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Sous-comité de l'éducation postsecondaire au Canada

 

Délibérations du sous-comité de l'enseignement postsecondaire
du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 13 - Témoignages pour la séance de l'après-midi


OTTAWA, le mercredi 16 avril 1997

Le sous-comité de l'enseignement postsecondaire du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 15 h 15 pour poursuivre son examen de l'enseignement postsecondaire au Canada.

Le sénateur Thérèse Lavoie-Roux (vice-présidente ) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente: Bon après-midi. Monsieur Young, je vous prierais de nous présenter la personne qui vous accompagne, puis de faire votre déclaration.

M. Terence Young, adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation et de la Formation de l'Ontario: Madame la présidente, m'accompagne aujourd'hui M. Louis Lizotte du ministère de l'Éducation.

Madame la présidente, honorables sénateurs, je suis député de la circonscription de Halton Centre à l'Assemblée législative de l'Ontario et adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation et de la Formation de l'Ontario, l'honorable John Snobelen; je m'occupe plus particulièrement des collèges et des universités.

Je vous remercie de me donner l'occasion aujourd'hui d'adresser quelques mots au sous-comité de l'enseignement postsecondaire. Au Canada, l'éducation a beau être du ressort des provinces, elle n'en reste pas moins une préoccupation d'envergure nationale. Les gouvernements provinciaux doivent pouvoir compter sur l'appui du gouvernement fédéral au moment de s'acquitter de leurs responsabilités à cet égard, puisqu'il y va de la prospérité future du pays tout entier. N'allez pas croire que je prône le chevauchement de programmes et de services qui existent déjà au niveau des provinces. Ce que les provinces attendent plutôt du gouvernement fédéral, c'est un engagement financier sans équivoque. Nous voulons nous assurer que le gouvernement fédéral attache une importance prioritaire à l'éducation de la prochaine génération de Canadiennes et de Canadiens.

Le 4 février 1997, dans son discours sur l'état de l'Union, le président des États-Unis, M. Clinton, a fait la promesse au peuple américain de renforcer l'éducation et, pour ce faire, d'employer à bien les forces de la technologie et de la science. Mieux encore, il a annoncé qu'il ferait de l'éducation sa principale priorité pour les quatre prochaines années.

Comment pourrions-nous ne pas en faire autant pour les étudiantes et les étudiants du Canada? Nous savons pertinemment que notre avenir se joue à l'échelle de l'économie mondiale et du marché international. Si nos amis et alliés devaient produire davantage de jeunes diplômés et surtout des diplômés mieux qualifiés que par le passé, le Canada risquerait de rester sur la touche, sans grand espoir de se remettre en lice. C'est pourquoi l'Ontario applaudit la présente enquête sur la situation de l'enseignement postsecondaire au Canada. C'est aussi la raison pour laquelle je suis venu aujourd'hui vous présenter notre volonté de coopérer avec le gouvernement fédéral en matière d'aide financière aux étudiants, de formation de la main-d'oeuvre et de recherche en milieu postsecondaire.

L'histoire de l'enseignement postsecondaire en Ontario remonte loin, et nous en sommes fiers. Au début du XIXe siècle, la province comptait quelques collèges confessionnels répartis sur son territoire. Depuis, nous sommes partis de cette base pour mettre sur pied un réseau d'universités et de collèges d'arts appliqués et de technologie, ainsi que des programmes de formation, qui soutiennent aisément la comparaison avec ce qui se fait de mieux ailleurs. Des milliers de jeunes des quatre coins du monde viennent étudier en Ontario. On y trouve en effet des programmes de renommée internationale en médecine, en électronique, en animation informatique ou en hôtellerie, pour n'en citer que quelques-uns.

On lisait récemment dans la revue Maclean's que le Collège Sheridan, avec son programme d'animation classique et informatique, constitue le Harvard des écoles d'animation du monde entier. En fait, la réputation du collège dans cette discipline est telle que la demande pour les programmes dépasse de beaucoup le nombre de places disponibles. Par exemple, dans le programme d'animation, 2 791 demandes d'admission ont été reçues pour les 154 places qui s'ouvriront en septembre prochain.

Au cours des dix dernières années, deux universitaires ontariens ont reçu le prix Nobel, John Polanyi en chimie et Bertram Brockhouse en physique. Dans la plus récente de ses évaluations annuelles des universités, la revue Maclean's a classé des universités ontariennes en première, deuxième et cinquième place des cinq meilleures universités de recherche au pays. Parmi la catégorie des universités générales, trois des cinq meilleures universités sont en Ontario, et deux des cinq meilleures pour les universités de premier cycle.

Pourquoi donc aurions-nous lieu de nous inquiéter? Soit dit franchement, atteindre un tel niveau d'excellence n'est guère facile, et le maintenir encore moins. Les changements touchant la technologie, la conjoncture économique, le marché du travail et les dépenses publiques nous obligent à revoir le financement de l'éducation. La réforme de l'enseignement postsecondaire et de la formation est une priorité pour notre gouvernement. En effet, l'accès à l'enseignement supérieur est le nerf du potentiel économique à long terme de notre province.

Il n'y a pas de meilleur programme de création d'emplois que l'enseignement postsecondaire. Les titulaires d'un diplôme d'enseignement postsecondaire sont mieux rémunérés et moins vulnérables au chômage que les autres.

Néanmoins, ces dernières années, les provinces, les établissements d'enseignement et les étudiants ont essuyé le contrecoup de pressions accrues. Il était grand temps de développer une nouvelle orientation pour l'éducation postsecondaire. L'une de nos premières initiatives a été de constituer le Comité consultatif sur l'orientation future de l'éducation postsecondaire. Tel que vous l'entendrez bientôt de M. David Smith, ce comité consultatif nous a beaucoup donné pour alimenter notre réflexion sur la réforme de l'enseignement postsecondaire en Ontario. L'une des premières mesures recommandées par le Comité consultatif, en vue d'en arriver progressivement à ce que le financement de l'éducation postsecondaire en Ontario atteigne la moyenne des autres provinces, était de stabiliser le niveau des subventions de fonctionnement des collèges et universités. Or, nous maintiendrons en 1997-1998 un niveau de paiements de transfert aux collèges et universités similaire à celui de l'année dernière, de l'ordre de 2,2 milliards de dollars. Même si les fonds en provenance du gouvernement fédéral diminueront de plus de 42 p. 100, les sommes dépensées par l'Ontario aux fins de l'éducation postsecondaire ne baisseront que de 2 p. 100.

Nous avons aussi partiellement adopté la recommandation du Comité consultatif de déréglementer les droits de scolarité en autorisant nos collèges et nos universités à relever leurs droits de 10 p. 100 maximum en moyenne pour 1997-1998, étant entendu que la hausse maximale autorisée pour un seul programme est de 20 p. 100.

Si nous voulons que l'éducation soit accessible au plus grand nombre, nous devons veiller à ce qu'elle soit abordable. Il est inadmissible que quiconque soit forcé d'abandonner l'idée de faire des études supérieures par simple manque de moyens. La démarche adoptée par le gouvernement ontarien concernant le financement des études est de venir en aide aux étudiantes et aux étudiants les plus nécessiteux. C'est pourquoi nous exigeons des collèges et des universités qui augmentent leurs droits de scolarité qu'il consacre 33 p. 100 des sommes ainsi recueillies à l'aide financière aux étudiants.

Nous avons témoigné de notre détermination à aider les étudiants d'autres façons. De 1995-1996 à 1997-1998, le gouvernement de l'Ontario va avoir plus que doublé ses dépenses au titre du Régime d'aide financière aux étudiants et aux étudiantes de l'Ontario qui, d'un total de 232 millions de dollars en 1995-1996 devrait atteindre un montant estimé à 528 millions de dollars en 1997-1998, aidant près d'un quart de million d'étudiantes et d'étudiants à atteindre leurs buts.

La province investit aussi dans l'aide financière aux étudiants grâce au Fonds fiduciaire d'initiative pour les étudiantes et les étudiants de l'Ontario. Ce fonds, qui connaît un succès retentissant, est constitué à partir de dons immédiats ou promis que le gouvernement égale, dollar pour dollar, pour toutes les contributions recueillies jusqu'au 31 mars 1997. Nous avions estimé au départ que cette initiative permettrait aux collèges et aux universités de recueillir une centaine de millions de dollars. Or, quantité d'établissements ont déjà atteint leur cible initiale, sans que le flot de contributions ne cesse pour autant. Nous estimons désormais que la barre de 100 millions de dollars sera franchie et nous contribuerons comme convenu un dollar à ce fonds pour chaque dollar obtenu d'une autre source.

Bon nombre de nos collèges d'arts appliqués et de technologie ne s'étaient jamais essayés à la collecte de fonds, et pourtant, plusieurs d'entre eux ont obtenu des résultats remarquables. L'un de nos plus petits collèges, le Collège Northern à Timmins, est confiant d'atteindre la cible qu'il s'est fixée pour cette campagne, à savoir recueillir un million de dollars. Si l'on tient compte de la taille de cet établissement, le don moyen par étudiant est comparable à celui des grandes universités de la province. Cela illustre bien l'appui dont ce collège bénéficie dans sa collectivité du nord-Est de l'Ontario. Les plus grands gagnants seront bien entendu les étudiants.

Compte tenu du montant moyen des bourses qui leur sont accordées, nous pouvons déjà dire que plus de 10 000 étudiants bénéficieront du Fonds financier d'initiative pour les étudiantes et les étudiants de l'Ontario. Nous allons également accorder une aide supplémentaire aux étudiants par l'intermédiaire des Bourses d'excellence de l'Ontario récemment annoncées. Ce nouveau programme paiera les droits de scolarité des étudiants, inscrits dans les collèges et universités publics de l'Ontario, dont les résultats se situent dans les 2 p. 100 supérieurs. Les premières bourses d'excellence de l'Ontario seront accordées en fonction des notes obtenues en 1997-1998.

