Délibérations du comité sénatorial permanent
des
affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 14 - Témoignages
Ottawa, le mardi 4 juin 1996
Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui a été renvoyé le projet de loi C-28, concernant certains accords portant sur le réaménagement et l'exploitation des aérogares 1 et 2 de l'aéroport international Lester B. Pearson, se réunit aujourd'hui à 9 heures pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Nous entreprenons aujourd'hui notre étude du projet de loi C-28. Mais nous devons cependant régler auparavant quelques questions administratives.
Le calendrier des séances cette semaine s'établit comme suit: Aujourd'hui, puis demain à 15 h 30, même si le Sénat siégera peut-être à ce moment-là -- c'est-à-dire à condition que la motion soit adoptée par la Chambre; jeudi à 10 heures; lundi à 10 heures, ainsi qu'en après-midi s'il le faut. Il y aura également une réunion du comité de direction après la séance de ce matin, afin de mettre la dernière main à la liste de nos témoins.
Je suis disposée à accepter ce matin une motion pour que nous ne votions pas sur des questions de fond relatives au projet de loi.
Le sénateur Nolin: Je propose la motion, à savoir:
Que tout examen ou vote sur des motions concernant l'étude du projet de loi C-28 en comité ne puisse avoir lieu avant que tous les témoins aient été entendus.
La présidente: Tous les membres du comité sont-ils d'accord?
Des voix: D'accord.
La présidente: Adopté. Merci à tous.
Le sénateur Lynch-Staunton: Madame la présidente, nous pourrions peut-être avoir une indication des témoins qui ont été confirmés, afin de pouvoir nous préparer en conséquence?
La présidente: Oui. Demain, nous entendrons deux témoins qui traiteront des dispositions de l'ALÉNA touchant le projet de loi. Il s'agit de M. von Finckenstein et de M. McIlroy. Nous entendrons ensuite un témoin qui parlera des aspects juridiques et constitutionnels, et plus précisément de la constitutionnalité du projet de loi. Il s'agit de M. Chipeur. Jeudi matin, nous entendrons le ministre de la Justice et lundi matin, M. Monaghan et M. MacKay, qui traiteront eux aussi de la constitutionnalité du projet de loi.
Le sénateur Jessiman: Tel qu'il est rédigé actuellement?
La présidente: Oui. Ils ont tous les deux copie des amendements qui vous ont été remis hier.
Le sénateur Beaudoin: Avez-vous dit lundi matin?
La présidente: Oui, lundi matin à 10 heures.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est une liste impressionnante. Il y a cependant un absent frappant, soit le ministre des Transports. Pouvez-vous confirmer qu'il a été invité et que vous connaissez sa réponse à cette invitation?
La présidente: Oui, le ministre des Transports a été invité. Il a envoyé ses fonctionnaires.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le ministre des Transports ne viendra pas discuter des aspects politiques de ce projet de loi, ni de la politique qui sous-tend le projet de loi?
La présidente: Non. Le ministre des Transports ne viendra pas ici; c'est le ministre de la Justice qui viendra.
Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, il est normal que le parrain du projet de loi se présente au comité sénatorial pour expliquer les aspects du projet de loi proposé qui, pour des raisons évidentes, ne peuvent l'être par ses fonctionnaires. Ce projet de loi, tout comme son prédécesseur, a été déposé à la Chambre des communes par le ministre des Transports -- dans ce cas-ci, au nom du ministre des Transports. Techniquement, c'est son projet de loi. Il semble tout à fait justifié qu'il se présente devant nous. S'il ne vient pas, peu importe la raison, il devrait au moins au moins envoyer son secrétaire parlementaire afin que nous puissions examiner les questions relatives à la politique publique dont les fonctionnaires ne peuvent discuter, pour des raisons évidentes.
La présidente: Les arguments qui ont été présentés sans cesse au sujet de ce projet de loi ont porté surtout sur sa légalité et sa constitutionnalité. Voilà pourquoi nous avons invité le ministre de la Justice, bien que, à la demande du sénateur Nolin, j'aie aussi invité le ministre des Transports.
Il a été décidé que nous devrions mettre l'accent sur les questions juridiques et constitutionnelles relatives au projet de loi. Voilà pourquoi le ministre de la Justice a accepté de se présenter devant nous. De fait, nous espérions qu'il puisse venir ce matin, mais il a une réunion du Cabinet ce matin et a demandé si nous accepterions qu'il vienne jeudi. Nous avons acquiescé à sa demande.
Le sénateur Nolin: Je ne me souviens pas que nous ayons décidé que les séances devraient porter uniquement sur la constitutionnalité.
La présidente: Non. Je ne parlais pas des séances proprement dites, mais plutôt des témoignages. Sénateur Nolin, il y aura une réunion du comité de direction immédiatement après cette séance, afin de déterminer s'il y aura d'autres témoins. La liste des témoins que je vous ai donnée ce matin est celle sur laquelle nous nous sommes entendus jusqu'à la prochaine réunion du comité de direction, qui aura lieu après la séance de ce matin.
Le sénateur Nolin: Si vous vous souvenez bien, j'ai demandé certains témoins et vous m'avez répondu d'attendre à midi, après avoir entendu le ministre. Depuis, le témoignage du ministre a été reporté à jeudi après-midi. Nous aurons du mal à prendre des décisions sur la liste future des témoins à la réunion du comité de direction ce midi. Puis-je proposer de reporter la réunion du comité de direction à jeudi après-midi, après que le ministre aura été entendu?
La présidente: Certainement, nous pouvons reporter la réunion du comité de direction à ce moment-là, à la demande du sénateur Nolin.
Le sénateur Stanbury: Je rappelle au chef de l'opposition et à ses collègues que jamais, durant les discussions concernant ce projet de loi ou son prédécesseur, ils n'ont jugé souhaitable d'examiner autre chose que les aspects juridiques et constitutionnels. On l'a répété à maintes et maintes reprises.
De nombreux amendements au projet de loi ont circulé, et les efforts en vue d'améliorer le projet de loi ont visé à apaiser les craintes de l'opposition. Ce sont ces amendements qui constitueront le principal sujet de discussion du comité. Il s'agit de questions juridiques et constitutionnelles. Je ne sais pas trop ce que signifie cette diversion par rapport aux questions de politique, mais on semble s'éloigner de la ligne que s'est tracée l'opposition jusqu'ici.
Le sénateur Nolin: C'est très intéressant.
Le sénateur MacDonald: Vous pourriez peut-être nous expliquer exactement ce que font les fonctionnaires des Transports ici aujourd'hui.
Le sénateur Stanbury: On les a invités.
Le sénateur MacDonald: Évidemment, on les a invités, mais était-ce pour parler justement des restrictions que vous venez d'évoquer?
Le sénateur Stanbury: On me dit que c'est vous qui les avez invités. Ils ont été invités et ils sont venus.
Le sénateur Lynch-Staunton: De quoi parleront-ils? Devront-ils s'en tenir aux aspects juridiques et constitutionnels du projet de loi?
Le sénateur Stanbury: Je n'en ai aucune idée. Je ne limiterai pas leurs interventions.
Le sénateur Nolin: Sénateur Stanbury, je ne sais pas si vous vous souvenez, mais lorsque nous avons examiné le projet de loi C-22, le deuxième témoin que nous avons entendu était le ministre des Transports. Nous l'avons interrogé précisément sur le principe et la politique qui sous-tendaient le projet de loi C-22, prédécesseur du projet de loi C-28. Nous pensons qu'il convient de poser les mêmes questions au nouveau ministre des Transports au sujet du principe du projet de loi et des faits à l'origine de cette décision extraordinaire du gouvernement.
Nous pensons que le ministre des Transports devrait répondre aux mêmes questions qui ont déjà été posées à l'ancien ministre, M. Young. Il n'y a pas de truc, pas de nouvelle stratégie. C'est toujours la même question de savoir comment s'explique cette décision.
Le sénateur Stanbury: Si je comprends bien, par suite de cette demande, le ministre a été invité à comparaître.
La présidente: Oui, il l'a été.
Nous entendrons ce matin deux témoins prêts à discuter avec nous des amendements qui vous ont été distribués hier. Je suis disposée à tenir les réunions du comité de direction quand le sénateur Nolin le demandera. Nous pouvons poursuivre ce débat après avoir entendu les témoins ce matin. Mais il conviendrait de les entendre maintenant.
Le sénateur Lynch-Staunton: Avec votre permission, madame la présidente, dois-je comprendre que, désormais, le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ne s'intéressera qu'aux aspects juridiques et constitutionnels et donc que le seul ministre qui sera invité à comparaître sera le ministre de la Justice et que les ministres qui parrainent les projets de loi renvoyés à notre comité ne seront pas tenus de comparaître parce que nous nous limiterons aux aspects juridiques et ne parlerons pas des politiques? C'est la définition la plus étroite jamais donnée au mandat du comité depuis que le comité existe.
Comme l'a fait remarquer le sénateur Nolin, lorsqu'il a comparu à titre de premier témoin sur le projet de loi C-22, M. Rock a demandé que M. Young soit invité parce qu'il ne pouvait pas répondre aux questions qui lui seront posées à nouveau jeudi prochain, questions qu'il faudrait normalement adresser au ministre qui parraine le projet de loi.
Je ne comprends pas pourquoi le comité hésite à poursuivre la tradition consistant à inviter le ministre qui parraine le projet de loi ou tout au moins son secrétaire parlementaire, afin d'avoir un tableau complet du projet de loi à l'étude, au lieu de nous limiter à un point de vue strictement juridique. Je conviens que nous avons insisté là-dessus, mais nous nous posons aussi de nombreuses questions sur la politique à l'origine de ce projet de loi que, comme nous l'a déclaré le sénateur Kirby, le gouvernement aimerait faire adopter sans amendement.
Si le gouvernement veut que le projet de loi soit adopté sans amendement, le ministre responsable devrait venir ici et faire valoir son point de vue. C'est pour aider le gouvernement à faire avancer sa cause que je demande au comité d'appuyer une résolution, s'il le faut, pour que le ministre des Transports trouve le temps de nous donner son point de vue et le raisonnement justifiant ce projet de loi qu'il a déposé de nouveau. Nous serions certainement disposés à l'accueillir quand son emploi lui permettra de venir.
Le sénateur MacDonald: Dans le Toronto Star du 3 juin, il y a un article écrit par un très éminent journaliste, M. Edison Stewart -- qui est avec nous aujourd'hui -- dans lequel il cite le ministre des Transports comme suit:
Je ne prends pas une décision qu'il revient au juge de prendre... parce que la question du niveau des profits...
...et nous savons évidemment de quoi il parle...
...est actuellement devant les tribunaux et qu'il ne conviendrait pas que je fasse d'autres commentaires à ce sujet.
Le ministre de la Justice a profité de l'occasion pour faire renaître le projet de loi C-22, en le changeant tout simplement de numéro. Les amendements qui devaient être proposés par les sénateurs libéraux ont été décrits en détail par le sénateur Kirby au Sénat la semaine dernière. Nous ne les avons reçus qu'hier. Il y a eu une certaine confusion quant aux témoins qui seraient entendus ce matin. D'ailleurs, nous ne savions pas qui étaient les témoins avant d'entrer dans cette salle. Nous avions évidemment toutes les raisons de croire que nous entendrions des représentants du ministère de la Justice ou le ministre lui-même.
Il s'agit du projet de loi de M. Anderson. Il l'a remis au Feuilleton. Pour ma part, je ne vois vraiment pas pourquoi il ne peut pas se mettre à notre disposition, comme l'a déclaré le sénateur Lynch-Staunton.
Je propose que le comité indique que le témoignage de M. Anderson lui serait très utile et que le ministre devrait comparaître.
La présidente: Une motion a été présentée. Le sénateur MacDonald a demandé que le ministre des Transports comparaisse devant le comité.
Le sénateur Bryden: Votre motion est-elle que le ministre des Transports soit invité à comparaître devant le comité?
Le sénateur MacDonald: Oui, que le comité considère qu'il serait très utile que M. Anderson comparaisse devant lui et que le ministre trouve le temps de le faire.
Le sénateur Bryden: Je crois comprendre qu'une telle invitation a déjà été faite au ministre des Transports.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est exact, mais si elle vient de l'ensemble du comité, elle aurait peut-être plus de poids.
Le sénateur Bryden: Madame la présidente, est-il exact qu'une invitation a été faite?
La présidente: Une invitation a été faite oralement au ministre des Transports; il n'y a pas eu d'invitation officielle par écrit.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est habituellement ainsi qu'on procède et, d'habitude, le ministre accepte.
