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DEV2 - Comité spécial

Société de développment du Cap-Breton (spécial) 1996

 

Délibérations du comité spécial du Sénat sur
la Société de développement du Cap-Breton (1997)

Fascicule 1 - Témoignages du 17 mars


SYDNEY, le lundi 17 mars 1997

Le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton se réunit aujourd'hui à 9 h 30 pour poursuivre l'étude du rapport annuel, du plan d'entreprise et des rapports d'étape de la Société de développement du Cap-Breton et d'autres affaires connexes.

Le sénateur Bill Rompkey (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous reprenons nos audiences sur la Société de développement du Cap-Breton.

Nous poursuivons cet exercice d'examen parlementaire parce que les sénateurs, en particulier ceux qui sont membres du comité, s'intéressent vivement à cette question.

Nous ne sommes pas des décisionnaires; toutefois, nous avons le pouvoir de faire des recommandations, nous avons le pouvoir de faire des observations publiques, et nous avons le pouvoir que nous confère la population. La Société de développement du Cap-Breton est une société d'État; elle appartient aux contribuables; nous sommes ici en tant que représentants des contribuables.

Nous avons également le pouvoir inhérent à une équipe d'étoiles du Cap-Breton. Comme je le disais à notre dernière réunion, si nous étions dans la Ligue nationale de hockey, nous jouerions ici la partie des étoiles du Cap-Breton. Il y a tout un bagage de connaissances autour de la table, et nous avons le pouvoir de poser des questions éclairées.

Nous sommes ici pour évaluer les progrès et, pour ce faire, nous utilisons essentiellement deux points de repère: le plan d'entreprise et, d'autre part, notre propre rapport et nos propres recommandations.

Je ne vais pas lire toutes les recommandations, mais je vais lire celles qui me semblent pertinentes. J'attire d'abord votre attention sur la recommandation no 5, et je cite:

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada ouvre un crédit de 41,25 millions de dollars correspondant à la moitié du coût de l'élimination du passif non capitalisé associé au régime de retraite non contributif et à la moitié du coût des paiements effectués dans le cadre des régimes antérieurs de préretraite et de retraite anticipée.

Nous mettrons l'accent sur la recommandation no 8 ce matin, car nous entendrons des représentants des syndicats. Cette recommandation figure sous la rubrique «Relations patronales-ouvrières», et je cite:

Il est crucial d'améliorer grandement les relations patronales-ouvrières chez DEVCO; c'est peut-être l'élément le plus important pour le succès futur de la société. L'examen du rendement de DEVCO entrepris par un comité du Sénat doit comprendre un examen approfondi des progrès réalisés au chapitre des relations patronales-ouvrières.

Je m'en voudrais de ne pas mentionner la recommandation no 9, et certains participants me rappelleraient alors à l'ordre si je ne le faisais pas. Elle figure sous la rubrique «Future activité minière». Je cite:

La société et la province de la Nouvelle-Écosse doivent entreprendre immédiatement une étude pour vérifier le potentiel et le coût de mise en exploitation de la mine Donkin.

Nous entendrons d'abord ce matin des représentants du Syndicat canadien de la fonction publique.

M. Kevin MacNeil, représentant national, Syndicat canadien de la fonction publique: Je veux d'abord remercier le comité de nous avoir invités à comparaître de nouveau et je félicite le comité pour le rapport qu'il a déjà publié. À nos yeux, c'est la preuve que vous avez écouté. Nous ne croyons pas que tous ont écouté ce que nous avions à dire, pas seulement nous du SCFP, mais l'ensemble du mouvement syndical et les employés de la société en général. Comme vous l'avez signalé à juste titre, il s'agit d'une société d'État qui appartient au peuple. À titre de citoyens, nous sommes intéressés à l'affaire.

Nous croyons que vous avez réfléchi sérieusement à nos propositions. Si la société et le gouvernement avaient attendu, avant de rendre officiel leur plan, le court laps de temps nécessaire pour que vous en terminiez au moins une étude exploratoire, le plan, le plan définitif aurait peut-être été sensiblement différent.

Je ne peux pas dire que je suis d'accord à 100 p. 100 avec toutes vos recommandations; il ne serait pas honnête de ma part de l'affirmer. Par exemple, nous aurions préféré que l'on discute davantage de la question du passif associé au régime de retraite. Vous avez manifestement compris notre point de vue, puisque vous avez recommandé que le gouvernement fédéral assume la responsabilité d'au moins la moitié de ce passif.

Lors de notre dernière comparution, nous avons dit que nous ne possédions pas tous les renseignements voulus dans ce domaine. La question du passif associé au régime de retraite a été déléguée au SCFP, à titre de membre du groupe syndical. Nous croyons maintenant posséder tous les renseignements voulus. Malheureusement, nous avons dû invoquer la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir ces renseignements, même si nous soutenons qu'il s'agit de renseignements publics qui auraient dû être disponibles dès le départ.

Nous avons remarqué en lisant votre rapport que même le comité a eu quelques difficultés à obtenir tous les renseignements qu'il voulait. Nous avions alors des préoccupations à cet égard, et cette question nous préoccupe toujours.

Les renseignements supplémentaires que nous avons obtenus au sujet du régime de retraite ne renfermaient aucune révélation, mais si nous avions eu ces renseignements, nous aurions été mieux en mesure de vous présenter une argumentation plus détaillée à l'appui de notre conviction que le gouvernement du Canada est responsable d'une partie importante de cette dette, sinon de sa totalité. Nous persistons à dire que la société devrait être déchargée de la totalité de cette dette si l'intention est de prendre une décision claire et nette quant à savoir si le plan de la société est économiquement rentable et viable. Nous ne pouvons pas en avoir une idée claire et nette avec cette dette qui pèse comme un boulet.

Je n'ai pas tous les détails, mais j'ai lu dans le numéro de samedi du Cape Breton Post que M. Dingwall, le ministre de la Santé, a dit que le gouvernement fédéral veut transférer une dette de 102 millions de dollars, à cause des aspects environnementaux dont le comité se préoccupait à juste titre. Il évoquait la possibilité de transférer une partie de cette dette des livres de la société à ceux du gouvernement, mais que la société serait toujours censée la payer. Je ne vois pas que cela fasse grand-chose pour nous.

La réalité, c'est que cette dette a été accumulée parce que de l'argent qui était dû n'a pas été payé dans les caisses de retraite aux fins du passif non capitalisé.

M. Dingwall affirme que, si un sort terrible frappait la société, les gens auraient l'assurance que le gouvernement du Canada assumerait la responsabilité de cette dette. Peut-être ne comprend-il pas vraiment que le gouvernement du Canada assume déjà cette responsabilité, quel que soit le succès ou l'échec de la Société de développement du Cap-Breton. Il s'agit là de dettes accumulées le plus légalement du monde, et toute autre entreprise canadienne n'aurait pas été autorisée à la reporter.

Je me laisse peut-être emporter quelque peu à ce sujet, car nous en avons déjà discuté.

Si je comprends bien, vous voulez examiner la situation actuelle, en comparaison de celle d'il y a un an, quand le plan a été mis en oeuvre.

Laissez-moi vous dire qu'avec l'endettement et les problèmes géologiques possibles nous avions de grandes inquiétudes et nous ne pensions pas que le plan proposé pourrait fonctionner. À ce moment-là, comme je suis plutôt optimiste de nature, j'ai laissé entendre qu'il faudrait deux ans pour s'apercevoir que cela ne fonctionnait pas. Apparemment, j'étais trop optimiste. Sauf erreur, en ce moment, c'est-à-dire juste avant la fin de la première année, nous avons un trou d'environ 25 millions de dollars par rapport aux prévisions.

Je ne suis pas venu ici pour porter des accusations ou rejeter le blâme sur quiconque. J'ai lu le procès-verbal des travaux du comité sur Internet et j'ai lu le compte rendu, que j'ai trouvé intéressant et instructif. Je crois que vous avez écouté tous les témoignages et en avez tenu compte. Pour autant que je puisse voir, vous n'avez pas écarté le moindre argument du revers de la main.

L'un des membres du comité a dit que les habitants du Cap-Breton devraient peut-être prier très, très fort, parce que le plan ne prévoit à peu près rien pour tenir compte des forces de la nature. C'est malheureusement vrai. Nous pouvions prévoir à ce moment-là d'énormes difficultés éventuelles, surtout du côté de la mine de Phalen. Il y a eu deux graves éboulements du toit à Phalen, ce qui n'a pas aidé à assurer la réussite du plan. Je peux vous assurer que ces éboulements n'ont pas été rentables pour nous.

Ce qui me préoccupe maintenant, et il faut absolument s'en occuper, c'est que si nous sommes déjà 25 millions de dollars dans le trou, même si tout devait aller comme sur des roulettes pendant les quatre prochaines années, nous nous retrouverions avec un profit de 24 millions de dollars au bout des cinq années du plan, au lieu des 49 millions de dollars de profits que nous avions prévus. De plus, la perte subie cette année signifie qu'il nous manquera environ 25 millions de dollars pour faire fonctionner la société l'année prochaine. Ce manque à gagner initial aura un effet de cascade, et cela n'augure rien de bon pour nous.

Par ailleurs, comme la première année est maintenant presque terminée, ne devrions-nous pas nous demander maintenant ce que nous ferons au cours de la sixième année? Je dis cela parce que nous en sommes au moins au deuxième plan quinquennal. Vous n'ignorez sûrement pas que ce n'est qu'après l'expiration du premier plan quinquennal que l'on a commencé à s'interroger sur ce que l'on ferait au cours des cinq années suivantes. Je ne pense pas que ce soit rationnel à long terme, à moins de dire que nous allons faire fonctionner l'affaire pendant cinq ans, après quoi tout sera terminé. Je ne crois pas que ce soit l'intention; du moins j'espère que tel n'est pas le cas.

Le conseil d'administration de Devco devrait être tenu de nous dire non seulement ce qui s'est passé au cours de l'année précédente, mais aussi ce que l'on entend faire au cours des sixième et septième années, au minimum.

Nous sommes loin d'être sortis de l'auberge pour ce qui est de la mine de Phalen. Nous sommes extrêmement inquiets quant à l'avenir des activités à cet endroit. Que ferons-nous si le pire se produit? Nous n'avons pas de roue de secours. Le camarade Drake, du syndicat UMW, vous donnera de plus amples détails là-dessus.

L'une des recommandations du comité traitait des relations entre la société et le gouvernement provincial. J'ai des préoccupations à cet égard, parce que le premier ministre Savage a dit que la province de la Nouvelle-Écosse n'a pas vraiment les moyens de faire beaucoup dans ce dossier, qu'il doit se contenter d'offrir des conseils et une petite aide financière.

Où en sommes-nous du côté de Donkin? Chose certaine, beaucoup d'études ont été faites. Je crois qu'au cours de la dernière série d'audiences, dont il a été question dans le procès-verbal, le sénateur MacEachen et le sénateur Buchanan ont dit qu'ils se rappelaient avoir signé les ententes initiales relativement à la mine de Donkin. Beaucoup d'études, beaucoup de forage, beaucoup d'argent et beaucoup d'efforts ont été consacrés à ce dossier. Il n'est pas nécessaire de faire d'autres études. Je ne dis pas que la situation ne doit pas être réexaminée à la lumière des circonstances actuelles, mais il est certain qu'une autre année s'est écoulée. J'aimerais bien savoir si l'on a fait quelque chose à ce sujet, parce que nous n'avons pas beaucoup de temps si le scénario du pire devait se réaliser à Devco.

Pour ce qui est des relations syndicales et humaines, nous avons peut-être commis certaines erreurs qui pourraient susciter des problèmes à l'avenir quant aux compressions d'effectifs.

Comme chacun peut s'en rendre compte, comme nous avons attendu jusqu'à la cinquième année du plan avant de commencer à travailler au plan suivant, nous traversions une période fort stressante, et c'est pourquoi, à mon avis, on n'a pas bien tenu compte de tous les détails.

L'un des aspects auxquels nous n'avons pas bien réfléchi, ce sont les conséquences du programme prévu d'indemnité de départ et du programme d'encouragement à la retraite anticipée, qui auraient pour résultats de modifier la courbe démographique et d'abaisser l'âge moyen des effectifs.

On considère que les gens plus jeunes sont plus agiles, travaillent mieux et plus rapidement et subissent moins de blessures. C'est généralement vrai. Pourtant, on ne semble pas faire grand cas du fait qu'à mesure que l'on prend de l'âge on acquiert aussi de l'expérience, et je crois que les honorables sénateurs sont bien placés pour le savoir. L'expérience est une denrée qui ne s'achète pas. Pour l'acquérir, il faut avoir vécu. Quand on se débarrasse des travailleurs les plus âgés, comme on l'a fait en l'occurrence, on se débarrasse aussi d'un important bagage d'expérience pratique, qui est une denrée précieuse pour toute compagnie.

Parallèlement, nous avons aussi posé d'autres gestes qui ne me semblent pas particulièrement productifs. La société a fait savoir qu'elle comptait faire des compressions d'effectifs, surtout dans le secteur des services, dans le rail, dans les ateliers, et cetera. Les comptables affirment catégoriquement que tout cela peut se faire de façon beaucoup plus efficace et efficiente par la sous-traitance. C'est bien beau, mais c'est fondé sur des hypothèses qui ne sont pas nécessairement valables.

Nous avons fait savoir aux gens que ces secteurs-là ne seront pas des secteurs de croissance, ni même rentables. Par conséquent, à mesure que les gens prennent leur retraite, on annonce que des postes sont ouverts, et les gens qui ont acquis une certaine expérience dans certains de ces secteurs de services diront: «On dirait bien que l'on va se retirer de ce secteur. Je voudrais avoir un peu plus de sécurité. Par conséquent, même si ce n'est guère attrayant et si cela ne me chante pas tellement, je pense que je vais saisir cette occasion d'emploi ailleurs parce que cela me semble apporter une plus grande sécurité.»

En fin de compte, le poste vacant est comblé par quelqu'un qui a les qualités requises, mais qui ne possède aucune expérience dans ce domaine précis. Je crois que cette perte d'expérience sera très coûteuse.

Nous éprouvons déjà des problèmes à cause de ce manque d'expérience. Ce n'est pas joli à voir. Cela causera d'autres problèmes économiques dans l'application du plan, même si tout le reste fonctionne à 100 p. 100. Il faut se pencher sur ce problème.

J'aime bien le terme traditionnellement appliqué aux créateurs de cette industrie, que l'on appelle les requins de l'industrie. Quand ils ont mis sur pied ces entreprises au Cap-Breton et en Nouvelle-Écosse, il y a bien des choses qui ne me plaisaient pas, mais il faut avouer qu'ils étaient loin d'être stupides. Ils n'ont pas mis en place toutes ces infrastructures pour appuyer ces industries sans qu'il y ait un besoin, sans reconnaître qu'il était de leur intérêt de le faire.

On ne peut pas acheter de l'équipement minier chez Canadian Tire, en dépit de ce que pourraient croire les comptables. Ce n'est pas si facile. C'est une industrie lourde et spécialisée. Nous avons eu l'expérience du secteur privé, qui pouvait répondre à nos besoins en trois, quatre, six ou huit mois, mais cela ne voulait pas dire qu'il fallait fermer les portes en attendant de recevoir l'équipement voulu. Nous devions tout faire nous-mêmes. Nous avions la capacité de le faire nous-mêmes. En fin de compte, nous l'avons fait plus rapidement et à moindre coût chaque fois qu'on nous en a donné l'occasion, et cela nous a aidés à maintenir à flot cette industrie.

Il n'est pas dans notre intérêt d'abandonner l'infrastructure, qui est véritablement l'assise qui assure le fonctionnement de ces mines. Les rumeurs qui circulent au sujet des compressions et de la sous-traitance ont créé une situation où les gens qui possèdent de l'expérience quittent leurs postes. Même si l'on maintenait ces postes, nous ne pourrions pas fonctionner aussi bien que par le passé.

Voilà donc les questions de relations humaines et de relations syndicales dont nous devons tenir compte. Il faut faire très attention quand on commence à déplacer les gens. Nous devons leur faire savoir très clairement quelles sont nos intentions, si nous comptons sur eux pour rester à leur poste et faire dépendre leur avenir et l'avenir de leur famille d'un travail dans les ateliers, à la gare de triage, ou quoi que ce soit. Il est important que les gens sachent que ces emplois continueront d'exister, autrement ils accepteront d'autres postes, pour lesquels ils ne possèdent pas nécessairement les compétences voulues, mais auxquels ils ont droit en vertu de leur ancienneté. C'est un problème de relations ouvrières. Je me rends compte que nous faisons partie du problème, mais on n'a pas encore trouvé un autre système que l'ancienneté pour protéger les gens.

Je ne vais pas m'étendre sur les questions de relations ouvrières, mais je vais vous dire que la majorité des employés ont signé des conventions collectives à long terme. Je ne sais pas quelle est exactement la situation aujourd'hui, mais je crois qu'une convention n'a pas encore été conclue. Peut-être que d'autres témoins vous en parleront plus tard.

À mon avis, les conventions collectives sont bonnes, du point de vue de la société. Je ne me plains pas; je ne dis pas qu'on s'est fait avoir. Il ne semble pas que ce soit le cas, mais cela dépend des facteurs dont on tient compte.

Le système de prime a été supprimé. Tous les syndicats sont allés aussi loin qu'ils le pouvaient en fait de collaboration. Dans le cas du SCFP, et je suis certain qu'on peut en dire autant des autres syndicats, nous avons été assez généreux, parce que nous sortions de quatre années de blocage des salaires et d'augmentation zéro. Avec ces effectifs, nous avons signé des conventions collectives de quatre ans qui nous donnaient l'assurance que ce dont on discute ici aujourd'hui serait réalisable. Nous avons accepté de prendre l'argent des primes, auquel nous avions le droit aux termes du contrat, et de le transformer en salaires. Ainsi, on se débarrassait du programme des primes.

Tout ce qu'on a fait dans ces négociations, c'est répartir d'une nouvelle façon l'argent que les membres possédaient déjà. C'est mon avis. Tous ne seront peut-être pas d'accord, et je le comprends. Nous avons fait quand même un certain sacrifice, tout au moins potentiel, mais personne ne s'en plaint amèrement. Nous savions que nous devions faire quelque chose pour sauver notre entreprise, et nous l'avons fait.

Je dois dire que depuis la conclusion de ces ententes, peut-être parce que nous travaillons tous mieux en temps de crise et dans des situations chargées d'émotions, nous avons vu une plus grande collaboration. Chose certaine, au Cap-Breton, nous savons ce que c'est que la collaboration, mais il faut parfois nous donner une poussée assez forte pour nous décider.

L'atmosphère s'est grandement améliorée. Il y a maintenant une véritable ouverture, une volonté de discuter des dossiers ouvertement, franchement et honnêtement, ce qui n'est pas toujours le cas dans les discussions.

Le comité a abordé dans son rapport la question des relations de travail. J'ignore dans quelle mesure vous connaissez ce dossier, mais d'après mes propres connaissances et mon expérience en la matière, non seulement au SCFP, mais aussi dans tous les syndicats du pays, on fait grandement confiance aux programmes que concoctent habituellement les cabinets d'experts-comptables, les TQI, GQT, QVT, ACQ. On sort un nouveau sigle tous les six mois parce que tous les six ou huit mois ces programmes se cassent le nez, et il faut bien alors trouver un nouveau sigle pour convaincre le pauvre diable qui est prêt à l'essayer.

La réalité, c'est qu'à long terme ces programmes sont tout à fait catastrophiques, comme vous le diront sûrement les représentants du secteur de l'automobile et des chantiers navals. Le plus récent exemple, à ma connaissance, est celui de Québec Power. Il y a environ deux ans, notre ministère de l'Éducation a mis au point un programme parce que, à cause de la régionalisation, on devait tout réinventer et passer dès le lendemain à la responsabilisation des employés. On n'a jamais vraiment réussi à s'entendre quant à l'orientation à prendre.

Quand j'ai téléphoné au ministère de l'Éducation, on m'a dit: «De quel programme voulez-vous parler? Mais cela n'a pas d'importance, parce que tout cela revient au même.» Il est intéressant de constater que tout cela remonte aux programmes de qualité de vie au travail qui avaient été proposés en 1968 par John Munro, qui était alors ministre fédéral du Travail. Il n'y a rien de neuf aujourd'hui, en 1997, par rapport à ce que l'on proposait en 1968, sinon que l'on a essayé ces programmes dans diverses régions du pays, sans résultat, ce qui n'est pas catastrophique en soi. Bien des choses que nous mettons à l'essai ne fonctionnent pas, et l'on essaye donc quelque chose d'autre. C'est la vie.

Les programmes de ce genre semblent fonctionner pendant un an ou deux parce que les employés acceptent d'être plus amicaux et plus coopératifs. Après un an et demi ou deux ans, quand la compagnie, quelle qu'elle soit, est censée commencer à payer de retour cette générosité, tout à coup les programmes ne fonctionnent plus. Les pneus sont à plat, et l'animosité est alors bien pire qu'elle ne l'était au départ.

Je suis à 100 p. 100 d'accord avec l'idée d'établir de bonnes relations de travail dans cette société, si l'on veut créer un avenir... nous en comprenons toute l'importance. Cependant, ces programmes, à mon avis, ne sont pas la bonne façon de s'y prendre. Il y a des tas d'entreprises de par le monde qui fonctionnent sans ces programmes, et il n'est pas question pour moi de craindre l'inconnu ou ce qui peut être nouveau. Je crains au contraire ce que je connais.

J'ai du mal à saisir exactement ce que nous allons faire. Je suis heureux que le comité ait étudié la situation, en insistant sur la nécessité de suivre de près son évolution. Pendant des années nous avons traité avec le gouvernement et les représentants de la société, sans toujours avoir le sentiment qu'ils nous écoutaient.

Comme je l'ai dit au départ, le comité semble s'être sérieusement penché sur les questions qui se posent. Que vous ayez pu penser que c'était du blabla, vous avez en tout cas jugé nos préoccupations dignes de considération et d'examen. Il est gratifiant que le comité semble disposé à ne pas perdre de vue l'évolution de la situation.

Le comité dans son rapport parle d'une vérification comptable continue de la société, soit par le vérificateur général du Canada, soit par une firme privée indépendante. M. Shannon ne nous a pas caché qu'à son avis on avait présenté les livres jusqu'ici de façon un peu fantaisiste. Nous craignons pourtant de notre côté que la firme de M. Shannon ne fasse la même chose, c'est-à-dire ne présente une image un peu trop rose de la situation. Ce que nous voulons, c'est un petit peu plus que cela, et un peu plus également que des articles de journaux et des manchettes. Nous nous intéressons à la réalité de la situation sur le terrain, là où nous sommes.

Je demanderais donc instamment que le vérificateur général soit chargé d'un travail de vérification, et si ce n'est pas possible, qu'il décide du cabinet privé qui en serait chargé.

Vous comprenez que les intéressés, et j'inclus les hommes d'affaires, sont toujours très heureux de voir tomber dans leur escarcelle ce genre de contrat, et en retour ils se montrent accommodants envers ceux qui leur ont donné la préférence. Cela peut être dangereux. Je ne suis pas en train de descendre les cabinets de comptables; je suis sûr qu'ils font leur travail honnêtement. Mais j'ai déjà vu au fil du temps que lorsque tel cabinet conservait le contrat trop longtemps un certain laxisme s'installait. Il n'y aurait aucun mal à organiser régulièrement des appels d'offres et des concours. Ces firmes, comme nous tous, cherchent à plaire à ceux qui les payent. Il faut donc veiller à ce que ces vérificateurs soient totalement libres face à la société.

Le sénateur Murray: Je ne veux pas paraître trop critique sur ce point, mais, comme vous le savez, nous avons beaucoup discuté en comité de la question des coûts sociaux. Comme dans n'importe quelle discussion et négociation, il a fallu parvenir à un compromis, et nous avons fixé la barre à environ 40 millions de dollars. Nous déclarons dans le rapport:

[...] pour le comité, une partie importante de ces coûts sociaux découle de la décision de nombreux employés de ne pas se prévaloir du régime de pension contributif que la société leur a proposé en 1982. Cela, de toute évidence, a fait monter le coût du régime de pension non contributif de Devco, et nous pensons que Devco et ses employés ont dans une certaine mesure la responsabilité de ce coût social.

Voilà donc la position finale du comité.

Deuxièmement, vous parlez de la province de la Nouvelle-Écosse. Nous recommandons que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, en collaboration avec Devco, fasse faire une étude de la mine de Donkin. Il est vital que la province soit présente. Nous ne parlons ici que d'une étude. Ce n'est pas cela qui va bouleverser leur budget, ni faire sauter la banque.

Car, si une étude doit être faite... Comment dire les choses sans blesser qui que ce soit? C'est un petit peu difficile. Si le ministère fédéral des Finances décidait seul de faire faire une étude, et de la formulation du mandat, il obtiendrait la réponse qu'il veut a priori obtenir.

La question n'a pas été posée par le gouvernement actuel, mais le ministère des Finances a ses propres objectifs, à savoir, en l'occurrence, de dégager l'État le plus tôt possible du secteur du charbon. Il est donc extrêmement important, pour que tout cela se fasse dans l'intégrité, que nous ayons ce que M. Trudeau avait l'habitude d'appeler «un contre-pouvoir», avec en l'occurrence la participation de la Nouvelle-Écosse à l'étude.

Un petit rappel: vous nous avez dit la dernière fois que nous avons rencontré le SCFP que votre syndicat représentait les surveillants, infirmières et agents de sécurité.

M. MacNeil: Oui.

Le sénateur Murray: Combien de membres a votre section locale?

M. MacNeil: Il y a environ 160 survivants.

Le sénateur Murray: Et pour ce qui est des surveillants, jusqu'à quel échelon cela va-t-il? À partir de quand les surveillants deviennent-ils des cadres?

M. MacNeil: Cela été souvent débattu devant le Conseil canadien des relations de travail et, si je ne me trompe, devant la Cour suprême.

Le sénateur Murray: Et où est-ce que cela en est?

M. MacNeil: Le surveillant de niveau supérieur est sans doute un surveillant de secteur.

Le sénateur Murray: Dans la mine?

M. MacNeil: Non, ils n'ont pas besoin d'être dans la mine.

Le sénateur Murray: Que veux dire «surveillant de secteur»?

M. MacNeil: Il y a quelques années, et pour me préparer à une audience du Conseil des relations de travail, j'ai regardé cela de plus près et constaté que certains surveillants ont la responsabilité de six, sept ou huit autres surveillants, et ne sont en réalité jamais en contact avec les autres syndicats représentés. Ils ont la responsabilité des surveillants, mais ce ne sont pas des cadres de direction, d'après le Code canadien du travail.

Le sénateur Murray: Certains de vos membres sont-ils dans la mine?

M. MacNeil: Absolument. La loi l'exige.

Le sénateur Murray: Il y a longtemps, lorsque je connaissais mieux ces questions qu'aujourd'hui, je me souviens que l'on devait passer des examens du ministère des Mines de la Nouvelle-Écosse pour être un cadre qui descend dans la mine. Est-ce que c'est toujours vrai?

M. MacNeil: Oui. Il y en a d'ailleurs beaucoup, parmi nous, qui ont les compétences voulues pour être des gestionnaires dans la mine.

Le sénateur Murray: Mais une fois qu'ils ont accepté un poste à ce niveau, sont-ils encore membres de votre syndicat?

M. MacNeil: Ils seraient alors dans la catégorie gestionnaire.

Le sénateur Murray: On parle de 658 licenciements sur une période de cinq ans, dont 400 devront avoir eu lieu avant la fin de l'exercice en cours. Combien de vos syndiqués seront directement touchés par ces licenciements?

M. MacNeil: Sénateur Murray, je vais laisser la parole à Angus ou à Fraser, qui ont travaillé directement sur ces dossiers. Ils connaissent la question à fond; cela dépasse l'imagination.

M. Angus MacEachern, président, SCFP, Section locale 2046: Pourriez-vous répéter la question?

Le sénateur Murray: Combien des vôtres vont être touchés par les licenciements prévus avant la fin de l'exercice comptable, c'est-à-dire à la fin du mois? On parle dans le plan de 400 licenciements pour l'exercice qui se termine ce mois-ci, et de 258 dans les quatre années qui suivent.

