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NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales

Fascicule 1 - Témoignages


Ottawa, le mercredi 20 mars 1996

Le comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 17 h 15, afin d'organiser ses activités.

[Traduction]

M. John Desmarais, greffier du comité: Honorables sénateurs, l'élection du président est le premier point à l'ordre du jour. Je suis prêt à recevoir les candidatures.

Le sénateur Cools: Je propose la candidature du sénateur Tkachuk.

M. Desmarais: Il est proposé par l'honorable sénateur Cools que l'honorable sénateur Tkachuk soit élu président du comité.

Les honorables sénateurs veulent-ils adopter cette motion?

Des voix: D'accord.

M. Desmarais: Je déclare l'honorable sénateur Tkachuk président du comité et je l'invite à occuper le fauteuil.

L'honorable David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.

Le président: Merci, honorables sénateurs. Je vais essayer de régler la partie organisationnelle de l'ordre du jour le plus rapidement possible.

Certains d'entre vous sont nouveaux au sein du comité des finances nationales. J'ai déjà siégé au sein du comité, mais c'est la première fois que j'y remplis cette fonction particulière.

J'aimerais commencer par le point suivant inscrit à l'ordre du jour, soit l'élection d'un vice-président.

Le sénateur Stratton: Je propose que le sénateur De Bané soit élu vice-président du comité.

Le président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Le point suivant est une motion pour la création du sous-comité du programme et de la procédure. Pourriez-vous lire la motion s'il vous plaît, monsieur Desmarais?

M. Desmarais: La motion se lit comme suit:

Que le sous-comité du programme et de la procédure (comité de direction) se compose du président, du vice- président et d'un autre membre du comité, que le président désignera après les consultations d'usage;

Que le sous-comité soit autorisé à prendre des décisions au nom du comité conformément à son agenda et ses procédures;

Que le sous-comité soit autorisé à inviter des témoins et à établir l'horaire des audiences; et

Que le sous-comité fasse rapport de ses décisions au comité.

Le sénateur Cools: Je propose cette motion.

Le président: En l'absence de discussion, est-ce convenu, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Le cinquième point porte sur l'impression des délibérations du comité. La motion se lit comme suit:

Que le comité fasse imprimer 480 exemplaires pour distribution; et

Que le président soit autorisé à changer le nombre selon la demande.

Le sénateur Poulin: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Le point 6 inscrit à l'ordre du jour porte sur l'autorisation de tenir des réunions et de faire imprimer des témoignages en l'absence du quorum. La motion se lit comme suit:

Que, conformément à l'article 89 du Règlement, le président soit autorisé à tenir des réunions pour entendre des témoignages et à en permettre la publication en l'absence du quorum.

Le sénateur De Bané: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Le président: Adopté.

Chacun devrait avoir un exemplaire du rapport financier. La motion se lit comme suit:

Que, conformément à l'article 104 du Règlement, le président soit autorisé à faire rapport des dépenses faites au cours de la première session de la 35e législature.

Le sénateur Stratton: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Est-ce convenu, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Le point suivant porte sur le personnel de recherche. La motion se lit comme suit:

Que le comité retienne les services du Centre parlementaire pour effectuer les recherches jugées nécessaires par le comité; et

Qu'au nom du comité, le président supervise la rédaction des études, des analyses et des résumés par le personnel de recherche.

Quelqu'un veut-il proposer cette motion ou une autre motion?

Le sénateur Stratton: Que recommandez-vous, monsieur le président?

Le président: Que nous retenions les services du Centre parlementaire.

Le sénateur Losier-Cool: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Est-ce convenu, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Au point 9, relatif à l'autorité d'engager du personnel, la motion se lit comme suit:

Que le président soit autorisé à demander au Sénat la permission de retenir les services des conseillers juridiques et du personnel technique, d'employés de bureau ou d'autres personnes nécessaires pour examiner les projets de loi, la teneur des projets de loi et les prévisions budgétaires qui pourraient être déférés au comité.

Quelqu'un voudrait-il proposer une telle motion afin que je puisse en présenter une semblable dans la salle du Sénat?

Le sénateur Stratton: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

En ce qui concerne l'autorisation d'engager des fonds et d'approuver les comptes à payer, la motion se lit comme suit:

Que, conformément à l'article 32 de la Loi sur la gestion des finances publiques, l'autorisation d'engager des fonds soit conférée au président ou, en son absence, au vice-président; et

Que conformément à l'article 34 de la Loi sur la gestion des finances publiques, et à la directive 3:05 de l'Annexe II du Règlement du Sénat, l'autorisation d'approuver des comptes à payer au nom du comité soit conférée au président, au vice-président ou au greffier du comité.

Le sénateur Cools: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Est-ce convenu, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Le point 11 traite des frais de déplacements des témoins. La motion se lit comme suit:

Que, conformément aux directives du Sénat relatives aux frais de déplacements des témoins, le comité peut accorder une indemnité raisonnable pour frais de déplacements, pour un maximum de deux témoins d'un même organisme, après qu'une demande de remboursement aura été présentée.

Le sénateur Losier-Cool: Je propose cette motion, monsieur le président.

Le président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Le président: Je ne sais pas combien de temps nous voulons consacrer tout de suite au point suivant. Le sénateur Kenny, président du comité de régie interne, a offert à chaque comité la possibilité d'élaborer un plan de communication doté d'un budget raisonnable, qui serait appuyé par le Comité de régie interne. J'aimerais poser la question suivante aux membres de ce comité. Pensez-vous que ce soit nécessaire? Devrions-nous donner suite à une telle proposition? Devrions-nous l'englober dans le budget de l'année à venir, ou non?

Le sénateur Cools: Absolument. Le sénateur Kenny a fait une telle proposition et je pense que nous devrions en profiter avec plaisir. De combien d'argent parlons-nous?

Le président: Je n'en ai pas la moindre idée.

Le sénateur Stratton: J'imagine que personne ne sait ce que devrait ou pourrait être le budget. Si nous l'approuvons en principe, nous verrons comment procéder par la suite et nous déciderons si nous devons fixer un budget ou si encore nous en avons besoin d'un ou non. Cela serait-il acceptable? Une recommandation relative au budget va-t-elle nous être présentée?

Le président: J'ai vu ce que fait le comité des banques et cela me plaît.

Le sénateur Cools: À combien cela s'élève-t-il?

Le président: Je ne sais pas combien ils ont dépensé sur ce point.

Le sénateur De Bané: Monsieur le président, nous avons la chance de compter parmi nos membres notre collègue le sénateur Poulin, ancienne vice-présidente de la Société Radio-Canada, qui a exercé la profession de journaliste dans le monde des communications. Peut-être pourrait-elle nous donner quelques conseils.

Le sénateur Poulin: Nous pourrions commencer par nous fixer un objectif. Je propose que nous demandions des fonds au comité de la régie interne afin de faire connaître aux Canadiens le travail que nous effectuons au sein de ce comité et pour souligner encore davantage l'importance accordée aux finances nationales. Tel pourrait être notre objectif; nous pourrions alors présenter au comité de régie interne un plan pertinent de communication assorti d'un budget raisonnable.

Le président: Quel montant proposez-vous?

Le sénateur Poulin: Je propose 20 000 $.

Le sénateur Cools: Supposons qu'il soit prêt à nous donner 50 000 $?

Le président: Nous sommes le comité des finances, après tout.

Le sénateur Poulin: Lorsque l'on connaît le montant à l'avance, c'est toujours plus facile. Je propose 20 000 $.

Le sénateur Stratton: Cela me gêne de décider d'un chiffre sans vraiment connaître les coûts.

Le président: Tout d'abord, je préférerais que vous me fassiez part de vos idées; ensuite, nous pourrions en établir les coûts. Je peux le faire conjointement avec le greffier, mais les membres du comité devraient d'abord me donner des indications au sujet de ce qu'ils souhaitent faire.

Le sénateur Stratton: Je suis d'accord avec le mode de communication du comité des banques.

Le sénateur Cools: Combien reçoit-il?

Le sénateur Poulin: Vingt mille dollars.

Le sénateur Stratton: L'avez-vous vérifié?

Le sénateur Poulin: Oui, je l'ai vérifié.

Le sénateur Stratton: Si le sénateur Poulin l'a vérifié, je n'ai pas de problème.

Le sénateur Cools: Très bien. J'allais proposer de demander un montant équivalent à celui que reçoivent tous les autres comités.

Le président: Il faudrait donner quelques indications au greffier et décider si nous allons prendre modèle sur le plan du comité des banques. Nous aurons peut-être des idées originales, mais nous pourrions commencer de la sorte et voir comment les choses évoluent.

Le sénateur Poulin: Notre objectif devrait également servir de point de départ. Le fait de connaître les objectifs nous permet de travailler en fonction de la réalité. Le travail du greffier s'en trouvera donc facilité. Je serais heureuse de coopérer avec le greffier si le président le désire.

Le président: C'est entendu; c'est parfait.

Le point 13 relatif à l'horaire des séances régulières est simplement là à titre d'information.

Le sénateur Stratton: Pourquoi a-t-on prévu l'horaire de 19 heures le mercredi soir? Est-ce au cas où nous siégerions tard au Sénat? Je pose cette question par simple curiosité.

Le président: Cet horaire de 19 heures nous donnera de la souplesse au cas où nous nous heurterions à des problèmes comme cela m'est arrivé aujourd'hui. Je siège au comité des peuples autochtones dont les réunions commencent à 17 heures. Il se peut que certains d'entre vous siègent au sein d'autres comités. Nous avons deux horaires. Si nous voulons les utiliser les deux, nous le pouvons, ou nous pouvons tenir nos séances à 17 heures. Chaque fois que cela sera possible, nous nous réunirons à 17 heures, mais s'il y a d'autres affaires à régler, nous aurons l'horaire de 19 heures.

Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

La séance se poursuit à huis clos.


Ottawa, le jeudi 21 mars 1996

Le comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 11 h 15, pour l'étude du Budget des dépenses supplémentaire (B) déposé au Parlement pour l'exercice se terminant le 31 mars 1996.

Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.

Le président: Honorables sénateurs, nous recevons aujourd'hui les représentants du Secteur de la gestion des dépenses du Conseil du Trésor: David Miller, secrétaire adjoint de la Direction des programmes et Norm Everest, conseiller principal en prévisions budgétaires à la Direction des programmes.

Monsieur Miller, vous pourriez peut-être nous présenter les personnes qui vous accompagnent ce matin, après quoi nous pourrons commencer. Je crois savoir que vous avez une déclaration préliminaire.

M. David Miller, secrétaire adjoint, Direction des programmes, Conseil du Trésor du Canada: Merci beaucoup, sénateur. Nous sommes accompagnés par des représentants du ministère de la Justice, ainsi que du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, qui répondront à certaines questions précises que les sénateurs voudront poser.

Le président: Veuillez commencer votre exposé, monsieur Miller.

