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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 41e Législature,
Volume 148, Numéro 54

Le mardi 28 février 2012
L'honorable Noël A. Kinsella, Président


LE SÉNAT

Le mardi 28 février 2012

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.

Les travaux du Sénat

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, sachez qu'il y a eu des consultations entre les partis et qu'il a été convenu d'admettre des photographes sur le parquet du Sénat cet après-midi afin de photographier la présentation d'un nouveau sénateur, tout en restant le plus discrets possible.

[Traduction]

Nouveau sénateur

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur d'informer le Sénat que le greffier a reçu du registraire général du Canada un certificat établissant que l'honorable Vernon Darryl White a été appelé au Sénat.

Présentation

Son Honneur le Président informe le Sénat qu'un sénateur attend à la porte pour être présenté.

L'honorable sénateur suivant est présenté, puis remet les brefs de Sa Majesté l'appelant au Sénat. Le sénateur, en présence du greffier, prête le serment prescrit et prend son siège.

L'honorable Vernon Darryl White, d'Ottawa, en Ontario, présenté par l'honorable Marjory LeBreton, C.P., et l'honorable Michael L. MacDonald.

Son Honneur le Président informe le Sénat que l'honorable sénateur susmentionné a fait et signé la déclaration d'aptitude prescrite par la Loi constitutionnelle de 1867, en présence du greffier du Sénat, commissaire chargé de recevoir et d'attester cette déclaration.


(1410)

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Sa Majesté la reine Elizabeth II

Le jubilé de diamant

L'honorable Noël A. Kinsella : Honorables sénateurs, je prends la parole pour informer le Sénat de la présentation des bons vœux et des compliments des sénateurs à Sa Majesté la reine à l'occasion de son jubilé de diamant.

Des voix : Bravo!

[Français]

Il y a une semaine, le mardi 21 février 2012, j'ai eu le grand honneur d'être reçu en audience au palais de Buckingham. Sa Majesté a exprimé sa profonde reconnaissance et sa gratitude aux honorables sénateurs et sénatrices pour les vœux si généreux et chaleureux qu'ils lui ont offerts pour son jubilé de diamant.

[Traduction]

Honorables sénateurs, ce fut effectivement un grand honneur d'être reçu en audience par la reine, qui a exprimé sa profonde reconnaissance envers les sénateurs pour leurs vœux généreux et chaleureux à l'occasion du jubilé de diamant de Sa Majesté. Je suis heureux de vous informer que la reine Elizabeth était en pleine forme et qu'elle a participé activement aux discussions. La reine savait que le vitrail du jubilé de diamant avait été installé au dessus de l'entrée du Sénat, menant à l'édifice du Centre du Parlement, et que la cérémonie de dédicace avait eu lieu. Après avoir indiqué à quel point elle était heureuse que le projet ait été mené à bien, Sa Majesté m'a prié de transmettre aux sénateurs toute l'estime qu'elle a pour cette enceinte et l'assurance de sa constante bienveillance.

[Français]

Sa Majesté m'a demandé de transmettre aux honorables sénateurs et sénatrices l'assurance de sa plus haute considération et de sa bienveillance indéfectible.

[Traduction]

Le Mois de l'histoire des Noirs

Félicitations à l'occasion de l'intronisation de M. Graham Downey au Mur de l'excellence du révérend W.P. Oliver

L'honorable Terry M. Mercer : Honorables sénateurs, en février, Mois de l'histoire des Noirs, nous explorons l'histoire et la contribution des Afro-Canadiens à notre pays et notre société.

En Nouvelle-Écosse, février est le Mois du patrimoine africain.

Chaque année, la Black Cultural Society of Nova Scotia rend hommage à une personne qui a contribué de façon exceptionnelle à la collectivité. Le Mur de l'excellence du révérend W.P. Oliver a été construit en l'honneur du révérend William Oliver, qui a été décrit comme le défenseur néo-écossais de l'égalité. Si son nom vous semble familier, c'est parce que le révérend William Oliver est le demi-frère du sénateur Oliver.

Le 11 février dernier, le nom de Graham Downey a été ajouté au Mur de l'excellence du révérend W.P. Oliver. Ami et collègue de longue date, Graham a été le premier conseiller municipal noir de Halifax, poste qu'il a occupé pendant plus de 25 ans. Il a aussi été adjoint au maire.

Son petit-fils, Jerome Downey, a même brigué les suffrages au conseil municipal régional d'Halifax en 2008. Âgé de 23 ans, il était le plus jeune candidat.

Comme vous pouvez le constater, la politique et le service à la collectivité ont des racines profondes dans la famille Downey. Mais Graham n'est pas connu uniquement pour sa passion pour la vie municipale et la défense de la collectivité. Son frère Billy et lui étaient propriétaires du célèbre Arrows Club d'Halifax.

Une voix : Vous y êtes déjà allé?

Le sénateur Mercer : À plusieurs reprises.

En 2009, Billy a reçu le prix d'excellence de l'African Nova Scotian Music Association pour l'ensemble de ses réalisations. La musique et la culture ont elles aussi des racines profondes dans cette famille.

Au cours des années 1960 et 1970, l'Arrows Club était l'endroit branché par excellence. Les Haligoniens noirs pouvaient s'y rassembler pour célébrer leur culture dans une ville où, comme dans bien d'autres endroits, la ségrégation persistait dans une certaine mesure. C'est à l'Arrows Club qu'on pouvait entendre des artistes comme Teddy Pendergrass, Ben E. King ainsi que Ike et Tina Turner, sans oublier des artistes locaux tels Gordon et Harold Johnston, et Linda Carvey. J'ai passé plus que quelques heures à l'Arrows Club au fil des ans avec plusieurs de mes amis de la communauté noire de Nouvelle-Écosse. Les Downey étaient l'âme de ce club. Ils avaient créé toute une atmosphère d'entreprenariat dans le milieu du spectacle pour les gens de leur communauté.

Honorables sénateurs, je vous invite à vous joindre à moi pour féliciter Graham Downey, qui a reçu une distinction honorifique de la Black Cultural Society of Nova Scotia. Nous sommes également reconnaissants à Graham de sa contribution exceptionnelle à la communauté afro-canadienne, à la ville d'Halifax et à l'ensemble de la population néo-écossaise. Nos plus sincères félicitations.

L'honorable Vernon White

Félicitations à l'occasion de sa nomination

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour souhaiter la bienvenue à notre collègue le plus récent, le sénateur Vernon White, qui se joint à nous à la Chambre haute en tant que représentant de l'Ontario.

Né au Cap-Breton, le sénateur White — que la plupart d'entre nous connaissent mieux sous le titre de chef White — a consacré 30 ans de sa vie à la protection des Canadiens d'un océan à l'autre. Grâce à sa vaste expérience et à ses multiples connaissances, le sénateur White fera profiter le Sénat du Canada de sa perspective unique du milieu de l'application de la loi. Alors qu'il travaillait pour la Gendarmerie royale du Canada au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, le sénateur White a contribué considérablement à l'augmentation du nombre d'agents de police autochtones dans les collectivités du Nord. Étant donné la diversité et le caractère unique de la population dans le Nord, les fonctions policières quotidiennes y sont extrêmement différentes de ce qu'elles sont dans les grandes villes et les petites municipalités canadiennes.

Aux cours de ses années de service à la Gendarmerie royale du Canada, le sénateur White a aussi travaillé à Halifax, puis à Ottawa, où il a terminé cette étape de sa carrière en tant que commissaire adjoint à l'information et à l'identification.

Bien des gens seraient satisfaits d'avoir exercé une carrière aussi longue et glorieuse au sein du corps policier national du Canada, mais le sénateur White a refusé de se reposer sur ses lauriers. Doté d'un sens de l'éthique professionnelle incomparable — et ceux d'entre nous qui ont la chance d'habiter à Ottawa peuvent très bien en attester —, le sénateur White a décidé de relever de plus grands défis et d'assumer des responsabilités accrues. Il a entrepris une nouvelle étape de sa carrière dans le milieu de l'application de la loi lorsqu'en 2005, il a été nommé chef du service de police régional de Durham, poste qu'il a occupé jusqu'à ce qu'on lui demande de devenir chef de la police d'Ottawa. Le 22 mai 2007, Vernon White a été assermenté en tant que chef de police dans la capitale du Canada, poste qu'il a occupé jusqu'à sa nomination à la Chambre haute, qui a pris effet le 21 février, sur la recommandation du premier ministre Stephen Harper.

Durant sa longue carrière dans le milieu de l'application de la loi, le sénateur White a souvent milité en faveur de nombreuses initiatives du gouvernement visant à faire du Canada un endroit plus sûr pour les familles, les aînés et les personnes les plus vulnérables de notre société.

(1420)

Honorables sénateurs, je suis extrêmement heureuse que le sénateur White participe aux travaux de cette assemblée en y apportant son expérience et ses conseils. Il y jouera un rôle essentiel pour l'amélioration des conditions de vie de nos jeunes et des personnes vulnérables, comme je l'ai dit plus tôt, tout en veillant à ce que les importantes réformes au système de justice canadien projetées par le gouvernement continuent de protéger et de servir les Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

Sénateur White, j'ai le grand honneur de vous souhaiter la bienvenue à la Chambre haute du Parlement du Canada.

[Français]

Le Cirque du Soleil

L'honorable Andrée Champagne : Honorables sénateurs, qui d'entre nous n'a pas eu l'occasion, au moins une fois dans sa vie, de voir un des nombreux spectacles du Cirque du Soleil?

En voyant leur spectaculaire numéro lors de la remise des Oscars, dimanche soir dernier, j'ai presque oublié que les Américains parlent encore et toujours du Cirque du Soleil et je me suis plutôt retrouvée il y a 30 ans.

En 1985, Année internationale de la Jeunesse décrétée par l'ONU, j'avais l'honneur de diriger le ministère responsable. Nous avions alors un programme bien spécial qui visait à faciliter aux jeunes l'obtention d'un travail d'été, la réalisation d'un rêve.

Parmi les demandes reçues, l'une venait d'un groupe installé à Baie-Saint-Paul au Québec. Ceux-là préparaient des spectacles qui devaient avoir lieu à Vancouver au cours de l'été. On souhaitait ajouter à la troupe existante des jeunes de la région, dans le but de les initier aux différentes disciplines du monde du cirque. Le programme ne pouvait pas offrir des sommes très importantes, mais ces sommes quand même suffisantes pour permettre à la compagnie d'engager quelques jeunes. On espérait alors que certains apprendraient à aimer cette vie et deviendraient des membres actifs de la troupe pour plusieurs années à venir. La suite fait maintenant partie de l'histoire du Canada, puisque le Cirque du Soleil a atteint des sommets que personne ne pouvait imaginer en 1985.

En remerciement de cette première aide venue du gouvernement fédéral — bien sûr, elle a été suivie de plusieurs autres coups de pouce au cours des années —, le Cirque du Soleil m'avait fait parvenir un gilet de coton ouaté, à ses couleurs et avec son logo de l'époque. Croyez-le ou non, il est toujours dans mes tiroirs et il m'arrive encore de le porter fièrement quand le temps s'y prête.

Il y a eu un autre moment inoubliable lors de cette soirée des Oscars. Enfin, Christopher Plummer, ce Montréalais d'origine, a été reconnu par ses pairs après quelque 60 ans d'une carrière remarquable. Nous pouvons en être bien fiers.

Heureusement, les acteurs ne sont pas soumis aux mêmes restrictions que celle qui nous sont imposées, à nous sénateurs. Il n'aurait jamais eu cet Oscar il a 82 ans.

Dimanche soir, un autre moment assez extraordinaire fut le couronnement du film The Artist, pour lequel on a aussi célébré son interprète principal, M. Jean Dujardin. Comment expliquer que ce film français ait reçu tous ces prix?

Facile à expliquer, ont dit de méchantes langues, même à l'émission Vivement dimanche de Michel Drucker sur TV5. Elles ont affirmé que c'était facile à comprendre, puisqu'il s'agissait d'un film muet : « Quand nous, les Français, nous nous taisons, tout le monde nous aime. »

Le décès de M. Pierre Juneau, O.C.

L'honorable Marie-P. Poulin : Honorables sénateurs, la semaine dernière, le Canada, a malheureusement perdu l'un des plus grands promoteurs de la culture canadienne que notre pays ait connus. M. Pierre Juneau est décédé au terme d'une carrière remarquable, tant à la présidence de la Société Radio-Canada, où j'ai eu l'honneur de travailler avec lui, qu'au CRTC ou à l'ONF.

Pierre Juneau était plus qu'un administrateur talentueux, il était avant tout un passionné de l'identité canadienne, de l'expression artistique et culturelle d'ici, et de la radiodiffusion publique comme agent de développement et de diffusion pour nos talents canadiens. Honorables sénateurs, nous devons à Pierre Juneau une fière chandelle, parce qu'il aura allumé chez les Canadiennes et les Canadiens la flamme de la fierté qui nous anime aujourd'hui.

Pierre Juneau avait compris bien avant d'autres que l'unité canadienne dépend de la promotion de notre identité culturelle, en français, en anglais et dans le plein respect du patrimoine des Premières nations.

Il n'y a rien d'étonnant, donc, à ce que l'industrie de la musique ait récompensé son importante contribution en nommant les prix Juno en son honneur dès 1971.

Le défi du contenu canadien dans les médias, qu'il avait articulé en 1972, lors d'une conférence à l'Empire Club, bien avant l'ère d'Internet, demeure tout aussi vrai et prophétique aujourd'hui. Je le cite :

[Traduction]

La préservation et le développement de notre capacité de créer et de produire nos propres images est une chose dont nous ne pouvons tout simplement pas nous passer. Nous devrons fournir un effort soutenu et constant pour nous permettre de tout voir, y compris nous-mêmes, par nos propres yeux et par nos propres réseaux de production et de diffusion.

[Français]

Oui, Pierre Juneau a relevé ce défi, et ses efforts ont rapporté bien des dividendes. La vigilance dont il a fait preuve est toujours d'actualité.

Honorables sénateurs, Pierre Juneau avait d'autres passions, moins connues du public, que j'ai eu le plaisir d'observer lorsqu'il était mon supérieur et mon mentor à la Société Radio-Canada. En plus d'être un joueur de tennis talentueux, il était un homme tenace et constant, tant dans ses activités sportives que dans l'exercice de ses fonctions. Il avait le courage de ses convictions.

Pierre Juneau était également un père de famille qui accordait la plus grande importance aux liens familiaux. Pour lui, le Canada devait être l'agrégat des valeurs reconnues au sein même de nos familles. Les valeurs de bonté et de justice devaient primer, dans sa vie familiale et dans la société canadienne. Pierre Juneau était le même homme, bon et juste, dans ces deux environnements.

Il va nous manquer grandement. À son épouse, Mme Fernande Juneau, à ses enfants, André, Martin, Isabelle et à leur famille, j'offre mes sincères condoléances.

Honorables sénateurs, chers collègues, chaque fois que je verrai à la télévision une émission qui parle de nous, chaque fois qu'un artiste ou un film canadien connaîtra du succès à l'étranger, je remercierai Pierre Juneau de son leadership qui aura, encore une fois, renforcé ma fierté d'être Canadienne.

[Traduction]

Mme Sharmeen Obaid-Chinoy

Félicitations pour l'obtention d'un Oscar

L'honorable Salma Ataullahjan : Honorables sénateurs, je veux souligner la réalisation d'une Canadienne qui a été oubliée parmi les gagnants de notre pays à la cérémonie de remise des Oscars.

Sharmeen Obaid-Chinoy, qui a la double citoyenneté canadienne et pakistanaise, a remporté dimanche l'Oscar du meilleur documentaire court. Son film, Saving Face, qu'elle a codirigé et coproduit avec le cinéaste américain Daniel Junge, traite de femmes qui ont été victimes d'attaques à l'acide au Pakistan et du plasticien qui les a aidées. C'est un dossier particulièrement important, compte tenu que 70 p. 100 des victimes de telles attaques sont de jeunes femmes âgées de moins de 18 ans.

Même si le sujet de son documentaire est tragique et que ce type de tragédie ne se voit pas uniquement au Pakistan, Mme Obaid- Chinoy dit qu'elle s'est concentrée sur la victoire et non sur la défaite dans ce dossier. Son film est centré sur les héros qui aident les personnes dans le besoin et sur la dignité des victimes qui apprennent à vivre avec leur visage défiguré.

Quant à elle, le moment le plus mémorable du film survient lorsque le personnage principal accouche d'un garçon et décide de lui donner le nom du médecin qui l'a traitée, plutôt que celui de son mari, qui était l'agresseur. Cette femme veut que son fils grandisse en ayant le médecin comme modèle, plutôt que son propre père.

Mme Obaid-Chinoy, journaliste et cinéaste renommée qui a écrit dans des journaux au Canada et aux États-Unis, a aussi reçu un Emmy Awards en 2010. On remarque dans son œuvre le documentaire intitulé Highway of Tears, qui porte sur les femmes autochtones au Canada qui sont disparues le long de la route 16, en Colombie-Britannique.

Dans son discours de remerciements aux Oscars, Mme Obaid- Chinoy a dédié son prix à « toutes les femmes au Pakistan qui travaillent afin que la situation change ». J'ai, moi aussi, été à même de constater cette volonté. Ce sont vraiment les femmes du Pakistan qui sont en train de transformer la nation et de donner une image positive du pays.

J'espère que vous vous joindrez à moi pour rendre hommage à Sharmeen Obaid-Chinoy, qui est au nombre de ces femmes. Nous la félicitons d'avoir gagné le premier Oscar du Pakistan et d'avoir donné au Canada un prix précieux.

(1430)

Le don d'organes

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, au début du mois, l'Institut canadien d'information sur la santé a publié un rapport révélant que les besoins en matière de dons d'organes dépassent largement ce que peuvent offrir les Canadiens qui décident de faire don de leurs organes. En 2010, le nombre de dons a été le même qu'en 2006. En 2010, plus de 1 000 personnes, vivantes et décédées, ont fait l'objet d'un prélèvement d'organes. Cependant, il y avait encore environ 4 500 personnes sur les listes d'attente. Malheureusement, 229 de ces personnes sont décédées en cours d'attente.

La possibilité qu'un plus grand nombre de personnes meurent à cause de la stagnation du taux de donneurs d'organes est vraiment préoccupante. Par exemple, la grande majorité des gens sur les listes attendent un rein. Le rapport souligne que le nombre de patients qui ont reçu un diagnostic d'insuffisance rénale a plus que doublé depuis 1991. On s'attend à ce que ce nombre augmente davantage. Comme il y a de plus en plus de cas de maladies comme l'hypertension artérielle et le diabète, le besoin en reins sera plus élevé que jamais.

Heureusement, la campagne visant à accroître le nombre des Canadiens qui s'inscrivent comme donneur d'organes a récemment connu du succès. En janvier, Helene Campbell, une jeune Ontarienne qui attendait une double greffe des poumons, a mis Justin Bieber au défi de soutenir le don d'organes et de sang, et il a relevé le défi. C'est ainsi que le Réseau Trillium pour le don de vie, établi en Ontario, a vu une foule de personnes s'inscrire en ligne sur la liste des donneurs d'organes. Mme Campbell a continué sa campagne en apparaissant au Ellen DeGeneres Show, il y a moins de deux semaines. Je lui souhaite une meilleure santé, et j'espère que sa mission permettra de faire augmenter le nombre de dons d'organes.

Honorables sénateurs, j'encourage tout le monde à être un donneur d'organes. Selon les règles de votre province, il suffit de signer une carte de donneur d'organes ou d'indiquer sur votre carte santé ou votre permis de conduire que vous souhaitez faire don de vos organes. Je vous encourage à faire part de votre volonté à votre famille. Dans beaucoup de provinces, il faut avoir le consentement de la famille pour faire un don d'organes.

Enfin, je remercie tous les Canadiens qui ont déjà pris les mesures nécessaires pour être donneurs d'organes. Votre compassion et votre générosité remarquable donneront de l'espoir aux milliers de Canadiens qui attendent une greffe d'organes.

Les exportations de produits agricoles canadiens vers la Chine

L'honorable JoAnne L. Buth : Honorables sénateurs, la Chine, qui compte1,3 milliard d'habitants sur un territoire plus petit que celui du Canada, représente un marché important pour les produits agricoles canadiens. En 2010, la valeur de nos exportations agricoles destinées à la Chine se chiffrait à 2,6 milliards de dollars. À mesure que le revenu et le revenu disponible des consommateurs chinois augmenteront, leur consommation d'huile végétale et de viande augmentera aussi, ce qui offrira aux produits canadiens un marché en pleine croissance.

Je me suis rendue en Chine récemment avec le ministre de l'Agriculture, Gerry Ritz. Ce n'était pas mon premier voyage puisque, quand je travaillais dans le secteur du canola, je suis allée en Chine à plusieurs reprises afin d'étudier le développement des marchés et l'accès à ces derniers. Notre récente mission a montré, encore une fois, l'importance des efforts que fait le gouvernement canadien pour renforcer ses liens avec le gouvernement chinois et soutenir nos entreprises. La Chine est un pays remarquable regorgeant de possibilités. Le Canada doit y être très présent et continuer d'augmenter ses échanges commerciaux avec ce pays afin de créer plus d'emplois pour les Canadiens.

Les produits des agriculteurs et des éleveurs du Canada sont les meilleurs au monde, mais, comme le Canada compte relativement peu d'habitants, nous ne pouvons pas en consommer la totalité. À titre d'exemple, plus de 90 p. 100 de notre production de céréales et d'oléagineux est exportée. Il est essentiel de savoir profiter des possibilités des marchés pour assurer la réussite continue de nos agriculteurs et de notre industrie agricole. Si nous pouvons répondre aux besoins de la Chine grâce aux produits canadiens, nous bénéficierons d'un merveilleux marché d'exportation. Les demandes de la Chine entraînent une concurrence accrue à l'échelle mondiale, ce qui permet de stabiliser les prix et procure de meilleurs prix aux agriculteurs, aux éleveurs et à toute la chaîne de valeur agricole. Les démarches que fait le gouvernement du Canada pour ouvrir de nouveaux marchés et réduire les obstacles commerciaux sont essentielles à la rentabilité de tous les secteurs de l'industrie agricole.

Grâce aux efforts qu'il a déployés pour améliorer le développement des marchés et l'accès aux marchés, le ministre Ritz a pu faire plusieurs annonces importantes quand il était en Chine. Ces annonces portaient notamment sur l'exportation du suif de bœuf canadien, sur des discussions détaillées et techniques concernant l'exportation de bovins laitiers et de boucherie, et sur l'augmentation du commerce de la farine de canola et du matériel génétique porcin. Ces nouvelles possibilités pourraient représenter plus de 350 millions de dollars par année, ce qui permettra aux agriculteurs et aux éleveurs d'avoir plus d'argent dans leurs poches.

Honorables sénateurs, le monde du commerce et des affaires repose avant tout sur les relations. Alors que nos entreprises agricoles cherchent plus de débouchés sur les marchés mondiaux, les liens plus solides qui existent maintenant entre le Canada et la Chine, grâce aux efforts du premier ministre et du ministre Ritz, feront en sorte que le Canada sera prêt à répondre aux besoins de la Chine et à lui offrir les aliments et les produits alimentaires sûrs et de grande qualité qu'elle recherche, ce qui contribuera à soutenir les agriculteurs, les éleveurs et les emplois du Canada, en plus de renforcer l'économie canadienne.

Le Mois de l'histoire des Noirs

M. Daniel Grafton Hill, O.C., O.Ont.

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, alors que le Mois de l'histoire des Noirs tire à sa fin, j'attire votre attention sur la vie et les contributions de Daniel Grafton Hill, ou Dan Hill pour les intimes. Il fut un défenseur des droits de la personne, sociologue, fonctionnaire et historien spécialisé dans l'histoire des Noirs au Canada. Il est né en 1923, a grandi dans l'Ouest des États-Unis et a obtenu son diplôme de l'Université Howard, située à Washington, en 1949.

À la suite d'une année d'études à l'étranger, en Norvège — où il était libre de ses mouvements et avait le droit de fréquenter qui il voulait —, il a décidé qu'il ne pouvait plus accepter la ségrégation raciale en vigueur dans son pays. En 1950, il est venu au Canada et a entrepris des études de sociologie à l'Université de Toronto, où il a obtenu une maîtrise et un doctorat.

Dan Hill est, par la suite devenu chercheur au conseil de planification sociale de Toronto et secrétaire exécutif du conseil de planification sociale de North York. En outre, il était chargé de cours à l'Université de Toronto. Fort de son doctorat en sociologie et de sa décennie d'expérience à titre défenseur des droits civils, il est devenu le premier directeur de la Commission ontarienne des droits de la personne.