M. MacEachern: Parlez-vous simplement de licenciements, ou de licenciements et de départs à la retraite?

Le sénateur Murray: Je parle de gens qui quittent définitivement Devco. Il s'agit de réductions d'effectifs.

M. MacEachern: En ce moment, il n'y a pas à notre syndicat suffisamment de surveillants et d'agents de sécurité. C'est-à-dire que nous recrutons des gens qui viennent d'ailleurs pour remplacer certains de nos employés les plus anciens qui partent à la retraite. En ce moment aucun de nos syndiqués n'est touché par les licenciements en cours, mais certains vont partir à la retraite.

Le sénateur Murray: Il semble qu'au total cette opération soit pour vous tout bénéfice.

M. MacEachern: Les postes qui doivent être pourvus le sont par des gens qui viennent d'autres syndicats, celui des Travailleurs de l'automobile, l'Association internationale des machinistes, Confidential ou UMW.

M. MacNeil: Qu'on ne s'y trompe pas! En ce moment nous sommes plutôt en progression, mais nous le savions depuis au moins un an. Je vous ai déjà dit que nous avons environ 160 membres, et j'ai parlé de «survivants», parce que nous étions par le passé 270 environ.

Le sénateur Graham: Deux cent soixante-dix? C'était quand?

M. MacNeil: Pendant les cinq dernières années. Cela a été beaucoup plus difficile par le passé que cela ne l'a été plus récemment. À certains moments nous avons eu des vacances, et il a fallu chercher des gens venant d'ailleurs. Même si au total nous pouvons donner l'impression d'y gagner, nos effectifs diminuent, comme partout ailleurs.

Mais à ce tour-ci de réductions d'effectifs, nous n'avons pas été touchés aussi durement que certains autres syndicats.

Le sénateur Murray: Finalement, j'aimerais vous parler de Phalen, et, si c'est possible, poser la question à chacun des autres témoins qui peuvent nous informer là-dessus.

Au cours de l'exercice financier 1995-1996, qui s'est terminé au mois de mars de l'année dernière, Phalen a été fermée 10 semaines parce qu'une galerie s'est effondrée, et 1 200 personnes ont été mises en chômage technique temporaire. Depuis lors, nous avons eu des rapports trimestriels. Le premier concerne la période se terminant en juin 1996; 8 Est: l'exploitation du niveau inférieur s'est heurtée à la présence de roches, de poches de grisou, et de zones sensibles qui n'étaient pas prévues, imposant un arrêt des travaux et une modification des méthodes et de l'équipement; l'exploitation de la fendue a également été reportée.

Vous voyez ensuite que l'extraction dans le premier trimestre a progressé de 1,3 kilomètre, contre 2,2 kilomètres prévus. Pour la période des six mois suivants, se terminant le 30 septembre 1996; 7 Est: l'exploitation continue de la paroi longitudinale devait se poursuivre pendant le second trimestre. Le rabattage et les hommes de production ont été bien au-dessus ce qui avait été prévu en raison de conditions de plafond difficiles, d'écoulements d'eau provenant d'un plafond en grès, et de problèmes de ventilation en relation avec l'état du plafond; un éboulement, le 17 septembre, a arrêté la production pendant quatre semaines.

Et ensuite pour les neufs mois se terminant en décembre on peut lire:

À la mi-janvier, malheureusement, c'est-à-dire pour la période correspondant à ce neuvième rapport, un autre éboulement de plafond a eu lieu sur 7 Est. Tous les efforts sont déployés pour reprendre l'exploitation de cette paroi, dès que ce sera raisonnablement possible.

Que pensent les membres de votre syndicat des conditions à Phalen? Pouvait-on prévoir ce dont il est question dans ces rapports? Est-ce que c'était évitable? Est-ce qu'il était possible de faire quelque chose? Et que peut-on faire maintenant?

M. White nous a dit que la situation de la mine de Phalen va s'améliorer. Par contre, j'ai lu quelque part que tout le charbon qui pouvait être extrait de façon économique à Phalen l'a été. Nous avons les déclarations d'un autre leader syndical, qui va comparaître devant le comité, selon lequel l'exploitation à Phalen se fait de semaine en semaine, et que personne ne peut faire de prévisions à beaucoup plus long terme.

Que vous disent vos membres?

M. MacNeil: Voilà justement une mine pour laquelle nous devions prier, et c'est ce que nous avons fait. Peut-être que nos prières n'ont pas été suffisamment ferventes.

Je peux certainement vous rapporter ce que l'on m'a dit, mais les personnes qui m'ont tenu ces propos sont ici. Il serait peut-être alors préférable de leur donner la parole, puisqu'elles connaissent la situation sur le terrain, de première main.

Ce n'est pas désastreux, mais là encore il va falloir beaucoup invoquer la providence.

M. MacEachern: Lorsque vous dites qu'on ne sait pas à plus d'une semaine ce qui va se passer, c'est sans doute vrai. À Phalen, dès que l'exploitation repart, il se passe quelque chose: soit il y a de l'eau, soit la paroi menace de céder, soit il y a des problèmes en profondeur.

Je travaille à Phalen, comme Brian et un certain nombre de nos collègues qui sont assis derrière. Si je décidais de placer de l'argent dans un fonds universitaire pour les études de ma dernière fille, je ne sais pas si je pourrais continuer à faire des versements dans quatre ans si j'étais toujours à Phalen. Je n'ai aucune certitude que je pourrai encore y travailler dans cinq ans.

Nous pouvons en gros imaginer ce qui va se passer d'ici un an, mais pas plus.

En ce qui concerne Phalen, nous ne pouvons pas accuser les mineurs; je dis bien tous les mineurs, et non pas seulement les contremaîtres. Ils ont réussi à récupérer non seulement 7 Est, mais également 6 et 5 Est. Vous devriez voir dans quelles conditions travaillent ces gens: vous n'en croiriez pas vos yeux. Je n'ai jamais eu à reprendre en main une paroi qui s'écroulait, comme ont eu à le faire la plupart d'entre eux.

Je suis descendu dans la mine, j'ai vu sur place, et je ne sais pas si je pourrais y travailler tous les jours; là où on essayait de reprendre l'exploitation de ces parois, les conditions étaient absolument atroces.

En ce qui concerne les mineurs eux-mêmes, vous ne trouverez pas mieux que les mineurs du Cap-Breton. La preuve en est que des gens viennent de l'Ouest pour essayer de nous inciter à y aller, parce qu'ils ont besoin de gens qui savent extraire le charbon.

Pas mal de choses importantes ont été faites récemment, particulièrement à Phalen et à Prince. L'exploitation à Prince a commencé trois ou quatre semaines avant la date prévue. On a eu un problème grave de tambour rotatif. Il est tombé en panne. Il a été réparé par notre propre équipe, à bien meilleur prix que si l'on s'était adressé à un entrepreneur de l'extérieur, et cela a pris trois ou quatre semaines de moins.

Nos mineurs veulent travailler. Mais le problème grave, c'est que la majorité d'entre eux ne savent pas ce que l'avenir leur réserve. Je pense, quant à moi, que c'est la mine de Donkin qui est notre avenir.

Nous ne savons pas s'il y a un plan à long terme prévu pour Phalen, et ce n'est pas la faute des mineurs. Quelqu'un m'a dit que ce grès est une véritable malédiction; c'est véritablement un problème grave. Cela ralentit l'exploitation et la production.

Avec ce grès, avec les excroissances rocheuses et la profondeur de la mine de Phalen, on ne va certainement pas réussir à battre de record d'ici longtemps, qu'il s'agisse de l'exploitation en profondeur ou plus près de la surface. Plus les choses seront lentes à Phalen, plus notre production s'en ressentira. Il faut que quelqu'un prenne le taureau par les cornes rapidement -- je pense notamment à la mine de Donkin -- et propose un plan prospectif, sinon je ne vois pas beaucoup d'avenir pour Devco. Si nous nous en remettons à Phalen, nous n'avons plus aucun avenir.

À Prince, les gens pensent que l'avenir se présente mieux qu'à Phalen. Prince est une mine plus ancienne; Phalen est déjà une mine ancienne pour une mine qui n'a que 10 ans.

Le sénateur Graham: Je souhaite la bienvenue aux témoins, dont je connais certains d'entre eux depuis longtemps.

J'ai rendu visite hier à un monsieur qui officiellement est membre de ce comité, mais qui n'est pas parmi nous aujourd'hui. Je vous transmets donc à tous les salutations du sénateur John M. Macdonald, qui a 90 ans.

J'ai été très impressionné par tout ce que vous avez dit. Je pense aussi à la déclaration de M. Dingwall citée dans le Cape Breton Post de samedi dernier. Je vais lire ce qu'il a dit, puisque ce n'est pas une confidence qu'il m'a faite, et que cela va pouvoir éclairer la lanterne de certains de nos collègues. Je lis l'article:

Le ministre de la Santé Dave Dingwall prévoit le transfert d'un passif de 207 millions de dollars, figurant au budget des pensions et des opérations de restauration environnementale, de la comptabilité de Devco aux comptes publics fédéraux, comme première étape en prévision d'une radiation. Selon M. Dingwall, la société d'État continuera à rembourser chaque année une partie de ce passif, mais si Devco n'était pas en mesure de le faire, pour une raison ou une autre, l'État canadien prendrait le relais.

Est-ce que vous pensez que c'est une bonne décision?

M. MacNeil: Très certainement, si effectivement cela se fait. D'après cette citation on envisage de prendre une mesure qui serait un premier pas, avant de prendre des mesures plus concrètes. Nous sommes, de notre côté, deux fois plus éloignés des instances décisionnelles, et même s'il n'y avait qu'un seul palier au-dessus de nous, cela ne changerait pas grand-chose.

Le sénateur Graham: Monsieur MacEachern, vous ne pensez pas que Phalen puisse être exploitée plus de quatre ou cinq ans. J'espérais qu'on pourrait être un petit peu plus optimiste. Est-ce que vos collègues sont tout aussi pessimistes que vous?

M. MacEachern: Je suis peut-être même optimiste en parlant de quatre ou cinq ans, mais c'est ce que pensent beaucoup de gens. En fait, le plan prévu pour Phalen pour les trois ou quatre années à venir prévoit l'exploitation d'une paroi tenue en réserve, plus proche de la surface. Quand on commence à exploiter au-dessus de là où on se trouve déjà, c'est qu'il ne reste plus grand-chose en-dessous.

Le vrai problème à Phalen, c'est le grès, et cela sera tant que la mine sera en exploitation. Ce problème de grès, combiné à des problèmes de charges et de coups de grisou possibles, ralentit l'aménagement de la mine. Quand l'aménagement est lent, vous devez attendre plus longtemps avant de pouvoir produire.

Le sénateur Graham: Il y a beaucoup de charbon?

M. MacEachern: Oui, les réserves sont importantes.

Le sénateur Graham: Le problème est un problème de structure géologique, et d'exploitation suffisamment efficace.

M. MacEachern: Oui, c'est le problème essentiel à Phalen en ce moment.

Le sénateur Graham: Monsieur MacNeil, vous avez dit que vous perdiez aussi vos collègues les plus compétents.

M. MacNeil: Absolument; c'est ce qui se passe. C'est peut-être de là où je suis en ce moment que j'ai cette impression, puisque je commence à faire partie des anciens, mais je ne crois pas que ce soit la raison. J'ai travaillé dans bien des secteurs différents depuis que j'ai commencé à travailler, et l'essentiel de ce que j'ai pu apprendre m'a toujours été transmis par des gens qui étaient plus anciens que moi.

Mickey Baker, qui est parmi nous aujourd'hui, est depuis 40 ans dans les mines. Lorsqu'il va prendre sa retraite, c'est toute une expérience accumulée qui va s'en aller avec lui. Fraser Morrison est prêt lui aussi à prendre sa retraite. Il a passé beaucoup de temps au coeur de l'action, et c'est là qu'il a pu accumuler un savoir sur la meilleure façon de faire concrètement le travail. Il avait évidemment certaines connaissances livresques, si vous voulez, mais ce que vous apprenez sur le terrain, directement, dans ce genre d'activité, est ce qui décide de l'avenir de votre entreprise.

Le sénateur Buchanan peut peut-être se souvenir de Sysco, où j'ai reçu une partie de ma formation de base. Si les gens n'avaient pas eu ces compétences et ces connaissances, ce n'est pas le matériel et l'équipement seuls qui auraient pu assurer la production. Avoir des gens qui savaient comment se servir du matériel permettait de faire durer les choses beaucoup plus longtemps que quiconque l'aurait envisagé.

Les connaissances ne sont pas quelque chose de génétique, et ce n'est pas non plus toujours facile à transmettre. Comme on le dit, il faut les gagner à la sueur de son front.

Voilà pourquoi aussi nous avons un Sénat. Quelle qu'ait été l'activité des honorables sénateurs par le passé, ils ont accumulé beaucoup d'expérience au fil des ans. Nous avons besoin de gens compétents pour apprécier les situations, et faire ce travail d'évaluation que nous faisons maintenant. Les connaissances et l'expérience que vous avez pu accumuler au cours de vos différentes carrières ont une valeur, et dans notre situation nous craignons précisément de voir disparaître cette expérience accumulée.

Je ne parle pas des gens qui veulent une promotion. Pour nous, c'est quelque chose de tout à fait normal. Mais nous avons maintenant des gens qui demandent à être mutés, et à pouvoir jouir de ce droit de bénéficier d'une mutation horizontale ou, dans certains cas, d'une rétrogradation, parce qu'ils craignent ce qui pourrait arriver à leur section. Ils sont alors remplacés par des gens qui n'ont pas les connaissances ni les compétences nécessaires au bon rendement d'une section de production. Alors, au bout du compte, on ferme la section, ce qui confirme dans leur pronostic ceux qui avaient demandé à être mutés.

Voilà un piège que je veux pouvoir éviter. Il ne s'agit pas d'un plan concerté de la part de la société; ce n'est pas une machination. C'est simplement quelque chose dont il faut tenir compte dans notre plan. Je ne pense pas que la direction de la société, ou la société elle-même, ait une stratégie ou conspire pour faire échouer les choses. Tout ce que je veux dire, c'est que dans le feu de la discussion et la passion du débat entourant ce plan d'entreprise nous avions tous très peur qu'Ottawa nous laisse tomber, comme vous pouvez l'imaginer.

Bien évidemment, la société et nous-mêmes avons essayé de donner une image la plus positive possible. De son côté la société a pris certaines décisions qui n'avaient peut-être pas été pensées jusqu'au bout, et a fait confiance, comme c'est la mode aujourd'hui, à des comptables plutôt qu'à des gens qui ont une expérience concrète de l'industrie.

Comme je l'ai déjà dit, nous n'avons peut-être pas suffisamment tenu compte du fait que la main-d'oeuvre va se rajeunir, ce qui fera baisser le taux d'absentéisme et certains coûts sociaux, comme les indemnisations des accidents du travail, du moins je l'espère; mais il y a un prix à ces économies, à savoir le départ de gens qui avaient accumulé de l'expérience.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

Le sénateur Graham: Je tiens tout de suite à vous rassurer: il n'y a personne autour de cette table, ni en Nouvelle-Écosse, que je sache, qui veuille laisser tomber Devco.

Lorsque je suis rentré chez moi vendredi, le temps à Ottawa était terrible. Nous avons eu un retard au décollage, et j'ai entendu quelqu'un dire: «Je ne sais pas si je suis prêt à décoller dans ces conditions.» J'ai tout de suite répondu: «Si le pilote estime que c'est sûr, ça l'est également pour moi.» Je ne pense pas non plus que les dirigeants de Devco aient pour stratégie de se saborder eux-mêmes.

Le comité a insisté dans son rapport sur l'amélioration des relations entre les travailleurs et la direction. Vous avez dit, et j'en suis heureux, que vous aviez signé des contrats à long terme. Je ne sais pas s'ils sont entièrement satisfaisant pour vous, mais vous avez également évoqué une amélioration du climat général.

Avec une amélioration des relations entre la direction et les travailleurs, et de façon générale du climat qui prévaut, quel est votre niveau de confiance aujourd'hui par rapport à ce qu'il était lorsque vous avez comparu devant le comité au printemps dernier?

M. MacNeil: Vous parlez sans doute de la confiance que les travailleurs font à l'administration et à la gestion?

Le sénateur Graham: Oui, et quelle confiance avez-vous également dans l'avenir de votre secteur?

M. MacNeil: C'est mieux que cela n'a été. Je ne suis membre de cette section locale et je ne travaille dans le secteur minier que depuis 10 ans environ, mais depuis un certain temps la confiance est revenue, et le débat est plus ouvert. Cela ne veut pas dire que les choses soient roses; nous ne sommes pas d'accord sur tout, bien évidemment, mais la situation s'est largement améliorée.

En matière de relations humaines et interpersonnelles, dans une large mesure, tout dépend de certaines impressions que l'on peut donner. Voilà ce que je crains. Ce qui a pu être une bonne relation de travail un certain temps peut souffrir d'une décision de la direction, qui va à Ottawa pour s'y entretenir avec des responsables, plutôt que de comparaître devant votre comité, comme nous le faisons. Cela nous ramène en arrière, et les gens se disent: «Attention, voilà qu'ils retournent à Ottawa pour parler de nous derrière notre dos, sans nous permettre de participer ou d'entendre ce qui va se dire.» C'est peut-être un peu de paranoïa, mais c'est quand même important; c'est une question de perception. Si les membres du syndicat et le reste des travailleurs pensent que c'en est fini avec la transparence et l'ouverture, et qu'il y a des arrière-pensées quelque part, et qu'on ne nous dit pas tout, alors tout est à reprendre.

Des petites choses comme ça peuvent tout ruiner. Je suis certain que la direction a de bonnes raisons de faire ce qu'elle fait; je lui accorde le bénéfice du doute. Cependant, ce ne sont pas tous les travailleurs qui sont aussi généreux que moi.

Oui, les relations sont meilleures depuis un certain temps, mais des petits détails de ce genre n'aident pas à les entretenir.

Le sénateur Graham: Le comité a recommandé, entre autres, de faire porter les efforts sur des marchés d'exportation. Je crois savoir que le président de la société est justement cette semaine à l'étranger en train de prospecter de nouveaux marchés d'exportation. Je crois que c'est la raison qui explique son absence de demain.

Le sénateur Buchanan: Je crois que nous avons fait le tour de la question du passif non capitalisé; je n'y reviendrai donc pas.

Ce qui m'inquiète plus, c'est l'avenir de l'industrie houillère. Depuis 1977, le gouvernement nous dit vouloir maintenir l'industrie houillère du Cap-Breton. Je ne le crois pas. Au milieu des années 80, je me trouvais dans un bureau à Ottawa où des représentants du ministère des Finances et du ministère de l'Industrie et du Commerce disaient clairement que le gouvernement du Canada devrait se fixer comme objectif l'abandon progressif de l'exploitation houillère au Cap-Breton. Cela m'avait consterné, et je suis encore plus inquiet aujourd'hui. Ceux qui ont cette opinion de l'industrie houillère du Cap-Breton ne savent pas le nombre de gens, le nombre de familles, que fait vivre cette industrie.

La position du gouvernement de la Nouvelle-Écosse m'inquiète aussi. J'ai entendu dire ces dernières années que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse n'était pas responsable de l'industrie houillère. Quelle absurdité!

À la fin des années 60, quand le gouvernement fédéral a signé les ententes originales avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, il est certain que le gouvernement fédéral a accepté d'assumer la responsabilité de l'exploitation minière au Cap-Breton et que la province a accepté d'assumer la responsabilité des mines du comté d'Inverness et sur le continent. Ces ententes appartiennent au passé. L'industrie houillère du Cap-Breton existe toujours, beaucoup de charbon continue à être extrait, et le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, ces ententes mises à part, est responsable des travailleurs de l'industrie houillère.

Pour qu'un gouvernement provincial dise qu'il n'est pas responsable de l'industrie houillère du Cap-Breton, il faut qu'il soit inconscient. Il est responsable de quelque 2 300 personnes, plus les 6 000 à 7 000 personnes qui sont employées indirectement par l'industrie. Nous avons accepté cette responsabilité à la fin des années 70 et au début des années 80.

Monsieur MacNeil, vous avez dit qu'Allan MacEachen, Ron Barkhouse, qui était ministre à l'époque, et moi-même avions accepté la responsabilité de l'avenir de l'industrie houillère. Nous avions accepté cette responsabilité en nous fondant sur l'avis de spécialistes qui nous avaient dit que si un nouveau gisement n'était pas trouvé au Cap-Breton, l'industrie houillère était vouée à la disparition.

En acceptant cette responsabilité que nous croyions être celle de la province à l'époque, le gouvernement provincial a conclu des ententes avec le gouvernement fédéral. Conformément à ces ententes, la province ne devait pas prendre en charge le développement des mines, car ce devait être la responsabilité de Devco. Cependant, la province a dépensé beaucoup d'argent en faisant des études... des études de coûts, des études de marché, des études de faisabilité, des études d'exploitation. Elle a dépensé beaucoup d'argent en plates-formes de forage et en prospection des veines des gisements de Donkin et de Sydney.

Le sénateur MacEachen, le vice-premier ministre de l'époque, qui s'est toujours beaucoup intéressé au Cap-Breton, tout comme mes collègues, les sénateurs Graham, MacDonald et Murray, m'avait promis, juré, que le gouvernement fédéral ne se retirerait pas de l'exploitation houillère au Cap-Breton. C'est ce qu'il m'a dit directement en dépit du fait que des responsables des Finances et de l'Industrie et du Commerce souhaitaient à haute voix tout le contraire. Vous le savez; c'est une de nos pages d'histoire.

Je ne connais pas personnellement la situation à la mine de Phalen. Je suis allé dans des mines de charbon, mais jamais dans la mine de Phalen. J'ai visité la 1B et la 26 il y a des années, mais je ne connais pas la situation actuelle. Je ne doute pas un instant de ce que vous nous dites. J'ai parlé à beaucoup de mineurs qui travaillent à Phalen, et, comme vous venez tout juste de le dire, ils ont peur que dans trois, quatre ou cinq ans il n'y ait plus de Phalen. Les estimations vont de trois à dix ans. Selon Devco elle pourrait durer encore 15 ans, mais je ne pense pas que cela soit sérieux.

Voyons un peu ce qui se passe en ce moment. Premièrement, le gouvernement provincial prétend qu'il n'est pas responsable; deuxièmement, il n'est même pas disposé à financer la moitié du coût de l'étude de faisabilité pour actualiser l'étude de 1979-1981, sous prétexte qu'une telle étude relève de la responsabilité fédérale. C'est absurde. Quand une province abdique sa responsabilité envers sa population en faveur du gouvernement fédéral, c'est absurde. Le gouvernement provincial a la responsabilité indéfectible d'aider la Société de développement du Cap-Breton et de veiller à l'avenir de l'industrie houillère.

Il n'est pas nécessaire d'avoir fait des études d'avocat ou d'être prophète pour voir ce qui se passe. Je suis du Cap-Breton, j'y suis né et j'y ai grandi. Mon père a travaillé dans la mine toute sa vie, tout comme mes grands-pères. Jamais je n'avais pensé que je verrais un jour du charbon américain brûler dans les centrales thermiques du Cap-Breton. Je ne dis pas que nous n'avons jamais importé de charbon américain; nous l'avons fait. Nous en importons depuis des années pour le mélanger au charbon de qualité 26 pour les fours à coke, pour avoir une meilleure qualité métallurgique de charbon. Mais que du charbon de qualité thermique soit importé au Cap-Breton, à peu près 50 000 tonnes, je crois, c'est le début de la fin. L'objectif de la compagnie d'électricité est d'importer son charbon, alors que Devco a des réserves suffisantes pour l'approvisionner.

J'ai toujours été favorable à la prospection de gaz naturel sur l'île de Sable, car j'estime que les avantages économiques pour la Nouvelle-Écosse peuvent être énormes. Cependant, nous n'avons jamais imaginé que le gaz de l'île de Sable remplacerait le charbon. Le charbon est notre ressource indigène, le gaz naturel aussi, mais son marché, c'est le Nord-Est des États-Unis. Vous vous imaginez le Nouveau-Brunswick se battre pour avoir notre gaz naturel? C'est extraordinaire. C'est extraordinaire qu'il veuille notre gaz, mais la compagnie d'électricité vient de signer des projets de contrats d'approvisionnement en gaz naturel de Tufts Cove, ce qui est parfait, mais aussi de Trenton, qui s'approvisionne actuellement en charbon du Cap-Breton. Je considère encore une fois que c'est le début de la fin, qu'à terme c'est la condamnation de l'industrie houillère. Nous ne pouvons l'accepter, car nous avons ce charbon, et la mine de Donkin sort du bon charbon.

J'ai parlé à des ingénieurs et à des géologues, et il est indubitable que le charbon de la mine de Donkin près de la surface et tout au fond contient une forte teneur en soufre. Cependant, on me dit qu'au centre on y trouve le meilleur charbon des gisements de Sydney, du charbon à faible teneur en soufre qui peut être nettoyé à moins de 1 p. 100, et qu'il y en a en abondance. Ce ne sont pas des millions de tonnes, ce sont des milliards de tonnes de charbon qu'il y a dans cette région.

Il me semble que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial ne peuvent refuser d'assumer leur responsabilité et de faire leur devoir en commençant par l'étude de faisabilité de la nouvelle mine de Donkin, y compris les études de commercialisation et les études de coûts. J'ai parlé avec certains des meilleurs ingénieurs et géologues de la province, et je suis persuadé qu'ils donneront le feu vert à la mine de Donkin et qu'elle sera d'un grand secours quand celle de Phalen commencera à s'épuiser.

M. MacNeil: Sénateur Buchanan, je ne conteste pas du tout ce que vous dites. Je suis suffisamment âgé pour me souvenir de certaines de ces ententes et de certaines de ces déclarations que vous avez citées. Je ne crois pas que la province de la Nouvelle-Écosse ait simplement décidé de s'en remettre au gouvernement fédéral en lui disant: «La compétence pour l'industrie houillère est à vous», mais, quoi qu'il en soit, il reste que c'est une compétence provinciale.

Le sénateur Buchanan: C'est une bonne remarque; c'est de compétence provinciale.

M. MacNeil: Absolument. Nous avons eu quelques réunions animées avec des politiciens provinciaux qui essaient de prétendre que ce n'est pas leur responsabilité, mais nous ne sommes pas d'accord. Nous reconnaissons qu'il y a eu une entente de coopération parce que la province de la Nouvelle-Écosse ne pouvait pas s'en sortir seule, et le gouvernement fédéral a accepté de coopérer avec la Nouvelle-Écosse et de partager une grande partie des coûts.

Quant aux coûts d'une étude complémentaire, comme vous l'avez dit, une grande partie de cette étude a déjà été réalisée. Il ne s'agit pas de faire revenir les plates-formes de forage et de refaire un nouvel échantillonnage. La province a partagé le coût de ce travail. Il s'agit en réalité d'un travail informatique, d'un rassemblement de renseignements déjà recueillis pour voir s'il y a une possibilité, si vous voulez, de créneaux sur le marché mondial d'aujourd'hui. Je ne crois pas que cette étude coûte très cher.

Au moment du choc pétrolier, la compagnie d'électricité, tout comme Devco l'est encore, je crois, devait devenir un outil économique pour la population de la région. L'objectif était de réduire les importations d'énergie et d'utiliser au maximum notre propre énergie.

Aujourd'hui nous devons faire face à la concurrence potentielle du gaz naturel, qui est aussi une de nos ressources. Nous devrions être comblés. Malheureusement, je ne crois pas que cela sera le cas, sénateur. J'ai vu le contrat, et il me rappelle la vieille affaire du gypse, avec l'intégration verticale des sociétés. La province de la Nouvelle-Écosse touchera le fruit de la production de gaz. Par contre, ce sont les sociétés qui empocheront le fruit du transport du gaz, de la distribution du gaz, et cetera, et nous n'en toucherons pas un sou.

La compagnie d'électricité dit: «Nous aimerions que le gaz de la Nouvelle-Écosse nous coûte le moins cher possible, car cela nous permettrait de nous débarrasser du charbon et de ses problèmes.» Je crois que cela n'arrivera jamais, car à mon avis ces sociétés américaines ne le vendront pas à la Nouvelle-Écosse au même prix qu'elles le vendront à Boston. Nous nous retrouverons pris comme les Terre-Neuviens avec les chutes de Churchill. C'est ce que je vois arriver.