Le sénateur Bryden: Puis-je faire une suggestion? Afin de ne pas devoir adopter de motions à chaque fois, même si nous sommes prêts à le faire au besoin, je suggère que la présidente envoie une invitation par écrit au ministre. Le ministre décidera alors s'il veut comparaître ou non.
La présidente: Après cette séance, j'enverrai une invitation par écrit à M. Anderson.
Le sénateur MacDonald: Veuillez indiquer que tout le comité souhaitait qu'il soit invité.
La présidente: Je n'y manquerai pas.
Pouvons-nous entendre nos témoins?
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous avons håte de les entendre, mais essayons de procéder correctement. On a parlé d'amendements, mais aucun n'a été proposé. Si les témoins sont ici pour discuter d'amendements, ces amendements devraient être déposés afin qu'ils figurent au compte rendu. Nous avons reçu, à la dernière minute, une note indiquant que ces amendements seront proposés par les sénateurs libéraux. Tant qu'ils ne l'auront pas été, ils n'existent pas officiellement.
Le sénateur Bryden: Conviendrait-il de les adopter maintenant?
La présidente: Non, mais il convient de les déposer.
Le sénateur Bryden: Je suis prêt à le faire. Je dépose les amendements.
Le sénateur Lynch-Staunton: Comment pouvez-vous les déposer si vous ne les proposez pas? Nous procédons un peu à l'envers. D'habitude, quand un projet de loi est à l'étude en comité, on en discute avec les témoins afin que les sénateurs se fassent une meilleure idée des points de vue à son sujet. Avant même d'avoir eu l'occasion de discuter du projet de loi, on nous dit qu'il sera modifié. Normalement, nous avons d'abord une discussion, puis les amendements sont présentés. Connaissant mieux le projet de loi, nous pouvons alors mieux évaluer les amendements. Mais ici, on nous dit qu'il faut examiner les amendements et en discuter tout de suite, et le projet de loi devient secondaire. Ce n'est pas la façon de procéder, madame la présidente.
La présidente: Sénateur Lynch-Staunton, c'est la façon de faire du comité. Nous avons procédé ainsi aussi récemment que la semaine dernière au sujet du projet de loi C-8.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dans le cas du projet de loi C-8, vous avez présenté les amendements le premier jour, avant que nous commencions à entendre les témoins.
La présidente: Non, nous avons déposé une série d'amendements lorsque les fonctionnaires ministériels sont venus témoigner, afin qu'ils puissent les passer en revue avec nous et nous dire exactement en quoi ils modifieraient l'interprétation du projet de loi. Si je comprends bien, nous ne pouvons adopter des amendements que lorsque nous procédons à l'étude article par article du projet de loi. Nous n'en sommes pas là actuellement.
Je crois que nous pouvons déposer les amendements. Nous pouvons ensuite demander aux fonctionnaires d'en discuter avec nous ce matin, de nous expliquer les amendements et de répondre à toute question que les sénateurs peuvent se poser pour déterminer s'ils répondent à leurs attentes, leurs exigences ou leurs besoins. Mais nous ne nous prononcerons pas sur ces amendements tant que nous ne procéderons pas à l'étude article par article, à une séance future du comité.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il s'agit d'amendements présentés par les sénateurs libéraux. Pourquoi demandons-nous aux fonctionnaires de les expliquer? D'après la note de service datée d'hier, il s'agit d'amendements à proposer par les sénateurs libéraux. Il reviendrait aux sénateurs libéraux de les expliquer, pas aux fonctionnaires. Les fonctionnaires sont ici pour défendre le projet de loi. Ils n'ont aucun amendement à présenter. Ils sont ici pour discuter d'un projet de loi que le gouvernement voudrait faire adopter sans amendement. On nous affirme maintenant que des amendements seront proposés par les sénateurs libéraux, pas par les fonctionnaires. Nos collègues peuvent certainement éclairer notre lanterne.
Le sénateur Bryden: Madame la présidente, c'est sûrement conforme à la procédure que j'ai vue, depuis le peu de temps que je suis ici, lorsque des amendements sont déposés. Les fonctionnaires peuvent discuter du projet de loi qui est devant eux. Pour gagner du temps, nous aurions la liberté, je crois, de leur demander si les amendements, en supposant qu'ils soient proposés, apaisent certaines inquiétudes qui ont été soulevées. C'est ce que je proposerais de faire plutôt que de passer en revue le projet de loi, qui est étudié en comité depuis deux ans. Bon nombre des points de vue sont bien connus. Cela nous donnerait l'occasion non seulement d'examiner le projet de loi mais aussi d'interroger les fonctionnaires sur ces amendements, s'ils veulent donner leur avis, sans qu'il faille les convoquer à nouveau.
D'après mon expérience au comité, jusqu'ici tout au moins, tout le monde a coopéré pour tenter d'analyser à fond et objectivement les questions dont nous avons été saisis et afin de faire avancer les dossiers. Je suppose que nous allons adopter la même attitude maintenant. Je suis disposé à déposer les amendements, si la présidente le souhaite ainsi.
Le sénateur Beaudoin: Au sujet de la procédure, si le sénateur Bryden est sur le point de déposer les amendements, je suppose que les sénateurs libéraux ont fait leur choix et que ce qu'ils veulent, c'est un débat et des questions aux divers témoins sur les amendements. Autrement dit, vous avez décidé que vous voulez des amendements.
Le discours du sénateur Kirby comprenait deux parties. Il a déclaré que le gouvernement préférerait que le projet de loi soit adopté sans amendement, mais que des amendements pouvaient être proposés. On nous dit ce matin, et je voudrais que ce soit clair, que si des amendements sont déposés, et si nous voulons en débattre, c'est parce que le comité étudiera uniquement les amendements au projet de loi.
Le sénateur Bryden: Si je peux répondre, je pense que la position est très claire: le gouvernement est tout à fait disposé à adopter le projet de loi sans amendement. Nous estimons qu'il est légal, constitutionnel, et cetera. À la limite, les membres du comité sont prêts à faire rapport du projet de loi tel qu'il est, sans amendement.
Nous croyons cependant que, pour faire avancer rapidement le projet de loi et compte tenu de toutes les discussions qui ont eu lieu jusqu'ici, il serait préférable d'adopter les amendements qui sont devant nous. Je sais que vous vous préoccupiez beaucoup, tout comme d'autres sénateurs, de savoir si les amendements dissipent vos inquiétudes au sujet du projet de loi. Je pense qu'il faut établir très clairement que les membres de ce côté sont tout à fait disposés -- et nous pourrions le faire aujourd'hui, si vous le voulez -- à faire rapport du projet de loi sans amendement.
Nous déclarons toutefois que, lors de la deuxième lecture, pour être juste envers la Chambre, le sénateur Kirby a indiqué que, compte tenu des antécédents du projet de loi, nous serions prêts à proposer des amendements qui, de l'avis du gouvernement et de l'avis des sénateurs, règlent au moins un bon nombre des questions constitutionnelles qui ont été soulevées auparavant.
Le sénateur Beaudoin: Elles ont été soulevées l'an dernier.
Le sénateur Bryden: Oui. Afin d'essayer d'être le plus ouverts possible -- et j'ai participé aux discussions d'hier pour savoir si nous pouvions au moins tenter de vous faire parvenir les amendements avant la séance d'aujourd'hui -- il a été décidé de vous proposer ces amendements. Cela nous donne la possibilité de discuter du projet de loi dans son état original et de nous faire une idée des amendements qui dissiperaient nos craintes.
Le sénateur Nolin a déclaré, au sujet de la politique, qu'il n'y a pas de truc. Croyez-moi, il n'y a pas de truc ici non plus. Nous essayons simplement de faire avancer le dossier.
Le sénateur Jessiman: Par votre entremise, madame la présidente, je demande au sénateur s'il est clair, comme l'a déclaré le sénateur Kirby, que si personne de ce côté n'est disposé à proposer ou à appuyer ces amendements, ils ne le seront pas par quelqu'un d'autre? Si aucun membre de ce côté n'est prêt à proposer ou à appuyer les amendements, peu importe lesquels, le comité ne proposera ou n'appuiera aucun amendement?
Le sénateur Bryden: Je ne pense pas être en mesure de répondre à cette question.
Le sénateur Jessiman: C'est ce qu'il a déclaré en Chambre. C'est ce qu'a affirmé le leader du gouvernement, si je comprends bien, dans ses remarques. Ces amendements ne seraient proposés et appuyés que si nous insistions pour qu'ils soient adoptés. Je vous pose la question suivante ou je la pose aux autres par votre entremise: si nous, de ce côté, ne sommes pas disposés à proposer ou à appuyer aucun de ces amendements, ni d'autre amendement, pouvons-nous supposer que ces amendements ne seront pas proposés ni appuyés et que le projet de loi sera adopté tel que présenté? Pourrions-nous obtenir une réponse à cette question? Si vous n'essayez pas de cacher quelque chose, répondez-nous.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il dépose les amendements pour qu'on en discute, alors je suppose qu'il les proposera le moment venu.
Le sénateur Bryden: Je ne me souviens pas des mots exacts que vous avez cités et, comme vous le savez, je ne les accepte pas comme tels. Je répète ce que j'ai déjà dit, à savoir que le projet de loi est devant nous. Le gouvernement a toujours maintenu que le projet de loi est légal, constitutionnel et que le Parlement a le droit de l'adopter.
Tout au long de l'histoire de ce projet de loi, cependant, on a exprimé diverses préoccupations quant à certains aspects du projet de loi et on n'a ménagé aucun effort depuis deux ans pour tenter de dissiper ces craintes. Nous en avons ici la preuve.
Au fil du débat, il se pourrait bien que les membres d'en face décident que leurs préoccupations concernant la légalité et la constitutionnalité du projet de loi dans son état original sont disparues. Je voulais adopter la position qui consiste à tout mettre sur la table, puis à en discuter en comité. Puis, s'il faut des amendements, nous y verrons en temps et lieu. Qu'ils soient proposés par nous ou par les membres d'en face, ou peu importe la façon de procéder, croyez-moi, je n'ai pas réfléchi aux aspects techniques de la chose. Je pense simplement qu'en toute équité, il serait bon d'avoir devant nous non seulement le projet de loi dans son état original, mais aussi les solutions proposées aux difficultés qui ont été prévues. Si vous souhaitez, ou si nous le souhaitons nous-mêmes, demander aux témoins si ces amendements apaisent ces préoccupations, alors les amendements seraient à notre disposition.
La présidente: J'ai deux remarques, puis j'espère que nous pourrons entendre les témoins.
Premièrement, sénateur Jessiman, pour s'entendre clairement au sujet de votre argument, il n'est pas nécessaire que quelqu'un appuie une motion présentée à notre comité. Deuxièmement, la procédure que nous suivons ce matin pour discuter de certains amendements avec M. Desmarais et avec M. Baker est identique à celle que nous avons suivie le 13 décembre 1994. À ce moment-là, nos témoins étaient M. Desmarais et M. Pigeon, qui n'est plus au ministère, je crois. Nous procédons exactement comme nous l'avons fait à ce moment-là.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le sénateur Bryden dépose-t-il les amendements au nom des sénateurs libéraux et du gouvernement du Canada?
La présidente: Il les dépose en son nom personnel.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ces amendements sont-ils appuyés par le gouvernement? Étant donné que des fonctionnaires sont ici pour en discuter, je suppose que le gouvernement les appuie.
Le sénateur Bryden: Je ne saurais répondre à cette question.
Le sénateur Lynch-Staunton: Alors, puis-je demander qui les a préparés?
Le sénateur Nolin: Qui les a rédigés?
Le sénateur Lynch-Staunton: Il serait bon de connaître l'origine des amendements.
Le sénateur Bryden: Les amendements ont été préparés par le gouvernement, mais je ne saurais dire s'ils l'ont été seulement pour mon usage. Le but consiste à les déposer devant le comité.
Le sénateur Lynch-Staunton: Sénateur Bryden, j'ai håte d'entendre les témoins moi aussi. La forme et le contenu de ces amendements sont identiques à ceux que nous a présentés le ministre Rock, je ne me souviens plus quand. Pouvons-nous donc supposer qu'ils sont approuvés par le gouvernement du Canada, étant donné qu'ils ont été préparés par le gouvernement du Canada pour être présentés à notre comité? Ce sont des amendements du gouvernement, des amendements proposés, autrement dit.