En 1984, il fut nommé ombudsman de l'Ontario. Pendant son mandat, il a créé des programmes essentiels d'approche destinés aux groupes traditionnellement exclus, plus particulièrement aux Autochtones du Canada. Après sa retraite, en 1989, il est devenu membre du Tribunal canadien des droits de la personne.

Au fil des ans, Dan Hill a également agi à plusieurs reprises comme conseiller, notamment auprès du président de l'Université de Toronto sur la question des droits de la personne et des libertés civiles et auprès du comité du maire de Toronto sur les relations avec la collectivité et les groupes raciaux. J'ai eu la chance de pouvoir compter sur ses conseils et son amitié pendant de nombreuses années.

Alors qu'il était déjà une autorité dans son domaine, Dan Hill est devenu un auteur accompli. En effet, il a rédigé une série d'articles sur l'histoire des Noirs au Canada. En outre, il est l'un des membres fondateurs de la Société de l'histoire des Noirs de l'Ontario. Son ouvrage le plus connu, intitulé The Freedom Seekers, Blacks in Early Canada, publié en 1981, a été utilisé dans les programmes d'enseignement secondaire par plusieurs provinces canadiennes.

Dan Hill est décédé en 2003, laissant derrière lui deux fils remarquables : Dan Hill, compositeur et interprète, et Lawrence Hill, auteur de renom. Ses réalisations sont son héritage. Comme il l'a lui-même dit :

[...] nous n'avons pas encore atteint la terre promise d'une société juste. [...] Toutefois, ce n'est pas une raison pour baisser les bras. Il y a quelque chose de trop important en jeu. Si on en juge par l'histoire, une leçon est très claire, tant qu'on enfreint, réduit ou élimine les droits de ne serait-ce qu'une personne, alors la liberté de tous est en danger [...]

Merci, Dan Hill.


[Français]

AFFAIRES COURANTES

Le Budget des dépenses de 2011-2012

Dépôt du Budget supplémentaire des dépenses (C)

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2012.

[Traduction]

Le Budget des dépenses de 2012-2013

Dépôt des parties I et II

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les parties I et II du Budget principal des dépenses de 2012-2013, pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013.

[Français]

Le travail

Le Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs—Dépôt du rapport annuel de 2010-2011

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport annuel du Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs, pour l'exercice qui a pris fin le 31 mars 2011.

(1440)

[Traduction]

Projet de loi sur la sécurité des rues et des communautés

Présentation du neuvième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

L'honorable John D. Wallace, président du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, présente le rapport suivant :

Le mardi 28 février 2012

Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a l'honneur de présenter son

NEUVIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-10, Loi édictant la Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorisme et modifiant la Loi sur l'immunité des États, le Code criminel, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et d'autres lois, a, conformément à l'ordre de renvoi du vendredi 16 décembre 011, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport avec les modifications suivantes :

1. Article 2, page 3 :

a) Remplacer la ligne 28 par ce qui suit :

« a) l'État étranger — dont l'immunité de juridiction est levée par application de l'article 6.1 de la Loi sur l'immunité des États — ou toute entité inscrite ou autre personne »;

b) Remplacer la ligne 30 par ce qui suit :

« b) l'État étranger — dont l'immunité de juridiction est levée par application de l'article 6.1 de la Loi sur l'immunité des États — ou toute entité inscrite ou ».

2. Nouvel article 3.1, page 5 : Ajouter avant la ligne 10 ce qui suit :

« 3.1 L'article 2 de la même loi est modifié par adjonction, selon l'ordre alphabétique, de ce qui suit :

« activité terroriste » S'entend au sens du paragraphe 83.01(1) du Code criminel dans les cas où l'acte ou l'omission en cause est commis, le 1er janvier 1985 ou après cette date, par un État étranger inscrit sur la liste visée au paragraphe 6.1(2). ».

3. Article 5, page 7 : Ajouter après la ligne 6 ce qui suit :

« (11) L'État étranger inscrit sur la liste visée au paragraphe (2) à l'égard duquel un tribunal compétent a conclu qu'il avait soutenu le terrorisme ne bénéficie pas de l'immunité de juridiction dans les actions intentées contre lui relativement à une activité terroriste à laquelle il s'est livré. ».

4. Article 6, page 7 : Remplacer la ligne 13 par ce qui suit :

« contre lui pour avoir soutenu le terrorisme ou pour s'être livré à une activité terroriste. ».

5. Article 7, page 7 :

a) Remplacer les lignes 18 et 19 par ce qui suit :

« commerciale, soit par l'État pour soutenir le terrorisme ou pour se livrer à une activité terroriste si celui-ci est inscrit sur la liste »;

b) Remplacer la ligne 28 par ce qui suit :

« avoir soutenu le terrorisme ou pour s'être livré à une activité terroriste, si celui-ci est ».

6. Article 9, page 8 : Remplacer la ligne 28 par ce qui suit :

« contre lui pour avoir soutenu le terrorisme ou pour s'être livré à une activité terroriste. ».

Votre comité a aussi effectué des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le président,
JOHN D. WALLACE

(Le texte des observations figure en annexe aux Journaux du Sénat d'aujourd'hui, p. 905.)

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, quand étudierons-nous le rapport?

(Sur la motion du sénateur Wallace, l'étude du rapport est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

[Français]

Le Budget des dépenses de 2011-2012

Avis de motion tendant à autoriser le Comité des finances nationales à étudier le Budget supplémentaire des dépenses (C)

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, plus tard aujourd'hui, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2012.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

Le Budget des dépenses de 2012-2013

Avis de motion tendant à autoriser le Comité des finances nationales à étudier le Budget principal des dépenses

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, plus tard aujourd'hui, je proposerai :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013, à l'exception du crédit 10 du Parlement.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

Avis de motion tendant à autoriser le Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement à étudier le crédit 10 du Budget principal des dépenses

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement) : Honorables sénateurs, je donne avis que, plus tard aujourd'hui, je proposerai :

Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues au crédit 10 du Parlement dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.

L'Assemblée parlementaire de la Francophonie

Le séminaire intitulé « Légiférer contre les violences faites aux femmes et aux filles », tenu du 30 mars au 1er avril 2011—Dépôt du rapport

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) concernant sa participation au séminaire parlementaire intitulé « Légiférer contre les violences faites aux femmes et aux filles » de l'Union interparlementaire et de l'Assemblée nationale de Burkina Faso, tenu du 30 mars au 1er avril 2011, à Ouagadougou, au Burkina Faso.

La réunion de la Commission de la coopération et du développement et la réunion du Réseau parlementaire de lutte contre le VIH/sida, tenues du 23 au 27 mai 2011—Dépôt du rapport

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) concernant sa participation à la réunion de la Commission de la coopération et du développement ainsi qu'à la réunion du Réseau parlementaire de lutte contre le VIH/sida, tenues à Phnom Penh, au Cambodge, du 23 au 27 mai 2011.

Le séminaire sur les femmes dans la vie politique, dans la vie civile et dans la vie familiale, ainsi que sur la mise en Œuvre de la Convention des Nations-Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes—tenu les 26 et 27 octobre 2011—Dépôt du rapport

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation parlementaire canadienne de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) concernant sa participation au Séminaire sur les femmes dans la vie politique, dans la vie civile et dans la vie familiale, ainsi que sur la mise en œuvre de la Convention des Nations-Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, tenu à Budapest, en Hongrie, les 26 et 27 octobre 2011.

Finances nationales

Avis de motion tendant à autoriser le comité à siéger durant les séances du Sénat et lors de l'ajournement du Sénat

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)a) du Règlement, je donne avis, que plus tard ce jour, je proposerai :

Que, jusqu'au 31 mars 2012, pour les fins de toute étude d'un projet de loi, de la teneur d'un projet de loi ou des prévisions budgétaires, le Comité sénatorial permanent des finances nationales :

a) soit autorisé à siéger même si le Sénat siège à ce moment-là, l'application de l'article 95(4) du Règlement étant suspendue à cet égard;

b) soit autorisé, conformément à l'article 95(3)a) du Règlement, à se réunir du lundi au vendredi, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix : D'accord.


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

Les ressources humaines et le développement des compétences

La banque d'emplois

L'honorable Catherine S. Callbeck : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement. Près d'un million et demi de Canadiens sont au chômage. Ils sont nombreux à utiliser la banque d'emplois du gouvernement fédéral, un répertoire électronique des emplois offerts par des employeurs de partout au pays. Cependant, lorsqu'on essaie d'utiliser la banque d'emplois actuellement, on reçoit le message suivant :

En raison de difficultés techniques, le Guichet emplois et le Guichet emplois pour employeurs ne sont pas disponibles présentement.

Ce site web est hors service depuis au moins 10 jours. Pourquoi faut-il tant de temps pour réparer un outil dont les chômeurs ont bien besoin?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, je remercie madame le sénateur de porter cette question à mon attention. J'ignore ce qui a causé l'interruption du service Guichet emplois. Je prends note de la question du sénateur. Je vais me renseigner sans délai pour connaître la raison de cette panne et savoir quand nous pouvons nous attendre à ce que le site soit de nouveau fonctionnel.

Les affaires étrangères

La Convention des Nations Unies sur les armes à sous-munitions

L'honorable Elizabeth Hubley : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'ai été heureuse de constater que, le mercredi 15 février, le gouvernement a déposé une copie de la Convention sur les armes à sous-munitions et une note explicative à l'autre endroit. C'est un premier pas vers la ratification du traité et j'ai bien hâte de voir la mesure législative à cette fin.

Je suis particulièrement curieuse de savoir comment le gouvernement interprétera l'article 21 de la convention. Cet article est important, car il énonce les dispositions sur l'interopérabilité militaire entre les États qui ont ratifié la convention et ceux qui ne l'ont pas fait.

Lors de la négociation du traité, le Canada a travaillé dur avec d'autres États ayant des vues similaires pour que l'article 21 vise une norme humanitaire élevée tout en permettant au Canada et aux autres États participants de s'engager dans des opérations militaires avec les alliés qui ne sont pas parties à la convention, comme les États-Unis.

Madame le leader peut-elle nous garantir que, lorsque la mesure législative sera présentée, l'article 21 sera interprété à la lumière des normes humanitaires les plus élevées et qu'il ne minera pas l'engagement du Canada envers les principes de la convention?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, le gouvernement a participé activement aux négociations de la Convention sur les armes à sous-munitions. Nous étions très heureux de compter parmi les premiers pays à signer la convention à Oslo, en décembre 2008. Le Canada estime que la convention est un instrument important pour protéger les civils contre l'utilisation d'armes à sous-munitions. Les préparatifs pour la ratification vont bon train. Comme le sénateur l'a mentionné, ce traité a été déposé à la Chambre des communes le 15 février.

Une mesure législative doit être adoptée pour entériner la ratification du traité. Elle devrait, nous l'espérons, être présentée très prochainement.

(1450)

[Français]

Le patrimoine canadien

La commémoration de la Guerre de 1812

L'honorable Roméo Antonius Dallaire : Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Récemment, nous avons eu le plaisir de participer aux cérémonies et aux activités qui ont entouré le Bal de neiges à Ottawa et au parc Jacques Cartier, de l'autre côté de la rivière.

Lors des activités, on voulait célébrer le 200e anniversaire de la guerre de 1812 sous le thème « Défendre le Canada ». Il est tout à fait approprié que l'on éduque notre jeunesse sur son histoire et les sacrifices que des gens ont dû consentir pour notre pays.

Je trouve difficile à comprendre qu’on ait laissé des armes entre les mains de jeunes enfants pour refléter la façon de défendre le Canada. Même sur nos bases militaires, à l’occasion des journées portes ouvertes, on ne met jamais des armes entre les mains des enfants. On ne leur permet pas de jouer, comme l’a dit M. Trépanier, aux cowboys et aux Indiens. On refuse de le faire. De plus, le Canada a signé la convention contre l’utilisation des enfants soldats, et cette convention prescrit qu’on ne devrait pas mettre des armes à feu entre les mains d’enfants âgés de moins de 18 ans.

Ce genre de commémoration sera-t-il répété lorsqu'on célébrera le 100e anniversaire de la Première Guerre mondiale en 2014?

[Traduction]

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Notre histoire, c'est notre histoire, et la guerre de 1812, pour ceux d'entre nous qui...

Une voix : Étaient là?

Le sénateur LeBreton : Presque. En fait, le capitaine John Le Breton, fondateur des plaines LeBreton, a servi chez les Britanniques dans la bataille de Lundy's Lane, si ma mémoire est fidèle. J'ignore les circonstances exactes de l'incident que le sénateur a décrit, mais je sais qu'il convient de commémorer la guerre de 1812, un épisode très important de l'histoire du Canada. Elle a défini notre pays au tout début de ce que nous appelons aujourd'hui le Canada. Je sais que des reconstitutions historiques ont lieu, particulièrement dans les diverses régions où la guerre de 1812 s'est déroulée. Je suis allée à l'une de ces cérémonies au fort Wellington, à Prescott, en Ontario. Il y avait beaucoup de participants, dont des jeunes. Je dirais au sénateur qu'il est difficile d'établir un lien entre le fait d'inciter des jeunes à participer à la reconstitution d'un épisode de notre histoire et la crainte d'armer nos enfants ou de promouvoir chez eux l'utilisation d'armes.

[Français]

Le sénateur Dallaire : Je suis aussi d’avis qu’il faut enseigner l’histoire à nos jeunes. Les militaires qui doivent défendre notre pays font une utilisation disciplinée de la force. Toutefois, il y a une différence avec le fait d’avoir un kiosque où des enfants de neuf, 10 ou 12 ans jouent avec des armes et les pointent les uns sur les autres et d’avoir le responsable de l’activité nous dire que ce n’est pas grave, que nous avons tous joué aux cowboys et aux Indiens. Pourtant, lorsque nous jouions aux cowboys et aux Indiens, c’était les cowboys contre les Indiens, sauf que les Indiens, pendant la guerre de 1812, étaient nos alliés. S’ils n’avaient pas été de notre côté, nous aurions perdu.

La ministre peut-elle nous garantir que, lors des commémorations futures, on usera d'un meilleur doigté, que des armes ne seront pas mises entre les mains des enfants afin de leur permettre de jouer aux soldats qui, eux, ont la responsabilité de défendre leur pays, rôle complètement différent pour lequel on ne veut pas impliquer des enfants en si bas âge?

[Traduction]

Le sénateur LeBreton : Je comprends les préoccupations du sénateur à cet égard, mais il s'agit ici d'un épisode important de l'histoire du Canada. Chose certaine, personne ne devrait assimiler les reconstitutions histoires ni quelque élément de notre histoire à un effort pour fausser l'esprit des jeunes en leur apprenant notre histoire. J'ai écouté l'entrée en matière de la question du sénateur. Dans notre société, nous avons aujourd'hui des jeux vidéo extrêmement agressifs et dangereux. Ce n'est qu'une opinion personnelle, mais les enfants ne retirent absolument rien de ces jeux.

Je ne sais pas exactement ce qui était proposé au parc Jacques- Cartier, mais je sais que l'intérêt suscité est vif, et c'est ce qu'il faut souhaiter. Je ne pense pas que les Canadiens connaissent assez bien leur histoire. Lorsque j'allais à l'école, il y a bien longtemps, l'histoire était l'une de mes meilleures matières. Dieu merci, je n'étais pas jugée d'après mes aptitudes en mathématiques. Quoi qu'il en soit, je ne crois pas que le fait d'enseigner aux jeunes et de les renseigner sur un épisode important de l'histoire du Canada contribue de quelque façon que ce soit à les inciter à vouloir se servir d'armes à feu par la suite.

Le sénateur Dallaire : J'ai l'impression que nous nous comprenons mal. Il ne s'agissait pas là-bas d'une commémoration dans laquelle on voit des gens se prêter à une reconstitution historique structurée.

C'était l'un des pires outils pédagogiques imaginables pour illustrer l'histoire de notre pays en mettant entre les mains d'enfants des imitations d'armes, et en les incitant à se tirer les uns sur les autres sous prétexte d'apprendre l'histoire. Je souhaiterais que, dans les commémorations à venir, on s'abstienne de ce genre de moyen pédagogique pervers pour instruire les jeunes et leur faire comprendre les sacrifices nécessaires pour préserver la liberté de notre pays et les sacrifices du passé.

Je demanderais à madame le leader, lorsqu'elle préparera toutes ces commémorations, dont celle de la bataille où mon beau-père a commandé — le régiment qui a combattu à Châteauguay en 1813, lors d'un moment fort de notre histoire — de vérifier les activités prévues pour éviter que nous ne répétions ce genre de chose-là.

Le sénateur LeBreton : J'éprouve un grand respect pour les opinions du sénateur, mais je dois m'inscrire en faux énergiquement contre l'entrée en matière de sa question. Notre histoire, c'est notre histoire. Je ne connais pas les détails de ce qui a été organisé au parc Jacques-Cartier, mais notre histoire reste notre histoire. Pouvez- vous imaginer que, lorsque nous essayons d'enseigner l'histoire de notre pays et de faire connaître les sacrifices consentis par les Canadiens à la Première Guerre mondiale, à la Seconde Guerre mondiale, dans le conflit coréen et ailleurs, nous ne puissions pas indiquer les outils qui ont été utilisés? Le Musée de la guerre, sur les plaines LeBreton, serait une caverne vide si nous ne pouvions pas enseigner cela aux enfants. Soit dit en passant, il y a aussi une grande exposition historique sur la guerre de 1812 au Musée de la guerre.

Je rejette complètement l'entrée en matière de la question du sénateur et son observation. Je ne crois pas que nous puissions réécrire l'histoire. L'histoire, c'est l'histoire, et les gens doivent comprendre tous les aspects de cette histoire : le bon, le mauvais, le vilain.

Le sénateur Dallaire : Il ne s'agit pas des faits historiques, mais de la façon d'enseigner l'histoire et des subventions données à ceux qui l'enseignent dans le cas dont j'ai parlé. Dans notre histoire, les jeunes de 12 ans ne sont pas battus à la guerre de 1812. Les enfants de neuf ans ne combattaient pas. En fait, ils souffraient à cause des combats. Il n'y a aucun lien entre le fait d'armer des enfants et notre histoire. En fait, aucune méthode pédagogique sérieuse ne permet de croire que le fait de laisser des enfants s'amuser avec des armes les aident à comprendre ce qui s'est passé à l'époque.

(1500)

Je tiens à signaler que, au Musée canadien de la guerre, personne ne joue avec ces armes. Les visiteurs les regardent. On leur montre ce qu'elles peuvent faire et on leur présente des renseignements d'une manière structurée. Bien sûr, on leur explique ce qui s'est passé. Toutefois, nous devons le faire d'une façon qui respecte les programmes éducatifs que nous avons dans notre pays et qui témoigne de notre respect envers ceux qui ont dû porter ces armes et les utiliser contre d'autres êtres humains.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je suppose que nous allons devoir nous entendre pour dire que nous ne nous entendons pas. Encore une fois, comme je l'ai mentionné, je ne sais pas de quelle façon les choses ont été présentées ni de quelle façon les gens ont participé. Je crois le sénateur sur parole à ce sujet. Pour moi, nous n'empoisonnons pas l'esprit de nos jeunes. Nous ne leur apprenons pas à être agressifs. Nous nous servons simplement de l'histoire pour leur apprendre ce qui s'est passé et ce qui a fait la grandeur de notre pays. Il se trouve que la guerre de 1812 fait partie de notre histoire.

La commémoration d'événements historiques

L'honorable Percy E. Downe : Honorables sénateurs, j'ai entendu madame le sénateur LeBreton dire que « notre histoire, c'est notre histoire ». Peut-elle nous dire si le gouvernement du Canada financera la célébration de la victoire remportée par le général Wolfe sur les plaines d'Abraham?

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Honorables sénateurs, nous parlons de la guerre de 1812. Nous parlons d'un événement majeur de l'histoire du Canada. Je ne répondrai pas à cette question. Je vais me contenter d'en prendre note.

Le sénateur Downe : Notre histoire, c'est notre histoire. Je suppose que la ministre n'essaie pas de récrire l'histoire. Si on finance la commémoration d'événements historiques, on ne peut pas se permettre d'être sélectif en finançant certains, mais pas d'autres. Est-ce que madame le leader peut déterminer si le gouvernement a l'intention de financer la commémoration de cet événement?

Le sénateur LeBreton : Notre histoire, c'est notre histoire, c'est vrai. Je connais bien l'événement historique que mentionne le sénateur. Je l'ai appris dans mes livres d'histoire, mais je n'ai rien d'autre à dire à ce sujet. Je vais simplement prendre note de la question.

Une voix : Proposez une motion.

Le sénateur Downe : Honorables sénateurs, le leader a dit que le problème est attribuable en partie au fait que nos jeunes ne connaissent pas notre histoire, contrairement à la situation qui existait lorsqu'elle-même allait à l'école. En finançant des commémorations, nous rendons les Canadiens plus conscients de leur histoire. Est-ce l'un des événements dont le gouvernement financera la commémoration?

Le sénateur LeBreton : Je sais — et ma collègue, madame le sénateur Verner, a joué un rôle de premier plan à cet égard — que le gouvernement a financé la célébration du 400e anniversaire de la fondation de Québec et que les festivités ont attiré de grandes foules. Je crois que cela a beaucoup contribué à la connaissance par les Canadiens de l'important rôle que la province de Québec a joué dans la création de notre pays et de l'histoire de la belle ville de Québec. Le sénateur Verner a déployé des efforts considérables pour concrétiser la commémoration de cet événement qui fait partie de notre histoire.

En ce qui concerne la question, j'en prends note, comme je l'ai mentionné.

Le sénateur Downe : Je suis heureux que le sénateur LeBreton ait soulevé la question du 400e anniversaire de Québec parce que je crois, moi aussi, que c'est un grand événement. Je félicite tous ceux qui s'en sont occupés. Je crois savoir que le gouvernement du Canada a dépensé 120 millions de dollars à cette occasion.

Pour le 400e anniversaire de Cupids, à Terre-Neuve-et-Labrador, le gouvernement du Canada a dépensé plus de 4 millions de dollars, soit plus de 5 400 $ par personne puisque Cupids a une population de 790 âmes.

Je me demande à quoi l'Île-du-Prince-Édouard peut s'attendre pour le 150e anniversaire de la conférence de 1864.

Le sénateur LeBreton : Honorables sénateurs, je me souviens de tous les arguments que nous ont présentés nos collègues de Terre- Neuve-et-Labrador au sujet de la commémoration du grand événement de Cupids. J'espère que le sénateur ne laisse pas entendre que le gouvernement n'aurait pas dû marquer cet événement. C'est ce que j'ai cru comprendre en l'écoutant. Quoi qu'il en soit, il semble être obsédé par cette commémoration. Toutes les cérémonies organisées à l'occasion du 400e anniversaire de Québec sont de notoriété publique.

Je n'ai participé à aucune discussion, honorables sénateurs. Je sais que nous avons organisé par le passé d'importantes cérémonies pour commémorer différents événements qui se sont produits à Charlottetown. Je vais donc simplement prendre note de la question.

Le sénateur Downe : Honorables sénateurs, le leader se trompe du tout au tout au sujet de mon interprétation de la commémoration de Cupids. Je suis absolument enchanté que le gouvernement ait trouvé le financement nécessaire. Je suis ravi qu'il ait dépensé 5 400 $ par personne. J'espère que ce sera la norme qu'il observera dans le cas de l'Île-du-Prince-Édouard, quoique j'en doute un peu.

Je me demande si le ministre peut nous informer, de préférence par écrit, du niveau de financement auquel l'Île-du-Prince-Édouard peut s'attendre pour la célébration du 150e anniversaire de la conférence de 1864, qui a abouti à la création de notre pays. C'est un événement tout ce qu'il y a de plus historique. Il serait bon que l'Île- du-Prince-Édouard puisse commencer déjà sa planification de la commémoration de cet événement en 2014.

Le sénateur LeBreton : Je remercie l'honorable sénateur de sa question. J'en prends note.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, si notre histoire est notre histoire, je me demande pourquoi le gouvernement n'a rien prévu à l'occasion du 30e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés, pour laquelle — nous le savons tous — beaucoup d'hommes et de femmes du Canada ont combattu et sont morts dans des endroits comme l'Afghanistan. Cet événement est lié aux principes de base de notre démocratie et de nos droits. Nous devrions le commémorer à l'intention de tous les enfants du pays.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Je suppose aussi que nous devrons célébrer le premier, le dixième, le 20e, le 30e, le 40e et le 50e anniversaire de votre naissance, sénateur Mitchell. Le fait est que les événements historiques sont ordinairement célébrés après un temps assez considérable, pas après 30 ans.

