Délibérations du comité sénatorial permanent
des
affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 25 - Témoignages
ST. JOHN'S, le jeudi 11 juillet 1996
Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui à 9 heures pour continuer son étude de la résolution de modification de la Constitution du Canada, clause 17 des Conditions de l'union de Terre-Neuve au Canada.
Le sénateur Sharon Carstairs (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Nous sommes ravis d'entendre votre intervention, monsieur Loyola Sullivan, chef de l'opposition de Terre-Neuve et du Labrador.
M. Loyola Sullivan, député, chef de l'opposition officielle de Terre-Neuve et du Labrador: Honorables sénateurs, je me présente devant vous aujourd'hui en tant que progressiste-conservateur au nom du caucus et en tant que chef de l'opposition officielle, poste que je détiens depuis le 11 mars de cette année. Notre caucus occupe neuf des 48 sièges de l'Assemblée législative.
J'interviens également en tant qu'ancien enseignant et parent de trois enfants qui fréquentent actuellement les écoles de notre province.
Après avoir mûrement réfléchi à tous les arguments et examiné la situation actuelle, notre caucus a décidé à l'unanimité de voter en faveur de la clause 17.
Je vous donnerai trois raisons principales de ce choix. Premièrement, la modification de la clause 17 est la démarche en faveur de laquelle notre Assemblée législative a voté démocratiquement, au nom de notre population. Deuxièmement, le gouvernement de Terre-Neuve a reçu, en fait, lors des élections de 1966, un mandat favorable à cette démarche. Troisièmement, le premier ministre Tobin a garanti que cette modification de la clause 17 permettra de réaliser la sorte de réforme de l'enseignement qui a été promise aux habitants de Terre-Neuve et du Labrador et en faveur de laquelle ils ont donc cru s'exprimer lors du référendum de septembre 1995.
J'ajouterai, pour commencer, que les avis sont partagés au sujet de cette question. Elle a suscité de nombreuses divisions dans notre province. De nombreuses personnes dont nous respectons beaucoup le jugement ont adopté des points de vue opposés. Cet état de fait est souligné par la grande diversité des opinions exprimées devant le comité du Sénat depuis 15 jours. Ne vous y trompez pas, c'est un lourd fardeau qui pèse sur les épaules des législateurs, le fardeau d'avoir à choisir la meilleure voie à suivre face à des arguments opposés, des valeurs divergentes et des inquiétudes non encore apaisées.
Je suis heureux que le Sénat ait choisi d'organiser des audiences publiques à ce sujet pour permettre aux habitants du Canada, et plus particulièrement de Terre-Neuve et du Labrador, de dire publiquement ce qu'ils pensent de la modification de la clause 17. Il est vraiment regrettable qu'aucune audience publique n'ait eu lieu auparavant sur cette question, que ce soit à l'initiative du gouvernement de Terre-Neuve ou de la Chambre des communes. Je considère donc comme un privilège de me joindre à d'autres intervenants pour me présenter devant ce comité pour faire connaître les opinions de notre caucus.
Si vous me le permettez, je voudrais vous présenter brièvement l'historique du débat sur la réforme de l'enseignement tel que nous le voyons. Je pense qu'il est important d'expliquer cela publiquement et de donner aux sénateurs l'occasion d'en prendre connaissance avant de voter sur cet amendement.
Les garanties constitutionnelles concernant le financement public des écoles confessionnelles et le rôle des confessions dans la gestion de l'enseignement ont été inscrits dans les Conditions de l'union en 1949. En 1987 encore, ces dispositions ont été confirmées par un accord conclu entre les parlements fédéral et provincial qui en étendait l'application aux assemblées pentecôtistes.
Depuis 1949, notre système a évolué grâce aux efforts de coopération manifestés par les diverses confessions. Le nombre de conseils scolaires dans l'ensemble de la province est passé de 270 à 27 et on prévoit encore d'autres regroupements.
Parallèlement, suite à la diminution des inscriptions et à d'autres facteurs, de nombreuses écoles de diverses confessions se sont réunies pour partager des installations et des services. En 1964, nous avions 1 266 écoles. Au 30 septembre de l'année dernière, il en restait seulement 472. On s'attend à d'autres réductions. En fait, le seul obstacle au regroupement, dans certains secteurs, est l'absence de capitaux pour financer le regroupement des installations.
En mars 1992, le gouvernement provincial a reçu un rapport de la Commission royale d'enquête sur la prestation des programmes et des services dans l'enseignement primaire, élémentaire et secondaire.
Le gouvernement avait créé cette commission afin de déterminer comment améliorer la qualité de l'éducation tout en diminuant les coûts. La Commission royale a constaté qu'il y avait des économies potentielles annuelles de 14,5 millions de dollars que le gouvernement aurait du mal à réaliser avec la clause 17 sous sa forme actuelle.
D'après les confessions, il serait possible de réaliser la totalité ou presque de ces économies sans recourir à une modification de la Constitution si les confessions et le gouvernement continuaient à collaborer au regroupement et au partage des installations et des services.
La Commission royale sous-entendait que le gouvernement ne pouvait pas exiger la réalisation de ces économies si la gestion du système scolaire ne lui était pas transférée. Sinon, les mesures prises par le gouvernement pourraient être contestées en vertu de la Constitution.
En novembre 1993, le gouvernement a présenté une proposition de mise en oeuvre de plusieurs des réformes envisagées par la Commission royale. Cette proposition était intitulée «Adjusting the Course (Part I) -- Restructuring the School System for Educational Excellence». S'inspirant de ce document, le gouvernement a essayé d'abord de réformer en profondeur le système en s'appuyant sur un consensus plutôt qu'en recourant à une modification de la Constitution.
De l'avis de plusieurs personnes, les négociations à ce sujet ont permis d'arriver à un accord sur presque toutes les questions en jeu. Il s'agissait notamment des critères de viabilité des écoles, du transport des élèves et de la protection de l'éducation et des pratiques religieuses. Le gouvernement n'était toutefois pas satisfait des résultats obtenus. Il a déclaré que les questions encore en suspens, même si elles étaient peu nombreuses, étaient très importantes.
Depuis lors, pendant ces trois années de négociations, le gouvernement a choisi de ne pas mettre en oeuvre de nombreuses réformes recommandées par la Commission royale bien qu'il soit arrivé à un accord à leur sujet avec les confessions ou qu'un tel accord n'ait pas été nécessaire en vertu de la clause 17. Nombre de ces recommandations portaient sur le programme d'études, la formation du personnel enseignant, l'uniformité et l'excellence de l'enseignement en classe, le taux de vigilance, la durée de la journée et de l'année scolaires, les élèves ayant des besoins particuliers, la discipline et les élèves perturbateurs, et l'évaluation. La réforme de l'enseignement dans ces domaines clés était apparemment au point mort pendant cette période.
L'Assemblée législative a ajourné pour l'été le 31 mai 1995. Le lendemain même, le gouvernement Wells a publié une lettre qu'il avait envoyée aux confessions pour leur présenter, en fait, un ultimatum au sujet de la réforme.
Trois semaines plus tard, le 23 juin, le premier ministre Wells a annoncé qu'un référendum sur la modification de la clause 17 aurait lieu le 25 septembre, c'est-à-dire le lendemain de la Fête du travail et le jour de la rentrée. Malheureusement, la législature ne siégeant pas, n'a pas pu en débattre et aucune audience publique n'a eu lieu.
La campagne d'information publique du gouvernement était axée sur une brochure intitulée «The Education Referendum: A Decision on the Future of Education in Newfoundland and Labrador». Les éléments qu'elle contenait ont été reproduits à l'époque dans diverses publicités. En fin de compte, environ 55 p. 100 des votants se sont exprimés en faveur du projet de modification de la clause 17.
Le référendum ne liait nullement la législature ni les députés à titre individuels. Il avait pour objet de sonder l'opinion publique pour l'information des législateurs qui devaient ensuite prendre une décision.
La modification de la clause 17, dont le libellé différait légèrement de la version soumise au référendum, a été présentée à la législature en octobre pour qu'elle en débatte. Tous les députés ont eu la possibilité de se faire entendre et de s'exprimer au nom de leurs électeurs.
Le 31 octobre, après sept jours de débat, la législature a procédé à un vote sur cette modification. La liberté de vote a été accordée aux membres des caucus de l'opposition et du gouvernement. Chacun a pris sa décision pour des raisons personnelles en tenant compte de l'issue du vote dans sa circonscription et en comparant les arguments et les principes en jeu.
La législature a adopté cette résolution par 31 voix contre 20. Nous nous étions prononcés collectivement. En tant que législature, nous allions aller de l'avant et modifier la clause 17.
En novembre, le Président de l'Assemblée législative a envoyé une copie certifiée de la résolution au greffier du Conseil privé à Ottawa. Le premier ministre avait indiqué en janvier, dans une lettre au premier ministre Wells, que le gouvernement fédéral serait prêt à déposer la résolution au Parlement à la reprise des travaux de la Chambre des communes, mais, fin mai, celle-ci n'avait pas encore eu à se pencher sur la clause 17.
Le 23 mai, à l'approche de l'été et alors que la clause 17 n'avait pas encore été soumise aux Communes, le premier ministre Tobin a présenté à l'Assemblée législative une résolution demandant à Ottawa d'étudier la clause 17 dans les meilleurs délais.
Durant ces audiences, on a constaté une certaine confusion au sujet de ce que la législature a approuvé en votant en faveur de la clause 17. Le préambule indiquait, entre autres choses, que l'adoption d'une version révisée de la clause 17 était essentielle pour que le gouvernement puisse apporter les changements nécessaires d'urgence au système d'éducation de la province. Or, la résolution elle-même demandait simplement que la Chambre prie respectueusement les membres de la Chambre des communes et du Sénat d'examiner la proposition de modification de la clause 17 dès que possible et se prononce sur cette question avant que le Parlement n'ajourne pour l'été. C'est parce que nous désirions qu'Ottawa se penche sur cette question avant l'été que notre vote du 23 mai a été unanime.
Pourquoi appuyer la modification à la clause 17? Plusieurs questions ont été soulevées lors du débat sur cette clause. Premièrement, est-il nécessaire de modifier la clause 17?
D'après les confessions, la plupart des changements recommandés par la Commission royale en 1992 et la plupart des économies qu'elle avait jugées possibles pourraient être réalisées en s'appuyant sur un consensus si les dénominations et le gouvernement continuaient de collaborer.
Selon elles, durant les négociations qu'elles avaient eues avec le gouvernement, une entente était intervenue sur les points suivants: réduire le nombre de conseils scolaires à huit ou dix, fermer une centaine d'écoles, créer un office de la construction scolaire responsable de la construction des écoles dans l'ensemble de la province, rationaliser les transports par autobus scolaires et laisser le gouvernement déterminer le montant des subventions d'exploitation et le nombre d'enseignants. Les confessions affirmaient donc qu'en voulant modifier la clause 17, le gouvernement cherchait seulement à élargir ses pouvoirs.
Pour sa part, le gouvernement déclarait que les confessions avaient tort de dire qu'une entente était presque intervenue au sujet de la réforme de l'enseignement. D'après lui, les confessions et le gouvernement avaient une conception très différente de ce que devait être un système d'éducation optimal. D'après lui, son modèle était beaucoup moins coûteux et permettrait de réaliser des économies beaucoup plus rapidement que si l'on se contentait d'améliorer progressivement l'efficacité des dispositions actuelles.
Il ajoutait que les autres réformes recommandées en matière d'éducation axée sur la classe étaient coûteuses et ne pourraient être financées, dans la situation actuelle, que par une élimination rapide des cas coûteux de double emploi et des excès administratifs. Le gouvernement pouvait citer en faveur de son argumentation le rapport de la Commission royale de 1992 lui-même, selon lequel une transformation fondamentale du système confessionnel permettrait d'économiser 14,5 millions de dollars par an.
Et les droits des minorités? Certains groupes religieux de notre province affirment que les droits garantis aux minorités leur sont retirés sans leur consentement. Le gouvernement a présenté plusieurs amendements à l'encontre de ces accusations. Les sept confessions jouissent toutes des droits en question. Chacune d'elles constitue une minorité et aucune n'est majoritaire. Il est donc faux de dire que la majorité piétine les droits de la minorité. Les droits de tous les groupes sont touchés de la même façon. Aucun groupe n'est traité différemment des autres. Personne n'est victime de discrimination.
Aux termes de la version révisée du paragraphe 17a), une confession a le droit d'assurer aux enfants qui relèvent d'elle l'enseignement religieux, l'exercice d'activités religieuses et la pratique de leur religion dans toute école. Aux termes de la version révisée du paragraphe 17b), une confession a le droit d'avoir une école uniconfessionnelle financée par les deniers publics. Aux termes de la version révisée du paragraphe 17e), les confessions ont le droit d'élire au moins deux tiers des membres d'un conseil scolaire et chaque confession a le droit d'élire un nombre de ces membres proportionnel au pourcentage de la population qu'elle représente dans le territoire qui est du ressort du conseil.
Le gouvernement a garanti à la population que la version révisée de la clause 17 préserve, dans l'ensemble, les droits des minorités. En fait, la plupart des habitants de notre province semblent le croire. Pendant la campagne électorale, ici, en février, alors que les confessions et les citoyens avaient la possibilité de mettre fortement en relief la question du sort des droits des minorités aux termes de la clause 17, elles ont choisi de ne pas le faire.
Après avoir soigneusement évalué ces arguments et d'autres, notre caucus a décidé d'appuyer l'adoption de la version révisée de la clause 17. Tout bien considéré, nous sommes convaincus que les points soulevés font pencher la balance en faveur de l'adoption de cette proposition. En outre, ce point de vue est encore renforcé par d'autres arguments reposant sur des événements qui se sont produits depuis que la législature a débattu de cette question en octobre.
Premièrement, nous respectons le vote des députés en octobre. N'oubliez pas que le résultat du référendum ne liait pas l'Assemblée législative. Lorsque nous avons entamé le débat sur cette question en octobre, la modification de la clause 17 n'était rien d'autre qu'une proposition que la majorité de la population avait appuyée dans un référendum. Dans la législature, les députés ont défini la question en jeu et présenté leur argumentation.
En tant que députés, beaucoup d'entre nous, après avoir évalué la situation, ont voté conformément au souhait des électeurs de leur circonscription. Il y a eu des votes pour et des votes contre des deux côtés de la Chambre.
Une majorité de députés a finalement choisi la voie de la modification de la clause 17. Cette modification devenait alors plus qu'une simple proposition. C'était la voie choisie par la législature au nom de tous les habitants de Terre-Neuve et du Labrador. Nous nous sommes prononcés et la question est maintenant entre les mains du gouvernement fédéral.
Deuxièmement, nous respectons le vote des électeurs. Les élections générales de 1996 ont été les premières à se produire dans notre province depuis le début du débat sur la clause 17. Le gouvernement Wells n'était pas mandaté pour modifier la Constitution et il n'a pas non plus sollicité un tel mandat. En fait, juste avant les élections de 1993, M. Wells a pris la parole devant la législature pour assurer aux dirigeants religieux qu'il ne prévoyait ni ne désirait chercher à faire modifier la Constitution pour réaliser la réforme scolaire. C'est seulement après les élections qu'il a inclus la modification de la clause 17 dans la politique de son gouvernement.
Le nouveau chef du Parti libéral, M. Tobin, a ouvert la campagne en promettant de poursuivre les initiatives entreprises par son prédécesseur en matière de réforme de l'éducation, y compris la modification de la clause 17. Il a promis de se montrer plus coopératif à ce sujet que ne l'avait été le premier ministre Wells. Il n'a toutefois jamais dit qu'il avait l'intention d'annuler l'approbation donnée par notre province à cette résolution ou de demander à Ottawa de ne pas l'étudier plus avant. En fait, on pouvait lire, à la page 67 du Livre rouge électoral du premier ministre:
Un référendum a eu lieu l'année dernière au sujet de la question importante des écoles confessionnelles. La population s'est exprimée. La réforme de l'éducation ira de l'avant.
Pendant la campagne électorale, les confessions et la population dans son ensemble ont eu l'occasion de contester la position du gouvernement au sujet de la clause 17 et de susciter des controverses à son endroit. Elles ne l'ont pas fait. Pendant cette campagne, il n'y a eu aucun mouvement populaire en faveur de l'annulation de la résolution relative à la clause 17. En renouvelant le mandat du gouvernement, la population de notre province a, en fait, approuvé la stratégie gouvernementale au sujet de la modification de la clause 17.
Troisièmement, M. Tobin s'était engagé à respecter cinq conditions. Comme je l'ai dit en commençant, notre caucus savait que la population craignait de plus en plus que la modification de la clause 17 en question ne permette pas d'atteindre les résultats qu'on lui avait annoncés et en faveur desquels elle pensait avoir voté en septembre.
Lors du référendum, on avait demandé aux électeurs s'ils étaient en faveur d'une révision de la clause 17 selon les modalités proposées par le gouvernement pour permettre une réforme du système d'éducation confessionnel.
La conception que les gens se faisaient des implications d'une révision de la clause 17 leur avait été inspirée par la teneur de la modification elle-même ainsi que par les renseignements contenus dans la brochure du gouvernement et les déclarations publiques du premier ministre et de ses ministres. L'accord-cadre négocié par le gouvernement et les confessions au printemps dernier a toutefois amené les gens à se demander s'ils allaient vraiment obtenir ce pour quoi ils avaient voté.
Avant de me rendre à Ottawa en mai, j'ai posé comme condition que le M. Tobin garantisse à l'Assemblée législative que la clause 17 permettrait d'atteindre les cinq résultats en faveur desquels on avait demandé à la population de voter lors du référendum.
Ces cinq résultats sont les suivants: la création d'écoles multiconfessionnelles ouvertes à tous les enfants quelle que soit leur religion; le droit de tous les enfants à fréquenter l'école de leur quartier; la possibilité qu'une école soit uniconfessionnelle; la nomination des enseignants sur la base seulement de leur mérite et de leurs qualifications sauf pour les écoles uniconfessionnelles; et la limitation de l'influence des Églises à l'éducation religieuse et à la pastorale, sauf dans les écoles uniconfessionnelles.
Sur mes instances, le premier ministre Tobin a bien pris l'engagement devant les habitants de Terre-Neuve et du Labrador que, quand elle entrerait en vigueur, la modification de la clause 17 adoptée par l'Assemblée législative permettrait de réaliser tout cela. Les inquiétudes relatives aux intentions du gouvernement Wells vis-à-vis de la réforme structurelle ont été en grande partie apaisées quand le premier ministre Tobin a affirmé publiquement que toute loi adoptée à la suite de la modification de la clause 17 serait conforme à ce qui avait été dit à la population et qu'elle pensait accepter en votant comme elle l'avait fait.
Nous trouvons préoccupant que le projet de loi qui doit faire suite à la modification de la clause 17 n'ait pas encore été publié, mais nous considérons que l'engagement pris par M. Tobin est très sérieux. S'il ne devait pas s'y conformer, il devra assumer ses responsabilités.
Je suis conscient du fait que le Sénat n'a que des moyens d'action limités relativement à la clause 17. Il peut seulement adopter la résolution sous sa forme actuelle, la rejeter ou la modifier. S'il la rejetait ou la modifiait, celle-ci serait renvoyée à la Chambre des communes qui devrait réétudier la question et se prononcer à nouveau. Elle pourrait alors adopter simplement cette résolution, là encore sous sa forme actuelle, et elle entrerait alors en vigueur, ou elle pourrait la modifier conformément aux souhaits du Sénat et c'est alors notre Assemblée législative qui devrait se pencher à nouveau sur la question.
Le Sénat dispose, au plus, de six mois pour se prononcer sur cette résolution; c'est ce qu'on appelle le veto suspensif de six mois.
Le premier ministre Tobin a critiqué la façon dont le Sénat étudie la clause 17, mais il est clair que le Sénat a le droit et l'obligation de prendre toutes les précautions requises. La Chambre des communes s'est peut-être prononcée sur cette résolution en deux jours seulement mais, bien entendu, le gouvernement du Canada avait en sa possession et refusait d'étudier la modification de la clause 17 depuis déjà plus de six mois, soit plus longtemps que la durée de la suspension que pourrait imposer le Sénat.
M. Tobin ferait bien de réfléchir au fait qu'il siégeait lui-même au Cabinet du premier ministre Chrétien pendant la période durant laquelle le gouvernement a refusé de s'occuper de cette résolution dans les meilleurs délais. Si M. Tobin insiste pour critiquer le cheminement de la clause 17 à Ottawa, il doit reconnaître que la responsabilité en incombe dans une large mesure à lui-même et à ses anciens collègues du gouvernement fédéral.
Il pourrait également admettre que les audiences du comité du Sénat se sont avérées très utiles et, assurément, riches d'enseignements pour de nombreuses personnes dans notre province qui, jusqu'à présent, avaient été mises dans l'impossibilité de participer à ce débat.
Nombre des questions soulevées lors de cette série d'audiences sont manifestement importantes et exigent une réflexion approfondie.
