12 heures à rédiger le rapport, dont une journée de huit heures, en fait juste pour finaliser les dix points. J'ai parlé de huit d'entre eux aujourd'hui, et les sénateurs les trouveront au début du rapport. Nous avons également entendu tous les témoins que j'ai énumérés au début de mon intervention.

Je crois que c'est un bon rapport, auquel votre comité a consacré beaucoup de temps et d'efforts. Honorables sénateurs, je suis ravie de vous remettre ce rapport pour analyse. Vous pouvez avoir l'assurance que le comité continuera de se pencher sur de nombreux problèmes liés à cette importante question. J'espère que le gouvernement écoutera attentivement tout ce que nous avons dit. J'espère aussi que tous les sénateurs uniront leurs efforts en vue de mettre sur pied un nouveau régime d'éthique qui permettra à chacun d'entre nous d'obtenir au moment opportun des conseils éclairés et indépendants et qui sera le reflet de la nature unique de cette Chambre tout en répondant aux attentes sans cesse plus grandes des Canadiens.

Des voix: Bravo!

L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, je désire poser une question à l'honorable sénateur Milne.

Son Honneur le Président: J'ai le regret d'aviser les honorables sénateurs que le temps de parole du sénateur Milne est écoulé.

Le sénateur Milne: Honorables sénateurs, je suis fort disposée à répondre à des questions. Je demande au Sénat la permission que l'on m'accorde le temps de le faire.

Son Honneur le Président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, le comité a-t-il eu l'occasion d'étudier le témoignage de M. Mark Audcent, légiste du Sénat, concernant les articles 119 à 123 du Code criminel, relativement à l'anomalie que présentent les versions française et anglaise en ce qui concerne les termes «fonctionnaire» et «official» et au fait que les sénateurs tombent actuellement sous le coup de la définition du terme «official», si l'on tient compte de la décision du juge Dickson dans l'affaire Giguère, et au fait que cela crée, si l'on veut, une situation absurde dans le cadre de laquelle les sénateurs ne bénéficient pas de la protection accordée aux fonctionnaires dans une section préalable du Code criminel? Les sénateurs pourraient aussi, ce faisant, être inclus par inadvertance. Je n'ai pas entendu les observations de l'honorable sénateur à ce sujet. L'honorable sénateur ou le comité ont-ils étudié ce témoignage pour ensuite le rejeter ou, si tel n'est pas le cas, ont-ils l'intention d'analyser la question et de l'aborder plus en profondeur?

Le sénateur Milne: Je remercie le sénateur Kenny de sa question.

Honorables sénateurs, c'est une des questions dont nous avons discuté assez longuement. À notre avis, nous n'en étions qu'aux étapes préliminaires de cette étude et nous ne réagissions qu'à la création du poste de commissaire à l'éthique. Nous n'avons pas eu le temps d'aller plus loin. Toutefois, nous avons annexé à notre rapport toutes les dispositions s'appliquant actuellement aux sénateurs, y compris les dispositions du Code criminel. Définir un député ou un sénateur comme étant un «fonctionnaire», comme l'honorable sénateur l'a à juste titre souligné, est une anomalie. C'est un aspect sur lequel nous devrons nous pencher attentivement lorsque la mesure législative sera présentée, afin de veiller à ce que cette situation soit corrigée.

Le sénateur Kenny: Honorables sénateurs, il me semble que si vous allez procéder comme vous l'exposez dans ce rapport et que le comité suit les recommandations que vous proposez, puis que le rapport est adopté, nous nous doterons d'un outil bien incomplet si nous n'examinons pas avec soin les lois déjà en vigueur.

Le comité semble envisager un système axé sur le Règlement du Sénat, qui n'aurait pas besoin de se fonder sur une loi, mais qui serait compatible avec les lois et les règlements en vigueur et s'y harmoniserait. Ainsi, si le comité procède de cette manière, il semblerait pertinent de veiller à ce que ces textes de loi concordent et qu'ils soient efficaces et compatibles.

Le sénateur Milne: L'honorable sénateur Kenny a bien raison. Je le remercie de sa proposition.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, au nom du sénateur Carstairs, le débat est ajourné.)