Le sénateur Bryden: Comme vous l'avez indiqué, sénateur, le fait que beaucoup de ces amendements aient été préparés en fonction du projet de loi C-22 -- et il y a eu quelques changements et des modifications mineures pour répondre à d'autres préoccupations -- indique à notre comité que le gouvernement est disposé à les appuyer, si le comité exige que ces amendements soient apportés.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est en train de devenir une blague ridicule. En décembre 1994, nous avons reçu des amendements portant, dans le coin supérieur, le code «003-002.01a À L'USAGE DU PARLEMENT, Article 3, page 2». En juin 1996, nous recevons une feuille portant le code «003-002.01a À L'USAGE DU PARLEMENT, Article 3, page 2». C'est exactement la même chose. La première a été préparée et présentée au nom du gouvernement du Canada lorsque M. Desmarais et M. Pigeon sont venus nous voir. Aujourd'hui, M. Desmarais est venu avec un autre collègue, je suppose pour défendre le même amendement au nom du gouvernement du Canada.
Je voudrais établir le rôle de M. Desmarais et de son collègue dans la discussion sur ces amendements. Parlent-ils au nom du gouvernement, qui a préparé des amendements semblables pour que nous en discutions ici en décembre? Ou y jettent-ils un coup d'oeil rapide et se disent-ils que le sénateur Bryden les a apportés et qu'ils pourraient en discuter? Je veux savoir à quel point nous devons prendre ces amendements au sérieux.
Le sénateur Bryden: Ces amendements ont été préparés par le gouvernement du Canada à l'usage de notre comité. Nous pouvons les proposer au comité et ils seraient acceptables aux yeux du gouvernement.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ce sont des amendements du gouvernement. Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci. Je crois que nous sommes prêts à entendre M. Desmarais et M. Baker.
Le sénateur Beaudoin: Les amendements sont-ils déposés?
La présidente: Adoptons une motion officielle afin que tout soit clair.
Le sénateur Bryden a déposé les amendements qu'il a apportés au comité. Êtes-vous d'accord pour qu'ils soient déposés au comité, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Bryden: Je crois que ces amendements ont été remis à tous les membres du comité.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, mieux vaut tard que jamais, je suppose.
La présidente: J'invite maintenant M. Desmarais et M. Baker à commencer leur présentation.
M. John Desmarais, directeur général, Projets spéciaux, Coordination des opérations, ministère des Transports: Madame la présidente, j'ai déjà comparu devant votre comité au sujet du projet de loi C-22, ainsi qu'à l'enquête sur l'annulation des accords. Je n'ai pas préparé de déclaration officielle à présenter aux sénateurs ce matin.
Je rappelle quelle était et quelle est encore la position du gouvernement: ceux qui s'opposent au projet de loi et à l'annulation des accords ont droit uniquement au remboursement des frais déboursés, moins les sommes versées pour lobbyisme. Les amendements qui ont été déposés au comité, et que j'ai lus hier soir et ce matin, ne vont pas plus loin. La position du gouvernement n'a pas changé; c'est plutôt la forme du projet de loi qui change avec ces amendements.
Après ces brèves remarques, madame la présidente, je suis prêt à répondre aux questions des membres du comité.
Le sénateur Bryden: Madame la présidente, pouvez-vous demander à M. Desmarais de présenter l'autre témoin qui l'accompagne?
La présidente: L'autre témoin est Mike Baker, directeur, Questions ministérielles, Politiques et coordination, ministère des Transports.
Le sénateur Lynch-Staunton: Quelqu'un nous expliquera-t-il les amendements?
Le sénateur Nolin: Pouvons-nous passer en revue les amendements et nous faire expliquer pourquoi vous les avez acceptés?
Mon autre question est la suivante: où est M. Pigeon? Il ne travaille plus au ministère?
M. Desmarais: Il travaille au ministère de la Justice. Il a été affecté au ministère des Transports. Il y est encore. Je pense qu'il n'était pas disponible cette semaine. Il négocie la cession des aéroports aux autorités aéroportuaires locales. Je ne sais pas exactement ce qu'il fait cette semaine. Ces cessions sont aussi prioritaires pour le gouvernement, et c'est à cette tåche qu'il travaille.
La présidente: On m'a indiqué ce qui était arrivé à M. Pigeon. Je suis désolée de ne pas avoir transmis l'information aux membres du comité.
Le sénateur Nolin: Pouvons-nous passer les amendements en revue, l'un après l'autre?
M. Desmarais: Évidemment. Le premier amendement porte sur l'article 3 du projet de loi, qui se lit actuellement comme suit:
Il est déclaré que, par application de la présente loi, les accords ne sont pas entrés en vigueur et n'ont aucun effet juridique.
L'amendement proposé stipule:
Les accords n'ont aucun effet juridique après le 15 décembre 1993.
Vous vous souviendrez qu'en février 1995, nous étions devant les tribunaux. La cour a reconnu que les contrats ont été résiliés au 3 décembre. Par conséquent, ils avaient une existence juridique. On a reconnu la date où ils ont été annulés, si vous le voulez, par résiliation. Par conséquent, on reconnaît désormais ce fait dans le projet de loi, contrairement à l'ancien projet de loi qui affirmait que les contrats n'avaient jamais existé.
Le sénateur Nolin: Avant de passer à un autre amendement, en français nous employons le mot «résiliation». A-t-il le même sens que «repudiation» en anglais?
M. Desmarais: N'étant pas avocat, je ne saurais vous répondre, sénateur Nolin. Si je comprends bien, le gouvernement déclare qu'il ne reconnaît pas le document, l'accord et ne donne pas l'autorisation de le mettre en vigueur. C'est ce qu'on appelle «repudiation». Lorsque cette violation anticipée est reconnue par l'autre partie, le contrat prend fin légalement. C'est ainsi que je comprends les choses.
Le sénateur Nolin: Vous pensez qu'il y a une série de contrats ou d'«accords», tels que définis à l'article 2, et qu'à une certaine date ils devaient prendre fin, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Oui, monsieur, c'est ce que je comprends.
Le sénateur Beaudoin: L'article 3, qui pourrait être amendé, stipule:
Il est déclaré que, par application de la présente loi, les accords ne sont pas entrés en vigueur et n'ont aucun effet juridique.
Par suite de la décision du tribunal à Toronto, vous reconnaissez désormais que le contrat a existé et qu'il n'aura aucun effet juridique après le 15 décembre 1993; c'est-à-dire après la «résiliation». Je veux seulement que ce soit clair aux fins du compte rendu.
M. Desmarais: Je ne peux pas me prononcer sur la définition de «résiliation», parce que je ne comprends pas la terminologie juridique française.
Nous reconnaissons que ces contrats existaient jusqu'au moment de la violation anticipée. À partir de cette date, ils ont cessé d'avoir un effet juridique.
Le sénateur Beaudoin: Bien.
Le sénateur Nolin: Connaissez-vous la décision des tribunaux -- vous ne pouvez peut-être pas répondre sans consulter l'arrêt -- au sujet de la date où les contrats ont commencé à avoir un effet juridique?
M. Desmarais: Lorsqu'ils ont été signés, je suppose.
Le sénateur Nolin: Lorsque vous dites "repudiation", voulez-vous dire que les droits des parties ont commencé, ont vu le jour, à une certaine date et jusqu'à une autre, qu'ils ont existé durant une certaine période?
M. Desmarais: Oui, monsieur.
Le sénateur Nolin: Ces droits existent encore, même lorsqu'il y a rupture de contrat. Mais aucun nouveau droit n'a été créé après la fin, après la date précise où l'accord a pris fin, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Aucun droit ne découle du contrat, je dirais, sénateur.
Le sénateur Nolin: Aucun nouveau droit ne découle du contrat?
M. Desmarais: C'est exact. C'est un peu compliqué. Lorsqu'un contrat est annulé par violation anticipée ou qu'il y a rupture de contrat, si vous voulez, certains droits à des dommages-intérêts sont prévus en droit. Nous ne prétendons pas que ces droits légaux n'existent pas. Quand nous analyserons les autres amendements, nous verrons qu'il y a un droit d'intenter des poursuites pour obtenir des dommages-intérêts. Je ne dis pas que ces nouveaux droits ont été abrogés par ce nouvel amendement au contrat.
Le sénateur Bryden: Madame la présidente, à ce sujet et après avoir consulté les dossiers, je crois que les parties au contrat se sont entendues sur la date du 15 décembre comme date de résiliation du contrat.
M. Desmarais: La date du 15 décembre a été retenue parce que, lorsque l'enquête Nixon a commencé, nous avions reporté la date de la cession des installations ou des biens du 1er novembre au 15 décembre. C'est à cette date qu'ils devaient assumer la responsabilité des biens en vertu du contrat. C'est pour cette raison que cette date a été choisie. D'après la décision des tribunaux, la date est le 3 décembre.
Le sénateur Bryden: Vous avez déclaré -- et croyez-moi, vous n'avez pas besoin de lire cette tonne de documents -- que la date du 15 décembre, qui est un peu plus tardive, est acceptable aux deux parties?
M. Desmarais: Elle est acceptable pour le gouvernement.
Le sénateur Bryden: Et pour l'autre partie également?
M. Desmarais: Je n'ai pas parlé à l'autre partie au sujet de cet amendement, mais cela lui donne quelques jours de plus que ce que prévoient les tribunaux, alors je suppose que ce serait acceptable. Là encore, il vaudrait peut-être mieux leur demander à eux plutôt qu'à moi.
Le sénateur Lynch-Staunton: Maintenant que le gouvernement a signé un bail qui le lie légalement, d'après ce que je lis dans les journaux, avec l'administration aéroportuaire de Toronto au sujet de l'administration de l'aéroport Pearson, même si la clôture n'aura lieu qu'en décembre, c'est tout de même un accord qui lie les parties -- à quoi sert cette disposition?
M. Desmarais: Je ne suis pas certain de comprendre votre question, sénateur.
Le sénateur Lynch-Staunton: L'aéroport a été cédé à une autre autorité aéroportuaire. À quoi bon écrire sans cesse ce qui est évident et accepté par tout le monde?
Le sénateur Desmarais: Sénateur, vous vous souviendrez que, en vertu des accords qui existaient avec la société en commandite T1T2, on avait prévu la cession de tout l'aéroport à l'administration aéroportuaire de Toronto. Le propriétaire devenait effectivement l'administration aéroportuaire à une date ultérieure. C'était toujours possible. Simplement parce que nous avons cédé l'ensemble de l'aéroport -- nous n'avons pas cédé seulement les aérogares, autrement dit -- cela ne signifie pas que ce projet de loi n'est pas nécessaire.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je voulais seulement clarifier ce point. Il est intéressant de constater que vous faites allusion aux jugements des tribunaux qui, en réalité, ont provoqué ces amendements. Le ministère des Transports et le gouvernement reconnaissent que des jugements des tribunaux déclarent qu'il y a eu rupture de contrats.
M. Desmarais: Nous reconnaissons que les contrats ont existé, sénateur. Que cela ait été imposé par les tribunaux ou non, peu importe maintenant. C'est un fait qu'il faut accepter.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le gouvernement l'accepte maintenant, mais il ne l'acceptait pas en 1992.
M. Desmarais: En décembre 1994, non il ne l'acceptait pas.
Le sénateur Lynch-Staunton: Il ne le reconnaissait pas lorsque le sénateur Kirby a pris la parole au Sénat et déclaré qu'il préférerait que le projet de loi soit adopté dans sa forme intégrale, et lorsque le sénateur Bryden l'a répété il y a quelques minutes. On nous dit maintenant qu'à cause des jugements des tribunaux, nous n'avons pas beaucoup le choix; nous devons obéir aux tribunaux.
M. Desmarais: Nous obéissons aux tribunaux dans ce cas.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est exact. Les sénateurs Bryden et Kirby en ont pris bonne note.
M. Desmarais: C'est un choix, sénateur. On n'est pas obligé de respecter cette décision. Cette décision stipule simplement que les contrats ont pris fin le 3 décembre. Le gouvernement pourrait décider que les contrats n'ont jamais eu d'effet juridique. Si je comprends bien, ce serait une décision constitutionnelle.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui. Je crois que c'est ce qu'on vous a demandé de nous dire. Comment pouvez-vous justifier qu'on accepte un jugement des tribunaux d'une part, et qu'on essaie de l'annuler de l'autre?
Le gouvernement n'a pas interjeté appel du jugement de la Cour d'appel qui maintenait la décision du tribunal de première instance; il n'a pas demandé à la Cour suprême l'autorisation de le faire. Il semble qu'il ait renoncé à cette dernière possibilité de faire renverser la décision et donc accepté que la cause soit entendue.