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer la réponse à une question orale posée par l'honorable sénateur Tardif, le 2 février 2012, au sujet de la nomination d'un arbitre à Postes Canada.

[Français]

Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer la réponse à la question orale posée par l'honorable sénateur Dawson, le 8 février 2012, concernant la Garde côtière et les services bilingues.

[Traduction]

Les langues officielles

La formation en langue seconde—La dualité linguistique

(Réponse à la question posée le 2 février 2012 par l'honorable Claudette Tardif)

Le 26 juin 2011, le projet de loi C-6, Loi prévoyant la reprise et le maintien des services postaux, a reçu la sanction royale. Cette loi a mis fin à l'arrêt de travail mettant en cause la Société canadienne des postes et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) et a renvoyé les questions non réglées à l'arbitrage.

Le 22 juillet 2011, l'honorable juge Coulter A. Osborne a été nommé arbitre dans cette affaire, conformément à la Loi. Le 18 août 2011, le STTP a déposé une requête à la Cour fédérale dans laquelle il contestait la nomination du juge Osborne.

Le 20 octobre 2011, la Cour fédérale a suspendu la procédure d'arbitrage entre Postes Canada et le STTP jusqu'à ce qu'elle rende sa décision concernant la contestation de la nomination. Le 1er novembre 2011, l'honorable juge Osborne a démissionné de ses fonctions d'arbitre dans le conflit.

Le 27 janvier 2012, la Cour fédérale a rendu une décision concernant la nomination du juge Osborne bien qu'il avait démissionné de sa nomination. La Cour fédérale reconnaît que le point est discutable, mais demeure déterminé que la personne qui serait nommée arbitre dans ce conflit devrait posséder, entre autres, une certaine expérience reconnue en relations du travail et être bilingue.

Le gouvernement du Canada examine actuellement cette décision. Le processus de nomination d'un nouvel arbitre est en cours. Les partis se rencontrent dans un effort de sélectionner un arbitre qui aura l'accord des deux partis.

Une fois nommé, l'arbitre devra régler le conflit de travail qui oppose les parties et imposer une nouvelle convention collective. Il disposera de 90 jours après sa nomination pour rendre sa décision tel qu'exigé dans la législation, à moins qu'une prorogation ne soit accordée.

[Français]

Les pêches et les océans

La Garde côtière—Les centres de coordination de sauvetage—Les services bilingues

(Réponse à la question posée le 8 février 2012 par l'honorable Dennis Dawson)

Pêches et Océans Canada s'engage à s'assurer que les opérations rapides et pertinentes de coordination de la recherche et du sauvetage maritimes et d'intervention sont disponibles pour tous les Canadiens. Cela comprend les marins du Québec.

La décision de fusionner les services de coordination des opérations de recherche et de sauvetage actuellement assurés par le Centre secondaire de sauvetage maritime de Québec avec ceux des Centres conjoints de coordination des opérations de sauvetage de Halifax (Nouvelle-Écosse) et Trenton (Ontario) ne nuira pas à la sécurité maritime.

L'objectif principal de cette fusion est d'améliorer l'efficience des services de coordination des activités de recherche et sauvetage maritimes en ayant dans les mêmes centres les coordonnateurs de la Garde côtière canadienne et des Forces canadiennes, permettant aux coordonnateurs des activités de recherche et de sauvetage maritimes et aériens de partager leurs connaissances et leurs ressources. La sécurité maritime sera toujours la priorité de la Garde côtière canadienne et nous reconnaissons l'importance fondamentale de ces services de sécurité pour les Canadiens.

Une équipe de mise en œuvre de la fusion, composée d'employés de la Garde côtière canadienne et du ministère de la Défense nationale, est en place pour s'assurer que Halifax et Trenton aient suffisamment de capacité et de compétences pour effectuer la fusion. Cela comprend la formation des nouveaux coordonnateurs et le transfert de toutes les pratiques et procédures locales dans les Centres conjoints de coordination des opérations de sauvetage de Halifax et Trenton.

Cette fusion ne réduira pas la coordination des opérations de recherche et de sauvetage ou les ressources d'intervention au Québec et n'aura aucune répercussion sur la sécurité des gens de mer.

Les normes de services existantes de la Garde côtière canadienne en matière de recherche et sauvetage maritime seront maintenues, y compris, notamment, l'expertise dans le domaine marin, les connaissances locales et la prestation de services dans les deux langues officielles. Une formation sera offerte afin de s'assurer que les niveaux de service appropriés sont établis et maintenus aussi bien dans le centre d'Halifax que de Trenton, tandis que la capacité bilingue sera augmentée au-dessus des niveaux actuellement en place à Halifax et à Trenton.

Les coordonnateurs de recherche et sauvetage, tout comme les équipages des navires de la Garde côtière et les employées des centres de Services de communications et de trafic maritimes possèdent des connaissances locales et ils sont tous des points de contact pour les navigateurs en détresse. Les officiers de la Garde côtière canadienne, les hélicoptères et les navires continueront de fournir une couverture de recherche et sauvetage au Québec.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

Le Code criminel
La Loi sur les armes à feu

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L'honorable Daniel Lang propose que le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les armes à feu, soit lu pour la deuxième fois.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-19, intitulé Loi sur l'abolition du registre des armes d'épaule.

Je commencerai par citer le poète George Santayana, qui a dit que ceux qui ne tirent pas de leçons de l'histoire sont condamnés à répéter les erreurs du passé. Laissez-moi vous expliquer.

Il y a 93 ans, le Parlement du Canada a adopté une loi sur le contrôle des armes à feu obligeant les propriétaires d'armes à feu à obtenir un permis pour toutes leurs armes, qu'il s'agisse d'armes légères, de carabines ou de fusils de chasse. Un an plus tard, cette disposition a été abrogée. Je me reporte aux débats du 6 mai 1921, alors que le ministre de la Justice, Charles Doherty, avait déclaré :

[...] l'on nous a généralement fait observer que la loi existante avait un effet trop rigoureux, qu'elle prête à des abus et cause aux citoyens d'inutiles ennuis.

(1510)

Honorables sénateurs, nous nous retrouvons aujourd'hui devant une situation d'une remarquable similitude, mais, cette fois, il a fallu 17 ans pour abolir une loi qui s'est avérée tout aussi inutile et agaçante.

L'élimination du registre des armes d'épaule est vraiment un moment historique, et notre débat va bien plus loin que le seul registre. Aujourd'hui, le Parlement lance un message de confiance aux propriétaires d'armes d'épaule respectueux des lois. Ils ont enfin eu gain de cause.

Honorables sénateurs, il est important de souligner que le projet de loi à l'étude est l'aboutissement de la décision que les Canadiens ont rendue le 2 mai dernier. Il suffit de signaler le cas de ma région, la circonscription du Yukon. Lorsque les élections ont été déclenchées, au printemps dernier, toutes les maisons de sondage peignaient en rouge le paysage politique du Yukon. Pendant la campagne, l'élimination du registre des armes d'épaule a été l'un des principaux enjeux. Le soir des élections, le paysage politique du Yukon a tourné au bleu. Comme nous le savons, ce fut la même chose dans beaucoup de circonscriptions partout au Canada.

Le registre des armes d'épaule s'est avéré un gaspillage total de l'argent des contribuables. Lorsque cette mesure a été proposée dans le projet de loi C-68, le ministre de la Justice à l'époque, Allan Rock, a déclaré ceci au sujet des coûts du projet de loi :

Nous pensons que cela coûtera 85 millions de dollars.

L'ancien sénateur Jean-Louis Roux a pris la parole ici même et appuyé ce chiffre de 85 millions de dollars, rejetant les affirmations de ceux qui critiquaient la mesure et prétendaient que la mise en place du système d'enregistrement coûterait entre 500 millions et 1,5 milliard de dollars.

Honorables sénateurs, le temps a montré que c'était pire encore. Dès 2004, CBC/Radio-Canada nous apprenait que le registre avait déjà coûté 2 milliards de dollars aux contribuables canadiens.

Au cours de l'étude du registre des armes d'épaule, les témoignages entendus à l'autre endroit en ont montré clairement l'inefficacité. Rien ne prouve que l'élimination du registre puisse changer quoi que ce soit au drame des suicides et des homicides.

Il importe également de signaler aux sénateurs que, d'après ce qu'on dit, les données du registre sont inexactes, les taux d'erreur se situant entre 43 et 90 p. 100. De plus, au cours des 17 années d'existence du registre, personne n'a jamais réussi à prouver que ce registre avait prévenu un seul crime ni sauvé une seule vie.

Comme sénateur du Yukon, j'ai un intérêt particulier pour l'abolition du registre des armes d'épaule. Ceux d'entre nous qui habitent dans des régions éloignées et dans le Nord ont senti que le registre des armes d'épaule était discriminatoire pour tous les habitants du Nord, autochtones ou non. Pour nous, l'arme d'épaule est un outil de travail nécessaire tous les jours, un peu comme le tracteur l'est pour l'agriculteur qui doit labourer son champ. Les Autochtones, plus particulièrement, ont senti qu'ils étaient traités injustement par le registre et que, une fois de plus, le gouvernement s'ingérait dans leur vie.

Imposer par le droit pénal l'exigence de se soumettre à un processus inutilement bureaucratique, voilà qui manifeste une méconnaissance de cette réalité quotidienne. Comme des aînés autochtones me l'ont dit, il s'agit d'une solution ratée qui a été imposée à nos gens par les grandes villes. Honorables sénateurs, j'espère que vous conviendrez avec moi que c'est absolument inacceptable.

J'en reviens encore à l'architecte du registre des armes d'épaule, l'ancien ministre de la Justice Allan Rock. Certains ont dit que, lorsqu'il est arrivé à Ottawa, il pensait que les seuls qui devaient avoir des armes à feu étaient les policiers et les militaires. C'est exactement cette attitude mal inspirée qui a mené à l'échec du registre des armes d'épaule. Elle témoigne d'une incompréhension fondamentale non seulement de la culture des propriétaires d'arme à feu, mais aussi du crime et des moyens de le prévenir.

Le but visé par le registre, c'était de réduire la criminalité. Il a échoué pour la simple raison que seuls les Canadiens respectueux des lois allaient accepter de se plier à cette exigence. Les criminels n'enregistrent pas leurs armes.

En réalité, honorables sénateurs, on ne fait pas reculer la criminalité en harcelant les citoyens respectueux des lois. On le fait en imposant des peines dures, mais justes. On le fait en mettant en place un système correctionnel qui est conçu pour corriger le comportement criminel. On le fait en augmentant le nombre des policiers dans les rues. On le fait par des investissements intelligents qui visent à prévenir les crimes avant qu'ils ne se produisent.

Honorables sénateurs, on fait reculer la criminalité en dépensant efficacement l'argent des contribuables, pas en le consacrant à un système qui ne marche pas.

Ces derniers mois, bien des gens m'ont demandé ce que le projet de loi C-19 allait faire. Permettez-moi d'en expliquer les principes.

Le projet de loi fera disparaître l'obligation d'enregistrer les armes à feu à usage non restreint. Comme je l'ai déjà dit, ces armes sont un outil quotidien pour les ruraux respectueux des lois, les Autochtones, les agriculteurs et les chasseurs pour leurs activités traditionnelles et culturelles, pour répondre aux nécessités de la vie de nos jours. Voilà pourquoi le registre a tellement prêté à controverse dès le début.

Le projet de loi prévoit également la destruction des fichiers existants qui se trouvent dans le Registre canadien des armes à feu. Honorables sénateurs, le registre et ses dossiers sont indissociables. Ils forment une seule et même chose. Détruire le registre en conservant les fichiers, c'est conserver des données qu'il n'y a aucune raison de conserver. D'aucuns ont formulé des critiques, je le sais, soutenant qu'il fallait conserver les fichiers, mais il faut signaler que ces mêmes gens affirment également qu'ils rétabliront le registre des armes d'épaule à la première occasion.

Honorables sénateurs, un engagement a été pris envers les électeurs : le registre des armes d'épaule allait être aboli. Les renseignements personnels qui y sont contenus seront éliminés. Je tiens à vous assurer que, à nos yeux, il est inacceptable de créer un registre par des voies détournées.

Voilà qui m'amène à une autre critique formulée contre le projet de loi à laquelle je veux répondre. Certains ont dit que les provinces devraient avoir accès à l'information contenue dans le registre pour qu'elles puissent lancer une version provinciale de cette politique gouvernementale qui a été un échec. Je ne suis pas de cet avis. Cette information a été fournie par des Canadiens respectueux des lois à leur gouvernement national pour les fins expresses d'un programme national.

Une fois le projet de loi adopté, le registre des armes d'épaule cessera d'exister et, je le répète, le gouvernement fédéral n'aura aucune raison de conserver les renseignements personnels et privés des citoyens. Il serait inacceptable, à mon avis, de communiquer les renseignements personnels des Canadiens à d'autres fins.

Honorables sénateurs, il faut se poser des questions fondamentales au sujet du projet de loi à l'étude. La première est la suivante : ce système a-t-il été efficace? La réponse est un non retentissant. Les données statistiques ne font ressortir aucune corrélation entre la mise en place du registre des armes d'épaule et une diminution de l'utilisation criminelle des armes à feu.

Il faut se poser une autre question : cette dépense en a-t-elle valu la peine? Deux milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent. Combien de policiers aurions-nous pu payer? Combien de programmes de prévention du crime aurions-nous pu offrir? Nous ne le saurons jamais, puisque cet argent a été gaspillé.

Lorsque nous tâchons de prévenir le crime, et surtout les crimes commis avec des armes à feu, nous devons adopter une approche très nette. Il faut veiller à ce que seules des personnes compétentes et autorisées aient des armes à feu. Il faut continuer à lutter énergiquement contre l'importation illégale d'armes à feu. Il faut faire en sorte qu'il y ait assez de policiers dans les rues pour protéger les Canadiens. Il faut investir dans la prévention du crime et la prévention des gangs. Il faut infliger de lourdes peines pour dissuader les gens de commettre des crimes avec des armes à feu.

Honorables sénateurs, j'ai eu l'occasion de parcourir les débats qui ont eu lieu au Sénat lorsque le malheureux projet de loi C-68 a été déposé, en 1995. Il faut signaler qu'il y avait de graves inquiétudes au sujet des ramifications du registre et de ses conséquences. Le temps a confirmé que ces inquiétudes étaient fondées. En fait, certains sénateurs représentant la partie gouvernementale, y compris le sénateur du Yukon, ont voté contre le projet de loi.

(1520)

J'espère, chers collègues, que, lorsque nous aborderons le chapitre final du projet de loi C-19, les sénateurs des deux côtés se sentiront libres de voter pour mettre fin à ce cauchemar des contribuables et pour libérer les propriétaires d'armes d'épaule qui respectent nos lois des sanctions criminelles que prévoit le texte législatif actuel.

[Français]

L'honorable Claudette Tardif (leader adjoint de l'opposition) : Honorables sénateurs, j'aimerais m'assurer qu'un temps de parole de 45 minutes sera alloué à la critique de l'opposition, la sénatrice Hervieux-Payette.

Son Honneur le Président : Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

[Traduction]

L'honorable Gerry St. Germain : Honorables sénateurs, c'est pour moi un grand jour.

Des voix : Bravo!

Le sénateur St. Germain : Non, ce n'est pas mon anniversaire — je dois maintenant rajuster mes bottes de cow-boy —, mais c'est un grand jour parce que je l'avais prédit lors de l'adoption du projet de loi C-68. C'est vrai. Comme le sénateur l'a dit, je suis peut-être un prophète en odeur de sainteté. Après le grand discours du sénateur Lang, il ne reste vraiment pas grand-chose à dire, mais je voudrais quand même prononcer quelques paroles un peu différentes parce que j'étais là lorsque le projet de loi C-68 a été adopté.

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour participer au débat sur le projet de loi C-19, Loi sur l'abolition du registre des armes d'épaule. Plusieurs de sénateurs actuellement présents étaient là lorsque le gouvernement libéral Chrétien a créé le registre des armes d'épaule au moyen du projet de loi C-68. À l'époque, la plupart des Canadiens croyaient que le registre n'était pas vraiment nécessaire, que cette décision était peu judicieuse et qu'elle n'augmenterait pas la sécurité de nos collectivités.

C'était le mardi 2 mai 1995. Le Sénat avait alors décidé de permettre au gouvernement de nous priver d'une autre partie de nos libertés individuelles en imposant des restrictions sur le droit des Canadiens respectueux des lois de jouir de leurs biens personnels. Toutefois, trois sénateurs nommés par le gouvernement libéral avaient écouté leur conscience en prenant la part des gens qu'ils représentaient et en votant contre le projet de loi C-68. Si d'autres sénateurs s'étaient joints aux anciens sénateurs Lawson, Lucier et Sparrow, le résultat du vote sur ce projet de loi abusif aurait peut- être été différent.

Depuis l'adoption du projet de loi C-68, les Canadiens d'un océan à l'autre se sont battus contre cette loi. J'ai parcouru le pays de long en large, parlant aux gens pour m'assurer que mon opposition reflétait leur point de vue. Je me souviens d'avoir voyagé dans les Territoires du Nord-Ouest, au moment où Stephen Kakfwi était ministre de la Justice. Je me suis rendu jusqu'au delta du Mackenzie, puis j'ai regagné Fort Simpson. J'ai parcouru toutes ces régions dont les habitants étaient unanimes : cette mesure législative empiétait sur la vie non seulement des Autochtones, mais des gens en général. J'avais passé une nuit à Shingle Point, où des Inuits étaient partis à la chasse à la baleine boréale. Ils ont attendu que la baleine entre dans l'anse. Nous sommes restés dehors cette nuit-là. Le matin suivant, pendant que nous nous réveillions, un groupe d'enfants jouait à l'extérieur quand un énorme grizzli s'est avancé vers l'océan, venant de la montagne. Les Inuits avaient besoin de leurs fusils pour se protéger. Ils ne pouvaient pas se permettre de les entreposer. Leurs armes devaient être prêtes à servir et, Dieu merci, elles l'étaient. Ils n'ont pas tué l'ours. Ils ont fait ce que nos Autochtones font. Ils ont préservé la vie de l'animal, mais l'on fait fuir en tirant quelques coups de feu.

Je n'étais pas le seul voyageur. Des députés faisaient également partie du groupe. J'ai écouté les préoccupations de milliers de propriétaires d'armes à feu respectueux des lois qui considéraient, à juste titre, que le projet de loi C-68 constituait une attaque flagrante du gouvernement contre leur droit constitutionnel de jouir de leurs biens personnels.

Honorables sénateurs, le projet de loi dont nous sommes saisis mettra fin à l'un des programmes les plus coûteux que notre bureaucratie ait jamais administrés. Lorsque le projet de loi mettant en œuvre le registre des armes d'épaule a été soumis au Parlement, le gouvernement avait estimé qu'il lui faudrait 2 millions de dollars pour l'établir et le gérer. Après quelques faux départs, il a fallu à la bureaucratie plus de trois ans et des millions de plus pour mettre sur pied et administrer le registre. En 2003, le gouvernement a demandé au Parlement d'approuver des crédits d'environ 170 millions de dollars pour financer les frais de fonctionnement de cette seule année. Nous étions très loin des 2 millions de dollars prévus à l'origine.

En 2002, la vérificatrice générale Sheila Fraser a publié un rapport cinglant sur les rapports financiers douteux établis sur le registre des armes d'épaule, en précisant que le programme était en bonne voie de coûter plus d'un milliard de dollars aux contribuables. Une fois de plus, la vérificatrice générale avait raison.

Ce registre particulier a également eu des effets injustifiés qui ont directement atteint les propriétaires d'armes à feu respectueux des lois du Canada. Les chasseurs de canards ou d'autres animaux, les agriculteurs et les Autochtones — qui, comme je viens de le dire, dépendent de leurs armes à feu pour maintenir leur mode de vie et leurs traditions culturelles — ont été forcés à participer à un processus bureaucratique. L'objectif — mettre les armes à feu hors de portée des méchants — n'a jamais été établi dans les faits, sous quelque forme que ce soit.

Dans une note remontant à 1995, dont je détiens encore une copie, le ministre d'alors, Allan Rock, disait qu'aucune arme d'épaule ne serait interdite en vertu des dispositions du projet de loi C-68. Honorables sénateurs, c'était bien loin de la vérité, comme je vais le montrer en mentionnant brièvement une décision récente de la GRC, qui est chargée de l'administration du programme.

Fin décembre, les propriétaires enregistrés d'une certaine carabine de calibre .22 — c'est le plus petit calibre qui existe — ont reçu des lettres du Programme canadien des armes à feu administré par la GRC, exigeant qu'ils lui remettent leur carabine sans compensation parce que la GRC, de sa propre initiative, avait décidé de la faire passer de la catégorie des armes à feu sans restrictions à la catégorie des armes prohibées. La raison donnée par la GRC était que la carabine ressemblait à un fusil militaire, même si elle n'en avait aucune des caractéristiques.

Il y a des questions raisonnables à poser ici. La carabine de calibre .22 est l'arme d'épaule du plus petit calibre qui existe. La reclassification était-elle nécessaire? La sécurité du public était-elle en jeu? Le véritable objet du projet de loi C-68 — qui a conféré à la GRC le pouvoir de confisquer les carabines en question dans ce cas — était-il de faire disparaître les armes à feu dans la société canadienne? Pas d'après la promesse faite aux propriétaires d'armes d'épaule par l'ancien ministre Allan Rock.

Honorables sénateurs, le Canada a des lois imposant des restrictions sur la possession et l'utilisation des armes à feu depuis 1877. Il a un registre central des armes à feu à autorisation restreinte depuis 1951 et un système de classification des armes prohibées et à autorisation restreinte ainsi que des armes d'épaule sans restrictions depuis 1968.

De plus, un système de vérification de l'admissibilité des personnes souhaitant acquérir une arme à feu, y compris des carabines et des fusils de chasse sans restrictions, a été établi en 1977. Le système de vérification de l'admissibilité a continué d'être resserré jusqu'en 1991. Ce que je viens de décrire est connu sous le nom de Système canadien d'information sur les armes à feu.

Honorables sénateurs, le principal objet du projet de loi C-68, Loi sur les armes à feu, était de renforcer la sécurité du public. Dans la décision relative au renvoi à la Cour suprême du Canada, la cour a noté que le registre des armes d'épaule représentait une tentative de mettre fin aux problèmes découlant de l'utilisation criminelle ou dangereuse des armes à feu dans des cas tels que le suicide, les tirs accidentels et la violence familiale. La cour a dit que le registre visait à dissuader les gens de faire un usage abusif des armes à feu et à en contrôler l'accès en fonction de la personne qui a présenté la demande et du type de l'arme en cause.

Honorables sénateurs, je dois vous dire, avec tout le respect que je vous dois, que la création d'un sous-registre des armes d'épaule sans restrictions à partir du Système d'information sur les armes à feu n'a absolument rien fait pour renforcer la sécurité du public.

(1530)

Honorables sénateurs, le projet de loi C-19 supprime uniquement l'obligation d'enregistrer les armes à feu autres que les armes à feu prohibées ou à autorisation restreinte, c'est-à-dire les fusils de chasse. Toutes les autres exigences réglementaires qui visent à faire de notre pays un endroit sûr continuent de s'appliquer, comme ce doit être le cas. Nous devons être responsables de la façon dont nous entreposons des armes, et un permis doit être obligatoire pour se procurer des armes à feu.

Honorables sénateurs, au cours des 14 dernières années, le registre a coûté plus de 2 milliards de dollars aux contribuables. Durant cette période, il n'a jamais fonctionné efficacement. Il n'a pas favorisé l'utilisation plus sécuritaire des armes à feu et il n'a pas non plus rendu nos collectivités plus sûres.

Honorables sénateurs, je veux être clair au sujet de l'objet du projet de loi. Cette mesure fait deux choses. Elle ne diminue en rien les obligations relatives à la propriété et à l'utilisation sécuritaire des armes à feu. Par contre, elle élimine le registre des armes d'épaule, et les données liées à ce registre seront détruites. C'est aussi simple que cela.

Au cours des 14 dernières années, la majorité des Canadiens étaient d'avis que le registre des armes d'épaule entraînait une utilisation inappropriée de nos ressources financières et policières. Ce programme malavisé est enfin sur le point de disparaître.

Honorables sénateurs, vous pouvez dire fièrement aux gens que vous représentez que nous avons défait une chose qui n'aurait jamais dû se faire. Pendant la dernière campagne électorale, le gouvernement a promis de se débarrasser de ce registre. C'est l'objectif du projet de loi C-19. Nous devons faire ce qui s'impose, c'est-à-dire adopter cette mesure législative.

