Aller au contenu
LCJC - Comité permanent

Affaires juridiques et constitutionnelles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 9 - Témoignages


Ottawa, le jeudi 2 mai 1996

Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et d'autres lois en conséquence, se réunit aujourd'hui, à 10 h 30, pour en faire l'examen.

Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Chers collègues, ce matin nous allons étudier le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et d'autres lois en conséquence. Nous avons avec nous du ministère de la Justice, Richard Clair, administrateur de projet; et Jean- Pierre Baribeau et Gino Grondin, tous deux conseillers juridiques de l'équipe du projet sur les contraventions. C'est un groupe sans conteste impressionnant.

Messieurs, veuillez faire votre présentation, après quoi le comité, tel que je le connais, vous pressera de questions.

M. Richard Clair, administrateur de projet, Équipe du projet sur les contraventions, ministère de la Justice: C'est la première fois que nous comparaissons devant un comité parlementaire et nous espérons que cette rencontre s'avérera une expérience agréable.

[Français]

M. Clair: Je suis heureux d'avoir l'opportunité de vous présenter brièvement les points saillants du projet de loi C-16 visant à modifier la Loi sur les contraventions, adoptée par le Parlement en 1992.

Ces modifications visent à renforcer l'application de la législation fédérale de façon efficace et économique, à diminuer les coûts d'administration de la justice et à éliminer les chevauchements de la création d'une infrastructure fédérale pour la verbalisation des infractions fédérales.

[Traduction]

Les modifications proposées par le projet de loi C-16 se rangent dans trois grandes catégories: tout d'abord, les modifications qui prévoient le cadre pour l'application du régime pénal d'une province et d'un territoire aux contraventions fédérales; deuxièmement, les modifications qui améliorent le régime actuel de contraventions afin de le rendre compatible avec les régimes provinciaux et territoriaux existants; et troisièmement, des modifications corrélatives de procédure ou d'ordre administratif à certaines autres lois.

Les dispositions prévoyant le cadre qui rendra le régime pénal de chaque province et territoire applicable aux contraventions fédérales se trouvent aux articles 65.1 à 65.3 du projet de loi.

Le projet de loi permet au gouverneur en conseil de prendre des règlements pour rendre le régime pénal d'une province et d'un territoire applicable aux contraventions fédérales commises dans cette province ou ce territoire. Il habilite également le gouverneur en conseil à faire les adaptations nécessaires pour s'assurer que les régimes fédéral et provinciaux sont compatibles, c'est-à-dire entre autres harmoniser leur terminologie respective.

En vertu du projet de loi C-16, un agent de l'autorité - un policier, par exemple - délivrerait, pour une contravention commise dans une province, le procès-verbal en vigueur dans cette même province. Une fois délivré, ce procès-verbal sera traité par la province comme tout autre procès-verbal provincial.

Le projet de loi prévoit que trois principes fédéraux fondamentaux énoncés dans la loi actuelle doivent être respectés lorsqu'un régime pénal d'une province devient applicable aux contraventions fédérales. Ces principes sont les suivants: tout d'abord, le gouvernement fédéral désignera les infractions fédérales qui peuvent faire l'objet de poursuites en vertu du régime pénal d'une province ou d'un territoire; deuxièmement, le gouvernement fédéral établira le montant des amendes à payer ou le mode de calcul des amendes qui peuvent être imposées en vertu du régime pénal d'une province ou d'un territoire; troisièmement, une personne poursuivie en vertu du régime pénal d'une province ou d'un territoire ne devra pas être condamnée à une peine d'emprisonnement par suite de sa mise en accusation.

Le projet de loi autorise le ministre de la Justice à conclure des ententes avec la province, le territoire ou la municipalité concernant l'administration ou l'application de la loi, la poursuite des contraventions et la perception des amendes, ainsi que l'indemnisation de ces services. Ces services seront payés à même les amendes et les frais perçus.

Les procureurs ou les mandataires de la Couronne fédérale ou les procureurs ou les mandataires de la Couronne provinciale s'occuperont des poursuites si la province et le gouvernement fédéral concluent une entente à ce sujet.

[Français]

La mise en oeuvre du projet que nous proposons s'effectuera par étapes échelonnées sur une période de trois ans. Les premières ententes doivent entrer en vigueur en 1996. Certaines provinces et territoires ne sont pas prêts immédiatement à intégrer le régime en vigueur des contraventions fédérales dans leur juridiction, ni à négocier la contrepartie de leur participation à l'application de la loi.

L'Ontario et le Québec sont les premières provinces où nous mettrons le projet en oeuvre. Nous devons faire remarquer ici que le gouvernement fédéral a toujours la possibilité de proclamer la Loi sur les contraventions dans les provinces ou les territoires où il est impossible, pour une raison ou une autre, de recourir au régime pénal d'une province ou d'un territoire.

Le deuxième type de modifications que nous proposons vise à faciliter le recours au régime pénal de chaque province et à harmoniser la Loi sur les contraventions avec ces régimes différents.

Par exemple, les termes «procureur général du Canada» ont été remplacés par les termes «procureur général» dans toute la Loi, en vue de rendre possible la poursuite des contraventions fédérales par des poursuivants provinciaux.

Des changements terminologiques tels que le remplacement du mot «dépôt» par les termes «au moyen d'un procès-verbal» harmonise la loi avec les différents régimes provinciaux. Ces changements sont nécessaires parce que les poursuites sont entamées de façon différente d'une province à l'autre. En Ontario, par exemple, le dépôt du procès-verbal de contravention constitue le point de départ des procédures. Dans d'autres provinces, la poursuite commence à la date de signification du procès-verbal de contravention.

[Traduction]

De même, on a éliminé de la loi toute mention de la saisie des biens, de leur confiscation automatique en cas de déclaration de culpabilité et du traitement que leur réservent les tribunaux.

En vertu de la Loi actuelle sur les contraventions, la confiscation des biens saisis au moment où un procès-verbal est délivré est automatique si le contrevenant plaide coupable. La confiscation automatique accroîtrait le fardeau des tribunaux puisque les contrevenants devraient présenter une requête au tribunal pour récupérer leurs biens. L'un des principaux objectifs de la Loi sur les contraventions était de réduire le fardeau des tribunaux.

Comme de plus en plus de régimes pénaux provinciaux traitent les condamnations par défaut sans exiger une intervention supplémentaire de l'agent d'autorité qui a délivré le procès-verbal, le projet de loi C-16 apporte certains changements à la loi pour permettre cette possibilité. Ce type de modifications permettra d'harmoniser la loi avec les régimes provinciaux en vigueur.

Le projet de loi renferme également des modifications corrélatives au Code criminel et à la Loi sur l'identification des criminels, destinées à assurer une certaine cohérence entre ces lois et les modifications apportées à la Loi sur les contraventions. Il modifie également deux autres lois pour remplacer les anciens montants maximums fixés pour les amendes par des montants maximums qui correspondent au montant des amendes imposées pour des infractions semblables.

