Aller au contenu
SAFE

Sous-comité de la sécurité des transports

 

Délibérations du sous-comité de la
Sécurité des transports
du comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 4 - Témoignages pour la séance du matin


EDMONTON, le mardi 3 décembre 1996

Le sous-comité de la sécurité des transports du comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui à 9 h 27 pour étudier l'état de la sécurité des transports au Canada.

Le sénateur J. Michael Forrestall (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Puisqu'il y a quorum, la séance est ouverte, mesdames et messieurs. Nous poursuivons aujourd'hui la série d'audiences du sous-comité de la sécurité des transports du comité sénatorial permanent des transports et des communications. Nous sommes des profanes qui essayons de comprendre non seulement les problèmes auxquels l'industrie des transports est continuellement confrontée, mais également, ce qui est tout aussi important et peut-être même plus, quelle devait être notre orientation pour les 10 ou 15 prochaines années.

Nos premiers témoins d'aujourd'hui sont M. Ross Hogg, premier vice-président du Alberta Safety Council, ainsi que M. Mel Mottram, directeur des programmes.

Monsieur Hogg, vous avez la parole.

M. Ross Hogg, premier vice-président, Alberta Safety Council: Monsieur le président, j'aimerais dire tout d'abord que nous vous savons gré de nous avoir invités à comparaître ce matin.

Le Alberta Safety Council est un organisme sans but lucratif. Le Conseil est autonome, ce dont nous sommes très fiers, et ne reçoit aucune subvention du gouvernement au titre des frais d'exploitation. Le gouvernement finance certains programmes pour nous, mais il ne nous fournit aucune aide financière directe de façon régulière.

Notre objectif, de toute évidence, est de faire de l'Alberta un endroit sûr où vivre, travailler et jouer.

Notre organisme est dirigé par un conseil d'administration appuyé par un personnel de soutien rémunéré. Nous offrons une vaste gamme de programmes touchant tous les aspects de la sécurité, et notamment la sécurité dans les exploitations agricoles, à la maison et dans les entreprises. S'agissant des transports, nous offrons des cours de conduite défensive, des cours de perfectionnement du conducteur, ainsi que des cours de conduite de motocyclettes et de véhicules de plaisance. Nous offrons un programme intitulé «55 Alive», lequel porte sur la sécurité des conducteurs et des piétons du troisième âge.

Nous participons également à des consultations avec les fonctionnaires, les médias et le grand public sur des questions touchant la sécurité.

En ce qui concerne la sécurité routière, le conseil estime qu'il y a et qu'il y a eu de nombreux progrès sur le plan de la conception et de l'entretien des automobiles qui circulent sur notre réseau routier. C'est le chauffeur qui demeure le maillon faible, car il existe peu d'initiatives coordonnées et intégrées en vue d'améliorer les compétences de conduite.

La législation et la réglementation concernant la circulation routière varient d'une province à l'autre et dans les territoires. C'est surtout le cas des règlements portant sur les autocars et les gros camions utilisés à des fins commerciales. Par exemple, en 1990, toutes les provinces, ainsi que les territoires et le gouvernement fédéral ont adopté le Code national de sécurité, lequel n'est pourtant pas encore pleinement en vigueur dans tout le pays, et notamment pas dans notre province.

Les annonces publicitaires concernant les véhicules à moteur et leurs accessoires décrivent souvent des pratiques de conduite dangereuses, et mettent souvent l'accent sur la vitesse.

Bon nombre de conducteurs continuent de considérer la conduite comme une activité virile plutôt qu'un moyen de transport. Nous en avons eu un exemple flagrant il y a quelques jours, où après une énorme tempête de neige, bien des gens continuaient de croire que, comme par miracle, nos routes étaient sèches et que les voitures tenaient bien la route. À leur grand regret, ils ont pris conscience de la réalité sur le Whitemud Freeway qui a dû être totalement fermé à la circulation pendant cinq heures environ à la suite d'un carambolage en série.

Les gens refusent d'utiliser les techniques disponibles pour des raisons fausses. Par exemple, les radars photographiques, les caméras aux carrefours et les systèmes de ceinture-contact sont autant de moyens à notre disposition. Toutefois, leur utilisation est critiquée pour des raisons qui n'ont rien à voir avec la sécurité routière.

La question des sacs gonflables a fait les manchettes ces derniers jours. Il faut trouver une solution sans nuire à la sécurité routière. Entre-temps, il faut bien informer les propriétaires de véhicules dotés de sacs gonflables.

Les taux de collision entre véhicules continuent d'être beaucoup trop élevés. Cela représente une ponction considérable sur les budgets des services de santé et des programmes sociaux des provinces et du gouvernement fédéral. En fait, les gens ne connaissent pas toujours le coût énorme que les accidents de la route représentent pour l'ensemble de l'économie.

J'aimerais maintenant vous présenter certaines recommandations formulées par le conseil. Il est peu probable qu'on rende les cours de conduite obligatoires à l'heure actuelle. Toutefois, le conseil estime qu'une réduction d'impôt au titre des frais de cours de conduite subis par un particulier pour lui-même ou pour l'une des personnes à sa charge est une solution possible qui inciterait les gens à suivre volontairement des cours de conduite.

Transports Canada doit être un chef de file dans le domaine de la sécurité routière. Même si cette question est essentiellement du ressort des provinces, le gouvernement fédéral peut donner l'exemple dans ce domaine, avec l'appui d'organismes comme le Conseil canadien des administrateurs en transport motorisé, ou CCATM.

La mise en oeuvre des programmes et des campagnes au niveau local peut se faire grâce à des partenariats avec les conseils de la sécurité provinciaux. Ces ententes permettraient d'élaborer des programmes nationaux perfectionnés qui seraient mis en vigueur au niveau local. Cela permettrait de réaliser des économies considérables.

Le Conseil recommande qu'on accorde la priorité à des programmes proactifs visant à prévenir les collisions plutôt qu'aux programmes destinés à remédier aux conséquences d'une conduite imprudente. Par exemple, nous recommandons des programmes de cours de conduite automobile et l'octroi de permis par étapes progressives.

Il faudrait aider le CCATM à coordonner une étude de la législation et de la réglementation de la circulation routière, de façon à ce que les règles et les sanctions soient mieux adaptées. Par exemple, les règles visant le poids et les dimensions des véhicules, les conditions d'exploitation, les passages pour piétons et l'utilisation des voies multiples varient d'une province à l'autre. Cette étude pourrait nous permettre également de moderniser les lois et règlements en vigueur, tout en en réduisant le nombre.

Toutes les provinces et les territoires doivent mettre pleinement en vigueur le Code national de sécurité de façon uniforme. Par exemple, il faudrait achever le programme d'échange de dossiers interprovincial. La taille des véhicules en cause devrait être uniforme dans toutes les régions du pays. Il faudrait améliorer les vérifications des transporteurs interprovinciaux.

Il faut accorder à la sécurité routière la priorité qu'elle mérite. Les gouvernements doivent débloquer les ressources nécessaires et faire preuve de leadership. Il faut utiliser les techniques comme les radars photo et les caméras aux carrefours, non pas comme des sources de recettes, mais plutôt comme du matériel de soutien permettant de résoudre efficacement les problèmes cernés dans des domaines précis. Les corps policiers aux niveaux municipal, provincial et fédéral doivent accorder une plus haute priorité à l'application du code de la route et aux enquêtes sur les collisions, tout en offrant la formation voulue aux agents de police.

En conclusion, étant donné les souffrances indescriptibles et les pertes financières que les accidents de la route causent aux Canadiens, il est impératif de prendre des mesures en vue de réduire et même de prévenir totalement les collisions entre véhicules. Le moment est venu d'oublier les rivalités pour des questions de compétence et de ne plus se contenter de belles promesses pour résoudre le problème. Ce ne sont pas des accidents; ce sont des incidents qui sont prévisibles et évitables. La technologie est là. Tout ce qu'il faut, c'est un peu de bonne volonté et les ressources nécessaires.

On peut très bien réitérer pour la sécurité routière les progrès extraordinaires réalisés par les campagnes antitabac et «Participaction». Les accidents de la route coûtent à l'économie albertaine 10 millions de dollars par jour. Les souffrances humaines sont inestimables. Il faut se fixer et atteindre dès maintenant des objectifs précis.

Monsieur le président, merci encore de nous avoir invités à comparaître. Nous répondrons volontiers aux questions que les membres du comité ou vous-même voudront nous poser.

Le sénateur St. Germain: Merci beaucoup, messieurs, de votre présence. C'est une bonne chose de débuter nos délibérations par la comparution de votre organisme en Alberta. Il en existe un semblable en Colombie-Britannique. Il semble que les accidents dominent notre vie. On dirait que nous avons hâte de disparaître de ce monde. Il est encourageant de voir que des organismes comme le vôtre existent et font ce genre de travail.

Ma question découle de mon expérience antérieure d'agent de police. Un jour, j'attendais à l'aéroport dans mon petit camion rouge lorsque j'ai eu l'impression de sentir un feu de broussailles. Je me suis aperçu que c'était des gens qui fumaient de la marijuana. Je n'en revenais pas. Ce n'était pas la première fois. Lors de votre exposé, vous n'avez fait aucune allusion à la consommation de drogues et pourtant vous dites qu'il faut en arriver à supprimer les accidents.

M. Hogg: Ce n'est peut-être qu'un voeu.

Le sénateur St. Germain: Voici ma question: sur quoi met-on l'accent? Nous savons que lorsqu'un gars s'enivre au vin ou à la bière, il existe des moyens de déterminer son alcoolémie. Et pourtant, un grand nombre de gens dans notre pays consomment des drogues. Malgré toutes les techniques dont nous disposons, nous ne semblons pas en mesure de trouver un moyen d'effectuer des tests sur les gens qui conduisent de façon déconcertante. A-t-on fait des recherches dans ce domaine, à votre connaissance? Dans l'affirmative, où en est-on?

M. Hogg: Moi aussi, j'ai été agent de police et affecté pendant 24 ans à la patrouille routière. J'ai collaboré avec le laboratoire judiciaire de la GRC qui se penchait sur les cas de conduite avec facultés affaiblies par l'alcool et les drogues.

Comme vous le savez, il existe déjà les alcootests. Les tribunaux et les gens en général connaissent l'effet produit par la présence de 80 milligrammes d'alcool pour 100 millilitres de sang dans le système. Cela veut dire qu'on perd ses facultés et que l'on ne peut pas faire certaines choses.

En matière de drogues, le problème vient de ce qu'il en existe de nombreuses sortes différentes qui rendent les tests difficiles. En général, il faut faire une analyse de sang, ce qui signifie que la personne doit être emmenée dans une installation médicale pour la prise de sang. Cette procédure a de nombreuses ramifications sur le plan juridique. Le gros problème, c'est que personne n'a encore trouvé quelle quantité de drogue dans un volume de sang donné affaiblit les facultés. On parle de facultés affaiblies lorsqu'on a 80 milligrammes d'alcool dans 100 millilitres de sang. Du point de vue juridique, personne ne sait dans quelle mesure la présence de 5 milligrammes de hachisch dans le corps d'une personne de 100 livres nuit aux facultés de celle-ci.

Pour certaines drogues, il y a également le problème de la réaction résiduelle. Une personne peut voir à nouveau ses facultés affaiblies quelques heures, quelques jours, voire quelques semaines après avoir consommé la drogue.

Le président: Est-ce ce que l'on appelle les «flashback»?

M. Hogg: Oui, plus ou moins. Dans l'état actuel des choses, il est impossible d'appliquer aux drogues les mêmes campagnes qu'à l'alcool.

Le sénateur St. Germain: Prend-on des mesures pour évaluer cette question? Je vois des gens sur la route à Vancouver qui fument de la marijuana. Je me pose toujours la question dans ces cas-là. La plupart de ces personnes représentent un danger. Je pense qu'elles sont à l'origine de bon nombre d'accidents plus ou moins «étranges» en Colombie-Britannique. Je suis sûr qu'il en va de même ailleurs.

M. Mel Mottram, directeur des programmes, Alberta Aviation Council: Ce qui préoccupe le plus le Conseil à cet égard, c'est qu'à l'heure actuelle, on ne fait que réagir au problème. En fait, si nous découvrons une personne en train de fumer du hachisch, ou autre chose dans un véhicule, nous l'inculpons. Ce qu'il faudrait, c'est trouver une façon de l'appréhender avant qu'elle ne prenne le volant.

À l'heure actuelle, dans l'industrie pétrolière, que je connais bien, on fait des analyses de sang à toutes les personnes qui franchissent le portail. La politique suivie est la tolérance zéro. Il n'y a pas de limite fixée au taux d'alcool dans le sang; si l'on décèle la moindre présence d'alcool, la personne est licenciée. C'est la politique. Il y a également une politique qui interdit la drogue. Ces mesures sont prises parce que dans une raffinerie de pétrole, il y a beaucoup de matériel dangereux.

Quelle différence y a-t-il entre travailler dans ce secteur et conduire un véhicule de deux ou trois tonnes à des vitesses atteignant parfois 120 kilomètres à l'heure? Le plus simple serait d'appliquer strictement une politique de tolérance zéro. Le problème, c'est qu'il faut prendre des mesures proactives. Il faut provoquer un changement d'attitude. Nous devons encourager ce changement. Nous attrapons souvent les gens après coup. Ce que nous souhaitons faire, et nos efforts portent là-dessus, c'est trouver des façons d'intervenir avant que les choses en arrivent là. De votre point de vue également, c'est là-dessus que doivent porter nos efforts.

Le sénateur Bacon: À la page 2 de votre mémoire, faites-vous allusion à l'importance relative des questions pour la sécurité routière?

M. Hogg: Non.

Le sénateur Bacon: La question des sacs gonflables est importante. On en a beaucoup parlé. Avez-vous des recommandations à formuler au comité à ce sujet?

M. Mottram: Vous me mettez dans une situation très délicate, sénateur. Notre comité des transports se réunit la semaine prochaine et cette question est à l'ordre du jour. En conséquence, ce que je pourrais vous dire maintenant ne reflète pas nécessairement la position du conseil.

Le sénateur Bacon: Pouvez-vous nous donner une idée?

M. Mottram: Eh bien, tout d'abord, il faut offrir des options. Il doit être possible de débrancher les sacs gonflables. Le gros problème, pour bon nombre de propriétaires d'automobiles à l'heure actuelle, c'est que leur garantie n'est plus valable s'ils font débrancher le sac gonflable. En conséquence, les propriétaires ou les vendeurs d'automobiles ne les débranchent pas. S'ils le font, cela annule la garantie. Que faut-il faire, dans ces conditions? Il n'y a pas moyen de s'en sortir. Il nous faut une loi qui leur permette de le faire.

Il faut également mettre en oeuvre une énorme campagne de sensibilisation. Les gens ne comprennent pas qu'un enfant de moins de 12 ans ne doit pas s'asseoir sur le siège avant d'une voiture équipée d'un sac gonflable. Ils ne comprennent pas que lorsqu'un sac se gonfle sous l'effet d'un choc, cela se fait en une fraction de seconde. C'est comme une explosion. Si l'on pèse 110 livres, que l'on mesure environ 5 pieds 3 et que l'on est assis sur le siège avant, le sac fera plus de dégâts en se gonflant que n'en aurait fait une collision de plein fouet.

Le sac gonflable n'est pas mauvais en soi. Simplement, dans certaines circonstances, il peut être plus dangereux qu'une collision de plein fouet. Il faut trouver un mécanisme grâce auquel le conducteur du véhicule peut brancher et débrancher le dispositif. Voilà ce que nous pensons de la question.