J'invite tous les sénateurs à se ranger derrière le sénateur Lang et à appuyer ce projet de loi attendu depuis longtemps. Le gouvernement du Canada tient ses promesses.

Merci. Que Dieu vous bénisse tous.

L'honorable Marjory LeBreton (leader du gouvernement) : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur St. Germain : Oui.

Le sénateur LeBreton : Il est important que le sénateur St. Germain ait présenté ses observations. Dans la tradition du Sénat, de la Chambre haute, le sénateur a, si ma mémoire est fidèle, donné à notre assemblée l'occasion d'agir comme une Chambre de second examen objectif. Sauf erreur, il a proposé un amendement visant à reporter de six mois l'étude du projet de loi, de façon à laisser les esprits se calmer et à faire en sorte que les gens prennent une décision rationnelle dans un contexte de second examen objectif.

Évidemment, le sénateur jouissait de l'appui de ses collègues mais, malheureusement, ceux-ci n'étaient pas assez nombreux. Je veux savoir si le sénateur se souvient de cet épisode et s'il souhaite en parler.

Le sénateur St. Germain : Je m'en souviens. Nous voulions reporter l'étude du projet de loi parce que les esprits étaient échauffés après un incident qui s'était produit au pays, ce qui était regrettable.

Ce qui était le plus déplorable dans toute cette histoire, c'est qu'une personne comme mon père, qui vivait de la terre et avait besoin de fusils pour chasser et nourrir sa famille, se faisait comparer à des fanatiques qui se servaient de leurs fusils pour tirer sur des gens, que ce soit en Californie ou en Alberta ou à n'importe quel endroit. Cette comparaison était complètement injuste. C'est de cette manière qu'on présentait les choses. C'est ce qui me brisait le cœur parce que je savais à quel point nous respections les fusils durant mon enfance. Ils faisaient partie de nos vies. Leur rôle était équivalent à celui d'un marteau pour un charpentier ou d'un stéthoscope pour un médecin. Pourtant, on nous comparait aux criminels qui utilisaient ces armes de manière irresponsable. Les personnes qui se servaient de fusils ou qui en possédaient une grande quantité étaient considérées comme des fous qui étaient sur le point de détruire l'humanité. C'était regrettable, et c'est pour cette raison que je voulais que le projet de loi soit reporté.

Je comprends le problème. J'ai été policier. Je me suis trouvé dans cette situation. Il y a des criminels qui ont tiré sur moi. Je peux vous le dire, ce n'est pas agréable. Cependant, les gens se laissent emporter par l'émotion. C'est pourquoi je voulais reporter le projet de loi afin de permettre aux gens de retrouver leurs esprits. Il y a des milliers de personnes en Amérique du Nord qui utilisent les armes de manière responsable et à des fins de divertissement.

J'étais au Langley Rod & Gun Club l'autre soir, où des jeunes recevaient des prix pour le tir. C'était des compétiteurs olympiques de Langley, en Colombie-Britannique. J'ai assisté à la cérémonie en compagnie de Mark Warawa, député à l'autre endroit, ainsi que de plusieurs maires des localités voisines. Nous présentions des prix à ces jeunes, qui étaient complètement passionnés par le tir sportif. C'est dans cet esprit que j'ai tenté de faire reporter le projet de loi, afin de permettre aux gens de se calmer et de bien réfléchir à la question. Cela ne s'est pas produit, et nous y voilà.

Nous devrions aujourd'hui utiliser toute notre sagesse et procéder aujourd'hui à un second examen objectif de cette initiative parce que je pense qu'elle est très importante pour beaucoup de personnes.

Son Honneur le Président : Le temps de parole du sénateur St. Germain est écoulé. Le sénateur Dyck aimerait poser une question, mais le sénateur St. Germain devrait demander plus de temps.

Le sénateur St. Germain : Si le sénateur veut poser une question, je vais le faire.

Son Honneur le Président : Cinq minutes de plus.

L'honorable Lillian Eva Dyck : Honorables sénateurs, si je pose la question, c'est parce qu'il s'agit d'un projet de loi controversé. Le sénateur St. Germain a prononcé une excellente allocution. C'est toujours une question très difficile pour nous, les femmes. Le sénateur le sait bien, lui qui a été policier.

Qu'est-ce que le sénateur dit aux organismes comme le YWCA, qui s'est positionné contre l'abolition du registre des armes à feu à cause de la violence conjugale, étant donné que les armes d'épaule sont les plus couramment utilisées pour tuer les femmes? Cela est un problème qui me brise le cœur. Selon le YWCA, le nombre d'homicides conjugaux, surtout envers les conjointes, a chuté depuis la création du registre.

Si le projet de loi était adopté, que répondrait le sénateur à une femme qui lui dirait que sa sœur a été assassinée avec une arme d'épaule? Comment peut-on se faire à cette idée? Quel argument peut justifier l'abolition du registre des armes à feu lorsqu'on sait que de tels incidents se produisent en situation de violence conjugale? Peut-il me convaincre qu'il existe un moyen d'atténuer ce risque?

Le sénateur St. Germain : Selon moi, aucune statistique ne montre que le registre des armes d'épaule a réduit le nombre de crimes violents commis à l'encontre de femmes ou d'hommes — ou la violence, quel que soit le sexe de la victime.

J'ai grandi dans une maison où il y avait des fusils, et les femmes faisaient partie de cette culture. La vérité, c'est que beaucoup de femmes perdent la vie à cause de la violence. Je pense à Willie Pickton. Il ne s'est jamais servi d'une arme à feu. Quand on se penche sur les cas des tueurs en série, on constate que la plupart d'entre eux n'ont pas utilisé d'arme à feu.

Que faudrait-il restreindre ensuite? Je crois qu'il faut se sensibiliser à la violence contre les femmes sous toutes ses formes. Si on le fait et qu'on unit nos efforts, en tant que parents et grands- parents, qu'on fait tout en notre pouvoir pour faire en sorte de supprimer la violence sous toutes ses formes dans nos familles, alors on commencera à voir les choses changer pour le mieux. Tant qu'à s'en prendre aux armes à feu, on peut aussi s'attaquer aux couteaux et à toute une litanie d'autres choses. Une multitude de meurtres sont commis à l'arme blanche. En tant que policier, je peux dire ceci au sénateur. Je me suis rendu sur la scène de meurtres, et je vous assure que c'est à vous déchirer le cœur. Toutefois, on ne peut pas réagir de manière excessive et pénaliser des millions de personnes pour les actes répréhensibles d'un seul individu. La solution consiste à éduquer la population et à éviter que nos jeunes, ou quiconque, soient témoins d'actes de violence contre les femmes dans leurs foyers, quels qu'ils soient.

(1540)

Je me rappelle à quel point mon grand-père St. Germain, qui était métis, était bon avec son épouse. Cette bonté s'est transmise de génération en génération. Mon père a été marié pendant une cinquantaine d'années. Je suis moi aussi marié depuis 50 ans. Mon grand-père ne l'a malheureusement pas été pendant 50 ans parce qu'il n'a pas vécu assez longtemps. Cela faisait partie de notre culture et pourtant, il y avait des armes partout. On enseignait aux familles l'amour, la compréhension, la bonté, mais pas la violence.

L'honorable Caroline Stewart Olsen : Honorables sénateurs, je vais partager mon temps de parole avec le sénateur Brown.

Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-19. Je suis solidaire des agriculteurs, des chasseurs, des Canadiens des régions rurales respectueux de la loi de partout au pays. Ce projet de loi me tient particulièrement à cœur, mais plus encore, c'était et c'est un cri de ralliement pour des gens comme moi qui ont dit : « C'est assez. » De nombreux Canadiens ont perçu le registre des armes à feu comme une attaque directe du Parti libéral envers les habitants des régions rurales. L'Ouest et le Nord ont été durement touchés par cette mesure législative. Après le désastreux Programme énergétique national, c'est à cause du registre des armes à feu que bien des Canadiens se sont mis à tourner le dos au Parti libéral, qui s'est immiscé directement dans leurs foyers et leurs modes de vie. Les libéraux n'ont malheureusement pas eu l'air de s'apercevoir à quel point les citoyens étaient choqués.

Je crois qu'après le PEN, le registre des armes à feu a été le début du déclin du Parti libéral. La lutte a duré 17 ans et arrive enfin à son terme. Au fil des ans et à mesure que les objections continuaient, de plus en plus de gens se demandaient pourquoi on ne les écoutait pas. Les libéraux n'avaient plus de connection avec les électeurs et ne semblaient se préoccuper que des grands centres que sont Toronto et Montréal.

Il faut se rappeler que les Canadiens savaient que des lois très rigoureuses sur le contrôle des armes à feu existaient déjà et, dans le cadre des réformes du gouvernement actuel, les Canadiens seront toujours tenus de se procurer un permis pour acheter ou posséder une arme à feu et d'enregistrer les armes à feu prohibées et à autorisation restreinte, comme les armes de poing et les fusils d'assaut. Pour obtenir un permis d'arme à feu, les gens doivent se soumettre à une vérification de leurs antécédents judiciaires et détenir un certificat de sécurité dans le maniement des armes à feu émis par un instructeur expérimenté. Le registre des armes d'épaule cible inutilement et injustement les Canadiens respectueux de la loi, sans toutefois réduire la criminalité ni maintenir les armes à feu hors de portée des criminels.

Je me souviens de mon père, qui hochait la tête en tentant d'expliquer les tenants et aboutissants de ce projet de loi dans notre région, lui qui était un partisan du Parti libéral et un chasseur de longue date. Ses explications n'ont rien donné. Les gens ont eu une réaction viscérale à l'égard du registre. C'était le gouvernement contre le peuple. Les agriculteurs et les chasseurs, qui respectaient déjà la loi et qui entreposaient déjà leurs armes à feu de façon sécuritaire, étaient fâchés. Personne ne défendait leur point de vue, voilà ce qui les mettait surtout en colère. J'ai participé à de nombreux rassemblements politiques ces dernières années; j'ai pu alors constater que les gens se déplaçaient en grand nombre et qu'il y avait de nombreux anciens libéraux parmi eux. Le registre des armes à feu constituait l'enjeu qui tenait le plus à cœur aux agriculteurs, aux femmes, aux pêcheurs et aux gens ordinaires qui se déplaçaient.

Au fil des ans, une vague de ressentiment a gonflé, et le Parti libéral n'a rien vu, n'en a pas saisi le sens ou n'en a tout simplement pas tenu compte. Le registre s'est révélé extrêmement coûteux pour les contribuables canadiens. Les libéraux ont dit aux Canadiens que le registre coûterait 2 millions de dollars. Or, il en a coûté plus de 2 milliards à ce jour, 2 milliards de dollars dépensés pour forcer les Canadiens des régions rurales à perdre leur temps à remplir des formulaires et à se plier à des formalités administratives, et tout ça pour un registre qui ne sert à rien. Les Canadiens se sont alors sentis comme s'ils étaient des criminels en raison de leur style de vie, et leur ressentiment a pris de l'ampleur.

Le projet de loi du gouvernement mettra enfin un terme à ce gaspillage d'argent des contribuables. Nous veillerons à ce que les renseignements personnels et inutiles sur les honnêtes Canadiens qui ont été recueillis soient détruits. Nous protégerons ainsi la vie privée et assurerons la sécurité des Canadiens. Nous avons à cœur la prévention des crimes commis avec des armes à feu. Nous avons donc adopté des peines minimales obligatoires pour l'utilisation d'une arme à feu lors de la perpétration d'un crime ou depuis une voiture. Grâce au durcissement des peines, les criminels restent en prison; ils ne sont donc plus dans nos rues en train de commettre d'autres crimes. Le projet de loi C-10, Loi sur la sécurité des rues et des communautés, prévoit de nombreuses mesures qui permettront vraiment d'assurer la sécurité des Canadiens, et elles sont bien plus efficaces que le registre.

Je vous supplie d'appuyer le projet de loi C-19 ainsi que les autres mesures que le gouvernement veut instaurer pour réduire la criminalité et pour assurer la sécurité des Canadiens. Je demande aux sénateurs de prendre du recul, d'examiner l'évolution du registre des armes à feu et d'en tirer une leçon. C'est à vos risques et périls que vous refuserez d'entendre les doléances des Canadiens.

L'honorable Bert Brown : Je remercie madame le sénateur Stewart Olsen. Je crois qu'elle a très bien résumé le fond de ma pensée. Je vais pouvoir parler moins longtemps que prévu.

Je me suis entretenu avec quelques chefs de police ces dernières années, dont une femme. Ils m'ont dit préférer qu'on consacre 2 milliards de dollars à l'embauche d'un plus grand nombre de policiers dans leurs municipalités que 2 milliards de dollars et plus à traiter de la paperasse.

Les policiers ont aussi déclaré que, lorsqu'ils sont appelés sur la scène d'un crime potentiellement violent, ils ont appris à supposer qu'il risque d'y avoir des armes à feu, et qu'ils devraient s'y préparer en prévoyant des renforts. Il est très rare qu'on utilise des armes d'épaule pour commettre un vol à main armée. Le problème, c'est le nombre beaucoup plus grand de pistolets qui sont importés illégalement au Canada en provenance des États-Unis. Ce sont généralement ces pistolets qu'on retrouve sur les scènes de crime, et ces scènes de crime sont beaucoup plus fréquentes dans les grandes villes que dans les petites municipalités et les villages. Environ 98 p. 100 des crimes violents sont commis dans les villes, et non dans les petites municipalités et les régions rurales.

Lorsque l'économie ralentit ou traverse une crise, la criminalité augmente et les lâches partent à la recherche d'une arme plutôt que d'un emploi. Ma résidence a été cambriolée trois fois depuis cinq ans que je siège au Sénat. Nous avons fait installer des systèmes d'alarme et des caméras, et la police vient parfois vérifier si tout va bien. La seule façon de contrer les crimes violents, c'est d'avoir davantage de policiers armés. Heureusement, les illuminés sont rares et sévissent peu souvent. Une chose est certaine, on ne les arrêtera pas avec des bouts de papier qui coûtent 2 milliards de dollars et dont le coût augmente d'année en année.

Il y a une dizaine d'années, je suis allé à un bureau de maniement sécuritaire des armes. Quand j'en suis ressorti, j'avais une licence d'instructeur et une casquette indiquant mon nouveau statut. J'ai dit au sénateur Munson que j'allais raconter cette anecdote car elle est amusante. Je ne le vois pas ici aujourd'hui.

Il y a trois ans, j'étais assis dans la dernière rangée, à peu près au milieu de la salle. Un seul pupitre me séparait du sénateur Munson. Il semblait s'ennuyer ce jour-là, et il se tenait la tête avec la main. Il m'a regardé et m'a demandé si j'avais une arme.

Je lui ai répondu : « Oui, mais pas sur moi. » Il m'a dit : « Apporte-la demain et tire-moi dessus si c'est aussi ennuyant qu'aujourd'hui. » Je lui ai répondu qu'il devrait probablement discuter avec sa femme avant qu'il ne sombre davantage dans la morosité. C'est ce qu'il a fait et, le lendemain, il m'a rapporté les propos de sa femme : « Elle pense que ce n'est probablement pas légal. » Et j'ai répondu : « Eh bien, tant mieux, parce que, selon ma femme, ce n'était guère plus légal de vous tirer dessus! »

(1550)

Je voulais simplement partager cette histoire amusante avec vous. Je n'en revenais pas qu'il m'ait dit une chose pareille.

Honorables sénateurs, je veux conclure avec quelques remarques au sujet des événements tragiques qui ont eu lieu il y a quelques années, événements qui nous ont marqués à un tel point que le gouvernement fédéral a instauré une loi dans tout le pays. Je ne crois pas que beaucoup de gens savaient que c'était une arme à feu enregistrée qui avait été utilisée dans cette tragédie.

À mon avis, il est impossible de justifier une dépense de 2 milliards de dollars pour une quantité grandissante de paperasse sur des armes à feu. Un de mes amis, après avoir discuté du registre des armes à feu, avait décidé d'enregistrer les siennes. Il les a enregistrées au moyen d'un ordinateur, ce qui est possible, et a ensuite envoyé ses données au Nouveau-Brunswick — du moins, je crois que c'est là qu'elles aboutissent.

Je lui ai demandé comment cela s'était passé et il m'a répondu qu'il les avait toutes inscrites, puis avait appuyé sur le bouton de confirmation et que tout était alors disparu. Je lui ai demandé ce qui était arrivé, mais il m'a avoué ne pas le savoir. Je lui ai alors demandé combien d'armes à feu il avait enregistrées, et sa réponse fut 126. Je lui ai expliqué qu'à mon avis il ne pouvait en enregistrer que 10 ou 12 à la fois par l'entremise du réseau. J'ai alors voulu savoir ce qu'il comptait faire et il m'a répondu qu'il ne ferait plus rien. Honorables sénateurs, il y a de nombreuses armes à feu qui n'ont jamais été enregistrées et qui ne le seront probablement jamais.

J'avais un autre voisin qui possédait près d'une centaine d'armes à feu, je dirais. Il était un amateur et il cherchait à acheter des Winchester, qui revêtent une certaine importance dans l'histoire de l'Ouest du pays. Il courait les ventes aux enchères et achetait de vieux Winchester. Il ne s'en servait pas, il voulait simplement les collectionner. Je crois qu'il en avait près d'une centaine.

Je vais terminer en disant que, lorsque cet homme a tué 16 femmes au Québec, je crois que la véritable tragédie, c'est le fait qu'il ait séparé les hommes et les femmes dans la pièce et qu'il ait tiré sur toutes les femmes. Je sais que c'était un déséquilibré, mais je ne comprends pas pourquoi les hommes qui étaient là n'ont pas essayé de l'arrêter.

L'honorable Anne C. Cools : Honorables sénateurs, ce fut une énorme tragédie et elle continue de faire des remous. Je me souviens d'avoir lu, il y a quelques années, qu'on avait fait bien peu pour empêcher cet homme armé d'en arriver là et que les jeunes hommes présents étaient tellement dépassés par les événements qu'ils ont été incapables d'intervenir pour l'arrêter. J'ai lu aussi qu'au moins un d'entre eux s'était suicidé parce qu'il était tenaillé par le regret de n'avoir rien fait pour empêcher la tuerie. Le sénateur sait peut-être ce qu'il en est exactement. Il est possible que cette tragédie ait pu être évitée, mais elle est d'une telle ampleur qu'elle continuera, selon moi, à nous faire réfléchir pendant des années encore.

Le sénateur a-t-il eu connaissance de ce cas?

Le sénateur Brown : Oui, j'ai entendu exactement la même chose que le sénateur, à savoir que l'un d'entre eux s'est suicidé. J'imagine qu'il lui était insupportable de songer qu'il n'était pas intervenu pour protéger les victimes.

Son Honneur le Président : Y a-t-il d'autres interventions?

L'honorable Yonah Martin : Honorables sénateurs, en tant que citadine, je voulais vous dire que je suis en faveur de ce projet de loi. J'ai eu l'occasion de parler à des propriétaires d'arme à feu et à des familles qui pratiquent la chasse par tradition, de génération en génération. Par exemple, je connais une famille habitant dans la région métropolitaine de Vancouver qui m'a raconté en détail la longue tradition héritée du grand-père d'Italie, qui l'a enseignée à son fils, aujourd'hui père de famille, et à son petit-fils. Cette famille aime cette tradition. Nous voyons parfois, dans ce dossier, un clivage entre la ville et la campagne, mais les habitants des régions urbaines qui pratiquent la chasse, qui respectent les lois et qui ont eu à subir les formalités et la paperasse encombrantes, qu'ils assimilent à un parcours d'obstacles, s'intéressent à cette question et attendent impatiemment l'adoption de ce projet de loi.

Je ne possède pas d'arme à feu et je ne pratique pas la chasse, mais mon mari a grandi dans les Kootenays, à l'intérieur de la Colombie- Britannique, dans une famille où la chasse était une tradition. Je voudrais faire entendre la voix de ceux qui, dans les villes, considèrent eux aussi qu'on leur inflige des tracasseries et des dépenses. Ce point de vue n'est pas seulement celui des Canadiens des régions rurales, bien que les traditions là-bas y soient pour quelque chose, traditions que je respecte, du reste. Les citadins attendent depuis longtemps, eux aussi, le jour où ce projet de loi sera adopté.

Son Honneur le Président : Y a-t-il d'autres interventions?

(Sur la motion du sénateur Hervieux-Payette, le débat est ajourné.)

[Français]

Le Budget des dépenses de 2011-2012

Adoption de la motion tendant à autoriser le Comité des finances nationales à étudier le Budget supplémentaire des dépenses (C)

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis donné le 28 février 2012, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget supplémentaire des dépenses (C) pour l'exercice se terminant le 31 mars 2012.

(La motion est adoptée.)

Le Budget des dépenses de 2012-2013

Adoption de la motion tendant à autoriser le Comité des finances nationales à étudier le Budget principal des dépenses

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis donné le 28 février 2012, propose :

Que le Comité sénatorial permanent des finances nationales soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013, à l'exception du crédit 10 du Parlement.

(La motion est adoptée.)

Adoption de la motion tendant à autoriser le Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement à étudier le crédit 10 du Budget principal des dépenses

L'honorable Claude Carignan (leader adjoint du gouvernement), conformément à l'avis donné le 28 février 2012, propose :

Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à étudier, afin d'en faire rapport, les dépenses prévues au crédit 10 du Parlement dans le Budget principal des dépenses pour l'exercice se terminant le 31 mars 2013;

Qu'un message soit transmis à la Chambre des communes pour l'en informer.

(La motion est adoptée.)

(1600)

L'étude sur les politiques, les pratiques, les circonstances et les capacités en matière de sécurité nationale et de défense

Le quatrième rapport du Comité de la sécurité nationale et de la défense—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Wallin, appuyée par l'honorable sénateur Lang, tendant à l'adoption du quatrième rapport (intérimaire) du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, intitulé Répondre à l'appel : Le rôle de la Première réserve du Canada dans l'avenir, déposé au Sénat le 15 décembre 2011.

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, il me fait grand plaisir de prendre la parole au sujet de ce rapport.

[Traduction]

Honorables sénateurs, il m'a fallu un peu de temps pour venir ici et je remercie les membres du comité de leur patience, en particulier la présidente. Je veux mentionner quelques points auxquels j'ai dû réfléchir. Je veux évidemment parler du rapport intitulé Répondre à l'appel : Le rôle de la Première réserve du Canada dans l'avenir.

J'encourage tous les sénateurs à passer du temps avec les membres des diverses forces. Chaque été, chacune des forces donne aux sénateurs et aux députés fédéraux l'occasion de participer activement à ses activités, ce qui donne une idée de la façon dont les fonctionnent forces.

L'été dernier, j'ai participé avec un député à un vaste exercice de guerre qui, sauf erreur, incluaient environ 1 000 membres de la réserve, à Wainwright, en Alberta. J'ai été déployé, si je puis m'exprimer ainsi, au sein d'une unité blindée de reconnaissance. J'ai passé deux jours avec le groupe, y compris une période de presque 24 heures sur le terrain et une nuit entière dans le froid et la noirceur à agir comme sentinelle dans un avant-poste d'observation pour surveiller un combat et une attaque qui devaient se produire le lendemain, et qui se sont effectivement produits.

C'était aussi près de la réalité que cela pouvait l'être avec les armes, le barda, ainsi que la possibilité d'observer l'interdépendance des individus et la façon dont les réservistes travaillaient. J'ai été très impressionné, en particulier par le leadership déployé. J'étais dans un véhicule avec trois autres personnes. L'une était un caporal-chef. C'était un jeune homme qui avait été deux fois en Afghanistan avec la force régulière. Quand il y est parti, il était dans la réserve et il en était à sa quatrième année d'études en philosophie. Il était très réfléchi et faisait preuve d'un leadership remarquable à bien des égards. Bref, ce fut une expérience impressionnante et très émouvante que je recommande à tous les sénateurs et députés.

Honorables sénateurs, je pense que ce rapport est bon. Il se fonde sur d'excellents témoignages fournis par des témoins très réfléchis. Ce qui le rend particulièrement pertinent à mes yeux et à ceux des sénateurs et des Canadiens c'est qu'il présente une analyse relativement complète d'un bon nombre des questions importantes auxquelles la réserve doit faire face au Canada. La page des recommandations est en quelque sorte une liste de ces questions importantes, même si elle ne les inclut pas toutes.

Par exemple, le rapport aborde la question de savoir comment le nombre de membres de la première réserve devrait être établi à l'avenir, compte tenu de la nouvelle situation de guerre internationale qui existe et de la démobilisation d'une bonne partie de nos forces dans ce secteur précis.