Cela dit, je reconnais que le report de la décision au-delà de l'été pourrait avoir d'importantes répercussions. Le gouvernement provincial a fait savoir que, si l'on n'apportait pas cet été les changements qui semblent pratiquement incontournables, cela aurait de graves conséquences. Il a dit que, si l'affaire n'est pas réglée d'ici peu, les changements relatifs aux conseils scolaires ne pourront pas entrer en vigueur à temps pour la rentrée 1996-1997 sans risquer d'être contestés en vertu de la Constitution.
Il a déclaré qu'un retard dans les changements concernant les conseils scolaires coûterait jusqu'à 10 millions de dollars à notre province. Je ne peux pas dire si le chiffre cité par le gouvernement est exact. Il n'a fourni aucun détail pour le justifier. Il est néanmoins vraisemblable que les réductions envisagées pour les conseils scolaires portent sur des millions de dollars.
Avant de terminer, je voudrais souligner une question soulevée lors du débat sur la clause 17 qui me préoccupe grandement. En essayant de gagner d'autres personnes à la cause de la modification de la clause 17, certains se sont livrés à des exagérations relativement à la qualité actuelle de l'enseignement dans notre province. Certains ont dit qu'une réforme structurelle est essentielle parce que le système actuel produit, le plus souvent, des élèves de qualité inférieure. Non seulement de telles affirmations portent-elles atteinte à notre réputation et au moral des élèves, des parents et des pédagogues de notre province, mais elles sont en outre manifestement fausses.
Je fais référence à la brochure d'information distribuée par le gouvernement juste avant le référendum; elle disait:
[...] il y a de plus en plus de preuves que les élèves de notre province n'obtiennent pas des résultats d'un niveau comparable à celui des élèves des autres provinces ou qu'ils n'atteignent pas le niveau nécessaire pour faire face aux rapides changements sociaux et économiques.
Certains sont allés encore plus loin dans ce sens à la Chambre des communes, notamment la députée libérale Carolyn Parrish qui a déclaré:
La province de Terre-Neuve et du Labrador a décidé de moderniser son système d'éducation pour le rapprocher de ceux qui existent dans la totalité des autres provinces et territoires du Canada... De toutes les provinces du Canada, c'est elle qui a les plus fortes dépenses par habitant et qui obtient les plus mauvais résultats. Elle a les taux de décrochage les plus élevés, les taux d'analphabétisme les plus élevés et obtient les notes les plus faibles dans les tests normalisés en mathématiques, en sciences et en anglais.
Le député libéral Gar Knutson a dit:
D'après de nombreux observateurs que je crois dignes de foi, le système scolaire de Terre-Neuve est inférieur aux normes auxquelles nous nous attendons normalement au Canada. Après avoir examiné des documents à ce sujet et avoir consulté des gens qui ont fait leurs études dans ce système, je crois que la qualité de l'enseignement à Terre-Neuve est inférieure aux normes canadiennes.
C'est une accusation très grave.
Je me joins au député fédéral de Gander--Grand Falls, George Baker, pour exprimer mon indignation au sujet des propos d'un député du Parlement selon lequel, d'après une certaine norme, le niveau d'un élève de 12e année de Terre-Neuve correspond en réalité à celui d'un élève de 8e année en Ontario.
Je m'insurge vivement contre les députés fédéraux qui ont utilisé à plusieurs reprises le mot «moderniser» pour décrire ce qui, à leur avis, devrait se faire en matière d'enseignement à Terre-Neuve et au Labrador. Il est faux de dire que le système d'enseignement de Terre-Neuve et du Labrador est au bord d'un précipice, sur le point de s'effondrer en ruines. Nous avons beaucoup progressé. Comme tout le monde, je sais que des améliorations sont possibles dans certains domaines, mais, en tant qu'ancien enseignant et que parent, je suis très rassuré de savoir que mes enfants sont confiés au système d'enseignement de notre province.
Pour ce qui est des résultats scolaires, les élèves de Terre-Neuve et du Labrador ont un niveau comparable à celui des élèves de toutes les autres provinces. À de nombreux égards, nos résultats sont supérieurs à la moyenne nationale.
En février 1995, le ministre de l'Éducation a publié les résultats d'un test qu'avaient passé plus de 8 500 élèves de 7e année de l'ensemble du pays, le Canadian Test of Basic Skills. Les élèves de notre province ont dépassé la norme nationale en mathématiques et en étude du travail avec des notes de 53 et 51 p. 100 respectivement. Dans les trois autres principales disciplines, leurs résultats, bien qu'inférieurs à la norme nationale, sont considérés comme d'un niveau normal. Leur note générale pour l'ensemble des épreuves était de 49 p. 100, ce qui correspond pratiquement à la norme nationale.
Le ministre de l'Éducation a terminé en disant:
[...] les résultats du récent test CTBS...
-- c'est-à-dire le Canadian Test of Basic Skills --
[...] sont encourageants. Il est rassurant de savoir que les élèves de Terre-Neuve peuvent tenir tête à ceux du reste du Canada.
En effet, on pourra constater que les résultats des élèves de notre province vont en s'améliorant depuis une vingtaine d'années par rapport à ceux des élèves des autres provinces.
Comme l'a souligné le député libéral Ron Duhamel lors du débat de la Chambre des communes, le ministère de l'Éducation de cette province a déclaré:
Le niveau général d'éducation dans tous les groupes d'âge de Terre-Neuve a connu une hausse spectaculaire depuis le milieu des années 1970 et le retard que nous avions par rapport au reste du Canada est quasiment comblé.
Comme l'a souligné le député libéral indépendant Dennis Mills lors de ce débat, on pouvait même lire dans le livre rouge électoral du premier ministre Tobin:
Depuis la Confédération, nous avons fait d'énormes progrès en matière d'éducation. Les habitants de Terre-Neuve et du Labrador ont édifié un système d'enseignement dont nous pouvons tous être fiers. Nos taux de participation aux études universitaires sont supérieurs à la moyenne nationale. Si la tendance actuelle se maintient, le niveau d'éducation à Terre-Neuve et au Labrador sera bientôt l'égal des meilleurs au pays.
M. Mills a également cité notre ministre de l'Éducation, selon lequel le pourcentage de notre population ayant moins de huit ans de scolarité est passé de 24 p. 100 en 1976 à 5,6 p. 100 en 1991, alors que la moyenne canadienne était respectivement de 9,5 p. 100 et 3,8 p. 100.
En d'autres termes, l'amélioration de la situation a été beaucoup plus forte à Terre-Neuve que dans le Canada en général.
M. Mills a également cité les propos suivants de notre ministre de l'Éducation:
Le nombre d'élèves de Terre-Neuve qui ne terminent pas leurs études secondaires est passé de 66 p. 100 en 1976 à 49,9 p. 100 en 1991. La moyenne canadienne est passée de 56 p. 100 à 43 p. 100 pendant la même période. Les chiffres de Terre-Neuve sont bien meilleurs maintenant qu'en 1991, dernière année pour laquelle les statistiques permettent une comparaison avec le Canada.
Les élèves de Terre-Neuve obtiennent des résultats tout aussi bons que ceux de la plupart des autres provinces et que la moyenne canadienne.
On peut confirmer ces déclarations au vu du résultat des tests de lecture et de rédaction passés par des élèves de 16 ans dans le cadre du Programme d'indicateurs du rendement scolaire de 1994.
Ce sont là des citations de l'ancien ministre de l'Éducation de cette province. Elles présentent une image bien différente de celles, sans fondement, que beaucoup de gens ont utilisées pour nous critiquer et donner l'impression que la question de la clause 17 était beaucoup plus tranchée qu'elle ne l'est en réalité. Une réforme structurelle du système d'éducation de notre province est nécessaire, non pas parce qu'il produit des élèves de piètre qualité, mais parce que la diminution des effectifs scolaires et la réduction ininterrompue des crédits posent de nouveaux problèmes financiers.
La Commission royale de 1992 et les études ultérieures ont clairement montré la possibilité d'apporter des améliorations en ce qui concerne le programme d'étude, le taux de vigilance, la durée de la journée et de l'année scolaires et d'autres facteurs. Il est hors de doute que des commissions royales feraient des constatations identiques dans toutes les autres provinces.
Lorsque nos élèves doivent s'affronter aux meilleures des écoles de pays comme l'Allemagne et le Japon, nous ne pouvons pas nous contenter du statu quo et nous devons toujours chercher de nouvelles possibilités de relever notre niveau. Il est évident que des améliorations sont possibles, mais soyons honnêtes: nombre de celles qui ont été recommandées en 1992 relèvent actuellement de la compétence de la province et pourraient être réalisées sans que l'on modifie la Constitution.
Les habitants de notre province sont déçus que peu d'efforts aient été entrepris à cet égard alors que le gouvernement s'est attaché à la réforme structurelle de l'enseignement. Il prétend qu'une réforme des structures est nécessaire pour financer d'autres réformes, mais ses affirmations sont parfois exagérées.
Malheureusement, les exagérations donnent trop facilement naissance à des stéréotypes dangereux qui n'ont aucun fondement réel. Mettons fin, une fois pour toutes, au mythe selon lequel le système scolaire de cette province est inférieur ou produit des élèves inférieurs, parce que c'est tout simplement faux.
En conclusion, le caucus progressiste-conservateur de l'Assemblée législative prie instamment le Sénat de faire le nécessaire pour encourager la réforme de l'éducation à Terre-Neuve et au Labrador. Nous nous rendons compte que la question n'est pas définitivement tranchée. Nous vous demandons de tenir compte des raisons pour lesquelles nous sommes en faveur de l'adoption de la version révisée de la clause 17.
Quoi qu'il advienne de cette clause, nous souhaitons avant tout que les changements qu'il faut opérer à Terre-Neuve et au Labrador au niveau de l'enseignement en classe soient mis en oeuvre de façon appropriée, rapidement et conformément aux voeux exprimés par notre population. Nos enfants le méritent largement.
Le sénateur Doody: Je vous souhaite la bienvenue. Pour ce qui est du vote unanime de l'Assemblée législative en faveur de cette résolution, c'est ce que le Parlement du Canada avait demandé pour pouvoir étudier dans les meilleurs délais cette résolution qui traînait quelque part sur un bureau à Ottawa. Cela veut-il dire que les caucus des deux côtés étaient unanimement en faveur de la nouvelle version de la clause 17 proposée?
M. Sullivan: Je peux seulement répondre au nom de notre caucus. Nous étions unanimement d'accord pour agir comme nous vous l'avons expliqué ici aujourd'hui. Par notre vote du 23 mai, nous demandions à la Chambre des communes et au Sénat de se prononcer promptement sur cette question avant l'ajournement de l'été. Voilà, fondamentalement, le sens de la résolution adoptée le 23 mai.
Le sénateur Doody: La nouvelle version de la clause 17 proposée contient de nombreux engagements envers les écoles confessionnelles et la participation des confessions religieuses à la vie scolaire, et cetera, ce qui est très bien et très rassurant, mais tout cela relève de dispositions législatives provinciales qui, du point de vue constitutionnel, sont uniques.
Avez-vous une idée de la loi provinciale qui régira tout cela? Êtes-vous au courant de cette loi? Pouvez-vous nous en parler? Cela m'inquiète beaucoup. En vertu de la loi, le gouvernement peut établir des normes pour les écoles. Il peut par exemple dire combien de gens appartenant à une confession déterminée doivent vivre à une distance déterminée d'une école dont on propose la création pour que celle-ci puisse être confessionnelle.
A-t-on réfléchi aux critères ou aux normes devant présider à la création de ces écoles? Tout ce qui se produira après l'adoption de cette résolution et la modification de la Constitution consécutive à cette proposition sera assujetti à la loi provinciale.
M. Sullivan: Je ne suis pas au courant de ce que le gouvernement se propose de faire. J'ai demandé à plusieurs reprises à l'Assemblée législative à être autorisé à voir le projet de loi, même avant le 31 octobre dernier. J'ai demandé récemment, au cours de cette session, à être autorisé à prendre connaissance des intentions du gouvernement relativement à la diminution du nombre de conseils scolaires et à l'élection de leurs membres, et cetera. Le gouvernement n'est pas prêt à déposer ce projet de loi parce que, d'après ce qu'a répondu le ministre, il pourrait susciter au sein de la population certaines inquiétudes inopportunes qui pourraient avoir des répercussions sur son sort. Voilà ce que j'ai déduit de sa réponse.
J'aimerais savoir dans quelle voie le gouvernement désire nous entraîner, mais je sais parfaitement que toute loi provinciale peut être modifiée à tout moment. Une loi adoptée aujourd'hui ne sera peut-être plus en vigueur l'année prochaine, alors qu'on ne peut pas modifier aussi facilement ce qui est inscrit dans la Constitution.
Le sénateur Doody: Mais cette nouvelle version de la clause 17 proposée est assujettie au droit provincial. Comme vous le laissez entendre, les gouvernements peuvent modifier les règlements quand ils le veulent, au gré de leur fantaisie ou quand cela leur paraît financièrement ou politiquement approprié.
Je me trompe peut-être, mais il me semble qu'il faut être vraiment très confiant pour accepter qu'une modification de la Constitution puisse être assujettie au droit provincial.
Je ne mets en doute ni la moralité ni les bonnes intentions du gouvernement ou de l'opposition actuels, mais qui sait ce qui se passera dans cinq ans? Voilà pourquoi une protection constitutionnelle est nécessaire. Il ne me semble pas qu'une telle protection existe aux termes de la nouvelle version de la clause 17 proposée.
M. Sullivan: Pour moi, cette modification apporte une certaine souplesse et donne aux parents le droit de faire leur choix.
Lorsque j'étais critique de notre parti pour l'éducation en février 1993, on m'a cité dans un important article d'un journal local comme étant en faveur du droit des parents à faire un tel choix. Je pense que les parents devraient pouvoir exercer un plus grand contrôle sur le système d'éducation.
Je déclarais également dans cet article que les parents devraient pouvoir décider s'ils veulent que leurs enfants fréquentent une école de quartier. La clause 17, sous sa forme actuelle, fait obstacle à certains égards aux améliorations nécessaires pour offrir la meilleure éducation possible à nos enfants.
Le sénateur Doody: De quels obstacles s'agit-il, monsieur Sullivan? Il me semble que, aux termes de la clause 17 actuelle, la législature de Terre-Neuve peut créer une école où elle veut, pourvu qu'elle ait l'argent nécessaire. Je sais très bien quelles difficultés cela représente; j'ai connu cette situation. Toutefois, la clause 17 actuelle n'empêche pas le gouvernement de Terre-Neuve de créer une école publique, une école privée ou une école confessionnelle où il le veut.
M. Sullivan: Si l'on suppose que les ressources financières sont illimitées, c'est exact, mais notre province ne dispose pas de ressources financières illimitées.
Le sénateur Doody: Je le sais. C'est simplement une façon de parler. Je veux dire que ce n'est pas en modifiant la clause 17 que l'on augmentera les ressources financières de la province. Même avec un nouveau système scolaire, nous ferons face aux mêmes blocages qu'à présent.
À mon avis, en modifiant la clause 17, qui assure une protection constitutionnelle aux droits des minorités à Terre-Neuve -- et je parlerai de cela dans un instant --, nous les mettons entre les mains de la législature provinciale.
D'après un vieil adage, la vie, la liberté ou les biens de tout le monde sont menacés lorsque la législature siège. Nous allons maintenant ajouter les droits des minorités à cette liste.
Cela m'inquiète beaucoup. Apprendre que personne ne sait réellement quelles sont les intentions de la législature en matière de règlements, de normes ou de critères, rend la chose encore plus inquiétante.
La question des droits des minorités suscite des raisonnements étranges. Vous dites que les sept confessions jouissent des droits accordés à la majorité et que, bien que chacune d'entre elles soit minoritaire, elles constituent collectivement une majorité. Si vous supprimez ou diminuez les droits de n'importe laquelle de ces minorités, cela ne la touche pas puisqu'elle fait partie de la majorité comme toutes les autres. Est-ce bien ce que vous voulez dire?
M. Sullivan: Non, j'ai signalé que c'est un des arguments utilisés par le gouvernement. J'ai également énuméré certains arguments utilisés par les confessions. Ce n'est pas moi qui l'ai dit.
Le sénateur Doody: Si, vous dites que le gouvernement a présenté plusieurs arguments pour réfuter cette affirmation.
Pensez-vous qu'on porte atteinte aux droits des minorités?
M. Sullivan: Je pense qu'il faut prévoir, dans le système scolaire, des dispositions pour l'enseignement religieux, l'exercice d'activités religieuses et la pratique de la religion et que les parents devraient avoir le droit d'envoyer leurs enfants à une école de la confession de leur choix si le nombre d'élèves est suffisant.
La version modifiée de la clause 17 contient des dispositions relatives à la gestion de ce système dans les écoles uniconfessionnelles. Elle prévoit une participation confessionnelle dans toutes les écoles.
Le sénateur Doody: Seriez-vous rassuré si cette protection était inscrite dans la Constitution, comme la clause 17 actuelle, ou préféreriez-vous que cela soit entre les mains de la législature?
M. Sullivan: En ce qui concerne une modification de la Constitution, la législature peut seulement présenter un projet de loi ne dépassant pas les limites fixées par la Constitution.
La législature ne peut apporter des changements que s'ils correspondent aux paramètres établis par cette modification de la Constitution. Un projet de loi provincial ne peut pas avoir préséance sur la Constitution, il doit la respecter. Dans trois ou quatre ans, la loi pourrait être modifiée, mais elle ne peut pas être contraire à la Constitution.
Je suis convaincu que, tout bien considéré, les habitants de cette province sont protégés. Les parents veulent pouvoir choisir, mais ils ne veulent pas que l'éducation religieuse disparaisse des écoles. Je vois une grande différence entre ce que prévoit la modification de la clause 17 et ce que serait pour nous un système scolaire public. Cette modification assure la protection de l'enseignement religieux.
Le sénateur Doody: Cet enseignement est garanti sous réserve du droit provincial d'application générale prévoyant les conditions de la création ou du fonctionnement des écoles.
M. Sullivan: Non, une protection est accordée à toutes les écoles, quelle que soit leur viabilité, en ce qui concerne l'éducation, la pratique et les activités religieuses. J'interprète cela comme s'appliquant à toutes les écoles.
Le sénateur Doody: C'est sous réserve du droit provincial, mais je m'en tiendrai là.
Le sénateur Rompkey: Je vous souhaite la bienvenue. Je vous félicite pour un exposé très clair et direct.
Je remarque, monsieur Sullivan, que vous vous exprimez non seulement en tant que chef de l'opposition officielle et que membre du caucus progressiste-conservateur, mais également en tant qu'enseignant catholique et que parent.
Je voudrais vous demander de consacrer quelques instants à parler en tant qu'enseignant catholique et que parent pour nous exposer votre point de vue à ces titres.
Pouvez-vous nous dire de façon générale ce que les enseignants de la province pensent de cette question? Pouvez-vous nous dire ce que les parents de la province en pensent?
M. Sullivan: Premièrement, j'ai enseigné pendant 20 ans dans une école catholique. Je ne peux pas parler au nom des enseignants puisque je n'enseigne pas en ce moment. Je peux parler en m'appuyant sur mon expérience personnelle d'enseignant et de parent d'enfants fréquentant notre système scolaire.
Je ne voudrais pas que nous ayons un système scolaire public dans cette province. Je ne crois pas que les enseignants souhaitent que nous ayons un tel système. Je pense qu'ils veulent que l'on conserve le droit d'offrir un enseignement religieux ainsi que des activités et une pratique religieuses au sein d'un milieu scolaire chrétien.
Toute cette question tourne autour des gens qui sont dans ce système et des catégories de personnes. Les parents veulent choisir les meilleures solutions pour offrir à leurs enfants la meilleure éducation possible. Je pense qu'une modification de la clause peut nous permettre d'aller plus loin que si cette clause n'était pas modifiée, sans supprimer l'enseignement religieux dans les écoles.
Je ne pense pas que cette modification fasse sortir la religion des écoles. Elle retire un certain contrôle à ce sujet, mais pas les pratiques religieuses fondamentales à chaque confession.
Le sénateur Rompkey: Les parents de votre circonscription vous ont dit, à vous et à vos collègues, ce qu'ils en pensaient. Nous avons entendu l'avis de parents des deux côtés; certains veulent aller de l'avant et d'autres se sentent menacés et préféreraient conserver le statu quo.
À votre avis, quel est le sentiment général des parents?
M. Sullivan: J'ai l'impression que les parents souhaitent une réforme structurelle du système. Ils veulent que nous utilisions notre argent de la façon la plus efficace possible en cette période de difficultés financières, mais ils ne veulent pas que l'on instaure pour cela un système scolaire public. Voilà mon impression. Ils veulent que certaines protections soient accordées à l'enseignement religieux au sein du système.
Le sénateur Rompkey: Pour ce qui est du système lui-même, vous avez parlé très clairement de la situation de l'enseignement à Terre-Neuve et de son niveau relatif par rapport à d'autres parties du pays. Je vous félicite d'avoir rétabli les choses.
