Délibérations du comité spécial du Sénat sur les
Accords de l'aéroport Pearson
Témoignages
Ottawa, le mercredi 27 septembre 1995
[Traduction]
Le comité sénatorial spécial sur les accords de l'aéroport Pearson se réunit aujourd'hui, à 9 heures, en vue d'étudier tous les aspects inhérents aux politiques et aux négociations ayant mené aux accords relatifs au réaménagement et à l'exploitation des aérogares 1 et 2 de l'aéroport international Lester B. Pearson, de même que les circonstances ayant entouré l'annulation des accords en question, ainsi que de faire rapport à ce sujet.
Le sénateur Finlay MacDonald (président) occupe le fauteuil.
Le président: Bienvenue une nouvelle fois devant nous, messieurs. Monsieur Nixon, vous étiez...
Le sénateur Lynch-Staunton: Monsieur le président, avant d'aller plus loin et de commencer notre interrogation des témoins, j'aimerais invoquer le Règlement.
Le président: Alors, allez-y.
Le sénateur Lynch-Staunton: Cela vient prolonger mon rappel au Règlement d'hier, que je peux maintenant étoffer un peu mieux, étant donné que j'ai eu l'occasion de lire la transcription de ce qui a été dit hier. Vous vous souviendrez que dans une discussion au sujet du groupe Morrison Hershfield, M. Nixon a dit, et je cite:
Ils m'ont dit qu'à leur avis, Paxport semblait bien en voie de l'emporter et qu'ils ont jugé préférable de ne pas donner suite. Ils ont dit que c'était décidé d'avance.
J'ai invoqué le Règlement, la discussion s'est poursuivie et M. Nixon a répondu en citant le passage que voici, tiré d'un mémoire de la province de l'Ontario:
La province sait que cette initiative fédérale a peut-être donné lieu à certaines irrégularités. Elle reconnaît que certains des participants à ce contrat se sont peut-être comportés d'une façon contraire aux bonnes pratiques commerciales. On est également largement convaincu dans le milieu des affaires, le milieu de l'aviation et les sphères gouvernementales que le gouvernement fédéral a enfreint de façon flagrante ses propres règles régissant la passation des marchés ou a favorisé injustement l'une des soumissions pour le réaménagement de l'aérogare.
Il s'agit d'un mémoire envoyé par le gouvernement de l'Ontario à M. Nixon. La discussion au sujet de la validité de ces allégations s'est alors poursuivie et M. Goudge nous a dit, et je cite:
Pour ce qui est des faits permettant de conclure que cette transaction avait pu faire l'objet de manipulations politiques, les opinions de Morrison Hershfield me paraissaient confirmer cette conclusion.
L'objet premier de l'enquête en cours est d'examiner les conclusions du rapport Nixon et d'en conclure qu'elles sont justes ou qu'elles ne le sont pas. Nous avons ici la preuve qu'une allégation prononcée par un soumissionnaire mécontent a compté pour une part importante d'une conclusion importante, soit que le contrat a peut-être été conclu après manipulations politiques. Monsieur le président, à moins que les témoins ne disposent de preuves en ce sens, ils devraient rétracter leurs déclarations. S'ils insistent pour dire que ces opinions considérées comme fondées, bien qu'aucune preuve en ait été fournie au comité, suffisent pour en arriver à la conclusion qu'a tirée M. Nixon, alors nous avons pour obligation de convoquer des témoins qui ont été parties à ces allégations pour que ceux-ci nous expliquent pourquoi ils ont pensé ou comment ils ont conclu qu'il y avait eu manipulations politiques dans le processus d'appel d'offres, surtout que nous n'avons jusqu'ici entendu que le contraire et qu'il est pour nous important d'entendre tous les avis. Et s'il est des avis qui contestent le processus d'appel d'offres et qui allèguent que celui-ci a été irrégulier et truqué, alors cela frise la criminalité. Il s'agit d'allégations extrêmement graves et pour lesquelles pas le moindre brin de preuve n'a été fourni au comité. Par conséquent, monsieur le président, je demande par votre intermédiaire aux témoins de nous fournir des preuves, faute de quoi je vous exhorte à convoquer des personnes qui puissent appuyer ces allégations, et je m'arrêterai là pour l'instant, monsieur le président.
Le président: Votre question s'adresse à...?
Le sénateur Lynch-Staunton: Je vous la pose à vous, mais je... je vous soumets mon rappel au Règlement.
M. Robert Nixon, président du conseil d'administration, Énergie atomique du Canada Limitée: Que je sache, c'est un rappel au Règlement, et j'aimerais, si vous me permettez, réagir.
Le sénateur Lynch-Staunton: Des témoins peuvent-ils se prononcer sur un rappel au Règlement?
Le président: Eh bien, c'est...
M. Nixon: Je n'ai que ceci à dire, monsieur le président. Mes commentaires et, je pense, ceux de M. Goudge, sont venus en réponse à des questions posées par le sénateur LeBreton, qui nous avait demandé ce qu'on nous avait dit à l'occasion de certaines réunions. Je pense qu'il est de notre devoir de lui faire rapport, à elle, ainsi qu'aux autres sénateurs, sur ce qui a été dit à ces occasions, et tout particulièrement dans des cas comme celui-ci, où l'incidence est considérable, et c'est pourquoi j'ai jugé important hier de lire aux sénateurs ce paragraphe du mémoire de la province de l'Ontario, qui fait partie de la documentation fournie aux sénateurs, car celui-ci a, à un autre niveau de justification, si je puis utiliser ce terme, son importance propre. Je n'ai rien d'autre à dire tout de suite au sujet de ces questions, mais je répondrai aux questions que voudront me poser les honorables sénateurs.
Le président: Il y a une différence entre les deux. Je pense que vous avez fait intervenir le témoignage du gouvernement de l'Ontario pour montrer que vous utilisiez également des ouï-dire.
M. Nixon: C'est exact, monsieur.
Le président: Mais je n'ai pas très bien saisi l'expression utilisée, sénateur Lynch-Staunton. Était-ce: «la demande de soumission a été truquée»?
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
M. Nixon: Selon les gens de cette compagnie qui nous ont parlé, l'expression était: «c'était décidé d'avance».
Le sénateur LeBreton: Était-ce M. Dale Patterson?
M. Nixon: Cette expression a été employée à l'occasion d'une réunion à laquelle assistait M. Dale Patterson. Je ne peux pas vous dire qui a prononcé ces mots.
Le sénateur LeBreton: Et M. Dale Patterson est-il membre du personnel ou vice-président de la compagnie?
M. Nixon: Il était présent en tant que participant aux activités de la compagnie. J'ignore quel est son poste à l'heure actuelle.
Le sénateur LeBreton: M. Goudge nous a dit hier qu'il était membre du personnel. Et M. Patterson est-il avec cette compagnie depuis longtemps, ou bien savez-vous s'il a travaillé ailleurs avant?
M. Nixon: J'ignore depuis combien de temps il travaille pour la compagnie, mais je sais qu'il travaillait autrefois au gouvernement de l'Ontario.
Le sénateur LeBreton: Pour qui?
M. Nixon: Je ne sais pas. Il a travaillé pour des gens là-bas et je le connaissais à l'époque.
Le sénateur LeBreton: Lorsque vous étiez au cabinet de l'Ontario?
M. Nixon: C'est exact.
Le sénateur LeBreton: Pour Monte Kwinter peut-être?
M. Nixon: Il était peut-être là, car il y avait 31 personnes et il était membre du personnel de l'une d'entre elles.
Le sénateur LeBreton: Lorsque vous l'avez interviewé avec cette nouvelle compagnie, était-il membre du personnel ou membre du bureau?
M. Nixon: Je ne sais vraiment pas.
Le sénateur Lynch-Staunton: Monsieur Nixon, vous souvenez-vous quand vous avez reçu le mémoire du gouvernement de l'Ontario, qui vous a été soumis par le ministère des Transports?
M. Nixon: Sénateur, je ne vois pas de date sur la copie que j'ai dans mon dossier.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dans ce cas, je vais vous venir en aide car, dans nos dossiers, nous avons une lettre d'accompagnement de George Davies, sous-ministre, datée du 17 novembre 1993. Cette lettre d'accompagnement dit: «Je suis heureux de vous soumettre ce mémoire», et cetera. Vous avez donc reçu ce mémoire le 17, et votre conclusion qu'il y a eu manipulations politiques découle principalement de ce document, n'est-ce pas?
M. Nixon: Oui, principalement.
Le sénateur Lynch-Staunton: Bon. L'histoire se corse, maintenant, monsieur Nixon, car...
M. Nixon: Si vous me permettez, monsieur le président, pour la gouverne du sénateur, c'est peut-être un détail, mais ma conclusion était que les ententes étaient telles qu'on pouvait soupçonner que le favoritisme avait joué un rôle dans le choix de Paxport.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne parle pas de favoritisme, mais de manipulations politiques flagrantes. C'est beaucoup plus grave que du favoritisme. Nous sommes tous, vous et moi compris, bénéficiaires de favoritisme, alors je ne pense pas que l'on veuille discuter de cette question-là aujourd'hui.
M. Stephen Goudge, conseiller juridique, Gowling, Strathy and Henderson: Mais, sénateur, permettez que j'attire votre attention sur la conclusion précise du rapport Nixon.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, monsieur, je demande au témoin quand il a reçu le mémoire du ministère ontarien.
M. Goudge: Mais ce qui est, je pense, important, c'est...
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, monsieur, je veux savoir quand il a reçu le mémoire. Celui-ci est daté de novembre...
M. Nixon: Eh bien, monsieur le président, je suis reconnaissant à l'honorable sénateur de m'avoir dit quand j'ai reçu le mémoire.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, j'ai dit que la lettre d'accompagnement est datée du 17 novembre.
M. Nixon: C'est à ce moment-là que je l'ai reçu.
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous l'avez reçu le 17 novembre. Très bien. Quand avez-vous rencontré le groupe Morrison Hershfield, dont le témoignage a servi de base à votre conclusion qu'il y avait eu manipulations politiques flagrantes?
M. Nixon: Nous avons discuté de cela hier, monsieur le président, et, si je me souviens bien, nous n'avons pas pu donner une date précise, mais nous pensons que cela s'est sans doute passé dans la troisième semaine de notre examen.
Le sénateur Lynch-Staunton: La troisième semaine de votre examen. Très bien.
M. Goudge: Je demande d'être autorisé à me prononcer sur le rapport inexact de la conclusion de M. Nixon que vient de nous donner le sénateur. La conclusion dont il fait état est très précise, et elle figure en haut de la page 13 du rapport Nixon: valider un contrat inadéquat comme celui-là, qui a été conclu de façon irrégulière et, possiblement, après manipulation politique... voilà quelle est la conclusion...
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous appelez cela une conclusion? Vous appelez cela une conclusion? C'est une insinuation ignoble que vous ne pouvez même pas prouver. C'est ce à quoi nous voulons en venir ici: le rapport tout entier s'appuie sur des ouï-dire. Je préciserai, en passant, qu'ouï-dire n'est pas un terme juridique: j'ai le dictionnaire ici, c'est «rumeur». Il s'agit d'ouï-dire non fondés, de rumeurs non fondées. Ce que j'essaie de vérifier auprès de M. Nixon, et ce que j'aimerais qu'il comprenne, c'est que si nous contestons son rapport et faisons ces rappels au Règlement... il reçoit un mémoire daté du 17 novembre et contenant de graves allégations. Dans la troisième semaine de son travail, Morrison Hershfield lui fait part de graves allégations. Et ces graves allégations, jusqu'ici non fondées, sont utilisées pour insinuer qu'il y a eu manipulation politique. Comment se fait-il qu'avant même d'avoir reçu ces mémoires et entendu ces allégations, il a déjà rédigé un rapport daté du 11 novembre, dans lequel figure la conclusion que voici:
Remettre à un nouveau gouvernement un contrat conclu de façon si irrégulière et sous un voile de manipulations politiques flagrantes apparentes est perçu par les citoyens et les contribuables comme étant inacceptable.
Notre question est la suivante: comment se fait-il que, sans disposer de preuves, ces allégations - et elles sont sans preuves - n'étant venues que plus tard, dans la troisième semaine, il ait déjà pu rédiger cette conclusion, qui est reprise presque mot pour mot dans le rapport final?
Le sénateur LeBreton: Il est donc parti à la recherche de personnes qui viennent appuyer sa conclusion.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est ce que nous aimerions savoir. C'est pourquoi toute cette... vous voulez parler d'un processus irrégulier...
Le sénateur Bryden: Monsieur le président, ces...
Le sénateur Lynch-Staunton: Et c'est pourquoi j'ai invoqué le Règlement.
Le sénateur Bryden: S'il s'agit bien d'un rappel au Règlement. La question est vraiment de savoir si ce sont là toutes les preuves ou les seules preuves. Nous avons encore un jour, deux jours, cinq jours, 15 jours de témoignages à entendre, et ce que nous avons entendu en réponse à une question posée par un sénateur, ce sont les opinions qui ont été données, et il était très clair qu'en ce qui concerne cette réunion avec la compagnie, ce qui a été rapporté ce sont les opinions exprimées par cette compagnie. M. Goudge a, je pense, dit croire que ces opinions étaient sincères.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est sans doute le cas.
Le sénateur Bryden: Et il les a rapportées. Il s'agit là de preuves légitimes, même en situation de tribunal.
Le sénateur Jessiman: Jamais d'enquête.
Le sénateur Lynch-Staunton: Mais de tels éléments ne peuvent pas intervenir dans la décision du juge.
Le sénateur Bryden: Vous pouvez leur donner le poids que vous voulez, que les allégation soient fausses ou non, mais si nous ne... que ce soit vrai ou faux...
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est incroyable.
Le sénateur Bryden: ...la personne qui a fait ces déclarations y croyait sincèrement. Et celles-ci ont été rapportées. Si vous posez une question, vous devez être prêt à accepter la réponse qu'on vous donne, quelle qu'elle soit. Vous avez obtenu la réponse à la question que vous avez posée et maintenant, parce que vous n'aimez pas la réponse, vous invoquez le Règlement.
Le sénateur Lynch-Staunton: Monsieur le président, permettez que je répète la question. Les témoins ont-ils des preuves qui viennent appuyer ces allégations? Je ne dis pas que de telles allégations n'ont pas été faites. Je ne dis pas non plus qu'elles ne correspondaient pas à des convictions sincères. Cependant, ces allégations ont été faites, elles font partie d'un rapport qui a amené l'annulation des contrats et nous savons ce que cela a entraîné.
Le sénateur Bryden: Voulez-vous dire par là que nous ne devrions pas en être mis au courant?
Le sénateur Lynch-Staunton: Si, on nous met au courant des allégations; nous voulons être au courant des preuves les appuyant, de façon à pouvoir nous acquitter des responsabilités qui nous reviennent en vertu de l'ordre de renvoi qui nous est venu du Sénat.
Le sénateur Bryden: Et il se pourrait fort bien, sénateur Lynch-Staunton, que si c'est là le coeur de l'affaire, il nous faille convoquer ces personnes pour qu'elles viennent témoigner.
Le sénateur Lynch-Staunton: Eh bien, nous demandons à ces témoins...
Le sénateur Bryden: Ils ne peuvent que témoigner sur ce qu'ils savent.
Le sénateur Lynch-Staunton: Si c'est là le genre de témoignage qu'ils vont nous donner, alors leur rapport est déjà discrédité.
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je pense qu'il est question ici de deux points différents. L'accusation de «trucage d'appel d'offres» est extrêmement grave, et c'en est une qui occupera à l'avenir l'attention du comité, et il nous serait extrêmement utile que vous nous aidiez à trouver qui a fait cette déclaration et si vous l'avez vérifiée... si vous avez demandé au témoin d'appuyer ses allégations. Voilà pour la première question. L'autre chose qui me trouble est qu'un gouvernement provincial fasse des allégations du genre en cachette sans en fournir de preuves concrètes. Il sera bien tenu compte de votre rappel au Règlement.
Le sénateur Lynch-Staunton: Merci, monsieur le président.
M. Nixon: Monsieur le président, puis-je répondre à ce que vous venez de dire?
Le président: Je vous en prie.
M. Nixon: Bien. Je pense que les honorables sénateurs doivent savoir que je ne dirigeais pas une commission royale et que je n'étais aucunement habilité à faire prêter serment ou à contraindre des personnes à témoigner, qu'on m'a demandé de me renseigner sur ces contrats en vue de former une opinion à leur sujet et de la transmettre au premier ministre. Les gens, surtout ceux qui sont calés en droit, ont peut-être tendance à assimiler mes efforts à une enquête judiciaire, mais ce n'était pas une enquête judiciaire, ni rien de proche. On m'a tout simplement demandé d'examiner ces questions, de former une opinion et de la transmettre au premier ministre, ce que j'ai fait.
Il était également important que je réponde aux opinions exprimées publiquement pendant la campagne électorale. La plupart d'entre nous sommes politiciens. Même si je n'ai pas participé à cette campagne, j'étais très sensible au fait que le grand public était préoccupé par le processus d'octroi du contrat, et plus particulièrement par le fait que les principaux intéressés avaient des liens avec le Parti progressiste-conservateur, et que des personnes autres que moi disaient...
Le sénateur Lynch-Staunton: Incroyable.
Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Laissez le témoin répondre à la question sans l'interrompre.
M. Nixon: Des personnes autres que moi - car ce n'est pas ce que je disais - prétendaient qu'il y avait eu influence indue dans le cadre de l'octroi du contrat. Pour donner suite à la demande du premier ministre d'examiner ces questions et satisfaire ses exigences, il était tout naturel pour moi de rechercher ou en tout cas de recueillir des renseignements auprès de personnes fermement convaincues que le processus avait été injuste. Le fait qu'ait compté parmi ce groupe-là le gouvernement de l'Ontario m'a beaucoup étonné, mais les propos qui ont été tenus sont ceux que je vous ai rapportés; ce n'est pas moi qui ai écrit ces paroles; elles nous ont été exposées dans le mémoire dont vous avez copie. Sur la base de ces renseignements et d'autres, il vous faut comprendre qu'il s'agissait d'un sujet de discussion générale, parmi l'électorat intéressé et informé, en tout cas dans la région torontoise, entourant les contrats relatifs à l'aéroport Pearson. Que cela vous plaise ou non, c'est sans doute cette question qui occupait le plus ceux et celles qui en discutaient dans les minoteries et chez les coiffeurs du sud-ouest de l'Ontario. Il était donc nécessaire pour moi de rapporter cela au premier ministre, car il avait vécu cette campagne et il avait connu un succès certain, en ce sens qu'aucun progressiste-conservateur n'avait été élu dans toute cette région. Je pensais que cela valait la peine d'être mentionné, étant donné que c'était certainement un élément important. Il revient entièrement aux honorables sénateurs de décider des autres témoins qu'ils veulent entendre, mais en réponse à leurs questions, je leur ai dit qui nous avons rencontré et ce que ces personnes nous ont dit, à nous, à moi.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et qui vous n'avez pas rencontré. Parce que ces personnes-là avaient des vues contraires aux vôtres.
Le sénateur Tkachuk: Il a dit quelque chose qui, me semble-t-il... monsieur Nixon, vous avez mentionné le fait que les intervenants étaient associés. Qui est le président d'AGRA Industries? Cela est important car ces...
Le président: Nous traitons pour l'instant du rappel au Règlement du sénateur Lynch-Staunton, et je sais à quoi vous voulez en venir.
Le sénateur Tkachuk: S'il va parler des intervenants, il ferait mieux de nous dire de qui il s'agit, car cela m'intéresse.
Le président: Vous aurez l'occasion de soulever cette question un petit peu plus tard, sénateur.
Le sénateur Tkachuk: Oui, je le ferai.
Le président: Monsieur Nixon, vous avez eu l'amabilité de nous dresser la liste des considérations, selon votre ordre de priorité, qui sont intervenues dans la préparation de votre rapport. Pourriez-vous nous éclairer davantage à cet égard?
M. Nixon: Oui, monsieur le président. Hier, vous m'avez demandé en privé, puis en réunion, de réfléchir à l'ordre de priorité que j'avais accordé aux différents aspects de l'examen du contrat que j'avais entrepris, et je l'ai fait la nuit dernière. Je peux vous dire que j'ai regroupé les questions importantes en trois catégories, mais je tiens à préciser qu'il ne s'agit là que d'une question d'opinion. Il me faut vous dire que la question la plus importante, dans mon esprit, était le fait que la décision avait été prise par le gouvernement pendant une campagne électorale, alors que la question elle-même était importante dans le cadre de la campagne. C'est cette question, plus que toutes les autres, qui m'a préoccupé et les faits qui se rattachent à cette décision sont faciles à déterminer sans qu'il faille convoquer de témoins: la décision a été prise le 7 octobre, à la demande expresse du premier ministre d'alors et avec son approbation, suite à une demande spéciale d'approbation faite par le sous-ministre et le sous-ministre associé.
Sans approfondir cela, je dirais que se situe au deuxième rang en importance le fait que le processus de privatisation ne cadre pas avec l'orientation générale de la politique du gouvernement du Canada. Cela peut être contesté et le sera, mais j'avais compris à l'époque, le gouvernement ayant établi des AAL dans la plupart des autres centres urbains, qu'il aurait été raisonnable de le faire également pour Toronto. Or, ce ne fut pas le cas. Deuxièmement, la Demande de propositions, ne comportant qu'une étape et celle-ci devant être bouclée dans les trois mois, n'était à mon avis pas juste, ni suffisamment fouillée pour qu'il puisse être tenu compte, en bonne et due forme, de l'intérêt du public.
D'autre part, il n'y avait aucune exigence financière préalable et, bien que les preuves à cet égard soient nombreuses et variées, il était clairement ressorti que la compagnie dont la proposition a été retenue ne pouvait à l'époque pas garantir son financement, et les discussions là-dessus ont duré des jours et des semaines et n'ont abouti que lorsqu'est intervenu un deuxième soumissionnaire capable de fournir des fonds suffisants pour que le programme soit acceptable.
Point suivant: étant donné l'importance économique de Pearson, il était difficile pour moi de convenir de l'utilité d'un bail de 57 ans pour livrer cela à des intérêts privés ayant déclaré qu'ils en tireraient un profit de 23,6 p. 100 avant impôts, alors qu'il y avait une autre solution faisant intervenir le public et que j'avais jugée raisonnable. Voilà pourquoi j'avais pensé que cela était contraire à l'intérêt public.
Point suivant: le flot de revenus assuré au gouvernement par les ententes était insuffisant. Nous discuterons davantage de cela, car mon conseiller en la matière était M. Crosbie, qui a assisté aux réunions d'hier et qui est bien sûr à mes côtés aujourd'hui. Est venu s'ajouter à cela le fait que le taux de rendement pour la compagnie elle-même était considéré par lui comme excessif.
Point suivant: les ententes comportaient une limitation du développement des aéroports situés dans un rayon de 75 kilomètres autour de Pearson. Nous en avons assez longuement discuté et je ne vais pas revenir sur tout cela, mais l'incidence sur Hamilton, Buttonville et d'autres aéroports de la région allait être considérable.
Monsieur le président, à un autre niveau d'importance, le troisième, se situe la question qui a ouvert nos discussions aujourd'hui, soit celle du favoritisme politique et du lobbying. Même si je n'ai pas tiré de conclusion définitive, j'ai dit qu'à mon avis on pouvait soupçonner que le favoritisme avait joué un rôle dans le choix de Paxport. Je répéterai que c'était là une question importante dans les élections et que le futur premier ministre m'avait demandé d'examiner les questions entourant les contrats. Penser que j'aurais dû exclure cela de ma réflexion est tout à fait déraisonnable. J'ai bel et bien inclus cette dimension, et j'ai recueilli là-dessus différents avis, glanés dans la presse écrite, mais également lors de discussions avec divers particuliers et groupes, et c'est ce qui m'a amené à cette conclusion qui fait partie de mon rapport. Le travail de lobbying appartient lui aussi à cette catégorie, et lorsque je dis que ces questions sont tertiaires, je ne veux pas dire par là qu'elles ne sont pas importantes, mais vous m'avez demandé d'établir l'ordre de priorité que j'ai suivi, et c'est ce que j'ai fait.
La disposition du gouvernement en faveur de la privatisation par opposition à une dévolution à une administration aéroportuaire locale est une question dont j'ai déjà parlé, mais je tiens à ce que vous compreniez que c'était là une question importante à mes yeux, et que même si d'autres questions pourraient être incluses dans la liste, ce sont celles-là qui sont venues à mon esprit par suite de la demande du président. Aucune de ces questions ne repose sur une seule déclaration faite à l'occasion d'une réunion particulière. Les éléments essentiels qui s'y rattachent faisaient déjà clairement partie de la discussion publique à l'époque où j'ai entrepris mon examen et nombre d'entre eux avaient été mis en lumière, voire même chaudement débattus dans le cadre de la campagne électorale qui se terminait tout juste au moment où le premier ministre me faisait sa demande.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Nixon. Ce que vous venez de dire figurera bien sûr au procès-verbal. Avez-vous là des notes écrites?
M. Nixon: Oui, ce sont des notes écrites.
Le président: Le greffier pourrait-il en avoir copie?
M. Nixon: Oui, je peux lui donner ce sur quoi je me suis fondé pour vous donner ces explications.
Le président: Très bien. Si je vous le demande, c'est que je ne voudrais pas que le comité décharge sa bile sur des questions de moindre importance, à moins que nous ne siégions pendant encore plusieurs semaines. J'aimerais, voyez-vous, que l'on puisse se concentrer sur les questions plus importantes dont vous avez tenu compte. Cela nous sera très utile.
Le sénateur LeBreton: Il est bon de savoir que pour une fois, nous aurons des notes.
Le président: Hier, nous avons connu une situation quelque peu inhabituelle, car mes collègues là-bas n'avaient pas de question à poser, et le sénateur LeBreton s'est ainsi vu accorder quatre ou cinq heures. Je sais que le sénateur Bryden va se lancer le premier, mais si vous pouviez me donner une idée du temps que voudrait avoir chaque témoin, ou plutôt chaque intervenant, excusez-moi, je n'aurais pas à imposer de limite; si vous pouviez me dire: «J'ai besoin d'une demi-heure et je vais m'efforcer de m'en tenir à cela», cela me rendrait bien service. Je ne voudrais pas interrompre le fil de vos pensées en plein milieu avec mon marteau. Je sais que vous allez vous lancer, sénateur Bryden. De combien de temps aimeriez-vous disposer?
Le sénateur Bryden: Pour l'instant, selon ce qui va ressortir, j'ai deux séries de questions à poser, dont une qui découle de ce qui s'est passé hier. Je pense qu'une demi-heure devrait suffire pour chacune d'entre elles, selon la durée des réponses qui seront données. Je proposerai donc...
Le sénateur Jessiman: Une demi-heure en tout?
Le sénateur Bryden: Oui, mais je me proposerais de prendre une demi-heure ou 40 minutes, ce qu'il me faut pour ma première partie, après quoi...
Le président: Vous reviendrez.
Le sénateur Bryden: Oui, j'aimerais qu'on m'autorise à ravoir la parole.
Le président: Premier tour.
Le sénateur Bryden: Ce qui nous permettrait de retrouver notre rythme normal.
Le président: Oui. Y a-t-il quelqu'un d'autre pour tout de suite? Très bien.
Le sénateur Jessiman: Monsieur le président, je pense, dépendamment, encore une fois, des réponses qu'on nous donnera, que nous serons en mesure de couvrir les neuf points que les témoins nous ont donnés aujourd'hui, mais pas forcément dans le même ordre, et j'imagine que cela devrait demander au moins deux heures en tout, peut-être plus. Je suis néanmoins disposé à ce qu'on fasse un autre découpage, c'est-à-dire que l'on y travaille pendant une heure et qu'on s'arrête ensuite. Cela vous convient-il?
Le président: Cela nous aide pour organiser la journée.
Le sénateur Jessiman: Je ne peux pas promettre que ce sera deux heures, mais c'est la meilleure estimation que je puisse vous donner.
Le sénateur Stewart: Sénateur Jessiman, si l'on s'arrêtait, comme cela vient d'être proposé, cela viendrait-il violer l'unité, le rythme de l'interrogatoire?
Le sénateur Jessiman: Eh bien, permettez-moi de dire que ce que je...
Le sénateur Stewart: Ce que je veux dire, monsieur le président, c'est que si le sénateur Jessiman pense que ce serait le cas, alors nous devrions le laisser poursuivre, comme nous l'avons fait avec les sénateurs hier. Je pense que ce serait une bonne chose pour le comité.
Le sénateur Jessiman: Très bien.
Le sénateur Tkachuk: Je n'ai qu'environ une demi-heure, monsieur le président.
Le sénateur Kirby: Auquel cas, ce sera de nouveau notre tour, et le sénateur Bryden aura une deuxième fois la parole.
Le président: Oui, très bien, sénateur Bryden.
Le sénateur Jessiman: Et y a-t-il quelqu'un d'autre de votre côté qui va prendre la parole?
Le sénateur Stewart: Moi, j'aurais quelques questions.
Le sénateur Jessiman: Très bien. J'aimerais également dire que même s'il me sera peut-être possible de parcourir tout ce que j'ai préparé en l'espace de deux ou trois heures, si des choses surviennent après, je ne voudrais pas qu'on m'arrête, je ne voudrais pas qu'on me dise que j'ai eu ma chance et que... j'aimerais avoir l'occasion, si je trouve...
Le président: Nous ne parlons ici que du premier tour, et le sénateur Stewart...
Le sénateur Jessiman: Mais je ne voudrais pas qu'on me coupe la parole.
Le président: Non, non.
Le sénateur Kirby: Nous n'avons jamais fait cela.
Le sénateur Jessiman: C'est parfait.
Le président: La suggestion faite par le sénateur Stewart est généreuse.
Le sénateur Jessiman: Et je l'apprécie.
Le sénateur Kirby: Nous n'avons jamais fait cela, et nous ne le ferons pas.
Le président: Nous parlons donc d'un premier tour, sénateur Bryden, soit d'environ une demi-heure. Voilà pour le premier tour, et il aura de nouveau la parole par la suite.
Le sénateur Bryden: Plus ou moins.
Le président: Oui. On vous donnerait ensuite deux heures, et qui vous suivrait? Le sénateur Bryden de nouveau. Oui.
Le sénateur Jessiman: Et je ne prendrai peut-être pas les deux heures.
Le président: Cela suffit pour amorcer la pompe.
Le sénateur Bryden: Un autre petit commentaire. Comme le disait Maggie Muggins, je ne sais pas ce qui se passera demain, il me faudra peut-être redemander la parole selon ce qui ressortira par la suite.
Le président: Oui, bien sûr. Allez-y donc maintenant, sénateur Bryden.
Le sénateur Bryden: Hier on a discuté d'un certain nombre de réunions et dans le cas de plusieurs - en tout cas celles qui sont ressorties de mes travaux de recherche - des notes ont été prises et, si je ne m'abuse, si des notes ont été prises, elles ont dû l'être par M. Goudge. C'est bien cela, n'est-ce pas?
M. Nixon: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: L'une de ces réunions est celle qui a eu lieu le 3 novembre avec Huguette Labelle, et j'aimerais que l'on parle de ces notes, car elles ont été déposées auprès du comité. Il s'agit du document 002424, à l'onglet D. Si je procède ainsi, c'est que je pense que cela pourrait nous aider à mieux comprendre ce qui s'est passé à la réunion, monsieur Goudge, et la première chose pour laquelle j'ai besoin de votre aide, c'est votre écriture. Je n'avais jamais pensé que quelqu'un pouvait avoir une écriture encore plus illisible que la mienne, mais j'en suis moins certain aujourd'hui. Avez-vous devant les yeux les notes de cette réunion?
M. Goudge: Oui, monsieur, et je m'excuse du fait qu'elles soient si illisibles. Je ferai de mon mieux pour vous les interpréter.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous tout simplement les parcourir avec nous? Je vais essayer de vous aider pour que cela aille plus vite. Tout à fait en haut de la page, on lit «questions pour H. Labelle». S'agit-il de questions que vous aviez préparées à l'avance?
M. Goudge: Oui, ce sont des idées, sénateur, qui m'avaient traversé l'esprit auparavant et que je voulais apporter avec moi à cette rencontre avec Mme Labelle.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous nous expliquer brièvement quelles étaient ces idées, en vous servant de ces notes comme d'un aide-mémoire?
M. Goudge: Bien sûr. «Sélection de processus de privatisation; quand, pourquoi». Si cela vous convient, sénateur, je vais tout simplement vous lire ces notes.
Le sénateur Bryden: Oui.
M. Goudge: «En aucun cas éliminer les AAL, le sens de cela. Calendrier choisi, les 90 jours, le processus de sélection jusqu'au 7 décembre 1992, le recours à des lobbyistes, le résultat, le critère financier satisfait, la concurrence entre les aérogares, l'introduction de Claridge et l'état des négociations à son départ en juin 1993». Ce sont là des questions qui me sont venues avant la réunion et sur lesquelles je pensais qu'il serait bon de l'interroger.
Le sénateur Bryden: Ce me semble être une tentative d'établir en ordre chronologique les différents événements qui sont survenus entre le début de son intervention et son départ. Est-ce bien cela?
M. Goudge: Ce me semble juste, sénateur.
Le sénateur Bryden: La réunion a eu lieu le 3 novembre. Qui était là?
M. Goudge: Si je me souviens bien, il y avait M. Nixon, Mme Labelle, moi-même et, je pense, M. Wilson.
Le sénateur Bryden: En ce qui concerne les notes intervenues après cette date, s'agit-il de notes prises lors de la réunion, avant la réunion ou après la réunion?
M. Goudge: Pendant la réunion.
Le sénateur Bryden: Pendant la réunion?
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous passer en revue ces notes et nous les expliquer... les étoffer de votre mieux.
M. Goudge: Elle nous a dit, comme le laisse entendre la première inscription, qu'elle était arrivée à Transports Canada en octobre 1990. Elle a dit qu'il y avait alors eu trois décisions clés à prendre. La privatisation de l'aérogare 3, la politique en matière d'administrations aéroportuaires locales et la séparation de T1T2 et des pistes.
Le sénateur Jessiman: Excusez-moi, pourriez-vous me redire le mot que vous avez prononcé juste avant T1T2 et les pistes?
M. Goudge: Séparation, sénateur, excusez-moi.
Le sénateur Jessiman: Merci. Ça va.
M. Goudge: Puis, juillet 1990, propositions spontanées pour T1T2; elle nous a donné les renseignements là-dessus.
Le sénateur Bryden: Lorsque ces propositions sont arrivées?
M. Goudge: Oui. Elle nous a dit que la décision d'aller ou non de l'avant avec les pistes avait été la décision clé. Elle a dit que M. Corbeil est arrivé en tant que ministre...
Le sénateur Bryden: Un instant. Il me faut vous arrêter ici. Êtes-vous en train de lire à partir de vos notes originales?
M. Goudge: Je vais m'arrêter à la ligne suivante.
Le sénateur Bryden: Je veux tout simplement... croyez-moi, je n'aime pas parler de documents et de liquide correcteur, mais...
Le sénateur Lynch-Staunton: Comment peut-on barbouiller de liquide correcteur blanc des notes personnelles?
Le sénateur Bryden: Eh bien, j'allais précisément interroger le conseiller juridique là-dessus, car il s'agit d'un avis à un ministre, ou bien de... c'est une réponse de...
Le sénateur Jessiman: Qu'est-ce que le document 69(1)(g)? C'est cela que nous voulons savoir.
M. Nelligan: Il s'agit d'un document confidentiel du Cabinet. Voilà ce que c'est que le 69. Je ne savais pas que le Cabinet faisait des confidences à ce témoin.