Il y est question des nouveaux rôles qu'il faut définir selon les différentes classes des réserves, A, B ou C. On y aborde la question du renforcement du système de rémunération utilisé dans les réserves, car il y a des incohérences administratives et d'autres problèmes. Il est aussi question de la façon dont il faudrait redéfinir la fonction de recrutement de l'armée de réserve par rapport à la façon dont on enrôlait massivement des gens par le passé. Il faut le faire parce que le monde a changé. En effet, il est peu probable que nous soyons encore obligés d'enrôler massivement des gens. Du moins, il est à espérer que ce ne sera jamais plus nécessaire.

Il est question dans le rapport de l'empreinte de la réserve dans son milieu, de son rôle particulier par rapport à la collectivité et de ses rapports avec elle. Les réservistes dont parle le rapport sont issus de la collectivité et y retournent presque quotidiennement, ce que les membres de la force régulière ne font pas.

Je pourrais encore donner d'autres exemples. C'est un rapport complet qui couvre très bien l'ensemble de ces questions.

L'un des points forts du rapport, c'est qu'il présente avec précision les questions à régler, ce sur quoi il faut se pencher. L'étude s'est faite assez rapidement et ne souligne, dans une certaine mesure, que les points principaux. Certaines questions exigent toutefois qu'on s'y attarde beaucoup plus longtemps. J'aimerais en aborder quelques-unes.

J'ai parlé de l'empreinte de la réserve dans son milieu. Il est vrai que les réserves établissent des rapports particuliers avec la collectivité. Les réservistes en sont issus. Un ou deux jours par semaine, souvent la fin de semaine, ils retournent dans leur milieu. Je ne cherche pas ici à diminuer le rôle des nombreux réservistes qui restent plusieurs mois dans un endroit difficile, par exemple en Afghanistan. On établit dans le rapport un certain nombre de faits concernant les liens particuliers qu'entretiennent les réservistes avec leur milieu. Dans la version finale du rapport, nous avons formulé une recommandation, à savoir que l'empreinte de la réserve dans son milieu — autrement dit, le rôle que jouent les réservistes dans l'armée et dans la collectivité — doit être mieux définie, surtout dans les circonstances actuelles, surtout maintenant que nous en sommes en quelque sorte à une période de pause. Nous avons effectué une première étape. Il est maintenant temps de revoir et de repenser ce que les réserves peuvent faire.

Les réflexions à ce sujet font ressortir un élément de plus en plus important, tant pour les forces de réserve que pour les forces régulières, c'est-à-dire le travail humanitaire et les secours en cas de catastrophe, tant chez nous qu'à l'étranger. Les témoignages et les observations que nous avons entendus, de même que d'autres discussions que j'ai eues, soulignent le rôle extrêmement important que les militaires, et spécialement les forces de réserve, ont joué et jouent encore dans le monde entier sur le plan de l'aide humanitaire et du secours en cas de catastrophe. Le travail colossal effectué par les forces de réserve lors des inondations à Winnipeg et des tempêtes de verglas a été mentionné à plusieurs reprises.

Toutefois, on a aussi laissé entendre que les forces de réserve ne disposent peut-être pas toujours de l'équipement et de la formation nécessaires pour entreprendre certaines de ces activités. Par exemple, au cours d'une discussion à laquelle j'ai participé, quelqu'un a mentionné que les militaires et les forces de réserve pourraient intervenir en cas d'incendie, par exemple l'incendie dévastateur qui a fait rage dans le Nord de l'Alberta. Il a été établi que, bien qu'ils disposent assurément du leadership, de la discipline et des capacités physiques qui leur permettent d'aider dans une telle situation, ils ne disposent pas de l'équipement adéquat.

Quel type d'évaluation doit être fait pour déterminer quels sont les besoins en matière de formation pour qu'ils puissent assumer ce rôle de façon plus intense, quels sont les besoins en matière d'équipement, de financement et de budget pour l'avenir? D'une certaine manière, je souhaite profondément que les militaires en viennent à avoir davantage de temps à consacrer à ce genre d'activités parce qu'il y aura beaucoup moins de pression et d'occasions pour eux de combattre en situation de guerre. Cela serait une situation de dernier recours et nous espérons qu'ils n'aient pas à combattre. Peut-être qu'un des moyens de maintenir des forces de réserve militaire disciplinées, bien entraînées, actives et ayant un bon moral est de leur donner d'autres défis, comme l'aide humanitaire et les secours en cas de catastrophe.

Hier, je crois, un témoin a fait valoir qu'il s'attend à ce qu'il y ait de plus en plus de catastrophes climatiques parce que le climat change. Il y a des signes de ces changements et les données scientifiques ne sont même pas nécessaires — il suffit de se promener dehors ou d'écouter les nouvelles pour se rendre compte qu'il a beaucoup plus de catastrophes qu'avant. À l'avenir, j'aimerais qu'on accorde davantage d'importance et d'efforts à ce genre d'études au Comité de la défense.

(1610)

Le rapport aborde un deuxième aspect — auquel il s'arrête, mais qu'il n'approfondit pas suffisamment — qui soulève des questions que nous devrions examiner de plus près. Il concerne le dédommagement des employeurs dont certains employés sont déployés à l'étranger ou mutés à un poste les empêchant de travailler pour eux pendant un certain temps. Cette situation impose un fardeau indu en matière de responsabilité sociale élargie — de responsabilité nationale élargie — sur un nombre restreint d'employeurs. Certaines administrations ailleurs dans le monde dédommagent les employeurs à cet égard; nous devons examiner plus attentivement cette question. Le rapport fait valoir que, en période de compressions budgétaires, cette mesure paraîtrait inappropriée. Je ne suis pas certain de souscrire à cette conclusion.

En fait, la Compagnie Canada, une fondation privée, indépendante et créée pour œuvrer en ce sens au nom des Canadiens et des réservistes, prétend que 8 millions de dollars suffiraient à financer les mesures nécessaires pour faire de cela une réalité et diminuer le fardeau indu et injuste actuellement imposé à de nombreux employeurs de petites et moyennes entreprises qui emploient des réservistes. Le jour où ces réservistes sont déployés, les employeurs doivent se passer de leurs services. Quand ce n'est que pour une période de huit, neuf ou 10 mois, il est difficile et coûteux de remplacer ces gens. Les employeurs doivent former une personne pour une courte période de temps et parfois, il est impossible de trouver quelqu'un dans ces circonstances. Cela impose un lourd fardeau aux petites et moyennes entreprises, qui ont déjà souvent à assumer un fardeau accablant. Je recommanderais que cet aspect fasse aussi l'objet d'une étude plus approfondie au comité.

Un troisième aspect concerne la publicité sur les soins de santé et la promotion de ces soins de santé pour les réservistes, plus particulièrement pour les réservistes qui pourraient s'éloigner dans une certaine mesure du monde militaire à leur retour de pays comme l'Afghanistan, ou qui pourraient laisser la réserve ou le service.

Il n'est pas facile de les informer des services disponibles.

Il faut aussi signaler que l'un des problèmes de santé dont nous connaissons tous l'existence, soit le trouble de stress post- traumatique, pourrait devenir de plus en plus fréquent. Il pourrait toucher un nombre beaucoup plus élevé de soldats après leur retour au pays. Des témoins nous ont signalé que ce délai pouvait se produire parce que pendant une mission intense — et certains soldats ont été déployés deux, trois ou quatre fois — ils sont sous l'effet de l'adrénaline, complètement concentrés et résolus à accomplir leur mission. Cette intensité peut avoir pour effet d'éloigner le stress, la pression ou la réflexion qui mènent éventuellement au TSPT.

Maintenant que nous déployons moins de soldats vers des pays comme l'Afghanistan, il est possible que, quand la pression et l'intensité liées à ces missions disparaîtra, le stress reprenne le dessus, ce qui entraînera une augmentation des cas de TSPT. Notre comité doit à tout le moins se tenir au fait de cette question, voire l'étudier en profondeur. C'est un point à examiner. Il faut s'assurer qu'il existe des services comparables pour les militaires de la force régulière, les réservistes, les anciens combattants de la force régulière et les anciens combattants de la réserve, car il ne faut jamais laisser tomber ces gens qui ont tant fait pour nous et demandent si peu en retour.

Pour revenir aux rapports que notre comité pourrait produire, j'aimerais parler encore une fois d'un sujet qui, selon moi, mériterait un examen attentif. Il s'agit de la GRC et de ce qui me paraît être un problème émergent et de plus en plus évident et qui concerne la culture de cette organisation. Bien sûr, jusqu'à maintenant, notre évaluation ne se basait que sur quelques anecdotes. Nous avons entendu parler d'allégations de harcèlement et de situations qui dépassaient parfois les simples allégations; des tribunaux ont même rendu des décisions à ce sujet. Je crois qu'il n'y a pas de fumée sans feu et que cette question mériterait qu'on l'étudie.

Cette semaine, à titre d'exemple, nous avons appris qu'un sergent et une gendarme de la GRC avaient eu des relations sexuelles dans une voiture de la GRC pendant qu'ils étaient en service. C'est impardonnable, inacceptable. Il est intéressant de noter qu'une situation semblable s'est produite dans les Forces canadiennes, où un général entretenait une relation avec une personne moins gradée. Cette situation a été réglée de façon rapide et décisive.

Dans le cas de la GRC, après un long délai, un tribunal a rendu une décision selon laquelle le participant le plus haut gradé, qui était un homme... Pourrais-je avoir cinq minutes de plus?

Son Honneur le Président intérimaire : La permission est-elle accordée pour que le sénateur puisse poursuivre pendant encore cinq minutes?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Mitchell : Merci. Un homme a été condamné par un tribunal relevant de la GRC, et il a reçu une suspension de salaire de dix jours. Le tribunal, selon un de ses membres, a déterminé que le sergent avait menti, mais il ne pouvait pas rendre de jugement à cet égard, car ça ne faisait pas partie de son mandat. Voilà ce qu'on a imposé à cet homme, au supérieur dans cette affaire : une suspension de salaire de 10 jours.

La femme, qui était sa subalterne, a reçu une suspension de salaire de sept jours. On l'a reconnue coupable, puisque c'est ce que font les tribunaux. Évidemment, le tribunal a déterminé qu'elle avait menti lorsque les deux agents ont affirmé que le délit n'avait pas eu lieu, avant d'admettre le contraire. Elle a été condamnée et renvoyée du corps de police.

Peut-être qu'il y a une explication sensée à cela. De prime abord, je trouve plutôt fort que l'homme puisse garder son emploi, se voir imposer une suspension de salaire de 10 jours, et ne pas être rétrogradé, alors que la femme perd son emploi. À mon avis, ça semble injuste, et ça ne donne pas une très bonne image de la GRC. J'ignore quel est le problème structurel dans ce cas. Je crois que le comité sénatorial pourrait examiner cela de manière à aider la GRC, car il ne s'agira pas d'une chasse aux sorcières. Ce n'est pas un comité partisan. Le comité permet aux gens — nous en voyons beaucoup qui souhaitent se faire entendre — d'avoir voix au chapitre et de s'exprimer devant les deux camps. Je pense que l'exercice serait utile.

Enfin, je veux dire que le comité travaille beaucoup mieux ces jours-ci. Je dois cependant soulever un point avec beaucoup d'appréhension. Au cours des deux dernières semaines, la présidente du comité a été gentille avec moi, et je veux que cela se poursuive. Toutefois, il y a un mois, elle a fait une déclaration qui a probablement été mal formulée, mais que je ne peux tout de même pas laisser passer sans y répondre. Avant d'assumer la présidence du comité, elle a affirmé : « Nous ne commencerons pas par tirer des conclusions a priori pour ensuite rédiger un rapport destiné à appuyer le point de vue personnel de certains. »

En tenant ces propos, elle a discrédité non seulement un comité qui, à mon avis, s'est distingué depuis le jour de sa création, mais également les membres du comité — qui n'auraient jamais toléré ce type de conduite et qui auraient protesté si ce genre de choses s'étaient produites. Je songe notamment à Mike Forrestall, Laurier LaPierre, Michael Meighen, Pierre Claude Nolin, Joe Day, Norm Atkins, Willy Moore, Tommy Banks, Lucie Pépin, Hugh Segal, Roméo Dallaire, Dan Lang et bien d'autres. Je voudrais terminer mon intervention en disant que Colin Kenny est responsable en grande partie du succès incroyable de ce comité. Il est l'un des meilleurs présidents de comité de l'histoire du Sénat. Il a permis à ce comité d'accomplir plus de choses que la plupart ou l'ensemble des comités. J'y ai vécu certaines des meilleures expériences de ma vie, et je pense qu'il est juste de dire que les Canadiens en sont conscients.

Je sais que la présidente du comité ne voulait insulter personne quand elle a parlé des partis pris dans les rapports. Je sais qu'elle ne voulait pas discréditer ou dénigrer ces sénateurs remarquables et distingués qui n'auraient jamais toléré ce genre de comportement.

(1620)

Au lieu de dire que le comité travaille mieux que par le passé, il faut plutôt que nous fassions notre possible pour que le grand succès du comité se poursuive, lui qui est — et qui a toujours été — un véritable modèle. Si nous y parvenons, le comité ne perdra aucunement de son lustre et il restera l'un des meilleurs comités du Sénat.

Son Honneur le Président intérimaire : Souhaitez-vous poursuivre le débat? Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Wallin, avec l'appui de l'honorable sénateur Lang, propose que le quatrième rapport d'étape du...

L'honorable Joseph A. Day : Pardonnez-moi, honorables sénateurs, je me suis laissé absorber par l'excellent discours qui vient tout juste d'être prononcé et je viens de me rappeler que j'avais l'intention de demander l'ajournement du débat sur la présente question.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Day, le débat est ajourné.)

Pêches et océans

Budget et autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer—L'étude sur la gestion de la population de phoques gris au large de la côte est du Canada—Adoption du cinquième rapport du comité

Le Sénat passe à l'étude du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans (budget—étude sur la gestion de la population de phoques gris au large de la côte est du Canada—autorisation d'embaucher du personnel et de se déplacer), présenté au Sénat le 16 février 2012.

L'honorable Fabian Manning propose que le rapport soit adopté.

Son Honneur le Président intérimaire : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

La pauvreté

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Robichaud, C.P., attirant l'attention du Sénat sur la question de la pauvreté au pays — une question qui est toujours d'actualité et qui continue de faire des ravages.

L'honorable Art Eggleton : Honorables sénateurs, pour commencer, je tiens à saluer le sénateur Robichaud et à le remercier d'avoir inscrit cette interpellation au Feuilleton. Dans le préambule de cette interpellation, on dit que le problème de la pauvreté au Canada est « une question qui est toujours d'actualité et qui continue de faire des ravages ». Comme c'est vrai.

Honorables sénateurs, il y a à peine plus de deux ans, le Sénat a adopté à l'unanimité le rapport intitulé Pauvreté, logement et itinérance : les trois fronts de la lutte contre l'exclusion. Ce rapport est l'aboutissement d'un travail de deux ans entrepris par un sous- comité du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Je présidais le sous-comité et le sénateur Hugh Segal en assurait la vice-présidence.

Malheureusement, les conditions que nous avons mises au jour à l'époque existent encore aujourd'hui. Nous avions constaté avec stupéfaction, tout comme nous le constatons aujourd'hui, que pas moins d'un Canadien sur 10 vit dans la pauvreté. C'est 3,4 millions de personnes. Cela équivaut à la population entière, hommes, femmes et enfants compris, de la Nouvelle-Écosse, de Terre-Neuve- et-Labrador, du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard et de la Saskatchewan réunies. Ces personnes, qui sont nos concitoyens, doivent composer chaque jour avec un revenu insuffisant, un logement inabordable, des vêtements inadéquats et le manque de nourriture. Luttant pour joindre les deux bouts, ces familles ne peuvent même pas rêver d'améliorer leur sort. Un témoin qui a connu la pauvreté l'a exprimé ainsi : « La pauvreté vole votre âme et ne vous laisse pratiquement aucun espoir. Elle vous dérobe tout ce qui peut être agréable dans la vie. Elle vous laisse isolé, seul et affamé [...]. Chaque jour est un combat. »

Ce qui est également troublant, c'est qu'environ une de ces personnes sur quatre sont des enfants, un chiffre d'autant plus déplorable que le Parlement s'était engagé, en 1989, à éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000, au lieu de quoi nous avons à peine réussi à abaisser sous la barre des 10 p. 100 le taux de pauvreté chez les enfants dans la plupart des provinces.

Nous avons également remarqué que les inégalités ne cessent de s'accentuer dans notre société. Selon Statistique Canada, de 1980 à 2005, le revenu des Canadiens comptant dans la tranche de 20 p. 100, de la population la mieux nantie a progressé de 16,4 p. 100 tandis que celui des Canadiens comptant dans la tranche de 20 p. 100 de la population la plus démunie a reculé de 20,6 p. 100. À la fin de 2009, seulement 4 p. 100 des ménages canadiens détenaient 67 p. 100 de la totalité de la richesse au Canada. De récentes études réalisées par l'OCDE, le Conference Board du Canada et le Centre canadien de politiques alternatives montrent des données semblables et posent des questions sur les répercussions de la pauvreté sur notre tissu social et notre cohésion sociale.

L'an dernier, alors que de nombreux Canadiens ressentaient toujours les effets de la récession, la rémunération des PDG des plus grandes sociétés canadiennes a augmenté d'environ 13 p. 100. L'écart qui ne cesse de se creuser entre les riches et les pauvres — en fait, entre les riches et les autres — annonce une crise imminente.

Honorables sénateurs, je crois que nous comprenons tous les arguments d'ordre moral qui motivent la lutte contre la pauvreté et l'inégalité, soit l'existence bouleversante de souffrances et de besoins dans un pays aussi riche que le nôtre et le nombre inacceptable de vies diminuées, de rêves repoussés et de potentiel perdu.

Par contre, je ne crois pas que beaucoup de gens se rendent compte du coût économique de la pauvreté. La pauvreté nous coûte de l'argent à tous — pas seulement aux pauvres — en faisant augmenter nos impôts, en déprimant l'économie, en augmentant le coût des soins de santé et en entretenant un sentiment d'isolation et la criminalité.

Selon une étude ontarienne dirigée par des économistes et des spécialistes en politique comme Don Drummond, Judith Maxwell et James Milway, la pauvreté coûterait au Canada environ 7,5 milliards de dollars par année uniquement en soins de santé. Les 25 p. 100 des Canadiens les plus pauvres coûtent au pays deux fois plus cher au titre des soins de santé que les 25 p. 100 les plus riches. La valeur de la perte de productivité se situe entre 8 et 13 milliards de dollars. En somme, la facture de la pauvreté varie entre 24 et 30 milliards de dollars par année.

Permettez-moi de vous présenter un autre argument économique. Un rapport de la Chambre de commerce du Canada présente sous un jour très cru les difficultés d'ordre démographique qui pointent à l'horizon. Au fur et à mesure que la population vieillira et que la croissance de la population en âge de travailler ralentira, nous serons aux prises avec de graves pénuries de main-d'œuvre. Dans son rapport, la Chambre de commerce a dit que, pour pallier les pénuries de main-d'œuvre qui s'annoncent, nous devions exploiter les segments sous-employés de la société. Elle mentionne les aînés, les Autochtones, les personnes handicapées et les nouveaux immigrants, en particulier les jeunes hommes célibataires, qui ont touchés très durement par la récession.

Honorables sénateurs, ces groupes sont précisément ceux qui, avec celui des parents seuls — qui sont le plus souvent des mères seules —, ont été désignés dans notre étude comme les plus vulnérables face à la pauvreté. Il se trouve donc que les groupes qui croupissent dans la pauvreté sont ceux dont la Chambre de commerce dit que nous aurons besoin pour combler les postes et pour payer de l'impôts à l'avenir.

Ici se recoupent donc deux des plus grands défis de notre société : les coûts économiques permanents de la pauvreté et la bombe à retardement que constitue le vieillissement démographique. La bonne nouvelle et la grande chance que nous avons, c'est que nous pouvons nous attaquer aux deux problèmes en même temps. Si nous donnons à un plus grand nombre de personnes le moyen de s'arracher à la pauvreté, nous aiderons à combler les postes vacants. Donnez à un plus grand nombre de gens la possibilité d'échapper à la pauvreté, et nous économiserons des milliards de dollars sur les coûts de la pauvreté.

Notre comité a aussi découvert que, au cours des dernières décennies, les politiques sociales que les différents ordres de gouvernement ont mis en œuvre, aussi bien intentionnés étaient- ils, ont abouti à deux résultats tout aussi dévastateurs l'un que l'autre. Premièrement, le revenu découlant de tous les programmes, même quand ceux-ci fonctionnent tels qu'ils le devraient, ne fait que maintenir les gens dans la pauvreté. Deuxièmement, dans le pire des cas, les politiques et les programmes existants maintiennent les prestataires dans la pauvreté, car ils rendent ces derniers dépendants aux programmes de sécurité du revenu ou aux refuges pour les sans- abris.

Comme le sénateur David Croll le déclarait il y a presque 40 ans dans son rapport historique :

[...] nous versons des milliards de dollars chaque année dans un système d'aide sociale qui se contente de traiter les symptômes de la pauvreté sans toucher à la maladie elle- même.

On observe toutefois des signes encourageants. Pendant notre étude, nous avons observé des exemples de pratiques et de programmes prometteurs, la plupart communautaires, qui fonctionnent véritablement, car ils tirent les gens de la pauvreté et de l'itinérance. Ces initiatives sont recensées et soulignées dans notre rapport. Malheureusement, ces exemples ne sont que des étincelles d'espoir dans un système essentiellement dysfonctionnel qui a grand besoin d'une réforme.

Notre comité s'est penché sur toute la gamme des programmes de sécurité du revenu, des allègements fiscaux à l'aide sociale, en passant par l'assurance-emploi et la Sécurité de la vieillesse. Nous avons formulé 74 recommandations précises visant à améliorer la situation. Vous serez heureux d'apprendre que je ne les passerai pas toutes en revue aujourd'hui, mais sachez qu'elles sont dans le rapport, si vous voulez les consulter.

(1630)

Bref, aucun Canadien ne devrait vivre sous le seuil de la pauvreté. Nous avons besoin d'une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté qui soit élaborée par nos gouvernements fédéral et provinciaux. Il est intéressant de souligner que le Conseil national du bien-être social, un organisme dont les membres sont nommés par le gouvernement fédéral, a produit l'automne dernier un rapport intitulé Le sens des sous pour résoudre la pauvreté. Le conseil a dit qu'il faudrait 12 milliards de dollars par année pour que les Canadiens atteignent et dépassent le seuil de pauvreté. Si l'on compare ce montant aux 24 à 30 milliards que coûte la pauvreté chaque année, que j'ai mentionnés tout à l'heure, on peut voir pourquoi le conseil a utilisé le mot « sens » plutôt que « cents » dans le titre du rapport.

Permettez-moi d'aborder brièvement les questions du logement et de l'itinérance. Je pense que nous savons tous d'instinct à quel point il est important de pouvoir compter sur un logement convenable. Un logement constitue un point d'ancrage pour une personne et une famille. Il jette les bases de la réussite d'un niveau de scolarité plus élevé et mène à une plus grande stabilité au travail. Les spécialistes de la santé nous disent également qu'un logement adéquat constitue un facteur déterminant en matière de santé à court et à long termes. À l'heure actuelle, 4 millions de Canadiens ont du mal à trouver un logement abordable. Quand je dis « abordable », je me fie à la norme de la SCHL, c'est-à-dire qu'environ 30 p. 100 du revenu doit être consacré à un logement adéquat et convenable.

La lutte contre le problème de l'itinérance n'est pas uniquement une obligation morale, mais également une question d'argent. Il est plus onéreux pour la société de laisser une personne vivre dans la rue que de lui offrir un logement convenable et des services de soutien. L'ancien premier ministre de l'Alberta, Ed Stelmach, a dit il y a seulement un an qu'un sans-abri coûte, en moyenne, environ 100 000 $ par année à la société, ce qui comprend les coûts des soins de santé. Les sans-abris fréquentent sporadiquement les refuges, le système judiciaire, les prisons, et cetera. Lui dit 100 000 $, mais certains disent que c'est encore plus. Il a signalé que le coût annuel tombe à environ 35 000 $ par année pour chaque personne à qui on donne accès à un logement et à du soutien à long terme.

Malcolm Gladwell, auteur du livre Le point de bascule, a signé un article dans le magazine The New Yorker à propos d'un homme, Murray Barr, surnommé l'homme à un million de dollars. M. Barr a vécu dans la rue, en prison, dans des salles d'urgence et à l'hôpital. Il était alcoolique et il a fini par mourir dans la rue. Le million de dollars en question, c'est ce qu'il a coûté aux contribuables. Il aurait été nettement préférable et plus économique de l'aider à surmonter sa toxicomanie.

