Aller au contenu
AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'agriculture et des forêts

Fascicule 7 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 13 juin 1996

Le comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 9 heures, pour considérer les travaux futurs du comité.

Le sénateur Leonard J. Gustafson (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, le greffier du comité a distribué un ordre du jour aux fins de discussion et de décision.

À la rubrique «Autres questions», l'Association des banquiers canadiens a demandé de témoigner à notre comité. Une lettre est parvenue à mon bureau la semaine dernière à propos des déclarations et des recommandations du comité sénatorial permanent des banques et du commerce en matière de crédit agricole. Cette association souhaite comparaître devant nous avant que notre comité énonce sa position.

Les sénateurs souhaitent-ils faire inscrire d'autres sujets à l'ordre du jour?

Le sénateur Riel: Oui, j'aimerais discuter du lait cru.

Le sénateur Hays: Monsieur le président, nous devions entendre aujourd'hui l'Ontario Cattlemen's Association. Je comprends que nous n'avons pas le temps de reporter ce témoignage ce printemps, mais nous ne devrions pas l'oublier. Nous devrions peut-être convoquer des témoins pour la reprise des travaux à l'automne.

Le président: Il serait peut-être sage de convoquer d'abord l'Association nationale des éleveurs de bovins, afin d'obtenir une perspective d'ensemble sur la question.

Le sénateur Hays: Nous constaterons que les points de vue varient selon les régions. Je pense qu'il vaudrait mieux que ces points de vue s'expriment sur la place publique. Je ne suis pas certain qu'on puisse faire quoi que ce soit, mais je pense que ce serait une bonne idée d'entendre les gens et de les laisser exprimer leurs préoccupations. Il en ressortira peut-être quelque chose, mais je ne peux pas le savoir sans avoir rien entendu.

Le président: La mission d'information à la Commission canadienne du blé est la première question à l'ordre du jour.

Le sénateur Hays: Nous attendons un rapport du groupe spécial chargé, par le ministre de l'Agriculture, de faire des recommandations, notamment sur l'avenir de la Commission canadienne du blé. Le groupe spécial devrait présenter son rapport avant la fin du mois. Je ne crois pas que quelqu'un sache vraiment ce qu'il recommandera.

J'ai pu discuter longuement avec un des membres, un certain M. Duke, de la Saskatchewan. Je lui ai exprimé quelques points de vue du comité sur ce rapport après notre dernière mission à Winnipeg. Je ne pense pas qu'il soit très utile de retourner là-bas tant que le rapport n'aura pas été distribué. Il conviendrait mieux d'y aller à la rentrée.

À la réunion du comité de direction, hier, nous avons parlé de la possibilité d'effectuer cette mission avant que le Sénat ne reprenne ses travaux en septembre ou encore beaucoup plus tard dans l'année. Un budget a été prévu pour cette mission. C'est une bonne idée; c'est une question importante. J'espère que nous trouverons le temps d'effectuer cette mission à l'automne.

Le sénateur Rossiter: Je suppose que nous obtiendrons des exemplaires du rapport du groupe spécial.

Le sénateur Hays: Je vais demander au greffier de s'en assurer.

Le président: Pourriez-vous proposer une motion à cet effet, sénateur?

Le sénateur Hays: Je n'ai pas de date précise à indiquer dans la motion, monsieur le président.

Le président: C'est prévu pour la fin de l'automne.

Le sénateur Hays: Je propose que nous donnions suite à notre intention de nous rendre à la Commission canadienne du blé, à Winnipeg, et d'entendre d'autres témoins, s'il y a lieu, à l'automne.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

La prochaine question à l'ordre du jour est une mission d'information à Washington, D.C.

On a mis en doute, au comité de direction, la possibilité de réaliser une mission fructueuse, étant donné les élections de cet automne. Si nous allions à Washington à la mi-octobre, les Américains seraient peut-être si obsédés par leurs élections que nous n'accomplirions pas grand-chose.

Le sénateur Rossiter: Nous devrions peut-être reporter la mission au printemps.

Le président: Présentez-vous une motion?

Le sénateur Rossiter: Oui. Je propose que nous reportions la mission d'information à Washington bien après les élections, probablement au début du printemps ou à la fin de l'hiver.

Le président: Ou au début de l'hiver, mais certainement après les élections.

Le sénateur Rossiter: Oui.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

La prochaine question à l'ordre du jour porte sur les forêts. Le sénateur Spivak arrivera sous peu. J'attends aussi le sénateur Taylor. Nous pourrions peut-être reporter cette question à la fin de la séance.

La prochaine question est la conférence de Winnipeg.

Le sénateur Rossiter: Nous avons convenu que Mme Dewetering y assistera.

Le président: Oui. Le sénateur Hays souhaite y aller lui aussi.

Le sénateur Hays: J'aimerais y aller, mais il y a quelques conflits d'horaires avec des manifestations auxquelles je dois assister à Calgary à l'occasion de la Fête du Canada. J'essaierai d'assister au moins à une partie de la conférence. Si je comprends bien, les journées importantes seront jeudi et vendredi.

Mme June Dewetering, attachée de recherche, Bibliothèque du Parlement: Jeudi matin sera important.

Le sénateur Hays: D'autres membres du comité seront-ils présents? Y serez-vous, monsieur le président?

Le président: J'aimerais y aller.

Le sénateur Hays: Il serait bien qu'un membre du comité y aille. J'ai un conflit d'horaire parce que je participe aux activités entourant le premier congrès international des Rotary à Calgary. Si j'étais présent le mercredi et le jeudi, est-ce que j'assisterais aux journées les plus importantes?

Mme Dewetering: Le mardi soir, il y a simplement l'inscription et une réception d'ouverture.

Le sénateur Hays: Je vais essayer de réorganiser mon emploi du temps et j'informerai ensuite le greffier. Si je peux y aller, je le ferai.