Vous avez dit que les économies réalisées -- je crois que vous les avez évaluées à environ 14,3 millions de dollars -- pourraient être consacrées à améliorer encore le système.
Nous savons que les habitants de notre province peuvent faire jeu égal avec les autres. Nous savons que nos élèves peuvent obtenir de bons résultats. Nous savons également que cette province lutte pour assurer sa survie économique, qu'elle connaît encore un taux de chômage élevé, surtout parmi les jeunes, et que les choix sont limités. L'économie est de plus en plus axée sur le savoir. L'informatique et les satellites ont révolutionné la façon dont le monde fonctionne, la façon dont on échange des informations et dont les entreprises sont gérées. Si nos enfants n'ont pas les mêmes compétences que ceux du reste du monde, ils ne seront pas concurrentiels dans l'économie mondiale.
Pouvez-vous nous donner plus de détails à propos de la situation actuelle de la province et du système d'enseignement qu'il lui faudrait pour la préparer à l'entrée dans le 21e siècle?
M. Sullivan: J'ai cité le chiffre de 14,5 millions de dollars. Certains pourront en avancer d'autres. Le rapport de la Commission royale compare le système confessionnel le plus efficace au système interconfessionnel ou multiconfessionnel le plus efficace. C'est de là que vient ce chiffre de 14,5 millions de dollars.
Depuis la publication de l'étude de la Commission royale, le système actuel a évolué et la coopération et le regroupement ont entraîné des économies. Ce qui nous inquiète pour l'avenir est le déplacement de la population vers les villes qui se produit ici comme dans tout le Canada. Soixante pour cent de la population va résider dans les zones urbaines du Canada, tendance que l'on constate dans le monde entier. À Terre-Neuve, cela veut dire qu'il sera plus facile de choisir des écoles uniconfessionnelles, puisque le nombre d'élèves sera suffisant pour cela.
Une autre grave source d'inquiétudes est la perte nette de 8 000 habitants par an, provenant pour la plupart des régions rurales. Celles-ci sont décimées. La population d'un village de ma région est passée de 1 450 à 950 depuis 1990. Dans l'ensemble de la province, il y aura beaucoup d'autres villages aussi peu peuplés où il sera difficile de justifier le maintien des systèmes actuellement protégés par la Constitution.
Nous devons répartir les fonds de façon non discriminatoire. Cela peut se faire si l'on s'entend là-dessus et que l'on collabore à cette fin. Je félicite les confessions pour la coopération dont elles ont fait preuve au cours des quelques dernières années dans les écoles conjointes. Nous progressons assez rapidement. J'ai cité le nombre d'écoles et de conseils scolaires pour vous montrer à quelle vitesse nous évoluons. Toutefois, les effectifs diminuent à un rythme inquiétant à cause de la migration nette vers l'extérieur qui s'ajoute à la concentration de la population dans les villes. Nous aurons du mal à faire face à ces défis si notre système n'évolue pas suffisamment.
C'est un problème purement financier. Je ne plaide pas en faveur de règlements en matière de viabilité, quel qu'ils soient, qui élimineraient les possibilités de choix. Je suis aussi consterné que tout le monde de ne pas pouvoir en prendre connaissance. J'aimerais que l'on mette vraiment cartes sur table. Cela ne s'est pas fait, mais il n'y a aucune raison de refuser le droit à apporter des améliorations sans démanteler un système qui répond bien à nos besoins depuis de nombreuses années.
Le sénateur Rompkey: Le préambule de la résolution finale sur laquelle a voté l'Assemblée législative indiquait qu'il était essentiel qu'une nouvelle version de la clause 17 soit adoptée pour que les changements qui doivent être apportés d'urgence au système d'éducation de la province puissent être mis en oeuvre. Je suppose que ce vote portait implicitement sur le préambule qui constituait un appui sans réserve à la nouvelle version de la clause 17.
M. Sullivan: On pourrait certainement en tirer cette conclusion. Notre caucus a appuyé la résolution à l'unanimité. Nous n'avons pas examiné le préambule à part. Il n'est pas et il n'était pas question d'interpréter la résolution elle-même.
Le sénateur Ottenheimer: Je vous félicite, monsieur Sullivan, d'avoir si bien parlé de la qualité de notre système d'éducation. Les habitants de Terre-Neuve qui fréquentent les écoles ou qui y enseignent ont fait l'objet de nombreux commentaires qui révèlent une vaste ignorance au sujet de Terre-Neuve, comme si nous étions des gens arriérés qui faisons de notre mieux pour parvenir à rattraper un continent éclairé et tourné vers l'avenir. Vous avez fort bien répondu à une grande quantité d'informations erronées, parfois plutôt condescendantes.
Il est juste de dire que tous, que nous soyons ou non en faveur des modifications apportées à la clause 17, quelles que soient notre appartenance politique ou nos convictions religieuses et d'où que nous venions, nous sommes en faveur d'une amélioration du système d'éducation de Terre-Neuve.
Je voudrais porter brièvement mon attention sur la question des droits des minorités. À mon avis, avis partagé par beaucoup sinon par tout le monde, l'harmonie entre les citoyens, la nature même d'une société pluraliste, nécessite le respect des droits des minorités. Je ne veux pas jouer sur les mots. Nous n'en sommes plus là. Je suppose que l'on pourrait dire que chaque personne constitue une minorité, mais il est évident que les pentecôtistes, qui représentent 7 p. 100 de la population, forment une minorité et les 37 p. 100 de catholiques aussi.
Je crois comprendre que les communautés unifiées souhaitent que l'on protège le droit des catholiques et des pentecôtistes, par exemple, à l'enseignement religieux et à la pratique de la religion à l'école. Elles ne souhaitent pas nécessairement exercer d'autres activités de gestion. Je n'ai rien à opposer à cela.
Toutefois, en ce qui concerne les minorités qui désirent pratiquer d'autres activités de gestion, le libellé du nouveau projet de la clause 17 assujettit leurs droits à cet égard exclusivement au bon vouloir de la législature provinciale. Il stipule: «sous réserve du droit provincial d'application générale prévoyant les conditions de la création et du fonctionnement des écoles».
Cela relève exclusivement de la compétence de la province. Je ne veux pas dire qu'elle ne devrait pas avoir son mot à dire, puisque l'éducation est une responsabilité provinciale, mais ici, c'est exclusivement de son ressort.
Je prierai instamment tous mes collègues d'envisager l'inclusion d'une expression du type «lorsque le nombre le justifie». Elle est vague, mais elle reflète un certain passé et une certaine expérience judiciaires, constitutionnelles et juridiques. Bien sûr, c'était dans le domaine des droits linguistiques et non pas dans celui des droits confessionnels, mais, au moins, la législature provinciale n'a pas l'exclusivité du pouvoir puisqu'il existe toujours la possibilité d'un renvoi devant les tribunaux.
Voyez-vous un intérêt à cela ou êtes-vous, de quelque façon que ce soit, en mesure d'inviter le comité du Sénat à appuyer un amendement remplaçant le fait de devoir dépendre exclusivement de la province par une disposition du type «lorsque le nombre le justifie»?
M. Sullivan: Il serait relativement difficile d'inclure les chiffres correspondants dans la Constitution, étant donné que ce qui représente actuellement un nombre approprié, compte non tenu des déplacements de population, n'en sera peut-être plus un dans quatre ans, surtout compte tenu du taux de migration net vers l'extérieur de notre province dans certains secteurs. Devrons-nous demander chaque fois une modification de la Constitution? Les mouvements de population sont plus importants dans notre province que dans d'autres et notre population diminue.
L'expression «lorsque le nombre le justifie» s'applique aux écoles uniconfessionnelles, comme l'a signalé le sénateur Doody. Je pense qu'elles pourraient être assujetties aux règlements provinciaux sur la viabilité. Toutefois, on prévoit certainement la nécessité que le nombre d'élèves soit suffisant et, ce qui est important, que les parents aient à choisir d'avoir une école uniconfessionnelle. C'est un facteur très important. Il ne faut pas seulement que le nombre le justifie, mais également que les parents en expriment le désir. De quelle façon cet élément interviendrait-il?
C'est une des raisons pour lesquelles j'aurais aimé savoir comment on définit ce qu'est une école viable. Nous l'avons demandé à la législature l'année dernière. J'aimerais voir le projet de loi. Au début, on a lancé toutes sortes de chiffres; on a parlé de 90 p. 100 ou de 50 p. 100 plus un. Je n'en sais toujours rien. Les députés de l'opposition aimeraient beaucoup voir ce document, mais il n'a pas encore été présenté. Il n'est pas encore entré en ligne de compte.
Nous avons utilisé ce que nous savions concrètement et théoriquement et nous sommes arrivés à une conclusion sur cette base. Si nous avions eu des éléments différents, nous les aurions examinés en bonne et due forme.
Ce que vous dites me paraît extrêmement intéressant.
Le sénateur Ottenheimer: Je suis d'accord pour que la préférence des parents soit également une condition à respecter et je conviens avec vous que les nombres changent. Toutefois, il s'agit d'avoir une sorte d'entité en dehors de la législature provinciale. Il est évident que, vu que les nombres changent, un tribunal ne se prononcerait pas de la même façon dans un an et dans cinq ans. Je vous invite à penser aux répercussions d'une garantie prenant la forme d'un renvoi aux tribunaux.
Le sénateur Jessiman: À la page 1 de votre mémoire, vous citez trois raisons fondamentales, dont la deuxième se lit comme suit:
[...] le gouvernement de Terre-Neuve a reçu, en fait, lors des élections de 1996, un mandat favorable à cette démarche.
Est-ce parce que le résultat du référendum était de 55 p. 100 et que, de ce fait, il vous paraissait clair que le gouvernement avait reçu le mandat d'adopter une disposition législative de ce type?
M. Sullivan: Non.
Le sénateur Jessiman: Vous ne pensez pas que le référendum avait quoi que ce soit à voir avec cela.
M. Sullivan: Je n'ai pas dit que le référendum pouvait être la justification de ce mandat. J'ai cité trois raisons pour lesquelles notre caucus a unanimement approuvé cette résolution et la deuxième raison concernait les élections générales de 1996.
Lors des élections de 1993, on n'avait pas parlé de la modification de la clause 17. Avant la campagne, le 12 mars 1993, devant l'Assemblée législative et en présence des dirigeants des Églises qui étaient dans la tribune, le premier ministre d'alors a assuré qu'il ne prévoyait aucunement ni n'avait l'intention de chercher à faire adopter une modification de la Constitution qui aurait une incidence sur la réforme de l'enseignement ou l'annulerait.
Depuis 1993, le gouvernement n'avait reçu aucun mandat de la population. En fait, il a dit très précisément, au début de la campagne, qu'il ne chercherait pas à faire modifier la Constitution.
Au début de la campagne électorale de 1996, M. Tobin a signalé que, en ce qui concerne cette réforme, il continuerait les initiatives entreprises par son prédécesseur lorsqu'il avait changé de politique à cet égard en 1995. M. Wells avait alors décidé de chercher à faire modifier la Constitution, et M. Tobin disait qu'il avait le même objectif. Il faisait référence au livre rouge des Libéraux et à la façon dont la population s'était exprimée.
Je ne peux pas dire si c'est pour cela que M. Tobin a agi ainsi, mais je peux dire que, à l'ouverture de la campagne électorale de 1996, le premier ministre d'alors a dit que le gouvernement allait s'engager sur cette voie et qu'il n'a rencontré aucune opposition importante. C'est pour cette raison que cela n'est pas devenu un des principaux enjeux de la campagne électorale de 1996.
C'est seulement l'une des choses que notre caucus a prises en considération pour prendre sa décision finale.
Le sénateur Jessiman: Si le référendum s'était traduit par un résultat opposé avec 55 p. 100 des voix pour le «non», reconnaîtrez-vous avez moi que la situation serait différente aujourd'hui?
M. Sullivan: Il s'agirait alors de quelque chose de théorique et d'hypothétique.
Le sénateur Jessiman: J'ai le document qui a été envoyé dans tous les foyers et d'après lequel ce problème ne peut être réglé que si les Églises acceptent le changement. Les déclarations des dirigeants de toutes les Églises -- les Églises regroupées, les catholiques, les pentecôtistes, les adventistes du septième jour -- montraient qu'ils pensaient pouvoir être d'accord. Je n'approfondirai pas plus cette question, mais je suis surpris qu'ils aient pensé être proches d'un accord et que tout se soit ensuite écroulé.
On retrouve cela également à plusieurs reprises dans ce document. Je lis maintenant le dernier paragraphe figurant sous le titre: «Comment la clause 17 sera-t-elle transformée?».
[...] il pourra y avoir des écoles pour chacune des confessions lorsque le nombre le justifie...
Plus loin, sous le titre «Quelques questions et réponses», la dernière phrase du dernier paragraphe se lit comme suit:
Les parents peuvent toutefois choisir des écoles appartenant à leur propre confession lorsque le nombre le justifie...
Cette expression est utilisée aussi dans d'autres parties de ce document.
À mon avis, les pentecôtistes et les catholiques pensaient certainement que cela voulait dire lorsque le nombre le justifie et que les parents donnent leur consentement. Sous sa forme actuelle, ce document ne mentionne pas «lorsque le nombre le justifie» ni le consentement des parents. On laisse à la législature le soin de déterminer cela. J'aurais l'impression que le gouvernement, de même que l'opposition, devraient convenir qu'il devrait y avoir quelque part dans ce document les termes «lorsque le nombre le justifie» et «sous réserve du consentement des parents». Ils n'y sont pas.
Les gens vont de l'avant maintenant et on est à la merci d'un gouvernement donné. On pourrait dire: «Bon, s'il fait ce qu'il ne faut pas faire, on pourra le mettre dehors l'année prochaine». Toutefois, ceci sera inscrit dans la Constitution et cela m'inquiète.
M. Sullivan: C'est très juste et cela nous préoccupe également. Nous avions espéré avoir des indications précises sur le projet de loi, mais le premier ministre a également employé les expressions «lorsque le nombre le justifie» et «consentement des parents». Lorsque je lui ai demandé de confirmer ces cinq points, il a répondu en citant «lorsque les parents le désirent et que le nombre le justifie». Nous ne connaissons pas encore les chiffres correspondants. J'aimerais bien les connaître.
Dans mon exposé, nous avons dit que le fait de ne pas avoir ces éléments nous préoccupait, mais nous devions utiliser l'information dont nous disposions et en tirer la meilleure conclusion possible. Notre jugement a été unanime compte tenu de tous les facteurs présentés.
Ce que vous proposez est extrêmement intéressant. C'est logique et cela ne poserait pas de grosses difficultés. L'objectif de ce qui a été présenté dans cette brochure et qui a été dit à la législature est que l'un des critères présidant à la désignation d'écoles uniconfessionnelles -- et personne ne le nie -- est la notion de souhait des parents et de nombre suffisant. C'est l'élément fondamental. Je ne pense pas que cela pose de problèmes, sinon en ce qui concerne les nombres à atteindre. C'est quelque chose que j'aimerais beaucoup savoir à l'avance.
Le sénateur Jessiman: Bien des députés provinciaux espèrent que le gouvernement agira de façon raisonnable et responsable. Ce sera peut-être le cas, mais le problème est qu'un autre gouvernement, avec le libellé actuel, pourrait éliminer les écoles confessionnelles en relevant trop les chiffres. C'est la position dans laquelle nous nous plaçons en adoptant cette modification parce que ce critère figure alors dans la Constitution. Ce n'est pas facile à modifier. Une fois qu'il est là, c'est de la dynamite.
M. Sullivan: Il y aura des audiences publiques au sujet de la viabilité des écoles dans l'ensemble de la province à partir de l'automne, je pense. Je crois savoir que le projet de loi ne sera pas adopté avant. Chacun peut penser ce qu'il veut de l'effet que cela aura sur ce processus.
Le sénateur Lewis: Monsieur Sullivan, je suppose que vous êtes un partisan convaincu du système démocratique.
M. Sullivan: En effet.
Le sénateur Lewis: Je pensais que vous répondriez cela.
La population s'exprime par l'intermédiaire de ses représentants élus. Le corollaire en est que les législateurs sont et devraient être à l'écoute des souhaits de la population, l'électorat. Je suppose que cela s'applique également à vous.
La formule «sous réserve du droit provincial d'application générale» a suscité certaines inquiétudes. Êtes-vous convaincu que la législature exercera ces droits de façon raisonnable et responsable?
M. Sullivan: Je ne peux pas parler au nom des gens qui ne sont pas membres de notre caucus. Je peux seulement parler au nom de notre caucus.
Le sénateur Lewis: Vous avez des réserves au sujet des autres.
M. Sullivan: Je ne peux pas parler de ce que le gouvernement va faire. Je peux signaler que certains événements ne m'ont pas inspiré une grande confiance quant à la capacité du gouvernement à faire ce qu'il dit qu'il va faire.
Dans notre caucus, nous avons examiné le fond de la question et essayé d'éviter de spéculer au sujet de ce qui pourrait se produire. Nous avons essayé de composer avec les renseignements fournis. Je pense qu'il est prévu que toutes les écoles de la province pourront offrir un enseignement religieux ainsi qu'une pratique et des activités religieuses. L'existence d'écoles uniconfessionnelles est également prévue, sous réserve, bien entendu, du droit provincial. Ce serait un élément délicat. Nous voulions savoir ce qu'il en était. Toutefois, tout bien considéré, nous nous sommes prononcés sur la base de l'ensemble des renseignements présentés et nous ne pensions pas devoir retarder quoi que ce soit simplement parce que nous n'avions pas pris connaissance des détails.
Nous ne voulions pas voter pour ou contre le processus. Il ne nous plaisait pas depuis le début. Le 31 mai, l'Assemblée législative a brutalement terminé ses travaux. La décision a d'ailleurs été prise le jour même. La modification de la clause 17 a pris forme pendant l'été, avant même la rentrée et la reprise de la session. J'ai dit en Chambre que je considérais cela comme un affront personnel du fait que j'avais été élu pour représenter la population de ma circonscription et que je ne pouvais pas contribuer au débat sur le libellé de la modification de la clause 17 de façon à ce que la législature puisse faire des propositions à ce sujet. L'Assemblée nationale du Québec a débattu de sa question, mais pas nous. La démarche suivie ne m'a pas plu. Nous nous en sommes plaints à l'Assemblée législative. Je ne me suis cependant pas laissé aveugler par ce processus, même si cela aurait été facile.
Pour moi, cette décision repose sur la recherche de la meilleure solution pour les enfants de notre province dans une période de difficultés financières et de diminution des effectifs scolaires. Nous voulons fournir la meilleure éducation possible sans éliminer certains droits en matière de religion ou certaines pratiques religieuses qui existent dans notre système scolaire à la suite d'une longue évolution. C'est ce qui était au coeur de la discussion. Notre caucus en a débattu longuement; j'ai personnellement participé à cette discussion. J'ai travaillé à l'intérieur de ce système pendant 20 ans. J'ai trois enfants qui fréquentent ces écoles. J'ai été critique responsable de l'éducation, même si j'occupe maintenant un poste différent. J'ai examiné cette question sous de nombreux angles et dans de nombreuses optiques différentes.
Nous parlons de la démocratie et des procédés démocratiques. Avant ces élections, le mandat que le gouvernement avait reçu en 1993 était de ne pas modifier la Constitution puisque le premier ministre avait promis qu'il ne le ferait pas. Nous n'avions donc pas de solides raisons d'appuyer une modification de la Constitution lorsque nous nous sommes présentés devant l'électorat en 1993, période où la controverse au sujet de l'éducation faisait rage dans notre province. En 1996, le gouvernement s'est présenté à nouveau devant la population quand cela n'était pas un enjeu et il a indiqué qu'il allait maintenant chercher à faire modifier la Constitution. Je pense que c'est un modèle de comportement démocratique et c'est un des principaux facteurs dont nous avons discuté avant de prendre notre décision.
Le sénateur Lewis: Vu les raisons que vous venez d'énoncer, vous avez l'impression que nous devrions aller de l'avant avec cette modification.
M. Sullivan: Oui.
Le sénateur Lewis: Et voir ensuite ce qui se passe.
M. Sullivan: Eh bien, c'est vous qui exprimez cela en ces termes, sénateur. Notre caucus est d'avis que nous devrions aller de l'avant et que c'est dans notre intérêt. Nous ne pouvons pas nous laisser aveugler par d'autres facteurs. Nous devons penser à notre objectif, savoir à quoi nous voulons parvenir et ce que nous devons faire sans nous laisser dissuader. Certaines personnes aimeraient peut-être laisser les événements politiques ou autres influencer leur décision finale, mais il est important de ne pas nous laisser détourner de cette voie parce que ce sont nos enfants qui en souffriraient.
La présidente: Vous avez dit que l'une des raisons de votre attitude était le respect du résultat des élections de 1996 et vous avez établi une nette distinction entre le mandat donné en 1993 et celui de 1996. En 1996, y avait-il un parti politique qui était opposé à la clause 17?