Honorables sénateurs, nous devons faire davantage en matière de logement et d'itinérance. Il est temps que les gouvernements fédéral et provinciaux se penchent sur la question et mettent au point une stratégie nationale en matière de logement.

Honorables sénateurs, comment peut-on mettre les choses en marche? Il faudra avant tout de la volonté — de la volonté politique. La plupart des provinces sont en train d'adopter des plans antipauvreté. Il faut qu'elles amènent la question sur le tapis aux réunions fédérales-provinciales-territoriales afin que le gouvernement fédéral s'engage lui aussi dans le dossier. Tous les ordres d'administration doivent s'y investir. Il faut aussi accroître la sensibilisation, le soutien et la compréhension des Canadiens, pauvres ou non, relativement aux coûts qu'ils doivent tous assumer.

Je conclus en précisant que notre rapport est fondé sur un simple principe de bon sens, à savoir que les programmes sociaux devraient tirer les gens de la pauvreté et non les y laisser. Il est temps de donner aux gens les outils dont ils ont besoin pour s'en sortir et avoir une vie meilleure. La pauvreté n'est pas un problème anodin. Elle nous touche tous et nous coûte cher à tous. Nous dépensons beaucoup d'argent sans obtenir les résultats escomptés. La transformation de tout système implique des coûts de transition, mais je suis fermement convaincu que, dans l'ensemble, nous n'avons pas besoin de dépenser davantage, mais nous devons dépenser de façon plus avisée, et de façon plus efficace et plus efficiente.

Dans l'économie mondiale d'aujourd'hui, où pointe le défi démographique que représente une société vieillissante menant à une diminution de la main-d'œuvre, il est plus important que jamais de créer des possibilités pour libérer l'apport créateur de ceux qui sont pris au piège de la pauvreté. De façon très concrète, le niveau futur de notre prospérité dépend de notre façon d'aborder le niveau actuel de notre pauvreté. Bref, je crois que la pauvreté est une chose que nous ne pouvons tout simplement plus nous permettre.

(Sur la motion du sénateur Segal, le débat est ajourné.)

[Français]

Les ordres de renvoi des comités du Sénat

Interpellation—Fin du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Comeau, attirant l'attention du Sénat sur la teneur des ordres de renvoi des comités.

L'honorable Joan Fraser : Honorables sénateurs, je voudrais commencer par réitérer mes félicitations au sénateur Comeau. Avec son interpellation, il nous rappelle un sujet qui va au cœur de notre rôle de parlementaire.

Comme tout le monde, je crois que les comités sont au cœur, et peut-être même le cœur du Sénat. Tout comme le sénateur Comeau, je suis ici maintenant depuis un certain temps, j'ai participé aux travaux de plusieurs comités, j'en ai présidé, j'ai présidé des sous- comités et j'ai appris à quel point le travail de nos comités est précieux, non seulement pour nous, mais pour le Parlement et pour le pays.

Il est donc essentiel que nous soyions les gardiens très soucieux de ce qui est important dans cette tradition du Sénat et du Parlement du Canada.

[Traduction]

Il y a un problème qui existe depuis longtemps et le sénateur Comeau l'a soulevé. Il l'a fait mieux que je ne le ferais. En fait, je dirais que ce problème est plus aigu qu'il ne l'a dit. Selon moi, le problème réside dans la façon dont nous traitons les ordres de renvoi et les décisions budgétaires liées à ces ordres de renvoi pour les comités.

Dans un premier temps, on demande au Sénat d'approuver un ordre de renvoi. Une fois que c'est fait, le comité s'adresse au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, et plus précisément au sous-comité présidé par le sénateur Comeau, qui est responsable des budgets et des déplacements des comités, et il présente son budget. Toutefois, comme l'a dit le sénateur Comeau, et je le cite :

À mon avis, notre comité ne peut pas remettre en question les paramètres d'un ordre de renvoi déjà adopté par le Sénat.

Tels ont été le principe et la tradition suivis ici. Cela signifie que le Sénat lui-même devrait assumer la responsabilité des ordres de renvoi qu'il autorise. Or, la plupart du temps, ce n'est pas ce que nous faisons. Il en est ainsi en partie parce que nous respectons nos comités. Lorsqu'un comité vient nous voir et dit : « Nous voulons étudier X », nous avons tendance à dire : « Faites-le, parce que nous savons que vous êtes un groupe de gens sérieux et nous vous autorisons donc à mener votre étude. »

Toutefois, la portée des ordres de renvoi est parfois si étendue que nous autorisons les comités à faire à peu près n'importe quoi. Je me souviens qu'il y a quelques années, notre ancien collègue le sénateur Banks, alors président du Comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, avait présenté un ordre de renvoi dont la portée était tellement vaste que je lui avais dit : « Vous pourriez tout faire avec cet ordre de renvoi, sauf aller sur la planète Mars. » Il m'avait regardé en souriant et avait répondu : « Exactement. » C'était exactement ce qu'il voulait. Il voulait un ordre de renvoi d'une portée tellement vaste que le comité pourrait ensuite estimer qu'il était autorisé à faire à peu près tout ce qu'il voulait.

À mon avis, le sénateur Banks a été un excellent président de ce comité qui, sous sa présidence, a fait un travail formidable et important, comme c'est encore le cas aujourd'hui. En fait, tous nos comités font un travail important. Le problème n'est pas là. Le problème, c'est que lorsque nous accordons ces autorisations, nous signons essentiellement des chèques en blanc. Nous n'exerçons pas la fonction que les parlementaires sont censés exercer, c'est-à-dire savoir ce qu'ils font et ce qu'ils autorisent en matière de dépenses de fonds publics. Par conséquent, nous demandons au Comité de la régie interne d'accomplir la tâche impossible qui consiste à tenter de trancher parmi toutes les demandes importantes et valides déjà autorisées par le Sénat.

(1640)

Nous savons que nos règles comportent des singularités et qu'elles sont problématiques à certains égards. Il me semble néanmoins que nous, parlementaires, pourrions simplement modifier nos pratiques sans qu'il soit nécessaire de changer une seule règle. Ainsi, lorsqu'un comité nous soumet un ordre de renvoi, nous pourrions commencer par poser des questions. De fait, nous pourrions nous attendre à ce que, avant même que nous ayons à poser des questions, le président du comité — ou le vice-président, si le président est absent — fournisse une explication assez détaillée de ce qui est prévu. Nous pourrions refuser d'adopter des ordres de renvoi trop généraux et exiger que ceux qui sont soumis soient précis. Nous n'allons jamais étudier toutes les questions relatives à l'énergie et à l'environnement de façon générale, si valable ce champ d'études soit-il. Nous allons plutôt être appelés à nous pencher sur le sujet dont le Comité de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a été saisi. Des dates pourraient être fournies. Le Sénat pourrait être informé sommairement des témoins que le comité a l'intention d'entendre, des endroits où il compte se rendre, des grands enjeux qu'il envisage d'examiner et de l'objet de son rapport, non pas en matière de conclusions, mais plutôt du point de vue des domaines sur lesquels il prévoit être en mesure de faire rapport.

J'ai parlé du Comité de l'énergie, mais nous savons tous que mes propos s'appliquent à différents types de comités. En consultant les ordres de renvoi dernièrement, j'en ai trouvé un du Comité des peuples autochtones, qui accomplit un travail remarquable de représentation pour des gens qui ont désespérément besoin qu'on fasse valoir leurs droits.

Bonté divine, nous l'avons autorisé à :

Examiner, en vue d'en faire rapport, les responsabilités constitutionnelles, conventionnelles, politiques et juridiques du gouvernement fédéral à l'égard des Premières nations, des Inuits et des Métis et d'autres questions générales relatives aux peuples autochtones du Canada.

Qu'est-ce que cela signifie? Nous ne le savons pas. Je le répète : il est vital de mener des études sur les Autochtones, mais avant que nous — les 105 sénateurs — ne signions un chèque en blanc au comité, nous devons exiger qu'il délimite clairement la portée de son étude. Or, nous ne le faisons pas et, de ce fait, à mon avis, nous manquons à notre devoir constitutionnel.

La plupart d'entre nous se rappelleront notre ancien collègue, Lowell Murray, un homme qui a oublié plus de choses sur le Parlement et les finances publiques que n'importe lequel d'entre nous en connaîtra jamais. Il avait l'habitude de se plaindre que la Chambre des communes a :

[...] permis que son pouvoir le plus fondamental, le pouvoir de dépenser, devienne lettre morte, et que le processus d'étude des crédits et du Budget des dépenses devienne un rituel vide de sens.

Nous savons que c'est vrai. Nous savons que si un comité n'examine pas le budget des dépenses, il est simplement réputé avoir été adopté. Cette règle s'applique sous l'actuel gouvernement, mais elle s'appliquait déjà sous les gouvernements précédents.

Il n'y a pas si longtemps, un gouvernement libéral a adopté à la va-vite, en l'espace d'une demi-heure, des dépenses totalisant 50 milliards de dollars. Qui plus est, le gouvernement a obtenu le consentement unanime. Ce n'est pas ce que j'appelle bien garder les fonds publics.

Nous ne pouvons pas dire à la Chambre des communes ce qu'elle doit faire, mais nous pouvons mettre de l'ordre dans nos affaires et veiller à ce que nous fassions ce que nous devrions faire depuis longtemps, soit examiner les dépenses que nous autorisons et vérifier comment les précieux dollars des contribuables seront dépensés.

L'honorable Gerald J. Comeau : Est-ce que madame le sénateur Fraser accepterait de répondre à une question?

Le sénateur Fraser : Avec beaucoup d'appréhension.

Le sénateur Comeau : Je remercie le sénateur Fraser d'avoir précisé certaines choses que j'ai omises dans mon discours. Elle a fourni beaucoup plus de détails, mais je crois que je sais ce qui la motive.

J'ai écouté ses commentaires, et elle parlé des différences importantes entre la Chambre des communes et le Sénat. À la Chambre des communes, il existe une sorte d'ordre de renvoi général, donc les comités n'ont pas besoin d'obtenir un ordre de renvoi de la part de la Chambre. En d'autres termes, ils peuvent simplement aller de l'avant et étudier ce qu'ils veulent, quand ils veulent.

Au Sénat, par contre, nous nous intéressons à ce que font les comités. C'est pourquoi un ordre de renvoi doit être sollicité de cette assemblée. Cela dit, les sénateurs veulent vraiment savoir ce que font leurs comités.

À mon avis, ce que madame le sénateur a soulevé est extrêmement important. Ce qu'elle a suggéré ajouterait énormément à nos travaux et augmenteraient encore la valeur de nos comités. Si nous sommes au courant de ce que font nos comités, nous suivrons leurs travaux de beaucoup plus près. C'est l'un des éléments qui ont tant accru le pouvoir de nos comités, outre le fait que nous n'avons pas à nous préoccuper d'élections dans trois ans, je suppose.

Madame le sénateur Fraser aurait-elle d'autres suggestions qu'elle aurait oublié de faire quand elle a pris la parole? Y a-t-il d'autres facteurs qui expliquent pourquoi nos comités sont tellement meilleurs?

Le sénateur Fraser : Il est évident que nos comités sont nettement meilleurs. La semaine dernière encore, alors que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles siégeait, j'ai eu l'occasion de parler avec plusieurs témoins qui m'ont dit, comme nous avons tous entendu tant d'autres nous le dire : « Vous savez, j'ai comparu devant des comités de la Chambre des communes et devant des comités du Sénat, et c'est le jour et la nuit. C'est tellement mieux ici. Vous travaillez avec sérieux et vous n'êtes pas obsédés par la volonté de marquer des points sur le plan politique. »

Les témoins, et le public aussi, selon moi, apprécient vraiment cette réalité. Il est vrai que nous avons à cœur le travail de nos comités. C'est là une des caractéristiques du Sénat.

Je crois aussi que notre capacité d'accomplir un meilleur travail est liée à la nature du Sénat, qui a évolué au fil des ans. Cela peut évidemment changer mais, pour l'instant, je crois que l'un des avantages dont nous bénéficions à cet égard a trait au fait que nous n'avons pas à être élus, que nous n'avons pas à marquer des points politiques, et que nous savons que nous allons devoir nous côtoyer pendant longtemps, alors autant prendre nos activités au sérieux et ne pas se laisser emporter par une incessante partisanerie.

Je ne crois pas avoir d'autres recommandations à faire. Je ne connais certainement pas les subtilités du Règlement de la Chambre des communes aussi bien que le sénateur Comeau. Il a siégé avec distinction à l'autre endroit pendant un certain temps avant de faire de même ici, un honneur que je n'ai pas eu. De toute façon, je ne crois pas que je sois faite pour cela.

Je respecte les députés. Je sais que je serais incapable de faire leur travail, mais je crois que nous pouvons faire mieux dans ce domaine. J'irais jusqu'à dire que même si nous faisons déjà du très bon travail, nous pouvons encore nous améliorer. Si le Comité de la régie interne a d'autres recommandations sur la question, sur les façons de nous y prendre, je serais tout à fait disposée à en prendre connaissance. J'invite tous les sénateurs à participer à l'exercice si on les y invite.

Son Honneur le Président intérimaire : Y a-t-il d'autres interventions?

Le sénateur Comeau : J'ai un bref commentaire à faire. Je sais que je devrais poser une question, mais je vais la présenter sous forme de commentaire. Je suis heureux que madame le sénateur ait parlé de la différence entre le Sénat et la Chambre.

Tout comme elle, je suis d'avis que les députés de la Chambre des communes font un travail remarquable. Ils travaillent fort dans un contexte parfois extrêmement difficile et partisan. De temps à autre, ce genre de chose se produit au sein des comités sénatoriaux, mais, en général, les études se font dans une atmosphère non partisane.

(1650)

La production de rapports non partisans, de nature collégiale, est l'un des grands avantages du Sénat et l'un des meilleurs volets du rôle de sénateur. Je voudrais féliciter le sénateur Day, qui se trouve en face, pour son travail au sein du Comité des finances et pour l'approche extrêmement rigoureuse de ce comité. C'est assez souvent le contraire de ce qui se passe dans l'autre endroit. Je pense que nous devons être contents de ce que produisent nos comités, et leur production est tout à fait tangible.

L'honorable Carolyn Stewart Olsen : Je sais que le temps est écoulé, mais pourrions-nous avoir cinq minutes de plus?

Son Honneur le Président intérimaire : Sénateur Fraser, voulez- vous cinq minutes de plus?

Le sénateur Fraser : Oui.

Son Honneur le Président intérimaire : La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix : Oui.

Le sénateur Stewart Olsen : Je voulais prendre la parole dans ce débat parce que je suis d'avis qu'il est extrêmement important, mais vous avez tous les deux présenté avec éloquence les arguments que je voulais faire valoir. Comme je suis une nouvelle venue au Sénat et que je siège au Comité de la régie interne, j'aimerais que le sénateur Fraser fasse parvenir à ce comité quelques notes d'information pour nous indiquer comment ce dernier devrait procéder aux changements, qui me paraissent extrêmement importants et justifiés par des motifs très valables. Je lui serais très reconnaissante de bien vouloir faire parvenir ses notes au président du Comité de la régie interne.

Le sénateur Fraser : Je remercie madame le sénateur de cette marque de confiance. Le Comité de la régie interne est l'un des comités dont je n'ai jamais été membre. J'ai fait partie du troupeau de présidents de comité qui se présentent devant le Comité de la régie interne, puis s'en vont en se plaignant de ne pas avoir eu assez d'argent, tandis qu'un autre en a eu davantage.

Je réfléchirai à la question et j'invite tous les sénateurs à y réfléchir aussi, car nous souhaitons tous bien faire notre travail.

Le sénateur Stewart Olsen : Merci.

Son Honneur le Président : Si aucun autre sénateur ne désire prendre la parole, le débat sur cette interpellation est considéré comme terminé.

(Le débat est terminé.)

La reconnaissance du commandement des bombardiers lors de la Seconde Guerre mondiale

Interpellation—Suite du débat

L'ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénateur Meighen, attirant l'attention du Sénat sur le retard inadmissible, malgré la résolution adoptée à l'unanimité par cette Chambre le 18 juin 2008, à accorder une distinction honorifique adéquate aux braves aviateurs et membres d'équipage canadiens qui ont fait partie du commandement des bombardiers lors de la Deuxième Guerre mondiale et qui, par leurs efforts, leurs sacrifices et leur courage, ont pu mettre fin à une guerre qui aurait pu durer des années encore.

L'honorable Hugh Segal : Honorables sénateurs, j'interviens pour parler de l'interpellation de l'ancien sénateur Meighen sur le retard inadmissible dans la remise d'une distinction honorifique méritée aux courageux Canadiens qui ont fait partie du commandement des bombardiers lors de la Seconde Guerre mondiale. Comme je n'étais pas lors des hommages rendus au sénateur Meighen à l'occasion de sa dernière journée dans cette Chambre, le plus grand hommage que je puisse lui rendre est de poursuivre avec d'autres personnes ses efforts pour corriger cette terrible injustice.

Le Sénat a parlé d'une seule voix le 18 juin 2008 quand il a adopté une résolution à l'unanimité pour remédier à la situation. Cependant, il semble que personne à Rideau Hall, à la Chancellerie des distinctions honorifiques, au ministère de la Défense nationale, au ministère des Anciens Combattants, au ministère du Patrimoine ou au Conseil privé n'ait prêté le moindre intérêt à la résolution que nous avons adoptée à l'unanimité sur cette question.

Entre-temps, ces courageux aviateurs, qui ont subi plus de pertes lors des raids de bombardement importants sur l'Allemagne nazie que les autre Canadien qui ont participé à toute autre opération lors de la Seconde Guerre mondiale, meurent sans obtenir la reconnaissance qu'ils méritent. Comment les bureaucrates, les membres ergoteurs du Comité des distinctions honorifiques et les employés indolents de tous ces ministères, y compris de Rideau Hall, peuvent-ils être assez cruels pour laisser une telle injustice se poursuivre? Savent-ils à quel point il fallait du courage à ces jeunes Canadiens? Se soucient-ils du fait que le danger était si important que, sur les 17 100 Canadiens qui ont fait partie du commandement des bombardiers, 9 980 d'entre eux, soit 56 p. 100, sont morts au combat? Il est évident que ces fonctionnaires apathiques s'en fichent éperdument.

Cette semaine, je vais présenter une série de questions écrites dans le but de connaître les noms, les réunions, les dates et les participants à des comités au sein de la bureaucratie qui ont fait traîner les choses, se sont perdus en futilités au lieu d'agir et qui ont hésité, alors que des Canadiens beaucoup plus âgés qu'eux sont décédés...

Des voix : Bravo!

Le sénateur Segal : Au cours de quelques heures en Europe, et ce, à plusieurs reprises, ces Canadiens ont fait preuve d'un courage, d'un patriotisme et d'un amour pour leur pays que ces fonctionnaires ne pourront jamais comprendre.

Je tiens à féliciter les ministres MacKay et Baird, ainsi que les sénateurs Moore et LeBreton, qui sont tous intervenus en faveur de cette décoration et qui ont travaillé extrêmement fort pour qu'elle devienne réalité. Pourquoi ne s'est-il donc rien passé? Comment se fait-il que les choses soient si empêtrées et enchevêtrées que même des ministres de premier plan, des hommes et des femmes honnêtes et de valeur, n'ont aucune emprise sur cette question? Quel processus ou comité chargé des distinctions honorifiques est tellement insensible à la décence publique et l'équité qu'il empêche depuis longtemps que les mesures qui s'imposent soient prises? Quel péché ces courageux pilotes et membres d'équipage canadiens ont-ils commis lorsqu'ils sont allés frapper l'Allemagne d'Hitler bien avant que les soldats canadiens et ceux d'autres pays puissent ouvrir un front à l'Ouest, sur les plages de Sicile et de Normandie, longtemps après que les bombardiers nazis eurent attaqué les populations civiles en Europe et au cours du Blitz sur Londres?

Honorables sénateurs, en cette année du jubilé, dans les 16 pays qui composent son royaume, nous rendons hommage à la reine qui, en tant que jeune femme et princesse ayant vécu les bombardements aériens à Londres, a travaillé dans les ateliers de réparation des ambulances et autres véhicules qui étaient essentiels pour sauver la vie de civils qui subissaient toutes les nuits le feu nourri de l'ennemi. Cet esprit caractérisé par le service, le devoir et la loyauté envers sa population est la marque de commerce de notre reine depuis ce jour. Cette année de jubilé est l'occasion idéale de réparer une injustice et de remettre aux Canadiens membres du commandement des bombardiers la décoration qu'ils méritent tant compte tenu de leur service altruiste, de leur courage et de leur sacrifice.

Je sais que le leader du gouvernement au Sénat a tenté d'être très utile dans ce dossier, et je lui en suis très reconnaissant. Je sais aussi que cette proposition est appuyée par les deux partis au Sénat, et c'est pourquoi la résolution a été adoptée à l'unanimité en 2008. Je suis persuadé que, en ce moment même, il y a dans les bureaux des ministres, des députés et des sénateurs, tous partis confondus, des personnes qui travaillent extrêmement fort, pour que cette proposition se concrétise enfin. Quand on y pense, on ne peut qu'être encore plus irrité devant l'absence de progrès observée jusqu'ici.

J'invite d'autres sénateurs à prendre la parole dans le cadre de ce débat au cours des prochaines semaines. Si nous persistons dans nos efforts, il est à espérer que les démons du retard, de la tergiversation, des faux-fuyants et de la trahison seront chassés par les anges de la décence, du respect, de la reconnaissance et de la gratitude avant qu'il soit ne trop tard. Nous le devons bien aux courageux pilotes et membres d'équipage canadiens qui ont écourté la guerre, aidé à sauver des millions de vies et contribué de façon si considérable au maintien de la civilisation contre le fascisme et la tyrannie. N'oublions jamais, en effet.

Son Honneur le Président : Le sénateur Segal accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Segal : Avec joie.

L'honorable Percy E. Downe : Le sénateur a réussi avec brio, comme toujours, à résumer la question et, dans ce cas-ci, notre frustration à tous. Pourrait-il nous dire ce qui ne va pas? Quel comité doit approuver cela? Ce n'est certainement pas un ministère axial. Ce serait un comité responsable des distinctions. Serait-ce Rideau Hall ou le gouvernement du Canada? Peuvent-ils s'entendre sur un hommage particulier? Je me demande ce que le sénateur a découvert dans le cadre de son enquête jusqu'à présent.

Le sénateur Segal : La bonne et la mauvaise nouvelle, sénateur, est que la réponse à toutes vos questions est oui, toutes les possibilités. J'ai suivi le dossier d'un ministère à l'autre. Je l'ai suivi au Bureau du Conseil privé. Je l'ai suivi à la chancellerie. J'ai posé les questions qui me sont venues à l'esprit — c'est-à-dire si les comités sur les distinctions s'étaient réunis ou non, si les politiques en matière de distinctions étaient en cours d'examen ou non — mais la réponse est toujours : « Pas encore. Il y a un problème. On s'en occupe. » Puis, plus rien. Le problème dans tout cela est que, pendant que l'espoir s'éteint, un nombre croissant de pilotes dont le sacrifice et le courage n'ont pas été reconnus s'éteignent aussi.

(1700)

Nous avons créé des décorations particulières pour Dieppe. Nous avons créé des éditions spéciales de décorations pour l'Afrique du Nord, théâtre d'une bataille. Nous ne demandons rien d'extraordinaire. Nous disons simplement que le commandement des bombardiers, qui a effectué des centaines de vols qui étaient nécessaires pour appuyer l'effort de guerre, soit reconnu, qu'on reconnaisse que ses membres d'équipage, ses pilotes et ses navigateurs de même que ses officiers de l'armement ont donné le meilleur d'eux-mêmes pour leur pays, prenant d'énormes risques. C'est tout ce que nous demandons. C'est tout ce que les survivants et leurs familles demandent.

Je ne sais pas pourquoi la demande n'a pas encore été acceptée. Je voudrais bien donner une réponse claire et précise à mon collègue de l'Île-du-Prince-Édouard, mais je ne le peux pas, car je ne le sais pas.

Le sénateur Downe : Je vous remercie de cette réponse. Vous avez parlé de la Barrette de Dieppe qui, comme vous l'avez précisé, a été décernée plusieurs années après les faits. En fait, elle a été décernée à mon regretté beau-père plusieurs années après.

Je pars du principe que le processus serait similaire. Voici ma question : savez-vous comment il se fait que la Barrette de Dieppe a été décernée plusieurs décennies après la fin de la guerre?