Le président: L'attachée de recherche m'informe que ce sera une conférence assez importante.

Mme Dewetering: Oui, environ 1 600 personnes ont été invitées.

Le président: Il y aura probablement des discussions générales sur tous les aspects de l'agriculture. Il y a beaucoup d'optimisme dans le milieu agricole actuellement, surtout à cause de la hausse des prix dans le secteur des céréales et dans certaines autres industries. L'industrie bovine fait exception. Il y a de nombreux défis internationaux pour le Canada.

Le ministre s'est inquiété du coût des intrants, notamment du coût des engrais, qui augmente lui aussi en même temps que le prix des céréales. Les fabricants de produits chimiques semblent pousser jusqu'à la limite. Il a indiqué que nous pourrions peut-être examiner les hausses du coût des intrants agricoles que sont la machinerie et les engrais. Je suis convaincu qu'il en sera question à Winnipeg.

Le sénateur Hays et moi-même essaierons d'assister à la conférence. Mme Dewetering nous en donnera un compte rendu complet.

Nous passons maintenant aux «Autres questions».

Le sénateur Hays: Si je comprends bien, nous attendons les sénateurs Spivak et Taylor pour discuter du troisième sujet à l'ordre du jour.

En attendant, quelqu'un peut-il faire le point sur la question du lait non pasteurisé, qui a été soulevée par le sénateur Riel?

Le président: Nous avons eu de longues analyses et de nombreux témoignages du ministère de la Santé, durant votre absence, sénateur Hays. C'est presque devenu un enjeu politique. Le comité de la santé a admis qu'il avait probablement été un peu négligent en n'informant pas les intéressés au Québec de ses raisons avant d'agir.

Je crois que le gouvernement provincial à Québec a exprimé des objections, n'est-ce pas?

Le sénateur Riel: Oui. Comme je l'ai déjà mentionné, chaque fois qu'une mesure peut être interprétée comme une attaque du gouvernement fédéral contre l'agriculture ou toute autre industrie au Québec, les journaux en font toute une histoire.

Dans ce cas-ci, l'Assemblée nationale a adopté une résolution à l'unanimité pour «ordonner» -- le terme employé en français est aussi fort que cela -- au gouvernement fédéral de retirer ses modifications.

Il semble que le Bloc québécois se vante de son intervention dans toute la province. Ils ont organisé une réception et servi du fromage soi-disant de lait cru. On me dit qu'en partie du moins, du fromage ordinaire a été servi et qu'il n'avait pas été fabriqué avec du lait cru. Je n'ai pas vérifié cette information.

La radio et la télévision au Québec ont diffusé des émissions avec de prétendus experts pour démontrer qu'il n'y a pas de différence de goût entre du fromage de lait cru et du fromage de lait pasteurisé. On en a fait tout un scandale.

Si je comprends bien le témoignage que nous avons entendu ici, le ministère fédéral de la Santé ne sait pas ce qui se passe au Québec. Ils affirment maintenant qu'ils feront adopter un nouveau règlement pour modifier celui qui existe actuellement. Un comité a été formé par le gouvernement provincial et par le ministère de l'Agriculture du Canada. Si je comprends bien, on permettra aux petits producteurs du Québec d'aller de l'avant.

Le scandale a été déclenché par les importateurs de fromage, si je comprends bien. M. Rivard a indiqué clairement que les importateurs reçoivent une autorisation du gouvernement fédéral. Trois ou quatre gros importateurs font beaucoup de sous -- ce à quoi je n'ai aucune objection, mais ils doivent observer les lois et les règlements qui protègent la santé dans la province.

Apparemment, 25 p. 100 des importations de fromage au Canada sont refusées à la douane. C'est beaucoup. Les ventes de fromage de lait cru au Québec représentent un petit pourcentage des ventes de fromage sur ce marché. M. Rivard a affirmé que la production totale en cause serait égale à celle d'une exploitation agricole de taille moyenne au Québec. Ce n'est peut-être pas si important.

Je suis étonné de voir que le ministère de la Santé ne semble pas avoir de conseiller en relations publiques. Ils n'ont probablement pas de service des relations publiques. Au Québec, tous les ministères, tous les ministres, tous les titulaires de postes importants ont un attaché de presse. Ces attachés de presse sont chargés de maintenir un lien constant avec les médias et de les informer.

Le président: Sénateur Riel, les fonctionnaires du ministère ont admis que le ministère est un peu négligent en ce qui concerne les relations publiques.

Avez-vous des recommandations au sujet du suivi? Je ne sais pas trop ce que le comité sénatorial pourrait faire pour le moment, sauf surveiller la situation. Si le gouvernement du Québec a pris des mesures aussi énergiques pour demander une nouvelle approche, le comité peut-il vraiment faire quelque chose en attendant que cette nouvelle approche soit définie?

Le sénateur Riel: Premièrement, nous n'avons entendu aucun représentant du ministère de l'Agriculture. Je ne sais pas pourquoi ils n'ont pas comparu devant nous.

Deuxièmement, il ne sert à rien que je fasse plus de boucan à ce sujet, parce que la situation sera certainement corrigée. Je crois comprendre, d'après les déclarations de M. Rivard et d'autres, que les petits agriculteurs seront protégés et que les importateurs seront tenus de respecter des conditions plus strictes.

Le président: Nos conseillers pourraient peut-être nous renseigner à ce sujet.

M. Jean-Denis Fréchette, attaché de recherche: Agriculture et Agroalimentaire Canada n'a rien à voir avec l'inspection du fromage de lait cru. C'est pour cette raison qu'aucun représentant d'Agriculture Canada n'a comparu devant le comité.

Le sénateur Riel: Je cherchais seulement à obtenir de l'information. Depuis mars ou avril, nous ne savons pas ce qui se passe ni pourquoi on avait décidé d'aller de l'avant. Je suppose que nous pourrions attendre à l'automne et y réfléchir durant l'été.

