Délibérations du comité spécial du Sénat sur les
Accords de l'aéroport Pearson
Témoignages
Ottawa, le mardi 15 août 1995
[Traduction]
Le comité spécial du Sénat chargé d'étudier les accords visant l'aéroport international Pearson se réunit aujourd'hui, à 15 h, pour poursuivre l'examen de toutes les questions relatives aux politiques et aux négociations ayant abouti à la conclusion des accords touchant la mise en valeur et l'exploitation des aérogares 1 et 2 à l'aéroport international Lester B. Pearson et les circonstances entourant leur annulation, et pour faire rapport à ce sujet.
Le sénateur Finlay MacDonald (président) occupe le fauteuil.
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Avant que nous n'amorcions la quatrième semaine de nos audiences portant sur les accords visant l'aéroport international Pearson, je pense que M. Nelligan aimerait dire un mot de certaines des affaires découlant de la dernière journée des témoignages.
M. John Nelligan, c.r., conseiller juridique du comité: Honorables sénateurs, j'ai ici deux lettres qui ont trait à des questions débattues dans le cadre d'audiences antérieures. La première provient de M. A.D. Pascoe. Vous vous rappellerez que M. Hession a fait référence à lui et qu'un certain nombre de questions ont été soulevées. Voici ce qu'il écrit:
Monsieur, je vous remercie de me donner l'occasion de préciser à l'intention des membres du comité le rôle que j'ai joué dans le projet de réaménagement des aérogares de l'aéroport Pearson.
En mars 1990, j'agissais à titre d'adjoint spécial de l'honorable Doug Lewis. Comme le savent les membres du comité, M. Lewis a été ministre des Transports de février 1990 à avril 1991, date à laquelle il a été nommé solliciteur général du Canada. J'ai fait partie de l'effectif du ministre jusqu'à la fin d'octobre 1991. Après avoir quitté la fonction publique, je suis rentré à Toronto, où j'agis comme expert-conseil.
Paxport s'est ajouté à la liste de mes clients en avril 1992. À ce moment, la société a retenu mes services pour l'aider à communiquer ses projets de réaménagement des aérogares 1 et 2 à la province de l'Ontario, aux administrations régionales et municipales de la communauté urbaine de Toronto, aux groupements d'entreprises, aux syndicats ainsi qu'à d'autres organisations locales. Pour le reste de l'année 1992, je me suis adonné à cette tâche au moyen d'une série de réunions, d'exposés, de lettres et d'autres contacts.
Le mandat que j'avais reçu de Paxport ne comprenait pas l'exercice de pressions sur les politiciens ou les fonctionnaires du gouvernement fédéral à l'égard de quelque question que ce soit. De fait, je n'ai eu aucun contact de la sorte pendant la période où j'ai agi comme expert-conseil pour le compte de Paxport, même si, en vertu de la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, j'avais, au début de 1993, enregistré Paxport comme l'un de mes clients, obéissant en cela à ma pratique coutumière. À l'époque, Paxport et Claridge consacraient leur énergie à la réalisation d'une fusion ainsi qu'à la négociation des modalités du bail qui les lierait au gouvernement fédéral. Je n'ai nullement pris part aux pourparlers entre la Pearson Development Corporation et Transports Canada.
Je tiens à préciser que le mandat que j'ai confié à Paxport n'a débuté qu'une année complète après mon départ du ministère des Transports. D'ailleurs, mes responsabilités avaient trait à des activités liées aux communications et aux affaires publiques qui visaient d'autres ordres de gouvernement ainsi que des organisations non gouvernementales.
En ce qui concerne l'article 59 du Code régissant la conduite des titulaires de charges publiques en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, j'ajoute que la demande initiale de propositions touchant le réaménagement des aérogares 1 et 2 n'a été émise qu'en mars 1992, soit cinq mois après que j'eus quitté la fonction publique. Avant qu'elle ne soit émise, aucune procédure ni opération courante précise n'était en cours.
Je précise que nous avons accepté cette lettre, mais nous espérons entendre M. Pascoe plus tard au cours des audiences, car je crois que certains sénateurs aimeraient toujours pouvoir lui poser certaines questions.
La deuxième lettre est adressée au conseiller juridique du comité par M. George Hunter, conseiller juridique spécial du ministère de la Justice. Elle a trait à la confusion qui entoure les documents présentés à M. Rowat à l'occasion de la dernière audience. Comme tous les sénateurs ont ces lettres en main, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de les lire en entier.
Vous remarquerez simplement qu'il semble que des copies des documents en question aient été, en vertu de la pratique courante, expédiées au ministre de la Justice en même temps qu'au greffier du comité du Sénat. Comme le précise la lettre, il semble également qu'on ait par inadvertance omis de censurer en entier un paragraphe particulier figurant dans la copie de la lettre transmise au cabinet du ministre. Mais je pense que la lettre parle d'elle-même. Si les sénateurs ont des questions à son sujet, ils peuvent les poser maintenant.
Le sénateur Lynch-Staunton: J'ai certaines questions, monsieur le président. Je regrette que vous n'ayez pas lu la lettre en entier, et j'espère que tous les sénateurs en ont une copie. Peut-être devrait-elle être lue aux fins du compte rendu, car je crois comprendre...
M. Nelligan: Très bien. C'est bon.
Dans le cadre de l'audience tenue par le comité le 3 août, on a noté certaines questions relatives à la version...
Le sénateur Kirby: Puis-je poser une question? La lecture aux fins du compte rendu ne me pose aucun problème, sinon qu'il s'agit d'un exercice fastidieux. Je serai heureux qu'elle soit consignée dans le compte rendu d'une façon ou d'une autre. Si cette récitation d'une dizaine de minutes s'impose pour une raison particulière, très bien. Sinon, je serai heureux de...
Le sénateur Lynch-Staunton: Certains d'entre nous aimeraient que la lettre figure au compte rendu.
M. Nelligan:
...certaines questions relatives à la version du document 00294 présentées par le sénateur Bryden à ses collègues du comité. Après que le comité eut suspendu ses travaux pour la journée, M. Edge et moi nous sommes réunis. Même si nous ne connaissions pas tous les détails entourant le document 00294, nous avons entrepris une enquête, et je suis maintenant en mesure de faire rapport de nos constatations.
Pour situer les choses dans leur contexte, le ministère de la Justice a retenu les services de MM. Scott et Aylen, conseillers juridiques spéciaux chargés de diverses questions découlant du mandat du comité, ainsi que vous l'ont appris les discussions que nous avons eues et notre correspondance antérieure. De façon plus précise, MM. Scott et Aylen ont été chargés de l'organisation de quelque 200 000 pages de documentation liées aux contrats visant l'aéroport Pearson. On a organisé la documentation pour faire en sorte qu'elle puisse être transmise au comité ainsi que pour aider les témoins du gouvernement et ceux qui étaient antérieurement au service du gouvernement à se préparer à témoigner. Par la suite, MM. Scott et Aylen ont demandé au cabinet de comptabilité juridique Lindquist, Avey de mettre leur expérience et leurs ressources considérables à contribution dans ce dossier.
Lorsque le comité a fait part de son intention d'entre- prendre des audiences dans la première semaine de juillet, le projet initial, qui prévoyait la lecture optique de la documentation, s'est révélé impraticable, compte tenu des délais impartis. On a fait des copies de tous les documents et, le 13 juin, on les a fait parvenir à Lindquist, Avey. On a immédiatement entrepris de saisir les données de base relatives aux documents de manière à ce qu'elles puissent être rappelées selon les rubriques et les témoins éventuels. Depuis, ce travail se poursuit.
Voici ce qu'on a fait par la suite.
À mesure que les témoins ont été identifiés et que la date de leur comparution a été établie, les employés de Lindquist, Avey ont extrait les documents préparés ou reçus par le témoin, ceux où le nom du témoin est mentionné et, enfin, ceux qui revêtent une importance quelconque pour le témoin.
Les employés du cabinet affectés à cette tâche sont visés par une entente relative à la confidentialité.
Une équipe de fonctionnaires spécialisés dans les questions relatives à l'accès aux documents gouvernementaux passe alors les documents en revue en vertu des principes relatifs à l'accès à l'information.
Le ministère de la Justice fait directement parvenir les documents examinés au greffier du comité. Le ministère conserve des copies pour lui-même ainsi que pour Lindquist, Avey.
Scott & Aylen et Lindquist, Avey ne sont nullement mêlés à l'examen ni à la fourniture des documents au greffier, à ceci près que Lindquist, Avey consignent dans l'index des documents toutes les suppressions.
Vous vous rappellerez que la lettre "S" figure sur les documents censurés.
À ce jour, 58 volumes de documents ont été fournis au comité, chacun contenant habituellement environ 350 pages.
Vous vous rappellerez que votre bureau et les greffiers ont été mis au courant du rôle joué par Lindquist, Avey et du fait que le cabinet pouvait vous venir en aide à l'égard de tout document auquel le greffier pourrait parfois vouloir accéder, fait que j'ai par la suite confirmé dans la lettre que je vous ai adressée le 7 juillet. M. Edge vous a fourni plus de détails à propos de la démarche en cours dans sa lettre du 21 juillet. Dans ce contexte, le bureau du greffier a demandé et reçu de l'aide à quelques occasions.
La conjugaison des exigences liées à la cueillette et à l'examen des documents et de l'horaire du comité a eu l'effet suivant: dans la plupart des cas, les documents ne parviennent au comité qu'à la onzième heure. Et même pour obtenir ce résultat, des gens doivent travailler de six à sept heures par jour.
Une fois les documents expédiés au greffier du comité, Scott & Aylen et Lindquist, Avey aident les fonctionnaires du ministère de la Justice à cerner les questions que le témoin devrait être amené à aborder devant le comité ainsi que les documents qui y ont trait. Les fonctionnaires du ministère de la Justice ou Scott & Aylen, avec l'aide de Lindquist, Avey, fournissent cette information au cabinet du ministre de la Justice.
Dans ce contexte et compte tenu de la présence prévue de M. William Rowat à titre de témoin, Lindquist, Avey a fourni des renseignements au cabinet du ministre, le mardi 1er août. Les employés de Lindquist, Avey ont commis une erreur et transmis une copie du document 00294 contenant le texte entier du dernier paragraphe, paragraphe qui avait été supprimé en vertu de l'alinéa 69.1g)...
qui a trait aux documents confidentiels du Cabinet...
...dans les documents déposés antérieurement devant le comité.
Le cabinet du ministre de la Justice m'apprend que l'adjoint du sénateur Bryden n'a pu, au moment où il préparait ce dernier, accéder à la bibliothèque du comité en raison de l'heure tardive. Il a donc téléphoné au cabinet du ministre de la Justice pour demander qu'on lui fasse parvenir les documents pertinents en vue des audiences du lendemain. Le cabinet du ministre a fait parvenir le document au sénateur Bryden, sans se rendre compte qu'un passage aurait dû être supprimé.
Soit dit entre parenthèses, j'ajoute que nous avons confirmé que les documents ont été reçus par le greffier dans la soirée du 1er août et qu'une copie de ces documents a été distribuée aux divers membres du comité dans la matinée du 2 août. M. Rowat, bien entendu, a comparu le 3 août.
Il poursuit:
De plus, j'ai appris que le sénateur Kirby, pendant qu'il interrogeait M. Broadbent, le 3 août, a fourni à tous les membres du comité ce qu'il a appelé le document 0020089. Il faisait peut-être référence au document 002008. En fait, l'enquête révèle que le document 002008 ne figure pas sous ce numéro dans les documents déposés auprès du comité.
À l'occasion de la séance d'information offerte par Lindquist, Avey au cabinet du ministre, le 1er août, on faisait référence au document 002008 dans l'un des textes fournis. Au cabinet du ministre de la Justice, on m'apprend que le document 002008 a par la suite été fourni au sénateur Kirby, à la suite d'une demande présentée par son adjoint à l'égard d'un document ayant trait aux garanties touchant les déroutements et l'achalandage. Le bureau du sénateur Kirby connaissait le contenu du document 002008, mais pas le document lui-même, grâce à d'autres documents déposés auprès du comité. À son bureau, on n'a donc pas compris qu'un document fourni au cabinet du ministre par Lindquist, Avey lui avait été fourni par erreur.
À cet égard, je constate que tous les renseignements contenus dans le document 002008 figurent dans d'autres documents déposés antérieurement auprès du comité ou accessibles au comité par d'autres moyens, notamment le document Rowat 00302, le document Desmarais 00478, le document Broadbent 001682 et la réponse de Paxport Incorporated à la demande de propositions (page D-1-35 du document). Comme un examen sommaire des quelques premières pages du document 002008 permet de le constater, ce dernier est presque en tous points identique au document 00302. Voilà qui explique peut-être le fait qu'il n'ait pas fait partie des documents fournis au comité. Quoi qu'il en soit, je ne vois pas pourquoi le document 002008 ne devrait pas être accessible au comité.
Les événements liés aux documents 00294 et 002008 sont imputables à des erreurs fortuites. Au meilleur de la connaissance, il s'agit, je crois, d'incidents isolés. Si elles ont été commises, c'est qu'on a omis de vérifier que seule la version revue des documents avait été distribuée. À l'avenir, seuls les documents revus seront distribués.
Et la lettre est signée de la main de M. George Hunter.
Le sénateur Lynch-Staunton: Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais clarifier le rôle de Scott & Aylen. Si on en croit la lettre de M. Hunter, les services du cabinet ont été retenus par le ministère de la Justice pour passer en revue quelque 200 000 pages de documents, afin d'aider le comité, ainsi que les témoins du gouvernement et ceux qui étaient auparavant au service du gouvernement.
Le ministère de la Justice a-t-il l'obligeance de revoir les documents destinés aux témoins de l'extérieur du gouvernement, ou ce traitement de faveur est-il réservé, comme on le dit ici, aux témoins du gouvernement et aux témoins auparavant au service du gouvernement? Je ne sais si quelqu'un sera ici en mesure de répondre à ces questions.
M. Nelligan: Lorsque nous recevons des documents du ministère de la Justice, notre pratique consiste à tout mettre en oeuvre pour faire en sorte que les témoins puissent les examiner avant de témoigner. Dans certains cas, bien entendu, le délai a été court. Mais nous avons mis les documents à leur disposition.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ainsi donc, c'est le comité, et non le ministère de la Justice, qui met les documents à la disposition des témoins, qu'ils appartiennent au gouvernement ou non?
M. Nelligan: Les témoins du gouvernement, nous a-t-on dit, avaient déjà été mis au courant, si bien que nous ne l'avons pas fait. Je ne fais allusion qu'aux témoins qui ne sont pas associés au gouvernement.
Le sénateur Lynch-Staunton: Eh bien, le mandat... peut-être faudra-t-il demander à quelqu'un du ministère de la Justice de venir ici pour clarifier la situation. Lindquist, Avey sont des juricomptables. Qu'entend-on par juricomptables?
M. Nelligan: Il s'agit de comptables qui prennent une part active aux litiges. Je connais le rôle joué par ce cabinet en particulier: il offre des services de comptabilité d'enquête, par exemple lorsqu'il importe de se pencher sur une quelconque transaction commerciale. En outre, il offre des services de coordination et de catalogage des documents au stade préparatoire d'un litige. Dans le milieu, le cabinet est connu pour sa capacité d'organiser des documents aux fins d'un litige.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il n'y a pas... est-il normal qu'un gouvernement retienne les services d'un tel cabinet pour examiner des documents à caractère confidentiel?
M. Nelligan: Je ne puis répondre à cette question.
Le sénateur Lynch-Staunton: Eh bien, j'aimerais que quelqu'un le fasse parce que je trouve cela, disons les choses autrement: outre les employés de Lindquist, Avey qui sont visés par des ententes concernant la confidentialité, a-t-on accordé à l'un ou l'autre des membres du personnel du comité un privilège analogue?
M. Nelligan: Je pense que la réponse est non.
Le sénateur Lynch-Staunton: Y compris vous-même?
M. Nelligan: C'est juste. J'ai demandé qu'un tel privilège me soit accordé. On m'a expliqué que, pour des raisons liées à la pratique interne, il était inapproprié que je signe une entente de non-divulgation, mais que la question serait examinée à l'interne par le ministère de la Justice. Les employés de Lindquist, Avey devraient signer une telle entente. Quant aux travaux, ils seraient effectués en vertu du contrat du ministère de la Justice.
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous ne savez pas si ce type d'entente entre une société privée et le gouvernement du Canada a été conclue auparavant pour ce genre de travail?
M. Nelligan: Je n'en sais rien. Pour être tout à fait franc, sénateur, je n'en serais guère surpris. Lorsqu'on a affaire à un dossier volumineux et complexe, la coutume veut qu'on le confie à des experts-conseils de l'extérieur, mais, bien entendu, j'ignore dans quelle mesure le gouvernement s'est conformé à cette pratique.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dans ce cas, passons à la lettre de M. Hunter. Ce dernier précise que, jusqu'ici, on nous a fourni 58 volumes contenant en moyenne 350 pages, ce qui représente environ 20 000 pages de documentation.
Faut-il croire que, parmi ces 20 000 pages de documentation, seuls deux documents ont été fournis par inadvertance dans leur forme non censurée? Or, il se trouve que les deux seuls documents qui ont été fournis alors qu'ils n'auraient pas dû l'être sont les deux seuls qui appartiennent à cette catégorie?
À quel genre de coïncidence avons-nous ici affaire lorsqu'on dit que les événements... au meilleur de ma connaissance, il s'agit, je crois, d'incidents isolés?
Quelque 20 000 documents ont été, nous dit-on, examinés, certains ont été censurés et tous ont été déposés sous une forme ou une autre auprès du comité. À deux reprises, deux adjoints de sénateur se sont adressés au ministre pour obtenir des documents parce que, d'une façon ou d'une autre, ils ne pouvaient se les procurer ici, et c'est la version non censurée de ces documents qui a été fournie.
Comment se fait-il que les probabilités soient telles que ces deux sénateurs aient gagné le gros lot?
Vous voyez où je veux en venir. Deux règles semblent s'appliquer ici. Il y a une règle que nous respectons et qui porte que les seuls documents auxquels nous avons accès sont ceux qui ont été déposés auprès du comité, et il y a une autre règle, selon laquelle, pour peu qu'on ait accès au cabinet d'un ministre, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, on peut obtenir le document désiré sous la forme désirée. Pour dire le moins, ce ne sont pas là les règles du jeu égales pour tous auxquelles je croyais que nous serions assujettis lorsque l'enquête a débuté.
Voilà ce que révèlent les faits. Il y a ici un sénateur dont l'adjoint a été mêlé à cette affaire. J'espère qu'il pourra nous donner une explication. Malheureusement, le sénateur Bryden n'est pas ici. Mais je suis convaincu qu'il pourra mieux nous expliquer. La version censurée des documents a été devant le comité pendant au moins un jour. Ils ont pu être fournis par la voie habituelle. D'une façon ou de l'autre, il a fallu... quoi qu'il en soit, l'un d'entre eux a été déniché pratiquement au beau milieu de la nuit. Or, un employé ministériel se trouvait commodément sur place et a extrait le document des dossiers. Voilà un service plutôt extraordinaire qui, malheureusement, ne nous est pas offert.
Voilà les commentaires que j'avais. S'ils ne suscitent aucune réaction, je tiendrai pour acquis qu'ils ne sont pas dénués de fondement.
Le président: Sénateur Lynch-Staunton, le comité y trouvera peut-être un bien faible réconfort, mais nous devrions être flattés, je suppose, par le fait qu'un comité parlementaire a suscité au gouvernement du Canada un intérêt tel qu'un nombre incalculable d'avocats du ministère de la Justice ont dû consacrer un incroyable nombre d'heures à la préparation de documents et qu'il a fallu retenir les services de l'un des plus importants cabinets d'avocats du Canada qui, à son tour, a retenu les services de juricomptables; autrefois, on parlait de détectives privés, n'est-ce pas?
Ce que nous trouvons le plus contestable, c'est que le gouvernement semble toujours insensible aux droits et aux privilèges d'un comité parlementaire au point de ne pas consentir au conseiller juridique d'un tel comité parlementaire les privilèges conférés aux juricomptables sur la foi d'une entente de non-divulgation analogue. Il s'agit d'un affront qui, je crois (et je vais en discuter avec les membres du comité), mérite qu'on convoque un témoin du ministère de la Justice. Au cours des quelques dernières semaines, on a soulevé un trop grand nombre de questions sans réponses.
Il serait regrettable que le non-respect de tout ce à quoi un comité parlementaire a droit soit négligé au point où seuls quelques futurs spécialistes des sciences politiques ou l'Institut de recherches politiques en tireront un article publié dans le Queen's Quarterly. Il est peut-être trop tard.
Le sénateur Lynch-Staunton: Si je puis finir à propos du rôle du cabinet de juricomptabilité, quoi d'autre... M. Broadbent, à l'occasion de son témoignage, nous a dit qu'on avait demandé à l'interroger et qu'il avait refusé. Ont-ils ou non interrogé des témoins? Sommes-nous au courant? Quelle est la réponse?
M. Nelligan: Je ne suis pas au courant de ce qui se passe au sein des ministères. Je sais qu'on a demandé à interroger un ou deux témoins, et ces demandes m'ont été transmises. Selon ce que m'a appris M. Hunter, à qui j'en ai parlé, on a depuis renoncé à cette pratique.
Le sénateur Lynch-Staunton: Doit-on comprendre qu'ils avaient pour mandat d'interroger des témoins?
M. Nelligan: Pas de la part du comité.
Le sénateur Lynch-Staunton: De la part du ministère de la Justice ou de quiconque a retenu leurs services ou ceux de Scott & Aylen?
M. Nelligan: Ce que je comprends, et je serai peut-être vague à ce propos, c'est qu'ils n'avaient pas l'intention d'interroger des témoins de l'extérieur, mais, apparemment, ils avaient l'intention de se pencher sur... d'informer et d'interroger des témoins qui appartiennent ou appartenaient à la fonction publique. C'est ce que je crois comprendre, mais je puis me tromper.
Le sénateur LeBreton: À des fins de clarification, on nous dit maintenant qu'on y a renoncé?
M. Nelligan: Ils ont renoncé à parler à des personnes de l'extérieur.
Le sénateur LeBreton: Ils avaient commencé à le faire.
M. Nelligan: Ils ont communiqué avec au moins deux lobbyistes et, lorsque je leur en ai touché un mot, ils ont convenu que cela n'était pas approprié.
Le sénateur LeBreton: Le cabinet Lindquist, Avey a-t-il à son service un certain M. Bibeault?
M. Nelligan: Je ne puis le dire.
Le sénateur LeBreton: Apparemment, ce serait un M. Bibeault qui aurait communiqué avec les témoins.
M. Nelligan: Je n'en sais rien.
Le sénateur Jessiman: Devons-nous comprendre qu'ils interrogent encore des employés du gouvernement qui ont comparu devant nous? Procèdent-ils toujours à de tels interrogatoires?
M. Nelligan: Je ne le sais pas. Vous pourrez peut-être poser la question aux témoins qui comparaîtront aujourd'hui.
Le sénateur Jessiman: Le comité connaît-il le mandat de Scott & Aylen et, par l'entremise de ce cabinet, celui de Lindquist, Avey, en ce qui concerne le travail effectué à l'égard du comité? Je crois comprendre qu'ils sont mêlés à une poursuite judiciaire.
Connaissons-nous le mandat qui leur a été confié à l'égard du comité?
M. Nelligan: D'après ce que m'a dit M. Hunter, je crois comprendre que son cabinet a été retenu à titre de conseiller spécial du ministre à l'égard de ce dossier particulier. Dans le contexte de cette audience, je puis le comprendre. Il m'a aussi appris que son cabinet avait retenu les services de Lindquist, Avey, qu'on a chargé de participer au catalogage et à la préparation des documents, ce qui, comme je l'ai indiqué, ne m'a pas surpris.
Le sénateur Jessiman: Connaissons-nous leur mandat? Savons-nous combien ils touchent?
M. Nelligan: Je n'en ai aucune idée. Cette question n'est pas du ressort du comité. Il s'agit d'un contrat direct conclu avec le ministère de la Justice.
Le président: Sénateur Kirby?
Le sénateur Kirby: Monsieur le président, j'aimerais revenir sur deux ou trois de ces questions. Je ne peux rien vous apprendre à propos de Lindquist, Avey ni à propos des avocats, parce que je ne les ai jamais rencontrés. Je ne sais pas ce qu'ils font, je ne sais pas combien ils gagnent, si bien que je ne peux vous être d'aucun secours. Je veux revenir sur le point que vous avez soulevé, parce que vous et moi en avons parlé plus tôt aujourd'hui. À cet égard, je suis parfaitement d'accord avec la position que vous avez adoptée sur ce point; nous avons certes reçu un certain nombre de documents dont des parties avaient été censurées en vertu de la Loi sur l'accès à l'information ou des dispositions relatives aux documents confidentiels du Cabinet.
Je pense que l'une des raisons pour lesquelles vous et moi avons conjointement appuyé la nomination de M. Nelligan à titre de conseiller du comité est précisément que nous pensions qu'un avocat aguerri et éminent comme M. Nelligan pourrait, lorsque des documents censurés nous seraient remis, dès le départ, nous savions tous deux que tel allait être le cas, nous donner l'assurance que la censure des documents serait conforme à la pratique.
Je suis d'accord avec vous pour dire que, pour en revenir au point soulevé par le sénateur Lynch-Staunton, l'un des membres de notre personnel, M. Nelligan en l'occurrence, devrait être en mesure de s'assurer que les documents sont censurés en conformité avec la loi. À cet égard, je suis tout à fait disposé à vous épauler pour que M. Nelligan puisse s'asseoir immédiatement avec les plus hauts cadres du ministère de la Justice, si besoin est, afin de voir si ce problème peut être résolu. Il ne fait aucun doute qu'il s'agit là d'un problème dont vous et moi avons parlé. Au départ, nous étions tous deux du même côté, et je crois que nous le sommes encore. Je suis heureux de vous venir en aide sur ce point.
J'ajoute quelques commentaires à propos de ce qu'a déclaré le sénateur Lynch-Staunton, parce que je pense qu'un détail lui a échappé.
En ce qui concerne le document dont l'un de mes adjoints a obtenu copie, j'ai déjà interrogé un certain nombre de témoins à propos du seuil à partir duquel on pourrait procéder à des déroutements, des 33 millions de dollars, des 39 millions de dollars et des 35 millions de dollars, et tout le reste. Malheureusement, nous avons été tout simplement dans l'impossibilité de mettre la main sur le document que je voulais, pour vous en convaincre, vous n'auriez qu'à voir l'amas de paperasse qui se trouve dans mon bureau. J'avais les chiffres en tête, mais je ne les avais pas sur papier.
Mon adjoint de recherche a donc simplement communiqué avec le cabinet du ministre de la Justice. De fait, il a dit que nous avions en main le document concernant les déroutements. Il a demandé qu'on nous en envoie une copie. Or, on lui a envoyé la mauvaise. Le comité a débattu de cette question avant même que je ne la soulève, mais pas sous la forme de ce document particulier. J'ai pensé qu'il me fallait clarifier ce point, parce que le sénateur Lynch-Staunton lorgnait de mon côté en quête d'une réponse.
Je répète ce que j'ai dit d'entrée de jeu: je suis tout disposé à soutenir que M. Nelligan devrait être en mesure de s'assurer que les documents censurés qui nous sont remis l'ont été conformément aux dispositions touchant les documents confidentiels du Cabinet ou à la Loi sur l'accès à l'information.
Le sénateur Lynch-Staunton: Une question et un commen- taire. M. Nixon a pu procéder à un examen exhaustif des contrats visant l'aéroport Pearson en 30 jours. Savons-nous quels documents lui ont été fournis pour lui permettre de procéder à un tel examen dans un délai aussi court? Y a-t-il ici quelque chose qui nous échappe? Ne devrions-nous pas nous fier à ce qu'il a utilisé plutôt que de passer en revue 200 000 documents? Savons-nous ce dont disposait M. Nixon?
M. Nelligan: Dans un premier temps, nous avons demandé tous les documents mis à la disposition de M. Nixon, et nous en avons reçu, un certain nombre d'entre eux étant censurés de la manière habituelle. On nous a par la suite précisé que certains des autres documents constituaient dans les faits des documents confidentiels du Cabinet, parce qu'il s'agissait d'annexes aux présentations au Conseil du Trésor aux fins de l'approbation des divers stades du contrat.
D'après les pourparlers que j'ai eus avec des représentants du Conseil privé, on espérait être en mesure de mettre à notre disposition la plupart de ces documents supplémentaires parce qu'on avait pu établir qu'ils existaient ailleurs sous une forme non confidentielle. Je n'ai rien entendu à propos de la réussite d'une telle démarche, mais il y a toujours certains documents manifestement mis à la disposition de M. Nixon qui ne nous sont pas parvenus directement.
À la lecture du rapport de M. Nixon, bien entendu, il semble qu'il ait eu accès aux recommandations des cadres du ministère à l'égard de questions qui devaient faire partie des documents soumis à l'approbation du Conseil du Trésor, et j'espère que nous les aurons avant la comparution de M. Nixon.
Le sénateur Lynch-Staunton: Monsieur le président, je suppose, et je conclurai sur ce point, que nous devrions peut-être être flattés de constater que le gouvernement du Canada ait jugé nécessaire de recourir aux services de spécialistes de l'extérieur pour l'aider à réagir à la décision du Sénat, décision unanime, soit dit en passant, de tenir la présente enquête.
Si, par ailleurs, on s'efforce de favoriser un côté au détriment de l'autre, nous devrions nous inquiéter au plus haut point des motifs réels de l'entrée en scène des juricomptables et des avocats de l'extérieur.
La lettre de M. Turner me semble tout au moins...
Le sénateur Kirby: M. Hunter.
Le sénateur Lynch-Staunton: M. Hunter, je m'excuse, une tentative majeure visant à... je ne dirais pas "camoufler", je n'aime pas ce terme, mais à excuser ce que j'interprète comme la transmission délibérée de documents à des membres du comité. On n'aurait pas dû agir de la sorte.
Avec un peu de chance, cela ne se reproduira plus. Cela ne se reproduira plus. Cela ne devrait plus de reproduire, parce que je citerai à l'intention de tous les membres ce que le sénateur Fairbairn, qui parlait au nom du gouvernement du Canada, a déclaré à propos de la motion visant la constitution du comité. Si je lis cette déclaration aux fins du compte rendu, c'est pour rappeler au gouvernement du Canada ce que sa porte-parole a alors déclaré devant le Sénat:
Nous prendrons nos responsabilités avec sérieux et nous veillerons à ce que le processus soit juste et équilibré. Nous nous efforcerons de contribuer à la production d'un résultat qui fera toute la lumière sur la question de l'aéroport Pearson.
Auparavant, elle avait déclaré:
Nous participerons pleinement et activement à une étude en comité.
La première partie de cet engagement est honorée, mais, malheureusement, je ne crois pas que le processus ait jusqu'ici été aussi équitable et équilibré qu'il aurait dû l'être. Certains membres du comité ont droit à certains avantages interdits à ceux de l'autre côté. En soi, le fait d'appartenir au parti qui forme le gouvernement a des avantages, et celui d'être dans l'opposition, conséquence nécessaire, a naturellement des inconvénients, mais on devrait se garder d'exagérer les avantages au détriment de l'autre parti. C'est tout ce que j'avais à dire, monsieur le président.
Le président: Sur le même point?
Le sénateur Tkachuk: J'aimerais simplement clarifier la procédure dans laquelle nous sommes engagés. Et, monsieur le conseiller juridique, si je soulève cette question, c'est pour que, à supposer qu'il y ait certaines questions sans réponse, nous écrivions à ces gens pour leur demander de nous fournir des explications.
Si je comprends bien, les documents sont réunis au ministère des Transports, au ministère de la Justice, partout où ces documents se trouvent, et ce sont des bureaucrates qui sont chargés de les réunir, des fonctionnaires du ministère et des bureaucrates, et ces documents sont transmis en vrac au cabinet d'avocats, qui les fait ensuite parvenir au cabinet de juricomptables?
M. Nelligan: Les documents vont à Lindquist, Avey.
Le sénateur Tkachuk: Directement?
M. Nelligan: C'est juste.
Le sénateur Tkachuk: Ils sont censés passer ces documents en revue pour veiller à ce que les problèmes relatifs à l'accès à l'information soient...
M. Nelligan: Ils cataloguent les documents dans un ordinateur et leur assignent des numéros de manière à ce qu'on puisse y accéder par date ou par personne. Donc, la première instance, Lindquist, Avey, leur assigne un numéro et saisit les données dans l'ordinateur. Les documents sont par la suite expédiés à un groupe de spécialistes des règlements relatifs à l'accès à l'information. Ces derniers examinent les documents et cernent les passages qui, à leur avis, devraient normalement être supprimés, à supposer qu'une demande soit présentée en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Les documents sont alors renvoyés à Lindquist, Avey.
Le sénateur Tkachuk: Leur renvoie-t-on les copies censurées ou... les copies censurées?
M. Nelligan: Je ne saurais vous le dire. Quoi qu'il en soit, ils renvoient une version des documents où sont précisés les passages qui devraient être supprimés.
Le sénateur Tkachuk: Ces dossiers seraient alors compilés, après quoi ils sont renvoyés. Des fonctionnaires du ministère les examinent et disent: "Nous ne voulons pas ceci, nous ne voulons pas cela."
M. Nelligan: En toute justice, je ne crois pas qu'ils disent: "Nous ne voulons pas cela." Ils précisent plutôt l'article concerné de la Loi sur l'accès à l'information.
Le sénateur Tkachuk: Monsieur le conseiller juridique, je vous fais part de mon opinion. Ce que dis, c'est: "Nous ne voulons pas ceci, nous ne voulons pas cela." Puis les documents bruts, ou s'agit-il des documents censurés, sont renvoyés à Lindquist, Avey?
M. Nelligan: Je ne suis pas en mesure d'expliquer plus en détail ce processus mécanique. On m'a dit que les documents étaient renvoyés à Lindquist, Avey, et je crois comprendre que la censure proprement dite des documents est effectuée par ce cabinet, au même titre que les crochets que nous avons maintenant rencontrés si souvent.
Le sénateur Jessiman: On leur dit quoi censurer?
M. Nelligan: Oui.
Le sénateur Jessiman: Un groupe de spécialistes?
Le sénateur Tkachuk: Donc, ils récupèrent les documents, les censurent et les insèrent dans des reliures.
M. Nelligan: Ils en expédient une copie au comité du Sénat, au ministre de la Justice et au ministère des Transports.
Le sénateur Tkachuk: Eh bien, vous voyez, ils affirment ici avoir renvoyé une version non censurée aux fonctionnaires, au ministère, au cabinet du ministre. Un employé a commis une erreur et expédié une copie du document 00294 contenant le texte intégral du dernier paragraphe, lequel paragraphe a été supprimé en vertu d'un article quelconque de la loi, dans les documents déposés antérieurement auprès du comité.
Si je pose la question, c'est parce que s'ils avaient reçu la version censurée du ministère et qu'ils s'occupaient de tout cela, comment ont-ils pu renvoyer la version non censurée au ministère?
M. Nelligan: Je n'en sais rien.
Le sénateur Tkachuk: Eh bien, peut-être devrions-nous leur demander comment cela s'est produit? Ont-ils deux séries de documents, la version non censurée se trouvant chez Lindquist, Avey? Nous voulons savoir pourquoi elle s'y trouve. Et aussi les documents censurés qui sont par la suite renvoyés au ministère de la Justice. La version non censurée des documents se trouve-t-elle au cabinet du ministre?
M. Nelligan: Sénateur, je suppose que les documents bruts que le ministère expédie dans leur état initial demeurent intouchés par le cabinet Lindquist, Avey, qui, en bout de ligne, les renverra au ministère, et qu'il s'agit de copies. Dans chaque cas, les documents seraient transmis à des fins d'examen, et les copies seraient alors censurées. Voilà, me semble-t-il, la procédure mécanique qu'ils doivent suivre. C'est de la spéculation de ma part.
Le sénateur Tkachuk: Il y aurait une série complète de documents non censurés au cabinet du ministre?
M. Nelligan: Il s'agirait des originaux. Ils seraient non pas au cabinet du ministre, mais bien dans les bureaux de Lindquist, Avey.
Le sénateur Tkachuk: Eh bien, non, parce qu'il a dit qu'il a reçu la copie intégrale que Lindquist, Avey ont fait parvenir sous le numéro 00294. À mon avis, ils n'auraient pas envoyé... je n'aurais pas envoyé ici la copie intégrale de ce document en même temps que les documents non censurés, après quoi le bureau du sénateur Bryden aurait, par chance, obtenu ce document en particulier. Il faudra que je demande au sénateur Bryden d'acheter mes billets de loterie. C'est impossible à faire.
M. Nelligan: Je ne tiens pas à commenter vos propos. C'est ce qui, selon eux, est arrivé.
Le sénateur Tkachuk: Comme je l'ai expliqué auparavant devant le comité, je n'aime pas la façon dont la question des documents est traitée depuis le début, et je nourris de forts soupçons à l'endroit de ces deux immenses ministères, Transports et Justice, qui comptent tous deux sur un grand nombre d'avocats. Nous avons ici un cabinet d'avocats et des détectives privés qui se qualifient de juricomptables, qui s'acquittent de ces tâches et qui sont tenus au secret, tandis qu'on vous refuse la même faveur, puis on produit cette excuse, qui à mes yeux n'a aucun sens, puisque je ne puis imaginer que Lindquist, Avey ait expédié un seul document. Ils auraient expédié un volume complet.
Par conséquent, le cabinet du ministre doit avoir... nous ne parlons pas des employés du ministère qui travaillent la nuit. Il téléphone au cabinet du ministre, et un adjoint de direction répond au téléphone, j'ai en main tous les documents censurés et tous les documents non censurés, et j'extrais les documents non censurés et je les fais parvenir au sénateur Bryden. Voilà ce qu'on nous dit. C'est exactement ce qui s'est produit. Il n'y avait pas une seule enveloppe. Il fallait qu'il y ait un volume contenant tous les documents préparés pour le 3 août.
Ainsi, j'aimerais savoir si les adjoints de direction des sénateurs libéraux obtiennent également des renseignements à propos des versions non censurées.
Le sénateur Kirby: La réponse est un non catégorique.
Le sénateur Tkachuk: Mais les adjoints de direction du ministère de la Justice ont accès à ces documents. De toute évidence, ils peuvent les lire parce qu'ils y ont accès.
Le sénateur Kirby: J'ignore si cela est vrai. Manifestement, un document nous a été envoyé par erreur. Quant à savoir s'ils ont les autres en main, je n'en ai pas la moindre idée.
Le sénateur Tkachuk: S'ils sont en mesure de les lire, il doit certainement leur arriver de prendre un café ensemble. Ils lisent ces documents.