M. Miller: Merci, monsieur le président et honorables sénateurs. Le Budget des dépenses supplémentaire (B) de l'exercice 1995-1996 a été déposé devant le Parlement le 8 mars 1996. Ce Budget des dépenses supplémentaire s'élève à environ 675,8 millions de dollars. Du point de vue de la planification financière, les différents montants qui le composent ont été prévus dans le budget du 6 mars 1996; ils constituent des réaffectations de fonds entre les ministères et organismes ou à l'intérieur de ceux-ci ou ils visent à obtenir du Parlement l'autorisation de payer des dettes qui étaient prévues dans le déficit des exercices précédents.

Le Budget des dépenses supplémentaire sert en outre à informer le Parlement des dernières prévisions de dépenses dans le cadre de certaines autorisations législatives. Ce Budget des dépenses supplémentaire prévoit une augmentation nette de 711,1 millions de dollars, également prévue dans le cadre établi des dépenses.

J'aimerais informer les honorables sénateurs de certains des principaux éléments à l'égard desquels des crédits sont demandés dans ce Budget des dépenses supplémentaire. Il y a un montant de 333,4 millions de dollars destiné à neuf ministères et organismes au titre des programmes de départ des fonctionnaires, comme le Programme d'encouragement à la retraite anticipée, la prime de départ anticipé et, dans le cas du ministère de la Défense nationale, le Programme de réduction des effectifs civils. Il y a également un montant de 141,4 millions de dollars destiné à 13 ministères et organismes pour répondre à divers besoins opérationnels en utilisant la provision de 5 p. 100 du report du budget de fonctionnement.

Cette année, les ministères et organismes ont reçu la permission de demander des autorisations de report dans le premier Budget des dépenses supplémentaire, soit à l'automne 1995. La plupart des ministères et organismes se sont prévalus de cette provision, de sorte qu'un nombre relativement restreint de demandes ont été présentées dans ce Budget des dépenses supplémentaire. En outre, 85 millions de dollars de subventions sont prévus pour qu'Agriculture et Agro-alimentaire Canada puisse aider les particuliers et les organisations à s'adapter aux changements apportés au système de transport du grain. Enfin, il y a un montant de 23,8 millions de dollars pour que Statistique Canada absorbe les coûts prévus du recensement de 1996.

Les rajustements législatifs qui sont indiqués dans ce Budget des dépenses supplémentaire représentent une variation globale nette des dépenses de 700 millions de dollars, comme je viens de le dire. Les principaux postes de dépenses sont les suivants: 3,2 milliards de dollars répartis en trois postes distincts, pour le transfert de Petro-Canada et du Canadien National au secteur privé. Cette somme comprend deux postes de Transports Canada d'une valeur globale de 2 milliards de dollars et un poste du ministère des Finances d'une valeur de 1,3 milliard, en vertu de la Loi sur la participation publique au capital de Petro-Canada. Ces postes précis sont de nature technique et correspondent à la façon dont le gouvernement effectue sa comptabilité et sa tenue de livres réelles. Il est peut-être utile que je vous donne quelques explications supplémentaires sur ce point.

Sur les deux postes de Transports Canada, le premier représente une injection supplémentaire de capitaux de 900 millions de dollars dans le CN immédiatement avant la privatisation de la société, afin de réduire la dette non payée du CN et de rendre la société plus attrayante pour les investisseurs. L'autre poste de Transports Canada, d'une valeur de 1,1 milliard de dollars, ainsi que le poste de 1,3 milliard du ministère des Finances concernant Petro-Canada, ont pour objet les rajustements effectués dans les Comptes du Canada afin de tenir compte de l'écart entre la valeur globale des investissements consentis dans les sociétés dont le Canada a fait état dans les Comptes publics des exercices précédents, et le montant que les investisseurs sont prêts à payer.

Les Comptes publics de chaque exercice font état de la valeur globale au comptant des éléments d'actif du Canada liés notamment aux prêts et aux investissements, y compris les investissements dans diverses sociétés d'État. À la fin de chaque exercice, la valeur réelle, ou valeur marchande de chaque élément d'actif, est déterminée. Si la valeur n'est plus la même que celle qui était indiquée pour l'exercice précédent, la valeur de l'écart est inscrite dans les Comptes publics sous la rubrique «Provision pour dépréciation». Cependant, lorsqu'un élément d'actif est vendu ou supprimé d'une autre façon des comptes, le Parlement doit accorder des crédits pour combler l'écart entre la valeur initiale et la somme perçue au moment de l'aliénation. Le Parlement a autorisé les ministres de tutelle à effectuer ces rajustements lorsque les deux documents législatifs ont été approuvés. Ces postes du Budget des dépenses supplémentaire font maintenant état de la valeur de ces rajustements.

Le principal poste législatif suivant est un montant de 400 millions de dollars pour le Conseil du Trésor du Canada, pour des paiements au Compte spécial des régimes compensatoires afin de couvrir les coûts des incidences de la pension versée aux fonctionnaires qui ont choisi de se prévaloir du Programme d'encouragement à la retraite anticipée au cours de l'exercice 1995-1996.

Un autre poste correspond à une augmentation de 325 millions de dollars pour Développement des ressources humaines Canada, au titre de l'aide consentie en vertu de la Loi canadienne sur les prêts aux étudiants et de la Loi canadienne sur l'aide financière aux étudiants. Une diminution de 2,5 milliards de dollars des frais de la dette publique, en 1995-1996, découle de taux d'intérêt plus favorables que ceux qui avaient été prévus dans le budget de février 1995. Une diminution de 656 millions de dollars des versements prévus à même le Compte d'assurance-chômage est également incluse. Enfin, une diminution de 412 millions de dollars des paiements de transport est essentiellement attribuable à l'abrogation de certains pouvoirs législatifs, dont le principal était la Loi sur le transport du grain de l'Ouest.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, telles sont mes remarques préliminaires. Je serais heureux de répondre à toutes les questions que vous voudrez nous poser au sujet du Budget des dépenses supplémentaire.

Le sénateur Stratton: Relativement à votre déclaration préliminaire, monsieur Miller, je suppose que les montants prévus pour Petro-Canada et le CN sont des dépenses uniques?

M. Miller: C'est exact, sénateur. Lorsque nous avons acheté les actions, la valeur de celles-ci a été inscrite dans les Comptes du Canada. Par la suite, nous avons fait des rajustements de façon à indiquer de façon plus exacte la valeur de ces actions détenues par le gouvernement. Lorsque nous avons vendu les actions, il a fallu supprimer ces montants du compte. C'est pourquoi il s'agit effectivement d'un rajustement unique.

Le sénateur Stratton: Ce poste ne réapparaîtra jamais dans le budget?

M. Miller: Non, en effet.

Le sénateur Stratton: En second lieu, pour Agriculture et Agroalimentaire Canada, relativement au montant de 85,1 millions de dollars prévu au crédit 15 pour les subventions aux particuliers et aux organisations à l'appui de la réforme du transport du grain, quels critères régissent l'octroi de ces subventions? Quel est le montant moyen de la subvention par bénéficiaire? Pendant combien de temps ces subventions, sans doute provisoires, continueront-elles d'être versées aux bénéficiaires?

M. Miller: Je pourrais peut-être demander à M. Migie de répondre à cette question.

M. Howard Migie, directeur général, Direction générale de l'adaptation et de la politique des grains, Direction générale des politiques, Agriculture et Agroalimentaire Canada: Nous commençons par le montant de 85 075 000 $ qui correspond à quatre postes de dépenses. Il y a 20 millions de dollars qui concernent le changement dans le système de mise en commun de la Commission canadienne du blé. Ce montant fait partie d'un poste plus important, mais les 20 millions de dollars seront nécessaires en 1995-1996. La répartition de cette somme de 20 millions se fonde sur les livraisons courantes faites cette année au Manitoba et dans l'est de la Saskatchewan.

Il y a également un poste de 45 millions pour les produits de la luzerne et le foin comprimé. Gråce à la subvention, les producteurs ont reçu entre 10 et 15 millions de dollars pour chaque année visée, au cours d'une longue période. Il s'agit d'un paiement unique de 45 millions de dollars à toutes les installations, pour tenir compte des frais de transport supplémentaires qu'elles devront assumer lors de leur adaptation.

Il y a 20 millions de dollars pour l'aide au transport des provendes; la subvention doit prendre fin sous peu. Elle restera en vigueur pendant encore deux ans. Outre cette somme de 20 millions, il y aura d'autres montants qui ne sont pas prévus dans ce budget des dépenses supplémentaire et qui atteignent près de 40 millions de dollars de plus.

Enfin, il y a un montant de 75 000 $ destiné aux particuliers du nord-ouest de l'Ontario qui ont été touchés par la disparition de la subvention au transport. Tous ces programmes sont quelque peu différents. Pour ce qui est de la mise en commun, les subventions se fondent sur les livraisons actuelles, car nous avons annoncé ce changement trop tard pour que les agriculteurs modifient leurs systèmes de culture en 1995-1996. Dans le cas de l'aide au transport des provendes, à la suite d'intensives consultations, les fonds ont été répartis entre les provinces en fonction de la mesure dans laquelle elles ont profité de cette subvention. Dans chaque province, l'industrie va déterminer les principales priorités en vue de la répartition.

Dans le cadre des 45 millions de dollars prévus pour les produits de la luzerne et le foin comprimé, il y a une affectation provinciale fondée sur l'utilisation historique de la subvention. C'est pourquoi nous nous sommes fondés sur une moyenne de trois ans du montant des subventions. Au sein de chaque province, ce montant est fonction de la production au cours de l'année précédente.

Pour le montant de 75 000 $ destiné au nord-ouest de l'Ontario, très peu de producteurs ont, depuis toujours, livré leurs produits en vertu de la subvention prévue dans la Loi sur le transport des grains de l'Ouest. Cela représente si peu par rapport au 1,6 milliard de dollars que nous nous contentons de renouveler le programme pour les quelques producteurs qui se sont prévalus de la subvention pour acheminer leur grain.

Le montant de 17 280 000 $ fait partie de ce que nous appelons le programme de développement rural et agricole. Nous encourageons l'industrie à participer directement à la prise des décisions concernant les priorités et à la gestion réelle du programme. Sur ces 17 millions, nous en avons réservé sept pour l'Ontario. De concert avec le gouvernement fédéral et la province, on a cerné les secteurs prioritaires, dont je pourrais parler aux honorables sénateurs s'ils le désirent.

Il en va de même pour le Québec, auquel nous avons alloué 10 millions de dollars. Deux tiers de cette somme iront à l'UPA et un tiers à la Coopérative fédérée du Québec. En vertu d'ententes conclues avec ces organismes, nous allons établir certains principes et critères dont nous avons convenu avec l'industrie, par exemple pour déterminer les secteurs prioritaires. À l'intérieur de ces derniers, il y a certains principes qu'il faut respecter. Il ne doit exister aucun problème sur le plan du commerce international. Il ne s'agit pas de paiements de transfert directs aux particuliers. Cette somme s'appliquera à des mesures visant la compétitivité, la recherche et l'environnement.