M. Desmarais: Le gouvernement a accepté le fait que, si le bail existait, il l'avait résilié.
Le sénateur Lynch-Staunton: À l'époque, ils ont même tenté de faire déclarer cette décision non confirmée. Je suis désolé de devoir vous poser ces questions, mais elles sont essentielles. Je suis désolé, parce que, vous l'admettez vous-même, vous n'avez pas la formation juridique nécessaire pour discuter des aspects très techniques de ce dossier.
Voilà pourquoi, malgré mes questions et celles des autres, je crains que vous ne puissiez y répondre et votre collègue non plus. Alors, je ne comprends pas pourquoi nous n'avons pas invité quelqu'un du ministère de la Justice pour nous aider à comprendre les aspects juridiques.
M. Desmarais: Je pense qu'il y aura un témoin du ministère de la Justice pour discuter des aspects juridiques. On m'a invité pour discuter des aspects de ces amendements liés aux politiques. Ils sont ensuite exprimés en termes juridiques.
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous essaierons de limiter la portée de nos questions, même si la présidente nous a déclaré au début que le seul sujet de discussion ici était l'aspect juridique et constitutionnel, mais vous êtes disposé à discuter des politiques?
M. Desmarais: Je suis prêt à en discuter.
Le sénateur Lynch-Staunton: Alice au pays des merveilles et moi-même avons quelque chose en commun: cela devient de plus en plus curieux.
Le sénateur Nolin: La raison de politique est la décision des tribunaux, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Essentiellement, nous affirmons que la décision des tribunaux nous permet d'apporter ce changement.
Le sénateur Jessiman: J'aimerais passer aux amendements que vous proposez à l'article 7.
Le sénateur Lynch-Staunton: Procédons dans l'ordre, s'il vous plaît.
La présidente: Sommes-nous prêts à passer à l'article 4?
M. Desmarais: Dans l'article 4, il y a un changement accessoire, qui découle de l'article 3. On a changé l'article 4 pour les mêmes raisons que pour l'article 3. L'ancien article 4 stipulait que les accords n'avaient jamais existé. Le nouvel article 4 prévoit qu'ils n'ont aucun effet juridique après le 15 décembre. C'est simplement un changement accessoire.
Le sénateur Nolin: Je suppose que c'est la même chose pour l'article 5?
M. Desmarais: Je le croirais. Je suis en train de lire l'ancien article 5. Oui, c'est la même chose pour l'article 5, on donne la date du 15 décembre plutôt que d'affirmer que les droits n'ont jamais existé.
La présidente: Nous en venons maintenant à l'article 7.
Le sénateur Jessiman: Proposez-vous qu'on modifie cet article en ajoutant «avant ou après l'entrée en vigueur de la présente loi»? Ces mots n'y étaient pas avant. Je ne vous pose pas une question de droit, mais n'est-il pas vrai que, selon le libellé actuel, le procès actuel ne seraient pas touché, puisque la décision n'a pas encore été rendue? C'est simplement une question de date. Si vous n'ajoutez pas «avant ou après l'entrée en vigueur de la présente loi», cet article 7 ne couvre pas les poursuites actuelles, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Je ne peux pas répondre à cette question, sénateur. Je ne m'y connais pas assez en droit.
Le sénateur Jessiman: N'est-ce pas ce que vous avez compris, d'après ce qu'on vous a dit?
M. Desmarais: Je crois comprendre que ce changement a été apporté parce que nous avons éliminé la date du 30 juin. L'ancien projet de loi fixait une date précise; il stipulait qu'aucune réclamation ne pouvait être faite après le 30 juin 1993. Je dois trouver cet article -- je pense que la date du 30 juin se trouvait dans l'un des anciens amendements proposés, plutôt que dans le projet de loi proprement dit.
Le sénateur Jessiman: Je comprends cela, mais ces mots ne figurent pas dans le libellé actuel du projet de loi. Le gouvernement propose que nous ajoutions «avant ou après l'entrée en vigueur du présent projet de loi». Je ne vous demande pas de vous prendre pour un avocat et de m'expliquer le sens de ces mots. Je me demande si le gouvernement vous a expliqué pourquoi ces mots sont nécessaires. Je crois que le gouvernement a besoin de cet amendement parce qu'un jugement n'a pas encore été rendu et que, si ces mots ne sont pas ajoutés, l'article ne s'appliquera pas.
M. Desmarais: Sénateur, si je reviens à l'article 7 du projet de loi dans son état original, toute procédure judiciaire était interdite.
Le sénateur Jessiman: Peut-être, mais il faut que cela s'applique aux questions futures. On ne lit pas «avant ou après l'entrée en vigueur de la présente loi».
M. Desmarais: Je crois que l'article stipule:
7. Aucune action ou autre procédure, au titre notamment de la restitution ou des dommages-intérêts...
ne peut être intentée...
et je crois que c'est au coeur du problème, en ce sens que le mot «lies» en anglais désigne selon moi tout ce qui a commencé auparavant.
Le sénateur Jessiman: Que ferez-vous maintenant? Il y a un jugement. Supposons que des dommages-intérêts ont été accordés et payés. Faut-il les restituer?
M. Desmarais: En vertu de ce projet de loi, non, si des dommages-intérêts avaient été accordés, ils ne devraient pas être restitués.
Le sénateur Jessiman: Il y a un jugement. Affirmez-vous que le jugement est touché par cet article? On n'intente pas des poursuites.
M. Desmarais: Le jugement rendu en février 1995 n'est pas touché par cette loi. Mais les dommages-intérêts qui seront accordés pourraient bien l'être.
Le sénateur Jessiman: Oui, à moins d'ajouter dans le projet de loi «avant ou après l'entrée en vigueur de la présente loi».
M. Desmarais: Je ne suis pas certain de comprendre votre question, sénateur.
Le sénateur Jessiman: Je dis que si vous n'ajoutez pas ces mots dans l'article, le jugement parle par lui-même et s'applique. Mais si vous ajoutez l'amendement, il pourrait y avoir des conséquences.
Le sénateur Bryden: L'article 8 original se lit comme suit:
8. Les actions ou autres procédures visées à l'article 7 et intentées avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont, par application de la présente loi, rejetées ou annulées.
Je ne veux pas présenter des arguments juridiques, mais je ne pense pas que cela change ce qui se passe avant ou après l'entrée en vigueur de la loi. Ce n'est pas nouveau.
Le sénateur Jessiman: Il n'est pas question de «jugement», mais plutôt des «actions ou autres procédures». Ce n'est pas un jugement.
Le sénateur Beaudoin: Sur la question du fond, nous devons tenir compte du fait que le premier projet de loi, le projet de loi C-22, déclarait que l'accord n'avait jamais existé et qu'il n'avait aucun effet juridique. L'amendement proposé stipule qu'il a existé mais qu'il n'a pas d'effet juridique après décembre 1993. C'est une négation complète. C'est un amendement très fort. Nous avons aussi considéré l'article 4.
Ce qui est clair maintenant c'est que les effets juridiques existent jusqu'en décembre 1993. Il ne fait aucun doute qu'il y a eu un accord et que tous les effets existent. Les tribunaux devront en tenir compte. Mais, après décembre 1993, il n'y aura pas d'effet juridique. L'article 3 va en ce sens, tout comme l'article 4. Nous devons en tenir compte.
Ce que feront les tribunaux si le projet de loi est adopté avec ces amendements, c'est une autre histoire. À eux de décider. Nous devons toutefois reconnaître qu'il y a eu un accord et que cet accord a des effets jusqu'en décembre 1993. Voilà ce que disent ces amendements. À mon avis, c'est très clair. Je veux en être certain. C'est ce que je comprends, monsieur Desmarais.
M. Desmarais: Essentiellement, je dis que l'accord a existé jusqu'au 15 décembre, oui.
La présidente: Sénateur Nolin, voulez-vous passer au prochain amendement?
Le sénateur Nolin: Je voudrais parler de la question de l'immunité prévue à l'article 7 proposé.
Lorsque nous avons discuté du projet de loi C-22 et qu'un amendement semblable a été proposé, vous avez répondu, à propos de l'immunité accordée normalement à un ministre et à des fonctionnaires du gouvernement et qu'on accorde ici à des gens qui ne font pas partie du gouvernement ou à des consultants, que c'est rare, mais que cela arrive.
Je vais vous poser la même question: Pourquoi profiterions-nous de cette situation rare pour accorder une immunité à des gens qui ne sont pas fonctionnaires ou à des conseillers externes?
M. Desmarais: Comme je l'ai déclaré à ce moment-là, l'immunité a été accordée à tous les fonctionnaires et conseillers qui avaient aidé le gouvernement dans cette annulation, si vous voulez, parce que le gouvernement reconnaissait que lui seul était responsable de l'annulation. Les conseillers n'étaient pas responsables de l'annulation. Aucun acte des conseillers n'était à l'origine de l'annulation. C'est le gouvernement qui a décidé d'annuler le contrat.
Il y avait aussi des conseillers qui ont souvent fait affaire individuellement avec les promoteurs. Lorsque ces conseillers avaient pu donner à l'autre partie des conseils sur lesquels celle-ci se fiait ou ne se fiait pas, selon la tournure des discussions, nous leur avons accordé une immunité à eux aussi. Le marché a été conclu entre le gouvernement et l'autre partie, pas entre les conseillers et l'autre partie. Peu importe ce qui a été dit durant les négociations par les conseiller ou par n'importe qui, il s'agissait désormais de la responsabilité du gouvernement et non des conseillers.
Le sénateur Nolin: Peu importent les actes des conseillers externes?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Nolin: Sans exception?
M. Desmarais: Sans exception.
Le sénateur Nolin: Dans la mesure où il est question des accords, ils peuvent dire ce qu'ils veulent?
M. Desmarais: Dans la mesure où ils respectent le mandat de leur contrat.
Le sénateur Nolin: Prenons M. Nixon, par exemple. M. Nixon n'avait pas de mandat écrit.
M. Desmarais: Je crois qu'il était très large, mais c'était un mandat.
Le sénateur Nolin: Dans son rapport, il fait allusion à un mandat qu'il aurait reçu du premier ministre.
M. Desmarais: J'ai vu un mandat.
Le sénateur Nolin: Ah bon, vous avez vu un mandat?
M. Desmarais: J'ai vu un mandat d'une ligne dans son contrat -- je crois que c'était dans son contrat -- qui disait qu'il devait examiner toutes les questions relatives à l'annulation des accords de l'aéroport Pearson et faire rapport à ce sujet.
Le sénateur Nolin: Pouvons-nous voir ce document, s'il vous plaît?
M. Desmarais: Je croyais qu'on vous l'avait remis. Je vais essayer de le trouver.
Le sénateur MacDonald: Nous l'avons.
Le sénateur Nolin: Cela veut dire que n'importe quel conseiller externe, dans la mesure où il travaille...
M. Desmarais: ... dans le cadre du mandat prévu au contrat, est protégé par cet article.
Le sénateur Nolin: Si nous prenons l'exemple de M. Nixon et vous croyons sur parole, c'est très large. Il aurait pu dire n'importe quoi, en privé ou en public, à n'importe qui et influencé un tiers tout en étant protégé dans la mesure où ses propos se rapportaient à l'accord.
M. Desmarais: Pour reprendre votre exemple, dans la mesure où M. Nixon respectait le mandat que le gouvernement lui avait confié, je pense qu'il était protégé. Je vous suggère de poser la question aux avocats. Je ne peux pas affirmer légalement qu'il est protégé contre tout, mais si j'ai bien compris, il serait protégé tant qu'il travaille dans le cadre du mandat stipulé dans son contrat.
Le sénateur Nolin: À mon avis, c'est une politique très large du gouvernement ou de votre ministère d'accorder cette immunité. Le ministre jouit déjà de cette immunité. Soit dit en passant, nous n'avons pas besoin de l'article 7 pour que vous jouissiez de cette immunité, ni vous ni le ministre, parce que c'est déjà le cas. Mais accorder la même immunité à un conseiller externe, c'est une politique très large, une nouvelle politique de votre ministère, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Ce n'est pas particulièrement nouveau, mais c'est une politique que nous appliquons très rarement. Bien souvent, c'est prévu dans le contrat.
M. Mike Baker, directeur, Questions ministérielles, ministère des Transports: J'ajoute à ce qu'affirme M. Desmarais que c'est un aspect normal de presque tous les contrats. Ce n'est pas une nouvelle politique, en soi.
M. Desmarais: Il y a plusieurs contrats avec plusieurs ministères. Vous conviendrez avec moi que le contrat avec M. Nixon a été conclu par le Bureau du Conseil privé et non par le ministère des Transports. C'est bien connu. Je crois que le sénateur MacDonald peut le confirmer.