M. Goudge: Monsieur Nelligan, ce n'est pas ma conclusion.
M. Nelligan: Je comprends cela.
M. Goudge: Comme vous le savez, en tant que...
Le sénateur Bryden: J'imagine que le témoin a noté la réponse donnée par Corbeil, et j'aimerais que le conseiller juridique nous dise s'il peut nous fournir cela.
M. Nelligan: Je ne suis pas son conseiller juridique, mais j'imagine qu'il est normal que vous lui posiez la question: il a pris des notes et nous aimerions savoir ce que Mme Labelle lui a dit. Nous avons demandé à Mme Labelle ce qu'elle lui a dit. Je pense qu'il est juste de lui demander son interprétation de ce qu'elle lui a dit et qu'il peut répondre à la question. Tout simplement, il n'a pas de notes sur lesquelles s'appuyer pour rafraîchir sa mémoire, car quelqu'un les a badigeonnées de liquide correcteur blanc.
M. Goudge: Permettez-moi de dire ceci, sénateur: je suis tenu - et je pense qu'il me faut expliquer davantage cela - par l'engagement en matière de secret qui fait partie de toute cette opération depuis le début et dont M. Nixon a parlé hier. D'après ce que j'ai compris, le liquide correcteur a été appliqué sur l'ordre des conseillers juridiques du gouvernement et je n'ai pas été dégagé de mes obligations en matière de respect du secret entourant mes notes des deux lignes suivantes. Cela me paraît quelque peu étrange, mais c'est ce qu'on me dit.
Le sénateur Jessiman: N'est-il pas vrai que vous n'avez pas été engagé en cela par le gouvernement, mais par M. Nixon, dans le cadre des témoignages donnés hier?
M. Goudge: C'est exact.
Le sénateur Jessiman: Ma question s'adresse donc à M. Nixon. Pouvez-vous dégager votre conseiller de cette exigence afin que nous puissions savoir ce qui a été badigeonné de blanc?
M. Goudge: Je ne pense pas que ce soit important...
Le sénateur Jessiman: Permettez qu'il réponde à la question.
M. Goudge: Bien sûr.
Le sénateur Jessiman: Le dégageriez-vous de cette responsabilité? Oui ou non?
M. Nixon: L'engagement en matière de respect du secret a été signé par moi.
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Nixon: Au nom de nous trois, et je ne peux pas...
Le sénateur Jessiman: Votre réponse est donc non? Dites tout simplement oui ou non, il nous faut poursuivre.
M. Nixon: Très bien.
Le sénateur Jessiman: Non?
M. Nixon: Non.
Le sénateur Jessiman: Merci.
Le sénateur Bryden: Pour que ce soit clair, puis-je demander au conseiller juridique - je sais que vous l'avez fait de nombreuses fois - mais pourriez-vous demander aux juristes de réexaminer cela afin que nous... ou bien l'avez-vous déjà fait?
M. Nelligan: J'ai demandé une libération de cette obligation pour l'ensemble d'entre eux mais, à mon avis, étant donné ce que le ministère de la Justice a dit, leur entente de non-divulgation, qu'ils ont manifestement respectée tout au long du processus, est soumise aux questions des membres du comité. Ils ont peut-être une opinion différente, mais moi je dis que vous avez le droit de poser la question, et s'ils refusent de répondre, vous pouvez alors réfléchir aux mesures que vous voudrez prendre par la suite.
Le sénateur Bryden: J'y réfléchis déjà. Ils disent qu'ils ne peuvent pas répondre parce qu'ils pensent qu'ils ne devraient pas se prononcer sur les parties qui ont été badigeonnées de blanc, et c'est ce que leur ont dit les gens du ministère de la Justice. Ce que j'envisagerais pour l'avenir, c'est de vous demander, en tant que conseiller juridique du comité, d'aller rencontrer les gens au ministère de la Justice, de leur téléphoner, ou en tout cas de leur demander si c'est essentiel que ces parties soient supprimées.
M. Nelligan: Je leur soumettrai cette question. Ce qui me préoccupe, c'est que ces témoins - et ce n'est pas du tout de leur faute - n'ont rien à voir avec des documents confidentiels du Cabinet. Il a été dit expressément qu'ils ne devaient pas recevoir de documents confidentiels du Cabinet. Il me faut donc supposer qu'ils n'en ont pas reçu. Cela étant, tout ce qu'ils ont, c'est leur serment de non-divulgation, et tout au long de la discussion que nous avons eue avec eux, ils nous ont renseignés sur des choses qu'ils ont reçues de façon confidentielle, et cela est très bien et ils le font. Je ne comprends franchement pas pourquoi ils devraient être empêchés de parler de quelque chose parce quelqu'un au ministère de la Justice a décidé à la toute dernière minute qu'il s'agissait d'un document confidentiel du Cabinet. Quoi qu'il en soit, je demanderai une nouvelle fois au ministère de la Justice pourquoi cela a été supprimé.
Le sénateur Bryden: Très bien.
M. Nelligan: J'aimerais pouvoir poser une question afin d'éviter une confrontation, et M. Goudge pourrait peut-être alors se prononcer. Tout ce qui nous intéresse, monsieur, ce sont les faits qui vous ont été communiqués et qui vous ont aidé à en arriver aux conclusions finales qui figurent dans le rapport. La note de service qui a été supprimée contient-elle des données qui n'ont rien à voir avec des secrets du Cabinet et que vous jugez pertinentes aux fins de cette enquête et susceptibles de nous aider à déterminer comment vous avez fait pour en arriver à ces conclusions?
M. Goudge: Monsieur Nelligan, j'aimerais discuter de cela avec les gens au ministère de la Justice, parce que je ne voudrais pas être injuste envers eux, et leur position est qu'ils ne vont pas libérer M. Nixon ni moi-même de cette entente de non-divulgation visant les deux lignes qui ont été supprimées. Je pense que, pour être juste, il me faudrait vérifier avec eux si je peux répondre à votre question, car je ne voudrais pas agir à l'encontre de leur position actuelle, qui est que je ne peux pas, dans le cadre de mon entente de non-divulgation, vous dire ce que représentent ces deux lignes.
M. Nelligan: Très bien. Pour éviter une confrontation au sujet de questions triviales - et je dois dire que nombre de ces questions l'ont été -, répondez tout simplement à la question suivante: quels que soient les renseignements contenus dans ce passage qui a été supprimé, les aviez-vous considérés importants à l'époque?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: C'est probablement pourquoi ils ont été cochés d'un astérisque.
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Pour poursuivre, il y a quoi d'écrit à côté de l'astérisque suivant?
M. Goudge: «On n'a pas envisagé l'AAL». J'avais l'habitude, sénateur, de mettre un astérisque à côté de renseignements que je jugeais importants. Ces astérisques auraient été là lorsque Mme Labelle nous en a parlé.
Le sénateur Bryden: Ce que vous dites, donc, c'est qu'à l'occasion de cette réunion, la sous-ministre vous a dit que l'AAL n'était pas envisagée. Envisagée pour quoi?
M. Goudge: En tant que possibilité pour T1T2.
Le sénateur Bryden: Monsieur Nixon, pour éviter que j'aie à revoir tout cela avec vous, si vous avez des commentaires supplémentaires, pourriez-vous les ajouter, je vous prie? L'AAL n'a donc pas été envisagée en tant que participant possible dans le processus. C'est bien cela?
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Et qu'est-ce qui est écrit ensuite?
M. Goudge: «Le processus accéléré pour la Demande de propositions donne un avantage énorme à Paxport». C'est ce qu'elle nous a dit, et j'ai mis un astérisque parce que j'avais trouvé que c'était là une affirmation très importante venant d'un fonctionnaire de haut rang.
Le sénateur Bryden: Et ensuite?
M. Goudge: Que Claridge ne voulait pas que T1T2 soit privatisée, pas plus que ne le voulait Air Canada.
Le sénateur Bryden: Je trouve cela assez important, car j'ai manqué certaines des audiences et je n'ai pas lu l'ensemble des procès-verbaux. Il me semble néanmoins que c'est la première fois qu'on nous dit que Claridge ne voulait pas que T1T2 soit privatisée, et je demanderais à chacun de vous de confirmer si cela correspond bien au souvenir que vous avez de la position énoncée par le sous-ministre le 3 novembre.
M. Goudge: Absolument, sénateur, absolument.
M. Nixon: Oui, sénateur.
Le sénateur Lynch-Staunton: Qu'avaient-ils voulu qu'on fasse avec les aérogares? Quelle avait été leur suggestion?
M. Goudge: Je ne sais pas si elle a suggéré cela. Ce que j'ai déduit de notre entretien c'est que la préférence de Claridge était que rien ne change pour T1T2.
Le sénateur Jessiman: Voulez-vous dire que c'était là son opinion ce jour-là, le jour où vous lui avez parlé?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le 3 novembre.
Le sénateur Jessiman: C'est impossible.
Le sénateur Lynch-Staunton: Une fois leur offre faite.
Le sénateur Jessiman: Impossible. Mais poursuivez.
Le président: Il faut qu'on se comprenne. Il s'agissait de questions justes, de questions supplémentaires.
Le sénateur Bryden: Tout ce qui ne semble pas coller avec votre façon de voir les choses semble être impossible...
Le président: Non. Essayons de comprendre. Ces questions étaient des questions supplémentaires, mais essayons de comprendre la différence entre une question supplémentaire qui cherche à tirer quelque chose au clair et une intervention qui n'est qu'une réfutation de ce que le sénateur Bryden a peut-être dit et, enfin, un rappel au Règlement, qu'il me faudrait tout de suite accepter d'entendre. Laissons donc le sénateur interroger les témoins et abstenons-nous de faire d'autres interventions ou des réfutations. Pour ce qui est de questions supplémentaires, il n'y a pas de problème.
Le sénateur Bryden: Pour être juste, j'aimerais revenir un petit peu sur la question de l'objet de la rencontre. Si j'ai bien compris, vous retraciez l'histoire du développement du projet.
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Si j'ai bien compris, donc, Mme Labelle ne disait pas que Claridge n'avait jamais voulu participer au projet des aérogares 1 et 2, mais seulement qu'au début, Claridge ne voulait pas que T1T2 soit privatisée.
M. Goudge: Absolument.
Le sénateur Lynch-Staunton: Au début de quoi? Excusez-moi.
M. Goudge: Au début du processus.
Le sénateur Jessiman: De quel processus?
M. Goudge: Du processus de privatisation de T1T2.
Le sénateur Lynch-Staunton: Et quand ce processus a-t-il commencé? Quand ce processus a-t-il commencé, dans votre esprit?
M. Goudge: Dans son esprit?
Le sénateur Lynch-Staunton: Non.
Le sénateur Jessiman: Ce dont vous nous parlez.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
M. Goudge: Eh bien, je...
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous aimerions situer cela dans le temps.
M. Goudge: De quoi parlait-elle selon moi?
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
M. Goudge: Au moment où l'on concoctait la Demande de propositions?
Le sénateur Jessiman: Où l'on faisait quoi?
M. Goudge: Où l'on concoctait cela, où l'on préparait la Demande de propositions.
Le sénateur Jessiman: Avant le véritable lancement de la Demande de propositions ou les 17 mois entre le moment où ils ont annoncé qu'ils allaient...
M. Goudge: Sénateur, je ne sais pas si j'aurais jamais laissé entendre qu'il y avait une date précise. Il était clair dans mon esprit que Mme Labelle parlait du début.
Le sénateur Jessiman: Du début. Très bien. Ce pourrait être l'année 1985. Mais ça va.
M. Goudge: Sénateur, je n'ai pas laissé entendre que c'était en 1985.
Le sénateur Jessiman: Ou 1987.
Le sénateur LeBreton: Pourquoi ont-ils fait une soumission?
Le sénateur Lynch-Staunton: On y arrive. Ils vont revenir.
M. Goudge: Il vous faudrait leur poser la question à eux, sénateur.
Le sénateur Bryden: Ils ont des poches très profondes, voilà pourquoi.
M. Goudge: Ce qui m'avait frappé, c'est qu'elle avait clairement dit que Claridge et Air Canada auraient préféré que T1T2 ne soit pas privatisée.
Le sénateur LeBreton: Ce n'est certainement pas ce qu'ils nous ont dit lors de leur comparution.
Le sénateur Bryden: Passons maintenant à la page suivante de vos notes. La première inscription concerne, je pense, la Demande de propositions, n'est-ce pas?
M. Goudge: Oui. «La Demande de propositions - le gouvernement pourrait décider de ne pas aller plus loin avec cela».
Le sénateur Bryden: L'un ou l'autre d'entre vous pourrait-il nous expliquer cela? C'est plutôt cryptique.
M. Goudge: Ce qu'elle disait, si j'ai bien compris, c'est que la Demande de propositions permettait au gouvernement de recevoir des propositions mais également de décider en bout de ligne de ne pas aller plus loin.
Le sénateur Bryden: Il avait cette possibilité?
M. Goudge: Oui, monsieur, il avait cette possibilité.
Le sénateur Bryden: Passons maintenant à la note suivante.
M. Goudge: «Paxport a insisté en faveur de la privatisation et d'un très court délai pour la Demande de propositions». Encore une fois, ce sont là les renseignements qu'elle nous a communiqués.
Le sénateur Bryden: D'autres sources nous ont confirmé la même chose. Ensuite?
M. Goudge: «Le consentement d'Air Canada était nécessaire. Cela n'est intervenu qu'au milieu de l'été 1993».
Le sénateur Bryden: Je pense...
M. Goudge: Je pense que cela se passe d'explication.
Le sénateur Bryden: Nous comprenons tous cela. Ensuite.
M. Goudge: «Obtenir la lettre de Transports Canada à Paxport lorsque la décision a été prise». Et je suppose que c'est la lettre d'intention.
Le sénateur Bryden: Excusez-moi, quel est le premier mot?
M. Goudge: Obtenir.
Le sénateur Bryden: Oh! Vous vouliez obtenir cette lettre?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: Et la ligne suivante?
M. Goudge: «Paxport a fait une offre spontanée, mais Claridge ne l'a pas fait».
Le sénateur Bryden: Et la ligne suivante.
M. Goudge: La ligne suivante, c'est «note». J'ai pris l'habitude d'inscrire le mot «note» lorsque c'était une idée à moi par opposition à une déclaration faite par Mme Labelle. Suite à cette réunion, nous avons été quelque peu induits en erreur par la PDC.
Le sénateur Bryden: La PDC étant qui?
M. Goudge: Les personnes qui étaient venues nous rencontrer représentant la PDC, qui étaient en fait les gens de Claridge qui avaient déjà...
Le sénateur Bryden: Pearson Development Corp.
M. Goudge: Oui, PDC, c'est la Pearson Development Corporation, mais vous vous souviendrez des discussions d'hier: les cadres supérieurs de la PDC qui étaient venus nous rencontrer étaient en fait les cadres supérieurs de Claridge.
Le sénateur Bryden: Oui.
Le président: La Pearson Development Corporation est en fait l'associé gérant de la T1T2 Limited Partnership.
M. Goudge: C'est exact, sénateur. Tout ce que j'aimerais souligner, c'est qu'avant l'entreprise en coparticipation, ils avaient été Claridge, et la note que je me suis faite dit que Claridge avait peut-être l'impression de ne pas avoir été battue de façon franche et loyale, même s'ils nous avaient donné à entendre cela, ou avaient pensé le faire, lors de leur rencontre avec nous.
Le sénateur Jessiman: Monsieur le président, je n'avais pas vu qu'il y avait quelque chose de l'autre côté et je ne suivais pas. Je retourne cela maintenant, et je vois qu'il y a quelque chose. Pourriez-vous me lire le texte jusqu'au point où vous en êtes maintenant? Je déchiffre Demande de propositions et que le gouvernement pouvait décider. Est-ce bien cela?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: Vous êtes avocat vous aussi, sénateur, et vous devriez être en mesure de lire cela.
Le président: Pouvait décider quoi... de ne pas?
M. Goudge: «De ne pas aller plus loin».
Le sénateur Jessiman: De ne pas aller plus loin. Merci. Et la ligne suivante?
M. Goudge: «Paxport a insisté en faveur de la privatisation et d'un très court délai pour la Demande de propositions».
Le sénateur Jessiman: Bien. Et maintenant vous avez l'astérisque. Air Canada...
M. Goudge: «Le consentement d'Air Canada était nécessaire. Cela n'est intervenu qu'au milieu de l'été 1993».
Le sénateur LeBreton: Gråce à elle.
M. Goudge: «Obtenir la lettre de Transports Canada à Paxport lorsque la décision a été prise».
Le sénateur Jessiman: Pardon?
M. Goudge: «Obtenir la lettre de Transports Canada...
Le sénateur Jessiman: Obtenir. Pardon.
M. Goudge: ... à Paxport lorsque la décision a été prise. Paxport a fait une offre spontanée, mais Claridge ne l'a pas fait».
Le sénateur LeBreton: Monsieur le président, une question supplémentaire. Pourquoi le sous-ministre des Transports... est-ce elle qui a dit que Claridge n'avait pas fait d'offre spontanée?
M. Goudge: C'est ce que dit ma note.
Le sénateur LeBreton: Ahurissant.
Le sénateur Jessiman: Qu'elle vous ait donné ce renseignement?
Le sénateur LeBreton: Ahurissant.
M. Goudge: C'est ce que dit ma note.
Le sénateur LeBreton: Ahurissant. Elle a bien des comptes à rendre.
Le président: Madame le sénateur, abstenons-nous de faire des commentaires et tenons-nous en tout simplement à...
Le sénateur Stewart: ...l'autre côté devrait être autorisé à intervenir de cette façon, monsieur le président, car vous laissez faire depuis des semaines.
Le président: Peut-être que j'essaie de m'amender. Sénateur Bryden.
Le sénateur Bryden: Je n'ai pas reçu votre note, et vous avez dit très clairement que lorsque vous inscrivez le mot «note» cela veut dire que ce sont vos propres pensées.
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: La dernière inscription dit «Claridge n'a pas...»
M. Goudge: «Ne nous a pas dit qu'il ne voulait pas que T1T2 fasse l'objet d'une Demande de propositions». Je pense que cela se passe d'explication.
Le sénateur Bryden: Monsieur Nixon, cela établit-il bien ce qui s'est passé à la réunion?
M. Nixon: Oui, sénateur.
Le sénateur Bryden: Auriez-vous quelque chose à ajouter?
M. Nixon: Non, sénateur.
Le sénateur Bryden: Monsieur Goudge, auriez-vous quelque chose à ajouter?
M. Goudge: Je ne pense pas pouvoir ajouter autre chose d'utile à ce que j'ai déjà dit, sénateur.
Le sénateur Bryden: En réponse à des questions qui vous ont été posées hier, vous avez fait état d'une réunion avec M. Gardner Church, et je pense... c'était le 31 octobre 1993. Non. Oui.
M. Nixon: Oui.
Le sénateur Bryden: Et, monsieur Nixon, vous étiez présent à cette réunion.
M. Nixon: Celle-ci s'est déroulée chez moi, dans mon salon.
Le sénateur Bryden: Oui. Y avait-il des personnes autres que M. Goudge, M. Church et vous-même?
M. Nixon: Je pense que Brad Wilson était là.
Le sénateur Bryden: J'aimerais maintenant vous renvoyer au document numéro 002415, à l'onglet A. Tout comme le document qu'on vient d'examiner, il semble qu'il s'agisse ici de notes sur cette réunion. Pourriez-vous les examiner et les comparer, monsieur Goudge, et nous dire s'il s'agit bien d'une copie conforme?
M. Goudge: Je pense que oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Ce document-ci est beaucoup plus long, mais je vous demanderais de faire la même chose, c'est-à-dire de le parcourir pour nous et de vous arrêter chaque fois qu'il y aurait des compléments d'information à nous fournir - et même chose pour vous, monsieur Nixon - et je vous poserai des questions si j'ai besoin d'éclaircissements.
M. Goudge: Il s'agit ici encore, sénateur, de notes que j'ai prises pendant la réunion de cet après-midi-là avec M. Church. Je pense qu'il serait juste de dire qu'elles sont sans doute plus détaillées au début de la réunion et il me faut vous avouer ma faiblesse humaine, qui m'a amené à prendre des notes moins précises et moins complètes au fur et à mesure de la réunion, mais permettez-moi de vous les lire telles quelles. 1987, étude du ministère des Transports, il parle d'une étude du ministère des Transports faite par Jerry Johnson. La note suivante dit «L'aéroport en tant qu'installation stratégique». Ç'aurait été le fil conducteur de l'étude, que je me souvienne.
Le sénateur Bryden: Je pense que cette étude figure au dossier ou en tout cas qu'on en a déjà parlé. Poursuivez.
M. Goudge: Puis en 1988... M. Church fait état de l'étude conjointe fédérale, provinciale et municipale, approuvée vers le début ou le milieu de l'année 1989, l'élément clé pour M. Church étant la coordination des installations et l'affirmation de la nécessité d'une administration aéroportuaire. Il a parlé de M. Heed, le gérant de l'aéroport. C'est à la ligne suivante. À la ligne suivante, je suppose qu'une référence au ministre Lewis en 1988 vient renforcer les opérations de Transports Canada.
Le sénateur Jessiman: Le premier mot, c'est Lewis?
M. Goudge: Oui, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Merci.
M. Goudge: C'est une supposition que je fais, et je dois dire que je ne m'en souviens pas très bien, mais je pense que cela doit concerner le ministre Lewis. L'opinion contraire à l'opération de Transports Canada a été alimentée par la question du réseau, l'aspect financier et la nécessité d'une approche stratégique, et j'imagine que M. Church nous expliquait son avis contraire, en tout cas contraire aux opérations de Transports Canada, fondé sur les facteurs que j'ai notés. M. Church aurait comparé l'affaire de l'aérogare 3 à celle-ci. Je dois dire que je ne me souviens pas dans le détail de ce qu'il a pu dire dans ce contexte, sénateur.
Le sénateur Bryden: Monsieur Nixon, vous souvenez-vous de la discussion entourant la comparaison entre ces deux affaires?
M. Nixon: Je me souviens que Gardner Church connaissait très bien le processus préalable à la construction de l'aérogare 3. Il a parlé de l'appel d'offres qui a mené au choix de Huang & Danczkay, ainsi que des circonstances dans lesquelles Claridge a pris le contrôle de l'aérogare 3. Je pense qu'il était intéressé de voir que Claridge avait soumissionné pour les aérogares 1 et 2 en espérant gagner. Je répète simplement qu'il était responsable de la politique du gouvernement ontarien vis-à-vis de la privatisation de Pearson.
Le sénateur Bryden: Ensuite, monsieur Goudge?
M. Goudge: J'ai noté ensuite que M. Church a porté à notre attention une question dont nous avons beaucoup entendu parler depuis, à savoir l'accès d'un gouvernement ultérieur aux avis donnés par le greffier du Conseil privé à un gouvernement antérieur. Je sais que c'est là une question avec laquelle le comité a eu à se débattre et qui concerne aussi notre accès à l'information, et j'entends par là l'accès de M. Nixon.
Le sénateur Bryden: Bien, à la page suivante il est question de l'aérogare 3.
M. Goudge: Il nous a parlé de l'aérogare 3 et des principaux points faibles de celle-ci, et j'en ai dressé la liste ici, que je vais vous lire telle que je l'ai consignée. «C'est une mauvaise affaire». Il a fait état de la conception, de la garantie en cas de pertes d'exploitation et du contrôle d'ensemble, en particulier des portes d'embarquement. Il a parlé ensuite des nouvelles propositions concernant T1T2, avec le retrait de BAA. Il trouvait les risques trop élevés. Je ne sais pas trop à quoi se rapporte la mention «partage des avoirs entre aérogares 1 et 2 et aérogare 3». Il nous a ensuite indiqué quelles autres personnes bien informées pourraient nous aider dans notre travail de rassemblement de renseignements. M. Sommerville, M. Guscott. Il a indiqué que M. Guscott, qui était sous-ministre adjoint au ministère des Transports provincial rédigeait un mémoire, et j'imagine que c'est celui que vous avez dans vos dossiers. Il a parlé ensuite de l'échéance de janvier, février 1992. Et du faible délai laissé par la DDP. Il s'agit là du délai dont différentes personnes vous ont déjà parlé. La bureaucratie fédérale...
Le sénateur Jessiman: Résiste?
M. Goudge: J'ai peut-être bien écrit «résiste». Je ne parviens même pas à me relire moi-même.
Le sénateur Jessiman: Cela paraît coller.
M. Goudge: Je dois admettre que je ne parviens pas à lire ce mot.
Le sénateur Bryden: Et la ligne suivante.
M. Goudge: «Segal était la clé. John Tory travaillait pour Matthews».
Le sénateur Bryden: Que disait-il au sujet de Segal?
M. Goudge: De l'avis de M. Church, M. Segal s'était montré très intéressé à ce dossier, avait exprimé très activement cet intérêt et avait joué un rôle clé dans la décision d'adjudication qui a été prise.
Le sénateur Bryden: Et le fait que John Tory travaillait pour Matthews?
M. Goudge: C'est ce que M. Church nous a indiqué.
Le sénateur Bryden: Bien. Voulez-vous poursuivre?
M. Goudge: La réaction provinciale aurait pu être de susciter une offre ou une administration et d'en garantir les emprunts. J'ai noté ensuite: «Nous aurions engagé l'équipe BAA, Peats et Bullock», et j'y ai ajouté Ontario. En disant «nous», il parlait de l'Ontario. Il a indiqué ensuite que Claridge avait donné son concours après l'adjudication et acceptait d'être gérée en tant qu'administration.
Le sénateur Bryden: Est-ce que l'un ou l'autre d'entre vous pourriez nous en dire un peu plus sur ce que l'Ontario envisageait?
M. Goudge: Il a indiqué très clairement que la préférence de l'Ontario allait à une administration aéroportuaire locale, et l'une des options retenues par la province, en réaction à l'initiative de privatisation, était de susciter la création d'une administration aéroportuaire locale.
Le sénateur Bryden: Et elle allait pour cela engager l'équipe BAA?
M. Goudge: C'est ce qu'il nous a dit, l'équipe BAA, Peats et Bullock.
Le sénateur Bryden: Il doit s'agir de... est-ce que ce sont des particuliers?
M. Goudge: Des conseillers professionnels.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la note «Claridge a donné son concours après l'adjudication et accepte d'être gérée comme une administration»? Oh, je pense que je commence à comprendre moi-même.
M. Goudge: Pour parler franchement, sénateur, je ne me rappelle pas précisément ce qu'il voulait dire ici. C'était probablement que Claridge aurait été disposée à se charger de tout cela et aurait accepté qu'une administration aéroportuaire prenne le contrôle de ce qui restait de l'aéroport.
Le sénateur Bryden: Ou bien aurait-ce - l'idée vient juste de me venir - pu vouloir dire que Claridge aurait été disposée à ce qu'une AAL gère l'aéroport parce qu'elle possédait déjà l'aérogare 3?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: Et enfin, la dernière ligne.
M. Goudge: Sa préoccupation est qu'il n'y avait pas d'obligation de diligence dans la DDP et je pense qu'il songeait particulièrement à l'absence de preuve de la capacité financière.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous nous dire ce qu'est une obligation de diligence?
M. Goudge: Je ne suis pas sûr de pouvoir en donner une définition qui satisfasse un spécialiste du droit commercial. La doléance de M. Church était que la DDP n'exigeait pas de garantie concernant la capacité financière continue de l'adjudicataire et qu'une telle clause aurait dû y figurer.
Le sénateur Bryden: D'accord, pourriez-vous passer à la page 3. Est-ce que je déchiffre le nom «Hazel»?
M. Goudge: Oui, la mairesse de Mississauga, dont il pensait qu'elle faisait une bonne affaire. Il n'y avait pas d'administration, dans les circonstances actuelles et le...
Le sénateur LeBreton: Excusez-moi. Qu'entend-elle par «pas d'administration»?
M. Goudge: Pas d'AAL, je pense.
Le sénateur LeBreton: C'était donc une bonne affaire de ne pas avoir d'AAL?
M. Goudge: Selon sa perspective...
Le sénateur LeBreton: Sa perspective à elle?
M. Goudge: ...Mississauga.
Le sénateur LeBreton: Très bien.
M. Goudge: Une bonne affaire fiscale pour Mississauga. Le problème des taxis serait réglé et il y avait une garantie concernant l'emploi d'entreprises locales. Il a indiqué ensuite qu'il avait...
M. Nixon: Elle.
M. Goudge: Elle... non, M. Church a indiqué...
M. Nixon: Oh, excusez-moi.
M. Goudge: ...que nous devrions demander au premier ministre la pleine collaboration de MM. Church et Guscott.
Le sénateur LeBreton: Puis-je poser une question complémentaire? Est-ce que M. Church a participé à la rédaction de ce document qui a fait surface après coup, le 17 novembre?
M. Goudge: Je ne sais pas. Je veux dire, j'en doute. C'est une déduction, sénateur, car je sais qu'il était alors à l'Université York.
Le sénateur LeBreton: Eh bien, il a dit: «Demandez à Rae la pleine collaboration de Church et de Guscott».
M. Goudge: Oui.
Le sénateur LeBreton: Et l'avez-vous fait?
M. Goudge: Non.
Le sénateur LeBreton: Une autre question complémentaire. Quelles étaient les qualifications de Gardner Church pour que vous accordiez une telle importance à ce qu'il avait à dire sur tout cela?
M. Nixon: Monsieur le président, M. Church est un haut fonctionnaire de grande expérience du gouvernement ontarien, ayant servi des gouvernements de toutes couleurs politiques. À cette époque, il se trouvait à la fin d'une mission spéciale confiée par la province de l'Ontario et à laquelle il avait travaillé à temps plein, pour s'occuper des intérêts de la province dans le réaménagement et la privatisation de Pearson, et cherchant à mettre sur pied une AAL, par une collaboration entre le gouvernement de l'Ontario, les municipalités et, dans une certaine mesure, le ministre fédéral. À mon sens, il était l'un de ceux qui connaissaient le mieux cette affaire.
Le sénateur LeBreton: Pensez-vous qu'il penchait très fortement en faveur d'une AAL? C'est une question complémentaire.
Le président: Non, ce n'en est pas.
Le sénateur LeBreton: Oh, désolée, j'y reviendrai plus tard.
Le président: Votre première était une question de nature complémentaire, mais vos deux autres ne l'étaient pas.
Le sénateur LeBreton: D'accord, je reviendrai là-dessus plus tard, car je pense que je vais ranger Gardner Church dans la même catégorie que M. Bandeen.
Le sénateur Bryden: Poursuivez, monsieur Goudge.
M. Goudge: L'inscription suivante, sénateur, est «South Central Ontario Airport Authority: Hamilton à Oshawa». Je pense que c'est l'administration dont M. Nixon vous a parlé hier et qui englobait Mississauga. «L'alternative», une option de rechange disent mes notes... «l'alternative était Mississauga et les petits». Je suppose que cela veut dire les petits aéroports. Cela aurait pu être une administration distincte. Et la troisième administration possible était la GTRAA. Ensuite il y a deux mots, «Hazel doit», et je ne sais plus de quoi il s'agissait. Je suppose que je commençais à m'essouffler, à ce stade.
Le sénateur Bryden: Juste.
M. Goudge: Il a indiqué que la province avait effectué un examen de l'accord conclu le 7 octobre et a indiqué que dans le document dont disposait la province, trois sections avaient été effacées. Il disait que je devrais en parler avec les juristes provinciaux, comme j'avais prévu de le faire. Il a indiqué que l'accord limiterait très sensiblement le rôle futur d'une administration. Il nous a ensuite parlé des lobbyistes dont il savait qu'ils avaient joué un très grand rôle dans ce projet, il a notamment mentionné Capital Hill Group, avec M. Metcalfe. Je ne parvenais plus à écrire assez vite. Au haut de la page suivante, il y a une partie effacée.
Le sénateur Bryden: Je dois vous interrompre ici. Je dois vraiment m'arrêter là-dessus, car j'ai la tentation diabolique de composer ce numéro de téléphone qui est écrit en dessous, et dont je suppose qu'il est le numéro de la personne dont le nom a été... non, peut-être pas.
Le sénateur LeBreton: Il y a aussi un numéro de télécopieur.
M. Goudge: Juste pour prévenir la question de M. Nelligan, monsieur le président, je peux absolument garantir que ce qui a été censuré n'avait absolument rien à voir avec ce qui s'est passé après cette réunion.
M. Nelligan: Est-ce un numéro de téléphone de Toronto qui a été effacé?
M. Goudge: Oui, monsieur.
M. Nelligan: 416, domicile.
Le sénateur Jessiman: Connaissez-vous le numéro?
M. Goudge: Si je sais à qui appartient ce numéro?
Le sénateur Jessiman: Oui. Ce qui a été effacé.
M. Goudge: J'ai indiqué que c'était le numéro de téléphone au domicile de M. Church, et il a été censuré et...
Le sénateur Jessiman: C'est donc le numéro de Church. Bien.
M. Goudge: Il nous a donné son numéro de téléphone personnel.
M. Nelligan: C'est important. Les numéros de télécopieur ne sont pas censurés, mais les numéros personnels le sont.
M. Goudge: Eh bien, les numéros personnels sont...
M. Nelligan: C'est une nouvelle version de la...
M. Goudge: Les numéros professionnels ne sont pas...
M. Nelligan: ...politique.
M. Goudge: Vous voyez.
Le sénateur Bryden: Il y a ensuite la mention finale de Toronto Life.
M. Goudge: Pour autant que je me souvienne, sénateur, il nous a indiqué que Patricia Best, journaliste au Toronto Life, avait fait une enquête sur l'accord Pearson et qu'elle aurait peut-être quelques renseignements à nous donner.
Le sénateur LeBreton: Une question complémentaire sur les lobbyistes. Ce Capital Hill Group, Herb Metcalfe. Est-ce le seul lobbyiste que M. Gardner Church a mentionné?
M. Goudge: C'est le seul nom que j'ai noté, oui.
Le sénateur LeBreton: Et vous souvenez-vous à quel titre il mentionnait M. Metcalfe?
M. Goudge: Comme lobbyiste ayant joué un rôle dans ce projet.
Le sénateur LeBreton: Il ne disait pas qu'il exerçait des pressions ou des choses de ce genre?
M. Goudge: Je ne me souviens pas avoir parlé avec M. Church de la mesure dans laquelle les lobbyistes avaient exercé des pressions.
Le sénateur LeBreton: Je m'en suis tenue à une question complémentaire.
Le sénateur Bryden: Puis-je poursuivre?
Le sénateur LeBreton: Oui. Je m'en suis tenue à...
Le sénateur Bryden: J'essaie d'avancer aussi rapidement que possible et je ne m'en tire pas trop mal, merci à tout le monde. Je me reporte ensuite au document 002427, mon onglet C, qui sont les notes d'une réunion dont il a été question hier, que vous avez eue avec Jack Matthews, M. Vineberg et un certain Peter, et je pense que vous avez dit que c'était Peter Kozicz.
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Avez-vous vu cette copie et en avez-vous l'original?
M. Goudge: J'ai mes originaux, et j'essaie de trouver la bonne page.
Le sénateur Bryden: C'est en novembre... on dirait le 5 novembre.
M. Goudge: C'est juste, c'était effectivement le 5 novembre. Sur la photocopie on dirait un 1, mais c'est en fait un 5.
Le sénateur Bryden: Oh, un instant, j'ai oublié de poser une question sur le document précédent. M. Church a fait état d'un examen de l'accord effectué par la province?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: À la troisième page. A-t-il dit qu'un rapport a été établi?