À l'époque du budget de l'an dernier, nous avons indiqué dans le Budget des dépenses qu'il y aurait des programmes de 17 millions de dollars par an dans l'Est du Canada, relativement aux modifications que nous avons apportées à toutes nos subventions de transport, en vue de répondre aux préoccupations des Canadiens de l'Est qui craignaient d'être durement touchés par cette mesure.

Le sénateur Stratton: Ma question porte sur le montant de 17,3 millions de dollars pour le développement rural. Vous avez parlé de diverses formes de compétitivité. Que voulez-vous dire exactement? Comment répartissez-vous les fonds pour rendre les régions rurales du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta plus concurrentielles?

M. Migie: Ces montants précis que nous demandons ne concernent que l'Ontario et le Québec.

Le sénateur Stratton: Cela n'a rien à voir avec l'Ouest?

M. Migie: C'est exact. Nous avons prévu une affectation qui s'élève en tout à 60 millions de dollars par an aux fins d'adaptation. Nous avons collaboré avec l'Ontario et le Québec au départ pour élaborer le modèle. L'Ontario a pris l'initiative. Dans l'industrie ontarienne, au lieu de mettre en place des programmes où les fonctionnaires provinciaux et fédéraux prennent toutes les décisions quant aux priorités et à l'affectation des fonds, on met sur pied des entités commerciales. Le mandat de l'entité commerciale définit les règles de base. Les priorités sont établies de façon générale avec le secteur et de concert avec les deux paliers de gouvernement, tant en Ontario qu'au Québec. Nous espérons faire la même chose dans l'Ouest, et partout où le secteur agricole nous le demandera.

Dans le cadre de notre programme d'adaptation en Ontario et au Québec, nous avons fait une étude pour déterminer les programmes considérés comme ayant la plus haute priorité, comme l'environnement ou des mesures visant à réduire les dépenses. Après nous être entendus sur ces secteurs, nous répartirons les fonds.

Dans le cas de l'Ontario, nous avons fixé une période de quatre ans. Nous poursuivrons ce programme pendant quatre ans. Il s'agit à certains égards d'un programme expérimental car nous offrons une subvention en vertu de règles de base convenues entre les intéressés, mais c'est néanmoins une subvention. Le gouvernement fédéral participera au processus en tant qu'observateur, au même titre que la province. Cette dernière cernera les besoins les plus importants pour aider le secteur agricole à s'adapter à l'avenir. Cette adaptation ne doit en aucun cas provoquer des problèmes au niveau du commerce extérieur ou pour les provinces voisines. Il ne s'agira pas de paiements directs aux particuliers. Au bout du compte, ce sera peut-être un programme de gestion des entreprises agricoles. Nous voulons absolument éviter tout dédoublement entre les programmes, mais ce sera peut-être le cas pour la formation.

Le sénateur Stratton: La Société du crédit agricole y participera-t-elle?

M. Migie: Non, pas la SCA. Toutefois, nous avons des programmes qui pourront porter sur la gestion des entreprises agricoles. Une de nos règles de base est qu'il faut absolument éviter tout dédoublement avec d'autres programmes fédéraux ou provinciaux. Dans certains cas, la province estime que nos programmes de commercialisation ont des lacunes. Elle estime qu'une meilleure commercialisation profitera à l'industrie. C'est ce genre de programme que nous envisageons.

Le sénateur Stratton: Je dois poser la question au sujet de la subvention de 4,5 millions de dollars à la province du Manitoba au titre du transfert des responsabilités du système de digues de la rivière Assiniboine.

M. Migie: Robert Caron est ici pour répondre à cette question.

Le président: Qu'en est-il des chèques dus à tous les agriculteurs de l'Ouest au titre de la subvention du tarif du Nid-de-Corbeau? Ont-ils tous été envoyés?

M. Migie: Non, pas tous, monsieur le président.

Le président: J'ai un service à vous demander, monsieur. Ma belle-mère pense que, du fait que je suis sénateur, j'ai une influence sur toutes ces questions. Plus vite vous enverrez ces chèques, moins elle me téléphonera pour s'informer.

M. Migie: Le processus est en route. D'ici à demain soir, des chèques pour un montant de 0,5 milliard de dollars auront été envoyés. Il nous reste encore quelques semaines, sans doute jusqu'à la fin avril, avant de pouvoir envoyer toute la première série de chèques. Cela représente 1,2 milliard sur la somme globale de 1,6 milliard de dollars. Nous en envoyons de plus en plus toutes les semaines.

Le sénateur Stratton: Quel est le montant du versement moyen à un agriculteur?

M. Migie: Je n'ai pas ce renseignement sous la main.

Le sénateur Stratton: Pourriez-vous nous l'obtenir, je vous prie?

M. Migie: Encore une fois, cela n'a rien à voir avec le budget que vous étudiez, mais j'obtiendrai ce renseignement.

M. Robert P. Caron, conseiller principal en planification financière, Planification et gestion des ressources, Direction générale des services intégrés, Agriculture et Agroalimentaire Canada: Je vais m'efforcer de vous donner une idée de ce programme précis. Un bref historique sera peut-être utile.

Depuis le début du siècle, le gouvernement du Canada construit et entretient un système de digues adjacent à la rivière Assiniboine dans le but de lutter contre les crues. En 1950, la responsabilité de la construction et de l'entretien de ce réseau de digues sur la rivière Assiniboine a été transférée du ministère des Travaux publics à notre Administration du rétablissement agricole des Prairies.

En 1967, l'ARAP a construit un meilleur réseau de digues interrompues qui s'étend de Portage-la-Prairie jusqu'à un endroit situé juste au sud de Winnipeg. Cela couvre une distance d'environ 67 kilomètres de chaque côté de la rivière, soit un réseau total de digues d'environ 134 kilomètres. Les digues protègent actuellement plus de 200 hectares de terres agricoles à fort rendement, plusieurs centaines de propriétés agricoles et un certain nombre de collectivités rurales.

La province du Manitoba est propriétaire du barrage Shelmouth, qui est situé sur la rivière Assiniboine au nord de Russell et du canal de dérivation de Portage, qui détourne les eaux de crue de la rivière Assiniboine vers le lac Manitoba. Le réseau de digues, outre ce barrage et ce canal de dérivation, font partie intégrante du système de protection contre les crues de la rivière, jusqu'à la ville de Winnipeg inclusivement. Le principal avantage dont jouit le Manitoba est la possibilité d'exploiter ces trois importants projets de lutte contre les inondations sur la rivière Assiniboine en tant que service unique de gestion, ce qui donne naturellement plus de visibilité à la province.

Le montant de 4,5 millions de dollars au titre du transfert au Manitoba lui fournira des fonds suffisants pour la remise en état des digues, ainsi que l'acquisition éventuelle de terrains, et lui permettra de disposer d'un fonds pour l'entretien continu et les travaux de réparation futurs des digues.

Le sénateur Stratton: Il s'agit d'un transfert de responsabilité. À la suite de celui-ci, il incombera à la province du Manitoba d'entretenir ces trois systèmes?

M. Caron: C'est exact.

Le sénateur Losier-Cool: Monsieur le président, je ne suis ni agricultrice, ni Canadienne de l'Ouest. Toutefois, je suis enseignante. À l'instar du sénateur Tkachuk, mes anciens étudiants sont convaincus que, en ma qualité de sénateur, j'exerce également une influence sur les décisions prises au Parlement.

Mes questions portent principalement sur la page 3 de votre déclaration préliminaire, en ce qui a trait à l'éducation, la Loi canadienne sur les prêts aux étudiants et la Loi canadienne sur l'aide financière aux étudiants. Puis-je retourner dans ma région et dire à mes étudiants qu'ils disposeront de plus d'argent?

M. Miller: Malheureusement non, sénateur. Ce n'est pas la raison de cette augmentation. Il y a dans mes notes un tableau qui porte sur la modification. Le montant requis pour le Programme canadien des prêts aux étudiants est pour l'essentiel dû en fait à une série de demandes. Deux cent millions de dollars du coût de la modification globale sont destinés au remboursement de l'arriéré de demandes présentées par des institutions financières relativement à des prêts aux étudiants en souffrance. Le remboursement de cet arriéré augmente par conséquent le montant requis pour la compensation des provinces qui ne participent pas au programme, soit le Québec et les Territoires du Nord-Ouest.

Les écarts dans le coût des divers éléments de programme en vertu de la Loi canadienne sur les prêts aux étudiants et de la Loi canadienne sur l'aide financière aux étudiants comprennent le calcul des intérêts, un allégement des intérêts en souffrance qui représentent, je le répète, l'essentiel de ces 200 millions de dollars, outre les versements de compensation, qui s'élèvent à près de 80 millions de dollars en vertu de ces modifications.

Le taux des prêts non remboursés est actuellement d'environ 11 p. 100. Tous les nouveaux prêts aux étudiants sont négociés aux termes de la Loi canadienne sur l'aide financière aux étudiants et ne sont pas garantis par le gouvernement fédéral. En conséquence, le taux actuellement élevé de prêts non remboursés va diminuer. À compter du 1er décembre 1995 et à l'exclusion de l'arriéré, les sommes à recouvrir par le gouvernement fédéral au titre des prêts aux étudiants non remboursés, dont la valeur totale est inférieure à 800 millions de dollars, s'élevaient à 1,3 milliard de dollars. Il nous reste encore un important arriéré dans le cadre des arrangements précédents.

Le sénateur Cools: J'ai plusieurs questions à poser, dont certaines sont très complexes.

Sauf erreur, il se trouve parmi les témoins deux fonctionnaires du ministère de la Justice. Si vous ne pouvez pas répondre aujourd'hui même à mes questions, j'ai tout mon temps.

Les questions précises que j'ai posées hier soir portaient sur la situation actuelle à Toronto et en Ontario relativement au Régime d'aide juridique. Il me paraît étrange que cette question monopolise ainsi l'intérêt des médias et fasse l'objet d'articles quotidiens, alors que le Parlement ne semble même pas au courant de l'énorme scandale dû à l'effondrement du fameux «barreau».

Je veux parler notamment d'un article paru dans le Star de Toronto le 24 juin 1995, sous le titre: (traduction) «Allégations de fraude dans les factures des avocats de l'aide juridique». Ce n'est qu'un seul des nombreux articles publiés sur la même question. Si le personnel du comité le souhaite, je déposerai volontiers copie de cet article.

À mon avis, un rapport soumis au comité de l'aide juridique du Barreau du Haut-Canada qui reflète précisément la teneur de l'article écrit par une certaine Tracy Tyler est plus inquiétant encore que les articles parus dans la presse

Je vous demande de vous reporter au rapport figurant à l'Annexe E. La numérotation des pages est assez compliquée. Au bas de la page, je lis que le barreau estime que le nombre d'heures facturées, surtout par les avocats de l'immigration, est troublant et laisse supposer une fraude sérieuse.

Ces accusations sont très accablantes et très révélatrices. Je sais que le barreau estime que les malversations de ses propres membres ne concernent que lui. Ce n'est pas mon avis.