Ils n'avaient peut-être pas droit à l'immunité que nous accordons normalement dans un contrat ministériel classique, alors nous leur accordons cette immunité.
Le sénateur Nolin: Mais habituellement, dans ces contrats, le mandat est clair?
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Nolin: Il est limité ou étroit. Il se limite à des actes précis du conseiller, de sorte qu'en agissant ainsi, on jouit de l'immunité, n'est-ce pas? C'est l'intention, habituellement.
M. Desmarais: C'est l'intention.
Le sénateur Nolin: Je reviens à M. Nixon. Le domaine de travail n'est pas très limité. Le mandat était très vaste. Voilà pourquoi je dis que c'est une politique très inhabituelle, une nouvelle politique de votre gouvernement d'accorder ce genre d'immunité pour un mandat si vaste. Vous êtes venu parler de la politique du gouvernement, voilà pourquoi je vous ai demandé si c'est une nouvelle politique.
M. Desmarais: Ce n'est pas une nouvelle politique. Que l'immunité ait été accordée à M. Nixon, vous pouvez affirmer que c'est une nouvelle politique si vous le voulez. Mais nous ne le voyons pas de cette façon. Nous pensons qu'il s'agit simplement de l'application normale de notre politique existante envers un entrepreneur qui travaillait de bonne foi et qui rendait des comptes au gouvernement.
Le sénateur Beaudoin: Au sujet de cette immunité juridique, il y a habituellement trois catégories: le ministre, le préposé ou le mandataire.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Beaudoin: Vous ajoutez maintenant une autre catégorie très vague et qui comprend à peu près n'importe qui. C'est une question de droit que nous soulèverons jeudi, parce qu'une disposition d'immunité doit être rédigée très clairement.
Est-ce la première fois que vous ajoutez une telle disposition à un projet de loi?
M. Desmarais: C'est la première fois, à ma connaissance, sénateur. Je ne suis pas historien des lois qui ont été adoptées au Parlement, mais c'est la première fois que je vois qu'on s'en sert et c'est la première fois que moi, je m'en sers.
Le sénateur Beaudoin: Nous reviendrons sur cette question jeudi et en discuterons plus à fond.
Le sénateur MacDonald: Cela ne nous sera d'aucune utilité.
La présidente: Sénateur Nolin, avez-vous fini de poser des questions sur l'article 7 et pouvons-nous passer à l'article 8?
Le sénateur Nolin: Quelle politique sous-tend l'article 8 proposé? Que devrions-nous savoir à ce sujet?
M. Desmarais: Je pense que la politique découle du premier amendement. Nous avons reconnu qu'un accord a existé. Nous reconnaissons que les tribunaux ont un certain pouvoir qui leur permet de déterminer des dommages-intérêts. Nous reconnaissons aussi que nous ne pouvons pas demander qu'un montant précis soit réclamé, à cause notamment des dates.
Nous disons que nous reconnaissons que cette question sera portée devant les tribunaux pour qu'ils déterminent des dommages-intérêts. On peut intenter des poursuites et demander une indemnité uniquement pour les aspects qui touchent directement aux aérogares, aux aérogares 1 et 2, ou aux accords, si vous voulez. Ce sont les deux seuls domaines où l'on peut faire une réclamation recouvrable en droit, c'est évident, et c'est la limite.
Vous vous souviendrez que l'article 9 du projet de loi non amendé stipule que personne ne peut obtenir d'indemnité, un point c'est tout.
Le sénateur Nolin: Dans le paragraphe 8(1) proposé, vous avez laissé tomber deux amendements que vous aviez proposés par le passé.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Nolin: Pourquoi?
M. Desmarais: Cette histoire dure depuis un certain temps. Les honoraires d'avocats commencent à s'accumuler pour bien des gens. On demande habituellement à quelqu'un de fixer un montant précis rétroactivement. Quand on intente des poursuites, on part de la date de l'audience ou du jugement, selon le cas, pour déterminer les dommages-intérêts et donc les coûts. Il est donc impossible de demander un montant précis. On peut avoir une idée générale, mais jamais un montant précis. Cela élimine la possibilité d'un montant précis, si vous voulez.
Le sénateur Nolin: Si je me souviens bien, c'était l'un de vos arguments la dernière fois.
M. Desmarais: C'est bien possible.
Le sénateur Nolin: Nous voulions savoir pourquoi on demanderait un montant précis pour quelque chose d'inconnu. Que faut-il penser de l'alinéa d)?
M. Desmarais: Je me souviens des discussions au sujet du 30 juin. J'ai déclaré que l'alinéa d) découlait au départ des discussions entre M. Wright et l'autre partie, au cours desquelles il leur avait donné jusqu'au 30 juin pour présenter leurs réclamations au gouvernement, s'ils voulaient qu'elles soient examinées en vue d'un règlement par le ministre en vertu de l'ancienne loi.
Lorsque le seul mode de paiement disponible est un versement par le ministre, il n'est pas nécessaire de donner une date précise. Les tribunaux détermineront les dates. Par conséquent, «au plus tard le 30 juin» ne veut rien dire, si vous voulez. Si les poursuites sont intentées en 1997, il y a des honoraires d'avocat du 30 juin jusqu'en 1997, qu'on devrait pouvoir réclamer, en théorie. Il s'agit de ce genre de coûts.
Là encore, la date du 30 juin est liée à l'idée d'un montant précis et au fait que le ministre aurait dû verser un certain paiement compensatoire en application de l'ancienne loi. Lorsque ces dispositions disparaissent, l'article sur le 30 juin n'est plus nécessaire.
Le sénateur Beaudoin: J'ai une question générale à propos de l'article 8. Nous pouvons toujours résilier un contrat si nous sommes prêts à verser une indemnité -- dans un certain cadre, évidemment, mais c'est la loi. Dans ce cas-ci, il y a une clause d'exclusivité. Des dommages généraux sont acceptés en principe, mais il pourrait y avoir de nombreuses exceptions. Nous voulons en savoir un peu plus sur les raisons pour lesquelles certains domaines sont exclus.
Par exemple, des dommages exemplaires ne sont pas accordés très souvent. Je suis un peu surpris de voir qu'ils sont exclus, mais il doit y avoir une raison. Je pense que vous êtes ici pour répondre à ces questions.
Pourquoi avez-vous exclu certains aspects au lieu de vous fier aux tribunaux? Les tribunaux existent dans notre système judiciaire pour accorder des dommages-intérêts dans certaines circonstances, alors quelle est la logique derrière tout cela?
Le sénateur Nolin: C'est une question de politique.
Le sénateur Beaudoin: C'est vraiment une question de politique.
M. Desmarais: Lorsque le gouvernement a annulé ce marché le 3 décembre 1993, il a indiqué qu'il était disposé à verser une certaine forme d'indemnité aux personnes touchées par l'annulation. Il a aussi indiqué que, parce qu'ils n'avaient pas pris possession des biens et parce qu'ils n'avaient pas dépensé beaucoup d'argent pour remettre les biens en état, l'indemnité se limiterait aux frais déboursés, moins les honoraires des lobbyistes. En ce qui concerne les sommes versées pour lobbyisme, vous devrez interroger le gouvernement. Je ne suis pas au courant de cette information. L'indemnité se limite donc aux frais déboursés parce que nous allons rembourser ce qui a été dépensé.
Dans le cours normal d'un appel d'offres, lorsqu'on annule l'appel avant de signer un contrat, on peut convenir de payer les coûts jusqu'à ce moment-là, mais pas après.
Voilà la genèse de ce raisonnement, à savoir que nous allons rembourser les coûts jusqu'à la date de l'annulation et toutes les indemnités de départ des employés, par exemple. Les frais déboursés seront remboursés, mais c'est tout. C'est cette politique que le gouvernement voulait appliquer.
Le sénateur Beaudoin: Je comprends pourquoi vous indiquez une date, mais pourquoi exclure certains domaines?
M. Desmarais: Comme les profits non réalisés?
Le sénateur Beaudoin: Comme les alinéas a), b), c), d), e), et cetera.
M. Desmarais: Passons en revue les domaines qui ont été exclus. Nous répondrons ensuite à votre question directement. Nous avons stipulé les restrictions. On peut intenter des poursuites en dommages-intérêts contre le gouvernement. Nous l'avons accepté. Nous en venons ensuite au paragraphe 8(4) des amendements, qui stipule les domaines pour lesquels nous n'accorderons aucune indemnité, notamment les profits non réalisés.
Le sénateur Nolin: Le paragraphe 8(2)?
M. Desmarais: Non, le paragraphe 8(4) proposé, dans mon ébauche. Je lis l'ébauche qui a été rayée.
Le sénateur Nolin: Vous parlez des amendements de mai 1995 et de décembre 1995?
Le sénateur Beaudoin: Nous n'avons pas le même document. Nous serons dans le pétrin.
M. Desmarais: J'espère avoir le même document. Je n'en suis pas certain. Je devrais peut-être jeter un coup d'oeil au vôtre.
Le sénateur Jessiman: Il porte le numéro 008-003.
M. Desmarais: Je n'avais pas de copie de ce document.
Dans l'alinéa 8(2)a), on exclut les profits. C'est une décision de politique, comme je l'ai expliqué. L'alinéa 8(2)b) exclut les sommes versées aux lobbyistes, même s'il s'agit de frais déboursés. L'alinéa 8(2)c) porte sur des investissements dans une société ou personne morale contrôlée par un ou plusieurs des associés. Cette disposition veut dire qu'il y a probablement eu de nombreuses transactions entre les associés de diverses filiales qui ont obtenu des contrats de sous-traitance. Ces questions devraient être réglées entre les associés et n'ont rien à voir avec le gouvernement. Par conséquent, nous n'accorderons aucune indemnité pour ce genre d'interaction au sein de la société en commandite.
Le sénateur Nolin: J'ai une question à vous poser au sujet de l'alinéa c). Pourquoi? Je me rappelle vous avoir posé la même question il y a deux ans. Je ne suis toujours pas convaincu par la réponse. Pourquoi? Le gouvernement, la Reine, fait croire quelque chose à des gens, puis, un jour, la Reine a dit: «C'est fini. Cela suffit. On n'en parle plus. Et, j'oubliais, je ne vous rembourserai pas pour les dommages occasionnés par votre interprétation de ma décision».
M. Desmarais: Je ne vous suis pas.
Le sénateur Nolin: Est-ce la politique de votre gouvernement de penser que c'est juste? Votre gouvernement pense-t-il que c'est juste?
M. Desmarais: Je ne comprends pas votre question.
Le sénateur Nolin: La Reine, le gouvernement de notre pays, prend une décision et accorde un contrat.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Nolin: Cela ne se fait pas du jour au lendemain. C'est un long processus. Il se termine quelque part en 1993. Avant d'en arriver là, des personnes et des sociétés ont décidé d'investir.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Nolin: C'est à cela que vous faites allusion dans l'alinéa c).
M. Desmarais: Pas directement, sénateur. Je ne dis pas que ces personnes ont décidé d'investir dans la société en commandite T1T2.
Le sénateur Nolin: Je ne parle pas précisément de T1T2. Je dis «investir».
M. Desmarais: Ils ont investi dans la société en commandite T1T2. Ils ont mis de côté certains avoirs propres, qui restent encore entiers, ou qui le deviendront par l'indemnité, plus d'autres frais qui ont peut-être été payés, mais pas à même ces avoirs propres. Ils seront remboursés.
Il est question ici de filiales. Il peut y avoir divers types de filiales. Un associé peut décider d'investir dans une filiale parce qu'il s'attend que T1T2 fera quelque chose pour lui. Le gouvernement n'a pas provoqué cet investissement, le contrat non plus. C'est une décision personnelle d'investir.
Le sénateur Nolin: Ont-ils intenté des poursuites judiciaires?
M. Desmarais: Jusqu'ici, non.
Le sénateur MacDonald: Est-il question des réclamations de tiers?
M. Desmarais: Essentiellement, des réclamations de tiers qui découlent de cette affaire et qui comportent un investissement dans divers investissements des associés, les réclamations de tiers.
Le sénateur Jessiman: Par conséquent, Paxport pourrait être tenue responsable envers ces tiers, mais ne pourrait pas être indemnisée par le gouvernement?
M. Desmarais: Je ne suis pas certain que Paxport soit un bon exemple. Prenons, par exemple, une société appelée Pearson Airport Management. Elle a été établie pour administrer le contrat. Elle n'a pas été établie par l'ensemble de la société en commandite, mais par quelques associés. Elle n'a pas de capital-actions, si vous voulez, sauf les quelques capitaux nécessaires pour s'incorporer. Les actions de cette société ont été échangées entre les associés à un certain montant. Ce genre de situation est exclu.