M. Goudge: Il a dit, sénateur, que la province avait effectué un examen des accords. Et que cela ferait partie des documents dont il supposait que la province nous les communiquerait et il nous avertissait du fait que les documents que la province avait obtenus pour mener cet examen avaient trois clauses censurées.
Le sénateur Bryden: Bien. L'intérêt de cela est que cette réunion a eu lieu le 31 octobre 1993.
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Et il a indiqué à cette date que la province avait examiné l'accord.
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Je vous remercie. D'accord, vous avez noté ici les représentants de Paxport qui étaient présents à la réunion. Qui d'autre y était?
M. Goudge: M. Nixon, moi-même et je suis quasiment certain que M. Wilson y était également.
Le sénateur Jessiman: Le 5 novembre?
Le sénateur Bryden: Le 5 novembre.
Le sénateur Jessiman: Je vous remercie.
Le sénateur Tkachuk: Est-ce que Wilson a pris des notes?
M. Goudge: Nous le lui avons demandé et il n'a pas communiqué de notes.
Le sénateur Tkachuk: La question était de savoir s'il avait pris des notes, et pas s'il en avait communiquées. Prenait-il des notes à ces réunions?
M. Nixon: Pas à ma connaissance; en fait, je suis sûr que non. Dans les réunions du type de celle décrite ici, M. Goudge était chargé de prendre les notes. Il faut bien voir qu'il s'agissait à nos yeux de définir une politique et de rédiger un rapport en l'espace de trois semaines, et j'étais prêt à travailler sans notes. Je l'ai jugé inutile et nous ne pensions certainement pas que nous ayons besoin de rafraîchir nos mémoires 20 mois plus tard.
Le sénateur Bryden: Puis-je vous demander, monsieur Goudge, si ce sont bien là les notes que vous avez prises à la réunion? Ce ne sont pas des notes préparatoires à la réunion?
M. Goudge: C'est juste, sénateur. Ce sont les notes que j'ai prises pendant la réunion.
Le sénateur Bryden: Bien. Et la copie que j'ai distribuée est une copie fidèle, pour autant que vous puissiez voir?
M. Goudge: Absolument. Je dois préciser que la date, en haut, est le 5 novembre. C'est très clair sur l'original. Sur la photocopie, on dirait que c'est le 1er novembre. Ce n'était pas le 1er novembre. Veuillez excuser ma mauvaise écriture.
Le sénateur Bryden: Vous auriez pu présenter des excuses générales au début, nous ne vous en aurions pas voulu. Peu importe, pouvons-nous poursuivre?
M. Goudge: J'aurais peut-être dû. Voulez-vous que je passe en revue les notes, sénateur? Je pense que vous avez vu qui étaient les participants, sénateur.
Le sénateur LeBreton: Quel est le premier, qu'avez-vous écrit là?
Le sénateur Jessiman: Est-ce Peter Coughlin?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Jessiman: Vous écrivez Peter.
M. Goudge: Oui.
Le sénateur LeBreton: Est-ce Peter Coughlin ou Peter Kozicz?
M. Goudge: Le deuxième, sénateur.
Le sénateur LeBreton: Ce n'était donc pas Coughlin?
M. Goudge: Ce n'était pas Coughlin. M. Coughlin était présent à la réunion que nous avons eue avec PDC.
Le sénateur LeBreton: Et M. Vineberg, est-ce... c'est M. Vineberg, de Claridge, et il était présent?
M. Goudge: Absolument.
Le sénateur LeBreton: Il y avait donc Jack Matthews, M. Vineberg et Peter Kozicz. Et quel est le premier mot en haut? Est-ce Paxport?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur LeBreton: Eh bien, M. Vineberg ne travaillait pas chez Paxport, mais c'est une autre... pour PDC, mais pas pour Paxport.
M. Goudge: Mon impression de ce qui est arrivé, sénateur, c'est que les gens de Paxport devaient venir nous voir, et M. Matthews est venu en tant que son représentant, son président, et il était accompagné de M. Vineberg. Je ne savais pas que M. Vineberg viendrait, mais il était là, et sa présence a été utile.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous... pourriez-vous passer en revue les notes comme vous l'avez fait des précédentes?
M. Goudge: Certainement. J'entrerai dans les détails si vous le voulez, sénateur, mais la première partie de la réunion était une description donnée par les représentants de Paxport de la structure de Paxport et de la manière dont PDC était articulée.
Le sénateur Bryden: Oui.
M. Goudge: Et ces notes sont ma tentative de suivre les taux de participation. Si vous voulez, je vais vous les lire, mais je pense que c'est assez clair, à moins que...
Le sénateur Jessiman: Je ne comprends pas ce que sont les 12,5 p. 100; de quoi s'agit-il? De frais généraux?
Le sénateur Bryden: Vous devriez peut-être passer les notes en revue. Si vous commencez à T1T2, je vous demanderai des compléments d'information.
M. Goudge: PG, je suis certain que cela signifie partenaire général, et PL, partenaire limité, et les pourcentages sont les pourcentages de participation.
Le sénateur Jessiman: Après T1T2, en dessous, PG, c'est-à-dire partenaire général. Qu'y a-t-il écrit en dessous? On dirait un «C».
M. Goudge: Je pense que c'est PL.
Le sénateur Jessiman: PL, partenaire limité.
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Jessiman: Oui. Et en dessous?
M. Goudge: PG.
Le sénateur Jessiman: PG de nouveau?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: Donc, si je regarde... j'interromps vos interruptions.
Le sénateur Jessiman: Eh bien, j'essaie simplement de faire en sorte que ce soit clair pour tout le monde. À côté de groupe Matthews, vous dites qu'il faut lire PG?
Le sénateur LeBreton: PL.
Le sénateur Jessiman: PL est au-dessus, mais je veux savoir... oh, je déchiffre ce que c'est, c'est Lockheed.
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Jessiman: D'accord. Vous dites que le partenaire général est le groupe Matthews? Est-ce là ce que vous avez écrit? Je ne...
M. Goudge: J'ai indiqué ici que le partenaire général était composé des sociétés dont la liste suit.
Le sénateur Jessiman: Le groupe Matthews est un PL aussi. Je pense que c'est évident.
M. Goudge: Peut-être.
Le sénateur Jessiman: Mais vous pensez avoir écrit que c'était un PG?
M. Goudge: Je vous demande pardon?
Le sénateur Jessiman: Mais vous pensez que ce qui est écrit là est PG, non PL?
M. Goudge: Si vous parlez de la troisième inscription, la première est PG, deux lignes en dessous il y a PL, et la ligne en dessous dit PG.
Le sénateur Jessiman: D'accord.
Le sénateur Bryden: Donc, si je suis bien, la composition de la société T1T2 était qu'il y avait un associé général à 53 p. 100... c'était qui?
M. Goudge: T3LPCO Investment Inc.
Le sénateur Bryden: Autrement dit, Claridge?
M. Goudge: Si vous le dites, sénateur, je suppose que c'est bien Claridge.
Le sénateur Bryden: Ensuite, le PL à 12,5 p. 100, c'est Lockheed?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: Et puis l'autre associé général semble être, d'après ce qui est écrit ici, le groupe Matthews, Bracknell, Allders et les autres indiqués ici. Est-ce exact?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Bryden: Et ensuite, qu'écrivez-vous?
M. Goudge: La ligne suivante est une mention de l'offre spontanée de Paxport de l'été 1990. M. Matthews nous en a parlé. La ligne suivante parle du départ de BAA, fin 1991.
Le sénateur Bryden: Qu'entendez-vous par là? Parti où?
M. Goudge: S'est retiré de la scène, si vous voulez.
Le sénateur Bryden: A cessé d'être un concurrent?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur LeBreton: Une question complémentaire? Hier, M. Nixon a donné l'impression que BAA s'était retirée peu de temps avant - et je pense qu'il a utilisé le terme quelques jours avant, je vérifierai - avant l'AAL, qui s'est retirée en mars, sans que l'on sache trop pourquoi, alors que vos notes ici confirment que BAA s'est retirée fin 1991.
Le président: Sénateur LeBreton, je ne veux pas me montrer tatillon, mais il ne s'agissait pas là d'une question complémentaire. Vous rectifiez les propos de témoins sur la base de témoignages que nous avons entendus hier. Ce n'était pas une question complémentaire visant à obtenir un complément d'information.
Le sénateur LeBreton: D'accord, j'y reviendrai plus tard, monsieur le président.
Le sénateur Bryden: Quelqu'un voudrait-il répondre?
M. Goudge: Pourriez-vous répéter la question, sénateur?
Le sénateur LeBreton: Eh bien, hier, M. Nixon a indiqué que BAA s'est retirée et a renoncé à présenter une proposition peu de temps avant - et je pense qu'il a dit quelques jours avant le lancement de la DDP, et ici dans vos propres notes nous trouvons confirmation qu'elle est partie fin 1991, c'est-à-dire deux mois et une semaine ou deux avant la DDP. J'aimerais donc savoir pourquoi M. Nixon hier a voulu donner l'impression, ou ne pas donner l'impression, je vérifierai, que c'était quelques jours avant le lancement de la DDP.
M. Nixon: Monsieur le président, si je puis répondre, je me suis trompé, et le sénateur a eu la bonté de me corriger directement hier et elle le répète aujourd'hui, et ce n'est que juste puisque nous sommes maintenant en possession des faits, alors que je les ignorais hier.
M. Goudge: Il serait bon de dire également, sénateur, que le fait d'entrer autant dans les détails risque de nous lancer un peu sur une fausse piste. Ainsi que M. Nixon l'a bien dit hier, les éléments qui fondent sa conclusion n'ont rien à voir avec la date du départ de BAA, que celle-ci ait été fin 1991 ou deux ou trois jours avant la DDP.
Le sénateur LeBreton: Je pense que la fausse piste décrit les actes de quelqu'un d'autre, et non les nôtres ici, mais peu importe.
M. Goudge: Je veux simplement que vous compreniez, sénateur, que le choix entre ces deux éventualités n'est pas un élément déterminant dans les conclusions de M. Nixon.
Le sénateur LeBreton: Mais vous étiez l'avocat et vous preniez les notes, et vous deviez bien les avoir tenues...
Le président: Sénateur Bryden.
Le sénateur Bryden: Ceci est la dernière note prise à la réunion, et j'aimerais terminer là-dessus. Pourriez-vous vous reporter à la note qui figure au bas de cette page?
M. Goudge: «Note BAA pensait trucage même chose AAL».
Le sénateur Jessiman: Où est-ce?
Le sénateur Bryden: Au bas de la note du 5 mars, première page de la note du 5 mars.
Le sénateur LeBreton: Et c'est quelque chose que M. Matthews a dit? De qui est cette note? C'est une question complémentaire, monsieur le président, car il a...
Le sénateur Bryden: Si vous vouliez seulement attendre.
M. Goudge: Sénateur, c'est une note que je me suis faite à moi-même. Lorsque je prends des notes, j'ai coutume de précéder mes propres réflexions de la mention «note».
Le sénateur Bryden: D'accord, pouvons-nous passer à la page suivante?
M. Goudge: «Deloitte évalue offre après décembre 1992». M. Matthews avait indiqué que nous devrions nous procurer le rapport de Deloitte. Que la proposition était taillée sur mesure pour répondre aux besoins d'Air Canada. Que Claridge payait moins en loyer, sensiblement moins les premières années que Paxport. Que PDC prévoit un plafond de rendement, mais pas de plancher. Et la dernière mention indique que Paxport allait nous envoyer ses factures de lobbyiste.
Le sénateur Bryden: L'a-t-elle fait?
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden: Et je suppose que vous nous les avez remises?
M. Goudge: Je crois que vous les avez.
Le sénateur Bryden: Et elles sont disponibles. Monsieur le président, cela a l'air d'être un épais dossier mais je ne m'intéresse qu'à deux ou trois documents.
Le président: Dans cinq minutes, votre heure sera écoulée.
Le sénateur Bryden: Eh bien, c'est que tout le monde ne cesse de poser des questions complémentaires. Jusqu'à plus soif. Sortez votre chronomètre. De toute façon, vous êtes généreux et je...
Il a été question hier d'une série de réunions avec les municipalités de la région et de mémoires présentés par elles, et j'aimerais vous soumettre un document, à mon onglet K, le document 002323, qui émane de la municipalité régionale de Hamilton-Wentworth. Il s'agit d'une lettre adressée à l'honorable Robert Nixon et elle est signée par Whynott. Un mémoire y est joint... l'avez-vous trouvé, Hamilton-Wentworth? C'est le document K.
Rapidement, monsieur Nixon, s'agit-il là du mémoire de la municipalité de Hamilton-Wentworth dont vous avez fait état hier? Je pense que vous en avez parlé hier.
M. Nixon: Oui, j'en ai parlé, monsieur le président, et je ne me souviens pas s'il y avait un mémoire plus volumineux joint à cette lettre. Je me souviens de la réunion, car les représentants de Hamilton-Wentworth étaient profondément préoccupés par le fait que le contrat allait freiner le développement de Hamilton jusqu'à ce que le trafic à Pearson atteigne 33 millions de voyageurs par an.
Le sénateur Bryden: C'est cette mention au premier paragraphe, je suppose, ou on dit que le plafond, la garantie, allait freiner l'expansion de son aéroport et des aéroports avoisinants pendant pas mal de temps.
M. Nixon: C'est juste.
Le sénateur Bryden: Et au point 3, au paragraphe 3, et je vais le lire rapidement:
Si l'on suit la formule de privatisation de T1/T2 pour les pistes de Pearson, les conséquences pour l'aéroport de Hamilton seront encore plus préjudiciables.
Savez-vous de quoi il est question ici?
M. Nixon: Il s'inquiétait de ce que la construction d'une nouvelle piste nord-sud, et peut-être le doublement des pistes existantes de Pearson, n'accroissent la compétitivité de cet aéroport à tel point que l'aéroport de Hamilton perde sa raison d'être; je dirais presque perde encore davantage sa raison d'être, car déjà, en l'état actuel de la concurrence à l'époque, la plus grande partie du trafic avait tendance à préférer la commodité de Pearson, car il était surtout à destination de l'agglomération de Toronto. Les expéditeurs, et particulièrement les passagers des vols nolisés, refusaient souvent de parcourir 40 milles ou quelque de plus. Il espérait que si Hamilton devenait davantage un partenaire dans l'ensemble des installations aéroportuaires pour le trafic de fret et de voyageurs, cela serait un avantage économique pour Hamilton, dont l'aéroport serait perçu comme plus commode.
Le sénateur Bryden: Je vous renvoie maintenant à mon onglet «J». C'est le document 002312.
M. Nixon: Je l'ai.
Le sénateur Bryden: Il s'agit du mémoire de la ville de Brampton, adressé à Robert Nixon, au sujet de la privatisation de l'aéroport international Lester B. Pearson. Si vous voulez jeter un coup d'oeil sur le document, s'agit-il du mémoire qui vous a été adressé?
M. Nixon: Oui, c'est bien lui.
Le sénateur Bryden: Si je puis attirer rapidement votre attention, car je sais que je mets à rude épreuve la patience du président, sur la page 2, premier paragraphe, sous le titre «Éléments à considérer». Je vais simplement lire la dernière phrase:
Tout en reconnaissant qu'une AAL imposerait un délai supplémentaire, nous pensons que la récession actuelle durera encore quelque temps et qu'il subsiste toujours un «créneau» pour mettre en place une AAL afin de réaliser dans les conditions les plus avantageuses les améliorations d'infrastructure nécessaires, avant qu'une reprise des pressions de l'offre et de la demande ne s'exerce sur les installations aéroportuaires existantes.
Vous avez rencontré ces personnes. Vous ont-elles exprimé ces mêmes préoccupations en personne?
M. Nixon: Oui, très fermement.
Le sénateur Bryden: Et en haut de la page 3, la dernière partie de la phrase... il vaut mieux que je lise le tout:
Comme vous le savez bien, l'initiative fédérale touchant les AAL qui a été annoncée par le ministre des Transports John Crosbie en avril 1987 stipulait clairement que tous les profits retirés par une AAL devaient être réinvestis dans l'infrastructure de l'aéroport.
Ce n'était pas le cas dans le contrat de privatisation, n'est-ce pas?
M. Nixon: Non, il était entendu, sur la base d'un investissement d'environ 61 millions de dollars, que les profits retirés seraient de 23,6 p. 100 des recettes avant impôt.
Le sénateur Bryden: Il y a quelques autres passages que je devrais souligner, mais je vais passer à la page 4. On y soulève un aspect qui n'a peut-être pas été assez évoqué; il s'agit de la dernière phrase du quatrième paragraphe:
Bien que l'on attende de toute administration aéroportuaire locale qu'elle soit «sensible aux besoins de la collectivité», on n'attend rien de tel d'un consortium privé.
Et cela après avoir fait ressortir que la première obligation d'un consortium privé est à l'égard de ses actionnaires. Êtes-vous d'accord?
M. Nixon: Oui.
Le sénateur Bryden: Et enfin... je ne vais pas tout lire, mais je veux attirer l'attention du comité sur le paragraphe de conclusion, page 5, où la ville résume sa position.
Monsieur le président, j'en ai un dernier, qui a été mentionné hier et que j'aimerais introduire, c'est le document I, la «Présentation provinciale à Robert Nixon».
J'ai ici deux exemplaires du mémoire complet. C'est le document 002318. Vu que nous sommes submergés de paperasses, je n'ai pas photocopié tout le texte. Je pense que vous l'avez au complet.
M. Nixon: Oui.
Le sénateur Bryden: Je me suis contenté de reproduire le sommaire. J'aimerais vous renvoyer rapidement, dans l'introduction, à la deuxième phrase du premier paragraphe:
Ce qui a transpiré de la nature des accords, et du processus par lequel ils ont été signés, préoccupe nombre d'usagers ontariens des aéroports, notamment les milieux d'affaires et la population du centre-sud de l'Ontario (défini par le gouvernement fédéral comme les localités situées dans un rayon de 100 kilomètres de Toronto).
Au cours de votre enquête, avez-vous rencontré les mêmes préoccupations, à l'intérieur de ces paramètres?
M. Nixon: Oui.
Le sénateur Jessiman: Il s'agit là du mémoire daté du 17 novembre? Il n'est pas daté, mais c'est celui qui a été transmis le 17 novembre 1993?
Le sénateur Bryden: Je pense que nous venons également d'établir qu'il avait été rédigé avant le 31 octobre.
Le sénateur LeBreton: J'ai un document 002317, daté du 17 novembre, une lettre du ministère des Transports à M. Nixon, puis un résumé très détaillé... c'est manifestement un document détaillé présenté comme un sommaire, portant le même numéro 002317, daté du 17 novembre.
Le sénateur Jessiman: Quand M. Nixon en a-t-il pris réception? C'est ce que nous avons demandé. Il a dit que c'était avant la lettre du 17 novembre. C'est important. Peut-il nous le dire?
Le sénateur Bryden: Vous avez quelque chose daté du 17?
Le sénateur LeBreton: En fait, sénateur Bryden, lorsque vous avez cité le 002318, j'avais déjà un document 002317.
Le sénateur Bryden: Où l'avez-vous trouvé? À La Baie?
Le sénateur LeBreton: Non. C'est un document du dossier. Soit dit en passant, je ne vais pas non plus y faire mes courses.
Le sénateur Bryden: Je ne devrais pas plaisanter.
Le sénateur LeBreton: C'est un document que nous avons ici. Tout ce que je fais, c'est d'établir la date. C'est une lettre de George Davies à M. Robert Nixon. Elle est datée du 17 novembre 1993 et il s'agit de la lettre d'accompagnement du mémoire provincial. Ensuite, il y a le rapport au complet, et il est daté du 17 novembre. La copie que vous avez distribuée est manifestement un résumé du rapport complet et, par coïncidence, il porte le numéro suivant dans notre système de numérotation, 002318. Tout ce que je dis, c'est que ce document ici établit que la date de ce document n'est pas le 17 novembre.
Le sénateur Bryden: Peu importe.
Le sénateur LeBreton: Est-ce exact, monsieur Nixon?
Le sénateur Jessiman: J'aimerais demander au témoin...
Le sénateur Bryden: Sénateur Jessiman, vous aurez votre tour. Pourquoi ne posez-vous pas vos questions lorsque c'est votre tour? J'ai essayé très, très fort de ne pas vous donner de raison de vous fåcher contre moi encore une fois.
Le sénateur LeBreton: Sénateur Bryden, vous semblez dire que ce document a été rédigé fin octobre et tout ce que j'essayais de faire c'était de lui attribuer une date, en me fiant à la lettre qui a été adressée à M. Nixon et au document complet, dont ceci est manifestement un résumé.
M. Nelligan: Puis-je vous aider? Au paragraphe 4.0, le document dit:
Lors d'une réunion antérieure, M. Nixon a reçu copie de l'analyse préliminaire effectuée par la province de l'accord avec PDC.
Je suppose donc que ce document fait suite à la réunion initiale avec M. Nixon, et cela figure au dossier. Vous pouvez poursuivre.
Le sénateur LeBreton: Vous pensez donc que la date est celle que nous avons, monsieur l'avocat?
M. Nelligan: C'est après la réunion.
Le sénateur LeBreton: Oui.
Le sénateur Bryden: Si je puis passer à la page 9 du résumé, et j'espère qu'il s'agit toujours du même document, 2318, on trouve le chapitre 4.0: «Résumé de l'examen des accords effectué par la province de l'Ontario». Avez-vous cela? J'attire votre attention sur la partie intitulée «Restrictions au développement futur», et vous demande de passer au deuxième paragraphe, que je vais lire pour obtenir votre avis.
La province considère cette disposition relative au nombre minimal de passagers comme limitant la capacité du gouvernement fédéral à favoriser le développement aéroportuaire en dehors du complexe des aérogares 1 et 2. Avant que Pearson parvienne au seuil de 33 millions de voyageurs, le système aéroportuaire du sud-centre de l'Ontario aura besoin d'une capacité d'aérogare accrue, en raison de la croissance démographique générale dans la région, ainsi que de l'augmentation de capacité de Pearson résultant de la construction de nouvelles pistes. Cette disposition permet dans la pratique à PDC de s'implanter dans la zone 4 sans appel d'offres; en d'autres termes, PDC a trouvé une façon de contourner les conditions de la proposition de réaménagement des aérogares de 1992, qui excluait expressément la zone 4.
Pourriez-vous nous parler de cet aspect? En avez-vous discuté?
M. Nixon: Oui, sénateur, et la formule selon laquelle PDC obtenait accès à la zone 4 est un peu compliquée. M. Goudge s'en souvient peut-être mieux que moi, mais, selon mon souvenir, si le gouvernement du Canada jugeait souhaitable, après la conclusion de l'accord, de développer des installations aéroportuaires dans d'autres aéroports que Pearson, c'est-à-dire avant que le seuil de 33 millions de passagers soit atteint, l'une des pénalités était que PDC reçoive accès à la zone 4 laquelle, selon le concept initial du réaménagement de tout l'aéroport, ne devait pas être cédée à une partie privée.
Le sénateur Bryden: Puis-je maintenant passer à la page 10, les paragraphes du milieu de la page sous le titre «Concessions apparentes», juste après les tirets:
Il convient également de noter que, alors que le nom des associés dans PDC ne figure pas dans les accords sur le réaménagement des aérogares, selon nos informations certaines entreprises fournissent à la fois des services aéroportuaires et possèdent une part de PDC. Cette forme de «cumul des profits» consistant à tirer des bénéfices des services aéroportuaires en même temps que de l'exploitation des aérogares - pourrait gonfler inutilement les coûts.
Pourriez-vous, monsieur Nixon, ou peut-être M. Goudge, qui a examiné de près les accords, nous dire s'il y a eu des ententes entre des parties liées qui autoriseraient ce que la province qualifie de cumul des profits.
M. Nixon: Si je puis répondre, et je demanderais à M. Goudge de compléter, l'une des possibilités d'un tel cumul réside dans le contrat de gestion que Paxport a concédé à Matthews Development.
Le sénateur Jessiman: Paxport ou Pearson?
M. Nixon: Ce n'était pas Pearson. C'était l'adjudicataire principal, et c'était l'un des contrats internes qui faisaient partie de l'accord d'ensemble du 7 octobre, contrats internes qui n'avaient pas été rendus publics encore à cette date. Une deuxième possibilité concerne Allders, qui était l'un des grands investisseurs dans la société et qui a obtenu, par contrat, le droit d'exploiter les boutiques hors taxe pendant la durée du bail.
Ce monopole sur les boutiques hors taxe dans les aérogares 1 et 2 était jugé par les autres entreprises de vente hors taxe canadiennes comme une restriction inacceptable, à leur sens, et certains concurrents d'Allders me l'ont fait savoir sans ambages.
Le sénateur Bryden: Puis-je vous demander, à l'un ou à l'autre d'entre vous... monsieur Crosbie, je ne vous oublie pas, c'est simplement que nous parlons ici de clauses contractuelles. Si vous souhaitez intervenir à n'importe quel moment...
M. Allan Crosbie, associé gérant, Crosbie & Company Inc.: Merci beaucoup.
Le sénateur Bryden: J'avais l'impression que vous vous endormiez.
J'aimerais que vous vous reportiez aux deux dernières sections, dont l'une est intitulée «Clauses inhabituelles». La province de l'Ontario a attiré votre attention sur:
Un certain nombre de clauses inhabituelles figurant dans le contrat. Certaines de ces clauses entraînent:
une divulgation seulement partielle des principaux intervenants dans l'accord PDC;
Avez-vous des commentaires à ce sujet?
M. Nixon: On a parlé ce matin du débat qui faisait rage au moment de la signature de cet accord et de l'examen que j'ai mené. Lorsque les détails de cet accord ont été rendus publics, aux alentours de la deuxième semaine d'octobre 1993, il y a eu un débat intense et le gouvernement a essuyé de fortes critiques. Celles-ci portaient sur deux aspects. Premièrement, il y avait les contrats entre parties liées dont il a été question il y a quelques instants à la rubrique du cumul des profits, pour reprendre le terme du mémoire ontarien et que je n'ai guère tendance à utiliser moi-même.
J'ai perdu la fil de ma pensée.
Le gouvernement n'a pas révélé ces contrats internes, pas plus que la liste totale des membres bénéficiaires du consortium, bien que les fonctionnaires disposaient de tous ces renseignements. Cela ne compte plus guère aujourd'hui, puisque la liste complète des membres du consortium a fait surface et qu'ils sont tous connus.
Le sénateur Bryden: Le paragraphe suivant:
un bail de 57 ans, indépendamment de la bonne exécution de toutes les phases du réaménagement.
M. Nixon: C'est vrai. Évidemment, cela dépend du volume de voyageurs et de la croissance de ce volume, mais la durée de 57 ans du bail était un sujet de préoccupation pour moi et échappait à l'entendement de beaucoup de gens. Les gens de Transports Canada l'ont justifiée en disant que c'était là une durée standard pour des baux à long terme. Mais, dans mon rapport, et dans mes réponses hier, je n'ai pu m'empêcher de mentionner que le transport aérien est fortement tributaire de l'évolution technologique et il suffit de voir ce qu'est devenu le petit aéroport de Malton de 1935 pour se demander si ce contrat à long terme répondra effectivement aux besoins de la collectivité canadienne dans 57 ans. Mon sentiment très net est qu'il n'en est rien et que le gouvernement prend une décision très peu sage en louant ces installations à une société privée pour une période aussi longue.
Le sénateur LeBreton: Question complémentaire, monsieur le président, pour obtenir une précision.
Par conséquent, un bail de 60 ans octroyé à l'AAL de Vancouver, c'est-à-dire jusqu'en 2045, quand on peut imaginer que l'aéroport de Vancouver... n'est-il pas vrai que toutes les AAL actuellement formées bénéficient de baux de 60 ans?
M. Nixon: Oui, c'est vrai, mais j'ajouterais que la raison d'être d'une AAL n'est pas seulement d'exploiter l'aéroport dans l'intérêt immédiat de la collectivité, mais également de l'exploiter dans l'intérêt de la collectivité d'ensemble, alors qu'un aéroport privé a pour mission première de rapporter des bénéfices à ses actionnaires.
Le sénateur LeBreton: Nonobstant l'intérêt de la collectivité?
M. Nixon: Je dirais que sa mission est de faire en sorte que l'investissement effectué dans cette libre entreprise particulière rapporte des profits, qui en l'occurrence se montaient à 23,6 p. 100 avant impôts.
Le sénateur LeBreton: Juste un éclaircissement, sénateur Bryden. C'est uniquement pour vous aider. Le résumé...
Le sénateur Bryden: J'ai besoin de toute l'aide que je peux trouver.
Le sénateur LeBreton: Oui. Le résumé que vous avez produit, non daté, numéro 002318, est constitué en fait de pages... on peut le voir d'après la numérotation des pages - 2, 9, 10, 11, 20 - tirées du document complet du 17 novembre et agrafées ensemble, et je souligne la date du 17 novembre 1993.
Le sénateur Bryden: Monsieur le président, j'ai indiqué au début que j'ai le document complet ici. J'ai deux exemplaires.
Le sénateur LeBreton: Vous avez dit octobre. En parlant de ce document, vous avez dit qu'il datait de la fin octobre.
Le sénateur Bryden: Puis-je poursuivre?
Le sénateur LeBreton: Oui.
Le sénateur Bryden: J'essaie de terminer aussi rapidement que je peux et j'en viens au dernier petit élément.
Ce qui m'intéresse, dans le bail de 57 ans, c'est qu'il était indépendant de la bonne exécution de toutes les phases de développement prévues dans l'accord. Cela signifiait que, pour un investissement d'environ 100 millions de dollars, ce consortium pouvait retirer pendant 57 ans un bénéfice de l'aéroport international Pearson, même sans jamais y reverser un sou. N'est-ce pas exact?
M. Goudge: C'est juste, sénateur. Permettez-moi d'ajouter quelques explications. Ce que vous voyez ici est un extrait d'un mémoire provincial beaucoup plus détaillé qui contient une analyse fouillée des dispositions contractuelles effectuée par Fraser et Beatty pour la province, et que j'ai passée en revue avec leurs avocats. Et je peux vous dire que les avocats considéraient ce bail de 57 ans, non assujetti à la réalisation de travaux d'aucune sorte, comme hautement inhabituel. La plupart des contrats de cette sorte comportent une clause de résiliation si les travaux ne sont pas effectués. Les avocats...
Le sénateur Bryden: Est-ce qu'il y avait ici une telle clause?
M. Goudge: Non. M. Nixon, dans son rapport, a fait état de cette absence. À mon sens, cela était inhabituel, mais nous n'avons peut-être pas insisté aussi fortement sur cet aspect que le mémoire provincial adressé à M. Nixon.
Le sénateur Bryden: Et nous avons ce mémoire?
M. Goudge: Vous l'avez, monsieur.
Le sénateur Bryden: Au complet. Paragraphe suivant:
très peu de contrôle du gouvernement fédéral sur le droit de PDC à hypothéquer le bail auprès d'une banque.
Monsieur Goudge, je suppose que c'est inhabituel qu'un propriétaire accorde ce droit, n'est-ce pas?
M. Goudge: Oui, monsieur.
Le sénateur Bryden:
la faculté de PDC de sous-louer sans le consentement du gouvernement fédéral;
J'ai eu l'occasion de voir beaucoup de baux. Est-ce qu'ils n'exigent presque pas toujours le consentement du propriétaire, en ajoutant que «ce consentement ne doit pas être refusé sans bonnes raisons»?
M. Goudge: C'est la clause habituelle. C'était certainement l'avis des juristes de la province, et c'en est un que je suis venu à partager, après avoir consulté un certain nombre d'avocats.
Le sénateur Bryden: Et ce consentement n'est pas requis dans cet accord?
M. Goudge: Non, monsieur.
Le sénateur Bryden: Dernier paragraphe:
le fait que tous les différends entre PDC et le gouvernement fédéral puissent être soumis à un tribunal d'arbitrage.
Qu'y a-t-il d'inhabituel à cela?
M. Goudge: Franchement, cela ne m'a pas frappé comme un problème majeur.
Le sénateur Bryden: Enfin, dernier élément, «Rapidité du processus d'appel d'offres»:
La province nourrit également quelques préoccupations concernant le processus qui a conduit à l'accord avec PDC.
Et cela a été un sujet de débat et est déjà bien connu, mais c'est un autre élément.
Avez-vous des éclaircissements à ajouter découlant de mes questions, monsieur Nixon ou monsieur Goudge?
M. Nixon: Je dirais simplement que les éléments que vous avez fait ressortir étaient importants, à mon sens, mais ce qui comptait le plus était l'attitude générale transparaissant du mémoire, que j'ai d'ailleurs parcouru en détail pour la première fois hier après-midi. Il y a trois ou quatre lignes juste à la fin, après les tirets, qui m'ont certainement influencé, et je cite:
La province est préoccupée par le nombre de clauses inhabituelles dans un accord aussi crucial. Individuellement, elles semblent priver le gouvernement fédéral des droits habituels d'un bailleur; collectivement, elles donnent à penser que le contrat a été håtivement et mal négocié.
Vous pouvez imaginer que cela n'a pas été sans me frapper, vu la mission qui m'avait été confiée.
Le sénateur Bryden: J'ajouterais peut-être une petite précision, à savoir que la mission qui vous a été confiée diffère de la nôtre, dans ce comité, et c'est pourquoi j'ai peut-être prêté un peu plus attention à des faits importants et pertinents, mais qui ne sont pas nécessairement de nature globale. Nous avons vu, jusqu'à présent, que l'affaire ne semble pas aussi mauvaise tant qu'on se limite aux généralités. C'est lorsqu'on voit de près les détails que l'on constate que les clauses ne sont pas standard, que les transactions entre parties liées sont inhabituelles, que les paiements qui sont faits sans contrepartie... juste une dernière question. Étiez-vous informé du contrat passé entre Matthews Investment et PDC?
M. Goudge: Le contrat entre parties liées?
Le sénateur Bryden: Oui, c'était un contrat - j'en ai une copie ici, quelque part - pour 350 000 dollars par an, pendant dix ans, non résiliable.
M. Goudge: Ce que nous savions, sénateur... ce que je savais, et je me limiterai à ce que je savais... c'était que dans les documents de clôture, il y avait une liste de contrats entre parties liées prédatant le 7 octobre. Il y avait une liste d'une dizaine de contrats. J'ai été préoccupé de voir que le gouvernement avait seulement le droit de prendre connaissance de ces contrats. Il n'avait aucun droit d'assurer une juste valeur marchande, ni aucun droit de veto.
M. Nixon: Je dirai seulement que je n'avais pas connaissance de cela au moment de rédiger mon rapport, et je ne l'ai su que parce que c'était un document produit ici et naturellement, cela m'a intéressé de le savoir en lisant vos délibérations.
M. Goudge: En étais-je informé? Non, monsieur.
Le sénateur Bryden: Vous n'étiez pas informé de celui-ci?
M. Goudge: Non.
Le sénateur Bryden: Mais vous connaissiez les dix autres.
M. Goudge: Je connaissais la liste des dix autres. Une controverse a surgi sur la question de savoir si ces dix existaient bien tels qu'ils figuraient dans les documents de clôture. Ma préoccupation était que le seul droit que le gouvernement se réservait dans le contrat était d'en prendre connaissance. Il ne s'était pas réservé le droit, comme il aurait été à mon avis prudent, d'opposer un veto, si les contrats entre parties liées prédatant le 7 octobre n'étaient pas réguliers, ou à tout le moins un droit moindre, mais néanmoins plus adéquat que celui qu'il s'est réservé, à savoir de s'assurer qu'ils représentaient une juste valeur marchande.
Il n'avait fait ni l'un ni l'autre, dans le contrat. En fait, il n'a même pas exercé le droit qu'il avait, celui de prendre connaissance des contrats, et cela me causait quelques préoccupations.