Les témoins pourraient peut-être dire au comité ce qu'ils savent de ce problème. Quelles sont les sommes en cause? Parlez-nous un peu des opérations de transfert. Toutefois, et c'est le plus important, je vous demanderais d'insister davantage sur la réaction du ministère à cette question. Qu'a fait le ministère pour y remédier?

M. John H. Sims, sous-procureur général adjoint, Citoyenneté et Immigration, Secteur des services juridiques, ministère de la Justice: De par le poste que j'occupe, je me préoccupe de l'incidence éventuelle du problème dont vous parlez sur la viabilité du programme d'immigration.

En premier lieu, toutefois, la surveillance de la façon dont les avocats de l'immigration sont rémunérés par le Régime d'aide juridique de l'Ontario n'est pas de la compétence du gouvernement fédéral. Comme vous le savez, ce programme est administré par le Barreau du Haut-Canada. Celui-ci utilise des fonds qui proviennent évidemment de la province et du gouvernement fédéral. Toutefois, la responsabilité de l'administration du programme incombe pour le moment au barreau. En cas d'allégations de fraude justifiant une enquête, c'est à lui d'intervenir.

Je ne connais pas les détails de ces allégations bien que, comme vous, sénateur, j'ai lu certains articles dans les journaux. Je considère comme une mesure positive le fait que le barreau assume une certaine responsabilité ou qu'un comité fasse un rapport à une tribune publique comme l'Assemblée du barreau au sujet de ces allégations. Cela vise sans doute à inscrire cette question à l'ordre du jour pour que le problème fasse l'objet d'une enquête et débouche sur une solution convenable.

D'abord, les fonds alloués par le gouvernement fédéral à la province, et par l'entremise de celle-ci, au barreau, ne sont assortis d'aucune condition. Il nous est impossible d'insister pour qu'on nous rende des comptes. Ces fonds sont gérés par le barreau.

Le sénateur Cools: Il serait superficiel de ma part de prétendre que le seul problème est l'administration des fonds, et là n'est d'ailleurs pas mon intention. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir qui est chargé de veiller à ce que les fonds soient dépensés à bon escient et de façon honnête. Le Parlement est chargé d'une lourde tåche, c'est-à-dire s'assurer que les prélèvements effectués sur le Trésor sont gérés convenablement et au moins honnêtement. Je n'accepte pas l'idée que cette responsabilité incombe à d'autres instances et non à nous.

M. Sims: Votre question est à deux volets, sénateur. Premièrement, vous nous demandez quelle incidence cela aura sur la viabilité du programme d'immigration du gouvernement fédéral. Deuxièmement, vous voulez savoir comment le gouvernement fédéral transfère des fonds à une province dans le cadre du nouveau Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux (TCSPS). Je ne peux pas répondre à la deuxième partie de votre question, même si je suis convaincu que d'autres présents aujourd'hui pourront le faire.

Le sénateur Cools: J'en suis convaincue également.

M. Sims: Sous réserve de ce que diront les experts présents, à première vue, il me semble que nous nous écartons du régime du RAPC pour nous orienter vers un nouveau système en vertu duquel le transfert de fonds à une province est assorti de moins de conditions que par le passé. Le gouvernement fédéral exercera moins de contrôle à l'avenir sur la façon dont la province dépense cet argent. Toutefois, il vaudrait mieux interroger mes collègues à ce sujet.

Le sénateur Cools: Je comprends. Si le gouvernement transférait de l'argent qui était ensuite simplement détourné, quelle serait la responsabilité du gouvernement à cet égard? D'après ce que vous nous dites, le gouvernement remet les fonds et ne s'en occupe plus. Cela m'intéresse beaucoup.

Je suis quelque peu étonnée par le silence des fonctionnaires fédéraux à ce sujet. J'ai de nombreuses autres questions, mais leur silence me sidère. Je reçois de nombreux appels au sujet de ce genre de problèmes. Les gens ne me croient pas lorsque je leur dis que personne au Parlement n'en discute.

M. Sims: Sénateur, les fonctionnaires fédéraux que vous avez invités ce matin n'ont pas la compétence voulue pour répondre à cette question. Nous vous trouverons les personnes spécialisées en la matière. Il en existe. Mes collègues du ministère du Développement des ressources humaines, lequel est responsable du nouveau programme, ont sans nulle doute toutes les réponses. Personnellement, je ne suis pas en mesure de vous aider ce matin, sénateur.

M. Miller: Je pourrais peut-être ajouter, sénateur, qu'en ce qui concerne le mode de transfert des fonds aux provinces et en vertu du TCSPS, comme l'a signalé M. Sims, il s'agit d'un transfert beaucoup plus général, qui n'est assorti d'aucune condition. En vertu des programmes antérieurs, il était prévu que telle partie des fonds serait destinée à l'enseignement postsecondaire et telle autre à l'aide sociale, et cetera. Nous avons essayé de changer ce système pour que les provinces soient mieux en mesure d'établir leurs priorités respectives.

De ce fait, en matière de gestion financière, il s'agit des programmes législatifs pour lesquels les versements sont stipulés. Le suivi s'effectue lors d'une évaluation de programme pour voir comment les fonds ont été utilisés. En tout cas, je suppose que l'administration des programmes vers lesquels ces fonds sont transférés finit par être entièrement du ressort des provinces.

Le sénateur Cools: J'aimerais formuler autrement la question: quel genre de discussions vos sous-ministres de la Justice ont-ils eues avec le procureur général de l'Ontario au sujet de tous ces problèmes qui sont si inquiétants?

M. Ajit Mehat, directeur général, Direction générale des programmes, ministère de la Justice: Il faut faire la distinction entre les critères visant l'affectation de fonds à l'aide juridique en matière criminelle, et ceux qui concernent l'aide juridique en matière civile. Dans les deux cas, les accords se font entre gouvernements. C'est l'un des éléments fondamentaux qu'il ne faut pas oublier.

S'agissant de l'aide juridique en matière civile, ou des fonds destinés à financer les affaires civiles, dont font partie les questions relatives à l'immigration et aux réfugiés, M. Sims a signalé à juste titre que ce programme est financé par le ministère du Développement des ressources humaines. En l'occurrence, les fonds sont alloués dans le cadre du programme du RAPC, du moins à l'heure actuelle. L'an prochain, cela se fera dans le cadre du TCSPS.

Aucune condition n'est fixée à l'affectation de fonds relativement à l'aide juridique en matière civile. Pour ce qui est de l'aide juridique en matière criminelle, toutefois, il existe un accord très précis passé avec la province de l'Ontario qui stipule à quoi serviront les fonds et comment le processus de demandes doit être respecté avant que les fonds ne soient versés à la province. Je tiens à m'assurer que nous comprenons tous que, sur ce plan-là, nous appliquons un mécanisme différent pour l'affectation de fonds qui nous permet de participer davantage à des discussions et à un dialogue permanent avec la province quant à la façon dont ces fonds sont dépensés.

Le sénateur Cools: J'aimerais bien obtenir un exemplaire de ces accords.

M. Mehat: Bien entendu, sénateur.

Le sénateur Cools: Je comprends le problème. Je sais comment le régime d'aide juridique est entré en vigueur. C'était d'une certaine façon une invention de John Turner.

Ce qui me préoccupe tout particulièrement, c'est ce problème de fraude, et les allusions continuelles dans les journaux aux cas de fraude parmi les avocats et le Barreau. À long terme, cela va saper la confiance qu'ont les gens dans l'administration de la justice.

Je prends très au sérieux le rôle du Sénat. Si l'argent est utilisé à mauvais escient, ou volé ou autre, je crois sincèrement qu'il nous incombe d'intervenir. Je ne crois pas un seul instant que l'on puisse se contenter de remettre les fonds en disant: «Bon, si cet argent se perd ou est volé, nous ne pouvons rien faire.»

Je pensais que nous pourrions au moins saisir le vérificateur général du problème. Le vérificateur général est au service de la Chambre des communes et non du Sénat. Il me paraît étrange que ces questions soient passées sous silence, apparemment, simplement parce que l'on veut protéger les avocats. Il serait souhaitable que les responsables changent d'attitude et éventuellement que l'on approfondisse un peu plus la question. Vous pourrez peut-être me faire parvenir d'autres renseignements.

M. Sims: Sénateur, nous vous fournirons des renseignements plus complets que ceux que nous avons pu vous transmettre ce matin.

Le sénateur Cools: J'aimerais également savoir à combien se monte la dépense totale relative aux avocats qui se sont occupés de l'affaire Bernardo. J'aimerais connaître le montant exact des honoraires versés à John Rosen, Ken Murray et George Walker. D'après mes sources, il semble que Rosen ait touché 200 000 $ et Walker, 400 000 $. Ce sont des chiffres mystérieux et j'aimerais savoir exactement combien cela a coûté.

M. Sims: Sénateur, avant de m'engager à vous fournir ces renseignements, j'aimerais dire que, au nom du ministère, je suis prêt à faire de mon mieux pour obtenir cette information à votre intention.

Le sénateur Cools: Vous avez le pouvoir de demander des renseignements.

M. Sims: De toute évidence, pour autant que je sache, le ministère fédéral de la Justice n'a aucun droit d'exiger de voir les factures présentées par John Rosen et les deux autres avocats au Régime d'aide juridique de l'Ontario.

Le sénateur Cools: Si vous leur disiez qu'un comité du Sénat du Canada aimerait obtenir quelques renseignements à ce sujet, je suppose que vous pourriez compter sur leur collaboration.

M. Sims: Je suppose que oui, sénateur. Je ne manquerai pas de préciser qui sont les auteurs de cette demande de renseignements. Nous ferons tout notre possible pour satisfaire cette demande.

Le sénateur Cools: Je suis convaincue que vous recevrez la plus grande collaboration possible.

J'ai une autre question concernant la façon dont les fonds sont dépensés. J'aimerais savoir de quel budget ou crédit proviennent les fonds actuellement dépensés dans le cadre de l'affaire Airbus-Mulroney. Je voudrais savoir combien il a été dépensé exactement à ce titre jusqu'ici.

Le sénateur Stratton: Est-ce que cela inclut l'enquête de la GRC?

Le sénateur Cools: Oui. Je tiens à savoir qui sont les avocats qui représentent le ministère de la Justice et à combien se montent les honoraires. En outre, j'aimerais savoir ce que cela coûte à la GRC. Je tiens également à connaître le plan financier du ministère au cas où M. Mulroney gagne son affaire. Quel est le plan financier prévu pour lui verser les 50 millions de dollars qu'il réclame? Je tiens à savoir si le ministère compte nous soumettre un crédit pour lui verser cette somme.

Le président: Êtes-vous en train de demander comment le ministère va procéder pour réunir les 50 millions de dollars au cas où il gagne son affaire?

Le sénateur Cools: Je veux savoir quel est le plan financier du ministère, pendant que l'affaire est en cours.

