Délibérations du comité sénatorial permanent
des finances nationales
Fascicule 23 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 23 avril 1997
Le comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 17 h 15, pour examiner le budget principal des dépenses qui a été présenté au Parlement pour l'année financière se terminant le 31 mars 1998.
Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: La séance est ouverte. C'est la troisième réunion publique du comité. Nos témoins aujourd'hui sont M. Bruce Rowsell, directeur du Bureau de la surveillance des médicaments, et Mme Jean Peart, chef intérimaire du Projet du chanvre indien.
Si vous avez une présentation à faire, vous pouvez prendre la parole.
M. Bruce Rowsell, directeur, Bureau de la surveillance des médicaments, Santé Canada: Je voudrais faire une brève déclaration d'ouverture.
Honorables sénateurs, je suis heureux de pouvoir vous dire que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et son règlement d'application ont été proclamés le lundi 21 avril. Ce règlement entrera en vigueur le 14 mai. Il porte principalement sur l'utilisation médicale des drogues contrôlées et il facilitera le traitement de ces produits par les pharmaciens, les médecins, les vendeurs agréés et les autres, en vertu de cette nouvelle loi.
Je vais d'abord parler de l'objection que vous avez soulevée en ce qui concerne la réglementation concernant le chanvre industriel. Tout d'abord, je voudrais dire que Santé Canada fait tout son possible pour que cette réglementation soit approuvée dès que possible, tout en reconnaissant qu'il y a d'autres priorités réglementaires au sein du ministère. Nos priorités sont établies, dans la mesure du possible, en fonction du risque pour la santé des Canadiens et des besoins médicaux pour certains produits.
Deuxièmement, conformément à la politique du Conseil du Trésor, notre pratique est de consulter autant de parties intéressées que l'on peut, pour se faire la meilleure idée possible de la question et des problèmes liés à ces produits. Il est important d'établir un cadre politique avant de demander à nos conseillers juridiques de commencer à rédiger un règlement. Les efforts faits dès le début nous permettent de préparer tout de suite un document convenable et, par conséquent, de réduire le temps exigé par des révisions ultérieures.
Je vais vous donner un ou deux exemples. Nous avons tenu un atelier de consultation ici à Ottawa les 17 et 18 mars et pendant cette session un certain nombre de points ont été soulevés. En ce qui concerne le chanvre industriel, on s'est intéressé surtout à la teneur en fibres, et aux questions relatives aux fibres textiles, aux produits de papier et autres produits de remplacement du bois. Toutefois, un certain nombre de parties se sont présentées et ont déclaré que l'huile extraite des graines est également un produit de valeur. Nous n'avions pas vraiment considéré cet aspect, alors qu'il semblait y avait intérêt certain pour les graines. Cela nous a donc donné un point de vue différent de celui qu'on avait auparavant, puisque nous n'avions envisagé que la fibre. On cherche à utiliser les huiles dans le domaine des cosmétiques, en particulier des produits de toilette, et également comme substance nutritive. Nous avons dans la loi une exception pour les graines stériles. Toutefois, beaucoup de personnes estimaient que les valeurs nutritives et autres de ces huiles seraient probablement supérieures si elles étaient extraites de graines viables plutôt que stériles.
Il faut être en mesure de faire la distinction entre ces graines et celles qui seront utilisées pour la culture de la marijuana ou du chanvre industriel. Les graines stériles et viables sont très difficiles à distinguer. C'est pour cela que l'on travaille avec nos collègues d'Agriculture Canada. Nous espérons dans notre règlement, renvoyer à la Loi sur les semences pour être certains de ne pas créer des difficultés administratives indues au secteur industriel, mais nous voulons être sûrs également que l'on autorise les graines de chanvre, mais pas celles de marijuana.
Un certain nombre de propositions ont été faites. L'attitude dans le secteur est loin d'être homogène. De toute évidence certains ne voudraient aucune réglementation, alors que d'autres voudraient que l'on réglemente de trop près, au point de créer un monopole. Nous voulons un équilibre qui laisse l'industrie fonctionner avec le minimum acceptable de contrôles.
Il est essentiel que nous considérions les vues opposées, que nous réunissions de l'information, que nous l'analysions et que nous développions un cadre politique qui permettra à l'industrie de progresser, en reconnaissant qu'il y a aussi une question de confiance du public qu'il ne faut pas perdre de vue. Il y a des gens dans notre société qui considèrent le chanvre industriel comme une étape vers la légalisation de la marijuana. Nous devons faire en sorte que les Canadiens reconnaissent que ce règlement n'est là que pour faciliter le développement industriel de la fibre extraite du chanvre et que l'on prendra des précautions pour prévenir l'utilisation récréative de la marijuana.
Là encore, je pense qu'il nous appartient d'essayer d'éviter de nouvelles perturbations de cette industrie en nous assurant que la réglementation vise spécifiquement la marijuana utilisée à des fins récréatives, plutôt qu'au chanvre utilisé à des fins industrielles.
Nous avons un site Internet à Santé Canada qui permet au public et aux parties intéressées de nous faire part de leur opinion sur la façon dont les contrôles doivent être mis en oeuvre. Je dois dire que nous avons eu une bonne réponse du monde entier, qui nous a aidés et nous a également informés. Nous avons eu de nombreux commentaires, certains très détaillés.
J'ai ici un document pour discussion qui provient de notre réunion de consultation du mois de mars, qui a été utilisé comme information de base lors de notre processus de consultation. C'est le genre de renseignements disponibles dans notre site Internet.
C'est Agriculture Canada qui réglemente la propagation, l'importation et l'exportation des semences et leur contrôle. Nous voulons nous assurer que nous avons un lien adéquat, de sorte que les agriculteurs n'aient pas à se soumettre à deux processus de réglementation pour cultiver le chanvre et pour que l'on maintienne la variété nécessaire des semences.