[Français]

LE CODE CRIMINEL

PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—AJOURNEMENT DU DÉBAT

L'honorable Jean Lapointe propose: Que le projet de loi S-18, Loi modifiant le Code criminel (loteries), soit lu une deuxième fois.

— Honorables sénateurs, c'est avec beaucoup d'humilité que je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi S-18. Après mûre réflexion, à la suite de multiples rencontres et, après avoir étudié le dossier pendant plusieurs mois avec mes collaboratrices et mes collaborateurs, nous en sommes arrivés à la conclusion que les appareils de loterie vidéo dans les bars et les restaurants de huit provinces au pays représentent une calamité grave.

Ces appareils devraient être retirés de ces établissements pour être relocalisés dans les casinos, les hippodromes et les maisons affiliées comme les hippoclubs, tous gérés et seulement gérés par les gouvernements provinciaux.

En amendant le Code criminel canadien en ce sens, nous réussirons à freiner ce fléau qui, trop souvent, cause d'innombrables problèmes pour nos concitoyens. Nous avons pris connaissance de la situation plus en détail à la lecture de nombreuses études provenant tant de chercheurs d'universités partout au Canada, que de rapports émanant des gouvernements provinciaux, d'institutions privées et de travailleurs sociaux.

Selon les maisons qui viennent en aide aux joueurs compulsifs, la loterie vidéo est la forme de jeu qui crée le taux le plus élevé de dépendance et cela, dans une proportion monstre.

(1510)

Dans son rapport annuel de 1999-2000, la ligne de services téléphoniques d'informations (Jeu: aide et référence du Jeu pathologique du Québec) rapportait que:

Parmi les types de jeux mentionnés le plus souvent par les appelants en détresse, soulignons les loteries vidéo à 83 p. 100.

Le Dr Robert Ladouceur, un psychologue de l'Université Laval et un des chercheurs les plus en vue dans le domaine du jeu compulsif, a déclaré lors d'exposés sur le sujet des loteries vidéo que:

[...] 95 p. 100 des gens qu'il traite pour des problèmes reliés au jeu pathologique indiquent les loteries vidéo comme jeu auquel ils s'adonnent.

La Maison Claude Bilodeau, ouverte à l'automne 1999 et ayant pour but de venir en aide aux joueurs compulsifs, mentionnait que, depuis son ouverture:

[...] 94 p. 100 des demandes d'aide pour des problèmes reliés au jeu compulsif originaient de l'utilisation d'appareils de loterie vidéo.

[Traduction]

Selon le rapport sur le jeu préparé par Harold Wynne, du Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies, 78 p. 100 des gens ayant des problèmes de jeu jouent à la loterie vidéo.

[Français]

Selon une étude récente menée par la Maison Jean Lapointe sur le traitement du jeu pathologique:

Le jeu préféré des participants qui ont débuté la thérapie est la loterie vidéo et ce, à 83 p. 100.

L'Institut national de santé publique du Québec évalue que 9 p. 100 des utilisateurs de loteries vidéo développent une dépendance; et dans toutes les recherches consultées, les loteries vidéo représentent unanimement et très majoritairement la principale source de problèmes des joueurs qui cherchent de l'aide, ceci variant entre 80 p. 100 et 90 p. 100.

[Traduction]

Selon une étude publiée dans la Revue canadienne de psychiatrie, la plupart des joueurs compulsifs sont dépendants des loteries vidéo, auxquelles ils jouent quotidiennement ou plusieurs fois par semaine. Ainsi, ils restent près de chez eux et utilisent les appareils disponibles dans les bars des environs. Le Dr David Hodgins, de l'Université de Calgary, a affirmé dans un exposé présenté au Comité consultatif de l'Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies qu'il y avait 3 p. 100 de joueurs compulsifs et 2 p. 100 de joueurs pathologiques en Alberta, et que 86 p. 100 des gens qui vont chercher de l'aide en Alberta jouent à des loteries vidéo.

