Délibérations du comité sénatorial spécial
sur
la Société de développement du Cap-Breton
Fascicule 3 - Témoignages - Séance du matin
OTTAWA, le lundi 3 juin 1996
Le comité sénatorial spécial sur la Société de développement du Cap-Breton se réunit aujourd'hui, à 11 heures, pour poursuivre son étude du rapport annuel et du plan d'entreprise de la Société de développement du Cap-Breton, ainsi que des questions connexes.
Le sénateur Bill Rompkey (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte. J'accueille deux témoins du Bureau du vérificateur général: M. Bill Radburn, vérificateur général adjoint, Opérations de vérification, et M. John O'Brien, directeur principal, Opérations de vérification.
Bienvenue, messieurs.
Nous avons reçu un mot de la Société de développement du Cap-Breton:
Comme suite à nos entretiens, je vous fais parvenir les documents suivants:
1. Rapport d'examen spécial du 28 août 1992...
2. Ébauche des états financiers provisoires du 31 octobre 1995...
Nous avons bien ces deux documents. Les membres du comité les ont reçus et sont en train de les découvrir. Nous apprécierions, ce matin, que vous nous fassiez part de vos observations relativement à ce rapport, que ce soit à titre personnel ou en vos deux noms. Nous passerons ensuite à quelques questions.
Je vous en prie, allez-y.
M. Bill Radburn, vérificateur général adjoint, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général: Monsieur le président, nous avons reçu votre invitation vendredi dernier, mais comme nous étions tous deux hors de la ville, nous n'avons pas eu suffisamment de temps pour préparer une déclaration liminaire et en faire distribuer des exemplaires. Si vous me le permettez, j'aimerais toutefois vous décrire en quelques mots nos responsabilités en matière de vérification.
Le Bureau du vérificateur général a commencé à remplir le rôle de vérificateur de la Société au début de l'exercice financier qui s'est terminé le 31 mars 1989.
Notre travail de vérification auprès des sociétés d'État est régi par les dispositions de la Loi sur l'administration financière et non par celles de la Loi sur le vérificateur général. La première prévoit en effet la tenue d'une vérification annuelle, de même que la conduite d'examens spéciaux périodiques. Je me propose de vous décrire brièvement ce que comprennent ces deux types de vérification.
Tout d'abord, la vérification annuelle. Elle est semblable à une vérification traditionnelle des états financiers d'une entreprise privée, mais elle a une portée plus large et la reddition de compte y revêt une plus grande importance. Elle comporte trois éléments: premièrement, la formulation d'un avis quant à la fidélité de représentation de la situation financière dans les états financiers; deuxièmement, la formulation d'un avis sur certains paliers d'autorité et, troisièmement, la rédaction de notes en vue d'attirer l'attention du lecteur sur toute autre question tombant dans les limites de notre examen et qui, de l'avis du vérificateur, devrait être portée à l'attention du Parlement.
Nous devrions avoir terminé notre vérification annuelle pour l'année se terminant le 31 mars 1996 dans le courant des deux prochaines semaines.
L'examen spécial est une sorte de vérification de l'optimisation des ressources, qui doit être effectuée au moins une fois tous les cinq ans. Il est de portée beaucoup plus large que la vérification annuelle, puisqu'il concerne des questions comme la protection et le contrôle des actifs, l'utilisation économique et rentable des ressources et l'efficacité des opérations de la Société. En vertu de la Loi sur l'administration financière, les examens spéciaux sont destinés au conseil d'administration et, en général, ils ne sont pas rendus publics.
Le dernier examen spécial de la Société du Cap-Breton a été communiqué au conseil d'administration en décembre 1992, et le prochain devrait débuter à l'automne.
Avant de conclure, monsieur le président, je tiens à signaler que le président du conseil, devenu depuis président par intérim, M. Shannon, a demandé à notre bureau de vérifier les états financiers de la Société pour la période de sept mois se terminant le 31 octobre 1995. Nous avons accepté de le faire, mais à cause des changements qu'on était en train d'apporter aux plans de la société, ces états financiers n'ont jamais été terminés ni approuvés par le conseil d'administration. Donc, nous n'avons pas effectivement émis de rapports de vérification à leur sujet.
Mais comme vous l'a indiqué M. Shannon quand il a témoigné devant vous lundi soir, nous avons décidé d'intégrer ces données à celles de l'exercice financier normal se terminant le 31 mars 1996.
Voilà, monsieur le président, qui conclut mes remarques liminaires. Nous avons cru comprendre que la Société vous a fait remettre ses états financiers d'octobre 1995 ainsi que le rapport d'examen spécial de 1992. Donc, M. O'Brien et moi-même allons maintenant répondre à toutes les questions que vous voudrez bien nous poser sur les aspects de la vérification auxquels nous avons pris part.
Le sénateur MacEachen: Monsieur le président, j'ai une question à poser à propos de la demande que M. Shannon a adressée au Bureau du vérificateur général pour faire vérifier les opérations de la Société pendant la période de sept mois se terminant le 31 octobre 1995. Que faut-il conclure du fait que ces états financiers n'ont jamais été terminés ni approuvés par le conseil d'administration? Est-ce parce qu'ils n'ont pas été approuvés par le conseil que le rapport de vérification n'a pas été émis ou est-ce parce que le Bureau du vérificateur général n'a pu terminer son travail? Ce n'est pas très clair d'après ce que vous nous avez dit.
M. Radburn: À l'époque, la situation de la Société était très mouvante. Beaucoup de propositions étaient formulées. Nous, nous avions terminé notre travail. Si ce n'avait été de la tenue imminente de vos audiences publiques, et d'autres questions, nous aurions terminé le rapport de vérification et nous l'aurions émis. Cependant, comme les facteurs extérieurs avaient une incidence sur les données contenues dans les états financiers, le temps est passé et nous n'avons pas eu la possibilité d'y mettre une touche finale. Si le conseil avait approuvé les états financiers à l'époque, nous aurions pu publier notre rapport de vérification.
Le sénateur MacEachen: Est-il exact de dire que ce rapport n'a pas été émis par ce que le conseil d'administration de l'a pas approuvé?
M. Radburn: Je crois que le conseil d'administration découvrait les événements au fur et à mesure qu'ils se produisaient et il a estimé qu'il valait mieux appréhender les conséquences de ces événements avant d'approuver les états financiers. C'est parce qu'il ne les a pas approuvés que nous n'avons pas pu émettre notre rapport de vérification.
Le sénateur MacEachen: Monsieur le président, j'ai cru comprendre que la vérification ou la demande de vérification avait pour objet d'obtenir un instantané de la situation, à l'époque où M. Shannon est devenu président. Il était question de fournir au nouveau président et au conseil d'administration un examen de la situation à cette date, examen qui aurait fait autorité.
M. Radburn: C'est exact. Au fait, les états financiers que vous avez devant vous constituaient cet instantané, la seule différence étant qu'ils n'ont pas fait l'objet d'un rapport de vérification.
Le sénateur MacEachen: Qui fournissait ces états financiers?
M. Radburn: La production des états financiers relève de la responsabilité de la direction. C'est elle qui les prépare. Nous étions prêts à émettre un rapport de vérification à leur sujet, mais, comme je l'ai dit, d'autres événements sont survenus. Quoi qu'il en soit, les états que vous avez devant vous sont un instantané à la date du 1er octobre.
Le sénateur MacEachen: Un instantané que le Bureau du vérificateur général pourrait estimer fiable et comme faisant autorité?
M. Radburn: Oui, et si d'autres événements ne nous en avaient empêchés, nous aurions pu produire un rapport de vérification.
Le sénateur MacEachen: De quels événements parlez-vous?
M. Radburn: Principalement du fait que les documents de planification qui avaient été soumis n'avaient pas encore été approuvés par le gouvernement. Nous trouvions un peu gênant d'émettre un rapport de vérification avant que le plan d'entreprise ne soit autorisé, parce que certaines des mesures que la Société entrevoyait de prendre n'avaient pas reçu l'assentiment du gouvernement. Il s'agissait certainement là d'un facteur à ne pas négliger. Puis, par la suite, il y a eu toutes les décisions concernant la tenue d'audiences publiques et plusieurs autres questions.
M. John O'Brien, directeur principal, Opérations de vérification, Bureau du vérificateur général: Monsieur le président, l'un des aspects auquel nous nous intéressons ici est celui de l'évaluation des ressources. La valeur des actifs dépend beaucoup des plans d'avenir de la Société. Tant que ces plans ne sont pas formulés, approuvés et acceptés, il est difficile d'attribuer une valeur raisonnable à ces actifs. Le plan en question, qui a finalement été approuvé en mai de cette année, est assez différent de celui qui avait été proposé par la Société et dont débattait le conseil d'administration; c'est ce plan qui nous aurait servi de base pour déterminer la valeur des actifs, en octobre dernier.
Donc, les choses évoluaient. Nous le savions et, au fond, si nous avions effectivement émis un rapport de vérification fondé sur des hypothèses et des données apparaissant dans un plan qui n'avait pas été accepté par le gouvernement, nous aurions alors dû supposer ce que celui-ci aurait approuvé pour cette société.
Le sénateur MacEachen: Pour ce qui est de l'évaluation des actifs, comment vous y prenez-vous dans le cas d'une houillère, comme Phalen et Prince? Comment leur attribuez-vous une valeur?
M. O'Brien: Dans le premier cas, nous effectuons une évaluation des actifs au prix de revient, ce qui correspond aux dépenses totales encourues. Puis, on se penche sur l'utilisation de ces actifs dans l'avenir et sur l'utilisation que la direction projette d'en faire. Par exemple, si l'on ne prévoit pas d'utiliser ces actifs dans l'avenir ou qu'on n'envisage pas qu'ils puissent rapporter quelque chose, la direction doit les dévaluer à un niveau correspondant à la future MBA.
Le sénateur MacEachen: Par exemple, a-t-on attribué une valeur quelconque d'actif au charbon qui se trouve dans la mine Donkin? Comment considérez-vous ce charbon? S'agit-il d'un actif à valeur nulle?