J'aimerais maintenant aborder certaines questions soulevées lors de la deuxième lecture. La liste des contraventions qui feront partie de la première étape de la mise en oeuvre du projet sur les contraventions est en train d'être examinée par la Section des règlements du ministère de la Justice. La liste comprend le Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux, le Règlement sur les petits båtiments, le Règlement sur les parcs nationaux et la Loi relative à la circulation sur les terrains de l'État. En ce qui concerne cette dernière loi, les infractions qui font partie de la liste sont celles qui concernent les excès de vitesse. Il appartient aux ministères de déterminer les infractions qu'ils veulent inclure sur la liste des contraventions.

Les ministères continueront d'être responsables de l'exécution de leurs règlements. Il a été question d'établir des lignes directrices pour déterminer si on doit recourir à un procès-verbal ou à une assignation. Nous discuterons de cette question avec les ministères et nous leur prêterons notre concours pour la préparation de ces lignes directrices.

J'aimerais également expliquer pourquoi il a fallu si longtemps avant que l'on soit en mesure de promulguer la loi. La loi a reçu la sanction royale à la fin de 1992. En 1993, le ministère de la Justice a mis au point des modèles administratifs pour la mise en oeuvre de la loi. Des discussions ont eu lieu avec les provinces et les territoires. Ils ont exprimé des craintes à propos des coûts et à propos de procédures qui différeraient de celles en vigueur dans leur propre administration. Ils ne voulaient pas d'un système qui ferait double emploi avec le leur et qui proposait des procédures différentes pour le traitement des contraventions fédérales. Ces discussions ont abouti à la conception de la loi actuelle.

[Français]

La dernière question qui fut soulevée est celle des modifications au projet de loi à la Chambre des communes. Il n'y a eu qu'une modification. Elle visait à faire correspondre la version anglaise à la version française. Au paragraphe 17(4) les mots «by means of a ticket» furent remplacés par les mots «under this Act».

Les modifications proposées permettront aux deux paliers de gouvernement d'augmenter leur efficacité opérationnelle et de fournir à la population un régime de poursuite des contraventions fédérales plus adéquat et plus rapide.

Le recours au régime pénal en vigueur dans une province ou un territoire contribuera à l'élimination des chevauchements coûteux, puisqu'il permet l'économie d'une infrastructure fédérale distincte dont l'implantation et l'administration seraient très onéreuses.

Le gouvernement fédéral bénéficiera en outre de la longueur d'avance des provinces et des territoires dans le traitement efficace et économique des contraventions.

[Traduction]

Le recours au régime pénal d'une province et d'un territoire correspond manifestement à l'esprit de coopération que le gouvernement actuel veut promouvoir entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires.

Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.

La présidente: Je vous remercie. La prochaine fois que vous ferez une présentation, vous voudrez bien essayer de ralentir un peu votre débit pour faciliter le travail des interprètes.

Le sénateur Jessiman: Depuis combien de temps faites-vous partie du ministère, monsieur Clair?

M. Clair: Depuis 1990 et dans ce poste depuis quatre mois.

Le sénateur Jessiman: Le ministère s'occupe de ce projet depuis dix ans. Pourtant, vous ne pouvez toujours pas nous indiquer les infractions qui seront incluses. En connaissez-vous le nombre?

M. Clair: Au cours de la première étape, il y en aura environ 400.

Le sénateur Jessiman: Est-ce que cela se limitera aux quatre lois dont vous avez parlé?

M. Clair: Nous sommes en négociation avec l'Ontario et le Québec et c'est la première étape prévue.

Le sénateur Jessiman: En 1992, on avait indiqué qu'il existait des centaines de milliers d'infractions et que ce nombre serait réduit à environ 4 000. À votre avis, est-ce que l'on parviendra à atteindre cet objectif?

M. Clair: Nous en avons environ 2 000 maintenant. Certains ministères qui participaient à ce projet, comme le ministère de l'Agriculture, s'en sont retirés.

Le sénateur Jessiman: Si vous savez qu'il y aura 2 000 infractions, pourquoi retenons-nous l'inclusion des 1 600 autres en Ontario et au Québec?

M. Clair: En partie parce que nous voulons donner aux provinces la chance de s'adapter. Il faut qu'elles introduisent les infractions dans leurs systèmes informatiques. De plus, nous devons obtenir l'autorisation des ministères pour inclure les infractions en vertu de la Loi sur les contraventions. Nous n'avons pas encore obtenu l'accord de tous les ministères à cet égard.

Le sénateur Jessiman: Pour choisir ces 2 000 infractions sur des centaines de milliers d'infractions, avez-vous suivi certaines lignes directrices?

M. Jean-Pierre Barbeau, conseiller juridique, Équipe du projet sur les contraventions, ministère de la Justice: Nous avons tåché dans la mesure du possible de nous en tenir aux infractions qui sont factuelles afin d'éviter de devoir faire appel à des experts. Tout ce dont on a besoin, c'est d'une déclaration indiquant qu'il s'agit d'une infraction à un règlement ou à une loi en particulier.

Le sénateur Jessiman: Pouvez-vous nous dire quelles sont ces 400 infractions?

M. Clair: Bien sûr.

Le sénateur Jessiman: J'aimerais en prendre connaissance.

M. Baribeau: Elles ont été examinées par la Section des règlements du ministère de la Justice. Nous en avons reçu une ébauche. Il y a encore un peu de révision à faire pour s'assurer que les deux versions sont identiques. Cette ébauche servira à préparer la liste officielle des infractions, qui sera publiée dans la Gazette du Canada.

Le sénateur Jessiman: S'agit-il des 400 infractions en question?

M. Baribeau: Oui.

Le sénateur Jessiman: Dans combien de temps les 2 000 infractions prévues seront-elles incluses?

M. Clair: Il faudra probablement deux ou trois ans pour obtenir la participation de tous les ministères. Toutes ces infractions doivent être introduites dans les systèmes informatiques des provinces pour qu'on puisse suivre la situation. Nous ne voulons pas leur demander d'informatiser 2 000 infractions immédiatement. Nous préférons procéder par étapes pour leur donner une chance de s'adapter.

Le sénateur Jessiman: Les procureurs généraux des provinces ont-ils été consultés? Avez-vous consulté vos homologues dans chacune des provinces?

M. Clair: Oui, nous sommes en train de consulter nos homologues provinciaux. Nous avons rencontré tout récemment les représentants des provinces de l'Ontario et du Québec. J'ai rencontré les représentants provinciaux l'année dernière également. Nous les tenons au courant du déroulement du projet de loi. Ils sont très favorables à ce projet et sont d'accord avec l'orientation que nous avons adoptée.

Le sénateur Jessiman: Un membre de votre ministère a sans doute lu le procès-verbal des séances de ce comité en 1992. À l'époque, on a voté sur une motion qui a été rejetée par quatre voix contre trois. Les sénateurs du Parti libéral voulaient que les bureaucrates parlent aux politiciens en plus de parler à vos homologues. Êtes-vous en train de nous dire que nous sommes dans la même situation qu'en 1992?