Une étude intitulée The Prevalence of Problem Gambling in Prince Edward Island a été publiée en octobre 1999. Selon elle, la vaste majorité des problèmes dans la vie de 70 joueurs pathologiques sur les 71 admis au programme viennent principalement de la loterie vidéo.

[Français]

Un des problèmes majeurs est l'accessibilité. Que ce soit dans les grandes villes ou dans les villages, il est difficile de trouver une seule rue ou avenue d'importance sans y retrouver ces appareils destructeurs. Un autre problème d'importance égale est celui de la visibilité. Les jeunes qui vont dans les bars pour s'amuser entre amis sont attirés par les loteries vidéo; si on pense aux jeunes de la génération Nintendo, ils succomberont inévitablement à leur attrait. Je me fais un portrait très pessimiste de l'impact de la loterie vidéo sur ces jeunes pour l'avenir.

[Traduction]

Les chercheurs disent craindre davantage pour l'avenir des adolescents que celui des adultes. Les enfants d'aujourd'hui représentent la première génération à grandir dans un monde où le jeu de hasard n'est pas perçu comme un danger, où, en fait, les églises, les entreprises de services et les gouvernements approuvent des jeux de hasard comme moyen de recueillir des fonds. Ils sont légaux, ils sont acceptés et les enfants d'aujourd'hui n'ont jamais vécu à une époque où les jeux de hasard ne faisaient pas partie de la société.

Ces craintes sont justifiées selon les résultats de nombreuses études de recherche comme celles menées à Windsor et au Québec par les chercheurs reconnus Jeffery Derevensky et Rina Gupta, de l'Université McGill, et Harold Wynne, de Wynne Ressources en Colombie-Britannique. D'après les travaux de Gupta, Derevensky et Wynne, de plus en plus d'adolescents s'adonnent aux jeux de hasard, qui sont en passe de devenir un problème grave pour 4 à 18 p. 100 d'entre eux.

[Français]

Dans son rapport publié en août 2000, la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec mentionnait qu'en 1996, dans la région de Québec, on a constaté que 7,4 p. 100 des jeunes de moins de 18 ans présentaient des problèmes reliés au jeu; 34 p. 100 des jeunes ayant participé à cette étude ont répondu avoir déjà joué sur des appareils de loterie vidéo. Ils ont donc joué alors qu'ils étaient mineurs.

[Traduction]

Dans sa déclaration de principe sur la politique relative au jeu de hasard au Manitoba, l'Association des travailleurs sociaux du Manitoba a déclaré que des cinq catégories d'âge, la plus jeune, les personnes âgées entre 18 et 24 ans, contenait le plus haut pourcentage, 66 p. 100, de personnes ayant joué à la loterie vidéo au cours de l'année. Leurs études indiquent que les jeunes sont extrêmement susceptibles d'utiliser des appareils de jeu de hasard comme les appareils de loterie vidéo.

[Français]

Le jeu pathologique et compulsif a d'importantes répercussions sociales et financières sur les individus, la famille et la société en général. Que de détresse, de foyers démantelés, de suicides et de crimes commis par les dépendants des loteries vidéo!

Je pose la question aux honorables sénateurs: pourquoi retrouvons-nous la grande majorité de ces appareils destructeurs dans nos quartiers les plus défavorisés? Ces problèmes représentent un lourd fardeau pour le système de soins de santé, mobilisent les tribunaux et se révèlent très coûteux pour les contribuables. Je prends la liberté de vous citer quelques-uns des problèmes les plus fréquents reliés au jeu compulsif qui, lui, est causé en grande partie par ces loteries vidéo.

Au niveau personnel, le jeu provoque souvent chez l'individu un endettement qui peut conduire jusqu'à la faillite. La santé de l'individu est donc mise en cause et engendre le stress, la dépression et parfois le suicide.