Je crois que quelqu'un devrait acheter les aventures de Sam Slick d'Haliburton et les distribuer aux bureaucrates qui sont censés s'occuper de nous dans cette nation.

Le sénateur Buchanan: Nous avons négocié une entente en 1982, qui a été actualisée en 1986. Les Néo-Écossais devaient posséder 50 p. 100 des pipelines reliant les gisements de gaz à la frontière du Nouveau-Brunswick. Cette entente a disparu corps et biens, mais nous l'avions négociée.

Le sénateur MacDonald: Monsieur MacNeil, vous avez parlé d'un simple exercice informatique pour actualiser l'étude de faisabilité, mais les estimations des coûts d'exploitation de la mine de Donkin vont de 40 millions de dollars à 400 millions de dollars. Qu'entendez-vous par coût d'une étude de faisabilité? Le coût de l'étude de faisabilité devait être partagé entre Devco et la province de la Nouvelle-Écosse, ce qui veut dire entre le ministère des Finances et la province de la Nouvelle-Écosse. Comme le sénateur Murray l'a dit, nous avons tendance, ces jours-ci, à nous méfier du ministère des Finances.

M. MacNeil: Je ne parle que du coût des études pour déterminer la faisabilité. Comme vous l'avez dit, les projections des coûts d'exploitation vont de 40 millions à 400 millions, et il est évident qu'une étude est nécessaire. Nous ne proposons pas pour le moment que la Nouvelle-Écosse assume la moitié du coût d'exploitation.

Je n'essayerai pas de prétendre combien cela va coûter; je n'en ai aucune idée. Je vous dirai simplement que parmi toutes celles que j'ai entendues, les projections des United Mineworkers of America me semble les plus plausibles. Cela fait des années qu'ils étudient la question, et ils ne manquent pas de spécialistes tant sur le plan international que sur le plan local. Ils ne sont pas du genre à dire qu'ils peuvent faire quelque chose pour cinq sous quand ils savent pertinemment que cela coûtera 3,50 $, et certainement pas dans le cas présent.

En toute honnêteté, je n'ai aucune idée du coût. En fait, je me méfierais de toute estimation proposée par notre syndicat, car le secteur minier n'est pas une de nos spécialités. Nous sommes simplement venus exprimer nos vues sur les responsabilités du gouvernement fédéral.

M. Robert MacFarlane, secrétaire de séance, Section locale 2046, Syndicat canadien de la fonction publique: Monsieur le président, l'avenir est sombre. Le camarade MacEachern a prédit trois ou quatre ans de plus à Phalen. J'ai trois fils et une fille. Ma fille est partie. Un de mes fils est parti. L'autre a repris ses études. Il a essayé de trouver un emploi à temps partiel. Il est marié, il a une famille et il n'a aucun avenir ici.

Je crois que tous ceux qui comparaissent devant des comités comme le vôtre espèrent quelque chose pour leurs fils et leurs filles. Nous avons tous fait des sacrifices. Il n'y a pas un mineur ou un employeur du Cap-Breton qui n'ait pas cet objectif ultime. Il n'y a pas un père, il n'y a pas une mère, qui ne soit pas prêt à avoir deux emplois pour financer l'éducation de ses enfants pour permettre au Canada de progresser et pour lui offrir des travailleurs éduqués et qualifiés. Nous préférerions garder ces gens éduqués au Cap-Breton et utiliser leurs compétences chez nous, mais pour cela il faut des emplois.

Je travaille à la mine de Prince et j'aimerais que vous compreniez qu'à la suite de certaines circonstances malheureuses à Phalen la Société de développement du Cap-Breton a demandé aux mineurs du Cap-Breton de creuser profond. Je suis dans la salle de contrôle et je surveille tout ce qui se passe et je vois les efforts de ces hommes. C'est une taille qui n'était pas censée produire au moins avant avril. Grâce à des efforts insensés -- les week-ends et les vacances de Noël y sont passés -- ils sont arrivés à faire entrer cette taille en production plus tôt.

Nous ne demandons pas la lune; nous demandons une chance. Ces employés ont extrait plus de 100 000 tonnes de charbon en tout juste trois semaines. Je suis certain que des gens qualifiés comme vous peuvent savoir que la productivité est toujours précédée par une période de travail préliminaire moins productive. Grâce à ces énormes efforts, nos gens y sont parvenus. Tout ce que nous demandons, c'est que ces efforts soient reconnus.

Tout ce que nous demandons à votre comité, c'est de faire des recommandations favorables pour nos travailleurs. Donnez-nous la moitié d'une chance de prouver que nous sommes les meilleurs que cette île ait jamais produits.

Le président: Je demande maintenant aux représentants du Syndicat national des travailleurs canadiens de l'automobile de venir s'installer à la table.

M. D. Victor Tomiczek, représentant national, Syndicat national des travailleurs canadiens de l'automobile: Nous sommes venus aujourd'hui soutenir les efforts de nos camarades des autres syndicats.

Je serai bref. Le SCPF vous a parlé d'une question importante qui méritait votre attention et j'aimerais laisser autant de temps que possible aux United Mineworkers. Étant donné les études et les efforts qu'ils ont consacrés à la tentative de sauvetage de leur industrie, ils méritent d'être entendus.

Les Travailleurs canadiens de l'automobile représentent un groupe varié de travailleurs dans l'industrie minière. Nous représentons les employés de bureau -- les commis payeurs, les pupitreurs, les programmeurs, les arpenteurs et les répartiteurs -- ainsi qu'un certain nombre d'employés qui travaillent sous terre: les inspecteurs et les artificiers, les échantillonneurs et les arpenteurs souterrains.

Bien entendu, nous nous posons des questions sur notre avenir dans l'industrie houillère du Cap-Breton. Je me pose des questions car j'entends les commentaires de nos représentants élus. En 1995 M. David Dingwall s'est dit confiant dans l'avenir de Devco. Nous ne pouvons guère être confiants tant que nous n'aurons pas vu d'efforts concertés de la part de toutes les parties concernées pour régler les problèmes.

Au moment même où M. Dingwall faisait cette déclaration en 1995, le président de Devco annonçait que la société mettrait 1 200 employés à pied. Une des justifications était que cette décision garantirait l'avenir de la société. Nous ne voyons pas les avantages de cette décision.

Je peux vous assurer que le Syndicat national des travailleurs canadiens de l'automobile et notre prédécesseur, la Fraternité canadienne des cheminots, employés des transports et autres ouvriers, avant notre fusion, comptait environ 375 à 400 membres employés à Devco. Actuellement nous comptons 148 membres des TCA à Devco. C'est le chiffre actuel dans les registres d'effectifs. En réalité, nous ne comptons que 110 postes dans la société et ce chiffre ne fait que diminuer.

Nous nous inquiétons non seulement de l'avenir de nos emplois à Devco mais aussi du fait que le nombre de postes syndiqués dans la société ne cesse de diminuer. Nous estimons que la myopie de Devco met notre économie en grand danger. Il est absurde que notre industrie houillère ne dépende que d'un seul consommateur, à savoir la Nova Scotia Power. J'ai traité avec cette société comme représentant syndical et je peux vous dire que Nova Scotia Power n'a que dédain pour l'industrie houillère et pour les travailleurs de la Société de développement du Cap-Breton. Elle ne cache pas son mépris pour la Société de développement du Cap-Breton. En fait, ces dernières années, elle a tout fait non seulement pour embarrasser la société, mais pour essayer de rompre des marchés et des contrats qui étaient en place depuis très longtemps.

Je suis sûr que M. Drake des United Mineworkers vous en parlera plus car il connaît très bien le dossier et les acteurs qui, coïncidence, ont des rapports avec les deux sociétés. Les travailleurs commencent à se méfier quand ce sont des gens qui semblent être apparentés à deux sociétés qui prennent des décisions nous affectant.

Le fait même que nous dépendions tellement de Nova Scotia Power nous oblige à nous poser la question suivante: pourquoi consacrer des millions et des millions de dollars à la modernisation et à l'amélioration des quais pour les charbonniers internationaux quand nous ne nous en servons pas? Quel est l'intérêt, surtout quand on ne cesse d'attaquer le gaspillage des deniers publics? Nous estimons que les quais à charbon sont un élément intégral de l'avenir de Devco.

Nous devons développer nos marchés au-delà de Nova Scotia Power. Comme nous n'utilisons pas ces quais, nos usines de préparation du charbon, qui nettoient le charbon, sont sous-utilisées. Nova Scotia Power n'a pas besoin de charbon nettoyé, résultat: la moitié du temps l'usine de préparation du charbon ne tourne pas. Avant, elle tournait toujours à plein temps, aujourd'hui au mieux, elle tourne de manière saisonnière.

Si nous ne lavons ni ne purifions notre charbon, nous sous-évaluons le produit que nous essayons de vendre. Faire simplement passer le charbon de la mine au central de Nova Scotia Power ne nous permet pas d'améliorer notre produit ni d'améliorer nos chances d'avenir dans la Société de développement.

Ce qui me gêne vraiment c'est que Devco n'ait même pas la courtoisie de se montrer lors de ces audiences ou de prendre des dispositions pour rencontrer les sénateurs après qu'ils aient eu le temps de digérer tout ce qui leur a été dit. Je trouve cela répréhensible et les membres de votre comité devraient clairement faire savoir qu'il leur déplaît que Devco ait évité de venir discuter des problèmes de Devco ici à Cap-Breton où cela compte.

Ceci dit, si nous permettons à Devco de vous rencontrer en catimini après cette audience, ce serait la moindre des choses que les syndicats soient invités à y participer afin qu'ils puissent entendre de leurs propres oreilles comment la Société de développement du Cap-Breton justifie certaines de ses décisions passées et, en particulier, comment elle voit son avenir. Si elle vous parle de cet avenir, j'estime que les syndicats devraient être représentés à ces réunions.

À propos de certains des témoignages que j'ai entendus aujourd'hui, je ne vois pas combien d'études de faisabilité supplémentaires il faudrait faire à propos de la mine Donkin. Le sénateur Buchanan a parlé d'un rapport sur la qualité du charbon de Donkin. Nous n'avons pas lu ce rapport et nous aimerions en avoir une copie s'il est disponible. Nous aimerions que nos propres spécialistes l'étudient.

Que Donkin soit exploitable ou non, il faut penser à l'autre solution. Si Donkin n'est pas exploitée, notre avenir dans le charbon est terminé. Le président de Devco, M. Shannon, nous a dit qu'il faudrait de 700 millions à 900 millions de dollars pour liquider Devco, c'est-à-dire fermer tous les sites et minimiser l'héritage environnemental. Il n'en faudrait pas autant pour ouvrir Donkin.

Je suis d'accord avec le SCFP quant à qui croire en matière de coût des opérations de la Société de développement du Cap-Breton. J'appuie aussi la position des UMW sur ce point. J'ai écouté l'exposé de M. Drake sur l'avenir de Donkin et sur les besoins pour exploiter cette mine. C'est la seule personne -- et, à propos, c'est la direction qui nous l'a dit -- qui semble savoir de quoi elle parle. D'habitude, on dit que si c'est un travailleur qui le dit ça ne veut pas dire grand-chose. Si vous voulez savoir toute la vérité sur ce qui se passe dans une mine, vous avez intérêt à le demander à un mineur car ce ne sera pas la vérité de quelqu'un d'assis dans un bureau qui ne connaît rien à ce qui se passe au fond de la mine.

Selon certaines rumeurs, la société menace de réduire à 10 les équipes qui extraient le charbon de la mine de Prince. Mesdames et messieurs, c'est une grave erreur. Si on permet à la Société de le faire, ce sera un clou de plus dans notre cercueil. Le seul moyen de nous donner une chance est de permettre aux mineurs de produire; s'ils ne sont pas au fond de la mine ils ne peuvent pas produire. Si les équipes sont réduites à la suite d'une décision prise par un bureaucrate qui pense pouvoir économiser de l'argent en ne faisant plus produire certaines équipes, nous n'irons nulle part. Notre métier c'est d'extraire du charbon.

Il y a trois ans il y a eu un éboulement de roches à la mine Phalen. Je ne suis pas mineur. J'ai travaillé à la mine 26 pendant quelque temps, puis j'ai travaillé dans les bureaux de la Devco avant de devenir représentant syndical. Cependant, je viens d'une famille de mineurs. Mon père a travaillé pendant six ans dans les mines, et j'ai cinq frères qui sont mineurs. Je crois en savoir un peu sur la précarité pour les mineurs que leur avenir dépende de décisions des directeurs et des gestionnaires de la Devco. Je vis depuis que je suis né dans cette région et je ne me souviens pas d'une mine où on ait travaillé que sur une seule taille. Aujourd'hui l'exploitation de la mine Phalen repose uniquement sur une seule taille. C'est totalement absurde.

Il existe à la mine Phalen une taille le long de la paroi 8 est, mais elle n'est pas exploitée. Cela pourrait représenter énormément de charbon, et éventuellement, beaucoup d'argent. Pour une raison que j'ignore, personne à la Devco ne pousse l'exploitation de cette taille. On semble se satisfaire de savoir que l'industrie minière dépend de cette seule taille à la mine Phalen. Si elle devait disparaître demain, il ne faudrait pas être la tête à Papineau pour comprendre que la mine n'a plus d'avenir.

Cela confirmerait peut-être que ceux qui sont à la tête de la société n'ont aucune idée de ce qu'ils font là. Peut-être qu'il faudrait changer ceux qui sont à la barre. Les membres de la Direction de la Société de développement du Cap-Breton, semblent toujours être nommés pour des raisons politiques au lieu de nommer des gens qui s'y connaissent dans l'industrie minière. On a dit plus tôt que l'on perdait tous les mineurs d'expérience et qu'on ne pouvait plus faire appel à leur compétence.

Beaucoup de jeunes mineurs ont quitté la région pour se rendre en Colombie-Britannique ou en Alberta, parce qu'ils ont l'impression que personne ne cherche à assurer leur avenir au Cap-Breton. Ils ont donc jugé qu'il était préférable pour eux de déménager alors qu'ils avaient 20 ou 30 ans plutôt que d'attendre qu'ils en aient 40 ou 50 alors que les possibilités d'emplois sont moindres.

Les travailleurs de la Devco ont actuellement en moyenne 40 ans, ce qui n'est pas très logique. Qui d'autre est prêt à commencer en bas de l'échelle et à tout apprendre de l'industrie minière pour pouvoir assurer la sécurité dans une mine?

Bon nombre de nos mineurs d'expérience prennent leur retraite à la suite de négociations ou même d'une absence de négociations, lorsque des gens viennent nous dire, pour quelque raison que ce soit que tant de mises à la retraite sont possibles. Or, la plupart de ceux qui prennent leur retrait sont des gens extrêmement compétents dont l'expérience nous manquera chèrement.

Il en est de même pour nos travailleurs spécialisés. Les syndicats ont tout fait en leur pouvoir pour maintenir la stabilité dans l'industrie minière en signant des conventions collectives à long terme ne comportant aucune augmentation salariale d'importance. Toutefois, cela n'a pas empêché d'autres industries qui paient des salaires beaucoup plus élevés pour des métiers spécialisés d'attirer bon nombre de nos travailleurs spécialisés vers des métiers très respectés et rémunérés à leur juste valeur.

Nous n'avons pas affaire ici à une GM dont les coffres sont pleins; nous avons affaire ici à une société qui prétend constamment être sans le sou. Il nous est également difficile d'être intransigeant lors de négociations lorsque nous savons que nous n'avons pas l'appui ni de la province ni du gouvernement fédéral.

Le sénateur Buchanan a laissé entendre que l'ancien gouvernement provincial a toujours appuyé les mineurs. N'oublions pas que chaque tonne de charbon tirée des mines de charbon du Cap-Breton a toujours rapporté beaucoup à la province. Voilà pourquoi je crois que la province a une obligation, ne serait-ce que morale, que de rembourser aux mineurs une partie de l'argent qu'elle a gagné grâce à eux au fil des ans. Il est tout à fait inconcevable d'entendre un premier ministre provincial affirmer aujourd'hui, que sous prétexte qu'un organisme fédéral fait affaire avec l'industrie du charbon, la province se dégage de toute responsabilité. C'est un comportement tout ce qu'il y a de plus répréhensible, mais je suppose que l'on ne peut pas s'attendre à autre chose de la part de notre premier ministre. On ne veut rien offrir au Cap-Breton pour remédier à la situation actuelle ni pour reconnaître que nous habitons une région du pays où le taux de chômage est le plus élevé du Canada. C'est un problème qu'il faut régler.

L'une des solutions, ce serait d'ouvrir la mine Donkin. Nous devons tout faire en notre pouvoir pour encourager cette solution.

Que je sache, la mine Donkin produit de l'excellent charbon. Dans l'industrie houillère, chacun sait que dès le premier jour d'exploitation d'une mine, vous devez garder à l'esprit que vous devrez la fermer un jour, car les mines ne sont pas éternelles. Chacun sait également que lorsqu'une nouvelle mine est ouverte, il est beaucoup moins coûteux d'exploiter le charbon parce qu'il se trouve beaucoup plus près de la surface, ce qui réduit les frais de transport. Je crois savoir que les veines de charbon à Donkin sont à six pieds sous terre au plus, ce qui veut dire qu'il y a beaucoup d'argent à faire dans l'immédiat.

L'un des facteurs qui devient une épée de Damoclès pour la Devco, c'est évidemment la question des pensions. Si la Devco devait fermer ses portes aujourd'hui, on sait que le gouvernement fédéral serait obligé d'assumer le coût de toutes ces pensions. Or, elles ne disparaîtront pas tout bonnement. Si le gouvernement fédéral veut vraiment exercer son mandat, il devra privatiser la société à un moment donné ou à un autre... et je ne dis pas que je sois d'accord ou pas; la décision devra dépendre de ce qui est dans le meilleur intérêt du Cap-Breton. Mais comment peut-on s'attendre à ce que quiconque se penche sérieusement sur l'avenir de la société lorsqu'on sait que cette société lui coûtera 45 à 50 millions de dollars en frais de pension qu'il faudra verser immédiatement? La société devrait pouvoir jouir des mêmes règles du jeu que les autres.

Le gouvernement fédéral se doit donc aujourd'hui d'entrer en jeu et d'assumer la responsabilité du fonds de pension de façon que ça ne soit pas prélevé des coffres de la Devco, cette vache à lait qui semble susciter maintes controverses au Canada. Le gouvernement fédéral ne devait pas traiter la Devco différemment des autres sociétés qu'il privatise. Je songe notamment à la privatisation du CN dont le gouvernement a assumé les pensions, et à d'autres cas encore. La Devco devrait être traitée sur un pied d'égalité avec ces autres sociétés. Il faut donner à la société Devco la possibilité de se prouver, ce qui lui serait impossible si elle doit faire une telle ponction dans ses réserves d'entrée de jeu. Comment espérer exploiter une société à profit lorsqu'il faut au départ cracher 45 millions de dollars? Ce n'est pas ainsi que l'on fait des affaires. Nous espérons qu'à un moment donné, quelqu'un assumera la responsabilité de ces pensions, comme il se doit.

Il en va de même pour la prise en charge automatique. Nous savons que la prise en charge automatique est d'une grande importance pour les mineurs qui ont contracté l'anthracose pour avoir travaillé dans une industrie dangereuse pour leur santé. J'ai peut-être tort, mais les habitants de notre région ont toujours supposé que le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, sous la tutelle du premier ministre Buchanan, assumerait la prise en charge automatique. On ne peut pas accuser celui qui est aujourd'hui le sénateur Buchanan de n'être pas prompt à la réplique. Il a appliqué cette mesure, qui était nécessaire, et, à l'époque on a jugé que c'était un pas dans la bonne direction en vue de reconnaître la maladie des mineurs.

Or, même si la prise en charge automatique était considérée comme une excellente idée émanant du gouvernement provincial, c'est la Devco qui en a fait les frais. Si l'on veut envoyer la note au premier ministre Savage, il faudrait lui envoyer celle-là, avec les compliments du sénateur Buchanan.

La prise en charge automatique s'adresse aux mineurs qui ont travaillé dans une houillère pendant 20 ans et dont les poumons en ont pâti. J'ignore si le sénateur Buchanan est au courant, mais il est malheureusement de plus en plus difficile pour les mineurs houillers d'être admissibles aux prestations. Comme toujours, dès lors qu'une mesure est bonne et que les gens y ont recours parce qu'ils sont malades on conclut qu'elle coûte cher et on érige des obstacles pour réduire le nombre de ceux qui y seraient admissibles.

Ce qui me préoccupe le plus en tant que représentant syndical du Cap-Breton et particulièrement en tant qu'habitant du Cap-Breton qui doit y élever une famille, c'est que mes enfants n'envisagent pas leur avenir au Cap-Breton. Ce qu'ils espèrent, c'est pouvoir aller s'installer dans une province suffisamment proche pour que nous puissions aller leur rendre visite. Savez-vous combien d'entre nous ont vu leurs familles et amis déménager au fil des ans? Ce n'est pas juste. Nous aussi, voulons pouvoir parler d'avenir chez nous.

Rien de tout cela n'est nouveau pour les habitants du Cap-Breton. Nous avons dû nous battre jusqu'à maintenant, et nous continuerons à le faire. Ce qui m'embête, c'est la manifestation qui s'est passée sur King's Road, que vous avez certainement vue dans les médias. Elle illustre bien le ressentiment des habitants de la région. Il y a toujours eu des manifestations par le passé, et il y en aura toujours encore, mais ce qui me préoccupe aujourd'hui, c'est la colère que j'ai vue s'y manifester. Cette colère résulte d'un sentiment de désespoir, à mon avis. Ces manifestations de ressentiment résultent de décisions prises par des gouvernements qui ne se soucient pas de leurs habitants mais plutôt des grandes entreprises, au détriment de leurs travailleurs.

Il y a déjà eu des manifestations de ce genre il y a maintenant 70 ans au Cap-Breton. S'il faut qu'il y ait des manifestations de ce genre, il convient qu'elles aient lieu dans la région du pays où le taux de chômage est le plus élevé du pays, car cela pourrait envoyer un message à Ottawa, nous l'espérons.

Je ne suis évidemment pas partisan de la violence -- j'aimerais qu'elle ne soit jamais nécessaire à nouveau -- mais une manifestation de ce genre est censée faire comprendre aux dirigeants qu'ils peuvent profiter de la population mais seulement jusqu'à un certain point. Il y a longtemps, durant une grève des mines, il paraît que le patron d'une des mines aurait dit que les mineurs étaient incapables de tenir le coup; or, les mineurs lui ont prouvé le contraire. Et tous les travailleurs sont prêts encore une fois à encaisser.

Je remercie le comité d'avoir permis aux travailleurs canadiens de l'automobile de comparaître. J'ose espérer que ces séances seront positives pour l'avenir de la société et celui de nos mineurs et de leurs familles, et qu'une décision sera prise le plus rapidement possible.

Pour ce qui est de Donkin, suffit les études de faisabilité: ce qu'il nous faut, c'est ouvrir la mine. On a fait une kyrielle études, dans notre coin de pays. Il doit bien en avoir dix déjà. Prenez-en une, et ouvrez la mine.

Le président: En ce qui concerne les séances du comité à Ottawa et le souhait que vous avez émis que le plus de gens possible sachent ce qui s'y passe, nous croyons savoir que la chaîne parlementaire filmera ces séances de comité et les rediffusera sous peu, mais peut-être pas en direct. Cela n'a pas encore été confirmé de façon absolue, mais la chose est des plus probables, ce qui permettra à tous les intéressés à Ottawa d'entendre ce qui s'est dit.

Le sénateur MacDonald: Anne McLellan, qui est la ministre des Ressources naturelles et qui ne mâche pas ses mots, a expliqué que l'étude quinquennale permettrait justement à la Devco de prouver qu'elle peut être autonome financièrement, sans quoi -- et je la paraphrase -- le gouvernement pourrait cesser de l'aider financièrement.

Pensez-vous qu'elle voulait nous faire peur?

M. Tomiczek: Sénateur, je ne voudrais pas vous offenser, mais ce qu'il y a de plus facile pour ceux qui sont dans leur petite tour d'ivoire à Ottawa, c'est de «faire peur au monde».

C'était une véritable menace. Malheureusement -- ou peut-être pas -- nous n'y avons pas accordé trop d'importance. Si l'on veut mettre la clé dans la porte, ça se fera. Le gouvernement qui décidera de fermer les portes de la Société de développement du Cap-Breton devra assumer les conséquences de sa décision.

Comme on l'a dit plus tôt, la Devco a été créée pour permettre l'élimination progressive de l'industrie houillère au Cap-Breton. Nous nous en souvenons tous, et c'est d'ailleurs à l'époque où mon père a été mis à la retraite sans cérémonie sans qu'il ait voix au chapitre. À l'époque, on avait l'impression qu'étant donné la précarité de l'industrie pétrolière, l'industrie houillère avait un certain avenir. Nous croyons toujours qu'elle un avenir. Il suffit de jeter un coup d'oeil au Cap-Breton et de reconnaître que non seulement cette ressource doit être exploitée, mais qu'il faut également avoir en main les outils pour vendre notre produit outremer, là où se trouvent les marchés.

Je ne m'inquiète pas des menaces en l'air. Ce n'est pas la première fois qu'on nous menace.

Le sénateur MacDonald: Kevin MacNeil a parlé de la 6e et de la 7e année d'exploitation et il semble être d'accord avec vous. Or, à en croire Anne McLellan, il n'y aurait pas de 6e ni de 7e année.

La responsabilité retombe maintenant sur la Devco, malgré tout le pain qu'elle a déjà sur la planche, y compris les conditions géologiques de la mine Phalen et le coût de l'étude de faisabilité de la mine Dunkin. Tous ces facteurs font qu'il lui sera à peu près impossible d'atteindre le seuil de la rentabilité, voire d'accuser des bénéfices à la fin des cinq années.

Vous avez répondu à ma question. Je voulais savoir si la ministre essayait de nous effrayer ou si le gouvernement en avait vraiment l'intention. Si le gouvernement en a l'intention, il essaie de se débarrasser de l'industrie houillère au Cap-Breton.

M. Tomiczek: Le gouvernement a essayé de nous effrayer avec son Livre rouge, mais il n'y a pas donné suite. Nous avons l'habitude d'entendre toutes sortes de rumeurs d'Ottawa ou d'Halifax, rumeurs qui n'ont rien à voir avec nous, car elles sont évidemment factices. Personnellement, je crois que le gouvernement fait toutes sortes de déclarations pour ne pas prêter flanc à la critique de la presse et pour avoir l'air d'agir.

J'étais en colère lorsque j'ai rencontré les ministres, et particulièrement M. Dingwall qui, lorsque les mineurs lui ont rappelé sa promesse d'ouvrir la mine Donkin, a répliqué en traitant tous les mineurs du Cap-Breton de menteurs, et en prétendant qu'il n'avait jamais fait cette promesse. Il faut pouvoir faire confiance à nos élus. Mais quand quelqu'un nous dit blanc, il ne devrait pas revenir dans deux mois pour nous dire noir. Vous me trouvez peut-être dur, mais j'appelle cela un mensonge.

Le sénateur MacDonald: M. Dingwall n'a pas besoin que je le défende.

Le sénateur Murray: Il en serait ravi.

Le sénateur MacDonald: Je ne partage pas ses convictions politiques. Je n'arrive pas à comprendre comment Dingwall, étant le piètre représentant qu'il est de sa circonscription, peut espérer emboîter le pas à Allan J. MacEachen et aider sa circonscription.

M. Tomiczek: Nous avons toujours affirmé que l'initiale J. représentait Jésus. M. Dingwall n'arrive pas à la cheville d'Allan J. MacEachen et ne pourra jamais le remplacer... pas que je sois moi-même un admirateur d'Allan J. MacEachen. Mais les habitants du Cap-Breton doivent bien admettre que M. MacEachen a déployé beaucoup d'efforts pour nous aider.