Notre position, en Ontario, est que les responsabilités du gouvernement vis-à-vis des étudiants vont au-delà du financement immédiat des études. Nous devons aussi anticiper leurs besoins, autrement dit leur avenir. On ne peut plus rien prendre pour acquis de nos jours, en particulier en matière d'éducation. Ce qui compte pour l'avenir en matière d'éducation c'est de multiplier les choix pour les jeunes, de leur offrir une certaine souplesse.

L'une des mesures que nous avons prises à cet égard a été d'encourager les collèges et les universités à conclure des ententes visant les études dans les deux types d'établissement. Il est certain que les étudiants qui obtiennent une formation pratique en même temps que leur diplôme universitaire ont d'emblée une longueur d'avance sur les autres et la conservent. C'est pourquoi nous encourageons les ententes dans ce sens.

Par exemple, le Collège Centennial et l'Université York offrent un programme qui permet aux étudiants de se préparer simultanément à l'obtention d'un baccalauréat et d'un diplôme en communication des entreprises ou en édition de livres et de revues. Ceux qui ont obtenu un diplôme en administration des affaires au Collège Humber sont pour leur part directement admis en troisième année du programme de baccalauréat en gestion des affaires offert par l'Université polytechnique Ryerson. Cela permet donc de cumuler en cinq ans au lieu de sept un diplôme en administration des affaires et un grade de bachelier en gestion des affaires, alors que ce dernier nécessite normalement à lui seul quatre années d'études.

Il convient de noter que l'inverse se fait également, autrement dit qu'il est tout à fait possible pour des étudiants de passer de l'université à un collège et de bénéficier de certaines équivalences pour être admis dans des programmes spéciaux tenant compte de leurs études universitaires. Ce type d'arrangement tire le meilleur parti de ressources qui se font rares, non seulement en ce qui a trait à l'économie, mais plus encore à la vie des jeunes Canadiennes et Canadiens et du nombre d'années qu'il leur faut consacrer à la poursuite de leurs objectifs d'études.

Le ministère de l'Éducation et de la Formation de l'Ontario accorde un appui financier au Conseil du consortium des collèges et des universités afin de l'aider à élaborer davantage d'ententes facilitant les études dans les deux types d'établissements. Nous aimerions que ces efforts trouvent un écho à l'échelle nationale. Nous appuyons d'ailleurs les travaux du Conseil des ministres de l'Éducation qui s'est penché sur la question avec son projet relatif à la mobilité des étudiants.

Les coupures majeures faites par le gouvernement fédéral aux montants transférés aux provinces au titre de la santé, des programmes sociaux et de l'éducation postsecondaire ont porté un sérieux coup au partenariat qui est à la base même de notre système d'éducation postsecondaire.

D'ici 1998-1999, le gouvernement fédéral aura réduit de 42,5 p. 100 les montants transférés aux provinces au titre de la santé et des programmes sociaux, tandis que ses dépenses à l'égard de l'ensemble des autres programmes n'auront baissé que de 1,5 p. 100. De plus, l'Ontario ne reçoit pas sa juste part des versements faits aux provinces aux termes du nouveau programme TCSPS. En 1996-1997 l'Ontario a reçu 420 millions de dollars de moins que si sa part avait été calculée directement en fonction de sa part de la population canadienne. Pour les cinq prochaines années, le manque à gagner de l'Ontario totalisera 2,1 milliards de dollars.

Je tiens à dire que l'Ontario appuie le principe de la péréquation entre les provinces. Cependant, les programmes fédéraux autre que les paiements de péréquation devraient traiter les provinces de façon équitable. Notre gouvernement est tout à fait d'accord pour que les personnes qui en ont les moyens paient une part équitable du coût de leurs études, à condition toutefois que les étudiants qualifiés parmi les moins nantis puissent compter sur une aide financière adéquate. C'est un parfait exemple de domaine dans lequel nos deux niveaux de gouvernements devraient collaborer pour le bien des étudiants canadiens.

C'est pourquoi l'Ontario a invité le gouvernement fédéral à une collaboration en vue de donner un coup de pouce aux étudiants. Notre idée est de créer un programme de remboursement des prêts étudiants en fonction du revenu à l'issue des études. Dans son dernier budget, le gouvernement fédéral se disait d'accord avec la recommandation de notre Révolution du bon sens visant la mise en place d'un tel programme de remboursement des prêts étudiants en fonction du revenu. Deux gouvernements ontariens successifs ont maintenant discuté de ce concept avec le gouvernement fédéral depuis 1995 et nous en discutons encore. Entre-temps, nous en sommes rendus à notre troisième ministre du Développement des ressources humaines Canada. Combien de temps pensez-vous que les étudiants de l'Ontario pourront prendre leur mal en patience? Il faut absolument que nous arrivions à mettre en place un programme concret d'ici septembre de cette année.

Nous comptons sur vous pour formuler des recommandations précises afin de débloquer ce dossier. Les deux niveaux de gouvernement devraient être en mesure de s'entendre bientôt à ce sujet, et pour le moins avant les élections fédérales imminentes. Les fonctionnaires des ministères concernés pourraient ensuite peaufiner les détails. L'essentiel c'est d'agir sans tarder. Des personnes représentant les étudiants, les collèges et universités et les établissements financiers devront se joindre aux discussions sur les détails du nouveau programme avant que celui-ci puisse être lancé. Je ne saurais donc trop vous conseiller de prévoir, comme l'une de vos premières recommandations, l'annonce et l'introduction d'un programme de remboursement des prêts étudiants en fonction du revenu.

Les mesures dont je parlais à l'instant constitueraient un bon point de départ pour la réforme de l'aide financière aux étudiants. De toute évidence, une telle réforme s'impose, car les personnes qui cherchent à obtenir une aide pour financer leurs études sont de plus en plus nombreuses. Les bénéficiaires du RAFEO sont passés de 142 000 à 217 000 de 1991-1992 à aujourd'hui, ce qui correspond à une hausse de 53 p. 100, et la valeur moyenne des prêts est passée durant la même période de 4 800 $ à 7 613 $, soit une hausse de 59 p. 100. Nous devons agir vite et mettre en place un programme fédéral-provincial de remboursement des prêts étudiants en fonction du revenu afin que les études postsecondaires restent accessibles au plus grand nombre.

Une discussion relative à l'enseignement postsecondaire, quel qu'en soit le sujet précis, doit toujours tenir compte des retombées de la recherche universitaire sur la vie sociale, économique et intellectuelle de notre pays. Évidemment, personne ne saurait dire au moment d'entamer des travaux de recherche quelle en sera finalement la valeur. D'un autre côté, qui saurait dire ce dont nous serions privés aujourd'hui sans les accomplissements des femmes et des hommes de science et de lettres au sein de nos universités?

L'Ontario accorde un appui permanent aux travaux de recherche entrepris par nos universités, et ce principalement par l'octroi de subventions de fonctionnement générales. La part de nos subventions de fonctionnement qui sert à appuyer la recherche s'élève à un montant estimé à plusieurs centaines de millions de dollars, auxquels s'ajoutent quelques enveloppes de financement ciblé.

Notre gouvernement mesure l'importance de la recherche dans les collèges et les universités, tant et si bien d'ailleurs que nous sommes en train de revoir la politique provinciale dans ce domaine. Le ministère de l'Éducation et de la Formation de l'Ontario a retenu les services de M. David Smith, l'ancien président du Comité consultatif sur l'orientation future de l'éducation postsecondaire, en lui confiant pour tâche de développer des options quant à la manière de tirer le meilleur parti des fonds que la province consacre à la recherche.

L'annonce récente de la mise sur pied de la Fondation canadienne pour l'innovation est un pas dans la bonne direction, car l'Ontario a vu d'un oeil inquiet les coupures de 10 à 17 p. 100 effectuées l'année dernière dans les budgets des conseils fédéraux de subventions à la recherche.

Ce qu'il nous faut au Canada aujourd'hui c'est un engagement à long terme du gouvernement fédéral en faveur de la recherche. Nous vivons une époque caractérisée par l'ampleur du changement à tous les niveaux. Les Canadiennes et les Canadiens doivent se positionner en tête de file, autrement dit innover et inventer les outils de demain, sans quoi nous serons vite dépassés par le progrès et relégués au rôle d'éternels retardataires qui ne rattrapent les dernières inventions qu'à grand-peine. Nous attendons un engagement inconditionnel du gouvernement fédéral à cet égard.

L'Ontario appuie en principe la proposition du gouvernement fédéral de transférer aux provinces les responsabilités liées à la formation de la main-d'oeuvre. Bien conçue et mise en oeuvre, une entente relative à la formation permettrait aux provinces d'offrir des programmes de formation plus efficaces, surtout par rapport à leur coût, tout en diminuant les chevauchements et les recoupements entre les deux niveaux de gouvernement. Autrement dit, elle nous aiderait à déployer nos efforts de manière plus intelligente, ce que visent tous les Ontariens et les Ontariennes.

Il y a juste un problème. L'Ontario compte parmi sa population 36 p. 100 de tous les chômeurs et 39 p. 100 de tous les travailleurs du pays. Or, le gouvernement fédéral ne nous offre que 27 p. 100 du financement prévu pour la formation professionnelle en 1997-1998. C'est d'une injustice flagrante. Peu importe l'angle sous lequel on essaie de présenter ou d'examiner les choses, il n'en reste pas moins que l'Ontario n'est pas traitée de façon équitable. Les personnes résidant en Ontario ont autant besoin de programmes de formation professionnelle que les autres citoyens canadiens. Mieux encore, elles y ont droit.