Le sénateur Bryden: Merci beaucoup, monsieur le président. Veuillez m'excuser d'avoir pris tant de temps.
Le président: C'était vos questions pour le premier tour?
Le sénateur Bryden: Oui, et je n'ai en fait pris que 40 minutes, si vous tenez compte des interruptions.
Le président: Le temps total écoulé était d'une heure et 20 minutes et quelques.
Le sénateur Stewart: C'est sous votre responsabilité, monsieur le président.
Le président: Quoi donc?
Le sénateur Stewart: C'est sous votre responsabilité. Je ne vous critique pas, mais ne reprochez rien au sénateur Bryden.
Le président: Avant de faire une courte pause, j'aimerais vous soumettre une question. Si vous aviez été parmi nous au cours des derniers mois, vous connaîtriez les frustrations que nous ressentons face à l'absence de documents, aux parties censurées, et dans nos relations avec le ministère des Finances. Je voulais vous demander si vous connaissez M. George Hunter, qui est un associé au sein du cabinet Aylen Scott.
M. Nixon: Je le connais.
Le président: Et vous le connaissez aussi, monsieur Goudge?
M. Goudge: Oui, monsieur le président.
Le président: M. Hunter est associé chez Scott & Aylen. Scott & Aylen ont été engagés par le ministère de la Justice. Vous le saviez?
M. Nixon: Je n'étais pas sûr quel ministère l'avait engagé. Je savais qu'il agissait au nom du gouvernement.
Le président: Très bien. Avez-vous rencontré M. Hunter ces derniers temps?
M. Goudge: Pour parler des documents et des parties censurées?
Le président: Pour parler de n'importe quoi.
M. Goudge: Oui, j'ai rencontré M. Hunter.
Le président: Combien de fois?
M. Nixon: Peut-être trois fois.
Le président: Trois fois. Il est allé à Toronto et vous a rencontré?
M. Nixon: Deux fois à Toronto et une fois ici.
Le président: Quelle était la nature de vos conversations avec M. Hunter?
M. Nixon: Il m'a posé des questions qui ne sont pas similaires à celles que l'on me pose ici. Je pense que j'étais pour lui une source de renseignements.
Le président: Rien d'autre?
M. Nixon: Eh bien, nous avons passé quelques heures à parler du rapport et de sa conception. Nous avons passé en revue tous les documents qui ont été soumis à votre comité pour voir dans quelle mesure ils concernaient les conclusions du rapport que j'ai rédigé.
Le président: Il vous disait quoi dire dans votre témoignage devant ce comité?
M. Nixon: Je n'utiliserais pas cette expression.
Le président: Quelle expression utiliseriez-vous?
M. Nixon: Je ne sais pas. J'ai trouvé en lui une source de renseignements utiles concernant les documents produits à ce comité. Il prenait également les procès-verbaux et en extrayait toutes les mentions directes de moi-même, qui parfois ne me faisaient guère plaisir à lire, mais, en tout cas, il m'en donnait connaissance directement. Et il me demandait de réfléchir au genre de réponses que je pourrais apporter.
Le président: Vous a-t-il fait part de son intention de recommander la censure de certains passages dans vos documents?
M. Nixon: Ces questions ont été abordées, mais je pense que M. Goudge pourrait mieux vous en parler. J'ai signé la promesse de confidentialité - et, évidemment, nous allons la respecter. Même si c'est une gêne pour nous-mêmes, sans parler du comité, nous allons certainement la respecter. Nous trouvons certaines interdictions un peu difficiles à comprendre, et nous en avons parlé avec M. Hunter, et il nous a...
M. Goudge: Il a expliqué... peut-être pourrais-je répondre, sénateur. M. Hunter nous a aidés en nous tenant informés des travaux de votre comité. L'une des difficultés qui ressort très clairement des procès-verbaux, c'est que vous êtes maintenant immergés dans les détails, car vous faites ce travail depuis le 11 juillet. Nous trois avons fait autre chose depuis le 11 juillet. Nous étions peut-être à votre niveau, le 30 novembre 1993, mais il était utile que M. Hunter nous fasse part de ce que vous faisiez, afin de nous remettre au niveau où nous étions.
Deuxièmement, je voudrais réfuter toute idée que M. Hunter nous aurait dit quoi dire ou tenté de le faire. Il n'en a rien été. Troisièmement, il s'est fait l'intermédiaire du ministère de la Justice pour ce qui est des passages censurés, des exclusions, et ce que nous étions autorisés à dire sans violer notre engagement de confidentialité envers le gouvernement. La position qu'il a pu prendre dans les discussions avec le ministère de la Justice dans ce débat sur la confidentialité, je ne le sais tout simplement pas. Mais c'est lui qui nous a dit ce que le ministère allait censurer.
Le président: Vous a-t-il donné des conseils?
M. Goudge: À quel sujet?
Le président: Sur n'importe quel sujet concernant l'affaire qui nous préoccupe?
M. Goudge: Non.
Le président: C'est juste un type sympathique qui vient à Toronto... vous remet-il des documents?
M. Nixon: Il m'a fourni une compilation de toutes les mentions du nom Nixon à ce comité. C'est donc un document pas mal épais.
Le président: C'est un bon ami que vous avez là. Comme vous le savez, le ministère de la Justice nous a dit qu'il a dépensé aux environs de 1 300 000 dollars, rien que pour le cabinet juridique Aylen, Scott et le cabinet Lindquist, Avey.
Le sénateur Kirby: Un million de dollars est le montant que dépense le ministère de la Justice. Les 300 000 sont notre budget. C'est ainsi que l'on obtient ce total.
Le président: Un million pour eux. Notre budget est de 297 000 dollars. Nous allons dépenser nettement moins que cela. Ils ont dépensé trois fois plus que nous. C'est tout.
Le sénateur Bryden: La différence entre le prix d'un politicien et le prix d'un avocat.
Le sénateur LeBreton: Puis-je poser une question supplémentaire, monsieur le président? Y avait-il des représentants du cabinet Lindquist, Avey à l'une quelconque des réunions que vous avez eues avec M. Hunter?
M. Nixon: Oui.
Le sénateur LeBreton: Qui?
M. Nixon: Robert MacDonald.
Le sénateur LeBreton: Quelqu'un d'autre?
M. Nixon: Non
Le sénateur LeBreton: M. MacDonald, que faisait-il là?
M. Nixon: La même chose. Il avait passé en revue et suivi de près les témoignages donnés ici et portait à mon attention les questions susceptibles de m'être posées et dont je devais être informé avant de me présenter moi-même ici.
Le président: Bien. Pause de dix minutes, s'il vous plaît.
Le comité suspend la séance.
Le comité reprend la séance à 11 h 30.
Le président: Nous allons reprendre. Sénateur Jessiman, vous avez la parole jusqu'à notre pause de midi. Nous reprendrons à 14 heures et vous pourrez poursuivre alors.
Le sénateur Tkachuk: J'ai quelques questions en rapport avec la vôtre, monsieur le président, si vous le permettez. Nous n'avons jamais demandé à M. Crosbie s'il a lui aussi rencontré M. Hunter?
M. Crosbie: Oui, je l'ai rencontré.
Le sénateur Tkachuk: Et quel était l'objet de cette réunion?
M. Crosbie: Eh bien, toutes les fois où j'ai rencontré M. Hunter, c'était dans le cadre du groupe, lorsque M. Goudge était présent, et je ne pense pas avoir quoi que ce soit à ajouter à ce que M. Goudge a déjà dit.
Le sénateur Tkachuk: Et M. MacDonald?
M. Crosbie: La même chose... la réponse est la même concernant M. MacDonald.
Le sénateur Tkachuk: M. MacDonald est membre du cabinet Lindquist, Avey. Celui-ci dit dans sa brochure: «Nous sommes des enquêteurs. La comptabilité n'est pas l'essentiel de notre travail. Il faut pouvoir comprendre les comptes. Il faut connaître la toile de fond»
Le sénateur Bryden: À quoi tend tout cela?
Le président: Question complémentaire.
Le sénateur Tkachuk: Que voulait-il? Quel était son rôle?
M. Crosbie: Nous avons eu une réunion avec M. Hunter et M. MacDonald. Je ne me souviens plus si M. MacDonald était là ou non, mais quelqu'un de Lindquist, Avey est venu nous voir à notre cabinet, tout au début de ce processus, lorsqu'il est apparu que nous pourrions être appelés à témoigner. Ils sont venus nous voir pour nous aider et nous conseiller sur le plan de la préparation des documents, de l'organisation de la documentation qui devrait vous être envoyée, car nous avions accumulé pas mal d'archives qu'il fallait classer et étiqueter, et toute cette sorte de choses, pour votre comité. Ils ont géré ce processus.
Le sénateur Tkachuk: Combien de fois l'avez-vous rencontré?
M. Crosbie: Eh bien, je me souviens de cette réunion-là.
Le sénateur Tkachuk: L'avez-vous rencontré trois fois, deux fois?
M. Crosbie: J'essaie de me souvenir. Il y a eu cette réunion dans nos bureaux, où ils nous ont parlé du classement de tous les documents et cetera, et puis je crois que toutes les autres réunions...
Le sénateur Tkachuk: Quand était-ce?
M. Crosbie: Il faudrait que je vérifie dans mon agenda.
Le sénateur Tkachuk: Juin, juillet, août, septembre?
M. Crosbie: Plutôt en septembre, lorsque nous avons commencé à préparer la documentation pour vous.
Le sénateur Tkachuk: D'accord.
M. Crosbie: C'était - j'ai l'impression que c'était fin août. Mais pour le dire précisément il faudrait que je vérifie - lorsque nous avons commencé à préparer la documentation pour votre comité, c'était...
Le sénateur Tkachuk: C'était là une réunion.
M. Crosbie: C'était une des réunions, et l'autre... toute autre réunion que j'ai eue...
Le sénateur Tkachuk: Toutes les autres réunions? Combien y en a-t-il eues?
M. Crosbie: Il y en a eu une... Steve, il y en avait une à Toronto à laquelle vous m'avez demandé de participer?
M. Nixon: Si vous permettez... il y a eu trois réunions dont je me souvienne.
Le sénateur Tkachuk: Avec vous-même, monsieur Nixon?
M. Nixon: M. Crosbie était présent à deux, à la deuxième et troisième réunion avec moi et M. Goudge, je pense, était présent à ces deux-là, et non pas à la première que j'ai eue avec eux.
Le sénateur Tkachuk: Je veux simplement savoir combien de réunions, monsieur Crosbie? Combien de réunions, monsieur Nixon? Et combien de réunions, monsieur Goudge, que vous ayez tous été là ou non?
M. Crosbie: Outre la première réunion dans mon bureau, pour nous aider à lancer le processus, à l'autre ou aux autres que j'ai eues avec eux, M. Goudge était présent. Combien y en a-t-il eu, est-ce deux?
M. Goudge: Je pense qu'il y en a eu deux.
Le sénateur Tkachuk: Et vous étiez donc présent à trois réunions?
M. Crosbie: Oui.
Le sénateur Tkachuk: Avez-vous pris des notes à ces réunions?
M. Crosbie: Je n'ai pas de notes.
Le sénateur Tkachuk: Vous avez eu trois réunions, et vous deux?
M. Goudge: Je n'ai eu que les deux où M. Crosbie était présent. Il est arrivé au milieu de l'une.
Le sénateur Tkachuk: Il y en a eu deux avec M. Crosbie, mais vous aviez eu une réunion séparée avant son arrivée?
M. Goudge: M. Nixon et moi-même avons rencontré M. Hunter et M. MacDonald.
Le sénateur Tkachuk: M. Nixon?
M. Nixon: Je vous ai dit que j'avais eu trois réunions. M. Crosbie était là aux deux dernières.
Le sénateur Tkachuk: Vous a-t-on montré des documents autres que ceux que vous aviez dans vos archives?
M. Nixon: Nous avions préparé... tous les documents que j'avais étaient en possession de M. Goudge, et il les a tous transmis dès le début au Bureau du Conseil privé.
Le sénateur Tkachuk: Je vais reposer cette question. Vous a-t-on montré des documents autres que ceux qui figuraient dans vos archives?
M. Goudge: Pas que je me souvienne, sénateur.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne pouvez répondre par oui ou non?
M. Goudge: Je suis virtuellement certain qu'il n'y en avait pas. Selon mon souvenir, nous utilisions cette occasion pour nous rafraîchir la mémoire, en quelque sorte.
M. Nixon: Les nouveaux documents étaient les... je les appelle les Hansards, mais les transcriptions verbatim des travaux de votre comité et il avait pour mission, ai-je déduit, pour le compte du ministère qui l'employait ou en général, pour le compte du gouvernement du Canada, de faire en sorte que moi-même et d'autres soyons informés des documents et témoignages nous concernant présentés à votre comité.
Le sénateur Tkachuk: On ne vous a montré aucun document autre que ceux figurant dans vos archives?
M. Nixon: Non.
Le sénateur Tkachuk: Et vous, monsieur Crosbie?
M. Crosbie: Non, on ne m'a pas montré de document. J'en suis sûr.
Le président: Sénateur Jessiman?
Le sénateur Jessiman: Juste pour rester un peu sur ce sujet, c'était l'une des questions que j'allais poser tout à l'heure, mais maintenant que le sénateur Tkachuk l'a soulevée, j'aimerais savoir combien, parmi les 16 personnes de votre cabinet, travaillaient sur le rapport Nixon en 1993?
M. Crosbie: Eh bien, il y en avait trois autres en sus de moi-même qui travaillaient sur ce rapport dans notre bureau de Toronto.
Le sénateur Jessiman: Sont-ils des professionnels comme vous?
M. Crosbie: Oui, ce sont tous des professionnels. Leurs qualifications sont légèrement différentes, mais ils sont au niveau professionnel.
Il y a eu aussi quelques personnes dans notre bureau de Los Angeles, je dirais une ou deux, mais sans être trop sûr. Je n'ai pas eu personnellement de contacts avec elles, d'autres du bureau de Toronto s'en chargeaient. Il y a également eu une certaine participation au niveau professionnel de notre bureau de New York.
Le sénateur Jessiman: Mais vous étiez responsable du dossier?
M. Crosbie: Oui.
Le sénateur Jessiman: Vous-même personnellement?
M. Crosbie: J'ai personnellement suivi de très près le dossier.
Le sénateur Jessiman: C'est vous qui, au nom de votre cabinet, avez signé le contrat avec le gouvernement?
M. Crosbie: Eh bien, notre cabinet a conclu un contrat avec le gouvernement.
Le sénateur Jessiman: Oui. Quel était le montant des honoraires, pour cette période de 30 jours où vous étiez...?
M. Crosbie: Quel était le montant du contrat avec le gouvernement?
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Crosbie: Si je me souviens bien, c'était 100 000 dollars, TPS comprise. Cette somme couvrait aussi nos frais généraux, si bien que le montant net des honoraires pour services professionnels était quelque peu inférieur à ce chiffre.
Le sénateur Jessiman: Lorsque vous avez rencontré deux fois, et M. Nixon trois fois, et M. Goudge deux fois, étiez-vous...
M. Crosbie: Excusez-moi, était-ce les réunions avec monsieur... vous parlez de ces réunions-là?
Le sénateur Jessiman: J'en ai fini avec 1993. Vous me disiez que votre cabinet a touché environ 100 000 dollars pour le travail qu'il a effectué.
M. Crosbie: Un peu moins.
Le sénateur Jessiman: Mais je parle maintenant des réunions que vous avez eues dernièrement. Vous avez participé à deux, et M. Nixon à trois, et M. Goudge à deux aussi. Vous d'abord, êtes-vous ici en votre capacité d'avocat?
M. Crosbie: Oui.
Le sénateur Jessiman: Et vous agissez pour le compte du gouvernement?
M. Crosbie: Nous travaillions pour M. Nixon.
Le sénateur Jessiman: Non, je parle de maintenant. Vous êtes ici aujourd'hui et vous étiez là hier. Êtes-vous là pour le compte du gouvernement ou non?
M. Goudge: Puis-je répondre à cela, sénateur? Nous sommes ici à la demande du comité.
Le sénateur Jessiman: Vous êtes ici à la demande du comité, certes, mais êtes-vous ici en votre capacité professionnelle? Allez-vous facturer?
M. Goudge: Vais-je facturer des honoraires?
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Goudge: Je ne pense pas que l'on me paye pour témoigner. En revanche, j'ai passé pas mal de temps à m'immerger de nouveau dans ce...
Le sénateur Jessiman: Je ne suis pas opposé...
M. Goudge: ...et c'est un sujet que je compte aborder.
Le sénateur Jessiman: Même chose pour vous, monsieur Crosbie?
M. Nixon: Je devrais peut-être préciser que nous n'avons aucune entente contractuelle avec le gouvernement à l'heure actuelle. Nos ententes contractuelles ont expiré fin 1993.
Le sénateur Jessiman: Mais vous ne comptez pas que M. Goudge travaille pour rien, n'est-ce pas?
M. Nixon: Selon mon expérience - il est responsable de l'Aide juridique, mais il peut...
M. Goudge: Je ne connais donc que trop bien...
M. Nixon: Il s'occupera de ses intérêts d'une façon ou d'une autre.
Le sénateur Kirby: On pourrait nous considérer comme un dossier relevant de l'aide juridique, je suppose.
M. Goudge: Je ne pense pas qu'il y ait lieu pour moi de répondre, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Monsieur Crosbie, vous comptez facturer des honoraires pour le temps que vous avez passé dans ces diverses réunions et ici même, n'est-ce pas?
M. Crosbie: Nous aimerions qu'il y ait une certaine contrepartie.
M. Nixon: Mais il n'y a pas aujourd'hui d'entente à cet effet. Nous sommes ici à la demande du président et de l'avocat du comité, ainsi que du greffier du comité, et nous sommes venus bien volontiers.
D'ailleurs, j'ai lu vos délibérations du premier jour, où vous avez indiqué qu'aucun témoin ne serait rémunéré et que vous comptiez que tous restent aussi longtemps que nécessaire et aussi longtemps que les sénateurs voudraient leur poser des questions; et cela me paraît tout à fait approprié. Je vous enverrai peut-être ma note d'hôtel et ma facture pour le billet d'Air Canada, mais vous en ferez ce que bon vous semblera.
Le sénateur Jessiman: Mais vous ne vous exprimez pas, en disant cela, au nom de M. Goudge et de M. Crosbie, n'est-ce pas?
M. Nixon: Je vous dis qu'à ma connaissance, rien n'est prévu pour leur rémunération. S'ils envoient une facture à quelqu'un, eh bien, cela les regarde, mais nous n'avons pas été engagés par un ministère, ni par moi-même, ni par le Bureau du Conseil privé, ni quiconque d'autre.
Le sénateur LeBreton: Question complémentaire, monsieur le président. Pour en revenir à votre rôle ici aujourd'hui, et vous avez bien entendu été convoqués par le comité, mais le cabinet - M. Hunter est un avocat du cabinet Scott & Aylen engagé par le gouvernement et Lindquist Avey est un cabinet de juricomptables engagé par le gouvernement ou par Scott & Aylen - ce n'est toujours pas clair -, apparemment dans le but, selon une longue lettre d'explication que nous a adressée M. Hunter lorsqu'a surgi tout ce problème des documents, de classer les documents, de veiller à ce que nous ayons les documents dans l'ordre de la comparution des témoins - mais je peux vous dire que nous, de notre côté, aurions été ravis d'avoir certains des documents sur Bandeen lorsqu'il a comparu - et aider les témoins du côté gouvernemental... mais pourquoi M. Hunter et M. MacDonald, du cabinet Lindquist Avey, passeraient-ils du temps avec vous, messieurs, pour passer en revue les témoignages, si même ils ne vous ont pas montré de documents... vous ont-ils expliqué pourquoi ils faisaient cela?
M. Goudge: Je ne peux me prononcer sur leurs motifs, sénateur. Je peux vous dire pourquoi j'ai trouvé cela utile. Vous savez que les événements de novembre 1993 se situent pas mal de mois dans le passé, pour nous. À la fin de ces 30 journées de travail très intense, où nous travaillions d'arrache-pied... j'ai littéralement laissé tomber ma clientèle et n'ai rien fait d'autre pendant 30 jours. C'était une période de travail très intense. À la fin, nous avions quantité d'informations en tête.
Le sénateur Jessiman le sait bien, on tend à oublier un dossier que l'on a plaidé dès le lendemain, et c'est pourquoi j'ai trouvé très utile que des gens qui ont suivi de près ce processus, vos travaux très minutieux, puissent nous dire où vous en étiez parvenu, nous communiquent certains des renseignements que vous avez obtenus et qui nous concernent et remettre nos mémoires au niveau où elles étaient en novembre 1993.
Personnellement, j'ai trouvé cela très utile.
Le sénateur LeBreton: Excusez-moi, mais vous dites «votre processus très minutieux» comme si vous parliez du comité tout entier. Nous, en tant que comité, n'avons engagé aucun cabinet qui se présente comme... il y a là un détective avec sa loupe et sa calculatrice et une poubelle qui épluche des documents. Nous, en tant que comité, n'avons pas... ce n'était pas notre comité.
M. Goudge: Je crois savoir que vous avez entendu 60 témoins.
Le sénateur LeBreton: C'est juste.
M. Goudge: Dont beaucoup ont parlé de ce que nous avons fait, et il était très utile, selon notre perspective, d'être tenus au courant de ce qu'ils disaient.
Le sénateur LeBreton: Mais ce que je voudrais savoir c'est pourquoi le gouvernement, qui a engagé Scott & Aylen et qui... et soit le gouvernement soit Scott & Aylen ont ensuite engagé le cabinet de juricomptables Lindquist Avey, qui se qualifient eux-mêmes de «détectives des crimes des cols blancs», pourquoi donc... nous avons eu cette explication que nous ne comprenons pas pleinement et nous ne savons pas exactement ce qu'ils font dans cette affaire de la censure des documents... pourquoi donc M. MacDonald, qui travaille à Toronto et est un des principaux avocats de ce cabinet, et M. Hunter, du cabinet Scott & Aylen passeraient-ils du temps avec vous, témoins?
M. Nixon: Permettez-moi de dire ceci, monsieur le président. Nous n'avons absolument rien à voir avec l'engagement de l'un ou l'autre cabinet. La responsabilité en appartient à quelqu'un d'autre et c'est là où vous devez chercher vos réponses.
Mais je suis d'accord avec M. Goudge, nous avons trouvé l'aide de ces messieurs très utiles. Et je peux vous dire que toutes les réponses que nous avons pu donner au comité, aussi insuffisantes soient-elles, de l'avis de l'honorable sénateur, ont été grandement facilitées par le fait qu'ils ont suivi ce qui se disait à votre comité et ont attiré notre attention sur tout ce qui nous concernait.
Le sénateur LeBreton: Ils travaillaient donc pour le gouvernement?
M. Nixon: Pour les personnes qui les ont engagés, oui.
Le sénateur LeBreton: Eh bien, cela montre bien ce que nous disons depuis le début, à savoir que nous les sénateurs ne sommes pas à armes égales dans cette enquête.
Le sénateur Stewart: Monsieur le président, est-il exact que l'indemnisation des témoins comparaissant à ce comité respecte les règles habituelles du Sénat?
Le président: Oui.
Le sénateur Stewart: La réponse est «oui»?
Le président: Oui. Et puisque j'ai soulevé la question avant la pause, je pense que les témoins ont déjà répondu aux questions.
Sénateur Jessiman.
Le sénateur Jessiman: Ma question s'adresse à M. Nixon. Nous avons dans le dossier une lettre du 17 novembre montrant que vous avez reçu à cette date le gros mémoire du gouvernement ontarien qui allègue que des irrégularités ont été commises par le gouvernement fédéral. Vous avez donc reçu ce document le 17 novembre. Et la troisième semaine de ce même mois, vous avez eu un entretien avec Morrison Hershfield où il disait qu'il y avait un truquage en cours, ou quelque chose à cet effet; est-ce exact?
M. Nixon: Désolé, je ne peux vérifier la date, mais il y a eu quelques discussions sur la date précise de la réunion avec Morrison Hershfield, et le mieux que je puisse vous dire est qu'elle s'est située dans la période de trois semaines dont nous parlons et, à mon avis, probablement vers la fin de la deuxième semaine.
Le sénateur Jessiman: C'était donc certainement après le 11 novembre...
M. Nixon: Désolé, je ne saisis pas ce qui s'est passé le 11 novembre.
Le sénateur Jessiman: Vous avez dit que c'était à la fin de la deuxième semaine. Vous avez dit tout à l'heure, et vous pourrez vérifier votre témoignage, que vous pensiez que c'était près de la fin de la troisième semaine. Nous revenons maintenant là-dessus et vous dites que c'était à la fin de la deuxième semaine. Donc...
M. Nixon: Il me semble que je viens de dire la troisième semaine mais ma langue a peut-être fourché.
Le sénateur Jessiman: Tout ce que je veux savoir c'est si vous avez rencontré Morrison Hershfield avant le 11 novembre.
M. Nixon: Non, je pense que c'était...
Le sénateur Jessiman: Désolé, après le 11 novembre, excusez-moi. Et la même chose pour la lettre datée du 17 novembre, vous l'avez reçue après le 11 novembre.
M. Nixon: C'est juste.
Le sénateur Jessiman: Et on vous a déjà posé la question précédemment, le 11 novembre... vous avez commencé à rédiger votre rapport et le 11 novembre, page 5, vous étiez en possession de renseignements que le gouvernement ontarien vous avait donnés et c'est là-dessus que vous avez fondé votre conclusion sur l'influence indue. Mais, le 11 novembre...
M. Nixon: Désolé d'interrompre, monsieur le président. Je ne saisis pas bien l'importance de cette date du 11 novembre. Je pense avoir indiqué clairement au comité, monsieur le président, que mes opinions ont évolué au fil des trois semaines, qu'il y a eu un certain nombre d'ébauches du rapport et j'ai entrepris à un certain stade d'esquisser les conclusions et recommandations, mais que la conclusion et les recommandations définitives destinées au premier ministre ont été finalisées la quatrième semaine. Selon mon souvenir, il n'y a rien eu de particulier le 11 novembre.
Le sénateur Jessiman: Vous avez remis au comité ces diverses ébauches de votre rapport; et la première commence avec «Problèmes et observations, 11 novembre 1993».
M. Nixon: Je ne pense pas... est-ce la bonne date?
Le sénateur Jessiman: Je ne peux que dire que c'est daté du 11 novembre. Ce ne pourrait pas être une note datée du 11 novembre 1994, n'est-ce pas?
M. Goudge: Quel document regardez-vous, sénateur?
Le sénateur Jessiman: C'est un document intitulé «Ébauches du rapport Nixon».
M. Goudge: Qui a constitué ce recueil?
Le sénateur Jessiman: Je ne sais pas. On me l'a remis.
M. Nelligan: Il s'agit simplement d'un recueil de tous les documents d'archives qui semblent être des ébauches du rapport final. Nous avons tenté de déchiffrer les dates. Nous avons indiqué que nous ne sommes pas sûrs de certaines des dates. Peut-être les témoins pourraient-ils vous éclairer sur la date de chacune...
M. Nixon: Monsieur le président, je n'étais pas à la même page que le sénateur Jessiman...
Le sénateur Jessiman: Première page, monsieur. La première page, en haut à droite.
M. Goudge: Est-ce que vous vous fiez à l'inscription qui se trouve en haut à droite?
Le sénateur Jessiman: Oui, 11 novembre. Il n'y a pas l'année... si ce n'est pas 1993, ce n'est certainement pas 1992 non plus.
M. Nixon: C'est l'écriture de M. Goudge.
M. Goudge: Souhaitez-vous que j'intervienne là-dessus?
Le sénateur Jessiman: Certainement. Dites-moi.
M. Goudge: Vu ce qui a été dit hier, j'ai vérifié et demandé qu'on examine l'original et la date écrite ici est le 19 novembre, et non le 11 novembre, d'accord?
Le sénateur Jessiman: Est-ce que cela dit 19 novembre?
M. Nixon: Oui.
M. Goudge: Si vous regardez l'original, si vous examinez l'original, il apparaît clairement que c'est le 19 novembre.
Le sénateur Jessiman: L'avez-vous ici?
M. Goudge: Il est à Toronto, mais j'ai fait envoyer par télécopieur un agrandissement de la date figurant sur l'original. Et je peux vous dire que cela semble coller, sénateur. Je sais que... et j'ai fait faire des vérifications là-dessus...
Le sénateur Jessiman: Vous dites que cette ébauche est du 19?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Jessiman: Regardez la suivante.
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Jessiman: Elle est datée du 18 novembre.
M. Goudge: Oui. Je n'ai rien à voir avec le classement qui a été fait ici, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Ce n'est pas vous qui avez classé ce recueil?
M. Goudge: Non.
M. Nelligan: Afin que vous compreniez bien, sénateur, nous avons cru que ce document était daté du 11, et c'est pourquoi nous l'avons classé avant celui du 18, et dont la date est clairement lisible. Mais nous n'avons jamais été sûrs de leur ordre chronologique. Cela a été fait par nous, ici.
Le sénateur Jessiman: Et vous avez lu la même chose que moi, car il me paraît plutôt évident qu'il est écrit le 11, mais si vous dites que c'est 19...
M. Goudge: Il est clair sur l'original et très clair sur l'agrandissement télécopié que c'est le 19 novembre. Et cela colle très bien, sénateur. Si vous regardez, c'est précisément le même texte que celui daté du 18 novembre.
Je peux vous dire que, dans mon souvenir, il n'y a rien eu de cette nature déjà le 11 novembre. Franchement, cela me surprenait beaucoup car on en a parlé en passant hier et cela ne paraissait pas coller du tout.
Le sénateur Jessiman: Avez-vous l'agrandissement télécopié?
M. Goudge: Oui.
Le sénateur Jessiman: Puis-je le voir?
Le président: D'accord, monsieur Goudge. Nous pouvons le prendre.
Le sénateur Jessiman: C'est un drôle de 9. Qu'en pensez-vous?
Il me semble que cela devrait être versé au dossier et si vous pouviez produire l'original, j'apprécierais car cela me semble certainement...
M. Goudge: On me dit qu'il est à Toronto. Franchement, nous n'avons pas eu... ces documents ne sont plus physiquement sous ma garde depuis longtemps.
Le sénateur Tkachuk: L'original est chez Lindquist Avey.
Le sénateur Jessiman: C'est très important, monsieur le président, et je pense que cela devrait être versé à notre dossier.
M. Goudge: Je ne sais pas où il est.
Le sénateur Jessiman: Sous une forme ou sous une autre.
Le sénateur LeBreton: Vous dites que vous avez remis vos documents à Lindquist Avey et Hunter?
M. Goudge: Non. J'ai remis tous ces documents à la Couronne, dans le cadre de la procédure judiciaire, il y a des mois et des mois.
Le sénateur LeBreton: Ils sont donc aux mains du tribunal?
M. Goudge: Je ne sais pas où ils sont. Tout ce que je sais, c'est que j'ai demandé à M. Hunter si je pouvais avoir une copie de l'original, et ce que l'on m'a donné était un agrandissement télécopié de la première page. Je l'ai fait car je ne voyais pas comment il pourrait y avoir un document comme celui figurant à l'onglet 1 dès le 11 novembre. Je ne me souviens d'aucune ébauche déjà à cette date.
M. Nixon: Il n'y en avait pas.
Le sénateur Jessiman: Bien. Mais vous allez essayer de produire l'original. Vous pourriez peut-être téléphoner pendant la pause de midi.
M. Goudge: Je vais essayer de remonter la piste, sénateur, et déterminer d'où cela provient.
Le sénateur Jessiman: Merci beaucoup.
Le président: Sénateur Jessiman, pouvons-nous accepter la parole du témoin lorsqu'il dit que c'est le 19 novembre?
Le sénateur Jessiman: Est-ce que cela a l'air d'être le 19 novembre, à vos yeux?
Le président: C'est possible, oui.
M. Nelligan: Cela ne ressemble pas à un 11.
Le sénateur Jessiman: Je ne sais pas à quoi cela ressemble.
Le président: Le témoin a dit que c'était le 19 novembre. Ne pourrions-nous...
Le sénateur Jessiman: D'accord, bien sûr, bien entendu, monsieur Goudge. Mais j'aimerais néanmoins voir l'original, si vous voulez bien.
M. Goudge: Je ferai de mon mieux.
Le sénateur Jessiman: Je sais que l'aéroport est désorganisé, mais je suis sûr que votre bureau est bien organisé et vous devez avoir un télécopieur pour nous faxer cela.
M. Goudge: Je ferai de mon mieux, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Parfait. Merci beaucoup.
Monsieur le président, allons-nous terminer à midi?
Le président: Oui.
Le sénateur Jessiman: Il vaut mieux que je m'arrête. Je veux parler de Mme Labelle. Cela prendra une heure.
Le président: Très bien. Cela nous donne cinq minutes de plus pour déjeuner.
Le sénateur Jessiman: Ou bien nous pouvons reprendre à 2 heures moins 5, peu m'importe.
Le sénateur Bryden: Monsieur le président, si nous avons encore cinq minutes, j'aimerais aborder deux points, mais je peux prendre une longue pause-déjeuner comme tous les autres. Me permettez-vous?
Le sénateur Jessiman: Non.
Le sénateur Bryden: S'il vous plaît, ne déduisez pas cela de mon temps de parole cet après-midi.
Dans le recueil des diverses ébauches du rapport Nixon, il y a un passage effacé à l'onglet 2.
Le sénateur Jessiman: Page?
Le sénateur Bryden: Voyons voir si les pages sont numérotées. Oui. Il y a un passage censuré page 5. Le passage qui m'intéresse, car je pense qu'il nous intéresse, se trouve page...
M. Nelligan: La page non numérotée.
Le sénateur Bryden: Oui, après cela. Ce n'est pas la page suivante, mais l'autre d'après. Il semble manquer une partie de phrase. «Certains ont été surpris lorsque...» ...est-ce «Huang et Danczkay»?
Le président: Hum.
Le sénateur Bryden: «appuyé par le lobbyiste Moores a gagné», et puis on lit «Otto Jellinek», partie effacée, «a demandé à son adjoint d'assister».
Pourrions-nous savoir pourquoi cela a été censuré? Je serais très surpris que cela ne soit pas en rapport avec le sujet qui nous préoccupe. Et il y a un autre passage censuré. Il est à l'onglet 3, page 2.
Encore une fois, on dirait le même passage dans une autre ébauche. «Certains ont été surpris lorsque Huang et Danczkay, appuyé par le lobbyiste Moores a gagné», et puis «Otto Jellinek», partie effacée, «a demandé à son adjoint».
M. Nelligan: Je pense que c'est le même texte.
Le sénateur Bryden: Pourriez-vous nous éclairer? Serait-il possible de voir si nous pouvons...
M. Nelligan: Certainement, sénateur. Il y a peut-être quelque confusion, parce que ces témoins ont eu accès aux présentations au Conseil du Trésor et ont pu, de ce fait, par inadvertance, faire état de renseignements que quelqu'un considère comme un secret du Cabinet.
Je suis persuadé, et ils peuvent me le garantir, que rien dans les présentations au Conseil du Trésor n'a quoi que ce soit à voir avec Otto Jellinek. Ils pourront peut-être confirmer... je ne vois absolument pas pourquoi ce paragraphe a été censuré de cette façon, et je vais vérifier auprès du ministère de la Justice.
Le sénateur Bryden: Je vous en serais très reconnaissant.
Le sénateur Jessiman: Monsieur le président, j'ai une question.
Le sénateur Bryden: Vous ne voulez tout simplement jamais me laisser le dernier mot.
Le sénateur Jessiman: Non, ce n'est pas vrai.