Selon M. Sol Boxenbaum, chef de la direction des opérations chez Viva Consulting Family Life Inc., maison qui traite plusieurs aspects reliés au jeu:

Le jeu pathologique détient le taux de suicide le plus élevé de toutes les dépendances. Depuis que le Coroner du Québec a débuté la compilation des données, 109 suicides ont été reliés directement au jeu, dont au moins 49 au cours des trois dernières années. Ces données ont été confirmées par des notes suicidaires laissées aux familles de ces victimes. Combien de suicidés n'ont pas laissé de note et, comme le jeu pathologique est une dépendance tellement secrète, combien de familles n'étaient même pas au courant du problème? Combien de suicides sont camouflés par des morts accidentelles? Certains joueurs désespérés ne veulent pas imposer à leur famille la douleur de leur suicide, et d'autres passent à l'acte en espérant que celle-ci pourra bénéficier de leur police d'assurance-vie.

[Traduction]

MM. Garry Smith, Harold Wynne et Tim Harnagel, dans leur étude rendue publique en mars 2003 et intitulée «Examining Police Records to Assess Gambling Impacts: A Study of Gambling- Related Crime in the City of Edmonton», ont dit:

Du point de vue des coûts sociaux et humains, la dépendance au jeu était un facteur dans quatre suicides et une tentative de suicide survenus à Edmonton au cours de la période de 20 mois visée par l'étude. Nous réitérons que ces chiffres peuvent minimiser la gravité du problème, puisque dans la plupart des cas les suicidés ne laissent pas de note ou les motifs sont inconnus.

[Français]

Pour la famille, les effets pervers du jeu peuvent entraîner un manque de sources financières destinées aux besoins primaires des enfants. C'est alors que nous pouvons conclure que la famille au complet souffre des effets pervers du jeu.

[Traduction]

(1520)

Dans ses résolutions de 1999 au sujet des appareils de loterie vidéo, l'Association canadienne de santé publique a affirmé que les travaux de recherche avaient démontré que le nombre de tentatives de suicide, de dépressions nerveuses et de cas de toxicomanie est plus élevé que la normale chez les conjoints des joueurs à problèmes, et que les enfants de ces joueurs ont des troubles de comportement et d'adaptation liés aux études, à l'abus de drogues et d'alcool, aux fugues et aux détentions.

[Français]

Au travail, les répercussions du jeu compulsif se font sentir par la perte de productivité et l'absentéisme.

Les joueurs compulsifs en détresse peuvent aller jusqu'à flirter avec le crime. Il est rapporté que ceux-ci ont recours au vol et à la fraude pour financer leurs habitudes de jeu.

[Traduction]

Dans leur étude rendue publique en mars 2003, MM. Smith, Wynne et Hartnagel ont dit:

Le rythme trépidant et ininterrompu des jeux de hasard comme les appareils de loterie vidéo et les machines à sous est le plus étroitement associé au jeu compulsif; par voie de conséquence, les crimes les plus communément associés au jeu compulsif (la fraude, la violence conjugale, le vol et le suicide) sont liés aux jeux de hasard comportant le plus grand risque de créer une dépendance.

[Français]

Pour ceux et celles qui croient que le fait d'enrayer les loteries vidéo des bars, des tavernes et des restaurants laisserait le chemin libre à plusieurs organisations illégales, laissez-moi dire que la légalisation des loteries vidéo n'a éliminé en rien les abus causés par les prêts usuraires et les prêts sur gage, et ce surtout au grand détriment des joueurs compulsifs.

Dans un autre ordre d'idées, dans la plupart des provinces, le jeu est devenu une vache à lait illusoire. Si on prend les chiffres avancés par le professeur Neil Tudiver, de l'Université du Manitoba, un joueur compulsif coûte à la société 56 000 $ par année. En prenant l'exemple du Québec, 2 p. 100 de la population éprouve un problème de jeu compulsif, selon Loto-Québec. Ces chiffres sont très conservateurs puisqu'ils ne tiennent pas compte des données fournies par les maisons et les experts qui viennent en aide aux joueurs compulsifs. C'est donc 140 000 Québécois qui sont aux prises avec le jeu compulsif et une moyenne de 89 p. 100 de ceux-ci qui éprouvent un problème avec la loterie vidéo. Honorables sénateurs, je vous invite donc à faire le calcul rapide et je vous laisse juger des résultats.