M. Miller: Sénateur, c'est sans doute la seule partie de votre question à laquelle je peux répondre. En vertu des méthodes comptables courantes du gouvernement, lorsqu'une cause est intentée contre la Couronne, il est tenu compte de cette dette éventuelle liée au montant de la demande d'indemnité. Toutes les dettes éventuelles sont inscrites et une provision est établie, pas précisément pour chaque cause, mais en général. Aucun montant précis n'est prévu pour la cause en question, mais il existe une provision globale s'appliquant à la multitude de demandes d'indemnité, y compris celles présentées par certaines premières nations à la Couronne.

Le sénateur Cools: Il existe des douzaines de causes semblables, mais c'est celle-ci en particulier qui m'intéresse aujourd'hui. J'aimerais savoir comment se prennent les décisions. J'aimerais savoir combien le ministère envisage de dépenser.

M. Sims: Sénateur, en entendant votre question, je pense à un certain nombre de points qui méritent réflexion avant que l'on s'engage à répondre. Permettez-moi de m'expliquer. L'exemple le plus simple, je suppose, est le suivant: si l'on devait déclarer en public que dans le cadre de n'importe quel litige, la Couronne s'attend à avoir une dette d'un montant X, il s'agirait d'un renseignement des plus importants et présentant un énorme intérêt pour la partie adverse dans le procès. Cela aurait pour effet de dévoiler un renseignement intéressant et d'importance cruciale dont la partie adverse, et même le juge ou le jury désigné pour le procès, tiendrait compte dans ses délibérations. Pour choisir un exemple hypothétique qui n'a rien à voir avec l'affaire Airbus, si la Couronne, dans une cause donnée, déclare publiquement, comme elle doit peut-être le faire au tout début du litige: «Nous n'admettons aucune responsabilité», mais qu'elle dise en privé: «Je pense que nous sommes extrêmement responsables. Il nous faudra payer la totalité de la demande d'indemnité et nous l'estimons à 100 millions de dollars», cela affaiblirait la position de la Couronne relativement à sa défense. C'est pourquoi M. Miller a expliqué il y a un instant que, en temps normal, les dettes éventuelles sont toutes regroupées en un seul montant, afin que les Comptes publics du Canada soient connus du public, mais qu'aucun plaideur ne puisse en tirer un avantage stratégique en se disant: «Très bien, le gouvernement est convaincu de me devoir de l'argent et je vais redoubler d'efforts pour l'obtenir.» Cela m'inquiète, sénateur.

Le sénateur Cools: Vous n'avez pas lieu de vous inquiéter, car si vous nous fournissez des renseignements de nature délicate, nous pouvons très bien siéger à huis clos et continuer notre discussion dans le plus grand secret. Je peux vous donner l'assurance que je serais à la fois choquée et surprise que M. Mulroney tire un avantage quelconque de renseignements que vous auriez pu nous fournir.

Le président: Quelle direction du ministère de la Justice se charge de l'enquête sur l'affaire Airbus?

M. Sims: Je ne sais pas exactement, sénateur. Je sais que le ministère de la Justice est directement concerné. L'enquête a découlé d'une affaire policière à laquelle a pris part la GRC.

Le président: Il devrait s'agir d'une direction spéciale sur les enquêtes. Existe-t-il au sein du ministère une section spéciale qui a fait enquête sur cette affaire?

M. Sims: Au départ, il s'agissait d'une affaire policière.

Le président: Qui en a été saisi ensuite?

M. Sims: Je me fie pour vous répondre aux articles de presse que j'ai lus - personnellement, je ne me suis absolument pas occupé de cette affaire. Toutefois, d'après ce que j'ai lu et d'après mes renseignements, il s'agit d'une affaire policière, contrairement à une affaire civile comme celle dont je suis chargé, mettant en cause un ministère client, comme le ministère de l'Agriculture ou de l'Immigration, par le biais de ses avocats. S'il s'agit d'une affaire policière, on peut parler d'enquêtes spontanées.

Le président: Je comprends. Toutefois, je vous ai posé une question. Je pense avoir une assez bonne idée de la façon dont le ministère de la Justice fonctionne. Je suppose que certains éléments de preuve ont été soumis à un procureur du ministère de la Justice et que ce dernier a dû intervenir. N'est-ce pas le cas? En l'occurrence, certaines mesures ont été prises. À qui doit s'adresser normalement la police dans ce genre d'affaire? À quel ministère s'adresse-t-elle? Il a bien fallu qu'elle en saisisse quelqu'un.

M. Sims: Nous savons que, dans ce cas précis, la police a demandé de l'aide au ministère de la Justice.

Le président: Ce renseignement est incomplet. Quel service du ministère de la Justice a pu se charger de cette affaire? Vous travaillez pour un groupe; chacun de vos collègues également. De quel groupe peut-il s'agir?

M. Sims: Je ne peux pas vous donner le nom exact du service, mais je peux vous le décrire. Il s'agit du groupe qui traite avec des gouvernements étrangers, pour obtenir leur aide en vue de recueillir des témoignages à l'étranger et de les communiquer au Canada. Il s'agissait d'une situation inhabituelle, d'après les rapports de presse, dans la mesure où la GRC a demandé l'aide des autorités suisses, lesquelles se sont adressées au ministère de la Justice dont relève ce genre de question. Le groupe du ministère de la Justice qui s'en occupe est celui de l'Assistance internationale.

Le président: Voilà une grande nouvelle. L'affaire aurait-elle été portée à l'attention d'un groupe du ministère de la Justice avant d'être renvoyée à Assistance internationale, pour déterminer s'il existait des preuves de la perpétration d'un acte criminel dans notre pays? Le prétendu acte criminel a été commis ici, et pourtant les responsables ont cherché à obtenir des preuves d'un autre pays.

M. Sims: Je n'en sais rien, sénateur.

Le président: Pourriez-vous vous engager à obtenir ce renseignement? J'aimerais savoir quelle section a reçu les éléments de preuve et ce qu'il est advenu de ces derniers. Nous, au Sénat, avons essayé d'obtenir cette information, mais en vain. Il s'agit peut-être là d'une occasion unique. Il se trouve que j'ai à maintes reprises posé ces questions sans jamais obtenir de réponse. Il doit bien exister une section qui a reçu les éléments de preuve, avant de les transmettre ailleurs, je suppose.

M. Sims: Encore une fois, sénateur, comme je l'ai dit en réponse au sénateur Cools, je me demande s'il n'y a pas lieu d'invoquer nos privilèges à cet égard, dans la mesure où ces renseignements font partie intégrante d'un litige en cours devant la Cour supérieure du Québec. Sous réserve des privilèges qui devront peut-être être invoqués, je vais m'efforcer d'obtenir ce renseignement pour vous.

Le président: Toutefois, pouvez-vous vous engager à le faire et, en cas de problème, à écrire au greffier pour le lui signaler?

M. Sims: Je lui écrirai.

Le sénateur Cools: Je suis convaincue que nos témoins d'aujourd'hui n'ont pas la compétence voulue pour répondre à ces questions. Les autres questions, à mon avis, sont tout à fait dans leur champ de compétence. Le témoin essaie de répondre de façon judicieuse, mais il est évident qu'il n'en sait rien.

Le président: Sénateur Cools, je vous ai déjà accordé près de 25 minutes. Je sais que d'autres membres du comité souhaitent poser des questions.

Le sénateur Cools: Nous pourrions peut-être essayer de discuter avec les personnes compétentes.

Le président: Au cours de notre étude du Budget des dépenses principal, vous aurez tout loisir, si vous le souhaitez, de poursuivre cette série de questions avec les représentants du ministère de la Justice. Il n'y aura aucun problème.

Le sénateur De Bané: J'ai une question pour M. Miller ou M. Everest. Hier, j'ai attiré l'attention du comité sur la question des dépenses du gouvernement canadien. J'ai dit en toute naïveté que je n'aurais jamais cru que, d'un seul coup, au début des années 1980, la dette du Canada commencerait à croître aussi rapidement pour atteindre son niveau actuel.

Après coup, si l'on voit ce qui s'est produit au cours des 15 dernières années, aurait-on pu prédire cette situation ou comment en sommes-nous arrivés là? Je suis sûr que si quelqu'un avait déclaré en 1978, 1979 ou 1980 que, 15 ans plus tard, la dette publique aurait décuplé ou se serait multipliée par 15, personne au Conseil du Trésor n'aurait admis cette possibilité. Néanmoins, c'est arrivé. Nous sommes maintenant dans une situation où, sauf erreur, la dette représente presque 80 p. 100 de notre PIB. Quelles leçons en tirez-vous? A-t-on mis en place un système pour empêcher ce genre de choses de se produire à nouveau? Que pensez-vous de la façon dont les choses ont évolué au cours des 15 dernières années?

M. Miller: Pour répondre à votre question, sénateur, je pourrais peut-être citer certains chiffres. Je pourrais vous dire comment les dépenses du gouvernement fédéral ont évolué au cours des 20 dernières années. En 1974-1975, les frais de la dette publique s'élevaient au total à 3,2 milliards de dollars. Dix ans plus tard, ils avaient augmenté à 22,4 milliards et, en 1994-1995, ils ont atteint leur plus haut niveau, soit 42 milliards de dollars. Voilà la façon dont l'intérêt réel sur la dette publique a augmenté au cours de cette période de 20 ans.

Fait également intéressant à signaler, toutefois, bon nombre des principaux programmes mis en oeuvre dans les années soixante-dix prévoyaient un élément d'indexation en fonction des taux d'inflation. À mon avis, la sécurité de la vieillesse en est le meilleur exemple. Ce programme est désormais le plus important du gouvernement. Il y a 20 ans, son budget était de 3 milliards de dollars et, en 1994-1995, il a dépassé les 20 milliards. Il se trouve donc que pour bon nombre de nos programmes de protection sociale, y compris tous ceux qui prévoient des transferts aux provinces, sont indexés. Lorsque notre économie traverse une période difficile, nous utilisons ces mêmes programmes pour aider un plus grand nombre de personnes au Canada, de sorte que le coût ne cesse d'augmenter.

Au cours de la même période, si nous excluons les frais de la dette publique, la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti, toutes les autres dépenses du gouvernement sont passées d'environ 22 milliards en 1974-1975 à près de 66 milliards de dollars en 1984-1985, pour atteindre aujourd'hui 83 milliards. Ces dépenses vont évidemment diminuer considérablement gråce aux modifications dues à diverses initiatives comme l'examen des programmes et les annonces dans le budget quant aux prévisions futures.

Quoi qu'il en soit, si l'on considère les secteurs dans lesquels le gouvernement fédéral a dépensé ses ressources au cours des 20 dernières années, l'accroissement de la dette publique est surtout dû aux programmes indexés au taux d'inflation. Lorsque l'économie était dans le marasme et que les recettes fiscales n'ont pas atteint les prévisions - en effet, celles-ci sont généralement indexées aussi, mais leur taux de recouvrement est beaucoup plus long lorsque les choses vont mal -, il y a eu un écart important.