Je ne propose pas que le comité intervienne, mais nous devrions peut-être faire une mise en garde générale pour qu'on sache qu'il faut faire quelque chose avant de prendre des décisions susceptibles de toucher une grande partie de la population. Ils doivent comparaître devant un comité sénatorial, et ce pourrait être le comité sénatorial de l'agriculture et des forêts, pour expliquer ce qu'ils feront et l'objet de leurs mesures.

Le président: Proposez-vous que le comité écrive au ministère de la Santé pour lui demander de se pencher sur la situation au Québec?

Le sénateur Hays: Monsieur le président, nous pourrions songer à déposer un petit rapport contenant quelques recommandations.

Le président: Nous avons été très bien renseignés par le ministère de la Santé lorsque des fonctionnaires de ce ministère ont comparu devant nous.

Le sénateur Hays: Nous avons entendu suffisamment de témoins. Nous pourrions peut-être rédiger un bref rapport contenant quelques recommandations.

Le sénateur Riel: Ils ne prendront pas de décision finale avant l'automne. M. Patterson a déclaré qu'ils rédigeront probablement un rapport en juillet et qu'ils l'étudieront avant de présenter autre chose cet automne. Voilà pourquoi j'ai indiqué que l'automne serait peut-être un moment plus opportun. Si nous envoyons aujourd'hui une lettre contenant des recommandations, elle se retrouvera dans la presse du Québec demain et sera interprétée comme une autre invasion ou une autre attaque. Je ne veux pas jeter de l'huile sur le feu.

Le président: Que pensez-vous de la suggestion du sénateur Hays de présenter un rapport plutôt que d'écrire une lettre?

Le sénateur Riel: Ce serait mieux.

Le sénateur Hays: Nos attachés de recherche auraient peut-être des recommandations sur ce que nous pourrions déclarer afin d'apaiser les craintes du sénateur Riel, que nous avons étudiées assez bien, je crois. Ce serait peut-être utile pour le gouvernement; il saurait mieux comment s'y prendre à l'avenir et s'assurer que ce n'est pas seulement une initiative du Bloc québécois.

Le président: Est-il convenu que nous rédigions un rapport?

Le sénateur Rossiter: Est-il proposé de le faire maintenant ou d'attendre d'en savoir davantage?

Le président: Nous devrions attendre de prendre connaissance des événements prévus pour l'automne avant de rédiger un tel rapport.

Le sénateur Riel: Il faudrait attirer l'attention du ministère sur le fait que notre comité étudie activement la question de la production laitière au Canada.

Nous savons qu'avant la fin de l'année, les Américains exerceront des pressions au sujet des tarifs qui seront mis en oeuvre dans le cadre de l'ALÉNA. Il est important de faire savoir aux ministères de l'Agriculture et de la Santé que nous considérons très sérieusement la question de la production laitière au Canada et au Québec.

M. Fréchette: Il serait peut-être sage que le comité attende à l'automne, quand la question du fromage de lait cru aura probablement été réglée. Santé Canada montre des signes de compréhension. Je recommande que le comité attende à l'automne.

Vous pourriez peut-être adresser une lettre personnelle au ministre de la Santé pour demander au ministère de communiquer au comité tout nouveau renseignement durant l'été. De cette façon, à l'automne, les membres du comité auront tous les documents publiés durant l'été. Le comité pourra ainsi décider à l'automne s'il convient ou non de rédiger un rapport contenant des recommandations ou de prendre d'autres mesures.

Le sénateur Hays: Je suis d'accord.

Le sénateur Rossiter: Je proposerais que cette question vienne en tête des priorités.

Le sénateur Landry: Exportons-nous beaucoup de lait aux États-Unis?

Le sénateur Hays: Je dirais que nous n'en exportons pas du tout.

Le président: Je pense qu'ils ont indiqué que le lait cru représente seulement 2 p. 100 de toute la production laitière.

Le sénateur Hays: Sénateur Landry, je pense que le sénateur Riel parle du groupe spécial de l'ALÉNA qui s'occupe des produits visés par la gestion de l'offre et, essentiellement, d'une attaque contre notre recours aux tarifs élevés et la poursuite de la gestion de l'offre dans ces secteurs. C'est un grand problème pour nous. Mais il ne s'agit pas d'une question d'importation et d'exportation, sauf dans la mesure où nous pouvons protéger nos industries et continuer de maintenir notre système de gestion de l'offre.

Le sénateur Anderson: J'avais cru comprendre, d'après les témoignages des deux témoins de Santé Canada, qu'ils recevaient des mémoires de toutes les régions du Canada à ce sujet. Je pense que la mi-juin est la date limite pour la réception de ces mémoires. Je crois encore que c'est une question importante. J'ai noté que les deux témoins ont indiqué qu'il y a eu 1 500 cas de maladie grave due à du fromage contaminé en quelques années, ainsi que 50 cas de brucellose par année au Canada. Ce n'est pas un problème bénin. C'est quelque chose qui devrait nous préoccuper.

J'ai demandé à recevoir un exemplaire de l'exposé de ces messieurs.

M. Blair Armitage, greffier du comité: J'ai appelé mon contact à Santé Canada qui m'a informé qu'ils n'avaient pas fait d'exposé à partir de notes précises mais plutôt des fiches documentaires qui nous avaient été remises. Il y avait cependant la liste des fromages que le représentant d'Agriculture Canada a présentée. Je n'ai pas pu mettre la main dessus.

Le président: Une lettre du Sénat au ministre ou aux fonctionnaires de Santé Canada suffirait-elle pour vos fins? Quel échéancier proposez-vous?

