Délibérations du comité sénatorial permanent
des
Peuples autochtones
Fascicule 4 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 15 avril 1997
Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones, auquel a été renvoyé le projet de loi S-12, prévoyant l'autonomie gouvernementale des premières nations du Canada, se réunit aujourd'hui à 10 h 06 pour examiner le projet de loi.
Le sénateur Landon Pearson (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, nous constituons un quorum.
Nous voulons que les témoins nous parlent surtout des aspects juridiques et constitutionnels du projet de loi S-12.
Veuillez nous présenter brièvement les témoins.
Le sénateur Tkachuk: Les témoins ne sont pas prêts à prendre la parole. Un certain nombre de sénateurs ont posé des questions au sujet de la Charte et de certains problèmes constitutionnels. Nous avons répondu à un bon nombre de ces questions dans l'exposé que nous avons fait lors de l'étude préalable. Les témoins ont été convoqués ici pour répondre à des questions, mais les sénateurs qui ont posé ces questions ne sont pas ici.
En tant que législateur, je suis satisfait. Je ne sais pas ce qu'il en est des autres sénateurs.
La présidente: Plusieurs sénateurs se sont ajoutés au comité depuis que vous avez fait votre exposé. Il faudrait qu'ils soient mis au courant, notamment des questions juridiques et constitutionnelles.
Mme Catherine Twinn, conseillère juridique, Lesser Slave Lake Indian Regional Council: Nous pouvons présenter un bref exposé pour vous rappeler les principales questions.
La présidente: Cela nous obligerait, le sénateur Anderson et moi-même. Je voudrais bien savoir comment vous conciliez cela avec la Constitution, les relations fédérales-provinciales et la Charte des droits et libertés.
Mme Twinn: On trouve un bon sommaire de la mesure législative au dos de la page couverture du projet de loi. Le préambule est important, car il définit le cadre de la mesure. Il est clair que, au plan juridique, la Couronne entretient depuis longtemps des relations avec les tribus, les bandes ou les organisations indiennes. Depuis avant la Loi sur les Indiens. Des centaines et des centaines de traités ont été signés; des traités de commerce et d'amitié principalement fondés sur les principes de la mutualité, de la réciprocité et de l'avantage mutuel.
Je me rappelle avoir lu l'histoire d'un chef iroquois qui, en 1645, était descendu aux Trois-Rivières pour rencontrer une délégation d'ennemis. Il avait dit à ceux-ci: «Je suis venu vous faire part des pensées de mes peuples et de mon pays et je sais que, ce faisant, je risque peut-être ma vie.»
Par suite de ses efforts, un traité fut signé. Mais, deux ans plus tard, sa violation déclencha les guerres du castor, qui durèrent 50 ans et coûtèrent la vie à beaucoup. C'est une vieille histoire. C'est une histoire riche et importante qu'il faut bien comprendre.
La Loi sur les Indiens n'a pas créé les bandes, organisations ni tribus indiennes, bien qu'on le croirait à en juger par les arguments juridiques que les juristes du ministère de la Justice ont fait valoir devant les tribunaux.
La Loi sur les Indiens n'est pas un code législatif complet régissant toutes les questions indiennes. Il s'agit d'une reconnaissance législative des anciennes organisations, bandes ou tribus indiennes. Au fond, il s'agit de collectivités.
Je ne vais pas aborder le sujet des collectivités, car si ceux d'entre vous qui font depuis peu partie du comité prennent connaissance des différents témoignages qui ont été présentés devant le présent comité, ils auront des renseignements de première main sur ce qu'est une collectivité, sur ce qu'elle représente et sur la façon dont une collectivité est détruite.
En fait, la Couronne a toujours reconnu ces collectivités et, tout récemment, dans l'affaire Van der Peet, le juge en chef Antonio Lamer a fait remarquer que les titres indiens ou autochtones n'ont pas été accordés par le souverain ni par la Couronne, mais qu'ils renvoient à des droits et à des intérêts légaux qui existaient avant l'arrivée des Européens et que cette réalité légale découle d'un seul fait, à savoir qu'avant l'arrivée des Européens, ces gens vivaient en collectivités, en sociétés organisées conformément à leurs coutumes, lois et pratiques. Le préambule du projet de loi fournit un cadre contextuel à la mesure législative.
L'objet du projet de loi est défini à l'article 3, qui prévoit ceci:
La présente loi a pour objet de permettre à la population autochtone des réserves indiennes d'exercer les attributions inhérentes à son statut et de préciser ce statut et ces attributions.
Tel en est l'objet, bien clair et simple.
L'article 4 décrit comment une collectivité peut être régie par cette loi, soit tout le processus qu'elle doit suivre pour y arriver. La collectivité doit mettre au point une proposition comptant un certain nombre de points prévus aux alinéas 4(3)a) à h). Comme le prévoit le paragraphe 4(4), elle doit aussi soumettre un projet de constitution à l'approbation de ses électeurs. La Constitution est un document important. Elle est rédigée par le peuple, pour le peuple; elle vient du peuple et de la collectivité.
La Constitution est le mécanisme par lequel le peuple exprime ses règles, sa volonté, ses exigences quant à l'exercice des pouvoirs que ce projet de loi conférera aux institutions de la collectivité, tels que, par exemple, la responsabilité financière, la responsabilité politique, la responsabilité sociale et la convocation de réunions. Tous les points de ce genre sont prévus. Tout dépend de la collectivité, qui est celle qui connaît le mieux ses propres besoins, priorités et préoccupations et qui sait le mieux comment assurer un équilibre.
Afin d'expliquer au mieux ce projet de loi, je vais utiliser une simple analogie. À l'heure actuelle, vous avez la Loi sur les Indiens et des administrateurs fédéraux qui exercent le pouvoir à l'égard des collectivités indiennes. Supprimez-les et laissez les collectivités se prendre en mains, et vous aurez compris de quoi retourne le projet de loi. En outre, beaucoup des questions constitutionnelles et juridiques qui peuvent vous venir à l'esprit tomberont d'elles-mêmes, car ce projet de loi ne change rien au statu quo. Il remplace tout simplement des bureaucrates fédéraux par la collectivité.
L'article 5 entre dans la section intitulée «Assujettissement à la loi».
Le prochain article important est l'article 8, qui porte sur le pouvoir législatif et qui se lit comme ceci:
Est reconnu à la Première nation le pouvoir de légiférer pour la paix et l'ordre sur son territoire ainsi que pour son bon gouvernement, notamment dans les domaines énumérés à l'annexe II, sous réserve des restrictions imposées à l'autorité législative par la Constitution.
L'annexe II figure à la toute fin du projet de loi. Y sont énumérées les compétences législatives possibles, dont les élections et référendums, le mode de fonctionnement de la Première nation, l'exercice des pouvoirs de la Première nation, la gestion interne de la Première nation, les terres de la Première nation, les fonds et autres biens de la Première nation, et cetera.
Est important aussi l'article 10, qui prévoit ceci:
La portée des lois de la Première nation se limite à son territoire, sauf disposition contraire de la présente loi ou d'une loi de la nation édictée dans un domaine visé aux points 13, 14, 15, 16, 17 ou 33 de l'annexe II.
Les points dont il est question à l'annexe II comprennent l'éducation, des questions intéressant le bien-être des enfants, le placement d'enfants, les testaments et successions, les héritages, les fiducies, la garde et l'adoption des enfants. À l'heure actuelle, par exemple, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien administre une très importante caisse de l'enseignement postsecondaire pour les Indiens, où qu'ils résident. Cela ne se limite pas aux Indiens qui vivent dans les réserves. La situation demeure donc inchangée. Je pourrais vous citer d'autres exemples, mais je crois que nous y reviendrons lorsque nous répondrons aux questions.
L'article 11 prévoit un mécanisme d'application des lois de la collectivité. Rien n'est prévu à l'heure actuelle pour l'application des règlements des bandes.
Le directeur général régional pour l'Ontario du ministère des Affaires indiennes, Jerry Kerr, m'a déjà parlé de la collectivité en Ontario. Des certificats de possession y sont utilisés dans les réserves et un membre de la collectivité détenait un tel certificat pour un terrain. Or, on a accordé l'accès à ce terrain à un non-Indien, qui en a fait un dépotoir de pneus. La collectivité était très préoccupée à ce sujet, mais n'avait aucun moyen de régler le problème parce qu'elle ne pouvait pas appliquer ses propres lois.
À l'heure actuelle, la GRC ne sévit habituellement pas lorsque l'on contrevient à un règlement d'une bande. C'est au petit bonheur et c'est très frustrant.
Une de nos collectivités a adopté un règlement interdisant les boissons alcoolisées dans la réserve. Le règlement a été soumis au ministère des Affaires indiennes. Vous n'ignorez pas que, conformément à la Loi sur les Indiens, le ministère a le pouvoir absolu -- ce que je trouve dangereux -- de rejeter un règlement pour quelque raison que ce soit et sans avoir à fournir de raison. Il n'a même pas à se justifier.
Toutefois, la collectivité en question a adopté ce règlement, qui a été approuvé par le ministère en dedans des 40 jours prescrits et qui est alors entré en vigueur. Un agent de bande était chargé d'appliquer le règlement. Des panneaux installés dans la réserve annonçaient que ce règlement était en vigueur et que les contrevenants étaient passibles de sanctions. On a pu contrecarrer dans la collectivité les problèmes que causaient un petit groupe de malfaiteurs qui endommageaient des propriétés et qui commettaient des délits liés à la consommation de boissons alcoolisées, parce que ceux-ci ont compris qu'ils s'exposaient à des sanctions.