Il y a un monde de différence, à mes yeux, entre celui qui fait une promesse et la tient et celui qui en fait une sans la tenir. Cela ne veut pas dire que tout le monde doive venir s'excuser de ne pouvoir tenir sa promesse. Nous comprenons bien que les décisions sont prises à la majorité et non par un ministre seul. Toutefois, tous ceux qui font des déclarations et la réfutent ultérieurement devraient en être imputables. C'est une chose que je n'accepte pas, monsieur le sénateur, et personne ne devrait l'accepter non plus. Si ma franchise embête quelqu'un, tant pis.

Le sénateur MacDonald: J'essayais d'expliquer que celui qui représente une circonscription ne joue pas le même rôle que celui qui défend une politique nationale.

M. Tomiczek: Bien sûr. Voici ce que je vous suggère: si vous n'avez aucune autorité pour agir, alors taisez-vous.

Le sénateur Graham: Bienvenue à M. Tomiczek. Nous venons tous deux de la même ville, Dominion.

Un commentaire au sujet de ce qui se passe actuellement et de l'avenir. J'étais le premier employé sur place de la Devco. Je me rappelle qu'au début, le mandat de la Devco était de réduire petit à petit l'importance de la houillère. Or, depuis cette époque, il y a eu les mines Lingan, Phalen, Prince et il y aura peut-être la mine Donkin. Mais dans tous les cas, il faut émettre la réserve habituelle: prouvons que le projet est faisable. Cela exigera beaucoup de coopération.

Monsieur Tomiczek, vous dites qu'il suffit d'aller ouvrir la mine. Il faut quand même mettre à jour le dossier auparavant.

M. Tomiczek: Il faut d'abord en extraire l'eau qui s'y trouve.

Le sénateur Graham: Oui, je le comprends.

Votre syndicat a succédé à la Fraternité canadienne des cheminots, employés des transports et autres ouvriers. Vous dites avoir sur papier 148 membres, mais 110 en réalité.

M. Tomiczek: Nous avons actuellement 100 emplois syndiqués, prévus par la Devco. Nous sommes un des syndicats qui compte des membres mis à pied. Nous devons nous battre quotidiennement, mais avec l'aide du SCFP, nous pouvons toujours garder des membres au travail.

Lors de la récente ronde de négociations, nous sommes convenus avec la société, par voie d'une entente, que nos gens seraient au moins admissibles aux prestations d'assurance-chômage pendant toute la durée de vie de cette entente.

Le sénateur Graham: Comment cela se compare-t-il avec il y a cinq ans?

M. Tomiczek: Plus de cinq ans.

Le sénateur Graham: Dans ce cas, disons dix ans.

M. Tomiczek: Lorsque j'étais à la société, c'est-à-dire il y a 13 ans, nous comptions trois sections locales à la Devco. Nous comptions d'abord la section locale des commis, qui regroupait à peu près 300 personnes à l'époque. Puis, nous avions la section locale des ingénieurs, qui comptait quelque 148 membres. Enfin, nous avions la section regroupant ceux qui étaient chargés des abattages à l'explosif et les inspecteurs de mines, qui regroupait 160 à 172 membres. Comme vous le voyez, le Syndicat national des travailleurs canadiens de l'automobile, autrefois la Fraternité, a perdu beaucoup de membres à la suite de compressions de personnel et beaucoup de membres chez les commis à la suite de l'évolution technologique. Nous nous en doutions bien lorsque nous avons vu arriver tous les ordinateurs personnels et que la Devco s'est mise à faire du réseautage à l'échelle mondiale. Cela nous a fait perdre énormément d'emplois.

Sénateur Graham: Vous avez dit que l'âge moyen des mineurs était de 40 ans?

M. Tomiczek: Oui.

Le sénateur Graham: Comment cela se compare-t-il avec ce qui se passait il y a cinq ou dix ans?

M. Tomiczek: Il y a dix ans, à l'époque où l'on embauchait, la plupart des embauchés avaient de 20 à 30 ans.

Je ne me rappelle pas la dernière fois où on a embauché à la Devco. Cela fait bien longtemps que nous n'avons pas eu de nouveaux membres dans notre syndicat.

Quelqu'un a parlé des relations industrielles. C'est un secteur qui a connu lui aussi d'énormes changements. Je dois admettre dans une certaine mesure que les relations humaines entre les syndicats et la société ont probablement atteint un certain plateau. J'attribue cette situation à deux facteurs: d'abord, la société semble avoir cessé d'avoir recours à des cabinets d'avocats de l'extérieur pour traiter tous les griefs. Je parle du cabinet de MacInnes Cooper qui s'est occupé d'à peu près tous les griefs et a mené tous les syndicats à l'arbitrage, ce qui a coûté très cher aux deux parties.

Comme la société n'a plus recours à ces avocats, elle semble prendre beaucoup plus au sérieux les exigences des travailleurs qui présentent des griefs dans des cas particuliers et elle semble se rendre compte qu'elle doit adopter une position beaucoup plus progressiste et cesser de nier l'évidence comme elle le faisait jusqu'à maintenant.

Je considère cela comme un progrès.

Le sénateur Buchanan: Vous avez parlé des études de faisabilité. Il ne fait pas de doute pour moi qu'il soit nécessaire d'avoir une mise à jour. L'étude de faisabilité que j'ai ici remonte à 1980-1981. Il y en a eu aussi une autre qui remonte à 1985. Il faut les mettre à jour, sans toutefois s'inquiéter de la présence du charbon. Nous savons tous qu'il y en a en quantité. Mais il faut aussi regarder ce qui se passe sur les marchés et se demander quels sont les coûts aujourd'hui. J'en ai une petite idée pour en avoir parlé à certaines gens, mais cela ne correspond pas au montant mis de l'avant par la Devco.

Vous conviendrez avec moi qu'il faut mettre à jour ces études pour évaluer ce qu'il pourrait en coûter aujourd'hui.

Vous avez mentionné le soufre dans une proportion de 1 p. 100. L'UMV a certains chiffres là-dessus, mais je ne me rappelle que nous avons demandé en 1984-1985 au ministère des Mines de déterminer avec la Devco la qualité du charbon se trouvant dans les filons de Cape Persé à la mine Donkin. Il est intéressant de noter que l'on peut mettre la main sur l'analyse effectuée par l'UMV mais aussi sur celles effectuées par la Devco. L'analyse des 2 700 tonnes de charbon extrait de la mine Donkin-Morien était particulièrement encourageante. L'échantillonnage laissait croire qu'en effectuant une extraction sélective, c'est-à-dire en laissant une partie du plancher et du plafond du filon de charbon -- je répète que le plancher et le plafond ont un contenu élevé en soufre -- et en extrayant 70 p. 100 du filon de 3,4 mètres, le niveau de soufre pourrait être réduit d'environ 1 p. 100. Tout cela se trouve dans le rapport annuel de la Société de développement du Cap-Breton pour 1985.

M. Tomiczek: Monsieur le sénateur, le 28 mai 1996 notre syndicat -- représenté à l'époque par Bobby Gillis, soit dit en passant -- soumettait un rapport sur l'extraction sélective. Je crois savoir que l'on avait injecté 300 000 $ en vue de cette extraction sélective. Nous aimerions bien savoir ce qu'il est advenu de cette somme. Qu'est-il advenu de cette proposition d'extraction sélective? Si l'argent a bien été alloué, a-t-il été véritablement dépensé comme il devait l'être?

Le sénateur Buchanan: Vous devriez interroger la Devco, puisqu'il s'agissait-là l'une de ses recommandations dans son rapport annuel de 1985.

M. Tomiczek: C'est comme si je demandais au gouvernement libéral de la province ce qu'il a fait des 52 millions de dollars dépensés pour les sables bitumineux? Je n'obtiendrai pas de réponse là non plus.

Le sénateur Murray: Qu'est-ce que vous disent vos membres qui s'occupent de l'abattage à l'explosif et vos inspecteurs de mines, membres de votre syndicat, de la mine de Phalen? Sont-ils plus optimistes au sujet de Phalen que tous les autres que nous avons entendus aujourd'hui et plus tôt?

M. Tomiczek: J'ai un certain avantage sur eux parce que mes propres frères travaillent à Phalen. Vous savez, lorsque nous sommes tous assis à boire un verre, on dit que nous chargeons plus de charbon dans la taverne que dans la mine.

Ils constatent évidemment que Phalen a beaucoup de problèmes avec des phénomènes indépendants de leur volonté, comme des explosions de roc et la présence de grès. Toutefois, nous avons déjà surmonté ce genre de problème par le passé et pouvons le faire encore. Nous le pouvons, grâce à la technique.

Nous savons que les mineurs sont capables de surmonter tous les problèmes qu'ils rencontrent sous terre. J'ai travaillé dans des mines en Ontario et dans des mines du Cap-Breton. Les mineurs des houillères du Cap-Breton sont insurpassables pour ce qui est de la compétence.

Ce qui inquiète nos membres, c'est de savoir s'il y aura une équipe de gestion qui prendra en main leur avenir. Nous sommes d'avis que si le secteur minier s'effondre, ce ne sera pas à cause de facteurs indépendants de notre volonté, mais plutôt parce que quelqu'un prendra une décision qui nous nuira. Notre plus grave problème, c'est le manque de confiance que nous avons envers la gestion de la Société de développement du Cap-Breton.

Le sénateur Murray: Vous semblez croire que les problèmes géologiques dont vous avez parlé sont temporaires et que vous pouvez les surmonter. Que pensez-vous de la proposition qu'a faite un témoin précédent, c'est-à-dire d'extraire le charbon plus en surface ou bien d'ouvrir une autre mine?

M. Tomiczek: Nous avons toujours eu confiance dans notre capacité de surmonter nos problèmes.

Si j'ai bien compris les pronostics, les problèmes géologiques de la mine ne sont que temporaires et nous pourrons nous y ajuster. Nous savons fort bien qu'une faille géologique dans un sillon ne dure pas indéfiniment. Malheureusement, celle-ci dure plus longtemps que nous ne l'aurions cru. Si l'on s'oriente dans une voie, c'est peut-être parce que les comités de santé et de sécurité au travail dans le secteur minier ne permettront à personne de travailler dans des conditions dangereuses.

Je sais que l'on surveille attentivement nos gens au sein du comité. Le syndicat international des mineurs d'Amérique envoie des représentants qui s'expriment de façon très musclée au comité de la santé et de la sécurité au travail, tout comme le font le SCFP et les autres syndicats. Je ne crains aucune décision qui pourrait être prise et qui serait susceptible de rendre notre travail dangereux. Mais je crains toutefois que quelqu'un décide un jour de fermer une mine parce qu'il a lu quelque chose dans un rapport se trouvant sur le pupitre de quelqu'un.

Le sénateur Murray: Vous avez mentionné le Quai international. Vos gens y travaillent-ils?

M. Tomiczek: Non.

Le sénateur Murray: Il n'y a aucun membre du syndicat national des travailleurs canadiens de l'automobile?

M. Tomiczek: Nous en avons déjà eu, qui travaillaient, mais plus maintenant.

Le sénateur Murray: Quel est le syndicat qui est en place là-bas?

M. Tomiczek: Je crois que ce sont des membres du syndicat des mineurs d'Amérique qui s'occupent du débardage sur les quais. Mais je ne crois pas qu'il se passe quoi que ce soit actuellement sur les quais.

J'ai toujours été fasciné par ces installations. Elles sont idéales pour les gros volumes. En passant, une des activités en flèche et en pleine expansion du port d'Halifax est le transport par porte-conteneur et par vraquier à partir de ce quai. Ça marche très fort à Halifax. Il reste qu'il revient moins cher d'expédier à partir du Cap-Breton au lieu d'Halifax. Nous sommes plus près des marchés d'Europe et de Terre-Neuve. Mais, encore une fois, personne ne semble s'intéresser au sort du port de Sydney.

La FCCETAO a compté jusqu'à 250 dockers qui travaillaient à Sydney. Aujourd'hui les effectifs sont réduits à 45 et avec de la chance, nous arriverons à les faire travailler 10 à 12 semaines par an.

Quelqu'un, un jour, a pris la décision de ne pas développer le port de Sydney, même s'il coûte moins cher, et même si la distance pour l'Europe est plus courte. Tout le fret et toutes les marchandises ont été détournés sur Halifax. Il ne faut pas s'étonner du sentiment d'aliénation dans cette partie de la province.

Le sénateur Murray: Bonne observation. Je poserai la question à l'UMA, et si j'en ai l'occasion, certainement aux dirigeants de Devco quand ils comparaîtront devant nous.

À l'automne de 1995, un plan prévoyait le désengagement de la société des activités d'exportation. Nous en avons discuté plus tôt.

Ce plan était accompagné d'une diminution de l'actif, d'une restructuration, et, bien entendu, d'une vague de licenciements encore plus féroce que celle qui a finalement été adoptée au printemps dernier. Le nouveau plan prévoit une reprise des activités d'exportation. Il y a certaines contradictions entre les chiffres du rapport annuel et ceux du bilan financier.

J'aimerais savoir ce qui se passe au quai international et savoir si les conditions actuelles leur permettront de reprendre leurs activités d'exportation, dès que la production de charbon le permettra.

M. Tomiczek: Ils devraient produire pour les marchés internationaux mais en plus ces installations devraient être utilisées pour expédier d'autres produits. Le charbon pourrait servir à relancer d'autres activités économiques au Cap-Breton mais personne ne fait rien. Tous les rapports sont passés sous silence. Bien que de l'argent ait été dépensé pour réparer ces installations et pour draguer le port, pour repeindre les bâtiments et leur donner meilleure allure, il reste que rien n'a jamais été fait pour développer ce genre d'activités au Cap-Breton.

Nous sommes une île. Nous sommes entourés d'eau. Ne devrions-nous pas tirer profit du fait que nous avons un bon port, que nous avons la main-d'oeuvre nécessaire et que nous avons désespérément besoin de travail?

Le sénateur MacDonald: Vous n'avez pas de charbon.

M. Tomiczek: Nous avons des tonnes de charbon. Ils ne veulent simplement pas l'extraire.

Le sénateur Buchanan: Nous avons construit la route qui va de la 125 à Sydport pour ouvrir Sydport aux marchés mondiaux, mais cela n'a pas été plus loin.

M. Tomiczek: Absolument.

Le président: J'invite maintenant l'Association internationale des machinistes.

M. Rick Wiseman, président général, Association internationale des machinistes: Je vous remercie de nous avoir invités à venir nous adresser à vous et à vous parler de certains de ses problèmes.

Nous n'avons pas l'intention de vous parler longuement des mines ou de Donkin, puisque les trois autres groupes, de toute évidence, en savent beaucoup plus que nous sur les mesures à prendre. Sachez seulement que, nous appuyons à 100 p. 100 la position de l'UMA et le plan qu'elle propose.

Je me suis rendu deux fois à Ottawa pour parler à deux ministres responsables de la Devco -- John Manley d'abord, puis Anne McLellan -- quand l'UMA a proposé son étude de faisabilité sur le coût d'ouverture de Donkin. Nous leur avons communiqué cette étude. Les deux ministres n'ont manifesté aucun intérêt et nous ont traités par-dessus la jambe. En gros, ils nous ont dit de rentrer chez nous et de faire nos devoirs comme de bons petits gars.

Nos dernières négociations collectives montrent les efforts inouïs de chaque syndicat pour établir des relations harmonieuses avec la direction.

Nous aimerions plus particulièrement vous parler de la sous-utilisation, du mauvais usage du matériel ferroviaire. L'AIM est le syndicat des services d'entretien de la mine. Nous entretenons le matériel de transport et le matériel ferroviaire.

Permettez-moi de vous dresser la liste de notre matériel actuel. Nous avons 10 locomotives GM de 2 000 chevaux et de 16 cylindres dont 4 sont équipées de générateurs. En cas d'urgence, en cas de panne de courant, par exemple, ces locomotives peuvent être utilisées pour rétablir le courant dans la mine et évacuer le personnel.

La plus vieille de ces locomotives a été achetée en 1979. C'est du matériel haut de gamme. Actuellement il est sous-utilisé. Des gens de GM sont venus les inspecter et nous ont dit qu'elles n'étaient pas utilisées à leur pleine capacité.

Nous avons 490 wagons dont la majorité sont à déchargement rapide. Ils déchargent automatiquement le charbon par des ouvertures sur un convoyeur à chevalet au quai international. Ces wagons ont été achetés uniquement pour être utilisés au quai international. Eux non plus ne sont pas utilisés à leur pleine capacité.

Nous avons aussi environ 40 kilomètres de voies qui sont entièrement entretenues par des employés de la Devco, des syndiqués de l'UMA et des syndiqués de l'AIM. Nous avons tout l'équipement nécessaire pour entretenir ou construire des voies. Permettez-moi de vous donner la liste d'une partie de l'équipement que nous avons sur place.

Nous avons un appareil qui lève, qui met à niveau et qui aligne les voies. Nous avons un égalisateur de ballast qui égalise le ballast sur la plate-forme. Je ne suis pas certain que vous sachiez tous ce qu'est le ballast, mais c'est le gravier qu'on met dans la plate-forme pour minimiser les problèmes de glissements provoqués par les eaux de pluie ou des inondations, par exemple.

Nous avons une machine à insérer les traverses, pas besoin d'explication. Elle insère les traverses sur les plates-formes. C'est une machine très rapide qui permet donc d'intervenir très rapidement en cas de problèmes d'inondations, de glissements de terrain, et cetera.

Nous avons une flèche à grue de 60 pieds qui nous permet de lever et de déplacer les rails pour les installer. Nous avons un matériel dernier cri pour réaligner les rails après un déraillement, un glissement de terrain, et cetera.

Nous appelons l'atelier que nous avons construit, le Centre du rail. Il a été construit en 1983 et a coûté 11 millions de dollars. C'est un atelier dernier cri. Les employés du centre peuvent tout faire depuis changer un tuyau d'arrivée d'air à la révision ou à la reconstruction complète d'un moteur.

Nous avons des grues qui vont d'une tonne à 30 tonnes de charge. Nous avons des hydrauliques de 30 tonnes de charge capables de soulever des locomotives, des camions, pour changer les moteurs, réparer les roues, et cetera.

Entre ici et Moncton, nulle part ailleurs vous ne trouverez le genre d'équipement que nous avons à notre centre. D'ailleurs, à l'heure actuelle, à Moncton, à cause de la réduction des effectifs, il n'y a personne qui puisse faire le travail que nous faisons ici. Par exemple, nous travaillons actuellement pour RailTex, la compagnie qui a acheté la ligne Sydney-Truro. Nous travaillons aussi pour Via. Nous réparons des roues, nous réalignons des roues, et cetera. Nous avons l'équipement et la main-d'oeuvre pour tout faire et toutes sortes de compagnies nous confient du travail.

J'aimerais vous parler un instant des locomotives. Lorsque nous les avons achetées, GM leur donnait une durée de vie de neuf ans après laquelle il fallait complètement les remettre à neuf. Grâce à notre entretien régulier, la première sur laquelle il nous a fallu faire quelque chose avait déjà 12 ans. Nous avions prolongé leur vie de trois ans. Nous les avons remises à neuf nous-mêmes. Nous n'avons eu besoin de l'aide de personne.

Victor Tomiczek vous a parlé du quai international. C'est vraiment un gros problème en ce qui concerne la ligne ferroviaire. Le dragage du port a coûté 15 millions de dollars et ils ont installé ce qu'on appelle une flèche coulissante. Cela sert à charger les bateaux. Avant nous ne pouvions charger que des bateaux de 25 000 tonnes et de 30 000 tonnes. Le dragage du port et l'installation de cette flèche coulissante nous a permis de charger des bateaux Panamax de 50 000 tonnes. À notre avis, ou bien cet investissement a été un pur gaspillage, ou bien c'est le meilleur usage qui ait été fait des deniers publics. Si la société a fait preuve de vision, notre syndicat ne peut que l'applaudir. Cependant, pour rentabiliser cet investissement il faut relancer les exportations.

D'après ce que j'en ai vu, le plan quinquennal prévoyait un désengagement total de la société du marché d'exportation. La dernière modification apportée à ce plan parle d'un rôle mineur sur le marché des exportations. Il nous semble que pour rentabiliser pleinement les investissements dans les installations portuaires notre retour sur le marché des exportations est impératif.

Le fait que nous soyons liés à un seul client et que nous ayons également négocié une réduction de 18 p. 100 du coût de la tonne produite met Devco dans une situation inexplicable. Se lier à un seul client est commercialement absurde. Nous répétons que notre retour sur le marché des exportations est impératif.

Quand la société a investi ses 15 millions de dollars initiaux dans ce quai, elle a dit à notre syndicat que pour rentabiliser pleinement cet investissement il nous faudrait satisfaire certaines normes au niveau du service et du chargement des bateaux. Avant que cette flèche coulissante n'ait été installée et que les dragages n'aient été faits, notre taux de remplissage -- c'est-à-dire le volume de charbon chargé sur un bateau -- était de 16 000 tonnes par jour. Pour être compétitif sur le marché mondial il faut arriver à réaliser aux alentours de 25 000 à 26 000 tonnes de chargements par jour.

Les derniers chargements que nous avons faits tournaient en moyenne entre 26 000 et 30 000 tonnes par jour, c'est-à-dire un taux équivalent ou supérieur aux normes mondiales. Bien que le chargement de bateaux ait été minimal au cours des dernières années, lorsque nous avons chargé nos derniers bateaux le journal interne de Devco, Minds and Matters, et les avis placardés sur nos babillards nous félicitaient des records que nous venions de battre.

Nous avons le matériel, nous avons la main-d'oeuvre. Nous avons tout l'équipement nécessaire pour charger dans les normes n'importe quel bateau. Il n'y a rien que nous ne puissions faire à International Pier. Pour nous, c'est l'avenir de Devco. Ne dépendre que d'un seul client est très aléatoire.

Au cours des huit à dix dernières années, le coût du transport de la tonne par rail n'a cessé de diminuer grâce au meilleur matériel que nous utilisons, à sa meilleure utilisation, à la productivité accrue des employés et à la réduction des effectifs. Depuis cinq ans, une équipe de train est composée de quatre personnes. Au cours de négociations récentes, que nous avons conclues en janvier de cette année, nous avons ratifié un accord autorisant la réduction de l'équipe, c'est-à-dire la réduction du personnel roulant, de quatre à trois, voire, dans certains cas et dans certaines circonstances, à deux. Cela permettra de réduire encore le coût de la tonne transportée de 25 à 40 p. 100.

Pour revenir à Mme McLellan et à M. Manley, qui nous ont conseillés de rentrer chez nous et de faire nos devoirs comme de bons petits gars, notre nouvelle convention collective est en vigueur jusqu'en mars de l'an 2000, ce qui garantit une certaine paix industrielle entre Devco et l'AIM. Je ne peux pas parler au nom des autres syndicats, mais je crois qu'ils ont tous ratifié leurs conventions pour au moins jusqu'en 1999. Les syndicats ont fait tous les efforts possibles et imaginables, aux dépens en grande partie, il faut le dire, de leurs membres. Nous avons pris des mesures pour garantir des relations harmonieuses.

L'AIM est le résultat de la fusion imposée entre ce qui était les Travailleurs unis des transports E, c'est-à-dire les mécaniciens de locomotives, les Travailleurs unis des transports T, c'est-à-dire les garde-freins de l'équipe, et l'Association internationale des machinistes. Juste avant cette fusion nous comptions environ 400 employés. Actuellement nous comptons 90 membres dans les registres, dont 58 ont des postes garantis à plein temps et les autres, comme Victor vous l'a dit, doivent être requalifiés pour la durée de la convention collective.

Devco verse 58 salaires à plein temps, ce qui correspond à une réduction de nos effectifs de décembre 1996 à janvier 1998 d'environ 40 p. 100. Cet accord nous a beaucoup coûté sur le plan humain et financier.

L'existence de deux mines nous pose un problème. Tout dépend de Phalen, et ils ne travaillent que sur une taille. Il y a un an ou deux, quelqu'un à la haute direction, dans son infinie sagesse, a décidé de suspendre l'exploitation de Phalen. Comme nul ne l'ignore, la situation de la mine de Phalen est précaire. Tout le monde sait que d'un jour à l'autre nous ne savons pas ce qui va se passer. Nous estimons que l'exploitation devrait être la priorité des priorités et qu'il faudrait toujours prévoir une sorte de roue de secours.

M. Drake peut vous parler de la situation à la mine de Donkin beaucoup mieux que je ne le pourrai jamais. La plate-forme pour recevoir une voie jusqu'au site de Donkin est prête. Nous avions autrefois une ligne qui allait de Morien à Donkin, je crois, je n'en suis pas entièrement sûr, mais elle a été arrachée. Quoi qu'il en soit, tout ce qui est nécessaire pour rouvrir une mine jusqu'à Donkin est en place. Nous avons le matériel, la main-d'oeuvre et la capacité de rouvrir cette ligne.

Sur le plan de la sécurité, il suffit d'emprunter les routes du Cap-Breton pour comprendre les mérites du rail par rapport à la route. L'état des routes matraquées par le passage des camions transportant le charbon de la mine de Prince est visible à l'oeil nu. Il suffit de se déplacer en voiture et d'être agressé 24 heures sur 24 par ces camions pour comprendre les avantages du transport par chemin de fer.

Il est évident, selon nous, que si la production est là, le coût du transport par camion n'est pas comparable à celui du transport par chemin de fer. Il n'y a pas de comparaison. Je vais vous donner un exemple. Généralement nos convois sont composés de 21 wagons de charbon. Il faudrait 63 camions pour transporter ce charbon que nous transportons en une fois.

Encore une fois, il y a le matraquage permanent des routes. Il y a le danger pour la sécurité. Le chemin de fer est la seule solution si la mine de Donkin est ouverte tant du point de vue de la sécurité que du point de vue économique.

Le sénateur Graham: Combien votre syndicat compte-t-il de membres?

M. Wiseman: Nous avons 90 membres sur les registres. Selon notre accord avec la société elle a l'obligation de payer 58 salaires.

L'option numéro un pour nous, c'est que des volontaires acceptent d'être licenciés pour l'année. Sinon, l'option numéro deux serait que la société, comme elle l'entendra, décide des 58 personnes qu'elle emploiera.

Le sénateur Graham: J'ai une impression d'amélioration dans les relations entre les syndicats et la direction. Vous avez parlé de convention jusqu'à l'an 2000. Quel est le niveau de confiance dans l'avenir?

M. Wiseman: Je dirais qu'il n'est pas élevé.

Le sénateur Graham: Supérieur à ce qu'il était il y a un an?

M. Wiseman: Avec la convention collective actuelle, nos membres sont plus confiants dans l'avenir, mais seulement jusqu'à l'an 2000.

Le sénateur Graham: Quels sont les plus gros bateaux qui peuvent accoster à ce quai?

M. Wiseman: Les plus gros sont d'environ 55 000 tonnes, les Panamax, bâtiments de référence.

Le sénateur Graham: Quel est le tirant d'eau dans le port?

M. Wiseman: Je ne sais pas. Avant ils faisaient mouiller ces bateaux à Port Hawkesbury. Nous les chargions par barge parce qu'ils ne pouvaient pas accoster au quai. Nous chargions des barges qui faisaient le transbordement dans ces bateaux à Port Hawkesbury. Il fallait peut-être faire trois ou quatre aller-retour entre le port de Sydney et Port Hawkesbury.

Le dragage et la nouvelle flèche coulissante nous permettent de charger n'importe quel charbonnier directement au quai.

Le sénateur Graham: Monsieur le président, je vais me permettre de faire une petite digression. J'ai une question à poser à M. Wiseman, question apparentée, mais qui concerne RailTex.

Il y a un certain nombre d'années, le sénateur MacDonald et moi-même débattions de la ligne de chemin de fer Truro-Sydney. À l'époque j'estimais que la vente de cette ligne était contraire au mandat du CN. Ils étaient passé de sept préposés à un.

Le sénateur MacDonald estimait que la privatisation de RailTex leur permettrait de faire un meilleur travail. Ils en donnent aujourd'hui la preuve, puisqu'ils font des bénéfices.

Cela m'incite à rêver à l'avenir, comme nous devrions tous le faire, des services voyageurs et autres services réguliers. Nous avons perdu il y a déjà longtemps le service régulier Truro-Sydney. Il y a beaucoup de services réguliers qui ne fonctionnent plus, dont 30 ou 40 se trouvent à un endroit ou à un autre dans le réseau de VIA Rail. Certains songent à la possibilité, et même en discutent, de rétablir certains services réguliers. Comme pour Donkin, il faudrait faire une étude de faisabilité pour voir si c'est possible.