En adoptant le projet de loi S-18, le gouvernement du Canada viendra en aide aux provinces qui font un déficit avec leurs loteries vidéo et non un profit, contrairement aux prétentions de certains représentants des gouvernements provinciaux. À l'inverse de ce que l'on pourrait penser, j'ai beaucoup de sympathie pour les tenanciers de restaurants, de bars et de tavernes qui exploitent des loteries vidéo dans leurs établissements. Je suggère fortement que les bénéfices engendrés par la suppression des loteries vidéo soient réinvestis dans ces entreprises afin de combler leur manque à gagner.

Le jeu est devenu au sein de notre société un phénomène omniprésent. Le problème du jeu pathologique est en hausse au pays et ce, dans une proportion effarante. Ce dernier ne connaît pas de frontière, au même titre que le problème de l'environnement. D'un océan à l'autre, les populations de nos provinces font face à un fléau d'une importance telle que le gouvernement fédéral se doit de prendre ses responsabilités et de mettre un frein au drame que subissent trop de familles canadiennes.

Je crois sincèrement que si nous nous attaquons à l'accessibilité et à la visibilité des loteries vidéo, cela pourrait avoir un effet positif sur notre société. C'est pourquoi je vous demande, honorables sénateurs, d'appuyer le projet de loi S-18 de façon expéditive afin de sauver le plus grand nombre de vies humaines et d'enrayer cette grave détresse subie non seulement par les joueurs compulsifs, mais aussi par tous ceux et celles qui les entourent.

L'élimination des loteries vidéo, en dehors des casinos, des champs de course et des maisons affiliées à travers le pays, aurait pour conséquence d'améliorer la qualité de vie de nos concitoyens et particulièrement celle de nos jeunes et de nos aînés.

[Traduction]

L'honorable Tommy Banks: L'honorable sénateur accepte-t-il de répondre à une question?

Le sénateur Lapointe: Oui.

Le sénateur Banks: Honorables sénateurs, je suis entièrement d'accord sur ce que vient de dire l'honorable sénateur Lapointe et j'appuie l'objectif du projet de loi. L'omniprésence des appareils de loterie vidéo est un fléau, cela ne fait aucun doute. Toutefois, comme le sénateur l'a dit, ces appareils représentent également une source de revenu pour les provinces. Je n'ai pas fait de recherche, mais ce sont ces dernières, sauf erreur, qui émettent les permis d'installation. Le sénateur s'est-il renseigné au sujet de la réaction qu'elles sont susceptibles d'avoir face à ce que d'aucuns pourraient considérer comme de l'ingérence si jamais l'exploitation de ces appareils était visée par le Code criminel?

[Français]

Le sénateur Lapointe: Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Banks de son intervention. Certaines provinces vont réagir négativement parce que c'est leur territoire. Ce que nous proposons ne relève pas du territoire des provinces puisqu'il s'agit d'un amendement au Code criminel. Que les provinces soient consentantes ou pas, je me fous éperdument de leur réaction. J'essaie de venir en aide à l'ensemble des citoyens de mon pays. La démarche que je vous expose aujourd'hui, au cas où vous ne le sauriez pas, est approuvée, selon un centre de recherche, par 70 p. 100 des citoyens canadiens. La réaction des provinces ne va pas aller à l'encontre de 70 p. 100 de leurs commettants. Ceux-ci votent quand les députés se représentent à une élection. Si on vote contre ce projet alors que les loteries sont en train de détruire nos aînés et nos jeunes, c'est que nous aurons affaire à des gens impliqués dans les machines, qui n'ont pas de coeur ou qui n'ont pas à coeur l'intérêt de notre pays.

[Traduction]

L'honorable Herbert O. Sparrow: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Lapointe accepterait peut-être de répondre à une autre question et, si vous permettez, je voudrais formuler une observation au préalable, car je pourrais ne pas avoir bien compris ce qu'il a dit dans son discours.

Je crois comprendre — et vous pouvez me corriger — que le jeu au Canada est une responsabilité fédérale. Il est traité dans le Code criminel. Il y a quelques années, le gouvernement fédéral a conclu avec les provinces un accord aux termes duquel on permet aux provinces de contrôler le jeu, mais cette permission peut être reprise par le gouvernement fédéral en tout temps.