Un jour, toutefois, un juriste du ministère de la Justice s'est penché sur le règlement en question et a décidé qu'il allait peut-être à l'encontre des droits conférés par la Charte aux membres de la collectivité. Une lettre a été adressée, non pas à la collectivité ni aux dirigeants de la bande, mais au ministère albertain de la Justice. Il a été décidé que la collaboration des tribunaux albertains ne serait plus assurée. Jusque-là, le procureur provincial de la Couronne recevait les renseignements fournis sous serment par l'agent de bande et intentait des poursuites contre les contrevenants.
Voilà que, tout à coup, le mécanisme d'application du règlement était littéralement supprimé sans même qu'on en ait discuté avec la collectivité. Et la collectivité ne l'a appris que grâce à la courtoisie d'un sergent de la GRC en fonction dans la région.
Les dirigeants de la bande étaient extrêmement affligés. Ils ont compris qu'ils n'avaient aucun pouvoir. Les malfaiteurs de la collectivité avaient à nouveau les coudées franches et l'intérêt de la collectivité ne pouvait plus s'exprimer de façon légale et ordonnée.
L'article 11 est important parce qu'il établit que seront infligées sous le régime d'une loi de la Première nation des amendes maximales et des peines maximales d'emprisonnement, qui ne peuvent être supérieures aux maximums généralement applicables aux infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Conformément à l'annexe II du projet de loi, la collectivité a le pouvoir de constituer et de désigner des juridictions civiles et criminelles. Beaucoup de crédits fédéraux sont allés aux Territoires du Nord-Ouest, où il y a désormais des juges de paix indiens qui ont toute compétence en matière d'infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
Nous, de la région du Lesser Slave Lake Regional Council, avons créé notre propre service de police, le Lesser Slave Lake Regional Police Service, qui tient son pouvoir de la GRC. Ce service de police a été créé conformément au Règlement de la bande. Je fais partie de la commission de police. Nous sommes en train d'établir des conseils de détermination de la peine et de nommer des juges de paix. Vous n'ignorez pas que les juges de paix ont leur mot à dire à toutes les étapes du processus pénal et qu'ils doivent être indépendants et impartiaux et donc inamovibles et rémunérés.
Il y aura bien des façons d'assurer la collaboration avec les autres ordres de gouvernement pour ce qui est des accords, protocoles, et cetera pour qu'il y ait vraiment équilibre et responsabilité. Toute collaboration débute par l'établissement de toutes sortes d'influences pour en arriver aux fins convenables.
Une autre partie importante du projet de loi est l'article 16, qui se lit comme ceci:
La propriété absolue de ses réserves et de celle de ses autres terres qui sont réservées aux Indiens -- au sens de l'article 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 -- est transférée à la Première nation à la date de son assujettissement à la présente loi, sous réserve des droits et conditions visés à l'article 17.
L'article 17 protège les droits légitimes, les droits de la tierce partie. Ces droits sont reconduits et ont force obligatoire sur le titre.
Je passe maintenant à l'article 28 du projet de loi, qui prévoit une option pour l'organisation de la Première nation. L'article 29 reconnaît que les Premières nations peuvent se réunir pour former ce qu'on appelle une «entité politique confédérale», comme l'est, en fait, le Lesser Slave Lake Indian Regional Council. Celui-ci est formé par huit bandes indiennes qui reconnaissent depuis toujours que, pour ce qui est de questions importantes d'intérêt commun, elles doivent s'unir pour défendre l'intérêt de la collectivité.
Cette entité politique peut avoir certains des pouvoirs législatifs qui lui sont délégués. Ce serait logique pour certaines des institutions qui sont établies et qui doivent continuer de fonctionner, qu'il s'agisse de tribunaux, de services s'intéressant au bien-être des enfants, et cetera.
Le sénateur Taylor: À propos de l'article 28, qui a le droit de se prononcer sur un fusionnement?
Mme Twinn: La collectivité elle-même.
Le sénateur Taylor: Ceux qui sont fusionnés?
Mme Twinn: Oui.
Le sénateur Taylor: Ceux qui ne participent pas au fusionnement ne peuvent pas se prononcer, même s'il leur faudra peut-être quitter le groupe?
Mme Twinn: Un fusionnement, c'est la réunion de deux collectivités.
Le sénateur Taylor: Mais elles viennent d'ailleurs.
Mme Twinn: Par exemple, quatre bandes peuvent vouloir se fusionner.
Le sénateur Taylor: Disons qu'une bande veut s'unir à la Sawridge. Est-ce que cette bande serait la seule à pouvoir se prononcer sur le fusionnement? Les autres bandes des environs auraient-elles leur mot à dire? Autrement dit, c'est comme une séparation.
Mme Twinn: Aux États-Unis, dans les années 30, on a invoqué la Indian Reorganization Act pour fusionner une poignée de collectivités et créer un gouvernement central. Cela a marché dans certains cas, mais pas dans d'autres. Dans les cas où cela n'a pas marché pour des raisons très pratiques de langue, de géographie ou de culture, par exemple, les frictions sont constantes parce que l'entité politique du gouvernement central prend des décisions que n'approuve pas une collectivité qui se considère toujours comme distincte et séparée.
Par exemple, en Arizona, les Tohono O'odham, à proximité de Tucson, ont une réserve. L'eau constitue un gros problème dans le Sud-Ouest. Lorsque le gouvernement a été centralisé, les collectivités ont perdu des pouvoirs au profit de ce gouvernement central indien. La personne qui est à la tête de ce gouvernement central indien a eu des discussions avec la municipalité de Tucson pour la vente par la collectivité à la ville de droits relatifs à l'eau. Bien sûr, comme Tucson ne peut pas prendre de l'expansion sans cet accord, il y a un énorme jeu de pouvoirs et les pressions sont très fortes.
La collectivité se bat sur deux fronts. Elle se bat comme qui dirait à l'interne, avec son propre gouvernement central qui veut faire un coup d'argent, alors qu'elle ne veut pas vendre ses ressources. Elle se bat aussi avec Tucson et des intérêts de l'extérieur qui veulent acquérir une partie de ces droits.
Cela n'arrivera pas dans ce cas-ci. La centralisation est très dangereuse parce qu'il s'agit de collectivités. Lorsque nous avons comparu la dernière fois devant le présent comité, nous avons beaucoup parlé de collectivité. Je sais qu'on a pu se demander pourquoi. Je ne saurais trop dire à quel point il importe que le pouvoir sur la collectivité soit aux mains de la collectivité. Sans cela, rien ne saurait fonctionner; pas plus les normes d'hygiène que les normes écologiques et que l'économie elle-même.
Lorsque ce sont des intérêts de l'extérieur qui gèrent la collectivité, ce qui constitue en fait une forme d'apartheid -- une gestion et un droit de regard de l'extérieur -- les problèmes et les conflits surgissent. On fait des choses qui n'ont pas de sens. Cela peut prendre du temps, mais des conflits finissent toujours par se manifester. Cela ne fonctionne pas.
M. Michael McKenny, conseiller juridique, Lesser Slave Lake Indian Regional Council: Le sénateur Taylor demande si les participants à un fusionnement et les parties qui s'en détachent sont seuls à pouvoir se prononcer. Ce n'est pas comme si une partie d'une Première nation pouvait partir et que seule cette partie pouvait voter. Ce n'est pas comme le Québec qui dit qu'il peut décider de se séparer. Il faut l'approbation de 80 p. 100 de la population. Si l'on prend l'exemple du Canada, 80 p. 100 des Canadiens devraient décider qu'une partie du Canada peut se séparer du reste et les conditions de la séparation devraient être établies avant le vote. Ce serait très différent de l'analogie que vous avez utilisée.
Mme Twinn: Je vais laisser la parole à Mike Taylor au sujet de l'article 34. Il s'agit d'un article important, compte tenu des questions auxquelles nous nous attendions.
M. McKenny: Je suis conseiller juridique auprès de la bande de Sawbridge mais également auprès du Lesser Slave Lake Indian Regional Council. J'ai participé à la rédaction du projet de loi S-12. La rédaction avait été entreprise, à l'origine, par M. Jim Ryan, à qui j'ai prêté main-forte et qui a bien voulu se joindre à nous. Il pourra aussi répondre à vos questions.
Le sénateur Twinn: M. McKenny est également directeur exécutif et gère toutes les affaires de la bande. Son rôle est important car il lui permet de connaître tous les problèmes que la Loi sur les indiens cause aux Premières nations ou aux bandes indiennes. Il doit affronter quotidiennement des problèmes de cette nature.
M. McKenny: Nous avons préparé un diagramme dont je me servirai pour vous expliquer les paragraphes 34(1), (2) et (3). Certaines personnes ont de la difficulté à comprendre cet article et nous espérons pouvoir ainsi les aider à y voir plus clair.
Dans la première hypothèse qui figure sur le diagramme, une loi concernant une Première nation a été adoptée et il s'agit de savoir si une loi fédérale d'application générale s'applique et, le cas échéant, laquelle.
La première chose à faire est de voir s'il s'agit d'une loi fédérale d'application générale. S'il ne s'agit pas d'une loi d'application générale comme la Loi sur les indiens, ou d'une loi spéciale, elle ne s'appliquera évidemment pas. Cet article ne vise que les lois d'application générale, le Code criminel par exemple.
Il faut ensuite voir si la loi est compatible avec les traités et les accords sur les revendications territoriales. Dans le cas contraire, la loi ne s'appliquerait pas, ce que stipulerait l'article 35. Le projet de loi rappelle que la loi d'application générale doit être conforme aux traités et aux accords sur les revendications territoriales.