Dans le tout dernier budget, bien que le rapport de la dette publique au PIB soit d'environ 77 p. 100, ce taux diminue en fait au cours de la période visée par ce budget, de sorte qu'il y a une légère tendance à la baisse. En tout cas, certaines autres dépenses de programmes modifiées à la suite du processus d'examen des programmes diminuent de façon spectaculaire. Par exemple, les dépenses directes des ministères, qui comprennent tous les postes de dépenses sauf les importants paiements de transfert législatifs aux particuliers et aux autres paliers de gouvernement, diminueront de 21 p. 100 entre 1994 et l'exercice 1998-1999.

Si notre rendement économique n'est pas aussi bon que prévu, il va sans dire que nos filets de sécurité seront encore là pour protéger les Canadiens et que cela entraînera des modifications à ce plan. Comme l'a signalé le ministre des Finances, toutefois, les prévisions qu'il fait dans ce budget se fondent sur les conseils de gens de l'extérieur quant aux hypothèses sous-jacentes et logiques concernant le rendement de l'économie, et cetera. Il semble que le pire soit déjà passé et que les tendances, pour les quelques prochaines années, permettent d'entrevoir la diminution des besoins financiers ou d'emprunt du gouvernement, ainsi que le rapport de la dette au PIB.

Le sénateur De Bané: Merci beaucoup, monsieur Miller. Si j'ai bien compris, le vérificateur général représente les actionnaires de notre pays, soit les Canadiens. Il est chargé de surveiller la façon dont le gouvernement dépense son argent. Il présente ensuite des rapports aux actionnaires, par l'entremise du Parlement, après avoir examiné ces dépenses.

Sauf erreur, il a pour mandat d'examiner les critères de rendement, le cas échéant, pour voir si les dépenses sont effectuées de façon efficace, lorsqu'il existe des mesures du rendement. Je pense qu'il accorde aussi beaucoup d'importance à l'optimisation des ressources, pour s'assurer que les actionnaires obtiennent le maximum en retour des impôts qu'ils paient.

Chaque année, le vérificateur général consacre un chapitre de son rapport à des observations sur les nouvelles politiques mises en place pour remédier aux problèmes qu'il a cernés les années précédentes. Les ministères s'engagent à combler les lacunes éventuelles décelées par le vérificateur général au nom des actionnaires du Canada. Souvent, toutefois, les ministères ne donnent pas suite à leur engagement à cet égard.

J'aimerais beaucoup savoir comment les recommandations du vérificateur général sont prises en compte pour combler les lacunes qu'il a décelées, ou si les ministères réagissent toujours en disant qu'ils sont mieux placés que lui pour savoir ce qu'il faut faire et qu'il n'a aucune idée de ce qui constitue une bonne gestion, et cetera. Comment réagissez-vous à ses recommandations?

M. Miller: L'évolution du travail réalisé par le Bureau du vérificateur général, comme vous le dites, est intéressante. Ce dernier exécute ce que l'on peut appeler la vérification financière des renseignements et des dépenses du gouvernement en général.

Toutefois, depuis quelques années, le vérificateur général procède à des vérifications de l'optimisation des ressources et a décidé d'entreprendre une série d'études de portée plus restreinte mais mieux ciblées, de concert avec les ministères. D'après mon expérience de ce genre d'initiatives, il semble que le Bureau du vérificateur général cherche davantage à aider les ministères à atteindre leurs objectifs quant au résultat de ces mesures, plutôt qu'à relever publiquement des écarts de conduite ou des procédures irrégulières.

En conséquence, si le vérificateur général souhaite consacrer un chapitre de son rapport à un important projet - et à l'heure actuelle, bien entendu, il présente plusieurs rapports au Parlement chaque année et non une fois par an - il s'engage alors à consacrer énormément de temps à travailler en collaboration avec le ministère ou l'organisme en cause avant de préparer ce rapport initial. Dans ce dernier se trouvent des réponses des gestionnaires. Chaque recommandation précise s'accompagne d'une réponse indiquant comment les mesures correctives seront prises ou en quoi les choses vont changer. Cela représente sans nul doute une reddition de comptes puisque les responsables indiquent publiquement les mesures qui vont être prises pour tenir compte des conclusions du vérificateur.

En général, au bout de deux ans, on procède à une étude de suivi. C'est peut-être à cela que vous faites allusion en parlant du chapitre où, deux ans plus tard, le vérificateur général examine à nouveau ce secteur, s'assure que ses recommandations ont été suivies et présente un rapport de suivi au Parlement, ainsi qu'à l'ensemble des Canadiens, sur les mesures précises qui ont été prises ou la façon dont on a résolu le problème. C'est ce qui se passe pour les principales constatations et les importantes initiatives prises.

L'essentiel du travail qu'effectue le vérificateur général auprès des ministères et organismes débouche sur des lettres aux gestionnaires, où l'on écrit au ministre ou au sous-ministre, ou même au directeur financier d'un organisme en leur demandant de prendre les mesures de rajustement qui s'imposent. L'essentiel des mesures prises au niveau de l'information ou du changement des critères de programmes se fait à la suite de ces examens et rapports qui sont peut-être moins spectaculaires mais sans nul doute plus importants pour la gestion permanente du gouvernement. Il existe une série de mécanismes. Le vérificateur général collabore de façon permanente avec les fonctionnaires des ministères, et il fait sans doute état officiellement de 10 à 15 p. 100 seulement de cette activité dans ses rapports périodiques au Parlement.

Le sénateur De Bané: À votre avis, monsieur Miller, les différents ministères tiennent-ils compte des principales recommandations du vérificateur général? Essaient-ils d'y donner suite de façon à ce que ses recommandations ne restent pas lettre morte? Quelle est votre impression générale?

M. Miller: D'après moi, au cours de la période qui précède la rédaction du rapport, ou plutôt d'un chapitre officiel le concernant, le ministère a déjà admis que certaines modifications s'imposaient et cela se reflète généralement dans sa partie de la réponse des gestionnaires, de sorte que les changements sont souvent déjà en cours. Lors de ses études, le vérificateur général est souvent confronté à un dilemme du fait que, d'ici à la publication du rapport, le programme a déjà changé d'orientation et il est difficile d'établir un rapport avec les observations. C'est sans doute les seuls cas, d'après mon expérience, où il est difficile de donner suite à ses conclusions. En d'autres termes, dans son rapport, le vérificateur général déclare: «Vous devriez évaluer ce programme et vous pencher sur ses répercussions,» alors que, en fait, l'orientation du programme a tout à fait changé et l'on a établi de nouveaux critères. En conséquence, du point de vue du ministère en cause, il serait absurde de retourner en arrière et d'évaluer le programme précédent. Ce sont les seuls cas où j'ai personnellement constaté que les recommandations n'avaient pas été suivies.

Il est difficile de faire fi de bon nombre des observations du vérificateur général. Il a toujours une autre occasion l'année suivante de réviser et de mettre à jour son information.

Le sénateur De Bané: Enfin, monsieur Miller, je me demande si vous consultez le Bureau du vérificateur général pour connaître sa réaction lorsque les ministères ont officiellement annoncé qu'ils allaient mettre en oeuvre certaines de ses recommandations mais n'y ont malheureusement pas donné suite. D'après mes renseignements, du point de vue du Bureau du vérificateur général, il arrive que le ministère dise: «Très bien, vous avez fait telle recommandation. Nous pensons qu'elle est bonne et allons la suivre.» Toutefois, quelques années plus tard, le vérificateur général constate que le ministère n'a pas respecté sa promesse. Vous pourriez peut-être vérifier auprès du Bureau s'il est arrivé au fil des ans que les ministères, malgré leurs promesses, ne donnent pas suite à ces recommandations.

M. Miller: Bien sûr, nous pourrons le vérifier.

Le sénateur Stratton: Vous avez mentionné les raisons de l'accroissement du déficit et de la dette publique. Nous supposons tous désormais que le déficit est une chose du passé et que, d'ici la fin du siècle, nous aurons un budget équilibré, à peu de choses près. Tel est l'argument avancé. Si les circonstances ne changent pas, c'est apparemment notre objectif. J'ai de sérieuses réserves à ce sujet.

Il faut alors se poser la question suivante: Si le déficit disparaît et que nous avons un budget équilibré, que devient la dette publique? Quand commence-t-elle à diminuer? Est-ce prévu pour l'an 2008, ou cela va-t-il se produire plus tôt?

M. Miller: Malheureusement, sénateur, je ne peux pas vous citer de date exacte. L'un des facteurs essentiels à prendre en compte est l'écart entre le déficit budgétaire, qui est la différence entre les dépenses et les recettes budgétaires, et les besoins financiers du gouvernement fédéral qui correspondent aux emprunts que nous devons faire à l'extérieur. L'objectif est de ramener ces besoins financiers à zéro dans les années à venir. L'objectif pour l'an prochain, sauf erreur, est de 2 p. 100. Si nous atteignons ces objectifs, nos besoins financiers seront les plus faibles de tous les pays du G-7. En 1997, je crois qu'ils seront d'environ 6 milliards de dollars, ce qui constitue le plus faible pourcentage. Bon nombre d'autres pays considèrent qu'à ce niveau, leur budget est équilibré. Dans notre cas, cela signifiera que nous aurons encore un déficit budgétaire, mais que, dans l'ensemble, nous pourrons le financer à l'interne. Nous n'aurons pas besoin d'emprunter à l'extérieur.

Le sénateur Stratton: C'est le problème que pose le déficit actuel.

M. Miller: C'est exact. Quant au remboursement de la dette, je n'ai aucune idée du moment où cela va commencer à se produire, étant donné les tendances générales. Lorsque nous aurons un budget équilibré, je ne sais pas exactement à quel moment la tendance va se renverser.

Le sénateur Stratton: N'avez-vous fait aucune prévision? J'ai du mal à y croire.

M. Miller: Je suis convaincu que mes collègues du ministère des Finances ont minutieusement étudié la question, mais au Conseil du Trésor, nous sommes plutôt responsables des dépenses. Le ministère des Finances se préoccupe en général des recettes et de la concordance entre les deux.

Le sénateur Stratton: Je comprends. Il serait intéressant de le savoir car d'ici quelques années, je suis sûr qu'il s'agira d'une question brûlante pour l'ensemble des Canadiens.

Le sénateur De Bané: J'oserais dire, sénateur Stratton, que le gouvernement n'a pas l'ambition de rembourser cette dette.

Le sénateur Stratton: Il n'a pas l'ambition de la rembourser progressivement?

Le sénateur De Bané: Je pense qu'il a pour objectif de réduire chaque année le rapport du service de la dette, y compris les intérêts annuels, au PIB.

Le sénateur Stratton: Je comprends.

Le sénateur De Bané: Il ne compte pas rembourser la dette cumulée, mais réduire le service de celle-ci.

Le sénateur Stratton: Je comprends tout cela, mais cette question sera au premier plan de nos préoccupations lorsque le déficit sera supprimé et notre budget équilibré. Que deviendra cette dette? Nos enfants et petits-enfants continueront de nous dire: «C'est vous qui l'avez créée; que comptez-vous faire pour la supprimer?»

Le sénateur De Bané: Je vous dis ce que je crois être la théorie du gouvernement.