M. Clair: Non.

Le sénateur Jessiman: Expliquez-nous en quoi elle est différente.

M. Clair: Les politiciens sont au courant de ce que nous sommes en train de faire.

Le sénateur Jessiman: Comment le comité le sait-il? Je ne fais que vous exposer les arguments avancés par l'autre côté il y a quatre ans.

M. Clair: Un comité de coordination de hauts fonctionnaires a rencontré les provinces pour discuter de la nécessité de modifier cette loi en vue de permettre l'application des régimes provinciaux. Je ne suis pas sûr si la recommandation a été transmise aux ministres. Je le vérifierai. Cependant, d'après les entretiens que j'ai eus avec des fonctionnaires en Ontario, je sais que ces modifications ont été portées à l'attention du ministre en Ontario. J'ignore si d'autres fonctionnaires ont mis leurs dirigeants politiques au courant de ces discussions.

Le sénateur Jessiman: Comme on l'a signalé il y a quatre ans, lorsqu'un comité comme le nôtre se réunit, l'annexe I du Règlement du Sénat du Canada s'applique. Il se lit comme suit:

... lorsqu'un comité sénatorial étudie un projet de loi ou la teneur d'un projet de loi qui présente, à son avis, un intérêt particulier pour une ou plusieurs provinces ou pour un ou plusieurs territoires -

- et cela les intéresse tous -

- il devrait, en règle générale et dans la mesure du possible, inviter le gouvernement concerné à lui présenter des observations écrites ou verbales...

Je propose, comme cela a été proposé auparavant, que c'est ce que nous devrions faire. Nous devrions avoir un document écrit des gouvernements mêmes nous indiquant que les politiciens sont au courant de ce qui se passe. On nous a dit que les hauts fonctionnaires sont effectivement au courant de ce qui se passe mais ce ne sont pas eux qui dirigent le pays; ce ne sont pas les responsables.

Le sénateur Gigantès: Bien sûr qu'ils dirigent le pays.

Le sénateur Jessiman: Vous avez raison et c'est ce que nous voulons éviter.

Vous n'avez rien par écrit du gouvernement? Vous traitez uniquement avec vos homologues?

M. Clair: Nous agissons ainsi sur l'ordre des provinces. Nous partons donc du principe qu'elles en ont discuté avec leur ministre.

Le sénateur Jessiman: Je ne suis pas ici pour vous réprimander.

Le sénateur Lewis: Les dispositions du projet de loi dépendront des accords conclus avec les provinces, n'est-ce pas? Cela ne les intéresse peut-être pas à ce stade.

Le sénateur Jessiman: Je ne fais que présenter ce qui a été dit. Cela m'a paru logique mais le résultat du vote n'a pas été favorable à leur proposition. Je crois que nous devrions obtenir quelque chose par écrit des provinces. Si elles veulent comparaître et nous indiquer qu'elles sont favorables au projet de loi, c'est très bien mais elles devraient en avoir la possibilité.

Est-ce que le procès-verbal se présentera sous la même forme dans chaque province?

M. Clair: Non, chaque province utilisera son propre procès-verbal.

Le sénateur Jessiman: Le libellé utilisé en Ontario pourrait différer de celui utilisé dans les autres provinces?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Jessiman: Un autre problème qui a été soulevé concernait la mise au point du libellé proprement dit du procès-verbal. D'après ce que j'ai lu, j'ai cru comprendre que vous étiez en train d'essayer de mettre au point un procès-verbal qui serait applicable à l'ensemble du Canada. Ce n'est pas le cas?

M. Clair: Non. La description de l'infraction proprement dite sera la même partout au Canada mais la forme du procès-verbal peut varier d'une province à l'autre.

Le sénateur Jessiman: Est-ce que cela a été réglé?

M. Clair: Nous sommes en train d'y travailler avec l'Ontario et le Québec.

Le sénateur Jessiman: Vous êtes en train de travailler avec elles mais avez-vous décidé de la forme du procès-verbal que vous délivrerez en Ontario et au Québec?

M. Clair: Nous utilisons le procès-verbal prévu par la Loi sur les infractions provinciales en Ontario, effectivement.

Le sénateur Jessiman: Est-ce que ce sera le cas dans chaque province; vous utiliserez le procès-verbal en vigueur dans la province?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Jessiman: Si c'est le cas, je ne comprends pas pourquoi cela prend tant de temps.

Le sénateur Bryden: D'après ce que je crois comprendre de la loi, le gouvernement du Canada peut qualifier de contravention en vertu de la loi toute infraction ou tout acte, sauf ceux punissables uniquement par voie d'acte d'accusation? Est-ce exact?

M. Baribeau: C'est exact.

Le sénateur Bryden: Par exemple, en vertu du projet de loi C-8, qui est le projet de loi sur les drogues, la possession de n'importe quelle drogue énumérée en annexe au projet de loi est punissable sur déclaration sommaire de culpabilité ou par mise en accusation. Je suppose par conséquent qu'il s'agirait de contraventions en vertu de ce projet de loi.

M. Clair: Oui.

Le sénateur Bryden: Les infractions de trafic de drogues en vertu de l'annexe II et de l'annexe IV de cette loi sont également des infractions mixtes et pourraient être des contraventions pour lesquelles un procès-verbal pourrait être délivré. Cependant, en ce qui concerne le trafic du cannabis et des drogues prévues à l'annexe I, le contrevenant ne peut être poursuivi que par voie d'acte d'accusation. Par conséquent, ce type d'infractions ne peut être qualifié de contravention.

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Bryden: La Couronne peut toutefois continuer à procéder par déclaration sommaire de culpabilité.

M. Clair: C'est exact. La Loi sur les contraventions est un outil à l'intention des agents de l'autorité. Elle ne remplace pas la déclaration sommaire de culpabilité.

Le sénateur Bryden: Est-ce une option supplémentaire?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Bryden: Je crois comprendre également que peu importe que la Couronne procède en vertu de la Loi sur les contraventions ou par déclaration sommaire de culpabilité, si un acte en particulier est désigné par la Loi sur les contraventions, peu importe la procédure utilisée, l'auteur de cet acte n'a pas de casier judiciaire.

M. Clair: C'est exact. Ce n'est plus une infraction criminelle.

Le sénateur Bryden: L'une des modifications de ce projet de loi supprime de la loi originale toute mention de la confiscation.

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Bryden: Cela restreint-il le nombre d'actes qui pourraient être visés par la Loi sur les contraventions? Si on prend comme exemple le projet de loi sur les drogues, cette incapacité à exiger la confiscation de drogues empêche-t-elle ce projet de loi de tomber sous le coup de la Loi sur les contraventions?

M. Clair: Non. La Loi sur les contraventions prévoit un processus particulier pour la confiscation. Toutefois, si la mesure habilitante renferme des dispositions de confiscation, ces dernières restent applicables.

Le sénateur Jessiman: Il n'y aurait toutefois pas de casier judiciaire?

