Délibérations du sous-comité des anciens combattants
du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des
sciences et de la technologie
Fascicule 2 - Témoignages
OTTAWA, le lundi 21 avril 1997
Le sous-comité des affaires des anciens combattants du comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, à qui a été renvoyé le projet de loi C-300 concernant la création d'une Médaille du service volontaire canadien de maintien de la paix des Nations Unies pour service dans une opération de maintien de la paix sous le commandement des Nations Unies, se réunit aujourd'hui à 18 h 05 pour l'étude du projet de loi.
Le sénateur Orville H. Phillips (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Notre premier témoin ce soir devait être M. Cliff Chadderton, que nous connaissons tous très bien. Malheureusement, il a eu un petit accident, et Mme Faye Lavell nous présentera le mémoire de l'association et répondra à nos questions.
Allez-y, madame Lavell.
Mme Faye Lavell, directrice, Bureau national des services, Conseil national des associations d'anciens combattants du Canada: Tout d'abord, je tiens à m'excuser au nom de M. Chadderton pour son absence. Comme bon nombre d'entre vous le savent sans doute, M. Chadderton porte une jambe artificielle. Malheureusement, tard cet après-midi il a glissé sur les marches derrière notre bureau et a cassé un boulon de sa jambe artificielle. Je suis donc venue présenter le mémoire à sa place.
Le Conseil national des associations d'anciens combattants appuie le projet de loi C-300, qui prévoit l'attribution d'une médaille par le Canada pour service dans une mission de paix sous le commandement des Nations Unies ou d'une autre force internationale.
M. Chadderton m'a demandé d'ajouter que cela dépendra, bien sûr, du coût de ce projet et de la volonté du gouvernement de répondre à nos autres demandes.
Nous estimons, toutefois, qu'avant d'adopter ce projet de loi le gouvernement du Canada devrait songer à attribuer d'autres médailles aux Canadiens ayant servi au cours de la Seconde Guerre mondiale ou de la guerre de Corée.
Dans les mémoires que nous avons présentés au sous-comité nous avons demandé qu'il soit tenu compte de certains oublis évidents à cet égard. Il y aurait certainement lieu d'envisager la création et l'attribution de telles médailles.
Le CNAAC a donné son aval à un tel projet. Il est d'avis en effet que, s'il faut l'autorisation de Sa Majesté la Reine ou du gouvernement britannique, mais que ladite autorisation ne puisse être obtenue dans un délai raisonnable, le gouvernement du Canada doit créer une médaille ou une étoile de campagne militaire, selon le cas, afin de reconnaître le service des membres des Forces canadiennes.
À cette fin, nous préconisons depuis longtemps l'établissement d'un comité d'étude et nous proposons que votre sous-comité examine le plus tôt possible les points de vue exprimés par ce comité.
En présentant le présent mémoire nous sommes conscients du fait qu'il peut exister, en vertu du British Awards System, des restrictions qu'ont acceptées les pays membres du Commonwealth. Nous savons également qu'en 1950 le roi a décrété un moratoire sur la création de médailles relatives à la Seconde Guerre mondiale ou sur toute modification des règlements régissant celles-ci. Nous croyons sincèrement néanmoins que le gouvernement du Canada peut décider de son propre chef d'attribuer des médailles et des décorations. On devrait donc envisager d'attribuer des médailles et d'autres décorations dans les cas suivants.
Premièrement, aux personnes qui étaient stationnées au Royaume-Uni ou dans d'autres secteurs considérés comme une zone de guerre, mais dont le service n'a pas été reconnu. Cela comprendrait le personnel au sol de l'ARC, les troupes en garnison et les membres des forces navales et de la marine marchande. Nous faisons particulièrement mention de la situation à l'égard du personnel au sol de l'ARC ayant servi au Royaume-Uni, dans un secteur qui n'était pas considéré comme étant opérationnel. Ces personnes étaient constamment en danger et satisfont aux critères généraux qui veulent qu'elles aient combattu pour la cause de la liberté dans des conditions qui exigeaient courage et dévouement de leur part. Il semble évident que, sans l'appui du personnel au sol, la contribution du personnel navigant, notamment de celui ayant servi dans le Fighter Command et le Bomber Command, aurait été sérieusement menacée.
Deuxièmement, à tous ceux qui ont été faits prisonniers de guerre ou qui se sont évadés et qui touchent une pension en vertu de l'article 72 de la Loi sur les pensions. L'attribution d'une médaille spéciale à ces personnes semble être fortement justifiée. Le fait qu'elles aient été emprisonnées ou qu'elles aient évité d'être capturées a déjà été reconnu par l'attribution d'une indemnisation spéciale en vertu de la Loi sur les pensions.
Troisièmement, aux membres des forces aéroportées qui ont participé à au moins une opération militaire. L'attribution d'une médaille aux membres des forces aéroportées, qui devaient en plus d'être confrontés aux dangers du combat, effectuer des atterrissages dangereux en parachute ou en planeur, semble être amplement justifiée.