Le sénateur Stratton: Je comprends, mais je pense que ma question est tout à fait justifiée. Je m'adresse peut-être aux mauvaises personnes, mais c'est néanmoins une question à laquelle il faut répondre.

M. Miller: Il vaudrait peut-être mieux la soulever lors de l'étude du Budget des dépenses principal.

Quant à l'autre question concernant les versements moyens pour les programmes de transition - et je pense qu'il s'agit de moyennes globales - en se fondant sur un versement moyen d'environ 20 $ l'acre et une exploitation agricole moyenne d'environ 600 acres, nous obtenons près de 12 000 $ par exploitation. Un certain nombre de facteurs sont pris en compte dans le calcul des différents montants. Il est presque trompeur de se fonder sur des moyennes.

Le sénateur Stratton: Il faut bien se fonder sur quelque chose.

Le président: J'ai deux questions supplémentaires à celles qu'a posées plus tôt le sénateur Stratton au sujet de Petro-Canada et du Canadien National, et plus précisément de l'injection de capitaux. Commençons par Petro-Canada. Combien de capitaux a-t-on injectés dans cette société depuis sa création? Une fois les dettes radiées et lorsque vous aurez obtenu la somme que vous espérez tirer de la vente de ses actions, à combien s'élèvera la perte cumulée relative à Petro-Canada? Y aura-t-il un profit?

M. Miller: En fait, il y aura un profit, mais c'est dû à la façon dont nous comptabilisons ces changements.

Je dois dire que l'injection de capitaux a davantage touché le CN que Petro-Canada. Dans ce dernier cas, nous avons tenu compte de l'écart entre la valeur comptable des actions que nous avons déterminée et le montant que nous avons effectivement reçu.

Le président: La valeur comptable a-t-elle été déterminée en fonction des sommes investies?

M. Miller: Ou de leur valeur, en effet. Je ne connais pas les détails de l'affaire. Il s'agit maintenant entièrement d'actions. Nous ne nous sommes pas départis de toutes les actions que nous détenions. La valeur comptable des 173 millions d'actions que nous détenions a été établie à près de 25 $ l'unité, soit un total d'environ 4,3 milliards de dollars. La valeur comptable des quelques 124 millions d'actions que nous avons vendues, plus ou moins, représente légèrement plus de 3 milliards de dollars. Cet écart, donc, correspond au montant que nous allons en fait radier. En d'autres termes, pour obtenir la valeur résiduelle du reste des actions, celles-ci continuent d'être comptabilisées à leur valeur comptable initiale, soit environ 25 $.

Au cours des années visées, conformément à de bons principes comptables, nous nous sommes rendu compte que, gråce à une provision pour compensation ou pour dépréciation, la valeur des actions n'était pas de 25 $, et on en a déduit un certain montant. D'après mes renseignements, le produit de nos ventes était supérieur au montant réduit que nous avions fixé pour la valeur des actions. Même si ce montant est inférieur à celui qui a été inscrit au départ, il est supérieur au montant qui figure actuellement dans nos livres.

Le président: Vos valeurs réduites étaient supérieures à ce que vous avez fini par obtenir pour les actions, n'est-ce pas? Autrement dit, vous avez évalué vos actions à 15 $ et avez réussi à vous en débarrasser à un autre prix, quel qu'il soit.

M. Miller: C'est exact.

Le président: Vous avez donc réalisé un profit.

Combien a-t-on investi dans Petro-Canada? Combien de capitaux le gouvernement fédéral a-t-il injecté dans cette société?

M. Miller: Mise à part la valeur comptable, qui correspond généralement au prix établi pour la prise de contrôle, je n'en ai franchement aucune idée.

Le président: Pourriez-vous obtenir ce renseignement pour nous, je vous prie?

M. Miller: Absolument.

Le sénateur De Bané: S'agissant de Petro-Canada, est-il vrai que le vérificateur général est arrivé à la conclusion que le gouvernement de l'époque, soit le gouvernement Trudeau, a payé trop cher pour l'acquisition de Petro-Canada?

M. Miller: En toute franchise, je n'en sais rien, sénateur. Je ne sais pas de quels facteurs on a tenu compte pour fixer la valeur de Petro-Canada étant donné les diverses transactions qui ont eu lieu. On a effectué plusieurs transactions pour accumuler l'intérêt qui a débouché sur l'achat de Petro-Canada. Là encore, nous pourrons obtenir ces renseignements pour votre gouverne.

Le sénateur De Bané: J'aimerais savoir quels conseils le gouvernement du jour a reçus des firmes engagées pour l'informer sur la valeur de la société qu'il souhaitait acheter. Pouvez-vous également obtenir ce renseignement?

M. Miller: Oui.

Le président: Avant la privatisation du CN, il a été décidé d'injecter 2 milliards de dollars dans la société, n'est-ce pas?

M. Miller: En fait, il s'agit de 900 millions de dollars.

Le président: Cette injection de capital visait-elle à réduire la dette en souffrance du CN envers le gouvernement fédéral, ou sa dette à l'égard des banques et autres institutions, ainsi que le gouvernement fédéral?

M. Miller: C'est une question intéressante. Malheureusement, je ne connais pas les divers éléments de la dette du CN pour le moment. Je suis sûr que ce renseignement ne figure pas dans nos notes d'information. Je préfère ne pas spéculer. Il nous faudra vérifier la composition de la dette. Cela s'est fait en vertu d'une loi ou d'un texte législatif, et je ne connais pas précisément le genre de renseignements qui étaient inclus, si ce n'est une provision pour injection de capital.

Le président: Qui était le principal courtier pour ces deux transactions, soit Petro-Canada et le CN?

M. Miller: Je n'en sais rien. Voulez-vous dire qui était le preneur ferme?

Le président: De quelle vente s'est occupé Gordon Capital?

M. Miller: Je ne m'en souviens pas. Il y a au secrétariat des spécialistes de la privatisation. Je ne sais pas exactement comment ces deux transactions se sont déroulées.

Le président: À combien s'est élevée la commission demandée? Combien a coûté la privatisation dans les deux cas? Quelle commission a-t-on versée aux preneurs fermes? Ils n'aiment pas être appelés courtiers.

M. Miller: Pour prendre l'exemple de Petro-Canada, lors de la vente des actions, on a prévu des versements intérimaires et ensuite le paiement du solde de la commission. Pour l'ensemble de la vente des actions, soit environ 750 millions de dollars, les commissions versées aux preneurs fermes se sont élevées à près de 52 millions de dollars.

Le président: Est-ce que vous parlez de Petro-Canada?

M. Miller: C'est exact. Permettez-moi de me corriger. Le produit total de la vente des 124 millions d'actions s'est élevé à près de 1,8 milliard de dollars. D'après le seul renseignement dont je dispose, les commissions des preneurs fermes ont représenté 52 millions de dollars de cette somme.

Le président: Il y a dans ces cas-là un courtier ou preneur ferme principal et un certain nombre d'autres qui l'aident à mener à bien la transaction. Il s'agit d'une transaction très importante et elle n'a donc pas pu être effectuée par une seule personne.

M. Miller: En effet, d'après mes renseignements.

Le président: Qui étaient les autres preneurs fermes et que représentait leur participation? Comment ont-ils été choisis? J'aimerais obtenir les mêmes renseignements au sujet du CN.

M. Miller: Très bien.

Le président: En ce qui a trait au système de gestion des dépenses, je vous demanderais, si le comité est d'accord, de revenir nous l'expliquer lors d'une séance spéciale. Il s'agit d'un nouveau système en vertu duquel les gestionnaires ministériels conservent une certaine partie des économies réalisées et peuvent les dépenser dans d'autres secteurs. Est-ce exact?

M. Miller: Ce n'est pas ainsi que je décrirais le système, monsieur le président. Cet élément précis, conformément à ce que j'ai dit dans ma déclaration préliminaire, correspond à la provision de 5 p. 100 du report du budget de fonctionnement. Il s'agit d'un élément précis du système.

Par le passé, on a reproché au gouvernement ses dépenses de fin d'exercice. Certains craignaient que les ministères n'effectuent ces dépenses de dernière minute que parce qu'ils disposaient des fonds et qu'il fallait les dépenser au risque de les perdre.

Certains facteurs contribuent à une gestion prudente. Nous prendrons l'exemple d'un gestionnaire qui a deux responsabilités à assumer dans le cadre de son budget: d'une part, acheter une nouvelle machine à écrire et d'autre part, payer la facture de téléphone de toute l'année. Ce gestionnaire n'achètera pas la nouvelle machine à écrire tant qu'il ne sera pas certain d'avoir l'argent nécessaire pour acquitter la facture de téléphone.

Il est arrivé par le passé que le gestionnaire se rende compte, aux environs de décembre ou janvier, qu'il disposait de l'argent nécessaire pour acheter la nouvelle machine à écrire. Il déclenchait alors un processus d'appel d'offres et approuvait l'offre la plus basse par l'entremise de Travaux publics et Services gouvernementaux. L'entrepreneur annonçait que la machine à écrire ne serait pas disponible avant le 1er avril. Le gestionnaire lui répondait qu'il relancerait un appel d'offres à la même époque l'an prochain, car l'autorisation d'acheter la machine serait périmée au 31 mars.

Le président: Peut-on emprunter les fonds à un autre ministère?

M. Miller: Non.

Le président: Un autre ministère peut-il l'acheter pour le compte de ce gestionnaire? Je pense que cela se fait.

M. Miller: En fait, la Loi sur la gestion des finances publiques interdit ce genre de chose. Certaines dispositions sont prévues en cas d'intérêt commun, si certains articles peuvent être achetés en même temps, mais l'autorisation de dépense sera également périmée à la fin de l'année.

Compte tenu de ce qui précède, nous avons proposé une modification. Il va sans dire qu'il faut toujours obtenir l'autorisation du Parlement. Il n'existe aucune autorisation spéciale. Le budget de fonctionnement d'un gestionnaire est généralement réparti de la façon suivante: 60 à 70 p. 100 pour les traitements, une certaine partie pour l'achat de petit matériel, ainsi que les dépenses de fonctionnement comme les factures de téléphone et les réparations. Or, l'année suivante, il est possible de présenter une demande dans un budget supplémentaire pour récupérer jusqu'à 5 p. 100 des sommes budgétées.

Lorsqu'un gestionnaire arrive en fin d'exercice et constate qu'il lui reste suffisamment d'argent pour acheter une nouvelle machine à écrire, ce qui se produira inévitablement, et que l'entrepreneur déclare que la livraison doit se faire le 1er avril, le gestionnaire peut en toute confiance approuver l'achat car les fonds qui sont annulés pour l'année en cours peuvent être renouvelés l'année suivante. Le Conseil du Trésor a invité tous les ministères à redemander cette autorisation au Parlement. Ainsi, nous pouvons éviter les problèmes qui se posent lorsqu'une autorisation prend fin le 31 mars. Cela donne au gestionnaire une grande marge de manoeuvre pour effectuer ce genre d'achats et de dépenses.