Supposons que quelqu'un ait l'imagination, le courage et les moyens nécessaires pour se lancer dans l'aventure. Seriez-vous en mesure de restaurer ces trains et de les entretenir?

M. Wiseman: Il n'y a aucun matériel roulant dont notre centre ne puisse s'occuper... moderniser, entretenir, réparer, et cetera.

Chaque fois que RailTex a eu un problème, c'est à nous qu'elle a donné le contrat. Qu'il s'agisse des locomotives ou de tout autre problème, c'est à nous qu'elle a donné le contrat. D'ailleurs, elle a embauché à contrat un de nos employés licenciés. Il n'y a personne d'autre de ce côté-ci de Moncton; et je crois que Moncton n'offre plus aucun service d'entretien ni pour le matériel roulant ni pour les locomotives. C'est tout pour nous.

Le sénateur Graham: De toute évidence ce service est offert par la société, et elle peut faire des bénéfices?

M. Wiseman: Exactement.

Le sénateur Murray: Est-ce que les employés de RailTex sont syndiqués?

M. Wiseman: Non.

Le sénateur MacDonald: Est-ce que vous voulez parler d'un CFIL dans la région, d'une ligne abandonnée?

Le sénateur Graham: Je parle de la possibilité de restaurer un service régulier entre Sydney et Truro en utilisant la ligne de RailTex.

Le sénateur Murray: Un service voyageurs.

Le sénateur Graham: Oui, un service voyageurs.

Le président: J'invite maintenant nos témoins suivants, les United Mineworkers of America.

M. Steve Drake, président, district 26, United Mineworkers of America: J'aimerais remercier le comité d'être venu au Cap-Breton, nous évitant ainsi d'avoir à nous rendre à Ottawa. Vous accueillir chez nous est un plaisir.

J'aimerais attirer votre attention sur une personne présente dans l'auditoire du nom de Dan Currie. C'est un ancien directeur de la mine de Donkin et il répondra plus tard à certaines questions concernant Donkin.

Le président: Je crois que nous l'entendrons tout à l'heure.

M. Drake: Avant que je ne commence, j'aimerais revenir sur certains points déjà soulevés.

Pour ce qui est des marchés d'exportation, j'aimerais voir le billet d'avion de George White, parce que je ne sais pas si George White est en train d'explorer des marchés d'exportation. Depuis deux ans et demi, nous réclamons une ouverture sur les marchés d'exportation pour ne plus dépendre de notre seul client, Nova Scotia Power. Que la direction de Devco ait choisi tout particulièrement cette semaine pour commencer à s'intéresser aux marchés d'exportation n'est pas le fruit du hasard. Je n'y crois pas un instant. Il faudrait que je mâche longtemps avant de pouvoir l'avaler.

Les syndicats ont beaucoup critiqué la direction de Devco depuis 28 ans. Nous avons vu environ 15 différents énoncés de mission pour Devco. Nous avons vu 35 ou 40 différents types de restructuration pour Devco. Rien de tout cela n'a fonctionné. Chaque fois qu'ils nous disent que nous devons faire quelque chose pour que l'entreprise fonctionne, pour qu'elle soit plus concurrentielle, nous le faisons parce qu'ils trouvent le moyen de dire qu'ils ont perdu de l'argent cette année-là.

À notre avis, le fait que la direction de Devco ne soit pas ici aujourd'hui pour comparaître est un affront au comité sénatorial. Nous appuyons les autres syndicats qui ont dit cela. Nous sommes d'avis que Devco est en train de préparer sa position à l'heure actuelle et que, peu importe ce que nous disons ici aujourd'hui, ils auront une réponse pour contester absolument tout ce que nous disons.

La direction, particulièrement celle de la Société de développement du Cap-Breton, n'aime pas être critiquée. Je vais vous lire quelque chose aux fins du compte rendu. Il s'agit d'un extrait d'un livre intitulé Les Bâtards de Voltaire. Ce livre a été écrit par John Ralston Saul. M. Saul écrit:

Cette absence de mécanismes intellectuels pour remettre en question nos propres actions devient claire lorsque l'expression de tout doute non structuré, par exemple, concernant l'exportation d'armes à des ennemis éventuels ou la perte du pouvoir des actionnaires en faveur des gestionnaires ou la perte du pouvoir parlementaire en faveur de l'exécutif est automatiquement catégorisée comme étant naïve ou idéaliste ou mauvaise ou pour l'économie ou simplement mauvaise pour les emplois, et si nous tentons d'utiliser un langage sensé pour aborder ces problèmes, on se heurte immédiatement aux structures des arguments officiels qui accompagnent les idéologies modernes officielles. Des arguments aussi stériles que le manque de pertinence de ces idéologies.

Notre société n'a aucune méthode d'autocritique sérieuse pour la simple raison que c'est maintenant un système d'autojustification qui génère sa propre logique.

Devco le fait toutes les semaines. Chaque fois que cela se produit, cela devient un cas de force majeure, peu importe que nous l'ayons prévu, que les employés l'aient prévu, que Devco l'ait projeté ou que Devco l'ait prévu. Si quelque chose ne va pas, ce n'est jamais la faute de la direction, car elle justifie son propre système. Nous disons que cela n'est pas correct et que c'est un problème grave au sein de la Société de développement du Cap-Breton.

Je vais maintenant commencer mon exposé. J'aimerais vous parler de la mine de Donkin, du marché de l'exportation et de la direction de la Société de développement du Cap-Breton. Ce qui est encore plus important, c'est que j'aimerais vous parler de l'actif le plus important de la société, c'est-à-dire les employés de la Société de développement du Cap-Breton. Je ne veux pas parler ici des membres des United Mineworkers of America; je veux parler de tous les employés syndiqués et non syndiqués qui travaillent pour cette société, à l'exception de quelques employés de la direction.

J'ai mentionné le fait que nous avions peut-être 15 différents énoncés de mission. Nous avons sans doute été restructurés plus souvent que toute autre organisation au Canada, sauf le gouvernement. Cela ne semble jamais fonctionner. Dans chaque rapport annuel, on nous dit que nous perdons de l'argent. Une année, il s'agit d'un cas de force majeure; l'année suivante, de l'amortissement; l'année d'ensuite d'une réduction de 207 millions de dollars de la valeur comptable. Selon le rapport annuel de Devco, nous avons perdu 207 millions de dollars. En 1996, il y a eu une diminution des recettes de 188 millions de dollars, ce qui fait qu'elles n'ont jamais été aussi peu élevées au cours des 12 dernières années. Je crois que ce chiffre est exact.

On nous a dit que nous devions coopérer. On nous a dit que nous devions accepter le changement pour être concurrentiels. On nous dit cela depuis 27 ans.

Permettez-moi de passer en revue quelques-unes des choses que les employés de cette société ont faites. En 1970, la productivité, qui est mesurée en tonnes de rendement par quart-homme, était de 2,48 tonnes par homme. En 1992, elle se situait à 11,6 tonnes par homme, ce qui est une amélioration sensationnelle de la productivité. Devco a dit: «Nous perdons toujours de l'argent.»

On nous a dit qu'il fallait augmenter la production, qu'il fallait augmenter le tonnage afin d'utiliser les économies d'échelle pour rendre l'entreprise plus concurrentielle. En 1992, notre production s'établissait à 4,2 millions de tonnes, dont 1,8 million étaient destinées au marché de l'exportation. Devco a dit que nous perdions toujours de l'argent.

Depuis la création de Devco, il y a eu une diminution de plus de 4 000 emplois, et, selon les chiffres les plus récents, Devco comptait 1 811 employés en 1996. On nous a dit que la réduction des effectifs était nécessaire, qu'une restructuration était nécessaire. On nous a dit que cela rendrait la société plus concurrentielle. Mais, encore une fois, on nous dit que Devco perd de l'argent.

On nous a dit que nous devions changer notre technologie pour devenir plus concurrentiels.

On nous a dit que nous devions changer notre technologie pour être plus concurrentiels. Nous avons changé notre technologie. Nous utilisons maintenant la méthode rabattante; nous utilisons maintenant le boulonnage du toit; certaines de nos sections ont maintenant de l'équipement télécommandé. Devinez quoi? Nous ne faisons toujours pas d'argent selon Devco.

On nous a dit que nous devions avoir des installations de lavage pour offrir un produit adapté à notre principal client, la Nova Scotia Power, et parce que le gouvernement fédéral avait approuvé un plan pour Devco selon lequel la société devait se tourner davantage vers le marché de l'exportation et réduire sa dépendance envers un seul client. Cela a été le mandat de Devco au cours des 20 dernières années. On nous a dit de construire de nouvelles installations pour l'exportation. Nous l'avons fait. Devinez quoi? Devco dit que nous ne faisons toujours pas d'argent et que nous devons nous retirer du marché de l'exportation.

Rien de tout cela ne semble logique pour les employés de cette société. Les seules personnes pour lesquelles cela semble être logique sont ceux qui le justifient en disant: «Nous pouvons le faire parce que nous le pouvons.» Voilà leur attitude. Les employés de cette entreprise en ont assez de cette attitude du gouvernement et de la direction.

On nous a dit que des contrats à long terme étaient nécessaires pour la stabilité de la main-d'oeuvre et pour rassurer les clients, que cela réglerait les problèmes de l'entreprise et que tout irait très bien. Chacun de nos syndicats vient tout juste de signer une convention collective à long terme -- tous les syndicats. Selon le rapport le plus récent de Devco pour les neuf derniers mois se terminant le 31 décembre 1996, les prévisions budgétaires ont été dépassées de 24,9 millions de dollars. Cela ne fonctionne toujours pas; ils veulent toujours davantage.

L'an dernier, M. Shannon a dit au comité sénatorial que la société avait besoin d'une plus grande souplesse pour l'ordonnancement du travail, que cela nous rendrait plus concurrentiels et nous assurerait un meilleur avenir. Les mineurs à l'heure actuelle ont des horaires de poste très souples. Certains mineurs produisent du charbon les fins de semaine; certains font des postes de travail de 10 heures; d'autres font des postes de 12 heures. Ils travaillent toujours en système trois-huit, soit le poste de jour, le poste de nuit et un poste en dehors des heures normales de travail. Devinez quoi? La société perd toujours de l'argent.

La Société de développement du Cap-Breton a dit que l'un des éléments clés pour rendre l'entreprise plus concurrentielle et pour améliorer sa situation à l'avenir était de produire davantage de charbon et que, par conséquent, nous devions produire pendant les vacances des mineurs. En 1996, les UMWA ont établi un précédent. Nous avons signé une convention collective dans laquelle nous nous engagions à produire du charbon pendant les vacances des mineurs. Nous avons donné à Devco le droit d'affecter des travailleurs pendant la période des vacances pour que l'entreprise soit plus concurrentielle, pour sauver nos emplois, pour sauver l'entreprise, pour sauver ce qui reste de la base économique de l'île du Cap-Breton. Devinez quoi? Ce n'est toujours pas suffisant. Devco perd toujours de l'argent.

On nous a demandé de faire des coupures. Au cours des 15 dernières années, l'un des principaux problèmes à la Société de développement du Cap-Breton était les taux d'absentéisme et d'accident. Au cours des 12 derniers mois, on a considérablement réduit ces taux -- et vous verrez les chiffres dans les documents que j'ai distribués. Le rapport trimestriel de Devco se trouve parmi ces documents, et on y indique que les taux d'absentéisme et d'accident ont été considérablement réduits. Nous perdons toujours de l'argent.

Les mineurs du Cap-Breton ont brisé tous les records de Devco -- pour la production du charbon, le lavage du charbon et l'expédition du charbon -- au cours des cinq dernières années, avec un record de production de plus de 22 000 tonnes pour une seule journée et de plus de 80 000 tonnes pour une seule semaine à la mine de Phalen; avec le plus gros chargement d'un navire charbonnier, soit 54 000 tonnes. Nous avons fait tout ce que la société a demandé et davantage. Nous avons fait tout ce que le gouvernement fédéral a demandé et davantage. Cependant, lorsque nous demandons qu'il y ait enquête sur la direction de Devco, on nous dit qu'il ne s'agit pas d'un problème de direction, que nous avons un problème avec les employés ou avec la mine ou avec les marchés. Je dis que tout cela n'est que balivernes.

La coopération, par excellence, messieurs, c'est exactement ce que nous avons donnée à cette société. La coopération a ses limites. À l'heure actuelle, Devco nous demande de coopérer comme des agneaux qu'on amène à l'abattoir, et nous ne le ferons pas. Nous allons nous battre publiquement contre cela, si nous le pouvons. Nous ne savons pas s'il nous faudra descendre dans la rue, mais nous le ferons si cela est nécessaire. La Société de développement du Cap-Breton a tout à fait tort sur cette question, et l'orientation que le gouvernement fédéral a donnée à Devco et qui a été approuvée par Anne McLellan n'est absolument pas la bonne.

Au cours des derniers mois j'ai reçu des lettres de Mme McLellan dans lesquelles elle dit qu'elle a totalement confiance dans la direction de cette société, qu'elle a entièrement confiance dans la capacité de M. Shannon de diriger cette société, qu'elle a totalement confiance en George White. Cette entreprise se dirige vers un mur de briques, et c'est Joe Shannon, avec son plan, qui l'a mise sur cette voie. C'est ainsi que les employés de l'entreprise voient la situation, et ils sont quelque peu nerveux.

Mme McLellan a refusé de se rendre au Cap-Breton pour constater de première main les problèmes que connaît la société. Elle dit que M. Shannon est tout à fait capable de s'occuper de la situation.

Il semble que Mme McLellan se désintéresse tout à fait de la Société de développement du Cap-Breton, contrairement aux anciens ministres qui étaient responsables de cette société. Je ne sais pas si elle se trouve dans une situation de conflit d'intérêts, et je ne ferai pas cette accusation. Cependant, il y a dans la circonscription de Mme McLellan en Alberta plusieurs mines de charbon qui font directement concurrence à la Société de développement du Cap-Breton sur le marché de l'exportation.

La deuxième chose dont je veux parler, ce sont les déclarations publiques de M. Shannon.

En 1985, M. Shannon a répondu à des questions de conflits d'intérêts concernant une affaire de camionnage. Soit dit en passant, notre syndicat appuie l'Association internationale des machinistes, qui propose qu'il y ait une ligne ferroviaire jusqu'à la mine de charbon de Donkin, si jamais cette mine est ouverte, car il s'agit de la seule façon viable d'expédier le charbon.

M. Shannon a déclaré en 1985 que son entreprise, Seabord Trucking, n'avait pas obtenu de contrat de Devco, lorsqu'il a mis sur pied la société, pour transporter le charbon par camion de la mine de Prince à la centrale de Lingan. M. Shannon avait raison; il n'avait pas de contrat à l'époque. Cependant, plusieurs années plus tard, l'entreprise de M. Shannon, Seabord Trucking, a transporté la majeure partie du charbon de la Société de développement du Cap-Breton de la mine de Prince jusqu'à la centrale de Lingan. Le Cape Breton Post du 15 novembre 1984 en faisait état. Aujourd'hui, en 1997, M. Shannon, à titre de président du conseil d'administration et d'ancien président par intérim de la Société de développement du Cap-Breton, est toujours propriétaire de cette entreprise, qui soumissionne toujours pour obtenir des contrats, et je crois comprendre que Seabord Trucking détient toujours la majeure partie des contrats pour transporter par camion le charbon de Devco.

Selon le Halifax Herald du 2 avril 1985, M. Shannon aurait dit:

La division du charbon de Devco s'efforcera de devenir une entreprise crédible en améliorant son rendement financier, en augmentant la production, en établissant un système d'imputabilité de la gestion et en restaurant la confiance des employés du gouvernement, de la collectivité et du grand public.

M. Shannon nous a dit en 1985 qu'ils allaient dans la bonne direction. Il dit la même chose aujourd'hui. Il a dit la même chose en 1995. Il a dit la même chose en 1996. Lorsque M. Shannon a comparu devant le comité en 1985, il a dit que c'était la bonne direction. Dans le rapport annuel de 1985 de la Société de développement du Cap-Breton, M. Shannon parle d'une nouvelle direction.

L'année avant que M. Shannon se joigne à la société, Devco a enregistré une perte de 49 millions de dollars. Pendant la brève période au cours de laquelle M. Shannon était là, cette perte de 49 millions de dollars s'est transformée en un profit de 9,7 millions de dollars en 1985. Les hommes politiques locaux, M. Dingwall et M. Russell MacLellan, ont publiquement mis en doute la réalité de ces chiffres. Les employés de la société les ont également mis en doute. Six jours après que M. Shannon eut annoncé le profit de 9,7 millions de dollars, il a quitté son poste, et le Cape Breton Post annonçait que Devco projetait une perte de 21 millions de dollars pour l'année suivante.

En une année, Devco est passée d'une perte de 49 millions de dollars à un profit de 9,7 millions de dollars pour revenir à une perte de 21 millions de dollars, et, encore une fois, tout cela est du domaine public. Anne McLellan nous demande d'avoir confiance dans ce genre de comptabilité. J'ai bien peur que cela ne soit pas possible.

En 1995, Joe Shannon a dit que les profits de Devco et ses prévisions budgétaires pour l'année courante selon l'ancienne direction n'étaient que -- et vous excuserez mon langage, mais je vais citer M. Shannon -- «foutaises». Il a dit qu'on avait tout à fait perdu confiance dans le processus budgétaire et que le profit de 13 millions de dollars avait été réalisé parce qu'ils avaient sous-utilisé le budget de mise en valeur. N'oubliez pas cela lorsque nous parlerons de mise en valeur plus tard. C'est ce que l'on dit dans le Halifax Chronicle-Herald et dans le Cape Breton Post du 13 octobre 1995.

Lors d'une réunion la même semaine avec le bureau du district 26, M. Shannon nous a dit qu'il ne serait pas surpris que des gens aillent en prison pour ces questions. Je crois que quelqu'un l'a mentionné lors des dernières audiences du comité. Lors d'une annonce subséquente du Bureau du vérificateur général, on disait que M. Shannon avait peut-être exagéré lorsqu'il parlait du rendement de l'ancienne direction de Devco.

J'aimerais maintenant vous présenter quelques transparents; ensuite je parlerai de la mine de Donkin et du marché d'exportation et de l'importance de ces deux questions.

Notre philosophie est très simple. Nous avons entendu les énoncés de mission de tous ceux qui ont été à la direction de la Société de développement du Cap-Breton, de sorte que nous avons nous-mêmes préparé notre propre énoncé de mission. Nous voulons remettre le Cap-Breton au travail et nous pensons que cette société d'État, Devco, a un rôle important à jouer, ainsi que la mine de Donkin. Cette entreprise doit s'efforcer de devenir honnête et imputable. Cela n'a jamais été le cas, jamais. Nous voulons également nous efforcer d'ouvrir la mine de Donkin. C'est un simple énoncé de mission, et nous pensons qu'il est tout à fait réalisable.

L'an dernier, lors des audiences du comité, M. Shannon a présenté un tableau sur lequel il y avait une ligne rouge et une ligne noire. La ligne noire représentait les prévisions budgétaires, et la ligne rouge représentait le rendement réel. M. Shannon a dit, et je cite directement le procès-verbal du comité:

Lorsqu'ils parlaient de mètres, ils étaient au-dessous des prévisions budgétaires, et lorsqu'ils parlaient de dépenser de l'argent, ils dépassaient les prévisions budgétaires -- soit l'opposé de ce que cela aurait dû être.

Devco à l'heure actuelle est au-dessous des prévisions budgétaires pour la mise en valeur et pour la production, mais pour ce qui est des coûts d'exploitation a dépassé son budget de 30 p. 100. Les coûts d'exploitation, selon le rapport trimestriel de Devco, sont 24,9 millions de dollars au-dessus des prévisions budgétaires. Je trouve que cela n'a aucun sens. Lorsqu'on est au-dessous des prévisions budgétaires pour la mise en valeur et pour la production, comment peut-on en même temps dépasser les prévisions budgétaires pour les coûts d'exploitation? Cela est tout à fait contraire à ce qu'a dit M. Shannon la dernière fois.

M. Shannon a dit que le dépassement de 960 000 $ en heures supplémentaires versés aux mineurs au cours de la dernière année, c'est-à-dire en 1995, je crois, était un problème important qu'il fallait régler, et que c'était un problème de gestion. Il a dit que c'était un problème de gestion qu'il fallait maîtriser -- et cela a été mentionné dans le Cape Breton Post et le Halifax Chronicle-Herald du 1er septembre 1995.

Le rapport trimestriel le plus récent pour les neuf mois se terminant le 31 décembre 1996 indique une augmentation de 3,1 p. 100 des heures supplémentaires à la mine de Prince et une augmentation de 3,6 p. 100 à la mine de Phalen par rapport aux prévisions budgétaires de M. Shannon. Nous sommes d'avis que M. Shannon a licencié trop d'employés.

En ce qui a trait à la production et à la mise en valeur, en 1985 M. Shannon a déclaré que les directeurs des mines étaient très inquiets du retard qu'avaient pris la production et la mise en valeur au fil des ans, ce qui s'était traduit par des retards, étant donné qu'il n'y avait pas eu de préparation préliminaire de tailles. C'est ce qu'on disait dans le Halifax Chronicle-Herald du 4 avril 1985.

M. Shannon sait fort bien que depuis les 11 ou 12 dernières années la mise en valeur est un élément clé si l'on veut maintenir l'activité minière et les chiffres de production.

En 1996, selon le Halifax Chronicle-Herald du 16 août, M. Shannon aurait dit:

Nous accusons un léger retard de production et un retard important dans la mise en valeur à la mine de Phalen, mais nous corrigerons cela au cours des prochains mois.

M. Shannon, ainsi que les hommes politiques fédéraux locaux, ont été informés que la fermeture de toutes les sections de mise en valeur dans les deux mines causerait des pénuries de charbon en janvier et février 1997. Ce qui s'est produit lorsque les mines de Phalen et de Prince n'ont produit aucun charbon avait été prévu par les United Mineworkers et par bon nombre d'autres employés syndiqués de la Société de développement du Cap-Breton en 1996 et en 1997. Les problèmes de contrôle du toit à la mine de Phalen, qui ont mené à l'une des fermetures de la mine de Phalen, ont été annoncés par Sandra Richardson, porte-parole de Devco. Sandra doit dire ce qu'on lui dit de dire; elle doit mettre ces choses sur papier et les communiquer aux médias. On a dit qu'on avait prévu la situation. Si on l'avait prévue, on aurait dû alors prévoir également le budget nécessaire, et il aurait fallu avoir un plan d'urgence.

Russell MacLellan, député de la région, a assisté l'an dernier à une réunion avec des dirigeants des UMW et la direction des mines de Devco, et les directeurs de la mine de Prince ont été informés que nous allions travailler jour et nuit, que nous avions besoin de personnel supplémentaire dans les sections de mise en valeur, sinon, en janvier et en février, lorsque les réserves de charbon dans la mine no 14 Ouest de Prince seraient épuisées, la mine no 15 Ouest ne serait pas prête à produire du charbon. Nous l'avons prévu l'an dernier pour la mine de Prince; Devco l'a prévu l'an dernier pour la mine de Phalen. Devco a dit qu'il s'agissait d'une fermeture prévue à la mine de Prince. Il ne s'agissait pas d'une fermeture prévue.

Nous leur avons dit l'an dernier que pour accélérer la mise en valeur à la mine de Prince il fallait ajouter des postes de travail et des employés, et la compagnie a refusé. En fait, cela a été une décision de gestion, une erreur de planification, et nous avons payé pour cela cette année, parce qu'il a fallu importer du charbon dans l'île du Cap-Breton. Nous avons perdu 12 millions de dollars à cause d'une erreur de gestion de l'an dernier. La situation avait été prévue.

Les tableaux suivants montrent les lacunes dans la mise en valeur des mines de Phalen et de Prince. Ces chiffres sont tirés directement du rapport trimestriel de Devco, ou du rapport qui est presque annuel à l'heure actuelle. On voit ici les chiffres pour les neuf mois se terminant le 31 décembre 1996, les chiffres les plus récents. Les tonnages de production de Devco ont été de 23 p. 100 moins élevés que prévu; il y a un écart d'environ 530 000 tonnes par rapport à l'objectif fixé pour les neuf mois se terminant le 31 décembre 1996.

En 1985 et en 1996 M. Shannon a souligné l'importance de la mise en valeur et de la planification. La mise en valeur de la mine de Phalen a été de 36 p. 100 inférieure à ce qui avait été prévu. L'an dernier, lorsqu'ils ont licencié 1 200 employés, nous leur avons dit encore une fois: «Vous avez du retard sur le plan de la mise en valeur. Ne licenciez pas 1 200 personnes. Nous ne voulons pas que quiconque soit licencié, mais nous ne voulons surtout pas que les sections de mise en valeur soient fermées.» Nous nous sommes battus avec eux; nous nous sommes disputés avec eux. M. Shannon a dit: «Non, nous devons trouver 10 millions de dollars quelque part.»

Eh bien, son plan nous a fait perdre 12 millions de dollars, et je ne vois pas comment cela pourrait être un gain. Nous avons perdu 12 millions de dollars à cause de décisions de gestion qui ont fait en sorte qu'on a dû importer du charbon et perdre des revenus, et ces revenus sont perdus à tout jamais. Cet argent est allé aux États-Unis; cela ne va aider le Cap-Breton ni le Canada.

Le sénateur Murray: Ils disent qu'ils ont atteint leur objectif à 75 p. 100 pour ce qui est de la mise en valeur de la mine de Phalen, monsieur Drake.

M. Drake: Ces chiffres sont exacts; je les ai vérifiés 20 fois. Ils sont exacts. Ils sont à 36 p. 100 de moins de mètres que prévu.

Le sénateur Murray: La mise en valeur totale. Est-ce que nous parlons de Phalen?

M. Drake: C'est de la mine de Phalen dont il est question.

Le sénateur Murray: Les travaux de mise en valeur de la mine accusent encore un retard par rapport au plan, mais la situation s'est améliorée depuis trois mois, et nous en sommes maintenant à 75 p. 100 de l'objectif. C'est ce qu'on dit ici.

M. Drake: Sauf votre respect, sénateur Murray, il fut un temps où l'on disait aussi que la terre était plate.

Je donne peut-être l'impression d'être cynique et je le suis peut-être. Nous ne cessons de dire la même chose depuis trois ans et demi ou quatre ans, et il semble que votre comité soit notre seul interlocuteur. Vous êtes les seuls à nous avoir écoutés et à avoir fait des recommandations convenables. La plupart de ces recommandations n'ont pas été suivies, et c'est frustrant, parce qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps. Si nous continuons à perdre 20 ou 25 millions de dollars, il ne restera plus un sou de ce prêt du gouvernement. Nous sommes actuellement acculés au mur et nous devons trouver quelqu'un qui transmettra notre message à Ottawa. Il y a des gens dans ce secteur qui ne devraient pas y travailler.

L'exploitation de la mine de Prince accuse un retard de 10 p. 100 en mètres par rapport aux prévisions. Regardez les chiffres qui figurent dans le document de la Devco, sénateur Murray. Au total, on accuse un retard de 2 893 mètres quant à la mise en valeur des mines de Prince et de Phalen.

Le sénateur Murray: Monsieur Drake, ce n'est pas ce qu'indique le rapport de neuf mois, si j'ai bien lu, et vous me reprendrez si je me trompe. Le plan de mise en valeur était de 4 200, et à la fin de décembre on en était à 3 800.

M. Drake: Quelqu'un a-t-il une calculette à portée de la main?

Le sénateur Murray: Eh bien, c'est 3 800 sur 4 200.

M. Drake: Vous avez les deux exemplaires. Regardez au sommaire, à la rubrique «Résumé des activités à la mine de Phalen». On dit bien «Exploitation en mètres: 6 922».

Le sénateur Murray: Oui.

M. Drake: Le plan était de 6 922; la réalité a été de 4 441. Maintenant, tournez la page pour voir ce qui se passe à la mine de Prince: prévisions en mètres, 4 213; exploitation réelle, 3 801. Le total est de 2 893 mètres. C'est une perte de 36 p. 100 à la mine de Phalen et de 10 p. 100 à la mine de Prince, au total. On n'a pas atteint les objectifs d'exploitation.