Lors de notre réunion de consultation, un certain nombre de personnes nous ont indiqué que l'industrie n'est pas prête à entrer en pleine production. Je sais que le secteur agricole est pressé de produire. Je pense qu'il est prêt. Toutefois on craint qu'il n'y ait pas une infrastructure en place pour acheter la récolte puis la traiter.
La situation est similaire en Allemagne, même si elle n'est pas exactement semblable. Les agriculteurs sont subventionnés pour faire pousser du chanvre mais, vu qu'il n'y a personne pour acheter la récolte et utiliser la fibre, celle-ci est brûlée et les agriculteurs touchent la subvention. Lors de notre processus de consultation, nous avons essayé de nous assurer que les diverses industries, comme l'industrie du papier et l'industrie textile, seraient en mesure de traiter la fibre. Je sais que Industrie Canada et Agriculture Canada travaillent avec ces industries également pour essayer de s'assurer qu'il y aura une infrastructure pour l'industrie du chanvre.
Je voudrais terminer en vous donnant une idée du calendrier que nous proposons, en reconnaissant que nous sommes liés par la politique du Conseil du Trésor. Actuellement, notre charge de travail est extrêmement lourde, puisque nous étudions les licences de recherche de compagnies qui demandent à cultiver du chanvre cette saison. Au cours de la semaine qui vient, ces licences devraient être terminées. Nous recevons encore des demandes de renseignements de la part de personnes qui voudraient avoir un projet de recherche pour la saison qui vient et nous essayons de donner satisfaction au plus grand nombre possible.
Nous espérons avoir un cadre politique en place d'ici juillet 1997. Ensuite, si nos conseillers juridiques ne sont pas trop occupés, la préparation du règlement lui-même devrait prendre deux ou trois mois. Cela nous amènera donc à août ou septembre. Il sera ensuite publié dans la Gazette du Canada, Partie I, et il y aura alors une période de commentaires de 75 jours, ce qui nous amènera à peu près à la mi-novembre. L'analyse de ces commentaires et toute révision éventuelle de la réglementation, prendront probablement 30 autres jours et le règlement final sera alors publié dans la Gazette du Canada, Partie II. Si tout va bien, la publication devrait se faire au début de 1998.
Je peux vous dire que je ne tiens pas à étudier une autre série de licences de recherche. Ce processus d'approbation est très lourd. Il est essentiel que nous ayons ce règlement en place pour la prochaine saison agricole. Si nous pouvons respecter le calendrier que je viens de vous donner et obtenir la collaboration de tous ceux qui sont associés au processus, nous devrions être en mesure de respecter l'objectif de début 1998, ce qui donnerait aux gens la possibilité de commencer dès la prochaine saison.
Le président: Madame Peart, avez-vous quelque chose à ajouter?
Mme Jean Peart, chef intérimaire, Projet du chanvre indien, Santé Canada: Non, mais je pourrais répondre aux questions.
Le sénateur Milne: Je voulais commencer par donner à tout le monde un échantillon de graines de cannabis stériles, mais malheureusement je n'ai pas pu en obtenir. Elles sont assez populaires. Il y a un magasin, ici, à Ottawa, qui vend des graines salées comme goûter ou comme aliment pour les randonnées.
Pour les besoins du compte rendu, je voudrais vous lire une lettre que j'ai reçue du ministre, aujourd'hui.
Chère sénateur:
Merci de vos lettres du 20 mars et du 10 avril 1997 concernant le règlement relatif à la culture du chanvre industriel.
Je le tenais au courant de ce qui se passait au comité.
Je crois savoir que des fonctionnaires comparaîtront devant le Comité sénatorial permanent des finances nationales le mercredi 23 avril 1997. Cela vous donnera sans aucun doute l'occasion de leur faire part directement de vos craintes. De plus, j'ai demandé à mon adjointe législative, Athana Mentzelopoulos, de continuer à travailler en étroite collaboration avec les fonctionnaires du ministère pour faire en sorte que cette question soit réglée le plus vite possible.
Je désire insister sur ces derniers mots: «le plus vite possible».
Je suis heureuse de ce que j'ai entendu cet après-midi. Je suis contente que le processus semble avoir été accéléré considérablement.
Étant donné que nous vous avons fait venir sous prétexte de parler du Budget des dépenses, nous allons commencer par cela. Étant donné que ce projet semble destiné à aller de l'avant, pouvez-vous nous dire où, dans le Budget des dépenses, je peux trouver les dépenses relatives à ce projet?
M. Rowsell: Non, je ne peux pas.
Le sénateur Milne: Est-ce une question piège?
Le sénateur Lavoie-Roux: Sénateur Milne, me permettez-vous d'intervenir?
Le sénateur Milne: Oui.
Le sénateur Lavoie-Roux: J'ai une question qui vous paraîtra peut-être stupide, mais avant de vous laisser continuer, j'aimerais bien savoir de quoi nous parlons. Quelle utilisation fait-on de ce chanvre? Pourquoi le cultiverons-nous? À quoi sert le chanvre?
M. Rowsell: C'est une plante qui a une fibre très longue. En gros, elle ressemble à du maïs, mais la tige a une fibre extrêmement longue et extrêmement solide.
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce que cela ressemble au lin?
M. Rowsell: Oui, c'est assez semblable au lin. Selon les rapports que nous avons, cette fibre est extrêmement bonne pour la fabrication de papiers fins. Il y a plusieurs produits textiles, aujourd'hui, qui sont faits de chanvre, y compris des vêtements. L'industrie textile fait beaucoup de recherches et est en train de mettre au point des textiles qui sont de très bonnes imitations du lin. C'est une fibre de très haute qualité. Elle est également utilisée pour le bois pressé et les panneaux de fibre. En Colombie-Britannique et dans d'autres provinces on considère le chanvre comme une ressource renouvelable.