M. Goudge nous a expliqué combien il a été utile que les avocats et juricomptables viennent vous voir parce que cela vous a permis de vous rafraîchir la mémoire. Est-ce votre cas aussi, monsieur Nixon?
M. Nixon: Oui.
Le sénateur Jessiman: Et monsieur Crosbie ?
M. Crosbie: Oui.
Le sénateur Jessiman: Je vous remercie.
Le président: Bien. Nous allons suspendre la séance pour déjeuner. Retour à 14 heures.
Le comité lève la séance jusqu'à 14 heures.
Ottawa, le mercredi 27 septembre 1995
Le comité sénatorial spécial sur les accords de l'aéroport Pearson se réunit aujourd'hui, à 14 heures, pour étudier tous les aspects inhérents aux politiques et aux négociations ayant mené aux accords relatifs au réaménagement et à l'exploitation des aérogares 1 et 2 de l'aéroport international Lester B. Pearson, de même que les circonstances ayant entouré l'annulation des accords en question, en vue d'en faire rapport.
Le sénateur Finlay MacDonald (président) occupe le fauteuil.
Le président: La séance est ouverte. Avant que le sénateur Jessiman ne poursuive ses questions, j'aimerais vous lire deux lettres. La première est adressée à M. Greg Weston du Citizen d'Ottawa, 165 rue Sparks, Ottawa.
Monsieur,
Dans votre article du lundi 25 septembre 1995, vous avez sérieusement remis en cause la crédibilité des travaux de notre comité. Dans votre article intitulé «(Traduction) La mise en scène de l'enquête Pearson va au-delà de la dissimulation de certains détails», vous dites: «(Traduction) nous avons en main tout le paquet de ces documents ministériels hautement confidentiels, dont le contenu a contribué à déclencher le scandale initial au sujet du marché Pearson il y a deux ans jour pour jour cette semaine.» La façon dont vous parlez de ces documents dans votre article nous porte à croire qu'ils seraient très importants pour permettre au comité sénatorial spécial sur les accords relatifs à l'aéroport Pearson de mener à bien le mandat que lui a confié le Sénat.
En conséquence, le comité vous invite à venir témoigner le jeudi 12 octobre 1995 dans le but de lui remettre des copies de ces documents. Toutefois, si vous faites parvenir les documents en question au comité avant cette date, votre témoignage en personne ne sera pas nécessaire.
Nous vous saurions gré de répondre dans les 48 heures à cette invitation.
Si vous souhaitez obtenir plus de précisions au sujet de cette demande, veuillez communiquer avec le conseiller juridique du comité, M. John Nelligan [...]
Les numéros de téléphone suivent.
Cette lettre est signée de M. Gary O'Brien, greffier du comité, avec copie à moi-même, au sénateur Michael Kirby, le vice- président et à M. John Nelligan, le conseiller juridique du comité.
Le sénateur Kirby: Il convient de signaler pour la gouverne de tous que vous et moi avons conjointement préparé le texte de cette lettre et que nous l'approuvons tous deux.
Le président: Oui, c'est un fait, sénateur Kirby.
Comme vous venez de l'entendre et comme vous pourrez le voir, dans cette lettre, le comité demande simplement à M. Weston de produire des documents qui lui ont été remis par le biais d'une fuite. S'ils nous sont fournis, il nous sera inutile d'interroger M. Weston ou de lui demander de révéler ses sources. J'ajoute que nous avons au préalable demandé ces documents au ministère de la Justice et que, après réflexion, les fonctionnaires nous ont répondu de nous adresser à M. Weston.
La deuxième lettre, signée par moi et le sénateur Kirby, est adressée à M. George Thomson, sous-ministre de la Justice, Ottawa.
Monsieur,
La semaine dernière, vous nous avez dit que les fonctionnaires de votre ministère étaient assujettis au principe de la confidentialité visant les rapports entre un avocat et son client. Ce faisant, vous avez exprimé une certaine réticence lorsque nous avons demandé que les conseillers juridiques internes du ministère de la Justice, qui se sont penchés sur le dossier Pearson, témoignent devant notre comité. Vous avez fait preuve de la même réticence lors de conversations avec le conseiller juridique du comité, M. Nelligan. Nous déplorons le fait que cette prise de position de votre part entrave sérieusement la capacité du Sénat en général, et du comité en particulier, de faire leur travail.
Étant donné votre décision, il est impossible à notre comité ou à un autre comité sénatorial d'avoir accès aux conseils que les juristes du ministère de la Justice fournissent à d'autres fonctionnaires (et non aux ministres). Pourtant, comme le prouvent clairement les témoignages écrits et oraux reçus par le comité, les conseils fournis par un fonctionnaire d'un ministère quelconque aux autres membres de la fonction publique ne sont pas confidentiels et doivent être à la disposition de notre comité et des autres comités du Sénat. Nous rejetons l'idée que les juristes du ministère de la Justice doivent être traités de façon différente des autres fonctionnaires en ce qui a trait aux conseils fournis aux fonctionnaires.
À notre avis, il est essentiel, pour mener à bien notre mandat, que nous puissions interroger MM. J. Pigeon et R.J. Green au sujet des conseils qu'ils ont donnés à divers fonctionnaires relativement aux accords sur l'aéroport Pearson en général et, en particulier, pour connaître leur avis quant à la date précise à laquelle ces accords sont devenus pleinement exécutoires pour le gouvernement fédéral. En conséquence, nous demandons que MM. Pigeon et Green soient dispensés, par le client compétent, de l'application du secret des rapports avocat-client auquel ils se sentent tenus.
Nous discuterons volontiers avec vous de la date prévue pour entendre ce témoignage et nous efforcerons de trouver un jour qui convienne à ces témoins.
Cette lettre est signée par moi, président du comité et par le sénateur Kirby, vice-président. Tous ceux qui le demandent peuvent également en obtenir copie.
Le sénateur Jessiman: Je viens d'obtenir le texte d'une lettre adressée par le ministère de la Justice à Gary O'Brien, greffier du comité, relativement à certains documents au sujet desquels j'avais posé des questions à Mme Bourgon, la greffière du Conseil privé. J'avais discuté au préalable avec M. Goudge dans l'espoir de déterminer ce que vous avez vraiment reçu du ministère, et à quelle date, après votre nomination, soit le 29 octobre, et... j'ai sous les yeux quatre documents qui s'intitulent tous... ou plutôt, trois d'entre eux s'intitulent «Privatisation des aérogares 1 et 2». En fait, je suppose que les quatre documents portent sur la même question. Ils sont tous précédés d'une lettre qui vous est adressée, monsieur... ou plutôt, veuillez m'excuser, d'une note de service adressée à Brad Wilson, votre adjoint administratif, c'est exact?
M. Nixon: C'est exact, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Cette lettre datée du 29 octobre se lit comme suit: «Veuillez trouver ci-joint, en réponse à votre demande dans le cadre de l'étude de M. Nixon, un exposé sur la privatisation des aérogares 1 et 2. Veuillez vous assurer que M. Nixon a bien signé l'accord de confidentialité avant de lui remettre ces documents. Je vous remercie. William A. Rowat.»
Or, lorsque nous avons discuté de ce document avec M. Rowat, il nous a également été signalé, et ce dernier l'a confirmé, que le ministre, en présentant cette question à la Chambre des communes, a fait mention d'un document portant le numéro 803279, dont j'ai remis une copie à tous les intéressés, mais malheureusement pas aujourd'hui; il s'agit d'un document intitulé «Privatisation des aérogares 1 et 2», numéro 803279, daté du 4 novembre 1993, qui est semblable à l'autre, mais semble plus complet.
Les parties qui m'intéressent le plus, dans le premier document, outre la lettre, si la pièce jointe est exacte, se trouvent à la page 11 où on peut lire: «Résultats éventuels de l'étude» et un peu plus loin: premièrement, annuler l'accord... repartir à zéro avec une AAL ou une... un mot indéchiffrable... d'État. Puis, deuxièmement, renégocier ou remanier l'accord.
Or, le document daté du 4 novembre 1993 compte trois pages supplémentaires et je ne prétends pas qu'elles soient identiques car ceci se trouve à la page 11 et ensuite, à la page 12 du document du 4 novembre, c'est la même chose. Il est dit, page 12... en fait, il y a un «25», et je ne pense pas que ce soit la page. Ça ne l'est certainement pas. Toutefois, on peut lire le chiffre «25» juste au-dessus d'un des mots, mais ce n'est certainement pas la page.
Il y est dit: «annuler l'accord», «renégocier/remanier l'accord.»
Je vous demanderais de jeter un coup d'oeil sur ce document et de me dire si, à un moment donné, soit lorsque vous l'avez reçu le 29, soit après le 4 novembre, après que ce document ait été rédigé, si vous en avez discuté pour obtenir des explications sur ce que l'on entendait exactement par «annuler l'accord» ou renégocier ou remanier l'accord?
Je vais vous remettre ce document; je vous demanderais d'y jeter un coup d'oeil et de me dire si oui ou non vous l'avez reçu, car M. Rowat dit que oui, mais que ce soit le cas ou non, j'aimerais savoir si cela vous rappelle quelque chose. Dans l'affirmative, j'aimerais vous poser quelques questions à ce sujet.
M. Nixon: Monsieur le président, M. Goudge est en train d'examiner le document mais je me rappelle avoir reçu un document et en avoir discuté avec les responsables de Transports Canada au début de mon étude; il s'y trouvait dans les deux dernières pages, ou peut-être même la dernière page, certaines options possibles. Si ma mémoire est bonne, ces options n'étaient pas expliquées en détail. Il y était question de deux ou trois possibilités.
M. Goudge me dit qu'il ne se souvient pas d'avoir vu le document que vous nous avez remis et, à première vue, les options ou mesures possibles y sont décrites de façon plus détaillée que ce dont je me souviens. Ce qui est encore très clair dans mon esprit, bien entendu, et ce que j'ai vu, à la dernière page si je ne m'abuse, c'est que la pénalité financière pourrait aller de 500 millions de dollars à près de 2 milliards de dollars, ou une somme aussi exorbitante que cela.
Le sénateur Jessiman: Entre 500 millions et 2 milliards de dollars? Si vous jetez un coup d'oeil sur le document, vous constaterez... et c'est l'une des choses que je voulais entendre de votre part.
M. Nixon: Très bien, cela se trouve dans ce document, mais il ne me semble pas que ce soit la même page que celle du document initial.
Le sénateur Jessiman: Ce que je veux dire, c'est que vous saviez au tout début de votre étude que si nous annulions cette entente, ou si vous recommandiez qu'elle soit annulée et que le gouvernement suive votre conseil et l'annule, vous saviez très bien dès le début que le ministère vous avait dit - non les auteurs de la proposition, ni la Pearson Development Corporation, mais bien le ministère lui-même - que si ce marché est annulé, le gouvernement doit savoir immédiatement, et vous le saviez, qu'il risque de se trouver dans l'obligation de verser des dommages- intérêts pouvant aller de 500 millions à 2 milliards de dollars. Vous le saviez et vous étiez d'accord. Je tenais simplement à le signaler pour que vous le confirmiez publiquement.
M. Nixon: Si vous le permettez, monsieur le président, je pourrais peut-être ajouter quelque chose. J'ai été quelque peu surpris, lorsque cette somme m'a été mentionnée, de constater que l'on ne tenait pas compte de la possibilité pour le Parlement de limiter le montant des dommages-intérêts. Et c'est pourquoi, lorsque j'ai fait une recommandation au ministre en lui disant qu'il était possible de négocier l'annulation du contrat, mais que sinon, il pouvait toujours invoquer le pouvoir du Parlement et autoriser le paiement de faux frais d'un montant acceptable mais sans toutefois envisager la moindre compensation au titre d'un manque à gagner de bénéfices, et que notre étude prouverait que ces faux frais devaient être nettement inférieurs au chiffre le plus bas indiqué par le ministère. Et je dois vous dire que j'estimais pour ma part tout à fait possible que, si l'annulation du contrat nous obligeait à payer ne serait-ce qu'en partie ce manque à gagner de bénéfices en se fondant le taux de 23,6 p. 100 sur 57 ans, nous en arriverions à un chiffre tout à fait exorbitant.
Toutefois, si le Parlement a le pouvoir d'annuler un contrat (et l'une des Chambres du Parlement a déjà invoqué ce pouvoir à deux reprises), j'ai dit qu'il était possible également d'établir du point de vue juridique que l'annulation du contrat obligerait le gouvernement à rembourser certaines dépenses qui seraient calculées selon certains moyens, mais j'ai personnellement recommandé au gouvernement de ne pas envisager de verser le moindre dédommagement au titre des bénéfices perdus.
Le sénateur Jessiman: Vous saviez toutefois que c'étaient des responsables du gouvernement qui vous le disaient. Ce n'était pas les gens de l'autre partie, mais bien les représentants du ministère de la Justice, je suppose, qui ont dit à Rowat de vous informer de la situation dans laquelle nous risquions de nous trouver.
M. Nixon: Je me rappelle m'être dit à l'époque que leur liste d'options était étonnamment restreinte.
Le sénateur Jessiman: J'aimerais récupérer ce document, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, car je tiens à le conserver. Si vous ne l'avez pas obtenu, moi si et je tiens à le garder.
M. Nixon: En fait, cette question a été le sujet favori des éditorialistes du Globe and Mail, mais ils voient les choses sous le même angle que vous.
Le sénateur Jessiman: C'est intéressant, car d'après mes renseignements, ce document a été préparé par des hauts fonctionnaires sans la moindre ingérence de la part des politiques. J'ai du mal à le croire car les seules options possibles qui vous aient été proposées, c'était de repartir à zéro avec une AAL ou une société d'État, ou de renégocier ou remanier l'accord.
M. Nixon: Ou de ne rien y toucher, je suppose.
Le sénateur Jessiman: Vous dites?
M. Nixon: Ou de ne rien y toucher, je suppose.
Le sénateur Jessiman: Cela n'est dit nulle part. Je voudrais maintenant savoir si, à un moment donné, le premier ministre ou quelqu'un d'autre a dit: «Bon, voyons un peu...». De toute évidence, lorsque vous avez parlé avec lui, il n'avait pas ce document en main. Lorsque vous avez discuté avec le premier ministre, il n'avait en main ni ce document, ni aucun autre concernant cette transaction de...
M. Nixon: Il n'était pas premier ministre, à l'époque.
Le sénateur Jessiman: Je regrette, je parle du premier ministre en puissance ou sur le point de l'être; officiellement, il était chef de l'opposition.
Lorsqu'il vous a parlé, avait-il des documents en sa possession?
M. Nixon: Non, aucun.
Le sénateur Jessiman: Lorsque vous lui avez demandé ce qu'il attendait de vous, vous a-t-il dit, à un moment donné: «Si c'est une bonne affaire, allons-y», et si l'on est objectif à ce sujet, comme il pensait, je suppose, que vous deviez l'être, je vous demande donc de me dire s'il vous a dit à un moment: «Dites-moi simplement si c'est une bonne affaire, menons-la à terme.» Cette suggestion a-t-elle jamais été faite?
M. Nixon: Il m'a conseillé d'examiner le dossier, de lui faire part de mon avis et de mes conseils, mais rien de plus. Il ne m'a pas dit sous quel angle aborder la question. Nous n'en avons pas parlé. Il m'a simplement confié cette tåche en me disant: «Nous nous reverrons dans un mois».
Le sénateur Jessiman: Lorsque vous en avez discuté avec les fonctionnaires, a-t-il jamais été question d'envisager au moins de donner suite à cette entente?
M. Nixon: Je pense qu'on m'a simplement soumis la liste d'options sans m'en recommander une plutôt qu'une autre. J'étais conscient du fait que les gens auxquels je m'adressais avaient eux-mêmes négocié l'accord et que, même s'ils n'étaient pas en mesure d'essayer de me convaincre, il était évident que c'était d'une certaine façon le fruit de leurs efforts, «leur bébé», pour parler couramment.
Le sénateur Jessiman: J'ai sous les yeux une copie antérieure du même document, qui ne porte aucune date mais le numéro 00304. Il y est dit...
Le sénateur Kirby: Puis-je poser une question? Si ce document n'est pas daté, comment savez-vous qu'il est antérieur à l'autre?
Le sénateur Jessiman: Eh bien, je n'y trouve aucune date.
Le sénateur Kirby: Je regrette. Je suis peut-être un peu pointilleux, mais vous avez dit que ce document est antérieur à l'autre mais qu'il n'est pas daté. Cela me surprend car...
Le sénateur Jessiman: Je suppose qu'il est antérieur, car il est en grande partie manuscrit, et j'ai donc supposé qu'il avait été préparé avant l'autre. Si ce document est en fait ultérieur à l'autre, que le témoin me le dise.
M. Nixon: Je regrette d'interrompre la réflexion du sénateur, et c'est peut-être dû à l'intensité de son interrogatoire, mais j'ai l'impression que quelqu'un a remonté le chauffage. Pourrait-on baisser la température?
Le président: C'est la même chose tous les jours à midi. J'ai été désigné responsable de la température de la pièce, mais je n'ai pas ma caisse à outils avec moi.
M. Nixon: On pourrait peut-être jeter un fauteuil par la fenêtre.
Le sénateur Jessiman: Je dis que c'est un document antérieur, monsieur le président, car la lettre dont j'ai parlé...
Le sénateur Kirby: Je n'ai pas ce document.
Le sénateur Jessiman: Il y est dit: «Une ébauche a été préparée et une rencontre a eu lieu dans les organismes centraux le 25 octobre 1993 en vue d'obtenir leur avis.»
Cette ébauche n'est pas datée, et il s'agit du document numéro 00304, dont j'ai parlé, et qui est inclus dans l'ensemble de la documentation.
Voilà ce qu'il en est: dans ce document, il est dit que vous devriez envisager comme première option de retenir les services de la Pearson Development Corporation pour l'aménagement des aérogares 1 et 2. Il est regrettable que vous n'ayez pas pu voir ce document, car vous croyez vous souvenir, dites-vous, que vous n'avez pas reçu celui que vous avez sous les yeux, mais uniquement celui daté du 29 octobre, où l'on présentait les deux options.
M. Nixon: Honnêtement, sénateur, si ma mémoire est bonne, dans le document que nous avions en main, il était proposé de façon implicite ou directement d'examiner le contrat et de recommander certains changements au gouvernement, voire le rejeter carrément. Je n'en suis pas certain, mais il me paraît évident que c'est une option qui m'était proposée.
Le sénateur Jessiman: J'ai posé la question à Mme Bourgon et cela me paraît surprenant; je tiens simplement à vous dire qu'à mon avis, il y a sans doute eu ingérence dans ce dossier de la part d'un élu politique. C'est clair; le document est simplement préparé par les fonctionnaires. Voici toutefois ce qu'il y est dit: «Arguments en faveur du statu quo: aucun problème juridique, aucune indemnisation, les travaux d'aménagement vont de l'avant comme prévu. Arguments contre: l'impression que l'accord est mauvais subsiste encore, le népotisme continuera d'être au coeur du débat public.»
Voilà qui a de quoi me surprendre.
M. Nixon: Permettez-moi de répondre à cette intervention car il n'y avait pas de ministre des Transports lorsque ces documents ont été préparés et qu'ils m'ont été remis.
Le sénateur Jessiman: Je ne prétends pas que vous les ayez reçus, monsieur.
M. Nixon: Sauf erreur, le document présentant les diverses options avait été préparé, et je pense l'avoir lu dans le compte rendu du témoignage fait devant votre comité par Mme Bourgon ou M. Rowat, parce qu'à l'époque des élections, on s'est dit que quelqu'un voudrait peut-être obtenir un avis à ce sujet et les fonctionnaires ont donc préparé ce document. Lorsque je les ai rencontrés, en sortant du cabinet du premier ministre désigné, ils m'ont dit que ce document avait été préparé et m'ont demandé quand et où je voulais l'obtenir et les responsables du ministère ont fait tout leur possible pour m'aider à comprendre ce document et me l'expliquer au besoin.
Je pense que vous ne devriez pas sous-estimer l'aptitude politique avec un petit «p» des fonctionnaires. Ils comprennent la situation dans laquelle se trouvent les élus politiques et, d'après mon expérience, ils sont tout à fait compétents et comprennent vraiment qu'il leur incombe de présenter aux politiques toutes les options possibles. À l'occasion, mais sans doute pas dans le cas qui nous intéresse, ces options s'accompagnent de certaines exigences d'ordre politique.
Le sénateur Jessiman: Si cette situation m'a paru inhabituelle, monsieur, c'est sans toute parce que les auteurs de ce document, à savoir M. Desmarais, M. Dickson et M. Rowat, ont tous témoigné devant le comité, après avoir prêté serment, en disant que c'était une bonne entente et qu'il n'y avait eu aucun favoritisme politique. C'est pourquoi tout cela me paraît un peu surprenant.
M. Nixon: Croyez-moi, loin de moi l'idée de douter de leur bon jugement dans les circonstances. Je répète simplement que, pour ce qui est du gouvernement, ces fonctionnaires étaient les principaux responsables de la négociation de l'entente. M. Rowat avait été détaché du Bureau du Conseil privé pour occuper le poste de sous-ministre associé, chargé de toute évidence de nous sortir de ce bourbier et de clore l'affaire de façon raisonnable et acceptable, ce qu'il a fait. C'est pourquoi je n'avais aucune raison de ne pas suivre leurs conseils, mais je devais toutefois faire la part des choses du fait qu'ils avaient été chargés de préparer l'entente.
Comme je l'ai dit plus tôt, c'était «leur bébé», le fruit de leurs efforts, obtenu après un travail long et fastidieux. Lorsqu'il a parlé des problèmes liés au bail d'Air Canada que l'on avait un peu oublié, M. Rowat a dit qu'il avait dû intervenir et user de ses compétences indubitables pour redresser cette erreur.
Puis son patron, le sous-ministre, a changé au mois de juin, et au cours de cette période, alors qu'un nouveau sous-ministre entrait en fonction, il a dû se sentir directement concerné par l'élaboration de l'entente lors de ce qui était l'avant-dernière étape du processus.
Le sénateur LeBreton: Permettez-moi d'intervenir, monsieur le président. M. Nixon vient de dire que M. Rowat avait été détaché et comme il s'agit d'un haut fonctionnaire du gouvernement, vous comprendrez...
M. Nixon: Je retire ce terme et dirais qu'il a été «affecté».
Le sénateur LeBreton: Il a été promu à un poste de sous-ministre adjoint à Transports Canada, du poste qu'il occupait au Bureau du Conseil privé.
M. Nixon: Je ne pensais pas qu'une mutation du Bureau du Conseil privé représentait une promotion, mais je suppose que c'est le cas.
Le sénateur LeBreton: C'est mon avis.
Le sénateur Jessiman: Je veux commencer...
Le sénateur LeBreton: M. Rowat est actuellement sous- ministre.
Le sénateur Jessiman: Or, le fameux rapport Nixon, et je parle de la dernière version selon vous, même s'il porte une date antérieure. Vous avez dit que la demande de propositions a été faite avant qu'il soit décidé d'agrandir le réseau de pistes de l'aéroport.
M. Goudge: De quelle page s'agit-il, sénateur?
Le sénateur Jessiman: De la page 2, ou plutôt de la page 1 du rapport.
M. Nixon: Vous parlez de la date de la décision concernant le réaménagement des aérogares par rapport à celle concernant les pistes de l'aéroport?
Le sénateur Jessiman: Oui. Je voudrais savoir si... vous semblez penser que cette décision a été...
M. Nixon: C'est la sous-ministre qui l'a portée à notre attention. À son avis, la décision de procéder à l'aménagement des aérogares avant d'agrandir le réseau de pistes consistait, selon ses propres paroles, à mettre la charrue devant les boeufs. En discutant avec les fonctionnaires...
Le sénateur Jessiman: Vous n'avez pas dit cela dans votre rapport.
M. Nixon: Je viens de vous le dire.
Le sénateur Jessiman: Je sais que vous venez de le dire. Vous l'avez dit hier aussi. Cela ne figure pas dans le rapport, et quand votre déclaration d'hier a-t-elle été préparée? Et par qui?
M. Nixon: Eh bien, cette déclaration est de moi.
Le sénateur Jessiman: Je sais bien, mais qui l'a rédigée?
M. Nixon: J'ai consulté mon...
Le sénateur Jessiman: Au sujet de cette partie... il n'y a que deux parties de la nouvelle déclaration qui diffèrent quelque peu de votre rapport proprement dit.
M. Nixon: Pour que tout soit bien clair, nous discutons maintenant de mon rapport et de ma déclaration d'hier, que je cherche dans ma pile de documents.
Le sénateur Jessiman: Je parlais du rapport, mais dans celui-ci, vous n'avez pas dit la même chose que dans votre déclaration au sujet de... il n'y est pas question de cela du tout.
M. Nixon: À mon avis, l'observation de la sous-ministre selon laquelle il aurait fallu agrandir les pistes avant de réaménager les aérogares constitue un élément d'information que je vous transmets volontiers et que vous êtes parfaitement en droit de vérifier vous-même auprès de la sous-ministre de l'époque. Ce n'était pas dans mon rapport mais c'était dans ma déclaration. Il n'y là rien d'anormal.
Le sénateur Jessiman: Le problème, c'est qu'elle a déjà comparu devant le comité. Nous en avons discuté avec elle et elle n'a pas dit la même chose.
Je veux vous poser une question, car vous nous avez remis le rapport qui remonte à près de deux ans en arrière. Vous avez tous dit, et je vous ai posé à tous la question avant la pause-déjeuner, que c'était une bonne chose d'avoir rencontré les représentants du ministère de la Justice pour qu'ils vous rafraîchissent la mémoire quant à ce qui s'était dit il y a deux ans. Or, je ne pense pas devoir vous poser la question, mais peut-être vaut-il mieux le faire: Mme Labelle n'a certainement assisté à aucune de ces réunions, n'est-ce pas?
M. Nixon: Non.
Le sénateur Jessiman: Et les responsables de la Justice n'ont rien pu vous dire qui vous rafraîchisse la mémoire quant à votre réunion avec Mme Labelle?
M. Nixon: C'est exact.
Le sénateur Jessiman: La seule chose qui vous reste de votre réunion avec Mme Labelle, qui a eu lieu il y a environ deux ans, ce sont les notes de M. Goudge, n'est-ce pas?
M. Nixon: Où il est question de cette affaire? Oui, je pense.
Le sénateur Jessiman: Nous verrons bien. Très bien. Je voudrais traiter en premier lieu, je le répète, de... la demande de propositions a été faite avant que la décision ne soit prise. Monsieur, saviez-vous, à l'époque où vous examiniez la question - et je parle maintenant de 1993 - que, en décembre 1992, le Bureau d'examen des évaluations environnementales avait déjà pris sa décision et remis son rapport?
M. Nixon: Je me rappelle avoir reçu des renseignements de Transports Canada, sauf erreur, au sujet de l'importance de l'étude d'impact, surtout en ce qui a trait aux pistes, et cette question avait été soulevée par le maire McCallion - j'espère ne pas écorcher son nom - qui représentait le groupe de citoyens s'opposant au projet d'expansion de l'aéroport. Si ma mémoire est bonne, la question a été abordée par les députés de la région élus depuis peu qui comptaient sur l'évaluation environnementale pour étayer leurs objections à l'augmentation du nombre de pistes et à trouver un autre service aérien, de façon à ne pas entraver le développement économique de la région de Toronto. À part cela, je ne me souviens pas d'avoir reçu le moindre document à ce sujet.
Le sénateur Jessiman: N'est-il pas vrai - et je prétends que si - que, avant la décision relative à la meilleure proposition globale, laquelle a été annoncée le 7 décembre 1992, le Bureau d'examen des évaluations environnementales avait déjà remis son rapport au gouvernement? J'affirme que c'est un fait. Je vais vous en donner la preuve.
Cela a permis au gouvernement de gagner du temps. L'étude faite par les services d'évaluation environnementale porte sur les pistes et non sur les aérogares, n'est-ce pas?
M. Nixon: Je pense que oui.
Le sénateur Jessiman: Le gouvernement a donc gagné du temps en procédant de cette façon?
M. Nixon: Sauf que les pistes n'étaient pas incluses dans le projet d'aménagement des deux aérogares...
Le sénateur Jessiman: Exactement.
M. Nixon: Je pensais que vous vouliez dire qu'on avait gagné du temps en préparant l'appel d'offres pour l'aménagement des aérogares.
Le sénateur Jessiman: Monsieur, ce que je veux dire, c'est que vous et Mme Labelle étiez d'accord à l'époque. Au départ, le gouvernement avait prévu de faire faire l'étude d'impact dans le cadre du projet d'agrandissement des pistes, après quoi on pourrait moderniser les aérogares. Tout cela a pris très longtemps. En conséquence, l'un des ministres, M. Lewis, a décidé de mener à bien les projets simultanément.
Cela permettait de gagner du temps. Permettez-moi de vous lire certaines observations qui ont été faites alors. Témoignage de M. Lewis, 13 août à 9 heures, page 23. Il a dit que l'on était «prêt à aller de l'avant avec l'agrandissement des pistes et l'aménagement des aérogares, même si d'autres projets ralentissaient.»
Puis le sénateur Hervieux-Payette a posé la question suivante à M. Lewis:
Comment avez-vous décidé de faire progresser le projet, d'établir une demande de propositions sans oublier, du même coup, enfin, la question de l'environnement?
M. Lewis: Je vais répondre à la question de mon mieux sans avoir eu l'occasion d'examiner les documents qui peuvent bien se trouver dans le dossier, sénatrice. Le Cabinet était d'accord avec l'idée d'émettre des demandes de propositions, de sorte que nous les avons publiées. C'est l'annonce que j'ai faite en 1990. En même temps, il y avait des audiences au sujet de l'impact du projet sur l'environnement. Nous avons décidé, si je ne m'abuse, d'aller de l'avant avec les demandes de propositions au moment où les audiences avaient lieu. Comme je l'ai expliqué plus tôt, si on consacre tout son temps à la question de la poule ou de l'oeuf, il n'y a rien qui se fait au bout du compte. Rien ne me permettrait de croire que les deux démarches ne pouvaient avoir lieu en parallèle.
Puis M. Lewis a ajouté: «Tout projet que l'on finirait par proposer serait assujetti aux exigences des études d'impact.»
Un peu plus loin, toujours le 13 août 1995, à la page 4-13:
Nous avons donc mis le projet «en accéléré» sur deux voies. Nous avons poursuivi l'étude d'impact et, en même temps, avons émis des demandes de propositions, parce qu'il fallait faire quelque chose.
Mme Labelle, le 1er août 1995, page 8:39.
Au départ, le gouvernement a décidé de faire faire l'étude d'impact sur l'environnement et de procéder ensuite à la demande de propositions. Il a évidemment changé d'avis par la suite pour la raison dont on a parlé parce que l'étude d'impact relative aux pistes prenait trop de temps.
Ce ne sont pas les remarques d'une personne qui estime que l'on a mis la charrue avant les boeufs. Elle a fait cette déclaration sous serment.
M. Goudge: C'est plutôt le contraire.
Le sénateur Jessiman: Vous avez raison. C'est bien. Je vous remercie.
Le sénateur Kirby: Il écoute attentivement.
M. Goudge: Puis-je m'en aller maintenant?
Le sénateur Jessiman: Témoignage d'Air Canada, le 16 août 1995. Page 13.
1993 était le moment idéal pour entreprendre les travaux de réaménagement de l'aérogare 2, étant donné que le nombre de voyageurs était moins élevé. Il n'est jamais facile d'effectuer des travaux de construction autour d'installations existantes, mais le public voyageur aurait été beaucoup moins dérangé qu'il ne le sera maintenant ou dans l'avenir.
Parlons un peu de votre remarque - car il va sans dire, je suppose, qu'elle est de vous - selon laquelle on a mis la charrue avant les boeufs. Si elle l'a dit, c'était en pleine connaissance de cause car elle comprenait pourquoi on avait agi ainsi et que c'était dans l'intérêt du gouvernement. N'êtes-vous pas de cet avis?
M. Nixon: Vous me demandez si je suis d'accord avec vous?
Le sénateur Jessiman: Non. Après avoir procédé à toutes les formalités pour la demande de propositions en vue de l'aménagement des aérogares, étant donné le retard dû à l'étude d'impact, le gouvernement a décidé d'accélérer les choses, n'a pas accordé de contrat et n'a même pas annoncé qui avait fait la meilleure offre globale tant que l'étude n'était pas terminée. Ne pensez-vous pas, avec le recul, que c'était une bonne chose pour le Canada?
M. Nixon: Je pense que c'était une bonne idée de faire les deux en même temps.
Le sénateur Jessiman: C'est tout ce que je voulais savoir.
Ensuite, vous avez dit... et vous en avez beaucoup parlé, surtout en vous reportant au témoignage de Mme Labelle, qu'il fallait procéder en une seule étape. Vous et moi savons qu'il y a différentes façons de procéder. On peut se contenter de désigner quelqu'un comme on l'a fait pour vous. Il n'y a pas eu d'appel d'offres avant de vous désigner, on a simplement pris la décision, ce qui est tout à fait possible si l'on tient à confier un travail à certaines personnes, et l'on procède ensuite en deux étapes en envoyant des demandes de propositions. La première consiste à choisir l'entrepreneur, sans laisser le moindre choix. Quand il y a demande de propositions, quels que soient les intéressés, si on connaît les intervenants, on leur fait parvenir l'offre, tout se fait au grand jour et les entreprises qui en entendent parler peuvent faire une offre.
Si l'on ne connaît pas les intervenants en cause, ce qui était le cas pour l'aérogare 3, comme il s'agit d'un aéroport de grande envergure, on envoie des demandes, ou des expressions d'intérêt. C'est ce qui s'est passé. Il y a ensuite une quatrième possibilité, comme on l'a fait à l'Île-du-Prince-Édouard, où la question environnementale se posait, de sorte que le processus s'est fait en quatre étapes. On a décidé dans le dossier qui nous intéresse de ne procéder qu'en une seule étape et selon vous, cela a nettement avantagé Paxport. C'est ce que vous avez dit dans les notes où il est question des propositions spontanées. À l'époque, lorsque vous avez préparé votre rapport, monsieur, combien de propositions spontanées avait-on reçues, à votre connaissance?
M. Nixon: Si vous me demandez de les énumérer...
Le sénateur Jessiman: Non, dites-moi simplement combien.
M. Nixon: Quatre, peut-être.
Le sénateur Jessiman: En fait, il y en a eu cinq. Vous étiez donc au courant. Pourquoi parlez-vous simplement de Paxport dans votre rapport? Pourquoi n'avez-vous pas mentionné les autres, car c'était votre avis. Permettez-moi de vous dire que votre opinion est fausse car les propositions spontanées sont tout à fait différentes de ce que l'on offre lorsqu'on répond à une demande de propositions. Pourquoi avez-vous insisté là-dessus dans votre rapport en laissant entendre - et je ne dis pas que vous l'ayez déclaré expressément, mais vous l'avez en tout cas laissé entendre - que Paxport était la seule entreprise à avoir présenté une proposition spontanée? C'est l'impression que j'ai eue en le lisant pour la première fois.
Vous savez maintenant, car je vous l'ai dit, qu'il y en a eu cinq. La première émanait de Airport Development Corporation et était datée du 10 mars 1989. Elle a été envoyée à nouveau le 19 avril de la même année, et encore une fois, le 27 juin 1990, à l'intention du nouveau ministre. Vous savez que c'était Huang et Danczkzay à l'époque où Claridge détenait un intérêt minoritaire et a ensuite pris le contrôle de cette société, profitant ainsi de cette proposition spontanée.