M. Sullivan: Ce n'était pas l'un des grands enjeux de la campagne. Au départ, notre parti avait indiqué avant ces élections et depuis 1993 qu'il ne faudrait pas modifier la Constitution. Il nous paraissait important de travailler sur cette question à l'intérieur même du système pour parvenir à un accord. Notre parti désirait une réforme structurelle et nous voulions que cette réforme soit axée sur l'enseignement en classe. Cette question n'a suscité aucune controverse dans ma circonscription qui est probablement catholique à 97 p. 100. Je n'ai sans doute pas reçu plus de deux ou trois appels ou interventions à ce sujet au cours des trois dernières années dans ma circonscription.
Il y avait de nombreux autres enjeux et cette question était en bas de la liste. Elle n'a même pas été abondamment discutée pendant la campagne. Je ne sais pas pourquoi, mais c'est ce qui s'est passé. On semblait penser que le gouvernement allait s'engager sur une certaine voie, que c'était apparemment un fait accompli et que la population était disposée à l'accepter. C'est comme cela que j'interprète la situation et c'est ce qui s'est produit.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Sullivan, pour votre exposé de ce matin.
Le prochain exposé sera présenté par M. Jack Harris, chef du Nouveau Parti démocratique de Terre-Neuve et du Labrador.
M. Jack Harris, chef du Nouveau Parti démocratique de Terre-Neuve et du Labrador: Madame la présidente, honorables sénateurs, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole devant vous au sujet de la réforme de l'enseignement dans la province de Terre-Neuve. On met en quelque sorte la charrue avant les boeufs. En fait, ce que nous faisons depuis quelques jours aurait dû avoir lieu avant le référendum de septembre 1995, car nous n'avons pas eu une telle possibilité de discuter de façon détaillée des dispositions de la nouvelle version de la clause 17 à une tribune publique comme celle-ci. Je me ferai l'écho de certains des propos de M. Sullivan en disant que nous ne sommes certainement pas satisfaits de la procédure suivie et de la façon dont nous en sommes arrivés à la situation actuelle.
Paradoxalement et malheureusement, mes préoccupations relativement à la procédure suivie au moment du référendum étaient très semblables à celles du premier ministre Wells en ce qui concerne l'Accord du lac Meech; en effet il n'y avait pas eu un débat public suffisant et la population de l'ensemble de la province n'avait pas pu y contribuer; les questions relatives au libellé exact de la résolution n'avaient manifestement pas pu être discutées avant le référendum lui-même. Comme je l'ai dit, ce débat a lieu maintenant au lieu d'avoir eu lieu à ce moment-là.
Je suis toutefois heureux que le Sénat s'intéresse à la question de la réforme de l'enseignement à Terre-Neuve. J'espère qu'il s'intéressera tout autant aux conséquences des changements apportés par le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, à l'affaiblissement de l'engagement national en faveur de l'équité régionale et à ses conséquences sur l'éducation dans notre province, car nous savons tous qu'il existe une corrélation très élevée entre la présence d'enfants insuffisamment nourris, la pauvreté, le chômage, d'une part, et la promotion sociale et les résultats scolaires, d'autre part. J'espère que le Sénat reviendra étudier ces questions et voir dans quelle mesure l'évolution de l'engagement national en faveur de l'équité régionale conditionne la capacité de provinces comme Terre-Neuve à offrir de nouvelles chances à leurs habitants.
Je voudrais dire que, à mon avis, les élèves de Terre-Neuve et les résultats qu'ils obtiennent, non seulement à l'intérieur de la province mais également ensuite, au niveau national et international, n'ont rien à envier à personne. Nous pouvons citer des centaines et des centaines d'exemples d'excellentes contributions des habitants de Terre-Neuve, non seulement à l'intérieur de la province, mais dans notre pays et partout ailleurs. Les gens qui sortent de notre système d'enseignement n'ont aucune raison d'avoir honte de l'éducation qu'ils ont reçue et des compétences qu'ils ont acquises.
Nous avons toutefois des problèmes systémiques. Nous consacrons à l'enseignement un pourcentage de notre budget plus élevé que n'importe quelle autre province, mais nos dépenses par élève sont néanmoins inférieures de 1 000 $ à la moyenne nationale. Nous constatons que nous devons consacrer une part plus importante de nos ressources à l'enseignement. Nous continuons d'y affecter moins de ressources que la moyenne nationale et nous avons donc un problème structurel à cet égard. Je dis cela simplement pour replacer certains des problèmes auxquels nous faisons face dans leur contexte.
En ce qui concerne le projet de clause 17, le Nouveau Parti démocratique a été le premier parti à appuyer officiellement dans cette province la réforme de l'éducation pour ce qui est des changements à apporter au système confessionnel. Notre appui était dû à des raisons économiques, au désir d'améliorer la productivité du système, d'éviter tout double emploi, mais aussi à des questions de principe. On ne permettait pas suffisamment la participation des gens qui n'appartiennent pas à une religion ou qui ne sont pas chrétiens et nous pensions qu'il n'était pas nécessaire de compartimenter la population en fonction de l'appartenance religieuse.
Nous avons, à Terre-Neuve, un système unique et nous vous soumettons, avec le projet de clause 17, un ensemble unique de droits applicables à Terre-Neuve qu'on ne retrouve dans aucune autre province. Lorsque Terre-Neuve s'est fédérée au Canada en 1949, il n'existait aucun droit constitutionnel en matière d'éducation dans la province. Les dispositions législatives appartenaient à l'histoire de Terre-Neuve.
Je me permettrai de dire, et cela peut faire l'objet d'un débat, que je ne pense pas que les négociations relatives à la clause 17 visaient à protéger les droits des minorités, du moins pas dans le sens de ce que les catholiques de l'Ontario ou les protestants du Québec, qui ont un système séparé et non pas public, ont cherché à obtenir. Ces provinces ont bénéficié de la protection de l'article 93, probablement pour éviter la situation qui s'était produite 100 ans plus tôt aux États-Unis où les écoles séparées ne devaient recevoir absolument aucune aide financière du gouvernement. Je pense que l'on craignait surtout que l'avènement de la Confédération ait le même effet au Canada. À Terre-Neuve, bien entendu, on disait notamment que la Confédération remplacerait le système purement confessionnel par un système dans lequel existeraient des écoles d'où Dieu serait totalement absent ou par des écoles publiques. La clause 17 a en quelque sorte gelé le statu quo pour tout le monde, et non pas pour une minorité particulière souhaitant être protégée parce qu'elle craignait de perdre ses droits relativement à ses propres écoles.
Notre situation était unique à l'époque et elle l'est encore aujourd'hui. Je ne connais aucune autre province ou aucun autre pays du monde où les catholiques, les anglicans, les presbytériens, les membres de l'Armée du Salut, l'Église unifiée, les pentecôtistes et les adventistes du septième jour aient le droit constitutionnel d'enseigner la religion dans toutes les écoles. C'est ce qui se passe à Terre-Neuve et au Labrador. Je ne sais pas où cela existe où que ce soit dans notre pays ou même dans le monde. Après l'adoption de cette clause 17, en supposant qu'elle finira par être adoptée, le système de notre province continuera d'être unique.
Nous avons tenu un référendum. Il ne nous a beaucoup éclairés, à mon avis. La campagne s'est déroulée pendant l'été. Des deux côtés, on a peut-être cherché à trop simplifier son enjeu. En d'autres termes, si on était en faveur de la réforme, on était censé voter «oui» et si on était en faveur du statu quo, on était censé voter «non». Cela ne favorisait guère les nuances ou la tenue d'un débat comme celui que nous avons maintenant.
J'ai personnellement voté «non» pour les raisons que j'ai énoncées. La procédure choisie m'irritait et la population n'avait pas suffisamment eu l'occasion de discuter le bien-fondé des détails de cette question. J'éprouvais également certaines des préoccupations que certains sénateurs ont exprimées au cours de cette séance à propos des conséquences de la formule «sous réserve du droit provincial». Quel effet a-t-elle sur ces droits? Ces droits existent-ils réellement? Vu ce qu'ont connu dans l'histoire les gens qui voulaient avoir des écoles séparées, en particulier les pentecôtistes et les catholiques, il était juste qu'ils aient des droits constitutionnels supérieurs à ceux offerts par le projet de clause 17.
Il n'y a pas eu de débat avant l'ouverture de la session de la législature à l'automne 1995. J'ai participé à ce débat et j'ai proposé des modifications. En fin de compte, nous nous sommes retrouvés avec la clause 17 telle que vous la voyez maintenant. En même temps que la majorité des 30 personnes présentes dans l'assemblée, j'ai voté en faveur du projet de clause 17.
Depuis lors, des élections ont eu lieu et les gens ont dit ce qu'ils en pensaient. J'étais chef d'un parti politique. À ce titre, on ne m'a pas demandé si, à mon avis, la version de la clause 17 proposée devait ou non être appliquée intégralement telle qu'adoptée par l'Assemblée législative et la législature. Comme d'autres l'ont dit, il n'y avait pas à en débattre. Il n'y avait aucune question à se poser au sujet de la déclaration très claire figurant dans le manifeste libéral. Personne n'a tenté de faire obstacle à la clause 17 pendant les élections.
Depuis lors, la clause 17 a été adoptée par l'assemblée. Je suppose que cela a donné au gouvernement le mandat de procéder à un référendum et je pense que cela règle, au moins au plan politique, le problème de la position adoptée par le premier ministre Wells en 1993. Cela a une valeur politique, mais pas constitutionnelle. Il y a eu des élections et tous les députés de l'Assemblée législative préfèrent reléguer cela dans le passé et s'occuper du projet de clause 17.
Je ne pense pas que la modification constitutionnelle proposée prive les catholiques, les pentecôtistes, les membres de l'Église unifiée ou n'importe quelle autre confession protégée du droit de pratiquer leurs activités religieuses dans toutes les écoles, ni de celui d'avoir des écoles uniconfessionnelles quand les circonstances s'y prêtent. Je pense toutefois qu'un transfert est nécessaire, un transfert de pouvoirs institutionnels et de contrôle vers les parents, les citoyens et les membres de la catégorie concernée. C'est un transfert constitutionnel d'un système autocratique à un système démocratique par rapport à la situation de 1949 telle qu'elle était figée dans la version originale de la clause 17. Je ne veux pas dire que l'une quelconque des Églises agisse aujourd'hui de façon autocratique en matière d'enseignement, ni même qu'on la laisserait faire. Néanmoins, la nouvelle clause 17 établit clairement que les droits détenus par une catégorie doivent être exercés démocratiquement par l'entremise des élections aux conseils scolaires, et je pense que c'est un changement opportun et positif.
Certains considèrent à juste titre que ce processus leur porte préjudice. Ils ont l'impression que la procédure suivie, surtout pendant l'été du référendum, ne permettait pas suffisamment d'exprimer des idées contraires ou de proposer d'autres options et que cela allait à l'encontre de la sensibilité et des préoccupations légitimes des gens qui s'opposaient à ce référendum ou à ce changement. Toutefois, j'espère que le processus actuel facilitera une compréhension, une réconciliation et un regroupement ultérieurs.
Je ne pense pas que cela représentera, à longue échéance, un éclatement de notre population et un glissement vers le sectarisme. Cela me paraît très important et je trouve également très important que nous considérions ce débat comme une chose du passé et que nous nous tournions vers l'amélioration des écoles pour nos enfants et pour l'avenir.
Le sénateur Beaudoin: Ce qui me préoccupe est la première clause de l'alinéa b) qui stipule «sous réserve du droit provincial». Ce n'est pas la première fois dans notre pays que nous avons une telle formule constitutionnelle.
Depuis plus d'un siècle au Québec et en Ontario, depuis un siècle au Manitoba et depuis un siècle en Saskatchewan et en Alberta, c'était l'inverse. En d'autres termes, l'éducation est partout du ressort des provinces. Toutefois, là où existent des droits confessionnels, chaque législature provinciale est tenue de les respecter. Or, dans cette province, vous voulez faire exactement l'inverse. Vous dites que les droits confessionnels sont protégés, mais ils sont désormais assujettis au droit provincial d'application générale. Si c'est ce que veut la population, c'est, bien entendu, parfaitement légal.
Je viens d'une province qui a eu des problèmes semblables aux vôtres dans le sens où la population du Québec voudrait modifier l'article 93 pour diviser les écoles en écoles françaises et écoles anglaises tout en conservant les écoles confessionnelles et le droit à de telles écoles. Évidemment, s'il y a une modification au Québec, elle se fera sur le modèle de l'article 93, mais les écoles ne seront plus divisées selon la religion mais selon la langue.
Je le dis parce que c'est important. C'est le texte de la Constitution et non pas simplement celui d'une loi. Bien entendu, Terre-Neuve jouit d'une compétence totale en matière d'enseignement. Vous avez des écoles confessionnelles et vous pouvez faire ce que vous voulez à leur sujet. Vous pouvez modifier la clause 17 si vous respectez la formule d'amendement. Cela ne pose pas de problème. Toutefois, je trouve problématique de dire dans la Constitution que le droit à des écoles confessionnelles est garanti sous réserve de la volonté exprimée par la majorité des membres de l'Assemblée législative.
Nous faisons généralement l'inverse. Nous protégeons les droits contre l'évolution des majorités parce que nous sommes d'avis que ces droits ne devraient pas changer tous les ans ou tous les quatre ans. Pour moi, la protection est exactement le contraire de cela. Vous donnez à l'Assemblée législative carte blanche pour changer le système, mais cela va plus loin. Vous lui accordez une carte blanche constitutionnelle à cette fin. Il lui suffit d'une loi pour changer le système comme elle l'entend, pourvu que la loi soit uniforme et d'application générale.
Je le répète, c'est parfaitement légal, mais cela m'étonne un peu parce que c'est le contraire de la protection constitutionnelle.
M. Harris: Sénateur, vous avez cristallisé une préoccupation que vous et d'autres n'êtes pas les seuls à avoir, mais que je partage également.
Je ne suis pas d'accord à ce moment-ci pour les raisons suivantes. Le projet de clause 17 énonce des droits positifs au lieu d'imposer des interdictions. Tous les autres droits du type de l'article 93, si vous voulez les appeler ainsi, ne sont pas énoncés expressément. On dit simplement qu'on ne peut pas faire quelque chose qui aura un effet préjudiciable sur un droit quelconque qui existait à un moment donné dans le passé. Nous ne savons pas nécessairement en quoi ils consistent tant qu'ils n'ont pas été testés. Dans le présent cas, la clause 17 énonce ces droits.
Je ne pense pas que l'on donne carte blanche à la législature provinciale parce que tous les droits ne sont pas assujettis à la législation provinciale. C'est seulement le cas pour les écoles uniconfessionnelles à l'alinéa b). Les droits accordés par 17a) n'y sont pas assujettis. En d'autres termes, le droit d'assurer l'enseignement religieux, l'exercice d'activités religieuses et la pratique de la religion aux enfants appartenant à cette catégorie dans toutes les écoles confessionnelles ne dépend pas de la législation provinciale une fois qu'il existe une école uniconfessionnelle. L'alinéa 17c) n'est pas assujetti à la législation provinciale puisque, une fois qu'une école a été créée en vertu du sous-alinéa b)(i), la catégorie de personnes concernée continuera d'avoir le droit d'assurer l'enseignement religieux, l'exercice d'activités religieuses et la pratique de la religion et de régir les activités académiques touchant aux croyances religieuses, la politique d'admission des étudiants et l'affectation et le congédiement des professeurs. Une fois que l'école a été créée, la législature ne peut pas dire: «Vous devez exercer ces droits de telle ou telle façon», ou «Nous allons les limiter de telle façon». C'est seulement au moment de l'établissement d'une école uniconfessionnelle que la législature provinciale a son mot à dire.
On est facilement tenté d'interpréter la formule «sous réserve du droit provincial» comme signifiant que la législature peut faire ce qu'elle veut. Je pense que le droit provincial a un champ d'application limité. Il ne peut s'agir que des dispositions stipulant dans quelles conditions une école peut être créée ou fonctionner. Les tribunaux devraient interpréter cela en tenant compte de la taille et de la viabilité de l'école et seulement de ces facteurs-là.
Ces considérations répondent, à mon avis, à votre préoccupation, pour aussi légitime qu'elle soit.
Le sénateur Beaudoin: Je ne me livre à aucune interprétation hâtive et je ne veux pas non plus le faire. Je me contente de suivre le texte.
Dans la province de Terre-Neuve et pour ladite province, la législature a le pouvoir exclusif d'édicter des lois sur l'enseignement, mais...
a) sauf dans la mesure prévue aux alinéas b) et c)...
Le sous-alinéa b) stipule:
sous réserve du droit provincial...
Il est évident que le pouvoir de la province en matière d'éducation est prépondérant. Il n'y a aucun doute à ce sujet. Il est toutefois aussi prépondérant en ce qui concerne les droits confessionnels, et c'est cela qui m'inquiète un peu.
Vous dites ici qu'elle a un pouvoir exclusif en matière d'enseignement, sauf dans la mesure prévue à l'alinéa b) qui commence par les termes «sous réserve du droit provincial». Qui a la primauté? C'est la législature, et non pas la Constitution.
M. Harris: Une fois de plus, je ne suis pas d'accord. La référence aux alinéas b) et c) à l'alinéa a) a seulement pour effet de dire que les adventistes du septième jour ne seraient pas autorisés à enseigner la religion dans une école uniconfessionnelle ou catholique. C'est le seul effet des alinéas b) et c) de la clause 17. Voilà comment je l'interprète, sénateur. Ces droits sont distincts. Les droits en vertu des alinéas 17a), 17c) et 17d) sont tous distincts.
Le sénateur Jessiman: Vous avez parfaitement raison, à part que le sous-alinéa b)(i) dit que oui, pour ce qui est du c), l'alinéa a) vous reconnaît ces droits, mais le gouvernement ne vous donne pas d'argent. Voilà ce que dit b)(i). Toutes les catégories de personnes mentionnées auront droit à avoir une école confessionnelle financée par les deniers publics et la législature peut annuler ce financement. Voilà ce que cela veut dire. Bien sûr, on peut aller de l'avant, mais sous réserve du droit de la province. Celle-ci pourrait imposer, comme règle applicable à tout le monde, que le pourcentage requis pour avoir une école confessionnelle est de 95 p. 100 des enfants d'un secteur donné, ou 99 p. 100. C'est très important. Ces gens ne recevront aucun financement.
Ils peuvent aller de l'avant. Il n'y a pas besoin de la clause 17 pour cela. Ils n'auront aucun mal à avoir une école confessionnelle s'ils en assument le coût. L'aspect financier est important.
M. Harris: À mon avis, l'aspect financier est réglé par l'alinéa 17d) qui stipule que toutes les écoles créées en vertu des alinéas a) et b) ont droit à leur part des deniers publics.
Le sénateur Jessiman: Pas en vertu du sous-alinéa b)(i). Il stipule que, sous réserve de cette disposition, le gouvernement verse de l'argent pour la création d'une école confessionnelle. Il pourrait adopter un projet de loi établissant que, pour qu'il y ait une école catholique dans un secteur déterminé, 95 p. 100 des gens doivent être catholiques. Vous savez ce que cela voudrait dire. Il n'y en aurait pas. Si ce chiffre n'est pas atteint, pas de financement. Voilà ce que cela veut dire. C'est comme cela que je l'interprète.
La présidente: Je pense que c'est un désaccord sur un point de droit et je ne crois pas que nous allons le régler ici aujourd'hui.
Le sénateur Lewis: Vous avez dit dans votre déclaration d'ouverture que, avant 1949, aucun droit n'était garanti. Le système dépendait entièrement du droit de Terre-Neuve, qui pouvait bien entendu être modifié n'importe quand. Jusqu'à 1949, tout le système était, pourrait-on dire, à la merci de la législature de Terre-Neuve ou de la commission du gouvernement. Ce système a paru bien marcher pendant presque 100 ans.
M. Harris: Il semblait bien marcher dans le sens que toutes les confessions recevaient un financement et avaient des droits garantis et protégés. Je pense qu'on est très sensible aux problèmes confessionnaux dans cette province à cause des conflits sectaires qui avaient lieu pendant les élections il y a une centaine d'années. Les habitants de Terre-Neuve ont fait preuve d'un esprit de conciliation et de tolérance relativement à ces problèmes qui inspire le respect. En fait, je crois que le Taoiseach d'Irlande, qui était ici récemment, a vanté le fait que Terre-Neuve soit capable d'avoir une société au sein de laquelle des gens différents, de confessions différentes et d'origines culturelles différentes sont traditionnellement capables de se tolérer mutuellement et de travailler ensemble. Je pense que la clause 17, si elle est modifiée ainsi, permettra qu'il continue d'en être ainsi.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Harris, pour votre exposé de ce matin.
Nous avons maintenant avec nous l'honorable Roger Grimes, ministre de l'Éducation du gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador. Il est accompagné de deux de ses collaboratrices. Monsieur Grimes, nous vous serions reconnaissants d'identifier les personnes qui sont avec vous et vous pourrez ensuite commencer votre exposé.