M. O'Brien: Le charbon du sous-sol est essentiellement considéré comme faisant partie des avoirs libres. Les actifs apparaissant au bilan correspondent aux frais subis par la Société ainsi qu'à ceux qu'elle projette et qui auront un rapport avec l'exploitation future du charbon. Cependant, si ce charbon reste dans le sous-sol, il n'a aucune valeur aux fins comptables.
Le sénateur MacEachen: Mais ce qu'on appelle les étais de mine ont tout de même une valeur.
Le sénateur Murray: Ils ont été radiés il y a des années.
M. O'Brien: Dans le cas de Donkin, tous les coûts ont été radiés il y a des années.
Le sénateur MacEachen: Quelqu'un est venu témoigner au sujet du plan quinquennal de la Société. On nous a remis des projections sur le chiffre d'affaires, la production, les revenus, les coûts de pension et ainsi de suite. Pouvez-vous nous aider à évaluer la fiabilité du plan quinquennal de l'entreprise, ou nous aider à tirer certaines conclusions à son sujet?
Autrement dit, si ce que je viens de vous demander n'est pas vraiment de votre ressort ou si vous n'êtes pas en mesure de me répondre, pourriez-vous nous dire sur quel critère ou quelles lignes directrices nous devrions nous appuyer pour évaluer la fiabilité du plan d'entreprise?
M. Radburn: Je crois que vous avez deviné notre réponse. Nous n'effectuons pas de vérification des plans d'entreprise. Ce genre de plan comporte un certain nombre d'hypothèses et de calculs qui échappent à notre examen et, par conséquent, nous ne pouvons pas vraiment formuler de commentaires quant à la fiabilité des plans; dans ce cas, ils nous ont permis de constater le sens des responsabilités de la direction et le fait qu'elle a organisé un certain nombre d'audiences publiques. Plusieurs organismes ont eu la possibilité de voir ce plan et de le commenter. Cela étant, certaines modifications y ont été apportées et nous disposons à présent d'un plan qui a été approuvé par le gouvernement.
Pour ce qui est des critères, je crois que vous avez déjà demandé à la direction de l'entreprise de vous fournir des données à l'appui des chiffres avancés, et j'appuie la décision du comité à cet égard parce que ces chiffres sont tous fondés sur une série d'hypothèses d'avenir. J'estime que le comité devrait être au courant de ce que sont ces hypothèses et ces données d'appoint.
Le sénateur MacEachen: Je me rappelle que nous avons demandé ces données d'appoint, mais je ne me rappelle plus exactement ce en quoi elles devraient consister. Quel genre d'information d'appoint le comité devrait-il examiner, selon vous?
M. Radburn: Si je puis vous faire une suggestion, monsieur le président, je dirais que ces projections devraient notamment porter sur les augmentations du chiffre d'affaires. Je pense, par ailleurs, que vous voudrez peut-être savoir qui seront les acheteurs de charbon et de quel volume il sera question, et peut-être même quel sera le prix moyen. Tout ce qui est développement et production est synonyme de dépenses. Vous voudrez peut-être disposer de données expliquant ces coûts, et vous voudrez peut-être aussi connaître les hypothèses sur lesquelles ils reposent, ainsi que les niveaux de temps supplémentaire et d'absentéisme qu'on envisage. Ce sont là quelques suggestions qui me viennent très rapidement à l'esprit.
Le sénateur MacEachen: Eh bien, je les trouve fort utiles. Pourriez-vous continuer à y réfléchir et remettre au comité une liste de ce que nous devrions demander?
M. Radburn: Si c'est ce que veut le comité, nous serons heureux de nous rendre à cette requête.
Le président: Le comité vous le demande effectivement, mais je vous invite à le faire le plus vite possible, parce que nous courons contre la montre. Nous voulons très vite produire un rapport qui soit le plus complet possible, certainement d'ici la fin du mois. Tel est notre mandat. Nous vous demandons donc de nous faire parvenir votre réponse dans les plus brefs délais.
Le sénateur MacEachen: Le gouvernement dispose de ce plan d'entreprise, qui a été remis par la direction. Normalement, il a été examiné par le Conseil du Trésor, par le Cabinet et par un comité du Cabinet. Est-ce que le Bureau du vérificateur général pourrait être invité à participer à l'évaluation de ce plan, ou est-ce que vous l'avez déjà été?
M. Radburn: Nous n'avons pas participé à cette évaluation, parce que nous n'y avons pas été invités. Ce qui nous intéresse dans l'examen d'un tel plan, ce sont les éléments qui pourraient avoir une incidence sur les états financiers de la Société, comme ceux qu'a mentionnés M. O'Brien, à savoir: le degré d'activité qu'envisage la Société et les actifs fixes qui continueront d'être exploités, par rapport à ceux qui ne le seront plus. Nous examinerions les documents afin de nous assurer que les états financiers sont conformes aux propositions contenues dans la proposition de plan d'entreprise et, en fin de compte, dans le plan approuvé.
Le sénateur MacEachen: Comme vous êtes les vérificateurs de la Société depuis sept ans maintenant, auriez-vous quelques remarques à formuler pour aider ceux qui sont à présent chargés d'examiner le plan?
M. Radburn: En notre qualité de vérificateurs, nous examinons les renseignements qui sont nécessaires à la formulation d'une opinion sur les états financiers.
Le sénateur MacEachen: Donc, votre analyse est entièrement rétrospective?
M. Radburn: Essentiellement, oui. Dans le cadre d'un examen spécial, nous devons également nous pencher sur la capacité future de la Société de faire face aux problèmes auxquels elle est confrontée dans le présent. Donc, une des raisons d'être de l'examen spécial est de nous assurer que la Société est bien préparée à affronter les problèmes des années à venir. Cependant, nous n'examinons ni n'évaluons la fiabilité de la planification de la Société, à aucun titre.
Le sénateur Murray: Merci, monsieur Radburn et monsieur O'Brien de vous être rendus à notre invitation à un si court préavis. C'est sans doute la meilleure, pour ne pas dire la seule occasion que le comité aura d'entendre un point de vue véritablement indépendant et expert sur certaines des questions dont nous débattons ici.
Est-ce que l'un de vous, ou les deux, êtes personnellement intervenus dans le dossier de la Société de développement, au cours de ces sept années?
M. Radburn: Pour les quatre premières années, nous avons confié la vérification à contrat, à une firme de comptables privée qui s'occupait de la Société de développement dans le passé, cela afin d'assurer la continuité et de nous donner le temps de faire connaissance avec la Société. Ce n'est qu'après 1993 que nous sommes intervenus directement dans le dossier.
Le sénateur Murray: Et pourtant, le rapport d'examen spécial de 1992 porte la signature du vérificateur général lui-même, M. Desautels.
M. Radburn: C'est exact. En vertu de la Loi sur l'administration financière, le vérificateur général est aussi, presque automatiquement, l'examinateur. Notre bureau effectue les examens spéciaux, même si, dans le passé, notamment en 1992, nous avons confié le travail de vérification annuelle à contrat.
Le sénateur Murray: Donc, vous vous chargez des examens spéciaux?
M. Radburn: Oui.
Le sénateur Murray: D'après la réponse que vous avez fournie au sénateur MacEachen, vous n'examinez pas véritablement le plan d'entreprise, mais vous vous penchez sur tous les aspects susceptibles d'avoir une incidence sur les états financiers de la Société. Cela devrait, selon moi, s'appliquer à la plus grande partie du plan d'entreprise.
Quoi qu'il en soit, j'ai ici votre rapport, comme nous tous d'ailleurs, je pense. Celui-ci a été effectué durant la période 1991-1992, au moment ou Devco prévoyait, dans son plan d'entreprise, de devenir financièrement autonome avant le 1er avril 1995. Vous avez joint au plan les critères d'examen sur lesquels vous vous êtes appuyés. Il y en a 26 à partir desquels vous avez évalué l'efficacité et la rentabilité de la Société et de ses systèmes et méthodes, le tout sous cinq titres: Exploitation minière, Environnement, Marketing, Ressources humaines et Affaires internes.
Dans son rapport, M. Desautels souligne que le plan d'entreprise de la Société fait état d'une phase de transition qui devait permettre à Devco d'atteindre l'autonomie financière au 1er avril 1995.
La Société est aux prises avec une concurrence nationale et internationale très dynamique, de même qu'avec une législation exigeant une meilleure protection de l'environnement, tant en ce qui concerne ses opérations que ses clients, sous la forme d'une réduction des émissions de soufre par les utilisateurs de ses produits.
Plus loin, on peut lire dans le rapport:
La Société relève ces défis de façon énergique. Jusqu'ici, elle a déployé des efforts importants pour rationaliser ses opérations, en modifiant en profondeur son organisation, ses effectifs et ses opérations. Elle a réussi tout cela en faisant porter l'accent sur une perspective commerciale, en élargissant son palier de clientèle et en augmentant son chiffre d'affaires à l'exportation.
Puis, le vérificateur général émet l'opinion suivante:
Selon nous (...) on peut raisonnablement conclure qu'il n'existe pas de défauts graves ni dans les systèmes ni dans les méthodes examinés.
Sauf pour ce qui suit.
Le vérificateur fait en effet état de quatre problèmes: d'abord, la nécessité de mieux cerner les réserves houillères de Prince; deuxièmement, la nécessité de régler les problèmes touchant aux expositions ambiantes et aux risques environnementaux; troisièmement, le nombre d'accidents et, quatrièmement, l'absentéisme.
À l'exception de ces quatre problèmes qu'il fallait résoudre, le vérificateur général a estimé que les systèmes et les méthodes examinés ne présentaient aucun défaut grave. J'en conclus que, pour le vérificateur général, le plan d'entreprise tel qu'il se présentait en 1992, était fiable et réalisable. Cette conclusion n'est-elle pas justifiée par ce rapport?