Le sénateur Anderson: Ils ont indiqué que les mémoires portant sur cette question devaient leur parvenir avant le 13 juin. Ils les examineront ensuite et prendront des décisions. Il vaut mieux attendre qu'ils aient eu l'occasion d'étudier ces documents. Ce n'est pas une question que nous devrions abandonner sans exprimer nos préoccupations.

Le sénateur Rossiter: Le sénateur Riel craint que, si nous écrivons quelque chose, les médias en prendront connaissance, ce qui embrouillera davantage une situation déjà embrouillée.

Le président: Nous pourrions peut-être écrire au ministre ou au ministère pour leur demander de nous tenir informés.

Le sénateur Anderson: Oui.

Le président: Êtes-vous d'accord, sénateur Riel?

Le sénateur Riel: Oui.

Le président: Cela apaise les craintes du sénateur Anderson au sujet de la santé, par exemple. Il ne devrait pas en résulter d'implications politiques concernant une ingérence dans la situation au Québec.

Sénateurs Taylor et Spivak, nous avons discuté des principales questions à l'ordre du jour. En ce qui concerne la mission d'étude à la Commission canadienne du blé à Winnipeg, il a été proposé que nous la reportions jusqu'à ce que nous ayons reçu un rapport du comité.

Quant à la mission d'information à Washington, nous avons décidé qu'il ne serait pas sage d'aller à Washington quand les Américains sont en pleine campagne électorale. Personne ne voudrait nous rencontrer. Alors, nous avons reporté cette mission.

Nous décidé de vous attendre pour étudier la question des forêts.

Mme Dewetering assistera à la conférence qui aura lieu à Winnipeg.

Le sénateur Spivak: Je ne sais pas quand elle a lieu.

Le président: Environ 600 personnes se rendront à Winnipeg. La conférence aura lieu les 25, 26 et 27 juin. Le sénateur Hays et moi-même voulons aussi y assister. Étant donné que vous êtes à Winnipeg, vous aimeriez probablement y assister vous aussi. Je crois comprendre qu'environ 1 600 invitations ont été lancées aux groupes agricoles et aux agriculteurs.

Le sénateur Spivak: Qui la parraine?

Le sénateur Hays: Agriculture Canada.

Le président: En ce qui concerne les «Autres questions», nous avons discuté du lait cru et des éleveurs de bovins. Il reste une autre question. L'Association des banquiers canadiens nous a écrit pour nous demander de comparaître au sujet du crédit agricole et des recommandations qui ont été faites par le comité sénatorial des banques à ce sujet.

Quelqu'un a-t-il des suggestions à ce propos?

Le sénateur Hays: Si nous entendons l'Association des banquiers canadiens, comme nous devrions le faire à mon avis, je pense que nous devrions aussi entendre la Société du crédit agricole ainsi qu'un ou deux groupes qui représentent les clients de la Société du crédit agricole, pour qu'ils nous expliquent comment ils envisagent l'avenir si la recommandation du comité des banques est acceptée par le gouvernement et que la Société du crédit agricole, ainsi que d'autres organisations de soutien financier, est intégrée à ce qui était la Banque fédérale de développement.

Le président: C'est un bon argument. Mon impression personnelle ressemble à celle qui a été exprimée par le ministre de l'Agriculture à notre comité. Il a déclaré qu'il n'y a rien de mal à ce que des changements soient apportés, tant que le crédit agricole est renforcé et qu'il ne disparaît pas.

Deux représentants de l'Association des banquiers sont venus à mon bureau, l'un de la Banque de Montréal, et l'autre de la Banque Canadienne Impériale de Commerce. Essentiellement, ils ont présenté les arguments suivants. Premièrement, ils ont du mal à maintenir leurs succursales dans les petits centres ruraux du Canada et c'est quelque chose que nous pouvons comprendre. Ils estiment que la concurrence de la Société du crédit agricole est injuste. Je leur ai fait remarquer qu'à mon avis, la société a sauvé bien des exploitations agricoles et qu'ils ne se rendaient probablement pas compte que la terre n'allait nulle part -- qu'elle n'allait pas disparaître -- et que nos agriculteurs avaient des cycles d'expansion et de ralentissement pendant lesquels ils n'arrivaient pas à faire leurs paiements. J'ai aussi fait remarquer que les banques devraient tenir davantage compte des circonstances, comme l'a fait la société au fil des années, et que si elles voulaient cette part du marché, elles devraient le faire savoir aux agriculteurs. Ils étaient d'accord -- en tous cas, ils ont dit qu'ils étaient d'accord.

Il ne fait aucun doute que les agriculteurs ont eu davantage confiance que le gouvernement ne leur enlèverait pas leur ferme quand ils avaient de mauvaises années. Je suis même allé jusqu'à indiquer que le ralentissement dans le secteur immobilier commercial leur avait certainement enseigné une leçon, à savoir que ce secteur est beaucoup plus instable que le secteur agricole, parce que les agriculteurs ne peuvent pas emporter la terre.

Ils ont ensuite évoqué l'ingérence des gouvernements provinciaux en ce qui concerne la protection des agriculteurs et ont même inclus les droits sur les biens de famille pour les terres sur lesquelles vivent les agriculteurs. Il a aussi été question de l'incidence des divorces et de l'éclatement des familles sur les exploitations agricoles. Lorsqu'une ferme est divisée, il devient presque impossible qu'elle soit rentable. Cette situation a de grandes conséquences, mais elle relève davantage des compétences provinciales.

Le sénateur Taylor: La solution consiste à tout donner à la femme.

Le président: Il faut se rappeler qu'il y a beaucoup de femmes à qui les parents ont donné une ferme et dont le gendre a peut-être voulu profiter.

Le sénateur Rossiter: Ou le contraire.

Le président: C'est exact. Je ne connais pas la solution à ce problème.