L'honorable Roger Grimes, ministre de l'Éducation, gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador: Merci, madame la présidente et honorables sénateurs. Je suis heureux de cette occasion d'intervenir devant vous au nom du gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador. Je suis également heureux que le Sénat ait pris le temps d'étudier à fond cette question au cours des trois derniers jours ici et lors de vos audiences à Ottawa.
Je suis également heureux que, ce matin, vous ayez entendu l'opinion des deux autres partis politiques en activité dans notre province, le Parti progressiste-conservateur, l'opposition officielle, représenté par M. Sullivan, et le Nouveau Parti démocratique, représenté par son chef, M. Harris.
Quand nous avons pris la parole devant la Chambre des communes et devant les députés des différents partis ici même, on nous a demandé, comme l'ont fait certains sénateurs ce matin, s'il y avait une division entre les partis quant à leur position relativement à l'adoption de la version modifiée de la clause 17. La réponse est «non». Cette réponse a été donnée clairement ce matin aux sénateurs qui représentent l'ensemble du Sénat.
Au plan politique, pour ce qui est des gens qui sont intervenus au cours des derniers jours et qui voudraient que les choses se passent autrement, s'ils veulent devenir membres d'un parti politique dans notre province en disant: «Je me rangerai du côté d'un parti ou d'un autre pourvu qu'il soit opposé à l'adoption de la clause 17», il n'y a aucun parti politique actuellement actif ici pour lequel ils pourraient voter. Du côté des partis comme dans la législature, tout le monde dans la province s'est clairement prononcé en faveur de l'adoption de cette modification.
Je pourrais également signaler qu'un mémoire écrit a été distribué au nom du gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador. Au lieu de vous en faire lecture, je soulignerai simplement cinq ou six points en m'appuyant sur quelques notes. Ce sera là ma déposition orale, mais l'exposé officiel présenté au nom du gouvernement est le texte qui a déjà été distribué. J'essaierai d'être bref parce que, plutôt que de faire des déclarations, j'aimerais que nous ayons un échange de questions et d'opinions.
Je suis accompagné de deux collègues, la sous-ministre de l'Éducation de la province, Mme Deborah Fray, qui travaille sur ce dossier à nos côtés depuis que je suis devenu ministre de l'Éducation, il y a quelques mois, dans le nouveau gouvernement libéral du premier ministre Tobin, ainsi que Mme Gail Welsh, une avocate du ministère de la Justice qui travaille sur ce dossier à l'intérieur du gouvernement depuis le début du débat relatif à la clause 17, il y a trois ou quatre ans, c'est-à-dire depuis l'époque du rapport de la Commission royale en 1992. Les avis juridiques internes que nous avons reçus à ce sujet nous ont régulièrement été fournis par Mme Welsh.
Avant d'aborder les points contenus dans le mémoire écrit, je parlerai d'une autre question qui a été soulevée au cours des discussions de ces derniers jours ainsi que ce matin. Y a-t-il eu une sorte d'entente entre le gouvernement de M. Tobin et les chefs des différentes confessions quant à la nécessité d'aller de l'avant avec l'adoption de la clause 17 au cours des dernières élections. Au lieu de vous en parler longuement, je voudrais déposer la déclaration publiée par M. Tobin le 9 juillet, ainsi que celle de M. Fallon au nom du conseil de l'éducation catholique présentée le même jour et les références à ce sujet dans le livre rouge du Parti libéral aux pages 66, 67, 68, et cetera. Il en a été question dans notre discussion ce matin.
Je pense que tout a été dit publiquement dans notre province au sujet de ce dialogue et tout le monde sait qu'il n'y a eu aucune sorte d'entente. Les deux autres chefs de parti qui ont pris la parole ce matin ont expliqué pourquoi, de leur point de vue, cette question n'avait suscité aucune controverse lors des dernières élections provinciales. Tous les partis partaient du principe que, s'ils étaient élus et formaient le gouvernement, ils procéderaient aux réformes présentées clairement lors du référendum de septembre, il y a près d'un an.
Madame la présidente, je voudrais m'assurer que ces documents seront joints au procès-verbal officiel du comité afin que la question soit parfaitement claire.
La présidente: Nous les joindrons à votre exposé.
M. Grimes: Au cours de ces audiences du comité, madame la présidente, vous avez beaucoup entendu parler de l'historique et de l'évolution de l'enseignement primaire, élémentaire et secondaire dans notre province et au Canada. Tout n'a pas toujours été facile dans ce domaine et, aujourd'hui encore, diverses questions n'ont pas encore été réglées dans certaines provinces. L'éducation des enfants est un processus complexe et le mode d'organisation des écoles est important pour les parents, les enfants et l'ensemble de la population. Tout ce que nous vous demandons, en tant que sénateurs, est d'étudier la situation de notre province dans son contexte parce qu'il y a de grandes différences d'une province à l'autre. M. Harris vient de souligner une différence fondamentale nous concernant qui tient au fait que la raison d'être des droits confessionnels est particulière à notre province. Il n'y a rien de comparable dans le reste du pays à la façon dont les droits confessionnels ont été garantis initialement et sont préservés aujourd'hui.
La province de Terre-Neuve et du Labrador est fière de la participation des Églises à l'enseignement et, tout au long de notre histoire, nous avons régulièrement protégé les droits confessionnels dans ce secteur. En fait, c'est la seule province à avoir un véritable système d'enseignement confessionnel. Il n'existe pas d'écoles publiques, neutres. Nous voulons maintenant trouver un compromis entre l'exercice des droits confessionnels et la possibilité pour la province de gérer et d'organiser nos ressources en matière d'éducation tout en assurant un programme d'éducation de la plus haute qualité aux enfants de nos écoles.
Certains voudraient nous faire croire que nous sommes allés trop loin en voulant transformer les droits confessionnels en matière d'éducation. D'autres nous disent que nous ne sommes pas allés assez loin et que nous devrions mettre sur pied un système scolaire neutre. Une certaine partie de la population de notre province préférerait cette approche.
Tout au long de ces séances, vous avez entendu divers arguments spécifiques concernant le processus choisi, les droits confessionnels, le rôle du gouvernement, la responsabilité des représentants élus, la crainte que ces droits ne soient abrogés ou celle que les changements apportés au système d'éducation de cette province n'aient des répercussions négatives sur l'organisation de l'enseignement dans d'autres provinces. Nous sommes d'avis que la résolution de modification de la clause 17 représente un compromis mûrement réfléchi entre ces différents points de vue.
En tant que ministre de l'Éducation du gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador, je désire faire en sorte que les enfants de la province disposent des outils nécessaires pour devenir plus tard des citoyens productifs. Cela veut dire qu'il faut fournir un programme d'éducation moderne de qualité. Le gouvernement vous a remis un mémoire très complet qui explique clairement nos intentions dans ces domaines et je vous prie de tenir compte des éléments mentionnés dans le mémoire écrit pendant vos délibérations au cours des journées et des semaines à venir.
Pour situer les choses, signalons ce qui découle de la clause 17 actuelle pour notre province. Elle protège les droits des écoles confessionnelles sur la base du droit tel qu'il existait dans la province en 1949, ce qui, comme un sénateur l'a signalé tout à l'heure, correspond à la tradition existant dans d'autres régions pour ce qui est de l'article 93. On fait le point sur les droits qui existent à un moment donné et on les inscrit dans la Constitution. Cela empêche la législature de modifier le rôle des Églises dans l'enseignement de façon unilatérale par rapport à ce qu'il était à cette époque.
Quelle sorte de pouvoir les confessions exercent-elles dans cette province en conséquence de ce qu'était la situation en 1949? En tant que sénateurs, vous n'êtes peut-être pas entièrement au courant de l'étendue des pouvoirs détenus actuellement par les Églises et les confessions dans cette province puisque la situation varie d'une province à l'autre. Ici, à Terre-Neuve et au Labrador, les limites des districts scolaires ne peuvent pas être modifiées sans l'approbation des conseils d'enseignement confessionnels. Les statuts des conseils scolaires doivent être approuvés par les conseils d'enseignement confessionnels. Les conseillers scolaires doivent être recommandés par ces conseils. La dissolution d'un conseil scolaire ou le renvoi d'un conseiller doivent être approuvés par ces conseils. Le financement de la construction d'une école doit être approuvé et réparti par ces conseils. Les conseils scolaires doivent présenter des états financiers annuels à ces conseils. Les personnes désirant enseigner dans la province doivent être agréées par l'un de ces conseils avant de pouvoir recevoir un certificat d'éducation valide dans la province. Les conseils scolaires ne peuvent pas acheter ou vendre des biens ou emprunter plus de 5 000 $ sans l'approbation du conseil d'enseignement confessionnel compétent. À l'heure actuelle, à Terre-Neuve et au Labrador, ces droits sont plus étendus et plus complets que dans les autres provinces.
Comme l'a déclaré le premier ministre Wells avant les élections de 1993, nous aurions préféré parvenir à une sorte de consensus et ne pas avoir à suivre la procédure dont nous avons atteint maintenant, je l'espère, les dernières étapes. Le gouvernement est-il parvenu à un tel consensus et à une telle entente avec les représentants des confessions? La réponse est malheureusement non, et je pense que cela a été confirmé par M. Harrington, qui a pris la parole ici il y a quelques jours en indiquant que, à son avis, nous nous retrouvions dans une impasse. Il y a différentes versions quant aux raisons pour lesquelles nous sommes dans une impasse, mais il est clair que nous n'avons pas les capacités politiques de nous entendre et de trouver un consensus dans notre province à l'heure actuelle.
Pendant presque trois ans, après la commission royale de 1992, le gouvernement a essayé, de concert avec les représentants des Églises et des confessions, d'arriver à un consensus sur les changements à apporter. Cette démarche a échoué et, comme on l'a signalé précédemment, il y a eu ensuite un référendum.
Après le référendum, nous avons eu des élections à l'occasion desquelles le premier ministre Tobin a fait savoir, dans le livre rouge dont nous avons déposé ici des extraits que, s'il était élu premier ministre et s'il parvenait à former le gouvernement, nous agirions conformément à ce qui avait été approuvé par le référendum en septembre 1995, c'est-à-dire que nous changerions la Constitution et modifierions la clause 17.
Quand j'ai été nommé ministre de l'Éducation suite à l'élection du nouveau gouvernement, je suis entré en contact avec des représentants des conseils confessionnels et je leur ai demandé s'ils étaient prêts à participer à une nouvelle tentative de parvenir à un consensus sur ces questions. Notre position en tant que gouvernement était que nous supposions que la clause 17 serait adoptée à un moment ou l'autre mais que, étant donné qu'il existe des droits confessionnels étendus, importants et permanents, nous continuerions de devoir collaborer avec les représentants des confessions pour déterminer les modalités fondamentales et pratiques de l'exercice de leurs droits après l'entrée en vigueur de la nouvelle clause 17.
Nous leur avons demandé s'ils étaient prêts à participer à une telle entreprise. Ils étaient d'accord et ils ont clairement indiqué qu'ils voulaient bien discuter, mais qu'ils continueraient de tout faire pour empêcher l'adoption de la clause 17. Quoi qu'il en soit, ils étaient prêts à changer certaines choses et nous avons eu des discussions avec eux.
Au cours de ces récentes discussions, un accord-cadre a été élaboré. Il portait sur deux grandes questions sur lesquelles on s'est entendu dans notre province, c'est-à-dire le fait que nous devrions avoir dix conseils interconfessionnels au lieu des 27 conseils confessionnels actuels qui sont gérés séparément et qu'un office provincial de la construction s'occuperait des besoins financiers, des rénovations et des réparations en fonction des besoins plutôt qu'en répartissant les fonds disponibles en fonction du nombre de membres de chaque confession.
Plusieurs éléments clés n'ont pas encore été réglés. Le texte de l'accord-cadre -- que j'ai soumis à l'approbation du gouvernement et que les représentants des différents conseils confessionnels ont eu aussi soumis à l'approbation de ces conseils -- signalait que plusieurs problèmes clés n'étaient pas encore réglés et devaient encore être discutés. Les principales questions avaient fait l'objet d'un consensus. Certaines n'étaient toutefois pas encore réglées, par exemple la désignation d'une école et le fait de savoir si elle serait uniconfessionnelle ou interconfessionnelle et partagée; comment les parents pourraient exercer leurs préférences; en quoi consisterait la politique provinciale des transports ainsi que ce que seraient les critères de viabilité. Nous devions nous retrouver pour continuer ces discussions.
Avant la reprise des discussions sur les répercussions au niveau des écoles des changements généraux concernant la gestion, diverses Églises ont retiré leur appui à l'accord-cadre à cause des pressions exercées publiquement par leurs adhérents.
Le sénateur MacDonald: Pouvez-vous nous dire quand, s'il vous plaît?
M. Grimes: Je ne me souviens plus exactement de la date, mais je suis sûr qu'une de mes collaboratrices peut vous l'indiquer. J'ai tout un dossier d'information ici. Ma sous-ministre va trouver la date à laquelle les Églises et, plus particulièrement, les conseils unifiés, ont fait savoir publiquement que certaines des dispositions fondamentales de l'accord-cadre leur posaient des difficultés. Sans l'accord du gouvernement et de chacun des groupes, nous ne pouvions pas conclure une entente.
Cette tentative de réalisation d'un accord-cadre a échoué. Aucune entente n'a été conclue ni signée. Le rapport présenté au ministre a été soumis au Cabinet qui a exprimé certaines réserves, notamment à l'endroit du secteur unifié. Suite à cela, nous n'avons pas pu reprendre ces discussions. Le gouvernement est d'avis qu'il lui est impossible de parvenir à un accord avec les Églises et que cela ne se produira pas à Terre-Neuve et au Labrador dans un avenir prévisible.
Sénateur, c'est le 30 mai que le conseil unifié a fait part de ses réserves.
Les écoles conserveront-elles leur caractère confessionnel avec les nouvelles dispositions? La réponse donnée par le gouvernement était «absolument, oui». Les deux tiers des membres des conseils scolaires seront élus pour représenter les confessions qui jouissent actuellement de certains droits en vertu de la Constitution et qui continueront d'en jouir. En vertu de la Constitution, toutes les écoles, qu'elles soient uniconfessionnelles ou interconfessionnelles et partagées, devront assurer un enseignement religieux et une pratique et des activités religieuses.
Il y aura des écoles uniconfessionnelles lorsque c'est le voeu des parents et qu'il existe un nombre suffisant d'élèves pour qu'elles soient viables. Les conditions exactes dans lesquelles cela se fera seront déterminées après la consultation publique qui aura lieu cet automne.
Je crois que c'est le 3 ou le 5 janvier 1996 que le gouvernement de M. Wells a publié un projet de loi et le règlement correspondant qui traitaient de ces questions. Ces textes ont été retirés par le premier ministre Tobin et le nouveau gouvernement. Une nouvelle série de règlements et de dispositions législatives sera présentée quand le Parlement du Canada aura terminé ses délibérations au sujet de cette modification.
Les écoles uniconfessionnelles auront le droit, aux termes des nouvelles dispositions, de régir la politique d'admission des élèves, les activités académiques touchant aux croyances religieuses ainsi que l'affectation et le congédiement des professeurs, ce que certains trouvent choquant mais qui est en fait énoncé ainsi dans le texte constitutionnel. Cela ne fera pas partie de la loi. C'est précisé dans la Constitution. On semble penser qu'il n'y a pas besoin d'une loi à ce sujet si cela figure dans la Constitution. L'objection présentée par d'autres, surtout l'association des enseignants, est qu'à leur avis, il est regrettable que la disposition constitutionnelle elle-même stipule clairement que les comités et les groupes s'occupant des écoles uniconfessionnelles auront le droit d'embaucher et de congédier les enseignants dans leurs écoles.
Cette modification aura-t-elle des répercussions sur les droits des confessions religieuses dans d'autres provinces? Je pense que les témoins que vous avez entendus vous ont tous dit que non. L'éducation relève clairement des provinces. La modification n'aura aucune répercussion sur les écoles confessionnelles des autres provinces et chaque province régit l'enseignement confessionnel de façon différente. Nous procédons d'une façon différente des autres à Terre-Neuve et au Labrador. Notre situation est unique et cela n'aura aucune conséquence dans les autres provinces -- du point de vue juridique, assurément pas. Il n'existe rien d'équivalent à la clause 17 dans les autres provinces du pays.
Lorsqu'il est intervenu devant le comité, M. Gibson a parlé de la création éventuelle d'un précédent. Il a signalé -- et je crois que cela figure au procès-verbal -- qu'il ne voit pas là non plus de précédent politique.
Au nom du gouvernement du Canada, M. Rock a signalé que chaque cas qui se présentera à l'avenir devra être étudié individuellement en fonction des règles en vigueur dans la province concernée et que nous devrions examiner le cas de Terre-Neuve dans son propre contexte.
Lors de discussions, on a soulevé la question de savoir s'il serait utile d'apporter une ou deux -- surtout une -- modification à cette résolution. Je pense à la modification qui consisterait à remplacer «sous réserve du droit provincial d'application générale prévoyant les conditions de la création ou du fonctionnement des écoles» par «lorsque le nombre le justifie».
C'est la question fondamentale. Elle a dominé le débat de la législature de Terre-Neuve et du Labrador et des modifications ont été proposées et rejetées. Il n'y a aucun doute à ce sujet. Si, suite à une modification, on devait supprimer la clause «sous réserve du droit provincial d'application générale prévoyant les conditions de la création et du fonctionnement des écoles», il aurait été inutile de se lancer dans cette entreprise et d'imposer cela à la législature; il aurait été inutile de tenir un référendum, de présenter une requête à la Chambre des communes et de tenir ces audiences. C'est la question fondamentale. Il serait malhonnête de prétendre quoi que ce soit d'autre.
L'idée que ces droits soient accordés «sous réserve du droit provincial d'application générale» a été débattue à fond dans la province. Elle a été discutée dans tous les détails avec des représentants des différentes confessions. Cela a été un sujet de discorde. Ils ont des avis juridiques selon lesquels, comme le disent certains sénateurs, ces droits seraient abandonnés aux caprices des politiciens élus. Les avis juridiques émanant du gouvernement et de l'extérieur indiquent tous que tel n'est tout simplement pas le cas.
Nous avons décrit à votre intention une nouvelle façon d'envisager la chose. Comme le dit M. Harris, au lieu d'avoir une déclaration générale énonçant qu'on ne peut pas altérer des droits qui existent déjà dans la législation à une date donnée -- cette date étant l'année 1949 --, nous avons décidé d'énoncer expressément la nature de ces droits dans une disposition constitutionnelle. La formule «sous réserve du droit provincial d'application générale» ne menace aucunement ces droits et force simplement la législature, en vertu de la loi et de ses obligations, à adopter un projet de loi qui fasse en sorte que les gens puissent exercer les autres droits contenus dans la même disposition. Ceci n'a rien de limitatif ni de dangereux. C'est une protection supplémentaire. Pour la première fois, la nouvelle clause 17 nous indique directement dans la disposition constitutionnelle quels sont les droits en question. Si une législature essaie maintenant, dans 15 ans, dans 20 ans ou dans 100 ans d'adopter un projet de loi qui rendrait l'exercice des droits énoncés impossible, celui-ci sera annulé n'importe quand par les tribunaux. Le maintien de la protection n'est pas menacé.
Les gens qui pensent que nous ne sommes pas allés assez loin sont choqués par le fait que nous avons inséré les droits dans la Constitution de façon détaillée au lieu qu'ils figurent dans une loi avec une disposition telle que celle qui se trouve dans la clause 17 actuelle. Ils peuvent au moins être rassurés par le fait qu'ils peuvent toujours présenter une contestation puisqu'il est dit qu'il faut que ce soit comme en 1949. Ils peuvent revenir argumenter au sujet des dispositions législatives qui étaient en vigueur à l'époque et de leur effet sur les différents droits. Ils auraient la partie belle devant le tribunal. Il n'y a pas eu de contestation à ce sujet à Terre-Neuve et au Labrador.
Nous adoptons ici une démarche différente en énonçant ces droits dans la Constitution elle-même avec la formule «sous réserve du droit provincial» qui impose à la législature, sous l'autorité de la Constitution, d'adopter des lois d'application générale. Cela veut dire qu'on ne peut pas demander une norme différente, plus élevée ou plus stricte, pour les écoles uniconfessionnelles que pour les écoles interconfessionnelles partagées. Les dispositions doivent avoir une application générale. Tout le monde doit être traité de la même façon. Toute loi doit être conçue ainsi.
Le gouvernement a toujours reçu le même avis juridique: ce projet de loi est une protection supplémentaire et non pas une menace. En fait, notre législature est tenue d'adopter un projet de loi autorisant l'exercice des droits restants énoncés dans la nouvelle version de la clause 17. Toute loi non conforme à ces lignes directrices serait certainement rejetée par les tribunaux dans la province ainsi que dans tout le pays. C'est ce que nous avons toujours dit au sujet de la formule «lorsque le nombre le justifie».