Le sénateur Kirby: Je suis offensé par ces insinuations. De notre côté, aucun membre de notre personnel n'a fait quoi que ce soit de ce que laisse entendre le sénateur Tkachuk. Je pense qu'on devrait s'en tenir à ma parole. Tout cela est catégoriquement et absolument faux. Vous souhaitez peut-être croire le contraire parce que cela vous semble favorable à votre cause, mais la réalité est que cela est faux.
Le sénateur Tkachuk: J'aimerais que quelqu'un du ministère de la Justice comparaisse devant nous pour nous expliquer ce qui s'est produit. J'aimerais connaître la voie administrative par laquelle circulent ces documents. Je veux savoir qui s'en occupe. Je veux connaître le rang que ces gens occupent au sein de leur entreprise parce que, comme le président l'a dit, il s'agit d'un comité parlementaire. Si une société appelée Lindquist, Avey peut accéder à tous les documents, enquêter à propos de tout cela et prendre des décisions ou aider à prendre des décisions, il me semble (et, pour ce que j'en sais, ils ont peut-être même interrogé les témoins qui se présentent ici) que nous devrions avoir le même droit.
Le sénateur LeBreton: Puis-je poser une question à propos de la chronologie?
Le président: Essayons d'accélérer un peu. Nous avons ici affaire à deux séries de questions distinctes. La première a trait à des questions supplémentaires concernant le point que nous débattons, et l'autre, aux sénateurs qui souhaitent poser des questions aux témoins.
D'abord et avant tout, je pense, avez-vous quelque chose à ajouter, sénateur Kirby?
Le sénateur Kirby: Notre conseiller juridique et vous êtes au courant, mais je tiens à informer les membres du comité et à clarifier la question des documents. J'ai demandé au conseiller juridique d'examiner la question de savoir si les documents qui ont été déposés (je pense que le mot "déposés" est celui qui convient), en relation avec le procès instruit à Toronto, et qui concernent peut-être les témoins que nous entendrons dans les prochains jours, particulièrement à compter de la semaine prochaine, moment où nous entendrons les lobbyistes, si ces documents, donc, pourraient ou non être mis à notre disposition. Aucun des lobbyistes ne les a mis à notre disposition, même si nous avons présenté des demandes en ce sens.
Ma question est donc la suivante: si de tels documents ont été déposés devant les tribunaux, comme je suppose qu'ils l'ont été, ne pourraient-ils pas être déposés devant nous, étant donné qu'ils l'ont été devant les tribunaux? N'étant pas avocat, je sais que cette possibilité soulève certaines questions juridiques. Tout le monde devrait savoir que j'ai demandé au greffier de se pencher sur cette question. J'ai adressé la même requête au conseiller juridique. Je ne connais pas la réponse. Je voulais simplement vous mettre au courant.
Le sénateur Jessiman: Avec le consentement des parties, le conseiller juridique a déclaré que les choses étaient, à son avis, en voie de se résoudre.
Ma question, cependant...
Le sénateur Gigantès: Il n'y a pas de consentement des parties.
Le sénateur Jessiman: Non?
Le sénateur Kirby: Je vous ai simplement fait part de la requête que j'ai adressée au conseiller juridique. Dans quelques cas, je pense que nous n'avons pas le consentement des parties. Il me semble simplement que si des documents ont été déposés dans le cadre de procédures judiciaires, nous devrions également y avoir accès. C'est tout ce que je tenais à dire.
Le président: Deux autres questions supplémentaires sur ce point. Sénateur Gigantès, aviez-vous une question supplémentaire à poser?
Le sénateur Gigantès: Je suis intervenu de façon illicite.
Le sénateur Jessiman: Je suis heureux d'avoir entendu ce que le sénateur Kirby a déclaré. Notre conseiller juridique peut maintenant examiner ces documents.
Le président: Malheureusement, ce n'est pas le sénateur Kirby qui exerce le pouvoir.
Le sénateur Kirby: Je suis d'accord pour que notre conseiller juridique examine les documents.
Le sénateur Jessiman: Si le conseiller doit examiner les documents non censurés et qu'on a maintenant affaire à d'autres spécialistes, on parle maintenant d'un groupe de spécialistes, j'aimerais que notre conseiller nous dise s'il sera en mesure de le faire par ses propres moyens ou s'il estime qu'il aura besoin d'aide. Le cas échéant, je pense qu'il devrait l'obtenir.
M. Nelligan: Nous devrions nous garder de mettre la charrue avant les boeufs. Attendons de voir ce qu'ils seront en mesure de me laisser faire parce que, jusqu'à maintenant, la réponse a été non. Si possible, j'aimerais simplement souligner que lorsque j'examine un document, il m'arrive parfois, même maintenant, de laisser entendre à nos conseillers juridiques que le texte en question ne répond pas à l'un des critères normaux utilisés pour justifier la censure d'un passage, et, à un certain nombre d'occasions, ils ont eu la bonne grâce de me donner raison et de divulguer le contenu d'un document tout entier.
Je reconnais qu'étant donné les pressions qu'entraîne une entreprise de cette taille, certaines erreurs seront commises, et j'aurai droit à la coopération de tous. Le problème, c'est que dans la plupart des cas, je ne suis pas en mesure d'établir si une question devrait être contestée ou non. Si le privilège d'examiner les documents m'est conféré et que ces derniers sont nombreux, nous nous pencherons alors sur les ressources dont j'aurai besoin pour m'acquitter de ma tâche.
Le sénateur LeBreton: Une question rapide, sénateur, qui a trait à la chronologie du sénateur Tkachuk sur ce point. Quel est donc le rôle de George Hunter, puisque nous parlons de Lindquist, Avey, du ministère des Transports et du ministère de la Justice? George Hunter... je crois me rappeler distinctement qu'à la conclusion de notre dernière séance, notre conseiller juridique a demandé au sénateur Bryden de s'expliquer par écrit à propos du document en question, et la réponse nous vient de George Hunter, du cabinet Scott & Aylen. Où cadre-t-il dans tout cela?
M. Nelligan: Il est le conseiller juridique spécial du ministre de la Justice à l'égard de ce problème particulier.
Le sénateur LeBreton: Ainsi donc, c'est non pas le sénateur Bryden qui a fourni des réponses à propos de ce document, ainsi que vous l'aviez demandé, mais bien plutôt M. Hunter, le conseiller juridique spécial du ministère de la Justice?
M. Nelligan: Je ne crois pas que le sénateur Bryden aurait été en mesure de répondre à la question. M. Hunter et son cabinet ont été engagés pour conseiller le ministre quant à la façon correcte dont les documents pourraient être mis à la disposition du comité. On les a aussi chargés de prêter leur concours à la circulation des documents. J'ajoute qu'il s'est révélé très utile, particulièrement à l'occasion de mes pourparlers avec les représentants du ministère de la Justice. Il m'a fourni une aide considérable. De façon générale, il est là pour faciliter le processus et pour agir comme conseiller juridique spécial sur cette question.
Le sénateur LeBreton: Il est donc le conseiller spécial du ministre de la Justice à l'égard des documents échangés et peut-être aussi d'autres questions liées à l'enquête?
M. Nelligan: Il agit comme conseiller à l'égard des documents et de la production des témoins, et il nous aide à faire avancer les choses.
Le président: D'accord. Je vais interrompre cette discussion ici. Je vous remercie beaucoup, sénateur Kirby. Vous et moi allons nous réunir et discuter de la possibilité de convoquer un témoin susceptible de nous venir en aide.
Le sénateur Lynch-Staunton: Pour faire en sorte que notre conseiller juridique bénéficie des mêmes...
Le président: Tel sera l'objet de notre démarche.
Le sénateur Kirby: Étant donné la chaleur, puis-je rappeler que nous nous sommes ici donné pour règle qu'il était permis de laisser tomber la veste. Aussi, je vous en prie. Certains d'entre nous l'ont déjà fait. D'ici la fin de la journée, il fera passablement chaud dans cette pièce. Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Témoins, je tiens à vous remercier de vous être libérés pour nous cet après-midi, ce soir et demain matin. Collègues, ces trois hommes constituent d'importants témoins pour notre comité. M. Desmarais et M. Jolliffe ont participé, à un titre ou à un autre, à l'ensemble du processus touchant l'aménagement de l'aéroport Pearson et, bien entendu, M. Rowat connaissait bien la situation avant d'assumer le poste de sous-ministre associé des Transports puisque, au Bureau du Conseil privé, il assumait des responsabilités liées au développement économique.
Ce qui nous intéresse tout particulièrement, bien entendu, c'est qu'il a été négociateur en chef des accords visant l'aéroport Pearson à compter du 17 juin 1993. Comme vous le savez, il est maintenant sous-ministre de Pêches et Océans Canada.
Histoire de résumer ce qu'on nous a dit au cours de la dernière semaine de nos audiences, je précise que selon M. Broadbent, le contrat était dans l'intérêt du public et bon pour le Canada. Il a évoqué non sans une certaine fierté le processus de négociation, particulièrement la clause relative à la régie et le règlement obtenu à l'égard du transfert d'employés de Transports Canada à la Pearson Development Corporation.
Il a également fait état d'une importante pierre d'achoppement, ce qu'on a appelé le "sandwich" d'Air Canada, c'est-à-dire le fait qu'Air Canada ait déjà négocié un bail à long terme pour l'aérogare 2, ou qu'il était réputé l'avoir fait.
Nous avons également entendu parler de certaines des frustrations qu'il avait éprouvées en tant que négociateur en chef. À la mi-juin 1993, M. Rowat a été désigné comme négociateur en chef et, de concert avec M. Jolliffe et M. Desmarais, a été l'artisan de la réussite des négociations touchant le contrat.
Comme ils le savent tous à ce stade-ci, je crois, les conclusions du rapport Nixon ont été l'une des principales raisons, mais non la raison principale, de l'annulation des accords visant l'aéroport Pearson.
Les trois témoins ont eu des entretiens en profondeur avec M. Bob Nixon. Le 3 août, M. Rowat a déclaré, et je cite: "mon équipe et moi avons coopéré sans réserve à l'examen mené par M. Nixon et son équipe. De même, M. Jolliffe a fait partie de l'équipe d'évaluation, et M. Desmarais a pris une part active à l'ensemble du processus."
Au cours des trois dernières semaines, l'interrogatoire des témoins a permis de dégager un certain nombre de problèmes ou d'enjeux concernant cet accord. Ils se sont concentrés sur la question de savoir s'il s'est agi d'un accord précipité conclu à la hâte, ou s'il s'est simplement agi du point culminant d'un processus long et lent.
Le processus a-t-il été biaisé de manière à ce que Paxport gagne le concours? On a laissé entendre qu'il s'agissait en réalité d'une machination visant à laisser croire à l'existence d'un véritable concours. A-t-on eu plutôt affaire, comme l'ont indiqué Mme Labelle et David Broadbent, à de dures négociations ayant conduit à ce que M. Broadbent a défini comme un contrat avantageux pour le Canada?
Quoi qu'il en soit, les témoins qui comparaissent devant nous nous aideront grandement à répondre à ces questions. Avant de donner aux sénateurs l'occasion de poser des questions, j'aimerais poser certaines questions d'intérêt général pour jeter les bases des discussions d'aujourd'hui et de demain matin.
Dans le cadre de témoignages antérieurs, on nous a dit qu'on avait précipité les choses pour tenter de conclure les accords visant l'aéroport Pearson. Au terme d'un examen sommaire des audiences antérieures, j'ai en fait compté pas moins de 25 allusions laissant entendre que l'accord visant l'aéroport a été quelque peu précipité. La vaste majorité de ces références est provenue des sénateurs libéraux siégeant au comité.
Si je comprends bien, le projet constituait une question prioritaire pour le gouvernement. Les ministres des Transports qui se sont succédé l'ont répété. Il fallait remettre à niveau l'aéroport Pearson, ainsi que l'ont répété, répété et répété encore les politiciens des niveaux fédéral, provincial et municipal.
Ma première question est la suivante: a-t-on bel et bien précipité un accord qu'on a mis trois ans à conclure, ou le mot "précipité" est-il une exagération? Monsieur Rowat?
M. William Rowat, sous-ministre, ministère des Pêches et des Océans: Vous avez raison de dire que le mot "précipité" a été utilisé à de nombreuses reprises devant ce comité, je suppose, mais aussi vers la fin des négociations.
Avant que je ne sois nommé au poste de négociateur en chef, on avait, je crois, consacré de deux ans à deux ans et demi à la préparation de l'accord et à diverses tractations. Au début du mois de décembre 1992, la meilleure proposition générale avait été définie, et ses auteurs, avisés.
À ce moment, je pense que le gouvernement et les sociétés étaient convaincus qu'il faudrait tout au plus quelques mois pour que cette série de négociations et les diverses questions relatives à la capacité financière soient menées à bien.
Tout au long de ces mois, on a fait référence à... la meilleure façon de présenter les choses est peut-être de dire qu'il s'agissait d'un certain nombre d'échéances. Quoi qu'il en soit, l'une d'entre elles était, je crois, le mois d'avril et, enfin, une autre, le 31 mai. Il ne fait aucun doute que mon prédécesseur avait clairement reçu le mandat de travailler en vue de cette date. Si je me reporte à ce que j'ai observé au Bureau du Conseil privé durant cette période, je pense qu'il ne fait aucun doute que le 31 mai était la date limite à laquelle toutes les parties, les ministres, les fonctionnaires, se croyaient tenus.
Je laisse aux sénateurs le soin de juger si le fait d'octroyer un délai de six mois pour mener l'accord à bien relève de la précipitation. Mais il ne fait aucun doute que le gouvernement et les ministres de l'époque n'avaient pas le sentiment d'exercer des pressions trop grandes sur leurs fonctionnaires.
Le président: Sans entrer dans la sémantique, je suppose qu'on pourrait en dire autant de l'expression "procédure accélérée"?
M. Rowat: Tout ce que je dirais à ce propos, c'est que, au moment où ont débuté les discussions initiales en décembre, c'est-à-dire au moment où la meilleure proposition générale a été définie, ce nombre de mois était considéré comme suffisant. En fait, je pense que mon prédécesseur avait indiqué que jusqu'aux tous derniers instants du mois de mai, il travaillait en vue de cette date limite. Jusqu'aux derniers jours de mai, il avait clairement laissé l'impression qu'il s'agissait d'un objectif réalisable.
Le président: Eh bien, je rappelle aux témoins, qui s'en souviennent peut-être, le programme mis sur pied par un ancien gouvernement libéral, c'est-à-dire le Programme des projets spéciaux de relance, dont l'acronyme était PPSR, dont le gouvernement libéral avait fait l'annonce au début de 1983. On a alors parlé d'un programme accéléré visant à faire avancer à vitesse maximale des projets de Travaux publics Canada et des projets d'achat du gouvernement d'une valeur de 2,4 milliards de dollars. Le but visé était d'aider l'économie à récupérer plus rapidement après la récession de 1981-1982 et de créer des emplois.
Transports Canada (je suis certain que M. Jolliffe et M. Desmarais s'en souviendront) a grandement bénéficié du programme. Vous avez financé et construit les installations aéroportuaires de l'aéroport de Hamilton et apporté des améliorations aux aéroports de St. John, de Winnipeg et de Regina. En un temps record, on a également construit des navires de la Garde côtière d'une valeur de 680 millions de dollars. Aurait-on raison de demander si, à l'époque, ce programme a jamais été qualifié de précipité?
M. Desmarais: Dans mon souvenir, il ne l'a pas été.
M. Keith Jolliffe, conseiller financier, Groupe de l'aviation, Transports Canada: À l'époque, je n'étais pas à Transports Canada. J'ai joint les rangs du ministère en 1988 et, fondamentalement, j'ai tout de suite été affecté au projet concernant l'aéroport Pearson.
Le président: De la même façon, l'une des premières mesures prises par l'actuel gouvernement a été l'annonce d'un programme d'infrastructures d'une valeur de 6 milliards de dollars, programme qui vise la mise à niveau des services locaux et qui a également été accéléré pour faire en sorte que des emplois soient créés pour les Canadiens. N'est-il pas usuel d'accélérer les projets prometteurs sur le plan de la création d'emplois? Ne s'agit-il pas d'une affirmation juste?
M. Rowat: Si le gouvernement fait d'une procédure accélérée ou de l'exécution rapide d'un projet visant à créer des emplois un critère prioritaire, et s'il s'agit de l'un des critères utilisés, les ministres sont tout à fait en droit d'exiger de leurs fonctionnaires qu'ils agissent avec célérité.
M. Desmarais: Avant que vous n'alliez plus loin à l'égard du PPSR, que, à l'interne, nous avions renommé SCRAP, d'après l'acronyme anglais SRCPP, la procédure accélérée ne visait que les approbations gouvernementales. Dans le cadre du programme, on a fait appel à la procédure normale d'appel d'offres et à tout le reste. Les appels d'offres et les négociations finales touchant les contrats ont pris le temps habituel.
Le président: Combien de temps a-t-il fallu? Vous en souvenez-vous?
M. Desmarais: Je ne me souviens pas de la date à laquelle le programme a débuté. À l'époque, il a fallu de un an à 18 mois pour obtenir les approbations. À la fin du programme, nous avions réduit à six mois le temps nécessaire pour les approbations, et, par la suite, nous sommes passés au stade de la construction. Je me souviens notamment de l'aéroport de Whitehorse. J'ai obtenu l'approbation en vertu du PPSR, et nous avons mené le projet à bien en 1989, au moment où je me trouvais à Edmonton. La construction a donc exigé le temps habituel, c'est-à-dire que, après l'obtention des approbations, la construction a suivi le cours normal des choses.
M. Rowat: Si je puis me permettre d'ajouter un élément, je n'étais pas en poste à Transports Canada, je travaillais au sein de l'un des ministères responsables. On doit établir une distinction entre certains types de projets, et je pense que la plupart des sénateurs, et il en va certes de même pour les ministres et la plupart des politiciens, en sont conscients. Les projets à l'égard desquels les gouvernements concluent un contrat direct exigent souvent moins de temps qu'un important projet de la Couronne en vertu duquel on procède à la cession d'un service d'envergure, procédure qui, de par sa nature même, entraîne des négociations beaucoup plus complexes.
Le président: Monsieur Rowat, les négociations entourant l'aéroport Pearson semblent se diviser en trois phases. Il y a eu la phase de la capacité financière, puis la phase de négociation générale menée par M. Broadbent à l'égard de l'ensemble des questions et ce que nous appelons la phase de nettoyage menée par M. Rowat, dans le cadre de laquelle on en est venu à des conclusions et où on a abordé l'épineuse question d'Air Canada. S'agit-il d'une bonne façon de décrire le processus de négociation?
M. Rowat: Dans l'ensemble, elle n'est probablement pas mauvaise. On pourra peut-être considérer comme quelque peu préjudiciable pour mon prédécesseur le fait de parler d'une phase de nettoyage. J'ai mené à bien un certain nombre de questions en suspens, dont certaines étaient sur le point d'être réglées, et d'autres, particulièrement celles qui avaient trait à Air Canada, qui avaient été laissées sur la table et que, sous la gouverne du ministre, j'ai résolues.
Le président: J'accepte la correction. Je ne cherchais nullement à porter préjudice à votre prédécesseur.
M. Jolliffe: Si je puis me permettre, sénateur, ce que vous avez appelé la phase de la capacité financière touchait en réalité un plus grand nombre d'enjeux. Nous avons dû vérifier bon nombre d'autres modalités liées aux baux, aux licences et à d'autres questions, conformément aux résultats du processus d'évaluation, de sorte que la première phase a eu trait non seulement à la capacité financière, mais aussi à nombre d'autres questions que nous avons dû définir correctement et situer en contexte en vue des négociations.
Le président: Oui, merci. Maintenant, monsieur Rowat, vous avez, à l'occasion de votre dernière comparution, expliqué comment le gouvernement s'était fondé sur trois principes directeurs, et je vous cite:
Eh bien, la première perspective, le premier principe était que le gouvernement ne devrait pas se trouver dans une situation financière plus défavorable qu'en vertu des autres solutions de rechange, par exemple l'exploitation par l'État, et cetera. Ainsi, ce, et le loyer final tenait compte de cette situation, c'est-à-dire le loyer final payé au gouvernement.
Je continue de vous citer:
Un deuxième principe était que l'aéroport lui-même devait demeurer concurrentiel, particulièrement au sein du marché nord-américain et, je suppose, à l'échelle internationale. Mais on parle ici du coût par passager de l'exploitation d'un aéroport. Et puis, troisièmement, que le fardeau imposé aux compagnies aériennes et aux passagers... je suppose que les économies réalisées par les compagnies aériennes ou les coûts supplémentaires assumés par elles sont, en bout de ligne, transmis aux passagers... qu'ils ne soient pas assujettis à un fardeau indu.
Je citais directement vos propos.
En tant que négociateurs, avez-vous le sentiment que ces principes étaient respectés dans le contrat dont vous avez convenu?
M. Rowat: Oui. À ce stade-ci, je tiens à préciser que ces principes directeurs, lorsque vous posez la question dans ce contexte, reprenaient en gros les termes de ceux qui figuraient dans la demande de propositions. Je crois avoir bien défini l'esprit de ces principes directeurs. Oui, je dirais que l'accord final respectait ces principes directeurs.
Le président: Lorsque le gouvernement s'est attaqué à l'annulation du programme d'achat d'hélicoptères EH-101 et à l'examen des accords visant l'aéroport Pearson, peu de temps après son élection, en 1993, les critiques se sont concentrées sur ces derniers parce que l'entente ne contenait pas une clause de résiliation, tandis qu'on trouvait la clause habituelle de résiliation pour des raisons de commodité dans l'accord relatif à l'achat d'hélicoptères. Certains ont vu dans cette différence la preuve d'une sorte de collusion entre l'ancien gouvernement et la Pearson Development Corporation.
Je regrette de devoir revenir sur ce point, mais n'est-il pas habituel de ne pas assortir les contrats de tenure à bail d'une clause de résiliation? Aux fins du compte rendu, pourriez-vous expliquer pourquoi?
M. Rowat: Peut-être pourrais-je inviter M. Desmarais à le faire, mais permettez-moi d'abord un commentaire. Dans les contrats de tenure à bail comme celui-ci, nous nous en remettons aux avis du Conseil du Trésor, et plus précisément, à cette époque, à ceux du Bureau de gestion des biens immobiliers. De façon générale, ils étaient d'avis que dans le contexte de contrats comme celui-ci, le locataire serait incapable d'obtenir un financement approprié pour un projet de cette envergure si le gouvernement pouvait, pour des raisons de commodité, annuler le projet. Selon ce que je crois comprendre, il n'est pas inhabituel que ce type de contrat ne soit pas assorti d'une clause de résiliation. John voudra peut-être ajouter quelque chose.
M. John Desmarais, conseiller principal du sous-ministre adjoint, Groupe des aéroports, Transports Canada: Je n'ai pas grand-chose à ajouter sur ce point. Les contrats de tenure à bail normaux conclus par Transports Canada avec le secteur privé ne s'assortissent pas d'une clause de résiliation, essentiellement pour la raison exposée par M. Rowat. Signer un bail à long terme assorti d'une clause de résiliation revient essentiellement à signer un bail mensuel, et les baux mensuels ne peuvent être financés auprès de qui que ce soit, particulièrement lorsqu'on a affaire, comme ici, à un financement de l'ordre de 400 à 500 millions de dollars. Même à l'égard des baux moins importants, on ne peut obtenir de financement que si on est assuré d'un terme certain, et c'est ce que nous recherchions ici.
Le président: Ainsi donc, la présence d'une clause de résiliation dans un contrat de tenure à bail constituerait une exception inhabituelle?
M. Desmarais: C'est juste.
Le président: On ne pourrait dans ce cas obtenir un financement hypothécaire?
M. Desmarais: De façon générale, si un contrat de tenure à bail est assorti d'une clause de résiliation, il faut que le gouvernement garantisse le financement d'une façon ou de l'autre.
Le sénateur Hervieux-Payette: Monsieur le président, j'aimerais soulever un point, histoire de comprendre. Lorsque vous faites référence à la clause de résiliation, vous faites référence à l'après-contrat. Lorsque nous parlions de la clause de résiliation, j'avais l'impression que nous parlions de la période préalable à la signature du contrat, au cas où le gouvernement déciderait de ne pas signer.
À mes yeux, cette situation entraîne deux conséquences fort différentes. Si le contrat n'a pas débuté et que vous n'avez pas donné de contrat à qui que ce soit, habituellement, la demande de propositions comprend, comme ici, je crois, une clause générale précisant que le gouvernement n'est pas lié par la demande de propositions, mais, après que la demande de propositions a été envoyée, le contrat a été octroyé à une partie, et nous avons ensuite commencé à négocier avec une autre partie, ce qui, enfin, a abouti à Mergeco.
Lorsqu'il était question de clause de résiliation, j'avais l'impression que nous parlions d'une clause de résiliation permettant au gouvernement de dire, eh bien, nous avons presque terminé les négociations, mais les contrats gouvernementaux comportent diverses étapes et diverses approbations. Avant que tout soit signé et que le cabinet n'ait donné son approbation finale, que le Conseil du Trésor ait donné son approbation, et que toutes les étapes nécessaires n'aient été suivies, le gouvernement pouvait, ni plus ni moins, assortir la lettre d'entente d'une clause de résiliation lui permettant de dire, eh bien, le processus est fort avancé, mais nous souhaitons tout annuler et nous rembourserons les dépenses plus ou moins définies dans une sorte de lettre d'entente.
Lorsque vous parlez de résiliation, jamais je n'ai pensé... je n'ai jamais entendu parler de l'existence d'une clause de résiliation pouvant être invoquée une fois le financement obtenu et l'exploitation amorcée en vertu d'un bail.
Le sénateur Jessiman: C'est pourtant ce que dit le contrat.
Le sénateur Hervieux-Payette: Je voulais simplement m'assurer que nous parlions tous de la même chose.
Le président: Je ne voulais pas vous induire en erreur. Je parle de la présence, dans le contrat, d'une clause de résiliation convenue par toutes les parties. Je ne fais pas référence à... de toute évidence, nous avons ici affaire à une annulation, mais cela n'a rien à voir avec une clause de résiliation prévue au contrat. Je faisais référence à une clause de résiliation contenue dans les accords que ces messieurs ici présents ont négociés et menés à bien.
Le sénateur Hervieux-Payette: D'accord.
Le président: Dans son témoignage, M. Broadbent a indiqué qu'il avait négocié avec de nombreux fonctionnaires pour s'assurer qu'il respectait bien les propositions initiales. Pouvez-vous nous dire comment vous vous êtes vous-mêmes assurés que vous n'alliez pas au-delà des propositions initiales? Et je ne sais pas si ce document a un rapport, mais je tiens pour acquis que oui. Corrigez-moi si j'ai tort. En date du 13 juillet 1993, vous avez écrit à M. Coughlin, il s'agit du document 00174, vous avez donc écrit ceci à M. Peter F. Coughlin:
Comme je l'ai indiqué à l'occasion de notre rencontre, les dispositions relatives au financement hypothécaire de la tenure à bail dont nous souhaitons assortir le bail foncier devraient épouser assez étroitement les modalités du contrat existant avec l'AAL de Vancouver. Les ministres insistent pour que nous ne nous éloignions pas des principes établis avec l'AAL à cet égard. Par conséquent, les possibilités de faire preuve de créativité au chapitre de la résolution de problèmes sont relativement limitées. J'espère que vous pourrez rappeler à vos conseillers juridiques de ne pas perdre cela de vue. Dans ce cas, pouvez-vous nous dire comment vous vous êtes vous-mêmes assurés que vous n'alliez pas au-delà des propositions initiales?
Cette lettre fait-elle référence à... parlons-nous de la même chose?
M. Rowat: Je pense que cette question est représentative du principe que vous cherchez à établir, c'est-à-dire comment nous avons pu nous assurer que nous respections la demande de propositions initiale et les directives des ministres. Je crois que la meilleure façon de répondre à votre question est de préciser qu'il y avait une demande de propositions. On a déterminé la meilleure proposition générale, et le gouvernement a avisé la société qui l'avait présentée de son intention de négocier avec elle divers aspects de la proposition. Dans les mois qui ont suivi, nous avons, dans l'esprit de la demande de propositions initiale, des principes et de la proposition, suivi ce que j'appellerais, et ce que le gouvernement appellerait, la procédure habituelle. Chaque fois qu'une difficulté de taille devait être surmontée, nous avons respecté la procédure habituelle, ce qui nous a permis de nous assurer que le ministre et les ministres étaient d'avis que nous ne débordions pas du cadre de l'entente.
Permettez-moi maintenant de dire un mot à propos de la procédure habituelle. Au gouvernement, on entend par "procédure habituelle" le fait qu'un ministre consulte ses collègues à l'égard d'enjeux qui ont une influence sur les mandats d'autres ministères, et donc sur le mandat d'un autre ministre, les enjeux qui ont une grande importance politique pour le gouvernement du moment, ou qui sont extrêmement délicats, et qui peuvent avoir des conséquences sur le plan régional.
Lorsqu'un ministre consulte ses collègues, la procédure habituelle oblige le ministre à porter à l'attention du Conseil du Trésor les questions ayant des répercussions financières.
Dans le cadre de cette négociation, la procédure habituelle a été suivie en tous points. Je pense que c'est peut-être là la meilleure façon de répondre à votre question.
Le président: Merci. Tout au long du processus, même avant que la demande de propositions ne soit émise, Transports Canada s'est montré préoccupé, à juste titre, je crois, par les aspects financiers de la privatisation par voie de bail. La firme Price Waterhouse a été chargée de donner à Transports Canada une idée de la pertinence de la transition sur le plan commercial. On a aussi demandé à Price Waterhouse de vérifier le processus d'évaluation. Raymond Chabot a également pris une part importante à l'affaire. L'équipe d'évaluation a retenu les services de Richardson Greenshields. Deloitte & Touche ont préparé deux rapports au cours des neuf derniers mois, l'un à propos de la capacité financière et l'autre à propos des aspects financiers d'un accord négocié.
Plus tard, étiez-vous, en tant que négociateurs du gouvernement, satisfaits du rendement général prévu pour le gouvernement et les investisseurs?
M. Rowat: En dernière analyse, il appartient au ministre et aux ministres de résoudre cette question. Étant donné le critère énoncé dans la proposition... c'est-à-dire que le projet devait être supérieur à la deuxième meilleure solution de rechange, je dirais que le rendement prévu pour le gouvernement répondait à ce critère.
En ce qui touche le rendement prévu pour les investisseurs, l'opinion que nous avons obtenue de représentants et de spécialistes de l'extérieur et de l'intérieur, à cet égard, puis-je vous renvoyer à la note de service de Paul Stehelin qui, je crois, figure dans vos documents, c'est que le rendement prévu pour les investisseurs était acceptable.
Le président: Oui. Et vous?
Le sénateur Gigantès: Il s'agit de l'accord conclu avec Mergeco?
M. Rowat: Avec Mergeco, c'est juste.
Le sénateur Gigantès: Cette affirmation ne s'applique pas au rendement souhaité par Paxport avant la conclusion de l'accord avec Mergeco?
M. Rowat: Au départ, le taux de rendement exigé ou proposé par Paxport était considérablement plus élevé. Mais la question était de savoir si l'accord final fournissait un taux de rendement suffisant, n'est-ce pas? Selon les diverses comparaisons qu'il a effectuées, M. Stehelin s'est dit d'avis que ce taux était acceptable.
Le président: Je veux revenir pendant un moment à la question du bail d'Air Canada. Toute cette histoire me paraît plutôt étrange. L'un d'entre eux sait-il pourquoi, dans la demande de propositions, on ne faisait nulle mention du bail à long terme qu'on souhaitait conclure avec Air Canada? À partir de ce que vous avez entendu, vu ou appris, êtes-vous en mesure de jeter un certain éclairage sur toute cette affaire?
M. Rowat: Peut-être pourrais-je commencer, et les autres pourront intervenir par la suite. Lorsque j'ai été chargé du dossier en juin, il s'agissait, comme je l'ai dit, de la question en suspens. J'ai demandé à être informé en détail de la question du bail d'Air Canada et de la possibilité que ce dernier puisse être prolongé au-delà... qu'on ait pu s'engager au-delà de l'expiration du bail alors en vigueur, fixée pour 1997. Comme M. Broadbent me l'a indiqué et comme il l'a indiqué à l'occasion de son témoignage devant le comité, on s'inquiétait, je crois, du fait que, dans un document de 1989, on fasse référence à la possibilité de prolonger le bail au-delà de 1987... au-delà de 1997.
En examinant les documents et en discutant avec les employés, à l'époque, j'ai compris que la question n'était pas aussi tranchée que tous, et mon prédécesseur, à coup sûr, le pensaient. Au moment de la négociation de la demande de propositions, M. Power était en fait la personne concernée. Et la documentation portée à mon attention précisait que ses collègues et lui, à l'époque, avaient, à deux reprises... à deux reprises, mais peut-être plus souvent... consulté des porte-parole d'Air Canada pour les encourager à étaler au grand jour leurs préoccupations et leurs vues à propos de la demande de propositions à venir. En fait, je crois que l'un de vos documents indique qu'Air Canada a reçu une copie de la section appropriée de la demande de propositions à venir à des fins de commentaires. À l'examen de la documentation, j'ai eu l'impression que la question n'était pas aussi tranchée que tous me l'avaient laissé croire au moment où j'avais été saisi du dossier.
Le sénateur Jessiman: Cela vous a aidé dans les négociations?
M. Rowat: Oui. À ce moment, j'essayais d'établir clairement si Air Canada soulevait cette question pour se donner un certain pouvoir de négociation ou s'il s'agissait d'une préoccupation véritable.
À ce moment, j'en suis venu à la conclusion que les véritables préoccupations d'Air Canada avaient trait, premièrement, aux 65 millions de dollars investis au cours des années précédentes. La compagnie voulait s'assurer que le solde non amorti lui serait remboursé. Deuxièmement la compagnie, à court terme, c'est-à-dire pour le reste de la durée du bail, qui expirait à la fin de 1997, était très préoccupée par sa propre situation financière, ainsi que par la situation financière de l'industrie, au point de ne pas avoir les moyens d'assumer les coûts proposés dans la proposition de Paxport. Troisièmement, Air Canada savait que, après 1997, l'aéroport devrait être modifié, amélioré, mais la compagnie avait aussi l'impression que les frais généraux imputés à l'industrie aérienne étaient plus élevés qu'ils devaient et devraient l'être.
Voilà comment j'ai évalué leur position, leur véritable position finale. À ce moment, la compagnie cherchait à obtenir la meilleure entente possible et utilisait tous les leviers auxquels un bon négociateur aurait naturellement eu recours dans les circonstances.
Le président: Mais quelqu'un a réglé le problème. Avez-vous, messieurs, réglé le problème, ou avez-vous assisté en spectateurs au règlement du problème par Air Canada et la Pearson Development Corporation?
M. Rowat: Je crois avoir précisé que, lorsque j'ai été saisi du dossier à la mi-juin, nous avons énoncé les positions de négociation dans un cahier noir répertoriant tous les enjeux, y compris le problème posé par Air Canada.
À ce moment, j'ai compris, comme Mme Labelle, que si nous avions eu pour position avec le... avec Mergeco, qu'il appartenait à la société de régler le problème avec les compagnies aériennes, que cette position, étant donné le fait que le bail était en suspens et les préoccupations relatives à Paxport, Mergeco avait soulevé des questions à propos du fait que la documentation n'était pas dans la pièce, et cetera, toute l'affaire était en proie à une grande confusion.
En arguant du fait que j'étais nouveau dans le dossier, j'ai alors accepté d'assister à une rencontre entre les deux parties à titre d'observateur, et il s'agissait d'une possibilité... vous pouvez y voir une façon de les réunir autour d'une même table en présence de représentants du gouvernement fédéral, mais j'étais strictement présent à titre d'observateur. Et les deux parties ont compris que je n'étais présent qu'à titre d'observateur. Pendant les dix premiers jours de mon affectation... les 10 ou 12 premiers jours, j'ai aussi eu la possibilité d'évaluer le problème posé par Air Canada de même que la position adoptée par Mergeco à ce propos. Comme je vous l'ai indiqué auparavant, les deux parties se sont réunies le 28 juin, et j'en ai aussi profité pour rencontrer les parties séparément le jour même, ou la veille.
À la sortie de cette série de rencontres, j'avais... grâce aussi aux conseils des membres de mon personnel, une assez bonne idée des principales pierres d'achoppement. À ce moment, j'ai conclu que je devais m'adresser au ministre pour obtenir des directives.
Le président: Vous êtes donc convaincu que l'entente conclue entre Air Canada et la Pearson Development Corporation était acceptable pour Air Canada et Transports Canada?
M. Rowat: Eh bien, le 30 août, Transports Canada, le ministre et le gouvernement ont annoncé que l'entente était acceptable, oui. En fait, ils avaient à ce moment conclu une entente, comme Air Canada. Pendant l'été, Air Canada en était venue à la conclusion que, grâce aux diverses modifications apportées au bail foncier gouvernemental, ainsi qu'au taux de rendement prévu pour Mergeco, il était possible de signer l'entente. Voilà pourquoi la compagnie était partie à l'entente du 30 août.
Le président: Je vois. D'accord.
M. Desmarais: Sur ce point, sénateur, j'ajoute qu'Air Canada a comparu devant le comité permanent des transports, à l'occasion de l'examen du projet de loi C-22. La compagnie s'est dite favorable à l'accord et convaincue d'avoir bien tiré son épingle du jeu.
Le président: Oui. D'accord. Après les démarches préalables à l'émission de la demande de propositions, la demande de propositions, l'évaluation des propositions, les négociations, la conclusion de l'entente, avez-vous cru ou même soupçonné que les dés étaient pipés et que les résultats avaient été, de quelque façon machiavélique, arrangés avant même le début des négociations? En êtes-vous jamais venus à cette conclusion?
M. Rowat: Je ne dispose d'aucun fait et je n'ai accès à aucun fait qui puisse étayer ce genre de thèse.
Le président: Monsieur Jolliffe? Monsieur Desmarais?
M. Desmarais: Je suis d'accord avec M. Rowat.
M. Jolliffe: Je suis tout à fait d'accord avec M. Rowat. Je n'ai eu vent de rien de ce genre.
Le président: Enfin, mes collègues voudront, j'en suis convaincu, aborder diverses conclusions et affirmations contenues dans le rapport de M. Bob Nixon, mais je me suis concentré sur trois conclusions dans lesquelles il recommande l'annulation des contrats. Il écrit:
Il est inacceptable de laisser en place un contrat inadéquat, conclu au terme d'un processus déficient et dans l'ombre d'éventuelles manipulations politiques.
Avez-vous des commentaires à formuler à propos de ces trois critiques adressées à une démarche à laquelle vous avez été mêlés de très près? Monsieur Rowat, d'abord. Avez-vous le sentiment d'avoir négocié un contrat inadéquat?