Quant à la performance industrielle, l'extraction brute est inférieure aux objectifs, et l'écart est de 530 000 tonnes; pour la longueur des galeries, il y a un écart de 2 893 mètres par rapport aux prévisions; les coûts d'exploitation sont de 30 p. 100 plus élevés que l'objectif de 24 000 907 $. Tous ces chiffres sont tirés du rapport de la compagnie.

Au bas, à la rubrique «Production et ventes», vous pouvez voir que le plan était d'ajouter 539 000 tonnes aux stocks, ce qui devait nous mettre à l'abri en cas de pépin.

Après les six premiers mois, le plan de Devco commençait déjà à s'effilocher. La compagnie avait du charbon en stock, et Joe Shannon et George White nous ont dit qu'il était très important de constituer des stocks, que c'était nécessaire. Durant le dernier trimestre, ils ont vendu jusqu'au dernier kilo de charbon qu'ils avaient en stock, pour que les états financiers paraissent mieux. Ils ont vendu 221 000 tonnes de charbon en stock à la Nova Scotia Power pour gonfler les chiffres du dernier trimestre. Il en résulte que l'on n'a pas atteint l'objectif fixé pour les stocks après neuf mois, l'écart étant de 760 000 tonnes.

Vous pouvez vérifier tout ce que je dis aujourd'hui à ce sujet, simplement en consultant le rapport et à l'aide d'une calculette. Il n'y a rien de magique; les chiffres sont là. Ce sont les propres chiffres de Devco. Aucun des chiffres que je viens d'énumérer n'est de moi ou des UMWA.

Le sénateur Murray: Je vais peut-être faire honte aux écoles de New Waterford par mes talents en arithmétique, mais d'après mes chiffres il y a un manque à gagner de 412 mètres à la mine de Prince. J'obtiens ce chiffre en faisant la différence entre 4 213 et 3 801 mètres.

M. Drake: Mais ce chiffre est celui de Prince uniquement; vous devez vous fonder sur l'ensemble. Pour l'ensemble de la société, il y a un écart de près de 2 900 mètres par rapport aux prévisions. Voyez ce qui se passe à la mine de Phalen.

Le sénateur Murray: Ils prétendent qu'ils sont à 75 p. 100.

M. Drake: Le chiffre est de 36 p. 100. Mon frère est professeur de mathématiques. Il enseigne à Glace Bay, et je lui ai demandé de faire ces calculs; ce n'est pas de moi.

Nous avons un problème de gestion. Nous avons toujours eu un problème de gestion. J'ignore comment y remédier. Je ne dis pas qu'il faut congédier une foule de gens, mais il y a des gens dans cette entreprise qui n'ont jamais eu à rendre de comptes. C'est un grave problème. Notre énoncé de mission stipule entre autres choses qu'il faut faire en sorte que les gens rendent compte de leurs actes dans cette entreprise. Si nous avons des comptes à rendre, nous allons le faire.

Je vais aborder brièvement la question du marché d'exportation et ensuite je parlerai de la mine de Donkin, après quoi nous pourrons répondre aux questions.

Pour ce qui est des exportations, dans ses rapports annuels de 1989 et de 1992, Devco a fait les déclarations suivantes:

La stratégie de marketing de Devco...

Cette stratégie a été approuvée par le gouvernement fédéral.

... a permis de diversifier la clientèle, et nous...

c'est-à-dire Devco,

... avons expédié du charbon dans 16 pays.

Voici le passage important.

Nous avons l'intention de déployer des efforts pour bien servir le marché et y connaître une certaine croissance, afin de réduire notre dépendance envers la Nova Scotia Power Corporation, qui est notre principal client au Canada.

Je lis maintenant une autre déclaration tirée du rapport annuel de la Société de développement du Cap-Breton:

Le charbon du Cap-Breton est bien reçu à l'étranger, et l'on continue de trouver de nouveaux clients. Les clients étrangers ont réglé le problème du charbon à haute teneur en soufre en installant des épurateurs thermiques, en appliquant des techniques de désulfurisation, et grâce au mélange de diverses qualités de charbon.

C'est ce que l'on fait à l'installation de lavage de Victoria Junction. Eric Funari vous parlera dans quelques instants de l'importance des installations de lavage qui permettent de maintenir des stocks supplémentaires de charbon; il vous dira à quel point les installations de lavage et d'exportation sont vitales pour cette industrie.

Voici d'autres passages tirés des rapports annuels de 1991 et 1992 de Devco:

Il faut atteindre la compétitivité sur le marché d'exportation. Pour cela, la société doit modifier ses installations de quais pour permettre le chargement de navires de gabarit Panamax. Quand le projet sera terminé, en 1993, il permettra de réduire les dépenses de transport maritime, de conserver les marchés actuels et d'ouvrir de nouveaux débouchés.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi, après avoir cultivé pendant 20 ans les marchés d'exportation, nous leur tournons maintenant le dos. Cela me dépasse.

Le nouveau chargeur de navires de la société est entré en service en septembre 1993, ce qui a été un facteur clé nous permettant d'obtenir des contrats de livraison de charbon thermique à l'exportation et de mieux nous positionner sur le marché. En juin 1994, on a chargé une quantité record de 54 995 tonnes métriques de charbon sur le MV Summerrain, à destination du Brésil.

Nos clients ont été très satisfaits. On a vendu du charbon en Suède, au Danemark, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Japon, au Brésil, en Argentine, en Afrique du Sud, en France, en Grèce, en Italie, au Royaume-Uni, en Corée, au Mexique et dans d'autres pays.

Cet énoncé figure dans le rapport annuel de 1994 de la Société de développement du Cap-Breton. À peine un an plus tard, M. Shannon a signalé à l'occasion des audiences tenues l'année dernière par le comité que nous perdions 20 millions de dollars sur le marché d'exportation. Je n'ai jamais pu obtenir d'explications sur ce chiffre, mais je suppose que je dois le croire parce que ce type est riche et célèbre. Je ne sais pas trop. J'ai de sérieuses réserves au sujet de ce chiffre, tout comme au sujet de beaucoup d'autres chiffres que l'on lance à gauche et à droite.

Nous avons actuellement un client, et ils vous diront qu'ils prévoient 10 navires cette année. Ils diront qu'ils prévoient vendre 700 000 tonnes de charbon à l'exportation. C'est ce qu'ils ont dit l'année dernière, mais cela ne s'est pas matérialisé. Ce qui se passe, en fait, c'est que l'on fait de longue date des efforts pour éliminer le marché d'exportation, pour se débarrasser de nos installations de surface et pour nous livrer pieds et poings liés à un seul et unique client, la Nova Scotia Power. Nous croyons que c'est une erreur monumentale pour n'importe quelle entreprise. Nous n'arrivons pas à comprendre comment Anne McLellan, la représentante fédérale pour la Société de développement du Cap-Breton, peut justifier pareille chose, mais c'est ce qu'elle a fait.

La Nova Scotia Power a pris des mesures pour utiliser des combustibles de remplacement. Elle fait actuellement des forages dans le bassin gazier du comté de Cumberland pour y trouver du méthane. Elle fait appel aux services d'une compagnie qui s'appelle REI, qui est liée à une compagnie américaine appelée Amvest. C'est une possibilité en fait de combustible de remplacement. On a aussi importé du charbon au Cap-Breton, en provenance des États-Unis d'Amérique; quiconque habite sur l'île du Cap-Breton ne peut que trouver cela épouvantable. Je suis certain que M. Buchanan partage ce sentiment d'horreur. Ils ont déclaré publiquement qu'ils sont disposés à acheter 90 000 millions de BTU de gaz naturel pour leurs centrales thermiques.

La centrale de Tufts Cove fonctionne maintenant au pétrole. Cela remplacera environ 400 000 tonnes de charbon. Ils ont deux autres centrales, en plus de celle de Lingan et d'une autre à Point Aconi. Quatre-vingt-dix mille millions de BTU de gaz naturel, c'est l'équivalent de 1,2 million de tonnes de charbon. Il faut retrancher de ce chiffre 400 000 tonnes parce que la centrale de Tufts Cove fonctionne maintenant au pétrole. Si la Nova Scotia Power remplit sa promesse d'acheter 17 p. 100 du gaz naturel de l'île de Sable, cela remplacera encore 800 000 tonnes de charbon. Ils sont en train de se détourner du charbon de la Société de développement du Cap-Breton, qui est leur principal fournisseur.

Est-ce raisonnable? Est-ce logique? Est-il défendable que la Société de développement du Cap-Breton n'ait plus qu'un seul client, la Nova Scotia Power? À ces questions, nous répondons non. Nous disons que c'est suicidaire pour cette entreprise. En 1995, la Nova Scotia Power, qui fait preuve d'agressivité en affaires, a arbitrairement réduit le prix contractuel de notre charbon et nous a dit qu'elle brisait le contrat. Soit dit en passant, M. Shannon a dit que dans trois ans la réduction de 18 p. 100 sera pleinement réalisée. J'ai obtenu copie du rapport annuel de la Nova Scotia Power, et l'on y indique qu'en janvier 1996 cette réduction de 18 p. 100 était déjà pleinement réalisée. Cela représente pour nous une perte de 30 millions de dollars par année.

Les preuves s'accumulent qu'il est nécessaire de se tourner vers les marchés d'exportation et de diversifier notre clientèle, mais il y a probablement deux, trois, peut-être quatre personnes tout au plus qui disent non. Nous n'acceptons pas cela. Il y a environ cinq semaines, un monsieur qui a environ 70 ans est venu me voir à mon bureau pour m'entretenir de l'importance d'avoir plus d'un client. C'est un mineur. À son avis, si M. Shannon tient tellement à se retirer du marché d'exportation, c'est uniquement parce qu'il est impossible d'expédier du charbon outre-mer par camion. Il m'a semblé que c'était là une observation assez judicieuse.

Pour ce qui est de la mine de Donkin, on trouve dans le rapport intitulé «Énergie, un plan pour la Nouvelle-Écosse», l'énoncé suivant:

L'industrie du charbonnage aura d'importantes répercussions positives pour l'emploi au Cap-Breton et pour l'ensemble de l'économie de la Nouvelle-Écosse.

En 1995, Devco a laissé entendre que l'industrie du charbonnage injectait environ 1 milliard de dollars par année dans l'économie de la Nouvelle-Écosse sous forme d'emplois directs et indirects et par d'autres retombées.

Le rapport ajoute que la mine de Donkin représentait le potentiel de développement le plus important. C'était en 1979. Le conseil de planification de l'énergie comptait notamment parmi ses membres un ingénieur très réputé, M. William S. Shaw, qui a un doctorat en génie. Il y avait par ailleurs au conseil de planification de l'énergie quelqu'un qui se faisait le chantre de l'avenir radieux de la mine de Donkin, à savoir le président de Novaco, M. Joseph P. Shannon.

Cette même année, en 1979, la firme Montreal Engineering, dans son rapport sur la première étude, probablement l'étude de 400 millions de dollars, a déclaré ceci:

Le gisement de Donkin ne comporte pas de dislocations importantes. Les risques au gisement de Donkin ne sont pas différents de ceux de tout autre projet typique. Les avantages de l'extraction sélective sont évidents.

La firme Kilborn Engineering a fait une autre étude en 1981 et a conclu que la géologie ne comportait pas de failles importantes.

Il y a là 1,4 milliard de tonnes de charbon commercialisable, et l'exploitation de la mine de Donkin est économiquement faisable.

En 1984, Alan Craven, de la firme Associated Mining Consultants, qui est un ingénieur réputé de l'Alberta, a fait une étude pour la Société de développement du Cap-Breton en supposant un projet de petite envergure faisant appel à de la technologie ancienne. C'était de la technologie viable en 1985. La partie ingénierie du rapport est encore valable. Pour ce projet, on envisageait d'utiliser la méthode d'exploitation par chambres et piliers, avec possibilité de passer dans l'avenir à l'exploitation par longue taille. Les conclusions de cette étude étaient qu'il était possible de se lancer dans une telle opération à très faible coût, de faire de l'argent en vendant le charbon ainsi produit et de dépenser ensuite cet argent pour lancer l'exploitation sur une grande échelle. Cela me semble plein de bon sens, et c'est exactement ce que nous avons dit l'année dernière et l'année d'avant dans le plan proposé par les UMW pour la mine de Donkin: allons-y sur une petite échelle et ensuite dépensons une partie de l'argent ainsi réalisé, à l'aide d'un effectif réduit, pour lancer une opération potentiellement plus importante pouvant atteindre 2 millions de tonnes par année.

Je suis heureux que le sénateur Buchanan ait lu cet énoncé tiré du rapport annuel. L'analyse des 2 700 tonnes de charbon extraites de la mine de Donkin-Morien a été particulièrement encourageante. L'échantillon indique que l'extraction sélective, c'est-à-dire laissant une partie du filon de charbon pour constituer le plancher et le plafond de la galerie et extrayant 70 p. 100 du filon de 3,4 mètres, permettrait de réduire le taux de soufre à environ 1 p. 100. Cette déclaration figure dans le rapport annuel de 1985 de la Société de développement du Cap-Breton, et c'est encore une fois Joseph P. Shannon, qui était alors président du conseil et président par intérim, qui signait ce document traitant de la qualité du charbon de Donkin.

Je suis moi-même mineur. Mon père, qui est ici présent aujourd'hui, a été mineur pendant plus de 40 ans. Nous discutons à la table de cuisine et nous nous entendons sur le bon sens. Or, le sens commun nous dit que nous extrayons du charbon au Cap-Breton depuis 1685, depuis plus de 300 ans. Tout le charbon que nous avons extrait a été vendu, jusqu'au dernier morceau, et nous avons exploité les mêmes filons qui existent dans le gisement de Donkin. C'est le même bassin charbonnier, le bassin de Sydney, et le simple bon sens nous dit que la mine de Donkin est tout aussi viable que les 110 autres mines de charbon que nous avons exploitées au Cap-Breton.

Quiconque vient nous dire que la mine de Donkin n'est pas rentable nous raconte des histoires. La mine de Donkin est un projet viable, tout aussi viable que l'était la mine de Phalen. On nous a dit bien souvent que le charbon de Caledonia était de mauvaise qualité ou bien que le charbon d'une éventuelle mine de Phalen était de mauvaise qualité, mais quand le gouvernement a finalement trouvé le courage politique d'ouvrir la mine, voilà que miraculeusement ce charbon était de bonne qualité et tout à fait vendable.

Je crois qu'il faut poursuivre le projet de la mine de Donkin. La semaine dernière encore, j'ai téléphoné à Alan Craven, en Alberta, qui est à l'origine de ce rapport. Il était également membre de l'équipe qui s'est penchée sur la question en 1984. Il a dit que nous avions des installations en surface, que la préparation en surface a été faite. Il a fait remarquer que nous avons déjà les deux galeries qui vont jusqu'au filon de charbon et les deux entrées de galerie, ce qui représente des dépenses en immobilisations considérables; que nous avons un bloc de charbon de bonne qualité, mais qu'il faut l'extraire de façon sélective; et qu'il faut trouver des marchés pour l'écouler. Il a dit aussi qu'il faudrait ouvrir la mine de Donkin.

Pour faire une analogie, disons que la mine de Donkin est un verre d'eau. Les rares personnes qui disent non à la mine de Donkin voient un verre à moitié vide; nous, nous trouvons qu'il est à moitié plein. Nous disons: nous savons ce que nous avons en main. Prenons ce que nous avons et tirons-en le plus grand profit possible. Nous affirmons que nous pouvons le faire.

Nous sommes fatigués de nous battre et d'argumenter avec des gens qui n'ont aucun élément de preuve, aucun fait empirique à l'appui de ce qu'ils disent quand ils affirment que la mine de Donkin n'est pas viable.

Nous demandons au comité de transmettre notre message à Ottawa. Nous avons collaboré dans toute la mesure du possible. Nous continuerons de collaborer si la direction et le gouvernement veulent bien collaborer avec nous. Nous n'avons pas de problèmes avec les cadres moyens. Nous nous entendons très bien.

Nous avons signé des conventions collectives à long terme. Nous avons laissé tomber nos griefs, qui en sont au niveau le plus bas jamais vu à la société. Nous avons laissé tomber les griefs en arbitrage; il n'y en a presque plus. Nous nous entendons bien la plupart du temps. Il y a des problèmes, mais ce sont des points dont il faut s'occuper régulièrement.

Quand quelqu'un nous lance un ultimatum et quand cet ultimatum oriente l'entreprise dans la mauvaise direction, nous devons nous y opposer. Nous sommes des habitants du Cap-Breton; nous sommes des mineurs; nous sommes membres des United Mineworkers of America et nous ne reculerons pas.

Le sénateur Murray: Dans quelques semaines, nous aurons terminé la première année du plan quinquennal. D'ici à la fin de la semaine, je crois que nous aurons l'occasion de nous entretenir avec les dirigeants de Devco pour savoir exactement quel est le retard par rapport au plan pour l'année. Nous en sommes presque à la fin de l'année financière. Le plan prévoyait la production de 2,5 millions de tonnes de charbon au cours de l'année se terminant le 31 mars 1997. Au cours des neuf premiers mois, on a produit environ 1,7 million de tonnes. D'après les chiffres que j'ai ici, cela donne 688 000 tonnes à Prince et 1,1 million de tonnes à Phalen. Pour atteindre les objectifs de production, la société devait donc produire 800 000 tonnes en janvier, février et mars. On aura donc un retard du côté de la production et du développement et à divers autres égards.

Je crois que l'année prochaine l'objectif est de produire 3,2 millions de tonnes, et, comme vous l'avez dit, on prévoit exporter entre 700 000 et 1 million de tonnes par année.

Je vais essayer d'aborder chaque point que vous avez traité cet après-midi. Il y a de nombreux éléments, et ce sera utile quand nous interrogerons les dirigeants plus tard cette semaine. Ne vous inquiétez pas du fait que vous avez comparu en premier. Les membres du comité aborderont avec les dirigeants bon nombre des points que vous avez soulevés et nous les presserons de répondre.

Pendant que j'écoutais votre exposé, une question m'est venue à l'esprit. Nous en sommes à la fin de la première année d'un plan quinquennal. Êtes-vous toujours contre ce plan, ou bien soutenez-vous qu'à cause de la mauvaise gestion ou d'une raison quelconque les objectifs du plan pour la première année n'ont pas été atteints?

M. Drake: Nous ne combattons pas le plan. Nous combattons les planificateurs depuis les débuts du plan. Le plan était mauvais dès le départ.

Le sénateur Murray: Il y a deux plans.

M. Drake: Je le sais.

Le sénateur Murray: Le plan qui a été approuvé en fin de compte, en termes de résultats, de ventes, d'effectifs, et cetera, est dans l'ensemble un meilleur plan que le premier ne l'était.

M. Drake: C'est un meilleur plan; il n'y a aucun doute là-dessus.

Le sénateur Murray: Soutenez-vous qu'il n'est pas réalisable?

M. Drake: Nous ne disons pas qu'il n'est pas réalisable. Nous estimons que, si on leur donne les bons outils, les mineurs du Cap-Breton peuvent presque tout faire dans une mine de charbon. Malheureusement, Devco ne nous donne pas les bons outils. On ne peut pas construire une maison avec un marteau brisé et un clou tout croche. C'est pourtant ce que Devco nous donne depuis longtemps, et c'est encore le cas.

Dans ce secteur, la clé, c'est le développement, sénateur Murray. Depuis trois ans, nous pressons les dirigeants, autant les précédents que les actuels, de maintenir les services de développement. Nous savons qu'il nous faut un certain niveau de production de charbon. Quand les syndicats ont restructuré le système des primes, on a craint que la productivité ne baisse. Je crois que M. MacLean peut vérifier que nous avons déjà obtenu 50 000 tonnes en une semaine ce mois-ci.

M. Allie MacLean, présidente de Phalen, section locale 2501, United Mineworkers of America: Il y a deux semaines, lors d'un quart de nuit du jeudi et d'un quart de nuit du vendredi, nous avons extrait plus d'un mille de charbon par quart de huit heures.

M. Drake: La mine de Prince est essentiellement la même chose, mais sur une plus petite échelle, car c'est une plus petite mine. Nous faisons ce qu'il faut faire pour que ce plan fonctionne.

Le sénateur Graham: En termes relatifs, qu'est-ce que cela veut dire?

M. Drake: Quand nous disons que nous faisons ce que nous pouvons?

Le sénateur Graham: Oui. Vous dites que la semaine dernière vous avez fait un mille de charbon. En comparaison de quoi?

M. MacLean: Comme Steve l'a dit il y a quelques minutes, les gens craignaient, quand on a supprimé le système de prime, que notre productivité ne soit peut-être pas aussi bonne qu'avant. Or, les hommes ont donné une plus grande productivité.

M. Drake: Je ne suis pas certain qu'on ait répondu à la question. Ce plan comporte certains objectifs. Je ne sais pas si les objectifs étaient irréalistes, ou bien si les dirigeants ont simplement négligé d'écouter ce que les mineurs avaient à dire en vue de rendre ce plan réalisable. S'il est viable, nous pouvons faire en sorte qu'il fonctionne. S'il n'est pas viable, les dirigeants doivent reculer et reconnaître qu'ils ont commis une erreur.

Le sénateur Murray: De quels objectifs parlez-vous? On est à court sur le plan du développement. Quel est votre argument?

M. Drake: Je croyais avoir énoncé clairement mon argument au sujet de la perte de production. Il faut faire du développement pour trouver un nouveau bloc de charbon. L'année dernière, quand on a fait les travaux préparatoires avec Steve Farrell, la municipalité régionale du Cap-Breton avait fixé comme objectif pour la mine de Phalen de mettre en exploitation la taille 3 Centre avant le 1er, le 2 ou le 3 janvier 1997, étant donné que la 7 Est pouvait se rompre d'un moment à l'autre et que nous n'aurions plus alors aucune production de charbon.

Vers la fin de 1995 et au début de 1996, nous avons rencontré la direction de la mine de Prince et lui avons dit que si l'on continuait de produire comme on produisait à la taille 14 Ouest de Prince, nous aurions épuisé le bloc de charbon en janvier ou février 1997. Cela voulait dire qu'il fallait affecter plus de mineurs aux sections d'aménagement de la mine de Prince, afin que la 15 Ouest soit prête, et ainsi, au début de la prochaine année, en janvier ou en février, la 15 Ouest serait prête, et nous n'aurions pas de pertes de production. On s'attendait à ce que les deux exploitations aient des manques à gagner au niveau de la production en janvier ou en février 1997. La direction n'a pas tenu compte des recommandations des syndicats, et, devinez quoi? On s'est mis à importer du charbon en janvier et en février 1997.

Nous disons que si l'on ne nous donne pas les outils qu'il nous faut pour que leur plan tienne debout leur plan ne tiendra pas debout; c'est impossible. Nous disons qu'ils n'atteindront pas leurs objectifs. Vous pouvez voir dans leur rapport un trou de 24,9 millions de dollars dans le budget.

Si tout va comme prévu pour ce trimestre-ci, du 1er janvier au 31 mars, on va produire une quantité record de charbon. Cette quantité record de charbon pour ce trimestre-ci sera étalée sur toute l'année afin que cela paraisse aussi bien que possible. On pousse nos gars aux deux mines, Prince et Phalen, le plus possible pour qu'ils sortent le plus de charbon possible. Il faut que la situation paraisse beaucoup mieux, parce que si on va à Ottawa avec un trou de 24,9 millions de dollars dans notre budget ça va aller mal. C'est ce qui se fait maintenant. Nous savons que cette industrie doit survivre, mais la situation sur neuf mois a l'air épouvantable.

Le sénateur Graham: Bien sûr, la question est celle-ci: si vous arrivez à faire cela pendant ce trimestre-ci, pourquoi ne pas en faire autant sur les quatre trimestres?

M. Drake: Ça, c'est la question de 60 000 $. Nous avons besoin d'une période d'aménagement. On a entendu trop souvent que la direction de la société fait un beau travail. La direction de la société ne fait pas un beau travail... et je ne parle pas des cadres intermédiaires; je parle de la haute direction.

Le sénateur Murray: Pour en revenir à l'aménagement, au cours de la période de neuf fois à la mine de Prince, le plan prévoyait 4 200 mètres, et en fait c'est 3 800. Il vous manque 400 mètres. À la mine de Phalen, il s'agissait de couvrir 6 922 mètres dans la période de neuf mois, et en fait vous en avez 4 441. Est-ce que le plan est déficient? Dites-vous qu'il aurait fallu planifier davantage d'aménagement?

M. MacLean: Oui.

M. Brendon McIntyre, membre du conseil de sous-district, United Mineworkers of America: Le plan lui-même pose un problème. Nous avions un plan quinquennal, et nous avons été consternés lorsqu'on a vu arriver le charbon américain ici. C'est pourquoi nous sommes sceptiques au sujet de ce second plan quinquennal. Est-ce que c'est un plan pour la frime, juste pour jeter 80 millions de dollars par la fenêtre et pour que la ministre McLellan puisse dire à la fin du plan quinquennal: «Eh bien, au moins on a essayé?»

C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. C'est pour qu'on arrête de gaspiller de l'argent. C'est pour qu'on cesse ces projections qui sont toujours trop basses à notre avis.

Une mine de charbon doit toujours avoir deux tailles. On produisait toujours un million de tonnes de charbon pour l'exportation, en plus de notre client habituel, la NSPC. Aujourd'hui, la NSPC est notre seul client, et voilà pourquoi je me méfie de ce plan. Si ce n'est que de la frime et qu'on gaspille de l'argent pour M. Shannon et son entourage, et pour qu'au bout du compte la ministre McLellan et ses gens puissent dire: «Eh bien, à tout le moins on a essayé», ça ne sert à rien. Voilà pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.

Le sénateur MacDonald: Comment s'est déroulée la rencontre de novembre ou octobre dernier où vous avez prédit que le manque d'aménagement finirait par causer l'effondrement de la taille est?

M. McIntyre: En janvier, lorsque la compagnie a réuni tous les syndicats, tous les employés, on s'est rencontré à l'immeuble GMB, au cinquième étage, et elle nous a sorti les chiffres qu'il lui fallait pour nous assommer. Elle prédisait le licenciement de 1 200 employés, et elle nous demandait à tous de coopérer pour qu'elle puisse atteindre son objectif de dix millions de dollars.

Je ne pense pas qu'il y ait eu un seul employé de la Société de développement du Cap-Breton qui se soit opposé à des compressions pour que la mine survive, mais nous avons recommandé que l'aménagement de ces deux mines de charbon se poursuive. Cela voulait dire que pour moi, le syndicaliste, j'allais dire: «D'accord, au lieu de 10 semaines, je vais en prendre 15. Je vais prendre les cinq de plus, et comme ça X gars pourront continuer et relancer l'aménagement.» La direction n'a rien voulu savoir.

Le sénateur MacDonald: Elle s'opposait principalement au recrutement du personnel supplémentaire qu'il fallait?

M. McIntyre: Elle voulait maintenir l'exploitation au minimum, rien que pour atteindre son objectif de dix millions de dollars pour la frime, et ensuite, neuf mois après cela, on est encore deux fois plus dans le trou. En ce qui me concerne, c'est un mauvais calcul.

M. Eric Funari, président, V.J. Préparation du charbon, section locale 2268, district 26, United Mineworkers of America: Si vous avez une entreprise dans laquelle les contribuables ont investi beaucoup d'argent, et que vous produisez beaucoup de charbon et que vous avez des débouchés pour ce charbon, et que vous comptez seulement sur une taille pour produire suffisamment pour rembourser votre investissement et que vous avez du mal avec cette taille, est-ce que ce n'est pas une bonne idée que d'avoir une source de production d'appoint, surtout s'il s'agit d'une société qui vaut plusieurs millions de dollars?

MM. Shannon et White ont prédit qu'on aurait de la difficulté avec cette taille. Dire qu'ils sont responsables de l'argent des contribuables et qu'ils ne veulent pas exploiter une nouvelle taille, s'il doit y avoir un autre effondrement comme celui qui a eu lieu il y a quelques mois, tout ça, ça ne fait que tuer la compagnie.