M. Hogg: Il y avait un article sur les sacs gonflables dans le journal ce matin. Le problème est lié au risque de poursuites au civil. En effet, si je me trouve dans votre voiture dont le dispositif a été débranché, que nous avons un accident et que je suis blessé, c'est vous qui êtes responsable parce que vous l'avez débranché. En revanche, si nous entrons en collision et que le sac gonflable me blesse, puis-je intenter des poursuites contre vous parce que vous avez oublié de me prévenir que votre voiture était équipée de ce dispositif?

Il faudra du temps pour résoudre tous ces problèmes. Dans l'intervalle, il faut mettre au point un meilleur système et en équiper les véhicules actuellement dotés des sacs gonflables de piètre qualité.

Il faudrait insister davantage sur le fait qu'un sac gonflable à lui seul est un dispositif inutile. Il s'agit d'un mécanisme de protection supplémentaire qui doit être utilisé en même temps qu'une ceinture de sécurité diagonale.

Enfin, un enfant ou une personne de petite taille ne doit pas s'asseoir sur le siège avant d'une voiture équipée d'un sac gonflable si la distance entre le centre du volant et le milieu de sa poitrine est inférieure à six pouces.

Le sénateur Bacon: Nous savons que l'un des plus gros problèmes de sécurité, sur notre réseau routier, est dû aux énormes camions lourds dont les chauffeurs sont poussés jusqu'à des limites extrêmes pour livrer leurs marchandises. Avez-vous des suggestions à faire pour y remédier?

M. Hogg: Le problème des camions, c'est que dès qu'ils sont en cause dans un accident de la route, c'est généralement spectaculaire et souvent grave. Il y a des victimes ou des blessés. En outre, il y a tellement de pièces et d'équipement sur les camions que bien des choses peuvent mal fonctionner. Les camions ont beaucoup plus de pièces que les automobiles, par exemple, et le risque de panne est plus grand. Ils ont des systèmes de freins à air comprimé qui sont réglables.

Le Canada a adopté un Code national de sécurité qui régit le nombre d'heures que peuvent rouler les camionneurs. Je pense que cette règle est plus que généreuse. Je suis sûr que d'autres personnes seront mieux placées que moi pour vous en parler. Toutefois, à mon avis, la mise en oeuvre uniforme et totale du Code national de sécurité dans tout le pays permettrait aux chauffeurs de camion de connaître les règlements en vigueur lorsqu'ils passent d'une province à l'autre. En outre, les poids et les dimensions devraient être équilibrés pour que les camionneurs sachent qu'il est légal de transporter dans une autre province ce qu'ils transportent dans la leur.

Le Code national de sécurité prévoit des programmes d'entretien et d'inspection à intervalles réguliers. Il exige que des inspections au hasard soient effectuées par les forces de l'ordre par l'entremise de la Commercial Vehicle Safety Alliance.

Si toutes ces mesures étaient mises en vigueur comme il se doit, cela contribuerait fortement à réduire le nombre de collisions mettant en cause de gros camions. Toutefois, étant donné que les accidents de camions sont généralement spectaculaires -- et je ne cherche absolument pas à trouver une excuse à l'industrie du camionnage -- on insiste de façon exagérée sur cette industrie. Ce n'est pas là qu'il faut concentrer nos efforts. Tout d'abord, il n'y a pas énormément d'accidents de camions par rapport aux accidents de voitures. Par exemple, en Alberta, moins de 70 000 gros camions circulent sur nos routes, contre près de 2 millions d'automobiles particulières.

Nous faisons passer des examens assez minutieux aux camionneurs. On ne peut pas en dire autant des conducteurs automobiles. Pour ce qui est du nombre de collisions, de blessures et de décès, la voiture particulière est le plus souvent en cause.

Le sénateur Bacon: À votre avis, le gouvernement fédéral devrait-il donner l'exemple et imposer un Code de sécurité national uniforme dans tout le Canada?

M. Hogg: Étant donné la façon dont les choses sont organisées à l'heure actuelle, c'est aux provinces de le faire. Le gouvernement fédéral pourrait exercer des pressions auprès de celles-ci pour qu'elles agissent. Par exemple, lorsque le Code national de sécurité a été adopté, le fédéral a accordé des subventions à toutes les provinces pour le mettre en vigueur. Celles-ci ont accepté les fonds et les ont dépensés à d'autres fins.

Il était censé y avoir un échange de dossiers interprovincial, un système informatisé visant à informer la province voisine sur le comportement de ses conducteurs à l'extérieur de chez eux. Ce projet n'est pas encore terminé. Cela fait huit ou neuf ans qu'il est en cours d'élaboration. Le système est en vigueur dans certaines provinces, mais pas dans d'autres. Certaines provinces continuent de transmettre de l'information par la poste, tandis que d'autres ne prennent même pas cette peine.

Voilà le genre de mesures qui permettraient de résoudre le problème lié au transport commercial aussi bien qu'au véhicule particulier.

Le sénateur Adams: En général, dans les localités de ma région, les agents de la police municipale et ceux de la GRC se chargent de faire respecter la loi. Je ne savais pas qu'il existait un code national. Je ne l'ai jamais vu. Il y a 20 ans que je suis sénateur et personne ne m'a jamais expliqué comment utiliser le code national. La seule fois où je pourrais le voir, c'est si j'achète un bateau et qu'il y a une étiquette sur les règles de transport attachée au bateau. Il y est indiqué le nombre de personnes que l'on peut transporter et la puissance maximum du moteur à utiliser dans ce bateau. C'est tout ce que je sais de la sécurité dans ce domaine. S'il est dit que le bateau ne peut être équipé que d'un 15 chevaux, je n'y mettrais pas un moteur de 20 chevaux.

Là où j'habite dans les territoires, si l'on est chasseur, personne ne peut vous apprendre de force à survivre sur la terre. Il en va de même pour l'eau. La plupart du temps, personne ne fait respecter l'exigence relative aux gilets de sauvetage. Dans le village, un gars peut emmener cinq ou six personnes en bateau sans transporter de gilets de sauvetage.

C'est un peu la même chose que les exemples dont vous parlez relativement au transport routier, aux gens qui fument, et cetera. Il existe des règlements qui s'appliquent aux chauffeurs de gros semi-remorques, mais aucun règlement ne vise le gars qui conduit sa voiture sur la route, même s'il a enfreint la loi.

J'aimerais que l'on adopte des mesures à l'échelle nationale. Même si le gouvernement dit aux représentants élus d'adopter leurs propres règlements dans leur ville et leur collectivité, il est impossible de trouver des gens pour faire respecter ces lois. Il en va de même pour les bateaux de plaisance. Parfois, je vais dans un chalet au bord d'un lac où les gens font du ski nautique, de la natation et de la pêche. Le pilote du bateau fait du 40 ou 50 milles à l'heure tout en tirant un skieur. Un de ces jours, quelqu'un va se faire frapper. Les agents de la Police provinciale de l'Ontario devraient peut-être se rendre dans ces endroits une fois par mois pour faire appliquer la loi à l'égard des personnes qui conduisent leur bateau en état d'ébriété, et autres. Cela ne se fait pas tous les jours.

Je me demande comment on peut apprendre la sécurité aux gens. Même s'il existe un code national, tout le monde n'en connaît pas le contenu. Peut-être que seuls les agents de police le connaissent. Il faudrait donner aux représentants élus dans la collectivité les moyens de faire respecter la loi.

M. Hogg: Je suis d'accord avec vous, sénateur. Moi aussi, je pense que l'application de la loi est une bonne idée. Cela marchait à mon époque, mais il ne peut pas y avoir un policier à chaque coin de rue. Malheureusement, s'il nous faut engager des policiers, cela fait augmenter nos dépenses à tel point que nous ne sommes plus concurrentiels. Cela coûte cher, un policier à plein temps. Cela coûte beaucoup moins cher d'avoir recours aux radars photographiques ou aux caméras aux carrefours, ou encore d'installer des systèmes de ceinture-contact dans les voitures.

Il existe des normes nationales visant tous les aspects de la conduite. Par exemple, si l'on détient un permis de catégorie 5 pour conduire une simple voiture en Alberta, ce permis est valable dans toutes les autres provinces. Pour l'obtenir, il faut faire la même chose dans toutes les provinces. En fait, ce système est valable pour tous les permis jusqu'à ceux de la catégorie 1, qui permettent de conduire de gros camions.

Pour obtenir un permis de la catégorie 1, il faut passer une épreuve sur un camion à trois essieux, c'est-à-dire un essieu avant directeur, un essieu arrière motodirecteur, un pivot d'attelage et une remorque avec un autre essieu. Dans notre province, une fois que l'on a passé son examen de conduite sur un camion à trois essieux, on peut prendre la route et conduire un camion Super-B à 11 ou 12 essieux et à trois points d'attelage. Cela pèse beaucoup plus qu'un camion à trois essieux. Ce genre de camion peut transporter des marchandises et des liquides dangereux tandis que le camion à trois essieux aurait pu servir au transport de boîtes. Il faut adopter des règles un peu plus strictes dans ce domaine.

Les normes d'inspection sont les mêmes dans toutes les provinces, mais elles sont appliquées de façon différente. Une infraction jugée grave dans une province ne l'est pas dans une autre. Un policier de notre province pourrait dire à un camionneur: «Faites réparer la pièce, allez et ne péchez plus». Toutefois, lorsque ce chauffeur se rend en Saskatchewan, il risque d'écoper d'une amende de 100 $ parce que son semi-remorque n'est plus conforme aux normes en vigueur dans cette province.

Il existe des normes nationales. Elles ne sont pas mises en vigueur de la même façon dans tout le pays, ce qui est injuste pour les camionneurs. En outre, cela sème la confusion dans l'esprit des gens.

Nous nous heurtons à un autre problème dans notre province: nous construisons des postes d'inspection le long de nos grand-routes et nous construisons ensuite des routes qui les contournent de sorte que les gens ne sont pas obligés de s'arrêter.

Le sénateur Adams: Avant notre départ d'Ottawa, nous avons appris certaines choses au sujet des semi-remorques. Les États-Unis et le Canada appliquent apparemment des règlements différents. Vous faites respecter ces règlements depuis plus de 25 ans sur les routes. Vous devez bien connaître certains camionneurs. Ces derniers peuvent conduire jusqu'à 13 heures sans interruption. Aux États-Unis, la limite est de 10 heures.

Au Canada, le poids d'un semi-remorque peut aller jusqu'à 130 000 livres, contre seulement 80 000 livres aux États-Unis. Cette différence de réglementation est peut-être due au fait que notre population est plus faible ou que chez nous la distance à parcourir pour arriver à destination est plus longue.

M. Hogg: C'est un des problèmes qui se posaient lorsqu'on a élaboré ces règlements. Pour vous citer un exemple simple, il faut 13 heures pour se rendre de Calgary à Vancouver par la route en conduisant prudemment. Allez-vous demander à ce camionneur de s'arrêter à l'entrée du canyon Fraser et de dormir pendant huit heures avant de se rendre à Vancouver? Vous pourriez lui demander de le faire. Toutefois, il est peu probable qu'il le fasse.

Les normes américaines ont été élaborées dans les années trente. Les responsables américains, de concert avec leurs homologues canadiens, effectuent actuellement des essais pour déterminer pendant combien de temps d'affilée un chauffeur peut conduire sans danger. Ces essais sont actuellement en cours. Aux États-Unis, on avait choisi une durée de 10 heures car cela semblait adéquat dans les années trente. Cette norme n'a jamais changé.

La situation pour les poids lourds au Canada n'est pas la même qu'aux États-Unis. Nous avons un avantage par rapport aux Américains dans la mesure où nos routes sont gelées pendant environ cinq mois par an. En conséquence, peu importe les charges transportées sur ces routes: lorsqu'elles sont complètement gelées, elles peuvent supporter un poids inimaginable. De toute façon, au départ, nous pensons que nos routes sont mieux construites que les leurs.

Le sénateur Adams: La plupart des sociétés de camionnage appliquent leurs propres règlements. Si je suis propriétaire d'un petit motel et que je commande toutes mes fournitures de Winnipeg, il faut évidemment qu'elles me parviennent à une heure précise. S'il fait mauvais temps et que l'avion ne peut pas se poser, mes denrées alimentaires n'arriveront pas à temps. Un camionneur pourrait être retardé pendant une demi-heure ou une heure et la société devra alors payer une pénalité. Les pénalités à payer en cas de retard coûtent plus cher à la société de camionnage qu'un accident de la route. Le chauffeur est très fatigué, et pourtant il se dit qu'il doit absolument parvenir à destination. Nous avons entendu certains témoins à Ottawa nous dire: «Peu m'importe si la police m'arrête. Si je n'arrive pas à l'heure, la société devra payer une amende à cause de mon retard.» Qu'en pensez-vous? Les sociétés de camionnage peuvent-elles appliquer leurs propres règlements?

M. Hogg: Oui, et certaines d'entre elles le font malheureusement. Elles disent à leurs chauffeurs qu'ils doivent absolument livrer leur cargaison et que s'ils refusent de le faire, quelqu'un d'autre le fera à leur place. Il faut éduquer l'industrie du camionnage et les expéditeurs et leur faire comprendre qu'il existe des règlements qui visent à protéger le grand public. Il faut leur faire comprendre qu'ils ne peuvent pas passer outre à ces règlements tout simplement parce qu'ils doivent livrer leurs boîtes de céréales à destination cinq minutes avant leurs concurrents. Lorsqu'on transporte des fruits frais en provenance de la Californie ou du Texas, c'est une autre affaire. Ce sont des denrées périssables. Il faut que la cargaison soit acheminée.

Il faut trouver des façons d'expliquer aux camionneurs pourquoi nous agissons ainsi. Ce n'est pas dans le simple but d'entraver le commerce. Si nous réglementons le camionnage, c'est bien dans le but d'acheminer les marchandises et de faciliter le transport, pour livrer aux gens les produits dont ils ont besoin. La American Trucking Association affirme que sans camions, l'Amérique cesserait de respirer. Il en va de même dans notre pays. «Si une chose est livrée à temps, c'est qu'elle a été transpostée par camion.» Voilà le genre de slogans que l'on entend, et ils sont vrais. Il faut faire en sorte qu'ils continuent de l'être, mais sans toutefois prendre de risques. Nous n'en sommes pas encore là.

Le président: Comment votre organisme est-il financé?

M. Mottram: Notre financement vient essentiellement des cours que nous offrons. En outre, nous assurons également la formation des instructeurs. Nous vendons aussi le matériel pédagogique utilisé pour ces cours. Voilà nos principales sources de financement. Comme nous l'avons dit plus tôt, ces cours portent sur un grand nombre de secteurs, y compris la sécurité routière.

Le président: Vous avez dit que les accidents de la route coûtent aux Albertains près de 10 millions de dollars par jour.

M. Hogg: C'est exact.

Le président: Pourriez-vous nous donner une ventilation de ce montant? Par exemple, combien correspond aux assurances, et cetera?

M. Hogg: Le montant de 10 millions de dollars par jour est une estimation faite par la Alberta Motor Association. C'est ce que cela coûte à l'ensemble de l'économie, compte tenu du coût du recyclage, de la perte de productivité et d'autres choses du même genre. Toutefois, pour ce qui est des coûts réels, c'est-à-dire les dégâts subis par les véhicules, les soins accordés aux blessés, les mesures prises à l'égard des victimes de la route, le recours aux forces policières, les services d'ambulance, d'incendie et de dépannage, ils représentent près d'un tiers de ce montant, soit 3,5 millions de dollars par jour.

Le président: C'est énorme.

M. Hogg: Oui, en effet. Chaque année, certaines personnes deviennent paraplégiques à la suite d'un accident de voiture. C'est un handicap irréversible. La première année de traitement d'un paraplégique coûte à la province 1 million de dollars.