Si le sous-comité veut que ses recommandations relatives à l'enseignement postsecondaire au Canada soient valables, il devra aussi insister sur un financement équitable de la formation professionnelle.

Notre gouvernement s'est engagé à fournir aux étudiants de l'Ontario, ceux d'aujourd'hui comme de demain, une base solide sur laquelle bâtir leur vie. La prospérité à venir de notre province est liée à la réussite professionnelle de sa jeunesse et c'est pourquoi nous faisons tout notre possible pour aider nos jeunes à réussir dans leurs études.

L'examen de notre système d'éducation postsecondaire par un comité indépendant, la préparation d'un programme de remboursement des prêts étudiants fondé sur le revenu, la mise en place de fonds fiduciaires pour les étudiants de l'Ontario, le maintien pour l'an prochain des subventions de fonctionnement aux collèges et universités à leur niveau actuel, voilà autant d'initiatives prises par le gouvernement ontarien pour contribuer à offrir à nos étudiants la meilleure éducation possible.

En résumé, voici ce que nous aimerions que le gouvernement fédéral fasse pour appuyer les provinces en matière d'éducation postsecondaire. L'Ontario se réjouit de l'engagement fédéral en faveur de l'infrastructure de recherche dans les établissements postsecondaires. Nous vous demandons également à tout le moins de maintenir, préférablement d'augmenter, les budgets des trois principaux conseils fédéraux de subventions à la recherche.

Il est essentiel que le transfert aux provinces des responsabilités concernant les programmes de formation professionnelle s'accompagne d'un financement adéquat provenant du gouvernement fédéral et que celui-ci soit réparti de manière équitable entre les provinces et les territoires, proportionnellement à leur part de la population active nationale.

Nous demandons au gouvernement fédéral de travailler avec l'Ontario dans le but d'introduire rapidement un programme de remboursement des prêts étudiants en fonction du revenu. Je ne saurais trop conseiller au présent sous-comité de recommander au gouvernement fédéral d'introduire, conjointement avec les provinces intéressées, un tel programme applicable aux prêts étudiants octroyés dès l'année scolaire à venir.

Nous avons pris un engagement à cet égard lors de notre dernière campagne électorale et le gouvernement fédéral pour sa part a annoncé son intention d'agir dans ce sens dans son dernier budget. Le moment est venu de passer à l'action. Une annonce officielle avant les élections fédérales imminentes suffirait à mettre les choses en marche. Cela donnerait le feu vert aux fonctionnaires des deux niveaux de gouvernement, qui se sont maintes fois consultés sur le sujet et qui sont prêts à passer à l'étape suivante.

Si le gouvernement fédéral décidait d'adopter nos recommandations, le Canada serait assuré d'avoir un système d'éducation postsecondaire dont l'excellence fera ses preuves dans le cadre de l'économie mondiale. Je vous remercie.

La vice-présidente: Merci, monsieur Young. Votre présentation était très complète et contenait de très bonnes suggestions. Nous allons certainement leur accorder une grande attention.

Le sénateur Forest: J'ai été également très heureuse d'entendre votre rapport cet après-midi, car les rapports que nous avons entendus ce matin étaient plutôt tristes. Le rapport des étudiants s'intitulait: «Crise en cours».

J'avais passablement d'expérience des universités de l'Alberta, et je peux dire qu'elles ont toujours envié la situation de l'Ontario. Nous estimions que vous étiez bien financés.

Je comprends les difficultés que crée aux provinces la réduction des paiements de transfert du gouvernement fédéral. Je me doute bien que cela vous cause de sérieux problèmes.

On nous a demandé à différentes occasions si, pour les paiements de transfert aux provinces, on ne devrait pas avoir une enveloppe spéciale réservée à l'enseignement postsecondaire, ou à l'enseignement en général. Certaines provinces estiment que l'enseignement se trouve défavorisé par rapport à la santé. Les personnes qui sont venues ce matin s'inquiétaient plutôt du fait qu'elles n'obtenaient pas leur juste part. Toutefois, je pense que le gouvernement fédéral estime qu'en donnant les fonds aux provinces de façon globale, il leur laisse une plus grande souplesse dans la façon de les redistribuer.

J'ai posé un certain nombre de questions ce matin au sujet du programme de remboursement des prêts en fonction du revenu. J'ai cru comprendre, d'après ce qu'on m'a dit ce matin, que c'était un fait accompli, que les choses étaient en marche. Est-ce que ce n'est pas le cas?

M. Young: Nous y avons travaillé avec trois ministres fédéraux successifs. Nos hauts fonctionnaires et les hauts fonctionnaires fédéraux ont établi des modèles et ils ont une bonne idée de la façon dont cela fonctionnerait, comment on pourrait le présenter, mais nous avons besoin d'un engagement. Si le premier ministre du Canada disait au premier ministre de l'Ontario: «Nous allons mettre cela en place d'ici septembre 1997», nous savons que ce serait possible. Mais c'est ça que nous attendons de lui.

Le sénateur Forest: En ce qui concerne le programme fédéral-provincial de formation de la main-d'oeuvre, si je comprends bien vous estimez que ce qu'on vous offre n'est pas équitable.

M. Young: C'est exact.

Le sénateur Forest: Je sais que des ententes ont été signées avec l'Alberta et le Nouveau-Brunswick. Savez-vous si ces provinces estiment recevoir leur juste part?

M. Young: Je ne suis pas au courant des détails de ces ententes. J'ai lu un article dans les journaux ce matin disant qu'une entente avait été signée avec le Québec également. Ce que nous allons faire, c'est étudier cette entente de différents points de vue. Notre première étape est d'obtenir que nos citoyens bénéficient d'un financement équitable. C'est notre position de départ. Nous voulons étudier en détail ce que le Québec a négocié.

Peut-être que M. Lizotte pourrait répondre, sénateur.

M. Louis Lizotte, conseiller politique principal, Direction de la politique en matière d'éducation postsecondaire, ministère de l'Éducation et de la Formation de l'Ontario: Je suis désolé, mais je ne connais aucun des détails, sénateur.

Le sénateur Forest: Pourriez-vous répéter les pourcentages que vous avez cités un peu plus tôt à cet égard?

M. Young: Nous avons 36 p. 100 des chômeurs du Canada et 39 p. 100 de la population active, mais nous ne recevons que 27 p. 100 du financement total.

Le sénateur Andreychuk: Vous dites que vous n'obtenez pas votre juste part du financement. Vous a-t-on donné des raisons de cela?

M. Young: Non, aucune.

Le sénateur Andreychuk: Quelles sont les justifications?

M. Young: Ce doit être la tradition ou un protocole historique. On ne m'a pas donné de raisons.

Je regrette que les étudiants ne soient plus ici. L'accès à l'enseignement postsecondaire en Ontario est parmi les plus élevé d'Amérique du Nord, et même le plus élevé si on le mesure d'une certaine façon. Quels que soient les frais de scolarité, quelles que soient les autres conditions, les diplômés des écoles secondaires de l'Ontario ont un des taux d'accès à l'enseignement postsecondaire le plus élevé de l'Amérique du Nord, sinon le plus élevé. Ce qui compte, en définitive, c'est l'accès. Nous savons que la qualité est excellente chez nous.

Je parlais avec un des dirigeants étudiants il y a quelques mois. Je lui demandais: «Lorsque nous faisons quelque chose de très bien, comme mettre en place le Fonds fiduciaire d'initiative pour les étudiantes et les étudiants de l'Ontario, qui permettra de récolter 200 millions de dollars ou plus pour les étudiants, est-ce que vous ne pensez pas que vous pourriez dire quelque chose de positif à l'égard de notre gouvernement?» Elle m'a répondu, «Non». Je lui ai demandé, «Mais, pourquoi?» et elle m'a dit «Parce que j'appartiens à un autre parti que le vôtre».

La vice-présidente: Nous avons déjà entendu quelque chose de ce genre.

Le sénateur Andreychuk: Il y a une disparité et cela me rend optimiste. J'espère que les étudiants sont critiques à l'égard des gouvernements qui ont précédé le vôtre. Il est rassurant que nos jeunes fassent preuve d'un certain cynisme.

Les gouvernements et les universités nous ont décrit sous un jour positif une éducation de bonne qualité. Je trouve optimiste que les gens s'efforcent de rechercher la qualité et qu'ils voient d'autres solutions. Comment s'attaquer à ces questions? Vous avez mentionné la belle déclaration du président Clinton, son voeu pieux, mais ce que je recherche ce sont des gestes concrets.

Lorsqu'il est question des enfants et de l'éducation, tous les adultes vous diront que nous avons besoin de la meilleure éducation possible pour nos jeunes, car ce sont eux notre avenir; une bonne éducation améliore la productivité; nous avons besoin de changements et de nouvelles technologies. Je pense que nous avons déjà entendu tout cela. Vous vous adressez à nous alors que nos audiences tirent à leur fin.

De votre point de vue, et gardant à l'esprit notre Constitution, pensez-vous que le système d'éducation que le Canada s'est choisi est acceptable et que ce dont nous avons besoin c'est d'une évolution, d'une adaptation; ou est-ce que nous devons envisager, à plus long terme, des modifications radicales?

À cet égard, je pense à certaines des innovations et certaines des mesures draconiennes prises par l'Australie dans l'ensemble du domaine des études et de l'éducation. Ce que l'on disait là-bas, c'était que des modifications mineures ici et là au système existant ne suffisaient pas. Pensez-vous que nous devrions procéder à un bouleversement majeur ou avons-nous simplement besoin d'une petite mise-au-point?