Des représentants des diverses confessions nous ont demandé d'en discuter et d'envisager de remplacer cela par «lorsque le nombre le justifie». Après un débat approfondi et un examen de la question au cabinet, au caucus et à l'assemblée, et après une tentative de présenter une telle modification lors du débat de l'Assemblée législative, celle-ci a été rejetée, principalement du fait que l'expression «lorsque le nombre le justifie» a tout un passé derrière elle. Une jurisprudence s'est constituée dans le pays au sujet de la question des droits linguistiques garantis par l'article 23. Des critères différents sont appliqués chaque fois parce qu'il n'y a pas de chiffre déterminé. Les politiciens élus de cette province ne voulaient pas que nous nous retrouvions dans la même situation en ce qui concerne l'exercice des droits confessionnels.
Nous sommes actuellement en train de préparer l'adoption d'un projet de loi sur la création d'une «commission scolaire» pour la population francophone de Terre-Neuve et du Labrador parce qu'elle veut exercer les droits que lui confère l'article 23.
Le débat sur «lorsque le nombre le justifie» dure déjà depuis pas mal de temps. Pendant des années, la province n'était pas d'accord et disait que le nombre ne le justifiait pas parce que ce groupe était très peu nombreux. Maintenant, au lieu d'avoir à nous défendre devant les tribunaux, nous avons accepté la création d'une commission scolaire pour les francophones de Terre-Neuve et du Labrador dans un avenir rapproché. Nous sommes en pourparlers avec eux sur les modalités de sa création et la façon dont ils exerceront leurs droits. Nous ne voulons toutefois pas nous retrouver avec une jurisprudence sur les droits linguistiques en utilisant l'expression «lorsque le nombre le justifie» comme principe directeur présidant à la décision de savoir si nous devrions avoir une ou plusieurs écoles appartenant à une confession déterminée dans les villes de Terre-Neuve et du Labrador. Je pense que ce serait une mauvaise méthode. Cela ne serait pas productif et ne serait pas du tout utile pour la province. En fait, cela risquerait de faire obstacle à nos efforts en vue d'aller de l'avant avec les réformes que nous voulons réaliser.
Le gouvernement aimerait trouver une solution politique pour ce qui est des critères à prendre en considération pour qu'une loi soit d'application générale dans la province. Nous entamerons cette discussion à l'automne. Nous ne voulons pas que les tribunaux déterminent au cas par cas le nombre justifiant la création d'une école confessionnelle dans la province. Nous voulons établir avec, nous l'espérons, l'accord de tous, un ensemble clair de critères applicables à l'ensemble de la province que nous étudierons cet automne. Les décisions seront prises sur cette base. Si l'une des confessions se sent lésée, elle peut toujours s'adresser aux tribunaux si elle pense que les critères établis dans la province sont trop stricts ou l'empêchent de faire valoir facilement ses droits en vertu de la nouvelle clause 17.
Le premier objectif du gouvernement est de trouver un compromis entre les droits de tous les intéressés et de traiter tout le monde sur un pied d'égalité; le deuxième objectif est, assurément, de laisser entre les mains des représentants élus du peuple le soin de décider combien il devrait y avoir d'écoles de tel type plutôt que de s'en remettre aux tribunaux. Des renseignements et des règlements d'application générale seront publiés à ce sujet.
On a fait référence aux passages de la brochure du référendum où l'on trouve l'expression «lorsque le nombre le justifie». On l'a employée parce qu'elle est d'usage courant. C'est une expression bien connue et tout le monde sait qu'elle signifie «quand il y a assez de gens». Bien qu'on sache ce qu'elle veut dire, personne ne sait ce que signifie «assez de gens». Les tribunaux se prononcent chaque fois de façon différente, même en ce qui concerne les droits linguistiques.
À la suite de cette déclaration dans la brochure, il y a une rubrique expliquant quelles écoles les élèves fréquenteront avec le nouveau système. Il est indiqué que les parents peuvent choisir des écoles de leur propre confession lorsque le nombre le justifie, mais il est ensuite précisé que cela s'applique lorsque la création de telles écoles est possible. Cela fait apparaître le concept de critères de viabilité. Le libellé juridique dont est maintenant saisi le comité figurait également dans cette brochure et indiquait qu'il y aurait une loi provinciale d'application générale à cet effet.
Nous voudrions passer à un nouveau système qui ne reflète pas une réalité passagère, mais énonce les droits directement dans la Constitution et oblige la législature à adopter des projets de loi permettant à tous les groupes qui ont et continuent d'avoir des droits de s'en prévaloir aux termes de la loi qui sera adoptée.
J'ai certains commentaires à faire au sujet du remplacement du mot «régir» par «établir et régir» parce que je crois que la question a été soulevée devant le comité à plusieurs reprises. D'après notre avis juridique et les discussions que nous avons eues avec des représentants des confessions, le sens est le même. Ces représentants m'ont indiqué que, si la clause 17 est adoptée et modifiée comme l'a proposé le gouvernement, ils seront contents de pouvoir utiliser l'argument invoqué par le gouvernement en disant: «Oui, vous nous avez dit que cela veut dire «établir et régir» et nous acceptons votre avis juridique». À notre avis, ce n'est pas un élément important.
Je crois savoir que M. Gibson a présenté hier un exposé très savant en se référant au Black's Law Dictionary et qu'il a lu une définition selon laquelle ce mot veut dire ordonner, commander ou instruire. Il a évité de citer d'autres définitions. Je pense qu'il voulait dire que ces deux mots ne signifient pas la même chose. Il y a trois définitions différentes du mot utilisé dans la version anglaise, «direct», dans le Black's Law Dictionary. D'après les avis juridiques internes et externes que nous avons reçus, le sens reste le même. On peut insérer ou non ces deux mots, cela ne change rien au sens. Le gouvernement n'a pas accepté ce changement parce que, dès que nous avons signalé une intention quelconque de modifier en quoi que ce soit le libellé de la clause 17 présenté au Parlement du Canada -- dont vous constituez une partie très importante --, cela a soulevé un tollé politique dans la province et les gens nous ont dit que nous ne faisions pas ce que nous avions dit que nous allions faire dans le livre rouge. Ils ont dit que nous étions en train de modifier ce texte. Or, il n'y a pas besoin d'ajouter le mot «établir» parce que, d'après notre avis juridique, ces deux verbes ont exactement le même sens. En fait, ce serait une modification tout à fait mineure qui forcerait la législature à faire tout un travail inutile. Les représentants des confessions de la province sont tout à fait prêts à reconnaître que, comme le gouvernement le dit, «régir» et «établir et régir» veulent dire la même chose. Ils seront ravis de se prévaloir de cet argument quand ce texte aura été adopté.
J'ai été surpris d'entendre M. Irving dire que nous avions donné sans raison de l'argent aux confessions et aux représentants des Églises. Je ferai peut-être la quête plus tard et je demanderai volontiers qu'on me rende cet argent. Je suis sûr qu'ils ont été aussi surpris et choqués que nous, mais tous les juristes qui conseillent le gouvernement et les confessions disent que le système proportionnel de financement en vigueur dans la province depuis 1949 est la façon juridiquement appropriée d'accorder des fonds. Ce n'est que par accord mutuel que l'on pourrait procéder autrement. Sans vouloir l'offenser, je pense que tous les avocats qui ont conseillé les conseils confessionnels d'éducation ainsi que ceux qui ont conseillé le gouvernement sont totalement en désaccord avec l'évaluation de M. Irving à ce sujet.
Pour terminer, j'aimerais résumer à nouveau ces deux ou trois questions.
Nous essayons depuis de longues années d'améliorer l'administration de notre système d'enseignement de la maternelle à la 12e année. Entre-temps, une commission royale a recommandé en 1992 que l'on modifie le système confessionnel. Elle a, en fait, déposé son rapport en mars 1992, il y a plus de quatre ans. Lors d'un référendum, la population a approuvé les changements proposés par le gouvernement. Il est vrai qu'il y avait une certaine ambiguïté et une certaine confusion, mais il y a eu un référendum et son issue a été positive. Il n'était pas nécessaire, mais le gouvernement d'alors a jugé qu'il était politiquement utile d'agir ainsi.
La législature provinciale a adopté une résolution demandant au Parlement du Canada de modifier la clause 17. Vous avez notre proposition de modification devant vous.
Le gouvernement a été réélu lors d'une élection provinciale dans le cadre de laquelle la réforme de l'éducation, comme le montre le document du livre rouge que j'ai déposé, faisait clairement partie du mandat sollicité par le gouvernement.
Tout récemment, en mai, la législature a reconfirmé à l'unanimité sa résolution antérieure et a demandé que la question soit réglée rapidement afin que nous puissions nous occuper des autres choses qui ont besoin d'être faites ici dans la province.
Ces discussions qui n'en finissent pas ont suscité un niveau élevé d'incertitude dans notre système scolaire. Dans six ou sept semaines va commencer une nouvelle année scolaire qui se déroulera dans les mêmes conditions que la précédente, mais on continue de se demander qui est responsable de la gestion et en vertu de quelles règles ces nouveaux conseils scolaires vont fonctionner.
Les représentants élus du peuple de cette province souhaitent que le Sénat adopte rapidement cette résolution pour permettre à la province de se doter de priorités clairement définies. Il est essentiel que notre législature puisse gérer le système scolaire de façon à en améliorer du mieux possible le rendement et à garantir aux enfants de notre province la meilleure éducation possible. Il faut toujours mettre l'accent sur les enfants, leur éducation et leur avenir plutôt que sur les aspects techniques relatifs à l'organisation et à la gestion des écoles. C'est à ce niveau-là que nous sommes actuellement bloqués.
Cette question continue de prendre beaucoup trop de temps et d'énergie aux pédagogues de la province. L'incertitude que ces événements suscitent a des conséquences négatives sur le milieu d'apprentissage dans nombre de nos écoles et nous trouvons que c'est inacceptable à l'heure actuelle.
Le comité peut aider à préparer les écoles de cette province au 21e siècle en appuyant les efforts entrepris par la province de Terre-Neuve et du Labrador pour améliorer notre système d'éducation au profit de nos enfants, les futurs dirigeants de notre province et de notre pays. Quand vous aurez étudié à fond cette question, nous vous demandons d'envisager d'adopter cette modification au nom de la population de Terre-Neuve et du Labrador sans rien y changer.
Le sénateur MacDonald: Monsieur Grimes, c'était un exposé remarquable.
J'ai été très impressionné par le travail que votre ministère et vous-même avez consacré à cet accord-cadre. Certains parlent d'une entente. J'ai le texte du rapport qui vous a été remis au sujet des résultats positifs obtenus lors des réunions qui ont eu lieu du 28 au 31 mars et j'ai également un document sur les faits saillants d'un accord-cadre concernant le regroupement des conseils scolaires, daté du 19 avril.
Monsieur Grimes, pourquoi avez-vous tenu ces réunions?
M. Grimes: Sénateur, je vous remercie de cette question, parce que c'est quelque chose de très important dans notre province et je sais que cela l'est aussi pour le Sénat.
Nous avons tenu ces réunions parce que, même avec une nouvelle clause 17, les confessions continuent de jouir de droits très importants à Terre-Neuve et au Labrador. La Constitution y fait allusion dans la nouvelle clause 17 et nous voulons déterminer à l'avance, de concert avec les confessions, comment appliquer ces droits au niveau des conseils scolaires en ce qui concerne la gestion et au niveau des écoles pour ce qui a trait aux répercussions sur les élèves. C'est sur cette base que j'ai invité les représentants des dénominations à donner leur avis pour voir si nous pouvions réfléchir à la façon de mettre en place ce nouveau système remodelé. J'ai été très heureux qu'ils soient prêts à participer à ces discussions. Ils l'ont fait de façon très ouverte et professionnelle et je les félicite de leurs efforts.
Comme le rapport le signalait, nous sommes parvenus à un accord total sur la gestion et sur le fait de n'avoir plus que dix conseils scolaires interconfessionnels conjoints et un conseil unique de la construction au lieu de 27 conseils correspondant tous à des confessions différentes.
Pour ce qui est du rapport lui-même, lorsque nous nous sommes présentés à nouveau devant le Cabinet et les différents conseils -- nous étions simplement des messagers représentant des groupes divers --, nous avons fait face à certaines difficultés. En fin de compte, deux des parties se sont dissociées de l'accord de base.
Je ne suis pas au courant de tout ce que le Integrated Education Council a dit à votre comité hier, mais ses déclarations publiques révèlent clairement qu'il a trouvé inacceptables certaines des choses qu'avait accepté son représentant lors des discussions sur l'accord-cadre. Ce conseil n'a pas voulu se prévaloir de certains de ces droits. Face à ce genre de résistance, le gouvernement ne pouvait pas aller plus loin.
Le sénateur MacDonald: Vous avez trouvé que c'était une répétition générale utile pour ce qui va se passer ensuite.
M. Grimes: Et cela aura été très utile, quoi qu'il en soit, lorsque tout ce processus aura pris fin et compte tenu du fait que le gouvernement, depuis le premier jour, n'a pas cessé d'espérer et de supposer -- sans faire abstraction des discussions à ce sujet --, que cette modification serait adoptée parce que la population de la province a majoritairement fait savoir qu'elle le souhaitait. Les politiciens élus en ont fait autant. Même avec la nouvelle clause 17 modifiée, vu l'étendue des droits qui restent reconnus, nous n'avons pas le choix, nous devons entamer des discussions détaillées avec les représentants des confessions pour voir comment procéder à la mise en oeuvre parce qu'il y aura de petits changements par rapport à la façon dont ces droits sont appliqués actuellement.
Le sénateur MacDonald: Dans son mémoire, M. Sullivan a parlé de ce qui était sous-entendu dans les recommandations de la Commission royale. Différentes personnes s'entendaient pour dire qu'il n'était pas nécessaire de modifier la Constitution pour effectuer les réformes souhaitées de toute évidence par la population, mais qu'il serait nécessaire d'éviter des contestations d'ordre constitutionnel. À la suite de vos travaux et après avoir reçu, le 30 mai, l'aide-mémoire du groupe des écoles unifiées, vous en êtes arrivés à la conclusion que la seule possibilité de réformer rapidement l'enseignement était de modifier la Constitution. Avant que vous n'entamiez ces réunions au sujet de l'accord-cadre, le gouvernement de Terre-Neuve avait-il déjà décidé de proposer de modifier la Constitution?
M. Grimes: Oui, sénateur. Lors de nos discussions, les représentants des confessions se sont montrés très francs et directs avec moi et j'en ai fait autant à leur endroit. Nous prenions pour hypothèse que la clause avait été modifiée et qu'il fallait déterminer comment gérer le nouveau système. Pour leur part, comme ils le répétaient au début de chaque réunion, ils partaient du principe que la clause ne changerait pas, mais ils venaient quand même nous rencontrer parce qu'ils étaient prêts à apporter certains changements. Ils disaient: «Nous savons que le système va changer et nous sommes prêts à nous entendre sur certaines choses.» C'est comme cela que nous commencions chaque réunion après les salutations d'usage. Il était clair que le gouvernement disait: «Supposons que la clause 17 a été modifiée et que ce processus est terminé; maintenant, nous voudrions déterminer rapidement comment appliquer le nouveau système dans la province.»
Le sénateur MacDonald: Vous n'avez pas utilisé ces réunions sur l'accord-cadre simplement pour prouver cela; vous vous en êtes servi, en réalité, comme préparation aux discussions très importantes au cours desquelles vous direz pour la première fois à la population de Terre-Neuve à quoi elle doit s'attendre.
Vous avez envoyé le 5 juin une lettre au sénateur Fairbairn, leader du gouvernement au Sénat. Vous aviez appris cinq jours plus tôt qu'il n'y aurait pas d'entente et qu'il n'était pas nécessaire de continuer les discussions. Vous déclariez:
[...] près de trois années de discussions intenses entre les représentants du gouvernement et les confessions se sont avérées futiles.
Vous avez ensuite eu trois semaines pour prouver que ces trois années antérieures avaient...
M. Grimes: Ce qui a réellement changé, quand nous avons essayé à nouveau pendant trois semaines d'arriver à un consensus, est que ceux qui n'étaient pas d'accord ont complètement viré de bord. Pendant les deux ans et demi précédant les élections, les gens de la province diraient que, d'après ce que l'on savait des efforts entrepris pour essayer de parvenir à un consensus plutôt que de modifier la Constitution, ceux qui manifestaient régulièrement leur désaccord en public étaient sans doute les représentants de l'Église catholique et de l'Église pentecôtiste. Le groupe réunissant les autres confessions ne disait pas grand-chose. Après les tentatives que nous avons faites pendant cette période de trois semaines, les pentecôtistes et les catholiques se montraient plutôt réservés alors que le groupe représentant les autres confessions et certaines factions de celles-ci était manifestement en plein désarroi. Ses représentants ont manifesté vivement leur désaccord, à un point tel qu'il y a eu dans la province des rumeurs selon lesquelles nous étions parvenus à une sorte d'entente et, vu l'affiliation religieuse du nouveau premier ministre et du nouveau ministre, des accords avaient été conclus avec d'autres confessions. Cela a été une période très désagréable.
Le problème est que sept groupes détiennent des droits. Le gouvernement ne peut pas s'entendre avec un ou deux d'entre eux et pas avec les autres. Nous pensions qu'une entente était nécessaire. Quand nous étions sur le point de nous entendre avec un ou deux de ces groupes, les perspectives d'entente avec plusieurs autres devenaient plus lointaines.
Je pensais tout à fait que les représentants des confessions avaient accepté mon invitation à nous livrer à cet exercice parce qu'ils étaient désireux d'arriver à une entente, sachant que le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador voulait que l'on respecte le résultat du référendum et le vote de l'assemblée. Nous allions demander que le Parlement du Canada modifie la clause 17 pour donner un statut juridique à l'entente que nous allions conclure, quelle qu'elle soit, mais ce statut juridique devait reposer sur la nouvelle clause 17 et non pas sur la clause existante. Il faut reconnaître qu'ils nous ont toujours dit qu'ils saisiraient toutes les occasions possibles dans la province et dans l'ensemble du pays pour s'opposer à ce changement et en empêcher la réalisation.
Le sénateur Ottenheimer: Monsieur Grimes, nous savons tous que nous approchons de la fin d'une procédure longue et difficile. Le petit peu de temps qui reste pour étudier cette question est donc peut-être même encore plus important que lorsqu'on a beaucoup de temps devant soi. Je voudrais axer mes questions et commentaires seulement sur ce que vous avez présenté comme des modifications possibles.
Premièrement, aux pages 11 et 12 de votre mémoire, vous exposez la position de votre gouvernement au sujet de la modification «lorsque le nombre le justifie». Dans votre exposé oral, vous avez cité un argument dont il n'est pas question ici. Je peux supposer qu'il ne fait partie de la position du gouvernement que depuis peu. Cet argument était que, d'après le gouvernement de Terre-Neuve et ses conseillers juridiques, votre libellé «sous réserve du droit provincial» accorde aux minorités une protection supérieure à celle qu'offrirait le libellé «lorsque le nombre le justifie». Comme vous le savez, M. Colin Irving a dit le contraire hier. Je peux seulement supposer que l'avis juridique qu'ont reçu les catholiques et les pentecôtistes est tout à fait différent puisque, si je comprends bien, ils penchent très fortement en faveur de l'adoption du critère «lorsque le nombre le justifie». Je crois qu'il n'existe pas d'avis juridique infaillible, mais l'opinion prépondérante est qu'il vaut mieux un critère du type «lorsque le nombre le justifie» parce que cela ne laisse pas la situation entièrement entre les mains de la législature provinciale. Comme vous l'avez dit, quand ce critère est appliqué, il l'est au sujet des droits des minorités linguistiques et non pas de ceux des confessions et il est difficile de prévoir en quoi il va consister. Il en va de même chaque fois qu'un tribunal se prononce sur un droit. C'est également ce qui s'est passé après 1982 avec la Charte des droits. Beaucoup de gens ne savaient pas exactement comment elle allait être interprétée, mais c'est évidemment pour cela que nous avons des tribunaux.
En fin de compte, ces minorités qui représentent 7 p. 100 et 37 p. 100 de la population sont convaincues que l'expression «lorsque le nombre le justifie» est plus rassurante pour elles que la formulation proposée par le gouvernement. Je ne pense pas qu'elles s'opposent non plus à ce que l'on fasse référence à la «préférence des parents». Le gouvernement envisagerait-il cela si un accord était possible?
À ma connaissance, aucun des groupes unifiés ne s'oppose au critère «lorsque le nombre le justifie». Je me rappelle parfaitement avoir demandé à un porte-parole du groupe Yes Means Yes s'il s'opposait à cela et je crois qu'il a dit: «Non, mais nous aimerions que l'on fasse également référence à la «préférence des parents».» C'est très bien.