M. Clair: Il n'y aurait pas de casier judiciaire dans le cas d'une contravention; c'est exact.

Le sénateur Bryden: En vertu du paragraphe 8(1.1), le gouverneur en conseil peut prévoir divers frais à l'égard de chaque province. Est-ce acceptable dans une loi fédérale?

M. Baribeau: Il y a toujours des différences de frais judiciaires, et cetera, selon les compétences, si bien que cela ne change rien pour le défendeur. Cela ne change rien de ce qui existe déjà au Canada.

Le sénateur Bryden: Les frais comprennent-ils les amendes?

M. Clair: Non. Les amendes sont fixées, tandis que les frais sont établis par chaque province.

Le sénateur Bryden: Le mot «frais» est défini comme «les montants réglementaires prévus en vertu de l'alinéa 8(1)e).» L'alinéa 8(1)e) se lit comme suit:

prévoir les frais, dépens, pénalités ou autres sommes d'argent qui doivent être imposés à l'égard d'une contravention ou qui peuvent l'être, dans les cas réglementaires, à toute étape des procédures.

Les amendes et les pénalités seraient-elles normalement les mêmes?

M. Clair: Les amendes sont les mêmes dans tout le Canada. Les frais servent à couvrir les coûts d'administration du régime de chaque province.

Le sénateur Bryden: Dans la partie des définitions, il est indiqué que «frais» désigne les montants réglementaires prévus en vertu de l'alinéa 8(1)e). L'alinéa 8(1)e) autorise au gouverneur en conseil à prendre des règlements prévoyant les frais, dépens, pénalités et autres sommes d'argent.

D'après ce que je comprends, le mot «frais» est défini comme signifiant des frais. Que sont donc des frais?

M. Baribeau: Il y a une distinction. Lorsque nous parlons de pénalités, nous ne parlons pas de l'amende elle-même. Si une contravention au Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux exige une amende de 100 $, cette amende est applicable dans tout le Canada. Maintenant, en Nouvelle-Écosse par exemple, on ajoute à toute amende des frais d'administration de 50 $. Ce montant est automatiquement ajouté à toutes leurs amendes. Nous n'allons pas modifier cela. Nous essayons de suivre leur régime. L'amende sera la même dans tout le Canada, mais les frais d'administration varieront d'une province à l'autre.

La pénalité dont nous parlons s'applique dans les cas où une personne demande la tenue d'un procès et ne s'y présente pas. Lorsqu'en pareil cas, il y a condamnation par défaut, le tribunal inflige une pénalité qui varie également d'une province à l'autre. L'amende reste fixée à 100 $.

Le sénateur Bryden: Les conséquences réelles d'une infraction identique peuvent donc varier considérablement en fonction de la province où elle a été commise?

M. Baribeau: C'est exact.

Le sénateur Jessiman: On ne peut pas dire la même chose de l'amende toutefois?

M. Baribeau: L'amende ne change pas, mais nous devons nous adapter aux divers régimes administratifs des provinces.

Le sénateur Bryden: Ai-je bien compris que les procédures en application du Code criminel peuvent se transformer en procédures en application de la Loi sur les contraventions, mais que l'inverse n'est pas possible?

M. Clair: Si vous faites l'objet d'un procès-verbal, vous ne pouvez pas procéder par sommation, mais si vous pouvez procéder par sommation, vous pouvez à la place, faire l'objet d'un procès-verbal, effectivement.

Le sénateur Bryden: Enfin, la coopération avec les provinces est exposée à l'article 65. Le paragraphe 65.1(1) se lit comme suit:

Pour l'application de la présente loi, le gouverneur en conseil peut, par règlement, prévoir que les lois d'une province - avec leurs modifications successives - en matière de poursuite des infractions provinciales s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux contraventions ou aux contraventions d'une catégorie réglementaire qui aurait été commise sur le territoire, ou dans le ressort des tribunaux, de la province; il peut notamment, par règlement...

C'est exactement le genre d'article qui fait dire aux gens que la loi est idiote. Cela manque totalement de clarté. Je l'ai lu et relu. J'en ai retiré certaines expressions comme «avec leurs modifications successives» pour essayer de mieux comprendre, mais je n'y suis pas arrivé. Si je me heurte à ce genre de difficulté, comment le Canadien moyen est-il censé comprendre cet article? Que veut-il dire?

M. Baribeau: En vertu de l'article 65.1, le gouverneur en conseil peut prendre des règlements visant chaque province, prévoyant que les lois provinciales s'appliquent aux contraventions énumérées dans les règlements fédéraux sur les contraventions, par exemple.

Les règlements prévoyant que les lois provinciales s'appliquent prévoient en fait que les dispositions provinciales relatives au régime pénal provincial s'appliquent aux contraventions fédérales. Ils renfermeront également des dispositions permettant la concordance terminologique entre lois provinciales et fédérales afin d'éviter toute divergence.

Le projet de loi stipule également que les règlements prévoient que ces lois provinciales s'appliquent - avec leurs modifications successives - de manière à ce qu'on ne se retrouve pas coincé par la date exacte à laquelle on aurait pris un règlement.

Le sénateur Bryden: Je le comprends, mais il doit sûrement y avoir une façon de le dire qui soit meilleure que cette phrase si compliquée.

Si quelqu'un fait l'objet d'un procès-verbal pour avoir mal stationné son bateau, par exemple, et s'il est clair que le bateau a été mal stationné et que le procès-verbal est justifié, la première chose qu'un avocat de la défense fera, c'est de voir si les règlements ont été correctement pris dans le cadre du pouvoir réglementaire fixé par la loi. Le paragraphe 65.1(1) pourrait à lui seul me permettre de gagner ma vie.

M. Baribeau: La liste des infractions est établie en fonction de l'article 8 de la Loi sur les contraventions. Le paragraphe 65.1(1) prévoit essentiellement l'adaptation aux lois provinciales. Par conséquent, l'infraction que représente le mauvais stationnement d'un bateau figure déjà à l'article 8. Les lois qui s'appliquent se trouvent dans les règlements pris en vertu du paragraphe 65.1(1).

Il ne fait aucun doute que le texte est compliqué, mais il ne vise pas nécessairement la personne accusée. L'accusation est portée en vertu de l'article 8 de la Loi sur les contraventions. Nous fournissons le mécanisme. Nous avons dû créer des dispositions offrant suffisamment de souplesse de manière à englober tous les régimes en place. Par exemple, en vertu du Code de procédures civiles du Québec, le processus débute au moment où le procès-verbal est émis; en vertu du POA, il débute au moment où le procès-verbal est déposé. Il y a donc des variations, si bien que nous avons dû trouver quelque chose qui puisse les englober. Selon nos rédacteurs, il n'y avait pas beaucoup de façons de le faire. Nous avons eu deux ou trois ébauches avant d'arriver à cette version.

Le sénateur Bryden: En essayant de tout englober, vous risquez de ne rien englober du tout.