M. Young: Je dirais que nous avons besoin d'une mise au point majeure. L'Australie est partie d'un point de vue très différent. Leur accès à l'enseignement postsecondaire était très inférieur au nôtre et l'enseignement y était gratuit. Elle avait beaucoup de chemin à parcourir. Elle n'avait pas le système que nous avons, particulièrement en Ontario. Elle n'avait pas l'excellente base dont nous disposons.

Il s'effectue beaucoup de choses extraordinaires dans nos universités. Vous ne voulez pas y renoncer en recherchant autre chose. Nous avons besoin d'une stratégie nationale de recherche qui maximisera l'utilisation des fonds et qui permettra de faire travailler les personnes les plus brillantes sur les sujets les plus importants.

Je ne confonds pas la recherche appliquée et la recherche fondamentale, parce que les deux sont importantes. Cependant, je dirais que c'est un domaine où nous avons absolument besoin d'une stratégie à long terme. En ce qui concerne l'accès des étudiants à des fonds pour poursuivre leurs études universitaires, il n'y a pas une réponse unique. En Allemagne, tous les frais de scolarité sont payés par le gouvernement, pourtant, seulement 11 p. 100 des étudiants vont à l'université. Les morceaux du puzzle qui permettent aux étudiants d'avoir accès à l'université sont en train de se mettre en place.

Un autre htmect de l'accès à l'enseignement postsecondaire c'est que plus de parents et de grands-parents commenceront à économiser pour les études supérieures des enfants lorsqu'ils entrent en première année. Il y a beaucoup de choses qui fonctionnent bien actuellement. Nous voulons nous assurer que nous nous développons à partir de ce que nous avons.

Le sénateur Andreychuk: Il est toujours difficile de venir en aide aux étudiants, car la minute où vous entendez parler d'un cas où il y a un besoin véritable, vous entendez le cas d'une autre personne qui a surmonté ses difficultés. Pourtant, lorsque vous regardez les obstacles, vous vous apercevez qu'ils étaient les mêmes. Certains parents aident leurs enfants, alors que d'autres avec le même revenu ne le font pas. Nous ne voulons pas intervenir là-dedans.

Une chose qui a changé, c'est la philosophie des bourses d'entretien, l'idée d'un encouragement plus général, l'idée que nous avons tous un investissement dans l'avenir. Je viens de Saskatchewan où on nous disait que chacun avait la responsabilité d'éduquer ses enfants. Nous utilisions le produit de nos impôts pour accorder des bourses d'entretien, mais les étudiants avaient l'obligation de travailler. Si le sénateur Perrault était ici, il vous demanderait si les étudiants ne peuvent pas travailler pour payer leurs prêts? Peuvent-ils travailler pour payer leurs dettes? Autrement dit, devons-nous envisager cette question des bourses d'entretien, en plus des bourses d'études, ou bien est-ce que les bourses d'études vont servir aussi un peu à l'entretien?

M. Young: Il y actuellement beaucoup de bourses d'études. La plupart des établissements d'enseignement ont leurs propres bourses d'entretien. Le Fonds fiduciaire d'initiative pour les étudiants de l'Ontario est un programme de bourses d'entretien, pas un programme de bourses d'études. Les bourses d'excellence sont pour les étudiants à plein temps qui se situent dans les 2 p. 100 supérieurs de leur classe. Les fonds versés paient les frais de scolarité.

Nous essayons d'accorder toute une gamme d'aides. Nous cherchons à donner aux parents des encouragements fiscaux, afin qu'ils économisent pour l'éducation de leurs enfants, ou des dégrèvements aux étudiants qui économisent pour leur propre éducation.

Je ne sais pas s'il y a une réponse parfaite à l'aide aux étudiants. En Ontario, nous appuyons quiconque, indépendamment de son âge, se rend responsable de ses propres actions et plus responsable de son avenir. Certains jeunes grandissent sans parents ou ont des parents qui ne peuvent pas les aider financièrement. Le programme de prêts à remboursement lié au revenu donnera à ces étudiants le choix d'aller à l'université ou au collège et de rembourser leurs prêts par versements mensuels abordables, même si cela doit prendre 20 ou 25 ans. Il n'y a rien qui empêche quelqu'un d'obtenir un prêt s'il est résolu et s'il veut s'efforcer d'obtenir quelque chose qui a de la valeur. C'est cela l'htmect intéressant.

Vous avez mentionné le cynisme des étudiants. Je suis d'accord que ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Certains étudiants universitaires commencent à contester au sein de l'établissement qu'ils fréquentent le principe des nominations à titre permanent. Est-ce logique pour les étudiants? Est-ce que l'on ne pourrait pas demander des variantes ou des changements dans la façon dont fonctionne le principe de la permanence? Je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose du tout. Il est juste qu'ils questionnent, car ce sont eux qui essaient d'apprendre dans ces établissements.

Le sénateur DeWare: Comme vous le savez, depuis Noël nous avons beaucoup entendu parler de mobilité et de normes nationales. On parle de normes nationales pour les jeunes, pour les dettes accumulées, pour la transférabilité mais, en raison des réductions de budget dans votre province, la taille des classes augmente et il y a réduction du nombre d'enseignants dans différents programmes. Tout cela a un effet négatif général. Nous avons parlé des frais de scolarité. Les étudiants se demandent comment ils pourront rembourser une dette de 30 000 $ après un programme de quatre ans.

Je voudrais parler avec vous du transfert d'argent de l'assurance-emploi pour la formation, effectué par le ministère des Ressources humaines en collaboration avec votre province. L'autre jour, nous avons rencontré des représentants des banques qui accordent les prêts aux étudiants. Une de leurs inquiétudes était la question de la crédibilité de certains des programmes de formation auxquels les gens de votre province veulent avoir accès. Est-ce que votre ministère a le contrôle de cette formation? Les banques ont des doutes au sujet de ces nouvelles organisations qui veulent faire la formation parce qu'elles pensent qu'il y a de l'argent de disponible alors qu'elles ne sont pas agréées et qu'elles devraient l'être en vertu du programme provincial. Est-ce que vous vous inquiétez de cela? Est-ce que vous pouvez me donner des renseignements à ce sujet?

M. Lizotte: En vertu de la Loi sur les écoles privées de formation professionnelle, tout établissement qui désire accorder de la formation en Ontario doit être enregistré si ce n'est pas un établissement public. De plus, s'il désire offrir de l'aide à ses étudiants, il y a des règlements en place qui régissent cet htmect et des normes à respecter.

Le sénateur DeWare: On s'inquiétait du fait que certains de ces établissements fermaient après un programme de 18 mois. Des étudiants qui s'étaient engagés et avaient pris un prêt, n'obtenaient pas la formation de qualité qu'ils auraient dû avoir. Les banques s'inquiètent de cela, parce que les étudiants se retrouvent avec des dettes, mais ni certificat ni diplôme. Est-ce que votre ministère n'a pas la responsabilité de s'occuper de l'agrément?

M. Lizotte: C'est exact. Pour que les étudiants obtiennent des prêts, il faut que l'établissement soit agréé par le ministère.

Le sénateur M. Lorne Bonnell (président) occupe le fauteuil.

Le sénateur Andreychuk: Tout le concept d'enseignement est en évolution et en expansion. Avez-vous des observations ou des idées particulières sur la voie que suit l'Ontario dans ce que certains appellent la commercialisation de l'enseignement outre-mer? D'autres ont dit que nous devrions profiter des besoins mondiaux d'enseignement international. Est-ce que l'Ontario tient compte de cet htmect dans sa réflexion?

M. Young: Il y a un certain nombre de changements qui s'opèrent actuellement, et cela continuera pendant les décennies à venir. L'un de ces changements, c'est l'éducation permanente. Les gens retourneront dans les collèges et les universités pour obtenir une meilleure formation ou un complément d'éducation. Le diplômé moyen aura cinq ou dix emplois différents pendant sa vie active.

Les conséquences de la technologie sont un autre point à considérer. La technologie élimine les frontières. L'université Western, ici en Ontario, a un programme de maîtrise en administration des affaires sur vidéo. Vous pouvez obtenir une telle maîtrise par contacts vidéo avec l'université. Il n'y a rien qui empêche les collèges et les universités de l'Ontario de faire de la formation pratiquement n'importe où dans le monde, par satellite par exemple.

Nous voulons faire en sorte que nous capitalisons sur l'excellence qui existe dans les établissements de l'Ontario.

Le sénateur Andreychuk: Lorsque nous étions à Vancouver, on nous a fait part d'une certaine inquiétude, pourrais-je dire de façon diplomatique, au sujet du fait que les universités de l'Ontario faisaient de la publicité auprès des étudiants de Colombie-Britannique. Les établissements de cette province estimaient que c'était leur chasse gardée. Est-ce que vous estimez que ce genre de concurrence est une bonne chose? Ou pensez-vous qu'il faut faire attention à ce que l'on fait?

Lorsque je parcours le monde, je constate que les universités américaines ont des filiales un peu partout au monde, en Malaisie, par exemple. Il semble que ces établissements bénéficient d'avantages fiscaux pour mettre sur pied ce genre d'opérations. Est-ce que l'Ontario a considéré cet htmect, ou est-ce strictement la communauté universitaire qui y pense?

M. Young: C'est la première fois que j'entends parler de ça. Un des vice-présidents de la compagnie Ford est membre du conseil d'administration du Collège Sheridan qui se trouve dans ma circonscription. Un autre membre de ce conseil d'administration s'est rendu en Extrême-Orient, je pense que c'était à Singapour. On lui a posé des questions au sujet du Collège Sheridan, en particulier en raison de son excellent programme d'animation. Nous avons alors établi un lien avec cet endroit. Des compagnies viennent maintenant à Sheridan pour consultation. Nous prenons ce que nous savons faire de mieux au monde et nous le fournissons à d'autres. Je vois cela comme un htmect positif.