M. Rowat: J'ai négocié un contrat qui répondait aux exigences et aux critères énoncés par le gouvernement d'alors et, comme je l'ai indiqué plus tôt, nous avons respecté les étapes nécessaires et ce que nous appelons la procédure habituelle. À titre de haut fonctionnaire, j'avais la conviction d'avoir atteint, pour le compte du gouvernement, les objectifs fixés. Voilà qui concerne le caractère "inadéquat" de l'accord.
En ce qui a trait au processus déficient, j'estime qu'à compter du moment où j'ai été saisi du dossier, soit à la mi-juin, la procédure appropriée a été suivie. Une fois de plus, j'insiste sur la procédure habituelle liée aux rencontres des ministres, ainsi qu'à l'obtention des approbations appropriées auprès des organismes compétents.
En ce qui concerne les manipulations politiques, je n'en ai senti aucune pendant que j'étais en poste.
Le président: Aurais-je raison d'affirmer que vous avez répondu non aux trois questions?
M. Rowat: Oui.
Le président: Monsieur Jolliffe?
M. Jolliffe: Je partage entièrement le point de vue de M. Rowat.
Le président: Monsieur Desmarais?
M. Desmarais: Pendant qu'on me contre-interrogeait dans le cadre du litige, je crois, monsieur, avoir indiqué qu'à la relecture du contrat, j'avais noté certaines clauses que j'aimerais négocier à nouveau, et je le maintiens encore aujourd'hui, mais c'est en réfléchissant après coup que j'en suis venu à cette conclusion. À l'époque, le contrat m'apparaissait conforme.
Le président: Merci beaucoup, messieurs. Vous nous avez été très, très utiles.
M. Nelligan: Avez-vous posé la question à M. Jolliffe?
Le président: Oui.
M. Jolliffe: Monsieur, j'ai dit que j'étais entièrement d'accord avec M. Rowat. Je suis également d'accord avec ce qu'a déclaré M. Desmarais. Face à autant d'éloquence, on ne peut rien ajouter.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette: Monsieur Desmarais, vous parlez français, avec un nom comme celui-là, j'avais l'intention d'avoir au moins de ce côté-là un peu plus de facilité.
D'ailleurs, selon ce que j'ai pu constater, vous êtes peut-être un des plus séniors en termes de temps au ministère. Donc, on peut couvrir toutes les séquences de préparation de l'appel d'offres, la préparation des critères d'évaluation, l'évaluation et vous avez suivi tout le processus de a à z. Vous étiez là avant que tout le processus commence.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Hervieux-Payette: On revient souvent à la question des "guiding principles". Qui avait charge de mettre en place, si vous voulez, quand vous avez préparé avec une équipe l'appel d'offres, normalement, tous les contrats, tous les baux et toutes les choses qui ont une implication financière pour ceux qui vont faire une proposition font partie de la documentation qui aurait dû être, je pense, à Toronto. On avait une salle spéciale où les gens qui voulaient faire une proposition pouvaient aller consulter tous les documents. Je veux clarifier cette question. C'est une chose que l'on trouve tous et chacun, parce que le processus a duré 18 mois. Tout d'un coup, à la dernière minute, on découvre que l'une des pierres angulaires pour faire la transaction qui est finalement le contrat avec Air Canada, qui a déjà des engagements préalables, Air Canada a fait quand même des déboursés. Donc, vous parlez à Air Canada de façon régulière. Vous venez juste de réaliser avec eux une amélioration de l'aérogare numéro 2. Ce ne sont pas des gens à qui vous parlez occasionnellement.
Ma question est la suivante: est-ce que ces documents faisaient partie de l'ensemble des documents de l'appel d'offres?
M. Desmarais: Non.
Le sénateur Hervieux-Payette: Qui était chargé d'assembler ces documents-là, de mettre tous les baux et tous ces documents qui avaient une connotation financière dans cette pièce spéciale?
M. Desmarais: C'était monsieur Power, à Toronto, qui avait fait cela avec monsieur Gerry Berigan, d'Ottawa.
Le sénateur Hervieux-Payette: Qui aurait négocié par exemple les "guiding priciples", puisque l'on réfère toujours à ce document comme étant vraiment un document qui engageait finalement pour beaucoup plus qu'après 1997 les relations commerciales entre le gouvernement du Canada et Air Canada. On a vu le document. Il n'y a personne qui a revu le processus de a à z, le processus sur le plan des documents légaux.
Je comprends qu'au ministère des Transports, vous avez beaucoup plus de gens techniques, des ingénieurs qui travaillent dans l'administration d'une infrastructure quand même très technique. Il n'y a personne au niveau légal, au contentieux, le ministère de la Justice, personne n'a souligné ce manque, parce que c'était votre locataire, à toutes fins pratiques, dans les aérogares, de loin le plus important. C'est une pièce essentielle, il me semble, pour pouvoir faire un appel d'offres. Donc, il n'y a personne qui a pu mettre ce document et dire: "voici, nous allons mettre ces deux choses à la disposition et les privatiser au point de vue opérations", mais personne n'a pensé de mettre le bail et les engagements du gouvernement. Je ne pointe pas personne. Je ne cherche pas des coupables. J'essaie de comprendre comment on a pu faire, toute une équipe de gens experts, un appel d'offres sans avoir le bail du principal locataire de cet établissement.
M. Desmarais: Puis-je répondre en anglais?
Le sénateur Hervieux-Payette: Oui, je n'ai pas de problème.
[Traduction]
M. Desmarais: Au moment de réunir toutes les données dans une pièce, nous avons fait appel à des conseillers juridiques. Nous y avons réuni l'ensemble des baux, des licences et des contrats en vigueur à Pearson, à l'époque, de manière à ce que tout soumissionnaire légitime puisse les examiner et utiliser l'information à sa guise pour préparer sa proposition.
Le seul document litigieux avait trait aux principes directeurs d'Air Canada. À l'époque, on a décidé que cela n'était pas, qu'il ne s'agissait pas d'un accord obligatoire. Seuls les accords obligations ont été admis dans la pièce réservée aux documents.
Un grand nombre de questions litigieuses entouraient les principes directeurs d'Air Canada. L'une d'entre elles avait trait au fait que, un an auparavant, soit en 1990, Paxport nous avait écrit, et Air Canada nous avait écrit. À l'époque, la compagnie appuyait sans réserve la proposition, qui était une proposition non sollicitée. Je pense que vous avez appris par M. Hession qu'Air Canada et Paxport ont mis un terme à leur association peu de temps avant l'émission de la demande de propositions, parce que nous avions demandé à Air Canada de formuler des commentaires à propos de cette demande. Dans ses commentaires, Air Canada a, une fois de plus, gardé le silence à propos des principes directeurs. Les bureaucrates ont donc décidé qu'il ne s'agissait pas d'un accord qui devait être mis de l'avant, et c'est pourquoi il ne s'est pas retrouvé dans la pièce réservée aux documents.
[Français]
Le sénateur Hervieux-Payette: Donc, les gens qui étaient chargés de faire l'appel d'offres étaient au courant du document. Ils ont choisi tout simplement de ne pas le mettre dans la pièce où étaient tous les documents.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Hervieux-Payette: Je comprends cela. Quand vous dites, et je me souviens du témoignage...
[Traduction]
Le sénateur Tkachuk: Puis-je poser une question supplémentaire? Qui a pris cette décision?
M. Desmarais: J'ai eu des discussions avec M. Berigan, tout comme M. Jolliffe, à l'époque. Je crois que c'est M. Berigan qui a pris la décision, et cette dernière a par la suite été ratifiée par le sous-ministre adjoint et le sous-ministre d'alors.
Le sénateur Tkachuk: N'est-ce pas bizarre? Parce que M. Barbeau a déclaré qu'il n'en avait pas la moindre idée.
M. Desmarais: Comme je l'ai dit, c'est ce que je crois. Je relevais de M. Berigan, et je ne sais pas de façon certaine qui a ratifié la décision, mais je sais qu'elle l'a été.
Le sénateur Tkachuk: D'accord. Merci.
M. Jolliffe: Permettez-moi d'apporter une correction: lorsque je travaillais sous les ordres de M. Berigan, je n'étais pas au courant de la disponibilité des principes directeurs. Le seul rôle que j'ai joué, à l'égard de la demande de propositions, a eu trait à certains critères financiers que j'ai acheminés en me fondant sur les documents relatifs à l'aérogare 3, de sorte que ce n'est que beaucoup plus tard que j'ai été mis au courant de l'existence des principes directeurs. Au moment de l'évaluation, nous n'étions nullement au courant de l'existence de ces principes directeurs. C'est beaucoup plus tard, autour du mois de mars 1993, je crois, que nous avons constaté l'importance de ce document.
Le sénateur Tkachuk: Merci. Je vous prie de m'excuser.
M. Nelligan: Puis-je venir en aide au sénateur? Voilà qui explique peut-être en partie le problème. Il y a une note de service adressée à M. Green par M. Power en date du 21 juin 1993, note de service qui renferme un document antérieur, le document...
Le sénateur Hervieux-Payette: Quel numéro?
M. Nelligan: En haut, on trouve le numéro 520213; en bas, le numéro 483.
Quoi qu'il en soit, M. Berigan a reçu de M. Desrochers, d'Air Canada, une lettre datée du 28 mars 1991. À la dernière page, soit à la page 520219, on retrouve le commentaire suivant:
Pour dire les choses simplement, Air Canada fera tout en son pourvoir pour prévenir la tenue d'une telle vente aux enchères...
À l'époque, ils s'opposaient à la demande de propositions.
...et nous nous opposerons vigoureusement et publiquement à toute demande de propositions donnant l'impression d'aller dans ce sens. En outre, Air Canada insistera pour que son bail non résiliable, en vigueur jusqu'au 30 avril 1997, soit pleinement reconnu et pour que les droits qu'il confère à Air Canada, y compris au chapitre de l'examen des taux de location fondé sur les politiques actuelles de recouvrement des coûts, soient protégés et maintenus.
Cette lettre était en possession de M. Power, et, à la lumière de ce qui est affirmé ici, on peut conclure qu'il est possible qu'il n'ait pas songé, à ce moment, que la compagnie se fondait sur les 22 principes. Si j'ai fait allusion à cette lettre, c'est parce qu'elle semble éclairer les motifs qui ont pu pousser M. Power à prendre cette décision à ce moment.
M. Desmarais: Ce n'est pas M. Power qui a pris la décision ultime; c'est M. Berigan qui l'a fait, à Ottawa. Mais il était au courant.
M. Nelligan: Oui, la lettre est de M. Berigan. Vous avez raison, oui.
Le sénateur Hervieux-Payette: Merci. Au moins, nous commençons à mieux comprendre pourquoi ce document est en même temps demeuré essentiel à la transaction, ainsi que pourquoi il est arrivé dans le décor très, très tard, même après le dépôt des propositions.
Et, bien entendu, monsieur le président, je suis quelque peu intriguée par le fait que Paxport et Air Canada aient semblé entretenir de très bonnes relations jusqu'à l'arrivée de Mergeco. Pendant longtemps, ils ont entretenu de bonnes... si la compagnie a fait parvenir une lettre d'appui pour la proposition non sollicitée, c'est certainement parce qu'on avait conclu une certaine forme d'entente, à propos de location et de choses du genre, parce que nul n'appuie un accord insensé. La compagnie était peut-être satisfaite du contenu de la proposition non sollicitée. Mais nous n'allons pas nous intéresser à la proposition non sollicitée. Nous avons assez de pain sur la planche, à moins que mes collègues ne souhaitent poser certaines questions.
D'après la proposition initiale de Paxport, celle qu'on appelle la meilleure proposition générale (peut-être l'apprendrai-je dans trois mois) et la proposition Claridge et l'accord final, je veux dire quel a été l'élément qui a permis d'emporter le morceau? Par exemple, lorsque nous examinons les critères d'évaluation pour Paxport, on constate que 45 points ont été attribués à la question financière, et 30 points, au plan d'affaires. Et, à la fin, tout juste six semaines avant l'approbation, on assiste à l'arrivée de Mergeco, parce que l'accord n'était tout simplement pas viable sur le plan financier.
Le sénateur Tkachuk: Fournissez-en la preuve.
Le sénateur Hervieux-Payette: J'essaie simplement de...
Le sénateur Tkachuk: Ne lisez pas The Globe and Mail. Sur quoi vous fondez-vous pour affirmer que l'accord n'était pas viable?
Le sénateur Hervieux-Payette: Je m'excuse, sénateur Tkachuk. J'ai des notes que j'ai préparées pour moi-même. D'accord? J'effectue un retour en arrière, parce que deux semaines se sont écoulées depuis que nous avons vu ces messieurs.
Le sénateur Tkachuk: Où trouvez-vous ces renseignements dans les témoignages? J'aimerais vérifier par moi-même. Cela m'aiderait et aiderait peut-être le témoin.
Le sénateur Jessiman: Citez vos preuves.
Le sénateur Tkachuk: Je veux les voir. C'est votre déclaration. Où sont les preuves?
Le sénateur Hervieux-Payette: Dans tous les documents que vous avez reçus.
Le sénateur Tkachuk: Dans ce cas, je veux les voir. Citez la référence.
Le sénateur Jessiman: Si vous l'avez, vous pourrez nous la donner plus tard. Nous pensons que vous ne l'avez pas.
Le sénateur Hervieux-Payette: Vous avez les mêmes documents. Je ne vais pas faire référence aux pages, une à la fois.
Le sénateur Jessiman: Lorsque je fonderai mes affirmations sur des passages, je vous indiquerai où ils se trouvent.
Le sénateur Gigantès: La firme Deloitte & Touche n'a-t-elle pas déclaré qu'il n'y avait pas de capacité financière? Un rapport a été publié à ce propos.
Le sénateur Tkachuk: Il y en a deux. C'est possible.
Le sénateur Gigantès: Ils ont approuvé la capacité financière une fois la société Mergeco créée, bien entendu, grâce à la bourse bien garnie de Bronfman, mais, avant Mergeco, ils n'ont pas reconnu la capacité financière. C'est ce à quoi elle faisait allusion. Comment peut-on...
Le sénateur Tkachuk: Ce n'est pas ce qu'ils ont dit.
Le sénateur Gigantès: Comment peut-on...
Le sénateur Tkachuk: Sénateur, où déclarent-ils cela?
Le sénateur Gigantès: ...déclarer qu'une soumission est la meilleure lorsque...
Le sénateur Tkachuk: Posez la question aux témoins. C'est pourquoi ils sont là.
Le sénateur Gigantès: Très bien. Comment peut-on considérer une soumission comme étant la meilleure lorsque la capacité financière est mise en doute?
M. Desmarais: Sénateur, la demande de propositions exigeait une preuve de financement avant la signature du bail, mais pas avant ni à aucun autre moment.
Et dans la lettre datée du 7 décembre qu'il a adressée aux auteurs d'une proposition pour faire l'annonce de la meilleure proposition, M. Barbeau a soulevé deux points. L'un avait trait à la situation de l'industrie aérienne. En effet, depuis le mois d'août, Air Canada et Canadien discutaient d'une éventuelle fusion, et il existait une certaine incertitude quant à savoir si le principal locataire demeurerait un important locataire en vertu du nouveau contrat de tenure à bail. On y a donc fait référence dans la lettre, tout comme à la déclaration selon laquelle Paxport devrait parler à ses intéressés. Dans le jargon de Transports Canada, "intéressés" signifie généralement les locataires à bail ainsi que les actionnaires, et je pense que cette déclaration donnait lieu à certaines interprétations erronées.
À l'époque, nous avons donc dit à Paxport de s'adresser aux compagnies aériennes pour voir si elles étaient toujours intéressées à être parties à l'entente et à louer des installations auprès de la société, ou si nous allions devoir discuter avec une autre compagnie aérienne.
Le sénateur Gigantès: Mais il existe un rapport de Deloitte & Touche dans lequel on met en doute la capacité financière de Paxport.
Le sénateur Jessiman: On ne met pas en doute la capacité financière de Paxport. On se demandait si leur projet ou leur proposition pourrait être financé, étant donné que la société allait obtenir une bonne part de ses revenus auprès des compagnies aériennes. Le témoin a expliqué que les compagnies aériennes risquaient de ne plus exister. Elles auraient pu faire faillite.
Le sénateur Gigantès: Comment peut-on décrire comme étant la meilleure une soumission qui...
Le sénateur Jessiman: Demandez au témoin.
Le sénateur Gigantès: Répondez-moi. Comment peut-on dire qu'il s'agissait de la meilleure soumission, alors qu'il y avait sur la table une autre proposition dont le financement ne soulevait aucune question?
Le sénateur Lynch-Staunton: La capacité financière.
Le sénateur Gigantès: La capacité financière.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le problème se posait pour les deux soumissionnaires.
Le sénateur Gigantès: Pas selon Deloitte & Touche.
Le sénateur Lynch-Staunton: Posez la question au témoin.
Le sénateur Gigantès: Nous avons le rapport de Deloitte & Touche.
Le sénateur Tkachuk: Si le sénateur Hervieux-Payette avait cité ses sources avec précision, nous n'aurions pas cette discussion.
Le président: Ne parlons pas tous en même temps. Essayons de parler chacun à son tour. Sénateur Payette.
Le sénateur Hervieux-Payette: Eh bien, je faisais référence à la première proposition qu'on a jugée être la meilleure proposition générale, celle qui devait produire 2,523 millions de dollars en vertu de la proposition initiale de Paxport, qui a été jugée la meilleure. Puis, à la fin, nous aboutissons à 1,043 en vertu du scénario de référence de Transports Canada, puis, bien entendu, le chiffre change. Mais vous avez approuvé la meilleure proposition générale assortie de certains chiffres, d'un certain rendement, à condition que les frais de location d'Air Canada puissent être presque quadruplés.
À l'époque, vous étiez au courant des difficultés financières qu'éprouvait l'industrie aérienne, et vous avez décidé que cette proposition était tout à fait sensée. S'ils ont tenu pour acquis que la compagnie pouvait payer quatre fois plus, c'est une chose. À condition qu'elle paie, parce qu'elle en a la capacité financière, et je fais référence à Air Canada qui, à l'époque, éprouvait des difficultés financières, tout comme Canadien. Nous nous rappelons l'époque où...
Comment pouvez-vous dire cela et attribuer des points au lieu de dire que cet élément de la proposition n'a aucun sens? Cela ne va pas se produire, c'est impossible. Les compagnies aériennes feraient faillite. La façon dont vous avez établi... et je sais que nous faisons sans cesse référence à 29 manuels que nous n'avons pas vus, mais comment avez-vous pu tenir, de fait qu'ils n'auraient jamais pu se matérialiser?
M. Jolliffe: Je peux peut-être vous éclairer, sénateur. Au stade de l'évaluation des plans d'affaires, nous avons établi les critères pour le plan financier et l'offre financière. Et je pense qu'on peut voir qu'il s'agit d'une situation relativement stérile. Enfermés à Toronto, nous passons en revue les propositions, qui constituent des projections établies par les deux promoteurs en vue d'une situation qui pourra ou non se matérialiser. Nous avons dû établir si ces situations possibles pourraient être influencées par certains facteurs. C'est ce que nous avons fait, nous les avons définies.
Lorsque, au bout du compte, nous avons abouti à un écart assez considérable entre les deux positions, une que nous avons décrite comme incroyablement dynamique et l'autre, que nous avons décrite comme incroyablement prudente, la marge était considérable lorsqu'on tient compte de la capacité des compagnies aériennes, des passagers et du public voyageur d'assumer ces coûts, et de la capacité de Paxport de négocier les baux avec les locataires et avec les compagnies aériennes, une fois que ce droit lui aurait été confié.
Tout au long du processus, Paxport insistait pour qu'on lui reconnaisse le droit de négocier ces baux, et la société demandait sans cesse qu'on la légitime. Les propositions ont été évaluées, et M. Lane vous a parlé de ce processus. Nous nous trouvions dans une situation stérile. Au bout du compte, nous ne savions rien des autres questions touchant la capacité financière, qui se résumaient, si vous voulez, à la bourse bien garnie d'un Bronfman soutenant la soumission d'ATDG, ou même la situation financière du Matthews Group, qui n'était que l'un des membres du conglomérat, et non le conglomérat lui-même. Paxport se constituait d'un certain nombre de sociétés. Nous n'avions que des informations financières de base à propos d'elles.
Après coup, nous avons bien entendu voulu vérifier, et c'est ce que j'ai fait avec M. Stehelin, de Deloitte & Touche. Nous voulions connaître exactement les autres données contextuelles relatives à Paxport, à l'époque, par exemple, ce qu'on appelle les capitaux propres moins solides et d'autres facteurs.
Mais il y avait un écart très marqué entre les deux propositions, et nous avons donc eu plus tard des questions à poser aux négociateurs à ce propos, questions qu'ils ont dû résoudre avant de transmettre au gouvernement l'accord final à des fins de recommandation.
M. Desmarais: Sénateur, si je puis me permettre d'ajouter à ce que vient de dire M. Jolliffe, Wood Gundy a, en février, à la fin de février 1993, je crois, écrit au ministre des Transports et affirmé que la proposition de Paxport pouvait être financée, mais que des questions étaient toujours en suspens. C'est là l'opinion exprimée par leur expert-conseil, si vous voulez. Ils les financeraient ou obtiendraient pour eux un financement auprès du marché.
Le sénateur Hervieux-Payette: J'ai lu la lettre et, pour ce faire, ils n'auraient pas trouvé beaucoup d'argent à la banque. Ils ont dit qu'ils entreprendraient de le faire, mais ils ne s'étaient pas engagés à le faire. On doit établir une distinction entre faire part de son intention de faire une chose et accomplir la chose en question. Lorsqu'il s'agit de financer un projet, ce n'est pas la même chose.
Ma question à propos de...
Le sénateur Tkachuk: Est-ce dans la lettre de la proposition que vous avez lu cela? Où est la lettre dans laquelle vous avez trouvé des renseignements à propos de la capacité financière ou du financement?
Le sénateur Hervieux-Payette: La lettre de Wood Gundy qui figure dans votre pile de documents. Je veux dire, il y a une lettre. Je veux dire...
Le sénateur Tkachuk: Quel est le numéro?
Le sénateur Hervieux-Payette: Je n'en sais rien. Si vous me demandez de fouiller dans la pile, je serai peut-être capable de mettre la main sur le document et de vous communiquer le numéro, mais...
Le sénateur Tkachuk: Pas de problème. Je voulais simplement savoir.
Le sénateur Hervieux-Payette: Nous avons 20 000 pages de documents à examiner. Je m'excuse.
Le sénateur Tkachuk: Nous avons tous 20 000 pages de documents à examiner.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je me demande si ce sont les mêmes.
Le sénateur Tkachuk: Vous avez peut-être plus de lecture à faire. C'est peut-être pour cette raison que vous avez besoin de plus de temps.
Le sénateur Hervieux-Payette: Je dispose d'un personnel qualifié qui prépare des notes d'information de qualité.
Le sénateur Tkachuk: Poursuivez, sénateur.
Le sénateur Hervieux-Payette: Je m'excuse, mais je ne crois pas que nous fassions des plaisanteries à propos de votre façon de travailler. J'aimerais que vous preniez au sérieux ce que je fais, parce que, sénateur, je m'acquitte de ma tâche avec sérieux.
Le sénateur Tkachuk: Je vous prends au sérieux.
Le sénateur Hervieux-Payette: Lorsque je fais référence à des documents que nous avons vus à quelques reprises, nous aurons besoin de deux fois plus de temps si je dois à chaque fois vous en donner la référence.
Le sénateur LeBreton: Nous voulons simplement connaître le numéro du document.
Le sénateur Tkachuk: Lorsque vous affirmez une chose que je n'ai ni vue ni lue auparavant, je demande où se trouve le document. Lorsque vous avez fait votre première déclaration... sénateur, je suis navré de vous avoir offensée, car telle n'était pas mon intention, mais lorsque vous avez fait votre déclaration, il n'y avait pas de document, et c'est pourquoi j'ai pensé que j'étais peut-être... qu'il y avait peut-être un autre document manquant que je n'avais pas en ma possession.
Le sénateur Hervieux-Payette: Eh bien, je ne nourris pas de tels soupçons à propos de tous les documents sous lesquels nous sommes ensevelis. J'essaie d'y voir clair, tout comme vous. J'essaie de garder un résumé de chacun des documents, mais il est possible que je ne sois pas en mesure de citer une référence précise lorsque je prononce une phrase à propos de documents que, parfois, nous avons vu trois fois. Je n'ai pas mémorisé les numéros.
Le sénateur LeBreton: Lorsque vous préparez vos questions, notez le numéro.
Le sénateur Tkachuk: Aucun problème.
Le sénateur Hervieux-Payette: Sénateur LeBreton, personne ne prépare mes questions. D'accord? Puis-je poser mes propres questions?
Le président: À l'ordre, à l'ordre. Sénateur Hervieux-Payette, adressez-vous aux témoins, je vous en prie.
Le sénateur Hervieux-Payette: Merci.
Eh bien, permettez-moi de me reporter à mes notes. Je m'excuse. Je reviens sur votre processus d'évaluation. Et aujourd'hui, je n'ai pas avec moi mon livre d'évaluation. J'apporte avec moi autant de documents que faire se peut, mais il y a une limite à ce que nous sommes en mesure de consulter. Mais dans l'évaluation que vous avez réalisée, il était question de droits imposés aux passagers ou de redevances d'installation passagers.
Lorsque vous avez procédé aux analyses à l'aide des cahiers que nous n'avons pas vus, avez-vous songé à toutes les recettes, et quels étaient le maximum et le minimum pour chacun des éléments qui devaient produire un revenu? La location des magasins, du garage, de l'aire de stationnement et tout le reste? Quelles étaient les hypothèses de base?
Ou n'utilisiez-vous comme point de comparaison que ce qui se produisait à l'aérogare 3, par exemple? Avez-vous utilisé l'aérogare 3 comme lignes directrices?
M. Jolliffe: Sénateur, nous n'avions aucun des documents relatifs à l'aérogare 3, si bien que nous n'étions absolument pas au courant des prix en vigueur à l'aérogare 3. En revanche, nous avions deux propositions qui, chacune à sa façon, tenait compte des recettes tirées des compagnies aériennes et des aires réservées au commerce bénéficiant du transit des passagers, de ce qu'on appelle dans certains secteurs la propension des passagers à dépenser, ce qui est particulièrement le cas dans les aires réservées au commerce.
Nous avons examiné ces chiffres pour savoir s'ils étaient réalistes et, en un sens, pour voir s'il était réaliste de penser qu'on pourrait aller chercher auprès des passagers des revenus de cette ampleur. Était-il réaliste de penser que les tarifs imposés aux compagnies aériennes pourraient être augmentés de la façon dont la société croyait pouvoir les augmenter? Nous avons procédé à nos évaluations, et nous avons mis en doute certains de ces chiffres. Qu'arriverait-il si les recettes chutaient de 10 p. 100 ou si les dépenses d'immobilisations augmentaient de 25 p. 100? Qu'arriverait-il si les frais de fonctionnement et d'entretien étaient supérieurs ou inférieurs aux frais prévus? Quels effets ces écarts auraient-ils sur les bénéfices nets?
Nous avons donc abordé la proposition sous l'angle du réalisme, mais nous n'avons pu effectuer de comparaison avec les tarifs en vigueur à l'aérogare 3, puisqu'il s'agit d'une aérogare exploitée par le secteur privé, et nous ne disposions pas de ces données.
Permettez-moi d'ajouter que ni l'un ni l'autre des promoteurs n'a proposé l'imposition de redevances d'installation passagers. ATDG prévoyait aller chercher auprès des compagnies aériennes ce que la société appelait des revenus additionnels faisant appel à la notion de redevances d'installation passagers, mais cette solution se retrouvait dans la position d'ATDG, et non dans celle de Paxport.
Nous n'avons jamais considéré les redevances d'installation passagers comme un facteur sur lequel nous devrions miser. Nous voulions plutôt tabler sur des revenus tirés de l'imputation de frais aux passagers.
Le sénateur Hervieux-Payette: Mais puisque vous vouliez favoriser la concurrence entre les deux, je veux dire au moins entre les aérogares 1 et 2 et l'aérogare 3, la demande de propositions a été faite dans cet esprit, et nous avons simplement... nous avons deux entités. À ce moment, la société a-t-elle obtenu un pointage élevé parce qu'elle fournissait des recettes plus grandes que l'aérogare 3, mais comment pouviez-être certains, pas certains, mais au moins assurés de façon réaliste, que vous recevriez cette somme qui, bien entendu, nous l'avons constaté en bout de ligne, ne s'est jamais matérialisée, mais parce que nous ne voulions pas de l'accord qui avait été signé? Mais vous avez analysé la question et décidé qu'il s'agissait d'un rendement réaliste pour la Couronne, ou au moins que la valeur de l'accord était telle. Chaque élément a été soigneusement soupesé, et, au bout du compte, nous aboutissons à un accord qui, à mes yeux tout au moins, semble plus réaliste.
Ma question est la suivante: n'est-ce pas, en vertu de la procédure gouvernementale, la procédure normale lorsque le premier soumissionnaire n'est pas en mesure de répondre aux exigences qu'il a lui-même déterminées dans sa proposition? Demandez-vous au premier et au deuxième soumissionnaires de fusionner, ou retenez-vous la proposition du deuxième?
M. Jolliffe: Permettez-moi de répondre à la question. Le premier point, me semble-t-il, sénateur, est que les deux soumissionnaires, les deux propositions, ont été jugées acceptables. Et la proposition de Paxport constituait la meilleure proposition générale acceptable.
Cela dit, et peut-être M. Rowat voudra-t-il formuler des commentaires à propos de la procédure, c'est le point de vue que nous avons arrêté au terme de notre évaluation. Il y avait un certain nombre de conditions que nous... un certain nombre de questions qui nous préoccupaient, et qu'on aurait pu aborder dans le cadre des négociations. Et cela est un... pour nous, c'était le premier but, nous ne pouvions voir les choses que dans un contexte stérile, sans aucune forme de participation de la part des auteurs des propositions, sans possibilité de les interroger en profondeur à propos d'éléments importants, le processus d'évaluation devant par la suite déboucher sur une recommandation.
Le sénateur Hervieux-Payette: Compte tenu de votre expérience auprès du gouvernement, n'a-t-on pas l'habitude, lorsque le contrat a été accordé au premier soumissionnaire et que ce dernier ne répond pas à toutes les exigences à l'égard desquelles il a contracté des engagements, de passer au deuxième et de faire fi du premier, parce qu'il n'a pas respecté tous les engagements énoncés dans sa propre proposition? En fait, vous y aviez vu la meilleure proposition générale, de sorte que ses auteurs devaient se montrer à la hauteur de la situation. Lorsque vous avez compris qu'ils ne seraient pas en mesure de respecter leurs engagements, pourquoi n'êtes-vous pas allés... pourquoi le gouvernement ou l'équipe chargée de l'analyse n'ont-ils pas dit: "Nous devrions passer au deuxième"?
Il arrive parfois que l'on ait quatre soumissionnaires en mesure de livrer la marchandise, et on retient celui qui sert le mieux nos intérêts, et à coup sûr celui qui sert le mieux nos intérêts financiers, mais on s'assure également que le projet sera mené à bien. Pourquoi n'avez-vous pas décidé, ou plutôt pourquoi n'a-t-on pas pris la décision de passer aux auteurs de la proposition numéro 2, puisque vous saviez qu'ils exploitaient déjà l'aérogare 3, et d'abandonner le premier, celui qui n'était pas capable de se conformer aux exigences de sa propre proposition?
M. Jolliffe: Simplement, sénateur, parce que la deuxième proposition, soit celle d'ATDG, était également assortie de conditions. Dans les deux cas, il y avait des problèmes à régler avant qu'on ne puisse déclarer la proposition totalement acceptable. Tout aurait été merveilleux si nous avions simplement pu prendre le document et dire: "Signez ici. Nous sommes disposés à apposer notre signature là."
Dans les deux cas, on nous tenait des propos qui obligeaient le gouvernement à accepter certaines choses. Dans les deux cas, on nous disait: "Nous nous attendons à ce que le gouvernement..." Eh bien, pour répondre à la question, nous avons dû nous adresser directement au gouvernement pour lui demander s'il était disposé à accepter telle ou telle chose comme condition préalable à l'acceptation de la proposition.
Comme les deux propositions étaient assorties de conditions, et que l'une était supérieure à l'autre, nous nous en sommes tenus à la proposition de Paxport et l'avons recommandée à titre de meilleure proposition générale, sous réserve des problèmes en suspens, puisque la proposition d'ATDG posait d'autres problèmes.
M. Rowat: Un commentaire sur ce point. Nous avons négocié avec Mergeco sur la foi de la proposition de Paxport, et nous avons conclu la ronde de négociations sur ce point. Et la ronde de négociations a produit un ensemble de résultats financiers qui, en fait, étaient supérieurs à ceux qui figuraient dans la proposition de Claridge. Les bénéfices nets, cela figure dans votre documentation, mais je n'ai pas le numéro du document sous la main, mais...
Le sénateur Kirby: Soyez prudent, il va se fâcher contre vous.
Le sénateur Gigantès: Vous allez indisposer le sénateur Tkachuk.
M. Rowat: Dans ce cas, je ne ferai pas référence à un document. Tout ce que je dis, c'est que les rendements prévus pour le gouvernement en dernière analyse étaient supérieurs à ceux que prévoyait la proposition initiale d'ATDG. En fait, les accords concernant la dette et les capitaux propres s'apparentaient à ce qu'on retrouvait dans la proposition initiale, et divers autres facteurs, les mouvements de trésorerie étaient... étaient plus favorables. Ainsi... et je pense que cela figure dans le document, dans la documentation que vous avez reçue.
En dernière analyse, l'entente conclue avec Mergeco sur la foi de la proposition de Paxport, même si elle procurait à la Couronne des rendements moindres, était malgré tout supérieure à la proposition initiale d'ATDG.
M. Desmarais: Puis-je aussi faire un commentaire, sénateur? Je veux revenir brièvement sur le processus. Lorsqu'on établit une demande de propositions ou un appel d'offres, peu importe, on fixe des critères d'évaluation à l'égard desquels des cotes sont accordées, et deux choses se produisent alors. Ou bien on n'obtient aucune soumission, et je m'en tiendrai particulièrement aux contrats de tenure à bail. Lorsqu'on ne reçoit aucune soumission, la procédure gouvernementale nous autorise à négocier avec qui bon nous semble ou avec quelqu'un que nous parvenons à intéresser à la proposition, toujours si aucune soumission n'a été reçue.
Lorsqu'un reçoit une soumission, en général, on l'évalue. Si elle répond à des critères minimaux, on négocie avec la personne en question.
Lorsqu'on reçoit plus d'une soumission, on procède à une évaluation et on retient la proposition qui a obtenu les cotes les plus élevées, et on entreprend des négociations avec le soumissionnaire. En cas d'échec de ces négociations, on passe au soumissionnaire suivant.
Ce qui s'est produit ici, c'est que nous avons entrepris des négociations avec Paxport, qui allait devenir Mergeco, et, le 3 mai, ATDG a retiré sa proposition. Après le 3 mai, nous n'avions plus affaire qu'à une seule proposition. Si les négociations avaient échoué, il n'y aurait plus eu de proposition sur la table.
Le sénateur Hervieux-Payette Mais ce que vous dites, et je le comprends parfaitement, c'est que six ou huit semaines après que la proposition de Paxport ait été déclarée la meilleure proposition générale, Mergeco est entrée dans le décor. Or, M. Hession dit que quelqu'un lui a téléphoné pour lui demander de créer Mergeco et de conclure certains accords. L'un d'entre vous a-t-il eu vent de ce coup de téléphone?
M. Desmarais: Non, madame.
M. Rowat: Non.
Le sénateur Hervieux-Payette: Monsieur Rowat, vous n'étiez pas en poste, si bien que ce n'est probablement pas vous qui avez téléphoné à M. Hession.
M. Rowat: Non, ce n'était pas moi.
Le sénateur Hervieux-Payette: D'accord. Merci. Si je pose la question, c'est parce que j'ai l'impression, lorsqu'on présente une proposition, je sais combien cela est difficile, et nous travaillons fort. J'ai travaillé chez SNC et, lorsque nous faisions une proposition, notre première réaction n'était certainement pas de fusionner nos activités avec celles de la personne qui avait remporté le concours avant d'être rejetée. La première réaction était... ils ont, ils n'ont pas été à la hauteur, si bien que nous allons nous asseoir à table et emporter le morceau.
Voilà la procédure normale en tout temps, il s'agit d'une procédure d'appel d'offres, que ce soit au niveau fédéral, provincial ou municipal, lorsque le premier choix a été rejeté, pour toutes sortes de raisons, parce qu'il n'est pas anormal qu'une condition ne soit pas remplie avant que la transaction ne soit conclue.
Ce qui me paraît étrange, c'est qu'ils n'ont pas été rejetés et que quelqu'un que nous ne connaissons pas, quelque part, a laissé entendre qu'ils devraient procéder à une fusion, et c'est alors que Claridge est entrée en scène. Et je sais que, bien entendu, ils auraient probablement préféré garder pour eux la totalité du marché, mais ils conservaient le contrôle, ce qui, bien entendu, est mieux que rien.
Mais, monsieur le président, je pense que nous devons clarifier pourquoi la pratique habituelle, selon laquelle les soumissionnaires qui ne répondent pas aux critères sont exclus, ne s'est pas appliquée. Normalement, c'est le cas.
M. Desmarais: Sénateur, le processus d'évaluation a révélé qu'ils répondaient à tous les critères, et ce sont eux qui ont obtenu les cotes les plus élevées. C'est ce que dit la lettre du 7 décembre. Ils ont présenté la meilleure proposition générale acceptable, et, ici, "acceptable" est un mot essentiel, leur proposition répondait à tous les critères d'acceptabilité, c'est-à-dire à tous les critères énoncés dans la demande de propositions.
Le sénateur Hervieux-Payette: Pour peu qu'ils répondent à toutes les conditions qui demeuraient en suspens.
M. Desmarais: Pour peu qu'ils répondent à toutes les conditions imposées par la suite, parce qu'ils ont adressé au gouvernement des demandes auxquelles nous n'étions pas disposés à répondre.
Le sénateur Hervieux-Payette: Si ces demandes n'avaient pas été satisfaites, cela signifie donc que...
M. Desmarais: Que la proposition aurait été retirée de la table, mais toutes ces conditions ont par la suite été satisfaites.
Le sénateur Hervieux-Payette: Mais pas par Paxport. Par la nouvelle compagnie.
M. Desmarais: À la lumière de la proposition de Paxport. Nous ne négociions que la proposition de Paxport.
Le sénateur Hervieux-Payette: Oui, mais nombre d'éléments figurant dans... si je me reporte à votre évaluation, bon nombre d'éléments proposés par Claridge ne constituaient ni plus ni moins qu'un compromis par rapport aux critères énoncés par Paxport et que Paxport...
M. Desmarais: Le seul compromis que je connaisse, sénateur, a trait à l'utilisation de l'aérogare 3 pendant la fermeture de l'aérogare 1. Si vous en connaissez d'autres, j'aimerais bien être au courant, parce que c'est le seul dont je me souvienne.