Le président: J'aimerais poser une question au sujet du Budget des dépenses supplémentaire. À la page 53, sous la rubrique Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, il est prévu un virement de 2 527 000 $. Ce montant est-il simplement viré d'un crédit à un autre?

M. Miller: Oui. En l'occurrence, monsieur le président, les fonds ont été réservés pour les Centres de services aux entreprises du Canada qui sont au nombre de 10 dans tout le pays. Diversification de l'économie de l'Ouest canadien est responsable des centres situés dans l'Ouest du pays. En effet, il s'agit d'un virement entre l'ancien crédit 5 et le crédit 1 au titre des dépenses de fonctionnement.

Le président: Le crédit 5 concernait-il les subventions et prêts aux entreprises?

M. Norm Everest, conseiller principal en prévisions budgétaires, Conseil du Trésor du Canada: Il s'agit des paiements de transfert aux centres de subventions et de contributions.

Le président: Le ministère est censé utiliser ces fonds pour aider les entreprises gråce à des subventions ou des prêts, mais ces fonds ont été virés aux budgets du personnel et de fonctionnement?

M. Everest: Dans ce cas-ci, oui. À la fin de l'exercice, il restait au crédit 5 des fonds excédentaires qui n'avaient pas été réclamés par des bénéficiaires admissibles.

Le président: L'an dernier, lors de la présentation du budget, le ministère ne savait pas qu'il devrait aider ces centres de services aux entreprises?

M. Everest: Si, je pense que cela a été annoncé dans le budget de l'an dernier. Toutefois, certaines dispositions ont été prises en vue de permettre aux ministères de réclamer ces fonds une fois les plans et les détails finalisés. À la fin de l'exercice, ils ont eu le choix entre demander au Parlement une affectation supplémentaire au crédit 1, ou examiner leur crédit 5 pour voir s'il existait des fonds excédentaires utilisables. Ils ont pu ensuite demander au Parlement de rajuster les fonds qui avaient été établis auparavant.

Le président: C'est donc à eux de décider ce qui constitue des fonds excédentaires. Le responsable de Diversification de l'économie de l'Ouest canadien peut décider s'il y a lieu ou non de consentir les prêts demandés. C'est lui qui décide. De temps à autre, le ministre est appelé à intervenir. En conséquence, au lieu d'économiser des fonds dans son budget de fonctionnement courant, ce gestionnaire peut décider d'accorder moins de subventions et prêts et de virer l'excédent dans un autre élément de son budget.

M. Everest: En l'occurrence, il s'agit davantage d'une décision sujette à conflit d'intérêts.

Le président: C'est exactement ce que je veux dire.

M. Everest: Toutefois, je ne pense pas que cela s'applique dans la mesure où, par exemple, une certaine somme d'argent a été affectée à Diversification de l'économie de l'Ouest canadien au titre de ses programmes de paiements de transfert. Si, dans le courant de l'année, il n'y a pas eu suffisamment de demandes pour épuiser ces fonds, ces derniers ne sont pas renouvelés.

Le président: Parlons un peu de l'APECA.

M. Miller: Les prévisions pour l'APECA se trouvent à la page 43.

J'ajoute que les Centres de services aux entreprises du Canada représentaient une importante initiative, et tous les organismes régionaux, outre Industrie Canada, ont considéré qu'il s'agissait d'une nouvelle initiative et d'une nouvelle façon de diffuser l'information dans tout le pays. En réalité, il doit y avoir des compromis entre les dépenses relatives à la mise en oeuvre directe des programmes et celles qui visent d'autres secteurs. Les responsables ont déterminé les sources de financement et déclaré: «Notre principale priorité en l'occurrence est le financement de ces centres de services aux entreprises; par conséquent, nous sommes prêts à réduire nos programmes dans certains autres secteurs financés par les contributions, afin de nous assurer que cette initiative pourra aller de l'avant.»

Le président: L'APECA a fait la même chose. Il s'agit pratiquement d'un plan. Ce n'est pas par hasard que l'organisme a réussi à économiser de l'argent. Ses dirigeants se sont sans doute dit: «À la fin de l'année, au lieu d'économiser de l'argent sur notre budget de fonctionnement actuel pour financer les Centres de services aux entreprises, nous utiliserons l'argent que nous avons promis aux contribuables de consacrer à des subventions pour financer des programmes et nous le réaffecterons à l'administration pour engager de nombreuses autres personnes.» C'est ce qu'ils ont fait de tous les fonds disponibles.

M. Miller: J'aimerais apporter une légère nuance à ce que vous dites à ce sujet, sénateur. Il s'agissait d'une importante initiative, car nous essayons de diffuser de l'information sur tous les programmes du gouvernement dans un grand nombre d'endroits. Il ne s'agissait pas simplement des organismes régionaux comme Diversification de l'économie de l'Ouest et l'APECA. On a jugé utile d'investir ces fonds dans les traitements et les frais de fonctionnement. C'était pour les responsables une priorité plus importante pour atteindre les objectifs généraux de leur organisme que de prévoir un certain montant aux fins de contributions ou de subventions.

Il s'agit d'une modification par rapport au plan initial, et c'est ainsi que cela figure dans ce budget des dépenses supplémentaire. On nous indique qu'il y a compensation entre les deux. Étant donné que les Centres de services sont en activité depuis plus d'un an, tout le monde savait que cette initiative était prévue et elle a donc été incluse dans les programmes. Il fallait prévoir la création de ces centres et les responsables n'avaient aucun moyen d'obtenir des ressources supplémentaires à cette fin. Ils ont dû fixer leurs propres priorités et se rendre compte qu'il fallait abandonner un autre secteur pour que cette nouvelle initiative puisse être mise en vigueur.

Le président: Le Québec en a un également.

M. Miller: C'est exact.

Le président: Tous ces centres jouent-ils le même rôle?

M. Miller: Oui.

Le président: Si nous passons au ministère des Anciens combattants, page 47, nous constatons un autre virement d'environ 4 millions de dollars.

M. Everest: Il s'agit du Tribunal des anciens combattants (Révision et appel).

Le président: Où le ministère a-t-il trouvé cet argent?

M. Everest: En septembre dernier, le Parlement a approuvé un nouveau projet de loi visant à créer le Tribunal des anciens combattants (Révision et appel), abrogeant du même coup d'autres textes de loi, la Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants et certaines parties de la Loi sur les pensions portant sur la Commission canadienne des pensions. Ces attributions ont alors été transférées à ce nouveau tribunal. En conséquence, il est resté des fonds disponibles dans certains crédits des Anciens combattants du fait que ces organismes ont été supprimés. Des fonds avaient été affectés pour toute l'année. Nous avons retrouvé des fonds, sauf erreur, dans les crédits 10 et 20. Toutefois, pour que le Budget des dépenses soit aussi simple que possible, au lieu de virer des fonds de plusieurs crédits dans le crédit 21, le ministère a déterminé qu'il disposait de fonds excédentaires au crédit 5. Les responsables ont donc décidé de prendre tous les fonds du crédit 5 et de faire en sorte que le rajustement soit aussi simple que possible.

Le sénateur Cools: J'ai parrainé ce projet de loi.

Le président: Ont-ils ce droit, donc, en tant que gestionnaires de secteurs où des subventions et contributions ont été budgétisées dans l'intérêt des contribuables? De l'argent va être versé à un contribuable quelconque qui ne travaille pas pour le gouvernement, c'est-à-dire une entreprise ou un organisme, un chèque d'assurance-chômage, ou autre, et on peut prendre cet argent et le verser au budget de fonctionnement, ce qui s'est fait dans certains cas dans le Budget des dépenses supplémentaire.

M. Miller: Tout d'abord, des montants maximums sont prévus pour les subventions qui doivent être approuvées une à une par le Parlement, puisqu'il s'agit essentiellement de cadeaux. Les ententes de contributions ressemblent davantage à une obligation contractuelle, car elles procurent en dernier ressort un avantage.

En effet, les divers gestionnaires d'un ministère pourraient prendre l'argent prévu pour une entente de contribution et l'utiliser pour ses dépenses de fonctionnement. Dans la plupart des cas, il faudrait effectuer un virement entre les crédits, ce qui exigerait un budget des dépenses supplémentaire. En réalité, les derniers budgets supplémentaires de chaque année sont généralement remplis de ce genre de transactions. La plupart du temps, cela correspond à un changement dans les priorités.

Le virement peut également se faire dans l'autre sens. Il ne se fait pas nécessairement des ententes de contributions aux dépenses de fonctionnement. Les fonds peuvent être virés des dépenses de fonctionnement aux contributions. Cela s'est produit au ministère de la Santé et aux Affaires indiennes, où ce n'est pas l'objet de l'affectation des fonds qui a changé, mais plutôt la méthode de prestation de ces services, car la délégation des responsabilités aux bandes indiennes a augmenté le montant des contributions nécessaires, en vertu de l'entente financière passée avec elles, plutôt que les dépenses de programmes directes par un ministère ou un organisme.

Il y a des cas où les fonds circulent entre les secteurs. L'objectif fondamental reste le même. En fait, en l'occurrence, nous n'avons même pas modifié le programme que nous offrions. Toutefois, ce n'était pas la bonne façon d'effectuer réellement et définitivement ces versements, de sorte qu'il nous faut demander au Parlement d'autoriser cette modification.

Le président: J'ai une dernière question sur la Commission d'assurance-chômage. La Caisse d'assurance-chômage est-elle excédentaire?

M. Miller: Oui.

Le président: À combien s'élève cet excédent?

M. Miller: Je n'en ai aucune idée.

Le président: Est-ce 500 millions de dollars?

M. Miller: Je n'en ai pas la moindre idée.

Le président: Ou plutôt 5 milliards de dollars?

M. Miller: Je dirais que l'excédent est plutôt de l'ordre de 5 milliards.

Le président: Cette somme se trouve-t-elle dans la caisse, ou est-ce simplement un jeu d'écritures? Elle fait vraiment partie des recettes générales, et sert véritablement à réduire le déficit, n'est-ce pas?

M. Miller: Dans ses recommandations d'il y a une dizaine d'années, le vérificateur général nous a demandé d'intégrer ces comptes précis, surtout le Compte d'assurance-chômage, dans les livres du Canada. Tant dans le budget que dans nos rapports sur les Comptes publics, il existe des inscriptions comptables visant à intégrer ces comptes spéciaux dans les transactions des comptes du Canada. Il se peut qu'on vous cite des chiffres différents. Il peut s'agir ou non de comptes consolidés. L'écart est effectivement dû au Compte d'assurance-chômage. Tout dépend des calculs relatifs aux besoins financiers et au déficit budgétaire, selon la façon dont ils sont présentés.

Le président: Nous reviendrons sur cette question lors de l'étude du Budget des dépenses principal.

S'il n'y a pas d'autres questions, j'ai besoin d'une motion pour faire rapport du Budget des dépenses supplémentaire au Sénat.

Le sénateur Cools: Je propose la motion.

Le président: Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le président: La motion est adoptée.

La séance est levée.


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