Le sénateur Andreychuk: Y a-t-il au sein du gouvernement le désir d'aider les universités à créer des filiales ou pensez-vous que c'est simplement l'obligation des universités?

M. Young: Pour l'instant, c'est à la discrétion des universités.

M. Lizotte: Dans le contexte de certains accords bilatéraux que l'ACDI a conclus avec certains pays, le ministère de l'Éducation et de la Formation de l'Ontario a essayé de fournir l'expertise de la province. En gros, les établissements scolaires voient cela avec beaucoup d'intérêt, tout comme les associations d'universités. Les collèges sont très actifs dans ce domaine dans beaucoup de pays.

M. Young: Je voudrais vous donner un exemple d'un accord qui existe. L'institut hôtelier du Collège George Brown recherchait un partenaire. On voulait permettre aux étudiants d'obtenir, en plus d'un diplôme d'hôtellerie, un diplôme en administration des affaires. N'ayant pu trouver une université en Ontario qui ait accepté de s'associer à ce programme, on a conclu un partenariat avec l'Université de Calgary. Les étudiants peuvent donc aller au collège George Brown et obtenir un diplôme en préparation des aliments ou autre chose. Ensuite, ils vont à l'Université de Calgary et obtiennent un diplôme en gestion des hôtels et des stations. C'est donc un diplôme en administration des affaires. Il est regrettable de devoir aller si loin pour obtenir ce genre de partenariat. Il y a là une synergie. C'est quelque chose qui est mutuellement bénéfique et les établissements peuvent apprendre l'un de l'autre.

En ce qui concerne la recherche appliquée, j'ai demandé à certains professeurs pourquoi il était impossible de réunir les meilleurs spécialistes au monde de la recherche sur le cancer pour parvenir à une cure. Et ils m'ont dit: «Nous nous parlons constamment. Nous sommes ensemble sur l'Internet tous les soirs.» Donc, cela se produit, même si nous ne le voyons pas nécessairement. Le fait que nous puissions partager connaissance et expertise dans le monde entier, instantanément, est un élément encourageant. Je pense que nous devrions participer à cela également.

Le sénateur Forest: Un certain nombre de gens dans ce pays nous ont dit qu'il fallait une présence fédérale plus forte dans le domaine de l'enseignement. Nous savons très bien que l'enseignement est une responsabilité provinciale. Toutefois on nous a fait de nombreuses suggestions et recommandations à l'effet que les ministres de l'Éducation devraient se réunir et qu'il devrait y avoir des principes ou des directives nationales dans le domaine de l'enseignement, tout comme il y en a dans le domaine de la santé. Ceci améliorerait la mobilité des étudiants et l'agrément dans tout le pays. Quelle est votre réponse à cela? Estimez-vous que ce serait utile?

M. Young: Il y a des accords d'articulation des programmes qui permettent aux étudiants, alors qu'ils sont en huitième ou en neuvième année, de commencer à planifier leurs études en vue d'entrer à un certain collège ou une certaine université.

Actuellement, nous avons des problèmes dans nos établissements. Les étudiants ne savent pas s'ils sont en mesure de passer d'une université à une autre. Nous avons encouragé nos établissements à fournir aux étudiants des renseignements à ce sujet. Je verrais cela comme un avantage à l'échelon national également. Je ne sais pas si on fait actuellement des efforts dans ce domaine.

M. Lizotte: Il est intéressant de remarquer que vous avez déclaré, sénateur, qu'il n'est pas nécessaire que des normes nationales viennent du gouvernement fédéral. C'est d'ailleurs là-dessus que travaille le Conseil des ministres de l'Éducation.

Le sénateur Forest: Est-ce que les provinces travaillent à ces directives entre elles?

M. Lizotte: C'est exact.

Le sénateur Forest: Est-ce que vous verriez un rôle de facilitateur pour le gouvernement fédéral dans ce domaine? On nous l'a dit partout dans le pays. Nous faisons très attention de ne pas empiéter sur un domaine de compétence provinciale. J'aimerais bien avoir votre point de vue sur cette question.

M. Lizotte: Dans sa déclaration d'ouverture, M. Young décrivait trois domaines dans lesquels le gouvernement fédéral pourrait intervenir en matière d'enseignement postsecondaire. Cette aide très concrète serait importante pour les établissements et les étudiants de l'Ontario.

En ce qui concerne les autres domaines où le gouvernement fédéral intervient déjà, on peut se demander s'il n'y aurait pas un dédoublement des services ou s'il n'y aurait pas concurrence.

Le sénateur Forest: Je pense que l'idée serait peut-être que le gouvernement fédéral essaie d'aider le Conseil des ministres à parvenir à une entente.

M. Young: Je n'ai rien entendu à ce sujet. Si dix ministres de l'Éducation s'entendent sur des normes, je ne sais pas quel pourrait être le rôle du gouvernement fédéral.

Le sénateur Forest: De toute évidence son intervention ne serait pas nécessaire.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je voudrais souligner les deux initiatives que vous avez prises et qui me semblent intéressantes. Êtes-vous la seule province à avoir un fonds fiduciaire d'initiative pour les étudiants?

M. Young: Je ne sais pas.

M. Lizotte: De mémoire, je ne sais pas non plus.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je pense qu'il y a d'autres endroits qui ont des choses similaires aux bourses d'excellence de l'Ontario.

Avez-vous des statistiques sur les étudiants d'université ou de niveau postsecondaire qui décrochent?

M. Young: Je pense qu'il en existe.

M. Lizotte: Ces statistiques sont très difficiles à obtenir parce que nous n'avons pas de systèmes d'information centralisés. Certaines études topiques ont été faites. Il y a des données à ce sujet et on fait des efforts actuellement pour essayer d'obtenir une meilleure image.

Il y a un projet en cours pour créer un numéro d'identification unique des étudiants, ce qui serait utile. Par exemple nous n'avons aucun moyen de savoir si quelqu'un décroche d'une université pour aller dans une autre ou aller à un collège. Si l'on avait un numéro d'identification unique des étudiants, cela faciliterait le suivi de ces étudiants.

M. Young: Est-ce que vous vous inquiétez de savoir si les étudiants décrochent parce qu'ils ne peuvent pas se permettre financièrement de rester à l'université?

Le sénateur Lavoie-Roux: C'est une des raisons. Mais je me demande si vous en avez identifié d'autres.

M. Young: C'est une chose extrêmement difficile à mesurer. Lorsque j'étais à l'université, je me souviens de camarades qui disaient ne plus avoir d'argent et ne pas pouvoir trouver d'emploi d'été. C'est donc toujours une possibilité. Lorsque le chômage monte en Ontario, les inscriptions aux universités diminuent automatiquement. Lorsque le chômage augmentait au début des années 90, les universités étaient pleines d'étudiants. De nombreux étudiants quittent l'université ou le collège simplement parce qu'ils ont obtenu un emploi intéressant ou bien rémunéré.

Le sénateur Lavoie-Roux: Au niveau postsecondaire, avez-vous une idée du pourcentage d'étudiants qui doivent travailler en même temps qu'ils poursuivent des études?

M. Young: J'ai reçu un rapport de l'Université York qui est l'université à laquelle j'ai étudié. Dans cette université le chiffre est plus élevé peut-être que dans certains autres établissements. Je pense que 30 p. 100 des étudiants travaillent pendant l'année scolaire ainsi que pendant l'été.

L'Université York a un pourcentage élevé d'étudiants dont les parents n'ont pas fait d'études postsecondaires et sont incapables de financer les études de leurs enfants. À cette université, le corps étudiant est quelque peu unique. Il y a un pourcentage plus élevé d'étudiants qui travaillent pendant la semaine et cela est vraiment inquiétant.

Nous avons trois enfants âgés de 14, 12 et 10 ans et nous voulons être en mesure de les aider. Il m'est égal qu'ils travaillent pendant l'été, je pense même que ce peut être une bonne chose pour eux. Par contre, je souhaiterais qu'ils n'aient pas à travailler pendant la semaine. Nous essayons d'économiser de l'argent dans ce but, mais ce n'est pas sans nous inquiéter.

Le sénateur Lavoie-Roux: Ma deuxième question concerne l'enseignement postsecondaire en français en Ontario. Je sais que c'est un sujet délicat en Ontario actuellement, mais il y a l'Université Laurentienne, l'Université d'Ottawa et une autre. Combien d'universités françaises avez-vous?

M. Young: Il y a des programmes d'étude du français dans la plupart de nos universités, ainsi que des programmes en français. Deux de mes filles sont en immersion française à mi-temps. Elles étudieront le français jusqu'à la fin de leurs études. Peut-être que M. Lizotte a le nombre exact.

M. Lizotte: Peut-être que le Collège Hearst est le seul qui enseigne exclusivement en français. Les autres sont des universités bilingues qui offrent des programmes en français. C'est l'Université d'Ottawa qui a le plus grand nombre d'étudiants inscrits dans des programmes de langue française. La deuxième est l'Université Laurentienne, puis il y a ensuite le Collège Glendon qui fait partie de l'Université York.

Nous avons trois collèges de langue française qui ont été créés par le gouvernement provincial ces dernières années. Il s'agit de la Cité collégiale, du collège Boréal et du collège des Grands Lacs. Il s'agit là de collèges communautaires.

Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce qu'il s'agit d'établissements qui sont à la disposition des francophones qui veulent poursuivre leurs études en français? Est-ce qu'ils répondent convenablement aux besoins?

M. Lizotte: Certainement. D'ailleurs, depuis leur création, il y a eu trois expansions majeures des services en français en Ontario, et cela correspond à une augmentation du financement par le gouvernement provincial pour la création de nouveaux programmes aux universités et aux universités bilingues, ainsi qu'à la création de trois collèges de langue française.