C'est une culture annuelle qui est probablement équivalente à un arbre de 20 ans. Mais au lieu d'attendre 20 ans pour couper les arbres, on peut utiliser le chanvre comme remplacement. C'est certainement vu comme une culture de remplacement du tabac dans beaucoup de régions. Les conditions de sol exigées pour le chanvre sont assez similaires à celles du tabac.
Comme je l'ai mentionné, les huiles extraites de la graine peuvent être utilisées à diverses fins, comme source d'éléments nutritifs, mais aussi dans les produits cosmétiques et les produits de toilette. Il y a donc de nombreuses possibilités. J'ai lu certains articles qui disent que l'on peut trouver jusqu'à 5 000 utilisations pour des produits du chanvre. Je pense que c'est un peu exagéré, mais il y a certainement de bonnes possibilités dans le secteur du textile, des produits du bois et du papier.
Le sénateur Milne: Si je comprends bien ce que vous avez dit, donc, le chanvre serait une culture de remplacement possible pour le tabac. Il produit à peu près quatre fois plus de fibres à papier par acre que les épinettes et il peut être utilisé pour beaucoup d'autres produits. Évidemment, on ne peut pas faire énormément de vêtements à partir des épinettes.
C'est une excellente culture et évidemment une culture qui, pour les agriculteurs, rapporte immédiatement. C'est donc une bonne culture de remplacement pour les producteurs de tabac du sud de l'Ontario. Après tout, nous cherchons des moyens de les soustraire à l'emprise du tabac. C'est bon également pour les terres de l'Ouest, parce que le chanvre est très résistant au gel et peut être cultivé même au nord d'Edmonton. C'est bien pour le Nouveau-Brunswick également parce qu'il pousse bien sur les sols argileux lourds.
Le sénateur Forest: Quel est le lien entre le chanvre et la marijuana? Est-ce que ce sont des plantes entièrement différentes?
M. Rowsell: Les deux sont des variétés de Cannabis sativa. Ce sont simplement des variétés différentes d'une même espèce. La marijuana est cultivée comme plante basse, parce que ce que l'on veut ce sont les feuilles dans lesquelles le niveau de THC est élevé. Le chanvre, par contre, devient très grand. Il peut probablement atteindre quatre ou cinq mètres de haut. On le plante très serré, comme le maïs, parce qu'on ne veut pas les feuilles.
Le sénateur Forest: Je ne savais que c'était la même plante.
Qu'est-ce que vous entendez par graine viable et graine stérile?
M. Rowsell: Pour rendre une graine stérile, on la traite par la chaleur, de façon à empêcher qu'elle ne germe.
Le sénateur Taylor: Je crois que la plante femelle est beaucoup plus haute, alors que la plante mâle est beaucoup plus touffue. Est-ce que les graines sont comme les poulets, c'est-à-dire qu'on n'en connaît pas le sexe avant de les cultiver?
M. Rowsell: On utilise des plantes femelles lorsqu'on veut obtenir des graines et des plantes mâles lorsque l'on veut de la fibre.
Le sénateur Taylor: Cela se fait donc beaucoup, n'est-ce pas?
M. Rowsell: Oui. Une des difficultés c'est que la plupart des semences, actuellement, viennent de France. Si l'on veut que l'industrie canadienne se développe, nous devrons avoir une infrastructure qui permette aux agriculteurs de produire des semences pour nos besoins.
Le sénateur Taylor: Si je comprends bien, la plante femelle que l'on cultive pour les graines est très similaire à la marijuana.
M. Rowsell: C'est exact.
Le sénateur Taylor: C'est un peu un problème pour l'inspection, car il est difficile de savoir si une plante femelle est cultivée pour la graine ou pour la production de marijuana. Je crois également que la plante femelle a un niveau de THC très supérieur à celui de la plante mâle.
M. Rowsell: C'est exact. Nous accorderions des licences aux producteurs de semences et nous envisageons de maintenir une banque de données centrale. Une force policière pourrait donc interroger cette banque de données et constater que les pépinières XYZ ont un permis de culture des graines de chanvre. Si elle constate la présence d'un champ où il y a des plantes de petite taille, la police pourrait alors être sûre qu'il s'agit de plantes cultivées pour la production de graines et non pour la production de marijuana. Nous essayons de faciliter la tâche à tout le monde, tant la police que les cultivateurs. Les producteurs ne souhaitent pas que l'on vienne perturber leur récolte, nous devons donc avoir un système transparent qui permette à tout le monde de travailler normalement.
Le sénateur Taylor: Je crois que la plante femelle peut être fumée alors que la plante mâle ne peut pas l'être.
M. Rowsell: Si vous me permettez de revenir à la question de le sénateur Milne, la réponse se trouve à la page 21, au tableau 10, sous le titre «Contrôle des drogues dangereuses». Le montant prévu dans ce groupe est consacré à ce projet, pas la totalité, puisque pour le moment nous n'avons que Mme Peart et une autre personne qui travaillent à ce projet.
Le sénateur Milne: Donc deux personnes?
M. Rowsell: Oui, deux personnes.
Le sénateur Milne: C'est tout?
M. Rowsell: C'est tout.
Le sénateur Milne: Vous êtes en train de me dire que vous aurez ce règlement compliqué et toutes ces relations avec les services d'application de la loi et Agriculture Canada en place d'ici le printemps prochain?
M. Rowsell: Mme Peart coordonne un comité interministériel, donc nous avons des représentants du Solliciteur général, de l'Agriculture, de l'Industrie, de l'Environnement et de la Santé, et nous travaillons en équipe. Ce comité nous aide tant dans le traitement des licences de recherche que dans le développement et le processus de consultation. Je dois dire que nous obtenons une excellente collaboration des autres ministères.