Dans l'affirmative, il s'agit ensuite de déterminer si la loi est compatible avec le projet de loi S-12. Si le projet de loi est adopté, il affectera certainement d'autres lois, notamment, dans une certaine mesure, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Le projet de loi pose cependant comme règle de base en matière d'environnement l'obligation, pour la Première nation, de choisir entre la loi canadienne, qui dicte la norme applicable à la grandeur du Canada, la norme provinciale ou sa propre norme, sans toutefois pouvoir aller en deçà de la norme la plus faible, fédérale ou provinciale.
Si l'on tient pour acquis que la loi d'application générale est compatible avec le projet de loi, il faut ensuite voir si elle est également compatible avec les lois et la constitution de la Première nation. Dans l'affirmative, la loi fédérale s'appliquera. Puisque toutes ces mesures concernent le même sujet et ne sont pas en conflit, elles s'appliqueront simultanément.
En cas d'incompatibilité, il faut chercher à voir si la loi d'application générale s'appliquera, en procédant à l'exercice suivant, plus complexe. Il faut d'abord chercher à voir si la loi porte sur un domaine mentionné à l'article 91 de la Constitution, c'est-à-dire une rubrique de compétence établie par le gouvernement fédéral. Dans l'affirmative, il faut se demander si la loi fédérale d'application générale s'appliquerait à une province, dans des circonstances comparables. Autrement dit, si une province a le pouvoir d'adopter une loi concernant les droits de propriété ou les droits civils et qu'un tribunal juge que cette mesure a priorité sur une loi adoptée par le gouvernement fédéral sous la rubrique du commerce, la Première nation serait sur le même pied que la province. Dans la plupart des cas cependant, c'est la loi fédérale qui primerait et ce genre de situation ne se produirait pas.
Si une province peut adopter une loi qui prévaut sur la loi fédérale, on fait alors appel aux deux critères déjà énoncés concernant les pouvoirs résiduaires du Parlement, à savoir s'il s'agit d'un domaine distinct et d'intérêt national. Le Code criminel, par exemple, est un sujet distinct d'intérêt national sur lequel une loi provinciale ne pourrait pas primer.
S'il ne s'agit pas d'un domaine distinct il faut se demander, conformément au second critère, si la loi est une mesure extraordinaire temporaire qui vise à éviter un désastre majeur. On pense ici à des mesures comme la Loi sur les mesures d'urgence ou d'autres lois adoptées dans le passé pour faire face à des situations d'urgence nationale.
Nous avons escamoté la case située à droite, au milieu de la page, qui contient les mots «Domaine mentionné à l'article 92 de la Constitution». Normalement, le Parlement fédéral ne peut pas adopter une loi concernant un domaine visé à l'article 92. Cet article s'appliquerait aux territoires ou à d'autres régions où le gouvernement fédéral peut adopter des lois concernant des domaines visés par l'article 92. En outre, il y a beaucoup de chevauchement entre les compétences établies aux articles 91 et 92 et si le Parlement fédéral adoptait une loi concernant des compétences visées à la fois aux articles 91 et 92, cette mesure le permettrait. Elle est donc perçue de la même manière qu'une loi adoptée en vertu de l'article 91.
Le second diagramme que nous avons distribué explique les articles 91 et 92. La grande case illustre tous les pouvoirs possibles du gouvernement concernant «la paix, l'ordre et le bon gouvernement». Le cercle foncé à gauche représente tous les pouvoirs mentionnés à l'article 91. Le cercle foncé de droite correspond à ceux de l'article 92. Bien entendu, il y a chevauchement des pouvoirs concernant la propriété et les droits civils, qui sont de compétence provinciale, et des pouvoirs concernant le commerce, qui sont de compétence fédérale. Certains diront même qu'il y a davantage de chevauchement que ce qu'illustre le diagramme.
Le grand cercle pâle, qui représente les domaines d'intérêt national, comprend une bonne partie des pouvoirs énoncés à l'article 91 et certains des pouvoirs contenus à l'article 92. Il vise également certains domaines qui ne figurent ni à l'article 91, ni à l'article 92, notamment certains des sujets qui ne sont pas énoncés mais qui font partie de la rubrique concernant la paix, l'ordre et le bon gouvernement.
Enfin, le petit cercle en bas correspond aux pouvoirs d'urgence, qui chevauchent les pouvoirs mentionnés aux articles 91 et 92 et peut-être aussi d'autres domaines qui ne sont pas visés explicitement.
Je sais qu'il s'agit d'un sujet très complexe et je m'attends à des questions de votre part.
Le sénateur Beaudoin: Avant d'aller plus loin, je voudrais savoir de quelle nature est ce projet de loi fédérale? Le préambule indique que cette mesure est édictée par le Sénat et la Chambre des communes. Il s'agit donc d'une loi fédérale. Vous avez parlé des pouvoirs. Jusque-là, il n'y a pas de problème sérieux, mais il y a un petit problème dans le cas des articles 91 et 92. En effet, tout changement à l'un ou l'autre article exige une modification de la Loi constitutionnelle et pas seulement l'adoption d'une loi ordinaire.
De quelle nature est cette loi? S'agit-il d'une mesure constitutionnelle, quasi constitutionnelle, d'une loi émanant d'un gouvernement de troisième niveau, ou d'autres choses? Si cette mesure est l'équivalent des articles 91 ou 92 et si elle prime, à certains égards sur l'un et l'autre, j'en conclus forcément qu'il s'agit d'une loi constitutionnelle.
S'il s'agit d'une loi constitutionnelle, nous devons nous plier aux règles prévues dans la Constitution et les articles 91 et 92 ne peuvent, dans ce cas, être modifiés qu'avec l'accord de sept provinces représentant au moins 50 p. 100 de la population canadienne. Je voudrais savoir où nous allons. Je trouve la chose intéressante et fascinante. S'il s'agit d'une loi ordinaire, il n'y a pas de problème, mais s'il s'agit d'une loi constitutionnelle qui vise à modifier les articles 91 et 92 et à créer un autre niveau de gouvernement, non pas que je sois pour ou contre, mais j'aimerais savoir où nous allons.
M. McKenny: Ce projet de loi n'a pas été conçu comme une loi constitutionnelle. Il aurait fallu, pour cela, se plier aux règles de modification de la Constitution et nous savons à quel point il est difficile de modifier la Constitution canadienne. Ce projet de loi est une loi ordinaire.
La seule raison pour laquelle nous avons mentionné les articles 91 et 92 est qu'il s'agit de concepts connus. Les tribunaux ont été saisis de questions concernant ces articles et la population en connaît le contenu. C'est donc une façon d'énoncer les pouvoirs qui existent au Canada. Nous ne voulons pas modifier l'article 91 ou 92 de la Loi constitutionnelle, la chose ne pouvant être faite par une loi ordinaire.
Ce n'est qu'une façon d'énoncer les pouvoirs que la Première nation reconnaît avoir. Si vous examinez l'analyse de plus près, vous verrez que les pouvoirs visés ne comprennent pas tous les pouvoirs conférés aux articles 91 et 92. Il ne s'agit pas de pouvoirs très étendus; ils concernent plutôt des domaines de nature locale ou privée semblables à ceux qui relèvent des provinces. Ils se rapprochent davantage des pouvoirs d'un gouvernement provincial que d'un gouvernement national. Le projet de loi ne confère pas aux Premières nations le pouvoir de créer, par exemple, leurs propres forces armées, leur propre monnaie ou d'avoir leur propre Code criminel. Les Premières nations n'auraient pas compétence dans ces domaines.
Le sénateur Beaudoin: S'il s'agit d'une délégation de pouvoir, cela ne pose pas de problème d'ordre constitutionnel. Je puis admettre que le gouvernement fédéral crée une autorité par l'intermédiaire des territoires, mais si le Parlement du Canada crée un niveau de gouvernement qui possède des pouvoirs à toutes fins utiles égaux à ceux qui sont visés aux articles 91 et 92, la chose ne peut être faite que par une modification de la Constitution.
Vous dites que ce n'est pas le cas. J'ai pourtant entendu dire, il y a un instant, que cette loi pourrait prévaloir sur une loi fédérale ou provinciale. N'est-ce pas le cas?
Si les articles 91 et 92 demeurent inchangés et que le projet de loi confère certains pouvoirs aux Premières nations conformément au paragraphe 91(24), soit. La chose peut être faite rapidement. Mais à y regarder de plus près, je ne suis pas sûr qu'il s'agisse uniquement de cela. J'y vois plutôt une importante dévolution de pouvoirs législatifs.
Je ne veux pas parler ici de la valeur du projet de loi. Je m'inquiète seulement de l'approche retenue. Si la question relève de la loi, très bien, mais nous devons savoir au départ si elle équivaut à une modification constitutionnelle.
M. James Ryan, rédacteur législatif, Lesser Slave Lake Indian Regional Council: Madame la présidente et honorables sénateurs, je me disais tout à l'heure que j'ai comparu pour la première fois devant un comité sénatorial il y a 34 ans. Pendant 13 ans, je suis venu régulièrement expliquer pourquoi les projets de loi étaient rédigés comme ils l'étaient. J'ai toujours aimé comparaître devant les comités du Sénat. J'ai toujours trouvé que les sénateurs étaient stimulants du point de vue intellectuel, beaucoup plus que ceux des comités de l'autre endroit, que je ne nommerai pas. Je suis heureux d'être de retour devant vous.