M. Mottram: La police de Calgary a fait l'an dernier une étude approfondie qui a révélé qu'un simple accrochage coûte en moyenne 6 000 $. Inutile d'être un génie pour savoir que chaque jour, un grand nombre de collisions ont lieu. Si nous multiplions le nombre d'accrochages par 6 000 $, cela représente une dépense assez considérable. Ce montant n'inclut pas les pertes humaines, mais il s'agit simplement des collisions.

M. Hogg: En Alberta, il y a chaque année environ 75 000 collisions avec dégâts matériels uniquement.

Le sénateur St. Germain: La tolérance zéro est-elle possible?

M. Hogg: Non, pas grâce à la technologie actuelle. Il existe une marge d'erreur dans le matériel d'analyse. Par exemple, vous pouvez souffler dans un alcootest et ce dernier peut indiquer zéro, ce qui signifie que vous êtes parfaitement lucide. Toutefois, vous pourriez très bien avoir jusqu'à 10 ou 12 milligrammes d'alcool dans le sang.

Le président: Cela varie sans doute en fonction du moment où l'on a consommé de l'alcool. Si l'on prend le volant tout de suite après avoir bu un verre, et que l'on de fait arrêter au coin de la route, l'alcoolémie serait sans doute de zéro.

M. Hogg: C'est exact.

Le président: Cela prend un certain temps pour passer dans le sang.

Le président: Votre organisme s'est-il sérieusement penché sur le fait que, à l'occasion, l'état de la route est la cause des accidents, surtout au printemps, lorsque les routes sont défoncées à cause des soulèvements dus au gel et des accotements non stabilisés? Parfois, il suffirait de deux pieds de plus dans la largeur de la route pour éviter un accident.

M. Hogg: Non, nous n'avons pas examiné la question.

Le président: Vous avez parlé de certaines publicités horribles pour les automobiles qui mettent l'accent sur la grande vitesse que celles-ci peuvent atteindre. Ces annonces font également état de ce que je considère comme une conduite dangereuse. Appliquez-vous un programme actif pour lutter contre ce genre de choses? Je pense que cela a un effet de suggestion néfaste sur les jeunes.

M. Hogg: Oui, il existe un conseil fédéral de la publicité dirigé par les agences publicitaires elles-mêmes, et qui s'efforce de faire respecter les règlements qu'il adopte. Le CCATM a pris position à ce sujet et a communiqué avec les trois principaux fabricants d'automobiles ainsi qu'avec l'association des fabricants étrangers au Canada. De toute évidence, ses efforts ont été vains. Il y a eu quelque progrès, mais ils refusent encore d'afficher des avertissements indiquant: «À ne pas essayer chez soi.»

Le président: Enfin, je voulais parler de la question de la presse. Est-elle généralement sensible à toute cette question dans notre pays à l'heure actuelle? Les journalistes sont-ils sensibles aux risques liés à la sécurité des transports? Nous viennent-ils en aide? Vous avez fait plusieurs remarques aujourd'hui susceptibles d'attirer leur attention. Les journaux ont une responsabilité sociale à assumer, et c'est un rôle très important étant donné son côté éducatif.

M. Mottram: J'aimerais répondre à cette question, monsieur le président, car c'est moi qui finis par répondre au pied levé aux questions des journalistes. Ces derniers sont très réceptifs et efficaces. Si vous leur dites qu'il existe un problème, ils viennent vous voir ou écrivent un article à votre sujet. Certaines stations locales de télévision ont fait la même chose.

Dans notre province, il est légal de monter à l'arrière d'une camionnette. Dernièrement, un adolescent s'est fait tuer après avoir éjecté. Les journalistes sont venus nous voir, ainsi que d'autres personnes, pour en discuter. Ils ont fait un reportage très complet qui a été diffusé par la chaîne de télévision locale.

Je n'ai jamais eu le moindre problème avec les journalistes auxquels j'ai eu affaire ces deux dernières années.

Le sénateur St. Germain: Dans l'industrie aérienne, que je connais bien, la tolérance est de zéro. Piloter un avion ou conduire une voiture, c'est un privilège qui nous est accordé. Si j'enfreins l'un des règlements du ministère des Transports, je dois le signaler. Il est possible que je n'obtienne pas d'assurance. Sans assurance, je ne peux pas piloter. Dès qu'une personne ne peut plus être assurée, le monde entier s'attaque aux compagnies d'assurance.

Avez-vous jamais envisagé d'adopter un programme visant à soutenir les compagnies d'assurances, au lieu d'en arriver aux mesures envisagées dans ma province, à savoir adopter le principe de l'assurance sans égard à la faute, ce qui est tout à fait insensé à mon avis?

Il n'en demeure pas moins que l'on ne peut pas empêcher ce genre de choses sans remettre en cause le privilège du conducteur. Si l'on remet en cause le droit de conduire en raison des accidents et des infractions aux règlements, les gens vont rentrer très vite dans le droit chemin.

Je connais un jeune homme qui vaut des centaines de millions de dollars. Il possède une grosse entreprise. Son permis de conduire a été suspendu. Avant d'en arriver là, il avait eu je ne sais combien de contraventions pour excès de vitesse. Des organismes comme le vôtre disent tous qu'il faut rendre son permis de conduire à Charlie parce qu'il doit aller travailler. Si Charlie devait marcher pour se rendre au travail, se faire emmener par quelqu'un ou faire de l'auto-stop, il comprendrait peut-être que conduire est un privilège. Si vous n'êtes pas disposé à appuyer ce genre d'initiative, alors je ne pense pas que vous soyez prêts à prendre les mesures qui s'imposent pour résoudre les problèmes.

M. Mottram: Nous jouissons du privilège, et j'utilise ce terme en toute connaissance de cause, de prendre des mesures à l'égard des récidivistes. C'est précisément ce dont vous parlez.

Je suis parfaitement d'accord avec vous, sénateur, tout comme le Conseil. En ce moment même, près de 75 000 conducteurs ont perdu leur permis en Alberta. Il y a un roulement. Certaines personnes le récupèrent et d'autres le perdent. Cela représente 8 p. 100 de l'ensemble des conducteurs de l'Alberta. Il y en a aussi 15 p. 100 qui ont perdu de 12 à 14 points sur leur permis. Quant aux 77 p. 100 restants, ils n'ont commis aucune infraction.

Pour les 8 p. 100 de conducteurs qui perdent leur permis, le nombre moyen de suspensions est de six environ. Au cours d'une période de 13 ans, dans la clinique de la circulation routière que nous dirigeons, j'ai vu des gens qui avaient eu jusqu'à 28 suspensions de permis. L'infraction la plus courante, dans ces 28 cas, était d'avoir conduit sans permis. Tant qu'on ne modifiera pas la loi en vue de punir beaucoup plus sévèrement ceux qui conduisent sans assurance, le problème subsistera. Si une personne conduit pendant qu'elle est sous le coup d'une suspension de permis, du point de vue technique, cette personne est encore assurée.

Le sénateur St. Germain: Si vous vous faites prendre en train de commettre un acte illégal pendant une partie de chasse, on peut saisir votre voiture. On peut également saisir votre avion ou votre hélicoptère. Pourquoi ne saisissez-vous pas les véhicules dans ces cas-là?

M. Mottram: Nous le faisons. Plus de 300 véhicules sont saisis chaque mois dans toute l'Alberta.

Le sénateur St. Germain: Eh bien, vendez-les, comme cela se fait en cas de violations des règlements de chasse.

M. Mottram: Le Traffic Safety Board, soit le comité de la sécurité routière de la province, s'est réuni pendant l'été. Il y a un certain nombre de sous-comités qui se penchent sur l'application des règlements et la normalisation et qui examinent précisément les questions dont nous parlons. Ce sont les recommandations exactes qui ont été formulées par ce comité. Quant à savoir où en sont les choses, je n'en sais rien, car cela n'est pas de mon ressort.

M. Hogg: Le problème est dû aux nombres en cause, monsieur. Il y a en Alberta 14 services de police qui comptent près de 300 agents à plein temps. Il y a 75 000 conducteurs dont le permis a été suspendu. Il serait naïf de ma part de vous dire qu'aucun d'entre eux ne conduit malgré la suspension. Bon nombre d'entre eux conduisent quand même. Le problème, c'est que nous les prenons après coup. Ils ont déjà commis l'infraction. Ils ont déjà conduit avec des facultés affaiblies. Ils ont perdu 15 points sur leur permis, ou autre, ce qui a entraîné une suspension de permis.

Il faut prendre ces personnes avant qu'elles n'en arrivent là et leur faire comprendre qu'elles ne peuvent pas continuer de conduire de cette façon. C'est inadmissible du point de vue social. Il y a bien d'autres personnes qui habitaient auparavant dans notre province, qui n'ont jamais eu de suspension de permis parce qu'elles conduisaient mal et qui y ont laissé la vie.

Le président: C'est une excellente remarque sur laquelle conclure. Je tiens à vous remercier de votre témoignage. Vous nous avez donné matière à réflexion. Je suis sûr que nous réfléchirons à vos observations. Vous faites de toute évidence un excellent travail. J'espère que vous continuerez dans cette voie.

Le président: Notre témoin suivant est Bob Lamoureux, de l'Alberta Aviation Council.

M. Bob Lamoureux, président, Alberta Aviation Council: Monsieur le président, j'occupe à titre bénévole le poste non rémunéré de président du Conseil. Je suis élu pour un mandat d'un an.

Le Alberta Aviation Council est un organisme autonome.

Le président: Êtes-vous un professionnel de l'aviation?

M. Lamoureux: Oui. J'exploite une société de vols nolisés à l'aéroport municipal d'Edmonton. La plupart de nos membres sont des représentants des services d'entretien et des opérations, c'est-à-dire des employés de Transports Canada auxquels nous offrons des postes honoraires. Nous comptons également parmi nos membres des représentants du Northern Alberta Institute of Technology et du Southern Alberta Institute of Technology où les ingénieurs-mécaniciens avion reçoivent leur formation.

Comme je l'ai dit, à l'heure actuelle, nous nous autofinançons. Avant, nous obtenions du financement ou de l'aide du gouvernement provincial. Néanmoins, à cause des coupures, nous avons dû nous financer nous-mêmes. À certains égards, c'est une bonne chose. Cela nous permet de parler de certaines questions dont nous hésitions à parler avant, car il était difficile de dire du mal du gouvernement qui nous donnait notre argent.

Nous sommes maintenant un peu plus autonomes. Si nous constatons un problème, nous le dénonçons.

Je suis dans le secteur de l'aviation depuis 18 ans. Le premier sujet que je voudrais aborder est l'effet de la déréglementation sur la sécurité dans l'aviation. En général, je n'ai pas constaté de grosses lacunes sur ce plan. L'aviation est assez différente du camionnage, en ce sens que l'accès à la profession est très limité. Nous connaissons pratiquement tous ceux qui y travaillent. Vous constaterez sans doute que les pilotes sont des gens très raisonnables.

Les nouveaux transporteurs qui se sont établis sur le marché font un excellent travail. Je veux parler de Westjet et Greyhound. Ils ont du personnel expérimenté qui est venu d'autres compagnies. Ce n'est pas comme s'ils réinventaient la roue. Bien entendu, ils ont beaucoup de nouveaux employés et quelques idées nouvelles. Ils ont aussi certaines techniques d'exploitation très nouvelles.

Le président: Mais ils sont nouveaux dans ce secteur.

M. Lamoureux: Oui. Ils ont un certain apprentissage à faire, comme tout le monde. Vous avez beau faire une bonne planification, il y a toujours des problèmes. Je ne sais pas s'il y aura de graves problèmes dans leur cas. Transports Canada a surveillé ces compagnies de près. Le ministère leur a également donné beaucoup d'aide pour mettre leurs systèmes en place et les exploiter en toute sécurité.

Ils se servent de vieux appareils, ce qui inquiète certaines personnes. En ce qui me concerne, cela ne m'inquiète pas. S'il est bien entretenu, un vieil avion peut voler tout aussi bien qu'un neuf, même s'il n'est peut-être pas aussi économique sur le plan de la consommation de carburant, et cetera, et s'il n'est peut-être pas aussi rapide. Jusqu'ici, nous n'avons pas constaté de sérieux problèmes sur le plan de la sécurité.

Je sais que Westjet a eu un petit problème. Je ne suis pas certain qu'il était nécessaire de fermer la compagnie pour cela. Je sais toutefois que la question se pose toujours. On a constaté un problème du côté de l'âge des pièces. Cela ne posait pas véritablement de problème de sécurité, mais la compagnie a eu de la difficulté à dater les différentes pièces des cellules. Cette lacune est, je crois, attribuable au vendeur, qui était une autre grande compagnie aérienne du pays. Ce n'est donc pas un problème isolé.

D'autre part, il y a un problème du côté des pilotes. Ces dernières années, les grandes compagnies aériennes ont fait très peu d'embauche. Avec la déréglementation, on doit recruter un bon nombre de nouveaux pilotes pour piloter de gros avions, si bien que l'effectif disponible se rétrécit de plus en plus. Ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose compte tenu des techniques de formation modernes dont nous disposons. Grâce aux simulateurs, il est maintenant possible de dispenser une formation beaucoup plus efficace qu'avant. L'expérience des pilotes qui ont dû faire face à des situations d'urgence n'est donc plus aussi nécessaire. À peu près n'importe quelle urgence peut être reproduite grâce aux simulateurs électroniques. Certains simulateurs modernes permettent même de vous faire subir les examens pour les différentes classes de permis sans que vous n'ayez à monter à bord d'un avion.

Le seul aspect qui pourrait être inquiétant est que les ressources humaines sont exploitées au maximum. On cherche à tirer des gens tout ce qu'ils peuvent donner. D'un autre côté, les compagnies établies de longue date ont une direction trop lourde et c'est sans doute pourquoi les nouveaux arrivants ont pu se tailler une place. Avec le temps, ces derniers vont sans doute embaucher plus de personnel, tandis que les vieilles compagnies réduiront le leur. Dans dix ans, tout le monde se retrouvera probablement à peu près au même niveau.

Les compagnies aériennes du Canada ont l'une des meilleures performances au monde sur le plan de la sécurité, surtout pour la classe 1. Je ne crois pas qu'un seul autre pays ait eu d'aussi bons résultats. Tout le monde en est fier. Même les nouvelles compagnies font de gros efforts pour maintenir cette norme. Je ne pense donc pas que nous aurons un grave problème du côté des gros transporteurs aériens comme cela a été le cas aux États-Unis.

Les compressions gouvernementales ont un effet sur la sécurité. Cet effet a été limité jusqu'ici. Toutefois, une chose qui nous fait peur est qu'on parle de réduire d'environ 75 p. 100 le personnel de Transports Canada. On dit que le ministère deviendra davantage un organisme de surveillance qu'un centre de ressources. Si vous vous contentez de faire la police, vous incitez les gens à cacher leurs erreurs. S'ils constatent un problème au sein de leur organisation, ils tenteront de le camoufler pour ne pas se voir imposer d'amende. C'est ce qu'ils feront au lieu de dire: «J'ai un problème, comment puis-je le régler?»

Nous ne voulons pas de cela. C'est ce qui se passait il y a une dizaine d'années. Néanmoins, ces dernières années, Transports Canada a davantage cherché à aider les gens à résoudre leurs difficultés qu'à leur imposer des amendes et à les obliger à fermer leurs portes. Les gens font des erreurs. Ils ont des problèmes. Certains essaient délibérément de contourner les règlements.