Aux termes du Code criminel, le gouvernement fédéral a-t-il le plein pouvoir, s'il souhaite l'utiliser, sur le jeu dans les provinces? De plus, savez-vous que Statistique Canada vient de publier un rapport sur le jeu au Canada? Il montre que, au cours du dernier exercice, le jeu a rapporté six milliards de dollars aux provinces. Il s'agit d'un bénéfice de six milliards de dollars. On estime que la collectivité elle- même consacre plus de 18 milliards de dollars au jeu; ce sont les pertes que les citoyens subissent. Ce montant se rapproche beaucoup des recettes totales de la TPS dans tout le pays.

Veuillez corriger ces chiffres si vous le pouvez. En fonction des données de Statistique Canada, du moins, l'utilisation des appareils de loterie vidéo est un terrible problème. Le sénateur Banks a parlé de fléau et je pense que c'est un terme qui convient bien. Nous prenons principalement de l'argent aux pauvres de notre pays. Un foyer moyen au Canada qui gagne 20 000 $ ou moins dépense en moyenne 357 $ pour le jeu en une saison. Ce sont des chiffres dont nous n'avons pas lieu d'être fiers en tant que nation. Devrions-nous permettre que cela se produise?

Ma prochaine question est celle-ci: le sénateur croit-il que le Sénat devrait étudier le jeu au Canada dans un avenir rapproché?

[Français]

(1530)

Le sénateur Lapointe: Honorables sénateurs, vous connaissez l'admiration que j'éprouve pour le sénateur Sparrow. S'il n'a pas compris en partie mon énoncé, je lui suggère d'utiliser les écouteurs pour l'interprétation comme je l'ai fait pour comprendre sa question. Je sais qu'il a un sens de l'humour très avancé, donc nous nous complétons sur ce point.

Je remercie le sénateur Sparrow de sa question. Les chiffres qu'il a rapportés sont très justes dans l'ensemble. Si 2 p. 100 de la population du Québec a un problème de jeu compulsif, il est établi que chacun de ces joueurs coûte 56 000 $ par année aux contribuables en traitements, en absentéisme et en toutes sortes d'implications sociales. Deux pour cent de la population, cela fait 140 000 Québécois, à 56 000 $ cela fait environ 7,8 milliards de dollars, et ce, seulement au Québec. Les profits des loteries vidéo du Québec sont de 692 millions de dollars, moins 7,8 milliards de dollars pour les traitements des joueurs compulsifs, qui entraînent une perte de 7,1 milliards dollars. S'il y a une perte de 7,1 milliards de dollars pour la province de Québec seulement, je me demande quelle est la perte totale à travers le Canada.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, le sénateur Lapointe connaît mon intérêt pour les questions sociales, où la prohibition joue un rôle pour mettre en oeuvre une politique publique.

Le sénateur a-t-il, dans ses travaux de recherches, étudié l'effort de prévention fait par les différentes autorités fédérales, provinciales, municipales et les régies régionales de santé publique dans les provinces? Quel est l'effort de prévention fait au Canada pour tenter de freiner ce fléau?

Le sénateur Lapointe: Il y a eu des efforts. J'ai été témoin d'efforts au Québec, où l'on stipule que le jeu doit rester un jeu. La roulette russe est aussi un jeu.

Les efforts de publicité ont été une partie infime de leur budget pour se donner bonne conscience. Ils étaient très minimes. Il y avait beaucoup plus d'investissements pour annoncer la prévention du jeu pathologique en expliquant que l'on aurait plus de succès que vous en obtenez dans la prévention de la consommation de la marijuana. Vous connaissez les résultats: ils sont nuls quand les jeunes veulent consommer ou jouer.