Ce projet de loi est conçu différemment de la plupart des autres projets de loi tout faits que j'ai examinés. Je répondrai sans doute mieux aux questions du sénateur Beaudoin en expliquant les facteurs qui ont joué dans la conception du projet de loi.
Je devais m'assurer au départ que le projet de loi ne puisse donner à penser qu'une Première nation est une création du Parlement. C'était ma première préoccupation en tant que rédacteur. Je crois que nous avons réussi à cet égard. Ceci explique peut-être en partie vos préoccupations, monsieur le sénateur, quoique je n'en sois pas certain.
La seconde chose dont il fallait tenir compte est que le projet de loi devait être conçu de manière à respecter les critères qui régissent les projets de lois sénatoriaux. Votre présence même à ce comité me permet de dire que nous avons réussi là aussi.
Le troisième critère nous imposait de ne pas dépasser les limites de l'autorité législative que le paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 confère au Parlement du Canada. Nous avons aussi respecté cette exigence.
Mon expérience professionnelle de rédacteur législatif me permet de dire que ce projet de loi ne porte atteinte à aucun des pouvoirs du Parlement.
Le projet de loi vise à créer une loi générale, mais qui serait, en fait, une loi spéciale pour toute Première nation. Aussi, si certains éléments de la loi ne correspondent pas à la réalité d'une communauté au sein d'une Première nation, elle pourra toujours demander au Parlement du Canada de modifier les aspects de la loi spéciale qui la concernent. Il s'agit, en ce sens, d'une loi d'application générale qu'une Première nation peut, au même titre qu'une entreprise, demander et appliquer et qui peut être modifiée selon les besoins.
Si un aspect de la loi se révélait politiquement ou socialement nuisible dans l'avenir, le Parlement serait parfaitement libre d'y apporter tous les changements qu'il voudrait. Cette mesure n'enlève rien au Parlement et, en ce sens, elle ne porte pas atteinte au processus parlementaire. Tout ce qui, dans cette loi, semble empiéter sur le champ de compétence des provinces est, en fait, de compétence fédérale.
Le sénateur Beaudoin: Merci beaucoup. C'est clair et net. Auriez-vous un exemple de ce qui pourrait constituer un empiétement sur les pouvoirs conférés par les articles 92 ou 93?
M. Ryan: En ce qui concerne les Autochtones, ce serait l'éducation, les droits de la propriété et les droits civils.
Le sénateur Beaudoin: Je n'y vois aucun problème car, comme vous l'avez dit, ce pouvoir est conçu de manière à respecter les limites du paragraphe 91(24). Cela me convient.
Le sénateur Watt: Avant que nous ne perdions de vue l'objet de la discussion, je voudrais avoir des éclaircissements. Je croyais avoir bien compris l'avant-projet de loi, mais en vous écoutant expliquer le diagramme, j'ai commencé à avoir des doutes.
Un de vos objectifs, relativement au paragraphe 91(24), est de transférer les pouvoirs du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à la communauté en en confiant l'exercice à une autorité administrative locale. Je le comprends et ne le conteste pas.
L'article 92 concerne les pouvoirs provinciaux et, qu'il s'agisse d'un transfert administratif ou non, si vous créez votre propre structure de gouvernement par le truchement de ce projet de loi, vous empiéterez tôt ou tard sur des compétences provinciales car, qu'on le veuille ou non, les provinces fournissent dans une certaine mesure des biens et des services à notre communauté.
Je crois que vous devez être prêts à négocier entre deux autorités gouvernementales. La même chose vaut dans le cas de l'article 91. Cet article va même encore un peu plus loin car, à mon avis, l'article 35 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, qui a été renégocié en 1982, doit encore être appliqué.
Compte tenu de ce qui précède, je me suis dit que ce projet de loi allait y contribuer de façon décisive et faire oeuvre de loi habilitante. C'est pourquoi j'accorde mon appui à votre projet de loi d'initiative parlementaire.
Je crois qu'il reste à apporter des réponses claires dans tous ces domaines. Si vous entendez vous doter d'un pouvoir législatif, tôt ou tard les gouvernements provinciaux ou fédéral, tout dépendant du gouvernement avec lequel vous ferez affaire, réagiront de façon positive ou négative. Comment ferez-vous? C'est pourquoi vous devez sérieusement envisager d'intégrer un mécanisme de résolution des différends ou une disposition concernant la tenue de négociations.
Je vois ce projet de loi d'un très bon oeil, bien que ce ne soit pas le cas de certains autres sénateurs et politiciens. J'essaie de voir dans quelle mesure ce projet de loi pourrait devenir un moyen nécessaire à l'application de l'article 35 dans l'avenir.
M. McKenny: Je vais essayer d'éclaircir les choses. Premièrement, le diagramme ne tient pas compte des lois provinciales. Je pourrais cependant le modifier en ce sens. La règle fondamentale prévoit cependant que toutes les lois provinciales d'application générale s'appliqueront à moins d'être incompatibles avec les lois et la constitution de la Première nation. C'est très semblable à ce qui se passe présentement.
Aux termes de l'article 88 de la Loi sur les indiens, les lois provinciales s'appliquent aux Autochtones sur les réserves dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec les règlements de la bande. À l'heure actuelle, une bande peut adopter un règlement qui prévaudra sur des lois provinciales. De plus, la Loi sur les Indiens vise un certain nombre de domaines qui relèvent des provinces, notamment l'éducation, les successions, les biens et autres choses de ce genre. Nous n'avons pas cherché à modifier le statu quo.
Le gouvernement fédéral a une compétence exclusive sur les terres réservées pour les Indiens, comme le stipule le paragraphe 91(24). Dans le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article 92, la province n'a pas celui de faire passer des lois concernant ces terres, et le gouvernement fédéral n'a inclut les lois provinciales dans l'article 88 que dans la mesure où elles sont compatibles avec les lois fédérales existantes et les lois des Premières nations.
Mme Twinn: Ma mère possédait une propriété et payait des impôts fonciers à la ville d'Edmonton. Lorsqu'elle est tombée malade, je l'ai amenée dans la réserve afin de pouvoir m'occuper d'elle. Elle ne pouvait plus quitter le lit. J'ai téléphoné au Bureau de santé d'Athabasca, un service provincial de santé, pour demander un bassin, mais on m'a répondu: «Non, elle se trouve dans une réserve. Nous ne fournissons pas de services dans la réserve.» Il s'en est suivi une abondante correspondance entre moi et, ultimement, Nancy Betkowski, alors ministre de la Santé de l'Alberta. Voilà la réalité à laquelle la plupart d'entre nous faisons face à bien des égards.
Le sénateur Watt, qui vient du Nord du Québec, ne connaît peut-être pas cela, mais nous, qui vivons en réserve, connaissons bien cela. Nous sommes constamment confrontés à cette réalité, à savoir qui a la compétence et qui assumera la responsabilité. Les gouvernements ne veulent pas l'accepter ni l'un ni l'autre. Ils se renvoient la balle l'un à l'autre. Entre-temps, ce sont les habitants de la collectivité qui souffrent et qui dépérissent.
Le projet de loi établit simplement que la collectivité a cette responsabilité. Si la collectivité exerce sa responsabilité et adopte une loi, cette dernière prend la place des lois provinciales. Sinon, les lois provinciales s'appliquent. Si la loi autochtone les remplace, ma collectivité pourrait, par exemple, conclure une entente avec le Bureau de santé d'Athabasca. Puisque ce bureau existe déjà et puisque nous n'avons pas beaucoup d'argent, nous lui demanderions d'étendre ses services à la réserve.
Nous le faisons déjà avec la municipalité pour les services de distribution d'eau et d'égouts. Le seul ennui, c'est que nous devons nous adresser à la bureaucratie fédérale et puis ensuite à la bureaucratie provinciale. Tout cela est source de pagaille, de difficulté, de retard, de coûts, d'exaspération. Voilà ce que nous voulons éliminer, de sorte que nous puissions traiter directement avec les gens avec qui nous avons besoin d'établir des rapports.
Cela représentera également une économie pour le contribuable, car à l'heure actuelle, les affaires indiennes représentent une industrie de 13 milliards de dollars par année. Il n'y a pas si longtemps, le vérificateur général du Canada a dit que les coûts de l'administration interne du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien engouffraient jusqu'à 80 p. 100 des crédits alloués au ministère.
Le sénateur Watt: Je ne vois absolument aucune objection à ce que vous vouliez assumer la responsabilité administrative. Cela se fait attendre depuis longtemps. Je me demande simplement si vous vous protégez. Voyons les choses de façon réaliste. Les gouvernements provinciaux ont des pouvoirs et de l'argent. Ils administrent les divers programmes auxquels vous voulez pouvoir avoir accès.
Ne serait-il pas plus opportun d'éliminer le gros obstacle que représente le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, par lequel vous devez passer pour accomplir quoi que ce soit au niveau de la collectivité?
Je ne vois aucune disposition dans le projet de loi qui vous permettrait d'entamer un dialogue entre votre structure de gouvernement, le cas échéant, et le gouvernement provincial. Je puis également comprendre que, lorsque le gouvernement du Canada promulguera votre loi, elle prendra force de loi. Cela ne veut pas dire que vous en réclamez déjà l'application. Voilà où je perçois une lacune.
Allons-nous créer une loi en prétendant qu'elle vous donne des pouvoirs alors qu'il n'en est rien dans un certain sens? Voilà ce que je veux faire remarquer.