M. Young: Si vous n'avez pas visité la Cité collégiale vous devriez le faire. C'est ici, à Ottawa, et c'est une école magnifique.

Le sénateur Forest: Est-ce un collège d'enseignement général?

M. Lizotte: C'est un collège d'arts appliqués et de technologie qui offre des programmes professionnels d'une durée d'un à trois ans.

Le président: Je voudrais vous remercier, M. Young, ainsi que votre conseiller politique principal, de votre excellente présentation.

Nous accueillons maintenant M. David Smith, Ph.D., du Comité consultatif sur l'orientation future de l'éducation postsecondaire.

Monsieur Smith, vous avez la parole.

M. David Smith, Ph.D., Directeur émérite, Université Queen's, Comité consultatif sur l'orientation future de l'éducation postsecondaire: Monsieur le président, je suis très heureux d'être ici aujourd'hui. Depuis l'été dernier, lorsque le Comité consultatif sur l'orientation future de l'éducation postsecondaire a été créé en Ontario, je savais que nous finirions par nous rencontrer, et nous voici enfin réunis, à la fin de vos audiences.

Comme je l'ai entendu il y a quelques minutes, vous avez l'impression d'avoir entendu tout ce qu'il y avait à dire, parce que vous êtes à la fin de vous audiences. Je suis sûr que les principales questions ont été toutes envisagées.

Je serais très heureux de pouvoir discuter avec vous et d'essayer de répondre aux questions qui vous gênent encore à ce stade. Je crois savoir que vous avez reçu copie du rapport de notre Comité, dont les 14 premières pages contiennent un résumé et nos recommandations.

Avec votre permission, monsieur le président, je voudrais passer les dix prochaines minutes sur ce que j'estime être les cinq «forces» qui, ensemble, influent sur le secteur de l'enseignement postsecondaire et montrer que la combinaison de ces forces exige une combinaison de politiques pour répondre aux besoins. Cette combinaison doit tirer partie des responsabilités partagées dans la société pour assurer la vigueur du secteur de l'enseignement postsecondaire.

Les cinq éléments qui, selon moi, influent de façon fondamentale et profonde sur le secteur de l'enseignement postsecondaire comprennent notamment la réduction à long terme du niveau de financement par les gouvernements. Du fait des contraintes et des changements dans la façon dont nous percevons le secteur public depuis quelques années, on s'attend à ce que le secteur de l'enseignement postsecondaire subvienne à ses besoins avec beaucoup moins de ressources gouvernementales. Le résultat de cela c'est qu'il a fallu restructurer les universités et repenser la façon d'utiliser les ressources dont elles disposent. Dans nos consultations à travers la province, l'automne dernier, nous avons constaté que des changements majeurs étaient en cours.

En même temps ce changement du secteur public suscite de la concurrence de la part d'autres systèmes d'enseignement postsecondaire, en particulier des États-Unis. En raison de nos systèmes de collecte des données, malheureusement très imparfaits dans ce domaine, nous n'avons guère que des renseignements anecdotiques sur la difficulté de conserver nos meilleurs chercheurs, professeurs et enseignants ou d'en embaucher pour doter les postes vacants. C'est un signe que nous avons de la difficulté à soutenir la concurrence, du moins de la façon dont nous utilisons les ressources actuellement.

En retour, cela conduira à une évaluation beaucoup plus prudente des priorités du secteur de l'enseignement postsecondaire. Nous n'avons pas de mécanismes pour analyser cette question en profondeur. Nous avons désespérément besoin d'études sur les priorités que l'on devrait accorder à nos universités et collèges en ce qui concerne l'attribution de ressources publiques.

Les États-Unis ont beaucoup d'instituts et organismes de recherche qui étudient ce secteur. Le Canada n'a pas grand-chose dans ce domaine. On aimerait qu'il ressorte de tout cela une évaluation beaucoup plus précise des priorités.

La deuxième force qui modifie profondément le secteur de l'enseignement postsecondaire c'est que l'on s'attend maintenant à ce que l'étudiant supporte une proportion bien plus élevée des coûts de son enseignement en acquittant des frais de scolarité qui augmentent relativement vite. Cela soulève immédiatement la question de la réforme des programmes d'aide aux étudiants de sorte que nous puissions aider ceux qui n'ont pas les moyens de payer ces frais de scolarité plus élevés.

Le Comité consultatif était en faveur d'un plan de remboursement des prêts en fonction du revenu et cela aurait été un des éléments principaux d'un régime d'aide aux étudiants beaucoup plus général. Il y a de nombreuses formes de remboursement en fonction du revenu. Nous n'avons pas essayé d'arrêter tous les détails, mais nous avons fait ressortir certains éléments qui, à notre avis, sont importants pour un tel régime. Le principe est bon. Nous recommandons fortement que cette recommandation soit prise en considération.

De plus, nous avons déclaré qu'il devrait y avoir de nombreuses sources d'aide aux étudiants, car c'est un domaine qui bénéficie d'une variété de sources susceptibles de mieux répondre aux besoins particuliers des étudiants. Nous avons proposé d'améliorer les régimes enregistrés d'épargne-études (REÉÉ), pour les rapprocher des régimes enregistrés d'épargne-retraite. Nous avons dit que, en principe du moins, on devrait permettre de déduire du revenu les intérêts payés sur les prêts étudiants, tout comme on l'autorise pour les emprunts fait à titre d'investissement dans de l'équipement industriel, même si nous nous rendons compte que la gestion de cet htmect puisse causer des difficultés administratives.

Nous étions en faveur du Fonds fiduciaire d'initiative qui donne aux universités une plus grande possibilité d'aider leurs étudiants jugés dans le besoin. Du fait de l'augmentation des frais de scolarité, nous voyons une évolution dans la forme d'aide aux étudiants. Toutefois c'est quelque chose que l'on doit encourager du moins pour l'avenir immédiat.

La troisième force, c'est l'augmentation de la contribution du secteur privé. Pour l'enseignement postsecondaire, la quantité d'argent que le secteur privé peut apporter est forcément limitée. Dans le cas des États-Unis, en observant les choses de près, on constate que l'aide privée est importante. Les grandes universités américaines, des établissements comme Harvard, MIT et d'autres, dépendent beaucoup de subventions du gouvernement, en particulier pour le financement de leur recherche. La contribution relative des sources privées, même si elle est plus élevée pour ces établissements, reste limitée. Pour des raisons évidentes, le Canada n'est pas aussi bien placé pour obtenir des subventions de grandes fondations privées et d'autres sources.

Nous constatons une augmentation des partenariats avec le secteur privé dans le domaine de la recherche, ce qui permet d'obtenir des fonds supplémentaires ainsi qu'un mécanisme intéressant de contrôle de la qualité. Le message là c'est que, grâce à différents moyens, le secteur privé jouera un rôle plus grand, mais nous ne devrions pas exagérer le montant que l'on pourra obtenir de cette source.

La quatrième grande force de changement c'est la croissance dans la demande de recherche. Avec le développement de ce qu'on appelle la nouvelle théorie de la croissance, avec l'importance que l'on apporte maintenant à la connaissance et à l'expansion de la prospérité du pays, il y a un intérêt croissant à confier à nos universités une plus grande part de nos activités de recherche. En plus de faire des recherches, on s'attend à ce que les universités produisent des chercheurs formés pour l'avenir. Par conséquent les universités seront la source des chercheurs de demain.

À cet égard, je voudrais rappeler l'importance particulière des trois conseils fédéraux d'attribution de subventions pour le travail dans les universités. Ils se sont révélés d'une importance extraordinaire. Ils ont imposé des normes de qualité en ce qui concerne l'attribution de ressources limitées. Ils ont fourni une aide importante à la fois pour la recherche fondamentale et la recherche appliquée.

Si l'on considère la période 1983-1984 à 1988-1989, on voit que sur cette période de cinq ans, il y a eu une réduction de 25 p. 100, en dollars constants, de l'argent accordé par les conseils de subventions, à une époque où la demande pour la recherche dans nos universités a augmenté et où il est nécessaire de fournir plus de formation à nos chercheurs pour les préparer à l'avenir. C'est extrêmement regrettable.

Je suis heureux, bien sûr, de la nouvelle Fondation canadienne pour l'innovation, car c'est une merveilleuse initiative. Elle soulève beaucoup d'optimisme dans la communauté universitaire qui pense que, peut-être, il y a un revirement de situation et que c'est un exemple d'accroissement de l'aide qui ne fera que se confirmer à l'avenir et même s'étendre dans d'autres directions.

La dernière force qui influe sur le changement dans l'université ce sont les pressions pour s'ouvrir davantage au flot international d'idées et pour respecter les normes internationales de qualité. Le mot université vient du latin universitas. De fait, l'université doit être ouverte aux influences internationales.

Depuis l'ouverture des frontières commerciales, la circulation des idées s'est accrue. Il est encore plus important que le Canada se place de manière à participer à cet échange international d'idées. Nos universités doivent être dans une bonne position pour profiter des normes de qualité au niveau international qui ont tendance à s'imposer de plus en plus. Placées dans une situation assez faible du point de vue ressources, elles ont du mal à s'adapter.

Voilà les cinq points que je voulais faire ressortir. Je serais heureux de parler de toute question relative à mon rapport ou à d'autres questions plus générales.

Le président: Merci de votre rapport. Je sais que vous connaissez très bien le sujet de l'enseignement postsecondaire. Vous avez entendu tout un tas d'histoires et vous avez préparé un rapport que nous lirons avec beaucoup d'intérêt. Être capable de produire un rapport est déjà une bonne chose. Après tout ce que nous avons entendu, nous craignons un peu de dire des choses qui pourraient perturber les provinces. Si nous disons autre chose, c'est le gouvernement fédéral qui sera mécontent. Si c'est quelque chose d'autre encore, ce seront peut-être les universités. Nous sommes donc dans une situation difficile, mais nous allons prendre le taureau par les cornes. Personne ne peut voter contre nous. Nous dirons ce que nous voulons dire.