M. Radburn: Sénateur, je ferais une distinction entre l'analyse de la planification de la Société au regard des critères énoncés et la réalisation d'une vérification ou la formulation d'un avis professionnel quant à la qualité du plan en question. Nous nous sommes penchés sur le processus de planification de Devco et avons estimé que celui-ci énonçait les alternatives et les possibilités voulues, et ainsi de suite. Je crois qu'à cette époque, la direction a formulé un plan que nous n'avions pas évalué de façon indépendante, et sur lequel nous n'avions tiré aucune conclusion, mais nous avons tout de même examiné le processus de planification et évalué la capacité de la direction de préparer les plans en question. Voilà qui répond en partie à votre question, sénateur.
Le sénateur Murray: L'objectif principal était d'amener la Société à l'autonomie financière au 1er avril 1995. C'est là l'essentiel des états financiers. Si, à l'examen des systèmes, des économies possibles, de la rentabilité et de l'efficacité de l'entreprise vous aviez constaté, d'après les 26 critères énoncés, que la Société n'aurait pu parvenir à l'objectif fixé, vous l'auriez dit, n'est-ce pas?
M. Radburn: Je crois que oui, sénateur. Nous avons indiqué que la Société était en train de s'organiser pour faire face aux défis que vous avez mentionnés plus tôt, mais à ce stade, elle n'avait pas encore fait complètement le tour de la question.
Le sénateur Murray: D'après ce que je crois savoir, le plan d'entreprise est mis à jour chaque année, de sorte que le plan quinquennal est systématiquement renouvelé.
M. Radburn: C'est exact.
Le sénateur Murray: Avez-vous vu le tout dernier plan quinquennal auquel le sénateur MacEachen faisait allusion, celui qui a été approuvé par le gouvernement le mois dernier?
M. Radburn: J'ai un exemplaire du sommaire de ce plan.
Le sénateur Murray: Vous en avez fait un examen empirique, mais vous ne l'avez pas examiné dans le cadre de vos responsabilités?
M. Radburn: Nous en avons reçu une copie à l'occasion de notre vérification annuelle.
Le sénateur Murray: Vous-même ou M. O'Brien avez très justement dit, il y a quelques minutes, que le plan d'entreprise pour les cinq prochaines années, qui a finalement été approuvé le mois dernier, est très différent de celui qui vous avait été remis au moment de la préparation de votre rapport de 1995.
M. Radburn: C'est exact.
Le sénateur Murray: Dans votre rapport de 1995, on peut lire:
Au cours de cette période intérimaire, la direction a élaboré un plan d'entreprise qui a permis de définir la nécessité de procéder à une importante restructuration afin que la Société puisse atteindre son objectif. Le plan de restructuration a reçu l'approbation définitive du conseil d'administration le 20 novembre 1995. Celui-ci prévoit la réduction de certaines activités ainsi que la réduction de l'effectif d'environ 800 employés, au cours des quatre prochaines années.
Avez-vous déterminé si ce plan pouvait permettre de réaliser l'objectif d'autonomie financière?
M. Radburn: On nous a soumis une série de plans et d'options. Il appartient à la direction et au conseil d'administration d'opter pour une des possibilités énoncées. Comme je l'ai dit plus tôt, nous n'avons pas évalué le plan pour savoir s'il était fiable. Nous n'avons pas vérifié les données qui le sous-tendaient. Nous l'avons considéré comme étant une orientation de la direction et nous avons essayé de refléter dans les états financiers ce qu'il contenait et la meilleure option qu'il présentait à ce moment-là.
Puis, d'autres facteurs ont occasionné des changements. Nous disposons à présent d'un plan, élaboré par la direction, approuvé par le conseil d'administration et par le gouvernement, plan dont la mise en oeuvre est autorisée.
Le sénateur Murray: Un autre facteur est la somme de 79 millions de dollars qui vient du gouvernement du Canada. C'est à cela que tient la différence principale entre les deux plans?
M. Radburn: Effectivement, entre les deux périodes, on avait indiqué dans le plan que le gouvernement s'était engagé à fournir un prêt d'un maximum de 79 millions de dollars, mais cela n'avait pas été confirmé pour la période se terminant en octobre.
Le sénateur Murray: Dans le premier plan, la Société avait envisagé de fermer progressivement la houillère Prince et de se retirer du marché d'exportation et, à toutes fins utiles, d'interrompre l'approvisionnement de Nova Scotia Power. Dans le second plan, elle indique qu'elle pourrait produire et vendre, en faisant de l'argent, 3 millions de tonnes de plus sur la période de cinq ans. L'effort de commercialisation est un autre critère.
Je suppose que, dans votre première étude, vous avez confirmé la validité de ces possibilités et projections commerciales. Je suppose que vous avez aussi examiné combien d'argent nous perdons, si nous en perdons, sur les marchés d'exportation. L'avez-vous fait?
M. Radburn: Lors de l'examen spécial, nous nous sommes penchés sur les opérations minières et sur la commercialisation. À l'époque, la direction en place augmentait son chiffre d'affaires à l'exportation. Les choses paraissaient alors prometteuses.
Le sénateur Murray: Le rapport de 1992, qui porte sur 1991 et 1992, semble plutôt contraire aux conclusions de M. Shannon au sujet de la direction, des contrôles alors en place, surtout en ce qui concerne le processus budgétaire. Je vais vous lire certaines des remarques de M. Shannon, extraites de nos comptes rendus.
Le 27 mai, il nous a présenté certains tableaux et a déclaré:
La ligne noire correspond au budget mensuel entre avril 1991 et juin 1995. La ligne rouge correspond aux dépenses réelles. Comme vous pouvez le voir, les prévisions budgétaires n'ont jamais été respectées, pendant aucun mois, pour le secteur de la mise en valeur de la mine Phalen.
Plus tard, le sénateur MacEachen lui dit:
Si je comprends bien, dans tous les cas envisagés, on a fait moins que ce qui était prévu.
M. Shannon: C'est vrai pour ce qui est du travail effectué, mais c'est exactement le contraire pour ce qui est des sommes dépensées. Autrement dit, on a fait moins de travail que prévu dans le budget, mais on a quand même dépensé plus que ce qui était prévu -- alors que ça aurait dû être exactement le contraire.
Le sénateur MacEachen: Et cela vaut depuis 1991?
M. Shannon: Oui (...) les travaux effectivement réalisés ont été inférieurs à ceux qui avaient été prévus dans le budget.
Quand nous avons fait ce constat, nous nous sommes interrogés sur la qualité du processus budgétaire.
Un peu plus tard, M. Shannon dit:
Nous avons perdu environ 2 millions de dollars sur nos ventes de charbon à la Nova Scotia Power Corporation, et environ 23 millions de dollars sur nos ventes à l'étranger.
Puis, il affirme:
À mes yeux, il y a manifestement quelque chose qui ne va pas dans ce budget. Après avoir analysé les chiffres, j'ai conclu qu'on avait établi un budget de convenance pour essayer de convaincre Ottawa que la mine gagnerait de l'argent cette année.
Enfin, plus tard, il déclare:
C'est cela. En fait, après cette analyse, nous ne pouvions nous fier ni au plan d'entreprise, ni au processus de budgétisation.
Ce témoignage, messieurs, semble plutôt contraire aux conclusions que vous avez tirées pour la même période dans votre rapport de 1992 et même dans votre rapport de 1995.
M. Radburn: Les commentaires de M. Shannon sont l'expression de son inquiétude vis-à-vis du processus budgétaire. Je crois que les données soumises étaient exactes, puisqu'il y avait un écart entre les chiffres réels et les chiffres projetés. Je ne sais pas si le budget était imprécis ou si la direction, avec le temps, n'a pas été en mesure de respecter le budget. Personnellement, j'estime que c'est une bonne chose qu'un budget soit un peu ambitieux, parce qu'on peut penser qu'il sert alors à stimuler les gens à faire de leur mieux. Cependant, comme le savent toutes les personnes assises autour de cette table, pour ce qui est des opérations d'extraction de la houille, nous avons assisté à un certain nombre de revers imprévisibles qui ont occasionné des écarts sur le plan des travaux de développement et de la production. Il est toujours difficile de prévoir quand ce genre de chose se produira et de déterminer l'étendue des retards qui en découlera.
Dans plusieurs cas, il est devenu habituel de ne pas atteindre les sommes prévues au budget.
Plusieurs autres exemples qui, je crois, ont été mentionnés, touchaient à l'absentéisme et au temps supplémentaire. À plusieurs reprises, les différentes équipes de direction ont essayé d'abaisser ces chiffres.
Le sénateur Murray: Voici ce qu'il a dit:
Je pense qu'on pourrait affirmer que le système de la compagnie était déficient. Il n'y avait pas beaucoup de contrôles en place.
Ce n'était pas là votre constat. Je suis certain que vous examinez les contrôles en place quand vous vérifiez une société d'État.
M. Radburn: Effectivement. Nous le faisons dans le cadre de notre vérification annuelle. Il est possible que M. Shannon ait exagéré la situation quant à la faiblesse des contrôles.
Dans les rapports antérieurs, nous avons signalé à la Société qu'elle devait renforcer ses contrôles dans certains domaines.
Pour ce qui est de cette déclaration de lundi soir, je vais demander à John O'Brien de vous donner quelques exemples du genre de travail que nous faisons dans le cadre de notre vérification annuelle.
M. O'Brien: Pour ce qui est de notre vérification annuelle, nous nous penchons essentiellement sur les contrôles qui nous permettent de formuler une opinion de vérificateur. Tout d'abord, il appartient à la direction d'exploiter un système de contrôles internes. Nous nous intéressons aux contrôles qui nous permettent de déterminer si les états financiers comportent des inexactitudes importantes.
Je crois que dans un des exemples qui a été mentionné lundi soir, il était question d'une même personne qui avait la possibilité de commander et de recevoir les marchandises. J'ai cru comprendre que c'est ainsi que les choses devaient se passer. Et pourtant, je crois savoir que ce système s'articule autour d'un ensemble de mots de passe empêchant quiconque de s'immiscer dans le système. Ainsi, pour tout achat jusqu'à concurrence de 50 000 $, le supérieur de l'agent doit donner son approbation. Pour tout achat de plus de 50 000 $, trois autorisations sont nécessaires. Enfin, pour les achats de plus de 250 000 $, c'est le conseil qui doit donner son autorisation.