Le sénateur Hervieux-Payette: D'accord.
Le sénateur Lynch-Staunton: Établissons les choses bien clairement. À la suite de l'entrée en scène de Mergeco, on ne s'est pas écarté de la proposition de Paxport.
M. Desmarais: Des modifications de la proposition de Paxport ont été négociées.
Le sénateur Lynch-Staunton: Des modifications négociées, oui, mais toujours par rapport à la proposition de Paxport.
M. Desmarais: Toujours par rapport à la proposition de Paxport.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il s'agit d'un élément clé et, avec un peu de chance, tout le monde aura entendu. Je vous remercie.
Le président: Collègues, nous allons nous interrompre à 17 h 30. Et comme j'ai été très généreux envers le sénateur Hervieux-Payette et moi-même à l'égard du temps utilisé, je vais maintenant imposer la limite de temps de 30 minutes.
Le sénateur Jessiman: Merci beaucoup.
Le sénateur Lynch-Staunton: Merci.
Le président: Voilà qui vous conduira gentiment jusqu'à 17 h 30, sénateur Jessiman.
Le sénateur Jessiman: Je vais maintenant produire les copies des documents auxquels je vais me référer.
Le sénateur Hervieux-Payette: Monsieur MacDonald, je vous rappelle que je n'aurais pris que 30 minutes si nous n'avions pas eu des discussions étrangères à mes questions.
Le sénateur Jessiman: Je vais maintenant distribuer ces pages.
Le sénateur Gigantès: Aucun numéro de document n'y figure. De quoi s'agit-il?
Le sénateur Jessiman: Les pages sont extraites du volume que vous avez reçu, mais je ne m'attendais pas à ce que tous l'aient en main. Je vais vous expliquer. Attendez un peu.
Le sénateur Gigantès: Le numéro de document. Il doit y avoir...
Le sénateur Jessiman: Non, je ne pense pas qu'il y ait eu un numéro de document. En fait. le document se trouvait à l'extérieur du cahier d'information. C'est un document qui nous a été remis. En fait, il s'agit d'une photocopie, de sorte que chaque page est... le document qu'on nous a remis était imprimé recto-verso, et je me suis rendu compte qu'il était beaucoup plus facile de suivre si un seul côté de la page était imprimé. Je l'ai donc photocopié.
Le sénateur LeBreton: Il s'agit d'un document qui nous a été apporté le premier soir par...
Le sénateur Jessiman: Il s'agit d'un tableau qui nous a été remis le 11 juillet 1995 par M. Mulder.
Le sénateur LeBreton: Par M. Mulder, le sous-ministre des Transports.
Le sénateur Jessiman: Je vais adresser mes questions à M. Desmarais, mais M. Jolliffe pourra aussi y répondre. À l'époque, je ne savais pas qu'il était à Transports Canada depuis 1988. Et je crois que certaines de ces données ne remontent pas à une date plus reculée.
Nous allons maintenant parler des propositions non sollicitées. Dans le rapport de M. Nixon, et je vous ai remis la page 1 de ce document, je vais me contenter de lire cette partie, et il s'agit du troisième avant-dernier paragraphe de la page 1. J'ai indiqué qu'il s'agissait de la page 1. Ma copie n'était pas paginée. Les autres pages semblent l'être, mais la page 1 n'était pas numérotée, si bien que je me suis permis d'ajouter un "1" du côté droit. Au troisième paragraphe de cette page, on lit:
En septembre 1989, ce groupe présentait au gouvernement du Canada, à l'égard de la privatisation des aérogares 1 et 2, une proposition spontanée qui fut rejetée.
Puis, à la page 8 du rapport de M. Nixon, on lit:
Comme la demande de propositions ne comportait qu'une seule phase et obligeait leurs auteurs à entreprendre la définition de projet et à présenter leurs offres, le tout dans un délai de 90 jours, l'un d'entre eux s'est trouvé fortement avantagé, à mon avis, du fait qu'il avait déjà fait une proposition pour la privatisation et l'aménagement des aérogares 1 et 2. Les autres sociétés de gestion et de construction qui n'avaient pas trempé dans le magouillage antérieur à la demande de propositions n'avaient aucune chance de faire assez vite pour préparer leur offre dans le bref délai imparti. Comme les projets de construction et d'aménagement se faisaient rares, d'autres sociétés auraient dû être invitées à présenter des propositions et se voir accorder à cette fin un délai raisonnable.
Si on lit le rapport Nixon, on se rend compte que l'auteur n'affirme pas de façon explicite qu'il s'agit de la seule proposition non sollicitée, mais c'est la seule à laquelle il fait référence. Puis, à la page 8, il fait allusion à une proposition. À la lecture du document, j'ai donc tenu pour acquis qu'il n'y en avait qu'une.
Je vous ai également remis un document qui nous a été transmis par M. Mulder le 11 juillet 1995. En septembre 1989, on retrouve la proposition visant à privatiser les aérogares 1 et 2 formulée par Paxport. Puis, pour la période qui s'étend de juillet à octobre 1990, on lit:
Proposition non sollicitée...
On n'écrit pas "propositions" au pluriel. Je vais donc vous poser une question à ce propos dans l'espoir que vous pourrez y répondre.
...visant à moderniser les aérogares 1 et 2 reçue de: Canadian Airports Ltd., Airport Development Corporation.
Ma première question est la suivante: s'agit-il d'une proposition formulée par deux sociétés ou s'agit-il, eu égard à ce tableau, d'une proposition émanant de chacune des sociétés? Le savez-vous?
M. Desmarais: Il s'agit d'une proposition émanant de chacune des compagnies.
Le sénateur Jessiman: Et maintenant, je dois poser la question suivante: savez-vous qui a préparé le document?
M. Desmarais: Monsieur, je crois qu'il a été préparé par mon personnel.
Le sénateur Jessiman: Votre personnel. Eh bien, cela n'a pas d'importance, mais j'ai en main cette information, et cela n'est pas tout à fait juste. Je voulais simplement voir si vous pouviez confirmer ou non. Si on examine Canadian Airports, et, comme vous le savez, dans notre reliure, j'aurais dû distribuer des copies, je m'excuse de ne pas l'avoir fait, mais dans les reliures, nous avons aussi, au tout début, la liste des conglomérats. Je m'excuse, j'aurais dû faire des copies. Onglet C. On y fait référence à Canadian Airports. On ne dit pas "Limited", mais il s'agit de la même société...
Le sénateur Hervieux-Payette: Quel numéro?
Le sénateur Jessiman: Il s'agit de l'onglet C de notre cahier d'information, le cahier bleu que vous avez en main. Je suis désolé, j'aurais dû faire des copies, mais j'ai oublié.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne tirez aucune conclusion.
Le sénateur Jessiman: Je voulais simplement aider le sénateur, et je veux simplement que le sénateur Hervieux-Payette comprenne pourquoi nous voulons qu'elle nous donne ses références pour que nous puissions suivre. Voilà qui nous facilite beaucoup la tâche.
Quoi qu'il en soit, Canadian Airports est la société qui, à un moment donné, faisait partie de cette proposition. Il s'agissait du consortium, et vous nous avez donné la ventilation, et British Airports Authority.
M. Desmarais: C'est juste.
Le sénateur Jessiman: D'accord? Et, après un certain temps, ils se sont retirés?
M. Desmarais: Ils se sont retirés, je crois, quelque part en 1992.
Le sénateur Jessiman: Bien. D'accord. Maintenant...
Le sénateur Gigantès: Ils n'ont pas présenté de nouvelle proposition, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Non.
Le sénateur Jessiman: Non, ils n'ont pas présenté de nouvelle proposition. Vous avez tout à fait raison.
Le sénateur Gigantès: La déclaration selon laquelle la proposition initiale pour les aérogares 1 et 2 conférait à cette société un grand avantage au cours de cette période de 90 jours, puisque l'autre société n'a pas présenté de nouvelle proposition...
Le sénateur Jessiman: S'agit-il d'une preuve, ou d'une chose que vous aimeriez qu'ils... en avez-vous la preuve?
Le sénateur Gigantès: C'est ce que M. Nixon affirme.
Le sénateur Jessiman: Oh, oh!
Le président: Ne parlons pas tous en même temps. Les sténotypistes ne parviennent pas à tout bien saisir. Si vous voulez intervenir, levez la main et demandez à poser une question supplémentaire, mais n'intervenez pas entre les témoins.
Le sénateur Jessiman: Monsieur le président, c'est à mon tour d'interroger les témoins.
Le président: Je le sais.
Le sénateur Jessiman: S'il vous plaît, pour l'amour du ciel!
Le sénateur Gigantès: Vous intervenez tout le temps.
Le sénateur Jessiman: Pour l'amour du ciel, je vous en prie. Très bien. Nous nous entendons là-dessus. Avec l'aide du sénateur, il affirme qu'ils n'ont pas... ils faisaient partie et ils... vous avez aussi admis qu'ils ont fini par ne pas présenter de proposition.
Ensuite vient Airport Development Corporation. Bon, celle-là n'est pas mentionnée dans le consortium qu'on nous a donné à la page... mais vous savez comme moi, et maintenant comme tout le monde, que Airport Development Corporation appartenait à Huang & Danczkzay. N'est-ce pas?
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Jessiman: Je dois quand même revenir à la première, parce que vous dites dans ce tableau qu'elle a été présentée en juillet 1989, et, selon les informations que j'ai reçues, elle a été présentée le 3 mai 1990, et vous dites juillet 1990.
M. Desmarais: C'est exact. Je n'ai pas dit particulièrement qu'elle avait été reçue ici. Elle a été examinée ici. Lorsque nous avons consulté nos dossiers, c'est là que nous l'avons trouvée, dans un dossier du mois de juillet.
Le sénateur Jessiman: Je vois..
M. Desmarais: On l'avait probablement reçue un peu plus tôt
Le sénateur Jessiman: C'était en mai. La société Canadian Airports, qui avait d'abord présenté une proposition, s'est retirée. Il s'agit d'une société dont faisait partie British Airports Authority.
Ensuite, la société Airport Development Corporation, qui appartient à Huang & Danczkzay et dont la soumission pour l'aérogare 3 avait été retenue, a ensuite présenté une soumission non sollicitée, et on m'a dit... vous dites ici dans le tableau que c'était encore en juillet, entre juillet et octobre 1990. On m'a dit que la soumission avait d'abord été présentée au ministre Martin le 10 mars 1989, qu'elle a été acheminée à Transports Canada le 29 mars 1989, puis qu'elle a été envoyée au ministre Bouchard le 19 avril 1989.
M. Desmarais: Encore une fois, je m'en tiendrai à ma déclaration antérieure, selon laquelle elle s'est probablement retrouvée dans un dossier du mois de juillet à notre bureau, mais qu'elle pourrait avoir été reçue plus tôt.
Le sénateur Jessiman: Si vous pensez que l'information que je vous donne est erronée, qu'elle m'a été fournie par d'autres et, j'aimerais simplement... même le tableau, voyez-vous, lorsqu'on regarde le tableau, la première chose qu'on voit dans ce tableau, 1989, après l'annonce selon laquelle vous aménageriez de nouvelles pistes et entreprendriez des travaux de restauration, il y a une proposition non sollicitée de privatisation de l'aérogare 1, présentée par Paxport, alors que si nous l'avions eu un peu plus tôt, nous aurions vu en mars 1989 que cette autre était là. Je voulais simplement vous le faire remarquer.
Le sénateur LeBreton: Y avait-il seulement ces trois-là?
Le sénateur Jessiman: S'il vous plaît, laissez-moi parler. C'est mon tour.
Le sénateur LeBreton: Je pensais à voix haute.
Le sénateur Jessiman: Non, il y en a d'autres.
Le sénateur LeBreton: Je vois.
On me dit (corrigez-moi si je me trompe) qu'une quatrième proposition a été présentée par Air Canada le 15 mai 1989; elle a été présentée à l'honorable Doug Lewis par Pierre Jeanniot, président et chef de la direction d'Air Canada. Pourriez-vous me dire si c'est exact?
M. Desmarais: Je ne me rappelle pas, monsieur.
M. Jolliffe: Je me rappelle certainement cette proposition, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Et on m'a dit (j'aimerais que vous le confirmiez ou que vous fassiez d'autres commentaires), que c'était pour un bail de 80 ans et une option de renouvellement. Est-ce exact?
M. Jolliffe: Quatre-vingts ans?
Le sénateur Jessiman: C'est ce qu'on m'a dit. Il s'agit de propositions non sollicitées, et on m'a dit que c'était le cas.
M. Jolliffe: Je ne me rappelle pas cette partie-là, mais je me rappelle très bien que la période du bail était substantielle. Peut-être 60 ans, mais pas 80.
Le sénateur Jessiman: Une cinquième proposition a été présentée le 1er juin 1990 à l'honorable Doug Lewis par Pierre Jeanniot, d'Air Canada, et il s'agissait d'un plan de Paxport pour l'intégration des aérogares 1 et 2. Et ma question est celle-ci: est-ce exact?
M. Jolliffe: C'était un plan qui faisait appel à Paxport, ou qui appuyait Paxport.
Le sénateur Jessiman: Oui. On m'a dit que cette proposition a été présentée par Air Canada le 1er juin 1990, par Pierre Jeanniot, à l'honorable Doug Lewis. Il s'agit d'un plan de Paxport pour intégrer les aérogares 1 et 2. Je peux vous donner le numéro du document. Je présume qu'il vient du dossier du tribunal, mais je n'en suis pas sûr.
M. Desmarais: Je ne me souviens pas d'emblée de ce document non plus. Il s'agissait peut-être de la lettre dont nous parlions plus tôt, dans laquelle Air Canada soutenait la proposition de Paxport.
Le sénateur Jessiman: C'est ce que je pensais aussi, mais l'argument que je veux faire valoir est certes qu'ils... ce faisant, nous avons montré qu'il y avait cinq offres non sollicitées.
M. Desmarais: Oui. Si nous revenons au 1er juin 1990, il y avait aussi à ce moment une offre qui n'est pas non plus mentionnée ici, après celle qu'il avait présentée en 1989, il avait envoyé une deuxième proposition non sollicitée, et...
Le sénateur Jessiman: Excusez-moi, je n'ai pas...
M. Desmarais: Paxport a bel et bien présenté une deuxième proposition non sollicitée en 1990, et c'est probablement celle à laquelle Air Canada fait allusion dans sa lettre du 1er juin 1990.
Le sénateur Jessiman: D'accord. Alors nous en aurions six.
M. Desmarais: Cela ferait la cinquième, avec le soutien d'Air Canada à son égard.
Le sénateur Jessiman: Je vois. Très bien. À présent...
M. Jolliffe: Sénateur, permettez-moi un autre éclaircissement. Je pense que votre commentaire selon lequel, en septembre 1989, le groupe Matthews, je pense qu'il s'agissait de la proposition de Paxport Management Inc., distincte de celle de Matthews Group Limited, mais je pense qu'il nous faudrait vérifier cela. Cela pourrait être une légère erreur d'identification de la proposition, de la proposition non sollicitée de septembre 1989. Je ne me rappelle pas en avoir vu une de Matthews Group Limited.
Le sénateur Kirby: Je pense que vous avez raison.
M. Jolliffe: Je pense que c'était Paxport Management Inc.
Le sénateur Jessiman: Vous dites que celle de 1989 a été présentée par Paxport quoi?
Le sénateur LeBreton: Management Inc.
M. Jolliffe: Ce qui serait conforme aux documents que vous avez ici.
Le sénateur Jessiman: Sur le document qu'on nous a remis, on voit simplement Paxport Management.
Le sénateur LeBreton: Ainsi, en d'autres termes, le rapport Nixon ne l'a pas bien identifié.
M. Jolliffe: Sénateur, j'essaie simplement d'établir un lien avec ce document. En fait, ça confirmerait la déclaration que j'ai ici, selon laquelle il s'agissait de celle de Paxport. Je pense que c'est celle à laquelle faisait allusion M. Nixon.
Le sénateur Jessiman: D'accord. Il pense que c'est l'offre non sollicitée de septembre 1989.
M. Jolliffe: Oui.
Le sénateur Jessiman: En réalité, je pensais moi-même que c'était ce à quoi il faisait allusion de toute façon, alors je n'ai pas... bon; est-il vrai que Airport Terminals Development Group Inc., connu sous le sigle d'ATDG, a bel et bien présenté une proposition? C'est celle du groupe Claridge.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Jessiman: Très bien. N'est-il pas vrai qu'il s'agissait d'une réaction à la proposition de Morrison Hersfield Group, MHG?
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Lynch-Staunton: Cette proposition n'était pas admissible.
M. Jolliffe: Il y a eu une réponse.
Le sénateur Jessiman: Je crois comprendre qu'elle n'était pas admissible parce que le million de dollars n'y était pas. N'est-ce pas? Ils ne satisfaisaient pas au critère de financement. Mais ils faisaient partie du...
M. Jolliffe: Ils ont répondu.
Le sénateur Jessiman: Ce sont deux soumissionnaires dont la proposition n'a pas été sollicitée.
M. Desmarais: N'oubliez pas, sénateur, qu'à ce moment, le groupe Claridge était la société en commandite T3, qui a elle-même formé Airport Development Corporation à l'époque; c'est donc un groupe qui a succédé à l'autre dans l'échelle organisationnelle.
Le sénateur Jessiman: Mais ils ne faisaient pas partie de...
M. Desmarais: Ils ne faisaient pas partie de la proposition non sollicitée de Huang & Danczkzay, mais c'est à eux qu'on aurait confié le travail qui y était inscrit.
Le sénateur Jessiman: Plus tard.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Jessiman: Très bien. À présent, savez-vous si toutes ces propositions ont été rendues publiques? Peut-être que je devrais... c'est ce que je comprends, et peut-être que vous pouvez me corriger, mais c'est encore une fois quelque chose que quelqu'un m'a dit, à savoir que Paxport et Canadian Airports, entité qui comprenait British Airports Authority et qui s'est retirée, ont vu leur proposition être publiée, alors que les autres ne l'ont pas été.
M. Desmarais: Je crois que Paxport et Canadian Airports ont rendu les leur publiques à divers endroits, mais pas... disons qu'ils n'ont pas fait un gros battage publicitaire dans la presse.
Le sénateur Jessiman: Mais les autres ne l'ont pas fait?
Le sénateur Jessiman: Airport Development Corporation était une société d'un genre très privé qui ne s'est pas affichée auprès de la presse.
Le sénateur Jessiman: Messieurs, nous vous parlerons demain de vos discussions avec M. Nixon, de votre réunion et de vos échanges de rapports, mais dans les discussions que vous avez eues et dans les documents que vous avez consultés, avez-vous pu voir si toutes les informations que je viens de vous donner à propos des propositions non sollicitées ont été transmises à M. Nixon?
M. Desmarais: Je ne pourrais vous le dire comme ça. Je crois qu'il m'a demandé personnellement des informations sur la proposition non sollicitée en septembre 1989, et j'ai répondu à cette proposition non sollicitée. On ne m'a pas posé de question à propos des autres.
Le sénateur Jessiman: Il ne vous a pas demandé s'il y en avait une autre?
M. Desmarais: Non.
Le sénateur Jessiman: Alors il vous a demandé si Paxport avait présenté une offre non sollicitée, et il ne vous a pas demandé s'il y en avait d'autres et vous ne lui en avez pas touché mot.
M. Desmarais: Non.
Le sénateur Jessiman: L'un ou l'autre de vous deux a-t-il posé des questions à propos des propositions non sollicitées?
M. Jolliffe: Je n'ai jamais parlé à M. Nixon.
M. Rowat: On ne me l'a pas demandé.
Le sénateur Jessiman: Monsieur le président, 20 minutes, ce n'est pas mal.
Le sénateur Lynch-Staunton: Combien de propositions non sollicitées ont été présentées?
Le sénateur Jessiman: Cinq.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et M. Nixon disait qu'il y en avait...?
Le sénateur Jessiman: Une. Parce qu'on ne lui avait parlé que de celle-là.
Le sénateur LeBreton: J'aimerais poser une question supplémentaire au sénateur Jessiman. Qu'arrive-t-il aux propositions non sollicitées lorsqu'elles arrivent au ministère? Un processus a-t-il été établi pour leur traitement, y a-t-il un bureau pour les propositions non sollicitées? Qu'en fait-on?
M. Desmarais: Ces propositions auraient été envoyées à M. Berigan, qui était chargé du dossier des aérogares 1 et 2 à Ottawa à l'époque. Elles auraient été passées en revue, puis on aurait ensuite préparé une réponse. Elles auraient été envoyées au ministre ou au sous-ministre à l'époque, et ce dernier aurait envoyé une lettre de refus polie.
Dans certains cas, si une proposition non sollicitée nous est envoyée, par exemple pour un projet de recherche, ce qui se produit assez périodiquement, le dossier est étudié et peut, dans certains cas, être financé, selon les priorités ministérielles.
Dans le cas qui nous occupe, le ministère avait sagement décidé que les propositions non sollicitées ne seraient pas étudiées plus avant.
Le sénateur LeBreton: C'est donc dire que pour beaucoup de projets gouvernementaux différents, il arrive assez fréquemment que des propositions non sollicitées soient présentées.
M. Desmarais: Oui, assez souvent.
Le président: Avant que je ne donne la parole au sénateur Kirby, M. Nelligan souhaite poser une question.
M. Nelligan: Pour faire suite à cette question, dans les documents que nous avons reçus récemment, il semblerait que, à l'étape de préparation de la DDP qui a en bout de ligne été publiée, votre personnel ait utilisé des documents que vous aviez reçus dans des propositions non sollicitées afin d'examiner les divers facteurs que vous pourriez souhaiter inclure dans votre DDP; est-ce exact?
M. Desmarais: Je ne crois pas que cela le soit, mais je communiquerai avec M. Power, qui a rédigé la DDP; je crois qu'il a déjà dit dans le passé ne pas avoir utilisé quoi que ce soit des propositions non sollicitées pour rédiger sa DDP, et je m'en tiens à sa déclaration.
M. Nelligan: Lorsque nous suspendrons la séance pour le souper, je vous montrerai le document. Je viens tout juste de me rappeler qu'on y fait allusion à l'utilisation des documents à des fins de recherche. Nous passerons la question en revue durant l'heure du souper.
M. Desmarais: Merci.
Le président: Sénateur Kirby, direz-vous qu'il est 17 h 30, puis nous reprendrons comme si...
Le sénateur Kirby: Je suis heureux de dire qu'il est 17 h 30, monsieur le président, dès maintenant.
Le président: Dès maintenant?
Le sénateur Kirby: D'après ce que j'ai compris, je pensais que ce que vous disiez, c'était que plutôt que de commencer une série de questions avec cinq minutes qui restent, est-ce que je dirais qu'il est 17 h 30. Je suis heureux de dire qu'il est 17 h 30, et que nous recommencerons à 19 h.
Le sénateur Gigantès: Une question rapide. Je vous demanderais, sénateur, en quoi votre série de questions est pertinente?
Le sénateur Jessiman: Vous me demandez cela à moi?
Le sénateur Gigantès: Oui.
Le sénateur Jessiman: Comme je l'ai dit au départ, d'après ce que j'ai lu dans le rapport de M. Nixon, je l'ai interprété comme s'il y avait... qu'il avait présumé qu'il n'y avait eu qu'une proposition non sollicitée. Il disait... et que c'était la seule dont il avait eu connaissance, la seule au sujet de laquelle il s'est informé, alors c'est la seule information qu'il a eue, et il est venu à la conclusion, à tort, selon moi, que puisqu'ils étaient les seuls à avoir présenté une proposition non sollicitée, ils avaient un énorme avantage sur tous les autres.
Eh bien, ceux qui ont présenté une proposition en bonne et due forme ont fini par le faire, et ceux qui ont présenté une proposition non sollicitée n'en ont pas présenté une. D'autres n'avaient pas présenté de proposition. Certains se sont retirés. Mais l'argument, c'est qu'il y en avait cinq au total. S'il avait su cela, en serait-il venu à cette conclusion? J'espère que non.
Le sénateur Gigantès: Merci de votre réponse.
Parmi ceux qui ont présenté des propositions non sollicitées, combien ont répondu à la demande de propositions?
M. Jolliffe: Trois entreprises ont répondu à la demande de propositions, dont une seule avait présenté une proposition non sollicitée, à savoir Paxport.
Le sénateur Gigantès: Ainsi, trois sociétés ont répondu à la demande de propositions, et une seule...
M. Jolliffe: Je pense que nous disons tous deux la même chose, sauf que Airport Development Corporation, qui a été reprise par ATDG, était au sommet de la hiérarchie, ce qui fait que leur connaissance et les documents qui proviennent de cette source se sont retrouvés dans la proposition d'ATDG. Ainsi, on pourrait dire que deux des propositions non sollicitées ont bel et bien fini par se retrouver dans les propositions qui ont été présentées à la suite de la DDP.
M. Desmarais: Je veux simplement souligner que le groupe Paxport qui a présenté la proposition non sollicitée en septembre 1989 n'était pas le groupe Paxport qui a présenté la soumission. Il s'agit d'un consortium différent. Le seul groupe présent aux deux occasions était le groupe Matthews.
Le sénateur Gigantès: M. Matthews n'était-il pas en relation avec Paxport?
M. Desmarais: Oui, les deux propositions, mais...
Le sénateur Gigantès: D'accord. Un instant. Si je comprends ce que vous dites, cette affaire du nombre de sociétés qui ont présenté une proposition non sollicitée n'a pas une grande pertinence puisque M. Nixon dit que, en réalité, une seule de celles qui ont présenté une proposition avait présenté une proposition non sollicitée auparavant et avait de ce fait eu du temps pour se préparer et jouissait d'une avance sur les autres.
M. Desmarais: C'est l'opinion de M. Nixon. Je ne peux faire de commentaire là-dessus.
Le sénateur Gigantès: Vous ne pouvez faire de commentaire là-dessus, mais les autres qui avaient présenté une proposition avaient-ils tiré avantage d'avoir présenté une proposition non sollicitée auparavant?
M. Desmarais: Nous croyons que Airports Terminal Development Group, qui a succédé à Airport Development Corporation, laquelle était contrôlée par des personnes difficiles, avait quelque peu profité du fait qu'elle avait présenté une proposition non sollicitée.
Le sénateur Gigantès: Contrôlée par des gens différents.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Gigantès: Ainsi, ce n'était pas la même entreprise.
M. Desmarais: C'est exact. Mais, comme je viens tout juste de le dire, le groupe Paxport qui a présenté la proposition non sollicitée et le groupe Paxport qui a présenté une soumission en bonne et due forme ne sont pas nécessairement contrôlés par la même personne.
Le sénateur Gigantès: Mais M. Matthews...
M. Desmarais: Est relié aux deux, tout comme Lockheed et ADC, qui est Airport Development Corporation, et ATDG, qui est Airport Terminal Development Group, mais qui n'était pas actionnaire majoritaire.
Le sénateur Gigantès: Merci.
M. Nelligan: M. Jolliffe a le document auquel j'ai fait allusion.
M. Desmarais: Merci. J'y jetterai un coup d'oeil et je vous en parlerai après le souper.
M. Nelligan: Consultez-le pendant l'heure du souper.
Le président: Nous allons suspendre les travaux jusqu'à 19 h.
Le comité suspend ses travaux jusqu'à 19 h.
Ottawa, le mardi 15 août 1995
Le comité spécial du Sénat chargé d'étudier les accords visant l'aéroport international Pearson se réunit aujourd'hui, à 19 h, pour poursuivre l'examen de toutes les questions relatives aux politiques et aux négociations ayant abouti à la conclusion des accords touchant la mise en valeur et l'exploitation des aérogares 1 et 2 à l'aéroport international Lester B. Pearson et les circonstances entourant leur annulation, et pour faire rapport à ce sujet.
Le sénateur Finlay MacDonald (président) occupe le fauteuil.
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît.
Un ou deux messages rapides. J'aimerais aviser les membres du comité que, désormais, les réunions commenceront à 9 h. Alors partout où c'est inscrit 9 h 30, comme les mercredis et jeudis, ce sera 9 h. Je pense que nous nous étions entendus là-dessus.
Le sénateur Kirby: Parfait.
Le président: C'est le premier point.
Deuxièmement, je demanderais aux sénateurs de parler dans le micro et de s'en approcher le plus possible lorsqu'ils parlent, parce que les sténographes ont de la difficulté à les entendre.
Je m'excuse d'avoir manifesté un peu d'impatience face aux interventions des sénateurs, mais les sténographes ne peuvent les entendre. Alors si vous voulez bien lever la main, je tenterai de vous permettre de poser des questions supplémentaires, mais je vous prierais, sénateurs, de ne pas faire un débat entre vous. Les témoins ici présents peuvent répondre aux questions. Alors essayons de fonctionner de cette façon. Cela nous permettra d'assouplir un peu le rythme du débat.
Lorsque nous avons suspendu les travaux pour le souper, le sénateur Kirby était sur le point de commencer à interroger les témoins. La période de 30 minutes pour la première série de questions commence à courir. Alors, Michael, à vous la parole.
Le sénateur Kirby: Merci, monsieur le président. Nous aurons plus d'une série de questions, alors tout va bien.
J'aimerais préciser une ou deux choses (j'allais dire ce matin, mais je devrais dire ce soir), après quoi, je passerai à des questions particulières.
Tout d'abord, monsieur Rowat, j'aimerais m'assurer d'avoir bien compris vos commentaires sur la déclaration selon laquelle la procédure régulière a été appliquée à chaque étape ou à peu près. Si je me rappelle bien, votre définition de "procédure régulière" était que les ministres avaient approuvé chaque étape du processus à mesure que celui-ci se déroulait. Est-ce bien là votre définition de "procédure régulière"?
M. William Rowat, sous-ministre, Pêches et Océans Canada: À diverses étapes importantes.
Le sénateur Kirby: Très bien. Par conséquent, votre définition de "procédure régulière" est essentiellement qu'une approbation politique appropriée a été donnée à chaque étape; il ne s'agit pas en réalité d'un commentaire sur la procédure proprement dite. C'est un commentaire sur le fait qu'une approbation politique est donnée à chaque étape, n'est-ce pas? Vous ne donnez pas simplement une évaluation abstraite du processus. Ce que vous dites, c'est que les politiciens ont autorisé chaque étape du processus. Par définition, c'est cela qui fait une procédure régulière.
M. Rowat: Non. Permettez-moi de le formuler de façon différente.
De mon point de vue, et certainement durant le temps où je me suis occupé de ce dossier, on entendait par "procédure régulière" le fait que le ministre donne une orientation sur des questions particulières et que les fonctionnaires suivent ces orientations. Lorsqu'un ministre a l'impression que, pour une raison ou pour une autre, il doit obtenir une directive plus générale de ses collègues, parce qu'il empiète sur les plates-bandes financières de quelqu'un d'autre, ou qu'une question particulièrement délicate sur le plan politique ou régional doit être abordée sur une tribune plus générale, alors la procédure régulière exigera qu'il cherche à obtenir l'accord des ministres sur les enjeux en question.
Le sénateur Kirby: C'est exact, et tant et aussi longtemps que les ministres donnent une orientation, ça constitue une procédure régulière. Il ne s'agit pas d'une évaluation de votre part quant au fait que l'orientation soit bonne ou non.
M. Rowat: C'est exact.
Le sénateur Kirby: Je voulais préciser ce point.
M. Rowat: Exactement.
Le sénateur Kirby: J'aimerais éclaircir une deuxième chose, parce qu'elle m'embête un peu. J'ai compris exactement ce que vous avez dit quant à la raison pour laquelle il n'y avait pas de clause de résiliation, et pourtant cela m'embête, parce que, dans le témoignage que M. Hession a fait devant le comité de la Chambre, je parle des audiences du comité des transports de la Chambre des communes au sujet du projet de loi C-22, fascicule numéro 7, page 7:19, en bas à droite. Je vais vous lire le passage.
Je suis désolé. Je n'ai pas eu le temps de le faire photocopier, mais je serais heureux de le remettre aux sénateurs en face de moi. Je veux simplement vous lire les deux déclarations de M. Hession, qui, vous vous le rappellerez, était sous-ministre des Travaux publics.
Monsieur le président, la pratique normale des instances du gouvernement responsables des marchés de l'État, c'est d'inclure dans leurs contrats des clauses prévoyant la résiliation pour des raisons de commodité en vertu desquelles la Couronne, pour quelque raison que ce soit, peut décider de résilier le contrat.
Il poursuit en disant:
...en temps normal et dans les contrats normaux, il y aurait eu une clause prévoyant la résiliation pour...
Si je comprends ce que vous avez dit cet après-midi, je pense que vous avez bien précisé qu'une disposition de résiliation n'était habituellement pas incluse dans un bail. Pourtant, lorsqu'on lit les commentaires de M. Hession, il semble qu'il ne faisait pas allusion à ce contrat précisément. Il parlait des jours où il était sous-ministre des Travaux publics.
Le président: Approvisionnements et Services.
Le sénateur Kirby: Approvisionnements et services. Excusez-moi, Monsieur le président. Une clause de résiliation est une disposition courante de tout contrat. Je me demande si vous pourriez nous expliquer pourquoi vos opinions divergent sur ce point particulier?
M. Rowat: Ce que je peux dire, c'est que selon l'avis que nous avions obtenu à l'époque, en vertu des ententes de location, parce qu'il s'agissait d'une situation particulière en ce qui touche le locateur et le prêteur hypothécaire, cela ne se faisait habituellement pas pour la location d'une propriété.
D'après moi, M. Hession faisait allusion aux contrats habituellement conclus par le gouvernement pour l'achat de biens et de services. Si ce n'est pas le cas, je devrais probablement demander l'avis des experts du Conseil du Trésor ou d'ailleurs. John pourrait vous donner une réponse plus complète.
M. John Desmarais, conseiller principal du sous-ministre adjoint, Groupe des aéroports: J'écoute sa description, et je vois qu'il utilise les termes "contrats" et "instances responsables des marchés". Les instances responsables des marchés et le pouvoir de location sont deux choses différentes au gouvernement. La location est régie par le Bureau de gestion des biens immobiliers, tandis que les grandes acquisitions sont habituellement régies par le ministère des Approvisionnements et Services. Ce sont les importants contrats d'approvisionnements qui contiennent en temps normal les dispositions de résiliation, de résiliation pour des raisons de commodité, et pas les dispositions de location, qui sont faites sous l'autorité du Bureau de gestion des biens immobiliers.
Le sénateur Kirby: Pourtant, monsieur Rowat, lorsque nous avons parlé la semaine dernière des directives écrites que vous avez demandées avant de signer le contrat quelque 18 jours avant l'élection, peut-on savoir pourquoi vous avez demandé ces directives écrites? Je veux revenir sur le sujet en parlant de la clause de résiliation, mais j'aimerais savoir pourquoi vous avez demandé ces directives écrites ou, en fait, à qui vous les avez demandées?
M. Rowat: Y a-t-il un lien avec la question précédente?
Le sénateur Kirby: Il y en aura un dans un instant, parce que je veux revenir à la question de la clause de résiliation. Tout d'abord, avez-vous vraiment demandé à Mme Bourgon de vous donner des directives explicites par écrit?
M. Rowat: Oui. Comme je l'ai déjà dit dans un témoignage antérieur, j'ai parlé à Mme Bourgon et je lui ai demandé des directives explicites.
Le sénateur Kirby: Par écrit, manifestement.
M. Rowat: Pardon?
Le sénateur Kirby: Vous avez manifestement demandé qu'elle vous les donne par écrit.
M. Rowat: Oui. Je lui ai dit que je préférerais qu'elles me soient données par écrit.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, je crois qu'il s'agissait d'une situation délicate. Tout d'abord, comme vous l'avez dit, c'était durant une élection; ensuite, le dossier était devenu extrêmement litigieux au cours de cette période particulière. Je me rappelle avoir réalisé, tout juste après mon retour de vacances, à quel point la question était devenue litigieuse en ces premiers jours du mois d'octobre.
Le sénateur Kirby: Alors vous lui avez demandé des directives explicites.
M. Rowat: Oui. Je lui ai demandé... je lui ai dit que je considérais qu'il s'agissait d'une situation très délicate, et elle m'a dit que c'était une situation où nous devrions chercher à obtenir des directives très explicites. J'étais d'accord avec elle. Elle a par la suite parlé à Glen Shortliffe, alors greffier du Conseil privé, et elle a conclu que... je m'aventure en terrain inconnu. Vous devriez lui poser la question.
Le sénateur Kirby: Très bien. Comme vous avez dit, je crois, qu'il s'agissait d'une situation controversée (je crois que vous avez utilisé le mot "délicate", il y a un instant), n'avez-vous pas envisagé à un certain moment de prévoir une clause de résiliation quelconque puisqu'il semble qu'il subsistait quand même un certain doute quant à ce qui arriverait au contrat après l'élection?
M. Rowat: Non. Non je ne l'ai pas fait.
Le sénateur Kirby: Vous n'avez jamais parlé de le faire?
M. Rowat: Non.
Le sénateur Kirby: Vous n'en avez absolument jamais parlé dans une réunion avec des représentants officiels?
M. Rowat: Durant cette période?
Le sénateur Kirby: Oui, ou durant la période, disons, durant les trois semaines qui ont précédé la signature du contrat, environ?
M. Rowat: Non. À ce moment-là, le dossier n'était pas si litigieux, mais fin septembre ou début octobre, il l'était devenu très manifestement.
Le sénateur Kirby: Avant que vous y mettiez votre signature?
M. Rowat: Avant, oui, d'accord, je vais revenir en arrière.
Vous vous rappelez que, dans ma déclaration liminaire, j'ai mentionné que le dimanche, le 3 du mois, l'entente avait été signée par Mergeco ou Pearson Development Corporation. Le lendemain, soit le lundi 4, le ministre Corbeil l'a signée, et les documents ont été déposés en mains tierces, de façon que, le 7, je puisse exécuter les documents.
Le sénateur Kirby: Pourquoi ont-ils été déposés en mains tierces?
M. Rowat: Parce que certaines conditions préalables devaient être confirmées. Par exemple, avaient-ils vraiment... avaient-ils accès aux 61 millions de dollars? La somme avait-elle été déposée en banque? Et ainsi de suite. Alors nous devions, avec les avocats, confirmer que les conditions préalables avaient été remplies avant l'exécution proprement dite des documents.
Le sénateur Kirby: Ainsi, en fait, vous n'avez pas participé à la séance de signature initiale quelque trois ou quatre jours auparavant. C'est le ministre Corbeil qui avait signé, n'est-ce pas?
M. Rowat: Exactement.
Le sénateur Kirby: Puis-je vous poser quelques questions à propos de la création de Mergeco? Je crois savoir que quelqu'un vous a demandé plus tôt aujourd'hui si vous étiez ou non le représentant officiel auquel M. Hession avait fait allusion. Manifestement, ce n'était pas vous, parce que, de un, vous avez affirmé que ce n'était pas vous, et de deux, vous n'étiez pas au ministère des Transports à l'époque, de toute façon. Cette question a été posée aux trois d'entre vous, n'est-ce pas?