Le sénateur Jessiman: Vous voulez dire que quelqu'un a payé quelque chose mais ne sera pas remboursé?
M. Desmarais: Sauf par l'associé à qui l'argent a été payé.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ce que je trouve le plus inadmissible à propos de ce projet de loi très inadmissible, c'est que maintenant que des poursuites ont été intentées et que les tribunaux devront se prononcer sur les dommages-intérêts, l'une des parties -- la défenderesse, dans ce cas-ci -- a décidé de changer les règles du jeu. Si ce projet de loi est adopté, on dira au juge d'oublier ce qu'il a entendu, de ne pas tenir compte de certains faits, d'en rejeter d'autres. Autrement dit, la cause est entendue en fonction de certaines règles concernant des réclamations de ce genre, mais le gouvernement intervient, en particulier avec cette disposition.
Ce qui est inadmissible selon moi, ce n'est pas seulement le fait que le gouvernement intervient, mais aussi qu'il est partie dans cette cause. À titre de défenderesse, il se sert de son pouvoir parlementaire pour demander au Parlement d'adopter une loi qui obligerait le juge à ne pas tenir compte de nombreux faits déjà entendus et de suivre ces lignes directrices plus contraignantes pour prendre une décision. Comment le gouvernement du Canada peut-il justifier une telle recommandation?
M. Desmarais: Là encore, je ne comprends pas très bien le sens de la question. Vous affirmez que nous changeons les règles en cours de route. Ces règles ont été établies avant que les poursuites soient intentées.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, la recommandation a été faite. Ce ne sont pas des règles. C'est une proposition qui n'a pas été approuvée.
M. Desmarais: Cette proposition a été faite avant que les poursuites soient intentées.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est exact. C'était déjà une mauvaise idée à ce moment-là, mais c'est pire maintenant que des poursuites ont été intentées.
M. Desmarais: Mais la position du gouvernement n'a pas changé depuis le début. La position du gouvernement a toujours été les frais déboursés moins les sommes versées aux lobbyistes et pas de profits non réalisés. Cette position n'a pas changé entre le projet de loi précédent et celui-ci. Vous parlez du mécanisme d'application, c'est cela qui change.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non, ce n'est pas si simple. Je sais que la position n'a pas changé. Mais lorsqu'elle a été énoncée pour la première fois, il n'y avait pas de poursuites.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Lynch-Staunton: On a argué que le gouvernement pouvait agir ainsi, c'est-à-dire qu'il pouvait établir les règles concernant la façon dont la cause serait entendue.
Mais depuis, le procès a commencé. Il est en cours depuis la mi-février, près de quatre mois. Maintenant, le gouvernement dit qu'il veut changer les règles de toutes façons. La partie a commencé et l'un des joueurs dit qu'il faut changer les règles, parce qu'il ne croit pas pouvoir gagner si la partie ne se joue pas selon ses règles.
M. Desmarais: Je vous répète que les règles selon lesquelles le gouvernement voulait jouer ont été établies avant que les poursuites soient intentées.
Le sénateur Lynch-Staunton: Cela n'a rien à voir. L'important, c'est que des poursuites ont été intentées. Comment le gouvernement peut-il justifier qu'il change les règles lorsque des poursuites ont été intentées?
Nous nous sommes opposés auparavant, mais il y avait des arguments très convaincants pour démontrer que c'était possible, tout comme on nous a dit que le Parlement peut renverser un verdict qui ne lui plaît pas. On nous a dit également, avant que la cause soit entendue, que le gouvernement pouvait établir un plafond de 1 $; tout cela avant que les poursuites soient intentées.
Mais comment justifie-t-on une ingérence dans un procès lorsqu'il a commencé?
M. Desmarais: Je ne peux pas répondre à cette question. Je vous suggère de la poser aux fonctionnaires de la Justice. Du point de vue de mon ministère, je ne considère pas cela comme une ingérence dans le procès.
Le sénateur Nolin: C'est bien plus une question de politique. Ce n'est pas une position de droit.
M. Desmarais: Je pense qu'on m'a posé une question de droit.
Le sénateur Nolin: C'est beaucoup plus que cela.
M. Desmarais: La position du gouvernement est qu'il ne s'ingère pas dans l'affaire qui est devant les tribunaux actuellement. Personne n'entrave les droits des plaignants de présenter leurs arguments. Personne n'entrave le travail du juge. Personne ne dit au juge quelle décision prendre au sujet des dommages-intérêts. Le gouvernement affirme que lorsque le tribunal accordera des dommages-intérêts, il ne pourra pas en accorder à l'égard des profits non réalisés ni des sommes versées pour lobbyisme. C'est tout. Ce n'est pas s'ingérer dans le procès, en ce qui me concerne. Cette position n'a pas changé depuis le 3 décembre 1993.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est une ingérence dans le procès, parce que les tribunaux entendent actuellement une cause portant sur des profits non réalisés, je suppose, et je suppose qu'il entend une cause portant sur des sommes versées pour lobbyisme. Si le projet de loi est adopté, les avocats du gouvernement s'empresseront de dire au juge qu'il ne peut plus entendre la cause parce que, s'il le fait, il ne pourra pas accorder d'indemnité pour les profits non réalisés et les sommes versées pour lobbyisme. Le juge répondra qu'on aurait dû l'avertir plus tôt.
C'est une ingérence dans le processus judiciaire. C'est conforme à la politique du gouvernement, mais l'erreur est aggravée du fait que, si le projet de loi est adopté, on dira au juge, en réalité, que les règles ont changé, que ce n'est pas la peine d'entendre les arguments concernant les réclamations prévues aux alinéas 8.(2)a), b), c), d) et e), parce que le gouvernement a décidé de ne pas accorder d'indemnité.
Le juge, bien naturellement je suppose, demandera: «Comment pouvez-vous nous faire cela? Nous avons commencé en respectant certaines règles fondées sur des principes et des traditions quant à la façon de régler les réclamations et, au beau milieu de notre travail, vous venez nous dire que nous ne pouvons pas continuer ainsi.»
Si ce n'est pas de l'ingérence, je me demande ce que c'est. J'aimerais que M. Desmarais réponde à cette question.
Le sénateur Bryden: Il a déjà répondu. Il a déclaré très clairement que, selon lui, ce n'est pas une ingérence dans l'exercice de la justice. Vous pensez le contraire. Très bien, mais le témoin a répondu à la question.
Le sénateur Lynch-Staunton: J'ai posé une question au témoin, madame la présidente.
La présidente: Oui, sénateur Bryden, le sénateur Lynch-Staunton a posé une question.
Le sénateur Lynch-Staunton: Votre définition de l'ingérence est peut-être différente de la mienne. Mais si ce que j'ai déclaré est vrai et que l'adoption du projet de loi modifierait l'évaluation des dommages-intérêts faite par les tribunaux, alors c'est de l'ingérence, n'est-ce pas?
M. Desmarais: Je soutiens, sénateur, que les plaignants ont intenté des poursuites pour dommages-intérêts. Ils ne l'ont pas fait pour les profits non réalisés, ils ont intenté des poursuites pour dommages-intérêts. Le projet de loi n'empêche pas le juge d'accorder des dommages-intérêts. Il dit que certains types d'indemnités ne peuvent être accordés, mais cela ne signifie pas que le tribunal ne peut pas accorder de dommages-intérêts. Il définit simplement les types d'indemnités que le gouvernement est prêt à payer, en droit. Ce n'est pas une ingérence dans le processus.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dans les accords que Transports Canada signe avec des parties du secteur privé et pour lesquels l'annulation est interdite, prévoit-on maintenant qu'en cas d'annulation, il est impossible de demander une indemnité pour les sommes versées pour lobbyisme et les profits non réalisés?
M. Desmarais: C'est une question très difficile à répondre. Les clauses interdisant l'annulation se rapportent à des baux immobiliers pour lesquels, normalement, le gouvernement ne prévoit pas d'annulation. Ici, c'est une question de temps. Si on a à exercer des activités à un aéroport et que, pour une raison ou une autre, le gouvernement décide d'annuler l'accord, les catégories normales de dommages-intérêts s'appliquent. Il y a une entreprise qui fonctionne.
Dans ce cas-ci, c'est une question de temps. Ces gens n'ont jamais pris possession des installations; ils n'ont jamais commencé à exploiter cette entreprise. Par conséquent, le gouvernement affirme qu'ils ne devraient pas avoir droit à des profits futurs parce qu'ils n'ont jamais vraiment été en affaires. Nous ne savons pas si l'entreprise aurait été viable.
En ce qui concerne le lobbyisme, je crois que le gouvernement a écouté M. Nixon, qui pensait qu'il y en avait trop. C'est une opinion exprimée par M. Nixon. Je ne saurais dire si le gouvernement l'a prise au sérieux. Nous avons reçu instruction de ne pas rembourser les sommes versées pour lobbyisme.
Le sénateur Lynch-Staunton: Étant donné que le gouvernement semble en avoir contre les lobbyistes et certainement contre leurs honoraires, est-il entendu dans les accords que signe Transports Canada ou tout autre ministère et qui interdisent l'annulation, que lorsque des lobbyistes entrent en jeu et qu'on réclame des dommages-intérêts, le plaignant convient de ne pas demander le remboursement des sommes versées pour lobbyisme?
M. Desmarais: Je ne crois pas que ce soit entendu.
Le sénateur Lynch-Staunton: Pourquoi pensez-vous qu'il y a une exception cette fois?
M. Desmarais: Comme je l'ai expliqué, le gouvernement a donné instruction aux bureaucrates d'inclure une disposition excluant les sommes versées pour lobbyisme. Le gouvernement a tenu compte de nombreux facteurs en plus des conseils de M. Nixon lorsqu'il a pris ces décisions, mais M. Nixon a indiqué que le lobbying était peut-être exagéré dans ce cas-ci.
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous avez suivi les audiences sur l'aéroport Pearson d'aussi près que n'importe qui. Vous avez donné votre évaluation de la façon dont les lobbyistes auraient pu vous influencer et indiqué la réaction de vos collègues. Ce n'était pas tout à fait en accord avec le rapport Nixon.
Vous affirmez que c'est la politique du gouvernement et que vous l'appliquez. C'est bien, mais vous ne pouvez pas expliquer la politique du gouvernement, ce qui nous oblige à convoquer M. Anderson pour qu'il nous l'explique.
Comme je l'ai déjà indiqué, madame la présidente, il y a certaines questions auxquelles M. Desmarais et M. Baker ne peuvent pas répondre et, même s'ils ont les réponses, ils ne devraient pas répondre parce que ce n'est pas leur rôle d'expliquer la politique du gouvernement, en particulier lorsqu'elle a une grande connotation politique. Voilà pourquoi je vous demande de faire de votre mieux pour que M. Anderson vienne témoigner au moment qui lui conviendra. Je suis certain que le comité l'accueillera quand il voudra.
J'aimerais poser d'autres questions sur un autre sujet lorsque nous aurons fini de discuter des amendements.
Le sénateur Doyle: Nous avons discuté du lobbyisme et cela nous a amenés à une question au ministre. Pouvons-nous tenter également de définir «diffamation»? Quelle est la politique concernant la diffamation?
M. Desmarais: J'essaie de trouver l'article original afin de voir ce qu'on en dit.
Le sénateur Doyle: Je devrais l'avoir devant les yeux, mais ce n'est pas le cas.
M. Desmarais: Cela se trouvait d'abord dans l'article 7.
Le sénateur Bryden: Je crois que cet article a été inclus dans l'un des amendements qui découlaient du projet de loi original en 1994.
Le sénateur Lewis: Ce n'était pas dans le projet de loi original.
Le sénateur Bryden: Non.
M. Desmarais: J'ai ici une série d'amendements et je ne le trouve pas. Je ne sais pas exactement ce qui était écrit.
On me dit que c'était dans la version de décembre 1994 et quelqu'un vient de me donner un résumé qui indique que, dans l'ancien paragraphe 8(2), il y avait un alinéa d) au sujet des réclamations pour diffamation ou perte de valeur d'une action, d'une participation dans une société ou d'un investissement. Est-ce celui-là?
Le sénateur Doyle: C'est celui-là.
M. Desmarais: Je pense que nous avons maintenant laissé tomber la diffamation et gardé la perte de valeur d'une action, d'une participation dans une société ou d'un investissement.
Le sénateur Doyle: C'est ce que je dis.
M. Desmarais: On l'a enlevé. Je ne saurais dire, à brûle- pourpoint, pourquoi c'est disparu.
Le sénateur Doyle: Ce n'était pas une question de politique?