Le sénateur Milne: C'est merveilleux d'entendre cela, mais est-ce que cela signifie que, en réalité, il y a plus que deux personnes qui travaillent sur ce projet?
M. Rowsell: Il y a deux personnes dans mon bureau qui ne s'occupent que de cela, mais d'autres ministères y contribuent également.
Le sénateur Lavoie-Roux: Et ce sera prêt dans un an?
M. Rowsell: J'espère même que ce sera plus tôt que cela.
Le sénateur Milne: Une fois le règlement en place, les agriculteurs devront encore faire toutes les démarches pour obtenir une licence pour le cultiver, et cela ne peut pas se faire du jour au lendemain.
M. Rowsell: Une des choses que nous considérons, c'est la nécessité d'exiger des licences des agriculteurs.
Le sénateur Milne: Très bien.
M. Rowsell: S'il y a un problème, ce sera avec les graines. Si nous pouvons mettre en place des contrôles en ce qui concerne la propagation, l'importation et la distribution des graines, alors il ne sera pas nécessaire d'obtenir de tous les agriculteurs qu'ils demandent des licences. À mon avis, on peut l'éviter, mais il pourrait y avoir de très bonnes raisons qui me forcent à changer d'avis.
Le sénateur Milne: Vous avez parlé d'une base de données à laquelle la police pourrait avoir accès pour savoir qui en fait pousser et qui ne peut pas.
M. Rowsell: Une possibilité c'est que tout vendeur autorisé en vertu du règlement tienne des registres de ses clients, combien il leur en a vendu et quand. Si cela entre dans une base de données, la police pourra constater que la pépinière ABC a vendu des graines à l'agriculteur John, domicilié à tel endroit. Il pourrait y avoir des vérifications et des protections. Il faudrait déterminer si la personne est véritablement un agriculteur, et cetera. Nous pensons pouvoir faire entrer tout cela dans le programme d'une façon raisonnable, sans avoir un processus long et détaillé d'attribution de licences.
Le sénateur Milne: Actuellement, vous envoyez la GRC enquêter sur l'exploitation et l'agriculteur. Ceux-ci clôturent chaque parcelle de cinq acres de barbelés. Mais cinq acres c'est à peine assez pour manoeuvrer une machine pour la récolte.
M. Rowsell: C'est exact. C'est une nouvelle entreprise et il y a beaucoup de gens curieux, donc de nombreux agriculteurs eux-mêmes veulent protéger leur investissement.
Le sénateur Milne: La réponse que votre ministère a envoyée au comité prévoyait que le règlement pourrait être terminé avant août 1998. Nous avons déjà perdu cette année de culture, je suis heureuse d'entendre que nous ne perdrons pas la prochaine également, mais je voudrais une confirmation absolument certaine, un engagement personnel de votre part.
M. Rowsell: J'aimerais bien être en mesure de faire cela, mais malheureusement, honnêtement, je ne pense pas que ce soit possible. Comme je vous l'ai mentionné, les calendriers sont serrés, mais nous ferons tout notre possible pour respecter les délais. Si quelque chose d'autre se produisait, il pourrait y avoir un problème.
Le sénateur Milne: Votre ministère a produit très rapidement un règlement sur le tabac, donc j'espère qu'avec le travail que vous avez déjà fait ce sera possible. Peut-être que Mme Peart pourrait nous dire précisément où vous en êtes dans le processus. Votre comité a rencontré différents groupes, avez-vous fait quoi que ce soit pour préparer l'attribution de licences?
Mme Peart: Comme M. Rowsell le faisait remarquer, nous avons eu des consultations. J'ai rencontré des représentants de Grande-Bretagne et d'Allemagne pour discuter des processus qu'ils utilisent, pour voir si oui ou non ils nous conviendraient. On découvre habituellement que ce qui fonctionne dans un pays ne fonctionne pas nécessairement dans un autre. Comme on l'a fait remarquer, les subventions sont un facteur important en Europe. Par exemple, en Angleterre, la subvention est 240 £ par acre.
Nous avons eu des consultations, le comité a examiné ces questions-là, nous avons eu des ateliers et nous en évaluons les résultats. En plus de cela, nous examinons les conséquences d'autres règlements, par exemple du ministère de l'Agriculture, sur cette question. Vous verrez dans le document que nous nous reportons fréquemment à la Loi sur les semences. Lorsque nous aurons terminé avec les licences de recherche, l'étape suivante est de déterminer comment utiliser les lois et les règlements en place, et quels changements il faudrait y apporter. Il faudra apporter quelques modifications à la Loi sur les semences.
M. Rowsell: En Grande-Bretagne, on a mis sur pied ce que l'on pourrait appeler un monopole pour contrôler la distribution des semences dans tout le pays. Nous hésitons beaucoup à utiliser le même système ici. En Allemagne, il y a registre pour les agriculteurs, de sorte que seules les agriculteurs enregistrés peuvent cultiver du chanvre. Néanmoins, il est prévu qu'un inspecteur se déplace et examine le terrain avant d'autoriser la culture. Au Canada, nous n'avons pas les moyens d'envoyer des inspecteurs partout, les distances sont trop grandes. Nous essayons donc de trouver des moyens qui seraient adaptés à la situation canadienne et qui n'imposeraient pas des restrictions trop sévères.
Le sénateur Milne: Ce sont des bonnes nouvelles. Avez-vous étudié la situation en Irlande? La culture du chanvre s'est toujours faite dans le sud de l'Irlande.
Mme Peart: Non, nous ne l'avons pas étudiée. Nous devons encore étudier la situation dans d'autres pays. Il est intéressant de noter que même si l'Union européenne s'entend sur un niveau particulier de THC, la Suisse n'est pas d'accord. Elle a ses propres exigences. La situation en Australie est légèrement différente. Ce pays en est encore au stade des licences de recherche. Aux États-Unis, une seule personne a reçu une licence de recherche. Nous devons encore faire plus d'études sur la situation dans d'autres pays, simplement pour nous aider à déterminer quel modèle serait le mieux approprié.