[Français]

Le sénateur Losier-Cool: Merci madame la présidente, ma question est certainement la même que celle du sénateur Bryden et je veux m'assurer que j'ai bien compris. Je ne suis pas avocat. Alors je veux m'assurer que j'ai bien compris la réponse parce que lorsque j'ai présenté ce projet de loi au Sénat, c'était un point sur les frais. Alors selon ce que j'ai compris, les frais applicables vont être différents d'une province à l'autre mais l'amende, pour la même offense, sera identique.

M. Baribeau: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. Qu'est-ce que vous venez faire? L'administration de la justice civile et criminelle est de juridiction provinciale. Le Code criminel est de juridiction fédérale. Qu'est-ce que vous voulez au juste? Voulez-vous prendre avantage des systèmes administratifs des provinces en matière de droit punitif? Est-ce ce que vous voulez faire? La province ne légifère pas en matière criminelle. La province légifère de façon «pénale», mais pas de façon criminelle. Vous voulez unifier les deux systèmes par entente? Je me demande pourquoi vous voudriez le faire.

M. Baribeau: Nous essayons, au lieu de créer une administration fédérale avec toute une structure fédérale, d'utiliser des systèmes déjà en place qui fonctionnent bien.

Le sénateur Beaudoin: Provinciaux?

M. Baribeau: Provinciaux, c'est ce que nous faisons. Nous importons, nous utilisons leur façon de faire pour nos infractions fédérales.

Le sénateur Beaudoin: Vous vous servez de l'administration de la justice provinciale en matière pénale, les avocats de la Couronne, pour les infractions pénales fédérales?

M. Baribeau: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Pourquoi le faites-vous, pour sauver de l'argent?

M. Clair: C'est à la demande des provinces.

Le sénateur Beaudoin: Le Québec a dit oui?

M. Clair: C'est une des provinces qui a poussé le plus dans cette direction.

Le sénateur Beaudoin: Évidemment, cela leur donne plus de pouvoirs?

M. Clair: On veut se servir de leur système.

Le sénateur Beaudoin: D'accord, vous voulez profiter d'un mécanisme provincial qui fonctionne bien?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Puis vous dites: pour les infraction fédérales, on va emprunter votre système.

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Vous signez un contrat avec la province?

M. Clair: Oui, avec la province, on négocie une entente avec eux pour les frais d'administration de leur système. S'ils font la poursuite pour nous, on signe une entente avec la province pour faire ce travail pour nous, oui.

Le sénateur Beaudoin: Comme on a fait pour les transports interprovinciaux avec les provinces?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Cela fonctionne bien?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Le système pénal provincial fonctionne bien?

M. Clair: Oui.

Le sénateur Beaudoin: Alors vous voulez vous en servir pour vos infractions?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Puis vous le faites par ententes?

M. Clair: C'est exact.

Le sénateur Beaudoin: Par lois aussi?

M. Baribeau: C'est-à-dire que la loi permet de...

M. Clair: ... de faire des ententes.

Le sénateur Beaudoin: C'est constitutionnel.

M. Clair: C'est ce que nous avions pensé.

[Traduction]

Le sénateur Doyle: Y a-t-il quelqu'un au ministère de la Justice qui soit chargé de dresser la liste des lois non promulguées du Canada, à un moment donné de l'année?

M. Clair: Je n'en ai pas la moindre idée.

Le sénateur Doyle: Avez-vous une idée du nombre de lois qui pourraient faire partie des lois non promulguées du Canada?

M. Clair: Non.

Le sénateur Doyle: Peut-il y en avoir qui soient plus anciennes que celles-ci?

M. Baribeau: J'en connais une, sur la consommation de carburants, qui a été adoptée en 1985 ou 1987. Je sais qu'il existe quelques lois qui n'ont pas été promulguées.

Le sénateur Doyle: Le ministère de la Justice nous demande chaque année d'examiner les lois qui sont en vigueur afin d'y apporter des corrections, des modifications et des variations ingénieuses de manière à tenir compte des nuances des deux langues, ou de ce que le sénateur Gigantès appellerait les joies de la fédération. Toutefois, personne ne s'occupe des lois qui n'ont tout simplement pas été promulguées.

M. Clair: Il se peut que la Section de la législation du ministère puisse répondre à cette question que je lui poserai; je demanderai à ses représentants de répondre directement au comité.

Le sénateur Doyle: Il nous serait utile de le savoir. Lorsque nous avons débattu des lois sur les armes à feu, des gens disaient: «Cela n'est pas en vigueur dans notre région»; tout le monde affirmait le comprendre; ou ils disaient: «Cette loi n'est pas mise en vigueur dans les réserves»; et tout le monde l'acceptait.

Notre système juridique semble présenter des variations géographiques, en plus des différences entre le fédéral et le provincial. Nous avons maintenant le problème des lois qui ne sont tout simplement pas promulguées.

La présidente: Si le comité le désire, nous pouvons donner suite à ce point en envoyant une lettre officielle demandant cette information.

Le sénateur Gigantès: Madame la présidente, puisque vous êtes prête à écrire des lettres, pourriez-vous présenter par écrit une plainte que j'ai pris l'habitude de faire? La langue française et la langue anglaise sont de nobles instruments. Il est arrivé que la prose des juristes soit éblouissante, dans ces deux langues, et que tout le monde la comprenne. Est-il possible de rédiger un texte juridique de manière que le Canadien moyen puisse le comprendre?

Le sénateur Doyle et moi-même sommes écrivains professionnels. Si je lui avais remis un paragraphe comme celui-ci lorsqu'il était mon rédacteur, il m'aurait renvoyé. Il m'aurait dit d'écrire exactement la même chose d'une manière compréhensible. Pour commencer, il faudrait morceler ce paragraphe.

La présidente: Voulez-vous que j'écrive une lettre au sujet du langage clair?

Le sénateur Gigantès: Oui; langage clair, élégant, compréhensible.

La présidente: J'écrirai une telle lettre, sénateur, de la façon la plus claire et la plus éloquente possible.

Le sénateur Corbin: J'ai quelques questions rapides à propos du parallélisme entre le français et l'anglais. Je ne parle pas de la qualité. À la page 2, la version anglaise comporte les paragraphes (i) et (ii). Dans la version française, ce n'est pas le cas. Les deux articles disent-ils la même chose?

M. Baribeau: Oui.

Le sénateur Corbin: À la page 3, au paragraphe 8...

[Français]

... la version française dit quele sous alinéa est abrogé. Vous prenez cinq, six phrases pour dire la même chose. Est-ce qu'ils disent la même chose?

M. Clair: Effectivement, ils disent exactement la même chose mais c'est parce que la technique de rédaction est différente en français qu'en anglais. En français, ils avaient tout simplement enlevé le sous-alinéa 18b)(iii) tandis qu'en anglais, ils avaient un mot qui traînait dans la version. Ils ont (iii) or (ii). Alors il y avait trois options. Donc pour enlever le troisième petit (i), il fallait qu'ils enlèvent le «or» à la fin du sous-alinéa.