Puis il y a eu la proposition de Paxport, en date du 25 septembre 1989, et ensuite celle de Canadian Airports Limited, l'Administration aéroportuaire britannique du 13 mai 1990, et enfin Air Canada, avec un bail de 80 ans comprenant certaines options, en date du 15 mai 1990. Air Canada a ensuite fait une autre proposition, le 1er juin 1990; il s'agissait en fait d'un plan de Paxport soutenu par Air Canada. Il y en a donc eu cinq en tout.
Je veux savoir pourquoi vous n'en avez mentionné qu'une? Pourquoi avez-vous laissé entendre dans votre rapport que Paxport devait avoir eu un tuyau puisqu'elle avait fait une proposition spontanée?
M. Nixon: Permettez-moi de préciser que ce que nous avons laissé entendre dans notre rapport, c'ést que Paxport avait un avantage sur ses concurrents pour cette raison. J'hésite à le dire car je sais avec quelle véhémence vos collègues réagissent, mais d'autres étaient d'avis que Paxport avait la faveur du gouvernement du Canada.
Le sénateur Jessiman: Qui sont ces personnes, monsieur? Parmi les gens dont vous avez parlé, Mme Labelle, par exemple, est-elle de cet avis?
M. Nixon: Non, mais nous avons discuté ce matin de certaines personnes qui sont de cet avis, lequel a été exprimé à diverses reprises, mais dont personne n'a parlé jusqu'ici.
Le sénateur Jessiman: Qui sont ces personnes? Je pose la question au témoin et si vous pouvez nous dire de qui il s'agit...
M. Nixon: Non, et je sais que cela va susciter diverses réactions. Lorsqu'on pense aux discussions qui se sont déroulées dans le milieu à l'époque des élections, il est évident que bien des gens avaient nettement l'impression, à tort ou à raison, que Paxport avait un avantage dans ce dossier. C'est ce qui m'a été dit à plusieurs reprises par des personnes dont le nom a été mentionné ici. Je dois vous le dire, car dire le contraire serait une erreur.
Le sénateur Jessiman: Jusqu'ici, vous nous avez parlé du gouvernement de l'Ontario et de Morrison et Hershfield. Je les confonds toujours. Vous nous avez parlé de ces deux-là. Y en a-t-il d'autres?
M. Nixon: Il m'a été dit à diverses reprises que certaines personnes dans le milieu avaient cette impression. Si cela vous paraît inadmissible, je dirais simplement que j'en suis désolé, mais c'est bien ce qui m'a été dit.
Le sénateur Jessiman: Vous savez toutefois que vous avez interrogé M. Rowat, M. Desmarais et M. Dickson? Je ne pense pas que vous ayez parlé à M. Joliffe, n'est-ce pas?
M. Nixon: Il faisait partie du groupe auquel nous avons parlé.
Le sénateur Jessiman: À qui avez-vous parlé au... vous avez parlé à Broadbent. Avez-vous soulevé la question? Vous le saviez à l'époque où vous avez interrogé ces personnes. Lui avez-vous posé la question?
M. Nixon: Nous en avons parlé dans une certaine mesure, mais les fonctionnaires ont témoigné devant votre comité et ont pris bien garde de me dire qu'ils n'étaient assujettis à aucune pression sérieuse ou injustifiée. Ils m'ont dit que personne ne cherchait à les influencer. En lisant les témoignages que vous avez reçus, j'ai constaté que la plupart de ces personnes ont dit n'avoir jamais rencontré de lobbyiste. On m'a également attribué des propos, incorrectement d'ailleurs, comme quoi je me demandais bien pourquoi fichtre ils étaient payés car il semble que la plupart des experts dans ce domaine, dans cette ville, ont été engagés par une ou plusieurs personnes s'occupant de ce dossier.
Le sénateur Jessiman: Vous étiez au courant ou non? Il vaut mieux que je pose la question car... avez-vous posé des questions au sujet de votre commission? Avez-vous posé des questions au sujet de M.Doucet et du fait qu'il était enregistré pour représenter une certaine société Paxport? Votre comité s'est-il penché sur cette question?
M. Nixon: Nous avons demandé les renseignements lorsque cela nous a semblé possible et opportun, et nous avons par exemple demandé aux responsables de Paxport de nous fournir leurs factures d'honoraires de lobbyistes, ce qu'ils ont fait.
Le sénateur Jessiman: Je ne voudrais pas vous interrompre. Je veux bien vous laisser dire tout ce que vous souhaitez, mais je vous ai demandé si vous-même ou votre comité, sur votre directive, aviez demandé au gouvernement de vous fournir certains renseignements en invoquant la loi pertinente à cette fin? Vous êtes-vous adressé aux responsables du gouvernement en leur demandant de vous fournir des renseignements concernant la société de M. Doucet?
M. Nixon: Non.
Le sénateur Jessiman: En êtes-vous bien certain?
M. Nixon: Je ne me souviens pas d'avoir... Je ne me suis pas adressé à des représentants du gouvernement. M. Goudge a dit la même chose.
M. Goudge: Nous avons pu compter sur la collaboration des responsables de Paxport et Claridge qui nous ont fourni tous les renseignements voulus au sujet des factures qu'ils avaient payées.
Le sénateur Kirby: Puis-je poser une question supplé- mentaire?
Le sénateur Jessiman: Bien sûr.
Le sénateur Kirby: Pour répondre à votre question précédente, vous avez demandé en gros qui avait l'impression que Paxport avait été tuyautée ou avantagée d'une quelconque façon. J'aimerais vous montrer le document numéro 000996, qui est une lettre de Don Blenkarn, alors député de Mississauga-Sud, au ministre des Transports. Monsieur Nixon, pourriez-vous lire les trois derniers paragraphes de la troisième page? Vous constaterez que cette lettre est signée de Don Blenkarn et adressée à M. Corbeil.
Le sénateur Jessiman: Est-ce qu'on en a fait parvenir une copie au comité?
Le sénateur Kirby: Parfaitement. Je l'ai trouvée dans les dossiers du comité.
Le sénateur Jessiman: Je ne parle pas de notre comité, mais de celui de M. Nixon.
Le sénateur Kirby: J'ai réagi... J'ai essayé de vous aider car vous avez demandé au témoin, du moins si j'ai bien compris, de vous citer les noms de personnes qui estimaient que l'un des clients - pardon - l'un des concurrents était avantagé par rapport aux autres. Je voulais simplement signaler ce que M. Blenkarn a déclaré à la page 3 de cette lettre:
L'impression qu'ont toutes sortes de gens qui critiquent notre gouvernement, c'est que des pots-de-vin sont versés à des amis désireux d'aménager des aéroports et que tout cela est infect, fait mauvais effet, suscite toutes sortes de doutes sans qu'on obtienne la moindre justification.
Les paragraphes suivants fournissent plus de détails à ce sujet. Je voulais simplement aider le sénateur Jessiman, qui a posé cette question. Est-ce le genre de sous-entendus qu'ont faits les diverses personnes auxquelles vous avez parlé?
M. Nixon: Sans le moindre doute, sénateur. Je le répète, je n'ai jamais vu cette lettre, mais bien des gens qui m'ont parlé, et je regrette de le dire à l'ensemble des sénateurs, partaient du principe que l'on avait accordé l'avantage à la proposition de Paxport. Je leur ai alors demandé quelle preuve ils en avaient. Nous avons passé cette question au peigne fin, et c'est pourquoi on en est arrivé à la conclusion que le bref délai fixé dans la demande de propositions avait avantagé l'une des parties, comme nous l'ont confirmé certains fonctionnaires.
M. Goudge: C'est ce que dit Mme Labelle.
M. Nixon: Dans les notes, Mme Labelle déclare...
Le sénateur Kirby: C'est manifestement l'opinion également des responsables du gouvernement de l'Ontario.
M. Nixon: Je regrette d'insister là-dessus, mais il est inutile d'essayer de me faire dire que la majorité des gens auxquels j'ai parlé n'ont pas soulevé cette question. Et les personnes notamment qui avaient été incitées à communiquer avec moi en raison de la campagne électorale récente, et c'est normal, étaient tout particulièrement au fait de ce dossier qui leur tenait à coeur.
Le sénateur Tkachuk: J'ai une ou deux questions supplémentaires à poser à ce sujet, car ce genre de commérages me gênent lorsqu'il s'agit d'un représentant du premier ministre du Canada. Vous soulevez ces questions au sujet de Paxport. Qui est le président de Allders International?
M. Nixon: Je ne connais pas son nom.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne connaissez pas son nom? C'était l'un des principaux partenaires, détenant 20,8 p. 100 des intérêts dans le groupe Matthews de l'entreprise Paxport.
M. Nixon: Allders est en fait une entreprise du Royaume-Uni qui a une filiale au Canada. Je sais que cette société était...
Le sénateur Tkachuk: Ce n'est pas vrai. C'est une entreprise qui appartient à...
M. Nixon: Je ne connais pas le nom du président.
Le sénateur Tkachuk: Laissez-moi terminer. Qui est le président de CIBC Wood Gundy Capital Inc. qui détenait 13,9 p. 100 des intérêts de l'entreprise qui a soumis la proposition initiale?
M. Nixon: Si vous me dites son nom, je vous dirai si je le connais, mais je ne peux pas répondre à cette question.
Le sénateur Tkachuk: Qui est le président de Ellis-Don?
M. Nixon: C'est l'un des M. Smith.
Le sénateur Tkachuk: Connaissez-vous son affiliation politique?
M. Nixon: Don Smith est un bon Libéral, si ce genre d'association de termes ne vous ennuie pas trop, mais quant à savoir...
Le sénateur Kirby: Le sénateur LeBreton dira peut-être que c'est un oxymore.
M. Nixon: Quant à savoir qui en est le président, c'était peut-être bien son fils, à l'époque, mais je ne connais pas son affiliation politique.
Le sénateur Tkachuk: Et la société Bracknell?
M. Nixon: Et alors?
Le sénateur Tkachuk: Qui en était le président?
M. Nixon: M. Bracknell?
Le sénateur Tkachuk: Vous pouvez bien faire preuve de désinvolture. Connaissez-vous le président de AGRA Industries?
M. Nixon: Non.
Le sénateur Tkachuk: Vous ne savez pas qui en est le président? Savez-vous ce que fait AGRA Industries?
M. Nixon: Sauf erreur, l'entreprise avec laquelle je traite... à l'heure actuelle, AECL est en affaires avec AGRA dans le cadre d'un projet technique...
Le sénateur Tkachuk: Une importante société d'ingénierie de l'Ouest?
Le président: Sénateur Tkachuk, voilà une autre preuve qu'une mauvaise question supplémentaire en mérite une autre. Les interventions du sénateur Kirby étaient irrecevables, les vôtres le sont également.
Le sénateur Tkachuk: Et pourquoi donc?
Le président: Ce ne sont pas des questions supplémentaires.
Le sénateur Tkachuk: Paxport, c'est tous ces gens-là. Paxport, ce n'est pas uniquement le groupe Matthews. Cela fait trois mois que j'essaie de le faire comprendre, et je continuerai d'insister là-dessus jusqu'à ce que les gens le comprennent. Qui était le président de NORR Partnership?
M. Nixon: J'en sais rien.
Le sénateur Tkachuk: Vous n'en savez rien. Et Sunquest Vacations?
M. Nixon: J'en sais rien.
Le sénateur Tkachuk: Très bien, ne pensez-vous pas que lorsque ces rumeurs ont commencé à se répandre, vous auriez peut-être pu poser ces questions?
Le sénateur Kirby: Il continue, bien que...
Le sénateur Tkachuk: Je pense que peut-être... et il est d'accord avec moi. J'ai simplement posé la question. Il n'y a de quoi fouetter un chat; cela fait trois mois et demi que nous parlons de Paxport.
Le président: Sénateur Jessiman?
Le sénateur Jessiman: Je voulais simplement... vous avez parlé des propositions spontanées en disant qu'on avait donné l'avantage à l'une d'entre elles. Voici ce qu'a dit M. Nelligan en s'adressant à M. Desmarais, l'une des personnes que vous avez vous-même interrogées: «Y avait-il la moindre similitude entre les propositions soumises au tout début par le groupe Matthews et le genre de proposition requise aux termes de votre demande de propositions?» Ce à quoi M. Desmarais a répondu: «Les propositions spontanées que nous avons reçues étaient assez brèves. À la suite de la demande de propositions, nous avons reçu pratiquement 10 000 pages de documents.»
Voici ce qu'il répond à la question au sujet de la viabilité financière: «L'auteur de la proposition doit avoir obtenu son financement au moment de la signature de l'entente. Il y avait des exigences requises dans le plan d'entreprise et il fallait énumérer les éléments d'actif et prouver que l'on avait tous les fonds nécessaires à la bonne réalisation du projet.» Quant à la question de savoir si le gouvernement ou l'un de ses ministères avait à l'époque une prédisposition envers un soumissionnaire plutôt qu'un autre, la réponse a été négative.
Nelligan, conseiller juridique: «Quelqu'un vous a-t-il dit...», s'adressant à Desmarais: «...qu'il fallait avantager l'un des soumissionnaires?» La réponse est non.
Revenons maintenant sur une partie du témoignage de Mme Labelle.
Voici ce qu'elle a déclaré le 1er août 1995, comme en témoigne la page 8:62 des délibérations du comité.
Parlons donc des déclarations d'intérêt. En 1986, le ministre des transports d'alors, M. Crosbie, a fait savoir, le 11 septembre 1986, que le secteur privé aurait une part dans la réalisation de l'aérogare 3. Et on nous dit que diverses parties ont exprimé un intérêt.
Si j'ai bien compris - et rectifiez si je me trompe - à cette époque, ni Transports Canada, ni quiconque au ministère des Transports ou au gouvernement, ne savait réellement qui étaient les partenaires possibles, qui étaient les personnes capables de construire des aérogares de cette taille au Canada. Ai-je raison?
Mme Labelle: Oui.
Le sénateur Jessiman: Et on m'a dit, et les témoignages faits ici l'indiquent, que sept ou huit personnes ont fait savoir qu'elles seraient intéressées. On m'a dit également que seuls quatre consortium ont effectivement soumissionné. Est-ce exact?
Mme Labelle: C'était avant mon arrivée, sénateur, mais c'est ce qu'il me semble.
Le sénateur Jessiman: Permettez-moi de vous dire qui étaient ces quatre.
Il y avait Bramalea-Ward Air, et nous savons tous, ou du moins la plupart d'entre nous savons, que Bramalea avait quelques problèmes; Ward Air en avait aussi et a disparu depuis; Cadillac Fairview était à la tête d'un autre consortium; il y avait encore Falconstar, qui était en réalité l'ancêtre de Paxport. Et il y avait enfin la Airport Development Corporation, c'est-à-dire Huang et Danczkay, mais je crois savoir que les Bronfman avaient aussi une part. Ce sont les quatre groupes qui ont effectivement présenté une soumission. Ai-je raison?
Mme Labelle: C'est ce qu'il me semble.
Le sénateur Jessiman: Et Huang et Danczkay ont remporté le marché?
Mme Labelle: Hm-hmm.
Le sénateur Jessiman: Et à cette époque, le groupe Bronfman avait une part minoritaire dans l'aérogare 3 et est devenu plus tard actionnaire majoritaire parce qu'il a racheté la part de Huang et Danczkay.
Ensuite, il a été question d'effectuer des réparations ou des travaux de quelque sorte dans les aérogares 1 et 2. Et on nous a dit que, au départ, ou du moins c'est ce que dit le rapport de M. Nixon, qu'il n'y avait qu'une offre spontanée, celle du groupe Paxport, alors qu'en réalité il y en avait trois.
À ce moment-là, lorsque je posais mes questions à Mme Labelle, je pensais qu'il n'y en avait eu que trois. J'ai constaté plus tard qu'il y en avait deux autres.
Mme Labelle: C'est ce qu'il me semble aussi. C'était l'été avant mon arrivée aux Transports.
Le sénateur Jessiman: Et ces trois personnes, ou ces trois sociétés, étaient le groupe Paxport, Canadian Airports Limited et Airport Development Corporation. C'étaient donc les trois compagnies qui étaient intéressées, qui étaient capables de faire le travail si on leur accordait le marché.
Donc, lorsque l'annonce a été faite que les travaux allaient être entrepris - et 17 mois se sont passés avant le lancement de la demande de propositions - votre ministère, Transports Canada, savait en réalité qui étaient les soumissionnaires possibles? N'est-ce pas exact? J'entends par là que vous saviez de façon générale qui allait soumissionner pour ce marché, qui en avait la capacité?
Mme Labelle: Nous savions certainement qui avait exprimé un intérêt. Nous ne savions pas si d'autres viendraient s'y ajouter, mais nous pouvions supposer que ce projet était bien connu dans le pays car il avait été annoncé depuis déjà pas mal de temps.
Le sénateur Jessiman: Oui. il n'était donc pas déraisonnable, dans ces conditions, de - parce que ce n'est pas toujours que vous avez des déclarations d'intérêt. Vous le savez parce que vous avez été en poste dans d'autres ministères. Ce n'est que lorsque vous ignorez qui sont les soumissionnaires éventuels que vous allez dire: «Qui va soumissionner là-dessus?», et donc vous demandez aux intéressés à s'identifier. mais dans bien des cas, ce n'est pas nécessaire. Ai-je raison?
Mme Labelle: C'est juste.
Le sénateur Jessiman: Et en l'occurrence, une décision a été prise. Vous saviez qui ils étaient. Vous aviez fait l'annonce. Tout le monde était au courant. Ils avaient eu 17 mois depuis que vous aviez fait l'annonce. Et donc vous avez lancé la demande de propositions.
Et maintenant, ils se plaignent des 90 jours. N'est-il pas vrai que lorsqu'on a annoncé que ce serait 90 jours, le ministre a déclaré à la Chambre des communes - et a fait répéter à d'autres, et je me souviens d'une réunion, deux semaines après, à laquelle 200 personnes étaient présentes - que si des parties sérieusement intéressées pensaient que ce délai était déloyal, qu'un prolongement serait accordé?
Mme Labelle: Oui.
Puis, Mme Labelle, après avoir dit cela...
M. Nelligan: Pourriez-vous indiquer le numéro de page, sénateur, pour le sténographe?
Le sénateur Jessiman: Excusez-moi, je pensais l'avoir fait. C'est le fascicule du 1er août 1995, page 8:63; la citation suivante provient également du témoignage de Mme Labelle, le même jour, page 8:70-71; c'est une discussion avec M. Nelligan.
Après avoir entendu le témoignage de Mme Labelle, voici ce qu'il dit:
M. Nelligan: Et vous nous avez déjà dit que vous avez parlé à M. Nixon.
Mme Labelle: Oui.
M. Nelligan: Et vous lui avez dit la même chose que ce que vous nous dites aujourd'hui.
Mme Labelle: Oui.
M. Nelligan: Vous a-t-il demandé autre chose ou lui avez-vous dit autre chose?
Mme Labelle: Pas que je me souvienne, monsieur.
Or, voilà ce qu'elle nous a déclaré le 1er août dernier, ce qui est tout à fait différent de ce qu'elle vous a dit il y a deux ans, d'après ce que vous croyez vous souvenir.
M. Goudge: Ce n'est pas un simple souvenir, sénateur. Permettez-moi de vous rappeler que, d'après mes notes, elle a déclaré...
Le sénateur Jessiman: J'examinerai vos notes plus tard. Je voudrais vous...
M. Goudge: Il importe de le signaler ouvertement maintenant, sénateur, car dans mes notes, elle déclare, sans la moindre ambiguïté possible, lorsque nous l'avons rencontrée...
Le sénateur Jessiman: Donnez-nous vos notes.
M. Goudge: ...au début novembre que le processus accéléré de la demande de propositions donne un énorme avantage à Paxport. C'est simple. C'était son avis.
Le sénateur Jessiman: Elle nous a dit ce qu'elle avait dit alors. Elle a déclaré au comité, et M. Nelligan lui a demandé (sic)...
Voici ce que vos... vous avez des notes en dessous desquelles il est écrit que Mme Labelle est présente; vous indiquez les trois... attendez un peu... décisions essentielles, pardon, «trois décisions essentielles, dont aucune»... il s'agit de «privatiser l'aérogare 3, la politique sur les AAL, le rapport entre l'aménagement des aérogares 1 et 2 et les pistes»... ce sont des projets importants, mais ensuite elle... il est dit «juillet 1990», et je ne sais pas...
Le sénateur LeBreton: Spontanées.
Le sénateur Jessiman: ...«propositions spontanées.» Je vous ai dit à quelle date les cinq propositions ont été faites. Ce n'est pas en juillet 1990, c'est dans le courant de l'année 1989, mais il y en a eu cinq et ensuite, le projet d'agrandissement des pistes constitue la décision essentielle.
M. Goudge: D'où le principe de la charrue avant les boeufs.
Le sénateur Jessiman: Nous venons de nous mettre d'accord, et le président de ce comité, M. Nixon, qui se trouve avec vous, a admis que c'était une bonne idée d'accélérer le processus. Donc, qu'elle ait pensé ou non que c'était mettre la charrue avant les boeufs, M. Nixon convient avec nous que c'était une bonne idée.
M. Nixon: N'allez pas trop vite. Je pense avoir approuvé l'idée que si le gouvernement pouvait faire les deux en même temps, je ne voyais aucune raison de ne pas le faire.
Le sénateur Jessiman: Eh bien...
M. Goudge: Ce qu'elle a dit, sénateur, pour étoffer un peu la discussion, c'est que selon elle les pistes constituent l'élément essentiel d'une infrastructure aéroportuaire; il faut donc en premier lieu décider du nombre de pistes qui seront nécessaires, et construire ensuite les aérogares en conséquence. Faire l'inverse, c'est mettre la charrue avant les boeufs.
Le sénateur Jessiman: Ce qu'on nous a dit, c'est que l'on voulait moderniser les aérogares pour en faire des installations de premier ordre. Il ne s'agissait pas d'accroître la capacité; nous construisons de nouvelles aérogares.
De toute façon, ce sont les témoignages que nous avons reçus. Or, je voudrais simplement citer un bref...
M. Goudge: Pour vous faciliter les choses, sénateur, je vous signale que la remarque au sujet de la procédure accélérée se trouve deux lignes plus bas.
Le sénateur Jessiman: Oui, et vous dites «donne...
M. Goudge: C'est elle qui le dit, ce sont les notes que j'ai prises pendant qu'elle parlait.
Le sénateur Jessiman: Je vous ai demandé si vous lui aviez posé la question et si elle vous avait répondu «Oui», ou si vous...
M. Goudge: C'est ce qu'elle a dit, d'après les notes que j'ai prises.
Le sénateur Jessiman: En réponse à une question de votre part?
M. Goudge: Vous me demandez si je l'ai contre-interrogée pour obtenir cette réponse? Non. C'est ce qu'elle nous a dit, sénateur. C'était son avis.
Le sénateur Jessiman: Je suis en train de lire ce qu'elle a dit, et j'aurai d'autres citations à vous donner plus tard.
En voici une autre. Elle est datée du 13 août (sic), numéro 1300-30 et c'est une déclaration de Shortliffe. Le ministère connaissait les entreprises susceptibles d'aménager l'aéroport Pearson. Cette observation était en réponse à une question quant à la nécessité de solliciter des expressions d'intérêt.
Or, voici ce qu'a dit M. Berigan le 26 août (sic), document numéro 0930. Le ministre estimait que le processus de demande de propositions était du domaine public depuis octobre 1990. Nous sommes alors le 11 mars 1992.
Les parties intéressées se penchent déjà sur la question. Certains soumissionnaires sérieux ont pu présenter une proposition car le délai a été prolongé... il est dit ici à 95 jours, et nul le sait exactement si c'était 95 ou 90 jours. Je pense qu'au départ, le délai était de 90 jours, avec possibilité de prolongation, mais on n'a pas jugé nécessaire de le prolonger. C'était la décision du ministre. Ces propos émanent de M. Berigan.
Or, vous savez également que l'un des auteurs de proposition, le groupe Claridge, a demandé une prolongation du délai. Le saviez-vous?
M. Goudge: Oui, mais presque à la fin du délai de 90 jours. Je veux dire qu'à ce moment-là, toutes les offres avaient été soumises.
Le sénateur Jessiman: Savez-vous pourquoi ce groupe a demandé un report de la date limite?
M. Goudge: Il en avait besoin.
Le sénateur Jessiman: Permettez-moi de vous répéter ce qu'ils nous ont dit. C'est parce que l'une des AAL devait faire une offre conjointe avec eux; ce groupe devait présenter une offre conjointement avec une administration aéroportuaire locale et, en cours de route, les responsables de celle-ci ont dit qu'il leur était impossible d'obtenir le financement voulu. Il a donc tout fallu recommencer à zéro. C'est pourquoi ce groupe a demandé une prolongation du délai.
M. Nixon: S'ils n'ont pas pu obtenir les fonds, c'est parce qu'ils n'étaient pas reconnus comme une AAL par le gouvernement du Canada, si je ne m'abuse.
Le sénateur Jessiman: Voici ce qu'a dit Mme Labelle, le 1er août, comme en témoigne le document numéro 1600-2. On a recours au processus des expressions d'intérêt si certaines parties sont loin de remplir les exigences. Cela entraîne des frais supplémentaires puisqu'il faut évaluer un plus grand nombre de propositions. M. Corbeil a décidé d'opter pour un processus en une seule étape.
N'oubliez pas qu'elle parle de cette question et qu'elle a dit à M. Nelligan, pour la gouverne du comité, qu'elle ne vous avait rien dit de plus. Vos remarques sont donc tout à fait contraires à ce qu'elle nous a déclaré sous serment.
Voici un autre témoignage de Mme Labelle. Le ministre a annoncé à la Chambre des communes que si des intervenants sérieux estimaient que le délai de 90 jours étaient trop courts, on accorderait une prolongation. Document daté du 1er août, numéro 1990-21.
Vient ensuite le témoignage de M. Simke. Savez-vous qui est M. Simke?
M. Nixon: De Price Waterhouse?
Le sénateur Jessiman: Oui. Transports Canada connaissait plus ou moins les soumissionnaires éventuels. La décision a été prise par les responsables du ministère et communiquée par l'entremise de Wayne Power. Témoignage reçu le 23 août, entre 9 heures et midi et demi, document A-5-17 Simke.
Plus tard, le même jour, à la même heure, un processus en deux étapes devenait superflu. Transports Canada savait plus ou moins qui étaient les soumissionnaires possibles. Il y avait déjà eu un processus d'élimination puisqu'un certain nombre d'intervenants avaient présenté des propositions spontanées. La décision a été prise par Transports Canada et communiquée par Wayne Power.
Harry Near, 23 août, 2-5-A-32. Le délai de 90 jours est acceptable. Au moins, on avait fixé une date limite et la décision devait être prise dans les plus brefs délais. Tous les intervenants sérieux étaient au courant du processus. Claridge disposait de l'étude déjà effectuée par Huang et Danczkay sur les aérogares 1 et 2.
Coughlin, 12 août, 1940-7-8. La proposition en deux étapes était inutile. Le gouvernement était au courant et en mesure de mener à bien le projet. Les choses se sont bien passées. Le délai de 90 jours était raisonnable. Il était possible de reporter la date limite et Claridge a présenté son offre dans les délais prescrits. Le groupe a demandé que le délai soit prolongé parce que son partenaire, l'administration aéroportuaire locale, s'est retirée du jeu.
Coughlin à nouveau, 12-9-1645-10-11. La période de 60 ans prévue dans la demande de propositions était importante pour permettre le financement du projet et compatible avec la politique gouvernementale. On a opté pour un bail de 57 ans de façon à le faire coïncider avec celui de l'aérogare 3. C'est une autre chose dont je parlerai plus tard.
Le président: Sénateur Jessiman, je me demande si nous pourrions... Monsieur Goudge, vous avez des notes détaillées sur la conversation que vous avez eue avec Mme Labelle?
M. Goudge: Oui.
Le président: Et j'ai en main et le sénateur Jessiman... reconnaissez-vous que ces renseignements semblent contradictoires?
M. Goudge: Je ne peux rien dire au sujet de ce qu'elle a déclaré au comité. Je crois le sénateur Jessiman sur parole, même si de mon côté, sénateur, j'aimerais également voir la transcription.
Le sénateur Jessiman: Très bien.
M. Goudge: Toutefois, si je vois la transcription, je vous croirai sur parole et je n'hésiterai pas à dire, monsieur le président, qu'il y a effectivement contradiction.
Le président: Le sénateur Jessiman en a lu de longs passages.
M. Goudge: Je plaisantais.
M. Nixon: Monsieur le président, avant que le sénateur Jessiman poursuive, je voudrais dire qu'il a exprimé les opinions mûrement réfléchies de certaines personnes quant à l'opportunité du délai de 90 jours, et déclaré que le gouvernement était prêt à reporter la date limite, au besoin, et qu'en outre, il connaissait les soumissionnaires intéressés, etc.
Même si nous avons entendu des opinions contradictoires, et l'avons déjà signalé au comité, par exemple, de la part du gouvernement de l'Ontario et d'autres parties, pour ma part, je m'en suis tenu aux conseils, qui me paraissaient les plus judicieux, de M. Crosbie, dont j'avais retenu les services; il fait partie d'une entreprise très compétente en la matière et je sais qu'il a examiné la question avec M. Desmarais, n'est-ce pas?
M. Crosbie: Et M. Dickson.
M. Nixon: Le comité l'autoriserait-il à donner son avis maintenant comme il l'a fait pour moi à l'époque.
Le sénateur Jessiman: Je n'ai pas terminé.
M. Crosbie: Sénateur Jessiman, l'impression qui émane des passages que vous avez cités diffère fondamentalement de celle qui m'a été communiquée, ainsi qu'à mes associés, lors de nos réunions avec les fonctionnaires de Transports Canada.
Je pense en particulier à la conversation que nous avons eue avec M. Dickson; j'ai relu nos notes, lesquelles vous ont été remises, et l'impression qu'il nous a donnée était que... et je cite simplement un passage de mes notes, où il dit: «Toutefois, le gouvernement n'a pas pris la peine de réfléchir aux diverses façons de la commercialiser», en parlant de l'aérogare, «et de prendre une décision mûrement réfléchie. Au lieu de cela, il a décidé d'aller de l'avant directement en procédant comme il l'avait fait pour l'aérogare 3.»
Selon lui, le processus de sélection et la méthode d'identification des soumissionnaires, et cetera, étaient exactement les mêmes que pour l'aérogare 3.
Toujours selon ce monsieur, pour l'aérogare 3, il n'y a pas vraiment eu de processus d'identification des soumissionnaires.
Il nous a donc donné...
Le sénateur Jessiman: Pour l'aérogare 3, on a demandé aux entreprises intéressées de manifester leur intérêt.
M. Crosbie: Pardon?
Le sénateur Jessiman: Pour l'aérogare 3, on a demandé aux entreprises intéressées de manifester leur intérêt. C'est ainsi que le gouvernement a trouvé les soumissionnaires.
M. Crosbie: L'impression que j'avais...
Le sénateur Jessiman: D'accord.
M. Crosbie: ...et ces notes le confirment, c'est que le gouvernement a pour ainsi dire mis un panneau «à vendre» sur l'aérogare et demandé à toutes les parties intéressées de se présenter; pour l'aérogare 3, plusieurs entreprises ont fait une proposition. D'après lui, pour l'aménagement de l'aérogare 3, cinq ou six groupes se sont présentés et ont fait une offre.
Le sénateur Jessiman: Quatre.
M. Crosbie: C'est ce qui est dit dans mes notes.
Le sénateur Jessiman: Il y en a eu quatre.
M. Nelligan: Laissons-le parler.
M. Crosbie: Il s'agit de l'aérogare 3.
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Crosbie: Je lis simplement mes notes.
Le sénateur Bryden: Puis-je poser une question? Avons-nous reçu copie de ces notes?
M. Crosbie: Oui, toutes ces notes sont dans le dossier du comité.
Le sénateur Bryden: Peut-on les retrouver? Portent-elles un numéro? Celles-ci sont les vôtres.
M. Crosbie: Tous ces documents vous ont été fournis.
Le sénateur Bryden: Y a-t-il une date ou quelque chose?
M. Crosbie: Ce sont mes... c'est un gros recueil de notes. C'est la même série de notes, mais avec des pages différentes.
Le sénateur Bryden: Puis-je demander au greffier de retrouver ces notes qui pourraient nous être fort utiles?
M. Nelligan: Le problème que posent les notes du témoin, c'est que ce sont des copies de ses originaux. Elles ne portent ni numéro, ni date, ni indication précise qui nous permette de les retrouver facilement dans nos recueils officiels de documents. Nous allons essayer de les trouver.
Le sénateur Bryden: Je regrette, je n'aurais pas dû interrompre le conseiller juridique principal.
Pendant la pause, M. Crosbie pourrait peut-être aider le greffier à retrouver ces documents.
M. Nelligan: Oui. Il m'a été très utile. Je lui ai demandé certaines autres notes hier, qu'il m'a remises, et j'en ai fait faire des copies, mais tous ces documents sont regroupés et ces notes sont très difficiles à déchiffrer pour quelqu'un qui ne connaît pas parfaitement l'écriture de M. Crosbie.
M. Crosbie: C'est vrai. Quoi qu'il en soit, en lisant les notes que j'ai prises lors de nos conversations avec les fonctionnaires de Transports Canada, et en les comparant à mes propres souvenirs de ces discussions, j'ai eu une impression très différente quant au processus et la rigueur avec laquelle Transports Canada a trouvé des soumissionnaires; d'après ce que certains nous ont dit, sa façon de procéder n'était ni très professionnelle, ni très adéquate.
Je voudrais dire autre chose. À mon avis, dans le domaine commercial, on pense souvent à tort que lorsqu'on veut vendre un élément d'actif, il suffit d'apposer une affiche «à vendre», ou faire passer une annonce dans la presse dans l'espoir que les soumissionnaires se présenteront d'eux-mêmes.
Le sénateur Jessiman: Rappelez-vous que 200 personnes ont assisté à une réunion, environ deux semaines après cette annonce, et qu'on leur a dit... et c'étaient des experts-conseils qui avaient des relations dans le monde entier...
Le sénateur Stewart: Nous pourrions peut-être permettre au témoin de répondre à la question.
M. Crosbie: Ce que je veux dire... à mon avis, peu importe le nombre de personnes qui ont assisté à cette réunion, c'est toujours la même vieille histoire. On cherche à vendre, et non à acheter. Tout dépend de la façon dont on présente les choses. Il y a moyen de présenter une affaire de façon à optimiser les intérêts du vendeur et, en l'occurrence, c'est le gouvernement qui était le vendeur; il suffit de jeter un coup d'oeil à la demande de propositions pour constater que c'est un document très aride, qui ne ressemble en rien à une offre de vente alléchante. Ce n'est pas une offre écrite dans le but d'expliquer à l'acheteur éventuel pourquoi il s'agit d'une opération alléchante qui lui permettra de gagner de l'argent, comment financer le projet, quels sont les gains réalisables et tous les avantages qui en découleront. Cette demande de propositions n'avait rien d'un document que l'on préparerait si l'on voulait vraiment conclure un marché, obtenir une valeur maximale et intéresser les gens au produit que l'on a à offrir.
C'est donc un processus à deux volets. Il ne s'agit pas simplement de dire aux gens que telle installation est à vendre, comme on semble l'avoir fait dans la presse et par d'autres moyens. Pour que la vente se déroule de façon efficace, il faut adopter une stratégie de présentation très alléchante pour vraiment convaincre les gens, et je ne pense pas que cela ait été fait.
En second lieu, il faut mettre en oeuvre un processus très efficace en vue de trouver des soumissionnaires, d'en créer au besoin, de communiquer avec eux, de leur expliquer comment procéder pour décrocher le contrat, d'aider les membres du consortium à se regrouper. Là encore, je ne pense pas que cela ait été fait, et personne n'y a pensé, de toute façon...