Le président: Quand avez-vous commencé, madame Peart?
Mme Peart: J'ai commencé en octobre de l'an dernier.
Le président: Monsieur Rowsell, aviez-vous quelqu'un d'autre qui travaillait à cela auparavant?
M. Rowsell: Oui, M. Hossie et Mme Francine Magnan travaillaient sur ce sujet avant que Mme Peart ne soit embauchée. Je reconnais que les ressources ne sont pas importantes, mais une grande partie du temps de Mme Peart est consacrée à donner des conseils à des gens qui s'intéressent à ce sujet. Nous avons reçu de nombreuses demandes de renseignements et y répondre prend beaucoup de temps qu'on ne peut pas consacrer à la préparation de politiques et de règlements.
Le président: C'est une question de ressources. Vous avez deux fonctions. Vous avez pour tâche de mettre ce règlement en place, mais aussi de répondre aux questions de ceux qui seraient intéressés à cultiver le chanvre ou à l'utiliser?
M. Rowsell: Exactement.
Le président: Avez-vous demandé plus d'argent au gouvernement? Il semble que cela prendra trois ans, environ la moitié de ce qu'a durée la Deuxième Guerre mondiale. Nous devrions être en mesure de licencier le chanvre plus rapidement que cela.
M. Rowsell: Oui, nous le devrions. Le problème n'est pas simplement une question de ressources au sein du ministère. Le sénateur Milne parlait du règlement sur le contrôle des produits du tabac. Nous avons également des règlements sur les produits du sang, les substances interdites et d'autres applications médicales, telles que les tissus et les organes. Mme Peart, moi-même, et d'autres au sein de mon bureau ne sommes pas les seuls qui travaillent à la préparation de règlements. Toute l'infrastructure du ministère est appelée à collaborer. Je crois savoir que le ministère est résolu à travailler avec nous pour respecter les délais fixés.
Le sénateur Lavoie-Roux: Vous avez mentionné le fait qu'au Royaume-Uni il y a des subventions pour la culture du chanvre. Pensez-vous que nous aurons besoin de fournir des subventions à ceux qui veulent se lancer dans cette culture? Si la réponse est oui, pouvez-vous me dire s'il y a d'autres récoltes qui reçoivent des subventions au Canada?
Mme Peart: La question des subventions relève du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. En Allemagne, où il y a des subventions pour la culture du chanvre, de même que pour celle du lin, on a constaté que, comme M. Rowsell le disait, une grande partie du chanvre n'était jamais utilisée, faute d'infrastructure pour la transformation. On a maintenant décidé que la seule façon de mettre cette infrastructure en place était de commencer à accorder la subvention aux industries qui font la transformation et non aux agriculteurs. Ce que je veux dire c'est que les subventions ne fonctionnent pas nécessairement dans cette situation particulière.
Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce que l'on donne des subventions pour d'autres cultures? J'hésiterais beaucoup à commencer à subventionner un autre domaine. Si le gouvernement voulait aller dans cette direction, je pense qu'il devrait faire très attention.
Étant donné que ce n'est pas vraiment une question agricole, est-ce que vous avez eu des consultations avec les provinces au sujet de ce règlement? Je ne veux pas dire qu'il faut obtenir leur consentement, mais elles pourraient voir les choses différemment et on pourrait peut-être éviter des difficultés ultérieures.
M. Rowsell: Oui, les gouvernements provinciaux ont fait partie du processus, en particulier les ministères qui représentent les secteurs agricole et industriel. Cette mesure législative relève du mandat fédéral. Nous essayons de créer une nouvelle activité industrielle. Il appartiendra alors aux provinces d'en tirer partie selon leurs besoins mais, oui, elles ont participé au processus de consultation.
Le sénateur Taylor: Je suis très intéressé par la culture du chanvre. En fait, mon exploitation ne se trouve guère qu'à 20 milles de certaines des parcelles expérimentales. C'est pour cela que je suis aussi bien renseigné à ce sujet.
Je voudrais féliciter le sénateur Milne, parce que c'est elle qui a commencé à faire du bruit à ce sujet. Si vous le pouvez, j'aimerais que vous fassiez un peu de publicité au sujet des délais que vous venez de nous signaler, de sorte qu'ils soient bien connus et que nous puissions suivre les progrès.
Est-ce qu'il y a quelque chose dans la Loi réglementant certaines drogues et autres substances qui pourrait retarder le règlement sur le chanvre, par exemple un lien avec un règlement concernant une autre drogue, ou bien est-ce que vous pouvez vous limiter au chanvre seulement?
M. Rowsell: Nous pouvons nous limiter au chanvre, oui. Il y a deux parties de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances qui n'ont pas été proclamées en même temps que le règlement qui a été présenté le 21 avril, ce sont celles qui traitent des précurseurs chimiques et des benzodiazépines. Les précurseurs chimiques sont les substances utilisées par les gangs de motards pour fabriquer des stimulants de type amphétamines et d'autres drogues illicites.
Le sénateur Taylor: Ça, je connais, mais je ne connais pas l'autre.
M. Rowsell: Les benzodiazépines sont des tranquillisants. Ce sont des substances placées sous contrôle international par les Nations Unies.
Le sénateur Taylor: Le problème c'est le mélange avec l'alcool, et cetera?
M. Rowsell: Oui, et on s'inquiète aussi de la surconsommation et du détournement. Très souvent, elles sont utilisées avec d'autres drogues pour en augmenter l'effet, de sorte qu'elles sont détournées vers le marché noir. Les Nations Unies nous ont demandé d'accroître les contrôles sur ces substances. Il y a un autre groupe, séparé du nôtre, qui prépare un règlement pour ces substances.