[Traduction]

M. Baribeau: Il fallait l'enlever de la fin du sous-alinéa ii).

[Français]

Le sénateur Corbin: Dois-je conclure que c'est la même explication pour le paragraphe 32, relativement à l'article 53(3) où en anglais, on a (3)(a) et (b) et en français, on a une simple ligne?

M. Baribeau: Je m'excuse, à quelle ligne?

Le sénateur Corbin: À la page 10, l'article 32 qui concerne l'article 53(1) de la Loi; le 53(3), je parle du troisième sous-alinéa :«Le montant - argent ou valeurs -» En anglais, encore vous avez (a) et (b). En français, vous avez une simple affirmation. Ils disent la même chose?

M. Baribeau: Ils disent exactement la même chose. C'est qu'en français, on pouvait référer au paragraphe précédent qui établissait la structure. Alors il n'y a pas eu de problèmes. C'était plus facile en français.

[Traduction]

La présidente: Sénateur Corbin, vous soulignez quelque chose de très intéressant. Il semble que la langue française soit plus claire que la langue anglaise.

Le sénateur Corbin: Oui, contrairement à ce qui a été dit pendant des années; à savoir que la version française est une fois et demie plus longue que la version anglaise. Ce n'est plus le cas.

Le sénateur Lewis: Il faudrait voir ce que comportait l'original pour voir comment ce problème a été réglé.

Le sénateur Corbin: Effectivement. Il s'agit peut-être de corriger une imperfection dans l'anglais original également, mais le même message est transmis, si bien que j'en suis satisfait.

Ma dernière question porte sur la destruction des photographies. Comment, à notre époque de haute technologie, compte tenu des nombreuses façons de diffuser l'information entre bureaux et villes, les législateurs peuvent-ils être assurés que les photographies seront effectivement détruites?

[Français]

Gino Grondin, conseiller juridique, Équipe du projet sur les contraventions, ministère de la Justice: Présentement, je pratique dans le domaine des infractions sommaires qui vont être incluses dans la contravention. Il n'y a pas de prise de photo et de prise d'empreintes digitales. En pratique, elles ne sont pas prises dès le début et conséquemment, on n'a pas besoin de les détruire par la suite.

Le sénateur Corbin: Mais pourquoi inclure les photographies?

M. Grondin: Pour s'assurer, probablement, des infraction plus sérieuses comme les infractions hybrides.

Le sénateur Corbin: Comment?

M. Grondin: Les infractions de type hybride ou mixte qui pourraient être poursuivies soit par acte criminel ou par procédure sommaire. Comme on l'a dit au début, les infractions mixtes peuvent être incluses dans la liste des infraction dans la Loi sur les contraventions. Donc c'est pour ne pas prendre de chances justement.

Le sénateur Corbin: Alors, ma question était de savoir quelle garantie vous pouviez me donner. Je ne veux pas savoir si la photo est prise ou non. Quelle garantie pouvez-vous me donner, lorsqu'une photo est prise et qu'elle doit être détruite conformément à la loi, qu'elle l'est effectivement?

M. Clair: Comment peut-on s'assurer que les agents en autorité observent la loi, je pense qu'on peut poser la question pour toutes les choses, mais ils doivent observer la loi. C'est le texte de loi.

Le sénateur Corbin: Qui vérifie? Est-ce qu'il y a une vérification qui s'assure que cela se fait effectivement?

M. Clair: Je ne crois pas.

Le sénateur Corbin: Alors pourquoi l'inclure dans la loi?

M. Clair: Parce qu'on indique clairement qu'il n'y en a pas de photos. Donc c'est un acte illégal.

Le sénateur Corbin: Donc si quelqu'un est pris en flagrant délit, vous avez l'autorité pour le clouer au mur, c'est exact?

M. Clair: C'est exact.

[Traduction]

Le sénateur Lewis: Bien sûr, c'est le dossier officiel qui nous intéresse, n'est-ce pas? Cela se compare à la manière dont on se débarrasse des drogues ou alcools de contrebande.

La présidente: De toute évidence, si l'on essayait d'utiliser une telle photographie à un moment ou à un autre, un avocat pourrait présenter un très bon argument, à savoir qu'en vertu de la loi, cette photographie aurait dû être détruite. Rien ne garantit qu'elle sera détruite, car la loi n'est pas toujours respectée, mais au moins, il est garanti que la photographie ne pourra pas être utilisée d'une manière non prévue, puisque cette disposition stipule qu'elle doit être détruite.

Le sénateur Bryden: Vous pourriez également demander à un tribunal qu'il vous garantisse que cela a été fait. Cela garantirait qu'elle ne pourrait pas être présentée à quelque moment que ce soit.

Le sénateur Corbin: Je disais également qu'aujourd'hui, il est très facile de reproduire des photographies gråce aux nouvelles technologies. Où cela nous mène-t-il?

Le sénateur Doyle: Pouvez-vous nous dire s'il y a beaucoup de Canadiens ou s'il y a des Canadiens qui auraient pu ne pas avoir de casier judiciaire si l'on avait donné suite à ce projet de loi en 1992?

[Français]

M. Grondin: À cet effet cela revient un peu à ma réponse de tout à l'heure pour les photographies. C'est qu'en pratique, lorsqu'une infraction est poursuivie par voie de procédure sommaire, on ne prend pas d'empreintes et de protographies. Donc, il n'y a pas de casier judiciaire qui existe pour ces infractions. Donc présentement pour ces infractions, on ne fait pas de protographies et de prise d'empreintes. Donc, je ne peux pas vous le garantir. En pratique, la Gendarmerie Royale du Canada et les agents qui appliquent les règlements, qui donnent les contraventions nous affirment qu'ils ne le font pas. Il n'y a pas de casier judiciaire à cet effet.

[Traduction]

Le sénateur Doyle: Pourtant, dans la description de la loi, le mot «décriminaliser» est utilisé avec désinvolture, mais vous ne parlez pas d'une infraction qui aurait donné lieu à un casier judiciaire. Est-ce bien ce que vous me dites?

[Français]

M. Grondin: Présentement, il y a possibilité de le faire. Avec une contravention, en pratique, il y a toujours la possibilité de le faire puisque ce serait légal, sauf qu'une contravention vient enlever complètement cette possibilité.

[Traduction]

Le sénateur Doyle: Je parle de la loi telle qu'elle est.

M. Clair: En pratique, on ne le fait pas, mais on a le pouvoir de le faire.

[Français]

M. Grondin: Oui, vraiment les autorités policières nous l'ont expliqué ainsi. Justement c'est une procédure trop lourde pour des infractions de nature plus mineures.

[Traduction]

La présidente: Je crois que nous avons mélangé les torchons et les serviettes. Le fait que vos empreintes digitales et votre photographie n'ont pas été prises ne signifie pas que vous n'avez pas de casier judiciaire. Si vous êtes accusé de possession de marijuana, il se peut qu'on ne prenne pas vos empreintes digitales ni votre photographie, mais vous avez un casier judiciaire.