M. Desmarais: La politique de base à ce moment-là était qu'on sentait des possibilités de poursuites en diffamation dans certaines des réclamations présentées par les associés et les tiers.
Si je comprends bien, la définition juridique des dommages-intérêts généraux comprend la diffamation. Quand on peut intenter des poursuites pour dommages-intérêts, on peut le faire pour diffamation. Le gouvernement dit que, s'il a diffamé quelqu'un et que des poursuites peuvent être intentées à cet égard, c'est permis, et des dommages-intérêts généraux seront accordés conformément à la loi.
Le sénateur Doyle: Ce n'est pas l'impression qui se dégageait auparavant.
M. Desmarais: Ce n'est pas l'impression qui se dégageait auparavant, non, monsieur.
Le sénateur Doyle: C'est une nouvelle façon de voir.
M. Desmarais: Un peu, oui.
Le sénateur Stewart: Si vous insistez, ils peuvent revenir en arrière, je suppose.
Le sénateur Doyle: Pas nécessairement.
Le sénateur Jessiman: Monsieur Desmarais, vous savez que le professeur Monahan a déclaré que l'ajout de l'alinéa e) au sujet des dommages punitifs, exemplaires ou majorés rend le projet de loi inconstitutionnel, à son avis?
M. Desmarais: J'ai entendu cela.
Le sénateur Jessiman: Ils n'accordent de tels dommages que lorsque les tribunaux estiment que la défenderesse, en l'occurrence le gouvernement, a fait quelque chose qui leur déplaît grandement.
Permettez-moi de vous donner le sens de «punitifs». Des dommages punitifs sont accordés pour punir la défenderesse et pour en faire un exemple, afin d'empêcher les autres de commettre le même acte. Si le gouvernement affirme ici qu'il se moque de ce que pense les tribunaux et que, si les tribunaux pensent pouvoir accorder de tels dommages, il adoptera une loi pour les en empêcher, alors c'est injuste.
Parlons des dommages exemplaires. Ces dommages sont accordés lorsque la conduite de la défenderesse est répréhensible. Ils ont pour but d'exercer le poids de la justice pour démontrer au contrevenant, le gouvernement, que la justice ne tolère pas une telle conduite. Ils ne sont pas accordés, à moins que les tribunaux soient de cet avis. En demandant d'empêcher les tribunaux d'accorder de tels dommages, on ne leur permet même pas d'envisager cette possibilité. Est-ce la politique du gouvernement?
M. Desmarais: Oui.
Le sénateur Jessiman: Merci.
M. Baker: À ce propos, je pense que vous constaterez que la raison de cette mesure est le fait que la plupart des dommages de ce genre sont inclus dans les dommages-intérêts généraux.
Le sénateur Jessiman: Craignez-vous que les tribunaux prennent une décision en ce sens? Je pense que c'est ce que décideraient les tribunaux. Si j'étais juge dans cette cause, d'après ce que j'ai entendu, j'accorderais certainement ce genre de dommages.
M. Desmarais: Si je peux intervenir, le gouvernement a pris la décision de politique d'annuler ce contrat, peu importent les raisons. Affirmez-vous que, chaque fois que le gouvernement prend une décision de politique, la personne visée par la décision devrait avoir le droit d'intenter des poursuites pour dommages exemplaires ou majorés?
Le sénateur Jessiman: On n'intente pas des poursuites pour dommages exemplaires. Il n'est pas nécessaire de plaider pour les obtenir. On vous les accorde. On vous les accorde si les tribunaux estiment que, dans les circonstances, vous devriez les obtenir.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dans sa présentation du 15 mai, le sénateur Kirby déclare, et je cite la page 350 des débats:
... en ce qui concerne les articles 9 et 10... qui interdisent toute compensation et donnent au ministre toute discrétion concernant le versement des sommes qu'il estime indiquées, sauf au titre des profits non réalisés ou des sommes versées pour lobbyisme, les membres libéraux du comité sont prêts à proposer un amendement qui aura pour effet d'éliminer ces articles.
Cela répondra à la troisième et dernière objection originale du sénateur Lynch-Staunton.
Nous n'avons pas ces amendements devant nous. Où sont-ils?
M. Desmarais: Je pense qu'ils ont été supprimés de ces amendements, sénateurs. La position du gouvernement est que, puisqu'il permet que des poursuites soient intentées, il n'est plus nécessaire que le ministre des Transports soit autorisé à faire un paiement dans le cadre d'un règlement hors cour.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ne devrait-il pas y avoir un amendement proposant de faire disparaître les articles 9 ou 10?
M. Desmarais: Peut-être. Je ne l'avais pas remarqué dans votre copie. Dans la mienne, ces articles sont rayés.
La présidente: C'est aussi ce qui est indiqué dans la nôtre.
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous n'avons pas les mêmes copies?
Le sénateur Bryden: Là encore, c'est peut-être parce que je ne connais pas bien la procédure. Il aurait probablement fallu l'indiquer, mais je croyais que, dans une telle situation, quand on fait l'examen article par article et qu'on arrive aux articles 9 et 10, il suffit tout simplement de voter pour les supprimer.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non. On agit déjà un peu trop à l'aveuglette. M. Desmarais et M. Baker ont bien fait de discuter des questions juridiques qu'ils ne connaissent pas très bien, mais on nous dit maintenant que cela viendra le moment voulu. Des amendements ont été déposés. Ils sont conformes à la présentation du sénateur Kirby, sauf pour les articles 9 et 10. Nous devrions décider aujourd'hui du sort de ces articles.
M. Baker: À ce sujet, sénateur, au sujet de la suppression des articles 9 et 10 ainsi que de la situation qui expliquait leur existence -- afin de permettre au ministre des Transports d'effectuer les paiements -- je pense qu'on a estimé pouvoir procéder par les mécanismes normaux, sous réserve de l'application de la Loi sur l'administration financière, et qu'il n'était pas nécessaire d'en parler dans le projet de loi proprement dit, mais j'ai peut-être mal compris.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est ce que j'avais compris moi aussi, ainsi que le sénateur Kirby. Pour pouvoir supprimer les articles 9 et 10, il nous faut un amendement à cet effet, et nous ne l'avons pas.
Le sénateur Bryden: Puis-je intervenir à ce sujet? J'ai devant moi une note qui indique que des motions ne sont pas nécessaires afin de supprimer les articles 9 et 10. Selon Beauchesne, il ne convient pas de proposer un amendement pour faire disparaître un article, mais plutôt de voter contre cet article au moment de voter sur le projet de loi.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je suis content de voir que la procédure est suivie. Je n'en ai pas l'habitude, surtout en ce qui concerne ce projet de loi. Quand nous arriverons aux articles 9 et 10, il y aura une motion visant à les «faire disparaître», peu importe le terme employé?
Le sénateur Stewart: À ce qu'ils ne demeurent pas dans le projet de loi.
Le sénateur Lynch-Staunton: Peu importe le terme, le résultat final sera que, si le projet de loi se rend jusque-là, les articles 9 et 10 auront disparu en troisième lecture.
Le sénateur Beaudoin: Avant de poser ma question, dois-je comprendre qu'en temps voulu les articles 9 et 10 pourraient disparaître?
Le sénateur Bryden: Oui.
M. Desmarais: Je le crois aussi.
Le sénateur Beaudoin: Vous affirmez que, en pratique, l'amendement à l'alinéa 8(2)e) ne veut pas dire grand-chose, si j'ai bien compris votre réponse?
M. Desmarais: Je ne dirais pas cela, sénateur. Je dis que la plupart des dommages pour diffamation ou le genre de questions qui se poseraient à cet égard seraient généralement réglés par les tribunaux à l'aide des dommages-intérêts généraux et non par des dommages punitifs, exemplaires ou majorés.
Tout ce que dit le gouvernement, c'est que si une poursuite est intentée, on a droit à des dommages généraux.
Le sénateur Beaudoin: S'ils sont inclus dans les dommages généraux, dans une certaine mesure, pourquoi les exclure?
M. Desmarais: Parce que le gouvernement ne souhaite pas verser ce genre de dommages et créer ainsi un précédent, si vous voulez, lorsqu'il prend une décision de politique qui peut donner lieu à des poursuites judiciaires en permettant aux tribunaux de dire qu'ils n'aiment pas la décision du gouvernement et accordent donc des dommages punitifs ou exemplaires. Ce n'est pas ainsi qu'on gouverne dans notre pays, sénateur.
Le sénateur Nolin: Ce n'est pas ainsi que fonctionne le système judiciaire non plus.
Le sénateur Beaudoin: Il y a trois pouvoirs dans notre pays. Le pouvoir judiciaire en est un important. Dans ce domaine, le pouvoir judiciaire pourrait bien penser que le gouvernement a fait une erreur et doit donc en assumer la responsabilité. Le pouvoir qu'on appelle judiciaire a tout à fait le droit d'agir ainsi.
M. Desmarais: Je suis d'accord avec vous, sénateur.
Le sénateur Beaudoin: Chaque fois que nous affaiblissons le pouvoir judiciaire, ma première réaction, c'est de dire: «Un instant. N'allez pas trop loin.» Nous croyons en la répartition des fonctions entre ces trois pouvoirs ainsi que dans la primauté du droit. Je fais pleinement confiance au système judiciaire de notre pays.
À mon avis, cette exclusion est un peu étrange. Selon moi, il y a tellement d'exclusions, énoncées dans les alinéas a), b), c), d) et e). Les motifs diffèrent peut-être d'un cas à l'autre. Elles sont de nature différente. Je ne comprends vraiment pas pourquoi il est question de dommages punitifs, exemplaires ou majorés. C'est un point de vue de politique.
M. Desmarais: Exactement, c'est un point de vue de politique.
Le sénateur Beaudoin: Mais il a des conséquences juridiques.
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Stewart: J'aimerais commenter les remarques du sénateur Beaudoin et du témoin. Je ne pense pas qu'il faudrait y voir simplement une politique du gouvernement. Il y a un point de vue du gouvernement qui est présenté aux deux Chambres du Parlement. Ce n'est pas le gouvernement qui établit les critères de l'attribution des dommages, mais bien le Parlement. Sinon, pourquoi sommes-nous ici?
Le sénateur Lynch-Staunton: Monsieur Desmarais et monsieur Baker, pouvez-vous nous donner des précisions sur le bail avec l'administration aéroportuaire de la région métropolitaine de Toronto, qui a été annoncé il y a quelques jours à peine?
M. Desmarais: Pas vraiment, sénateur. Je n'en connais pas les détails. Je sais qu'il a été signé vendredi, après avoir été approuvé par le Conseil du Trésor. C'est tout ce que j'en sais.
Vous avez raison d'affirmer qu'ils prendront possession des biens en décembre. Il y a une période de transition pour les employés, et cetera. C'est tout ce que je peux vous dire.
Le sénateur Lynch-Staunton: On a beaucoup critiqué le fait que la Pearson Development Corporation a été autorisée à reporter les loyers. Vous vous souviendrez de la discussion que nous avons eue ici à ce sujet.
M. Desmarais: Faites-vous allusion aux chiffres de 11 millions de dollars et de 33 millions de dollars?
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, mais peu importent les chiffres. C'était l'une des soi-disant «lacunes» que mes amis d'en face et leurs collègues du Cabinet ont trouvée dans l'accord sur l'aéroport Pearson pour justifier son annulation.
Par chance, j'ai reçu la semaine dernière le rapport annuel pour 1995 de l'Administration aéroportuaire de Montréal, qui administre les aéroports de Mirabel et de Dorval. On y trouve certains renseignements sur le bail avec le gouvernement. Le bail prévoit un report des loyers sur cinq ans pouvant atteindre 6 millions de dollars par année et l'obligation de rembourser le prêt après cinq ans à un taux fondé sur le taux des obligations du gouvernement du Canada majoré de 2,5 p. 100. Le gouvernement a vivement critiqué ce genre de disposition dans le bail avec T1T2. Il l'a pourtant accepté pour Montréal, à des conditions presque identiques. Je crois que les baux d'autres administrations aéroportuaires locales prévoient aussi un report des loyers. Pourquoi le gouvernement s'oppose-t-il si violemment à ce que les conditions offertes aux administrations aéroportuaires locales ne le soient pas à l'entreprise privée?
Le sénateur Bryden: J'aimerais demander quel est le rapport avec la question dont nous sommes saisis ici, et même si c'est juste pour les témoins. Sont-ils ici pour qu'on revienne une fois de plus sur l'enquête relative à l'aéroport Pearson?