Le sénateur Spivak: Devons-nous nous inquiéter des banques? Elles font de si bonnes affaires que ces problèmes agricoles ne les gênent probablement pas beaucoup. Regardez-les. Elles prospèrent de jour en jour. Ne devons-nous pas tenir compte du fait que toutes les forces du monde entier sont en train de détruire la ferme familiale? D'ailleurs, aux États-Unis, d'après ce que j'ai lu, ils ont essentiellement renoncé à la ferme familiale. Il n'y a rien d'autre que des exploitations gigantesques. Ne devrions-nous pas dire aux banques que d'autres facteurs entrent en jeu?

Quelle sera l'incidence de la technologie sur la nécessité, pour une banque, d'avoir une présence concrète?

Le président: J'ai présidé le groupe de travail sur la sécheresse dans l'Ouest canadien quand nous avons eu trois années de grande sécheresse. Les exploitations agricoles qui ont survécu n'étaient pas les grandes exploitations ni même les fermes constituées en société, mais plutôt les fermes de taille moyenne exploitées par un agriculteur qui faisait son travail; par les véritables fermes familiales.

Il y a quelques années, on croyait qu'une ferme familiale n'était qu'une idée politique. Je suis arrivé à la conclusion que ce n'est pas vrai. C'est elle -- et le sénateur Hays ou d'autres voudront peut-être intervenir à ce sujet -- qui a le mieux traversé les périodes difficiles.

C'est lié à l'investissement étranger. J'ai raconté aux banquiers que mon grand-père était venu de l'Illinois pour s'établir sur une ferme en Saskatchewan en 1909. Nous avons renvoyé les Américains chez eux complètement ruinés trois fois. Le dernier à partir était un agriculteur de notre région qui avait 150 quarts de section. Il a tout vendu et est retourné aux États-Unis. Il avait accumulé 150 quarts de section. À la vente, il m'a raconté qu'il a commencé à acheter des terres en 1962, quand la terre ne coûtait pas cher. Il a acheté des quarts de section pour aussi peu que 4 000 $.

Dans les années 20, en Saskatchewan tout au moins -- et c'était la même chose au Manitoba et en Alberta -- presque toutes les fermes d'une demi-section appartenaient à des Américains. Quand les années 30 sont arrivées, toutes ces terres ont été mises en vente. Ils ne sont pas devenus des exploitants de ferme familiale.

Cet agriculteur américain qui vient de partir m'a raconté que son fils n'est pas intéressé, qu'il ne connaît rien de l'agriculture et qu'il ne viendra pas ici et payer le prix qu'il faut pour devenir un agriculteur actif.

Vous avez un bon argument, sénateur Spivak. Je crois que les gouvernements doivent tenir compte de ce fait. Le ministre a beaucoup insisté sur l'importance du financement pour un agriculteur qui veut se diversifier, notamment pour produire des semences. C'est à cela que s'opposent les banques, parce qu'il n'est pas question seulement d'une exploitation agricole, mais aussi d'une petite entreprise. Le moment est venu où les deux ne peuvent pas être séparées si nous voulons que les agriculteurs puissent se diversifier suffisamment pour pouvoir soutenir la concurrence dans l'économie planétaire.

Je suis d'accord avec le sénateur Spivak. Personne ne prend les banques en pitié; elles ont réalisé des profits fabuleux. Par contre, il est vrai que nos petites collectivités voient les banques disparaître et que les caisses d'épargne semblent grandir.

Le sénateur Spivak: Qu'y a-t-il de mal à cela? C'est le jeu de la libre entreprise.

Le président: On me dit qu'à Estevan, qui compte environ 10 000 habitants, les caisses d'épargne détiennent environ 50 p. 100 des comptes.

Le sénateur Spivak: Je ne vois pas le problème. Les banques iront vers la location d'automobiles à long terme et l'assurance. Si elles doivent sortir de l'économie rurale, cependant. C'est la libre entreprise. Si elles ne peuvent pas soutenir la concurrence, elles devraient s'en aller et laisser les caisses d'épargne prendre leur place.

Le président: Je leur ai dit que si elles font connaître leur position aux agriculteurs, si elles leur fournissent un service et tiennent compte des circonstances durant les périodes difficiles, je ne vois pas pourquoi elles auraient des ennuis.

Le sénateur Spivak: Que veulent-elles nous raconter? Que veulent-elles démontrer?

Le président: Je suis d'accord avec ce qu'a déclaré le sénateur Hays, à savoir qu'en plus d'entendre l'Association des banquiers, nous devrions entendre la Société du crédit agricole et d'autres parties intéressées.

Le sénateur Spivak: C'est une excellente idée.

Le président: Sommes-nous d'accord?

Le sénateur Hays: Je n'ai pas besoin d'en dire plus. Cela me semble une bonne idée.

Le sénateur Rossiter: Le crédit agricole touche aux agriculteurs de toutes les régions du Canada. Depuis que je siège à ce comité, il me semble que nous nous intéressons surtout à l'agriculture dans l'Ouest canadien.

Le sénateur Spivak: C'est vrai.

Le sénateur Rossiter: Il serait bien que les gens sachent qu'il y a d'autres régions au pays.

Le président: Votre remarque est fondée. Nous en discuterons lorsqu'il sera question des forêts. J'en ai discuté avec le sénateur Anderson, hier. Il y a probablement des questions qui intéressent les Maritimes, et l'agriculture va beaucoup plus loin que le blé et le boeuf. L'horticulture et la culture de la pomme de terre sont d'autres questions importantes, tout comme la sylviculture. Vous avez raison.

Sénateur Hays, auriez-vous l'obligeance de présenter une motion, s'il vous plaît?

Le sénateur Hays: Sur le crédit agricole?

Le président: Oui.

Le sénateur Hays: Vous l'avez fait avec brio il y a un instant, monsieur le président.