Le sénateur Taylor: Autant que je puisse voir, cela n'aura pas de conséquences pour la préparation du règlement sur le chanvre?
M. Rowsell: Non.
Le sénateur Taylor: J'ai remarqué que vous avez mentionné que vous étiez très occupé à accorder des licences de recherche, et vous sembliez dire que c'était principalement des sociétés qui demandaient des licences de recherche plutôt que des agriculteurs.
Mme Peart: La raison pour laquelle nous avons mentionné des sociétés, c'est que des agriculteurs sont constitués en société et que les licences sont accordées au nom de la société, même si ce sont principalement des particuliers. Vous mentionniez un peu plus tôt les ministères provinciaux de l'agriculture. Certaines demandes sont au nom de chercheurs des ministères de l'agriculture des provinces, mais le chanvre sera cultivé sur des exploitants agricoles. Même lorsque la demande vient d'une société, il y a des agriculteurs en cause.
Le sénateur Taylor: J'essayais de savoir comment le chanvre serait commercialisé. Est-ce que ce sera comme les betteraves à sucre, où le raffineur conclut un contrat avec l'agriculteur? Autrement dit est-ce que celui qui transformera le chanvre conclura un marché avec l'agriculteur ou est-ce que l'agriculteur fera pousser le chanvre comme de l'avoine ou de l'orge puis cherchera un débouché?
Mme Peart: En Angleterre, c'est l'entreprise de transformation qui conclut un contrat avec l'agriculteur qui cultive le chanvre pour elle. Ici, certains pensent que cela pourrait être la façon de procéder, c'est-à-dire que les industriels concluraient des contrats avec les agriculteurs qui cultiveraient le chanvre, mais d'autres pensent qu'ils peuvent le cultiver le produit, puis ensuite trouver leurs propres débouchés. À mon avis, on ne s'est pas interrogé suffisamment sur le fait que le chanvre est une plante extrêmement grande et que si les installations de traitement ne sont pas à proximité de la ferme, il y aura un problème de transport.
Une des choses que je trouve très intéressante c'est que le désir de produire des choses comme le chanvre, que ce soit pour son huile ou pour sa fibre, est devenu régional. En Ontario, on s'intéresse principalement à la fibre, tandis que dans les Prairies on s'intéresse à l'huile.
Le président: Est-ce que votre ministère s'intéresse aux aspects concernant la commercialisation ou la distribution?
Mme Peart: Non.
Le président: Par conséquent votre règlement ne concernerait que la santé?
M. Rowsell: Oui.
Le président: Je ne comprends pas.
Le sénateur Taylor: Moi non plus. Je voudrais en revenir à la réponse que vous avez donnée où vous disiez que la plupart des demandes de licences de recherche venaient d'agriculteurs qui sont constitués en société. Pourquoi s'inquiète-t-on que des agriculteurs cultivent du chanvre si nous savons que dans moins d'un an nous aurons un règlement concernant sa culture. Autrement dit pourquoi ne pas donner aux agriculteurs une licence de recherche pour faire pousser du chanvre dès cette année? Peut-être qu'ils peuvent? Est-ce qu'il y a quelque chose qui m'échappe?
M. Rowsell: Il y a un règlement en vertu de la Loi sur le contrôle des stupéfiants qui dit que le ministre peut, sur demande, émettre une licence à n'importe quelle personne qui, de l'avis du ministre, est qualifiée pour cultiver, récolter ou produire du pavot ou de la marijuana à des fins scientifiques, aux termes et conditions que le ministre juge utile d'imposer.
Le sénateur Taylor: Pourquoi le ministre ne donne-t-il pas de licences à tous ceux qui veulent en cultiver?
M. Rowsell: Tant que c'est un élément de recherche nous pouvons.
Le sénateur Taylor: Il me semble que dans un marché libre, si vous faites pousser du chanvre et que vous cherchez un débouché, on peut dire que vous faite de la recherche, à moins que vous n'insistiez pour que la personne ait deux doctorats de Suisse avant de pouvoir cultiver de la marijuana?
M. Rowsell: Nous n'en demandons pas tant, mais le règlement dit que la recherche ne doit pas être de la recherche en matière de commercialisation, mais de la recherche scientifique. Lorsque le sénateur Milne proposait son amendement à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, elle suggérait qu'une fois que le chanvre est cultivé et récolté, il n'y ait plus de contrôles, de sorte que la commercialisation se ferait à l'extérieur de tout régime réglementaire. Notre seule fonction est de nous assurer que l'on ne cultivera que des variétés à usage industriel.
Le sénateur Taylor: Je pense que nous tournons en rond. Vous êtes en train de nous dire: «Si vous en faites la demande, vous pouvez obtenir un permis de recherche pour cultiver du chanvre cette année, mais si vous attendez une autre année nous allons vous donner un permis pour faire pousser du chanvre sans permis de recherche». Il est légal d'en faire pousser actuellement, mais nous n'avons pas encore la réglementation. Pourquoi n'émettez-vous pas tout simplement un permis en disant: «Cette année, vous êtes chercheur et l'an prochain vous serez agriculteur?
M. Rowsell: C'est ce que nous avons fait pour ceux qui ont fait une demande.
Le sénateur Taylor: Avez-vous refusé des agriculteurs qui voulaient faire pousser du chanvre industriel parce qu'ils n'étaient pas des chercheurs?
M. Rowsell: Nous les aidons à préparer des projets de recherche, de sorte qu'ils soient admissibles en vertu de la réglementation. Nous travaillons avec eux. Une grande partie du travail de Mme Peart est d'aider les gens à obtenir une licence.