Le sénateur Lynch-Staunton: Si je comprends bien, on a invité M. Desmarais pour qu'il discute des politiques, et ce dernier a accepté. C'est une question de politique. C'est une politique du gouvernement à l'égard des administrations aéroportuaires. C'est le ministre des Transports qui devrait répondre. Il refuse de se présenter ici. Nous espérons qu'après avoir reçu votre lettre, madame la présidente, il reviendra sur sa décision.
Quoi qu'il en soit, M. Desmarais et M. Baker sont les seuls fonctionnaires des Transports que nous avons prévu entendre jusqu'ici. Simplement pour comprendre la politique aéroportuaire du gouvernement, étant donné qu'il est question de l'aéroport Pearson, j'aimerais savoir pourquoi ce qui n'a pas été jugé acceptable dans un bail avec une entreprise privée semble être une disposition standard dans les contrats avec les administrations aéroportuaires locales.
La présidente: Avec tout le respect que je vous dois, sénateur Lynch-Staunton, nous étudions un projet de loi bien précis. Élargir la discussion pour parler de la façon dont les administrations aéroportuaires sont constituées d'un océan à l'autre n'est pas pertinent pour l'examen du projet de loi.
Le sénateur Nolin: Madame la présidente, ils ont annulé l'accord. Ma question est la suivante: pourquoi? Une réponse à la question du sénateur Lynch-Staunton jetterait peut-être un peu de lumière sur ce «pourquoi».
Le sénateur Lynch-Staunton: Le noeud de la question, c'est que nous discutons de l'annulation de contrats. Ce qu'on nous dit depuis c'est que des dispositions clés du contrat qui a été annulé font partie d'accords avec les administrations aéroportuaires. Si ces dispositions clés étaient si répréhensibles dans un contrat privé, qu'on nous demande d'annuler par le présent projet de loi -- et c'est cela qui est pertinent -- pourquoi ces mêmes dispositions sont-elles acceptables entre une administration aéroportuaire et un gouvernement qui ne les aimait pas et ne les aime toujours pas ailleurs?
Le sénateur Bryden: Tout au long des débats depuis deux ans, si je comprends bien, le droit du gouvernement d'annuler ce contrat n'a jamais été mis en doute par les membres d'en face. On l'a réitéré à maintes reprises dans les délibérations. S'ils avaient le droit d'annuler le contrat, pourquoi faut-il maintenant aller plus loin et tenter de trouver les motifs? Vous semblez changer de tactique une fois de plus.
Le sénateur Nolin: Nous ne contestons pas le fait que le gouvernement a le droit d'annuler le contrat. Nous ne le contestons pas du tout. Nous estimons que tout propriétaire qui annule un contrat doit assumer les conséquences de sa décision. Nous ne contestons pas le fait qu'ils avaient le droit de le faire. Ils ont le droit. N'importe qui peut annuler un contrat, tant qu'il en assume les conséquences.
Pour évaluer ces conséquences, il faut savoir pourquoi les contrats ont été annulés. Vous aviez peut-être de très bonnes raisons d'annuler le contrat. Nous ne savons toujours pas pourquoi le gouvernement l'a fait. Voilà pourquoi nous posons cette question au gouvernement. C'est une affaire de politique. Voilà pourquoi cette question est très pertinente.
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous avez fait valoir votre point de vue, et votre affirmation que vous ne vouliez pas que nous cherchions les motifs de l'annulation est aussi très révélatrice. Pouvez-vous nous dire pourquoi le report des loyers, qui n'était pas acceptable dans l'accord avec T1T2 fait partie de la politique du gouvernement dans les accords avec les administrations aéroportuaires?
M. Desmarais: Sénateur, l'accord de Montréal et, je crois, celui de Toronto prévoient un report des loyers. Je ne crois pas qu'il y en ait d'autres. Ces accords ont été signés avant l'accord Pearson. Celui de Montréal a été signé en 1992, si je me souviens bien. Celui d'Edmonton, en juillet ou en août 1992, je crois. L'accord Pearson a été signé en janvier 1994, environ un an et demi plus tard. Nous nous sommes servis des modèles de l'administration aéroportuaire locale pour concevoir notre disposition relative au report, que le gouvernement jugeait acceptable à l'époque.
Le nouveau gouvernement a décidé que ces modèles n'étaient pas acceptables, du fait que nous cédions des installations aéroportuaires au secteur privé, qui investissait des capitaux propres. Les AAL n'investissent pas de capitaux propres dans un aéroport. Elles n'ont pas de capitaux propres au départ. Ces investisseurs devaient avoir des capitaux propres suffisants pour financer leurs activités. Ces facteurs ont joué un rôle dans la décision du gouvernement, mais je ne saurais dire quelle était l'ampleur de ce rôle.
Le sénateur Lynch-Staunton: Dois-je comprendre que la politique du gouvernement actuel ne prévoit pas de reports?
M. Desmarais: À ma connaissance, sénateur. Je n'en ai pas vu, mais je n'ai pas vu les nouveaux accords. Je crois que le seul accord d'importance signé par le nouveau gouvernement est celui de Toronto, et je ne l'ai pas vu.
Le sénateur Lynch-Staunton: Savez-vous s'il y a une clause d'annulation dans cet accord?
M. Desmarais: Je ne le crois pas.
Le sénateur Lynch-Staunton: Cet aspect a aussi été critiqué. Savez-vous s'il s'agit d'un bail à long terme? D'un bail de 60 ans?
M. Desmarais: C'est un bail de 60 ans.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ce n'était pas acceptable dans le cas de l'accord avec T1T2.
M. Desmarais: Sénateur, vous supposez que ce n'était pas acceptable. Vous supposez que la décision du gouvernement repose uniquement sur le rapport Nixon.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est ce qui est arrivé, monsieur.
Le sénateur Nolin: C'est ce qu'on nous a dit.
M. Desmarais: À ma connaissance, la décision du gouvernement a été prise au Cabinet. Je ne sais pas sur quoi ils se sont fondés à cette réunion. Mais l'une des bases a été le rapport Nixon, que le gouvernement a publié. Quant aux autres facteurs, je ne sais pas. Je n'assiste pas aux réunions du Cabinet.
Le sénateur Doyle: Nous non plus.
M. Desmarais: Vous supposez que le rapport Nixon est la seule base. Je ne peux pas faire cette supposition.
Le sénateur Lynch-Staunton: Si vous le permettez, je peux vous citer les délibérations de la Chambre des communes. M. Young a déclaré:
La décision du gouvernement d'annuler le contrat relatif à l'aéroport international Pearson repose sur notre évaluation de la situation, qui a été confirmée dans le rapport de M. Nixon.
M. Desmarais: S'il se sert du rapport de M. Nixon pour confirmer ce qu'ils avaient déjà constaté, alors ils avaient d'autres sources d'information.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne veux pas commencer à argumenter sur la validité du rapport Nixon, mais vous venez de déclarer que l'impression existait déjà et qu'ils avaient besoin de quelqu'un pour donner une certaine respectabilité à cette impression.
Le sénateur Stewart: Un vernis de légalité.
Le sénateur Lynch-Staunton: Au rapport Nixon?
Le sénateur Stewart: Non. Ne soyez pas stupide.
Le sénateur Lynch-Staunton: J'allais parler de blanchiment. «Vernis» est peut-être un terme plus parlementaire.
La présidente: Je ne crois pas que cela reflète correctement les propos du sénateur Stewart. Avez-vous d'autres questions, sénateur Lynch-Staunton?
Le sénateur Lynch-Staunton: M. Desmarais n'a pas vu le bail de Toronto. Ils ne veulent pas nous le montrer, alors toute autre question sur ce sujet serait superflue. Si le ministre Anderson était ici, il pourrait peut-être nous donner des explications.
Le sénateur Nolin: D'après la réponse que vous venez de donner à mon collègue, pour quelle raison a-t-on décidé d'annuler l'accord?
M. Desmarais: Je ne le sais pas, sénateur. Là encore, il en a été question au Cabinet. Le ministre m'a communiqué la décision, après cette réunion du Cabinet. On m'a informé que les accords seraient annulés.
Le sénateur Nolin: Si l'ancien ministre des Transports a qualifié le rapport Nixon de confirmation d'autres hypothèses, déductions, examens, rapports ou documents qu'il avait à titre de ministre des Transports, connaissez-vous ces autres documents, rapports ou évaluations?
M. Desmarais: Je connais ce que nous lui avons présenté en tant que bureaucrates du ministère. Je crois qu'au cours de l'enquête, vous avez vu la plupart des documents qui ont été présentés au ministre. Essentiellement, la note de service du 4 novembre constitue le principal document provenant de chez nous et du ministère. Je ne suis pas au courant d'autres discussions ni d'autres documents qu'il aurait pu avoir.
Le sénateur MacDonald: Je voulais simplement préciser, au nom de mes collègues, que nous connaissons M. Desmarais depuis longtemps. Nous l'avons entendu lors des audiences sur les questions juridiques et constitutionnelles. Nous l'avons entendu au cours de l'enquête sur les accords Pearson l'été dernier. Nous avons un respect illimité, sans borne pour M. Desmarais, pour la façon dont il s'est comporté au cours de cette enquête et pour la simplicité et la franchise avec lesquelles il a présenté son témoignage. Nous l'admirons aussi pour la façon dont il a expliqué et défendu la position du gouvernement, comme les bureaucrates sont payés pour le faire. Il l'a fait avec brio.
Je suis d'accord avec M. Desmarais quand il parle de la liberté qui doit être accordée actuellement au juge de la Division de première instance de l'Ontario. Nous savons que ce juge est limité dans sa décision par les exclusions que la défenderesse a imposées.
C'est une question politique. Nous avons presque terminé maintenant. Les contraintes politiques qui existent habituellement dépendent de la vision à court terme des représentants politiques quant à savoir si les coûts de la résiliation d'un contrat dépassent les avantages. Il s'agit aussi bien des avantages politiques que des autres avantages.
Les politiciens, contrairement aux juges, ont des intérêts très clairs à défendre, étant donné que l'État en profite s'il réussit à se sortir en beauté d'un contrat. C'est clairement une affaire de juge et partie. Nous n'en sommes pas dupes.
Le sénateur Bryden: Nous ne nous lancerons pas dans un débat avec vous à ce sujet.
Le sénateur MacDonald: Ne pensez pas que nous sommes tout à fait aveugles face à ce qui se passe ou à l'orientation que prend le comité. Je veux exprimer clairement notre admiration pour M. Desmarais.
La présidente: Merci, sénateur MacDonald. Ces remarques sont très justes.
Le sénateur Lewis: Les témoins du ministère de la Justice doivent peut-être répondre à cette question: l'amendement au paragraphe 7(2) prévoit qu'aucune réparation ne peut être accordée à l'encontre d'un ministre, d'un préposé ou d'un mandataire de Sa Majesté. Qui entend-on par «préposé»?
La présidente: Il s'agit de l'article sur l'immunité.
M. Desmarais: Oui, je l'ai lu dans le paragraphe 7(2). «Préposé» désignerait un fonctionnaire ou un mandataire de la Couronne par opposition à un entrepreneur.
Le projet de loi dans son état original stipulait:
... ne peut être intentée contre Sa Majesté, ni contre un ministre, un préposé, un mandataire de Sa Majesté ou toute autre personne engagée pour fournir des avis ou services à Sa Majesté...
On a un peu remanié ces articles, de sorte qu'il s'agit désormais essentiellement des fonctionnaires et du ministre.
Le sénateur Lewis: Pouvons-nous en avoir confirmation?
M. Desmarais: Si vous parlez au ministre de la Justice ou aux témoins du ministère de la Justice, ils pourront vous le confirmer.
Le sénateur Nolin: À propos de cet amendement, l'amendement que vous proposez ne remplace pas complètement l'article 7. Vous avez maintenu les dernières lignes de l'introduction, avant les alinéas. Lorsque le sénateur Lewis a parlé de «préposé», la phrase ne se terminait pas là. Vous proposez que nous maintenions:
...d'un mandataire de Sa Majesté ou de toute autre personne engagée pour fournir des avis...
Nous conservons cette partie du projet de loi?
M. Desmarais: C'est exact.
Le sénateur Nolin: En français, «servant» est «préposé» et ce terme désigne un employé?
M. Desmarais: Essentiellement, oui.
Le sénateur Nolin: C'est d'eux qu'il s'agit.
Le sénateur Lewis: Oui.
Le sénateur Nolin: Vous gardez la fin.
Le sénateur Lewis: Seulement jusqu'à la ligne 39 en anglais. C'est un éclaircissement.
La présidente: Avez-vous d'autres questions à poser aux témoins ce matin? S'il n'y en a pas, la séance est levée.
La séance est levée.