Le sénateur Segal : Je crois savoir que c'est un comité interministériel des décorations qui examine ces questions. Le comité essaie de prendre des décisions complètement impartiales et équitables. Il étudie le contexte historique et obtient des conseils à ce sujet du ministère de la Défense nationale.

À l'époque, il existait une règle en vertu de laquelle il ne pouvait pas s'écouler plus de cinq ans entre le moment où un événement se produit et celui où il est reconnu. Manifestement, elle n'a pas été appliquée rigoureusement. Elle est appliquée dans la plupart des cas, mais pas toujours. Le sénateur marque un bon point. Il n'y a aucune raison que l'événement dont il est question ne soit pas reconnu, et le plus rapidement possible, en dépit de cette règle.

Le sénateur Downe : On croirait que c'est le SCRS qui gère le système d'attribution des décorations. Je souhaite bonne chance au sénateur.

Le sénateur Segal : Ce serait préférable s'il était géré par le SCRS — les résultats ne se feraient pas attendre — plutôt que par un comité interministériel de fonctionnaires anonymes qui ne semblent pas, à ma connaissance, devoir rendre compte à une quelconque autorité politique qui poserait les questions suivantes : Pourquoi le processus est-il si long? Combien de temps devrons-nous encore attendre? Il ne semble pas que ce comité rende directement compte à qui que ce soit, en tout cas pas dans la structure de gouvernance actuelle.

L'honorable Michael Duffy : Honorable sénateur Segal, je me demande s'il vous semble plausible que le documentaire très tendancieux et injuste dont a fait l'objet le commandement des bombardiers puisse avoir un rôle à jouer dans toute cette histoire? Est-ce que les relents de cette description injuste de la bravoure de ces hommes — la plupart très jeunes — inciteraient les bureaucrates à fermer les yeux sur le courage dont ces hommes ont réellement fait preuve?

Le sénateur Segal : Je me souviens en partie de cette controverse, sénateur. Je veux d'ailleurs rendre hommage au sénateur Day, qui présidait le comité qui s'est penché sur cette question à l'époque. À mon avis, les membres du comité — et c'est tout à l'honneur du sénateur Day — ont su trouver le juste équilibre en collaboration avec nos amis du Musée canadien de la guerre. Non seulement le musée n'a pas passé sous silence la controverse qui a fait rage à l'époque et dans les années qui ont suivi la guerre, mais il s'est aussi efforcé de la replacer dans une juste perspective. En effet, il a rendu hommage à la bravoure et au courage des jeunes Canadiens qui ont dû participer à ces périlleuses missions qui se sont déroulées pendant ces terribles nuits.

On peut retenir des ouvrages sur le sujet que, pendant les interminables négociations tenues entre Staline et Churchill afin de conserver l'appui des Russes, la seule chose que Churchill pouvait dire aux Russes — qui étaient en colère parce qu'il ne se passait rien sur le front ouest — était que les bombardiers attaqueraient l'ennemi d'une façon jusqu'alors inédite, c'est-à-dire en plein cœur du territoire ennemi. Ce fut un moment charnière : Churchill a ainsi pu s'assurer la collaboration des Russes, qui ont continué de se battre aux côtés des Alliés pour empêcher que la tyrannie des fascistes ne détruise le monde.

La controverse a peut-être été un enjeu, mais, à mon avis, le travail non partisan abattu par le sénateur Day et par les autres membres du comité a réglé cette question. Il s'agirait d'une piètre excuse et d'une vaine tentative visant à camoufler la vérité : il semble que les responsables sont simplement incapables de comprendre, comme la question du sénateur le donne à croire, à quel point il s'agit d'un enjeu des plus urgents pour les survivants qui ont joué cet important rôle et qui ont combattu pour la liberté.

L'honorable Joseph A. Day : Honorables sénateurs, je voudrais remercier le sénateur Segal de son appui et de son excellente relation des faits de cette affaire particulière. Je vais essayer de donner aux sénateurs une certaine perspective historique.

Nous avons examiné cette question au Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense. Le sénateur Norm Atkins, dont le père a combattu sur la crête de Vimy au cours de la Première Guerre mondiale, était le vice-président du comité et tenait beaucoup à ce que les faits soient reconnus.

Le documentaire produit à ce sujet avait provoqué une grande déception chez beaucoup de Canadiens. Nous avions travaillé très fort pour faire ajouter des mises au point qui l'auraient adouci. Toutefois, nos efforts n'ont pas eu beaucoup de succès.

Par la suite, il y a eu, au Musée canadien de la guerre, une exposition qui faisait preuve du même parti pris contre ce qu'avait fait le commandement des bombardiers. C'était vraiment très décevant. Nous avions tenu des audiences publiques à ce sujet et avions réussi à faire modifier l'exposition grâce aux efforts des sénateurs. La controverse a été si forte qu'un certain nombre de personnes au Musée de la guerre avaient donné leur démission. Cela donne une idée des conflits suscités par cette affaire. Il est important pour nous de comprendre tout ce contexte.

Honorables sénateurs, il y a un autre élément à considérer. Un bon nombre de Canadiens avaient combattu dans les rangs de la Royal Air Force et avaient participé aux activités du commandement des bombardiers, sous le commandement d'officiers britanniques. C'est plus tard durant la guerre que le commandement des bombardiers a compté un groupe canadien. Même là, il y avait encore beaucoup de Canadiens qui volaient sous les couleurs de la RAF. C'est une autre complication.

J'ai cru comprendre que la chancellerie avait examiné la question. Toutefois, je n'ai jamais vu ses recommandations, qui ont été adressées à notre exécutif. La chancellerie ne prend pas de décisions. Elle se limite à formuler des recommandations, la décision finale appartenant au gouvernement. Je crois que nous devrions continuer de nous occuper de cette affaire pour essayer de trouver les faits que le sénateur Segal a dit vouloir découvrir. Je voudrais aller encore plus loin pour essayer de me rafraîchir la mémoire. Cela fait trois ou quatre ans que je n'ai pas eu l'occasion d'y penser. Je croyais que nous avions réalisé quelque chose en prenant position au sujet du Musée canadien de la guerre, mais il est évident qu'il y a encore du parti pris. Je soupçonne fort que c'est ce parti pris qui cause encore des problèmes.

Il ne nous reste plus beaucoup de temps. L'espérance de vie étant ce qu'elle est, ceux qui ont fait partie du commandement des bombardiers ne seront pas encore là très longtemps. La situation est critique, et elle l'est depuis un certain temps.

Avec votre permission, honorables sénateurs, je voudrais ajourner le débat pour avoir la possibilité de faire d'autres recherches dont je vous ferai part pendant le reste de mon temps de parole.

Son Honneur le Président intérimaire : L'honorable sénateur Day, avec l'appui de l'honorable sénateur Downe, propose que le débat soit ajourné à la prochaine séance du Sénat au nom de l'honorable sénateur Day, pour le reste de son temps de parole.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(Sur la motion du sénateur Day, le débat est ajourné.)

(1710)

L'ingérence des fondations étrangères dans les affaires internes du Canada

Interpellation—Ajournement du débat

L'honorable Nicole Eaton, ayant donné avis le 2 février 2012 :

Qu'elle attirera l'attention du Sénat sur l'ingérence des fondations étrangères dans les affaires internes du Canada et leur utilisation abusive du statut d'organisme de bienfaisance accordé par Revenu Canada.

— Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour ouvrir une enquête qui révélera des faits étonnants — des faits qui m'ont surprise et, je l'espère, vous surprendront aussi, vous feront bouillir de colère et nous pousseront à agir.

Il s'agit d'une manipulation politique. D'un trafic d'influence. Des millions de dollars camouflés en dons de charité sont envoyés frauduleusement d'un pays à un autre, vers des comptes bancaires ou des organismes de charité fantômes qui, dans certains cas, ne servent qu'à l'évasion fiscale. Ils versent de l'argent à d'autres organismes de bienfaisance sans divulguer à quoi ces fonds sont destinés. Cette enquête porte sur la façon dont des fondations étrangères détenant des milliards de dollars se sont installées au Canada sans tambour ni trompette et, sous le couvert de supposées activités de bienfaisance, tentent de s'ingérer dans nos politiques internes.

[Français]

Elle porte sur des sociétés qui s'en mettent plein les poches en s'associant à des causes à la mode.

[Traduction]

Il s'agit de vedettes de cinéma déchues ou de gens qui rêvent de devenir des vedettes et qui tentent de relancer leur carrière. Il s'agit de gens prêts à tout pour miner la crédibilité du Canada et ce que représente l'identité canadienne ici et dans le monde entier. Il faut toutefois se demander ceci : est-ce que ces organismes de bienfaisance et ces organisations non gouvernementales qui acceptent d'énormes sommes d'argent défendent vraiment les intérêts du Canada, ou servent-ils plutôt leurs maîtres étrangers? Leur cause est-elle vraiment l'environnement, ou s'agit-il d'une entreprise beaucoup plus vaste et plus rentable? Il s'agit d'organismes qui consacrent la plus grande partie de leurs ressources à des activités politiques et au lobbying, et d'entités qui sont établies à titre d'organisme de bienfaisance au Canada mais n'ont même pas de bureau au Canada, seulement une boîte postale. Se présentant tout innocemment comme des associations de gens ordinaires, ces organismes ont l'audace de s'ingérer dans nos affaires internes et dans les questions qui touchent la souveraineté canadienne, toujours en catimini.

Comme l'écrit Vivian Krause, activiste et blogueuse de la côte Ouest :

Une chose est certaine : quand 36 organismes sont tous financés par une même source étrangère, les campagnes pour lesquelles ils dépensent plusieurs millions — pour payer des employés à plein temps salariés, des panneaux publicitaires coûteux et des sites Web sophistiqués — n'ont rien d'une opération menée par des citoyens ordinaires.

[Français]

Cette enquête porte sur des maîtres de la manipulation qui se cachent derrière des organismes de bienfaisance pour manipuler nos politiques à leur propre avantage.

[Traduction]

Si nous suivions la trace des contributions financières versées aux ONG et aux organismes caritatifs canadiens, nous comprendrions sans doute pourquoi les fondations étrangères dépensent autant d'argent au Canada. Malheureusement, les réponses se cachent souvent derrière des armées d'avocats et de comptables astucieux qui travaillent pour des fondations financées par le secteur privé et structurées de manière à pouvoir échapper à tout examen. Selon les calculs préliminaires de Vivian Krause, les fondations américaines ont versé au moins 300 millions de dollars aux organismes écologiques canadiens depuis 2000. Oui, 300 millions de dollars. La Fondation Tides, dont le siège social est en Californie, a versé au moins 6 millions de dollars à 36 organismes canadiens. Au cours des dernières décennies, la Fondation David Suzuki a reçu au moins 10 millions de dollars de fondations américaines. La Fondation Hewlett, dont le siège social est en Californie, a versé 13,6 millions de dollars à Tides Canada de 2002 à 2007. Depuis 2007, la Fondation Oak, qui a été fondée par le milliardaire britannique Alan Parker et dont le siège social est à Genève, a versé près de 2,6 millions de dollars à six groupes qui militent contre l'exploitation des sables bitumineux. Ce ne sont là que quelques exemples.

Certains organismes clés soutenus par des fondations étrangères ayant le dessein d'influencer l'opinion publique et l'orientation du gouvernement ont obtenu de l'Agence du revenu du Canada le statut d'organisme de bienfaisance. Ils émettent des reçus pour fins d'impôt même si une part importante de leurs activités pourrait être considérée comme très politique. Bon nombre d'entre eux agissent comme des lobbyistes sans suivre aucune règle canadienne. Patrick Moore, un ancien membre de Greenpeace Canada, souligne que s'immiscer dans la souveraineté d'un pays n'est pas un geste de bienfaisance.

Une importante étude publiée le 15 décembre 2011 par l'Université de Calgary conclut que 131 milliards de dollars seraient injectés dans l'économie du Canada de 2016 à 2030 si un réseau d'oléoducs permettait de profiter pleinement des sables bitumineux. Le nombre d'emplois bien rémunérés à risque est stupéfiant. On estime que le projet Keystone créera à lui seul 140 000 emplois au Canada et génèrera des activités économiques de 600 milliards de dollars au cours des 25 prochaines années.

[Français]

On a beaucoup parlé des sables bitumineux en général ainsi que du projet Keystone et de l'oléoduc Northern Gateway, mais il ne faut pas oublier que d'autres secteurs relevant des affaires intérieures du Canada sont dans la mire de ces organismes.

[Traduction]

Pensons à la forêt boréale, à la chasse au phoque, à l'élevage du saumon, à la fracturation dans l'industrie gazière, ainsi qu'à la gestion de l'ensemble de nos terres et de nos ressources naturelles. Il y a un an, Vivian Krause a révélé que la Packard Foundation, un organisme américain, a investi des millions de dollars dans une campagne favorisant le saumon d'élevage de l'Alaska aux dépens du saumon de la Colombie-Britannique. Établie à Seattle, la Packard Foundation, qui, selon son site web, « protège le Nord-Ouest », a dépensé 68 millions de dollars pour soutenir le Marine Stewardship Council, et 17 millions de dollars pour réformer l'industrie de l'aquaculture en menant une campagne dissuasive, appelée démarketing, contre le saumon d'élevage, particulièrement celui de la Colombie-Britannique. Le démarketing vise à réduire ou à modifier la demande. Cette tactique a été utilisée contre les produits forestiers canadiens, et plus récemment, contre le pétrole de l'Alberta. Cependant, ce sont les exportations de saumon d'élevage canadien qui ont été le plus durement touchées.

Quelles en sont les conséquences? Depuis 2003, la valeur du saumon de l'Alaska provenant des navires a plus que triplé, atteignant 500 millions de dollars, aux dépens du saumon de la Colombie-Britannique. La Pacific Coast Federation of Fishermen's Associations a déclaré que la Packard Foundation a joué un rôle important dans la croissance de son marché. Sur son site web, l'association dit être « l'association commerciale de la côte Ouest [des États-Unis] la plus importante et la plus engagée sur le plan politique ».

[Français]

Dans son rapport annuel de 2010, la Humane Society des États- Unis s'est vantée de :

[...] travailler méthodiquement à faire disparaître les marchés pour les peaux de phoques et à réduire la valeur commerciale des peaux, de manière à ce que cette activité ne soit plus rentable pour l'industrie et le gouvernement du Canada.

Honorables sénateurs, ceci est une citation directe.

[Traduction]

C'est ce même groupe qui a financé une séance de photos réunissant Paul McCartney et Heather Mills sur la banquise avec des blanchons pour pousser le gouvernement à interdire la chasse au phoque du Groenland — le militantisme-spectacle à son paroxysme. La chasse au phoque génère des revenus de plus de 15 millions de dollars pour Terre-Neuve-et-Labrador. On estime que de 5 000 à 6 000 personnes tirent au moins une partie de leurs revenus de cette activité. De plus, il ne faut pas oublier, honorables sénateurs, que la viande de phoque constitue un élément important de l'alimentation des Inuits.

La Brainerd Foundation, de Seattle, a dépensé des centaines de milliers de dollars pour bannir les navires pétroliers des côtes de la Colombie-Britannique et pour mettre un frein au développement dans cette province et au Yukon. Sur son site web, elle incitait la population à s'opposer à la construction de l'oléoduc d'Enbridge en faisant valoir les risques qu'entraînerait une circulation accrue des navires pétroliers.

Les fiducies Pew Charitable Trusts, de Philadelphie, ont pour leur part transféré des millions de dollars à des organismes canadiens de charité pour « protéger la forêt boréale ». Et pourtant, seul un maigre montant de 125 000 $ a été accordé à la lutte contre le dendroctone du pin qui a ravagé des milliards d'arbres en Colombie- Britannique et en Alberta et qui constitue une véritable menace pour cette même forêt boréale que les Pew Charitable Trusts prétendent protéger. Que cherchent-ils réellement à protéger?

Le premier ministre Harper a cherché à savoir à plusieurs reprises pourquoi ces groupes étaient si empressés à faire du Canada un immense parc national. Est-ce une coïncidence si leurs actions portent précisément sur les secteurs qui renforcent l'économie canadienne, ou faut-il y voir une forme de protectionnisme des marchés et des intérêts commerciaux? Se pourrait-il que, tandis que les États-Unis et l'Europe battent de l'aile, le Canada soit en train de devenir une grande puissance économique et sociale?

(1720)

Selon Brian Lee Crowley, directeur général de l'Institut Macdonald-Laurier et auteur de l'ouvrage The Canadian Century : Moving out of America's Shadow, le XIXe siècle sera le siècle du Canada. Tous les signes sont là. Le Canada est riche de la qualité de ses habitants, de la beauté de ses paysages et de ses ressources naturelles. Il dispose de quatre ressources en abondance : la nourriture, les sources d'énergie, l'engrais et les forêts.

Le Canada est un pays qui accorde de la valeur aux droits de la personne, à l'égalité des sexes, à la protection des minorités et à la liberté de choix. Les conseils et l'expertise de ses dirigeants et de ses décideurs sont recherchés. Il dispose de l'économie la plus solide des pays du G7. La magazine Forbes a classé le Canada pays numéro un où faire des affaires. À l'échelle internationale, nos grandes réalisations ont contribué à rendre le monde meilleur, y compris le Canada.

L'identité canadienne est forte. Un patriotisme tranquille s'est épanoui. Nous l'avons constaté pendant les Jeux olympiques de 2010, lorsque les Canadiens ont, pour la première fois, montré leur fierté nationale sans réserve au monde entier.

Trois articles récents confirment l'influence croissante du Canada. Dans sa chronique publiée dans l'édition du 9 janvier 2012 de l'Ottawa Citizen, Matthew Fisher a documenté le rôle croissant du Canada sur la scène internationale.

Dans un article publié le 10 janvier 2012, l'écrivain, journaliste et diffuseur britannique James Delingpole a fait ainsi l'éloge du Canada :

[...] parmi toutes les grandes nations occidentales, le Canada est probablement le seul pays qui soutient toujours les valeurs qui ont fait la grandeur de l'Occident.

Plus récemment, dans un article publié le 30 janvier dans le National Post, Jack Granatstein, historien respecté et chargé de recherche à l'Institut canadien de la défense et des affaires étrangères, a conclu que :

Les politiques étrangères de M. Harper ont permis au Canada de se tailler une place sur la scène mondiale.

Malgré cela, des intérêts étrangers ont relativement réussi à atteindre leur objectif. Grâce à des groupes non gouvernementaux relativement petits et s'intéressant à un seul enjeu, ils ont lancé de prétendus programmes de sensibilisation de la population très coûteux et conçus de façon professionnelle.

Prenez l'exemple des sables pétrolifères. Nous avons laissé des intérêts étrangers préparer un coup monté contre notre industrie des sables pétrolifères au moyen de mythes, de désinformation et d'expressions percutantes comme « sables bitumineux » et « pétrole sale ».

[Français]

Nous pouvons tirer des leçons de cette expérience et nous pouvons riposter. Faisons-leur comprendre qu'ils ne peuvent pas venir au Canada pour inciter nos citoyens à se retourner contre nous ou, pire encore, payer des agitateurs pour venir provoquer ici des manifestations et des révoltes contre notre propre pays.

[Traduction]

Ce n'est ni une question partisane ni un enjeu régional. Ce n'est certainement pas un enjeu environnemental. C'est une affaire patriotique qui touche tous les Canadiens. Elle concerne notre souveraineté et notre bien-être économique.

Nous devons signaler nous aussi quelques vérités dérangeantes. Citons notamment les bilans atroces en matière de droits de la personne des pays membres de l'OPEP où les femmes n'ont ni le droit de voter ni même le droit de conduire, où les gais sont persécutés et condamnés à mort et où d'infâmes tyrans règnent sur des peuples opprimés et affligés par la pauvreté.

Pourtant, ces mêmes fondations qui financent à coups de milliards des initiatives anticanadiennes sont étonnamment muettes quant aux bilans de leurs propres pays. L'ancien ambassadeur du Canada à Washington, Derek Burney, signale que l'empreinte carbone de l'industrie énergétique américaine alimentée au charbon est 64 fois plus élevée que celle des sables pétrolifères de l'Alberta. Les Américains en parlent-ils? Non.

Pas plus tard que la semaine dernière, Andrew Weaver, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en modélisation et analyse du climat à l'Université de Victoria et l'un des principaux auteurs du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat de l'ONU, a conclu que si l'on brûlait toutes les réserves de pétrole jugées économiquement viables des sables pétrolifères, l'effet serait négligeable, et que si l'on brûlait tout le pétrole des gisements exploités actuellement, il serait encore moindre. Il n'est pas surprenant d'entendre M. Weaver affirmer que le charbon est beaucoup plus nocif pour l'environnement que les sables pétrolifères.

Pour une raison mystérieuse, les fondations américaines prennent à la légère leurs propres bilans et refusent avec désinvolture d'admettre qu'elles acceptent le pétrole provenant de pays contestés comme l'Iran; elles vont même jusqu'à promouvoir le boycottage du pétrole canadien.

Je conseille à ces anciennes vedettes hollywoodiennes qui essaient de relancer leurs carrières au moyen des sables pétrolifères de faire porter leur pharisaïsme sur leur industrie énergétique alimentée au charbon.

Honorables sénateurs, dans les prochaines semaines, nous acquerrons une bonne compréhension de l'enjeu. Nous en apprendrons plus sur nos politiques relatives à l'impôt sur le revenu, notre cadre juridique, notre Charte et nos stratégies en matière d'utilisation des terres et de gestion des ressources naturelles. Nous en saurons davantage sur les dures réalités auxquelles sont confrontés les pays membres de l'OPEP et sur la façon dont la commission d'examen du projet Northern Gateway est récupérée par des milliers de prétendus intervenants, dont beaucoup ne se donnent même pas la peine de venir témoigner.

Nous prendrons connaissance des leçons tirées de Keystone et des répercussions de tout cela sur notre économie.

J'espère que l'enquête sensibilisera au cours des Canadiens à cette manipulation inquiétante des affaires internes du Canada par des intérêts étrangers. J'espère aussi qu'une deuxième série de solutions découlera des recherches effectuées en vue de chaque volet de l'enquête.

Merci beaucoup.

L'honorable Joan Fraser : Je crois que le temps dont disposait madame le sénateur Eaton est écoulé, mais je me demande si elle veut bien demander quelques minutes de plus afin que je puisse poser une question.

Son Honneur le Président intérimaire : Madame le sénateur accepte-t-elle de demander plus de temps?

Le sénateur Eaton : Peut-on m'accorder une prolongation pour me permettre de répondre à la question du sénateur Fraser?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Fraser : Je ne plongerai pas au cœur même du propos du sénateur. Je devrai l'analyser attentivement et faire mes propres recherches.

Cependant, l'affirmation du sénateur voulant que la création d'une expression percutante, c'est-à-dire « sables bitumineux », soit récente a retenu mon attention. Je me suis demandé si elle avait vérifié cela. Il y a des années, lorsque j'entamais ma carrière de journaliste en finances et en économie, j'ai travaillé pour un rédacteur en chef qui était aussi rédacteur commercial dans l'Ouest. Je n'avais jamais entendu parler de tout cela. Il m'a ouvert les yeux sur ce phénomène extraordinaire qu'on appelle les sables bitumineux. Il m'a parlé de Peter Pond et de la grande richesse qui sommeillait là-bas. À l'époque, on ignorait comment extraire les sables bitumineux — cela donne une idée du nombre d'années écoulées depuis. Pourtant, on les appelait « sables bitumineux ». C'est seulement depuis quelques années que j'entends le terme « sables pétrolifères ». J'aimerais donc savoir d'où le sénateur a pu tirer l'idée qu'il s'agit d'une nouvelle expression percutante forgée par des opposants.

Le sénateur Eaton : Je crois que c'est la manière dont l'expression est utilisée qui est nouvelle. Oui, « sables bitumineux » est une très vieille définition de « sables pétrolifères ». Comme le savent les sénateurs, ils suintaient du sol, ce qui permettait aux Autochtones de s'en servir pour étanchéifier leurs canoës. Aujourd'hui, le mot « bitumineux » évoque quelque chose de sale et de noir. Je pense que c'est pour ça que les opposants l'emploient. La connotation est très péjorative. Avez-vous remarqué que tous ceux qui sont contre l'exploitation des sables pétrolifères les appellent toujours « sables bitumineux » plutôt que « sables pétrolifères »? Pourtant, le bitume est une substance qui sert à paver les routes, alors c'est tout à fait autre chose.