Je ne veux pas que le nouveau rôle de Transports Canada consiste d'abord à vous imposer une amende et ensuite à fermer vos portes. Si cela arrivait, vous n'y retourneriez pas une deuxième fois. Pour une question de sécurité, si vous voulez que les gens améliorent leurs opérations et profitent de l'expérience et des connaissances disponibles à Transports Canada, il faut que le ministère soit plus accessible.

Les compressions qui touchent les stations d'information de vol et le Service de l'environnement atmosphérique me causent également de sérieuses inquiétudes. Il est question de fusionner les stations d'information de vol dans certains centres du pays. Edmonton, par exemple, aurait un centre qui couvrirait tous les Territoires du Nord-Ouest et la majeure partie du nord de l'Alberta. Si vous êtes à Inuvik, vous parlerez à quelqu'un qui sera ici, à Edmonton, par exemple.

J'estime qu'il faut avoir des observateurs atmosphériques humains dans les aéroports. Dans le Nord, la communauté a parfois offert l'assistance d'observateurs, mais ils ne sont là que huit heures par jour. Un autre problème, dans le Nord, c'est que nous comptons sur les avions Med-Evac pour aller chercher les gens. Il est difficile d'obtenir des rapports météorologiques décents la nuit. Il y a eu là-bas de graves accidents parce que le rapport météo était trop vague. Vous volez aux limites de la sécurité. Vos réserves en carburant ne vous laissent pas beaucoup le choix une fois que vous avez quitté Yellowknife en direction de Hull Beach.

Le président: Vous pensez que l'AWOS n'est pas assez perfectionné?

M. Lamoureux: Non, loin de là. Le système AWOS vous donne seulement les conditions météorologiques juste au-dessus de l'aéroport. Tout le monde sait, par exemple, qu'il peut y avoir un orage au-dessus de l'aéroport et un ciel clair ailleurs. L'AWOS nous a posé un tas de problèmes à l'aéroport municipal. Il a été complété par une observation humaine qui donne d'excellents résultats. C'est une chose qui peut se faire au niveau local sans coûter très cher.

Les inspecteurs de Transports Canada vont visiter les diverses compagnies pour vérifier la sécurité en procédant à des inspections. Ils inspectent les opérations et l'entretien. Ils ont été plus efficaces ces dernières années. Ils se sont montrés plus coopératifs en vous faisant de bonnes suggestions pour améliorer les choses. Même si vous respectez les règles de sécurité, ils voient parfois des améliorations à apporter. À cause des compressions, j'ai bien peur que leur visite ne devienne plutôt une opération policière et qu'ils n'auront pas le temps de travailler avec vous.

À long terme, cela va compromettre la sécurité, surtout avec la déréglementation et le fait que les nouvelles compagnies sont administrées par des gens moins expérimentés. Ces personnes n'ont pas autant de connaissances que certaines compagnies bien établies. Elles n'ont personne à qui s'adresser pour demander conseil. C'est là que les gens expérimentés embauchés par Transports Canada pourraient venir en aide aux nouvelles compagnies, en particulier.

Les gens qui travaillent dans le Nord veulent tous en sortir. Personne n'a envie de piloter dans le Nord jusqu'à la fin de ses jours. Les pilotes qui travaillent dans ces régions isolées sont donc moins expérimentés. Ce sont ceux qui ont le plus besoin d'aide. Il n'y a pas de bureau de Transports Canada en ville. Les pilotes sont livrés à eux-mêmes. Ils prennent un tas de décisions en comptant seulement sur la chance. Heureusement, les problèmes de sécurité n'ont pas réellement augmenté dans le Nord. Je crains toutefois qu'avec le temps la situation ne s'aggrave.

Je suis membre du groupe de travail SATOPS qui va commencer à sillonner le pays en janvier. Il étudie les services de taxis aériens qui transportent neuf passagers ou moins. Il y a eu une importante augmentation du nombre d'accidents impliquant des avions transportant de deux à six passagers. Malheureusement ce sont les appareils qui sont généralement confiés aux pilotes inexpérimentés et surtout des monomoteurs. Soixante-dix p. 100 des accidents de cette catégorie impliquent des monomoteurs exploités dans des régions isolées du pays. Pour ce qui est de la catégorie suivante, celle des bimoteurs qui desservent les villes et des moteurs à turbine, vous constaterez que la sécurité est sans doute très acceptable.

Comme l'un des sénateurs l'a mentionné, le sénateur St. Germain, les compagnies d'assurance jouent un rôle actif dans la sécurité de l'aviation. C'est une chose que j'apprécie beaucoup. Ceux qui n'exploitent pas leur entreprise de façon prudente sont pénalisés en payant des primes d'assurance plus élevées ou en étant incapables d'obtenir de l'assurance. Bien entendu, il est obligatoire d'avoir une assurance, même pour le pilote privé. C'est une chose qui me rassure. Transports Canada répète depuis des années que, s'il se retire, les compagnies d'assurance s'en mêleront, car ce sont elles qui paient la facture en cas d'accidents. L'aviation est un domaine connu pour les sommes énormes que peuvent atteindre les règlements des sinistres, surtout pour la responsabilité civile.

Le transport par hélicoptère est un autre secteur dans lequel les compagnies d'assurance jouent un rôle actif en offrant des programmes de formation, non seulement pour les pilotes, mais pour la direction. Elles se substituent au ministère des Transports parce que cela coûte moins cher que de régler des sinistres.

Pour ce qui est de l'aviation, les règlements sur le transport des marchandises dangereuses ont été une excellente chose. La situation n'est pas la même que pour le camionnage. En cas de problème, le camionneur peut toujours s'arrêter sur le bas-côté et regarder son camion brûler. Mais si un produit commence à réagir à l'intérieur d'un avion, loin d'un aéroport, vous avez un sérieux problème. Avant de recevoir la formation requise, les pilotes ignoraient les difficultés qui pouvaient se poser avec divers types de fret. D'après ma propre expérience, c'est sans doute l'un des meilleurs changements qu'il y ait eus dans la réglementation du secteur de l'aviation. Cela a sans doute permis d'éviter de nombreux problèmes, surtout dans le Nord où vous transportez n'importe quoi, aussi bien de la soupe que des boulons, dans le même avion. Vous savez au moins que vous devez exiger de bonnes normes d'espacement et tout le reste. C'est parfaitement logique.

La seule autre question que j'aimerais aborder est celle de la nouvelle réglementation de l'aviation canadienne qui a été mise en place. Son examen se poursuit. La plupart des gens viennent tout juste de recevoir leur exemplaire de la réglementation par la poste. Les règlements me semblent avoir été simplifiés. Ils sont plus faciles à consulter. Il n'y a pas eu beaucoup de changements à part l'abandon de vieux règlements qui n'étaient plus applicables. Ce qu'il y a de bien, c'est la façon dont ils sont conçus. Transports Canada peut changer l'application des règlements assez facilement alors qu'avant il fallait passer par le Parlement et attendre dix ans pour qu'un changement se concrétise.

Cela pose néanmoins un problème, en ce sens que Transports Canada peut commencer à apporter des changements sans vraiment consulter l'industrie. Je ne sais pas si cela se produira. Nous surveillons ce que fait le ministère pour qu'il n'agisse pas trop vite sans consulter suffisamment l'industrie ou faire les études appropriées.

Le président: Nous avons une Loi sur l'aéronautique qui a été formulée dans les années 20 et les années 30. Cela me sidère. La réglementation est une façon de gérer les choses, mais pas la façon idéale. Vous devriez être très prudents. Dites au ministère qu'il faut une nouvelle loi pour justifier ces règlements. Ils donneront peut-être alors de bons résultats.

M. Lamoureux: C'est tout ce que j'ai à dire. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le sénateur St. Germain: La première chose dont j'aimerais vous parler, monsieur, c'est de NAVCAN. Cela n'a rien de politique. Les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, ont essayé de rationaliser les dépenses et de mettre en place un système de paiement par l'usager et de recouvrement des coûts. Qu'en pensez-vous?

Hier, nous étions à Yellowknife où nous avons parlé à diverses associations. Il y a 25 ans environ, mon permis de pilote commercial coûtait à peu près 10 $. Il coûte maintenant 150 $ et plus si vous additionnez tous les droits qui sont exigés depuis.

Savez-vous si nous devrons désormais payer pour les services d'information de vol, les rapports météorologiques et les plans de vol? Croyez-vous que les gens risquent de laisser tomber tout cela et de voler à l'aveuglette? Cela ne risque pas tellement de se produire dans les grandes compagnies qui devront avoir une infrastructure en place. Mais cela peut arriver dans le cas des monomoteurs de moins de neuf passagers. Des gens risquent de voler sans disposer des renseignements voulus et sans un plan de vol adéquat. Cela pourrait mettre tout le monde en danger.

M. Lamoureux: C'est exact.

Le sénateur St. Germain: Avez-vous une opinion au sujet de NAVCAN et de son avenir?

M. Lamoureux: La décision n'est pas encore prise. J'ai assisté au congrès de l'ATAC, à Montréal, il y a deux semaines. D'après ce que j'ai compris, on envisage des droits d'un montant forfaitaire, un peu comme des frais d'immatriculation annuels pour une automobile. Pour les petits avions, le montant sera raisonnable. Quelqu'un a parlé d'environ 150 $ par an. Cela vous permettrait de déposer vos plans de vol et d'utiliser le service gratuitement.

Le président: Et les services météorologiques?

M. Lamoureux: Tout serait compris. Il serait difficile de faire payer au mille ou au breffage, surtout pour les usagers privés. Les petits usagers commerciaux et les gros usagers commerciaux seront à peu près dans le même bateau. Le petit usager commercial paiera sans doute des frais plus élevés, mais ce sera un montant forfaitaire, payable annuellement, qui vous donnera accès à plusieurs catégories de service.

Les grandes compagnies aériennes finiront sans doute par payer au passager ou au mille, selon la taille de l'avion. Elles paieront la majeure partie des coûts. Cela a été dit très clairement.

Je suis d'accord avec vous, sénateur. Si c'est trop cher, personne n'utilisera ces services et cela posera de sérieux problèmes sur le plan de la sécurité. D'un autre côté, même si on peut exiger n'importe quel montant, quand il s'agit de se faire payer, c'est une autre histoire.

Le président: Veillez à examiner leur plan d'entreprise pour voir comment ils combleront leur déficit. Quels pouvoirs cette entente confère-t-elle à NAVCAN?

M. Lamoureux: Je n'ai rien vu à ce sujet. Je ne pense pas qu'ils sachent encore ce qu'ils veulent faire. Les discussions se poursuivent. Mon cousin, qui est un des administrateurs de la tour de contrôle à l'aéroport municipal n'est pas très au courant. J'en sais généralement plus que lui. Quand je reviens d'un congrès, il m'emmène souvent déjeuner pour essayer de savoir ce qui se passe.

Le sénateur St. Germain: Je voudrais également que vous me parliez du facteur humain en ce qui concerne les observateurs météorologiques. La question des phares suscite la controverse sur la côte ouest. Certaines personnes s'opposent ardemment à ce qu'ils soient automatisés. En raison de mon expérience personnelle, je vois la situation maritime et aérienne dans une optique assez différente. Un jour, j'ai décollé de Saskatoon alors que le ciel était clair. Quand j'étais à 500 pieds dans les airs, le mauvais temps est arrivé. J'étais un pilote débutant dans les forces aériennes. Je me suis retrouvé, pendant une demi-heure, dans d'épais nuages, à voler à l'aveuglette.

Si j'ai bien compris, ces systèmes AWOS -- que vous pourriez peut-être m'expliquer un peu mieux -- montrent le temps qu'il faut juste au-dessus et à côté de l'aéroport. Vous pouvez avoir, à un ou deux milles de distance, un système atmosphérique stationnaire qui, tout à coup, se met à bouger.

J'ai survolé le nord de la Saskatchewan. Il est très différent de voler dans le Nord et ici, dans les Prairies, où c'est un peu plus facile. En Colombie-Britannique, de même que dans le Nord, il y a des régions où il est très difficile de voler et dont on n'a pas tenu compte pour la rationalisation des stations météorologiques.

M. Lamoureux: Vous avez raison, sénateur. Dans certaines régions du pays, comme les régions montagneuses et le Nord, les conditions atmosphériques changent très rapidement. C'est difficile à prédire. Les stations météorologiques sont très distantes les unes des autres. Celles qui sont là sont parfois espacées de plusieurs milliers de milles. Pourtant, on vous donne une moyenne établie par un ordinateur d'Ottawa qui essaie de deviner dans quelle direction un système dépressionnaire se dirige au milieu de terres inhabitées. Si vous n'avez pas quelqu'un pour surveiller ce qui se passe, vous ne pourrez pas le prédire.

Les avions modernes offrent davantage de possibilités. Ils sont plus rapides et peuvent transporter plus de carburant. Les moteurs à turbine donnent des avions plus puissants qui volent à de plus hautes vitesses. Mais les avions neufs coûtent très cher. Personne ne va dépenser 7 millions de dollars pour un avion de dix places.

Le fait est qu'il y a toujours de vieux avions qui volent dans le Nord. Ils ont parfois des difficultés.

Je suis d'accord avec vous, sénateur, pour dire que les bateaux sont différents. Ils peuvent s'arrêter si nécessaire. Ils peuvent ralentir, baisser l'ancre et attendre que le temps s'améliore. Vous ne pouvez pas le faire avec un avion.

Le sénateur St. Germain: Sénateurs, nous devrions recommander que l'on demande aux fonctionnaires du ministère des Transports qui prennent ces décisions de songer à maintenir des observateurs météorologiques en poste dans ces régions.

Le sénateur Bacon: Hier, quand nous avons parlé des petites compagnies aériennes du Nord, on nous a dit que la Loi sur le transport des marchandises dangereuses ne devrait pas s'appliquer au Nord. Les exploitants du Nord ont besoin d'une réglementation qui tienne compte de leur situation particulière. Êtes-vous au courant de ce genre de choses? Est-ce qu'il faudrait deux séries de règlements, une pour le Nord et une pour le Sud?

M. Lamoureux: Oui, je suis au courant de la situation. J'ai survolé l'Arctique pendant trois ans. Je crois qu'on s'est penché sur la plupart des exigences opérationnelles. Vous pouvez transporter du carburant supplémentaire à bord de l'avion s'il doit survoler une région isolée, et cela a été exempté de la réglementation. Il y a toute une liste d'exemptions.

Certaines des autres exemptions que les gens réclament visent plus la rentabilité que la sécurité. Les gens disent: «Nous avons transporté cette marchandise pendant des années». S'ils sont prêts à modifier la cellule de leurs avions, des compartiments peuvent être aménagés pour certaines choses.

Vous a-t-on précisé quelles étaient les cargaisons qui posaient des problèmes?

Le sénateur Adams: Il s'agissait de petits appareils qui survolaient les régions isolées. Des pilotes transportaient des prospecteurs, avec du naphte ou du propane, en hélicoptère.

Si vous avez un appareil nolisé, vous devez transporter une famille qui va s'établir dans une région isolée pendant un mois ou deux. Les gens ont surtout peur de ne pas pouvoir faire ce transport avec des produits dangereux.

M. Lamoureux: Je sais de quoi vous parlez. Je pense qu'il faudrait une exemption. Ce sont vos propres marchandises. Vous allez relever vos pièges, par exemple. Vous avez besoin d'essence pour vos lanternes et votre motoneige. Vous avez besoin de propane. Vous avez besoin de toutes ces choses, ainsi que de munitions.

Vous pouvez vous procurer des bouchons pour les bonbonnes de propane. Il y a d'autres systèmes qui existent depuis des années. Il s'agit de bien emballer ces marchandises et de ne pas placer une bonbonne de propane qui fuit à l'arrière d'un avion. Il est possible de le faire de façon sécuritaire. On ne se fie pas suffisamment à l'intelligence des pilotes. Ils sont capables de constater eux-mêmes certains problèmes. Personne ne va placer un baril d'essence qui fuit dans un avion. C'est impensable.