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Kirby: Mais vous représentiez le Bureau du Conseil privé dans le dossier. Quand avez-vous entendu parler de Mergeco pour la première fois, ou, à tout le moins, quand avez-vous entendu parler du fait que deux soumissionnaires s'uniraient ou qu'ils considéraient de le faire ou quelque chose d'approchant?
M. Rowat: J'ai discuté du dossier avec Ran Quail à la fin de janvier; je le faisais de temps à autre.
Le sénateur Kirby: Aux fins du compte rendu, Ran Quail était toujours à l'époque sous-ministre associé des Finances, n'est-ce pas?
M. Rowat: Sous-ministre associé des Transports.
Le sénateur Kirby: Des Transports. Excusez-moi.
M. Rowat: Et il était négociateur en chef au dossier à l'époque.
Le sénateur Kirby: C'est vrai.
M. Rowat: De façon générale, mon subalterne et moi communiquions avec lui régulièrement. Je lui ai téléphoné à la fin de janvier, et il m'a informé que les deux sociétés avaient effectivement fusionné et qu'elles avaient l'intention de présenter ensemble une proposition.
Le sénateur Kirby: Alors, si c'était à la fin de janvier... parce que, à en croire de M. Hession, l'appel téléphonique qu'il a reçu lui donnait à penser que les deux parties devaient s'unir quelque trois ou quatre jours après l'annonce, à la mi-décembre. C'est donc un mois plus tard, six semaines, pour être plus précis.
M. Rowat: Exactement.
Le sénateur Kirby: Et, avant ce moment, vous ne saviez pas que cela se produisait?
M. Rowat: Non.
Le sénateur Kirby: Vous n'aviez pas assisté à des discussions où on en parlait?
M. Rowat: Non.
Le sénateur Kirby: Vous êtes fonctionnaire. Si vous aviez été au ministère des Transports (je sais que vous ne l'avez pas été), mais n'auriez-vous pas pensé, avec toute votre expérience de haut fonctionnaire, que la solution, deux ou trois jours après que la meilleure offre globale eut été annoncée, consistait à téléphoner aux deux promoteurs et à leur suggérer de faire équipe? Un haut fonctionnaire qui aurait fait ce genre d'appel téléphonique aurait-il dérogé à la pratique habituelle?
M. Rowat: Je ne sais ce qu'était la situation à l'époque, alors je ne peux vraiment pas faire de commentaire. Je ne sais pas qui était le haut fonctionnaire.
Le sénateur Kirby: Non, je ne sais pas qui était le haut fonctionnaire non plus.
Pouvez-vous imaginer une situation où vous auriez fait cet appel téléphonique si vous aviez été haut fonctionnaire aux Transports, je veux dire si l'on présume que personne ne vous aurait ordonné de le faire?
M. Rowat: Eh bien, c'est un peu une question hypothétique, alors, non, je ne pense pas que je peux vraiment, en ce moment, vous dire comment j'aurais réagi.
Le sénateur Kirby: D'accord.
Monsieur Jolliffe, quand avez-vous appris pour la première fois que les deux parties allaient s'unir?
M. Keith Jolliffe, conseiller financier, projet de commercialisation du système de navigation aérienne, Groupe de l'aviation: Je pense que c'était en janvier, le 18 ou vers cette date-là, que M. Ran Quail m'a parlé d'une réunion à 8 heures le matin, quelque part à Ottawa. J'ai obtenu le compte rendu de cette réunion, et j'ai inscrit des notes au dossier à cet effet. Nous avions aussi reçu un document qui expliquait la position de Mergeco.
Le sénateur Kirby: De qui avez-vous obtenu ce document?
M. Joliffe: De M. Quail. Il s'agissait d'un document qui expliquait la situation de Mergeco, telle qu'elle était à l'époque, c'est-à-dire embryonnaire; nous devions l'étudier. Il s'agissait d'un document extrêmement confidentiel, qui n'était porté à la connaissance que des personnes qui avaient besoin de savoir.
Le président: Sénateur Kirby, voulez-vous permettre une question supplémentaire?
Le sénateur Kirby: Absolument.
Le sénateur Lynch-Staunton: Pour en revenir à la date du 7 octobre, puis-je demander à M. Rowat qui a déterminé cette date?
Le sénateur Kirby: Désolé. Le 7 octobre était la date à laquelle...
Le sénateur Lynch-Staunton: Le 7 octobre, oui. Vous posiez des questions à ce sujet.
Le sénateur Kirby: Je n'ai pas mentionné de date précise.
Allez-y.
Le sénateur Lynch-Staunton: Qui a déterminé cette date? L'a-t-elle été de façon arbitraire? Comment l'a-t-on établie? Pourquoi le 7 octobre?
M. Rowat: Au mois d'août, et en fait, ça devait être au début du mois d'août, nous avons réalisé que la documentation juridique ne serait pas complètement prête, et nous croyions qu'on ne pourrait pas mettre la dernière main à la documentation officielle avant la fin de septembre. Au calendrier, cela donnait la fin de semaine du 3 octobre... comme je l'ai dit, c'était un dimanche. Je crois que le premier tombait un vendredi. Alors, en d'autres termes, nous avions satisfait à l'objectif que nous nous étions fixé, en qualité de représentants de toutes les parties, pour obtenir toute la documentation. C'est pourquoi lorsque l'annonce de l'accord a été faite, le 30 août, on parlait d'accord de principe. À ce moment-là, les ministres avaient bien précisé dans leur annonce que des documents juridiques devaient encore être établis, mais, fondamentalement, ils ont annoncé qu'un accord avait été conclu.
Le sénateur Lynch-Staunton: De fait, l'accord n'a-t-il pas été réalisé en juillet, tandis que les accords officiels du Conseil du Trésor et le décret du conseil ont été obtenus en août?
M. Rowat: On s'est entendu sur la plupart des grandes lignes au cours du mois de juillet et du début du mois d'août, mais pour les deux parties, et certainement pour Air Canada, ce ne serait pas officiel tant que tout le monde n'aurait pas consulté toutes les parties et obtenu les approbations officielles.
Le sénateur Lynch-Staunton: Mais qu'ont fait le Conseil du Trésor et le conseil privé à fin du mois d'août? Que voulait donc dire le fait qu'ils aient approuvé les ententes?
M. Rowat: À la fin de...
Le sénateur Lynch-Staunton: Je pense que le 27 août (je n'ai pas la date devant moi) le gouvernement, le Conseil du Trésor et le conseil privé se sont tous entendus pour confirmer sinon ratifier officiellement ces ententes au nom du gouvernement du Canada.
M. Rowat: Nous avions besoin d'un décret.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et vous l'avez obtenu.
M. Rowat: Nous l'avons obtenu, et il a été produit en preuve...
Le sénateur Lynch-Staunton: À la fin du mois d'août.
Le sénateur LeBreton: Le 27 août.
Le sénateur Lynch-Staunton: Bon. Ce décret liait-il le gouvernement?
M. Rowat: Il donne du pouvoir au ministre. D'après ce qu'on peut voir au dossier, il donne au ministre le pouvoir de signer le bail foncier et, je crois, les ententes de service de gestion et d'autres choses encore dont je ne me souviens plus.
M. Desmarais: L'acte de vente.
M. Rowat: Et l'acte de vente.
Le sénateur Lynch-Staunton: Alors que s'est-il passé entre... je pense que j'empiète sur votre période. Je suis désolé.
Le sénateur Kirby: Le président me remettra le temps perdu. Il est très généreux.
Allez-y.
Le sénateur Lynch-Staunton: Alors, que s'est-il produit entre la fin du mois d'août et le 7 octobre au sujet de ces contrats? Y avait-il des négociations proprement dites? Les principaux changements ont-ils été apportés? Y a-t-il eu des modifications?
M. Rowat: Les négociations se sont poursuivies sur un certain nombre de fronts. L'entente n'était certes pas conclue à ce moment. Il fallait savoir s'il y avait des changements importants par la suite.
À la fin du mois d'août, le 30 août, le ministre avait toutes les approbations dont il avait besoin, tant le décret que les autres autorisations qui lui permettaient de conclure l'affaire, tant et aussi longtemps qu'il n'y avait pas de modifications substantielles. Du point de vue des représentants officiels qui s'occupaient de la question, il n'y avait pas de changements importants.
Le sénateur Lynch-Staunton: Alors peut-on affirmer qu'entre la fin du mois d'août et le 7 octobre, on n'a apporté que des modifications mineures à l'entente?
M. Rowat: Elles étaient plus que mineures. Un grand nombre d'éléments très importants devaient être négociés, mais nous connaissions essentiellement les modalités qui...
Le sénateur Lynch-Staunton: Elles étaient conformes aux lignes directrices qui avaient été données?
M. Rowat: Elles l'étaient.
M. Desmarais: Au cours du mois de septembre, nous avons mis la dernière main à l'entente de développement et à l'entente de gestion et d'exploitation, qui étaient les deux principales ententes.
Le Conseil du Trésor avait établi une feuille de modalités à leur égard, et nous n'y avons pas dérogé, mais il fallait établir le libellé des contrats et parachever ces ententes. Il y avait donc de grosses tâches à mener à bien jusqu'au mois de septembre.
Le sénateur LeBreton: Pour être plus précis, la date du 7 octobre avait dont été établie non pas par le gouvernement ou par son aile politique proprement dite, mais par les parties à l'entente, qui voulaient en faire la date où toute la documentation aurait été prête?
M. Rowat: Tous les documents légaux devaient être finalisés pour la fin du mois de septembre ou le début du mois d'octobre; c'était là notre estimation, et c'est le moment auquel les documents ont été prêts.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et toute la nervosité... (c'est ma dernière question, sénateur Kirby, je vous remercie de votre patience) toute la nervosité à propos de la signature et du respect de cette échéance était le fait de hauts fonctionnaires. Mme Campbell ou le ministre Corbeil, ou quiconque du côté politique, ne faisait pas de pression pour s'assurer que les contrats seraient signés?
M. Rowat: C'est exact.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et Mme Campbell et son Cabinet n'ont jamais tenté de modifier le processus après l'approbation du Conseil du Trésor le 27 août?
M. Rowat: C'est exact.
Quant à la remarque que vous avez faite plus tôt, la demande d'orientation émanait de moi-même et du sous-ministre de l'époque. C'était...
Le sénateur Lynch-Staunton: Mme Bourgon et M. Shortliffe l'ont informée que le gouvernement s'était engagé à apposer sa signature à un certain moment, et ils voulaient qu'on leur confirme que cette obligation serait respectée.
M. Rowat: Oui, ils voulaient savoir si je retirerais les documents placés entre les mains d'un tiers.
Le sénateur Gigantès: Mme Bourgon était sous-ministre des Transports à l'époque, n'est-ce pas?
M. Rowat: Oui. Elle était sous-ministre des Transports à l'époque. Glen Shortliffe était greffier du Conseil privé, et j'étais sous-ministre associé des Transports.
Le sénateur Lynch-Staunton: Que s'est-il vraiment passé le 7 octobre? Y a-t-il eu signature, y a-t-il eu exécution des documents? Que s'est-il passé le 7 octobre?
M. Rowat: En ce qui touche les documents proprement dits?
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
M. Rowat: Autant que je me rappelle, on a officiellement retiré les documents des mains des tiers et établi de nombreux autres documents quant au respect de certaines conditions préalables. Les 61 millions de dollars...
Le sénateur Lynch-Staunton: Il faut que je fasse attention ici. J'ai dit qu'aucune signature n'avait été apposée. Il y a eu exécution de documents plutôt qu'une autre séance de signature.
M. Rowat: Je pense que, dans l'ensemble, c'est exact.
M. Desmarais: M. Rowat a signé un document pour le retrait du document placé entre les mains des tiers.
Le sénateur Kirby: Il doit avoir signé quelque chose, parce qu'il a reçu des ordres bien précis selon lesquels il pouvait signer.
M. Rowat: Eh bien, il s'agissait d'une exécution des documents, mais je ne suis pas sûr...
M. Desmarais: Et il y avait plusieurs autres documents mineurs.
Le sénateur Lynch-Staunton: Eh bien, nous y reviendrons à un autre moment. Je voulais simplement éclaircir la question.
Le sénateur Kirby: Puis-je revenir aux origines de Mergeco pour un moment?
Une fois que les deux soumissionnaires ont entrepris de former Mergeco, ou tandis qu'ils étaient en train de le faire, lorsque vous avez appris la chose à la fin de janvier, vous avez dit, si je me rappelle vos paroles de ce matin, avoir continué à négocier la proposition de Paxport, d'abord, mais, ensuite, que les propositions de Claridge ou de ATDG étaient encore sur la table.
M. Desmarais: C'est exact. Oui.
Le sénateur Kirby: Aidez-moi un peu. Comment y arrivez-vous? Deux personnes soumissionnent. Les deux décident de s'unir, et l'une des deux ne veut pas retirer sa soumission. Bien sûr, vous avez dit que, en bout de ligne, quelque part au mois de mai, ils ont retiré leur soumission. Pourquoi la proposition de Claridge était-elle toujours sur la table?
M. Desmarais: Je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à cette question. Ils l'ont laissée sur la table. Ils avaient conclu une entente qui les liait. Je crois que l'entente a commencé à les lier au début du mois de février. Il y avait eu une lettre d'intention le 14 janvier, si vous voulez, qui a commencé à lier les parties au début de février. Nous étions encore en train d'étudier la question de la capacité financière. Cette question ne s'est pas résolue avant la mi-mars, comme nous l'avons fait remarquer l'autre jour, je crois. Nous avions également établi une condition selon laquelle s'ils ne retiraient pas leur proposition, nous ne pourrions négocier sérieusement.
Le sénateur Kirby: Pourquoi? Si cela a pris de février à mai, on peut présumer que vous étiez en train de négocier. Pourquoi avez-vous insisté pour que l'offre soit retirée?
M. Desmarais: Parce qu'on ne peut négocier avec une partie qui représente deux intéressés.
Le sénateur Kirby: Mais vous l'avez fait durant trois mois.
M. Desmarais: Non, monsieur, nous n'étions pas en train de négocier. Nous avions prouvé que Paxport possédait la capacité financière voulue et avions préparé le terrain pour les négociations, mais les négociations officielles n'ont pas commencé avant le 5 mars.
Le sénateur Kirby: Et c'est pourquoi vous avez insisté pour que l'offre soit retirée. Pourtant, vous vous étiez attachés au départ à la question de la capacité financière de Paxport uniquement, pas de Mergeco.
M. Desmarais: Nous avons commencé uniquement avec Paxport, oui.
Le sénateur Kirby: Et nous allons parler de cela, parce que nous parlerons par la suite du rapport de Deloitte et Touche, mais lorsque le premier rapport de Deloitte et Touche mentionnait que, seul, Paxport ne pourrait satisfaire aux critères de la capacité financière, vous avez entrepris de voir si Mergeco répondait à ce critère.
M. Desmarais: Je ne suis pas sûr que nous ayons procédé de cette façon. Je pense que nous avons commencé par Paxport, puis, vers la fin de janvier, nous avons rencontré Richardson Greenshields, à Toronto, et avons assisté à un exposé sur la proposition de Paxport. Puis, à ce moment-là, lorsque la lettre d'intention est devenue exécutoire, nous avons commencé par prendre en considération la participation de Mergeco plutôt que la seule participation de Paxport. Par la suite, il y avait d'autres questions à aborder.
Le sénateur Kirby: Veuillez m'expliquer ça une nouvelle fois, monsieur Desmarais. Vous dites que la transition s'est faite plutôt lentement. Ce n'est pas comme si vous aviez cessé d'étudier une proposition pour vous attacher à celle qui regroupait les deux entreprises le lendemain?
M. Desmarais: Non, ce n'est pas ce qu'on a fait.
M. Jolliffe: L'allusion à Richardson Greenshields est incorrecte. En réalité, l'exposé que nous avons eu nous avait été présenté par Wood Gundy et portait sur la proposition de Paxport. La société Wood Gundy nous faisait part de ses impressions sur la question de la capacité financière.
Mergeco est apparu au cours de ce mois de janvier; les partenaires devaient régler un certain nombre de questions. Les documents qu'ils nous ont fournis...
Le sénateur Kirby: Entre eux?
M. Jolliffe: Entre eux. Par exemple, pour que la proposition d'ATDG fonctionne, Lockheed devait être amené à accepter les principes et les intentions de Mergeco. Je crois qu'il leur a fallu un certain temps, et ils ont dû s'échanger plusieurs documents. On avait laissé un certain délai pour que les deux parties mènent à bien la fusion qui menait à Mergeco. Ils avaient déterminé que s'il leur était impossible de régler la question avant ce moment précis, l'intention aurait été considérée nulle, et nous nous serions probablement retrouvés à devoir traiter à nouveau la question de la capacité financière. Il y avait d'autres préoccupations quant à Paxport avant que nous ne commencions à entreprendre les véritables négociations.
Le sénateur Kirby: Qu'est-ce que Paxport a mis sur la table une fois que l'argent et le portefeuille bien garni (le comité a déjà entendu cette expression), de Claridge y ont été mis? En fait, pourquoi aviez-vous besoin de Paxport à ce moment?
Je ne sais pas très bien à qui je pose la question, parce que je ne sais pas qui s'occupait du dossier de Paxport, mais je vois tout le monde regarder M. Desmarais. C'est ça qui est difficile lorsqu'on est à un bout de la table.
M. Desmarais: C'est une question hypothétique, mais pour y répondre très simplement, on voulait que Paxport dépose une proposition.
Le sénateur Kirby: Pardon?
M. Desmarais: Nous voulions que Paxport présente une proposition. Nous voulions leur édifice. Nous voulions leur argent, leur loyer.
Le sénateur Kirby: Et vous n'auriez pu obtenir cette proposition...
M. Desmarais: Par l'entremise d'ATDG.
Le sénateur Kirby: Pourquoi dites-vous que vous n'auriez pu obtenir cette proposition? Quand on commence une série de négociations, cela peut mener n'importe où. Ce que vous dites, c'est que vous avez commencé ici et que vous avez terminé là. Vous pourriez avoir commencé là et avoir terminé là aussi, n'est-ce pas?
M. Desmarais: La proposition qu'ils avaient mise sur la table était très précise.
Le sénateur Kirby: Les deux l'avaient fait.
M. Desmarais: Mais pour l'édifice, par exemple, et la façon dont ils aborderaient ce programme d'aménagement et de construction et ce qu'ils allaient peut-être finir par faire pour vous. Nous aimions mieux la proposition de Paxport. Le score qu'ils ont obtenu dans le processus était beaucoup plus élevé, entre autres. Nous voulions négocier à partir de cette proposition de Paxport.
Le sénateur Kirby: Alors, ce que vous êtes en train de nous dire, c'est que vous vouliez certaines des caractéristiques, je dirais plus physiques que monétaires, de la proposition de Paxport et vouliez certaines des caractéristiques monétaires de l'autre.
M. Desmarais: Je dirais que nous aimions le portefeuille bien garni de Bronfman, mais nous n'étions pas nécessairement prêts à accepter l'offre financière que les Bronfman avaient faite. Nous avons décidé de demeurer avec Paxport.
Le sénateur Kirby: Seriez-vous arrivés exactement au même point si vous aviez commencé par Claridge et entrepris des négociations à partir de là? C'est évidemment de la spéculation, mais j'essaie de bien comprendre ce que vous...
M. Rowat: C'est de la spéculation, et vous auriez négocié à la hausse plutôt qu'à la baisse l'offre initiale qui avait été déposée.
Le sénateur Kirby: Mais, selon l'endroit où vous êtes, ce pourra être soit à la hausse soit à la baisse, n'est-ce pas? Si un côté descend, l'autre monte. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne façon de décrire ce que vous faites.
Monsieur Jolliffe?
M. Jolliffe: Oui, sénateur. Je pense que ce qui est vraiment au centre de la question, c'est la proposition de construction proprement dite qui était mise de l'avant. Manifestement, ATDG avait un avantage puisqu'il y avait intégré l'aérogare 3, mais il était beaucoup plus difficile de bâtir à partir de cette proposition d'aménagement que d'avoir affaire à un concept d'aménagement qui a été évalué et considéré comme nettement supérieur à la proposition d'ATDG. Nous n'aurions pas eu intérêt à perdre cet avantage opérationnel, qui tournait en fait sur la question du maintien en activité de l'aéroport et du pourvoi de l'organisation. Je pense que c'est l'argument que John voulait faire valoir.
Le sénateur Kirby: Puisque vous avez soulevé la question des négociations à la hausse ou à la baisse, qui mènent à une situation différente de la situation de départ, c'est-à-dire la négociation d'une négociation, puis-je vous poser certaines questions précises à propos des résultats par rapport au point de départ? Je vous pose la question parce que certains d'entre vous étaient peut-être ici lorsque nous avons tenté d'amener M. Broadbent à discuter de quelques-unes de ces questions et qu'il nous a demandé de vous poser la question. Je ne sais à qui il faudrait la poser, mais commençons par la question que nous avons débattue avec M. Broadbent.
Tout d'abord, en ce qui concerne la garantie de l'achalandage (qui, encore une fois, pour le compte rendu, portait sur un certain nombre de passagers, c'est-à-dire que le gouvernement ne pouvait prendre de mesures qui auraient détourné les passagers vers un autre aéroport du voisinage), vous en êtes finalement arrivés à un chiffre de 33 millions de dollars; est-ce exact?
M. Rowat: Trente-trois millions de passagers.
Le sénateur Kirby: Excusez-moi, 33 millions de passagers. Est-ce exact?
M. Rowat: Oui.
Le sénateur Kirby: Au cours des négociations, une grande diversité de chiffres ont été mentionnés. Je pense que, à un certain point, on a parlé d'un document dans lequel Paxport... appelons-le Mergeco. Mergeco demandait 39 millions, puis il y a eu un chiffre de 35 millions de passagers...
M. Rowat: C'est exact.
Le sénateur Kirby: Quelle est votre réaction aux commen- taires... je pense que je fais en réalité allusion ici au livre noir de M. Rowat, qui, soit dit en passant... je suis désolé. J'ai reproduit tous les autres documents dont je veux parler, mais celui-là fait quelque 100 pages. Son numéro est le 00302. Dans l'annexe d) de ce document, qui traite des seuils de déroutement et des garanties d'achalandage, on y dit la chose suivante... et je pense que c'est exactement la citation que j'ai utilisée plus tôt. Ce n'était pas dans le même document, mais nous avons déjà vu ce texte.
Le passage du document se lit comme suit:
Une garantie d'achalandage est, de fait, une garantie de monopole qui élimine tout besoin d'offrir un bon service pour conserver les locataires.
Pouvez-vous nous faire part de votre réaction à cela, de la façon dont vous avez établi les garanties passagers et comment vous en êtes arrivés à une situation où, du point de vue des passagers, les passagers pourraient être laissés dans une situation où l'aéroport serait nettement surpeuplé avant que le gouvernement puisse pouvoir dérouter le trafic vers un autre aéroport?
M. Rowat: Je pourrais peut-être commencer à répondre à cette question, et les autres pourront ajouter des commentaires s'ils le souhaitent.
Avant que le dossier ne me soit confié, M. Broadbent avait entrepris une série de négociations, comme vous les avez appelées, qui commençaient, de l'autre côté, à 39 pour diminuer à 35, et qui tenaient à leur intention expresse d'en arriver à un chiffre qui pourrait permettre un financement. Je pense que Transports Canada a dit de son côté qu'on pourrait établir un chiffre plus réaliste pour le projet, probablement de l'ordre de 30 à 32 millions.
Le sénateur Kirby: D'accord. C'est exactement le chiffre cité dans les documents qui ont été déposés lorsque M. Broadbent était ici.
M. Rowat: D'accord.
À mon avis, il y a manifestement un degré de risque lorsqu'on négocie ce genre de chiffres. Je me rappelle que j'étais au BCP à l'époque, et que M. Broadbent avait soulevé toute cette question à propos de la possibilité d'établir un chiffre plus élevé, autour de 35, ou de le maintenir à 30, 32. Je crois qu'après son argumentation, la conclusion générale était que le chiffre de 33 était certes risqué, mais...
Le sénateur Kirby: Risqué pour qui?
M. Rowat: Il pourrait entraîner une certaine congestion, et le gouvernement aurait pu avoir à appliquer la clause de compensation; mais le gouvernement avait décidé qu'il était prêt à assumer cette part de risque dans les circonstances.
Le sénateur Kirby: Êtes-vous d'accord pour dire que la DDP ne contenait aucune clause liée de près ou de loin à une garantie contre le déroutement des passagers?
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Kirby: Ainsi donc, c'est là une chose sur laquelle le gouvernement a reculé pour tenter de parvenir à une solution. Autrement dit, il a donné quelque chose qui n'était pas dans la DDP, qui n'avait été mise sur la table et qui ne faisait pas vraiment partie de la réponse à la proposition.
M. Desmarais: Cela figurait dans la réponse à la proposition.
Le sénateur Kirby: Désolé, ce n'était pas dans la DDP; c'était dans la réponse.
M. Desmarais: C'était dans la réponse fournie par Paxport, qui disait vouloir 39 millions de passagers...
Le sénateur Kirby: C'est de là que vient le chiffre de 39.
Ainsi, dans un certain sens, c'est là une chose que le gouvernement a accordée lorsqu'il... compte tenu du fait que dans toute négociation, il faut donner et reculer, en gagner et en perdre, mais c'est quelque chose que nous avons, dans un certain sens, donné au cours de la négociation; est-ce exact?
M. Desmarais: Si vous voulez, on pourrait dire que c'est quelque chose que nous avons donné, puisque cela ne faisait pas partie de la DDP. Bien des conditions étaient assorties au chiffre des 33 millions, comme vous pouvez le voir, sénateur, si vous lisez l'entente; le chiffre de 33 millions est en réalité de 30,5 parce que nous avions le droit de déplacer en tout temps 1,5 million de passagers... désolé c'est 31,5; cela était toujours dans la fourchette des 30 à 32, alors nous pouvions nous en accommoder. Le chiffre a fluctué à la hausse et à la baisse.
On pouvait aussi changer la compensation prévue pour le secteur 4 de l'aéroport, ce qui fait qu'il n'y aurait pas eu de compensation et qu'aucune garantie n'aurait été donnée quant à ce qu'ils pouvaient faire dans le secteur 4 et dans tout autre secteur.
Autre chose: le gouvernement avait décidé en 1989 d'optimiser l'aéroport Pearson, et cet aménagement était la première étape. La capacité ultime de l'aéroport, avec ses six pistes, devait approcher les 50 millions de passagers.
Le sénateur Kirby: D'accord. Parlez-moi de l'étalement du loyer. D'où cette idée est-elle venue et en quoi consistait-elle, parce qu'il s'agit d'une autre question sur laquelle nous voulions interroger M. Broadbent, et il nous a soigneusement dit de nous adresser à vous.
M. Rowat: Encore une fois, c'est avant que je ne prenne en main le dossier à Transports Canada, mais je pense que le problème durant les négociations entreprises par M. Broadbent, c'était la mesure dans laquelle les sociétés aériennes peuvent se permettre de payer les frais qu'on prévoyait leur demander pour la période de 1994 à 1997. D'après ce que j'ai cru comprendre, on a précisé clairement dans les discussions avec Mergeco et Air Canada que cette perspective allait soulever des difficultés extraordinaires pour Air Canada et, de fait, d'autres sociétés aériennes en raison des problèmes financiers qu'éprouvaient ces sociétés à ce moment-là.
Diverses propositions ont été débattues pour contourner le problème posé par les chiffres élevés au cours des premières années, si j'en juge d'après les informations que j'avais reçues à l'époque. Mergeco avait fait certaines propositions, par exemple l'abandon d'une hausse de loyer pour les sociétés aériennes à ce moment-là si le gouvernement permettait l'imposition de frais de prestation supplémentaires de 1 $.
Le sénateur Kirby: Des frais de prestations supplémentaires?
M. Rowat: Des frais de prestations supplémentaires.
Une autre proposition a vu le jour, au cours des discussions, je crois, selon laquelle on pourrait se préparer à envisager de différer le loyer, de le rembourser, mais sur toute la période de 55 ans; c'est-à-dire différer le loyer pour les trois premières années et rembourser la somme due sur 53 ans.
Alors je crois qu'il y avait ce genre de proposition sur la table. C'était ce genre de discussion. Il fallait répondre à la question suivante: devait-on acculer les sociétés aériennes au pied du mur pour les forcer à payer une hausse des tarifs au cours de ces premières années? Pouvait-on le faire, puisqu'Air Canada avait de fait un bail jusqu'en 1997? Et si on ne le pouvait pas et qu'il était toujours souhaitable d'aller de l'avant avec le projet, le gouvernement était-il prêt à établir une mesure quelconque pour différer le loyer?
Le sénateur Kirby: Mais, monsieur Rowat, je vous écoute et vous dites que, quel que soit le coût du démarrage, il devrait être payé par les sociétés aériennes ou par le gouvernement. Quelle était donc la contribution des promoteurs? Il me semble que toute la stratégie consistait à faire en sorte que n'importe qui ait à payer, sauf les promoteurs. Le dialogue que vous venez... les options que vous venez tout juste de nous exposer ne proposent qu'une alternative: ou bien le gouvernement paye en renonçant au loyer qui aurait été perçu en bout de ligne et, de ce fait, se trouve à faire en réalité une contribution initiale au projet, ou bien les sociétés aériennes payent. N'avait-on pas mis sur la table le montant que les promoteurs devaient verser?
M. Rowat: Eh bien, si vous vous rappelez bien, le promoteur devait avancer des fonds pour participer au projet.
Le sénateur Kirby: Une somme relativement faible, mais je veux bien.
Continuez.
Le sénateur LeBreton: Qu'est-ce qu'une somme relativement faible?
Le sénateur Kirby: Je vais revenir sur la question, parce que les personnes d'en face remettront en question mon jugement.
Allez-y.
M. Rowat: Je pense qu'ils avançaient clairement de l'argent pour que le projet puisse commencer rapidement. On se demandait, comme nous en avons parlé la dernière fois, si le montant devait être de 47 millions ou de 96 millions. Le gouvernement a insisté pour qu'il y ait un investissement de 96 millions de dollars.
Le sénateur Kirby: Vous souvenez-vous du chiffre mentionné dans la première offre de Claridge, dans sa proposition?
M. Rowat: Je ne me rappelle pas.
M. Desmarais: Je pense que c'était environ 150.
Le président: Sénateur Kirby, je vous ai donné 39 minutes parce que vous avez été interrompu, alors pensez-vous pouvoir terminer votre première série?
Le sénateur Kirby: Puis-je terminer cette question et réserver du temps pour une deuxième série?
Alors vous dites que le chiffre était, grosso modo, de 47 pour Paxport, alors que vous vouliez 96. L'offre de Claridge était nettement plus élevée, et pourtant votre opinion était que... me suis-je trompé là-dessus?
M. Desmarais: J'aimerais simplement en revenir à l'étape de la proposition.
Paxport avait présenté une proposition à démarrage rapide qui supposait un investissement de départ légèrement supérieur à 100 millions de dollars, et cela devait permettre de ne remédier qu'aux problèmes urgents d'Air Canada.
Le sénateur Kirby: En présumant qu'Air Canada...
M. Desmarais: Signerait le bail, ferait toutes ces choses merveilleuses, et il n'y avait aucune autre garantie pour une autre construction passé ce point, et ils obtiendraient toutes les recettes des installations dans l'intervalle. Alors cette offre a été rejetée assez rapidement.
Le sénateur Kirby: Elle a été rejetée assez rapidement parce qu'Air Canada ne pouvait payer la hausse.
M. Desmarais: Eh bien, parce que le gouvernement ne l'accepterait pas parce que cela signifierait qu'il devrait accorder un bail pour "X" années sans obtenir de garantie de construction.
Le sénateur Kirby: C'est exact.
M. Desmarais: Alors nous avons donc demandé d'autres propositions d'application rapide, nous avons obtenu des chiffres de 47 et de 96, et 96 était en quelque sorte... soit par l'entremise d'une redevance d'installations passagers, par un étalement du loyer par le gouvernement, ou un chiffre de 47 millions que l'entreprise financerait, puisque le gouvernement souhaitait commencer la construction relativement vite pour créer des emplois, et ils ont fait certains compromis.
Le sénateur Kirby: Monsieur le président, je m'arrêterai ici parce que j'aimerais aborder la question de la redevance d'installations passagers. Je vais laisser ma place à d'autres et y revenir à la prochaine ronde.
Le président: Alors, qui avait levé la main?
Le sénateur LeBreton: Eh bien, vous savez, je pourrais...
Le sénateur Jessiman: J'ai beaucoup de questions à poser.
Le sénateur LeBreton: Nous sommes tous les deux prêts.
Le président: C'est bien. Sénateur LeBreton.
Le sénateur LeBreton: Je reviendrai à mon sujet préféré, l'état des aérogares 1 et 2.
Ma première question renvoie au témoignage que nous avons obtenu sur la nécessité de réaménager les aérogares 1 et 2. M. Shortliffe et d'autres témoins, évidemment, ont parlé de l'état de délabrement de ces aérogares, notamment de leurs garages et stationnements. Pour citer M. Shortliffe, la situation à Pearson est le résultat de 15 années de négligence complaisante. Pour le citer encore, l'aéroport Pearson est dans un état de délabrement total. C'est une disgrâce et, pire encore, il n'est plus fonctionnel.
Les aérogares Pearson étaient une importante partie du problème. De plus, vers 1988 et 1989, on a qualifié l'aérogare 1 de taudis.
Il a poursuivi en décrivant l'état du garage et le stationnement, la technologie dépassée et, selon lui, l'aérogare 2 en était à une étape où les portes d'embarquement sont inadéquates.
Êtes-vous d'accord avec l'évaluation de M. Shortliffe à ce sujet? Était-ce en fait l'état des lieux à la fin des années 80? Est-il si urgent de moderniser les aérogares, particulièrement en ce qui touche la santé et la sécurité?
M. Desmarais: Je pense que je suis d'accord avec ce qu'a dit M. Shortliffe de l'état des aérogares en 1988. Ce n'était plus le cas en 1990, avec l'ouverture de l'aérogare 3. L'exploitation dépassait la capacité dans les deux aérogares, particulièrement l'aérogare 1. On y accueillait environ 10 millions de passagers par année à la fin de 1988 et au début de 1989. Elle avait été conçue pour en recevoir environ 5 millions, alors il fallait de toute urgence y faire des travaux. Il nous fallait déplacer les gens. L'aérogare 3 allait résoudre ce problème.
À ce moment-là, on ne s'entendait pas au ministère quant à l'utilité de réaménager les aérogares ou d'attendre qu'un plan directeur soit élaboré pour l'aéroport et de se contenter de réparer rapidement l'aérogare 1, parce qu'elle en avait drôlement besoin. On y avait accueilli beaucoup trop de gens durant beaucoup trop longtemps.
Oh, oui, la situation n'était pas belle à voir à la fin de l'année 1988. Au début de 1991, je crois, à partir de... j'essaie de me rappeler les années où j'y étais, mais cela ne fait qu'accroître la confusion. À l'ouverture de l'aérogare 3, une grande part des problèmes se sont faits moins pressants.
Oui, le système d'alarme incendie et ainsi de suite fonctionnait mal, selon les codes les plus récents. Il avait été conçu et construit dans les années 70, selon les codes qui existaient à l'époque, et il y était conforme.
Ces problèmes ont été reconnus. Ils l'ont été durant le processus de proposition, et on s'affaire actuellement à les corriger. En fait, je pense même que c'est déjà fait.
Manifestement, notre ministère cherchait à l'époque à fonctionner malgré une pénurie de fonds qui l'empêchait de faire tout ce qu'il aurait fallu pour les quelque 160 aéroports que nous exploitions d'un bout à l'autre du pays qui commençaient à montrer de l'âge et dont le budget était réduit. Alors, on faisait beaucoup de compromis. Les projets de sécurité les plus urgents dans tout le pays recevaient un financement, parfois au détriment de l'esthétique et des services de l'aéroport Pearson. C'est donc là qu'on en était à l'époque.
Le sénateur LeBreton: Ainsi, on a raison de dire que beaucoup de choses étaient urgentes au moment où tout cela a commencé.
On nous a dit que beaucoup d'améliorations s'imposent dans le secteur surpeuplé du transport transfrontalier et, à un moindre degré, au secteur du transport international de l'aérogare 2. Pourriez-vous nous donner des précisions à ce sujet?
M. Desmarais: Le secteur des vols transfrontaliers de l'aérogare 2 pose problème. Il n'a pas la capacité voulue pour répondre aux besoins d'air Canada. Il n'y a pas de carence aux aérogares 1 et 3 à l'heure actuelle.
Je pense que la capacité d'aménagement de ces aérogares et de leurs secteurs transfrontaliers est d'environ 7 millions de passagers, et nous en accueillons environ 6,5 millions par jour. Nous approchons de la limite où on peut observer une certaine congestion, mais seule l'aérogare 2 nous empêche de réellement répondre aux besoins d'Air Canada. Les secteurs des vols internationaux ont tous de la capacité, comme les secteurs des vols intérieurs.
Le sénateur LeBreton: La politique des ciels ouverts y changera-t-elle quelque chose?
M. Desmarais: Elle le pourrait. Je ne veux pas pour l'instant faire de commentaires sur les prévisions actuelles quant aux passagers, pour d'autres raisons bien évidentes. La politique des ciels ouverts peut exacerber le problème, mais elle peut aussi l'amoindrir, par exemple si les vols commencent à partir de, par exemple, Chicago vers Ottawa, ce qui fait que vous n'auriez plus à passer par Toronto pour aller à Chicago, et ainsi de suite. Alors, on ne peut donner de réponse sure.
Le sénateur LeBreton: On parle dans le témoignage du Mod Q ou de la porte 80. Quelle est la situation à cet endroit particulier?
M. Desmarais: Mod Q et la porte 80 sont des secteurs différents. Mod Q est un nouveau secteur international bâti à l'extrémité est de l'aérogare 2. Bon. Voilà que je confonds le nord, le sud, l'est et l'ouest. À vrai dire, je pense que c'est l'extrémité sud, soit l'aérogare 2.
Le sénateur Kirby: L'aérogare est située dans l'axe nord-sud.
M. Desmarais: C'est à l'extrémité sud. L'édifice a été construit fondamentalement à l'époque de WardAir, il devait répondre aux besoins de WardAir et a été subséquemment repris par Air Canada.
La porte 80 est une installation distincte, bâtie, je crois, vers la fin des années 70, le début des années 80. L'immeuble a été bâti par Air Canada, et l'entente signée par Air Canada à l'époque mentionnait que nous rachèterions l'édifice au prix du marché si jamais nous le voulions. Ainsi, l'édifice proprement dit n'est pas visé par un bail. Air Canada en était pleinement propriétaire. C'est le premier secteur où il devait y avoir de la construction dans les deux propositions que nous avons reçues, celle d'ATDG ou de Paxport. Alors, c'était un secteur à problème.