Le service de la Vérification interne de notre organisme effectue régulièrement des recensements de stock, dans le cadre de notre travail. Nous essayons de déterminer s'il existe un écart entre ce qui est indiqué aux livres et ce qu'a donné notre inspection. Nous-mêmes, et les gens du service de la Vérification interne, suivons cela de près. L'utilisation des matériaux et les dépenses font l'objet de comptes rendus réguliers. Les contrôleurs sur place effectuent une vérification mensuelle; ils sont responsables de mettre en relief tout écart par rapport aux prévisions. Les budgets font l'objet d'un examen.
Dans ce cas, afin de pouvoir rendre une opinion de vérificateur, nous avons été en mesure de cerner les contrôles sur lesquels nous pouvions nous fier.
Le sénateur Murray: Dans votre rapport de 1995, vous dites à propos des pensions que, selon une évaluation actuarielle en date du 31 octobre 1995, le régime de pension non contributif de la Société faisait l'objet d'un passif non capitalisé de 55,3 millions de dollars. Vous faites aussi état d'un surplus de 4,5 millions de dollars dans le régime de pension contributif, constaté à l'occasion d'une évaluation actuarielle.
Nous avons eu ici des échanges en forme de débat, sur ce qu'on appelle les coûts sociaux. Quand on remonte à 1968, on voit ce qu'il a fallu débourser pour réduire les effectifs et favoriser les départs anticipés à la retraite. Est-ce finalement en 1982 que le régime de pension contributif obligatoire a été adopté?
M. O'Brien: C'est cela.
Le sénateur Murray: Les employés embauchés avant cette date bénéficient d'un régime de pension non contributif, comme on vient de le signaler, régime qui fait maintenant l'objet d'un passif non capitalisé assez important.
Je me demande si je peux obtenir un avis de votre part sur cette question, mais je vais tout de même essayer. Quand M. Kent a comparu devant nous, et qu'il nous a rappelé l'historique de la Société, il nous a précisé que l'ancienne compagnie n'offrait pas de régime de retraite. Voici ce qu'il a dit:
... au début des années 70, tous ce sur quoi les mineurs à la retraite pouvaient compter à partir de 65 ans, c'était le Régime de pensions du Canada, et dans ces années-là c'était très peu. Les prestations n'étaient pas très élevées, mais on peut, je crois, justement dire qu'elles ont beaucoup aidé dans l'environnement social de Cap-Breton. J'ai toujours soutenu que la grande majorité de ces coûts de pensions n'ont pas vraiment contribué au déficit de Devco. La plupart des mineurs avec pension...
Je crois qu'on aurait dû dire «pensionnés»...
... travaillaient pour DOSCO...
C'est-à-dire, le prédécesseur de l'entreprise privée.
... qui n'avait rien prévu pour eux. Une industrie en pleine restructuration, qui s'acquitte d'obligations sociales contractées par un prédécesseur envers d'anciens employés, transporte un fardeau qui est lié au passé et non à ses opérations actuelles. Je dois dire cependant que le ministère des Finances n'a jamais été d'accord avec ce point de vue. Il préfère penser que Devco est une opération coûteuse.
Je ne veux bien sûr pas vous demander de commenter les motifs du ministère des Finances, mais il est, je crois, juste de vous demander quelle partie de ce passif est attribuable au bilan actuel de Devco.
M. Radburn: Nous estimons que ces états financiers sont le reflet des actifs, des obligations et des résultats d'exploitation de Devco. On pourra toujours soutenir que le gouvernement est responsable d'assumer les obligations du prédécesseur de cette société, mais pour l'instant, celles-ci incombent à Devco et elles sont clairement reflétées dans les états financiers. Le fait de déterminer si tel doit être le cas ou non sort des cadres d'une présentation fidèle des états financiers et relève d'une discussion plus large.
Le sénateur Murray: Effectivement. Depuis longtemps maintenant le vérificateur général a une vision beaucoup plus large de son rôle. Je crois d'ailleurs que la loi le lui autorise et même l'y encourage. Avez-vous constaté à l'occasion de vos vérifications l'existence d'une situation semblable chez d'autres sociétés d'État?
M. Radburn: Oui, il existe une autre situation à peu près semblable. On ne parle pas de coût social pour en décrire la nature, mais plutôt d'obligations environnementales. Nous avons en effet émis une réserve dans le cas d'Énergie atomique du Canada limitée, parce qu'elle n'avait pas indiqué dans ses états financiers les obligations environnementales qui lui incombent. Voilà donc un autre exemple. La Société a soutenu, comme d'autres témoins d'ailleurs je crois l'on fait ici, que cette responsabilité revient au gouvernement. La difficulté ici consiste à amener le gouvernement à l'admettre.
Le sénateur Murray: Effectivement.
M. Radburn: C'est un peu la même chose dans cet exemple.
Le sénateur Murray: Je ne connais pas les détails du cas d'EACL, mais je me demande si, dans le cas qui nous intéresse, le vérificateur général ne devrait pas revoir les responsabilités qui lui incombent et se prononcer sur la partie des coûts que le gouvernement devrait effectivement assumer.
M. Radburn: Nous ne l'avons pas fait dans ce cas, ni dans l'autre cas que j'ai mentionné. Au bout du compte, cette responsabilité appartient au gouvernement du Canada. Peu importe que le premier concerné soit le gouvernement ou la Société, il y a une obligation dont il faut s'acquitter et nous estimons que les sociétés d'État font partie du gouvernement en général. Je suppose qu'on pourrait toujours évaluer la responsabilité et la répartir. Nous ne l'avons pas fait parce que nous estimons, d'abord et avant tout, que c'est Devco qui doit effectuer les paiements.
Le sénateur MacEachen: Je veux enchaîner dans la veine des questions du sénateur Murray, parce que les réponses qui lui ont été faites m'intéressent. Je veux lire, pour le procès-verbal, un paragraphe du témoignage de M. Shannon qui, à première vue, semble choquant. Mais peut-être qu'au bout du compte, il ne l'est pas.
M. Shannon parlait d'une enquête dans une mine. Voici ce qu'il dit:
Pour vous donner une idée des résultats de l'enquête, elle nous a appris qu'il y avait, à l'usine de lavage de Victoria Junction, 3 665 paires de gants pour 121 employés, soit 29 paires par employé. À Phalen, il y en avait 11 000 paires, soit 13 par employé. Le 28 février, l'usine de lavage de Victoria Junction était fermée. Pourtant, ce jour-là, des paires de bottes d'une valeur totale de 1 000 $ ont été remises au personnel. En 1995, 252 paires de pantalons protecteurs pour les employés des brûleurs ont été livrés, alors qu'il y a au maximum 30 personnes qui en ont besoin.
Que pensez-vous de tout cela? Votre système a-t-il été conçu pour détecter les anomalies de ce genre? Est-il en mesure de le faire? Vous ne le faites pas parce que votre méthode n'est pas suffisamment au point ou parce qu'on ne s'attend pas à ce que vous le fassiez? Est-ce là une fonction qui incombe uniquement à la direction et qui échappe à la vérification?
M. Radburn: Je vais vous donner une amorce de réponse après quoi je demanderai à M. O'Brien de vous en dire plus.
Dans le cadre de notre vérification annuelle, nous effectuons des contrôles. Nous recensons les stocks. Nous comparons les stocks avec les registres de la Société. Bien qu'il nous soit arrivé de relever des écarts, nous sommes toujours parvenus à les expliquer et nous ne sommes jamais tombés sur le genre de situation que semblent traduire les nombres que vous avez cités. Mais je vais demander à M. O'Brien de nous faire part de ses remarques.
M. O'Brien: Il y a deux choses que j'aimerais dire. D'abord, notre responsabilité consiste à émettre une opinion sur les états financiers et nous devons nous attarder sur la notion d'importance relative et donc sur les sommes qui peuvent avoir une incidence sur la présentation fidèle des états financiers.
Deuxièmement, dans ce cas particulier, et pour revenir à ce qui a été dit plus tôt, j'ai cru comprendre qu'un employé avait, d'une façon ou d'une autre, obtenu le mot de passe de son supérieur. Quand un système est fondé sur la division des tâches et sur l'émission d'une autorisation par un supérieur, et que celui-ci n'est plus en mesure d'émettre cette autorisation parce que quelqu'un d'autre s'est procuré son mot de passe, le système s'effondre. Cela ne fait aucun doute. Mais il faut aussi y voir l'indication d'une défaillance individuelle.
Il est évident que tous les systèmes sont conçus pour que les gestionnaires conservent les pouvoirs qui leur ont été délégués et pour que personne d'autre ne soit autorisé à disposer des mêmes pouvoirs. Voilà ce que je comprends des cas particuliers qui ont été mentionnés.
Le sénateur MacEachen: S'agit-il d'un mot de passe informatique?
M. O'Brien: D'après ce que je crois savoir, c'est effectivement le cas.
Le sénateur MacEachen: Et ce mot de passe est tombé dans d'autres mains, accidentellement ou autrement?
M. O'Brien: C'est ce que je crois comprendre, sénateur.
Le sénateur MacEachen: Et c'est ce qui en a résulté?
M. O'Brien: Effectivement. C'est ainsi que je comprends la situation.
Le sénateur Stanbury: Je vais aborder un domaine dont nous n'avons pas encore parlé. Je crois savoir que sept personnes siégeaient au conseil d'administration. Elles avaient été nommées par décret.
Vous aurez peut-être l'impression de ne pas être en mesure de formuler de commentaires à ce sujet, mais ne vous livrez-vous pas à une évaluation quelconque de l'efficacité du travail d'intendance des conseils d'administration des sociétés d'État?