Étant donné l'opinion bien arrêtée des minorités pentecôtistes et catholiques et étant donné également que, ce qui pourrait être vérifié, les groupes unifiés ne s'opposent pas à ce critère -- et je sais que le porte-parole du Yes Means Yes Committee ne s'y oppose pas non plus --, envisageriez-vous un tel changement ainsi qu'un autre portant sur l'expression «établir et régir», que le gouvernement considère d'après vous comme étant simplement une question de vocabulaire dépourvue de signification réelle? Cela a beaucoup de valeur aux yeux des minorités. Elles y attachent beaucoup d'importance. Si le gouvernement pouvait, maintenant que l'on approche du but, accepter que l'on ajoute «établir et régir», que l'on précise «lorsque le nombre le justifie» et qu'on parle de la «préférence des parents», on pourrait peut-être arriver à un accord tel qu'aucune minorité ou aucune minorité importante ne se sentirait lésée. Cela ne serait une solution parfaite pour personne, mais tout le monde pourrait s'en accommoder, aussi bien le gouvernement que les différentes confessions.
M. Grimes: J'ai peut-être employé des termes différents dans les notes préparées pour mon intervention orale, mais la question de la protection supplémentaire est mentionnée au dernier paragraphe en bas de la page 12 du mémoire officiel du gouvernement. Ce texte se lit comme suit:
L'intention du gouvernement était de trouver un compromis entre les droits de tous les intéressés et de faire en sorte que tout le monde soit traité sur un pied d'égalité. En conséquence, le droit d'avoir une école uniconfessionnelle était accordé «sous réserve du droit provincial d'application général prévoyant les conditions de la création ou du fonctionnement des écoles.»
Il est ensuite précisé que:
[...] empêcher le gouvernement d'imposer une autre norme ou une norme plus élevée à une école uniconfessionnelle que celle qui s'applique à toute autre école financée par les deniers publics.
D'après les avis juridiques aussi bien internes qu'externes reçus par la province, la formule «sous réserve du droit provincial» oblige en fait la législature à élaborer des lois permettant aux gens d'exercer les droits énoncés dans le reste de la clause 17 plutôt que d'imposer des normes difficiles à atteindre qui les empêcheraient en fait de jouir des droits énoncés dans cette modification de la Constitution. Voilà ce que j'essayais d'expliquer.
Nous avons eu un débat au Cabinet, au caucus et dans la législature. Là encore, tout bien considéré, je me permettrai de demander au comité, pour ce qui est de son rapport, et à l'ensemble du Sénat de parvenir à la même conclusion que notre gouvernement et notre législature. Dans cette province, nous ne voulons pas lier l'exercice de droits confessionnels étendus et permanents à des critères auxquels s'applique une jurisprudence qui concerne l'exercice des droits linguistiques. Là encore, rien n'est clair. Certains prétendront que «lorsque le nombre le justifie» constitue un critère clair. Or, la jurisprudence ne contient aucun critère. Cela change chaque fois. On entre dans un processus dans lequel on est presque obligé chaque fois de demander au tribunal de décider si, dans tel ou tel cas, le nombre est acceptable au lieu de laisser la province établir une norme dans le cadre d'une loi d'application générale. Si quelqu'un se sent lésé parce que cette norme serait inatteignable, trop exigeante, trop stricte ou trop laxiste pour quelque raison que ce soit, il lui reste la possibilité d'interjeter un appel. Une contestation judiciaire est toujours possible. Toutefois, le système qui a fait l'objet de débats approfondis dans la province et qu'il nous paraît mieux de ne pas modifier consiste à énoncer les conditions et les critères dans une loi d'application générale. Toute personne qui se sent lésée dans sa jouissance des droits énoncés dans la nouvelle modification plutôt que dans la loi existante peut aller plaider sa cause devant les tribunaux.
En fait, nous allons nous pencher sur cette question cet automne. Nous avons déjà eu des discussions préliminaires avec les représentants des confessions au sujet de la nature de ces critères. Comme l'indiquait le rapport, certaines questions n'ont finalement pas été réglées. On espère qu'elles le seront dans le cadre de la procédure publique qui sera entreprise dans la province cet automne au sujet des dispositions législatives qui vont régir la façon dont les nouveaux conseils scolaires se prononceront sur la désignation des écoles de la province pour l'année scolaire commençant en septembre 1997.
Cet amendement a fait l'objet d'un vaste débat dans la province. Le gouvernement et la législature se sont prononcés à plusieurs reprises contre une modification. J'ai personnellement rencontré à ce sujet les représentants des confessions quand ils m'ont demandé d'étudier cette question avec eux. Nous avons ensuite présenté cela à nouveau au cabinet en suivant la procédure gouvernementale. Là encore, tout bien considéré, le gouvernement de la province pense que changer le libellé présenterait plus de problèmes que d'avantages comparativement à l'adoption d'une nouvelle clause qui nous dotera d'un nouveau système garantissant, pour aussi longtemps qu'on peut le prévoir, des droits confessionnels très étendus et obligeant la législature à mettre en place des lois d'application générale permettant à la population de se prévaloir des droits énoncés dans cette nouvelle clause 17.
Le sénateur Ottenheimer: Vous vous rendez certainement compte qu'un critère du type «lorsque le nombre le justifie» n'aurait pas pour but que, chaque fois qu'une école uniconfessionnelle devrait être créée, quelqu'un s'adresse à un tribunal pour vérifier si le nombre le justifie. On part du principe qu'il y aurait une entente sur ces questions et que la mention «lorsque le nombre le justifie» ne pourrait être invoquée que dans des cas extrêmes où il serait impossible de s'entendre. Une partie lésée pourrait vouloir se prévaloir de cet ultime droit. Il ne s'agirait pas de quelque chose qui aurait lieu chaque fois.
Je pense qu'il est encore possible au gouvernement et à la province d'accepter ces deux modifications et d'obtenir l'unanimité à ce sujet. Les facteurs pédagogiques sont, bien entendu, extrêmement importants, mais il en va de même de l'espoir que toutes les minorités de Terre-Neuve puissent être rassurées en constatant que leurs droits ont été respectés. Nous ne voulons pas qu'elles aient plus ou moins l'impression qu'on porte atteinte à leurs droits ou qu'on les en prive. Je sais que vous êtes également d'avis que c'est un idéal important et qu'il devrait être possible de l'atteindre.
M. Grimes: La deuxième partie de la question concernait l'expression «établir et régir». Ce que j'essayais de vous expliquer est que le premier terme a un sens très concret, mais le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador demanderait au Sénat de ne pas l'envisager à cause du débat approfondi que nous avons eu, c'est l'élément fondamental. À notre avis, l'attitude du gouvernement n'a pas varié. La formule «lorsque le nombre le justifie» peut paraître séduisante, mais elle crée une situation différente et il ne nous paraît pas souhaitable pour la province d'assujettir les droits confessionnels à une jurisprudence qui concerne l'article 23 et de les mettre de quelque façon que ce soit en corrélation avec les droits linguistiques.
Pour ce qui est de la deuxième question, le remplacement de «régir» par «établir et régir», si c'est la seule modification que l'on va envisager, elle porte tellement peu à conséquence, selon nous, qu'elle ne justifie pas que l'on force les législatures à reprendre toute une procédure pour ratifier une modification de ce genre. Les avis juridiques internes et externes qu'a reçus notre gouvernement indiquent que ces deux formulations ont le même sens. Elles seraient interprétées et utilisées exactement de la même façon. Les représentants des confessions m'ont dit, lors de nos réunions, qu'ils seraient ravis de produire des déclarations publiques, des lettres, etc., du ministre de l'Éducation et du gouvernement en place qui énoncent publiquement et clairement que le gouvernement est d'avis que «établir et régir» a exactement le même sens que «régir» et vice versa et qu'il n'y a aucune différence entre les deux. C'est de toute façon ce que les tribunaux décideront si nous nous adressons jamais à eux. C'est, de ce point de vue, une modification frivole par rapport aux problèmes en jeu.
Le sénateur Doody: Je déduis de ce que vous nous avez dit jusqu'à présent, monsieur Grimes, que la version définitive des règlements relatifs à la création d'écoles confessionnelles ou non confessionnelles n'est pas encore prête ou tout au moins qu'ils n'ont pas encore été publiés, n'est-ce pas? Vous allez consulter les confessions cet automne, je présume, après les audiences publiques.
M. Grimes: Oui. La seule indication publique donnée par le gouvernement au sujet de ses intentions relativement à ces critères est ce qu'a publié le gouvernement précédent de M. Wells le 3 ou le 5 janvier. Je ne me souviens plus de la date exacte. En fait, j'ai maintenant en ma possession, en tant que ministre de l'Éducation, une réponse détaillée à ce sujet émanant de l'organisme représentant les enseignants, la Newfoundland and Labrador Teachers' Association. D'autres groupes s'étaient déjà exprimés publiquement. Le gouvernement de M. Tobin a retiré ce document. Nous avons dit à tout le monde qu'une fois les formalités réglées au niveau national et la procédure parlementaire applicable terminée, nous présenterons à nouveau une version de ces critères que les gens connaissent déjà grâce aux publications antérieures.
Il y a trois éléments principaux. D'une part, on a défini comment serait exercée la préférence des parents. Certains n'étaient pas d'accord avec ce qui figurait dans le projet de loi. Lors des audiences publiques, ils pourront exprimer leur accord ou leur désaccord ou proposer une nouvelle méthode. Il est clair que nous avons défini les politiques provinciales en matière de transports pour ce qui est de la durée minimale des trajets en autobus et de l'existence éventuelle d'une école située à une certaine distance d'une autre école. Il est clair également que le projet de loi et son règlement d'application, qui ont été mis à la disposition de la population, indiquaient quelle devait être la taille minimale des classes. Les gens savent que ces textes existent, mais ils n'ont pas reçu le feu vert du nouveau gouvernement. Nous soumettrons ces documents sous cette forme ou dans une autre version aux audiences publiques de cet automne, au début de la prochaine année scolaire, une fois que le Parlement du Canada se sera prononcé sur la modification constitutionnelle qui nous permettra d'appliquer intégralement dans la loi les nouveaux changements que nous souhaitons proposer.
Le sénateur Doody: Je suppose que, une fois que ces audiences auront eu lieu et que vous aurez entendu les contributions de la population, vous en parlerez avec les intervenants et les différentes personnes dont les droits sont en jeu. Ensuite, si vous vous heurtez aux mêmes obstacles que ceux auxquels vous avez fait face jusqu'à présent dans vos négociations, la solution sera-t-elle de vous adresser à la législature? C'est le coeur du problème -- si tout le reste échoue, vous légiférez et il n'y a aucune protection pour la minorité.
M. Grimes: C'est bien de cela qu'il s'agit, sénateur, mais notre conclusion est exactement le contraire de la vôtre.
Les intervenants sont les confessions et la population en général. C'est un des éléments du débat politique qui a eu lieu dans la province. Certains disent que nous avons peut-être consacré trop de temps aux confessions concernées et à leurs représentants officiels et pas assez à la population en général. C'est l'une des critiques politiques adressées au gouvernement à ce sujet. Toutefois, étant donné l'extrême importance des droits confessionnels et le fait que c'est dans cette disposition constitutionnelle modifiée qu'ils sont énoncés pour la première fois, je me demande, comme je n'ai cessé de le répéter publiquement, avec qui j'aurais pu discuter des droits confessionnels au nom du gouvernement sinon avec les personnes que les confessions désignent pour me rencontrer? Je ne peux pas descendre dans la rue et dire: «Je sais que cette personne là-bas est catholique et très sympathique, je vais donc aller lui parler.» Nous devons procéder de cette façon; c'est très important. Nous devons suivre ces différentes étapes.
Tous les intervenants, y compris la population dans son ensemble, auront la possibilité de discuter de cette question cet automne. Quand cela sera terminé, nous présenterons le projet de loi.
Il me paraît important de continuer à vous expliquer la situation. D'après les avis juridiques reçus par le gouvernement, la disposition stipulant «sous réserve du droit provincial» oblige la législature à adopter des textes de loi permettant l'exercice des droits énoncés dans le reste de la clause 17. Si nous essayons de faire adopter un texte législatif trop directif, trop limitatif, empêchant de fait les différentes confessions d'essayer de se prévaloir de leurs droits, l'affaire sera portée devant les tribunaux qui nous donneront tort. Voilà ce que nous ont dit les avocats du gouvernement et ceux du secteur privé. En fait, cette disposition oblige la législature à présenter des clauses permettant la mise en oeuvre de ces droits et non pas à empêcher qu'on puisse s'en prévaloir. Il ne s'agit pas d'un manque de protection, mais plutôt du fait que, oui, ces droits seront protégés puisque la Constitution elle-même dit que l'exercice de ces droits, qui y sont inscrits, est garanti sous réserve du droit provincial. Nos avocats nous signalent toutefois qu'il ressort chaque fois clairement de ce texte que la législature ne peut faire autrement que présenter constamment des textes législatifs prévoyant et autorisant l'exercice de ces droits et non pas empêchant de s'en prévaloir.
Le sénateur Doody: Ces avis juridiques sont-ils disponibles?
M. Grimes: Je suis sûr qu'ils le sont très probablement, mais nous pouvons demander qu'on les cherche et qu'on vous en remette des copies.
Le sénateur Doody: Ce que je veux dire est que j'aimerais me sentir aussi rassuré que vous. Je n'interprète pas cela de la même façon.
M. Grimes: Sénateur, nous fournirons au comité tous les avis écrits que nous avons au sujet de cette question afin que vous les ayez en votre possession pendant vos délibérations. Je vous remercie de cette question.
Le sénateur Rompkey: Monsieur le ministre, vous êtes passé aux affaires de l'État après les affaires de l'Église, dans le sens où vous venez de vous marier. Je suis sûr que les membres du comité souhaitent vous offrir leurs félicitations.
Le sénateur Doody: Je proposerai que cette motion soit adoptée à l'unanimité.
Le sénateur Rompkey: Il y a l'unanimité à ce sujet, monsieur le ministre, et ce sera inscrit au procès-verbal.
M. Grimes: Pourrai-je en obtenir un exemplaire?
Le sénateur Rompkey: Vous en recevrez un exemplaire et il n'y aura pas besoin de modification ou d'avis juridique.
Monsieur le ministre, vous êtes issu d'une famille aux fortes convictions pentecôtistes. Vous avez été enseignant. Vous avez été accrédité par le comité pentecôtiste de l'éducation. En outre, vous avez été élu président de la Newfoundland and Labrador Teacher's Association. Nous savons que, quand on quitte un milieu comme celui-là, on ne garde pas des rapports très étroits, mais on reste néanmoins en contact avec des gens. Vous continuez de parler avec des enseignants et des parents de toute la province. Je voudrais savoir ce que ces enseignants et ces parents vous disent. En retirez-vous l'impression qu'il y a des gens de toutes les confessions qui sont en faveur de l'adoption de la clause 17 et que les habitants de cette province, quelle que soit leur confession, se sont exprimés clairement?
M. Grimes: Sénateur, je vous remercie de ce commentaire. Avant de répondre à votre question, j'ajouterai que, si j'ai été accrédité par le secteur pentecôtiste et j'y ai commencé ma carrière, j'ai surtout enseigné ensuite dans le système catholique. J'ai travaillé dans différentes parties du système et j'ai toute une expérience de l'enseignement. J'ai toujours beaucoup aimé ce métier. J'espère seulement que les enseignants de cette province trouvent leur métier aussi agréable de nos jours. Vu de nombreux facteurs, je ne crois pas qu'ils trouvent autant de plaisir à enseigner que c'était le cas pour moi il y a près de 20 ans.
J'hésite toujours à donner un avis personnel, mais le gouvernement est d'avis -- et, à titre de ministre responsable, c'est le point de vue que j'ai constamment présenté au gouvernement -- que, dans toutes les régions et quelle que soit leur appartenance religieuse, les habitants de la province pensent majoritairement que cela fait longtemps que l'on s'occupe de cette question. La Commission royale a déposé son rapport en mars 1992. Nous avons eu un référendum il y a presque un an. La législature a étudié la question. La Chambre aussi. Le Sénat est en train de l'étudier. Bien des gens aimeraient que cette partie du processus soit réglée une bonne fois. Comme nous l'avons signalé quand nous avons lancé les discussions au sujet de l'accord-cadre, ils se rendent compte qu'il y a encore beaucoup de travail à faire dans cette province parce que l'enseignement est du ressort de la province. Nous avons encore beaucoup à faire pour mettre en place nos structures de gestion et pour faire en sorte que notre nouveau système scolaire soit prêt à fonctionner selon les nouvelles règles dès septembre 1997. Tous les pédagogues vous diront que cela constituera déjà une tâche monumentale; il faudra demander les préférences des parents, élaborer une nouvelle série de critères et présenter un projet de loi qui constituera la base du nouveau système et qui reconnaîtra l'influence très étendue des droits énoncés dans la nouvelle clause 17.
Le gouvernement est convaincu que, de l'avis de la grande majorité des habitants de la province, nous devrions en finir avec cette partie du processus qui traîne depuis bien assez longtemps. Nous nous rendons cependant compte qu'on ne peut pas imposer une limitation de temps.
M. Sullivan a dit ce matin que la Chambre des communes, le premier ministre et le Cabinet disposaient de cette résolution depuis plusieurs mois. On en arrive seulement maintenant à des audiences publiques. Le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador aurait aimé que nous fassions cela il y a six ou sept mois pour que nous puissions être plus avancés maintenant.
Ce qui nous rassure le plus est que, dans le programme présenté lors des dernières élections au sujet de l'enseignement, on peut qualifier cela comme on voudra, mais il était impossible de s'y tromper: le gouvernement de Terre-Neuve et le premier ministre Tobin faisaient référence au référendum et indiquaient en grosses lettres, pour que tout le monde puisse le voir, que la population s'était exprimée et que, si nous étions élus pour former le nouveau gouvernement, nous irions de l'avant. C'est-à-dire que nous demanderions au Parlement du Canada de s'occuper dans les meilleurs délais de l'adoption de la modification soigneusement et expressément méditée et mise au point dans la province pour servir au mieux les intérêts de la population de Terre-Neuve et du Labrador.
Nous nous rendons bien compte qu'une certaine résistance se manifeste encore. Certains ne trouveront jamais cette procédure satisfaisante, mais nous sommes également convaincus que, lorsqu'elle sera terminée, on verra prévaloir le même esprit de coopération que celui qui régnait au début des discussions que nous avons eues avec les représentants des confessions au sujet de l'accord-cadre. Nous nous regrouperons et nous oeuvrerons ensemble au mieux des intérêts des élèves de façon à ce que les droits confessionnels soient garantis et énoncés dans la modification et que le projet de loi qui sera présenté n'ait en aucune façon un caractère oppressif ou agressif et ne limite aucunement les droits des gens tels qu'ils sont énoncés dans la nouvelle clause 17. Voilà l'objectif et le mandat du gouvernement. Voilà ce que nous avons l'intention de faire. Je répéterai que nous demandons à ce comité du Sénat de présenter bientôt son rapport en espérant qu'il conclura que cette modification présentée par la province devrait être adoptée sans autre modification.
Le sénateur Rompkey: Monsieur le ministre, le mot qui m'a frappé dans votre déposition est «compromis». Vous avez dit qu'il y aura un compromis entre les droits confessionnels et les droits de la province. Nous avons entendu des gens de toutes les confessions dire qu'ils voulaient que le pouvoir continue d'être entre les mains des laïcs représentant ces différentes confessions. Il m'est apparu clairement que le pouvoir des confessions devrait être exercé par leurs représentants laïcs. Il faut toutefois définir cela de façon plus précise. La province possède aussi des droits. La législature possède certains droits.
J'en suis arrivé à la conclusion que, même avec la nouvelle clause 17, les droits des confessions dans cette province -- et je suis sûr que tout le monde est d'accord -- seront au moins égaux et peut-être supérieurs à ceux qu'elles possèdent dans tout le reste du pays. Toutefois, la législature a aussi des droits.
Je veux vous donner l'occasion de vous étendre davantage sur cette question de compromis. Je pense que, pour notre comité, quand nous parlons de ceux qui détiennent certains droits, il est important de comprendre que, dans tout système juridique et dans toute constitution, il faut trouver un compromis entre les différents droits.
M. Grimes: Je suis heureux d'avoir l'occasion de vous parler de cette question.
À l'heure actuelle, je pense que la façon dont la population envisage le fonctionnement de notre système dans la province est que chacun des différents conseils confessionnels a constitutionnellement et juridiquement le droit dans la province, en vertu des lois pertinentes, de décider lui-même en tout temps du nombre d'écoles qu'il veut avoir dans différentes régions. Le gouvernement ne peut avoir son mot à dire à ce sujet. Cette décision relève fondamentalement des confessions.