M. McKenny: Nous reconnaissons que les Premières nations ne peuvent pas jouir de l'autonomie gouvernementale dans le vide. Elles devront fonctionner à l'intérieur du Canada. Elles devront négocier avec les gouvernements provinciaux. Elles devront négocier avec les gouvernements municipaux locaux sur certaines questions. C'est la seule façon efficace et opportune de procéder. Beaucoup de Premières nations n'auraient pas les ressources nécessaires pour accomplir beaucoup de choses à moins de négocier. Nous n'avons pas stipulé dans le projet de loi que quelqu'un devrait négocier. Nous avons certes prévu que les Premières nations et les provinces voudraient négocier et qu'elles le feraient pour parvenir à une entente. Nous avons tâché de donner des pouvoirs aux Premières nations de sorte qu'elles possèdent un instrument de négociation.
Le sénateur Watt: Je commence à comprendre.
M. McKenny: On a besoin du pouvoir d'exécuter l'entente.
Le sénateur Watt: C'est ainsi qu'il faut procéder. D'après ce que je croyais comprendre, vous n'êtes même pas en mesure de négocier.
M. McKenny: Ce n'est pas le cas. Il est clair que nous nous attendions à ce qu'il y ait des négociations. Cela s'est toujours passé ainsi pour les Premières nations. Elles ont négocié. Cela leur donne simplement le pouvoir une fois qu'elles sont parvenues à une entente.
Le sénateur Watt: Combien de temps donnerez-vous aux gouvernements fédéral et provincial qui fonctionnaient sous le régime des articles 91 et 92 pour réagir sur un dossier donné? Serait-ce 60 jours?
Le sénateur Taylor: D'après mon expérience, cela pourrait prendre 25 ans.
Le sénateur Watt: Nous parlons maintenant d'un nouveau mécanisme. Combien de temps donnerez-vous aux gouvernements fédéral et provincial pour réagir à votre projet de loi?
Mme Twinn: Le même temps qu'on nous donne pour réagir aux lois du Parlement ou aux lois provinciales qui sont adoptées.
Le sénateur Watt: Est-ce 60 jours?
Mme Twinn: Quand des lois sont adoptées, elles prennent force de loi et il faut les respecter. C'est ainsi qu'on organise ses rapports. On les expose, et c'est clair.
Le sénateur Watt: Votre représentant légal a décrit la chose en disant qu'il s'agissait, dans un certain sens, d'un transfert administratif et non d'une tentative visant à faire modifier la Constitution. Je crois cependant que vous finirez par tenter de le faire. Nous laisserons cela de côté pour le moment.
Pouvons-nous considérer cela comme un projet pilote? Vous proposez une façon très nouvelle de négocier avec le gouvernement et avec le système juridique. Il s'agit d'une façon de voir les choses sous un jour différent.
Le sénateur Tkachuk: Simplement pour clarifier, en réalité, il ne s'agit pas tant d'un projet de loi nouveau que d'un projet de loi différent. Le gouvernement fédéral exerce certains pouvoirs touchant les Indiens vivant dans les réserves. En vertu du projet de loi, les Indiens auront ces pouvoirs dans leur collectivité.
Le sénateur Watt: Cela ne me pose pas de problème.
Le sénateur Tkachuk: Je sais que cela ne vous pose pas de problème. Je tiens simplement à bien comprendre ce que vous dites. Lors d'une séance antérieure du comité, les représentants du ministère ont exprimé des inquiétudes quant à l'application de certaines lois par les Indiens dans leur collectivité. Cela fonctionnera de la même façon que tout le reste. Toutes les municipalités voisines adoptent diverses lois et nous devons nous gouverner nous-mêmes dans le contexte de ces lois. Il se produit souvent des conflits de compétences touchant les droits sur l'eau ou de nouvelles routes qui traversent les municipalités. Quand cela arrive, nous négocions et nous organisons nos affaires.
Ce n'est pas un gros sujet de préoccupation pour moi. Chaque collectivité a intérêt à se protéger elle-même, y compris la province de l'Alberta et la municipalité de Lesser Slave Lake. Tout ce qu'elles font se fait en contexte. Rien ne peut se faire isolément. Agir isolément est autodestructeur et chaotique, et aucune collectivité ne veut cela. Si des collectivités mènent leurs affaires de cette manière, elles sont autodestructrices et chaotiques, et ça les regarde.
Nous ne devrions pas nous perdre en considérations sur le comportement des gens. Nous devrions tâcher de garder les choses aussi simples qu'elles le sont en réalité. Il s'agit d'un projet de loi simple, bien qu'il comporte de nombreuses conséquences.
Le sénateur Watt: En tant que sénateurs, notre rôle et nos responsabilités ne se limitent pas à s'assurer que ce projet de loi fonctionne. Il faut tenir compte d'autres facteurs qui pourraient être liés directement ou indirectement plus tard.
Je ne conteste pas votre explication, sénateur Tkachuk. Cependant, comment arriver à ce résultat? Il faut une force exécutoire. Quand on a un pouvoir législatif, il faut être capable de faire appliquer les lois pour faire marcher le système. Et pour le faire marcher, il faut avoir les gens et l'argent. D'où viendront ces ressources?
Des tribus autres que celle-ci peuvent-elles financer leur propre structure de gouvernement aujourd'hui? Certaines en sont peut-être capables, mais d'autres non. Cela varie d'un bout à l'autre du pays.
La situation dans le nord du Québec est très différente. Nous y voyons probablement plus d'intervention du gouvernement provincial dans notre territoire et dans nos vies que dans n'importe quelle autre province. Telle est la nature de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Nous avons permis au gouvernement provincial d'établir une branche, très similaire à un gouvernement régional, qui est dirigée par les gens de la région. Il s'agit d'un organisme public. Il ne s'agit pas d'un gouvernement ethnique, mais d'un gouvernement non ethnique.
Les lois d'application générale du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral l'emportent sur tout le reste.
Mme Twinn: J'ai bien du mal à voir quelque complication que ce soit à ce sujet. C'est le gouvernement fédéral qui paie maintenant pour l'éducation. Il y a en Alberta 14 commissions scolaires dont nos enfants fréquentent les écoles. On a négocié avec ces commissions scolaires pour que nos enfants fréquentent ces écoles. Il existe des maternelles dans certaines réserves. Cela est également négocié avec le ministère de l'Éducation et avec le gouvernement fédéral. C'est ainsi que ce gouvernement fonctionnera. Il administrera ces programmes.
Il y a eu un grand vide. En matière d'éducation, par exemple, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien avait l'habitude de négocier avec certaines commissions scolaires pour que les Indiens puissent fréquenter leurs écoles. Une fois que la commission scolaire avait touché l'argent pour toute l'année, il lui importait peu qu'un enfant indien décroche, puisqu'elle avait déjà l'argent.
De même, les autobus scolaires venaient de l'extérieur des réserves. Les chauffeurs d'autobus laissaient parfois les enfants en plan. Ils se contentaient de klaxonner. Ils ne s'en souciaient pas. Depuis ce temps, cependant, nous avons négocié avec les commissions scolaires et des Indiens ont été embauchés pour conduire les autobus et ramasser nos enfants.
Le taux de décrochage s'élevait à près de 100 p. 100 en 1974. Depuis que nous avons commencé à administrer nos propres affaires de cette façon, le taux de fréquentation scolaire a considérablement augmenté. Il s'agit simplement d'une loi habilitante.
En ce qui a trait aux services de police, nous avons droit de négocier avec les forces de police au sujet des services dont la communauté souhaite bénéficier dans les réserves. L'entretien des routes fait l'objet de négociations avec la province. La municipalité peut être autorisée à utiliser la route traversant la réserve.
Ces questions font l'objet de négociations sans l'intervention d'un tiers. C'est le tiers qui est encombrant. C'est aussi simple que ça. L'autonomie gouvernementale n'exige pas beaucoup d'argent.
Le sénateur Tkachuk: Avant que vous n'arriviez, sénateur Watt, M. Ryan a expliqué que le projet de loi n'est pas primordial pour toutes les collectivités. Autrement dit, si une collectivité en Ontario voulait être assujettie à cette loi, on pourrait la modifier pour qu'elle s'applique plus précisément à cette collectivité.
M. Ryan: Oui. Le projet de loi n'impose le statut de Première nation à personne. La collectivité doit exister déjà et pouvoir répondre aux critères énoncés à l'article 3. Tout d'abord, elle doit constituer une collectivité. Sa proposition doit comporter l'indication des réserves et autres terres constituant le territoire de la collectivité. Elle doit comporter également l'indication des traités et accords antérieurs conclus entre Sa Majesté et la collectivité. Elle doit ensuite comporter une présentation générale du patrimoine tribal et des autres ressources à la disposition de la collectivité. Cela est essentiel, car si la collectivité ne dispose pas de ressources suffisantes pour pouvoir prendre le contrôle de ses affaires, il ne vaut pas la peine de s'assujettir à cette loi.
La collectivité qui possède suffisamment de ressources, d'acquis, d'identité et d'intérêts communs pour s'assujettir à cette loi peut le faire. Cela ressemble beaucoup à une loi générale sur les sociétés adoptée par un gouvernement provincial ou par le gouvernement fédéral. Elle n'impose le statut de société à personne. Cependant, si une personne répond aux conditions requises et s'assujettit volontairement à la loi, elle devient une société et peut agir en tout comme une société.
Dans un certain sens, le projet de loi permet à une collectivité existante, répondant aux conditions requises, de s'assujettir à cette loi de son propre gré; non pas en y étant forcée par le gouvernement, mais par elle-même.