Le sénateur LeBreton: En ce qui concerne Mod Q, l'exploitez-vous présentement avec un certificat temporaire?
M. Desmarais: En ce qui concerne Mod Q, nous avons des problèmes de congestion du côté aérien. L'octroi de certificat à cet endroit au cours des, oh, trois ou quatre dernières années a été temporaire, tandis qu'on recherchait des solutions aux problèmes de circulation au sol et de stationnement dans ce secteur. Je vous dirai maintenant que la proposition de Paxport, dans sa forme acceptée, ne résout pas ce problème.
Le sénateur LeBreton: On a laissé entendre que la diminution du nombre de passagers au cours de la récession (et nous avons entendu souvent ce terme au début des années 90) a remédié quelque peu au problème des aérogares 1 et 2, ce qui fait que la situation n'est pas urgente. J'ai fait le commentaire... comme vous le savez, nous voyons cela souvent au gouvernement. Quand la situation devient moins urgente, les choses sont mises en suspens. Puis, quand la situation redevient urgente, toutes les personnes concernées se retrouvent en face d'un problème. Alors, j'aimerais avoir votre opinion quant à la méthode de planification pour le renouvellement des zones aéroportuaires; est-il logique de déroger à une politique si l'économie connaît un ralentissement?
M. Desmarais: Il n'est pas nécessairement logique de déroger à une politique. Un gouvernement peut parfois trouver logique de la retarder ou d'en retarder l'application pour des raisons de financement et d'autres raisons.
Quant à savoir si l'aérogare 1 ou l'aéroport a une capacité adéquate ou s'il est urgent que sa capacité le devienne, c'est bel et bien un problème dont l'urgence se fait toujours plus grande à mesure qu'approche la fin du siècle. Comme le nombre de passagers augmente... et nous avons connu un ralentissement à ce titre, et il semble maintenant que nous ayons redressé ce ralentissement, si vous voulez. Le nombre de passagers a recommencé à augmenter, et d'ici la fin du siècle, les aérogares de Pearson connaîtront toujours des problèmes. Pour y remédier, il vous faut...
Le sénateur Gigantès: Pouvez-vous m'expliquer ce que vous voulez dire par "redressement du ralentissement"?
M. Desmarais: Excusez-moi, sénateur. Le ralentissement est maintenant chose du passé.
Le sénateur Gigantès: Je vois. D'accord. Parce que le ralentissement aurait pu se faire sentir ailleurs ou s'aggraver. Merci.
M. Desmarais: Désolé. Quant à ces installations, nous recherchions une proposition qui, pour toute reconstruction ou tout aménagement d'une aérogare, comporterait un délai d'environ huit ans. À la fin de ces huit ans, il vous faudrait revoir les limitations de capacité, même avec des aérogares toutes neuves.
M. Rowat: Il vous faut fermer l'aérogare 1.
M. Desmarais: L'autre argument que nous souhaitions faire valoir ici, c'est qu'il vous faut fermer l'aérogare 1 à une étape ou à une autre si vous voulez arriver à ce que les aérogares soient viables sur le plan économique. Une fois cette aérogare fermée, soit environ quatre à six ans après le début d'un programme de construction, nous connaîtrions probablement de graves problèmes de congestion parce qu'il s'est déjà écoulé quatre ans depuis la première présentation de cette proposition.
Le sénateur LeBreton: Pourriez-vous nous donner une estimation de la capacité d'achalandage actuel de l'aérogare 1?
M. Desmarais: Je vais vous donner un chiffre très approximatif si j'arrive à le trouver ici. La capacité de l'aérogare 1 est de 6,5 millions de personnes.
Le sénateur LeBreton: Et l'aérogare 2?
M. Desmarais: Les chiffres sont de 11,5 pour l'aérogare 2 et de 10 pour l'aérogare 3.
Le sénateur LeBreton: L'aérogare 2 peut-elle... si vous deviez transférer 6 millions de passagers de l'aérogare 1 à l'aérogare 2, la capacité serait-elle atteinte?
M. Desmarais: L'aérogare 2 reçoit actuellement 9,7 millions de personnes.
Le sénateur LeBreton: Et quelle est sa capacité?
M. Desmarais: À vrai dire, il s'agit des chiffres de 1994, et sa capacité est de 11,5.
Le sénateur LeBreton: Alors les aérogares approchent de leur limite.
M. Desmarais: Elles approchent de leur limite. L'aérogare 3 reçoit environ 6,7, 6,8 millions de passagers, sa capacité est de 10. Alors, d'ici quelques années, qui sait? Mais si vous prenez les 4,5 millions de passagers qui transitent par l'aérogare 1 actuelle et que vous tentez de les répartir, vous risquez d'avoir des problèmes de congestion.
Le sénateur LeBreton: Ainsi donc, on approche de la capacité maximale pour les deux aérogares.
Pour en revenir aux contrats, à quoi exactement ces contrats étaient-ils destinés? M. Power a précisé clairement que la demande de propositions visait la modernisation des aérogares et non pas une augmentation de leur capacité. Je pense qu'il a dit que l'augmentation de capacité serait un résultat indirect. Est-ce le cas? À vrai dire, nous parlons encore de réparer les aérogares. Nous ne parlons pas nécessairement d'en augmenter la capacité.
M. Desmarais: C'est exact. Le problème, c'est le terrain sur lequel elles sont situées. En raison de toutes les contraintes liées à l'exploitation d'un aéroport et aux routes et ainsi de suite, nous pensions ne pas pouvoir augmenter la capacité des aérogares bien au-delà de leur capacité actuelle. Si vous y arrivez, c'est que vous faites preuve de beaucoup d'ingéniosité. Les deux propositions préconisaient des solutions ingénieuses pour l'augmentation de la capacité.
Je pense que le chiffre de 39 millions préconisé par Paxport était un peu irréaliste. Le secteur aérien ne pourrait accommoder un tel achalandage, et c'est pourquoi nous revenons à un chiffre d'environ 30 à 32 millions.
Alors, oui, notre principale préoccupation était la remise en valeur des installations et l'obtention d'une installation nouvelle, moderne, de classe mondiale, et, si possible, une légère expansion.
Le sénateur LeBreton: Pour en revenir à la date où le contrat a été accordé à Paxport, dans la lettre qu'il a envoyée le 7 décembre 1992, le SMA des Aéroports, M. Victor Barbeau, énumère un certain nombre de questions, dont vous avez parlé plus tôt, qu'il fallait résoudre et d'autres points qui n'étaient pas acceptables. J'ai une copie de sa lettre. Évidemment, elle est datée du 7 décembre 1992 et elle fait partie de notre documentation. Je pourrais lire la lettre aux fins du compte rendu, mais je voulais vous demander... je pense que je vais lire...
Le sénateur Gigantès: Le document porte-t-il un numéro?
Le sénateur LeBreton: C'est une lettre de Victor Barbeau... je vais tenter de trouver le numéro de document. C'était...
Le sénateur Gigantès: Le sénateur Tkachuk vous en voudra beaucoup si vous ne le trouvez pas.
Le sénateur Tkachuk: Non, elle ne formule pas de conclusions, sénateur.
Le sénateur Gigantès: Vous ne vous fâchez que contre les libéraux.
Le sénateur Tkachuk: Je ne me fâche pas contre les libéraux.
Le sénateur LeBreton: C'est une lettre que nous avons... le numéro est 001844.
Le sénateur Gigantès: Merci. Vous êtes bien gentille.
Le sénateur LeBreton: Je vais vous lire des extraits de la lettre parce que je vais vous demander comment vous avez abordé chacune de ces préoccupations dans vos négociations. Évidemment, l'auteur les informe que le comité d'évaluation a déterminé que leur proposition était celle qui, globalement, répondait le mieux aux objectifs et aux exigences établis dans la demande de propositions.
Toutefois, votre proposition contient des dispositions qui préoccupent le gouvernement et qui ne peuvent être acceptées, en tout ou en partie; voici certains exemples de ces dispositions:
1. l'option de démarrage rapide;
2. les restrictions qui touchent le détournement du trafic;
3. l'attribution de droits d'atterrissage et de privilèges quant aux portes d'embarquement;
4. le mécanisme de financement qui touche le plan de mutation des employés;
5. les modalités qui doivent être intégrées aux diverses ententes.
Il poursuit ainsi:
De plus, l'évolution de la situation financière de l'industrie des lignes aériennes suscite un certain nombre de préoccupations supplémentaires aux yeux du gouvernement, particulièrement en ce qui touche la capacité financière de votre proposition.
Notez qu'on dit: "de votre proposition", et non pas de l'entreprise.
Nous sommes prêts à négocier une entente selon le cadre établi dans la demande de propositions, à condition que
1) certaines modifications exigées par le ministre soient apportées à votre proposition de façon à résoudre les préoccupations du gouvernement; et
2) vous fassiez la preuve, au plus tard le 15 février 1993 et à la satisfaction du gouvernement, que votre proposition peut être financée dans les circonstances.
La confirmation de votre acceptation des critères mentionnés ci-dessus doit être reçue par le ministère des Transports au plus tard à 17 h, HNE, le jeudi 10 décembre 1992.
Pour en revenir à ma question, nous diriez-vous de quelle façon vous avez abordé chacune des questions que M. Barbeau a énumérées dans sa lettre à Paxport?
M. Desmarais: Je pense avoir mentionné plus tôt que l'option de démarrage rapide qu'avait proposée Paxport, qui consistait grosso modo en un investissement de 150 millions de dollars sans garantie d'aménagement et prévoyait le transfert de toutes les recettes des concessions et de toutes les recettes du stationnement à leur compte bancaire, si vous voulez, ou sous leur contrôle sans remboursement au gouvernement était inacceptable. Nous l'avons rejetée d'emblée. Nous avions une autre option de démarrage rapide, si vous voulez, qui était en bout de ligne de 96 millions de dollars avec étalement du loyer.
Quant aux restrictions touchant le détournement du trafic, leur proposition demandait 39 millions de passagers sans détournement, et on ne pourrait détourner les passagers vers d'autres aérogares que lorsque ce chiffre serait atteint.
Eh bien, nous savons tous qu'on ne peut détourner un seul passager. Il faut détourner le groupe tout entier. C'est pourquoi nous avons commencé à renégocier un chiffre de 33 millions de passagers, avec la capacité de déplacer en tout temps vers d'autres aérogares des blocs de 1,5 million de passagers.
L'attribution de droits d'atterrissage et de privilèges relatifs aux portes d'embarquement... comme je l'ai déjà dit, me posait problème. Je ne me rappelle pas réellement cette clause et la façon dont elle a été présentée. Je crois qu'ils cherchaient à obtenir une définition ou à avoir un mot à dire dans l'attribution des droits d'atterrissage par le ministre, et ainsi de suite. Cela ne figurait pas sur les cartes.
Quant aux privilèges relatifs aux portes d'embarquement, je crois qu'ils souhaitaient pouvoir y amener n'importe qui, y compris les avions de marchandises et ainsi de suite, et cela ne pouvait non plus être accepté. Il s'agissait d'aérogares de passagers, mais c'est ce genre d'éléments de leur proposition que nous souhaitions corriger, qu'il s'agissait d'une aérogare pour passagers, et qu'elle n'allait servir qu'à cette fin, et que la prérogative du ministre quant à l'attribution des droits d'atterrissage était celle du ministre et de personne d'autre.
En ce qui touche le mécanisme de financement relatif au régime de mutation des employés, il s'agissait en réalité de la transférabilité des pensions, c'est-à-dire du transfert des pensions du gouvernement fédéral à Paxport en même temps que la mutation des employés, et la façon dont on allait financer le régime de pension et y ajouter pour procurer aux employés une pension de retraite. Les négociations relatives à l'accord de mutation des employés ont permis de résoudre cette question. Je ne peux vous citer exactement un passage, mais si vous lisez l'accord, vous verrez que tous les problèmes ont été résolus.
En ce qui touche les modalités à inclure aux diverses ententes, il y en a probablement une liste de 50 ou de 55 que nous avons finalement incluse dans diverses ententes et pour lesquelles le gouvernement n'avait pas accepté la proposition initiale. Je pourrais probablement vous trouver une liste des éléments que nous avons négociés et du règlement que nous avons obtenu, si vous le souhaitez.
Le sénateur LeBreton: Puis, il poursuit en disant, vous savez...
M. Desmarais: La question de la capacité financière était l'une de celles qui ont été confiées à Paul Stehelin.
Le sénateur LeBreton: C'est exact.
On peut donc dire sans se tromper que les préoccupations exprimées au nom du gouvernement par M. Barbeau ont toutes été résolues?
M. Desmarais: Elles l'ont toutes été.
Le sénateur LeBreton: Elles l'ont toutes été. D'accord.
Quels seraient vos commentaires quant à l'état des aérogares, particulièrement l'aérogare 1... parce que je vais faire allusion à un document déposé devant le comité, une liste de documents reçus de Robert Vineberg à partir du 1er août 1995. Il s'agit de documents d'un tribunal. Le comité me les a envoyés. L'un des documents est une note de service que vous, monsieur Desmarais, avez adressée à M. Mulder en ce qui touche: 1) la restauration du garage du stationnement de l'aérogare 1 et 2) les projets de sécurité de l'aérogare. Voulez-vous que je les lise pour le compte rendu, ou préférez-vous les commenter?
M. Desmarais: Je connais la note de service dont vous voulez parler.
Le sénateur LeBreton: Il s'agit d'un document déposé en preuve. Pour l'arbitrage du litige, il portait le numéro 5517. Il s'agit d'un document déposé en preuve, qui porte les numéros 00820436 à 441. C'est une note de service datée du 21 juillet 1994; elle date donc d'environ un an. C'est une note de service de M. Desmarais à M. Mulder, sous-ministre des Transports. Je vais vous en citer des passages:
Si le ministre souhaite continuer à exercer des pressions pour que le C-22...
il parle du projet de loi C-22...
...soit accepté, nous pensons que les grands projets de construction de nouvelles pistes et de restauration et d'expansion des aérogares, qui ont d'importantes répercussions économiques, s'y prêtent davantage. La non-approbation des projets mentionnés ci-dessus peut sembler accroître le pouvoir de négociation, mais elle ne fait en réalité qu'accroître le risque pour la sécurité publique, et si un accident devait se produire, le gouvernement et le ministère pourraient faire l'objet de critiques acerbes.
Puisque des fonds sont disponibles pour ce travail et qu'il ne semble pas y avoir de raisons stratégiques ou techniques pour ne pas aller de l'avant, la procrastination fait également augmenter la responsabilité, et si un accident devait se produire, les parties lésées pourraient réclamer des dommages-intérêts punitifs.
La note de service se poursuit ainsi, dans la rubrique "Contexte":
Depuis 1988, Transports Canada a consacré une somme d'environ 7,5 millions de dollars à des réparations, mais au cours des dernières années, le travail a été retardé jusqu'au transfert des aérogares.
La note se poursuit ainsi:
Nous avons reçu un avis du ministère de la Justice (qui n'avait pu considérer les faits à sa guise) selon lequel le gouvernement est exposé à une responsabilité civile et à la possibilité de dommages-intérêts punitifs en cas de blessure, de décès ou de dommages à la propriété attribuables à l'état du garage.
Le sénateur Kirby: Quelle est la date du document?
Le sénateur LeBreton: Le 21 juillet 1994.
Les réparations nécessaires à l'entretien de la structure, dont les travaux se dérouleront durant l'hiver 1994-1995, coûteront 865 000 $ et ne portent que sur des réparations des voies d'accès et de sortie seulement.
Puis, la dernière partie:
Pour corriger ce problème, on a pensé fermer totalement l'aérogare 1, mais cette solution a été rejetée puisque la capacité des autorités de l'aéroport international Lester B. Pearson d'accomoder le trafic existant serait gravement restreinte, sans parler de toute augmentation possible.
Je pourrais poursuivre, mais la note de service révèle de façon très claire, monsieur Desmarais, que vous étiez très très inquiet de la sécurité de l'aérogare 1 et, en fait, que vous aviez averti le gouvernement qu'il pouvait être tenu responsable si un accident devait se produire.
M. Desmarais: Je ne sais pas si j'ai averti le gouvernement. J'ai tout simplement rédigé la note de service à l'intention du sous-ministre en lui disant qu'il pourrait peut-être en parler au ministre.
Il y avait des préoccupations à propos des systèmes de sécurité de l'aérogare 1. Par la suite, le ministre a approuvé le programme, et je ne suis même pas sûr si ce n'était pas un ou deux jours avant même que je puisse lui faire parvenir cette note de service. Ces améliorations ont été apportées à cette époque.
Le sénateur LeBreton: Ainsi, vous êtes en train de dire que l'aérogare 1... vous avez dit il y a un moment que vous pensiez réellement qu'il fallait fermer l'aérogare 1 pour bien faire le travail.
M. Desmarais: Ce que je dis, c'est que si vous voulez réaménager les aérogares pour en tirer la capacité maximale, il vous faudra à un certain moment démolir l'aérogare 1 et la remplacer par autre chose.
Certaines des propositions que nous avons obtenues quant à l'optimisation de ce secteur préconisent le maintien de l'aérogare 1. On pourrait la réparer. On pourrait dépenser l'argent pour la réparer. Cela coûterait probablement à peu près autant d'argent pour la réparer complètement et l'adapter aux normes internationales d'aujourd'hui, si vous voulez, parce que le principal problème est le garage de stationnement et l'adaptation aux normes actuelles, et non pas l'édifice de l'aérogare proprement dit. Ainsi donc, un gouvernement qui souhaite réaménager l'aéroport Pearson doit donc faire certains choix.
À l'heure actuelle, si on envisage la question, on penserait probablement à une aérogare d'entrepiste ou à une expansion de l'aérogare 3 avant de toucher à l'aérogare 1, parce qu'il faut avoir un endroit où diriger le trafic si on doit fermer l'aérogare 1. Comme vous le voyez, l'aérogare 1 faisait l'objet de toutes sortes d'enjeux.
Mais le programme que nous proposions à l'époque, au moment où j'écrivais une note de service à ce sujet, nous aurait permis de maintenir l'aérogare 1 opérationnelle durant environ dix ans, de façon à permettre des décisions. Le système de gicleurs posait des problèmes. Les ascenseurs posaient des problèmes. Plusieurs systèmes connaissaient des problèmes. Comme je l'ai dit, toutes ces réparations ont été entreprises à ce jour, et il y en a d'autres qui doivent l'être.
Le président: Sénateur Kirby, vous avez une question supplémentaire?
Le sénateur Kirby: Monsieur le président, il s'agit en réalité d'une question que j'aimerais poser à notre conseiller juridique par l'entremise de le sénateur LeBreton.
Le document cité porte un numéro, mais j'ai cru comprendre qu'il s'agit également d'un document qui a été déposé en preuve au tribunal. Je comprends cela. Je ne conteste pas le fait que vous ayez le document, mais il me semble que si nous établissons que nous pouvons avoir en toute légalité des documents relatifs à l'affaire portée devant les tribunaux, nous devrions être capables de tous les avoir. Je ne fais qu'appuyer l'utilisation de ce document.
Le sénateur LeBreton: Ce n'est pas moi qui vais contester cela.
Le sénateur Kirby: Non, je sais que vous ne le ferez pas, mais c'est la première fois... je pense que je ne me suis toujours attaché qu'aux autres numéros. Comme vous dites, le document porte deux numéros, mais puisqu'il a un numéro de tribunal et que certains de ces documents nous ont été remis, je ne sais pas comment quelqu'un pourrait décider que nous ne pouvons...
M. John Nelligan, c.r., conseiller juridique du comité: Je ne pense pas que cela pose problème. J'ai obtenu l'autorisation des gens du ministère de la Justice avant d'apporter les documents, et ces volumes ont été mis à votre disposition par l'entremise du greffier.
Le sénateur Kirby: Alors nous pouvons obtenir tous les documents dont nous avons besoin?
M. Nelligan: Je vais vous expliquer. Tous les documents que j'ai obtenus jusqu'à présent se trouvent dans ce paquet. Ce que j'aimerais obtenir, ce sont les documents réels... nous ne les avons jamais reçus du ministère de la Justice. Eux les ont aussi. Ils ont des listes codées de tous les documents, et j'espère pouvoir obtenir l'accès à tous ces documents.
Le sénateur Kirby: Je pensais tout simplement que le fait que le sénateur LeBreton ait cité ce document pouvait vous aider à répondre à ma question plus générale, qui porte sur la façon dont nous obtenons les documents.
Le sénateur LeBreton: À vrai dire, j'en ai obtenu la liste. J'ai tout simplement demandé d'obtenir les documents qui concernent ces témoins.
Le sénateur Kirby: D'accord. Je voulais simplement m'assurer que vous en connaissez bien la nature. C'est parfait.
Le sénateur LeBreton: Pour en revenir à l'aérogare 1, vous avez probablement lu ou entendu le témoignage de M. Hession, qui disait croire que si l'aéroport n'était pas situé sur des terres de la Couronne, le ministère de la Santé aurait fait fermer les installations. Évidemment, vous nous avez déjà parlé des travaux qui y sont en cours. Est-ce que ça ne coûte pas très cher, ces réparations et réfections constantes? D'après ce que je comprends, la dernière fois où je me suis rendue à l'aérogare 1, le garage de stationnement ne fonctionnait certes pas à capacité. À vrai dire, un morceau s'est même détaché du plafond et est tombé à trois pieds de moi.
M. Desmarais: Le garage de stationnement fait plusieurs étages, et je ne pourrais vous dire de mémoire combien d'entre eux sont fermés en raison des dommages causés au ciment par le chlore. Une grave détérioration fait en sorte que le ciment dégringole sur les planchers situés en-dessous.
Le sénateur Gigantès: À voir les effets du fluor sur l'aérogare 1, je vais commencer à penser à changer de pâte dentifrice.
M. Desmarais: Alors, oui, le garage de stationnement est aux prises avec de graves problèmes, et plusieurs étages en sont fermés.
La déclaration de M. Hession selon laquelle le commissaire aux incendies fermerait des installations est à mon avis problématique. Je veux bien admettre que de nouveaux codes ont été établis, mais le commissaire aux incendies travaille généralement en fonction du code qui avait cours au moment où l'édifice a été conçu. Ce qu'on a fait dernièrement avec les foyers de soins infirmiers pourrait en être un exemple parfait: des gens disent que, selon les nouveaux codes, ils devraient être munis de gicleurs, mais certains foyers existants n'en sont pas munis, et personne ne s'énerve pour faire en sorte qu'ils le soient tous. Dans le cas qui nous occupe, c'est la même chose. L'aérogare ne satisfait pas aux normes des nouveaux codes, mais elle satisfait à celles du code qui avait cours le jour où elle a été bâtie, et c'est au regard de ce code qu'elle a été jugée et non pas nécessairement au regard des nouveaux codes.
Quoi qu'il en soit, nous nous efforçons toujours de remédier aux lacunes les plus graves et d'appliquer les dispositions des nouveaux codes le plus vite possible. Le programme que j'ai devant moi (si vous le voulez, je vais vous donner un exemplaire de cette note d'information qui tente de remédier à ce problème, sénateur) représente, grosso modo, un déboursé de 25 millions de dollars sur les deux ou trois prochaines années.
Le président: Monsieur Desmarais, la lettre que vous avez écrite à M. Mulder est plutôt intéressante.
Comme vous le savez, au cours de la dernière année... plus que ça, un an, un an et demi... où le projet de loi C-22 a été débattu devant le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, on s'attachait de façon précise à la constitutionnalité de ce texte législatif. La question n'a pas encore été résolue. Le comité tient toujours des audiences.
À maintes et maintes reprises, le ministre Young a refusé... a indiqué que l'incapacité de réaménager l'aéroport Pearson était attribuable aux sénateurs conservateurs qui tardent à adopter le projet de loi C-22.
Le sénateur Gigantès: Absolument.
Le président: Il a indiqué qu'il y a des problèmes avec le bail, ou des problèmes avec autre chose, mais à maintes et maintes reprises, on a invoqué ce fait pour expliquer la stagnation de la situation de l'aéroport, alors que je pense que vous savez qu'il y a bien des façons dont l'aménagement de l'aéroport pourrait reprendre si le gouvernement du Canada souhaitait régler ces prétendus obstacles: indemnisation, radiation, n'importe quoi. Mais vous indiquez dans votre lettre:
...même si le titre était transféré, le ministre a conservé le droit d'entreprendre ce genre de travail conformément à sa responsabilité globale envers la sécurité, environnementale ou autre, du système d'aviation...
et cette responsabilité globale supplante toute excuse qui peut avoir été invoquée auparavant. Si des gens devaient être tués dans l'aérogare 1, il aura énormément de difficulté à expliquer qu'il ne pouvait rien faire parce que le bail posait problème. Il n'a même pas de directeur général à cet aéroport. Il a retardé bien des choses.
La lettre que vous avez adressée à M. Mulder est très, très ferme, et vous y avez bien décrit la responsabilité du ministre. Il doit manifestement traiter cette affaire en priorité absolue.
M. Desmarais: J'ai écrit la lettre en 1994, monsieur, comme la date l'indique, je crois. À l'époque, la question du titre de propriété des aérogares 1 et 2 était confuse. Elle était encore enregistrée à T1T2 Limited Partnership. Et comme il s'agissait d'une propriété donnée à bail, nous n'avions pas le droit d'y faire un réaménagement.
Cependant, nous avons conservé dans le bail le droit de faire des réparations d'urgence si T1T2LP ne les faisait pas. Ainsi, sénateur, le bail nous permettait de faire les réparations d'urgence, et c'est la seule chose à laquelle je fais allusion.
En ce qui touche le réaménagement des aérogares, comme en ont parlé, je crois, les sénateurs au cours des débats sur le projet de loi C-22, on s'est heurté à une impossibilité parce que nous n'étions propriétaires du terrain ni des aérogares.
Le président: Et, sauf erreur, vous avez dépensé de l'argent pour l'aérogare 1.
M. Desmarais: Oui, monsieur, nous en avons dépensé.
Le président: Je suis désolé. Combien avez-vous dit?
M. Desmarais: Il y a actuellement un programme qui représente une dépense d'environ 25 millions de dollars. Les travaux les plus urgents ont été faits, et les autres travaux se poursuivent à l'heure actuelle.
Le sénateur Jessiman: C'est pour l'aérogare 1.
M. Desmarais: L'aérogare 1 seulement.
Le sénateur Jessiman: Laquelle devra être démolie.
M. Desmarais: Tôt ou tard. Comme je l'ai dit, cette somme de 25 millions de dollars nous permet de retarder l'échéance de huit à dix ans.
Le sénateur Tkachuk: Alors est-ce une somme que vous avez dépensée ou une somme que vous prévoyez dépenser?
M. Desmarais: C'est la somme que nous prévoyons consacrer au programme, cette année, l'an prochain, et une certaine partie a déjà été dépensée l'an dernier.
Le sénateur Tkachuk: Ainsi, c'est une somme de 25 millions sur...
M. Desmarais: Deux ou trois ans.
Le sénateur LeBreton: Cela permet de retarder de huit à dix ans...
Le président: Sénateur LeBreton, vous avez été interrompue.
Le sénateur LeBreton: Oui, ça va. Et cela permet fondamentalement de retarder l'échéance de huit à dix ans et de maintenir la capacité d'achalandage?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur LeBreton: Je vais... j'aimerais revenir à M. Rowat pour une question que ma curiosité me pousse à poser.
Que serait-il arrivé si, le 7 octobre, vous n'aviez pas signé en vue d'autoriser l'exécution des documents? Que ce serait-il passé? Quelqu'un vous a-t-il demandé votre avis quant à ce qui se serait passé si vous n'aviez pas poursuivi?
M. Rowat: Non, personne ne me l'a demandé, mais je présume que j'aurais demandé aux gens de l'autre côté de retarder le processus.
Le sénateur LeBreton: Je pense que c'est une question hypothétique. Vous savez, nous avions le décret à la fin du mois d'août, l'annonce par le gouvernement, l'accord de principe, et toute la documentation avait été établie. Selon vous, le gouvernement aurait-il pu être visé par une poursuite judiciaire avec un décret ou une approbation du Conseil du Trésor?
M. Rowat: Je ne connais pas la réponse juridique à cette question, et je ne me rappelle pas avoir demandé à obtenir un avis à ce sujet-là, mais je présume que l'autre côté aurait eu une forme de recours, qu'il aurait pris tous les recours juridiques qui étaient à sa disposition. Cela n'aurait pas nécessairement été une garantie de résultat.
Le sénateur LeBreton: Oui. Je présume que je devrais leur poser la question.
M. Rowat: Exactement.
Le président: Monsieur Rowat, je pense que j'ai une question intéressante à poser à chacun de vous trois. Elle exige une estimation éclairée, et je ne pense pas trouver de meilleures personnes pour m'en donner une que vous trois.
Selon le dernier témoignage de M. Shortliffe et des gens de Toronto qui ont comparu devant nous, en compagnie de l'autorité aéroportuaire générale de l'endroit, pour que l'aéroport Pearson soit conforme aux normes (quel que soit le nom qu'on leur donne, normes de classe mondiale, ou modernisation, mise à niveau, ou quoi que ce soit d'autre), rien ne pourra être terminé avant l'an 2003. D'après les témoignages que nous avons eus, jamais il n'y a eu une date antérieure à celle-là.
D'après ce que vous savez (et je ne vous demande qu'une estimation éclairée, c'est tout) si le contrat n'avait pas été annulé, l'aéroport respecterait-il les normes dont nous parlons?
M. Desmarais: Il le ferait grosso modo vers 1999-2000, sénateur.
Le président: Ainsi, nous n'aurions gagné que trois ans, à peu près?
M. Desmarais: Je suis désolé, sénateur, je ne comprends pas votre question. Si nous avions commencé le programme en 1993...
Le président: Oui.
M. Desmarais: ...c'est à dire si nous avions commencé la construction au moment où nous avons signé, le 1er décembre 1993, je dirais que les installations auraient complètement été réaménagées environ sept ou huit ans plus tard. Ainsi, de décembre 1993 à l'année 2000, 2001, peut-être 1999, si les conditions météorologiques avaient été bonnes et ainsi de suite, nous aurions pu compter sur une installation de classe mondiale.
Le président: Combien d'années au total?
M. Desmarais: Sept ou huit ans.
Le président: Sept ou huit ans. Bon. Si l'aéroport n'était pas remis à la nouvelle administration en septembre prochain, au plus tôt...
Le sénateur Jessiman: C'est en janvier-mars de l'an prochain.
Le président: Ne discutons pas du temps. Je pense qu'on dit dans le témoignage quelque part au mois de septembre. Je pense que c'est M. Bandeen qui a dit ça dans son témoignage. Vous ajoutez ensuite... alors quand pensez-vous que cela serait terminé? La date est-elle maintenant 2005 ou 2004?
M. Desmarais: Je n'ai pas fixé de date, sénateur. Des études sont en cours à l'heure actuelle, auxquelles participe l'AAL, afin de déterminer la faisabilité de l'aménagement dans ce secteur. À l'heure actuelle, je ne sais pas quel genre de plan ils vont établir.
Si c'est un plan qui tient compte de la croissance du nombre de passagers qui pourrait se produire entre maintenant et plus tard, cela ne pourrait même pas être une solution rapide pour les aérogares 1 et 2. On pourrait devoir construire l'aérogare 4 et l'entrepiste. Comme il y a croissance du nombre de passagers, comme je l'ai expliqué plus tôt, on n'a pas suffisamment de capacité pour retirer l'aérogare 1. Si l'on devait faire cela, on arriverait à court de capacité en moins de deux ans.
Alors il y a ce problème. Je ne sais pas quel genre de proposition l'AAL et l'aéroport établiront, proposition que l'AAL sera prête à mettre de l'avant au moment où elle prendra le contrôle. Et selon les dates que j'ai obtenues, cette prise de contrôle pourrait se faire dès juillet 1996. L'étude devrait être terminée à ce moment. Nous étudierons ensuite leur financement, je ne sais pas combien de temps il faudra pour faire cela; je ne connais pas non plus leur programme.
Le président: J'admets ce que vous dites. Je ne voulais pas paraître aussi insistant. Évidemment, j'espérais que vous me diriez que si vous aviez commencé en 1993, tout aurait maintenant été terminé. Et dans l'autre cas, si on va de l'avant, ce sera dans 20 ans. J'espérais obtenir ce genre de réponse. J'essayais d'obtenir une estimation éclairée.
Sénateur LeBreton, avez-vous terminé?
Le sénateur Tkachuk: La plupart de mes questions s'adresseront à MM. Jolliffe et Desmarais, mais je ne sais pas exactement qui aura la réponse, alors j'inviterais les deux témoins et M. Rowat, qui pourrait aussi m'être utile.
En ce qui touche les propositions non sollicitées dont vous avez parlé plus tôt aujourd'hui, où ont-elle été envoyées?
M. Desmarais: Dans quel sens?
Le sénateur Tkachuk: Qui les a eues? Où sont-elles allées?
M. Desmarais: Fondamentalement, je crois que toutes les propositions non sollicitées que nous avons étudiées étaient envoyées au cabinet du ministre puis, par la suite, au sous- ministre, puis au Groupe des aéroports, par l'entremise du bureau du SMA.
Le sénateur Tkachuk: Ainsi, le ministre, qui qu'il soit, les recevait, les envoyait à son sous-ministre, lequel les envoyait au ministère, probablement par l'entremise du Groupe des aéroports?
M. Desmarais: Dans le cas de ces propositions, au Groupe des aéroports.
Le sénateur Tkachuk: Ensuite, étaient-elles acheminées ailleurs?
M. Desmarais: Elles étaient généralement envoyées à un directeur général. À l'époque, il y avait un directeur général de la planification stratégique et des projets spéciaux. C'est à lui qu'on les aurait envoyées. Il s'agissait de M. Berigan, à qui vous avez parlé l'autre jour. Lui envoyait un exemplaire de la proposition au bureau local pour obtenir des commentaires, il inscrivait également ses propres commentaires et parlait à diverses personnes. En fonction du sujet de la proposition, il pouvait parler à des représentants du Conseil du Trésor, du ministère des Finances, du BCP, à plusieurs groupes de personnes, après quoi il préparait une réponse, qu'il envoyait au ministre pour signature.
Le sénateur Tkachuk: Et le ministre rédigeait ensuite une lettre de refus polie.
M. Desmarais: Dans le cas qui nous occupe, oui.
Le sénateur Tkachuk: C'est ce que le ministre a fait à chacune des cinq reprises?
M. Desmarais: Je le crois, oui.
Le sénateur Tkachuk: Il l'a même fait pour M. Matthews.
M. Desmarais: Je crois que c'était M. Hession, à l'époque.
Le sénateur Tkachuk: Ainsi, cinq entreprises ont envoyé des propositions non sollicitées. Si je pose ces questions, c'est parce que, vous savez, nous sommes ici pour discuter, bien franchement, de politique, ainsi que...
Le sénateur Gigantès: Non? Dieu nous en garde.
Le sénateur Tkachuk: ...ainsi que du processus proprement dit. Je voulais simplement préciser que cinq propositions non sollicitées avaient été envoyées et que, dans les cinq cas, le ministre avait envoyé une lettre de refus polie, y compris à M. Matthews.
Comme nous l'avons mentionné plus tôt, il existe bel et bien un programme pour les propositions non sollicitées.
M. Desmarais: Oui, il s'agit en général d'un programme de recherche et de développement.
Le sénateur Tkachuk: L'une ou l'autre de ces propositions aurait-elle pu déclencher cela, ou est-ce que ça aurait été considéré comme trop important pour cela, et quelqu'un serait arrivé pour dire non, nous ne pouvons le faire comme ça?
M. Desmarais: De façon générale, le processus relatif aux propositions non sollicitées que je connais en est quasiment un de recherche pure; il s'agit de quelque chose qui n'a jamais été mis à l'essai, de façon concrète, une machine, un appareil, un processus. Il s'agit d'aérogares. C'est une "terminologie" bien connue, si vous voulez, alors ceci n'aurait pas déclenché ce processus.
Le sénateur Tkachuk: Autrement dit, ce n'est pas un grand secret?
Le sénateur Hervieux-Payette: Puis-je obtenir une précision à propos de votre question?
Le sénateur Tkachuk: Bien sûr.
Le sénateur Hervieux-Payette: Selon vous, combien les entreprises doivent-elles dépenser, grosso modo, pour présenter une proposition? Doivent-elles dépenser un quart de million de dollars, un demi-million, un million ou plus, pour établir le genre de proposition dont nous parlons?
Nous employons le même terme, mais nous savons qu'une proposition peut être très détaillée et prête à être mise en application ou encore il peut s'agir seulement d'une formule ou d'une idée qui a été mise sur papier, mais qui ne va pas au fond des choses sur le plan financier.
Je voulais donc savoir, comme nous discutons de propositions avec un "S", si nous avons affaire au même genre de proposition, les gens étaient-ils prêts à signer l'accord le lendemain, et la proposition était-elle suffisamment détaillée pour que le gouvernement sache ce qu'il déclinait d'accepter?
M. Desmarais: La proposition de Paxport, si je ne m'abuse, et je ne suis pas certain des limites, des limites de temps en ce qui concerne l'argent... le coût de la présentation au gouvernement de la proposition de Paxport s'est élevé à 5 millions de dollars. Dans le cas de la proposition d'ATDG, je crois que c'était plus près de 10 millions.
Le sénateur Hervieux-Payette: Et les propositions "spontanées"?
M. Desmarais: Pour ce qui touche les propositions spontanées, je n'en ai pas la moindre idée. Je vous parle seulement des propositions les plus importantes, de ce qui était prêt à être signé, de ce que nous avons...
Le sénateur Hervieux-Payette: Je sais, mais quand nous parlons de propositions spontanées, je me demandais seulement si nous parlions de la même chose. Les propositions, je le sais, devaient être détaillées; les soumissionnaires répondaient à votre demande de propositions et, bien sûr, il fallait préciser tous les détails que vous demandiez.
Tout de même, les propositions spontanées que vous avez reçues étaient-elles aussi détaillées? Étaient-elles aussi complètes? Est-ce qu'elles ne représentaient qu'une idée? Les propositions spontanées faites au gouvernement avaient-elles la même envergure que les autres?
M. Desmarais: Elles n'avaient pas la même envergure que les propositions que nous avons reçues en réponse à la demande de propositions. Certaines renfermaient des dessins du concept évoqué. Je crois que la proposition de British Airports, Canadian Airports Limited, était présentée dans un gros livre assez épais sur papier glacé, c'était donc bien fait et bien présenté, mais il ne portait que sur un concept.
Je crois que le premier livre que nous avons reçu du groupe Matthews-Paxport, si je peux l'appeler ainsi, était, encore une fois, un volume relativement mince qui faisait une vingtaine de pages et qui nous proposait d'envisager un certain concept. Je ne crois pas que ce soit le genre de proposition qui nous aurait incités à signer un accord sur-le-champ.