C'est un service essentiel pour les gens qui vivent dans le Nord. C'est ainsi qu'ils gagnent leur vie. Ils ne peuvent pas se permettre de faire le trajet deux fois, simplement pour transporter une bonbonne de propane.

Le sénateur Bacon: Avec l'évolution des aéroports qui sont confiés à des administrations aéroportuaires locales, pensez-vous que les mesures voulues sont maintenant prises pour assurer la sécurité?

M. Lamoureux: L'Alberta Aviation Council a mis sur pied l'Alberta Airport Operators Association. Nous essayons de jouer le rôle de médiateurs pour faciliter le bon fonctionnement de ce système. Cela commence à vraiment démarrer. Avec l'arrivée de l'hiver, les gens se rendent compte qu'il coûte cher de garder un aéroport ouvert, surtout avec toute la neige que nous avons eue en novembre. Beaucoup de gens ont été surpris de voir combien il en coûtait de déblayer les pistes.

Nous avons remarqué qu'il était très difficile d'obtenir un rapport sur l'état des pistes dans quelques aéroports. Avant, nous pouvions appeler le ministère des Transports de l'Alberta. On prenait votre message, au garage, et on vous rappelait deux heures plus tard en vous indiquant l'état de la piste d'atterrissage.

Il y a beaucoup de travail à faire pour assurer la sécurité. Nous proposons notamment aux petites localités -- et certaines d'entre elles qui ont des aéroports depuis longtemps le font déjà -- d'installer à l'aéroport une maison mobile qu'elles mettront gratuitement à la disposition de quelqu'un, tout comme un propriétaire d'immeuble offrirait un logement à un concierge. En échange d'un logement gratuit, vous auriez quelqu'un pour répondre au téléphone.

High Prairie en est un bon exemple. Vous pouvez appeler là-bas au milieu de la nuit. Une dame sort de son lit, met son parka et sort dehors. Elle a un poste d'observation météorologique spécialement construit pour elle. Elle vous informera sur le plafond, les vents, la température et le point de rosée. Si les conditions semblent douteuses, elle ira en voiture sur la piste pour vous donner l'indice de freinage approximatif. Elle ne coûte pas très cher à la ville de High Prairie. Elle nettoie également le bâtiment de l'aéroport. Je pense que son mari fait une partie de l'entretien simple.

Ces villes ont besoin d'un peu d'aide. La première réaction d'un grand nombre d'entre elles est que l'aéroport ne leur est pas vraiment utile. C'est ce qui cause une partie du problème. Elles le laissent se détériorer et, une fois qu'il est en mauvais état, il faut dépenser une fortune pour le rénover.

Wayne Steel, qui a déjà travaillé pour le gouvernement albertain, a soumis une proposition pour l'administration de la Airport Operators Association. Il a administré les aéroports de l'Alberta pendant 17 ans.

Il faut inciter les gens à se joindre à ces organismes et à établir leur propre aéroport dans le cadre de l'infrastructure municipale. C'est seulement quand ils ont perdu leur aéroport qu'ils se rendent compte de son importance.

Le service d'ambulance aérienne joue un rôle de plus en plus important dans les soins de santé. Les hôpitaux des petites villes ont subi des compressions. Certaines villes qui avaient des médecins n'en ont plus. Par conséquent, tous les cas graves ou inhabituels, doivent être évacués vers Edmonton ou Calgary. Bien des gens ne pensent pas avoir besoin d'un aéroport jusqu'à ce qu'un des membres de leur famille tombe malade et doive être évacué.

Le sénateur Adams: Hier, à Yellowknife, nous avons rencontré certains membres de la Northern Transportation Association. Connaissez-vous cet organisme?

M. Lamoureux: Oui.

Le sénateur Adams: Vous avez déjà piloté dans le Nord. Je m'intéresse surtout aux règlements de vol, notamment en ce qui concerne le nombre d'heures autorisées en été. Est-il vrai que vous avez seulement droit à 140 heures par mois ou un chiffre de cet ordre?

M. Lamoureux: Je crois que c'est 150 heures.

Le sénateur Adams: Je me sens beaucoup mieux quand je rentre chez moi, à Rankin Inlet, et je ne suis pas si fatigué. C'est peut-être à cause du temps, je ne sais pas. La même chose doit être vraie pour les pilotes. Quelqu'un qui pilote un 737 met le pilote automatique peu après le décollage. Quand vous pilotez un petit avion à environ 20 000 pieds et que vous regardez en bas, vous savez où vous allez.

Devrait-il y avoir une différence dans le nombre d'heures de vol entre l'été et l'hiver? Nous avons un court été dans le Nord.

M. Lamoureux: Je connais bien Don Douglas qui se trouve là-bas. Je le connais assez bien. Il a été directeur régional de Transports Canada, ici, pendant un certain temps. Je connais également Rod Wood, qui est un de mes bons amis. Je sais donc ce qu'ils en pensent.

Leurs opinions sont justifiées. À leur avis, il faut non seulement tenir compte du nombre d'heures de vol du pilote, mais aussi du genre de travail qu'il fait et de ses conditions de vie. La situation d'un pilote d'hélicoptère qui travaille sur un chantier de construction, par exemple, n'est pas la même que celle du pilote qui doit voler dix heures par période de 12 heures. Il faut tenir compte des conditions dans le camp aménagé pour ces personnes.

Ces pilotes vont-ils bien pouvoir se reposer entre leurs heures de vol? Si c'est le cas, le nombre d'heures peut être augmenté en toute sécurité. Si vous volez dix heures par période de 12 heures plutôt que par période de 14 heures, et si cela se prolonge pendant 30 à 40 jours, le pilote va sans doute être fatigué.

L'un des problèmes que je vois est que les syndicats sont intervenus dans la réglementation. Je suis contre. Ils devraient négocier avec les compagnies aériennes. Quand la CALPA a été consultée au sujet de la limitation des heures de vol, elle a recommandé les heures qu'elle souhaitait pour ses membres. J'estime qu'elle aurait dû négocier cela avec Air Canada et Canadien, et non pas sur une base nationale, car il s'agit d'une convention collective.

Il faudrait examiner les choses du point de vue pratique. Si c'est sans danger, ce devrait être autorisé. Pour ce qui est des pilotes, s'ils commencent à se sentir fatigués, ils disent seulement: «Allez au diable, moi je vais au lit». À cause de l'assurance, si vous avez un mauvais dossier, la plupart des grandes compagnies ne vous embaucheront pas.

Nous prêchons la sécurité depuis si longtemps que tout le monde commence à en tenir compte sérieusement. Il y a moins de radicaux qu'avant. Il en reste quelques-uns. Quelques compagnies restent fidèles aux vieilles méthodes et poussent les gens jusqu'à ce que mort s'ensuive. Très peu de compagnies de ce genre survivront dans le monde moderne.

Le président: N'allons-nous pas à l'encontre des résultats visés? À un moment donné, il deviendra dangereux de voler au Canada si nous avons une série de politiques régionales. Vous pouvez voler un nombre x d'heures ici, mais pas là. Qu'en pensez-vous?

Quand vous examinerez la situation du taxi aérien peut-être pourrez-vous vous demander s'il est sécuritaire ou non d'avoir des règles différentes pour les uns et pour les autres.

M. Lamoureux: En fait, la situation existe déjà. La plupart des compagnies ont demandé et obtenu des exemptions pour le genre d'activités auxquelles elles se livrent. Cela se fait depuis des années.

Le président: C'est ce dont je parle. On demande maintenant davantage d'exemptions. C'est très bien de prendre les précautions voulues pour la dynamite afin de ne pas avoir à faire deux voyages. On l'a toujours fait. J'ai jamais entendu parler d'un avion qui a explosé parce que la dynamite avait explosé. Le fait est que c'est dangereux.

Le sénateur Adams: Vous avez mentionné tout à l'heure le système AWOS. Il y a un an ou deux, le gouvernement a commencé à réduire le nombre de gens dans certaines localités. Maintenant, nous comptons surtout sur les satellites et les systèmes AWOS. Nous avons entendu le point de vue de certaines personnes de Med-Evac qui ont un contrat avec les services de santé. Vous savez que vous pouvez voler pendant une heure et que le temps peut changer en l'espace de dix ou 15 minutes. Vous savez quelle est la situation dans les territoires. Que pensez-vous des compressions dans les services météorologiques du Nord et des territoires?

M. Lamoureux: C'est l'un des facteurs qui a le plus de conséquences pour la sécurité. En tant que pilote, je dirais que le mauvais temps est un facteur important dans la plupart des accidents. Un accident peut être attribué à la décision que l'équipage prend une fois qu'il se retrouve pris dans le mauvais temps. Le fait est que c'est le mauvais temps qui l'a obligé à prendre une décision.

Quand le SEA s'est retiré, il a dit: «Pourquoi ne pas confier cette tâche au personnel de la tour de contrôle?» Le personnel de la tour de contrôle a répondu: «Ce n'est pas notre rôle». Il y a là quatre employés. Ce qui ennuie les exploitants c'est que nous faisons des compressions. La description de tâches n'existe plus. Vous devez faire tout ce qu'il y a à faire.

Il serait assez facile de former les infirmières qui sont envoyées dans le Nord pour qu'elles puissent faire des observations météorologiques de base. On pourrait les munir d'une radio HF. Il n'est pas compliqué d'observer le temps. Une ménagère de High Prairie le fait pour nous et elle accomplit un excellent travail. Il n'y a aucune raison pour qu'une infirmière possédant un diplôme universitaire ne puisse pas en faire autant.

Dans une communauté isolée, les gens doivent comprendre que les emplois ne peuvent pas être trop spécialisés. Vous ne pouvez pas avoir une personne pour chaque fonction. Si certaines fonctions étaient regroupées, cela faciliterait beaucoup les choses pour tout le monde.

Le sénateur Adams: Vous avez dit tout à l'heure que certaines compagnies aériennes embauchent maintenant des gens qui n'ont pas beaucoup d'expérience pour piloter certains avions. Je sais que certaines personnes de ma région ont suivi un cours à Cornwall, en Ontario, où l'on donne une formation en météo et en sécurité pour l'aviation. Il y a certains endroits où l'on dispense une formation pour la sécurité des avions et des pistes d'atterrissage. Il y a un petit cours de formation en sécurité à Baker Lake.

Dans le cadre de votre organisme, vous avez pu constater que certains pilotes n'avaient pas reçu une formation suffisante. Comment voyez-vous la situation? Faudrait-il instaurer un cours de sécurité plus long?

M. Lamoureux: Je ne pense pas que cela dépende de la durée des programmes de formation. C'est plutôt une question d'expérience. Les pilotes sont promus trop rapidement. Tout le monde à des normes minimums à atteindre pour obtenir son brevet de pilote. Vous commencez comme copilote et vous faites ensuite un certain nombre d'heures de vol réparties sur un certain nombre d'années. Vous vous trouvez confrontés à des situations, des conditions météorologiques et des problèmes différents. Vous apprenez à y faire face, généralement aux côtés de quelqu'un qui est plus expérimenté que vous.

Ce qui se passe c'est, bien entendu, qu'on procède la même façon, mais plus rapidement. Je connais des gens qui sont diplômés de notre école de pilotage et qui volent maintenant comme copilotes pour Greyhound, par exemple. Je me souviens de les avoir vus arriver chez nous et demander comment faire pour apprendre à piloter. Ce n'est pas une mauvaise chose. Je commence peut-être à vieillir.

Nous avons des techniques de formation modernes. Nous avons des systèmes audiovisuels. Nous offrons un apprentissage interactif sur ordinateur. Les simulateurs de vol sont meilleurs qu'ils ne l'ont jamais été.

Avec les avions modernes que nous avons maintenant, tous les dispositifs de sécurité et tous les progrès qui ont été réalisés, cela ne devrait pas poser de gros problèmes. L'important est de veiller à ce que les gens profitent de ces systèmes et n'essaient pas d'aller trop vite. Un pilote militaire qui compte 500 heures de vol peut devenir le pilote d'un Hercule et voler autour du monde. Néanmoins, il a reçu un bon entraînement. Personne n'en a les moyens.

Personne ne peut se permettre de dépenser un million de dollars pour les 400 premières heures de vol d'un pilote. Nous pouvons nous inspirer de l'entraînement que l'armée donne à ses pilotes et nous servir des systèmes de formation électroniques que nous avons, surtout les simulateurs, pour transformer un pilote inexpérimenté en très bon pilote.

Le président: Pour conclure, pourriez-vous nous dire quelles sont les trois questions qui vous préoccupent le plus en ce qui concerne la sécurité de l'aviation générale?

M. Lamoureux: Je n'en vois que deux. D'abord, Transports Canada ne doit pas devenir un simple organisme de réglementation ou de surveillance. Le ministère doit conserver le rôle éducatif et consultatif qu'il jouait depuis quatre ou cinq ans. Il a été très longtemps un organisme de surveillance. Nous l'avons finalement convaincu de coopérer et de partager son savoir.

La deuxième question concerne les systèmes d'observation météorologique qui vont sans doute poser les problèmes les plus immédiats. Dès que le temps se gâte, les gens prennent des risques de toute façon. Il faut s'attendre à des problèmes.

Le président: Nous allons certainement nous intéresser au travail que vous allez accomplir au cours de la nouvelle année. Je vous souhaite donc bonne chance.

M. Lamoureux: Merci beaucoup.

Le président: M. William Sokil, président-directeur général de Sokil Transportation Group est présent dans la salle. Il connaît très bien l'Association canadienne du camionnage, puisqu'il en a été le président. Nous devrions lui demander de se joindre à nous, pendant cinq ou dix minutes, pour échanger quelques mots avec nous.

M. William Sokil, président-directeur général, Sokil Transportation Group; président sortant, Association canadienne du camionnage: Sénateurs, vous avez soulevé certaines questions dont celle du dépistage des drogues. Comme nos chauffeurs vont aux États-Unis, nous devons tous les tester d'ici la fin de l'année prochaine. Pour le moment, nous soumettons seulement aux tests les moins de 50 ans, mais nous comptons 200 employés. Nous avons pour politique de tester chacun d'eux, quel que soit son poste. Il peut s'agir aussi bien d'un gestionnaire que d'un contrôleur. Cela ne fait aucune différence.

Le président: Le dépistage est donc obligatoire. Est-il fait au hasard?

M. Sokil: Non. Tout le monde doit se soumettre au test de dépistage avant l'embauche et nous nous sommes donc déjà intéressés à certaines questions de sécurité. Quand nous avons lancé ce programme, les chauffeurs plus âgés ont été très nombreux à demander quand ils subiraient le test. Je suis très satisfait de leur attitude.

Les heures de service actuelles ne sont pas nécessairement les meilleures. Les études de la fatigue réalisées au Canada et aux États-Unis se sont penchées sur les heures de service. Il n'est plus question de dix heures. Nos 13 heures sont peut-être dépassées également. Peut-être faudrait-il des périodes de repos différentes. Ces questions seront examinées et Gilles Bélanger, qui fera un exposé devant votre comité plus tard, en février, vous dira ce qu'il en est. D'ici là, certains de ces résultats seront publiés. Nous travaillons à ce dossier depuis plusieurs années. Cela ne peut pas se faire du jour au lendemain.

Si tout le monde adoptait le code de sécurité, il nous serait plus facile de circuler d'un bout à l'autre du pays.