Le sénateur Nolin: En matière de consommation de cannabis, notre comité a démontré que la prohibition n'était pas un outil efficace pour prévenir la propagation d'un phénomène comme celui-là. Le projet de loi suggère d'utiliser la prohibition, pas tellement pour prohiber complètement, mais pour restreindre l'accès aux loteries vidéo. En introduisant cette prohibition, l'État ne voudra-t-il pas se satisfaire de sa responsabilité en disant: «Maintenant que j'ai modifié le Code criminel, je n'ai pas à faire de prévention parce que ma responsabilité est finalement assouvie en posant ce geste législatif»? C'est pourquoi je vous ai posé la question sur la prévention. Vous avez parlé de la publicité télévisée de Loto- Québec. Je suis d'accord avec vous, ce n'est pas uniquement une campagne de publicité qui doit être une mesure de prévention efficace. C'est beaucoup plus fastidieux et plus complexe qu'une simple campagne de publicité.

Je suis intéressé à en savoir plus. Si l'on modifie le Code criminel, cette modification n'annulerait-t-elle pas l'effort qui aurait lieu même si on introduit la mesure que vous nous demandez d'approuver?

Le sénateur Lapointe: Dès le début de votre intervention, j'ai compris où vous vouliez en venir.

Il ne s'agit pas de prohibition mais de relocalisation. Il s'agit d'enlever ces machines à la portée des gens. Ils deviennent dépendants parce qu'à deux portes de chez eux il y a des loteries vidéo.

Je vous donne un exemple. Une dame âgée de 71 ans, qui vit dans la région du leader de l'opposition à Magog, a hérité de deux édifices à appartements d'une valeur de plus de 300 000 $.

Sa sœur, pour lui changer les idées à la suite du décès de son mari, l'amène jouer au bingo. Au bout d'un certain temps il y a une intermission d'une demi-heure et elles descendent jouer à la loterie vidéo. Cette dame n'est jamais retournée au bingo, elle trouvait cela ennuyant. Elle est restée jouer à la loterie vidéo.

En cinq ans, elle a perdu ses deux édifices à appartements. Elle a perdu l'argent que son mari lui a laissé. Elle est aujourd'hui assistée sociale et lorsqu'elle reçoit son chèque, elle le joue à la loterie vidéo.

Un autre exemple: un homme d'environ 74 ans s'est suicidé après avoir perdu ses REER. Ce sont deux exemples dont j'ai entendu parler ces trois derniers mois.

(1540)

Le Nouveau-Brunswick a voté pour le maintien des loteries vidéo il y a quelques années. J'y étais la semaine dernière et j'ai posé des questions aux gens. S'il y avait un vote maintenant, cette loi se ferait battre à plate couture.

Des gens de coeur nous appuieront dans cette démarche. J'ai parlé à un député et nous avons uni nos efforts pour en arriver à une conclusion. C'est un homme de coeur et, à force de nous battre, nous passerons à travers pour aider les gens qui souffrent de cette maladie. Pour ceux qui veulent jouer, il n'y a pas de prohibition. On relocalise. Qu'ils prennent l'autobus ou un taxi. S'ils ont les moyens d'aller jouer au casino, ils ont les moyens de se payer un taxi.

(Sur la motion du sénateur Robichaud, au nom du sénateur LaPierre, le débat est ajourné.)

[Traduction]

VISITEURS DE MARQUE

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, avant de poursuivre, je voudrais signaler la présence à notre tribune d'un certain nombre de personnes: Le capitaine Ulf Snarby, de Liverpool, en Nouvelle-Écosse, lauréat du Atlantic Award for Responsible Fishing, et Mme Barbara Snarby; M. John Carriere, de Cumberland House, en Saskatchewan, lauréat du Freshwater Award for Responsible Fishing, et Mme Freda Carriere; M. Timothy Richards, de Heriot Bay, en Colombie-Britannique, lauréat du Pacific Award for Responsible Fishing, et Mme Linda Richards; le capitaine Rich Misner, de Port Dover, en Ontario, président du Conseil canadien des pratiques de pêche responsable.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite à tous la bienvenue au Sénat du Canada.

[Français]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, le mercredi, nous essayons de terminer les travaux de la Chambre aussi près que possible de 15 h 30 afin de permettre aux comités de siéger. Je propose que tous les points figurant à l'ordre du jour et au Feuilleton demeurent dans l'ordre actuel.

Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 1er mai 2003, à 13 h 30.)


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