M. Smith: Ce ne sera pas un très bon rapport si vous ne mécontentez personne.

Le président: Pourriez-vous nous faire part de vos idées sur l'enseignement coopératif.

M. Smith: Oui, c'est une initiative très importante pour laquelle l'Université de Waterloo a montré la voie. Tant du point de vue des étudiants que du point de vue des entreprises, cela fonctionne très bien. D'après ce que l'on m'a dit, certaines entreprises estiment qu'on ne peut pas aller trop loin. Il y a cependant des limites à l'adoption des programmes de coopération.

On court le risque de les classer de façon un peu trop stricte. Il y a diverses façons de donner aux étudiants une certaine expérience, par exemple, pendant l'été ou une autre partie de l'année. Ces autres solutions existent depuis très longtemps. On peut donner aux étudiants la possibilité d'acquérir une expérience valable sans alterner comme on le fait dans les programmes formels de coopération. D'une façon générale, ce que j'en entends est très positif.

Le président: Que pensez-vous de la promotion des études internationales, que ce soit les étudiants étrangers qui viennent au Canada ou les Canadiens qui vont étudier à l'étranger?

M. Smith: C'est très important. Il est extraordinairement important pour le Canada d'attirer un grand nombre d'étudiants d'autres pays. Cela aide nos étudiants à mieux comprendre la culture des autres nations et à mieux comprendre les diverses idées. C'est aussi très important sur le plan économique, car ceux qui ont fait leurs études ici connaîtront mieux les biens et les services que nous avons et lorsqu'ils seront dans des postes de responsabilité dans leur pays, ils pourront utiliser leur influence.

Lorsque des Canadiens se rendent à l'étranger, ils font la connaissance d'autres cultures et d'autres organisations sociales. On peut ainsi avoir, dans des établissements étrangers, une expérience intellectuelle assez différente. Je pense que les étudiants reviennent enrichis de ces nouvelles perspectives. Ils sont alors en mesure d'expliquer à leurs amis certaines des idées qui ont cours dans ces pays.

Je suis convaincu que le Canada bénéficie des échanges d'étudiants au niveau international.

Le président: Où pensez-vous que nous devrions aller en ce qui concerne le télé-enseignement?

M. Smith: Les nouvelles technologies font qu'il continue de se développer activement. J'ai entendu Terence Young parler de la situation à l'Université Western, où on communique par vidéo avec Vancouver. L'université avec laquelle je suis associé retransmet ses conférences dans les Territoires du Nord-Ouest et d'autres parties du Canada. Le développement de ces techniques est extrêmement stimulant, en particulier si l'on considère les distances qu'il faut parcourir au Canada et le coût des transports.

Cependant, on pourrait faire encore plus. J'ai été très influencé par les consultations du comité à Thunder Bay. Une étudiante autochtone extrêmement articulée nous a parlé de sa collectivité sur la côte de la baie Georgienne. Elle nous disait que la technologie n'est pas encore suffisamment développée pour donner accès à toutes les formes de communication nécessaires pour le télé-enseignement. Un satellite ou un autre moyen serait nécessaire. Il y a des gens dans sa collectivité et dans beaucoup d'autres de cette région qui pourraient bénéficier de l'accès à des programmes de télé-enseignement. En l'écoutant, j'ai vu qu'elle profitait de ce défi intellectuel et du développement de ses intérêts dans toute une gamme de domaines. J'ai vu cela comme un secteur d'investissement qui pourrait rapporter beaucoup à de nombreuses collectivités.

En réponse à votre question, le télé-enseignement se développe. Il y a de nouvelles technologies, mais il faut bien admettre que certaines sont assez coûteuses. Elles n'apportent pas les économies que certains avaient envisagées. À l'avenir, cela pourrait changer.

Le sénateur Forest: Monsieur Smith, je m'inquiète du financement de l'éducation. J'ai fréquenté des universités de l'Alberta pendant les bonnes années 1970 et 1980 lorsque nous avions beaucoup d'argent. Je suis découragée par ce qui se produit actuellement. Je sais très bien que les gouvernements ont des contraintes. Vous avez parlé des contributions plus grandes du secteur privé. Vous avez dit qu'il y avait une limite à cette contribution et je suis d'accord avec cela. Toutefois, est-ce que vous diriez qu'une culture prend naissance? Nous sommes un pays jeune et il me semble qu'une culture de l'aide privée est en train de naître.

L'Université de l'Alberta a lancé une campagne pour collecter 150 millions de dollars, un chiffre que beaucoup de gens pensaient impossible à atteindre. Toutefois, certaines facultés ont déjà dépassé leur objectif. Pensez-vous qu'il y a un espoir qu'une culture se développe? Dans l'Ouest, nous sommes encore plus jeunes qu'ici dans l'Est, où certains établissements existent depuis longtemps.

M. Smith: Oui, je pense que vous avez raison. Nous sommes encore dans une période de croissance. Vous avez cité l'objectif de l'Université de l'Alberta pour sa nouvelle campagne de financement. Si vous considérez l'objectif de la campagne des principales universités au cours des dernières années et si vous comparez cela avec la situation il y a 15 ou 20 ans, vous verrez qu'il y a eu une évolution considérable. Par conséquent, les possibilités de trouver des fonds privés se sont améliorées. Nous sommes encore loin de la situation des universités américaines.

À cet égard, des modifications de la politique fiscale seraient nécessaires. Le mot «culture» est le mot juste. Nous voulons nous assurer que l'université a un appui qui lui permettra de s'améliorer. Ce genre de façon de penser n'est pas encore généralisé au Canada au point où il l'est ailleurs. Ça vient. Mais je ne sais pas jusqu'où nous pourrons aller.

Le sénateur Forest: Nous avons entendu beaucoup de choses ce matin, tout comme ailleurs au Canada -- sur la nécessité d'obtenir une éducation universitaire, sur la formation à l'emploi et sur la création d'emplois, et cetera. Il est certain qu'à l'âge de la technologie et de la science, les gens ont besoin de ces compétences. Ce qui m'inquiète un peu par contre -- et la levée de fonds a quelque chose à voir avec cela... c'est que l'on ne porte pas suffisamment d'attention aux arts et aux lettres, qui sont pourtant des domaines de grande importance en ce qui me concerne. Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

M. Smith: Oui une fois encore je suis d'accord avec vous. Nous sommes à une époque où la science et la technologie, ce qui veut réellement dire la recherche en sciences appliquées naturelles et physiques, ont capturé l'attention du public beaucoup plus que les sciences sociales et les lettres. Cela se reflète dans l'importance relative des subventions accordées par les conseils. De toute évidence elles sont ajustées en fonction de l'équipement coûteux nécessaire dans les domaines scientifiques.

On dit qu'on pourrait inclure certaines choses dans les sciences et les lettres, mais il n'est pas clair que c'est cela que l'on désire souligner. Cela ne figurait pas clairement dans les annonces concernant la Fondation canadienne de l'innovation.

Certains pensent qu'accorder des bourses dans le domaine des lettres et des sciences sociales et faire de la recherche dans ces domaines ce n'est pas très sérieux. Le public a tendance à trouver ridicule que l'on appuie ce genre de choses. C'est vrai aux États-Unis et en Angleterre. Il faut donc être très prudent lorsque l'on essaie d'expliquer au public pourquoi il est tellement important que nous ayons des gens qui fassent de la recherche sérieuse sur des questions fondamentales pour notre société, sur des questions d'éthique et autres. Je crains que nous n'accordions pas assez d'importance à ces domaines.

Le sénateur DeWare: Le sénateur Andreychuk m'a demandé de l'excuser, car elle ne peut pas rester pour entendre la conclusion de vos remarques. Elle doit faire un discours au Sénat.

Nous avons eu des représentants d'un des conseils de recherche. Ils craignaient que certains ne comprennent pas que la recherche ordinaire prend beaucoup de temps. Lorsque l'on confie à quelqu'un un programme de recherche, ce n'est pas quelque chose qui va être réglé en trois ans. Ils s'inquiétaient donc des réductions de budget. Ils craignaient que l'on ne perde nos jeunes étudiants de doctorat, parce qu'il n'y a rien pour eux actuellement, même s'ils souhaitent travailler au Canada.

Est-ce que vos études montrent que nous perdons de bons chercheurs, alors que nous devrions être en mesure de les faire travailler chez nous?

M. Smith: De très nombreux cas ont été portés à notre attention. Il n'y a pas d'organisme statistique qui collecte des données à ce sujet, alors que ce serait nécessaire. À l'époque de la fuite des cerveaux, il y a environ deux décennies, on a collecté certaines données qui montraient que les Canadiens s'expatriaient. Nous n'avons pas tenu ces données à jour. J'estime que nous devrions avoir de meilleures données. Toutefois je ne doute pas de la chose.

Je connais certains cas. Il n'y avait pas ici l'aide nécessaire pour qu'ils poursuivent leurs activités de recherche. Ils pouvaient l'obtenir ailleurs. Nous perdons des gens non seulement au profit des États-Unis, mais aussi au profit de l'Angleterre. Nous avions toujours pensé que le Canada recevait des gens d'Angleterre. Nous avions certains avantages en matière d'infrastructures de recherche, mais ce n'est plus le cas. Et nous perdons des gens à cause de cela.

D'un autre point de vue, le public estime que les professeurs sont trop payés et sont feignants. Je connais certains cas où nous avons perdu d'excellentes personnes parce que nous ne pouvions pas soutenir la concurrence du marché américain.