S'étant assujettie à la loi, une collectivité constatera peut-être que les dispositions de la loi ne conviennent pas tout à fait à sa propre situation. Elle adressera donc au Parlement une pétition pour faire modifier la loi afin de l'adapter à la situation particulière de la collectivité. De par sa nature, il s'agirait d'une loi spéciale s'appliquant à chaque collectivité qui y est assujettie.
Le sénateur Watt: Êtes-vous en train de dire que ce qui s'applique à une bande en particulier ne s'appliquera pas nécessairement aux autres bandes?
M. Ryan: Leurs constitutions peuvent différer dans une certaine mesure. Certains aspects de leur situation respective peuvent être différents.
Le sénateur Watt: Vous avez dit que le projet de loi ne vise pas à faire modifier la Constitution, mais qu'il a plutôt un caractère administratif. Tenons-nous-en à un domaine au lieu d'aller et venir entre les niveaux administratifs et constitutionnels.
M. Ryan: Je veux parler de la constitution de la bande elle-même. Le projet de loi propose une constitution pro forma.
Le sénateur Watt: Est-ce que la constitution de la bande en question est déjà établie?
M. Ryan: Oui. Si l'organe exécutif de la Première nation le demande par résolution, le gouverneur en conseil peut déclarer inapplicable n'importe laquelle de certaines dispositions de cette loi. Il est donc possible d'y apporter quelques petites modifications.
Je parlais de la situation d'une bande assujettie à la loi qui estime, après quelques années d'application de la loi, que ses circonstances particulières exigent d'autres dispositions que celles qui figurent déjà dans la loi générale. Elle peut donc adresser une pétition au Parlement à ce sujet, mais ces nouvelles dispositions s'appliqueront uniquement à elle, tout comme une banque peut demander au Parlement de lui permettre de changer de nom, par exemple.
M. McKenny: On semble avoir l'impression que le projet de loi est peut-être dénué de sens pour les bandes qui possèdent de grandes richesses. Tout, d'abord, il s'agit d'un projet de loi du Sénat, et le Sénat ne peut mettre en oeuvre aucun financement pour le projet de loi, chose à laquelle on n'a jamais songé.
Deuxièmement, plusieurs des Premières nations appartenant au Lesser Slave Lake Indian Regional Council, qui appuient énergiquement le projet de loi et qui tiennent beaucoup à obtenir l'autonomie gouvernementale sous le régime de cette loi, n'ont pas beaucoup d'argent, mais elles reconnaissent qu'il y a des programmes existants. Le projet de loi n'a aucune incidence sur les programmes existants. Le financement pour l'éducation et autres programmes similaires se poursuivra. Si les Premières nations décident d'exercer des pouvoirs dans ces domaines, cela ne changera pas le statu quo en ce qui concerne les programmes et les services. Ils se poursuivront. Nous n'avons rien changé à cela.
Les Premières nations reconnaissent qu'elles devront négocier. Elles l'ont fait par le passé et le feront à l'avenir. Si elles décident de s'occuper d'éducation, par exemple, elles entreront en contact avec les gens qui fournissent actuellement les programmes et les services et avec ceux qui administrent les fonds, et négocieront. Elles reconnaissent que, si elles agissent de leur propre initiative sans consulter personne, elles pourraient se causer un problème et se trouver dans une situation où elles ne peuvent pas mettre en application leurs propres lois. Nous reconnaissons cela. Nous donnons des pouvoirs aux Premières nations; nous ne forçons personne à faire quoi que ce soit et nous n'essayons pas de leur enlever ce qu'elles possèdent déjà.
Le sénateur Taylor: J'ai trouvé intéressantes les dernières observations que M. McKenny a faites en disant que les bandes n'avaient pas besoin d'énormes ressources financières et que les programmes existants continueraient de s'appliquer. Il serait cependant plus difficile pour une bande ou une collectivité dotée de l'autonomie gouvernementale d'avoir accès aux fonds fédéraux ou provinciaux que ce n'est le cas sous le régime de la vieille Loi sur les Indiens.
Les bandes pensent-elles qu'elles pourront mieux réussir à négocier pour obtenir des fonds sous le régime de ce projet de loi?
Mme Twinn: La bande indienne sechelte a fait adopter une loi d'autonomie gouvernementale en 1986. Nous avons une lettre d'appui de la bande sechelte pour le projet de loi. Je crois comprendre que la bande sechelte reçoit chaque année du Parlement des crédits directs sous la forme d'une subvention pour les programmes et les services qu'elle dispense. Si elle décidait de confier à quelqu'un d'autre le soin de dispenser ces programmes ou ces services à sa place, elle peut s'engager dans ces rapports directs.
L'existence de ce genre de rapports permet la reddition de comptes. En cas de problème, on peut toujours annuler le contrat.
Depuis le début des années 80, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien a distribué plusieurs de ses responsabilités à d'autres ministères fédéraux. La situation est devenue très byzantine, très déroutante et difficile. Il y a des politiques interministérielles et il se passe toutes sortes de choses.
La bande sechelte dit que le régime sous lequel elle fonctionne depuis onze ans maintenant a donné de très bons résultats. Je le signale à l'appui de la direction que nous voulons prendre.
Le sénateur Taylor: Voilà un bon exemple. Je crois savoir que cette entente est identique à la vôtre.
Il y a plus de membres des Premières nations qui vivent hors des réserves que dans celles-ci. En quoi le fort pourcentage de membres des Premières nations et d'Indiens de fait qui ne vivent pas dans les réserves seront-ils touchés?
Le sénateur Twinn: Quand vous habitez à la ville, la moitié de vos taxes foncières va à l'éducation. Le conseil municipal est donc en réalité votre gouvernement. Nous sommes les plus importants contribuables de Slave Lake. Pourtant, nous ne pouvons voter aux élections municipales, ni nous présenter comme candidats. Nous vivons dans la réserve.
Le sénateur Taylor: Vous n'avez pas répondu à ma question. En quoi l'autonomie gouvernementale des Premières nations qui n'ont pas d'assise territoriale sera-t-elle touchée? Cela leur nuira-t-il ou les avantagera-t-il?
Le sénateur Twinn: Faites-vous allusion aux métis?
Le sénateur Taylor: Je parle de la situation générale. Un grand nombre n'ont pas d'assise territoriale, mais sont tout de même des membres légitimes des Premières nations. Ils ne pourront pas profiter de ces ententes. Je parle notamment des Autochtones qui habitent à Edmonton, à Winnipeg ou à Calgary, voire des métis de la Saskatchewan.
Le sénateur Twinn: Ils sont gouvernés par leur Première nation, où qu'ils soient.
Le sénateur Taylor: Ils sont gouvernés par les lois de la société, mais ils sont incapables d'obtenir leur propre autonomie gouvernementale. L'autonomie gouvernementale dont il est question repose uniquement sur la base territoriale, plutôt que sur le fait d'être Autochtone.
À l'article 4 du projet de loi, vous décrivez fort bien la qualité d'électeur, mais il me semble que, par définition, l'électeur est celui qui fait déjà partie de la collectivité. De nombreuses personnes de l'extérieur pourraient vouloir revenir à la réserve, mais elles ne sont pas réputées des électeurs. Il me semble que la mesure à l'étude exclurait en permanence du système ceux qui ne s'y trouvent pas déjà. En d'autres mots, vous êtes en train de former un ghetto; vous dites que seuls ceux qui ont déjà quitté la réserve ne peuvent y revenir. C'est ce que le gouvernement fédéral faisait aux Cris, au lac Loon.
Le sénateur Twinn: Vous êtes au courant, sénateur, je crois, de ce qui est arrivé au lac Lubicon.
Mme Twinn: J'aimerais revenir sur la question du sénateur Taylor, à laquelle on n'a pas entièrement répondu. Il importe de communiquer de nombreux renseignements si l'on veut bien répondre à la question et, pour bien comprendre la situation, il faut savoir certaines choses.
Tout d'abord, en ce qui concerne les Autochtones qui n'habitent pas dans la réserve, une portée extraterritoriale est prévue. Nous en avons déjà discuté. L'extraterritorialité existe dans certains domaines cruciaux.
Le sénateur Taylor: La présente entente en prévoit-elle?
Mme Twinn: Oui, comme je l'ai expliqué, on trouve à l'article 10 du projet de loi la mention des points 13, 14, 15, 16, 17 et 33 de l'annexe II.
De plus, si la collectivité disparaît, il ne reste plus rien non plus pour ceux qui habitent à l'extérieur de la réserve. Je vous en donne un exemple récent. Une membre de notre collectivité s'est mariée et est allée vivre au Nouveau-Brunswick. Elle vient de décider qu'elle veut revenir, accompagnée de ses enfants. Elle n'est pas heureuse là-bas. Elle sait que sa collectivité sera toujours là pour l'accueillir, qu'elle la réintégrera au giron, et c'est ce qui importe.
Le sénateur Taylor: Elle peut revenir?
Mme Twinn: La collectivité continue d'exister pour ceux qui veulent y revenir si la vie ne leur sourit pas à l'extérieur de la réserve.
Les terres indiennes ont tant diminué depuis le XVIe siècle qu'il ne reste, aujourd'hui, que de petites parcelles appelées des réserves. Il importe que nous conservions le peu de terres qu'il nous reste comme assise pour la collectivité. C'est le véritable concept de la collectivité, c'est-à-dire un groupe de personnes qui habitent ensemble.
Voilà qui répond à une partie de votre question au sujet du pouvoir de voter conféré à des personnes n'habitant pas au sein de la collectivité.