M. Radburn: En général, nous faisons rapport au conseil d'administration, et pas au sujet du conseil. Les responsabilités des conseils sont énoncées dans la Loi sur l'administration financière. Nous ne nous demandons pas si les conseils remplissent ou non leurs objectifs. Comme nous participons aux réunions du comité de vérification de Devco, nous avons une idée de ce qui se passe à l'échelon d'un des comités au moins, pour ne pas dire de tout le conseil. Le comité de vérification demande qu'on lui fournisse certaines informations qu'il obtient et dont il débat.
Cependant, je ne puis me prononcer sur l'efficacité du conseil.
Le sénateur Stanbury: Savez-vous a priori combien de fois le conseil se réunit?
M. Radburn: Nous nous réunissons avec les membres du comité de vérification pour soumettre un plan de vérification, puis nous nous réunissons de nouveau pour présenter les résultats de la vérification. Le conseil, lui, se réunit probablement quatre à six fois par an.
Le sénateur Stanbury: Et pour autant que vous sachiez, le comité de vérification ne se réunit que deux fois par an, est-ce exact?
M. Radburn: Il se réunit aussi souvent que le conseil, mais nous avons l'occasion de participer à ses réunions quand nous présentons notre plan de vérification puis quand nous soumettons les résultats de la vérification. Il peut se réunir plus souvent, mais nous, nous le voyons deux fois par an.
Le sénateur Stanbury: Il y a une chose qui m'inquiète: il semble qu'on ne contrôle pas suffisamment les opérations de la compagnie. Nous recevons des budgets qui sont très loin de la réalité. J'ai assez d'expérience dans ce domaine pour savoir que parfois, la direction et le conseil d'administration adoptent des budgets qui, comme vous le disiez, sont plutôt optimistes.
Mais jusque là à ce que cette situation se reproduise année après année... il faut bien qu'à un moment donné, les budgets aient une certaine crédibilité. On pourrait penser que tous ces gens voudraient que leurs budgets soient exacts au moins une fois de temps en temps.
Bien que je ne me sois pas intéressé à la chose de très près, il me semble que ce problème s'est reproduit année après année. Est-ce au conseil d'administration qu'il incombe de constater cette tendance et de faire quelque chose à ce sujet? Qui est responsable dans ce cas?
M. Radburn: Tout d'abord, c'est la direction qui est responsable de préparer des budgets et d'en débattre sérieusement lors des réunions du conseil. Au fil des ans, l'équipe de direction a été changée plusieurs fois. On a eu affaire à plusieurs styles et plusieurs approches. Récemment, c'est M. Shannon qui est intervenu. Il s'est penché sur ce qui s'était fait récemment et a formulé des propositions assez draconiennes. Un scénario optimiste prévoit que les plans approuvés par le gouvernement seront menés à terme, mais il est difficile de savoir ce qui se passera dans l'avenir.
Le sénateur Stanbury: Le syndicat a-t-il un statut d'observateur ou de membre au conseil?
M. Radburn: Je ne puis vous répondre. Si je me rappelle bien, je n'ai jamais aperçu de représentants du syndicat aux réunions du comité de vérification auxquelles nous avons participé.
Le président: Pour vous, est-ce que cela est bien ou mal?
M. Radburn: Officiellement, nous n'avons pas d'opinion. Ce rôle revient au gouverneur en conseil.
Le sénateur Stanbury: Avez-vous une opinion quant à la taille du conseil? Sept membres pour un conseil d'administration, cela me semble peu pour une société d'une telle taille. Disposez-vous de critères qui vous permettraient d'évaluer cela?
M. Radburn: Je ne pense pas que c'est une question de nombre, mais plutôt de qualité de membres siégeant au conseil. Un conseil peut comprendre cinq à sept membres. Plus leur nombre augmente, plus les choses se compliquent.
Ces dernières années, le gouvernement a réduit le nombre des nominations aux conseils d'administration. Dans le rapport du vérificateur général d'octobre 1993, nous avons exprimé notre inquiétude au sujet des conseils et de la planification de la relève, certains postes au sein de quelques conseils étant demeurés vacants pendant d'assez longues périodes. Nous pensions que les conseils devaient être responsables de planifier la relève, autrement dit, que les membres quittant le conseil devaient trouver les personnes convenant le mieux pour les remplacer. Je ne crois pas que les sociétés ont pris cette idée à coeur. Cependant, dans un rapport public d'octobre 1993, nous avons indiqué que, selon nous, la compétence devait être le premier critère de nomination des membres d'un conseil.
Le sénateur Stanbury: D'une façon générale, que pensez-vous de l'efficacité de l'intendance d'une société dont la responsabilité est partagée entre un conseil d'administration, un ministre et d'autres personnes. Si je ne m'abuse, trois entités ont la charge d'administrer la Société. L'absence d'unité d'administration pourrait bien occasionner une certaine confusion.
M. Radburn: Je suis content que vous posiez cette question. Nous nous sommes penchés sur le problème de l'intendance des sociétés d'État et avons déclaré, dans un rapport, que la chaîne de responsabilité faisait intervenir beaucoup trop de joueurs. Chacun devrait peut-être se demander comment il pourrait améliorer son rôle.
Dans notre rapport d'octobre 1995, nous avons indiqué certaines des mesures que pourraient adopter les différents joueurs, notamment la direction, le conseil d'administration, le gouvernement et le Parlement, pour améliorer l'intendance globale et la responsabilité des sociétés d'État. Beaucoup de personnes interviennent à ce titre. L'environnement est ici beaucoup plus complexe que dans la fonction publique.
Le sénateur Stanbury: Dans cette situation, j'ai l'impression que la responsabilité est répartie entre plusieurs intervenants et que personne ne semble vraiment suivre de près ce qui se passe dans l'exploitation de la Société.
Le sénateur Buchanan: Je vais peut-être passer à autre chose, aux mines de substitution, autrement dit aux possibilités de remplacer les deux mines actuelles.
Reportons-nous à la fin des années 70, à une époque où l'on s'inquiétait beaucoup de la situation et de la longévité de Devco. Après moult réunions, le gouvernement de Nouvelle-Écosse, le gouvernement fédéral et la Société de développement du Cap-Breton ont convenu qu'il faudrait explorer ailleurs, parce que la durée de vie utile des mines en exploitation à l'époque était limitée. La mine numéro 26 devait en effet fermer dans le courant de la décennie suivante. Malheureusement, elle n'a pas duré aussi longtemps à cause d'un incendie dévastateur. Autrement dit, les trois houillères -- dont une est maintenant fermée, Lingan, ce qui laisse Phalen, qui suit juste derrière -- auraient dû être fermées sans être remplacées par une nouvelle mine.
À l'époque, on a dépensé beaucoup d'argent pour chercher une nouvelle mine, surtout dans la veine du port des terrains houillers de Donkin. Plusieurs rapports ont été produits, par Ottawa d'une part, et par le gouvernement provincial et Devco d'autre part. J'en ai un ici.
Dans ces rapports, on semble dire qu'au cours de la prochaine décennie, ou à plus long terme, il faudra absolument trouver une nouvelle houillère au Cap-Breton si Devco doit continuer d'exister et de fournir du charbon pour répondre aux besoins sans cesse croissants de la Nova Scotia Power Corporation.
À l'époque, il fut décidé que la Nova Scotia Power Corporation allait très rapidement passer du mazout au charbon, ce qu'elle a fait. C'est ainsi que pour sa production d'électricité elle est passée de 60 p. 100 de mazout à 70 p. 100 de charbon, après la construction de Lingan 1, 2, 3, 4, après l'expansion de Point Tupper, puis l'expansion de Trenton et l'ouverture d'une houillère à Point Aconi. L'usage futur de ces houillères a fait l'objet d'un examen dans les études effectuées à l'époque.
Tout le monde estimait alors que la charbonnière Donkin présentait une certaine valeur. On s'entendait sur le fait que le meilleur charbon des terrains houillers de Sydney se trouvait dans la mine Donkin, dans la veine du port. On a alors retenu les services de Montreal Engineering et de Kilborn Engineering pour effectuer des analyses techniques de la mine Donkin.
À l'époque, Devco ne disposait pas des fonds nécessaires pour assumer les coûts du carottage. Le gouvernement fédéral, quant à lui, n'était pas disposé à financer le travail initial, si bien que c'est la province de Nouvelle-Écosse qui a dû débloquer un financement intérimaire pour permettre la venue d'un navire de forage, des États-Unis, en 1979. Nous avons payé pour cela. C'est ainsi qu'on a pu effectuer le carottage nécessaire dans la veine du port, et les résultats se sont avérés excellents. Je les ai ici. Comme j'étais très au courant de la situation à l'époque, je n'en ai pas eu trop besoin pour me rafraîchir la mémoire.
En 1981, le gouvernement fédéral a remboursé la province pour ce que lui avait coûté le navire de forage, après quoi on a décidé de creuser les tunnels de la nouvelle mine Donkin. Quand la décision a été prise de fermer la houillère 26, on a estimé que c'était la bonne chose à faire.
Les deux tunnels ont été percés et étayés. Je me le rappelle très bien. Je suis descendu dans l'un d'eux, quand il était en construction.
Les tunnels ont été inondés; c'est ce qu'il fallait faire parce qu'on n'allait pas exploiter la mine tout de suite. Quoi qu'il en soit, si on a inondé les tunnels à l'époque, c'est qu'on ne savait pas exactement quand l'exploitation de la mine pourrait commencer, même si ces tunnels débouchaient en plein sur le front de taille. Cela fait sept ans maintenant qu'on les a inondés, ou peut-être plus longtemps encore. Les ingénieurs miniers qui ont comparu devant ce comité nous ont déclaré que les tunnels étaient en excellente condition, qu'il ne faudrait que très peu de temps pour pomper l'eau à l'extérieur et que le béton était en excellent état justement parce qu'on les avait inondés. Si on ne l'avait pas fait, ils se seraient détériorés.
Si l'on a dépensé tout cet argent à l'époque, c'était pour trouver un substitut aux mines qui devaient fermer dans un proche avenir ainsi qu'aux houillères qui, à l'époque, avaient une vie utile de 15 ou 20 ans, de façon à aux besoins de la Nova Scotia Power Corporation qui venaient de passer d'un million de tonnes à 2,8 millions de tonnes de charbon d'un seul coup.