J'ajouterais que j'ai toujours travaillé dans le secteur du camionnage. J'ai commencé en 1949, alors que je n'avais même pas mon permis de conduire. Ce ne serait plus possible aujourd'hui. Il y avait des règles à l'époque, mais personne ne les suivait et je dois dire que j'ai beaucoup apprécié de pouvoir commencer dans ce métier.

Je souscris à la majorité des arguments que Ross Hogg a présentés au nom du Safety Council. Je ne sais pas s'il est encore là, mais il travaille au ministère des Transports de l'Alberta. C'est un allié de notre secteur, car le ministère cherche à l'aider plutôt qu'à faire la police. Même s'il agit parfois comme un policier, je l'admire, car il essaie d'aider l'industrie. Il est agréable de travailler avec lui.

On a mentionné plus tôt la question des coussins gonflables. J'ai un petit-fils âgé de six ans. La première chose qu'il m'a demandé était: «As-tu un coussin gonflable?» Je lui ai répondu que non et il m'a dit alors: «Je vais m'asseoir devant, à côté de toi». Autrement, il ne s'assiérait pas devant. Il faut croire que certains enfants ont compris le message. Je m'en réjouis.

J'étais à Toronto il y a une quinzaine de jours. La route 409 devrait ouvrir ce mois-ci, mais elle n'est toujours pas ouverte. Je vois là un problème. Certains virages sont trop serrés pour quelques-uns des camions modernes que nous utilisons. Ils visent à accélérer la circulation. Selon moi, il va falloir réduire la limite de vitesse, car les camions et les automobiles ne pourront pas prendre ces virages. Nous en avons un exemple typique sur la 401.

Le sénateur St. Germain: De quels virages s'agit-il, monsieur?

M. Sokil: Des entrées et sorties et des bretelles.

Par exemple, j'ai remarqué que sur la 401 ou la 400, à l'endroit où un camion transportant un liquide dangereux s'est renversé l'année dernière, on élargit le virage parce qu'il est trop serré pour la vitesse des véhicules. Je constate qu'on construit une toute nouvelle route avec un virage à angle trop prononcé à une entrée ou une sortie. Je n'en ai pas encore parlé à nos homologues du camionnage de l'Ontario, mais j'aborderai la question avec eux, car cela me paraît risqué.

En Alberta, sur l'autoroute de Yellowhead, au passage inférieur du CN, la voie a été conçue en fonction des anciennes normes et non pas des nouvelles qui prévoient de plus grandes longueurs. À l'un des virages, quand votre camion prend une direction, l'arrière prend la direction inverse, ce qui vous fait basculer. Les policiers ont l'habitude de dire: «Il allait trop vite». Néanmoins, votre camion se renverse alors que vous rouliez à une vitesse inférieure à la limite. C'est donc le résultat d'une mauvaise conception de la route et non pas d'un excès de vitesse. Je crois qu'il faut s'attendre aux mêmes difficultés sur la 409.

Vous avez parlé du poids. Vous avez dit que les Américains transportaient des charges moins lourdes. Dans certains États, ils ont tout un équipement. Quand vous êtes sur l'autoroute, vous avez une certaine limite de poids. Si vous êtes sur une autre route, la limite de poids est différente. Par exemple, le Michigan est comme une araignée. Je veux parler des camions qui circulent là-bas. Ils peuvent transporter environ 200 000 livres. Ils ont des routes qui peuvent supporter de telles charges. Les États-Unis vont bientôt s'aligner sur les normes canadiennes et mexicaines. Le fait est qu'ils ne peuvent pas tout transporter sur leur réseau routier actuel ou construire suffisamment de routes. Ils vont certainement recourir à certaines des techniques mises au point par le Canada au cours des années.

Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le sénateur Bacon: Les ministres des transports fédéral et provinciaux ont convenu d'établir un code national de sécurité, avec des normes de sécurité uniformes, pour la réglementation des véhicules commerciaux dans l'ensemble du pays. La mise en oeuvre de certaines normes a été un succès, mais il y a toujours un manque d'uniformité.

Selon vous, quels sont les principaux obstacles qui s'opposent à l'établissement d'un code national uniforme de sécurité au Canada et pour quelle raison a-t-il fallu attendre si longtemps? Le gouvernement fédéral devrait-il prendre l'initiative d'imposer ce code dans les provinces?

M. Sokil: Oui, je reconnais que si le gouvernement fédéral s'attaquait au problème en disant: «Voilà le code que vous devez appliquer» et obligeait les provinces à adopter ces normes, ce serait chose faite.

C'est la même chose pour la consommation de drogues. Le gouvernement canadien ne va pas mettre en oeuvre des normes à cet égard. Le secteur du camionnage a donc établi ses propres normes pour se conformer aux règles en vigueur au sud de la frontière. C'est ce que nous faisons. Nous l'avons fait nous-mêmes.

Le sénateur Adams: Vous êtes un homme d'affaires. Vous devez aller là-bas pour transporter des marchandises. Nous avons entendu dire que si vous livrez vos marchandises avec une ou deux heures de retard, vous devez payer une pénalité de 6 000 $ à 7 000 $. Est-ce vrai?

M. Sokil: Des pénalités sont imposées par certains usagers. Cela ne fait aucun doute. Les usagers des services de transport ne répondent pas aux besoins du secteur du camionnage. Ils exigent certaines choses et ils les obtiennent. Dans l'Ouest, je ne pense pas que nous ayons de graves problèmes sur ce plan, mais cela arrive. La question se pose davantage en Ontario et au Québec que dans les autres provinces.

Le sénateur Adams: Autrement dit, cela n'a rien à voir avec l'Alberta. Avez-vous une réglementation importante en Alberta?

M. Sokil: Ce n'est pas une réglementation. Cela nous est imposé par les usagers des services de transport.

Le sénateur Adams: Nos témoins de ce matin, du Safety Council, ont dit que certains chauffeurs étaient limités à 13 heures et vous m'avez entendu poser une question au sujet du chiffre de dix heures en vigueur aux États-Unis. Y a-t-il un règlement stipulant que vous devez vous arrêter au bout de tant d'heures, si vous avez droit à 13 heures, ou pouvez-vous conduire sans arrêt? Quel est le règlement?

M. Sokil: Il y a certains arrêts que vous devez faire pour des besoins naturels et également certains arrêts inutiles que vous êtes tenus de faire. Cela arrive. Nous veillons également à ce que la pression des pneus soit vérifiée sur tous les camions. Oui, les chauffeurs doivent s'arrêter. C'est pour qu'ils puissent prendre une pause de cinq ou dix minutes. Cela prend un peu de temps.

Nous surveillons nos chauffeurs pour nous assurer qu'ils ne conduisent pas trop longtemps, mais certains trichent, quels que soient les règlements que vous leur imposiez.

Le sénateur Adams: Nous avons entendu dire que certains utilisaient des drogues pour rester éveillés. Est-ce vrai?

M. Sokil: C'est possible. Je n'en connais pas qui le font chez nous.

Le président: De quoi sont faits les pneus de camion pour exploser si souvent devant vous?

M. Sokil: Ce sont généralement des pneus rechapés qui se déchirent sur la route. Le rechapage a peut-être été mal fait. Il se peut aussi que le pneu soit trop gonflé ou pas assez gonflé. La chaleur est souvent une cause d'éclatement.

Le président: Est-ce par souci d'économie? Vous pouvez acheter un bon pneu ou un pneu à bon marché. Vous ne mettez pas de pneus rechapés à l'avant des camions, n'est-ce pas?

M. Sokil: Non.

Le président: Pourquoi?

M. Sokil: Parce que nous pensons que ce n'est pas nécessairement aussi sûr.

Le président: Allons! C'est carrément mortel. Si vous placez des pneus rechapés à l'avant de votre véhicule, vous pouvez vous tuer.

M. Sokil: Je travaille dans ce domaine depuis longtemps. Nous le faisons depuis le premier jour et nous le faisons encore aujourd'hui. Il n'y a pas de différence.

Le président: Je n'ai jamais travaillé dans ce domaine, mais je fais la route Halifax-Ottawa une ou deux fois par mois. C'est un voyage agréable et intéressant, qui dure environ 30 heures, mais je ne roule pas au milieu des voitures. Je suis entouré de monstres qui ne tiennent généralement aucun compte de la limite de vitesse. Vous pouvez vous faire tuer si vous ne roulez pas à 10 ou 15 kilomètres au-dessus de la limite.

Cela dit, ce n'est pas la vitesse qui tue, mais c'est l'inattention ou un pneu qui éclate. Dans ce dernier cas, vous n'y pouvez rien. Les facteurs auxquels vous pouvez quelque chose ne causent généralement pas d'accident et ne tuent pas les gens. Ce sont les autres qui tuent, mais vous n'exercez aucun contrôle sur les pneus de camion.

J'ignore ce qu'il en est dans les Prairies, mais je n'ai aucune difficulté à voir 500 pneus de camion répandus sur la route entre Halifax et Ottawa. Dans le bon vieux temps, une petite camionnette d'un quart de tonne faisait le tour des routes pour ramasser les animaux tués par des automobiles. On a maintenant une camionnette d'un quart de tonne pour ramasser les animaux et un camion de deux tonnes pour ramasser les morceaux de pneu.

Pouvons-nous faire quelque chose pour remédier à ce problème? C'est extrêmement grave. L'Association du camionnage peut-elle faire quelque chose pour améliorer la qualité des pneus rechapés?

M. Sokil: Ce n'est pas nécessairement la qualité du rechapage; c'est la façon dont il est appliqué sur le pneu. On doit respecter certaines normes, mais la partie rechapée n'est peut-être pas suffisamment chauffée ou on ne la laisse peut-être pas mûrir suffisamment. Les fabricants de pneus devraient se pencher également sur d'autres problèmes.

Le président: Il est certainement possible de fabriquer des pneus assez sûrs, mais l'industrie veut-elle que ces pneus se retrouvent sur les roues avant? Veut-elle payer, disons 2 000 $ pour un bon pneu de camion et 1 000 $ pour un pneu de moindre qualité?

M. Sokil: En ce qui nous concerne, nous avons toujours acheté le genre de pneus qui nous convenaient le mieux, un point c'est tout.

Le président: Pour chaque roue du camion?

M. Sokil: Pour toutes les roues de nos camions et remorques. Les pneus rechapés sont toujours installés à l'arrière de la remorque, qui est utilisée 25 p. 100 du temps par rapport au tracteur. Les pneus à bas profil sont, selon moi, ce qu'on nous a proposé de mieux comme pneus depuis 15 ans et c'est ce que nous avons toujours utilisé.

Le président: Quand un pneu sûr devient-il un pneu peu rentable?

M. Sokil: Quand il n'est pas rechapable. Généralement, notre «rechapeur» nous prévient. Il décide de ne pas rechaper un pneu. De plus, s'il ne le rechape pas, cela veut dire qu'il vend un pneu neuf. Nous sommes parfois coincés entre le «rechapeur» et le marchand de pneus neufs.

Le président: Vous comprendrez que je m'intéresse au rapport entre la rentabilité et la sécurité.

M. Sokil: Je comprends.

Le président: Vous êtes-vous déjà trouvé dans une automobile, derrière un camion dont un pneu éclate?

M. Sokil: Non.

Le président: Non?

M. Sokil: Je n'ai jamais vu de pneu éclater.

Le président: Dieu vous en garde. Le Seigneur veille sur vous, car c'est terrifiant.

Les membres d'un comité permanent de la Chambre des communes revenaient de quelque part lorsqu'ils ont été frappés par un pneu qui a explosé. Le bus a quitté la route et il y a eu des blessés.

Nous sommes de simples sénateurs. Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour y remédier, mais je pense que le comité permanent de la Chambre des communes, qui a plus d'influence que nous, peut y faire quelque chose.

Le sénateur St. Germain: Monsieur le président, je tiens seulement à dire que les connaissances de ce témoin dépassent toutes celles que je pourrais jamais acquérir dans ce domaine.

Monsieur, je vous remercie d'être venu pour nous éclairer.

M. Sokil: Je suis ici comme observateur et je me demande simplement ce que vous faites. Je vais peut-être vous surveiller. Je ne sais pas. Merci de m'avoir entendu et je vous souhaite du succès dans vos audiences.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Sokil.

Nos témoins suivants sont des représentants de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques. La parole est à vous.

M. Frank Markson, Association canadienne des fabricants de produits chimiques: Monsieur le président, je suis le directeur général du comité régional de l'Alberta de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques. Je suis accompagné de mon collègue, M. Stan Doods, qui joue un rôle très important au sein de nos comités nationaux et provinciaux, en ce qui concerne la sécurité des transports. M. Doods est également le conseiller de Nova Chemicals, de Calgary, une société nationale établie en Alberta.

Comme votre horaire est très chargé et comme je crois que «siège ankilosé n'a point d'oreilles», je vais essayer de rendre cet exposé le plus intéressant et le plus bref possible.

En tant qu'association régionale dotée de comités régionaux, nous prenons très au sérieux la question de la sécurité des transports et nous avons mis sur pied un programme à cet égard. Je crois que votre greffier vous a distribué une partie de notre documentation.

Nous prenons cette question très au sérieux et nous nous proposons de vous donner un bref aperçu de notre association et de notre programme de sécurité. Par l'entremise de M. Doods, nous vous parlerons également des aspects de notre programme touchant particulièrement la sécurité dans les transports et la distribution.

L'Association canadienne des fabricants de produits chimiques a été fondée en 1962. Elle compte plus de 70 sociétés qui représentent 90 p. 100 de la production canadienne totale de produits chimiques. La production nationale a une valeur d'environ 15 milliards de dollars dont 6 milliards pour l'Alberta. Nous croyons que nous jouons un rôle de premier plan dans l'économie du pays et que nous apportons des avantages à la société canadienne. Grâce à notre programme vous conviendrez, nous l'espérons, que nous sommes également une industrie qui gère les produits chimiques, d'un bout à l'autre de la chaîne, en assumant ses responsabilités.

Pour ce qui est de notre programme de gestion responsable, nous en avons fait l'un des moyens par lesquels nos membres peuvent s'acquitter de leurs obligations en ce qui concerne la gestion de leurs produits. Nous avons établi un code de déontologie. Nous avons remplacé l'ancien par un nouveau code qui est à la base de ce programme. L'ancien consistait à faire le minimum. Le nouveau consiste à agir comme il se doit et à bien agir.

Nos membres adoptent cette nouvelle déontologie. Elle cherche à faire en sorte que tous les employés comprennent les méthodes par lesquelles leur entreprise souscrit à ce principe. Les employés doivent adhérer à ce programme.

Le programme a été lancé au milieu des années 80. Il a été mis en oeuvre au début des années 90. Comme condition d'adhésion à notre association, nos membres doivent souscrire formellement à nos principes et à notre code de pratique. Nous comptons 151 adhérents. Le PDG de chacune de ces sociétés s'engage à appliquer non seulement la lettre, mais l'esprit de notre code.

Le programme de gestion responsable comprend un programme qui amène la collectivité à participer au plan d'intervention d'urgence. M. Doods en parlera à propos du transport et de la distribution.

M. Stan Doods, Association canadienne des fabricants de produits chimiques: Comme l'a souligné M. Markson, le programme de gestion responsable est une condition d'adhésion à notre association. Chaque société membre a l'obligation de mettre en place des politiques, méthodes et procédés qui se conforment à chacune des exigences du code. Chaque produit -- et cela comprend les déchets -- doit être évalué pour que son transport puisse être assuré de façon à réduire les risques pour les transporteurs, la population vivant le long des voies de transport et l'environnement.

Nous procédons à ce que nous appelons une «évaluation du mode de transport». Chaque société membre dispose d'instruments, mis au point par notre association, pour l'aider à choisir le mode de transport qui présente le moins de risques.