En ce qui concerne votre question au sujet des électeurs, vous oubliez l'alinéa 4(2)b). Est électeur celui dont le droit de vote, en droit, est actuellement reconnu comme tel, quelle que soit la loi en vigueur. Le droit coutumier précise que ceux qui ne vivent pas dans la réserve sont des électeurs. Par ailleurs, l'alinéa b) précise bien que ces gens, peu importe comment la loi les définit actuellement, peuvent aussi reconnaître le droit de vote à des personnes qui ne satisfont peut-être pas à la définition légale d'électeur.
Je ne vois pas comment être plus équitable, sans sombrer dans le chaos et l'anarchie, que d'habiliter quiconque le souhaite à voter, ce que certains voudraient imposer aux collectivités vivant sur les réserves. Cette solution n'est pas pratique.
Le sénateur Taylor: En toute équité, ce n'était pas la question que j'ai posée. Vous m'avez confirmé ce que je croyais, c'est-à-dire que la collectivité telle qu'elle existe actuellement décide des personnes qui ont la qualité d'électeur. J'accepte la réalité, bien que je ne sois pas très convaincu de son bien fondé.
Ma question portait sur les personnes qui ne sont pas membres d'une collectivité. La plupart de nos Autochtones ne vivent pas au sein de leur propre collectivité; ils vivent à l'extérieur de la réserve. Aux termes du projet de loi à l'étude, la solution à leur problème devra-t-elle attendre ou le projet de loi à l'étude aidera-t-il les membres des Premières nations sans assise territoriale à obtenir l'autonomie gouvernementale? Faut-il absolument avoir une assise territoriale?
Le sénateur Twinn: Là n'est pas la source du problème.
Mme Twinn: Selon le paragraphe 91(24), les questions touchant aux Indiens et aux terres réservées aux Indiens sont de la compétence du Parlement fédéral. Je crois savoir que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a versé beaucoup de fonds au Congrès des Peuples autochtones pour qu'il négocie l'autonomie gouvernementale. J'ignore à quel stade en sont ces négociations. Toutefois, je suppose qu'elles connaissent une évolution plutôt bonne puisque Brad Morse, adjoint exécutif du ministre, est un ex-conseiller du congrès. Je suis certaine que le congrès a ses entrées chez le ministre.
En ce qui concerne la prestation de services et de programmes à ceux qui n'habitent pas dans la réserve, ces personnes sont celles qui peuvent le mieux juger de leurs problèmes et de leurs besoins et qui peuvent le mieux obtenir ce dont elles ont besoin en tant que collectivité, si elles forment une collectivité. Je n'en sais pas suffisamment à cet égard.
Le sénateur Milne: Aux termes de l'article 19 du projet de loi, la portée des lois de la Première nation se limite à son territoire, sauf disposition contraire dans un domaine visé au point 13, 14, 15, 16, 17 ou 33 de l'annexe II.
J'aimerais aborder la question de l'adoption des enfants à l'extérieur des terres contrôlées par la bande. Il est question, à l'article 17, de fiducies détenues au profit de citoyens et de la modification de ces fiducies, indépendamment du lieu où elles se trouvent ou du lieu de résidence des citoyens.
Ce sont des pouvoirs extraterritoriaux très étendus. On ne parle pas ici seulement de terres. Cela revient à contrôler la vie de ceux qui habitent à l'extérieur des réserves. Cet aspect du projet de loi me préoccupe énormément.
Mme Twinn: Ces personnes sont membres de la Première nation. Quant aux accords de protection de l'enfance actuels, par exemple, aux termes du régime provincial de l'Alberta, lorsqu'un enfant membre d'une Première nation est pris en charge, je crois savoir que la collectivité est avisée que des mesures sont prises à l'égard d'un de ses enfants. La collectivité s'en mêlera si elle le veut bien, si elle peut assurer un foyer à l'enfant, et ainsi de suite. Par conséquent, cet intérêt de la Première nation dans les domaines touchant à ses enfants lui est déjà acquis.
Le sénateur Milne: Même si les parents de ces enfants qui habitent à l'extérieur de la réserve n'ont pas qualité d'électeur?
Mme Twinn: Ce n'est pas forcément le cas.
Le sénateur Milne: C'est ce que j'ai compris de la réponse que vous avez donnée au sénateur Taylor.
Mme Twinn: J'ai dit au sénateur Taylor qu'il supposait que ces personnes n'avaient pas qualité d'électeur. Chaque Première nation a des règles différentes à ce sujet. Ainsi, dans de nombreuses collectivités, le droit de vote est conféré à tous les membres adultes de la Première nation, sans égard à leur lieu de résidence.
Le sénateur Milne: Ce n'est pas le cas en Ontario.
En ce qui concerne les fiducies «détenues au profit de citoyens et la modification de ces fiducies, indépendamment de la localisation des fiducies ou du lieu de résidence des citoyens», cela signifie-t-il qu'une fiducie établie par des parents autochtones pour le bénéfice de leurs enfants, quand toute la famille habitait à l'extérieur de la réserve, serait contrôlée par le conseil sur la réserve?
M. McKenny: Il existe un droit commun d'obligation fiduciaire qui s'applique aux fiducies. Les fiducies ont toujours fait partie de l'histoire des Premières nations, d'où la présence de cet article. Les terres de la réserve sont un bien détenu en fiducie pour assurer l'avenir des membres, tout comme les ressources. De nombreuses Premières nations ont établi des fiducies pour détenir des biens collectifs. Il existe une règle d'interdiction de perpétuités selon laquelle on ne peut détenir un bien en fiducie pendant des siècles et des siècles. Essentiellement, elle dispose qu'il faudra, tôt ou tard, distribuer l'argent. En Alberta, par «tôt ou tard», il faut entendre 80 années après le décès de tous ceux qui étaient vivants lorsque la fiducie a été créée. Pareil délai n'est pas très long, quand on connaît l'histoire des premières nations.
Au Manitoba, on a aboli cette règle parce qu'elle n'est pas sensée, dans le cas des Premières nations.
On voulait surtout permettre aux premières nations de changer ces règles, qui se prêtaient peu à leur réalité. Les premières nations les appliqueraient dans leur nouvelle version adaptée.
Le sénateur Milne: Ce qui tomberait alors sous le coup de votre article 34 et de votre diagramme illustrant l'applicabilité des lois.
M. McKenny: C'est cela.
Le sénateur Milne: Il s'agirait d'une loi provinciale qui, selon vous, serait inapplicable.
M. McKenny: Effectivement. On envisage la possibilité que les biens détenus en fiducie ne se trouveront peut-être pas dans la réserve. Si vous déposez l'argent dans une succursale bancaire située à l'extérieur de la réserve, tout à coup, vous êtes assujetti à une loi provinciale et à des règles différentes. C'est la même chose dans le cas d'un enfant. Si l'enfant habite actuellement dans la réserve, rien ne dit que, demain, il n'habitera pas ailleurs. Quelle loi s'appliquera? Le pauvre enfant est ballotté à droite et à gauche à cause de toutes ces règles.
On a tenu compte des règles classiques de conflits. Dans le cas des successions, nous avons décidé que la loi en vigueur là où se trouve la terre s'applique. Si le bien est sous une autre forme, ce sera la loi en vigueur là où habite habituellement la personne. Ainsi, il n'y aura pas dix lois différentes s'appliquant simultanément. De cette manière, il n'y aura pas de conflits.
Le sénateur Milne: Par exemple, si une famille autochtone habite à l'extérieur de la réserve et souhaite adopter un enfant, parce qu'il habite justement à l'extérieur de la réserve, la loi de la réserve à cet égard ne s'applique pas?
M. McKenny: Si la famille adopte un enfant qui n'est pas autochtone, elle ne s'appliquera pas.
Le sénateur Milne: Si l'enfant est autochtone?
M. McKenny: L'usage veut actuellement que la province communique avec la Première nation d'où vient l'enfant pour obtenir son consentement. Les autorités provinciales n'autoriseront pas l'adoption sans ce consentement.
Le sénateur Milne: Je ne souhaite pas en débattre plus longuement, mais j'ai tout de même de sérieuses réserves à cet égard.
Le sénateur Andreychuk: N'êtes-vous pas en train de dire que les lois d'adoption s'appliqueront à ces cas selon l'état courant des accords ou des lois en vigueur dans la province? Vous avez mentionné uniquement l'Alberta, qui a en place une procédure. La Saskatchewan en a aussi une. D'autres provinces n'en ont pas. Si les membres de la réserve habitaient à l'extérieur de celle-ci et souhaitaient adopter un enfant autochtone, les lois provinciales s'appliqueraient à moins qu'un accord n'ait été conclu avec la province à cet égard.
En d'autres mots, avant les négociations des années 70, la loi provinciale de la Saskatchewan s'appliquait à l'adoption. Depuis lors, le gouvernement provincial a conclu un accord en vertu duquel les Autochtones décident eux-mêmes de l'avenir des enfants autochtones. Ai-je raison?
M. McKenny: Je crois savoir que la Première nation d'où vient l'enfant doit donner son consentement. Le projet de loi s'inspire de la Loi sur les Indiens à cet égard. La loi provinciale s'applique à moins que la Première nation n'ait adopté sa propre loi. C'est que prévoit pour l'instant la Loi sur les Indiens, aux termes de laquelle l'adoption relève de la compétence à la fois du ministre et de la Première nation.