Je propose que le comité invite non seulement l'Association des banquiers canadiens, qui a demandé à comparaître devant nous, mais aussi des témoins qui présenteraient d'autres points de vue, à savoir la Société du crédit agricole et un ou des groupes représentant les clients de la Société du crédit agricole, afin que nous ayons une perspective équilibrée pour faire des recommandations, s'il y a lieu, sur cet éventuel changement proposé par le gouvernement qui éliminerait la SCA et transférerait son portefeuille à la Banque fédérale de développement.

Le sénateur Taylor: La SCA est-elle active surtout dans l'Ouest ou accorde-t-elle aussi des prêts dans les Maritimes?

Le sénateur Rossiter: Ah oui.

Le sénateur Hays: Elle est active dans tout le Canada.

Le sénateur Taylor: Je croyais que la plus grande partie de son capital était investi dans l'Ouest. Nous devrions peut-être inviter également des institutions provinciales, parce qu'elles aussi accordent des prêts aux agriculteurs. Je ne sais pas ce qui existe en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick, mais l'Alberta a sa propre organisation.

Le sénateur Hays: Il y avait l'AADC, l'Alberta Agricultural Development Corporation, en Alberta. Je ne sais pas si elle existe encore. Je pense que oui.

Le sénateur Taylor: Je me demandais seulement ce qui existe au Manitoba et en Saskatchewan. Je suis presque certain que les gouvernements de la Nouvelle-Écosse, de l'Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick ont une direction qui s'occupe du crédit agricole au sein de leur ministère de l'Agriculture. Nous devrions peut-être en inviter un ou deux, peut-être tous s'ils veulent venir, pour entendre ce qu'ils ont à dire.

Le président: Je pense que la recommandation du sénateur Hays le prévoit.

Le sénateur Hays: En ce qui concerne la profondeur de l'étude, nous devons attendre d'avoir quelques témoignages. Tout va peut-être très bien; sinon, nous pourrions peut-être étudier la question plus en profondeur.

Le sénateur Spivak: En ce qui concerne cette étude avortée sur l'avenir de l'agriculture au Canada, je me souviens que, lorsque le ministre a témoigné, il a parlé de développement rural. N'y avait-il pas des propositions sur la façon d'y parvenir ou de le stimuler? Je ne parle pas nécessairement des exploitations agricoles; je parle de développement rural. Nous avons oublié cette question, mais c'est fréquent en ce qui concerne le revenu non agricole. Je ne crois pas que ce soit lié directement au financement, mais en un sens, si. C'est certainement lié aux activités des banques. Elles ne se contentent pas de prêter de l'argent aux agriculteurs. On peut espérer qu'elles prêtent aussi à toutes sortes d'entreprises dans l'économie rurale. Nous ne devrions pas le perdre de vue. Ils l'ont peut-être oublié, mais le financement est la clé. Vous en souvenez-vous, sénateur Hays?

Le sénateur Hays: Ce dont vous vous souvenez, sénateur Spivak, c'est qu'au début du mandat du gouvernement actuel, nous avons décidé d'entreprendre une vaste étude sur l'état actuel de l'agriculture canadienne et les perspectives d'avenir dans le contexte du développement rural, parallèlement aux travaux du comité de la Chambre des communes. Nous avons travaillé à cette étude, mais en réalité, on nous a évincés. Désormais, le ministre et le gouvernement effectuent cette étude au lieu d'un comité parlementaire.

Que faire maintenant? Il reste encore au gouvernement un an et demi dans le cours normal d'un mandat de quatre ans. C'est un peu tard pour entreprendre une étude de cette envergure.

Le sénateur Spivak: Je ne pensais pas du tout à une grande étude. Le gouvernement a affirmé qu'il la ferait. Quels progrès ont été accomplis? Qu'arrive-t-il en ce qui concerne le financement?

Le sénateur Hays: C'est un sujet qu'il est préférable de laisser de côté, à mon avis, tant que nous n'aurons pas entendu les témoins. La question est la suivante: dans quelle mesure la Société du crédit agricole est-elle un moyen important pour atteindre nos objectifs à l'égard du Canada rural?

Le sénateur Spivak: Que font les banques? Nous ne devrions pas l'oublier quand nous les interrogerons.

Le sénateur Hays: Nous ne l'oublierons pas. Mais il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs. Nous tentons de répondre à des questions sans connaître tous les faits.

Le président: Le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles se penche sur certaines questions rurales.

Je me souviens que les municipalités rurales, surtout en Saskatchewan, ont présenté un excellent rapport au comité sénatorial.

Le sénateur Spivak: Merci de me le rappeler. Puis-je obtenir un exemplaire de ce rapport?

Le président: Oui. Le témoin était excellent.

Mme Dewetering m'informe qu'elle assistera à l'atelier sur le développement rural à la conférence de Winnipeg. Ce serait peut-être une bonne idée d'y assister vous aussi, sénateurs, et de faire des suggestions à ce moment-là.

Le sénateur Spivak: C'est une bonne idée.

Le président: Plusieurs questions, dont le transport et l'abolition de la subvention du Nid-de-Corbeau, auront des répercussions importantes sur le Canada rural.

L'Association des banquiers a aussi indiqué que les banques possèdent beaucoup de terres saisies en Saskatchewan. Le fait qu'elles ont ces terres à vendre confirme nos craintes.

Le sénateur Taylor: J'espère que vous leur avez dit de ne pas s'étouffer.

Le président: Le sénateur Spivak dit cela parce qu'avec les profits que réalisent les banques, personne ne les prend en pitié.

Je défends beaucoup les agriculteurs, parce que j'en suis un moi-même. Ils ne s'enfuient pas. Ce sont de bons citoyens et ils paient leurs dettes s'ils ont des sous pour payer.

La question est la suivante: est-ce important pour notre survie canadienne? Je pense que nous irons jusqu'au bout de cette question. Nous aurons peut-être perdu certains aspects importants de notre milieu agricole avant de nous faire une idée sur cette question.