Je vous rappelle tout cela parce que je me demande si le Bureau du vérificateur général a fait quoi que ce soit, au cours des dernières années, pour déterminer s'il est possible, voire probable qu'une des deux mines en exploitation, ou les deux, puisse fermer dans les huit à dix ans à venir? On aurait dit que la durée de vie utile des houillères Phalen et Prince pouvait être de 10 à 20 ans.
À un certain moment, il n'est plus économique de continuer d'exploiter ces houillères. Plus les tunnels s'enfoncent sous l'océan et plus le temps de transport du charbon et des mineurs s'étire. Les coûts augmentent jusqu'au point où il n'est plus économique d'exploiter la mine. C'est ce qui s'est produit dans le cas de la houillère 26.
Il ne fait aucun doute qu'à un moment donné dans un proche avenir, il faudra fermer l'une des deux mines, ou les deux. Laquelle fermera-t-on d'abord, je ne le sais pas.
L'autre élément, qui est une source de préoccupation permanente, surtout dans le cas de Phalen, tient aux états financiers provisoires de Devco. Comme vous le savez sans doute, la houillère de Phalen est sujette à des affaissements du toit et à des dégagements de grisou. Il est donc normal qu'on doute de plus en plus du rendement de l'exploitation des réserves de charbon quand on est aux prises avec de tels problèmes géologiques.
Si ces problèmes continuent, la durée de vie utile de la mine Phalen pourrait passer de 15 ou 20 ans à 7 ou 8 ans. Si les coûts d'extraction du charbon et du développement de la mine augmentent au point où il ne soit plus rentable de vendre le charbon, il faudra peut-être fermer la mine. Dès lors, Devco se trouverait dans la difficile situation d'avoir à exploiter une seule houillère, sans pouvoir se replier sur une solution de remplacement et en devant tout de même répondre aux besoins de la Nova Scotia Power Corporation.
À l'heure actuelle, c'est l'avenir qui est surtout préoccupant à Cap-Breton. Est-ce que l'industrie charbonnière va devoir fermer d'ici cinq ou dix ans?
L'année dernière, un important effondrement de toit à la houillère Phalen a entraîné d'énormes dépenses. Encore une fois, je dois rendre hommage aux mineurs de Phalen qui ont littéralement nettoyé les débris au pic et à la pelle. Il n'en demeure pas moins qu'il en coûtera beaucoup à la Société de développement de Cap-Breton. La Société a en effet réservé une trentaine de millions de dollars pour le coût de développement et de nettoyage des problèmes géologiques. Elle prévoit d'avoir besoin d'autant d'argent.
Pour placer tout cela dans une juste perspective, ce qui préoccupe le plus des gens, c'est l'avenir. Dans son rapport intérimaire, la Société de développement du Cap-Breton indique, au nombre de ses immobilisations, la valeur aux livres de la houillère Prince et de la houillère Phalen. Quant à Donkin-Morien, la valeur est nulle. Je crois deviner que la ligne du dessous, «projet de développement de quelque 80 millions de dollars», concerne la valeur de Donkin. Est-ce exact?
M. O'Brien: C'est exact.
Le sénateur Buchanan: Il est indiqué que Donkin a déjà coûté 80 millions de dollars. Au fait, c'est beaucoup plus que cela. Si vous tenez compte du financement intérimaire de 1979-1980-1981, on approche les 100 millions de dollars.
Les coûts avancés pour terminer la charbonnière Donkin m'effrayent. J'ai ici les coûts dont il a été question à l'origine. En dollars de 1984-1985, on prévoyait que la production d'un million de tonnes coûterait environ 160 millions de dollars, pour donner un chiffre rond. Pour deux millions de tonnes, cette somme serait passée à plus de 200 millions de dollars.
Mais retenons le montant de 160 millions de dollars. À l'époque, personne n'a remis ces chiffres en question. Si vous déduisez les 80 millions de dollars, soit ce qu'il en aurait coûté pour ouvrir la nouvelle houillère Donkin produisant un million de tonnes, il reste tout de même 80 millions de dollars, en dollars de 1984-1985.
Je n'ai pas effectué le calcul pour voir à quoi correspond cette somme en dollars de 1996, mais on m'a dit qu'on pourrait sans doute y ajouter 25 à 30 millions de dollars ou quelque chose comme ça. Si l'on déduit la vente du charbon extrait dans la phase de lancement -- ce dont nous avons parlé avec les gens de Devco la semaine dernière, et aussi avec Steve Farrell, un excellent ingénieur minier --, ainsi que les coûts nécessaires au parachèvement de la houillère Donkin, pour pomper l'eau et l'amener au point où l'on puisse produire un million de tonnes de charbon, on en arrive à 100 à 130 millions de dollars de 1996. Et pourtant, dans les techniques d'effarouchement que certains ont employées, on a voulu faire croire qu'il pourrait en coûter jusqu'à 500 millions de dollars pour terminer la houillère Donkin, bien qu'on ait ensuite ramené ce chiffre à 400 millions de dollars.
Je me suis entretenu avec plusieurs représentants de l'industrie minière -- dont certains étaient associés à la United Mine Workers of America, d'autres étaient indépendants et d'autres enfin représentaient la direction de Devco -- qui m'ont confirmé que ce chiffre de 400 millions de dollars était ridicule, que quelqu'un avait lancé ce montant et avait déterminé que la mine ne serait jamais construite.
Nous disposons maintenant d'un autre chiffre qui nous a été communiqué la semaine dernière, à savoir 100 à 120 ou 130 millions de dollars. Et l'on me dit que si l'on amortit de tels coûts d'immobilisation sur une période normale, à des taux d'intérêt normaux, et si l'on ajoute les frais d'exploitation globaux de la nouvelle mine, on pourrait produire du charbon pour des coûts nettement inférieurs à ceux de Phalen ou de Prince.
Avez-vous examiné l'un ou l'autre de ces chiffres? Avez-vous calculé ce qu'il en coûterait pour terminer la mine Donkin? Vous êtes-vous penché sur les conséquences qu'il y aurait de ne pas remplacer Phalen ou Prince? Vous êtes-vous demandé ce qu'il adviendrait de Devco si Phalen ou Prince devait fermer sans qu'on dispose d'une autre mine sur laquelle se replier? Ce qu'on craint, à Cap-Breton, c'est que Devco ferme, c'est qu'on ordonne la fermeture de Devco. Dieu nous en garde.
Après m'être entretenu avec des gens comme Steve Farrell, Coady Marsh, Bill Shaw, qui connaissent tous cette industrie, j'en suis venu à me demander, en supposant qu'il n'y ait pas de solution de replis et que les problèmes de Phalen se poursuivent -- et il y a toutes les raisons de croire que les problèmes géologiques se poursuivront -- où se retrouvera l'industrie charbonnière de Cap-Breton.
Je sais que j'ai posé beaucoup de questions. Mais avant tout, vous êtes-vous interrogé quant à la longévité des deux mines actuelles? Deuxièmement, vous êtes-vous demandé ce qu'il en coûterait de produire du charbon s'il fallait continuer à s'enfoncer sous l'océan? Troisièmement, vous êtes-vous demandé ce qu'il en coûtera pour terminer la nouvelle mine Donkin, en plus des 100 millions de dollars qui ont déjà été dépensés.
M. Radburn: Vous avez posé effectivement plusieurs questions, dont la plupart échappent à notre rôle de vérificateur. Mais pour ce qui est des coûts, il est évident que plus on s'enfonce sous l'océan et plus ils augmentent, à cause du temps nécessaire à l'extraction du charbon, à cause aussi des problèmes de ventilation et du reste. Donc, plus on s'enfoncera sous l'océan et plus les coûts augmenteront. Tout le monde est d'accord.
Nous n'avons pas, dans le cadre de notre travail, effectué d'étude de faisabilité au sujet de l'ouverture de Donkin. Lors de vous audiences, on vous a proposé plusieurs chiffres, couvrant un vaste éventail de 100 à 500 millions de dollars, comme vous l'avez vous-même souligné. Cela nous montre bien qu'il est nécessaire d'entreprendre une étude de faisabilité pour savoir exactement ce qu'il en coûterait. Nous, nous ne l'avons pas fait. Par conséquent, nous ne sommes pas en position de commenter ce que pourraient être les coûts inhérents à l'ouverture de Donkin.
Cependant, dans le cadre de notre examen spécial, nous avons cherché à déterminer quelles étaient les réserves charbonnières prouvées et probables de la mine Prince. À l'époque, nous nous sommes fait assister par un expert, c'était en 1991-1992. La Société s'appuyait sur des projections qui n'allaient pas au-delà de trois ans. Notre expert était d'avis qu'il aurait fallu miser sur des projections quinquennales. Il faut en effet disposer de ce genre de chiffres quand on veut conclure des contrats sur 20 ans. Nous avons souligné que le fait de ne disposer que de projections sur trois ans constituait une grave carence, surtout étant donné la qualité du charbon dans certaines mines. Nous avons donc recommandé à la Société d'entreprendre d'autres études. Cela, nous l'avons fait à propos de la houillère Prince, et non pas de Donkin ni d'autres.
Je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'étant donné la nature des activités de Devco, celle-ci devrait mieux connaître les réserves houillères prouvées et probables sur lesquelles elle pourra compter dans l'avenir.
Nous sommes relativement limités par la proposition de la direction et par le fait que le gouvernement ait accepté le plan quinquennal établi pour Phalen et Prince. Donc, nous sommes limités à ce qui est dit dans le plan d'action de la Société.
Quant aux autres choses que la Société pourrait ou devrait faire, je ne suis pas certain que nous soyons en position de formuler quelque commentaire que ce soit.
M. O'Brien: Pour ce qui est de l'évaluation des actifs en fonction de la période d'amortissement, d'après ce qui est indiqué aux livres, Phalen a encore une durée de vie utile de sept ans. Nous avons examiné la chose et avons analysé les projections de la direction, et cette conclusion nous convient. Il est évident que certains risques sont associés à la houillère Phalen, comme l'indiquent les états du mois d'octobre. La direction l'a reconnu. De toute évidence, cet état de fait aura une incidence sur la réalisation du plan.