Le sénateur Andreychuk: J'aimerais aussi obtenir des éclaircissements au sujet des fonds de la réserve. Il est question de fonds qui reviennent à l'Autochtone aux termes de la Loi sur les Indiens ou des fonds de la réserve. Dans le cas de l'autochtone qui vit à Winnipeg, qui touche un montant en vertu d'une fiducie qui n'a rien à voir avec le fait d'être Autochtone et qui n'a jamais appartenu à la réserve ou n'a été assujetti à la Loi sur les Indiens, en d'autres mots, s'il touche des fonds indépendamment, ceux-ci seraient-ils aussi contrôlés par la bande ou appartiendraient-ils en exclusivité au particulier? J'ai cru comprendre que vous ne suiviez que les fonds collectifs administrés soit par les chefs de bande soit par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Ne sont-ce pas là les fonds et les réserves pour lesquels vous réclamez le statu quo?
M. McKenny: Le ministre détient actuellement des fonds de fiducie pour des particuliers, des mineurs et des assistés sociaux, par exemple. Ces cas sont également visés par cet article. Il est prévu que le ministre ne continuera plus à jouer un rôle dans l'administration des biens fonciers de la bande. La bande aurait le pouvoir d'administrer ses biens et ses propriétés et devrait bien sûr le faire dans le contexte actuel de fiducie; elle pourrait alors être accusée d'abus de confiance si elle ne le respectait pas.
Le sénateur Andreychuk: Vous parlez du rapport de fiducie et de la circulation des fonds. Vous ne parlez pas du cas d'un Autochtone qui gagnerait de l'argent de façon indépendante sans recours aux ressources de la bande et qui établirait un compte de fiducie.
Le sénateur Milne: Aucune distinction n'est établie.
Le sénateur Twinn: À l'heure actuelle, tous les fonds et les terres de la bande sont détenus en commun. Je ne peux pas léguer ma part au moment de ma mort. Les sommes fiduciaires ne peuvent pas être léguées. Personne n'hérite de sommes fiduciaires. Ce sont des fonds détenus en commun et non par des particuliers.
Le sénateur Milne: Vous avez dit que ce projet de loi ne fait que remplacer l'administration du ministère des Affaires indiennes et du Nord par une administration autochtone. Je crois que c'est un objectif qu'il faut essayer d'atteindre. Je suis d'accord sur ce point. Toutefois, l'article 16 semble le contredire, puisqu'il y est question des terres. Quel effet cet article aurait-il sur les revendications territoriales à l'extérieur des réserves?
Ainsi par exemple, en Ontario, la bande de Golden Lake revendique toute la vallée d'Ottawa. À Ipperwash, la bande locale revendique des terres du MDN. Quel effet cet article aurait-il sur les propriétaires de chalet qui, en toute bonne foi, ont acheté des parcelles à la bande locale indienne sur les bords d'un lac? Comment l'article 16 règle-t-il de tels problèmes?
M. McKenny: On peut lire à la page 2 la définition de terres d'une Première nation. Il s'agit de savoir ce qu'est le territoire de la Première nation. Nous avons essayé de le limiter à ce qui est absolu et connu et non à d'éventuelles revendications qui sont des revendications non réglées; par conséquent, nous ne pouvons pas imposer d'autorité législative à cet égard.
Nous avons envisagé les terres dont il est question à l'article 16 et qui reviennent à la Première nation en vertu de cet article. Ce sont essentiellement des réserves. Il peut y avoir d'autres terres reconnues comme réservées aux Indiens en vertu du paragraphe 91(24), mais il s'agit essentiellement de réserves.
Ensuite, par territoire, on entend:
[...] terres acquises ou détenues par une Première nation, même avant la date de son assujettissement à la présente loi, et qui sont les siennes par déclaration du gouverneur en conseil.
C'est la même chose en vertu de la Loi sur les Indiens. Le gouverneur en conseil peut créer de nouvelles réserves. Nous n'avons rien changé.
c) terres acquises par une Première nation, même avant cette date, à la suite du règlement, négocié ou non, de revendications territoriales relatives à des réserves [...]
En cas de revendication territoriale réglée par un tribunal ou à l'amiable, c'est le statu quo. C'est ce qui arriverait aujourd'hui.
Le sénateur Milne: Qu'en est-il des terres à l'extérieur des réserves où les Premières nations ont des droits de chasse?
M. McKenny: Elles ne sont pas reconnues comme réserves ou terres des Premières nations. La Première nation a un droit issu de traités sur ces terres, mais ne les possède pas.
Le sénateur Milne: Vous parlez de terres cédées.
M. McKenny: Il ne s'agit pas de terres cédées techniquement parlant, mais de terres réservées pour ces peuples.
Le sénateur Adams: Les rédacteurs de ce projet de loi ont-ils pris en compte les recommandations du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones?
M. Ryan: Je n'ai pas pris ces recommandations en compte, car elles ont été faites alors que j'avais déjà commencé mon travail. Toutefois, je ne crois pas que ce projet de loi soit incompatible avec ces recommandations.
Le sénateur Adams: Ce rapport a coûté 50 millions de dollars aux contribuables canadiens, et maintenant le ministre dit qu'il n'a pas le temps d'y jeter un coup d'oeil. J'aurais pensé qu'il aurait pu être utile aux rédacteurs d'une loi pour les peuples autochtones.
Mme Twinn: Je n'ai pas lu tout le rapport de la commission royale, mais je peux dire, par exemple, que M. Hogg, dans son exposé sur le droit constitutionnel, n'est pas en faveur des dimensions extraterritoriales des points 13, 14 et 17 de l'annexe II, contrairement à la Commission royale sur les peuples autochtones; ces contradictions se retrouvent à propos d'autres éléments de cette loi, y compris le fait qu'elle doive exister.
Dans les causes MacMillan Bloedel, Delgamuukw et Sparrow, les tribunaux ne font que répéter qu'il faut cesser de les saisir de la question de l'autogestion, de l'autoréglementation et de l'autocontrôle des collectivités. Ce sont les législateurs qui doivent s'en occuper et c'est pour cela que nous sommes ici. Nous espérons que vous êtes prêts à coopérer.
Si je comprends bien, le sénateur Milne est très préoccupée par la question de l'adoption. J'aimerais vous rappeler que l'adoption en vertu du droit coutumier a toujours existé. Ces collectivités ont des règles, des intérêts et des idées à propos de telles questions. Elles pratiquent l'adoption dans le contexte du droit coutumier. C'est ce que la Cour d'appel de C.B. a reconnu dans la cause Casimel il y a quelques années. Des grands-parents avaient adopté un enfant. A l'âge adulte, cet enfant a été assassiné et on s'est aperçu que des prestations de décès étaient prévues pour ses parents en vertu d'une police d'assurance. La question était de savoir si les grands-parents pouvaient être considérés comme étant ses parents. C'était toute la question du statut juridique de cette adoption qui était posée. La Cour d'appel a confirmé cette adoption déclarant qu'elle était valide, aussi valide que d'autres genres d'adoption.
La semaine dernière, j'ai fait venir un jeune danseur indien de la réserve Driftpile, qui est l'une des bandes membres du Regional Council, pour enseigner les enfants de sixième année de l'école de Slave Lake que fréquentent mes enfants et qui est située à l'extérieur de la réserve. Il leur a expliqué les origines de la danse des herbes sacrées. Il a dit que lorsque les Indiens déplaçaient leur camp ou devaient établir un camp pour une cérémonie, 50 guerriers s'alignaient au bord d'un champ d'herbes hautes, pour danser et prier, tout en piétinant lentement les herbes pour préparer le champ de manière que les gens puissent s'y rassembler.
Peut-être qu'un Européen aurait brûlé les herbes, les aurait coupées ou aurait préparé le champ d'une autre façon. Toutes ces façons de procéder sont valables et nous devons les respecter. Nous avons donné aux gens la possibilité d'être ce qu'ils sont et de faire preuve de tolérance.
La présidente: Lorsque vous parlez des citoyens, pensez-vous que le citoyen d'une bande est également un citoyen canadien?
Mme Twinn: Oui.
La présidente: Par conséquent, tous les traités internationaux, et cetera, auxquels le Canada a souscrit s'appliqueraient?
Mme Twinn: Oui.
La présidente: Vous n'avez pas de problème à propos des questions de défense nationale, et cetera?
Mme Twinn: Ce sont des questions de souveraineté canadienne.
La présidente: Il s'agit ici d'une mesure habilitante se rapportant à tous les autres groupes indiens. Avez-vous consulté de nombreux autres groupes des Premières nations?
Mme Twinn: Oui, dans la mesure où nous avons disposé des ressources nécessaires. Nous avons demandé au ministère des Affaires indiennes et du Nord de nous financer à cet égard, mais il ne l'a pas fait. J'ai dernièrement passé une journée à la réserve Siksika pour examiner ce projet de loi avec son gouvernement; j'ai ainsi répondu à ses questions et à celles des avocats. Ce processus se déroule ailleurs également.
La présidente: Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui; cela a permis d'expliquer d'assez nombreux points au sujet du projet de loi.
Mesdames et messieurs les sénateurs, les représentants du ministère des Anciens combattants ne sont pas disponibles avant le 24 avril, mais peuvent produire un rapport écrit d'ici la fin de la semaine prochaine et en parler plus tard. Cela vous convient-il?
Le sénateur Andreychuk: Je trouve tout à fait inadmissible qu'un ministère ne soit pas prêt à nous présenter un rapport au bout de deux ans. Nous devrions débattre de ce point un peu plus tard. Entre-temps, il faudrait à tout le moins obtenir un rapport écrit pour avoir quelque chose au compte rendu.
La présidente: Merci.
La séance est levée.