S'il n'y a pas d'autres remarques à ce sujet, nous passerons à la dernière question, relative aux forêts.

Le sénateur Spivak: Tous les membres ont-ils reçu le document que j'ai fait distribuer?

M. Armitage: Quel document, sénateur?

Le sénateur Spivak: Le document sur les forêts.

M. Armitage: Je suis désolé; je ne pensais pas que vous vouliez que je le distribue. Je pensais qu'il s'agissait d'un document d'information pour que je vous aide à donner suite à un ordre de renvoi.

Le sénateur Spivak: Ce doit être ma faute; je pensais qu'il serait distribué. C'était seulement un document d'une page envoyé à la régie interne.

Le sénateur Rossiter: Le budget.

M. Armitage: Je suis désolé. Je ne me souviens pas de l'avoir vu.

Le sénateur Spivak: Je prie le comité de m'excuser. C'est un document d'une page que le sénateur Taylor a vu et que je pensais avoir été distribué à tous les membres du comité.

Le président: Le greffier peut peut-être donner des explications. Le comité a établi son budget, qui est maintenant à l'étude à la régie interne.

M. Armitage: C'est exact. Le sénateur Spivak doit assister à une séance du comité de la régie interne ce matin à 10 h 30, pour discuter de notre budget.

Le sénateur Taylor: Les forêts sont probablement un enjeu aussi important que l'agriculture. J'ai déjà entendu d'autres sénateurs et des députés me demander si nous laissions de côté la Colombie-Britannique ou les Maritimes. Je ne pense pas que nous puissions effectuer une mission d'information sur tous les aspects des forêts durant l'été et l'automne. Nous avons commencé par la forêt boréale parce que c'est celle qui a été mise en valeur le plus récemment, mais ce n'est pas la plus vieille.

Le président: Où se trouve-t-elle?

Le sénateur Taylor: Elle est parallèle au Bouclier canadien. Elle comprend le nord de l'Alberta, le nord de la Saskatchewan, la moitié supérieure du Manitoba, le tiers supérieur de l'Ontario et se termine au Québec.

Il s'agit essentiellement de la forêt de tremble et de peuplier. Pendant des années, les agriculteurs ont considéré que ces espèces n'avaient aucune utilité. Ce n'est que ces dernières années que les progrès de la technologie des pâtes à papier et du bois de construction ont permis de rendre ces arbres utiles. La forêt boréale se reproduit par les racines des arbres. Un tremble est probablement le plus grand organisme vivant au monde. Un seul tremble peut couvrir 100 acres de pousses verticales de toutes sortes. Il est plus grand que le palétuvier.

Le terme «boréal» vient d'«aurore boréale». Il s'agit de la plus importante forêt au monde. Elle s'étend du Canada en Russie et contient des réserves peut-être aussi vastes que celles de l'Amazonie.

Les gouvernements provinciaux ont accordé de grandes concessions, essentiellement à des sociétés étrangères, américaines et japonaises, principalement parce qu'elles ont été les premières. Ces sociétés convertissent ce bois en pâte à papier, en bois de construction et en papier. Il y a une forte demande mondiale de papier.

Mais cette forêt pose des problèmes différents de ceux qu'on trouve dans les forêts des Maritimes ou de la côte ouest. Ces dernières servent surtout les marchés du bois de construction, ainsi que de la pâte à papier, mais elles sont exploitées depuis 100 ans; la forêt boréale est une forêt vierge. Elle est à la même étape que les buffles au début du XIXe siècle. Le gouvernement et la population peuvent mettre en place des systèmes qui protégeront cette ressource pour les générations futures.

Ces forêts deviennent aussi plus intéressantes à cause de leur utilité éventuelle en microbiologie, notamment pour les vaccins et les nouveaux médicaments qu'on trouve dans une forêt de 100 à 150 ans. Les forêts qui ont été reboisées n'ont habituellement pas plus de 40 à 75 ans. Autrement dit, lorsque les arbres sont abattus, tout un système écologique est parfois endommagé. On a fait très peu de recherches sur ce sujet. Naturellement, les titulaires des concessions, les entreprises de bois de construction et les papetières ne sont pas très intéressés à assurer la protection microbiologique à long terme.

Enfin, il y a l'idée toute simple et classique que cette forêt est le poumon de la planète. C'est la seule grande forêt qui reste dans l'hémisphère nord pour nous aider à lutter contre la pollution et les pluies acides. Il est vrai toutefois qu'une forêt en croissance contribue à cette lutte elle aussi.

J'essaie de vous brosser un tableau général de la forêt boréale. C'est une forêt tout à fait différente de la forêt de la cordillère en Colombie-Britannique et des forêts maritimes. Au Nouveau-Brunswick, par exemple, 80 p. 100 des arbres se trouvent sur des terres privées.

Le sénateur Spivak: Je fais circuler cette carte, où la forêt boréale est la partie en vert foncé. Regardez comme elle est grande.

Le président: Le comité a beaucoup de chance de compter quelques experts sur cette question en la personne des sénateurs Taylor et Spivak. Il est important d'étudier cette question. Comment le comité procédera-t-il?

Le sénateur Taylor: Je ne sais pas si nous devrions avoir un sous-comité. Nous devrions peut-être réfléchir avant d'agir. Vous avez plus d'expérience que moi. Nous pourrions simplement effectuer notre mission cet automne pour voir la forêt boréale et nous faire une opinion par la suite. Il y a divers types de forêts.

Le président: Mon premier objectif est de faire adopter le budget aujourd'hui. Nous ne pouvons pas prendre de décisions tant que ce n'est pas fait. Nous demandons une somme considérable, 76 000 $.

Le sénateur Spivak: Si le budget est adopté, nous pourrons ensuite proposer un processus au comité.