Le sénateur Buchanan: Je suis très intéressé par ce que vous avez dit. Recommanderiez-vous à ce comité la tenue d'une étude de faisabilité indépendante destinée à établir ce qui en coûterait effectivement pour amener la nouvelle mine Donkin à un niveau de production d'un million de tonnes, qui correspond au seuil initial que la direction a toujours retenu? De nombreux chiffres ont été avancés. L'autre soir, le syndicat a avancé un chiffre maximum de 100 millions de dollars. Quelqu'un nous a dit 120 millions de dollars. Les représentants de l'industrie minière ont cité publiquement, mais pas devant ce comité, une fourchette de 130 à 150 millions de dollars, moins le coût du charbon extrait durant la phase de développement, ce qui ne nous met pas très loin des chiffres du syndicat. Cependant, je n'ai entendu personne nous apporter quelque preuve que ce soit, ni nous citer quelque information qui aurait pu justifier un tant soit peu le chiffre de 400 millions de dollars.
Je me suis entretenu avec des gens qui connaissent bien le milieu, et ils ne voient pas pourquoi quelqu'un évoquerait la somme de 400 millions de dollars autrement que pour dissuader les gens de terminer la houillère Donkin. Sincèrement, je crois que c'est effectivement la raison. L'écart est grand entre 150 et 400 millions de dollars.
Monsieur le président, j'espère que ce comité recommandera notamment la tenue d'une étude pour obtenir des chiffres réels, selon certains paramètres, afin de savoir ce qu'il en coûterait pour terminer la mine Donkin et non pour la construire puisque c'est déjà fait.
Demandons aussi qu'on établisse la durée de vie utile de ces mines, pour savoir pendant combien de temps elles pourront continuer à produire du charbon de façon économique, parce qu'on en arrive à un point où l'on est tellement loin sous l'océan qu'il n'est plus économique d'aller chercher le charbon, surtout si on ne peut le vendre. La semaine dernière, quelqu'un nous a dit que la mine Phalen avait une durée de vie espérée de 25 ans. Jamais personne avant n'avait indiqué une telle chose. J'avais entendu dire que la durée de vie utile de Phalen pouvait être de 8, 10, et peut-être même 15 ans. La durée était la même dans le cas de Prince, en ce qui concernait l'extraction rentable du charbon. La semaine dernière, on nous a parlé de 20 et de 25 ans. Jamais auparavant je n'avais entendu mentionné de telles durées.
Je ne m'attends pas à ce que vous disposiez de données contredisant ou confirmant celles-ci. Mais, plus tôt, vous avez déclaré que vous vous appuyez sur une période d'amortissement de sept ans. Or, dans ses propres plans, la Société ne prévoit rien au-delà de cinq ans.
Alors, faut-il s'étonner qu'on dise dans les médias, et qu'on entende même à la Nova Scotia Power Corporation, que celle-ci devra songer à s'approvisionner ailleurs si elle n'obtient pas certaines assurances du côté de la Société de développement du Cap-Breton, et cela sans oublier que presque toutes les centrales thermoélectriques de la Nova Scotia Power Corporation tournent au charbon du Cap-Breton?
Voulez-vous réagir à cela?
M. Radburn: Il nous est difficile de vous dire quoi que ce soit à ce sujet. Nous vérifions les états financiers. Vous soulevez des questions qui sortent des cadres de notre rôle et de nos responsabilités.
Le sénateur Buchanan: Je m'en rends compte, mais comme tous les vérificateurs généraux avec qui j'ai pu traiter au cours des 25 dernières années, vous vous êtes également penchés sur ce que réservait l'avenir. Les vérificateurs examinent les états financiers et font des projections.
Il est maintenant important que quelqu'un s'intéresse à l'avenir de l'industrie minière du Cap-Breton. Le sénateur MacEachen a été le premier à soulever la chose. Notre comité a pour tâche de s'intéresser à la situation financière de Devco. Cependant, sa principale responsabilité est de s'intéresser à l'avenir de l'industrie charbonnière du Cap-Breton. Pour cela, nous devons savoir s'il est envisageable d'ouvrir une nouvelle mine, comme nous l'avons fait déjà en 1979, en 1980 et en 1981. Des tunnels ont été construits et ont été inondés.
M. Radburn: Il y a du bien-fondé dans ce que vous dites. La Loi sur l'administration financière exige la formulation d'un plan d'entreprise quinquennal. Étant donné la nature de Devco, il y aurait certainement lieu d'obliger la Société à planifier à termes de cinq ans et à se poser régulièrement le genre de questions que vous venez de soulever. Cependant, la loi exige actuellement qu'elle se conforme à des plans quinquennaux.
Le président: Voilà une série de questions certainement intéressantes et qui pourraient nous inspirer quand nous rédigerons notre rapport.
Le sénateur Stanbury a posé une question au sujet de la composition du conseil et de la possibilité d'obtenir des biographies.
Le sénateur Stanbury: Il est important que nous connaissions les membres du conseil et que nous sachions quelles sont leurs compétences.
Le président: Le sénateur Murray a soulevé ce point plus tôt. Peut-être pourrais-je demander au greffier d'assurer un certain suivi à ce sujet et de nous obtenir des renseignements complets sur les membres du conseil. Nous sommes d'accord?
Le sénateur Stanbury: Il serait également utile de savoir quels sont les comités en place. Ce matin, les témoins nous ont parlé du comité de vérification. Y a-t-il d'autres? Le cas échéant, quelles sont leurs responsabilités?
Le président: Nous demanderons au greffier d'obtenir aussi ce genre de renseignements.
M. Radburn: Monsieur le président, les comités du conseil, comme c'est indiqué dans le dernier rapport annuel sont: le comité de vérification, le comité des communications, le comité de l'environnement et le comité d'investissement du fonds de pension. Voilà les comités dont il s'agit, mais nous n'avons ici ni leur rôle ni leurs responsabilités.
Le sénateur Anderson: Les représentants syndicaux qui ont comparu devant ce comité la semaine dernière s'inquiétaient du nombre de contrats que Devco accorde à l'extérieur. Selon eux, les travailleurs syndiqués pourraient effectuer 75 p. 100 des contrats affermés.
Que pensez-vous de cette affirmation? Dans vos vérifications, vous êtes-vous intéressés aux détails de l'affermage? Cette pratique du recours à contrat a-t-elle permis à Devco d'économiser de l'argent?
M. Radburn: J'aimerais vous être plus utile. D'une façon générale, c'est une méthode pour laquelle optent de nombreuses sociétés afin de réduire leurs coûts. Nous ne nous sommes pas penchés sur les détails de la convention en matière d'affermage et nous ne pouvons commenter cette affirmation du syndicat sans savoir ce que coûte effectivement l'affermage par rapport au travail réalisé à l'interne. Nous devrions nous livrer à une comparaison des coûts. Je ne peux que supposer qu'à l'époque où la Société a décidé de confier certaines tâches à contrat, elle l'a fait après avoir effectué une analyse et avoir déterminé qu'il lui en coûterait moins. Mais je n'en ai pas la certitude.
Le sénateur Stanbury: Y a-t-il d'autres vérificateurs auprès de la Société, autres que vous-mêmes?
M. Radburn: Nous sommes les seuls vérificateurs de la Société de développement du Cap-Breton. En vertu des dispositions actuelles, nous nous sommes fait aider par un des cabinets comptables privés. Pour lui, c'était le prolongement d'un engagement antérieur, plus direct, mais nous sommes les seuls vérificateurs.
Le sénateur Murray: Je constate dans l'état de 1995, que les actifs de la houillère Prince ont été réduits de 20 millions de dollars. À ce point, Devco avait l'intention de passer à un seul quart de travail et d'exploiter Prince à temps partiel. Puisque la Société envisage maintenant de repasser à deux quarts toute l'année, je suppose que ses actifs devront être réévalués à la hausse.
M. O'Brien: Comme vous l'a dit M. Radburn plus tôt, ces états non jamais été émis ni complétés. En fait, dans les états financiers vérifiés qui ont été rendus publics, les actifs n'ont jamais été dévalués. Ils étaient fondés sur un plan prévoyant un seul quart de travail et sur une production nettement inférieure à celle qui avait été prévue dans le plan d'entreprise approuvé.
À l'évidence, la direction devra réévaluer les conséquences de cet état de fait sur la valeur de ses actifs. Par la suite, nous devrons vérifier ce qu'elle a fait. En bref, je dirais que nous devons effectivement reconsidérer la chose.
Le sénateur Murray: Nous avons deux documents devant nous. L'un est l'examen spécial de 1992 et l'autre l'ébauche du rapport de 1995. Compte tenu des critiques, implicites et explicites qui ont été formulées par l'actuelle équipe de direction à l'endroit de celle qui l'a précédée, et par les syndicats et d'autres à l'endroit de l'actuelle équipe de direction, je me dois de vous poser une ou deux questions.
Pour ce qui est de 1992, vous avez effectué une étude afin de déterminer, premièrement, si les actifs de la Société étaient protégés et contrôlés. Je crois comprendre de votre rapport que votre conclusion a été positive. Avez-vous quelques réserves à ce sujet? Vous avez rédigé quatre notes complémentaires: une au sujet de l'absentéisme, une au sujet du nombre d'accidents, une sur la nécessité de confirmer les réserves de charbon et la dernière sur les questions environnementales. D'après ces notes, avez-vous conclu que, dès lors, les actifs de la Société étaient protégés et contrôlés?
M. Radburn: Si l'on considère la nature des actifs ainsi que la valeur élevée des transactions touchant aux stocks de charbon et ainsi de suite, on peut effectivement le dire, sénateur.
Le sénateur Murray: Avez-vous conclu que les ressources financières, humaines et physiques de la Société étaient gérées de façon efficace et économique?
M. Radburn: Hormis les préoccupations que nous avons formulées à propos du nombre d'accidents et du taux d'absentéisme, oui.