Le sénateur Taylor: Mon impression, et je me base sur ce que m'ont dit les agriculteurs de ma région, c'est qu'ils ne peuvent pas être admissibles à des licences de recherche et que, par conséquent, ils ne peuvent pas faire pousser de chanvre. Toutefois, s'ils attendent une année ils seront en mesure d'en cultiver. Il me semble que nous avons une solution très simple à ce système et c'est de dire que tous les agriculteurs sont des chercheurs. Vous pourriez alors prendre trois ans pour préparer votre réglementation si vous aviez besoin de tout ce temps-là.
M. Rowsell: Nous aurions les mêmes demandes de la part de ceux qui veulent cultiver de la marijuana à d'autres fins.
Le sénateur Taylor: Nous avons actuellement une loi qui dit qu'ils n'auront plus besoin de s'appeler chercheurs dans un an. Vous disiez vous-mêmes que d'ici 1998 tous ceux qui le demanderont pourront cultiver du chanvre. Vous essaierez même de ne pas vous immiscer dans la commercialisation. Donc pourquoi ne pas permettre à quiconque de faire pousser du chanvre maintenant, tout simplement en les appelant chercheurs?
M. Rowsell: Parce que nous n'avons pas le cadre réglementaire pour cela, monsieur, et nous ne l'aurons pas tant que la réglementation ne sera pas en place. La loi l'interdit. La réglementation prévoira des exceptions. Par nature, la loi interdit, de sorte que personne ne peut posséder de Cannabis sativa. La réglementation prévoit des exceptions pour permettre à certaines personnes de faire certaines choses. Laissez-moi vous donner un exemple. La codéine est interdite, mais nous avons un règlement qui dit qu'un distributeur autorisé peut fabriquer des comprimés pour soulager la douleur, qu'un médecin peut le prescrire et qu'un pharmacien peut le dispenser, de sorte que les patients puissent profiter de la codéine pour soulager leur douleur. Le principe est le même pour le chanvre.
Le sénateur Taylor: Si vous saviez qu'un règlement sera publié d'ici la fin de 1998, disant que la codéine n'aurait plus besoin de cette exemption, pourquoi essaieriez-vous d'arrêter une personne qui utilise de la codéine maintenant. J'ai un peu de mal à suivre votre logique. Un chercheur peut planter du chanvre et le vendre, mais un agriculteur ne peut pas cultiver de chanvre. Pourtant, dans un an, ces chercheurs seront devenus des agriculteurs et ils pourront cultiver du chanvre en tant que tel. Si ce n'est pas une sorte de bureaucratie, je ne sais pas ce que c'est.
M. Rowsell: Comme j'ai essayé de le dire, monsieur le sénateur, il n'y a pas de réglementation en place aujourd'hui qui nous permette de faire cela.
Le sénateur Taylor: Oui, sauf que vous en avez une, vous pouvez dire à quiconque veut faire pousser du chanvre qu'il est un chercheur.
M. Rowsell: Et quiconque veut faire pousser de l'opium, et quiconque veut faire pousser de la marijuana.
Le sénateur Taylor: Non, juste le chanvre.
M. Rowsell: Vous ne pouvez pas faire cette distinction.
Le sénateur Taylor: Le chanvre sera légal.
Le sénateur Lavoie-Roux: Seulement lorsque le règlement sera en place.
Le sénateur Taylor: Il le sera, nous le savons.
Mme Peart: Un des problèmes, ici, c'est que nous espérons définir dans le règlement le niveau maximum de THC qui sera autorisé dans le chanvre utilisé à des fins industrielles. Aujourd'hui, si nous disions que les agriculteurs qui font pousser du cannabis sont des chercheurs, cela signifierait que ceux qui font pousser de la marijuana pourraient se considérer eux aussi comme des chercheurs. Étant donné que nous n'avons pas de règlement limitant la quantité de THC, tous ceux qui voudraient faire pousser de la marijuana s'adressaient aux tribunaux si nous leur refusions le titre de chercheur.
Le président: Nous ne savons toujours pas les niveaux que nous voulons, est-ce cela le problème?
Mme Peart: La communauté internationale utilise généralement le chiffre de 0,3 p. 100 de THC. On suppose que c'est le niveau que nous utiliserons. C'est le niveau que nous avons fixé pour les licences de recherche. Toutefois, lorsque nous avons eu notre atelier, certains des agriculteurs canadiens se sont inquiétés de ce qui arriverait si, par exemple, une averse de grêle faisait monter le taux de THC, rendant la récolte illégale, ici et dans l'Union européenne. Un des avantages des projets de recherche c'est qu'ils permettront de clarifier certaines de ces questions. Nous voulons que la chose soit au point dès le début, plutôt que de nous trouver pris avec des circonstances qui pourraient ne pas être adaptées au Canada.
M. Rowsell: Dans le cadre des projets de recherche, les agriculteurs font des tests sur leurs récoltes sur une base régulière, pour déterminer les niveaux de THC, et les résultats nous aideront ensuite à fixer des normes pour le Canada.
Le sénateur Taylor: Combien de personnes qui ont demandé une licence de recherche ont été refusées?
Mme Peart: Je ne peux pas répondre à cela pour ce qui est du passé. Le problème c'est que certaines personnes pourraient nous écrire pour nous dire qu'elles veulent cultiver du chanvre et que si leur demande était rejetée, elles diraient qu'on les a refusées. Certains nous écrivent pour nous dire que les licences sont pour des fins de recherche, mais qu'ils veulent cultiver du chanvre pour faire de l'argent. Si leur demande est rejetée, ils vous diront qu'ils ont été refusés. Cette année nous avons un formulaire, avec des critères bien établis, et ce formulaire rempli doit être retourné avec la demande, mais nous n'avons reçu que 12 demandes conformes.
Le sénateur Taylor: Pourriez-vous nous communiquer un exemplaire de ce formulaire, s'il vous plaît?