J'ai remis au comité de la régie interne une description d'une page des principales questions à étudier. Il y a eu beaucoup de pertes d'emplois dans le secteur forestier et des pressions au sujet de la coupe à blanc et des autorisations. Le secteur forestier américain crée trois ou quatre fois plus d'emplois que le nôtre. C'est la première question.

Je m'inspire des suggestions de l'attaché de recherche. Nous examinerons des questions comme les coupes permises, les techniques d'abattage et les droits d'abattage. Beaucoup de nouvelles plantes sont arrivées dans la forêt boréale. Est-ce un développement durable?

J'ai lu dans le Calgary Herald un article au sujet d'une étude échelonnée sur cinq ans à propos d'une rivière du Nord. Il est désormais interdit de pêcher dans cette rivière parce que le poisson est complètement contaminé par le mercure.

Le sénateur Taylor: Il s'agit des plantes indigènes dans la forêt boréale, celles qui s'y trouvent depuis le plus longtemps.

Le sénateur Spivak: Cet article a été publié le 5 juin 1996. On y lit qu'il y a du poisson impropre à la consommation dans les rivières du nord de l'Alberta et que le problème est si grave qu'Ottawa et l'Alberta devraient publier des avertissements pour la santé.

Il y a aussi des progrès technologiques phénoménaux. J'ai été estomaquée par les progrès technologiques rapides dans le secteur pétrolier. Il y a des systèmes en circuit fermé. Je ne pense pas que le Canada ait adopté la bonne attitude pour trouver la meilleure technologie possible au lieu de favoriser le développement continu, comme on le fait dans certains pays, notamment en Suède. Dans un système en circuit fermé, il n'y a pas d'effluents. Aucun déchet de l'industrie pétrolière n'entre dans les cours d'eau. C'est désormais possible dans l'industrie forestière.

Il y a aussi le changement climatique. Sur la carte que vous avez devant vous, l'incidence du changement climatique est déjà évidente dans certaines régions. En plus de réchauffer toute la planète, l'incidence varie selon les endroits. La rigueur du climat résulte des changements climatiques. C'est certainement en train de se produire, mais on ne connaît pas la fréquence ni l'ampleur. Si les changements climatiques se produisent conformément aux prévisions actuelles, la forêt boréale ne pourra pas se déplacer vers le nord assez rapidement. C'est quelque chose dont il faut être conscient.

Le président: Le comité pourrait peut-être procéder comme suit. Vous et le sénateur Taylor comparaîtrez devant le comité de la régie interne aujourd'hui pour recommander au comité comment nous aborderons ces questions à l'automne.

Le sénateur Spivak: Oui. Il s'agit simplement d'une mission d'information.

Le président: À ce moment-là, nous saurons de quel budget nous disposons et nous compterons sur vous pour nous indiquer par quoi commencer. Comme l'a déclaré le sénateur Taylor, c'est un très vaste sujet, et nous ne pouvons pas visiter tout le pays en même temps. Mais nous devons commencer quelque part, avec l'intention d'aller plus loin.

Le sénateur Taylor: Je préviens le comité que cette question soulève de nombreux problèmes politiques, parce les forêts sont considérées comme une ressource provinciale, pas fédérale.

Les provinces et l'industrie forestière jouent des coudes, en ce sens qu'elles cherchent des fonds pour les affecter à autre chose. Elles exploitent peut-être aussi les forêts plus vite que ne le souhaite la société. Elles jouent également sur les redevances ou les droits d'abattage pour s'évincer mutuellement du marché.

Certaines sociétés forestières disent aux gouvernements de se mêler de leurs affaires. Mais nous devons aussi tenir compte de l'intérêt national.

Je fais ces remarques parce que l'un des journaux les plus chauvins de l'Alberta ou de la Colombie-Britannique nous dira peut-être de faire nos valises et de déguerpir.

Le président: Ce n'est pas très différent en agriculture.

Le sénateur Spivak: Nous croyons comprendre que les papetières ont dû dépenser des millions de dollars à la demande non pas des provinces mais du gouvernement national, parce qu'elles détruisent le poisson partout. C'est une responsabilité nationale, sans parler des eaux navigables et des oiseaux migrateurs.

Le président: Mme Dewetering a raison de proposer que vous fassiez rapport tous les deux au comité de direction. Le comité de direction pourrait ensuite faire quelques recommandations qui donneraient à notre personnel le temps de se préparer. Êtes-vous d'accord?

Le sénateur Spivak: Oui.

Le président: Quelqu'un proposera-t-il que le comité de direction soit autorisé à établir l'échéancier qui conviendra le mieux au comité?

Le sénateur Taylor: Je le propose, monsieur le président.

Le sénateur Spivak: Les incendies de forêt sont un énorme problème à cause des changements climatiques. C'est le problème le plus important.

Le président: Je constate que le gouvernement de la Colombie-Britannique a envoyé des pompiers au Québec.

Le sénateur Spivak: Les années 1994 et 1995 ont été les plus chaudes depuis que nous avons des statistiques. Ces dernières années, les incendies de forêt ont doublé. Mais il n'y a pas que les feux de forêt, il y a aussi les feux de cimes. C'est un résultat direct du réchauffement de la planète. Cela nous coûte une fortune.

Le président: Je suis convaincu que ces questions seraient soulevées si nous entendions les témoignages de divers intéressés.

Le sénateur Spivak: C'est un grand problème.

Le président: Notre greffier aimerait aborder quelques questions que nous devons régler.

M. Armitage: Le président a besoin d'une motion l'autorisant à faire rapport au Sénat, pour lui demander respectueusement d'autoriser le comité à recourir aux services de conseillers et de personnel technique, de personnel de bureau et de tout autre personnel nécessaire, et de se rendre à divers endroits au Canada et à l'étranger aux fins de cette étude.

Le sénateur Anderson: Je le propose.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

La séance est levée.


Haut de page