Le sénateur DeWare: C'est ce que nous a dit ce matin le président du Conseil des universités de l'Ontario qui affirmait que même s'il y avait un poste disponible que l'on essayait de doter, les personnes compétentes ne voulaient pas venir parce qu'elles craignaient qu'en raison des réductions de budget le programme ne reste pas viable à long terme.

M. Smith: Le chef d'un département d'une université avec lequel je parlais récemment me disait qu'il essayait d'embaucher du personnel. Il me disait que la différence de salaire entre ce que son université pouvait payer et ce que cette personne pouvait recevoir aux États-Unis était d'environ 20 p. 100. Par ailleurs, ceux que nous essayons d'embaucher sur le marché des jeunes peuvent avoir une subvention de démarrage importante aux États-Unis. Il mentionnait également l'incertitude au sujet de la voie que le Canada suivait.

Les jeunes qui en sont au stade de décider où ils veulent s'établir, sont pris par le désir de bien réussir leurs recherches et de se faire un nom. Ils veulent une rémunération raisonnable pour créer une famille, et cetera. mais ils veulent également le sentiment qu'ils feront partie d'un milieu dynamique et durable dans le domaine de l'enseignement supérieur. Actuellement on s'inquiète à ce sujet.

Le sénateur DeWare: Je suppose que vous n'avez pas eu de réponse en ce qui concerne le coût élevé des prêts aux étudiants, de l'éducation des étudiants, et cetera. Je pense que vous disiez qu'il était nécessaire de mettre en place un plan d'aide financière bien structuré. Les REÉÉ n'aideront pas les étudiants qui sont à l'université aujourd'hui. Ils pourraient aider les étudiants de l'avenir.

M. Smith: Ce qui est ressorti des discussions du comité, c'est que même si l'on veut que les jeunes qui n'ont pas la possibilité d'avoir de l'aide de leur famille obtiennent d'autres formes d'aide, il y a de bonnes raisons d'encourager les familles à prévoir les études universitaires de leurs enfants. Ce sentiment est beaucoup plus fort aux États-Unis. Il y a un sentiment de responsabilité. Au Canada, on a laissé ce sentiment s'atténuer. Et je pense que les REÉÉ pourraient aider à restaurer cette façon de penser.

Le sénateur DeWare: Est-ce que vous êtes d'accord avec certains des principes de dégrèvements fiscaux présentés par le président américain, à savoir 10 000 $ par famille ou 1 200 $ pour les faire participer au système?

M. Smith: Cela pourrait aider. Il faudrait comparer cela au coût de l'aide accordée d'autres façons. Parfois, ces régimes sont plus coûteux que ce qu'on pourrait faire d'une autre façon. Il faudrait y penser un peu plus.

Le sénateur DeWare: On pourrait autoriser les étudiants eux-mêmes à déduire les intérêts payés.

M. Smith: Oui.

La présidente: Plusieurs étudiants avec qui nous avons parlé nous ont dit que les chercheurs qui sont attachés à des universités sont souvent très bons, mais que ce ne sont pas les meilleurs enseignants. Il est un fait que certains chercheurs sont bons dans leur domaine, mais est-ce qu'ils s'intéressent réellement à l'enseignement?

M. Smith: Tous les enseignants pour être bons au niveau universitaire, doivent faire de la recherche active, c'est-à-dire se livrer à un certain type de recherche. Il n'est pas nécessaire qu'ils soient à la pointe de la recherche fondamentale ou appliquée, mais ils doivent être actifs dans ce que j'appellerais la recherche d'interprétation ou ce que d'autres appellent la réflexion.

Il faut travailler à la pointe de la connaissance. Il faut travailler sur l'ensemble des connaissances pour comprendre ce que sont les derniers développements, si l'on veut être un bon enseignant dans une classe universitaire. Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine et il faut le faire très sérieusement. Pour moi c'est ça la recherche.

En ce qui concerne le fait d'être à la pointe de la recherche exploratoire, tant dans le domaine fondamental qu'appliqué, certains des meilleurs chercheurs ne sont pas de bons enseignants. Alors que d'autres qui ne sont peut-être pas à la fine pointe peuvent avoir une pédagogie superbe. Si vous parlez des étudiants diplômés dans certains cours de finissants, il faut des enseignants qui travaillent à la pointe de la recherche exploratoire fondamentale et appliquée. Il faut donc essayer d'en faire de meilleurs enseignants. Il est absolument essentiel qu'ils soient en mesure de bien enseigner si l'on veut donner aux étudiants les connaissances nécessaires pour faire ce genre de recherche fondamentale. Ils doivent être en mesure de transmettre leur savoir.

Il faut être très strict au sujet de l'enseignement. Je ne cherche pas d'excuses pour ceux qui sont faibles sur le plan pédagogique. À mon avis les universités ont fait des progrès en ce qui concerne l'évaluation systématique des cours et en ce qui concerne la reconnaissance explicite de l'avancement qui en dépend. Je suis sûr qu'il reste encore de grandes faiblesses.

Je pourrais faire encore d'autres divisions dans la recherche et dire que tous les professeurs n'ont pas à se conformer à un seul modèle. Vous voulez un mélange de différentes sortes de compétences.

Le président: Pourriez-vous nous donner votre avis sur la permanence et votre point de vue sur les jeunes étudiants qui aimeraient obtenir un poste à l'université, mais ne le peuvent pas parce que les professeurs sont permanents?

M. Smith: Notre comité a étudié les nominations à titre permanent. Nous avons eu d'excellentes discussions à ce sujet. Des étudiants de l'Ontario Undergraduate Student Association sont venus nous parler. Ils ont demandé une étude sur la nomination à titre permanent qui concluait qu'il fallait la conserver, mais qu'il devrait y avoir un examen minutieux de la performance. Ils ont conclu que, de fait, il devrait y avoir une série de contrats, particulièrement vers la fin de la carrière, qui diraient clairement que l'on serait réexaminé sur la façon dont on s'acquitte de l'enseignement, mais que la permanence d'une personne serait préservée. C'est un résultat très intéressant pour un grand nombre d'étudiants.

Le comité lui-même s'est prononcé en faveur du maintien de la nomination à titre permanent. Nous en sommes venus à la conclusion que si l'Ontario devait faire bande à part et interdire la permanence, alors que toutes les autres universités avec lesquelles nous sommes en concurrence la conservent, il deviendrait très coûteux d'embaucher un professeur et de le conserver. Il faudrait payer une prime pour ne pas accorder la permanence.

Je ne parle pas au nom des autres membres du comité mais, en ce qui me concerne, j'estime que la permanence est un élément important de l'université. C'est une reconnaissance du fait que dans une université, nous parlons d'idées, nous échangeons des idées. Il ne devrait pas y avoir de conditions vous empêchant de présenter des idées impopulaires, susceptibles de vous faire renvoyer. C'est une entreprise différente des autres. On fait le commerce d'idées et vous ne voulez pas que cela puisse être un motif de renvoi.

Ayant été président d'une université pendant quelques années, je sais qu'il y a eu certaines abolitions de la permanence. J'aurais même été tenté à l'occasion d'exercer mon pouvoir administratif pour me faciliter la tâche dans certains cas. J'ai souvent considéré que c'était une bonne chose que je n'aie pas ce pouvoir, car j'aurais peut-être été tenté d'y recourir, alors que ce n'est pas conforme à l'idée de ce que doit être une université.

Cela m'a fait conclure que, effectivement, la permanence était une bonne chose.

Le sénateur Lavoie-Roux: Je vous comprends. Par contre, étant donné que ces gens sont intouchables, êtes-vous sûr que la qualité de l'enseignement fourni aux étudiants est protégée?

M. Smith: Vous pouvez avoir de l'influence sur un professeur de bien des façons. J'ai dirigé le département d'économie pendant 13 ans et j'en ai été le principal pendant 10 ans. Je suis parfaitement conscient de l'énorme quantité d'évaluations que subit un professeur. Vous êtes évalué chaque fois que vous vous présentez devant une classe, chaque fois que le cours est évalué. Ces évaluations des cours sont communiquées à l'instructeur. Elles vont au chef de département et au doyen. Dans le cas de Queen's, elles m'étaient fournies personnellement et je les regardais. Je ne connais pas de profession où vous êtes évalués de façon aussi formelle et aussi fréquente qu'à l'université.

Le sénateur Lavoie-Roux: Est-ce que vous voulez dire toutes les universités ou juste la vôtre?

M. Smith: Je crois que c'est pareil partout. Je suis d'accord que, peut-être, toutes ne le prennent pas de façon aussi sérieuse.

On peut aussi jouer sur la rémunération ou la promotion, et avoir une conversation avec le professeur.

La plupart des gens veulent qu'on les considère comme de bons professeurs. C'est une catastrophe lorsque l'on va dans le bureau d'un professeur et qu'on lui présente les résultats de l'évaluation d'un cours en lui disant: «Il semble y avoir un problème.» C'est traumatisant pour eux. Par conséquent, nous avons mis sur pied des moyens pour aider les instructeurs à mieux enseigner. Ils ont beaucoup apprécié cela, parce que je pense que la plupart aimeraient enseigner bien. Certains n'ont jamais appris comment. C'est là-dessus qu'il faut travailler.

Notre rapport dit clairement que les conseils de direction doivent s'intéresser sérieusement à ce domaine. Ils devraient s'assurer qu'il existe des procédures très claires concernant l'évaluation de la performance et les mesures à prendre au cas où cette performance ne serait pas entièrement satisfaisante.

Le président: Merci, monsieur Smith, de votre excellent rapport. Vous avez répondu à des questions très importantes pour nous.

La séance est levée.


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