Dans le cadre de l'évaluation des transporteurs, chaque transporteur adresse à la société membre une lettre d'engagement et une autoévaluation. En fonction des risques de son mode de transport, le transporteur peut avoir à se soumettre à une évaluation de ses activités par un tiers.

Ces évaluations sur le terrain sont examinées par la société membre et répétées tous les deux ans.

Chaque société membre doit procéder à une évaluation des risques de l'itinéraire pour les produits et déchets en question, de façon à réduire au maximum le risque pour la population et l'environnement. Chacune de ces évaluations est mise à jour tous les deux ans.

Les sociétés membres et les transporteurs doivent visiter les municipalités situées le long des corridors de transport pour établir des partenariats avec elles. Chaque société membre doit également adopter des localités qui ne se trouvent pas nécessairement dans sa région. Néanmoins, ce sont des collectivités qui voient passer des produits chimiques du fait qu'elles sont situées sur le réseau de transport, le long d'une voie de transport importante, qu'elle soit routière ou ferroviaire. Nous sommes dont obligés d'adopter des collectivités supplémentaires et de leur apporter ce partenariat.

On le fait en collaboration avec les transporteurs. S'il s'agit d'un grand transporteur ferroviaire -- il n'y en a que deux ou trois -- ou si c'est un transporteur routier, nous le faisons en collaboration avec eux. Nous allons leur présenter des feuilles de données sur la sécurité du matériel. Nous leur montrons comment contacter des organismes comme CANUTEC et nous avons également un wagon sécuritaire modèle. C'est un wagon-citerne qui aide les secouristes opérationnels à comprendre en quoi consiste cet équipement. Ce train se déplace constamment, d'un bout à l'autre du pays, où il traverse les diverses localités et nous en profitons, avec les transporteurs, pour faire des exposés dans les municipalités en question.

Chaque société membre doit avoir un plan d'intervention d'urgence adapté aux produits chimiques transportés, quels que soient les règlements. Si vous transportez des produits chimiques, même si la réglementation n'exige pas de plan d'intervention d'urgence, vous devez en avoir un pour répondre aux exigences de notre code.

Notre association a entrepris des activités supplémentaires. Nous avons le Programme d'aide d'urgence au transport, communément connu sous le sigle TEAP, dont vous avez peut-être déjà entendu parler. C'est un système d'intervention que nous avons mis en place à l'échelle de tout le pays. Nous avons dans des secteurs clés, des centres d'intervention régionaux que n'importe quelle société membre peut appeler quand un produit chimique est déversé en cours de transport ou de distribution. Ces centres d'intervention régionaux ont la formation voulue pour aider les équipes de première intervention à atténuer les effets de l'incident et la société membre peut ensuite compléter les efforts.

Nous avons une obligation de tiers. Un bon nombre de nos usines sont alimentées en produits chimiques qui nous servent de matières premières ou d'intermédiaires. Les fournisseurs et transporteurs de ces produits doivent satisfaire aux exigences de notre programme de gestion responsable. Les acheteurs de nos usines doivent donc aller rencontrer ces fournisseurs pour voir s'ils s'acquittent des exigences du programme et ils doivent vérifier si le transporteur s'acquitte des mêmes obligations.

Nous nous intéressons particulièrement aux efforts récemment déployés par Transports Canada pour rédiger les règlements en langage clair. Nous approuvons cette initiative, car tout ce qui vise à rendre la réglementation plus claire et plus simple à comprendre sert les intérêts de tous les membres de l'industrie. Nous avons trouvé très encourageant de participer à cette initiative.

De plus, le ministère a établi sa propre page Web sur l'Internet et, en tant que participants au processus, nous pouvons ainsi dialoguer avec lui. Nous pouvons lui faire part de nos préoccupations. Certains jours, nous recevons une réponse quelques minutes plus tard. C'est là un progrès énorme.

Nous avons également un protocole de vérification de l'intervention d'urgence selon lequel nous devons vérifier que nous avons effectivement un plan d'intervention d'urgence adapté à nos produits chimiques pour pouvoir rester membres de l'association. Je signale que Transports Canada a adopté ce protocole. Autrement dit, nous travaillons en collaboration avec le ministère. Il nous a aidés à élaborer ce protocole et accepte maintenant la vérification que nous faisons auprès de nos membres. Transports Canada surveille le processus de très près. Il ne nous laisse pas agir à notre guise. Nous travaillons en collaboration très étroite avec le ministère et ce dernier est très satisfait des progrès que nous avons réalisés jusqu'ici.

M. Markson: En résumé, sénateurs, nous tenons à souligner que la gestion responsable représente un engagement pris par l'industrie chimique envers toutes les parties prenantes. Il s'agit tant des membres de l'industrie que des intérêts de l'extérieur et surtout du public. Nous avons obtenu une rétroaction au sujet de ce programme des divers niveaux de gouvernement et, comme nous avons pu démontrer son efficacité aux organismes de réglementation, tous sont unanimes à l'approuver.

Croyez-le ou non, il s'agit d'une première au Canada. Qui a prétendu que les Canadiens manquaient d'imagination? Ce programme a été adopté dans le monde entier par une quarantaine d'entreprises et nous le mettons continuellement à jour en recherchant les possibilités futures de nous acquitter de nos responsabilités sociales.

Pour ce qui est du principal message que nous avons à vous transmettre, je conclurai en disant que, dans le cadre de cette gestion responsable, nous travaillerons avec toutes les partie prenantes pour améliorer continuellement la sécurité dans les transports. Nous croyons qu'il est possible de faire du bon travail, en dehors de la réglementation, en assurant une bonne reddition de comptes. Nous croyons que les compressions budgétaires ne nuisent pas à la protection du public et de l'environnement, et cela grâce à notre code d'éthique, dont j'ai déjà parlé.

De bons résultats sur le plan de la sécurité augmentent notre compétitivité. Il n'est pas avantageux pour nous de ne pas chercher à transporter nos produits vers les marchés de la façon la plus efficace et sécuritaire possible. Nous avons des responsabilités envers nos clients et nos fournisseurs. Notre programme de gestion responsable est bon pour nos affaires.

Voilà qui termine notre exposé, monsieur le président. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions. Nous avons tenu compte des questions que nous avons reçues et nous nous ferons un plaisir d'y répondre.

Le sénateur St. Germain: Messieurs, merci de votre exposé de ce matin et de votre participation à nos audiences.

J'ai reçu la visite de représentants de l'Association des chefs de pompiers. Je suppose qu'ils sont en première ligne. On les appelle dès qu'il y a un incident impliquant vos produits. Est-ce le seul service de la collectivité qui intervient ou y en a-t-il d'autres?

Quand vous mettez au point un nouveau produit chimique, de combien de temps disposez-vous pour communiquer l'information requise aux personnes qui interviennent en cas de déversement de produits chimiques dangereux?

J'ai parlé aux pompiers de Vancouver qui avaient des inquiétudes au sujet des produits chimiques. Ils sont venus me voir à mon bureau. Je ne me souviens pas exactement de ce qui les préoccupait, mais ils voulaient avoir les renseignements voulus sous la main. Pourriez-vous répondre à cela?

M. Doods: Nous faisons affaire à la police, aux pompiers et aux hôpitaux. Les localités bien équipées ont ce qu'elles appellent un groupe de services en cas de désastre qui est le premier à intervenir. Chaque fois que nous allons faire un exposé dans une localité, nous invitons tous les membres des services d'intervention d'urgence. Cela vous donne, j'espère, une idée de ce que nous recherchons. Parfois, un agent de la GRC ou de la police provinciale de l'Ontario est le premier arrivé sur les lieux. Nous essayons donc de faire participer les policiers à nos présentations.

J'ai le plaisir de dire que ces activités attirent beaucoup de monde. En août, j'ai participé personnellement à une présentation à Canmore. C'est un mois où les gens sont en vacances, mais une soixantaine de personnes du service de police, du service d'incendie et de la communauté médicale sont venues. Nous avons également invité les médias. Ils font partie du processus. Ils sont assez distants, bien entendu, mais ils viennent parce que nous avons des choses intéressantes à dire. Notre principal objectif est de diffuser le maximum de renseignements sur les produits transportés, comment déterminer quels sont ces produits, les réactions qu'ils peuvent produire dans une situation donnée et qui contacter pour obtenir des renseignements supplémentaires et de l'aide.

Le sénateur St. Germain: Supposons que la police appelle et vous dise qu'il y a eu un déversement. Votre association a-t-elle une équipe d'intervention disponible pratiquement 24 heures sur 24 pour fournir l'information dont les gens ont besoin pour faire face à la situation?

M. Doods: Oui.

Le sénateur St. Germain: Vous le faites?

M. Doods: Oui. J'allais dire que chacun de nos membres peut le faire. Mais je me demande si je peux l'affirmer. Je suis toutefois en mesure de vous dire ce que nous avons. Je peux vous dire ce que Dow, Celanese et Esso ont. Nous avons des gens et nous pourrions appeler immédiatement notre numéro 1-800.

Le sénateur St. Germain: Quand vous dites «nous», parlez-vous de votre association?

M. Doods: Oui. Quand nous avons parlé, dans notre exposé, de TEAP, notre Programme d'aide d'urgence au transport, si vous appeliez CANUTEC -- un bon nombre de secouristes opérationnels ont pour instruction d'appeler CANUTEC -- et si le produit est identifié comme un produit fabriqué par un de nos membres, on peut contacter les centres d'intervention régionaux TEAP. Ces centres sont équipés pour répondre directement aux secouristes dans les quelques minutes suivant leur appel.

Le sénateur St. Germain: Apparemment, on a mis au point, aux États-Unis, un système différent du nôtre. Il est informatisé. Pour une raison que j'ignore, Transports Canada n'a pas encore accepté cette méthodologie ou n'a pas voulu l'expérimenter. On m'a signalé que c'est ce que réclamaient les pompiers de Vancouver. Ils veulent un système informatisé afin que, dès qu'un appel est reçu et que le produit peut être identifié, ils puissent obtenir l'information requise par l'Internet ou par ordinateur.

M. Doods: Je connais le programme américain. Je ne suis pas certain qu'il ait eu autant de succès que ses promoteurs l'auraient souhaité, compte tenu des produits transportés. Ils sont très nombreux. Notre rôle est de fournir aux secouristes opérationnels les moyens d'identifier les produits dont il s'agit, au moyen de plaques d'identification ou d'inscriptions sur les wagons ou les camions.

Un nouveau guide a été publié. Je ne l'ai pas apporté, mais il y en a un grand nombre. C'est un guide d'aide d'urgence au transport où figurent tous les numéros de plaque. Un chapitre indique aux secouristes ce qu'ils doivent faire s'ils se trouvent devant ces plaques. Cela leur donne les moyens de prendre les mesures requises. Nous nous ferions un plaisir de travailler avec vous pour fournir les renseignements que recherche l'Association canadienne des chefs de pompiers. Nous serons toujours en mesure de le faire.

Le sénateur Perrault: La brochure que vous avez apportée avec vous ce matin est très attrayante. Je suppose qu'elle a été largement diffusée en Alberta.

M. Doods: Oui.

Le sénateur Perrault: Je remarque que vous êtes très orientés vers l'éducation. Il y a des photos de jeunes qui obtiennent de l'information de Canadian Oxy, à l'école Bruderheim. Y a-t-il un programme qui peut être mis à la disposition de toutes les écoles du pays ou des universités ou cela s'inscrit-il dans un projet spécial? Étant donné l'importance de votre industrie et la nécessité de protéger le public, ce genre de programme pourrait être mis en oeuvre d'un bout à l'autre du pays. Que font les autres membres de votre industrie dans les autres provinces?

M. Doods: Tous nos membres sont invités à se livrer à des activités de ce genre, que ce soit dans les écoles ou les clubs Kinsmen.

Le sénateur Perrault: Avez-vous contacté les commissions scolaires pour offrir vos connaissances? Cela devrait être pratiquement obligatoire dans les écoles.

M. Markson: C'est une excellente observation. Nos membres ont essayé de faire diverses choses. Par exemple, Fort Saskatchewan est une localité industrielle située des deux côtés de la rivière Nord-Saskatchewan. Nous avons là des membres de notre association et d'autres compagnies qui font partie de secteurs différents. Il y a des raffineries de pétrole, des usines de produits chimiques et des usines de transformation de produits agricoles. Nous avons constitué un comité d'éducation. Nous allons dans les écoles, des deux côtés de la rivière, pour participer à l'élaboration du programme scientifique.

L'Association industrielle de Strathcona représente les raffineries d'Edmonton. Elle va dans les écoles parler de la sécurité, de la sensibilisation de la collectivité et de l'intervention d'urgence.

Nous travaillons en collaboration avec les associations nationales à la protection de l'environnement et nous essayons de rejoindre les jeunes par l'entremise des éducateurs.

Vous avez raison, sénateur. Une harmonisation s'impose. Il faudrait que ce soit plus systématique.

Le ministère de l'Éducation de l'Alberta est en train de mettre au point un programme de chimie multimédia sur CD-ROM. Ce sera une merveilleuse façon d'éduquer les enfants dans le domaine des sciences.

Le sénateur Perrault: Les sciences sont très présentes sur l'Internet. Cela plaît aux jeunes.

M. Markson: C'est absolument fabuleux. Mais vous avez raison, continuez vos pressions et nous finirons par vous donner satisfaction. Vous avez tout à fait raison.

Le sénateur Perrault: Avez-vous des chiffres indiquant le nombre d'incidents majeurs qui se sont produits au Canada depuis dix ans et qui impliquaient des membres de votre association? Y a-t-il eu des décès? Quelles ont été les blessures causées et quelles mesures a-t-on prises pour remédier à la situation? Avez-vous des chiffres à ce sujet?

M. Doods: Nous n'avons pas de chiffres officiels, mais nous y travaillons. Nous sommes prêts à dire qu'aucun décès n'a été causé à la suite d'un accident survenu pendant le transport de marchandises dangereuses au Canada.

Le président: Est-ce vrai?

M. Doods: Je crois que c'est vrai.

Le sénateur Perrault: L'environnement a été contaminé dans certains cas.

M. Doods: Oui, il y a eu des dommages environnementaux, cela ne fait aucun doute. Tout récemment, notre association a rencontré les représentants des deux grands chemins de fer et l'association ferroviaire du Canada, la semaine dernière à Winnipeg, pour discuter de la sécurité ferroviaire. Nous croyons que le nombre d'accidents est en baisse. Il y a eu des mois difficiles, l'année dernière, en octobre et novembre, à cause du mauvais temps.

Pour ce qui est de Nova Chemicals, notre équipe d'aide d'urgence au transport n'a pas eu à intervenir depuis trois ans, et nous expédions une grosse quantité de produits chimiques.

Le sénateur Perrault: On semble avoir fait des progrès.

M. Doods: Nous sommes très satisfaits du travail que nous avons pu faire en collaboration avec les deux compagnies de chemin de fer.

Le sénateur Perrault: Cela ferait une très bonne émission spéciale pour Radio-Canada, par exemple. On pourrait en faire un docu-drame sur la protection de l'environnement et la protection des vies humaines. Je pense qu'on aurait là tous les ingrédients voulus pour une émission spéciale très intéressante qui pourrait être réalisée chez nous et obtenir beaucoup de publicité.

Le sénateur St. Germain: Sénateur Perrault, puis-je demander, par votre entremise, quel est le pourcentage de marchandises dangereuses qui sont transportées par chemin de fer plutôt que par camion?

Le sénateur Perrault: Bonne question.