Le sénateur Jessiman: Vous avez parlé de...
Le sénateur Stewart: Laissez-le répondre à la question.
M. Crosbie: Nous en avons eu la confirmation par la suite lors de nos entretiens avec les fonctionnaires de Transports Canada.
Le sénateur Jessiman: Avez-vous terminé?
M. Crosbie: Oui.
Le sénateur Jessiman: Merci. Vous avez dit qu'il s'agit d'un élément d'actif qui appartient au gouvernement, lequel devrait le décrire de façon précise et faire un maximum de publicité. Il s'agissait d'un projet d'aménagement. Le gouvernement voulait s'adresser au secteur privé et lui dire: «Écoutez, nous avons la vieille aérogare 1, qui nécessite d'importantes réparations ou qu'il faut remplacer, et nous avons l'aérogare 2, dont une partie est assez moderne, mais l'autre en piteux état. Nous voulons que vous, entreprises du secteur privé, nous proposiez des idées. Nous ne voulons pas vous dire comment procéder», ce qui revenait à dire: «Très bien, vous allez procéder de telle ou telle façon», et je vais d'ailleurs vous lire quelque chose à ce sujet. Il ne s'agissait donc pas d'une vente d'actif à proprement parler. Le gouvernement recherchait des gens compétents, ayant de l'imagination, et c'est pourquoi il a procédé par demande de propositions plutôt que par appel d'offres. Ce n'est pas la même chose que ce dont vous parlez.
M. Crosbie: Non, je pense... j'ai dans mes notes certaines remarques que nous ont faites les fonctionnaires de Transports Canada sur la question même que vous soulevez. À mon avis, c'est...
Le sénateur Jessiman: Vous ne nous avez pas lu ce passage.
M. Crosbie: Je le ferai volontiers, si vous le désirez.
Le sénateur Stewart: Allez-y...
M. Crosbie: Selon eux, la conception d'une aérogare pourrait coûter, disons, un million de dollars. Je lis mes notes. En procédant comme ils l'ont fait, c'est-à-dire en envoyant des demandes de propositions, selon lui: «Cela a permis au secteur privé de soumettre un projet qui ne coûtait rien au gouvernement.» Cette personne déclare que le gouvernement ne voulait pas le faire pour ne pas dépenser d'argent. C'est ce qui est dit dans mes notes. C'est donc une façon de procéder à moindres frais.
Le sénateur Jessiman: Il ne veut toujours pas dépenser d'argent, et savez-vous pourquoi?
M. Crosbie: C'est une façon mesquine de procéder. Ce qu'il dit, c'est: «Écoutez, nous ne savons pas quoi faire. Nous allons lancer la demande de propositions, sans dire à qui que ce soit quels avantages seraient susceptibles de découler d'un tel contrat, et ce sont les soumissionnaires qui dépenseront l'argent à notre place.»
Or, de la façon dont les choses se passent en général - et je pense pouvoir le dire sans la moindre hésitation, c'est ainsi que les choses se passent en général - lorsqu'on veut obtenir une valeur maximale d'une vente, il faut soi-même se préparer, réfléchir au bien que l'on vend et établir en quoi cela peut intéresser quelqu'un; ensuite, il faut investir une certaine somme au départ, s'adresser aux candidats éventuels et les convaincre en leur disant: «J'ai une bonne affaire pour vous, et voilà comment vous allez pouvoir gagner de l'argent...»
Le sénateur Jessiman: Vous parlez du gouvernement?
M. Crosbie: Je pensais pouvoir terminer.
Le sénateur Jessiman: Est-ce que vous parlez du gouvernement?
Le sénateur Kirby: Allez-y, terminez.
Le sénateur Jessiman: Vous n'avez pas encore terminé?
M. Crosbie: Non. Et c'est à vous d'aller leur montrer comment décrocher le contrat. Vous leur dites combien ils ont à y gagner, vous leur indiquez l'investissement qu'ils doivent faire, le rendement qu'ils peuvent en tirer. Vous pouvez même les aider à trouver des partenaires. Vous pouvez même les aider à trouver des sources de financement. C'est à vous de préparer un dossier complet en plus de la vente et, ce faisant, vous augmentez vos chances de faire une bonne affaire.
En outre, vous diminuez les dépenses initiales que doit subir le soumissionnaire pour présenter une proposition. En lançant la demande de propositions, qui non seulement ne fait rien de tout cela, mais qui en outre oblige la société à dépenser des sommes considérables pour préparer sa proposition, on exerce un effet extrêmement dissuasif sur les éventuels soumissionnaires. Il a toutefois déclaré: «Eh bien, le gouvernement ne veut pas dépenser d'argent.» À notre avis, si le gouvernement avait dépensé au départ, retenu les services de professionnels, adopté un processus sérieux et agi comme on le fait généralement pour ce genre de grands projets, il aurait très vraisemblablement été nettement avantagé, selon nous.
Voilà, j'ai terminé.
Le sénateur LeBreton: Il ne s'agit pas d'une vente.
Le sénateur Jessiman: Vous nous dites... il faut comprendre, et il en va de même pour le gouvernement actuel, qui n'est pas en faillite, mais qui a de sérieux problèmes dont il doit se sortir, et c'est pourquoi il demande au secteur privé de prendre part au projet.
Permettez-moi de poursuivre. Je tiens à faire consigner encore quelques citations.
M. Crosbie: J'ajouterais à cela que, sur les marchés financiers actuels, si l'on veut conclure ce genre d'entente et que le vendeur a de sérieux problèmes de liquidités, comme vous semblez le penser du gouvernement à l'époque, il existe des moyens de concevoir des ententes avec l'aide de conseillers dont les honoraires sont en grande partie conditionnels, ce qui aurait permis au gouvernement de limiter ses dépenses initiales.
Le sénateur Tkachuk: Par exemple en retenant les services d'une société comme la vôtre?
M. Crosbie: Pour un projet de cette envergure et de cette nature, je pense qu'il existe d'autres entreprises...
Le sénateur Tkachuk: Mais une entreprise comme la vôtre?
M. Crosbie: Une entreprise comme la nôtre. Il y en a d'autres qui auraient mieux fait l'affaire.
Le sénateur Tkachuk: Une banque d'affaires?
M. Crosbie: Certaines des grandes banques d'investissement de notre pays, des États-Unis et du Royaume-Uni, en effet.
Le sénateur Tkachuk: D'accord.
Le sénateur Stewart: Vous préconisez une stratégie de marché, et ces sénateurs ne croient pas en l'économie de marché.
Le sénateur LeBreton: Il n'y a que les Libéraux qui ne croient pas en l'économie de marché.
Le sénateur Jessiman: De toute façon, vous dites...
Le président: Sénateur Jessiman, j'aimerais faire une pause dans deux minutes, à 15 h 30.
Le sénateur Jessiman: Je voudrais simplement lire deux ou trois citations. C'est très important, monsieur le président. Il y a environ trois paragraphes que j'aimerais lire, si vous le permettez, après quoi nous pourrons faire une pause et passer à un autre sujet.
Ceci est en rapport avec la province de l'Ontario, n'est-ce pas? Ce sont les propos de M. Coughlin, et c'est... la page que j'ai porte le numéro 1940-5. Voici ce que M. Coughlin répond à une question que je lui ai posée:
Je crois qu'on l'a déjà dit, c'était en 1990, ou au moins 17 mois avant que soit lancée la demande de propositions. On entendait beaucoup parler de la demande de propositions. Nous savions que celle-ci serait lancée. Vous savez les ingénieurs qui ont participé à notre processus d'appel d'offres en connaissaient l'existence. Et je veux dire, qu'à partir de la date du lancement de la demande de propositions, nous nous sommes mis sérieusement au travail pour préparer notre offre. Mais nous savions à coup sûr que la demande de propositions serait publiée et nous étions bien sûr prêts.
Comme je l'ai dit plus tôt, M. Bullock s'est adressé à moi. Monsieur Bullock au nom - du moins m'a-t-on dit - du gouvernement ontarien essayait de mettre sur pied une administration aéroportuaire locale. Il m'a demandé si nous accepterions de présenter une proposition conjointe avec celle-ci. Nous avons accepté. Nous avons entrepris de préparer ensemble une proposition.
Vers le milieu de... la fin mai et le début juin de cette année-là... M. Bullock m'a informé qu'il ne pouvait continuer, qu'il ne parvenait pas à obtenir un consensus des cinq municipalités de Toronto en ce qui avait trait à une structure. Nous avons donc repris la proposition.
Et c'est vraiment pour cette raison, parce que nous avons dû intervenir et nous occuper vraiment de ce que j'appellerais la gestion quotidienne de la présentation, que nous avons demandé un report au gouvernement. Le gouvernement a acquiescé à notre demande et nous avons déposé cette offre le 13 juillet.
Je pose ensuite la question suivante à M. Coughlin:
M. Nixon n'a pas manqué de critiquer le fait que la demande de propositions ne comportait qu'une seule étape plutôt que deux comme ce fut le cas pour l'aérogare 3. En tant que proposant perdant, que pensez-vous de la nécessité d'un processus à deux étapes dans ce cas en particulier?
M. Coughlin: Je n'ai jamais cru qu'il fallait vraiment procéder en deux étapes. je crois que si vous revenez à l'aérogare 3, il s'agissait en quelque sorte d'une nouvelle entreprise et que le gouvernement ne savait absolument pas si quelqu'un voulait vraiment construire, financer et exploiter un aérogare. Je crois que cette demande a attiré quatre ou cinq propositions.
Le sénateur Kirby: Je voudrais simplement poser une question, pour ma gouverne. Je n'ai aucune objection à tout ce qu'a dit le sénateur Jessiman, et c'est peut-être mon esprit mathématique qui prend le dessus, mais j'ai du mal à comprendre qu'on puisse consigner dans le compte rendu des extraits du compte rendu. Si je ne m'abuse, le sénateur lit des passages du compte rendu qui sont à nouveau transcrits, et je pensais que ce...
Le sénateur Jessiman: Je veux que ces témoins en particulier...
Le sénateur Kirby: Je comprends. C'est un problème de logique, à mes yeux, et je me demande pourquoi le sénateur ne se contente pas de nous indiquer les numéros de pages et de les montrer aux témoins, au lieu de relire toute la transcription. C'est tout.
M. Nelligan: Je crains qu'un certain nombre de sénateurs aient eu la même faiblesse au cours des audiences, mais en général, s'il s'agit de brèves citations, il est souvent plus rapide de les lire au témoin et de lui demander son avis. Tout dépend de l'endroit où se trouve sa propre documentation. Il s'agit simplement de gagner du temps.
Le sénateur Stewart: Je rappelle au président que lorsque j'ai voulu paraphraser, on a poussé les hauts cris et insisté pour que je cite mot à mot.
Le président: C'est parce qu'on vous déteste royalement, sénateur.
Le sénateur Stewart: Vous appliquez donc un règlement différent selon les sénateurs.
Le sénateur Kirby: Selon que vous serez puissant ou misérable.
Le président: Sérieusement, avant la pause, je vais consulter le sénateur Kirby à ce sujet. Je suis aussi conscient que nous tous de l'importance de ces témoins pour notre prise de décision. Je sais aussi qu'on leur a demandé de rester un jour de plus que prévu, c'est-à-dire demain, et je les en remercie. Dès 16 heures demain, ils ont, en particulier M. Nixon, des rendez-vous très importants.
Il y a deux questions dont je veux parler avec le sénateur Kirby: d'abord, si les sénateurs veulent obtenir certains renseignements, ils doivent tenir compte du temps dont nous disposons. Dans ce cas, le sénateur Kirby et moi pourrions demander à prolonger nos heures. Il pourrait s'agir, par exemple, de commencer plus tôt le matin, d'abréger l'heure du déjeuner, et ainsi de suite. J'ai dit que nous allions en discuter et vous demander ensuite votre approbation.
Je vous demande aussi la permission de laisser le conseiller juridique, qui intervient d'ordinaire après que les sénateurs ont terminé, poser à l'occasion une ou deux questions, non pas toute une suite de questions, mais une ou deux afin d'obtenir des éclaircissements. Cela va aussi nous aider à accélérer le rythme au lieu de devoir réserver, à la fin, une heure ou une heure et demie à M. Nelligan pour qu'il revienne sur le témoignage.
Le sénateur Kirby: Inutile de me consulter. Je précise avec plaisir qu'en ce qui concerne d'abord M. Nelligan, c'est parfait.
En second lieu, afin de profiter au maximum du temps dont disposent les témoins, tout en permettant à ces derniers d'aller à leur rendez-vous de 16 heures demain, je suggère que nous commencions à 8 heures, ce qui nous ajouterait une heure, et que nous ne prenions qu'une heure pour déjeuner, ce qui nous donnerait deux heures de plus et une heure de moins à la fin. Ainsi, nous aurions une heure de plus demain.
Au nom de mes collègues, je suis disposé à vous faire cette proposition si elle peut nous être utile.
Le président: Alors, ce serait de 8 heures à...
Le sénateur Kirby: De 8 heures à midi et de 13 à 16 heures.
Le président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Le sénateur Bryden a posé une question au sujet des notes des témoins, et M. O'Brien pourrait peut-être lui répondre.
M. Gary O'Brien, greffier du comité: Honorables sénateurs, les notes dont M. Crosbie s'est servi se trouvent dans le volume III des cinq documents Nixon. Il s'agit du document 002536, pages 12 à 15.
Le sénateur Jessiman: Vous dites dans votre rapport, monsieur Nixon, que la demande de propositions laissait de côté de nombreux aspects fondamentaux du projet envisagé, ce que vous avez déploré et ce sur quoi M. Crosbie et moi avons échangé quelques mots.
Je tiens seulement à préciser qu'à ce que nous sachions, et j'espère que vous ne répéterez pas seulement les propos de M. Crosbie, M. Hession a exprimé l'avis que voici tout brièvement: «C'est la meilleure proposition que j'aie vue dans mes 30 années d'expérience.» Selon M. Simke, de Price Waterhouse, une société internationale, la principale raison pour demander des propositions tel qu'on l'a fait, c'est que Transports Canada souhaitait avant tout que les soumissionnaires éventuels fassent preuve de créativité et d'innovation.
Voilà, selon eux, la raison d'être d'une demande de propositions. Par conséquent, si vous vouliez un appel d'offres, comme le prétend votre collègue, M. Crosbie, ce n'est justement pas ce que cherchait le gouvernement. Il avait décidé que c'était au secteur privé de dépenser, et non au gouvernement.
Pour moi, d'après ce qu'on m'en a dit, c'était peut-être la façon d'agir autrefois, peut-être à votre époque. Mais maintenant, de nos jours, la façon de faire des gouvernements, et j'espère que s'il décide de procéder, le gouvernement actuel fera comme le précédent, c'est de laisser agir le secteur privé.
Le président: Y a-t-il ici une question?
Le sénateur Jessiman: Oui. N'êtes-vous pas d'accord? Vous voulez revenir à l'ancienne méthode?
M. Nixon: Monsieur le président, je serais d'accord pour dire que le sénateur Jessiman et moi sommes de la même époque, si vous voyez ce que je veux dire.
Le sénateur Jessiman: Oui, mais vous êtes plus jeune.
M. Nixon: Il faut bien se résigner et profiter de la vie.
Mais les renseignements que M. Crosbie nous a fournis avant la pause étaient semblables, bien sûr, au conseil qu'il m'a donné pendant la rédaction de notre rapport. Il a laissé entendre qu'à son avis, l'approche n'était pas tant désuète qu'inefficace et insuffisante, et que si les propositions de location avaient été mieux ficelées, nous aurions peut-être pu, pour reprendre ses termes, comme gouvernement et comme pays, conclure une meilleure affaire. D'autres se sont dits insatisfaits de la manière dont la proposition a été faite. Je crois...
Le sénateur Jessiman: Qui sont ces gens?
M. Nixon: Voyons un peu. Avons-nous déjà discuté de cette question? Qui était d'avis que le délai de 90 jours...
Le sénateur Jessiman: Avez-vous des notes à ce sujet?
M. Nixon: La critique à propos du délai de 90 jours nous a été faite par la société qui vous a donné du fil à retordre tout à l'heure, Morrison Hershfield. Il y en a d'autres qui ont critiqué ce délai, comme le gouvernement de l'Ontario, et cela s'est aussi trouvé dans divers mémoires provenant des municipalités et des municipalités régionales. Ces gens...
Le président: Cela s'est-il fait par écrit?
M. Nixon: Oh oui! Les mémoires ont été déposés au comité et ils sont consignés. D'après les notes prises par M. Goudge, et à ce que je me souvienne, le sous-ministre d'alors nous a bel et bien dit que la proposition et tout le mécanisme avaient nettement avantagé Paxport et peut-être quelques autres, mais certainement Paxport.
Il va sans dire que certains ont magouillé, peut-on dire, pour faire valoir leurs intérêts et assurer leur position. Toutefois, j'estime que le fait que des propositions non sollicitées aient été présentées a pu empêcher une entreprise nouvelle dans ce domaine d'en présenter aussi, en se disant que des personnes compétentes y avaient travaillé assidûment, lors des propositions concernant l'aérogare 3. Des perdants, en particulier, mais aussi des plus heureux, avaient fait des propositions touchant les aérogares 1 et 2, mais il semblait s'agir d'un groupe exclusif, alors qu'une demande de propositions faite selon une méthode adéquate aurait pu stimuler d'autres intéressés...
Le sénateur Jessiman: Vous ne répondez pas vraiment à la question. Vous avez déjà parlé des propositions non sollicitées. Je vous ai cité pour avoir dit que cela ne posait pas de difficulté, mais ce dont nous discutons maintenant, c'est l'idée de demander au secteur privé d'assumer les coûts, car d'après l'avis de M. Crosbie, que vous avez suivi, et je vous demande s'il est vrai que vous l'avez suivi, puisque c'est écrit ici, car d'après son avis, le gouvernement aurait dû dépenser des millions de dollars afin de préciser ses intentions. Est-ce bien ce que vous croyez que le gouvernement aurait dû faire, c'est-à-dire dépenser des millions...
M. Nixon: M. Crosbie a peut-être quelque chose à ajouter.
Le sénateur Jessiman: Je veux savoir... c'est vous qui avez pris la décision.
M. Nixon: C'est vrai, et il était d'avis que la demande de propositions n'était pas assez bien définie - ou du moins que le mécanisme entourant la demande ne l'était pas - pour servir pleinement les intérêts...
Le sénateur Jessiman: Il n'est pas question ici du mécanisme.
M. Nixon: J'étais d'accord et je l'ai indiqué dans mon rapport.
Le sénateur Jessiman: Je veux parler des aspects fondamentaux que, selon vous, les soumissionnaires avaient le soin de définir eux-mêmes. Ce que je veux savoir, étant donné qu'on demandait au secteur privé de dépenser son propre argent, non pas celui du gouvernement, mais le sien, afin de concevoir certaines idées, les présenter au gouvernement et voir si cela lui plaisait, c'est si vous pensez que le gouvernement aurait dû dépenser lui-même cet argent en premier; est-ce bien ce que vous êtes en train de nous dire?
M. Nixon: Oui, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Merci.
M. Goudge: Puis-je faire une observation, sénateur? Vous avez entendu notre témoignage au sujet du sous-ministre et de l'avantage consenti à Paxport. Laissons cela de côté un instant parce que je crois... je vais vous donner le fond de ma pensée. Je crois qu'il s'agit ici d'une question d'affaires publiques très légitime. Le gouvernement du Canada devait, en l'occurrence, comme cela se produira encore à l'avenir pour lui et pour d'autres gouvernements d'un bout à l'autre du pays, se départir d'une propriété publique. C'est un fait auquel nous devrons nous habituer, j'ai bien peur, pendant encore longtemps.
Le sénateur Jessiman: Mais, dans ce cas-ci...
M. Goudge: Laissez-moi terminer.
Le sénateur Jessiman: Il ne s'agissait pas de se départir...
Le sénateur Bryden: Sénateur Jessiman, nous avons coutume de laisser au moins le témoin terminer son exposé.
M. Goudge: Outre la question de savoir si les règles du jeu ont avantagé Paxport, nous sommes ici devant une question très importante d'affaires publiques qui concerne la manière dont les gouvernements doivent procéder pour se départir d'un bien afin que l'intérêt public en tire le maximum. Selon l'avis que M. Crosbie a donné à M. Nixon, le mécanisme en cause n'était pas structuré de cette manière alors qu'il aurait pu l'être afin que l'intérêt public tire pleinement partie de la privatisation d'un bien.
On peut être en désaccord, monsieur, sur la sagesse de mesures comme celles dont parle M. Crosbie, mais ce sont des questions de politique gouvernementale vraiment importantes, et M. Nixon n'a fait qu'exprimer une opinion fondée sur l'avis de M. Crosbie.
Le sénateur Tkachuk: Pourrais-je poser quelques questions supplémentaires, monsieur le président?
Le président: Quelques questions supplémentaires?
Le sénateur Tkachuk: Je ne sais pas, peut-être deux ou trois, mais elles font suite aux précédentes...
Le président: Alors ce ne sont pas des questions supplémentaires mais nouvelles.
Le sénateur Tkachuk: C'est au sujet du point de vue exprimé concernant une meilleure offre, monsieur le président, et j'aurais quelques questions à poser.
Le président: Je vous permets une seule question supplémentaire.
Le sénateur Tkachuk: Ce sera difficile, parce que j'ai écouté M. Crosbie avec beaucoup d'intérêt.
Monsieur Nixon, avez-vous déjà traité avec un agent immobilier?
M. Nixon: Oui, mais jamais pour une affaire comme celle dont nous discutons présentement. J'ai vendu la maison de ma mère après sa mort.
Le sénateur Tkachuk: J'ai toujours trouvé un agent immobilier qui pouvait m'offrir un meilleur prix qu'un autre, et tous ceux qui ont de l'expérience en la matière vous diront sans doute la même chose.
Monsieur Crosbie, vous travaillez en partie dans le domaine de l'évaluation et en partie dans celui des banques d'affaires?
M. Crosbie: En effet.
Le sénateur Tkachuk: Allez-vous alors au devant des occasions?
M. Crosbie: Bien sûr.
Le sénateur Tkachuk: Dans ce cas, monsieur, il y a eu des évaluations de faites par Price Waterhouse, Deloitte Touche, Raymond Chabot qui a examiné... vous savez, ce sont des entreprises comptables qui font de la consultation financière et des comparaisons, et qui n'avaient sans doute pas d'intérêt personnel dans ce projet. Pourquoi n'aurait-on pas dû retenir les services des uns ou des autres?
M. Nixon: Monsieur le président, je n'étais pas chargé d'embaucher qui que ce soit. On m'a demandé d'examiner le processus. On m'a signalé certaines lacunes. J'ai cru que les lacunes dont on m'avait mis au courant avaient quelque fondement et que le premier ministre, qui voulait mon avis, devait en être informé, comme je l'ai fait.
M. Crosbie: Puis-je répondre à cette question, puisque vous semblez insinuer que nous avons peut-être été en conflit d'intérêts?
Le sénateur Tkachuk: Je n'insinue rien, je ne fais que poser des questions.
M. Crosbie: Je tiens à préciser, pour que nous nous comprenions bien, qu'en ce qui concerne les spécialistes auxquels il y aurait lieu de faire appel afin de mieux représenter les intérêts du gouvernement et d'obtenir le maximum d'avantages, nous ne croyons pas que notre société ferait l'affaire. Nous ne sommes pas l'une des banques d'affaires canadiennes les plus importantes et nous ne faisons pas partie d'un grand réseau financier international. Une transaction de l'ordre de celle dont il est question, qui représentait 842 millions de dollars pour le gouvernement, est une transaction très importante qui exige, normalement, d'avoir recours à une banque d'affaires majeure. Le Canada possède quelques banques d'affaires majeures. Il en existe sur Wall Street et à Londres, et ce sont à des sociétés de ce genre qu'on s'adresse, d'habitude, pour une transaction aussi importante. Mais nous ne sommes par une société à laquelle... nous ne nous tenons pas pour le genre de société dont on retiendrait les services pour exécuter une transaction de cet ordre.
Par contre, lorsque je dirigeais le service des fusions et des acquisitions au sein de Merrill Lynch du Canada, alors je dirais que nous aurions cherché de façon très sérieuse à mener ce genre d'opération et, dans le cadre de mes anciennes fonctions, je crois que nous aurions été intéressés. Mais notre société actuelle ne se serait pas lancée sur ce marché. Il y en a d'autres de bien plus compétentes dans ce domaine.
Je ne fais que vous donner de notre mieux notre opinion en la matière, et j'estime que nous ne sommes absolument pas en conflit d'intérêts et que nous sommes parfaitement objectifs.
Le sénateur Tkachuk: Alors dites-moi quel genre d'entreprise canadienne ou internationale ayant une compétence en réaménagement des aéroports aurait pu s'occuper de ce projet.
M. Crosbie: Eh bien, je crois...
Le président: Sénateur Jessiman, êtes-vous d'accord pour que le sénateur Tkachuk poursuive?
M. Crosbie: J'estime qu'il y a beaucoup de grandes banques d'affaires.
Le sénateur Tkachuk: Ce n'est pas ce que j'ai demandé.
M. Crosbie: Il faudrait aller interroger leurs dirigeants et voir quelles sont celles qui ont compétence en la matière.
Le sénateur Tkachuk: C'est à vous de m'apporter des précisions, monsieur. Nommez-m'en quelques-unes.
M. Crosbie: Il ne m'appartient pas, je crois que ce serait aller au-delà de mes obligations, de vous conseiller sur la banque la mieux placée, qu'il s'agisse de Goldman Sacks, Dominion Securities, Warburgs ou Rothchilds.
Le sénateur Tkachuk: À qui aurait-on dû confier le réaménagement de cet aéroport?
M. Crosbie: Oh! vous voulez dire qui d'autre que Paxport aurait pu obtenir ce marché?
Le sénateur Tkachuk: Non. Qui d'autre que Pearson Development Corporation.
M. Crosbie: Il y a beaucoup d'autres sociétés majeures d'ingénierie et de construction et beaucoup d'autres genres d'entreprises auxquelles on peut penser...
Le sénateur Tkachuk: Par exemple?
M. Crosbie: De nouveau, ce n'est pas à moi...
Le sénateur Tkachuk: Nommez-m'en une, monsieur Crosbie. Je serais content. Ce serait un bon début.
M. Crosbie: Morrison Hershfield, British Airport Authority. Il y en a plusieurs, vous savez.
Le sénateur Tkachuk: Continuez, poursuivez la liste.
M. Crosbie: Acres. Je ne veux pas entrer...
Le sénateur Tkachuk: Vous conseillez le premier ministre du Canada, non?
M. Crosbie: Un instant. Ne nous excitons pas.
Le sénateur Tkachuk: Vous conseillez le premier ministre du Canada.
M. Goudge: Il conseille M. Nixon.
M. Crosbie: Quand on retient nos services pour quelque chose et que quelqu'un d'autre nous demande: «Qui seraient des investisseurs éventuels dans telle affaire? Qui pourrait se porter acquéreur de telle autre?», cela nous fait perdre beaucoup de temps. Je ne vous suggère rien, mais si vous vouliez que nous fassions une évaluation complète, professionnelle et rigoureuse des soumissionnaires et des investisseurs éventuels pour un projet de cette nature, nous le ferions avec plaisir mais de manière officielle. À cette fin, par exemple, nos bureaux de Los Angeles disposent d'un groupe important dans le domaine du génie et de la construction. Nous serions ravis de le mettre à contribution. À New York, notre groupe de financement de projets traite d'affaires de ce genre dans le monde entier. Nous ferions appel à lui avec plaisir. Nous connaissons pas mal le contexte canadien dans ce domaine. Pour trouver sur la scène internationale des gens qui ont la compétence, la capacité, le crédit et tout ce qu'il faut pour monter un dossier comme celui-là et présenter une proposition, c'est une affaire sérieuse et cela ne se prépare pas autour d'une tasse de café. Cela exige énormément de compétence. Ce n'est donc pas très professionnel de poser une question et de s'attendre à une réponse sur-le-champ. Pour y répondre, il faudrait que je m'attelle à la tåche et que j'y réfléchisse sérieusement, mais il existe des groupes aux reins solides, qui ont la compétence, le talent, l'argent et tout ce qu'il faut.
Le sénateur Tkachuk: Ce que vous auriez dû faire...
M. Crosbie: Non, nous n'avons pas été embauchés pour cela. Ce n'était pas à nous de vendre ce projet. Nous avons été étonnés de voir que le gouvernement ne l'avait pas fait.
Le sénateur Tkachuk: Merci. J'ai terminé.
Le sénateur Bryden: Dites-moi donc, monsieur le président, s'il s'agit vraiment d'une question supplémentaire.
Le sénateur Tkachuk: Je n'en ai posé que deux.
Le sénateur Bryden: Ça vous a pris une semaine.
Le sénateur Tkachuk: Eh bien, il a répondu.
Le sénateur Stewart: C'est bien ça le problème, il a répondu.
Le sénateur Bryden: Voici ma question supplémentaire, qui s'adresse sans doute à M. Goudge. C'est à propos de l'émission de la demande de propositions et du délai, et ma question est la suivante: avant que la demande de propositions ne soit faite, le gouvernement aurait pu changer d'avis et il n'aurait pas été question de compenser les soumissionnaires pour leurs frais.
M. Goudge: C'est juste.
Le sénateur Jessiman: Je m'adresse à M. Nixon. Je crois que vous le saviez, lorsque vous avez dit que ce n'était pas vrai, pas exact. Vous dites que le bail n'empêche pas T1 and T2 Limited Partnership d'entreprendre une autre activité que celles de la gestion, de l'exploitation et de l'entretien des aérogares 1 et 2. Vous saviez que ce n'était pas juste, n'est-ce pas?
M. Goudge: Où cela se trouve-t-il, sénateur?
Le sénateur Jessiman: À la page 5.
M. Nixon: Cette question me semble irrecevable, monsieur le président. Je n'ai rien mis dans le rapport dont j'estime que ce soit faux.
Le sénateur Jessiman: Ce que j'affirme me semble correspondre aux faits, c'est-à-dire que cela ne s'applique qu'après dix ans ou lorsque les travaux seront terminés. Est-ce que je me trompe?
M. Nixon: Après dix ans, tous les investissements auront été effectués...
Le sénateur Jessiman: Oui.
M. Nixon: ...et les propriétaires du bail des aérogares 1 et 2 pourront se retourner et le vendre à qui ils voudront.
Le sénateur Jessiman: Après dix ans, n'est-ce pas?
M. Nixon: Ils peuvent le faire entre-temps, à certaines conditions.
Le sénateur Jessiman: Pas d'après les renseignements dont je dispose.
M. Nixon: Pouvez-vous m'aider là-dessus, monsieur Goudge?
M. Goudge: Puis-je répondre à cette question, sénateur?
Le sénateur Jessiman: Et vous en avez été informé par écrit; M. Goudge l'a été.
M. Goudge: Puis-je répondre, car je crois que ce paragraphe du rapport fait partie de la documentation que j'ai rédigée pour M. Nixon? Pour être précis, sénateur...
Le sénateur Jessiman: Vous a-t-on écrit pour dire que c'était une erreur? Avez-vous reçu une lettre peu après le dépôt du rapport?
M. Goudge: J'ai reçu une lettre de M. Vineberg, en effet.
Le sénateur Jessiman: Y avez-vous répondu?
M. Goudge: Non.
Le sénateur Jessiman: Pourquoi n'y avez-vous pas répondu?
M. Goudge: Parce que j'ai cru que ce ne serait pas convenable, monsieur le sénateur, une fois remis le rapport de M. Nixon, de s'engager dans un échange de correspondance. Le rapport avait été déposé. Mais permettez-moi de préciser, monsieur, qu'il n'y a aucune contrainte de prévue après dix ans. Je puis aussi affirmer que ce que j'ai fait, et je ne peux en dire plus en raison du secret professionnel... je peux vous mentionner que la source de renseignements que j'ai utilisée pour rédiger ce paragraphe se trouve dans le mémoire de la Commission des transports, et elle est mentionnée en toute bonne foi dans le rapport.
Le sénateur Jessiman: Voulez-vous dire que l'information que M. Vineberg vous a transmise est inexacte?
M. Goudge: Je dis que ce que j'ai écrit provient de la source que j'ai mentionnée. À la suite de la lettre de M. Vineberg, j'ai consulté M. Desmarais et, effectivement, j'accepte la réserve faite au sujet du paragraphe que j'ai rédigé pour M. Nixon. Elle est exacte. C'est-à-dire que la réserve...
Le sénateur Jessiman: M. Vineberg...
M. Nelligan: Laissez-le terminer sa réponse.
Le sénateur Bryden: Il essaie de répondre à votre question.
M. Goudge: Permettez-moi de recommencer du début. La source d'information que j'ai utilisée pour le paragraphe qui figure à la page 5 est bien, monsieur le sénateur, celle que j'ai indiquée. Quand j'ai reçu la lettre de M. Vineberg, je me suis entretenu avec M. Desmarais, en effet, et je suis tout à fait prêt à accepter la réserve que vous faites au sujet de ce paragraphe.
Le sénateur Jessiman: Merci. C'est tout ce que je voulais.
M. Goudge: Néanmoins, j'estime qu'il y a deux choses importantes à ajouter. Premièrement, après dix ans il n'y a absolument pas de contrainte.
Le sénateur Jessiman: Après dix ans ou lorsque les travaux seront terminés.
Le sénateur Kirby: Laissez-le poursuivre.
M. Goudge: Deuxièmement, je crois pouvoir dire en toute certitude que l'information contenue dans le rapport relève du même ensemble de renseignements qui ont servi à prendre la décision du mois d'août.
Le sénateur Jessiman: Très bien. Vous dites aussi, à la page 7 du rapport, que le gouvernement a conclu dix ententes... pardon, que l'entreprise à participation a fait valoir auprès du gouvernement qu'elle avait passé avec des parties non indépendantes, avant le 7 octobre 1993, dix contrats dont l'un était censé être une entente de pilotage avec Matthews, et ce renseignement n'a pas été divulgué mais vous saviez aussi ou, du moins, vous l'avez appris en recevant la lettre de M. Vineberg, que le ministère des Transports avait demandé à T1 and T2 Limited Partnership de lui consentir le droit d'approuver ces contrats, et que dans une lettre au ministère datée du 25 novembre 1993, l'entreprise à participation a accepté d'accorder au ministère des Transports un droit de regard sur ces contrats. Vous saviez également, n'est-ce pas, que tout nouveau contrat conclu après cette date devait était établi à la valeur marchande.
M. Goudge: Permettez-moi d'expliquer ce paragraphe, sénateur, parce qu'il est tout à fait exact. Dans les documents de fermeture, il y en a un de l'entreprise à participation concernant les transactions sans concurrence conclues avant le 7 octobre. La liste en comporte dix. Par conséquent, l'entreprise affirme qu'elles existaient avant le 7 octobre.
Le gouvernement avait le droit de prendre connaissance de la teneur des contrats, sans plus. On nous a affirmé qu'il n'avait pas tenté d'exercer ce droit limité. Nous étions aussi d'avis, du moins je l'étais, bien que ce ne soit pas écrit dans le paragraphe, qu'il s'agissait d'un bien faible droit. Il n'avait pas de droit de veto touchant les transactions sans concurrence et il ne pouvait même pas s'assurer de leur juste valeur marchande.
Après le 7 octobre, l'affaire ayant été conclue, une lettre arrive dans laquelle on demande un droit supplémentaire qui ne figurait pas dans l'entente du 7 octobre.