Le sénateur MacDonald: J'avais cru comprendre que les relations patronales-syndicales s'étaient améliorées à tel point qu'il y avait au moins deux rencontres par année de prévues. Pourquoi sont-ils aussi imprévoyants? Pourquoi ont-ils du mal à vous comprendre quand vous leur dites: «Monsieur White, à moins que vous ne fassiez ceci ou cela, vous allez perdre la taille et vous serez probablement obligés d'importer plus de 100 000 tonnes de charbon américain?»

M. Drake: Nous avons dit cela souvent.

Tout d'abord, sénateur, vous vouliez savoir comment s'est déroulée la rencontre de novembre. C'était une bonne rencontre. Nous avons rencontré Russell MacLellan, le député fédéral de la région. On est allé à la mine de Prince et on s'est rendu sous terre, puis on est remonté et on a rencontré la direction. La rencontre s'est bien passée. Russell avait des questions à poser, et on y a répondu.

Tout ce qu'on a dit aujourd'hui au sujet de la nécessité de l'aménagement à la mine de Prince a été dit à cette rencontre-là, et Freddie Howard était d'accord pour dire qu'on avait besoin d'aménagement; autrement, nous n'aurions plus de mine. Ce qui s'est passé après cela, je n'en ai pas la moindre idée.

Russell MacLellan se préoccupait beaucoup à ce moment-là de l'aménagement de la mine de Prince. À cette rencontre -- et j'aimerais que Tommy Gillis, le président de notre section locale à la mine de Prince, soit ici aujourd'hui, parce qu'il pourrait confirmer ce que je viens de dire -- nous lui avons dit qu'en janvier ou février 1997 la mine de Prince ne produirait plus de charbon parce que nous n'aurions pas de taille prête pour l'exploitation à cause du manque d'intérêt de la société pour l'aménagement.

Il y a quelques semaines, la Société de développement du Cap-Breton a déclaré au Cape Breton Post que la fermeture de la mine de Prince était une fermeture programmée. Quand on a une entreprise qui vaut 150 millions de dollars comme la mine de Prince, on ne programme pas sa fermeture pour dix semaines. Quelle sorte de programmation est-ce là? On ne fait pas de choses pareilles.

Mais la rencontre s'est très bien déroulée en général. Cependant, après la rencontre, la société a mis à pied 1 200 personnes quand même, et ça venait de s'éteindre.

Le sénateur Murray: Pour en revenir à la Phalen, je vais vous citer ce que vous nous avez dit lorsque vous avez témoigné devant le comité en mai dernier. Vous avez dit:

N'importe quel mineur qui travaille à la houillère Phalen, vous dira que la base d'exploitation de cette houillère, varie d'une semaine à l'autre. Nous avons eu trop de problèmes géotechniques. Trois mines sont inondées au-dessus de la houillère Phalen. Il y a des éboulements. Les problèmes ne se comptent plus à cette houillère. Nos mineurs sont prêts à chercher des solutions. Mais si nous mettons tous nos oeufs dans le panier de la houillère Phalen et qu'un pépin survienne la semaine prochaine, le mois prochain ou l'an prochain, nous serons vraiment dans le pétrin. Nous ne pourrons pas approvisionner notre principal client, la Nova Scotia Power, ni les marchés d'exportation.

Donc quelque chose s'est passé. Vous avez dit que plusieurs choses s'étaient passées. Est-ce qu'on aurait pu d'une manière quelconque éviter ces problèmes géotechniques, les inondations et tout le reste?

M. MacLean: Pour ce qui est des inondations, l'eau pénètre à la taille no 7 est. Lorsqu'un toit s'effondre, l'eau coule. Nous disons que le toit n'aurait jamais dû s'effondrer. Nos hommes sont de bons mineurs. Ils le prouvent tous les jours. Chaque équipe extrait des tonnes de charbon. Il faut qu'on laisse nos hommes faire ce qu'ils savent faire le mieux, à savoir tailler le charbon, et c'est ce qu'ils feront.

On écoute nos hommes depuis un mois et demi, et ceux-ci obtiennent d'excellents résultats. La production de charbon est élevée.

Le sénateur Murray: Qu'est-ce qu'on peut faire pour éviter l'effondrement des toits?

M. MacLean: Qu'on écoute les hommes! Qu'on taille le charbon pendant les fins de semaine; qu'on n'arrête pas l'exploitation de la taille! La direction a fait cesser l'exploitation de la taille. Si la taille reste droite, il n'y aura pas d'effondrement.

Nous avons vécu des moments difficiles au cours de la dernière semaine et demie, et nous avons avec nous des arpenteurs qui le confirmeront. Nous avons connu encore les mêmes conditions, mais, parce que la taille était droite, parce que le profil était parfait, les hommes ont pu travailler sans qu'il y ait d'effondrement ou de chute d'eau. Il faut qu'on écoute les hommes. La direction écoute les hommes parce qu'on approche de la fin de l'exercice financier.

M. Drake: Le profil de la taille est très important. Il faut que laquelle soit aussi droite que possible. Quand on commence à exploiter une taille qui est un peu croche, on commence à avoir des problèmes de contrôle du toit. N'importe quel mineur vous le dira. Il faut que le profil soit droit.

À plusieurs reprises, à la houillère Phalen tout particulièrement, ça n'a pas été fait. Depuis quelques mois, on a commencé à écouter les mineurs, et on a maintenant régulièrement des arpenteurs dans la mine qui gardent le profil droit. Et ça, c'est une chose qu'on pourrait arranger avec un programme régulier.

Deuxièmement, nous avons une mine qui a été conçue à l'origine pour avoir un front de taille de 600 à 700 pieds. C'était la conception originale de la mine. Quelqu'un, dans sa sagesse, a décidé que, étant donné qu'on a des tailles de 1 000 pieds aux États-Unis, on devrait peut-être en avoir ici des parois de 860 pieds. Selon cette logique, si vous creusez un tunnel de 10 000 pieds à droite et un tunnel de 10 000 pieds à gauche, et que ça coûte 8 millions de dollars par tunnel, ou 16 millions de dollars au total, il faut récupérer cet investissement par l'extraction du bloc de charbon au milieu; et si vous taillez un bloc de charbon plus gros avec les deux mêmes tunnels, ça vous rapporte plus.

Ça semble logique, mais aux États-Unis, les conditions minières ne sont pas les mêmes qu'ici. Nous avons eu des discussions avec la Devco et avec Reggie MacIntyre, le président de l'exploitation à ce moment-là, et lui avons dit que les problèmes à la houillère Phalen, avec les conditions de contrôle du toit à la taille no 6 est, indiquaient qu'il y avait là des dépôts de grès dont on était déjà au courant. Nos géologues sont très bons; ils font bien leur travail. Nous savions que nous avions là de gros dépôts de grès, et nous savions que plus nous irions en profondeur, plus les choses s'aggraveraient. Plus vous allez en profondeur, plus vous avez de couverture, et par conséquent, plus de poids. Nous avons discuté à n'en plus finir.

Nous avons maintenant un front de taille de 650 pieds. On ne peut pas avoir un front de taille de 860 pieds, mais la Devco en a prévu un quand même. Il s'agissait pour elle d'obtenir un meilleur rendement sur votre investissement. La taille no 7 est en est un bel exemple. Il y a là un front de taille de 860 pieds, et c'est trop long. Il y a eu des effondrements de toit à la taille no 7 est.

Le bon sens vous dit que, si vous avez un problème de poids, il faut foncer dans cette direction le plus vite possible de telle sorte que, s'il y a effondrement, l'effondrement est derrière vous, dans les vieux chantiers, derrière votre front de taille. Il n'y a pas de problème si ça se produit là. Avec un front de taille de 860 pieds, il est tout à fait sensé d'y aller plus lentement que si vous aviez un front de taille de 650 pieds, auquel cas, il faut aller vite. Plus le front de taille est court, plus il faut aller vite dans cette direction, et plus vous aurez de poids derrière vous, là où il doit se trouver.

Les problèmes auxquels nous nous heurtons dans la taille no 7, seront pires dans la taille no 8. La Devco, dans sa sagesse -- et George White m'a écrit il y a deux semaines pour confirmer cela -- a décidé que la taille no 8 restera à 860 pieds et que la taille no 9 sera aménagé à 860 pieds. On n'arrive pas à comprendre pourquoi.

Nous allons briser encore tous les records si on nous donne les bons outils. Que l'on écoute les mineurs de charbon! M. MacLean a parfaitement raison. Quand j'ai commencé dans la mine, mon père m'a dit: «Stevie, tu vas réussir si tu écoutes bien les vieux mineurs.» Il avait raison et M. MacLean a raison. La Devco ne nous écoute pas; elle se contente de prendre des décisions arbitraires.

Le sénateur MacDonald: Monsieur McIntyre, le monsieur que vous venez de mentionner est un peu plus qu'un simple cadre intermédiaire.

M. Drake: Il était vice-président à l'exploitation.

Le sénateur Macdonald: Vous dites qu'il était d'accord avec vous?

M. Drake: Non, non, il n'était pas d'accord. Il n'était jamais d'accord avec nous.

M. McIntyre: Lorsque M. MacIntyre était vice-président à l'exploitation, nous avons eu cet éboulement dont nous avons parlé un peu plus tôt, il y a trois ans. Un groupe de gens de notre Comité de la sécurité, qui était formé de cadres et de représentants syndicaux, s'est rendu à l'étranger afin de mieux comprendre comment nous pourrions régler ce problème de la roche friable.

Lorsqu'ils sont revenus, ils ont tenu plusieurs réunions afin de mettre au point des critères de sécurité pour exploiter les zones d'aménagement. Ce n'était rien de nouveau, parce que nous avions eu des conditions semblables à la houillère no 26. Ils ont établi des critères avec lesquels tout le monde était d'accord, sur le nombre de mètres que l'on pouvait aménager en toute sécurité.

Reggie MacIntyre a dit au sujet de la houillère Phalen: «Si je ne peux pas mettre la machine en marche, il n'y aura pas d'aménagement.» L'aménagement a été bloqué à cette houillère pendant deux ans, parce que Reggie MacIntyre voulait qu'on mette en marche une machine, ce qui aurait compromis notre sécurité. Nous lui avons dit: «Toi, tu actionnes la machine et tu extrais le charbon, Reggie, et nous allons rester à l'extérieur de la mine.» «Ah, non» qu'il a dit.

C'est ce à quoi on s'expose quand on a affaire à un gars comme Reggie MacIntyre.

Le sénateur Graham: Il y a plusieurs années, Allan Foley, me faisait de longs sermons sur l'exploitation rabattante et l'exploitation par chambres et piliers. Allie, il faut écouter les hommes. On a insisté notamment, je le répète, dans notre rapport sur une meilleure coopération entre le syndicat et la direction, que l'on souhaitait.

Monsieur Drake, ayant écouté la première partie de votre exposé, j'ai l'impression que les relations entre le syndicat et la direction se sont en fait détériorées depuis l'an dernier. J'espère que ce n'est pas le cas.

M. Drake: J'ai dit que nous nous entendons très bien dans la plupart des cas avec les cadres intermédiaires. C'est avec la haute direction que nous avons un problème.

Le sénateur Graham: Depuis que vous avez témoigné devant notre comité à Ottawa le printemps dernier, diriez-vous que les relations se sont améliorées?

M. Drake: Avec les cadres intermédiaires, je dirais que oui. À partir d'un certain niveau vers le bas, je dirais que c'est le cas, surtout depuis quelques mois. Nous éprouvons encore des difficultés, mais ce sont des choses qu'il nous faut régler. Il s'agit d'une industrie. Vous avez donc un syndicat; vous avez aussi une direction, et il y a des choses à régler tous les jours, et nous le savons.

Le sénateur Graham: Pourquoi sommes-nous perdants sur le marché d'exportation?

M. Drake: Je dirais que nous sommes perdants sur le marché d'exportation à cause des décisions que l'on prend et qui ne devraient pas être prises. On ne peut pas acheter des machines de 6 millions de dollars. On en a acheté une, une ABM 20. Elle coûtait 3 millions de dollars. Elle ne valait rien. C'est d'ailleurs Reggie McIntyre qui l'a achetée. Celle qu'on avait dans la mine n'était pas performante. Alors on en a acheté une autre pour 3 millions de dollars, et on l'a démantelée pour en prendre des pièces pour celle qu'il y avait dans la mine. Mon beau-frère démantèle celle qu'il qui se trouve dans la mine. On ne sait pas du tout où on va envoyer celle-là.

On a donc dépensé 6 millions de dollars pour une machine. On ne peut pas continuer à prendre de telles décisions.

On ne peut pas prendre des décisions, comme celle de fermer arbitrairement des sections d'aménagement pour deux ans, après quoi on manque de charbon. Ces situations avaient été prédites par les employés qui travaillaient sur ce front de taille régulièrement. On ne peut pas prendre des décisions comme celle-là et s'attendre à être rentable.

On peut faire de l'argent sur le marché d'exportation si l'on décide de serrer la ceinture à cette société, et si on le fait pour de bonnes raisons, à savoir la survie de la Devco, et non l'ambition personnelle de quelqu'un.

M. MacLean: Monsieur Graham, j'aimerais ajouter ceci. Nous n'avons jamais perdu d'argent sur le marché d'exportation. La Société de développement du Cap-Breton a toujours eu des clients fidèles sur le marché d'exportation.

Nous avons perdu de l'argent sur le marché d'exportation lorsqu'on a cessé d'alimenter les vieux clients et qu'on s'est retiré du marché d'exportation. Mais, lorsque la Devco avait un besoin d'argent urgent, elle écoulait quelques tonnes de charbon sur le marché du disponible. L'entreprise perdait de l'argent avec ce charbon, mais elle trouvait ainsi de l'argent liquide rapidement pour ses autres besoins. C'est comme ça qu'elle a perdu de l'argent sur le marché d'exportation.

Si elle avait préservé ses clients fidèles et leur avait donné les services stables qui avaient fait sa réputation, la Devco n'aurait jamais perdu d'argent à l'exportation.

M. Drake: Eric Funari a peut-être un mot à dire à ce sujet. Eric est le président du syndicat local du lavoir de Victoria Junction. C'est un élément essentiel de notre marché à l'exportation.

M. Funari: Jusqu'à il y a cinq ans, je pouvais me retourner à l'endroit où je travaillais et apercevoir entre 1,5 million et 2 millions de tonnes de charbon qui attendaient d'être exportés. Maintenant, là où je travaille, je ne vois que le pavé, il n'y a plus de charbon à expédier.

Si vous voulez exporter plus de charbon, il ne faut pas faire ce que la Devco a fait le 1er avril lorsqu'elle a mis un terme à la production de charbon à la mine Prince. Le charbon de la mine Prince est le genre de charbon qui se lave très bien. C'est un bon produit, qui ne coûte pas cher à produire, et nous pouvons le mélanger. Avec une tonne de charbon de la mine Phalen, vous pouvez faire deux à trois fois plus de charbon. Autrement dit, on tire trois tonnes de charbon d'une tonne de charbon. Si vous êtes dans le charbon, si vous pouvez parfois doubler et tripler votre stock, c'est la chose à faire. Mais au lieu de faire ça, la Devco laisse la Nova Scotia Power lui dicter sa production.

Nous n'avons aucun mal à atteindre les normes de la Nova Scotia Power. Cela fait partie du contrat. J'aimerais beaucoup voir ce que contient ce contrat en fait de normes et de qualité. On nous a toutefois dit -- et j'ai déjà posé la question suffisamment de fois -- que l'important dans le cas du charbon, c'est d'arriver à une norme. Une norme concernant les émissions de soufre, et parfois aussi les restrictions sur la teneur en mâchefer. Cela, nous le faisons au lavoir. Nous lavons le charbon, nous le mélangeons, nous l'échantillonnons et puis nous le vendons.

Quoi qu'il en soit, la Nova Scotia Power et la Société de développement du Cap-Breton se sont concertés et ont dit: «Nous voulons tout votre charbon à l'état brut.» Nous n'avons même pas le loisir de mettre de côté la moindre tonne de charbon et faire de notre mieux, par dosage, pour arriver à une qualité exportable.

L'an dernier, j'ai passé huit mois à aller de gauche à droite, sans travail, parce que dans sa grande sagesse, la Société de développement du Cap-Breton avait permis à Nova Scotia Power d'utiliser du charbon à l'état brut au lieu de nous permettre de le mélanger à du charbon de la mine Prince, ce qui nous aurait donné trois tonnes au lieu d'une seule. D'un point de vue commercial, cela n'a aucun sens. Nous ne faisons pas de bénéfices. Si nous sommes incapables de produire autant que nous le pourrions et si nous sommes incapables de vendre autant que nous pouvons produire, on n'a pas l'impression que les dirigeants ont vraiment à coeur la réussite de la Société de développement du Cap-Breton.

Le sénateur Graham: Je ne saurais laisser passer l'occasion, monsieur le président et chers collègues, sans rappeler le nom de Lloyd Cresore, qui vient de décéder et qu'on enterre aujourd'hui.

Lorsque j'étais le vice-président de Devco, l'une de mes responsabilités organiques était précisément le marketing. Lloyd Cresore parcourait à l'époque le monde entier pour vendre du charbon pour le compte de la Devco. C'est donc avec tristesse que j'évoque son décès car il nous manquera.

Je voudrais maintenant en venir à la situation intérieure parce que selon mes souvenirs, lorsque je suis arrivé à la Devco dans les tous premiers temps de l'ancienne compagnie Dominion Coal, nous avions un contrat par lequel nous vendions du charbon à la Nova Scotia Power. Si je souviens bien -- et je peux me tromper -- le prix était de l'ordre de 8,05 $ la tonne. À l'époque, on parlait beaucoup de la conversion aux hydrocarbures.

Je me souviens aussi avoir reçu un coup de téléphone de la Nova Scotia Power qui voulait reconduire le contrat pour cinq ans au même prix. J'avais dit que moi aussi j'avais suivi l'évolution du marché parce que le prix du pétrole avait flambé pour atteindre quelque chose comme 43 $. Il y avait à ce moment-là une formule qu'on utilisait et qui représentait le prix convenu pour le pétrole résiduel. Le prix à Hampton Road était également un facteur en l'occurrence.

Vous avez mentionné le gisement de gaz de l'île de Sable et le fait que la Nova Scotia Power envisage d'acheter quelque chose comme 17 p. 100 de ses besoins. Laissez-moi vous poser la question du quitte ou double: Pouvons-nous être concurrentiels? Sommes-nous prêts à affronter la concurrence? Moi, ce que je vous dis, c'est oui, nous devrions affronter la concurrence. J'espère avec ferveur que nous n'allons pas abandonner le charbon du Cap-Breton à cause du gaz de l'île de Sable.

M. Drake: Merci pour cette marque de confiance. Je pense que ma réponse s'adresserait plutôt aux mineurs. Nous pouvons faire concurrence à n'importe quelle houillère dans le monde entier. Il nous faut une équipe de gestion qui puisse être l'égale de celles qu'on trouve ailleurs dans le monde et il nous faut également un responsable du marketing. La Devco a renvoyé Adrien White, son vice-président responsable du marketing. C'est la première chose que M. Shannon a fait en 1985. Allez donc comprendre.

Nous pouvons être les égaux de n'importe quelle industrie houillère dans le monde à condition d'avoir les bons outils. Comme je le disais, et je le répète, on ne nous les a jamais donnés.

Nous savons que le gaz de l'île de Sable est pratiquement une certitude. Il est difficile de contraindre une multinationale à renoncer à quelque chose dès lors qu'elle s'est engagée dans le processus, et cela nous l'acceptons. J'ai dit la même chose l'an dernier lorsque je suis venu déposer devant le comité sénatorial, en l'occurrence que nous devons faire en sorte que notre prix de revient à la tonne demeure compétitif.

Nous pouvons extraire autant de charbon qu'il en faut à la Devco. Nous pouvons produire 4,2 millions de tonnes par an, surtout si on ouvre la mine Donkin. Mais si nous n'arrivons pas à un prix de revient compétitif, il est certain que nous ne pouvons pas être viables sur le marché de l'exportation. Il nous faut une équipe de gestion qui nous donne un budget approprié, qui le respecte et qui arrive aux résultats escomptés. Jusqu'à présent, nous n'en sommes pas là.

Nous extrayons le charbon. C'est notre travail. Nous le faisons mieux que n'importe qui au monde. Je suis prêt à comparer un mineur du Cap-Breton à n'importe quel autre.

Le sénateur Graham: Tant en public qu'en privé, nous insistons auprès de la société pour qu'elle essaie de décrocher des marchés à l'étranger, et je me dois d'exprimer une certaine dose de confiance par rapport à ce que j'ai dit précédemment, c'est-à-dire que la société s'y emploie sérieusement. J'espère que vous aussi y accorderez foi. Harry Truman avait coutume de dire qu'il était originaire du Missouri et qu'il attendrait de voir les résultats.

Je ne doute pas qu'à l'heure actuelle, on s'emploie assez activement à chercher des débouchés à l'exportation.

À quand remonte la dernière évaluation de la mine Donkin?

M. Drake: Le syndicat en a fait une il y a un an et demi. Nous avons retenu les services de quelques ingénieurs et spécialistes américains qui font partie du syndicat. Nous avons publié un rapport que nous croyons relativement décent. Il s'agit d'un rapport technique à usage général sur la mine Donkin. Nous y disons que cette mine pourrait être ouverte moyennant 100 à 125 millions de dollars.

Cela bien sûr, c'est le point de vue du mineur, mais toutes choses confondues, nous représentons 50 000 années d'expérience dans ce domaine. Nous pouvons avoir notre mot à dire au moins sur ce plan là. Mais c'est la dernière évaluation qui ait été faite.

Il est intéressant que vous posiez la question. Ce rapport nous a pris six mois. Il s'agissait d'un rapport fort complet et très sensé. Lorsque nous l'avons rendu public, la direction de la Société de développement du Cap-Breton de l'époque a dit publiquement que la mine Donkin était une chimère, qu'elle n'y pensait même pas, que cela coûterait 400 millions de dollars et j'en passe. Malgré tout, nous avons insisté publiquement sur le plan politique et auprès des gens du Cap-Breton. La Devco a accepté de travailler de concert avec le syndicat pour faire de notre plan une option viable qui puisse être présentée au gouvernement fédéral et le convaincre qu'il était inutile de conduire une autre étude, que la chose avait déjà été étudiée jusqu'à plus soif. Il y a déjà huit études sur les tablettes. Nous devons ouvrir la mine Donkin.

L'une de ces études dit que la seule bonne façon de s'y prendre serait de procéder par extraction souterraine pendant une période d'essai. Nous avons déjà les trous de sonde. Nous sommes dans la veine. Nous savons ce que nous avons. Alors allons-y.

J'ai ici une lettre signée par Bob Cooper qui était à l'époque le vice-président responsable de l'ingénierie. Elle est datée du 21 juillet 1995. M. Cooper se trouvait dans une situation de compromis lorsqu'il fut contrait de travailler avec nous, ce qu'il fit. Nous leur avions donné tout le plan. Ils ont pris notre diagramme de galeries. Nous avions délimité les filons, nous avions fait des colonnes et tout ce qu'il fallait.

La lettre de Robert Cooper, responsable de l'ingénierie et de la sécurité, est parvenue à Gordon MacLean, le vice-président aux ressources humaines. On y lisait notamment ceci:

Veuillez trouver ci-joint notre dernier plan d'exploitation basé sur l'option Donkin, avancé par le syndicat. Ce plan d'exploitation a été modifié à la suite des discussions qui ont eu lieu avec les membres du bureau du syndicat. Il représente un diagramme d'exploitation sélective, avec les dimensions des colonnes correspondant à la profondeur du front d'abattage et l'emplacement de la taille calculés en fonction de norme antérieures relatives au calcul de l'affaissement du fond océanique. Bob MacDonald [...]

qui était ingénieur à la Devco,

[...] parlera aux gens du Bureau américain des mines pour revoir la conception des colonnes. S'ils confirment ce que nous pensons, ce sera le diagramme à partir duquel nous établirons notre estimation du coût.»

Après quoi on a rapidement passé en revue le concept de la mine Donkin.

La gestion de la Devco travaillait avec nous. Elle a établi les plans préliminaires pour l'extraction souterraine. À un moment donné dans tout cela, après que Joe Shannon fut devenu président suppléant et président du conseil de la Société de développement du Cap-Breton, cette coopération s'est évanouie. J'ignore pourquoi. J'imagine en fait que M. Shannon a dû dire: «Nous ne songeons plus à Donkin. Cela ne fait pas partie de nos activités. Cela ne fait pas partie de notre plan.»

Si vous consultez le rapport annuel de la Devco pour 1995, juste avant l'arrivée de M. Shannon, vous pouvez constater que M. Boutilier y disait qu'on procédait à une étude sur la mine Donkin. Cela se trouve dans le message du président aux actionnaires dans le rapport annuel de 1995.

Voilà où nous en sommes maintenant dans le dossier de la mine Donkin. Nous savons qu'elle peut être ouverte; nous savons qu'elle est viable. Les mécontentes disent que la mine Donkin va coûter 400 millions de dollars. En 1979, lorsque Montreal Engineering avait conduit l'étude, Donkin allait effectivement coûter 400 millions de dollars. J'en ai une représentation ici. C'est un complexe superbe. Il y a un lavoir, il y a également une usine d'extraction du méthane. Il s'agissait d'une exploitation à quatre galeries, ce qui représentait une dépense énorme et également une mine énorme. Pour ce qui est du travail sous la surface, on parlait à l'époque d'exploiter peut-être quatre fronts de taille en même temps. On parlait également de fronts de taille avancés. Il s'agit d'une technologie ancienne qui coûte très cher à utiliser. Il faut énormément d'argent pour travailler de cette façon.

J'ai relu une partie de la documentation. Dans le devis initial, on avait prévu de percer quatre galeries et de construire des structures nécessaires pour l'entrée du puits principal qui existe déjà, puis les galeries souterraines et tout le matériel, l'usine d'extraction de méthane, le lavoir et son expansion lorsque la quantité extraite atteindrait 3,8 ou 4 millions par an, les installations en surface et la préparation du site.

Ensuite, j'ai étudié les livres de la Devco pour les dix dernières années. En 1986, en 1987 et en 1988, on peut lire ceci dans les rapports annuels:

La nouvelle houillère Phalen est en exploitation sans dépassement de budget. Les immobilisations sont chiffrées au prix coûtant.

Voilà ce qu'on peut y lire pour ce qui de l'ouverture de la houillère Phalen.

Le coût total actualisé de la houillère Phalen est établi à 185 928 000 $. Au niveau de l'entreprise, l'ajout d'une troisième houillère permettra d'intégrer des économies d'échelle au coût des activités en surface et de l'administration.

Cela est extrait du rapport annuel de la Société de développement du Cap-Breton pour 1986-1988.

Pour mettre en activité la houillère Phalen en partant de rien et sans galeries -- souvenez-vous que nous avons les galeries à Donkin -- il faudrait un investissement énorme. Cela coûterait 186 millions de dollars.

On lit ceci dans le rapport annuel de la Devco pour 1995:

Coût d'acquisition de la houillère Prince [...]

D'après ce que j'ai pu comprendre, cela signifie ce que nous avons dépensé pour la houillère Prince depuis le début, en 1995. Je n'en suis toutefois pas certain. Nous pourrions, j'imagine, poser la question à un comptable.

Le coût d'acquisition de la houillère Prince par rapport à la vie utile du projet est de 150 318 000 $.

Nous avons donc deux mines. La première a été ouverte pour 185 millions de dollars et l'autre a été ouverte et mise en exploitation pour un total de 150 millions de dollars. Je ne voudrais pas m'étendre trop longuement sur le cas de Westray, mais lorsque le projet a commencé, ce n'était qu'un champ. Il n'y avait pas de galeries, il n'y avait aucune infrastructure en surface, il n'y avait même pas un petit lavoir. Il n'y avait rien. La Westray a commencé par une infrastructure en surface, un lavoir, du matériel de forage et des galeries, le tout représentant 100 millions de dollars.

Nous, nous avons déjà dépensé 80 millions de dollars pour la mine Donkin.

Déjà en 1985... et le communiqué de presse se trouve d'ailleurs dans votre liasse, M. Shannon avait dit qu'il nous fallait encore obtenir l'approbation nécessaire pour financer le projet.