M. Doods: Il faut être prudent avec les chiffres.

Nova Chemicals a fait 56 000 expéditions en 1995, dont 36 000 par chemin de fer. Le poids transporté par chemin de fer est à peu près quatre fois plus élevé que par camion. Vous pouvez transporter 25 tonnes dans un camion et 100 tonnes dans un wagon-citerne.

Le sénateur Perrault: C'est un peu en dehors du sujet, mais a-t-on jamais établi la responsabilité de l'horrible désastre de Bhopal, en Inde?

M. Markson: Je ne pense pas qu'elle ait été établie, mais Bhopal a été, dans une large mesure, à l'origine de ce programme de gestion responsable.

Le sénateur Perrault: Je me demandais quels avaient été ses effets sur l'industrie.

M. Doods: À l'époque, le gouvernement fédéral s'est demandé si ce genre de désastre pouvait se produire au Canada. Un groupe tripartite a été constitué pour étudier la question. Dix questions précises ont été posées. L'un des résultats a été notre programme. Notre association ne pouvait pas se permettre de laisser une telle chose se produire au Canada.

M. Markson: On a également établi un organisme national appelé CCAIM, le Conseil canadien des accidents industriels majeurs. Notre association travaille en collaboration étroite avec cet organisme. Il est national et non politique. Toutes les parties prenantes veillent à ce que les normes soient les plus élevées pour la sécurité du public et de l'environnement. Il y a deux semaines, le conseil a tenu sa conférence à Edmonton.

Le sénateur Perrault: Ce genre de progrès est agréable à constater. Merci.

Le sénateur Adams: Hier, nous avons entendu le témoignage du ministre des Transports du gouvernement territorial. Vous transportez parfois des produits dangereux dans les Territoires, surtout pour l'exploration pétrolière et les mines de diamants. Nous avons entendu dire, hier, qu'on avait commencé à construire des chemins d'hiver jusqu'à une mine de diamants et que plus de 3 000 camions transporteront des marchandises dans les territoires.

Je me demandais quelle est la différence entre les chemins d'hiver et les routes. Le ministère des Transports a une réglementation à l'égard de l'exportation de marchandises dangereuses. Nous avons des barges qui vont de Churchill, au Manitoba, jusqu'à la région de Keewatin. La région de Baffin est surtout approvisionnée à partir de Montréal, tout comme les localités minières de Nanisivik et Little Cornwallis, dans le haut Arctique. Je me demandais quelle est la différence dans la réglementation touchant les routes et l'exportation pour certaines des compagnies qui travaillent dans les Territoires.

M. Markson: Du point de vue de l'expéditeur, nous devons rester vigilants en ce qui concerne les normes de sécurité. Ces normes devraient être uniformes. Nous ne pensons pas qu'il faudrait compromettre le réseau routier, quelle que soit sa destination, quand il s'agit de transporter des matériaux dangereux ou non dangereux. Nous ne souhaitons pas que l'on fasse deux poids deux mesures.

Le sénateur Adams: Je m'intéresse surtout à la construction des chemins d'hiver. Ils traversent des lacs, ce qui n'est pas tout à fait la même chose que dans le cas des routes ordinaires. Les dangers sont différents sur les lacs. S'il y a un déversement, vous devez nettoyer, mais comment faites-vous? Certains camions passent à travers la glace. C'est ce qui m'inquiète.

M. Markson: Exactement. Il y a un risque environnemental. Vous avez parfaitement raison. Je ne pense pas qu'il devrait y avoir le moindre compromis, pas si nous respectons notre code de déontologie.

M. Doods: Nous faisons également des évaluations des risques routiers. Chaque membre de notre association doit évaluer les risques de chaque itinéraire. Cette évaluation tient compte des centres de population. Elle tient compte des cours d'eau. Elle tient compte des régions qui ont une écologie fragile. Nous ne pouvons pas toujours les contourner, mais nous sommes obligés d'en tenir compte et de veiller à ce que les camions ne les traversent qu'à certaines heures ou à ce que les services d'intervention d'urgence de la zone en question sachent exactement quoi faire en cas d'accident. Vous ne voulez pas perturber une source d'eau potable ou une région dont l'écologie est fragile. L'expéditeur et le transporteur ont, à cet égard, une responsabilité envers la collectivité.

M. Markson: C'est également une question de rentabilité, car un nettoyage coûte très cher.

Le sénateur Adams: Oui, et là encore, la situation est différente.

À Ottawa, je conduis parfois après une tempête de neige. Même s'il y a deux pieds de neige, je n'ai aucun problème. Si je vais dans une localité du Nord où il y a deux pieds de neige, je ne peux pas conduire. Je dois passer par-dessus. Dès qu'un conducteur dépasse Yellowknife, ce n'est plus du tout la même chose que de conduire en Alberta. Il fait très froid dans le Nord et la neige est fine; ce n'est pas de la poudre. C'est comme de la glace. Vous savez ce que je veux dire. Les travailleurs ont reçu une formation pour le cas où il se produirait un accident pendant le transport de produits chimiques.

Le sénateur Bacon: Avez-vous dit que vos membres représentaient 90 p. 100 des fabricants de produits chimiques?

M. Doods: Oui.

Le sénateur Bacon: Qu'advient-il des 10 p. 100 restant? Posent-ils davantage de dangers pour le réseau routier, pour les usagers de la route et pour l'environnement?

M. Markson: Il faudra leur poser la question.

Le sénateur Bacon: Vous devez le savoir.

M. Markson: Nous voulons leur montrer, par l'exemple, que nous avons un programme de gestion responsable crédible qui complète la réglementation du gouvernement à tous les niveaux et nous voudrions les inciter à se joindre à notre association. En fait, nous allons lancer une campagne de recrutement. J'espère qu'ils verront les avantages de notre initiative et qu'ils adopteront nos normes. Ils sont les bienvenus au sein de notre association, mais c'est à la condition de se conformer à des normes rigoureuses.

Le sénateur Bacon: C'est à cause de votre code qu'ils ne veulent pas se conformer à vos règles?

M. Markson: Un bon nombre d'entre eux ne sont pas nécessairement membres de notre association. Ils peuvent toutefois appartenir à d'autres associations et, bien souvent, ils appliquent les principes essentiels de notre code. Nous voudrions que tout le monde soit au même diapason. C'est un défi à relever.

Le président: Pour en revenir aux 10 p. 100, c'est un pourcentage important. Cela ne fait aucun doute. Ce serait toutefois encore plus important si ces 10 p. 100 de producteurs fabriquaient 30 ou 40 p. 100 de la production totale. Pourriez-vous nous en dire plus?

Que se passe-t-il si Dow Chemical veut faire cavalier seul? Si cette compagnie fait partie des 10 p. 100, elle représente, à elle seule, 50 p. 100 de l'industrie. Est-ce le cas? Ces 10 p. 100 de fabricants produisent-ils 10 p. 100 du volume ou 1 p. 100?

M. Markson: Je n'ai pas la réponse à cette question, mais je serais prêt à y répondre par écrit.

Le président: Est-ce une quantité importante? Si vous pouviez indiquer leurs noms, cela nous donnerait peut-être la réponse.

M. Markson: Je ne peux pas le faire aujourd'hui, monsieur, mais je serais prêt à vérifier pour vous.

Le président: Peut-être pourriez-vous le faire. Cela nous donnerait une bonne idée de la situation.

M. Markson: Absolument.

Le président: Dans un cas, ce n'est pas bien grave, mais dans l'autre cas...

M. Markson: C'est important, car il faut tenir compte de l'ensemble de la société.

Le président: J'aimerais que vous nous parliez brièvement du transport des produits dangereux à l'extérieur du Canada, aux États-Unis, en Europe et en Asie, dans tous les pays où vous savez ce qui se passe. Mais avant, pourriez-vous nous parler des normes qui pourraient être établies pour les transporteurs? Vous étiez là quand j'ai posé des questions au sujet des pneus. Quand vous conseillez vos membres, estimez-vous important qu'une norme soit respectée dans votre industrie?

M. Markson: Je pense que M. Doods pourrait entrer dans les détails, mais j'ai mentionné que nous collaborons avec les diverses parties prenantes. Nous avons établi des relations de coopération avec nos transporteurs. C'est essentiel. Ils sont nos partenaires. Quel que soit le mode de transport, les transporteurs nous aident à acheminer nos marchandises jusqu'au marché. M. Doods pourrait vous en donner des exemples et vous parler du genre de travail qu'il fait avec ces transporteurs.

M. Doods: Nous avons établi une norme pour les transporteurs.

Le président: Cela comprend-il les normes pour les pneus?

M. Doods: Non. Mais nous avons une norme pour les chemins de fer et une autre pour les transporteurs routiers. Nous nous orientons vers la deuxième phase. Nous venons d'entendre parler d'un programme appelé Partnership in Compliance, un projet pilote auquel participe l'Association canadienne du camionnage. Si nous avions quelque chose à vous demander aujourd'hui, ce serait votre aide pour comprendre ce programme, parce qu'il va conduire à l'harmonisation de la participation des transporteurs aux programmes de sécurité. Nous venons de demander quel était le programme concernant les pneus et nous avons pris note de ce que vous nous avez dit. Le programme Partnership in Compliance précise ce que le programme pour les pneus devrait être pour un transporteur routier canadien. Notre association a examiné la question et nous sommes en train d'adopter ce programme dans le cadre de notre évaluation des transporteurs routiers. Nous n'avions pas de norme en ce qui concerne le taux d'accidents. Ce programme en a une. Il précise quel doit être le taux d'accidents urbains.

Le président: Avez-vous ou n'avez-vous pas de données à cet égard?

M. Doods: Les données sont là et l'Association canadienne du camionnage les possède. Nous avons posé la question, mais sans savoir exactement ce qu'il fallait demander. Nous pensions qu'il devait y avoir un programme de dépistage des drogues, mais maintenant il y a des normes et nous savons que ces transporteurs doivent les appliquer. C'est ce que nous recherchons dans notre association. Le programme Partnership in Compliance est de plus en plus reconnu au Canada et aux États-Unis. Nous y voyons là un net avantage pour nous.

Ma connaissance du camionnage est limitée et je ne sais pas à quoi devrait ressembler un pneu. Je ne m'y connais sans doute pas autant que vous. Cette initiative qui accompagne la déréglementation devrait certainement retenir l'attention au cours des années à venir. Nous serions prêts à communiquer un exemplaire de ce programme à votre sous-comité.

Le président: Nous l'apprécierions vivement.

M. Doods: Le programme Partnership in Compliance ne s'applique pas à tous les transporteurs. Une petite compagnie qui n'a qu'un seul camion aura de la difficulté à tenir les dossiers requis. Nous avons parlé à certains grands transporteurs de la province des dossiers à tenir et ils trouvent que c'est une tâche très exigeante.

Il ne faut pas se contenter de mesures superficielles. Cela exige des ressources, mais nous considérons que c'est là quelque chose de positif et cela va beaucoup plus loin que nous ne l'avions demandé.

Le président: Vous avez fait des pas de géant depuis le début des années 80, sur le plan de l'emballage, de l'identification, de la communication et de l'éducation. Tout le monde fait de son mieux du côté du camionnage ou de l'industrie, mais les problèmes existent toujours et votre programme de partenariat est excellent.

Les membres du comité peuvent-ils apprendre quelque chose de l'expérience étrangère en Europe ou en Asie? L'industrie partage-t-elle la technologie et les procédés?

M. Markson: Il y a une association internationale de fabricants de produits chimiques. Notre association étant reconnue comme la fondatrice du programme de gestion responsable, nous jouons un rôle de premier plan sur la scène internationale. Les questions que vous avez soulevées conduiront aux améliorations continues que nous recherchons. Notre objectif est de ne tolérer aucun accident. Telle est la norme que nous voulons atteindre. Notre association canadienne joue un rôle de premier plan au sein de ces associations internationales.

Le sénateur Perrault: De toute évidence, votre organisme se penche sur d'excellentes questions. Vous dites que vos employés trouvent, chaque jour, des solutions novatrices, ce qui vous permet de tenir votre promesse de sauvegarder la santé humaine. Quels postes ces employés occupent-ils dans la hiérarchie de la compagnie? S'agit-il de vice-président de l'environnement ou confiez-vous cette responsabilité à un jeune fraîchement diplômé de l'université? Quel est le poste que les responsables de l'environnement occupent dans la hiérarchie des sociétés membres de votre association?

M. Doods: Chaque employé y participe.

Le sénateur Perrault: Vous avez quand même un service de l'environnement?

M. Doods: Oui, certainement.

Le sénateur Perrault: Je veux dire que chaque société a un service de l'environnement.

M. Doods: Certainement, elle a un programme.

Le sénateur Perrault: Mais ce n'est pas un poste d'une importance secondaire.

M. Doods: Absolument pas.

M. Markson: Je dirais que l'importance accordée à la sécurité et à ce programme de gestion responsable fait partie de la planification d'entreprise de chacun de nos membres.

Le sénateur Perrault: Plusieurs compagnies créent un poste de vice-président de l'environnement.

M. Markson: Absolument.

Le sénateur Perrault: Et certains de vos membres s'intéressent à l'environnement de la même façon.

M. Markson: Oui.

Le sénateur Adams: Vous avez dit, je crois, que lorsque vous engagez une entreprise de camionnage pour transporter des produits dangereux, vous devez l'informer du genre de produit chimique qu'elle transporte. Ce matin, j'ai posé une question au sujet d'un camionneur qui doit conduire pendant 13 heures pour savoir s'il faudrait l'assujettir à une réglementation différente s'il transporte des marchandises dangereuses. Avez-vous un règlement qui s'applique au transport de produits dangereux? Avez-vous un règlement pour le camionneur ou est-ce à lui de décider quand il doit se reposer? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Doods: Encore une fois, je peux seulement répondre en fonction de ce que Nova a fait par le passé et continue de faire. Si nous transportons un produit que nous jugeons à haut risque, nous spécifions l'itinéraire, les arrêts et le nombre de chauffeurs. Nous avons transporté des produits très toxiques de notre usine de Red River à Lloydminster et nous avons spécifié le transporteur et l'itinéraire.

Le président: L'avez-vous fait au moment de l'expédition?

M. Doods: Oui, à ce moment-là, et nous avons fait venir les chauffeurs à l'avance pour examiner avec eux la feuille de données sur la sécurité. En cas de problème, cela leur indiquait ce qu'ils devaient faire.

Récemment, à l'occasion d'une expédition aux États-Unis, nous avons visité les services de première intervention de la ville où nous transférions un liquide inflammable. Nous avons visité le service d'incendie pour nous assurer qu'il saurait comment faire face à ce produit en cas d'urgence. Quelles que soient les précautions que nous prenons, il y a toujours un élément humain dans tout ce que nous faisons. Un chauffeur qui est derrière le volant pendant dix heures et qui se trouve confronté au mauvais temps alors qu'il lui reste seulement une heure de route va essayer de continuer quand même. C'est humain.

Nous essayons également de laisser une certaine latitude aux transporteurs. S'ils doivent s'arrêter, qu'ils s'arrêtent.

J'ai entendu M. Sokil dire que les expéditeurs exerçaient de fortes pressions pour que les cargaisons soient livrées à temps, mais je ne connais pas ce genre de situation. Je peux comprendre, mais si un chauffeur s'arrête parce qu'il est fatigué, nous préférons revoir les délais fixés avec le transporteur que d'avoir à examiner un accident avec tout le monde dans la pièce. Comme l'a souligné M. Markson, le coût d'un accident est tout simplement inacceptable.

Le président: Merci, messieurs, pour ce témoignage très intéressant. Nous sommes très satisfaits de ce que vous avez fait. Il y a eu un changement très important entre la pagaille des années 70 et des années 60 et la façon dont les choses sont organisées aujourd'hui.

La séance est levée.


Haut de page