Le sénateur Jessiman: C'est le gouvernement qui demandait cela.
M. Goudge: Le gouvernement le demandait et l'entreprise à participation le lui a accordé après coup. Ce dont nous parlions, ce sont les transactions conclues avant le 7 octobre. Si l'entreprise à participation a voulu faire une concession, sachant pertinemment que j'avais exprimé de l'inquiétude à cet égard pendant les 30 jours du mois de novembre, c'était à elle d'agir et de la faire. À mon avis, la concession aurait pu être plus ferme. En fait, tout ce qu'elle prévoyait, c'est que les contrats censés avoir été passés avant le 7 octobre devaient, au moment de leur mise à exécution, porter une juste valeur marchande.
On peut croire que pour une transaction de cette envergure, et compte tenu des intérêts en jeu, le gouvernement aurait dû exiger davantage, notamment un droit de veto sur les conditions si elles devaient ne pas être acceptables.
Le sénateur Jessiman: Il est vrai, néanmoins, qu'afin d'établir le montant du revenu que Transports Canada ou le gouvernement devait toucher, il fallait, peu importe ce qui s'est passé entre les parties, que les contrats soient fixés à la valeur marchande et cela, vous le saviez.
M. Goudge: Tout ce dont je peux parler, le sénateur, c'est des transactions sans concurrence conclues avant le 7 octobre. D'accord? Je ne sais pas au juste à quoi vous faites allusion. Voulez-vous que je recommence du début?
Le sénateur Jessiman: Je veux parler des transactions sans concurrence conclues après le 7 octobre. Qu'elles portent ou non une juste valeur marchande, elles doivent, afin d'établir le loyer que le gouvernement devra toucher, correspondre à la valeur marchande.
M. Goudge: C'est ce qu'on peut en déduire, en effet, et vous avez raison.
Le sénateur Jessiman: Bien.
M. Goudge: J'estime pour ma part, sénateur, et vous n'avez pas besoin d'être d'accord, que si j'avais négocié une affaire comme celle-là à la place du gouvernement, je me serais assuré d'avoir un peu plus de pouvoir touchant les transactions sans concurrence conclues après le 7 octobre.
Le sénateur Jessiman: J'aimerais passer à un autre point, si possible. À la page 9 de votre rapport, paragraphe 8, vous dites que «la privatisation des aérogares 1 et 2 déroge à la politique du gouvernement du Canada.»
M. Goudge: Où est-ce?
Le sénateur Jessiman: «Après avoir permis la privatisation de l'aérogare 3 de l'aéroport Pearson, le processus de privatisation des aérogares 1 et 2 déroge à l'orientation principale de la politique du gouvernement du Canada.»
Le président: Je ne trouve pas ce passage, sénateur.
M. Goudge: Vous me perdez.
Le président: Voulez-vous parler du rapport Nixon? Vous avez dit à la page 9.
Le sénateur Jessiman: Excusez-moi, c'est ma neuvième question, il s'agit de la page 8. Le rapport Nixon dit ceci à la page 8: «Après avoir permis la privatisation de l'aérogare 3...» Ce que je dis, c'est que d'après M. Desmarais, cela était conforme à la politique. Vous a-t-il dit autre chose?
M. Nixon: C'est peut-être à moi de répondre. J'ai cru comprendre que la politique du gouvernement du Canada devait être, à cet égard, la même qu'en ce qui concerne les autres villes du Canada où il existe une administration locale.
La modification que M. Desmarais nous a signalée, c'est que bien qu'il n'y a pas eu de contraintes de posées à la reconnaissance d'une administration aéroportuaire locale dans d'autres centres urbains, comme à Montréal, la région métropolitaine de Toronto était, pour sa part, assujettie à une contrainte, c'est-à-dire que toutes les municipalités concernées devaient être d'accord. Par conséquent, j'estime que cela déroge à la politique que le gouvernement a appliquée dans d'autres grands centres urbains, mais pour les raisons que...
Le sénateur Jessiman: Mais il a expliqué pourquoi.
M. Nixon: L'une des raisons, c'est qu'on entrevoyait des difficultés avec Mississauga.
Le sénateur Jessiman: Et il y en a eu.
M. Nixon: Et Mississauga hésitait à s'engager parce que l'aéroport de l'île de Toronto allait en être affecté. J'ai exprimé l'avis que le gouvernement aurait pu reconnaître une AAL, s'il avait suivi la politique qu'il avait appliquée ailleurs.
M. Nelligan: Puis-je demander une explication à M. Nixon, parce qu'il me semble, d'après le premier paragraphe, qu'il est question de l'orientation principale de la politique annoncée par le gouvernement du Canada en 1987.
Aurait-on établi une politique particulière pour cette administration locale, ou vouliez-vous simplement parler de la politique générale tendant à confier le pouvoir à une AAL dans la mesure du possible? Je ne suis pas au courant de ces détails...
M. Nixon: Je ne mentionne ces détails que parce que certaines personnes que j'hésite encore une fois à nommer devant le comité, mais selon qui cette privatisation revêtait un intérêt particulier pour le gouvernement, du moins sous certains aspects, avaient l'impression qu'on avait dressé des obstacles inutilement rigides ou difficiles à surmonter pour la création d'une AAL à Toronto.
Le sénateur Tkachuk: Avez-vous demandé au gouvernement quelle était sa politique?
M. Nixon: La politique gouvernementale figure dans des documents d'ordre public.
Le sénateur Jessiman: Quelqu'un du gouvernement vous a-t-il dit que cela dérogeait à la politique gouvernementale?
M. Nixon: M. Desmarais nous a signalé qu'on exigeait, dans la région de Toronto, l'appui unanime des municipalités concernées, si bien que M. Corbeil était tout à fait justifié de dire qu'en l'absence du consentement unanime, il était donc impossible de créer une administration locale. Cela a donné lieu à toutes les difficultés que l'un des sénateurs a évoquées tout à l'heure, lorsque Claridge a affirmé qu'elle avait subi du retard parce que l'AAL ne pouvait pas prendre part à l'affaire. Elle ne le pouvait pas parce que son existence n'était pas reconnue. Il n'y avait pas d'administration locale...
Le sénateur Jessiman: Elle n'avait pas été organisée.
M. Nixon: Elle ne pouvait pas l'être sans l'approbation du gouvernement du Canada. Elle ne pouvait pas réunir de capitaux sans l'accord du gouvernement du Canada, et elle ne pouvait pas être établie sans que Mississauga y consente.
On était donc engagé dans une drôle d'impasse...
Le sénateur Tkachuk: S'est-on maintenant organisé?
M. Nixon: À vrai dire, je l'ignore. Il semble qu'on vienne d'embaucher quelqu'un de San Francisco. C'est ce qui a été mentionné tout à l'heure. C'est un sénateur qui l'a dit.
Le sénateur Jessiman: J'affirme que M. Desmarais nous a donné son avis. Je vous répète ce qu'il nous a dit sous serment et qui tient en une phrase: «Je ne crois pas que cette affaire déroge à la politique de 1987.» C'est ce qu'il nous a dit. C'est aussi notre avis. Mais ce n'est pas le vôtre. Passons à autre chose, si vous voulez bien.
M. Goudge: À vrai dire, c'est plutôt qu'elle «déroge à l'orientation principale.» En relisant le deuxième paragraphe de la page 1, vous voyez ce dont parlait M. Nixon. C'est-à-dire que l'orientation principale de la politique était d'utiliser une AAL.
Le sénateur Jessiman: Mais ça ne s'arrêtait pas là et vous le savez fort bien. Il nous l'a dit, à vous aussi bien qu'à nous. Passons à un autre sujet, si vous permettez.
M. Nixon: Auparavant, si vous permettez, il se peut que je devienne hypersensible à mesure que l'après-midi avance, mais les propos du sénateur laissent entendre qu'en quelque sorte, le rapport contient certains renseignements que je savais erronés, ce qui, monsieur le président, me paraît inadmissible.
Le sénateur Jessiman: Tout ce que je puis dire, c'est que voilà ce qu'on nous a affirmé sous serment, et c'est certainement...
M. Nixon: Nous avons tous ici prêté serment.
Le sénateur Jessiman: Vous l'avez fait, maintenant, mais pas lorsque vous avez rédigé le rapport.
M. Nixon: Je ne sais pas ce que cela signifie.
Le sénateur Jessiman: Ce que je suis en train de vous dire, monsieur, c'est que vous avez fait une affirmation. Or, nous avons entendu un témoignage qui la contredit. Rien ne nous empêche de penser que cette affirmation est erronée.
M. Goudge: Puis-je vous inviter, monsieur, à consulter la politique? Vous verrez que c'est évident.
Le sénateur LeBreton: L'avez-vous sous la main?
M. Goudge: Il est évident, d'après cette politique, que son orientation principale est d'utiliser les AAL.
Le sénateur Tkachuk: Que s'est-il passé pour l'aérogare 3?
M. Goudge: L'orientation principale de la politique. Laissez-moi vous répondre, sénateur. «L'orientation principale de la politique», c'est tout ce que dit la phrase...
Le sénateur Tkachuk: Le gouvernement peut-il établir une politique en prenant une mesure autant qu'en rédigeant un texte?
M. Goudge: Le rapport dit, monsieur le sénateur...
Le sénateur Tkachuk: Répondez-moi.
M. Goudge: Je vais le faire si vous m'en laissez l'occasion.
Le sénateur Tkachuk: Oui ou non?
M. Goudge: Vous me laissez répondre, oui ou non?
Le sénateur Tkachuk: Le gouvernement peut-il établir une politique en prenant une mesure autant qu'en l'écrivant?
M. Goudge: Le rapport dit que ce qui s'est produit dérogeait à l'orientation principale de la politique de 1987. Et je vous ai dit, à mon avis, en quoi elle consiste telle qu'énoncée.
Le sénateur Tkachuk: Lorsque M. Trudeau a imposé le contrôle des prix et des salaires, est-ce que c'était la politique du gouvernement... eh bien, je pose une question.
Le sénateur Bryden: C'est en train de devenir une prise de bec plutôt qu'un interrogatoire. Pourrait-on respecter quelque peu le décorum et avoir la courtoisie de laisser le témoin répondre aux questions afin que tout se déroule dans l'ordre?
Le sénateur Jessiman: Vous n'ignorez certes pas, monsieur, que cette politique... elle a deux parties. L'une prévoit que le gouvernement peut céder à bail une propriété foncière à l'entreprise privée, n'est-ce pas?
M. Goudge: Je suis disposé, sénateur...
Le sénateur Jessiman: Ai-je raison?
M. Goudge: Je tente souvent, moi aussi, de faire répondre des témoins par oui ou non, et je sais que j'ai le droit de donner la réponse qui me semble juste.
À mon avis, la phrase de la première page du rapport signifie que l'orientation principale de la politique est d'utiliser les administrations locales. Et comme on le voit au paragraphe de la page 1, il n'y a qu'une allusion au secteur privé. Voilà en quoi consiste précisément la politique.
Le sénateur Jessiman: M. Desmarais a dit le contraire pour d'autres raisons. Mais passons.
Ceci figure à la page 8 du rapport: «De plus, il est important de noter qu'aucune analyse financière préalable n'était exigée dans cette demande de propositions.» Êtes-vous au courant... je m'adresse à l'un de vous trois mais, surtout, à M. Nixon. Êtes-vous au courant du projet PEI de l'Île-du-Prince-Édouard, de la construction du pont?
Le sénateur Bryden: Règlement! C'est le projet PEI du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Jessiman: Le détroit de Northumberland, vous connaissez ce projet?
M. Nixon: Je ne suis pas au courant.
Le sénateur Jessiman: C'est un projet d'envergure semblable, sans doute, voire supérieure. Les dispositions de financement sont les mêmes. J'imagine que vous connaissez bien la partie de la demande de propositions qui concernait le financement du projet de même que les ressources financières. Avez-vous une idée de ce que cela signifie? Vous semblez croire, du moins je le suppose, que quelqu'un aurait pu se présenter avec 840 millions de dollars, signer un chèque et se lancer dans l'aventure.
D'après un témoin, M. Stehelin, personne au monde, y compris les Bronfman, n'aurait pu se présenter avec 840 millions de dollars en poche pour financer un aussi gros projet. Les Bronfman sont très riches, bien sûr, mais quand on voit ce qu'ils ont fait en ce qui concerne leur propre proposition, la soumission Claridge qui était associée avec l'autre société aérienne, Lockheed, excusez-moi... même s'ils étaient derrière l'offre, à la source des capitaux, quand on regarde les sociétés qui ont présenté la soumission, on s'aperçoit que c'était des prête-noms.
C'est parce que même quand on a de l'argent, on n'est pas prêt à prendre des risques démesurés. Si l'affaire s'était faite comme vous le souhaitez, ou comme vous prétendez qu'elle aurait dû se faire, vous n'auriez eu que des financiers disposés à prendre un risque énorme.
M. Stehelin, président de Deloitte Touche, nous a dit que même pour la famille Bronfman, l'une des plus riches ou probablement la plus riche du Canada, cette situation était impensable. Au contraire, c'est l'occasion pour ceux qui en ont les moyens de se réunir, comme l'a fait Paxport et comme tous les autres, notamment Claridge et Lockheed, qui étaient prêts à collaborer. En pareilles circonstances, il faut un consortium. Mais quand on exige de débloquer des fonds, cela rend la tåche plus difficile aux entrepreneurs canadiens qui ont un peu d'argent, encore qu'il en aurait fallu beaucoup, puisqu'on leur demandait 61 millions. En fait, ce n'était pas 61, mais plutôt 93 millions, en raison des frais d'exécution. J'estime donc que l'affaire était raisonnable.
Le sénateur Stewart: Il en est résulté à peu près exactement ce que vous qualifiez de répréhensible.
Le sénateur Jessiman: Pouvez-vous répéter, s'il vous plaît?
Le sénateur Stewart: Le processus utilisé a produit à peu près ce qu'il aurait fallu, comme vous dites, éviter.
Le sénateur Jessiman: Je ne comprends pas.
Le sénateur Stewart: Vous dites que le processus était bon parce qu'il n'a pas créé de biais en faveur de la famille Bronfman. Par contre, devant le résultat final...
Le président: Voilà deux observations sans aucune question de posée au témoin. Pourrait-on passer à la suivante?
M. Nixon: J'aimerais répondre, monsieur le président. J'ai seulement une précision à apporter après quoi, si possible, je demanderai à M. Crosbie d'intervenir, parce que c'est dans son domaine.
Pour répondre à la question directe du sénateur, non, je ne m'attendrais pas à ce qu'un soumissionnaire ait 840 millions de dollars en banque et puisse en fournir la preuve à qui la lui demande. Ma préoccupation est sans doute semblable à celle que Transports Canada a exprimée lorsqu'il a entrepris des audiences sur la capacité de financement de Paxport, c'est-à-dire de la proposition de Paxport qui avait été acceptée, ce qui a donné lieu à des discussions interminables. Nous en avons déjà parlé ici. Et le plan financier n'a pas été jugé réalisable jusqu'à ce que la concurrence qu'on avait tant recherchée pour Pearson s'évapore et que les propriétaires de l'aérogare 3 réunissent suffisamment de ressources pour que le gouvernement du Canada, en particulier Transports Canada, soit enfin persuadé que l'affaire serait financée comme il se doit.
Certains semblent d'avis, d'après les questions posées précédemment, que Paxport aurait pu, c'est-à-dire le groupe Matthews de Paxport et ses collègues, réunir les capitaux nécessaires. Mais ces derniers ont attendu que leur principal concurrent se présente et accepte un marché moins avantageux avant de trouver l'argent qui leur a finalement permis la participation majoritaire dans la proposition. Par conséquent, je ne suis pas le seul à m'être inquiété de la capacité de financement, puisque Transports Canada l'a fait aussi plus tard.
Le sénateur Jessiman: Vous savez comme moi que la capacité de financement ne mettait pas en cause les membres du groupe Paxport. Le doute découlait des frais qu'on voulait imposer aux sociétés aériennes. Le problème, c'est que Air Canada et Canadien étaient toutes deux en difficulté au sujet de leur avenir, à savoir si les deux sociétés allaient fusionner ou quel serait leur sort. Les deux éprouvaient des difficultés.
Transports Canada craignait donc qu'en accordant le marché à Paxport, les sociétés aériennes ne soient pas à même d'assumer leurs dépenses.
Par-dessus tout, bien sûr, il y avait le fameux «sandwich» d'Air Canada, si bien que ce ne sont pas les membres individuels de Paxport qui étaient en cause. Vous êtes d'accord là-dessus, n'est-ce pas?
M. Nixon: Monsieur le président, étant donné que M. Crosbie m'a fourni des conseils en la matière, il serait peut-être bon de lui céder brièvement la parole.
M. Crosbie: À propos de la capacité de financement de Paxport, de sa capacité de réunir 66 millions de dollars ainsi que de la manière dont cela s'est effectué, c'est ce qui nous paraît le plus étrange de tout le processus. À ce que nous sachions, en décembre 1992, le gouvernement, c'est-à-dire Transports Canada, a conclu avec Paxport une entente qui a été rendue publique, sous réserve que Paxport puisse faire la preuve qu'elle pouvait réunir les capitaux. En soi, cela n'a rien d'inhabituel.
Le sénateur LeBreton: C'est faux.
Le sénateur Bryden: Au contraire. Allez vérifier les faits. Telle qu'annoncée, la meilleure proposition globale était assujettie à la preuve de la capacité à réunir les capitaux propres avant le 15 février.
Le sénateur Jessiman: M. Crosbie sait pertinemment que cela ne concernait pas du tout les 61 millions de dollars qui faisaient partie du projet. Le problème, selon le gouvernement, c'est que dans sa proposition, Paxport prévoyait imposer aux sociétés aériennes les mêmes frais que ceux que paient les sociétés aériennes de l'aérogare 3. Et le gouvernement jugeait qu'Air Canada en était incapable.
Par conséquent, surtout à cause du «sandwich» d'Air Canada qui posait un problème à Transports Canada, il y avait, à ce que nous sachions, ce sous-ministre Labelle et ce sous-ministre adjoint Barbeau, tous deux responsables de la demande de propositions, qui n'en ont pas tenu compte on ne sait pourquoi.
Cela a embarrassé le gouvernement. Les soumissionnaires ont appris à la fin de juin 1993 que le gouvernement était au courant et que la question de la capacité de financement concernait les sociétés aériennes.
M. Crosbie: Il se peut que quelque chose m'ait échappé, mais je ne suis pas convaincu que vos propos se rapportent vraiment aux miens.
Le sénateur Jessiman: D'accord.
M. Crosbie: À ce que je sache, Transports Canada et Paxport ont conclu, en décembre 1992, une entente selon laquelle ils collaboreraient, à condition que...
Le sénateur Jessiman: La première discussion a eu lieu le 9 décembre.
M. Crosbie: Bien, le 9 décembre, peu importe. Ils allaient collaborer, à condition que Paxport puisse réunir les capitaux. Il y avait probablement une foule d'autres conditions, mais l'une d'elles était que Paxport dispose de l'argent nécessaire. De la manière dont l'entente était conçue et selon ce que les parties avaient accepté, les capitaux propres devaient atteindre 66 millions de dollars.
Le sénateur Jessiman: Soixante et un, il me semble.
M. Crosbie: Soixante et un, plus les coûts initiaux de 5 millions, cela donne 66 millions.
Donc on a dit à Paxport: «D'accord, votre offre est acceptée. On vous pose beaucoup de conditions. L'une d'elles, c'est que vous réunissiez 61 millions de dollars de capitaux propres.» Très bien. C'est de bonne guerre.
Le sénateur Jessiman: Et la preuve...
M. Nelligan: Laissez-le terminer.
M. Crosbie: Alors voilà où nous en sommes.
Ensuite, ils s'adressent à Paxport pour lui demander: «Pouvez-vous nous donner..., je crois que c'est ce qu'ils lui ont demandé, pouvez-vous nous montrer que vous êtes en mesure de réunir cet argent?» Et Paxport a été incapable de montrer qu'elle pouvait réunir cette somme.
Le sénateur Jessiman: Vous savez que ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai.
M. Crosbie: Je crois que c'est vrai.
Le sénateur Jessiman: Je vous assure que d'après les témoignages que nous avons reçus, ce n'est pas vrai. Ce qui est arrivé, lorsqu'ils se sont réunis...
M. Crosbie: Eh bien, quelle preuve Paxport a-t-elle fournie qu'elle avait cet argent, qu'elle avait 66 millions de dollars?
Le sénateur Jessiman: Laissez-moi terminer, d'accord?
M. Crosbie: Bien sûr.
Le sénateur Jessiman: D'après les témoignages, quand on a annoncé, le 7 décembre, que Paxport avait fait la meilleure proposition globale, elle avait les 61 millions demandés. Je suis bien obligé d'y croire, parce qu'on nous l'a affirmé sous serment.
M. Crosbie: Dans ce cas je puis...
Le sénateur Jessiman: Un instant.
M. Crosbie: D'accord.
Le sénateur Jessiman: Ensuite, le 9 décembre, M. Matthews téléphone à M. Bronfman, à la suggestion de ce dernier, car M. Coughlin a affirmé qu'ils en avaient parlé pendant une ou deux semaines avant de se dire: «Ma foi, si nous perdons cela nous ne pouvons faire partie du marché.» M. Coughlin a aussi dit qu'il ne faisait aucun doute que si Paxport obtenait ce droit ainsi que le bail d'Air Canada, et que si son offre n'était pas seulement jugée la meilleure mais que Paxport remportait vraiment le marché, il ne faisait aucun doute, toujours selon les propos de Coughlin, qu'elle pouvait trouver le financement voulu. Coughlin se dit: «Nous ne pouvons pas prendre de risque. Il vaut mieux obtenir une partie seulement que de tout perdre.» Parce que s'ils s'étaient adressés aux membres de leur propre consortium ils auraient pu trouver l'argent nécessaire, ou s'ils étaient allés voir ailleurs, à l'extérieur... mais après s'être entendus, ce que Paxport a fait a été de prendre, pour commencer, la moitié des intérêts dans l'aérogare 3, et ils sont demeurés moitié-moitié jusqu'à ce que deux des parties se retirent, et vous savez pourquoi Wood Gundy l'a fait, parce que les dividendes n'étaient pas suffisants, puis une autre partie s'est retirée de sorte que les parts n'étaient plus de 50/50 mais plutôt de 63/32 ou 67, 68, comme vous dites, puisqu'à l'heure actuelle, la proportion est d'environ un tiers, deux tiers.
M. Crosbie: Je ne veux pas vous contredire, mais d'après mes entretiens avec les représentants de Transports Canada, j'ai eu l'impression qu'après cette annonce, conditionnelle à ce que Paxport puisse réunir le financement, on a demandé à Paxport la preuve qu'elle pouvait le faire, et celle-ci n'a pas été capable de montrer qu'elle pouvait trouver l'argent. Si bien que lorsqu'on a annoncé la conclusion de cette affaire, il n'y avait aucune assurance que Paxport possédait effectivement l'argent ou qu'elle était en mesure de réunir les capitaux, puisqu'elle n'avait pas été capable de leur en fournir la preuve. Je ne fais que vous rapporter ce que nous ont dit les responsables de Transports Canada.
Le sénateur LeBreton: Vous êtes-vous adressé à Paxport?
M. Nelligan: J'ai certaines questions, sénateur Jessiman, étant donné qu'il y a beaucoup de confusion quant aux faits et que nos témoins d'aujourd'hui n'ont pas eu, cela se comprend, accès à tous les renseignements qu'on nous a fournis. Par contre, ils ont évidemment obtenu de l'information qu'on nous a refusée.
Le sénateur LeBreton: Ils ont aussi...
M. Nelligan: S'il vous plaît. Mais nous avons vu des documents, j'ignore si vous les avez vus aussi, selon lesquels l'inquiétude exprimée en décembre au sujet du financement était attribuable à la crise de l'industrie aérienne, laquelle faisait craindre que les sommes nécessaires afin d'établir la capacité de financement du projet ne soient pas disponibles et que la proposition de Paxport ne puisse pas être lancée sur le marché, vu l'incertitude qui régnait dans l'ensemble de l'industrie aérienne. Avez-vous pu consulter les documents en question?
M. Nixon: Je ne les ai pas vus.
M. Nelligan: Saviez-vous, monsieur, que cela faisait partie des inquiétudes exprimées alors dans des notes confidentielles par M. Shortliffe et diverses autres personnes?
M. Crosbie: Non, nous n'avons pas eu accès à ces notes.
M. Nelligan: Par conséquent, puisque les recettes provenant d'Air Canada étaient l'une des principales raisons pour lesquelles il fallait emprunter sur les marchés financiers, le groupe Paxport a fait valoir l'impossibilité de négocier avec Air Canada un bail permanent d'une certaine durée et il a affirmé que tant que ce ne serait pas fait, il ne serait pas en mesure d'établir sa capacité de financement. Étiez-vous au courant du problème qui se présentait à l'époque?
M. Crosbie: Oui. Mes propos ne concernent pas tant la nature de la dette que la capacité de Paxport d'affirmer qu'elle était à même de réunir les capitaux propres. En général, avant de conclure une forme quelconque d'entente préliminaire, on s'assure que l'intéressé possède au moins les capitaux propres.
M. Nelligan: Eh bien, monsieur, voilà où réside, à mon avis, la confusion. Les témoignages entendus jusqu'ici ne laissent aucunement entendre que Paxport était incapable, au moment de faire sa proposition, de réunir les 61 millions et que l'expression «capacité de financement» concernait en tout point la volonté des marchés financiers de débloquer des crédits sur la foi de revenus anticipés.
Je crois comprendre que votre interprétation est différente et que, d'après vous, la capacité de financement s'appliquait à la capacité du promoteur de réunir les capitaux propres.
M. Crosbie: En effet, monsieur.
M. Nelligan: De sorte que si les documents révèlent quelque chose de différent, vos conclusions se fondent, elles, sur d'autres éléments que ceux que nous possédons.
M. Crosbie: Oui.
Le sénateur Bryden: En toute déférence envers vous, messieurs le président et le conseiller, nos documents ne vont pas tous dans le même sens et une foule d'éléments montrent qu'on s'inquiétait énormément de savoir où le groupe Matthews allait trouver ses 20 millions de dollars; où il allait prendre les 8 millions d'Ellis Don, puisque cette partie s'était désistée. Toutes ces craintes concernaient la somme initiale de 61 millions de dollars en capitaux propres.
En ce qui concerne Air Canada dont il était prévu que les coûts allaient tripler ou quadrupler, on s'inquiétait surtout de savoir, si cette mesure était acceptée, comment il serait possible de financer l'étape suivante et de réunir les capitaux voulus.
Le sénateur Jessiman: Ce n'est pas vrai.
Le sénateur Bryden: Ou s'il serait possible d'emprunter. Le ratio était fixé à 66, ou quelque chose comme ça, 61 p. 100 pour les capitaux propres et le reste sous forme d'emprunts.
Le sénateur LeBreton: Monsieur le président, nous parlons de décembre 1992.
Le sénateur Stewart: Puis-je poser une question?
Le sénateur LeBreton: Il s'agit de décembre 1992. Le 7 décembre, quand la proposition de Paxport a été qualifiée de meilleure proposition globale, qu'on l'appelle comme on voudra, aucun des témoignages que le comité a pu entendre n'a confirmé qu'à cette date, Paxport n'était pas en mesure de réunir les 61 millions de dollars. Paxport même, lors de son témoignage, a dit qu'elle l'était. Les affaires concernant Ellis Don et CIBC se sont produites beaucoup plus tard, et non...
Le sénateur Bryden: Rien ne prouve non plus qu'elle était en mesure de le faire, et quand on lui a demandé d'en fournir la preuve pour le 15 février, elle en a été incapable. Le délai a été prolongé...
Le sénateur LeBreton: Non.
Le sénateur Bryden: ...jusqu'en mars, et là encore, elle ne l'a pas pu.
Le sénateur LeBreton: Non, c'est faux.
M. Nelligan: La confusion réside, sénateurs, dans la question que voici: s'agissait-il de viabilité financière ou de capacité de financement? Voilà la distinction que je voulais faire, parce qu'il me semble que l'expression capacité de financement avait un sens très particulier pour MM. Stehelin, Shortliffe et divers autres. Vous pouvez fort bien discuter entre vous de viabilité financière. Mais la capacité de financement dont il est question dans le document original semble signifier, d'après ce que j'en déduis des témoignages, l'aptitude des marchés financiers à absorber ce financement, compte tenu de la conjoncture dans l'industrie.
L'autre aspect vous appartient. Je ne veux pas en discuter.
Le sénateur Stewart: Avant de passer à autre chose, monsieur le président, j'aimerais demander à notre conseiller d'expliquer l'une de ses observations.
La conjoncture dans l'industrie aérienne différait-elle, en décembre 1992, de celle qui existait quand on a lancé la demande de propositions et, dans l'affirmative, en quoi différait-elle? Vous avez choisi un moment particulier, et j'aimerais savoir si la conjoncture, si la mer, était alors plus agitée qu'au moment de la demande.
M. Nelligan: À ce que je sache, elle différait, mais je ne veux pas insister là-dessus. Je m'en tiens simplement à ce que disent les documents au sujet de décembre puisqu'il y est précisément question de cette période. Je ne veux pas aller au-delà; il faudrait vérifier les dossiers pour la suite. Mais d'après les témoignages de MM. Shortliffe et Stehelin, il y a une distinction à faire entre les deux points de vue.
M. Nixon: Monsieur le président, pourrais-je ajouter...
Le sénateur LeBreton: Excusez-moi, monsieur le conseiller, mais je voudrais apporter une précision. Je n'ai pas besoin de tout citer, mais cela figure à la page 91 de la proposition, dans le rapport d'évaluation, document qui porte le numéro 530655, et c'est à propos du financement. M. Nixon aurait dû se donner la peine de consulter M. Lane qui dit très clairement dans son rapport que l'auteur de la proposition B, c'est-à-dire Paxport, a mis au point un plan financier crédible et fort bien documenté qui semble offrir des capitaux propres suffisants et bien tenir compte du service de la dette. Je n'ai pas besoin de poursuivre, monsieur le conseiller. Je ne fais que vous signaler ce passage dont je vais vous remettre copie avec plaisir.
Le président: Monsieur Nixon, il y a environ une heure, M. Goudge a fait une observation très intéressante dans l'ordre de la politique gouvernementale qui est au coeur du problème. Il s'agit du contrat dont vous avez recommandé l'annulation. M. Broadbent a dit qu'il avait tout des Bronfman: conception, créativité et profondeur des goussets. Il y a eu collaboration, et peu importe ce qui a pu se produire antérieurement, que les hypothèses aient été faussées ou qu'elles soient discutables, telle est l'entente qui a été finalisée. C'est cet accord qui a été conclu le 7 octobre et qui devait être définitif.
Qu'avez-vous donc trouvé de défectueux dans l'accord outre ce à quoi vous avez fait allusion, soit à la page 6, l'entente d'aménagement, et cetera? Autrement dit, y a-t-il quoi que ce soit de mauvais dans l'accord liant l'entreprise à participation, autrement que les points qui vous ont semblé dignes d'intérêt?
M. Nixon: Monsieur président, votre question est tout à fait pertinente, et j'y ai répondu de façon détaillée dans les sections de mon rapport portant sur le bail foncier, l'entente d'aménagement et l'entente sur la gestion et l'exploitation, de même que par mes propos sur le mécanisme dont il a été abondamment question ici.
Les aspects que M. Goudge a bien voulu réviser à mon intention et que nous avons inclus dans le rapport sont ceux que je viens de mentionner. Les sénateurs voudraient peut-être les aborder chacun à tour de rôle.
Le sénateur LeBreton: Cela m'intéresse.
M. Nixon: Il me semble que lors des interventions de cet après-midi, nous en avons traité que ce soit de manière satisfaisante ou non. Je crois que nous avons abouti à des divergences d'opinion. Je veux parler des questions que le conseiller et M. Crosbie ont soulevées et que j'ai incluses dans mon rapport.
Le sénateur Stewart: Puis-je poser une question, monsieur le président?
Le président: L'entente d'aménagement...
Le sénateur Stewart: Puis-je vous demander, monsieur le président, le sens de votre question? Elle est sans doute claire mais je n'en suis pas tout à fait sûr. Vous semblez dire qu'étant donné ce qui a finalement été obtenu, le processus se trouve en rétrospective justifié; est-ce bien ce que vous vouliez dire?
Le président: Essayez-vous de me piéger en me faisant dire que la fin justifie les moyens?
Le sénateur Stewart: Non. Je n'en doute pas du tout. Mais il me semble que c'est là où vous vouliez en venir.
Le président: Je suis quelque peu étonné de l'accent que vous mettez sur les lacunes de Paxport, qu'elles soient réelles ou non. Il me semble que toutes ces craintes ont été dissipées, comme l'a mentionné M. Stehelin dans son rapport du 7 août, quand il a dit que tout avait été réglé. Il n'y avait rien d'autre en suspens. La question d'Air Canada avait été réglée. Celle d'Allders aussi. La capacité de financement avait été établie. Tout avait été résolu. Tous les documents étaient bien ficelés. L'échéance avait été fixée au 7 octobre dès le mois de juillet. Le gouvernement n'a pris aucune initiative entre le déclenchement et la tenue des élections. Tout était en ordre. Toutes les conditions avaient été remplies. Quelqu'un a demandé au premier ministre si elle était prête à rendre publics les documents placés en fiducie. Elle a répondu que oui. Et M. Nixon nous a donné sa réponse à lui: «Oui, mais», et comme il l'a dit très pertinemment au comité, «[...] vous devez toutefois examiner l'entente d'aménagement, le processus et...», quel est le troisième point, monsieur?
M. Nixon: Le bail foncier.
Le sénateur Bryden: Franchement, monsieur le président, j'ai peut-être dormi, mais est-ce que M. Nixon a vraiment dit: «Oui, tout cela a été effectué. C'était une bonne affaire.»? C'est ce que vous venez de dire, mais je ne pense pas que monsieur...
Le président: Non. J'ai dit que rien ne porte à croire que ce n'était pas une bonne affaire, car toutes les étapes avaient été franchies. Mais je reconnais que M. Nixon a encore des réserves, et je lui ai demandé de nous les exposer.
Le sénateur Bryden: Bien.
Le président: Des choses comme la capacité de financement de Mergeco, à propos de quoi le premier ministre a dit: «Si ma tante avait...». Je dois faire attention de ne pas me tromper.
Le sénateur LeBreton: «Si ma grand-mère avait eu des roues, je serais un autobus.»
Le président: Il ne s'agit pas de refaire l'histoire, sénateur, mais ces questions avaient été examinées et réglées. Tous les problèmes avaient été résolus. C'est un fait.
Le sénateur Bryden: Le coût a aussi son importance.
Le sénateur Stewart: Et les participants...
Le sénateur Jessiman: Deux cents millions de dollars de plus pour le gouvernement.
Le sénateur Stewart: ...sont venus nous dire qu'ils avaient fait du bon travail. Qu'on applaudisse!
Le sénateur LeBreton: Et trois personnes en 15 jours deviennent les grands experts d'une affaire que des centaines de personnes ont mis des mois à båtir. Je n'en reviens pas. Il faudrait...
Le sénateur Stewart: Vous savez, des milliers et des milliers de soldats ont combattu durant la guerre du côté nazi. Je suis sûr que s'ils avaient remporté la victoire, ils auraient dit que c'était une grande victoire et que le processus était légitime.
Le sénateur LeBreton: Comment pouvez-vous faire une pareille comparaison? Franchement.
Le président: Disons qu'il est 17 heures. Merci beaucoup, encore une fois, messieurs. Nous ajournons à demain matin, 8 heures.
La séance est levée.