Le sénateur Murray: Avez-vous conclu que la Société était exploitée de façon efficace?
Le président: Excusez-moi, sénateur. Histoire de préciser les choses, si je me rappelle bien, le représentant du syndicat nous a dit qu'un des problèmes était la façon dont on déterminait l'absentéisme. Pouvez-nous en dire plus à ce sujet? Si je me rappelle bien, il nous a indiqué que même les gens ne faisant plus effectivement partie de la main-d'oeuvre active, pour raison de maladie ou autre, étaient considérés comme étant absents et que cela augmentait le taux d'absentéisme en général.
Excusez-moi de vous avoir interrompu, sénateur Murray, mais je voulais obtenir une précision.
M. Radburn: Je ne me rappelle pas comment était établi l'absentéisme, si ce n'est que le taux m'a semblé très élevé par rapport à ce qui se passe ailleurs dans l'industrie du charbonnage.
Le président: Mais vous n'avez pas analysé sur quelle base on déterminait l'absentéisme, n'est-ce pas?
M. Radburn: Je n'en ai pas souvenir.
Le sénateur Murray: En un mot, vous avez accepté ce que la direction vous a dit à ce sujet. Vous n'êtes pas allé au-delà, n'est-ce pas?
M. Radburn: Je crois que nous avons effectué un certain travail pour essayer d'étayer les taux d'absentéisme. Mais je ne me souviens pas que nous avons fait quoi que ce soit afin de déterminer sur quoi la Société s'appuyait pour en arriver à ses chiffres. Quoi qu'il en soit, s'agissant d'absentéisme et de nombre d'accidents et d'incidents pendant les heures supplémentaires, les statistiques de la Société ont toujours été plus élevées que la moyenne de l'industrie.
Le sénateur Murray: Eh bien, comme vous avez pu le constater, cela est devenu un véritable objet de litige.
En êtes-vous arrivé à la conclusion qu'à partir de 1992 la Société était exploitée de façon efficace?
M. Radburn: Comme la nature des opérations consiste à développer une exploitation charbonnière et à extraire le charbon, pour le vendre ensuite, la Société faisait ce qu'elle était censée faire. Donc, on peut effectivement conclure que les opérations étaient conduites de façon efficace. Nous n'avons pas trouvé de défaut grave sur ce plan, outre que la direction n'avait pas une idée suffisante de ce qu'étaient les réserves prouvées et probables.
Le sénateur Murray: Vous effectuez une vérification annuelle. Vous en êtes à la moitié ou au trois quarts du travail de vérification annuelle pour l'exercice financier qui s'est terminé en mars dernier. Vous avez presque fini.
M. O'Brien: C'est exact, nous avons presque terminé.
Le sénateur Murray: Si je comprends bien, vous allez entreprendre un examen spécial quinquennal. Le prochain sera fait l'année prochaine, est-ce exact?
M. Radburn: Nous le débuterons à l'automne.
Le sénateur Murray: Vous avez effectué les trois quarts du travail. En vertu de la Loi sur l'administration financière, vous devez attirer l'attention du Parlement sur tout autre question tombant dans le cadre de cet examen et qui, de l'avis du vérificateur, mérite d'être soulignée. Je sais que vous n'avez pas encore terminé votre rapport. Je crois que nous sommes tous au courant que notre débat concerne la direction de la Société.
Selon vous, y a-t-il quoi que ce soit que notre comité parlementaire devrait savoir à ce sujet? Y a-t-il quoi que ce soit que vous pourriez nous signaler maintenant, avant que nous ne commencions à rédiger notre rapport?
M. Radburn: Nous n'avons pas encore reçu l'ébauche des états financiers, par conséquent, nous n'avons pas terminé notre travail de vérification. Je crains que nous n'en soyons pas au stade où nous pouvons conclure notre travail. Nous aurons besoin de deux ou trois semaines de plus pour ce faire.
Le sénateur Murray: L'ébauche que vous avez date du 31 octobre. Mais vous avez poursuivi votre travail depuis, n'est-ce pas?
M. Radburn: C'est exact.
Le sénateur Murray: À n'en pas douter, on retrouvera dans votre vérification annuelle certaines préoccupations de l'ordre du détail. Mais d'ici là, n'est-il pas quelques aspects préoccupant que vous voudriez dès maintenant porter à l'attention de ce comité? Par exemple, en ce qui concerne les systèmes ou la direction de la Société.
M. Radburn: J'aimerais vous être plus utile, monsieur le président. Dans l'ébauche des états que nous avons dressée en octobre, et que vous avez devant vous, nous n'avions rien à souligner en fonction des dispositions de la loi.
Le sénateur Stanbury: Depuis que le vérificateur général a commencé à se charger de la vérification des livres comptables -- et je pense vous avoir entendu dire que vous aviez débuté cela il y a trois ans --, avez-vous tous deux participé personnellement à ce travail de vérification?
M. Radburn: M. O'Brien y a pris part.
M. O'Brien: Je l'ai fait deux ans sur les trois années.
Le sénateur Stanbury: Je sais ce que donnent les bris de continuité dans les vérifications. Il semble en particulier que les cabinets de vérification privés éprouvent de la difficulté sur ce plan, ces jours-ci. Avez-vous éprouvé ce genre de problème? Je pense qu'il sera important d'assurer la continuité de la vérification dans les prochaines années, dans le cas de Devco.
M. Radburn: Dans tous les organismes de vérification, il y a des mouvements d'effectif. Nous ne pouvons pas entièrement contrôler la chose. Il y a des gens qui s'en vont et nous devons faire tourner le personnel dans les postes. Quoi qu'il en soit, la continuité a été assurée aux échelons supérieurs.
Le président: Au chapitre 10 de votre rapport de vérification, celui traitant des sociétés d'État, vous faites remarquer que la responsabilité de l'intendance de ces sociétés n'incombe pas entièrement au conseil d'administration et que le gouvernement et le Parlement doivent également y prendre une part active. Que pourrait faire précisément le Parlement pour mieux contrôler la Société de développement du Cap-Breton?
Plus exactement, que penseriez-vous si l'on demandait à la Société de faire régulièrement rapport, éventuellement tous les deux ans, à un comité sénatorial permanent, pendant toute la durée de son plan d'entreprise? Et devrions-nous inviter les syndicats à participer à cet exercice?
M. Radburn: Dans notre rapport, nous avons précisé que le Parlement et les comités parlementaires pourraient, entre autre, participer en se faisant adresser les résultats de la Société, qui sont inclus dans ces rapports soumis au Parlement, pour les examiner et les utiliser. Récemment, la Société a accepté de produire trimestriellement des rapports de résultats. Une fois que les indicateurs et le format des rapports auront été décidés, je crois qu'il pourrait s'agir d'une information utile que ce comité pourrait examiner avant de décider s'il veut de nouveau entendre des représentants de la Société et d'autres témoins.
Mais en fin de compte, je crois que tout le monde veut savoir comment se débrouille la Société, qu'elle respecte ou non ses objectifs. Si elle fournissait ce genre de renseignements tous les trimestres, en commençant prochainement, le comité et d'autres pourraient décider jusqu'à quel point ils veulent intervenir directement et tenir la Société responsable.
Le président: La question est la suivante: pensez-vous qu'il serait utile qu'un comité sénatorial, par exemple, continue de surveiller la situation de façon régulière?
Le sénateur Stanbury: Est-ce que ça aiderait?
Le président: C'est cela. Normalement, dans le secteur privé, le conseil d'administration est responsable auprès des actionnaires. Or, qui sont les actionnaires d'une société d'État? Ce ne sont ni le ministère ni le ministre, ce sont les contribuables. Et qui représente les contribuables? Quelqu'un qui appartient à cette Chambre ou à l'autre. Est-il envisageable ou défendable qu'un comité sénatorial remplisse le rôle qui échoit normalement aux actionnaires à l'occasion d'une revue des activités?
M. Radburn: Il est difficile de répondre parce que les sociétés d'État sont chapeautées par un conseil d'administration. En fin de compte, c'est le conseil d'administration qui devrait tenir l'équipe de direction responsable. Peut-être que le rôle d'un comité sénatorial pourrait consister à contrôler les mesures prises par le conseil d'administration ainsi que les données communiquées par la Société, pour ne pas risquer de tomber dans le piège d'avoir à s'occuper des opérations quotidiennes.
Le président: Je vois ce que vous voulez dire.
Le sénateur Stanbury: L'un des défauts des débats que nous avons tenus au niveau de ce comité, tient au fait que nous ne nous sommes pas entretenus avec le conseil d'administration. Une autre fois peut-être. Quoi qu'il en soit, cela me semble être un élément important du processus.
Le président: C'est certainement un aspect dont nous devrons tenir compte à ce comité.
J'ai une dernière question à vous poser au sujet des relations industrielles. Avez-vous des remarques à formuler sur les principales raisons des tensions entre le syndicat et la direction?
M. Radburn: Je ne pense pas que cela nous appartient. À l'examen des procès-verbaux de vos réunions, on peut constater une opposition qui est, je crois, naturelle entre la direction, qui a décidé de réduire les effectifs, et les syndicats qui veulent maintenir le plus grand nombre d'emplois possible. Je ne pense pas qu'il est inusuel d'assister à ce genre de friction et de constater de telles différences de points de vue dans les sociétés.
Le président: Comment se comparent les relations industrielles sur des périodes de cinq ans, dix ans ou quinze ans de cette société d'État et des autres sociétés que vous avez vérifiées?
M. Radburn: Je vous répondrai en vous donnant quelques exemples. Nous nous sommes chargés de la vérification de la Société Radio-Canada. Dans le passé, nous avons vérifié la Société canadienne des postes. Eh bien, il nous arrive de constater ce genre de frictions et de points de vue différents dans plusieurs sociétés. Je n'estime pas que cela soit inhabituel.
Le président: S'il n'y a pas d'autres questions, je vais vous remercier de vous être rendus à notre invitation et d'avoir essayé de répondre à nos questions dans les limites de votre mandat.
La séance est levée.