Si j'ai bien compris la question du sénateur Doyle, il veut savoir s'il est possible que certains Canadiens, qui ont maintenant un casier judiciaire, n'en auraient pas, si cette Loi sur les contraventions avait été en vigueur ces quatre dernières années, étant donné que leur province aurait pu choisir d'appliquer cette Loi sur les contraventions à la place du Code criminel actuel. J'imagine que vous ne pouvez pas répondre à cette question, car elle est hypothétique. Il est toutefois évident qu'il y a des gens qui ont un casier judiciaire aujourd'hui, car la Loi sur les contraventions n'existait pas.

Le sénateur Lewis: Le fait que cela soit prévu maintenant montre que c'était devenu une nécessité.

Le sénateur Doyle: Dans un autre domaine, j'ai toujours été ahuri d'apprendre que des casiers ne sont jamais détruits. C'est un sujet sur lequel il faudrait se pencher.

Le sénateur Jessiman: Il devait à l'origine y avoir 12 ministères ou organismes et près de 4 000 infractions. En est-on maintenant arrivé à quatre ou cinq organismes?

[Français]

M. Grondin: Présentement, on garde un contact encore avec au moins une dizaine de ministères et d'agences. Deux, trois ou peut-être quatre ministères, officiellement, comme le ministère de l'Agriculture, nous ont dit qu'ils ne faisaient plus part des contraventions, sauf qu'on garde encore la majeure partie de ce qui existait au début.

Le ministère de l'Agriculture et un autre étaient à l'origine et faisaient partie des contraventions. Ils avaient un nombre important d'infractions et c'est ce qui a fait baisser le nombre d'infractions parce que le ministère de l'Agriculture avait presque 1 000 infractions à lui seul. Mais on a encore environ une dizaine de ministères et d'organismes participants.

[Traduction]

Le sénateur Jessiman: Ces 4 000 infractions sont-elles réparties entre tous les organismes?

[Français]

M. Grondin: Présentement, nous avons le ministère des Travaux publics pour le règlement des propriétés du gouvernement et puis aussi, le ministère du Patrimoine qui est responsable des règlements sur les parcs nationaux. On fait aussi affaire avec le ministère des Transports qui est responsable des règlements sur les petits båtiments et sur la restriction à la conduite des bateaux; nous avons donc principalement ces trois ministères.

[Traduction]

Le sénateur Jessiman: Ai-je raison de supposer que le Québec sera la première province à respecter ce projet de loi?

M. Clair: Non; c'est l'Ontario.

Le sénateur Jessiman: Et vous espérez que le Québec suivra?

M. Clair: Oui.

Le sénateur Jessiman: Qui décidera si une infraction doit faire l'objet d'un procès-verbal ou d'une sommation?

M. Clair: Des directives sont prévues par le ministère responsable de ce règlement.

Le sénateur Jessiman: Ces directives sont-elles disponibles?

M. Clair: Étant donné que la loi n'est pas en place, il n'y a pas de directives pour les forces de l'ordre. Nous demanderons aux ministères de les rédiger. Des compétences provinciales appliquent des règlements fédéraux, si bien qu'elles seront également assujetties aux directives de leurs ministères. C'est ce qui se passe à l'heure actuelle.

Le sénateur Jessiman: Quand pensez-vous que le Québec suivra l'exemple?

M. Clair: Nous pensons que dans le cas du Québec, la mise en application se fera le 1er janvier ou le 1er avril 1997.

Le sénateur Jessiman: Pensez-vous que toutes les compétences observeront ce projet de loi d'ici trois ans?

M. Clair: Oui, je le pense.

Le sénateur Jessiman: J'ai lu que l'on espère que ces amendes pourront être payées dans des institutions financières. Un plan est-il prévu à cet effet?

M. Clair: Les systèmes varient selon les provinces. Pour les contraventions fédérales, vous pourrez payer les amendes dans les endroits de la province où vous pouvez actuellement payer les amendes.

Le sénateur Bryden: Si en 1995, j'ai commis une infraction pour laquelle j'ai été accusé et reconnu coupable sur déclaration sommaire et qu'en 1997, cette infraction particulière devient une contravention faisant l'objet d'un procès-verbal, est-il prévu qu'en 1997, je pourrais demander que l'on supprime ma condamnation pour infraction criminelle, puisque ce n'en est plus une?

M. Clair: Je ne connais pas la réponse à cette question.

M. Baribeau: Je dois avouer que je ne le sais pas. C'est un point que nous n'avons pas examiné.

La présidente: Notre attachée de recherche pourrait peut-être nous donner quelques renseignements à ce sujet.

Le sénateur Bryden: Je pense qu'il est arrivé des cas où cela s'est produit; en d'autres termes, les choses ont changé et les gens ont demandé des effets rétroactifs.

Mme Kristen Douglas, attachée de recherche, Bibliothèque du Parlement: Rien dans ce projet de loi ne traite de ce point. Toutefois, toute personne ayant un casier judiciaire peut demander une réhabilitation. J'imagine que si l'infraction est tellement mineure qu'elle a été englobée dans le processus des contraventions, cela entrerait en jeu, car le processus de réhabilitation comporte un certain pouvoir discrétionnaire.

Le sénateur Gigantès: Est-ce qu'une réhabilitation ne signifie pas que même si vous avez commis une mauvaise action, vous êtes pardonné?

La présidente: C'est exact.

Le sénateur Gigantès: Le sénateur Bryden est en train de nous dire que la loi a été modifiée et que, en vertu de la nouvelle loi, les mauvais garnements ne sont plus considérés comme tels - à tout le moins pas aussi mauvais qu'avant.

Mme Douglas: Comme je l'ai dit, ce projet de loi n'est pas rétroactif au sens où l'a suggéré le sénateur Bryden. Toutefois, le mécanisme de réhabilitation a une incidence, par exemple, sur le traitement des demandes d'emploi. Aux termes de la législation sur les droits de la personne, certaines questions ne peuvent figurer sur un formulaire de demande d'emploi. Ainsi, on ne peut demander à un candidat s'il a déjà été reconnu coupable d'une infraction criminelle, car cela serait inconvenant. De fait, seules les infractions n'ayant pas fait l'objet d'une réhabilitation doivent être divulguées dans ce contexte.

Lorsqu'une réhabilitation est octroyée, cela ne signifie pas que l'acte répréhensible n'a jamais été commis, et la situation resterait inchangée aux termes de la Loi sur les contraventions. Ces actes demeureront des infractions qui seront encore assorties de sanctions, mais il ne s'agira plus de sanctions pénales.

Le sénateur Gigantès: Le Parlement a déjà compté dans ses rangs un député reconnu coupable d'un vol de banque qui avait été réhabilité. Ce député avait dénoncé le fait qu'un article de journal ait mentionné cet acte.

La présidente: Je désire remercier les témoins qui ont comparu ce matin.

Le comité souhaite-t-il passer à l'étude article par article du projet de loi?