Le 10 mai 1985, M. Shannon déclarait entre autres que dans le cas de Donkin, il y avait plusieurs options:

Selon l'option choisie, les frais de mise en route nécessaires pour mettre la mine en exploitation ont été chiffrés dans une fourchette de 50 à 150 millions de dollars, en plus du coût des galeries.

Jeudi, j'ai téléphoné aux représentants du syndicat et je leur ai demandé de me fournir quelques renseignements sur les frais de départ d'une exploitation minière aux États-Unis -- en partant de rien, d'un simple champ, lorsqu'il faut percer les galeries et faire tout le reste. Il y a une compagnie qui s'appelle je crois quelque chose comme Shoal Creek Mining qui, il y a quatre ou cinq ans, a ouvert une mine pour 165 millions de dollars. Le chiffre a été cité dans le United Mineworkers Journal d'après les propos du président de l'entreprise -- et je rappelle qu'il s'agit d'une mine ouverte à partir de zéro.

Nous pourrions passer toute la journée à discuter de ce que coûte la mine Donkin, mais les chiffres que je viens de vous donner portent à penser que nous pourrions ouvrir cette mine moyennant 200 millions de dollars. Nous en avons déjà dépensé 80 millions. Nous avons déjà à la houillère Lingan toute l'infrastructure de surface nécessaire, une infrastructure qui a été abandonnée, et que nous pourrions utiliser pour la mine Donkin. Monsieur Cooper a étudié la chose pour nous en 1995, avant que M. Shannon ne balaie le projet.

La Devco a un énorme stock de matériel d'extraction encore utilisable que nous pourrions réparer pour utiliser dans la mine Donkin. Nous ne voulons pas une mine qui coûterait 450 millions de dollars si cette dépense est impensable pour l'entreprise. Nous pourrions le faire pour 125 ou 150 millions de dollars, voire 175 millions, parce que selon nous, ce serait raisonnable.

Il en a coûté 185 millions de dollars pour ouvrir la mine Phalen. Quatre cents millions de dollars seraient totalement exagérés pour la mine Donkin. Il s'agit là de mon avis personnel qui repose sur ce que j'ai lu et sur ce qu'on m'a dit.

Nous avons le sentiment que l'exposé de mission que nous avons composé -- pour redonner du travail au Cap-Breton; rétablir l'honnêteté et l'intégrité de l'industrie et envisager de façon réaliste l'ouverture de la mine Donkin selon les renseignements dont nous disposons et les utiliser au maximum -- ne serait pas difficile à réaliser.

Le sénateur Graham: Cela peut peut-être paraître biaisé, mais je tiens à vous dire que j'étais là lorsque Dave Dingwall et Russel MacLellan se sont bagarrés comme de beaux diables contre les autres ministres, et même contre le premier ministre au Cabinet. Je peux vous dire qu'ils se sont engagés à fond pour défendre cette industrie et qu'ils continueront à le faire.

Le sénateur Buchanan: J'ai ici un texte dans lequel David Dingwall accusait l'ancien gouvernement de ne pas en faire suffisamment pour ouvrir la mine Donkin au Cap-Breton. Il est indubitable que les gens se sont bagarrés pour cette mine. Cela étant toutefois, je n'ai pas vu depuis 1983 ou 1984 d'étude péremptoire sur ce qu'il en coûterait pour ouvrir la mine Donkin.

D'après tout ce que j'ai pu lire... et vous savez, monsieur Drake, que j'ai lu tout ce que vous avez publié, j'ai lu toutes les études sur la mine Donkin. D'après tout ce que j'ai pu lire, je n'ai vu nulle part que la Devco aurait déclaré qu'il en coûterait 400 millions de dollars pour ouvrir la mine Donkin avec les deux galeries qui existent déjà.

Monsieur le président, nous avons demandé dans nos recommandations que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial agissent de concert et produisent un bilan actualisé, pas une nouvelle étude. Quelqu'un a déjà dit à ce sujet que ce dossier avait été étudié jusqu'à plus soif. Nous savons tous que le charbon est là. Certains des plus éminents ingénieurs et géologues ont signé ce rapport en 1981, rapport qui a été actualisé en 1983 puis une nouvelle fois en 1985. Ces gens savaient de quoi ils parlaient.

La mine Donkin est viable. Nous avons des estimations qui nous disent que la mine Phalen aura une vie utile de trois ans, cinq ans, huit ans, dix ans. À un moment donné d'ici là, la vérité éclatera à propos de la mine Phalen. Qu'adviendra-t-il de l'industrie houillère si jamais la mine Phalen vient à fermer?

M. Drake: C'est la question du quitte ou double.

Le sénateur Buchanan: Comme vous l'avez dit, la Nova Scotia Power a déjà commencé à acheter du charbon aux États-Unis, et elle cherche toujours à le faire. Cela aurait-il pu être évité? On me dit que oui.

M. Drake: Effectivement. Souvenez-vous que l'an dernier, nous leur avions dit d'accélérer les choses parce qu'en janvier-février, nous allions manquer de charbon... cela est mis sur papier. Russel MacLellan assistait à l'une de ces réunions. Nous l'avons mentionné à M. Dingwall; nous l'avons mentionné à la direction de la Devco ainsi qu'au conseil d'administration à deux reprises. La chose aurait pu être évitée.

Les décisions ont été prises jadis, et il n'est pas possible de revenir là-dessus, mais il faut que quelqu'un commence à prêter l'oreille. Il y a à l'heure actuelle dans l'industrie des gens qui occupent des postes clés à la haute direction, et à qui nous ne faisons pas confiance. S'ils nous conduisent dans l'avenir comme ils nous ont conduits jusqu'à présent, nous sommes dans un gros pétrin.

M. MacLean: Lorsque vous visiterez la mine Phalen dans la journée, je vous suggère de le faire pendant le quart de jour lorsque toute la direction est sur les lieux. Nous préférerions vraiment que vous le fassiez pendant le quart de jour.

En guise de conclusion, permettez-moi de préciser que l'âge moyen des mineurs est de 46 ans et non pas 40.

C'est le syndicat qui était allé demander à la gestion s'il était possible d'installer ce font de drainage ouest. Nous ne préconisons pas de le percer, mais bien de le monter afin que si quoi que ce soit survient en bas, nous aurions au moins ce front comme solution de repli. À ce moment-là, nous ne serions pas dans le même pétrin qu'aujourd'hui en devant importer du charbon des États-Unis. Nous aurions pu envoyer notre équipe sur place pour préparer ces fronts.

Ils ne nous ont pas écoutés il y a un an, mais aujourd'hui ils le font enfin. Ils vont préparer ces fronts au-dessus, sans pour autant les percer. Ils seront là en réserve. Au moins nous ont-ils écoutés sur ce point.

Je ne veux pas donner l'impression que la mine Phalen est dangereuse. Elle est exploitable. On y travaille plus lentement mais, avec toutes les précautions voulues, on peut y travailler en toute sécurité.

Le président: Monsieur Currie, nous aimerions maintenant entendre votre avis, après quoi nous vous poserons quelques questions.

M. Dan Currie, ancien directeur de l'exploitation à la mine Donkin et superviseur (électricité chez Devco), United Mineworkers of America: Monsieur Drake m'a invité à venir aujourd'hui vous parler du peu que je sais du projet Donkin.

Vers 1980, la Devco a lancé ce qu'on allait appeler le projet Donkin-Morien. Je connais peu les détails d'alors, mais apparemment c'était un projet bien distinct des principales mines que la Devco exploitait alors. On avait même ouvert à Sydney un bureau indépendant pour s'en occuper. On a commencé à creuser les puits et à foncer la galerie no 3. Je pense qu'à l'époque c'était M. Rankin qui était le président de la Devco.

Tout d'un coup, en 1982, la compagnie a jugé bon d'arrêter le projet. Le site a été cadenassé et la Devco a été réorganisée. Il avait fallu engager un entrepreneur d'une autre province pour percer deux galeries, peut-être aussi deux puits et des galeries. Après avoir foncé près de 350 mètres dans la galerie no 3, les choses sont restées en plan. Il y a eu ensuite une réorganisation à la Devco et certaines personnes ont tenté de relancer le projet une nouvelle fois.

En rétrospective, j'ai eu beaucoup de chance d'aller sur place parce qu'on avait utilisé alors une toute nouvelle technologie pour foncer ces galeries. On avait acheté une fonceuse fabriquée au Canada et le boulot avait été organisé. Nous allions découvrir ultérieurement qu'au tout début, le fonçage de ces galeries coûtait environ 18 000 $ le mètre. Lorsque le projet a été revu et lorsqu'on a commencé à utiliser la fonceuse de galerie ce chiffre est passé à 3 600 $ par mètre de galerie terminée. Nous parlons ici d'une galerie de 25 pieds de diamètre. Nous avons continué et nous avons parfaitement réussi à foncer toutes les galeries en utilisant cette machine.

Le premier entrepreneur, l'entrepreneur de l'extérieur de la province dont je vous ai parlé, était Beaver.

En creusant les galeries, nous avons traversé sans doute six filons. Il y avait le filon d'émeri, qui a cinq pieds d'épaisseur; le filon Phalen, qui a six pieds à cet endroit-là; il y avait le filon Black et le filon Boutilier, qui sont peu épais, qui font peut-être de deux pieds et demi à trois pieds; et il y avait ensuite le filon du port, qui avait 11 pieds d'épaisseur à l'endroit où nous l'avons traversé. Si nous avions creusé plus loin, nous aurions pu traverser deux autres filons au large de la côte. Il y avait le filon du centre et, je crois, le filon Stubbard, qui auraient pu être exploités de façon économiquement viable. Ces filons ont été découverts par les navires de forage au moment du forage au large de la côte.

Quand nous sommes arrivés au filon du port, nous avons cessé de creuser. Nous avons pris un échantillon d'environ 3 000 tonnes de ce filon du port et nous l'avons soumis à une extraction sélective. Dans le filon du port, nous avons trouvé huit pieds de charbon de très haute qualité au milieu du bloc. Au-dessus, on a trouvé un filon parallèle à une veine contenant du charbon de haute qualité, d'environ un pied et demi. D'après un des rapports que j'ai vus, ce charbon avait une teneur en souffre de 2,25 p. 100. Il y avait aussi des roches d'encaissement entre le plancher de pierre et le principal filon de charbon de huit pieds qui avait une forte teneur en mâchefer... et il faudrait obtenir la confirmation de ce chiffre car je vous le cite de mémoire. Je crois que le charbon qui se trouvait dans les roches d'encaissements avait une teneur en mâchefer de 12 p. 100. Nous avons envoyé au moins trois échantillons de charbon, et peut-être plus encore, à divers laboratoires pour les faire analyser. À part le rapport dont je vous ai parlé, je n'en ai pas vu d'autres sur la qualité du charbon.

La qualité du charbon est difficile à déterminer. Si l'on veut du charbon métallurgique pour la production d'acier et qu'on est dans une couche de charbon thermique, c'est du charbon thermique qu'on obtiendra et pas du charbon pour la production d'acier. Le type de charbon qu'on recherche peut changer d'une semaine à l'autre et d'un jour à l'autre. Je suis sûr que la qualité du charbon à Phalen et à Prince change d'une semaine à l'autre. Je pourrais le comparer aux échantillons de poussière de pierre.

Vous avez entendu pendant des mois des reportages télévisés sur l'enquête Westray. Personne encore ne sait combien de poussière de pierre il y avait, si tant est qu'il y en avait, car il y a diverses façons de prélever des échantillons de poussière de pierre et il y a aussi diverses façons de les analyser. Il en va de même pour les échantillons de charbon. On pourrait prélever un échantillon qui serait de très mauvaise qualité.

Ce dont je suis sûr, c'est qu'il y a beaucoup de charbon là. Les galeries étaient de première qualité, qui soutiendraient la comparaison avec n'importe quelle autre au monde. Il y a là trois filons qui pourraient être exploités dès maintenant, le plus important étant le filon du port. Je n'ai pas accès aux informations privilégiées de Devco maintenant, puisque je suis retraité de la compagnie, mais je crois qu'à l'heure actuelle, Donkin est le joyau de la couronne pour Devco ou pour l'industrie houillère de l'île.

Le sénateur Buchanan: Quel poste occupiez-vous à la houillère Donkin?

M. Currie: J'avais deux postes. J'étais directeur des opérations souterraines et électricien en chef. Je suis électricien de mon métier.

Le sénateur Buchanan: Je voudrais vous lire quelque chose. Il s'agit d'observations qui ont été faites par un ingénieur des mines du nom d'Allan Craven:

Donkin se présente comme un magnifique bloc de charbon qui doit être exploité. Il est pratiquement exempt de toute imperfection et d'après les indicateurs, le charbon qui en serait extrait dans 10 ans ou dans 15 ans, pourrait avoir une teneur en souffre moins élevée. Si l'exploitation est bien faite, la houillère Donkin aura toutes les chances de réussir.

Êtes-vous d'accord avec ces propos?

M. Currie: Je suis entièrement d'accord avec ces propos.

Le sénateur Buchanan: Montreal Engineering a déclaré:

Le bloc Donkin Resource est exempt de failles majeures et les risques à Donkin sont les mêmes qu'à n'importe quel autre projet typique. Les avantages de l'exploitation sélective vont de soi.

Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?

M. Currie: Oui, je suis entièrement d'accord.

Le sénateur Buchanan: Dans le rapport annuel de la Société de développement du Cap-Breton de 1985, Joseph P. Shannon, président du conseil d'administration et président intérimaire, a déclaré:

L'analyse de 2 700 tonnes de charbon extrait du Projet Donkin-Morien a été particulièrement encourageante. Cet échantillon indique que l'exploitation sélective -- c'est-à-dire l'exploitation de 70 p. 100 du filon de 3,4 m., tout en laissant le reste comme plancher et comme toit permettrait de réduire la teneur en soufre à environ 1 p. 100.

Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?

M. Currie: Pas entièrement. Je suis d'accord pour dire qu'il faudrait pratiquer une exploitation sélective et laisser la partie de la couche qui forme le toit, mais on pourrait difficilement laisser le charbon au plancher avec le type de machine dont on préconise l'utilisation dans l'étude Kilborn, car il en résulterait un problème au niveau du plancher. Il faudrait extraire la tranche inférieure de charbon à forte teneur en mâchefer sur une profondeur d'un pied et demi, mais il serait très facile de laver ce charbon.

Le sénateur Buchanan: Le lavage chimique réduirait cela encore plus que pour la section centrale, y compris le plancher.

M. Currie: Comme je l'ai dit, d'après le rapport que j'ai vu, la section du dessus avait une teneur en soufre de 2,25 p. 100. Le charbon pourrait être lavé afin de ramener la teneur en soufre à environ 1 p. 100, ce qui donnerait un charbon thermique de bonne qualité.

Le sénateur Buchanan: J'ai ici une note selon laquelle la teneur moyenne en mâchefer de la ressource exploitable à la houillère Donkin était de 26,6 p. 100, comme le précisent les études effectuées par Kilborn Engineering et Montreal Engineering. Je ne sais pas exactement pourquoi ils ont dit que la moyenne de la ressource géologique était de 9,4 p. 100 et que la ressource exploitable, qui serait je suppose soumise à une exploitation sélective, serait inférieure à 9,4 p. 100.

M. Currie: C'est possible, mais le rapport que j'ai vu disait que c'était aux alentours de 12 p. 100. Je le répète, il est difficile d'évaluer la teneur en mâchefer et en soufre du charbon à cause des variations.

Le sénateur Buchanan: Ce matin, nous avons discuté avec les représentants du syndicat et d'autres de l'avenir de l'industrie houillère. Il y a plus de 200 ans qu'on exploite le charbon au Cap-Breton.

En 1979, 1980, 1981 et 1982, on justifiait l'exploitation de la nouvelle houillère Donkin, comme vous l'avez déjà dit, en invoquant le fait, premièrement, qu'elle contenait beaucoup de charbon, deuxièmement, qu'il s'agissait de charbon thermique de bonne qualité et que le charbon dans certains cas est utilisé à des fins métallurgiques; troisièmement, qu'il y avait à l'époque, si je me souviens bien, cinq mines en exploitation au Cap-Breton: Prince, les houillères no 16; et no 26; Lingan; et Phalen est venue après. À l'époque, ni Devco, ni le gouvernement provincial, ni personne d'autre, ne contestait le fait qu'il faudrait une nouvelle houillère dans un avenir prévisible si l'exploitation minière devait se poursuivre au Cap-Breton.

Nous voilà maintenant avec deux mines en exploitation: Phalen et Prince. Nous avons beaucoup d'estimations quant à la vie utile de Phalen, qui est la houillère qui a la production la plus élevée. Ces estimations vont de trois ans, selon les problèmes qu'il pourrait y avoir, jusqu'à huit ou dix ans.

Quel serait selon vous l'avenir de l'exploitation houillère, quand la houillère Phalen fermera?

M. Currie: Quand Phalen fermera, il n'y aura plus d'exploitation houillère.

Le sénateur Buchanan: La province a déboursé beaucoup d'argent pour les études sur la houillère Donkin et pour les navires de forage. Vous étiez là à l'époque, tout comme Bill Shaw. Nous avons toujours considéré que l'avenir de l'exploitation houillère au Cap-Breton dépendait de la décision du gouvernement fédéral, par l'entremise de Devco, d'ouvrir une nouvelle houillère.

Il y a encore beaucoup de charbon dans d'autres gisements houillers de la région de Sydney, mais on nous a toujours dit que la mine exploitable serait la nouvelle houillère Donkin.

M. Currie: C'est celle qui est la plus exploitable à l'heure actuelle. Je ne sais pas qui dit qu'il reste encore beaucoup de charbon dans les gisements houillers de la région de Sydney. Donkin est le dernier important bloc de charbon. Je crois savoir qu'il y a trois milliards de tonnes de charbon qui gisent là, dont 1,3 milliard qui pourrait être exploité grâce à la technologie actuelle.

Il y a un autre bloc de houille à New Victoria qui est exploitable, bien qu'il ne soit pas aussi gros que celui de Donkin.

Le sénateur Buchanan: Les études qui ont été effectuées jusqu'en 1985 concluaient que la houillère Donkin était celle qui présentait le meilleur potentiel d'exploitation. On disait qu'il serait possible d'extraire 2 millions de tonnes par an du filon du port et 1 million de tonnes de Lloyd Cove ou du filon du centre. Pensez-vous que ces chiffres sont exacts?

M. Currie: Oui, bien que les galeries n'aient pas été prolongées jusqu'à Lloyd Cove ou jusqu'au filon du centre.

Le sénateur Buchanan: C'est juste. L'étape suivante serait de l'amener là-bas jusqu'à Lloyd Cove ou jusqu'au filon du centre.

Monsieur le président, nous avons entendu ce matin des gens expérimentés des syndicats ainsi que M. Currie, qui était directeur des opérations à la houillère Donkin lorsqu'on a foncé les deux galeries. Nous n'avons encore entendu aucun témoin dire que la houillère Donkin ne devrait pas être mise en exploitation.

J'en conclus, par conséquent, qu'il faudrait faire le point sur toutes ces études afin de déterminer, à X montant de dollars près, ce qu'il en coûterait pour exploiter la houillère Donkin jusqu'à concurrence de 2 millions de tonnes de houille. D'après les estimations du syndicat, il en coûterait 120 millions de dollars. L'estimation initiale, qui se fondait sur l'ancienne technologie, était d'environ 200 millions de dollars, moins les 80 millions qui ont déjà été déboursés, ce qui la ramènerait à 120 millions de dollars. D'après les estimations dont on nous a fait part à nos audiences et qui se fondent sur les nouvelles technologies et les nouvelles méthodes d'extraction minière, la nouvelle houillère Donkin pourrait être mise en production à raison de 150 millions de dollars ou de 200 millions de dollars au plus.

M. Currie: L'exploitation d'une houillère nécessite deux types d'aménagement. Il faut d'abord aménager les galeries d'accès, puis aménager les sections souterraines qui sont destinées à être exploitées.

Quand on perce les galeries d'accès, on traverse la pierre, de telle sorte que le rendement est nul et le coût élevé. Or ce travail a déjà été fait à Donkin.

Le sénateur Buchanan: Ce sont là les 88 millions de dollars qui ont déjà été déboursés.

M. Currie: En effet. Puis, il faut assurer l'accès aux filons houillers comme tels, le plus important étant celui du port.

Si la houillère est un jour mise en exploitation, on se trouverait à creuser dans les filons comme tels, et ainsi il y aurait un certain rendement sur les sommes investies.

Le sénateur Buchanan: La houille qui serait extraite à ce moment-là pourrait être vendue.

M. Currie: C'est juste. À Donkin, le rendement sur l'investissement a été nul, parce que le creusage s'est fait entièrement dans la pierre.

Le sénateur Murray: D'un point de vue pratique, pensez-vous que Donkin pourrait remplacer Phalen ou même Prince, ou peut-être leur succéder, après que ces houillères auront cessé de produire, ou croyez-vous qu'elles pourraient être exploitées en même temps comme source de production supplémentaire?

M. Currie: Les ressources de Donkin sont tellement importantes que la houillère pourrait être exploitée indépendamment.

Le sénateur Murray: En plus des houillères déjà en exploitation?

M. Currie: En plus ou, comme je l'ai dit, de façon indépendante. J'espère n'insulter personne en disant cela, mais je ne crois pas que le charbon de la houillère Prince est d'assez bonne qualité pour être utilisée seul. Il doit être mélangé à du charbon de la houillère Phalen, d'où le problème. Si Phalen ne produit plus, il serait possible de faire quelque chose avec celui de la houillère Prince.

Donkin, par contre, pourrait être exploitée indépendamment. Il serait possible d'en extraire entre 50 000 tonnes et 4 millions de tonnes.

Le sénateur Murray: Nos amis du syndicat m'ont envoyé le texte d'un exposé qu'ils ont présenté en 1983. À cette époque, le travail de prospection était déjà bien amorcé par Coady Marsh et plusieurs autres: K. MacKenzie, J.B. Mercer, J.J. Gilman. Il s'agit d'un exposé qu'ils ont présenté ici, à Sydney, à une conférence d'exploitants houillers.

On peut y lire ce qui suit:

On estime possible et économiquement viable de produire 4,5 millions de tonnes par an.

Cette quantité est très près de celle que vous avez mentionnée. Vous avez dit que la houillère pourrait produire au moins 50 000 tonnes et plus. Savez-vous à partir de quel niveau de production l'exploitation deviendrait rentable? Il ne faudrait sûrement pas qu'elle atteigne 4,5 millions de tonnes. Dites-vous qu'il serait possible de produire 50 000 tonnes de façon rentable, tous autres facteurs étant égaux?

M. Currie: Je dis que ce serait là la production minimale. Nous avons en fait présenté une proposition pour la production de 50 000 tonnes une fois les galeries creusées. Nous voulions servir le marché local, qui est de 45 000 à 50 000 tonnes environ. Nous aurions pu à ce moment-là embaucher une trentaine de personnes pour extraire ce charbon que nous aurions vendu sur le marché intérieur local et nous pu mettre la houillère en valeur en même temps.

Le sénateur Murray: De façon rentable?

M. Currie: Oui. La dernière fois où je me suis rendu sur les lieux, j'ai constaté que des vandales s'y étaient introduits et avaient détruit beaucoup des bâtiments de surface. Avec les installations qui se trouvent déjà là, avec les deux galeries, je dirais qu'il serait tout à fait possible de produire 1 million de tonnes de charbon.

Le sénateur MacDonald: Selon vous, monsieur Currie, l'exploitation de la houillère Donkin est la principale, sinon la seule, porte de sortie de l'industrie houillère du Cap-Breton?

M. Currie: Comme je l'ai dit, il reste deux blocs de charbon dans l'île qui sont facilement accessibles, et il s'agit du bloc de Donkin et d'un bloc plus petit qui se trouve à New Victoria. Donkin est le joyau de la couronne de l'industrie houillère actuellement.

Le sénateur MacDonald: C'est le plus important, pas le seul?

M. Currie: Oui, c'est celui qui prime tous les autres.

Le sénateur Graham: Monsieur Currie, vous parlez de Donkin comme d'un joyau?

M. Currie: Oui, monsieur.

Le sénateur Graham: Si vous me permettez de me faire pendant un instant l'avocat du diable, je vous dirai que, si c'est le joyau que vous dites et qu'il y a des entreprises d'exploitation houillère privées dans le monde entier, pourquoi ces entreprises n'ont-elles pas présenté de proposition pour exploiter Donkin?

M. Currie: N'y en a-t-il pas eu?

Le sénateur Graham: Je l'ignore.

M. Currie: Je suis à peu près sûr, sénateur Graham, que Consol a fait une offre pour Donkin. Il y en a peut-être eu d'autres aussi, mais je sais que Consol a effectivement présenté une offre.

Le sénateur Buchanan: Ils sont venus voir ce qu'il en était et ils étaient prêts à aller de l'avant.

Le président: Qui ça?

M. Currie: Consolidated Coal, des États-Unis. Je crois qu'il s'agit du deuxième producteur houiller des États-Unis.

Le président: Savez-vous quand la proposition a été faite?

M. Currie: C'était au milieu des années 80 ou peut-être à la fin des années 80. La personne responsable chez Consolidated était M. Poundstone.

Si vous le permettez, monsieur le président, vouloir soumettre le projet Donkin à une étude détaillée, c'est, selon moi de la foutaise. Je suis d'accord avec les sénateurs Buchanan et Graham pour dire que les études devraient toutes être réunies et mises à jour. Pour ce qui est d'effectuer une étude détaillée, les gens de Kilborn ont fait une étude formidable de ce bloc de charbon.

Le sénateur Graham: Ce doit être faisable, et il nous faudrait avoir une étude pour savoir combien il en coûterait la tonne pour extraire le charbon, quel serait le marché et quelle serait la qualité du charbon, et cetera. Il faudrait que nous ayons des informations à jour au sujet de tout cela.

Quand je vous ai demandé pourquoi les exploitants n'avaient pas manifesté leur intérêt pour un pareil joyau, je ne posais pas du tout une question à la légère. Vous pourriez peut-être en tenir compte pour plus tard.

Je m'interroge au sujet des 88 millions de dollars qui ont déjà été déboursés. À combien ce montant correspondrait-il en dollars d'aujourd'hui, sénateur Buchanan?

Le sénateur Buchanan: Ce ne serait pas beaucoup.

Le sénateur Graham: Peu importe. Ce que je veux savoir, c'est ceci: Est-ce qu'il faudrait faire tout ce travail si on décidait maintenant de partir à zéro?

M. Currie: Oh, oui.

Le sénateur Graham: Ce serait le cas si vous commenciez avec une parcelle de terre vierge, mais le fait est qu'il y a déjà peut-être pour 100 millions de dollars de travaux qui ont été effectués à la houillère Donkin.

Le sénateur Buchanan: Si j'ai bien compris, les galeries qui ont été creusées à raison de 88 millions de dollars sont toujours là. Elles sont inondées, mais d'après ce qu'on me dit, il serait possible de les mettre à sec en l'espace de trois mois.

M. Currie: Oui.

Le sénateur Buchanan: On avait inondé les galeries à l'époque pour les préserver, et elles l'ont été effectivement.

M. Currie: Oui.

Le sénateur Buchanan: L'argent en question a donc été dépensé à bon escient, car il serait maintenant possible de mettre la houillère en activité bien plus rapidement que s'il fallait creuser à nouveau les galeries.

M. Currie: C'est juste. Il faudrait deux ans pour les creuser s'il fallait le faire maintenant. Si quelqu'un décide un jour d'exploiter Donkin, il pourra en extraire du charbon dès le début. Par conséquent, il obtiendrait un rendement sur son investissement.

Le président: Pouvez-vous nous donner un chiffre approximatif quant à ce qu'il en coûterait pour intégrer les études?

M. Currie: Non. Tout dépendrait de l'entreprise qui en serait chargé.

Le sénateur Buchanan: Montreal Engineering et Kilborn ont toutes deux beaucoup d'expertise en la matière.

M. Currie: Je vous dirai, monsieur, que, si tous les acteurs pouvaient se mettre d'accord -- Reg MacIntyre et Steve Farrell --, nous pourrions faire la mise à jour des études à un coût marginal.

Le président: Voilà qui met fin à nos audiences.

La séance est levée.


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