L'honorable Joseph A. Day : Tout d'abord, permettez-moi de féliciter le sénateur Eaton pour sa présentation particulièrement bien documentée et très intéressante. Je suis impatient de poursuivre ma réflexion sur quelques-uns des points soulevés. Je veux simplement éclaircir la question et les arguments présentés afin de mieux les comprendre moi-même.

Le sénateur a signalé l'ingérence des fondations étrangères dans les affaires internes du Canada. Ce serait comme si la National Rifle Association versait de l'argent pour tenter d'influencer des décisions prises au Canada. Il s'agit de financement étranger qui se faufile au Canada, et jusque-là, ça va. Mais le sénateur a aussi parlé de l'utilisation abusive du statut d'organisme de bienfaisance accordé par Revenu Canada. S'agit-il de fondations étrangères qui recueillent des fonds au Canada pour ensuite les utiliser au pays?

Le sénateur Eaton : Non. Je disais plutôt que les fondations étrangères établissent souvent une division canadienne, une filiale, quoi, à qui elles versent de l'argent dans un but bien précis. Le pendant canadien, qui fait office de bureau central ou d'infrastructure, donne alors l'argent aux organismes de bienfaisance canadiens, et ces fonds sont réputés être de l'argent canadien. C'est en quelque sorte une fondation nourricière; l'organisme de bienfaisance américain alimente son pendant américain établi au Canada, qui, à son tour, envoie de l'argent à d'autres fondations canadiennes. Bien entendu, les organismes caritatifs canadiens obtiennent un reçu aux fins de l'impôt.

(1730)

Selon moi, le plus important, en ce qui concerne les organismes de bienfaisance, ce n'est pas tant le reçu aux fins de l'impôt que le fait que les Canadiens — comme nous tous ici présents — présument que les organismes « caritatifs » et les fondations font du bon travail. Nous ne remettons pas en question ce qu'ils font.

Le sénateur Day : La deuxième partie, je la comprends. C'est la première qui n'est pas tout à fait claire pour moi. Si un organisme de bienfaisance enregistré au Canada émet un reçu aux fins de l'impôt, ce reçu n'est valable que pour des recettes générées au Canada. Donc, l'argent amassé par une fondation étrangère n'importe où ailleurs et envoyé au Canada ne donne pas droit à un reçu aux fins de l'impôt, si je comprends bien. C'est seulement l'argent amassé au Canada qui y donne droit.

Le sénateur Eaton : À mon avis, le sénateur pose une question plutôt technique.

Je crois comprendre que certains organismes de bienfaisance canadiens ont conclu des ententes réciproques avec les États-Unis et inversement, c'est-à-dire que le Stratford Festival recueille de l'argent à Chicago et remet un reçu aux fins de l'impôt à un Américain. Ils y trouvent leur compte.

Toutefois, imaginons que je sois une fondation aux États-Unis qui fait un don à sa fondation au Canada; le don se transforme en argent canadien aussitôt qu'il est accepté. L'argent de la fondation canadienne est ensuite réparti entre certains d'entre vous. Comme cet argent provient d'une fondation enregistrée au Canada, c'est de l'argent canadien et l'on reçoit un reçu aux fins de l'impôt.

Son Honneur le Président intérimaire : Y a-t-il d'autres interventions?

L'honorable Grant Mitchell : Honorables sénateurs, j'aimerais poser une question, si possible.

Son Honneur le Président intérimaire : Je suis désolé, mais le temps est écoulé, sénateur Mitchell.

Le sénateur Mitchell : Je vais proposer l'ajournement, dans ce cas.

(Sur la motion du sénateur Mitchell, le débat est ajourné.)

L'évasion fiscale à l'étranger

Interpellation—Ajournement du débat

L'honorable Percy E. Downe, ayant donné avis le 7 février 2012 :

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur :

a) le problème des Canadiens qui fraudent le fisc en dissimulant des actifs dans des paradis fiscaux à l'étranger;

b) les torts que cette situation cause au Canada, en recettes perdues et en répercussions sur les Canadiens qui respectent la loi et qui paient leur juste part d'impôts;

c) les efforts dérisoires faits par l'Agence du revenu du Canada pour découvrir les évasions fiscales à l'étranger, y mettre fin et prévoir des mesures dissuasives et comment, comparativement à des organismes à vocation semblable dans d'autres pays, l'ARC ne fait pas le poids;

d) le fait que cette situation, qui s'ajoute aux scandales ayant éclaboussé récemment l'ARC, pourrait nous porter à croire à l'existence de problèmes graves à l'Agence;

e) les craintes que cette situation tienne à un manque de leadership de la part du gouvernement du Canada.

— Honorables sénateurs, je veux moi aussi parler de l'Agence du revenu du Canada, mais, contrairement au sénateur Eaton, je veux parler de l'argent qui sort du pays; je veux parler de l'évasion fiscale à l'étranger.

Comme vous le savez, honorables sénateurs, je suis ce dossier depuis un certain nombre d'années. La dernière fois que j'en ai parlé, un journaliste m'a demandé : « Savez-vous si certains de vos collègues au Sénat ont des comptes à l'étranger? » J'ai répondu : « Non, mais vous voudrez peut-être faire vous-même des vérifications; il y a peut-être de riches journalistes qui ont des comptes à l'étranger. » En effet, il n'y a jamais de divulgation, parce que les noms ne sont pas rendus publics.

Dans ce cas-ci, je veux parler d'une banque au Liechtenstein où il y a eu enquête sur la façon dont l'information était reçue. Un employé de la banque a volé l'information à son établissement, il est rentré dans son pays et il ensuite proposé de vendre l'information. Chose étrange, le gouvernement de l'Allemagne lui a acheté cette information, puis il l'a communiquée aux autres pays dont des ressortissants figuraient sur la liste. Dans le cas de cette banque du Liechtenstein, il y avait sur la liste 106 Canadiens qui avaient des comptes secrets, non déclarés.

Le problème se trouve à l'Agence du revenu du Canada. D'après son site Web, son mandat est le suivant : « Exécuter les programmes fiscaux, de prestations et autres, et assurer l'observation fiscale pour le compte de gouvernements dans l'ensemble du Canada, de façon à contribuer au bien-être économique et social continu des Canadiens. »

Malheureusement, les efforts anémiques de recherche de ceux qui fraudent à l'étranger sont un indicateur troublant qui montre que l'ARC a du mal à remplir son mandat et que, à bien des occasions, elle a échoué.

La fraude fiscale à l'intérieur du Canada fait également problème. Les médias ont signalé récemment que la GRC menait une enquête sur des allégations de corruption chez les fonctionnaires de l'ARC et que cette enquête avait été élargie pour porter sur des fonctionnaires de nombreux bureaux de l'agence. Des enquêtes se font depuis 2008 à cause d'allégations selon lesquelles des vérificateurs fédéraux aident des entreprises à frauder l'impôt au Canada en fermant les yeux sur des revenus non déclarés.

Trois vérificateurs de l'ARC ont été congédiés parce qu'ils étaient soupçonnés d'avoir partagé un compte bancaire de près de 2 millions de dollars avec un propriétaire d'entreprise qui avait plaidé coupable à des accusations de fraude fiscale. Ces enquêtes soulèvent de graves questions au sujet de l'état et de la compétence de la direction actuelle de l'ARC, et il y a là un lien direct avec mes inquiétudes au sujet de problèmes massifs de fraude fiscale commise à l'étranger.

En 2007, comme je l'ai dit, le gouvernement du Canada a reçu de l'information du gouvernement de l'Allemagne. C'est grâce à ce coup de chance que l'ARC a obtenu sur un plateau d'argent la liste de ces 106 tricheurs.

Au fil des ans, j'ai fait ce que j'ai pu pour suivre cette affaire en faisant des demandes d'accès à l'information, en posant des questions écrites au Sénat et en correspondant avec divers ministres. Je dois avouer que je suis déçu de ce que j'ai trouvé. Si on fait une comparaison avec ce qui s'est fait dans d'autres pays — aux États-Unis, il y a eu des audiences au Capitole, en Allemagne, il y a eu des descentes policières et dans le monde entier il y a eu des inculpations — la réaction au Canada a été consternante, à dire vrai, au point qu'on s'interroge sur la compétence de la direction de l'ARC.

En réponse à mes demandes de renseignements, le gouvernement a admis que l'information reçue montrait que les montants détenus dans les comptes de Canadiens dans cette banque du Liechtenstein totalisaient plus de 100 millions de dollars. Le plus petit compte s'établissait à 500 000 $ tandis qu'un autre dépassait les 12 millions de dollars. Il s'agit donc de Canadiens très riches.

Lorsque j'ai soulevé la question, le gouvernement fédéral a fait plein de promesses et tenu un discours intransigeant. En 2009, celui qui était alors ministre du Revenu, Jean-Pierre Blackburn, a déclaré ceci :

Les gens se sont aperçus que c'était une question de temps avant que nous les attrapions [...] Je leur dis que nous allons les attraper, que nous allons les trouver.

Plus tôt cette année, il a dit que la fraude fiscale était « un grave problème au Canada » et a ajouté que « si quelqu'un nous doit quelque chose, nous allons récupérer ce qu'il nous doit ».

Depuis 2007, toutefois, les paroles ne se sont pas traduites par des résultats, loin s'en faut. L'année dernière, l'Agence du revenu du Canada a déclaré n'avoir recouvré que 6 millions de dollars en arriérés d'impôt, intérêts et pénalités sur l'argent dissimulé par des Canadiens au Liechtenstein. Comme la somme totale dissimulée dépassait 100 millions de dollars dont, comme je l'ai dit, 12 millions déposés dans un seul compte, c'est bien peu.

Quand on mentionne les intérêts et les pénalités, un autre fait ressort clairement : pas un seul cent d'amende n'a été réclamé et ce, parce qu'aucune accusation n'a été portée. Dans les quatre années qui ont suivi la mise au jour de cette information, pas un seul des Canadiens qui ont dissimulé des fonds à l'étranger pour se soustraire au fisc au Canada n'a comparu devant un juge au Canada ou à l'étranger.

Tout à l'opposé de ce qui s'est fait au Canada, au Royaume-Uni, plusieurs centaines de citoyens étaient menacés de poursuites en juillet 2008, quelques mois seulement après que l'existence de leurs avoirs dissimulés au Liechtenstein ait été rendue publique. Durant la même courte période, le fisc allemand a forcé les fraudeurs qui avaient des avoirs au Liechtenstein à payer plus de 150 millions de dollars.

Enfin, depuis que le scandale a été mis au jour en 2008, pas moins de 20 pays ont conclu des accords d'échange d'information fiscale avec le Liechtenstein afin de tenir à l'œil leurs citoyens qui pratiquent l'évasion fiscale. Les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie, la France et l'Allemagne ont tous signé des accords. Même des pays comme Saint-Vincent et les Grenadines, l'Andorre et les îles Féroé — un territoire autonome du Danemark composé de 18 îles situées dans l'Atlantique Nord et comptant une population de 50 000 habitants — ont signé des accords d'échange d'information avec le Liechtenstein.

Devinez qui n'a pas encore conclu d'accord? Le Canada. Si tous ces pays, petits et grands, peuvent conclure un accord aussi rapidement, pourquoi faut-il des années au Canada pour en faire autant? En comparaison avec même certains des plus petits pays, la réaction du Canada au scandale fiscal peut être qualifiée, au mieux, de laxiste. La question est pourquoi. N'importe quel résident ordinaire du Canada qui ne déclarerait pas ses revenus serait harcelé par l'Agence du revenu du Canada.

(1740)

Pourquoi y a-t-il deux poids, deux mesures pour les riches Canadiens qui ont des comptes bancaires que cachés à l'étranger dans des paradis fiscaux reconnus? En fait, ces fraudeurs fiscaux semblent avoir reçu un traitement de faveur de la part de l'ARC après qu'elle eut découvert qu'ils cachaient de l'argent au Liechtenstein. En réponse à l'une de mes questions écrites, l'ARC a révélé que, en date du 20 juin 2010, 20 des 106 résidants du Canada qui détenaient des comptes au Liechtenstein avaient profité du Programme des divulgations volontaires de l'ARC, le PDV. Le PDV permet aux contribuables de corriger toute information incomplète ou erronée ou de fournir des renseignements qu'ils n'avaient pas déclarés auparavant à l'ARC, sans être passibles de pénalités ou de poursuites.

Pour que la divulgation en vertu du PDV soit valide, elle doit être volontaire. Selon la propre définition de l'ARC, la divulgation même volontaire n'est plus valide lorsque « le contribuable était au courant, ou avait connaissance, qu'une vérification, qu'une enquête ou qu'une autre mesure d'application était prévue par l'ARC [...]. »

Puisque que l'ARC a aussi révélé que les 106 Canadiens qui détenaient des comptes au Liechtenstein faisaient tous l'objet de certaines mesures d'observation, aucun d'entre eux n'aurait dû être admissible au Programme des divulgations volontaires. En fait, l'ARC avait plus tôt indiqué, dans une réponse à une question écrite, qu'« étant donné que des mesures d'observations ont été entreprises à l'égard de tous les contribuables inscrits sur la liste » — c'est-à-dire les 106 contribuables — « ils ne sont plus admissibles à des fins de considération dans le cadre du PDV. » C'était le 20 avril 2009.

Par la suite, l'ARC a modifié sa politique.

C'est assez simple : au moins 20 riches Canadiens ont évité des pénalités ou des poursuites parce qu'ils ont bénéficié d'un traitement de faveur. Pourquoi? Il est inacceptable que, après leur avoir donné un congé d'impôt, ce gouvernement qui dit vouloir lutter contre la criminalité permette à ces fraudeurs fiscaux d'éviter des poursuites.

Les Canadiens qui utilisent les services des banques du Canada paient tous leurs impôts. Pourquoi les Canadiens qui ont des comptes à l'étranger, dont certains contiennent des millions de dollars, se voient-ils accorder un congé d'impôt par le gouvernement? Qui est protégé? Pourquoi le gouvernement ne lutte-t-il pas contre les criminels qui fraudent le fisc?

L'affaire du Groupe LGT du Liechtenstein n'est pas restée unique longtemps. Quelques années plus tard, une situation semblable s'est produite au sujet d'une banque en Suisse. Encore une fois, le gouvernement du Canada a bénéficié du travail d'autres pays en recevant les coordonnées de 1 785 comptes détenus par des Canadiens dans cette seule banque suisse. Je n'ai pas autant à dire sur cette affaire, car le gouvernement est beaucoup plus discret dans ce cas-ci, mais nous savons qu'il était impossible d'ouvrir un compte dans cette banque avec un dépôt initial inférieur à 500 000 $, et que si l'ARC se penche sur ce dossier avec autant de célérité qu'elle l'a fait au sujet du Liechtenstein, personne ici ne sera encore en vie à la conclusion de l'enquête.

Peu importe que les comptes se trouvent au Canada ou à l'étranger, la question fondamentale est la même. Il en va de l'équité fiscale comme de la justice, il faut que l'on voie qu'elle existe. Les Canadiens honnêtes, respectueux des lois et qui paient leurs impôts ne devraient pas se sentir trahis par un gouvernement canadien qui ne peut pas ou ne veut pas faire les efforts nécessaires pour récupérer l'argent de Canadiens qui tentent d'éviter de payer leur juste part.

Honorables sénateurs, le gouvernement fédéral doit faire ce qui est juste et divulguer les noms des Canadiens qui possèdent des comptes au Liechtenstein et en Suisse. Ces riches fraudeurs, qui profitent de services financés par les contribuables, le système de santé par exemple, lorsqu'un membre de leur famille tombe malade ou lorsqu'eux-mêmes tombent malades, refusent pourtant de payer leur juste part. Ces gens doivent être jugés par l'opinion publique canadienne.

Voici le point de vue de l'avocat de Heinrich Kieber, l'homme qui a volé la liste à la banque au Liechtenstein :

Les règlements conclus doivent être connus du public dans de telles situations, et ce, pour deux raisons. Premièrement parce qu'il faut éviter les marchés avantageux entre le gouvernement et les gens très riches et très influents sur la scène politique.

Deuxièmement, il faut dissuader ceux qui auraient l'idée de faire la même chose. Lorsqu'une fraude fiscale est révélée au public, son auteur ne devient pas un héros. Personne ne songera à lui décerner un prix. On ne lui offrira pas des postes de prestige au sein de l'appareil de l'État. Et c'est très important [...]

Il faut qu'il en soit ainsi, car payer ses impôts est une responsabilité essentielle de tout citoyen. Ce sont les contribuables honnêtes qui doivent payer les impôts que ces individus ne paient pas.

Le gouvernement a annoncé récemment que 60 000 Canadiens recevraient la Médaille du jubilé de la reine. Je suis certain qu'aucun sénateur ne voudrait que cette médaille soit décernée à individu qui commet des fraudes fiscales en cachant de l'argent à l'étranger, mais, si les noms ne sont pas publiés, comment pourrons-nous en être sûrs?

Chers collègues, je voudrais que le Sénat comprenne la gravité du problème. La banque LGT, au Liechtenstein, et la banque UBS, en Suisse, ne sont que deux banques parmi les banques européennes. On a découvert que plus de 1 800 Canadiens cachaient de l'argent dans des comptes de ces banques. Ce n'est que la pointe de l'iceberg.

L'Agence du revenu du Canada estime que, au cours l'exercice 2009-2010 seulement, environ un milliard de dollars ont été placés dans des paradis fiscaux, ce qui est très alarmant. Combien d'autres milliards de dollars sont cachés dans des paradis fiscaux, à l'étranger, sans que l'Agence du revenu du Canada le sache?

Je vous répète, honorables sénateurs, que, parmi les Canadiens qui cachent leur argent au Liechtenstein ou en Suisse, personne n'a été inculpé de fraude fiscale. Pas un seul n'a été emprisonné pour avoir trompé le fisc. On a pu repérer des milliards de dollars en impôts impayés, mais un très petit montant a pu être récupéré. Bref, l'Agence du revenu du Canada n'a rien fait qui vaille concernant ce problème extrêmement grave.

Un rapport de l'ARC publié en octobre 2010 reconnaît le problème. Le rapport note que beaucoup d'importants cas possibles de non-conformité criminelle sont rejetés par les groupes d'exécution de l'agence par manque de ressources ou à cause de la lourdeur de la charge de travail. Le même rapport de l'ARC signalait que les bureaux choisissent les petits cas d'une faible valeur monétaire — puis-je avoir cinq minutes de plus?

Son Honneur le Président : D'accord?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Downe : Le rapport signalait que les bureaux choisissent les petits cas d'une faible valeur monétaire qui ne présentent pas nécessairement les plus grands risques. En d'autres termes, les responsables de l'ARC optent pour des solutions de facilité, en rejetant les cas risqués d'évasion fiscale de grande envergure au profit de petites victoires un peu plus certaines.

Le rapport note en outre que le secteur de vérification de l'évitement fiscal ne renvoie au Programme d'enquêtes criminelles, service de l'ARC chargé d'enquêter sur les cas soupçonnés d'évasion fiscale, que 0,2 p. 100 de ses dossiers, en dépit du fait que l'évasion fiscale dans cette population est beaucoup plus probable que dans l'ensemble de la population.

Comme je l'ai déjà mentionné, les montants déposés dans des banques du Liechtenstein totalisaient plus de 100 millions de dollars, avec des comptes allant d'un minimum de 500 000 $ à un maximum de plus de 12 millions. Aucun de ces cas ne peut se prêter à des mesures rapides, mais il est évident que l'ARC devrait faire tous les efforts possibles pour recouvrer les recettes perdues dans 100 p. 100 de ces cas d'évitement fiscal. Une proportion de 0,2 p. 100 témoigne d'un échec du leadership de la ministre Shea et de la haute direction de l'ARC.

Pour conclure, honorables sénateurs, les Canadiens ordinaires qui respectent les lois et paient leurs impôts veulent savoir pourquoi l'ARC fait deux poids, deux mesures. Pourquoi quelques Canadiens riches obtiennent-ils un congé fiscal du présent gouvernement? Les Canadiens veulent savoir où est l'honorable Gail Shea, ministre responsable de l'ARC. Pourquoi permet-elle cette situation? Pourquoi laisse-t-elle des fraudeurs qui placent leur argent dans des comptes secrets de paradis fiscaux échapper aux tribunaux et aux prisons du Canada?

L'honorable Carolyn Stewart Olsen : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Downe : Oui.

Le sénateur Stewart Olsen : C'est peut-être de l'ignorance de ma part au sujet de ce que le sénateur nous a exposé, mais je ne sais pas comment faire pour découvrir l'identité des fraudeurs et l'importance des montants qu'ils ont placés dans ces paradis fiscaux. Ces renseignements ne sont-ils pas tenus secrets par les gouvernements de ces pays?

(1750)

Si je comprends bien, nous sommes au courant des cas du Liechtenstein parce quelqu'un a révélé un document. Selon le sénateur, quelles seraient les premières étapes à suivre pour dépister ces fraudeurs?

Le sénateur Downe : Je ne suis certainement pas un expert, mais d'après les documents dont j'ai pris connaissance et que j'ai mentionnés dans mon intervention, d'autres pays ont signé des accords au sujet de l'évitement fiscal. Par exemple, lorsque le chat est sorti du sac, dans le cas du Liechtenstein, plus d'une vingtaine de pays avaient signé des accords de cette nature. Si un citoyen américain ouvre un compte là-bas, le gouvernement américain est mis au courant. Le Canada n'a rien fait pour que ce soit possible.

Autre chose. Nous signons une foule d'accords internationaux. Par exemple, nous aurons bientôt un traité avec le Panama à étudier au Sénat. Or, le Panama est l'un des pires refuges fiscaux au monde et, selon des allégations sérieuses, l'argent du narcotrafic en Amérique du Sud affluerait dans ce pays. Nous allons donc signer un accord de libre-échange. Nous pouvons exercer des pressions sur le Panama pour obtenir un accord fiscal visant les Canadiens qui auraient des comptes là-bas.

Il y a beaucoup trop d'argent caché à l'étranger dont nous pourrions nous servir ici pour réaliser une foule de projets. Chaque fois que nous proposons quelque chose, la même question revient : combien cela va coûter? Où allons-nous trouver les fonds? Il y a un montant considérable en impôts impayés, en sanctions et en amendes que nous ne percevons pas.

L'honorable Catherine S. Callbeck : Le sénateur accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Downe : Bien entendu.

Le sénateur Callbeck : Le sénateur a parlé de ces 106 Canadiens. Il a dit que le total des comptes était d'une centaine de millions de dollars et que la valeur des comptes variait entre 500 000 $ et 12 millions de dollars. Il a ajouté que l'ARC avait permis à 20 d'entre eux de payer leur dû en ne leur imposant aucune pénalité. Que deviennent les 86 autres? Est-ce que l'ARC va de nouveau accepter qu'ils paient leur dû, sans plus?

Le sénateur Downe : L'ARC m'a envoyé des documents, je ne sais plus si c'est pour répondre à une demande d'accès l'information ou à une question écrite. Elle m'a dit au départ que personne ne pourrait faire ce genre de divulgation volontaire parce que l'affaire est maintenant publique et que tous sont visés par une enquête. Elle a dit ensuite, comme je l'ai signalé dans mon intervention, que 20 de ces contribuables ne seront pas inculpés parce qu'ils ont fait une divulgation volontaire.

Je ne comprends pas pourquoi certaines personnes ont le droit et d'autres pas, ni pourquoi l'ARC a changé sa politique. Je ne sais pas si les 86 autres personnes y échappent ou ce que l'ARC compte faire. Je ne dispose pas de cette information.

(Sur la motion du sénateur Carignan, le débat est ajourné.)

Finances nationales

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Joseph A. Day, conformément à l'avis donné plus tôt aujourd'hui, propose :

Que, jusqu'au 31 mars 2012, pour les fins de toute étude d'un projet de loi, de la teneur d'un projet de loi ou des prévisions budgétaires, le Comité sénatorial permanent des finances nationales :

a) soit autorisé à siéger même si le Sénat siège à ce moment-là, l'application de l'article 95(4) du Règlement étant suspendue à cet égard;

b) soit autorisé, conformément à l'article 95(3)a) du Règlement, à se réunir du lundi au vendredi, même si le Sénat est alors ajourné pour une période de plus d'une semaine.

— Honorables sénateurs, la motion que je propose vise à permettre au Comité sénatorial permanent des finances nationales à siéger en dehors des heures habituelles de séance, mais seulement jusqu'à la fin du mois de mars, afin que nous puissions respecter les délais et veiller à ce que le gouvernement ait les fonds nécessaires pour continuer à fonctionner en avril et au-delà. Le comité demande la permission de siéger.

Son Honneur le Président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?

Des voix : D'accord.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 29 février 2012, à 13 h 30.)


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