Le sénateur Lewis: Je propose qu'il soit fait rapport du projet de loi sans amendement.

La présidente: Le comité est-il d'accord?

Des voix: D'accord.

La présidente: Nous le ferons dès que possible.

Le sénateur Corbin: Un certain nombre de préoccupations ont été exprimées. Que faisons-nous à cet égard? Seront-elles transmises à la Chambre? Y aura-t-il un suivi?

La présidente: On m'a demandé d'écrire une lettre pour demander qu'un langage clair soit utilisé. Je distribuerai cette lettre à tous les membres du comité lorsque je l'aurai envoyée, et je vous ferai connaître la réponse qu'on me fera parvenir.

Le sénateur Doyle m'a également demandé d'écrire une lettre au nom du comité pour demander quelles lois ont été adoptées mais n'ont pas été promulguées et ne sont donc pas en vigueur. Je distribuerai cette lettre ainsi que la réponse aux membres du comité.

Le sénateur Jessiman: Vous devriez également écrire aux différentes assemblées législatives ainsi qu'à tous les procureurs généraux. Bien que nos témoins aient indiqué qu'ils travaillaient de pair avec leurs homologues, je crois que nous devrions permettre aux provinces de confirmer leur accord par écrit ou en personne.

La présidente: Sénateur Jessiman, nous avons adopté le projet de loi. L'une des dispositions de celui-ci prévoit la tenue de négociations avec les provinces. Je présume que le Cabinet participera à ces négociations.

Le sénateur Jessiman: Ce n'est pas ce que nos témoins ont laissé entendre aujourd'hui, ni ce qui a été dit au moment de l'examen en 1992. La situation était exactement la même, et un vote a été pris à cet égard. Il est si facile d'écrire aux provinces pour leur dire ce que nous avons entendu et pour leur demander de nous faire savoir dans un délai d'une semaine si elles ne partagent pas ces opinions. Si elles désirent faire des déclarations au sujet du projet de loi, nous les entendrons. Si elles ne le souhaitent pas ou si elles ne répondent pas, nous pourrons présumer qu'elles sont satisfaites et que nous avons respecté nos propres règles.

La présidente: Si tel est le désir du comité, je peux certainement écrire aux ministres de la Justice et aux procureurs généraux de tout le pays pour leur dire que le comité a convenu de faire rapport de ce projet de loi sans amendement et que nous avions cru comprendre que des négociations avaient eu lieu.

Le sénateur Beaudoin: C'est la prérogative de la Couronne, exercée par le Cabinet, de décider quand elle promulguera une loi. Cette décision relève du pouvoir exécutif et non du pouvoir législatif. Bien sûr, le pouvoir exécutif a le devoir de promulguer une loi dès que possible, à moins qu'il n'existe de bonnes raisons d'agir autrement.

Si je me souviens bien, le comité d'examen de la réglementation a de temps à autre écrit aux ministres pour leur demander quand une certaine loi serait promulguée. Le comité des affaires juridiques et constitutionnelles a certainement le pouvoir de faire de même.

La présidente: De quelle façon aimeriez-vous que j'intervienne, sénateur Beaudoin?

Le sénateur Beaudoin: Envisagiez-vous d'écrire au ministre de la Justice?

La présidente: Non. Le sénateur Jessiman suggérait que j'écrive aux gouvernements de toutes les provinces et des territoires.

Le sénateur Beaudoin: Ce n'est pas ce que je veux dire. À mon avis, il suffirait d'écrire au ministre fédéral. Évidemment, si les deux paliers de gouvernement sont en cause, nous pouvons intervenir et demander aux procureurs généraux des provinces quelles sont leurs intentions. Nous avons déjà procédé de la sorte, et je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas continuer à le faire.

Le sénateur Lewis: En ce qui concerne les lois qui n'ont pas été promulguées, je présume qu'il faudrait remonter à 1867 pour avoir une liste complète.

La présidente: Sénateur Doyle, aimeriez-vous que l'on détermine une date?

Le sénateur Doyle: Oui, 1867.

La présidente: Alors, nous remonterons jusqu'en 1867.

Je dois dire, honorables sénateurs, que je suis encore un peu perplexe quant à ce que je suis sensée faire concernant la demande du sénateur Jessiman.

Le sénateur Jessiman: Je signalais qu'en 1992, les sénateurs libéraux avaient attiré l'attention du comité sur le fait que nos règles prévoyaient que, lorsqu'un comité étudiait un projet de loi touchant les provinces, nous devions généralement les inviter à communiquer avec nous par écrit ou en personne.

La dernière fois que nous avons abordé cette question, c'était en présence de fonctionnaires, et les sénateurs de l'autre côté avaient dit qu'il s'agissait simplement de fonctionnaires parlant à d'autres fonctionnaires et qu'ils souhaitaient entendre les procureurs généraux. Les fonctionnaires n'ont pas été élus par la population. Nous sommes sur le point d'adopter cette loi sans respecter nos propres règles.

La présidente: Sénateur Jessiman, il existe cependant une différence fondamentale entre ce projet de loi et celui étudié en 1992. Ce dernier ne prévoyait pas qu'un accord devait intervenir entre le fédéral et les provinces. Ce projet de loi le fait. Il prévoit la conclusion d'un accord fédéral-provincial, ce qui, légalement parlant, ne peut se faire sans le consentement des provinces et des politiques de cette province.

Le sénateur Beaudoin: N'oubliez pas que chaque fois que nous modifions le Code criminel, toutes les provinces sont très intéressées parce qu'elles appliquent le Code criminel. Nous pouvons inviter à comparaître le procureur général, l'Association du Barreau canadien ou les associations juridiques provinciales, et c'est ce que nous faisons lorsque la question est très importante, mais, aucune politique n'exige à mon avis qu'on envoie une lettre chaque fois que le Code criminel est modifié. Ce n'est pas ce que j'ai fait ni ce qu'ont fait les présidents précédents. Vous pouvez toutefois adopter cette pratique, madame la présidente.

La présidente: Merci, sénateur Beaudoin. Je ne fais que me soumettre aux demandes du comité.

Le sénateur Gigantès: Madame la présidente, votre argument est irréfutable. Si ce projet de loi exige que le fédéral et les provinces concluent un accord, cela signifie que le Procureur général du Canada cherchera à obtenir l'assentiment du procureur général de chaque province. Si une province ne le donne pas, cela signifie qu'elle est en désaccord. Pourquoi devrions-nous leur demander si elles sont d'accord si la loi prévoit un mécanisme à cette fin, à savoir la tenue de consultations qui permettront aux provinces d'exprimer leur accord ou leur désaccord?

La présidente: Les membres sont-ils d'accord?

Le sénateur Corbin: Vous avez répondu à ma question de façon satisfaisante. Je n'ai plus d'objection.

La présidente: Merci, sénateur Corbin.

Le sénateur Jessiman: Nous n'enverrons donc pas de lettres.

La séance est levée.


Haut de page