L'effet de la modification, ce qui est le coeur de la question, est que, dans l'esprit du gouvernement, à ce moment-ci de notre histoire, après des centaines d'années marquées par l'influence extrêmement positive des Églises dans les écoles de la province -- ce qui continuera, comme l'a signalé le sénateur Rompkey, de façon au moins équivalente à ce qui se passe dans n'importe quelle autre province du pays --, nous devrions donner à la législature, par l'entremise de cette loi d'application générale, le droit d'établir des critères. Elle devrait pouvoir dire: «Bien sûr, vous pouvez exercer vos droits, pourvu qu'ils répondent à cette série de critères; il ne faut pas que vous établissiez chacun les vôtres.» Il y aura un ensemble de critères d'application générale stipulant que tout groupe remplissant ces critères à un moment donné peut exercer intégralement tous les droits énoncés dans la nouvelle clause 17 et non pas dans un texte législatif qui existait en 1946 ou 1949 ou qui a été modifié en 1952. Cela fait directement partie de la nouvelle disposition constitutionnelle. Il est question des politiques en matière d'admission, de l'embauche et du congédiement des professeurs, de la pratique de la religion ainsi que des activités académiques touchant aux croyances religieuses. Pour pouvoir exercer ces droits, il suffit qu'un groupe réponde à une norme d'application générale dans la province. Voilà le changement qu'apporte cette nouvelle modification.
Nous croyons, et c'est ce qui ressort du débat qui a eu lieu dans la province, que ce changement est sensé et qu'il est approprié. C'est le moment de le faire. La population dans son ensemble le souhaite. Nous croyons maintenant que nous devrions passer à la prochaine étape.
Je demanderai au Sénat de terminer ses délibérations et, je l'espère, d'adopter ce texte sans autre modification afin que nous puissions continuer dans la province les discussions tout à fait nécessaires permettant de régler cette question des critères d'application générale.
Le sénateur Pearson: Ma première question allait porter sur la commission scolaire de langue française. Nous avons été très impressionnés par votre déposition. Je veux confirmer que vous avez bien dit que vous êtes en train de préparer la création d'une commission scolaire française.
M. Grimes: Oui, sénateur. En fait, les autres membres du Cabinet sont réunis en ce moment à Corner Brook sur la côte ouest de la province. J'ai parlé avec le premier ministre après la réunion du Cabinet d'hier soir au cours de laquelle il a approuvé la modification qui sera apportée au projet de loi pour permettre la création d'une commission scolaire pour la population francophone de Terre-Neuve et du Labrador.
Le sénateur Pearson: C'est très bien.
M. Grimes: Cette question n'est pas seulement étudiée par le Cabinet, elle est déjà plus avancée que cela. Le gouvernement est déjà habilité à présenter un projet de loi à ce sujet en même temps qu'un autre portant sur la création de dix conseils scolaires interconfessionnels et d'un conseil unique responsable de la construction des écoles.
Le sénateur Pearson: C'est une bonne nouvelle.
Ma deuxième question concernait le choix entre un enseignement public et un enseignement uniconfessionnel ou interconfessionnel. J'ai déduit des dépositions présentées ici que, même si rien dans l'ancienne clause 17 ne vous empêchait véritablement de créer une école publique comme il en existe en Ontario, cela entraînerait des complications et aurait des implications financières qui constitueraient un obstacle de fait étant donné toutes les autorisations que vous devriez obtenir. Je ne sais pas, en fait, si cela se fera jamais étant donné que le modèle d'école interconfessionnelle que vous proposez sera probablement aussi bien accueilli qu'une école publique par les gens intéressés qui n'appartiennent à aucune confession ou ont des convictions religieuses différentes et que les enfants ne seront plus obligés d'obtenir une autorisation des parents pour ne pas suivre un cours de religion. Je ne sais pas ce qu'il en est. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
Je m'intéresse activement au système scolaire public de l'Ontario depuis de longues années. J'ai travaillé à un programme de prévention primaire concernant la santé mentale des enfants. Certains commentaires présentés ici donnent à penser qu'un système scolaire public est dénué de tout sens des valeurs. Je veux vous dire que c'est faux. Le système scolaire public de l'Ontario est empreint de certaines des valeurs les plus nobles de la population canadienne -- la compassion envers les enfants et le souci de leur bien-être, surtout en ce qui concerne les enfants les plus vulnérables, ceux qui sont exposés à certains risques. Pouvez-vous dire ce que vous pensez des possibilités en matière de création d'écoles publiques à cet égard?
M. Grimes: Le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador n'aime pas employer des termes comme école publique, enseignement public et éducation publique à cause de l'évolution historique du système dans la province. Cette question a assurément fait partie du débat qui a eu lieu l'année dernière à la même époque au sujet du référendum. Je ne pense pas qu'un tel système serait dénué de tout sens des valeurs. Le problème est que, une fois qu'on adopte ce système, au vu des précédents juridiques établis dans ce contexte, les pratiques religieuses qui nous ont toujours paru aller de soi et que nous voulons voir continuer dans la province sont jugées contraires à la Constitution. Nous ne voulons pas qu'il soit fait mention d'un système d'enseignement public à Terre-Neuve et au Labrador dans quelque circonstance que ce soit à cause du fait que cela pourrait mener à une contestation des droits confessionnels relatifs aux activités religieuses et à la pratique de la religion qui sont énoncés dans notre nouvelle clause 17. Nous voulons que cela continue dans toutes les écoles et c'est la raison pour laquelle nous avons choisi le terme «interconfessionnel» au lieu de parler d'«écoles publiques». Nous voulons toujours faire ressortir que le système existant à Terre-Neuve et au Labrador est unique et différent des autres.
Toutes nos écoles financées par les deniers publics ont un caractère confessionnel. Il s'agit simplement de savoir si une école sera utilisée par une seule confession ou par plusieurs. Si cela reste dans la disposition constitutionnelle, nos conseillers juridiques nous disent là encore que, quelle que soit la nature de l'école, qu'elle soit uniconfessionnelle ou partagée entre plusieurs confessions, personne ne pourra contester le droit de dire le Notre Père, de célébrer Noël ou Pâques ou de pratiquer la première communion. Cela sera autorisé et à l'abri de toute contestation juridique.
À Terre-Neuve et au Labrador, la pratique observée a toujours été que les gens qui ne possèdent pas de tels droits et qui n'appartiennent pas à ces catégories ont la possibilité de ne pas participer aux activités qu'ils jugent offensantes. Il en est ainsi depuis toujours à Terre-Neuve et au Labrador. Les élèves appartenant à une confession qui diffère des confessions reconnues ou ne jouit pas des droits dont nous parlons sont autorisés à ne pas assister aux cours de religion ou aux pratiques religieuses qui ne concordent pas avec leur propre mode de vie et l'expression de leur religion. Voilà pourquoi nous n'avons pas utilisé la notion d'école publique dans cette modification de la Constitution.
Pourrions-nous avoir des écoles publiques? Il est clair que ce serait beaucoup plus facile avec la nouvelle clause 17 qu'avec l'ancienne. Nous pourrions en avoir aujourd'hui même. Cela pourrait poser des difficultés, mais nous pourrions le faire dès aujourd'hui. Le gouvernement ne souhaite cependant apparemment pas qu'il y en ait. Nous ne voulons pas du tout discuter de cela. Nous sommes tout à fait satisfaits de continuer à avoir des écoles de nature confessionnelle. La question est de savoir combien seront gérées conjointement et combien continueront d'être gérées par une seule confession de la façon dont celle-ci l'entend tout à fait comme cela se fait aujourd'hui. Les références aux écoles publiques, aux écoles neutres et la jurisprudence relative à cette question effraient franchement le gouvernement et nombre des groupes qui détiennent des droits dans ce domaine à Terre-Neuve et au Labrador et qui craindraient de ne plus pouvoir continuer à se prévaloir, dans toutes les écoles, des droits fondamentaux à l'exercice d'activités religieuses, à la pratique de la religion et à l'enseignement de différentes confessions religieuses.
J'espère avoir répondu à cette question.
Le sénateur Beaudoin: Monsieur le ministre, je désire vous remercier vivement pour la décision qu'a prise votre Cabinet au sujet des écoles françaises. Je pense que c'est une question très importante. Le Sénat n'en est pas saisi parce que nous nous occupons de la proposition de modification de la clause 17. L'utilisation du français à l'école n'est pas la même chose que la question des droits confessionnels en matière d'éducation, mais le même point de vue peut prévaloir à cet égard. Je suis content que le Cabinet ait pris cette décision.
Je pense que nous avons eu un débat fantastique au sujet de toutes les questions concernant la clause 17. Je conviens avec vous que l'élément fondamental est l'expression «sous réserve du droit provincial». Je suis d'accord pour dire que ce texte fait très souvent référence au droit confessionnel. Je conviens certainement avec vous qu'Ian Binnie et Colin Irving ne sont pas d'accord. Il n'y a absolument aucun doute. Ce sont deux éminents avocats de notre pays.
Puisqu'il s'agit d'un texte constitutionnel, chaque mot est important. Je ne sais pas si vous êtes de cet avis, mais je suis certain qu'un jour ou l'autre, il y aura un procès à propos de l'expression «sous réserve du droit provincial». J'ai écouté très attentivement votre interprétation de cette expression. D'autres l'interprètent peut-être autrement. Lorsque de telles difficultés se posent, comme cela a été le cas pour l'article 93, c'est à la Cour suprême du Canada qu'il revient de se prononcer. Comme l'a dit un célèbre juge en chef des États-Unis, ce sont les juges qui définissent ce que veut dire la Constitution, et cela s'applique particulièrement à la Cour suprême du Canada.
Je conviens que la clause 17 est unique et que Terre-Neuve a un problème unique. Cela ne fait aucun doute. J'ai toutefois l'impression que la Cour suprême interprétera cette importante modification à la lumière de la jurisprudence existante et examinera la portée de chaque nouveau terme utilisé. Nous ne pouvons pas mettre un terme à ce débat. C'est un tribunal qui le fera un jour. Que pensez-vous de cela?
M. Grimes: Je parlerai peut-être d'abord de la question du français.
Lorsque j'ai rencontré des représentants de la communauté francophone de Terre-Neuve et du Labrador, j'ai apprécié la façon dont ils abordaient cette question. Elle représente une source de frustrations pour eux depuis un certain temps et elle se pose depuis de longues années. Je dois reconnaître qu'ils ne voulaient pas mettre des bâtons dans les roues du gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador ou de qui que ce soit d'autre en ce qui concerne l'étude de la clause 17 et ils ne voulaient pas donner à quiconque l'impression qu'il y avait un lien direct entre les deux. Ils ont très légitimement saisi l'occasion politique qui se présentait lorsqu'il y a eu un débat public auquel était associé le Parlement du Canada. Ils voulaient également faire connaître leurs préoccupations. Ils ont exprimé leur point de vue et en ont parlé avec M. Tobin pendant et après les élections lorsqu'on m'a demandé de régler cette question au lieu d'avoir à plaider notre cause devant les tribunaux. Je suis heureux de vous indiquer, comme je l'ai fait tout à l'heure, que le Cabinet a réglé cette question hier soir. Une loi habilitante va être présentée et des discussions sont en cours au sujet des détails de la structure de cette commission scolaire.
Vous semblez dire avec satisfaction, sénateur, que cela finira devant les tribunaux. Je ne fais de la politique que depuis peu de temps, six ou sept ans environ. Je suis encore assez naïf pour penser que ce ne sera pas le cas. Pour ce qui est de cette nouvelle clause, je pense que l'on retrouvera le même esprit de coopération qui s'est manifesté lors des réunions précédentes avec les représentants des confessions. Lorsque cette nouvelle modification aura été adoptée, je crois également que, au cours des discussions que nous aurons cet automne pour préparer des dispositions législatives d'application générale, la population et les groupes qui détiennent certains droits auront la conviction que ces droits ne vont pas être éliminés ou sérieusement compromis. Ils sont énoncés dans la Constitution. Ils sont confirmés par une mesure législative. Je ne suis pas du tout certain que cela finira devant les tribunaux à un moment donné.
Les avocats me diront plus tard ce qu'il en est, mais, à ma connaissance, lorsqu'une mesure législative est contestée, même devant la Cour suprême du Canada, on accepte comme preuves les déclarations publiques figurant dans le hansard, les documents des législatures et les commentaires des ministres de la Couronne, des premiers ministres et des politiciens relativement aux intentions qui ont présidé à cette mesure. La décision du tribunal dépend de ce que le gouvernement a dit qu'il avait l'intention de faire.
Notre province a perdu un célèbre procès. L'un des éléments retenus a été que le premier ministre de l'époque avait dit ce qu'il avait l'intention de faire. Le tribunal a conclu que si c'était ce qu'il essayait de faire, c'était important.
Chacun des groupes intéressés par la question des droits confessionnels sera fortement rassuré par le fait que -- ils sont très habiles à faire des commentaires et à les utiliser quand il le faut, procédé très correct que nous utilisons tous --, dans mes déclarations publiques en tant que représentant officiel du gouvernement de la province, j'ai dit que la formule «sous réserve du droit provincial» oblige la législature à adopter des projets de loi leur permettant d'exercer les droits mentionnés dans le reste de la clause et ne l'autorisent pas à ajouter quoi que ce soit qui viderait le reste de la clause de son sens. Ils pourront très efficacement brandir cette déclaration si l'affaire se retrouvait jamais devant les tribunaux. Pour peu que le gouvernement ait jamais eu l'intention de s'engager sur cette voie et de dire: «Voici les droits qui vous sont accordés en vertu de la nouvelle clause 17, mais, en vertu de la disposition «sous réserve», nous allons vous imposer des conditions si strictes que vous ne pourrez jamais les exercer», je pense que je leur aurai fourni un excellent argument et qu'ils gagneront. Les choses se sont déjà passées comme cela devant les tribunaux. Ils ont accepté comme preuve les déclarations dans lesquelles des représentants officiels du gouvernement interprétaient publiquement non seulement les termes utilisés dans un projet de loi mais également les objectifs de celui-ci.
Je ne suis pas juriste. Si vous voulez en discuter plus avant, Mme Welsh pourra peut-être en débattre avec vous. Notre province a déjà perdu des procès importants. Dans ses décisions, le tribunal a écrit que le premier ministre ou le ministre de l'époque avait dit qu'il avait telle ou telle intention alors que le gouvernement avait fait autre chose, ce qui ne va pas. Je pense que les groupes intéressés seront grandement rassurés par le fait que le gouvernement affirme officiellement que cette expression clé le force à présenter des projets de loi leur permettant d'exercer tous les droits mentionnés dans le reste de la clause.
Le sénateur Jessiman: Comme vous le savez, l'alinéa 17b) dit «sous réserve du droit provincial». Je pense que vous avez dit que la province avait rédigé un projet de loi. A-t-il déjà été présenté en première lecture?
M. Grimes: Non. L'Assemblée législative de la province ne siégeait pas à ce moment-là. Il a été présenté publiquement par le premier ministre et le ministre de l'Éducation de l'époque.
Le sénateur Jessiman: Peut-on se le procurer?
M. Grimes: Oui. Il est à la disposition du public dans la province depuis quelque temps.
La présidente: Nous l'avons, sénateur Jessiman.
Le sénateur Jessiman: Vous pouvez répondre par «oui» ou par «non», mais on me dit qu'il existe maintenant dans l'ensemble de la province des écoles qui regroupent les catholiques, les pentecôtistes et d'autres confessions. En d'autres termes, à ce qu'on me dit, il y a déjà des écoles qui fonctionnent de la façon dont il est question dans le nouveau système proposé; est-ce juste?
M. Grimes: Non. Je suis néanmoins heureux que vous ayez posé cette question parce que des explications sont nécessaires.
Les écoles auxquelles vous faites allusion sont actuellement appelées des écoles de services conjoints. En fait, chacune est régie par une entente séparée conclue par les différents conseils scolaires qui s'entendent pour partager un édifice. Leur caractéristique principale est que l'on a en fait deux écoles qui fonctionnent sous un même toit. Le personnel est divisé; il y a un accord sur le partage des responsabilités administratives entre les différents conseils, qu'il s'agisse d'un conseil catholique, pentecôtiste ou unifié. Ils se partagent certaines tâches et exercent certaines activités séparément. Beaucoup d'ententes contiennent des éléments communs, mais certaines dispositions ne se trouvent que dans une seule entente.
Dans le cas des écoles interconfessionnelles prévues par la nouvelle clause, il n'y aura pas deux administrations et deux écoles différentes se contentant de partager un édifice; il y aura «une école» regroupant toutes les confessions et «une administration unique» nommée par le nouveau conseil scolaire interconfessionnel. Actuellement, s'il est convenu que le directeur de l'école soit catholique et si c'est avec le groupe unifié que les services sont partagés, le directeur adjoint doit appartenir à ce groupe. Dans les écoles interconfessionnelles fonctionnant en vertu du nouveau système, il n'y aurait rien de tel. Les mêmes possibilités seraient offertes à toutes les confessions. Le système actuel y ressemble, mais il est différent de ce que prévoit la nouvelle clause pour les écoles interconfessionnelles. Ce qui le caractérise est le côté pratique d'avoir deux écoles distinctes se partageant un bâtiment au lieu d'avoir chacune le leur. Cela se fait par souci pratique et sur la base d'une entente. Cela marche bien. Le gouvernement reconnaît que c'est mieux que d'avoir deux écoles distinctes dans deux édifices distincts, mais ce n'est pas exactement ce que la nouvelle clause prévoit comme étant une école interconfessionnelle.
Le sénateur Jessiman: Je suppose que si les parties étaient d'accord, ce système pourrait s'appliquer dans l'ensemble de la province à toutes les écoles avec une seule administration là où il y en a deux maintenant, sans que la clause 17 soit nécessaire.
M. Grimes: Je suis d'accord, sénateur, parce qu'il y a eu certaines tendances dans ce sens au fil des ans. Ce modèle des services conjoints a mis des années à prendre forme suite aux ententes intervenues entre les conseils. Ils ont du mal à gérer eux-mêmes leurs propres écoles, mais ils veulent préserver dans une certaine mesure leurs droits confessionnels distincts et trouver un mécanisme leur permettant de partager un seul édifice au lieu d'avoir chacun le leur. Ce n'est pas le même modèle que celui qui est prévu pour les écoles interconfessionnelles partagées dans la nouvelle clause. Cela se ressemble. C'est un pas dans la bonne direction et c'est un système utile dans la province actuellement, mais ce n'est pas le modèle envisagé.
Lorsque nous nous sommes penchés sur cette question quand nous avons récemment discuté de l'accord-cadre avec les représentants des confessions, j'ai notamment déclaré que je supposais que toutes ces écoles deviendraient des écoles interconfessionnelles. Certains n'étaient manifestement pas d'accord. Ils ne voulaient pas que chacune de ces écoles devienne automatiquement une école interconfessionnelle dans les conditions prévues par la nouvelle clause. Nous devions continuer d'en discuter et ce n'est pas encore réglé.
Le sénateur Cogger: Vous avez déjà répondu à mes questions. Je prendrai simplement une minute du temps dont dispose le comité, comme l'ont fait mes collègues le sénateur Pearson et le sénateur Beaudoin, pour féliciter le ministre et ses collègues d'avoir finalement suivi la recommandation du rapport Norman de 1993 en créant un conseil francophone. C'est très bien.
Comme la plupart des gouvernements, le vôtre sera jugé en fonction de la façon dont vous traitez vos minorités. C'est vraiment un pas dans la bonne direction. Au nom des francophones de Terre-Neuve et du Labrador, je crois que vous méritez des félicitations.
La présidente: Je vous remercie, monsieur Grimes, pour votre exposé et pour les informations que vous nous avez fournies ce matin.
M. Grimes: Je voudrais remercier les membres de ce comité d'assumer cette tâche au nom du Sénat. Nous pouvons seulement vous souhaiter bonne chance pour vos délibérations finales.
La présidente: La greffière remettra en fait un rapport au Sénat le 17 juillet, c'est-à-dire mercredi prochain.
Honorables sénateurs, avant de lever la séance, je voudrais remercier toutes les personnes qui ont participé à ces audiences, tout particulièrement celles qui sont restées là tout au long de ces deux journées et demie. Je ne fais pas abstraction des sénateurs, mais je pensais particulièrement aux membres du public qui sont restés à nos côtés pendant toutes ces audiences. Je les remercie de leur attention et, ce qui est plus important, de la façon dont ils ont respecté le Règlement du Sénat. Je suis très heureuse de la façon dont vous vous êtes comportés et de l'intérêt manifeste que vous portez à la clause 17 et dont votre présence est la preuve.
Je voudrais également remercier officiellement le personnel de l'hôtel Newfoundland, qui a été merveilleux.
Enfin, et ce ne sera certainement ni la dernière ni la moins importante de mes remarques, je voudrais remercier le personnel du Sénat qui en fait beaucoup plus que ce pour quoi il est rémunéré. Je féliciterai Heather Lank et les employés qu'elle dirige pour la façon dont se sont déroulées ces audiences.
J'ai également demandé à Mme Lank de remettre aux membres du comité un document d'une page intitulé «Options pour un rapport du comité». Je vous ai indiqué l'éventail général des options dont nous voudrons peut-être parler lors de notre réunion du lundi 15 juillet à 10 h 30. Je serai heureuse de rencontrer à ce moment-là tous ceux d'entre vous qui sont chargés de la rédaction du rapport du comité.
La séance est levée.