Le sénateur Hervieux-Payette: C'était donc des choses tout à fait différentes. Vous parliez, plus ou moins, puisque vous travaillez dans ce service, du volet pré-faisabilité d'une proposition, par opposition à l'étude de faisabilité d'un projet clés en main, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Vous connaissez très bien le sujet.
Le sénateur Hervieux-Payette: ...c'est la raison pour laquelle il me paraît important pour nous de...
Le sénateur Tkachuk: Avez-vous eu du travail du gouvernement fédéral au cours des années 80?
Le sénateur Hervieux-Payette: Je travaillais au groupe SNC. J'imagine que le groupe SNC travaillait avec quiconque voulait lui donner du travail, au Canada comme à l'étranger.
Le sénateur Tkachuk: J'imagine que c'est le cas.
Le sénateur Hervieux-Payette: Et il a eu beaucoup de travail du gouvernement conservateur...
Le sénateur Tkachuk: J'ai toujours cru qu'on aurait dû privatiser SNC Lavalin.
Le président: Présentez une proposition spontanée.
Le sénateur Tkachuk: Voilà. Lavalin aurait dû être privatisé il y a longtemps.
Je veux revenir à ma question sur les propositions spontanées et le refus qui leur a été associé. En fait, cela n'est pas très important pour moi. C'est seulement qu'il y a beaucoup de gens dans l'industrie qui savaient que le gouvernement s'en allait dans cette direction. Et c'est la raison pour laquelle j'ai posé la question, c'est la raison pour laquelle je voulais bien préciser qu'il y avait une politique gouvernementale en jeu au sens où il y a des lettres de réponses qui ont été rédigées et où il y avait une personne responsable du dossier. Vous dites que le ministre aurait été obligé de prendre cette décision.
Quand la demande de propositions... quand le ministre a fait l'annonce, puis affirmé que le secteur privé serait appelé à intervenir par la voie de la location des aérogares et que la demande de propositions était en cours de préparation, qui a été nommé responsable du dossier?
M. Desmarais: Essentiellement, c'est le groupe des aéroports, dont le directeur général était M. Berigan.
Le sénateur Tkachuk: Je sais que j'ai déjà emprunté cette voie, mais je veux l'emprunter à nouveau: il y a le ministre responsable, évidemment, puis le sous-ministre responsable et, ensuite, le directeur de l'aéroport responsable.
Bon, maintenant, le directeur d'aéroport... la chaîne serait donc comme suit: le ministre, le sous-ministre, le directeur d'aéroport. À ce point-là, le directeur d'aéroport nomme-t-il un autre responsable?
M. Desmarais: Non, sénateur. La chaîne irait du ministre au sous-ministre au sous-ministre adjoint...
Le sénateur Tkachuk: Ah, le sous-ministre adjoint, oui, responsable des aéroports. Nous parlons de la même personne, de la même chose.
M. Desmarais: Et puis, selon la démarche dont il est question, il peut choisir pour responsable le directeur général à l'administration centrale ou le directeur de l'endroit. Dans ce cas, à Ottawa, j'ai travaillé pour M. Berigan. C'était lui le grand responsable du dossier à Ottawa avec l'aide de M. Heed.
Un petit comité a été formé. Je voulais revenir sur le sujet du comité directeur dont le conseiller a parlé plus tôt, celui qui étudiait la demande de propositions. Ce comité avait pour président le sous-ministre adjoint Victor Barbeau. Ses membres étaient le directeur général des aéroports, à Toronto, M. Heed. Il y avait le directeur général des projets d'envergure de l'État, M. Ed Warrick. Travaillant à Toronto, il était responsable de l'aérogare 3 à ce moment-là et s'est vu confier alors la tâche de commencer à mettre au point la stratégie pour le Sud de l'Ontario et ainsi de suite. Il y avait le directeur général responsable de la planification ministérielle et des projets spéciaux, c'est-à-dire M. Berigan.
Voilà le comité directeur. M. Berigan et le personnel de M. Heed ont collaboré à la préparation des divers documents d'approbation et de la demande de propositions et ainsi de suite, ainsi qu'à la réalisation des études sur les questions à régler avant d'émettre la demande de propositions.
Le sénateur Tkachuk: Le processus a donc commencé un peu après l'annonce?
M. Desmarais: Je crois que cela a commencé avant, sénateur. Cela a probablement commencé au début de l'été en 1990.
Le sénateur Gigantès: Puis-je poser une question à ce sujet?
Le sénateur Tkachuk: Est-ce qu'il s'agit d'une question supplémentaire?
Le sénateur Gigantès: Une question de clarification.
Le sénateur Tkachuk: Ah, bien sûr, je vous en prie, sénateur.
Le sénateur Gigantès: Vous avez dit que le processus a commencé avant que l'on annonce la demande de propositions?
M. Desmarais: Oui, sénateur. La mise au point du processus, l'étude des questions à régler, tout cela a commencé, grosso modo, au début de l'été en 1990. M. Lewis a annoncé en octobre 1990 qu'il demanderait des propositions au secteur privé...
Le sénateur Gigantès: De l'été jusqu'au mois d'octobre, vous étiez donc à établir les conditions.
M. Desmarais: À établir les conditions, à regarder les questions en jeu, à prévoir les études nécessaires et à voir ce qu'il fallait régler.
Le sénateur Gigantès: Merci.
Le sénateur Tkachuk: Comment prenait-on les décisions concernant la demande de propositions? Il y a le comité. Il y a des gens qui y travaillent. Il y a des documents qui s'écrivent, et vous, vous organisez les choses en quelque sorte. Qu'est-ce qui est arrivé aux documents? Comment avez-vous fait la liste des choses que vous vouliez y inclure? Y avait-il...
M. Desmarais: On a fait la liste des questions que pourraient prendre en considération les ministres plus tard.
Le sénateur Tkachuk: De quoi s'agissait-il?
M. Desmarais: Je me souviens qu'il y avait, notamment, la participation de l'exploitant de l'aérogare 3. Il y avait aussi les intérêts canadiens dans le consortium. Il y avait un très, très grand nombre de questions comme celle-là.
Le sénateur Tkachuk: Quand la version définitive de la demande de propositions a été mise au point, qui aurait été responsable de vérifier tous les éléments? Tous les membres du comité?
M. Desmarais: Je ne sais pas si tous les membres du comité l'ont fait, sénateur. Je sais que j'ai regardé la liste moi-même. Je sais que M. Berigan l'a regardée à Ottawa. M. Power l'avait dressée. Il en aurait parlé à M. Heed avant de la faire parvenir à Ottawa. Ensuite, il y a eu une vérification à la section du développement commercial.
M. Warrick n'était plus au ministère à ce moment-là, de sorte que le comité était en fait plus petit. La majeure partie du travail pouvait se faire par téléphone. La plupart des travaux et des approbations, si vous voulez, au sein du groupe des aéroports concernaient M. Heed et M. Berigan, après quoi il y avait la ratification de M. Barbeau, puis le reste de la filière d'approbation.
Le sénateur Tkachuk: Il fallait que beaucoup de gens en soient heureux avant que la chose ne soit finie, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Il fallait que beaucoup de gens en soient satisfaits.
Le sénateur Tkachuk: D'accord. C'est ce que je voulais vraiment savoir. Et le ministère de la Justice? Était-il heureux ou satisfait, lui aussi?
M. Desmarais: Le ministère de la Justice a pris part à la rédaction de la demande de propositions, à partir de son bureau à Toronto.
Le sénateur Tkachuk: La question d'Air Canada ressort toujours dans cette discussion sur la demande de propositions. Vous y avez encore fait allusion, plus tôt.
La demande de propositions ou la salle de documentation renfermaient des renseignements concernant le contrat (jusqu'en 1997), concernant la location à Air Canada. C'est que l'option était manquante.
M. Desmarais: C'est que les principes directeurs étaient manquants. C'est tout.
Le sénateur Tkachuk: Les principes directeurs étaient manquants.
M. Desmarais: J'hésite à dire manquants. "Manquants" peut vouloir dire qu'on les a mis là, mais qu'ils ont été perdus. Ils n'ont jamais été mis là.
Le sénateur Tkachuk: D'accord. Vous avez dit qu'on en a discuté. Ce comité en a-t-il discuté?
M. Desmarais: Je ne sais pas si le comité en a discuté. Je me souviens d'avoir discuté moi-même avec M. Berigan et, je crois, M. Heed à ce sujet. Toutefois, je ne sais pas si cette question a fini par revenir au comité. Je n'ai jamais fait partie de ce comité.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne faisiez pas partie de ce comité?
M. Desmarais: Non.
Le sénateur Tkachuk: Mais vous auriez espéré que les membres du comité en auraient discuté ou vous auriez présumé qu'ils en auraient discuté?
M. Desmarais: Je présumerais que quand la décision a été prise, quelqu'un l'a ratifiée. Comme je l'ai dit plus tôt, j'en ai discuté avec M. Berigan. On m'a informé de la décision prise, de sorte que j'ai présumé que d'autres cadres supérieurs l'avaient ratifiée.
Le sénateur Tkachuk: Vous avez probablement déjà vu cette lettre de M. Desrochers, le document 006, je ne me souviens pas du numéro. Je crois que c'est 657, n'est-ce pas, monsieur le conseiller? 00657, le 26 août 1991, une lettre à l'intention de la sous-ministre, Mme Labelle.
M. Desmarais: Je ne suis pas sûr de l'avoir vue, sénateur.
Le sénateur Tkachuk: De toute façon, M. Desrochers est vice-président et chef de l'exploitation chez Air Canada. Dans sa lettre, il dit ce qui suit:
Madame Labelle, depuis quelques années...
...nous sommes le 26 août 1991...
...est en communication constante avec Transports Canada concernant l'aménagement de l'aérogare 2. Il leur a maintenant été signalé que Transports Canada s'apprête à émettre une demande de propositions pour le réaménagement de l'aérogare 2 et de l'aérogare 1. Je tiens à vous signaler qu'Air Canada, dans la soumission qu'il a adressée à Transports Canada, en date du 4 avril, propose une solution de rechange qui nous paraît répondre aux objectifs de Transports Canada et d'Air Canada. Étant donné le succès monstre qu'a donné notre collaboration au réaménagement de l'aérogare 2 depuis deux ans, je vous incite vivement à envisager notre proposition avant d'enclencher le processus de demande de propositions. De même, je tiens à vous rappeler la correspondance entre Air Canada et Transports Canada en 1989, qui témoigne de l'entente intervenue entre votre prédécesseur, M. Shortliffe, et M. Dennis Groom, vice-président d'Air Canada, à propos des principes directeurs régissant la négociation du bail à long terme d'Air Canada à l'aérogare 2. Je suis d'avis que les modalités de cette entente n'ont pas été appliquées et que l'entente est toujours en vigueur. Vous trouverez ci-joint un exemplaire de la correspondance pertinente pour référence. Je crois qu'il serait utile pour nous de nous rencontrer afin de comprendre pleinement les questions en jeu. Dans l'espoir de recevoir une réponse le plus tôt possible, je vous prie d'agréer, madame, mes sincères salutations.
Et c'est signé Lee Desrochers, avec copie conforme à l'intention de Claude Taylor, et une autre, à l'intention de Victor Barbeau.
Bon, maintenant, cela a été envoyé à Mme Labelle. Saviez-vous que M. Barbeau ou Mme Labelle avaient été mis au courant de cela et, évidemment, qu'Air Canada leur avait révélé qu'il faudrait en tenir compte dans le contexte de la demande de propositions. Vous a-t-on dit quelque chose à ce sujet?
M. Desmarais: Je sais que la lettre existe, pour l'avoir appris du bureau de M. Berigan. Les deux lettres, celle de la sous-ministre et l'exemplaire de M. Barbeau, sont parvenues au bureau de M. Berigan. Je ne sais pas si la sous-ministre ou M. Barbeau ont lu ces lettres. Au ministère, il est d'usage de demander à un adjoint administratif de lire les lettres, puis de les distribuer au responsable, si vous voulez.
Je ne saurais donc vous assurer qu'ils ont vu les lettres, seulement que celles-ci son parvenues au bureau de M. Berigan.
Le sénateur Jessiman: Avez-vous lu la lettre?
M. Desmarais: Je crois bien l'avoir vue à ce moment-là, sénateur, oui.
Le sénateur Jessiman: Avant que la demande de propositions ne soit prête.
M. Desmarais: Oui, en 1991, je crois, en août.
Le sénateur Jessiman: Puis-je poser une seule question encore?
Le sénateur Tkachuk: Certainement.
Le sénateur Jessiman: Merci. À l'époque où vous avez préparé la demande de propositions, croyez-vous que les termes suivants:
Air Canada a fait ces dépenses d'investissements en croyant qu'elle pourrait tirer parti des avantages que présentent ces investissements sur une période d'amortissement raisonnable et normale.
Croyez-vous que ces termes ont été inclus pour couvrir ce dont nous parlons? Cela ne me paraît certainement pas être suffisant, mais... qu'est-ce qu'on veut dire par là?
M. Desmarais: Essentiellement, ce que l'on dit, c'est qu'Air Canada a investi certaines sommes dans l'aérogare et qu'elle peut s'attendre raisonnablement à ce que ce soit amorti.
Le sénateur Jessiman: Mais il est dit, à la ligne suivante, que le bail se termine en 1997, c'est à dire quatre ans plus tard.
M. Desmarais: C'est ce que disait la lettre dont nous avons parlé plus tôt, quand nous leur avons demandé les conditions qu'ils voulaient inscrire dans la demande de propositions. Et nous surveillions leur langage. Je ne sais pas trop bien où on s'en va ici.
Le sénateur Jessiman: Je voulais seulement savoir, ce que vous saviez à ce sujet.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Jessiman: Vous étiez responsable de la préparation de ce document.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Jessiman: Et cela n'a pas été inclus.
M. Desmarais: Cela n'a pas été inclus...
Le sénateur Jessiman: Aux gens qui allaient répondre à votre demande ou faire une proposition, vous n'auriez pas dit: Écoutez, ces documents existent, vous serez mieux d'aller les étudier, nous les mettrons dans la pièce où vous pouvez aller étudier tous nos documents. Vous n'avez pas dit cela.
M. Desmarais: Nous avons dit que nous allions mettre dans la pièce tous les contrats, tous les baux, tous les renseignements techniques sur l'endroit. Nous n'avons pas dit que nous allions y mettre tous les papiers que Transports a jamais signés concernant l'aérogare 1 ou 2.
Le sénateur Jessiman: Non, mais il s'agit de votre principal locataire...
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Jessiman: ...à l'aérogare 2, et vous parliez d'un bail de 40 ans.
M. Desmarais: Oui, il y a beaucoup...
Le sénateur Jessiman: Et, il est vrai, personne ne savait s'il s'agissait d'un bail ou non.
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Jessiman: Nous sommes tous d'accord avec ce point mais, diable, on ne peut sûrement pas dire que ce n'est pas quelque chose que vous... que Transports Canada avait signé, et il pourrait... et, certainement, Air Canada a témoigné; d'après son témoignage, il y a là une obligation quelconque.
Et j'aurais cru, tout de même, que ces... enfin, tout paraît plus facile avec le recul, bien sûr, mais il y avait cela. Vous le saviez. Je n'arrive pas à croire que vous avez eu cela à l'esprit. Ce qui vous sauve, j'imagine, c'est que vous avez décidé d'envoyer cette disposition, comme on me l'a dit plus tôt, à Air Canada, et qu'Air Canada savait que c'est de cette façon que cela allait être proposé. Air Canada est peut-être donc préclu de faire quoi que ce soit à ce sujet.
J'aimerais voir la lettre que vous avez envoyée pour leur signifier cette disposition. Pouvez-vous nous la fournir?
M. Desmarais: Je vais essayer de la trouver. Je ne sais pas si elle est à la photocopie en ce moment. Il va falloir que je regarde.
Le sénateur Jessiman: Pourriez-vous le faire? Je crois que ce serait assez important
M. Rowat: Est-ce que je pourrais vous demander la date de la lettre à laquelle vous faites allusion, celle de M. Desrochers?
Le sénateur Tkachuk: Un instant, je veux en être sûr: c'est le 26 août 1991.
Le sénateur Gigantès: Est-ce qu'il y a un numéro de document?
Le sénateur Tkachuk: Oui, je l'ai lu, c'est le 000657.
Le sénateur Gigantès: Merci.
Le sénateur Tkachuk: De rien. Je le referais pour vous n'importe quand, sénateur Gigantès.
M. Desmarais: Je regardais il y a un instant la lettre du 28 mars 1991, celle que M. Desrochers a adressée à M. Berigan en réponse à la demande de renseignements au sujet de la demande de propositions. C'est là qu'on voit qu'Air Canada dit avoir recommandé, en juin 1990, la proposition de Paxport au ministre des Transports.
Le 6 mars 1991, Air Canada... Paxport qu'il a coupé ses liens. L'intervention d'Air Canada auprès de Transports Canada, la demande de propositions, représente la seule volonté d'Air Canada.
À la page suivante, on dit qu'Air Canada va... on examine cela, on dit ne pas vouloir une "vente aux enchères", Air Canada s'opposera vigoureusement à un processus de demande de propositions qui s'engagerait dans cette voie. Par ailleurs, Air Canada insistera pour que l'on connaisse son bail irrévocable, qui s'étend jusqu'au 30 avril 1997, et pour que l'on protège ses taux, notamment en ce qui concerne l'examen du taux de location fondé sur les politiques de recouvrement des coûts en place. C'est tout ce qu'Air Canada demandait.
Et il est en train d'établir, je crois... dans sa lettre, il est en train d'établir une position pour le prochain volet des négociations.
Le sénateur Jessiman: Avons-nous cela?
M. Desmarais: Je n'en suis pas sûr.
M. Rowat: 000483.
M. Nelligan: C'est celle dont j'ai parlé plus tôt au témoin, aujourd'hui.
Le sénateur Tkachuk: Bon, quand nous... je fais brûler les étapes un peu pour passer à la demande de... parce que d'autres témoignages ont déjà fait état du processus de mise au point de la demande de propositions, de l'annonce faite par le gouvernement, M. Lane et tout le reste. Je vais donc brûler quelques étapes pour... et le sénateur Hervieux-Payette a aussi parlé de ce qui s'est passé immédiatement par la suite, du mois de décembre et de l'annonce. Vous avez très bien expliqué ce que l'annonce voulait vraiment dire.
Je vais donc brûler quelques étapes pour passer à la question de l'étalement du loyer, qui a semé la consternation ici. C'était un peu comme... c'était une transaction énorme ou très compliquée. Mais enfin, j'ai passé la majeure partie de ma vie dans des petites entreprises, et l'étalement des loyers ne m'est pas une chose inconnue. Par exemple, on loue une surface de quelques milliers de pieds. En fait, c'est vraiment comme remettre le loyer à plus tard. C'est presque comme un prêt, n'est-ce pas?
M. Desmarais: D'une certaine façon. Je présume que "oui".
Le sénateur Tkachuk: Vous demandez des intérêts. Vous dites que, un jour, ce loyer sera payé?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Tkachuk: C'est ce que vous dites. Au lieu de payer le montant intégral du loyer, au cours des trois premières années d'un accord de dix ans, on paierait peut-être la moitié, puis on prend l'autre moitié, et on l'intègre aux sept années suivantes. La somme devient payable à un taux d'intérêt de 10 p. 100 ou de je ne sais combien.
L'idée elle-même de l'étalement d'un loyer, en termes simples, pour que l'électeur ordinaire qui nous écoute (enfin, pour la centaine d'électeurs qui peuvent nous écouter) comprennent ce dont nous parlons, n'est pas si compliquée.
En fait, l'idée n'est même pas si compliquée dans le cas des autres aéroports. L'étalement des loyers touche-t-il d'autres AAL?
M. Desmarais: Je crois que oui.
Le sénateur Tkachuk: Lesquelles?
M. Desmarais: Je crois que c'est le cas de Montréal. Je crois que Vancouver a une option à cet égard. Je n'en suis pas sûr dans le cas de Calgary et d'Edmonton. Je n'ai pas regardé leurs baux.
Le sénateur Tkachuk: C'est le cas de Vancouver.
M. Desmarais: Vancouver a l'option dans son bail, et je crois que Montréal exerce cette option en ce moment.
Le sénateur Tkachuk: Exerce cette option. Des quatre, donc, y a-t-il quatre autres aéroports en ce moment qui sont régis par une AAL?
M. Desmarais: Il y en a deux à Montréal, une à Vancouver, une à Calgary et une à Edmonton.
Le sénateur Jessiman: Est-ce qu'il y en a une à Mirabel?
M. Desmarais: Mirabel et Dorval font partie du groupe des aéroports de Montréal.
Le sénateur Tkachuk: Montréal aura son loyer différé. Vancouver a l'option. D'autres aéoroports ont-ils l'option?
M. Desmarais: Je n'en suis pas sûr. Je crois qu'Edmonton en a une. Pour ce qui est de Calgary, je n'en suis pas sûr.
Le sénateur Tkachuk: À partir d'aujourd'hui, on va probablement vouloir en avoir une, n'est-ce pas?
Pourquoi accorderait-on aux AAL le privilège d'étaler leur loyer?
M. Desmarais: Ce n'est pas moi qui ai négocié ces baux, sénateur. Je n'en ai pas la moindre idée.
Le sénateur Tkachuk: Très bien. Dans les contrats de la relatifs aux aérogares 1 et 2, les loyers différés étaient vraiment... je veux simplement le signaler pour qu'on comprenne que le gouvernement n'a pas renoncé à grand-chose... c'était en contrepartie de la construction immédiate et d'une somme d'argent supplémentaire, n'est-ce pas? Est-ce un peu ce qui s'est passé, les élections s'en venaient, faisons bouger les choses? Comprenez-vous?
M. Rowat: La société fusionnée a convenu de dépenser tout de suite 96 millions de dollars pour faire commencer les travaux. Le loyer pour les trois premières années était différé à la lumière de ce fait et serait récupéré au cours des dix années suivantes.
Le sénateur Tkachuk: À un taux d'intérêt de...
M. Rowat: Au taux préférentiel plus deux et demi pour cent.
Le sénateur Tkachuk: D'accord. Et aussi parce qu'Air Canada... qui voulait que les travaux commencent tout de suite, à part le gouvernement? Air Canada le voulait-il? Il y avait une certaine urgence, il me semble que... est-ce qu'Air Canada croyait que c'était une bonne idée de s'organiser ainsi? Ou est-ce que c'était le gouvernement ou encore le ministère qui s'en préoccupait davantage?
M. Desmarais: La phase 1A, c'est-à-dire la phase de mise en marche accélérée des travaux... vous le verrez si vous regardez le dessin ici, dans ce que nous avons remis. En rouge, on voit, essentiellement, le nouveau système de traitement de rapid-air d'Air Canada et l'expansion de la zone réservée aux vols transfrontaliers à l'aérogare 2, c'est-à-dire, essentiellement, la zone transfrontalière d'Air Canada. Cela est tiré du plan directeur qu'Air Canada nous avait fait parvenir auparavant. Air Canada avait hâte de voir les travaux commencer.
Le dossier de rapid-air a visiblement avancé, les zones de rapid-air et des vols transfrontaliers à l'aérogare 2 se trouvent maintenant l'une à côté de l'autre. On voulait réaménager ailleurs la zone réservée à rapid-air pour élargir celle des vols transfrontaliers. Il fallait donc un système de traitement pour rapid-air, afin d'élargir la zone réservée aux vols transfrontaliers. C'est donc ce qui est prévu au cours de la première phase.
M. Rowat: L'autre réponse à votre question, c'est que "oui", le gouvernement y voyait une priorité étant donné les emplois qui seraient créés. Si vous vous rappelez, l'économie à l'époque était déprimée, même à Toronto.
Le sénateur Tkachuk: Oui. Avez-vous... enfin, combien de personnes y travaillaient? Le savez-vous? Vous en souvenez-vous?
M. Desmarais: À quoi, sénateur. À la première phase?
Le sénateur Tkachuk: Oui.
M. Desmarais: Je ne m'en souviens pas par coeur. Je crois que des chiffres ont été établis, mais je ne m'en souviens pas en ce moment.
Le sénateur Tkachuk: C'est important, tout de même, le gouvernement y voyait quelque chose d'important.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Gigantès: Selon le bon jugement du gouvernement.
Le sénateur Tkachuk: Cela dépend toujours du bon jugement du gouvernement, quand il est question d'emplois.
Permettez-moi seulement de poser quelques questions théoriques à propos de la location d'un aéroport et des administrations aéroportuaires locales. Encore une fois, je me retrouve un peu sur la même voie, mais je veux seulement, l'administration aéroportuaire locale... est-ce un peu comme si on lui donnait l'aéroport?
M. Desmarais: L'aéroport lui est loué moyennant un loyer négocié. Encore une fois, il s'agit essentiellement pour le gouvernement de ne pas se trouver désavantagé par rapport à sa situation antérieure. Le gouvernement obtiendrait donc un loyer donné, dans la mesure où sa situation n'est pas moins bonne qu'elle ne l'aurait été s'il avait dirigé les affaires de l'aéroport lui-même. Et l'AAL profite de l'apport et du développement économique que le gouvernement peut contribuer à l'aéroport et peut se servir de l'argent en tant qu'organisme sans but lucratif pour mieux mettre en valeur l'aéroport.
Le sénateur Tkachuk: Vous louez donc l'aéroport en entier?
M. Desmarais: Nous louons l'aéroport en entier.
Le sénateur Tkachuk: Et vous le louez à... et les administrations aéroportuaires locales sont des organismes sans but lucratif?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Bon, "sans but lucratif", ça ne veut dire qu'une chose: l'organisme ne paie pas d'impôt. Ce n'est pas une organisation qui vient en aide aux enfants malades ou qui envoie de l'argent en Éthiopie. C'est un organisme sans but lucratif qui ne paie pas d'impôt.
M. Desmarais: Et les profits, s'il y en a, doivent être réinvestis dans l'aéroport.
Le sénateur Tkachuk: Mais si l'organisme faisait des profits, il ne paierait tout de même pas d'impôt.
M. Desmarais: Je ne suis pas sûr des dispositions fiscales...
Le sénateur Tkachuk: C'est pourquoi tout le monde adore le terme "sans but lucratif", y compris les gens qui sont à la tête de ces organismes puisqu'on n'est pas obligé de payer d'impôt, n'est-ce pas? On ne paie pas d'impôt.
M. Rowat: Ces organismes sont bel et bien exonérés d'impôt.
Le sénateur Tkachuk: Si on calcule donc les recettes que le gouvernement obtient entre une AAL et, disons, il me semble... enfin, je simplifie peut-être un peu trop, mais, dans un cas, on loue l'aéroport en entier; dans l'autre, on loue quelques aérogares. Est-ce juste?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Dans les deux cas, on loue.
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Tkachuk: Seulement à des personnes morales. À but lucratif, dans un cas, sans but lucratif, dans l'autre. Il n'y a pas de grande différence, ici, sur le plan des personnes morales?
M. Desmarais: D'accord, du point de vue des personnes morales.
Le sénateur Tkachuk: Et on obtient le loyer des deux aérogares, dans ce cas particulier, ou le loyer de l'aéroport en entier, dans l'autre. C'est simplement un loyer qu'on obtient. Tout ce que le gouvernement obtient, c'est un loyer.
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Tkachuk: Et il essaie de faire en sorte de ne pas se retrouver dans une situation pire que s'il ne louait pas.
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Tkachuk: Est-ce qu'il est tenu compte... dans les liquidités, est-ce qu'il est tenu compte des impôts perdus?
M. Desmarais: Dans les liquidités de qui, sénateur?
Le sénateur Tkachuk: Quand on tient compte de l'argent que le gouvernement obtient, on tient compte du loyer, dans un cas particulier et dans l'autre. À ce moment-là, est-ce qu'on pense aussi à la somme d'impôt que le gouvernement perd si l'un d'eux réalise des profits?
M. Rowat: Une autre façon de poser la question serait de demander combien d'impôt pourrait être perçu si le bail visait une société du secteur privé?
Le sénateur Tkachuk: Oui, est-ce que vous produisez des... je sais que le ministère des Finances en produit des livres entiers.
M. Rowat: Ils le font, et les dispositions fiscales sont si nombreuses... oui, théoriquement, vous avez raison. Le gouvernement en tire un avantage supplémentaire sur le plan fiscal s'il loue au secteur privé. Tout de même, il est difficile de déterminer une telle somme avec exactitude tant et aussi longtemps qu'on ne sait pas comment l'entreprise entend se structurer sur le plan fiscal. Tout de même, dans l'ensemble, le bail visant une entreprise du secteur privé comporterait un avantage fiscal supplémentaire pour le gouvernement.
Nous n'en tenons pas compte officiellement dans les chiffres, mais nous en prenons note, comme l'a fait M. Stehelin dans son analyse: cela s'ajouterait au loyer perçu par le gouvernement.
Le sénateur Tkachuk: D'accord. Bon, maintenant, le bail accordé à une entreprise du secteur privé... j'ai presque fini, je crois que ma demi-heure est presque terminée. Est-ce que ma demi-heure est terminée? Eh bien, pourquoi est-ce que je n'arrête pas tout de suite?
Le sénateur Kirby: Monsieur le président, si Dave n'en a encore que pour quelques minutes, je serais très heureux de le laisser faire, puis je terminerai la séance. Je m'excuse, mais à quel moment est-ce que nous suspendons les travaux?
Le président: Nous suspendons nos travaux à 21 h 30, mais j'aimerais avoir vos conseils. Il va falloir accorder à M. Nelligan une vingtaine de minutes pour les questions de récapitulation. Nous suspendons les travaux à 21 h 30.
Le sénateur Kirby: Est-ce qu'il doit le faire aujourd'hui ou au moment où nous aurons fini de poser nos questions aux témoins?
M. Nelligan: Je prévoyais le faire demain.
Le sénateur Kirby: En temps normal, il passe à la toute fin.
M. Nelligan: Je n'aurai peut-être pas vingt minutes si vous posez toutes ces questions.
Le sénateur Kirby: Tout ce que je dis, c'est que je serais très heureux de laisser Dave finir, puis de terminer la séance. À ce moment-là, nous pouvons continuer demain.
Le sénateur Gigantès: J'ai besoin de trois minutes, si on peut intercaler trois minutes quelque part pour moi.
Le sénateur Tkachuk: Cela me laisse cinq minutes. Je croyais que ma demi-heure était terminée: j'allais donc, enfin, plier bagage pour ainsi dire et laisser les questions à quelqu'un d'autre.
Le président: Il est 20 h 55. Nous en sommes au deuxième volet. Le sénateur Gigantès n'a pas encore eu l'occasion de parler au cours du deuxième volet. Vous n'avez besoin que de trois à cinq minutes?
Le sénateur Kirby: Plutôt que d'interrompre Dave, pouvons-nous laisser Dave finir?
Le président: Oui, puis vous pouvez terminer...
Le sénateur Kirby: Ensuite, le sénateur Gigantès peut...
Le président: D'accord, c'est bon.
Le sénateur Tkachuk: J'ai perdu le fil de... d'accord, je crois bien me rappeler où j'en étais.
Nous parlons d'impôt et du fait que les gouvernements, dans ce cas particulier, vous ne tenez pas compte du fait qu'une administration aéroportuaire locale signifie qu'il n'y a pas de recettes fiscales.
Dans le cas des aérogares 1 et 2, le réaménagement par le secteur privé passerait donc nécessairement par un financement par actions et par emprunt, puis les recettes tirées de concessions, de baux et ainsi de suite. N'est-ce pas?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Pourquoi le gouvernement ne les a-t-il pas laissées... pourquoi étaient-elles... ou est-ce que vous étiez contre l'idée d'imposer des frais de prestations supplémentaires? Le ministère des Transports aurait-il... aimait-il les frais de prestations supplémentaires?
M. Desmarais: Le ministère s'affaire depuis quelque temps à se donner une politique pour ce qui touche les frais de prestations supplémentaires. Je ne sais pas où il en est. Tout de même, dans le cas de Toronto, les frais de prestations supplémentaires posent un problème particulier. Le gouvernement ne peut appliquer des frais de prestations supplémentaires à l'aérogare 3. Nous n'en sommes pas les propriétaires, nous n'en sommes pas les exploitants. Nous pourrions donc seulement appliquer des frais de prestations supplémentaires aux aérogares 1 et 2, ce qui nuit à Air Canada et à toutes les compagnies aériennes qui se trouvent à l'aérogare 1 sur le plan du marketing, par rapport à celles qui se trouvent à l'aérogare 3.
Enfin, si vous aviez le choix, sénateur, vous choisiriez l'aérogare où vous n'êtes pas obligé de verser des frais. On a donc exprimé une très vive inquiétude: si les frais ne sont appliqués qu'aux aérogares 1 et 2, les compagnies aériennes à Toronto pourraient être sérieusement embêtées.
Le sénateur Tkachuk: On applique des frais de prestations supplémentaires à Vancouver parce qu'il faut y financer l'agrandissement de l'aéroport, ce qui ne vaut pas pour les administrations aéroportuaires d'Edmonton, de Calgary ou de Montréal, où la capacité est excédentaire. Ai-je raison?
M. Desmarais: La capacité est excédentaire à Edmonton. Je ne suis pas sûr de la capacité de l'aéroport de Dorval, à Montréal. Je sais qu'ils ont...
Le sénateur Tkachuk: Mais, il y a Mirabel...
M. Desmarais: Il y en a un peu à Mirabel.
Le sénateur Tkachuk: ...il y a, enfin, il y en a un peu. Les administrations aéroportuaires bénéficient toutes d'un bail à long terme, n'est-ce pas? Pour combien de temps?
M. Desmarais: Essentiellement, 40 ans plus une option de 20 ans, je crois. C'est donc un bail de 60 ans...
Le sénateur Tkachuk: Soixante ans. Bon, si je me rappelle bien le concept avancé par Paxport, puis par la Pearson Development Corporation, il fallait prévoir un investissement considérable. Combien de capitaux propres fallait-il?
M. Desmarais: Pour Pearson?
Le sénateur Tkachuk: Oui, la Pearson Development Corporation, pour le bail.
M. Desmarais: À l'étape initiale, 61 millions de dollars, somme qui aurait augmenté par la suite, je crois, mais je ne suis pas sûr du chiffre total absolu par rapport à leur programme d'investissement au total. Je crois que nous avons cela ici. Mais je... c'est 258 millions de dollars qui sont étalés tout au long du projet de réaménagement.
Le sénateur Tkachuk: En capitaux propres?
M. Desmarais: En capitaux propres. Et une dette de 484 millions de dollars.
Le sénateur Tkachuk: Deux cent cinquante millions de dollars sous forme de capitaux propres, et 400 millions de dollars, sous forme de dette. Bon, où diable l'administration aéroportuaire de Toronto va-t-elle chercher 250 millions de dollars?
M. Desmarais: Il va falloir que vous posiez la question à leurs représentants, sénateur.
Le sénateur Tkachuk: Eh bien, je vous la pose à vous, qui représentez le ministère des Transports: comment croyez-vous qu'elle l'obtiendra?
M. Desmarais: Essentiellement, de la même façon qu'on l'a fait à Vancouver. On va à la banque et...
Le sénateur Tkachuk: Et on impose des frais.
M. Desmarais: Il faut trouver une façon quelconque de régler la dette après un certain temps. Je ne sais pas très bien comment elle entend le faire.
M. Jolliffe: Sénateur, ce ne sont pas capitaux propres qu'elle obtient, c'est du financement par emprunt. L'administration aéroportuaire locale n'a pas de capitaux propres. Elle est financée intégralement par emprunt, si je ne m'abuse. Elle emprunte l'argent qu'il lui faut pour l'expansion. Elle accroît ses avoirs propres au fil du temps en réinvestissant ses recettes dans l'entreprise...
Le sénateur Jessiman: Avec ce qu'elle peut obtenir après avoir payé le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral doit en obtenir autant qu'il a toujours obtenu, et c'est l'esprit d'entreprise de l'administration aéroportuaire locale qui lui permettra d'y arriver. Ils n'y ont rien investi eux-mêmes, de sorte que c'est seulement... ce n'est qu'un transfert... enfin, quelle que soit l'affection que nous vous portons, vous, les bureaucrates, les fonctionnaires, enfin, ce n'est qu'un transfert, de votre groupe à un autre. Ce ne sont pas des bureaucrates, mais ils sont nommés par des bureaucrates, de sorte que notre situation ne m'apparaît pas meilleure. Et il va falloir qu'ils fassent exactement ce que vous avez fait il y a quatre, cinq ou six ans.
Tout le travail que vous avez abattu pour faire fructifier ce projet... vous avez abattu une somme colossale de travail, et voilà que tout est perdu. C'est une honte.
Le sénateur Tkachuk: Je ne suis pas... c'est différent... je ne sais pas. Enfin, cela m'importe peu. Ce qui me tracasse, c'est pourquoi... nous sommes ici pour discuter du contrat, pour discuter de la transaction au profit des Canadiens, pour déterminer si c'était une bonne entente pour le Canada, si nous aurions pu opter pour la proposition de T1T2 et de la Pearson Development Corporation. Tout de même, si vous éliminez cela, il faut qu'il y ait des options, n'est-ce pas?
L'administration aéroportuaire locale sera l'option. Vous dites donc que l'administration aéroportuaire de Toronto sera obligée d'emprunter tout l'argent qu'il lui faut pour le projet. Il n'y aura pas de... enfin, comment pourrait-elle obtenir un financement par actions?
C'est donc toute une façon de diriger les affaires d'une entreprise, avec un financement par emprunt de 100 p. 100 et aucun financement par actions.
Qu'arrive-t-il si les Lignes aériennes Canadien ou si Air Canada réduit le trafic arrivant à Pearson? Qu'arrive-t-il s'il y a un ralentissement de l'économie? Qu'arrive-t-il là? Qui se porte à son secours?
M. Jolliffe: Ils ont une forme d'avoir propre, sénateur. Ils ont l'occasion d'exploiter et de gérer l'aéroport, ce qui produit des liquidités. Et voilà de l'argent qui se trouve entre leurs mains, au même titre que l'argent qui pourrait être obtenu par la vente d'actions au sein d'une société ordinaire. Ce sont donc des liquidités "intégrées", qui sont produites dès maintenant en raison de l'exploitation de l'aéroport.
Ils disposent d'une base d'avoirs propres, les liquidités excédentaires par rapport aux dépenses d'exploitation. À l'aide de cet argent et, bien sûr, des fonds tirés de frais de prestations supplémentaires, ils peuvent faire les emprunts nécessaires pour réaménager les pistes et les aérogares.