Mme Peart: Oui. Vous remarquerez que les renseignements parlent d'un site Internet. Le formulaire est sur le réseau Internet. Les gens peuvent le télécharger et l'imprimer.
Le sénateur Milne: Mme Peart a déjà répondu à une de mes dernières questions. J'allais demander combien de licences ont été émises cette année.
Mme Peart: Je m'excuse, je n'ai pas dit émises. Je mentionnais combien de demandes ont été reçues.
Le sénateur Milne: Combien ont été émises?
Mme Peart: Nous sommes encore en train d'en émettre, mais nous avons besoin de renseignements complémentaires sur certaines autres. Je pourrais dire que, pour l'instant, nous n'en avons encore rejeté aucune.
Le sénateur Milne: Donc vous avez un maximum de 12 pour cette année.
Le président: Allez-vous continuer à émettre des licences pour cultiver du chanvre?
Mme Peart: C'est le seul moyen d'en cultiver cette année, donc la réponse est oui.
Le président: Est-ce que vous allez émettre des licences l'année prochaine?
Le sénateur Milne: Espérons que l'an prochain, la réglementation sera en place.
M. Rowsell: L'intention est de placer des contrôles sur l'importation, la propagation et la distribution des graines, ensuite les agriculteurs auront un mécanisme pour s'identifier, soit par leurs achats soit par un système d'enregistrement. Nous n'avons pas encore arrêté cela. Personnellement, je préférerais qu'ils aient une licence.
Le président: Ce serait bien.
Le sénateur Milne: Étant donné que l'argent est toujours rare, que Mme Peart n'a qu'une personne qui l'aide, et que c'est une culture qui tombe sous la coupe d'Agriculture Canada, avez-vous pensé à vous adresser au ministère de l'Agriculture pour voir s'il pourrait partager le coût ou fournir du personnel, de façon à accélérer le processus?
Mme Peart: Le comité interministériel dont nous avons parlé a deux membres de ce ministère. Pendant notre examen des licences de recherche, ils nous ont aidés en ce qui concerne les domaines qui sont strictement agricoles et au sujet desquels nous n'avons pas de connaissances particulières. Nous les consultons régulièrement. Comme je l'ai dit, nous espérons avoir des consultations plus directes dans le cadre de la Loi sur les semences, pour voir s'il y a des recoupements et quelles conséquences cela pourrait avoir pour nous.
Le sénateur Milne: Par conséquent, ce ministère donne déjà du temps et du personnel?
M. Rowsell: Un aspect dont nous parlons avec eux c'est l'identification et l'enregistrement des variétés de cannabis qui seraient acceptables pour le chanvre industriel en vertu de la Loi sur les semences. Lorsque ce sera fait, Agriculture Canada apportera des modifications à ses règlements.
Le sénateur Milne: Je vous remercie d'être venus et d'avoir accéléré ce processus. J'espère recevoir la transcription de tout ce qui a été dit aujourd'hui et la garder dans mes dossiers.
Le président: Si un agriculteur faisait pousser du chanvre maintenant ce serait illégal, même si ce sera légal l'année prochaine?
M. Rowsell: À moins qu'il n'ait une licence de recherche ce serait illégal, oui.
Le sénateur Lavoie-Roux: Qui est au courant de cela?
M. Rowsell: Vous seriez surprise. Il y a pas mal de groupes dans le pays qui sont très au courant de cela. Comme je l'ai mentionné, nous avons un site sur le réseau Internet. Nous avons invité la Fédération canadienne de l'agriculture, qui représente les agriculteurs de tout le pays, à participer à notre processus de consultation, donc elle connaît les documents qui sont disponibles.
Mme Peart: En plus, je suis allée à un symposium à Vancouver où il y avait plus de 300 personnes qui s'intéressent au chanvre industriel et j'ai dit clairement dans ma présentation qu'il était illégal d'en faire pousser sans permis de recherche.
Le président: Merci d'être venus.
Honorables sénateurs, avant de lever la séance, je voudrais mettre quelque chose au compte rendu. Le projet de loi C-93, qui traite de certaines dispositions du budget, déposé au Parlement le 18 février a été récemment présenté au Sénat. Si je comprends bien, le ministère des Finances a pris l'initiative d'envoyer certains documents au comité sénatorial des banques et du commerce, plutôt qu'à notre comité. Il faudra le consentement unanime du Sénat, demain, pour que ce comité procède à l'étude. Le sénateur Graham s'inquiétait de cela parce que j'étais passablement furieux. Je lui ai dit que c'est la deuxième fois que cela se produisait. La même chose s'est passée au sujet du projet de loi sur la taxe de vente harmonisée. On a prétendu que cela concernait la fiscalité, alors que je prétends, moi, et je pense que j'ai raison, que c'est financier parce qu'on paie les provinces maritimes pour accepter cette taxe de vente. Par conséquent, la question aurait dû être examinée par le comité des finances. Je sais que le ministère des Finances n'apprécie pas forcément le président, mais néanmoins, il doit travailler avec nous.
Comme je suis un bon diable, j'ai déclaré au sénateur Graham que nous allions laisser faire cette fois-ci, à cause de son charme personnel, mais qu'il devrait déclarer au ministère des Finances, en notre nom -- j'espère que vous êtes tous d'accord -- que nous ne prenons pas cela à la légère. Le ministère aurait dû consulter le sénateur Graham avant de prendre sa décision au sujet du comité qui étudiera le projet de loi. C'est une décision qui appartient au Sénat et à la direction du Sénat.
Le sénateur Lavoie-Roux: On devrait l'aviser que la prochaine fois nous ne l'accepterons pas.
Le président: J'ai averti le ministère auparavant au sujet de ce problème, mais il ne veut rien entendre. Cette fois-ci, je fais un avertissement formel et je le place au compte rendu. Nous allons l'envoyer au sous-ministre pour lui laisser savoir notre sentiment.
La séance est levée.