Le sénateur Jessiman: Ils ne demandent pas d'ordinaire des frais supplémentaires? Soit qu'ils demandent des frais supplémentaires au public, comme on le fait à Vancouver, comme on pourrait le faire ailleurs, selon ce que quelqu'un a dit, ils demandent 5 $ aux habitants de la Colombie-Britannique, 10 $ aux habitants d'Amérique du Nord et 15 $ aux autres. C'est comme cela qu'ils l'obtiennent. Ce sont des frais imposés aux gens qui se servent des installations.
M. Rowat: Eh bien, ils...
Le sénateur Jessiman: Ce sont les frais qu'ils demandent.
M. Rowat: Il y a...
Le sénateur Jessiman: C'est là qu'ils obtiennent les sommes supplémentaires.
M. Rowat: Comme à Vancouver, il y a une disposition prévoyant des frais de prestations supplémentaires.
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Rowat: Et c'est de cette façon qu'ils amasseraient les fonds qu'il leur faut, pour...
Le sénateur Jessiman: C'est donc imposé au public. C'est le public qui se sert des installations qui va payer.
M. Rowat: Exactement. Tout de même, tout exploitant d'aéroport doit garder à l'esprit le fait qu'il existe une certaine concurrence entre les aéroports. Voilà une des considérations dont il faut tenir compte à Pearson. Comment maintenir les coûts des aérogares 1 et 2 à peu près concurrentiels par rapport à ceux de l'aérogare 3, de façon à ne pas demander un prix excessif et, comme John l'a dit, rendre une aérogare préférable à une autre aux yeux du public et, à long terme, s'assurer de ne pas avoir un aéroport dont les prix sont excessifs par rapport aux autres centres aéroportuaires en Amérique du Nord.
Le sénateur Jessiman: C'est vraiment plus important, n'est-ce pas? Il y a de la concurrence dans le monde des aéroports. C'est-à-dire qu'il pourrait y en avoir si le propriétaire de chacun des aérogares n'était jamais le même. Il paraît qu'il n'y a pas un autre aéroport où il y a plus d'un propriétaire? Est-ce juste?
M. Desmarais: Propriétaires des aérogares?
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Desmarais: Oui, il y en a. Il y a l'aéroport Kennedy, à New York...
Le sénateur Jessiman: Lequel?
M. Desmarais: L'aéroport John F. Kennedy, à New York, a différentes aérogares dont le propriétaire n'est pas le même, quoique ce soient des compagnies aériennes, mais ce sont des compagnies aériennes différentes qui possèdent les différentes aérogares.
Le sénateur Jessiman: D'accord. Mais la véritable concurrence se joue entre Toronto, Detroit, Pittsburgh, New York et Chicago puisque le service recherché, pour une bonne part, est le transport des gens entre l'Amérique du Nord et l'Europe et l'Asie. S'il y a donc un aéroport de premier ordre ici à Toronto, il y a beaucoup plus de gens qui y seront attirés.
Et c'est vraiment... même si on peut avoir ce que certaines personnes qualifiaient de monopole, ici, pour ce qui touche le service intérieur à l'aéroport Pearson, ce serait meilleur, plus efficace, plus compétitif par rapport aux autres aéroports. Et voilà ce qui importe le plus pour Toronto, pour l'Ontario et pour le Canada.
Le sénateur Hervieux-Payette: Sinon, les gens peuvent s'arrêter à Mirabel. À ce moment-là, ils n'auront aucun problème.
Le sénateur Jessiman: Un jour peut-être, je l'espère, du moment que vous ne quittez pas.
Le sénateur Hervieux-Payette: Bien de l'espace, bien des portes.
Le sénateur Jessiman: C'est peut-être...
M. Desmarais: Je veux faire une observation rapide à propos des frais de prestations supplémentaires exigés à Vancouver. Les aéroports de Montréal ont décidé de procéder différemment et affichent des profits qui, pour les deux dernières années, se situent entre 25 et 30 millions de dollars, je crois. Ils se servent de cet argent comme garantie pour emprunter les sommes nécessaires à un programme de quelque 200 millions de dollars, je crois, en vue de...
Le sénateur Jessiman: Je m'excuse, mais je n'ai pas entendu: d'où provenaient les 20 millions de dollars?
M. Desmarais: Ils affichent, dans leur bilan, des profits de 20 à 30 millions de dollars par année pour les deux dernières années, dans le réseau des aéroports de Montréal, et je crois qu'ils envisagent un programme d'immobilisations à long terme et ils empruntent en prenant cette somme pour garantie, si vous voulez.
Le sénateur Tkachuk: Ils se sont donc constitué des réserves d'argent qui leur servent de garantie pour les emprunts?
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Jessiman: Est-ce qu'ils le font mieux que vous l'avez fait et c'est pourquoi, ou est-ce que vous demandez moins d'argent?
M. Desmarais: Je n'ai rien à dire à ce sujet, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Eh bien, enfin, connaissez-vous les faits? Ne le savez-vous pas? N'êtes-vous pas les gens qui ont fait ces contrats?
M. Desmarais: Je dirais que l'AAL a probablement un accès plus facile aux capitaux que ne l'avait le ministère, puisque nous ne pouvions crever le budget pour emprunter et que nous avions un problème de déficit.
Le sénateur Tkachuk: Monsieur le président, j'ai dépassé la limite de temps qui m'était accordée... pourquoi est-ce que je ne termine pas cela? Je n'en ai que pour, je veux aborder un sujet tout à fait différent demain. Alors, pourquoi est-ce que je ne termine pas cela demain avec quelques questions pour ensuite passer à un autre sujet. J'ai terminé.
Le président: D'accord. Le sénateur Gigantès, puis le sénateur Kirby vont terminer la séance.
Le sénateur Gigantès: Merci. Vous avez parlé de contenu canadien, ce qui m'a frappé. Qu'entendez-vous par contenu canadien dans l'aménagement du contrat?
M. Desmarais: La structure du consortium, de T1T2 Limited Partnership ou de quelque soumissionnaire que ce soit, devait comporter un certain contenu canadien. Je ne me souviens pas exactement du chiffre qui a été décidé au bout de compte. Vous vous souviendrez que, selon la Loi sur les transports nationaux, par exemple, les compagnies aériennes doivent appartenir à 75 p. 100 à des intérêts canadiens, je crois. C'est le genre de chiffre qu'il fallait établir, et je crois que nous l'avons fixé à 50 ou 51 p. 100, pour ce qui touche les intérêts canadiens. Mais je ne jurerais pas... je ne me souviens pas de ce qui a été décidé exactement, sénateur.
Le sénateur Gigantès: Et l'Accord de libre-échange nord-américain ne s'applique pas ici?
M. Desmarais: Pas dans ce cas, à mon avis. De toute façon, c'était avant la mise en place de l'Accord de libre-échange nord-américain. La demande de propositions a été émise en 1992. L'accord n'a pas été signé avant janvier 1994, je crois.
Le sénateur Gigantès: Je suis nouveau: je suis peut-être donc plus ignorant que mes collègues autour de la table, pour ainsi dire.
Le sénateur Kirby: Je crois qu'il parle de ce sujet en particulier, monsieur le président.
Le sénateur Gigantès: De ce sujet, oui. On dirait que, enfin, pour quelqu'un de l'extérieur qui ne comprend pas cela, que vous avez mis un temps incroyable à établir ce contrat. Est-ce que vous traîniez les pieds au ministère des Transports?
M. Desmarais: Ce n'était pas mon cas, pour moi-même. Ce n'était pas le cas des compagnons de travail que j'avais. Nous mettions beaucoup de diligence à ce travail.
Le sénateur Gigantès: Et vous, monsieur Jolliffe?
M. Jolliffe: Je n'avais pas l'impression de me traîner les pieds, sénateur.
Le sénateur Gigantès: Et vous avez dit, monsieur Desmarais, que ce n'était pas le cas des autres, à vos yeux.
M. Desmarais: Pas à ma connaissance. Les gens avec qui j'ai travaillé ne se sont pas traîné les pieds dans ce dossier.
Le sénateur Gigantès: J'ai été fonctionnaire pendant quelques années, expérience où j'ai été malheureux. Est-ce que vous avez essayé de défendre votre territoire et de vous accrocher à l'aéroport, plutôt que de le laisser aller?
M. Desmarais: Je souscris à l'idée que M. Barbeau a présentée l'autre soir: en défendant mon territoire, je me tue moi-même. Mon travail consiste à mettre en application la politique du gouvernement, quelle que soit cette politique, à un moment donné. Si je n'y parviens pas, je suis plus susceptible de me trouver mort que...
Le sénateur Hervieux-Payette: À jardiner.
M. Desmarais: Ou à jardiner.
Le sénateur Gigantès: Eh bien, à un moment donné, j'ai proposé à mon sous-ministre qu'il abolisse le ministère en entier, qu'il le privatise, et j'ai été tué. Mais je ne défendais pas mon territoire à ce moment-là. Merci.
Le président: Sénateur Kirby?
Le sénateur Kirby: Merci, monsieur le président.
Vous avez dit... je veux être certain d'avoir bien compris, c'est tout, parce que je n'ai pas pris de notes. Si ma mémoire fait défaut, dites-le moi... vous avez rappelé aux gens des échelons supérieurs les principes directeurs d'Air Canada et vous avez présumé, de ce fait, que ceux-ci feraient partie de la documentation mise à la disposition des soumissionnaires. N'est-ce pas?
M. Desmarais: J'ai dit que nous étions conscients de la question des principes directeurs au cours de la demande de propositions. J'ai eu des discussions...
Le sénateur Kirby: Au cours de la rédaction de la demande de propositions.
M. Desmarais: Au cours de la rédaction de la demande de propositions. Et j'ai eu plusieurs discussions avec M. Berigan. À un moment donné, il a été décidé que cela ne figurerait pas dans la demande de propositions. Cette décision est venue de M. Berigan, et je présume qu'il l'a obtenue, lui, d'échelons supérieurs.
Le sénateur Kirby: Avez-vous demandé pourquoi cela ne devait pas figurer dans la demande de propositions?
M. Desmarais: Non, sénateur.
Le sénateur Kirby: Avez-vous idée pourquoi cela ne l'était pas?
M. Desmarais: Comme je l'ai dit, nous avions la lettre d'Air Canada...
Le sénateur Kirby: Ce qui faisait douter des choses.
M. Desmarais: Pardon?
Le sénateur Kirby: Ce qui faisait douter des choses, ce qui faisait que les choses n'étaient pas claires.
M. Desmarais: Cela faisait douter des choses. Nous avions la lettre préparée par Air Canada en 1990 où la société disait appuyer sans réserve la proposition de Paxport, ce qui, en quelque sorte, mettait en doute les principes directeurs de 1989, dans la mesure où Air Canada appuyait sans réserve la privatisation, ce qui supposait la location de l'aérogare à quelqu'un d'autre. Cela faisait douter des choses. Par conséquent, on pouvait très bien douter de ce que ces choses existaient encore ou, si vous voulez, de ce qu'elles aient été répudiées par l'autre partie, sur le plan juridique.
Le sénateur Kirby: L'omission d'inclure dans la pièce ou dans la demande de propositions elle-même le document sur les principes directeurs ne peut guère être qualifiée de tentative délibérée de sabotage?
M. Desmarais: Non, sénateur. Comme je l'ai dit, la documentation dans la pièce devait comprendre les baux, les permis, les contrats qui étaient en vigueur et en place à ce moment-là. C'était là une chose qui était contestée, qui n'était pas forcément considérée comme étant exécutoire ni nécessairement en place.
Le sénateur Kirby: Pouvez-vous donc nous dire pourquoi, selon vous, certains des témoins que nous avons déjà accueillis, et M. Broadbent en particulier, ont bel et bien fait état de cette omission d'inclure les principes directeurs dans la pièce destinée à la documentation, le fait qu'ils n'aient été découverts que très tard, en mars ou en avril, je crois, pourquoi cela a consterné tout le monde à ce point? Et pourquoi les témoins nous ont-ils présenté la chose comme s'il s'agissait presque d'une tentative délibérée, comme si quelqu'un avait délibérément essayé de saboter l'opération?
M. Rowat: Comme je l'ai dit plus tôt aujourd'hui, il me semble qu'il est assez difficile de dire pourquoi le témoin antérieur a présenté les choses de cette façon.
Le sénateur Kirby: Est-il juste de dire que c'était exagéré, que cette façon de présenter les choses est exagérée?
M. Rowat: À l'époque, j'ai parcouru ce dossier, j'ai trouvé que c'était un peu plus dramatisé, un peu exagéré, et un certain nombre de documents du dossier que j'ai obtenus à la fin du mois de juin m'ont laissé voir qu'il y avait au moins deux façons d'interpréter ces principes directeurs, qu'il était possible de faire valoir un argument tout autant que l'autre.
Le sénateur Kirby: Je me demande si je peux parler maintenant de quelques documents, et je fais toujours circuler les documents que je regarde au moment où je les aborde, mais dans le cas qui nous occupe, je veux faire allusion à deux documents que le sénateur Bryden a utilisés la semaine dernière, de sorte que je n'ai pas... je ne crois pas... je m'en remets à mon adjoint. Je ne crois pas avoir fait de photocopie.
Le premier document, qui provient du Conseil du Trésor, porte le numéro 001107... c'est le sénateur Bryden qui l'a présenté la semaine dernière. Ce n'est pas celui qui a causé le problème.
Je ne sais pas s'il y a... Ross, y a-t-il un exemplaire pour les témoins? D'accord.
Monsieur le président, permettez-moi d'inverser l'ordre dans lequel je vais procéder. J'allais faire quelque chose. J'y reviendrai demain matin. J'allais parler des deux documents que le sénateur Bryden a déposés devant le comité, mais je serais heureux de le faire demain matin. Je vais changer de document et passer à autre chose maintenant. C'était le numéro 001107, un document du Conseil du Trésor.
Parfait. Je reviendrai sur ces documents demain matin.
Laissez-moi parler de documents dont j'ai des exemplaires. En faisant faire les photocopies, je n'ai pas fait faire les photocopies des deux documents auxquels le sénateur Bryden a fait allusion.
Ross, puis-je avoir le document sur lequel j'ai inscrit la lettre C, le document qui porte le numéro 001520. On y trouve la lettre C. C'est une note de Mme Huguette Labelle, sous-ministre des Transports, à M. Paul Gauvin.
Nous en avons des exemplaires, sénateurs.
Pouvez-vous en donner un exemplaire aux témoins?
Je veux parcourir le document... ceci terminera la séance, monsieur le président.
Je veux parcourir le document avec vous et vous poser quelques questions à ce sujet. D'accord?
Monsieur Rowat, dites-nous simplement quel est ce document. D'abord, qui est Paul Gauvin, puisque c'est un nom que nous n'avons pas encore vu, et ensuite, dites-nous brièvement ce sur quoi le document porte. Enfin, j'aimerais vous poser quelques questions à son sujet.
M. Rowat: D'accord. Paul Gauvin était le sous... il est sous-ministre adjoint aux finances et à l'administration, comme on dit, je crois. Est-ce le bon titre?
M. Desmarais: Oui.
M. Rowat: Et c'est le conseiller financier, le chef des finances du ministère.
Le sénateur Gigantès: Des Transports.
M. Rowat: Oui, du ministère des Transports.
Le sénateur Kirby: Et ce document compare la proposition de Paxport au scénario de référence de Transports Canada. Pouvez-vous définir ce qu'on entend par... si vous le lisez, vous allez constater que le scénario de référence de Transports Canada consiste à conserver la responsabilité des aérogares 1 et 2 au ministère. Est-ce bien le cas?
M. Desmarais: Essentiellement, oui, et les coûts qui y sont associés.
Le sénateur Kirby: Vous allez remarquer que cela confronte la proposition de Paxport et... permettez-moi d'appeler cela simplement le scénario de référence de Transports Canada. Pourquoi une telle étude a-t-elle été réalisée plus d'un mois avant que l'on ait effectivement accordé le contrat à Paxport? Le moment choisi me paraît curieux.
M. Rowat: Il va falloir que je pose la question à M. Desmarais. Nous étions en novembre...
Le sénateur Kirby: D'accord. Je m'excuse, monsieur Rowat. Je posais la question à quiconque pouvait...
M. Desmarais: Je crois que vous allez pouvoir lire, au bas de la lettre:
Les conclusions ont été soumises au Groupe des aéroports, qui en tiendra compte dans la préparation de sa soumission à l'intention des ministres.
Il s'agissait donc de renseignements que nous avons utilisés pour préparer l'évaluation, en prévision de l'approbation.
Le sénateur Kirby: Vous n'avez donc pas fait de comparaison avec la proposition de Claridge? Vous n'avez pas fait de comparaison semblable avec la proposition de Claridge?
M. Desmarais: Non. Je ne crois pas, pas à l'époque.
Le sénateur Kirby: Pourquoi?
M. Desmarais: Parce qu'à l'époque, nous savions, à Transports Canada, quelle proposition nous allions recommander aux ministres. Nous le savions, essentiellement, depuis le mois d'août. Nous attendions la vérification faite par RCMP, qui nous a été soumise en octobre...
Le sénateur Kirby: Il nous faudrait préciser que... les audiences sont télévisées.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Kirby: RCMP est l'acronyme d'une société d'experts-comptables: Raymond, Chabot et deux autres noms.
M. Desmarais: Oui, une société de Montréal.
Le sénateur Gigantès: Martin, Paré.
Le sénateur Kirby: Vous comprenez pourquoi cela peut porter à confusion.
M. Desmarais: Oui, je comprends. De toute façon, nous attendions son rapport de vérification, que nous avons reçu en octobre. Nous avions en main le rapport d'évaluation, qui avait été achevé à la mi-septembre. À ce moment-là, nous nous préparions à présenter un exposé aux ministres à ce sujet. Nous savions qui nous allions recommander, et c'est le travail qui devait mener à la préparation du document destiné aux ministres.
Le sénateur Gigantès: Quand vous parlez de l'évaluation de RCMP... Raymond, Chabot, Martin, Paré, c'est ce rapport dont les auteurs disent: Nous avons étudié la méthodologie de la méthodologie parce que nous voulions savoir si les paramètres de la première méthodologie étaient appliqués dans la deuxième méthodologie, sans jamais toucher au fond? C'est ce rapport?
M. Desmarais: Je ne vous suis pas, sénateur.
Ils ont fait deux rapports.
Le sénateur Gigantès: Je n'ai pas suivi...
Le sénateur Kirby: Pour être bref, la réponse à votre question est "oui".
Je veux parcourir l'étude avec vous, mais avant de le faire, avez-vous quelque chose à dire à propos de l'avant-dernier paragraphe de la feuille de présentation?
De fait, pourquoi n'en faites-vous pas la lecture, pour le compte rendu. Je suis curieux de savoir ce que vous en pensez.
M. Desmarais: Voulez-vous que je lise cela?
Le sénateur Kirby: Oui, seulement le paragraphe qui commence par "les conclusions".
M. Desmarais: Voici:
Les conclusions de l'analyse faite jusqu'à maintenant figurent à la page 11. Elles peuvent être résumées comme suit: la proposition de Paxport, sous sa forme actuelle, serait certainement plus avantageuse pour l'État du point de vue financier, mais seulement à un coût très élevé pour les compagnies aériennes et les voyageurs.
Le sénateur Kirby: Étiez-vous membre de l'équipe qui a fait cela?
M. Desmarais: Non, sénateur. Cela a été fait au groupe des finances, pas au groupe des aéroports.
Le sénateur Kirby: Êtes-vous d'accord avec ces conclusions?
M. Desmarais: Oui, sénateur.
Le sénateur Kirby: Néanmoins, le groupe des aéroports, entre autres, allait recommander à l'État une proposition qui était nettement plus avantageuse pour l'État... je crois que personne ne l'a jamais contesté... mais, comme la conclusion le fait valoir, à un coût très élevé pour les voyageurs et pour les compagnies aériennes.
M. Desmarais: Si la proposition était acceptée sans modification, oui.
Le sénateur Kirby: D'accord, je me demande alors si vous pourriez...
Le sénateur Tkachuk: Pourriez-vous lui demander de nous dire pourquoi?
Le sénateur Hervieux-Payette: Ä la page 11.
Le sénateur Jessiman: Non, il pose la question au témoin.
M. Desmarais: Parce que Paxport se proposait de renégocier le bail avec Air Canada dès le départ, ce qui aurait... et j'ai entendu diverses estimations ici. Keith, le loyer était-il le double de ce qu'ils payaient à ce moment-là, tout de suite, sans aucune construction? C'est évidemment le passager qui aurait payé la note, les coûts commençaient donc à augmenter très sérieusement, sans que les compagnies aériennes ni quelque autre personne en profitent. Le prix à payer était donc très élevé pour les compagnies aériennes et pour les voyageurs, si nous acceptions la proposition sans modification, même si le gouvernement touchait un loyer important.
Le sénateur Jessiman: C'est pourquoi vous avez posé les conditions dont il est question dans la lettre où vous acceptez la proposition.
M. Desmarais: Tout à fait.
Le sénateur Tkachuk: Ils auraient donc payé essentiellement la même somme que les Lignes aériennes Canadien paient à l'aérogare 3.
M. Desmarais: À l'époque, mais cela augmenterait par la suite avec la progression des travaux.
Le sénateur Tkachuk: Si le gouvernement continuait à subventionner Air Canada, les voyageurs seraient donc mieux placés?
M. Desmarais: Ce n'est pas ce que je dis.
Le sénateur Kirby: Allons, les gars, il me reste dix minutes.
Le sénateur Tkachuk: Je regarde cela, je ne suis pas comptable, mais j'arrive à déterminer ce qui est dit.
Le sénateur Kirby: Monsieur le président, je tolère très bien les interruptions, mais je suis pris dans une course contre la montre, n'est-ce pas?
Le sénateur Tkachuk: Je sais, et je m'en excuse. Je vous en prie, sénateur Kirby.
Le sénateur LeBreton: C'est seulement que la tête commence à nous tourner un peu.
Le sénateur Kirby: La tête vous tourne? Je lui ai seulement demandé de lire ce qui se trouvait dans le document. Enfin, ce n'est pas de ma faute. Je comprends bien pourquoi vous n'aimez pas cela, mais ne m'accusez pas d'en être responsable.
Le sénateur LeBreton: Allons, sénateur Kirby, vous n'êtes pas à Canada A.M.
Le sénateur Kirby Non, malheureusement, je n'ai pas Huey ici à mes côtés. Ce serait beaucoup plus divertissant.
Est-ce qu'on peut passer à... je veux que vous nous aidiez à parcourir le document pour en voir quelques points. Monsieur Rowat?
M. Rowat: Simplement pour répondre à la question que vous avez posée auparavant, il y est dit clairement, comme John en a convenu, que le prix à payer serait très élevé pour les compagnies aériennes et les voyageurs.
La démarche a tiré à sa fin, et la meilleure offre acceptable dans l'ensemble a été choisie. Puis, quand les conditions ont été établies, Victor Barbeau a énoncé très clairement qu'on se préoccupait de la viabilité financière de la proposition, à la lumière des réalités financières qui touchent l'industrie aérienne.
Le sénateur Kirby: D'accord.
M. Rowat: Ce qui a soulevé d'autres préoccupations au gouvernement. Même s'il a choisi la meilleure offre dans l'ensemble, je crois qu'il s'est rendu compte qu'il y avait certaines difficultés financières. Il l'a précisé et a dit "négocions".
Le sénateur Kirby: D'accord. Est-ce qu'on peut prendre... je veux aborder trois ou quatre questions tandis que nous parcourons le document.
Prenons la page 3, celle où il est question du scénario de référence révisé. Si je comprends bien, votre scénario de référence révisé... encore une fois, pour que tout le monde comprenne bien, il s'agit du cas où les aérogares 1 et 2 continuent à être la propriété de...
M. Rowat: Du gouvernement fédéral.
Le sénateur Kirby: Vous proposez un programme d'immobilisations qui cadre avec celui de Paxport. Est-ce comme cela qu'il faut interpréter votre première supposition?
M. Desmarais: C'est ce qui est dit là, oui, sénateur.
Le sénateur Kirby: Tout de même, vous avez négocié plus tard avec Paxport une solution qui représentait considérablement moins que les 767 millions de dollars. C'est bien cela?
M. Desmarais: Oui, sénateur.
Le sénateur Kirby: Par conséquent, en fait, le scénario de référence révisé, du point de vue du programme d'immobilisations, était nettement supérieur à l'accord que vous avez fini par conclure. C'est bien cela?
M. Desmarais: Je vous demande un peu de patience. Les 767 millions de dollars sont exprimés en dollars constants de 1992-1993. Exprimé en dollars courants, cela donne plus ou moins 858 millions de dollars, dont 686 millions de dollars pour la construction de l'aérogare et, grosso modo, le reste allant au développement commercial, à quelques hôtels et à un centre des congrès, je crois.
En négociant le contrat, nous avons exclu les hôtels et le centre des congrès, de sorte qu'il ne restait que les aérogares.
Le sénateur Kirby: De toute façon, la réalité est telle que le scénario de référence révisé prévoit une meilleur investissement que l'accord qui a été négocié au bout du compte, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Oui, c'est un peu élevé, par rapport à ce que nous avons obtenu à l'origine. Parce qu'il ne s'agit que des aérogares.
M. Rowat: Parce que les éléments comparés ont changé.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Jessiman: Pouvez-vous expliquer à nouveau, Monsieur Rowat?
Le sénateur Kirby: Oui, j'allais dire: répétez-moi cela.
M. Rowat: Quand cette analyse a été faite, elle comparait la proposition de Paxport à ce moment-là et le scénario de référence à ce moment-là.
Quand la proposition définitive de Mergeco a été parachevée, les éléments n'étaient plus les mêmes que dans le cas du scénario de référence, celui qu'on avait utilisé à l'origine.
Le sénateur Jessiman: Est-ce c'était meilleur ou pire que le scénario de référence?
M. Rowat: Cela ne se comparait pas.
Le sénateur Jessiman: D'accord, des pommes et des oranges.
M. Desmarais: Je crois qu'une comparaison entre ce scénario et l'accord définitif équivaudrait bien à comparer des pommes et des oranges.
Le sénateur Kirby: Soit dit en passant, cela soulève une question intéressante, et je veux revenir à ce document. Avant de consentir à l'accord définitif, êtes-vous revenus... enfin, je comprends pourquoi vous avez fait cela. Vous avez effectué cette analyse, pour que les ministres puissent comparer cela à une option logique, le maintien par le gouvernement des responsabilités ou de la propriété des aérogares 1 et 2, avec une proposition.
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Kirby: Ensuite, vous négociez une nouvelle proposition. À ce moment-là, quand je vous demande de comparer la nouvelle proposition et le scénario de référence, vous dites que vous ne pouvez le faire puisqu'il s'agit de pommes et d'oranges.
De fait, y a-t-il, quelque part, une comparaison qui a été faite, avant le parachèvement de l'entente, qui compare vraiment ce qui aurait dû être comparé, c'est-à-dire l'accord négocié, d'une part, et le scénario de référence révisé, d'autre part?
M. Rowat: Si vous faites allusion au document de M. Stehelin, que vous allez accueillir comme témoin plus tard, vous allez constater qu'il a bel et bien fait cette comparaison et essayé, je crois, de signaler le genre de différence dont il faut tenir compte entre les deux modèles et essayer, dans son analyse, de pondérer les diverses positions.
Le sénateur Kirby: Vous avez l'avantage. Je ne le dis pas méchamment, mais c'est seulement que vous avez l'avantage. Quand il est question de témoin qui doit comparaître au moins un jour plus tard, il se trouve que nous n'avons pas encore étudié les documents. Je dois donc prendre votre parole, mais je n'ai pas encore étudié les documents de M. Stehelin.
M. Desmarais: Pour être plus bref, sénateur Kirby, je crois que c'est un scénario de référence qui a été établi au début du mois d'août en 1993.
Le sénateur Kirby: Et avons-nous...
M. Desmarais: Je ne sais pas si cela a été produit, sénateur.
Le sénateur Kirby: Cela pourrait se révéler utile, monsieur le président. Je ne le demande pas tout de suite. Je dis simplement que si nous pouvions le trouver...
M. Rowat: Je signale que la documentation que j'ai reçue ici, qui, je présume est la même que la vôtre, comprend une lettre de M. Stehelin, qui porte un numéro. Je pourrais la trouver pour vous.
Le sénateur Kirby: Par ailleurs, il y aurait un document de M. Stehelin dans la documentation que nous avons reçue, mais quand j'ai réalisé qu'il viendrait comparaître, pour être franc, je n'ai pas pris le temps de l'étudier parce que ce sera la semaine prochaine.
D'accord. Puis-je vous demander ce que vous pensez de... toujours à propos du scénario de référence. C'est à propos du cinquième point, le deuxième à partir du bas, vous dites que les frais d'utilisation imposés aux compagnies aériennes seraient augmentés de manière à correspondre aux niveaux demandés à l'aérogare 3, en dollars par passager. Puis, vous convertissez cela en dollars par passager sur la ligne suivante.
Puis, à la page 5, à l'avant-dernier point, il est dit que les frais d'utilisation demandés aux compagnies aériennes augmenteraient à un taux annuel effectif de 1 p. 100 à compter de 1993-1994, ce qui représente un minimum très pessimiste.
Qu'entend-on par minimum très pessimiste? Est-ce dire que vous avez expressément fondé votre calcul sur l'idée de réduire autant que possible l'augmentation des frais d'utilisation imposés aux compagnies aériennes?
M. Desmarais: Je crois qu'il faudrait dire "optimiste" plutôt que "pessimiste", sénateur.
Le sénateur Kirby: Ça change légèrement le sens de la phrase.
M. Desmarais: Oui, je sais. Je vous dirai: dans les scénarios de référence que j'ai étudiés depuis, le pourcentage envisagé, un taux de croissance réel de 1 p. 100, c'est-à-dire 1 p. 100 plus le taux d'inflation, était considéré comme une prévision optimiste si le gouvernement continuait à exploiter les aérogares. C'est pourquoi j'ai dit qu'il faudrait probablement lire "optimiste", mais il faudrait que je vérifie cela auprès de l'auteur.
Le sénateur Kirby: Cela me paraît aussi beaucoup plus logique. Vous comprenez que j'ai été dérouté: d'une part, vous avancez que les compagnies aériennes auraient eu de la difficulté à supporter les augmentations de frais et, d'autre part, vous parlez d'un taux de croissance réel de 1 p. 100, ce qui équivaut à plus 1 p. 100...
M. Desmarais: Un pour cent plus le taux d'inflation.
Le sénateur Kirby: Je comprends cela. J'avais de la difficulté, la réponse, c'est donc que "pessimiste" devrait être "optimiste".
M. Desmarais: Je crois. Je peux vérifier auprès de l'auteur, si vous voulez.
Le sénateur Kirby: Non, non, vous pourriez me le faire savoir. Au moins, je le comprends maintenant, ce qui n'était pas le cas la première fois où je l'ai vu.
Je vous demanderais d'aller à la page 10... en fait, prenons la page 9. Au bas de la page 9, il y a... encore une fois, on poursuit la comparaison financière avec Paxport.
Encore une fois, il y a une série, selon le scénario de référence qu'on utilise, on voit qu'il y aurait une augmentation considérable des frais de prestations supplémentaires, comme vous le dites, 9,05 $, ils seraient plus de trois fois supérieurs aux frais actuels en vertu de la proposition de Paxport, puis les frais seraient plus élevés, dans d'autres cas.
À ce stade de la discussion ou de l'analyse, est-ce qu'on se préoccupait, pour revenir... en fait, à l'observation sur la feuille d'accompagnement, des effets que cela aurait sur les passagers? Ou est-ce qu'on revient à la feuille d'accompagnement, au cas où l'État serait mieux placé qu'auparavant, mais que les compagnies aériennes et les passagers en subiraient les conséquences et tant pis?
M. Desmarais: Je crois, sénateur, nous avons tous prêté attention aux coûts qui incomberaient aux compagnies aériennes et aux passagers tout au long du processus d'évaluation. J'ai entendu Connie Edlund dire au comité, il y a deux semaines, comment les choses allaient changer. Son rapport était un bon précis du rapport d'évaluation du comité de direction des affaires, si vous voulez. Nous étions au courant des changements qui allaient se produire. Nous savions que la proposition était "élevée". Nous nous en préoccupions. Nous nous efforcions de régler cela dans les négociations.
Le sénateur Kirby: Vous savez quoi? Je vous ai entendu dire, je vous ai entendu dire plusieurs fois, les trois, que vous alliez régler ça pendant les négociations. Il y en avait des choses qui ne faisaient pas votre affaire dans la proposition initiale, des choses que vous alliez régler par la négociation.
Enfin, combien... je ne sais pas si j'ai jamais vu une négociation où les gens trouvaient tant de choses à redire à une proposition initiale, tout en allant quand même de l'avant et en retenant cette proposition à des fins de négociation. Enfin, à un moment donné...
Le sénateur LeBreton: Où a-t-on dit...
Le sénateur Jessiman: Où ont-ils dit que cela ne faisait pas leur affaire?
Le sénateur Kirby: Non, je m'excuse. Je m'excuse, il a affirmé plusieurs fois ce soir, ou encore cet après-midi et ce soir, ces hommes ont employé une phrase comme celle qui a été employée il y a une minute, c'est-à-dire: essentiellement, nous n'aimions pas cela, mais nous allions essayer de contourner le problème par la négociation. Je ne fais que paraphraser. C'est exactement ce qu'ils ont dit.
Avant d'aborder la question dont je voulais traiter, je voudrais seulement clarifier ce que vous avez dit, monsieur Desmarais, à propos de la demande de propositions et l'omission d'inclure dans la pièce les "principes directeurs" d'Air Canada.
Tout ce que je dis, c'est qu'il semble y avoir eu toute une série de questions qui vous donnaient cette impression.
M. Rowat: Sénateur, si vous regardez la lettre que Victor a envoyée, elle exposait à l'intention de la société le genre de questions que le gouvernement fédéral voulait renégocier. De fait, en dernière analyse, toutes ces questions ont été négociées et réglées, y compris celle-ci, que vous allez sans doute aborder demain, c'est-à-dire le règlement définitif qu'il y a eu avec Air Canada et, du même coup, la détermination des frais de prestations supplémentaires ou du coût dans le cas de cet aéroport.
Enfin, la dernière conclusion que nous avons tirée ou encore le dernier bloc de questions qui a été négocié a fini par être... cela a fait baisser le coût d'exploitation de l'aéroport dans son ensemble, de cette aérogare en particulier, autour de celui de l'aérogare 3, de manière à avoir des prix concurrentiels. Le prix assumé par les passagers n'était donc jamais aussi élevé que ce que la société avait envisagé dans sa proposition initiale.
Voilà qui me semble répondre à votre question. Pour être franc, cette analyse, je crois...
Le sénateur Kirby: Je ne sais pas ce que vous nous montrez.
M. Desmarais: Le scénario de référence de Transports Canada.
M. Rowat: Cette analyse est celle qui... zéro, zéro...
Le sénateur Kirby: D'accord, c'est le document dont nous parlions. Vous avez simplement dit "cette" analyse. Je ne savais pas ce que vous nous montriez.
M. Rowat: Je crois que vous seriez bien mieux de mettre de côté cette analyse pour y revenir plus tard et de regarder la comparaison qui concerne l'accord définitif, qui met en regard le scénario de référence dans la dernière analyse et ce que nous avons effectivement...
Le sénateur Kirby: Et un scénario de référence révisé.
M. Rowat: ...et notre accord révisé dans la dernière analyse. Voilà une comparaison appropriée. Vous nous demandez de comparer la proposition initiale et un scénario de référence qui a été préparé en novembre 1992.
Le sénateur Kirby: Eh bien, vous l'avez fait. Enfin, c'est ce que fait ce document, n'est-ce pas?
M. Rowat: Oui, il est vrai que, mais...
Le sénateur Kirby: Enfin, je ne vous ai pas demandé de le faire. Vous autres, les membres du groupe de M. Desmarais, je m'excuse, les membres du groupe des finances l'ont fait.
M. Rowat: Tout de même, le genre de questions auxquelles vous en venez, implicitement... qu'avez-vous fini par conclure dans tout cela? Si vous voulez poser ce genre de questions, il vaudrait peut-être mieux d'aller directement au fond des choses: qu'est-ce que nous avons négocié au cours de l'été 1993 et comment peut-on comparer cela au scénario de référence? Il serait plus facile pour nous de répondre à des questions de ce genre.
Le sénateur Kirby: Sauf que, pour ce que ça vaut, je n'ai pas cette étude. Vous me dites que cette étude existe.
M. Desmarais: Je crois qu'elle existe, sénateur, et nous allons devoir la trouver pour vous. Nous allons le faire.
Le sénateur Gigantès: Mais n'est-ce pas un peu comme négocier une entente prénuptiale après un mariage forcé?
M. Desmarais: Nous n'étions pas encore mariés à ce moment-là, sénateur.
Le sénateur Gigantès: Vous alliez conclure un accord. Il semble qu'il a été décidé de conclure cet accord, malgré toutes les difficultés qu'il présentait, et les difficultés qui feraient l'objet des négociations par la suite.
Le président: Messieurs, il me semble qu'il est 21 h 30.
Le sénateur Kirby: Monsieur le président, si cela est possible, je vais accepter l'offre de M. Rowat, avec bonheur, sauf que je ne dispose pas de cette autre comparaison. Si quelqu'un pouvait trouver cette autre comparaison d'ici à demain matin... ce qui ne sera peut-être pas possible, je le comprends bien, et je ne m'en plains pas si on ne la trouve pas... cela serait utile.
M. Nelligan: On peut se procurer le rapport Stehelin du mois d'août.
Le sénateur Kirby: Mais il laisse entendre ici qu'il pouvait y avoir un autre document, à part celui-ci.
M. Desmarais: Je laisse entendre qu'il y a peut-être bien un autre scénario de référence qui a été établi fin juillet, début août 1993.
M. Nelligan: Je me suis fait une note. Je ne connais pas ce document particulier, mais nous allons essayer de le trouver.
M. Rowat: Et encore, il y a un document que vous avez bel et bien en votre possession et qui pourrait se révéler utile. C'est le document qui porte le numéro 000073 et qui est daté du 29 octobre 1993. Il a pour titre Briefing dec, Terminal 1-Terminal 2 privatization.
C'est un résumé, mais il y est question du genre de comparaison que nous avons fait. Et je crois que c'est un document qui aidera à tirer au clair plusieurs questions à l'aide d'un tableau comparatif concis.
Le sénateur Kirby: Puis-je aussi dire... je présume que je peux reprendre la parole demain matin, n'est-ce pas? Car je n'ai certainement pas eu une demie... ah, alors, je n'ai eu que dix minutes environ.
Le sénateur LeBreton: Combien de temps a-t-il eu pour...
Le sénateur Kirby: Dix minutes peut-être, grâce à...
Le président: D'accord. D'accord.
Le sénateur Gigantès: Vous étiez toujours en train d'interrompre, sénateur LeBreton.
Le président: D'accord. Nous ajournons jusqu'à 9 h, demain matin.
Encore une fois, merci, messieurs, d'être revenus. Vous vous êtes montrés très patients.
La séance est levée.