Quatrièmement, aux membres de la Première force d'opérations spéciales du Canada, qui ont débarqué sur l'île de Kiska, dans les Aléoutiennes, et aux membres de la 13e Brigade d'infanterie du Canada, qui ont également pris part à cette opération. En théorie, tous les participants étaient admissibles à recevoir l'Étoile du Pacifique. Cependant, le ministère britannique de la Défense a décrété que pour se voir décerner l'Étoile du Pacifique il fallait avoir servi dans l'une des îles situées au sud du 40e degré de latitude nord, dans le Pacifique central, dans la mer de Chine méridionale. Les îles Aléoutiennes se trouvent au nord de cette latitude.
La médaille Kiska soulève des circonstances particulières pour les Canadiens qui ont servi au sein de la Première force d'opérations spéciales et de la 13e Brigade d'infanterie du Canada. La Première force d'opérations spéciales était composée de militaires américains et canadiens. Les Américains ont reçu l'Étoile du Pacifique, ce qui signifie, bien entendu, que les Canadiens qui ont participé à la même opération se voient privés de cette forme de reconnaissance.
En Rhodésie et au Zimbabwe, 68 membres du personnel navigant de trois appareils Buffalo ont participé à l'opération Oxyde. Il semble que le fait de ne pas avoir attribué une médaille de campagne pour l'opération menée en Rhodésie et au Zimbabwe soit un oubli, du fait que le gouvernement du Canada a déjà reconnu nombre d'opérations semblables.
Dans tous les cas, lorsque c'est possible, les recommandations portaient non seulement sur les membres des forces militaires, mais aussi sur ceux de la marine marchande. On nous a laissé savoir qu'en 1967 le Canada avait décidé de créer son propre programme d'honneurs et de récompenses et de l'administrer distinctement de celui du Commonwealth britannique. Le 1er juin 1972, on a établi, par décret du conseil, le protocole de port des insignes d'ordres et de décorations du Canada, distinctement des Senior British Orders and Decorations ou conjointement avec celles-ci.
Il est tout à fait possible qu'un comité compétent, établi aux fins d'étudier les honneurs et récompenses, puisse accepter des mémoires qui pourraient très bien mener à d'autres recommandations.
On nous a déjà informés que le Canada ne peut pas modifier les règles en vertu desquelles les médailles ont déjà été attribuées, ou hésite à le faire. Par conséquent, nous devons probablement accepter le fait que le Canada ne peut pas, unilatéralement, modifier les conditions d'admissibilité à l'obtention d'une médaille. Nonobstant ce fait, nous sommes d'avis qu'en vertu du système actuel le Canada peut, s'il le veut, créer de nouvelles récompenses et médailles au besoin.
Si le comité le désire, le CNAAC serait heureux de lui présenter une documentation exhaustive qui pourrait être étudiée soit par le sous-comité, soit par le sous-comité sénatorial, soit par un comité spécial des médailles établi par le gouvernement du Canada.
Le sénateur Jessiman: Vous dites dans votre mémoire que vous savez qu'il peut y avoir certaines interdictions. Comment peut-on découvrir s'il y en a ou non? N'y a-t-il pas un organisme central?
Mme Lavell: Je suis venue à la dernière minute pour présenter le mémoire au nom de M. Chadderton. Je m'excuse, mais je ne peux pas vraiment répondre à votre question. Je préférerais que ce soit M. Chadderton qui y réponde.
Le sénateur Jessiman: Vous pourrez peut-être nous répondre plus tard, ou bien le témoin suivant pourra peut-être me donner la réponse.
Avez-vous la liste des médailles qui sont maintenant décernées aux anciens combattants?
Mme Lavell: Nous avons effectivement une liste à notre bureau principal. Malheureusement, je ne l'ai pas prise avec moi.
Le sénateur Jessiman: Nous devrions l'obtenir à un moment donné pour voir ce qui existe déjà et quelles médailles le comité pourrait songer à créer.
Le sénateur Bonnell: Nous étudions maintenant le projet de loi C-300.
Le sénateur Jessiman: Je sais, mais le témoin recommande la création d'un comité. Je voudrais savoir quelles médailles ont été créées jusqu'ici. On a demandé qu'on reconnaisse la contribution de certaines personnes, et je pense qu'on devrait le faire.
Le président: Dans le passé, surtout dans notre rapport intitulé «Fidèle à la parole donnée: d'hier à demain», le comité a formulé des recommandations au sujet des médailles. Nous avons déjà présenté des recommandations à ce sujet. Je pense que nos témoins suivants pourront répondre à nos questions au sujet des médailles qui ont déjà été créées.
Le sénateur Bonnell: Mme Lavell pourra peut-être transmettre tous nos voeux à M. Chadderton.
Mme Lavell: Je le ferai volontiers.
Le sénateur Bonnell: J'espère qu'il retrouvera sa mobilité bientôt, parce que nous nous rapprochons d'une date importante et nous voudrons qu'il soit là.
Mme Lavell: Je lui transmettrai votre message.
Le président: Une chose qu'on ne dit pas dans le projet de loi, c'est combien de temps il faudrait avoir servi dans une telle opération pour être admissible à la médaille. Par exemple, pour la défense de la Grande-Bretagne, il fallait avoir servi six mois dans une zone qui pouvait être attaquée. Le projet de loi ne mentionne pas la durée du service. Quelqu'un pourrait n'être en service que 20 jours et être quand même admissible à une médaille.
Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?
Mme Lavell: Je préférerais encore une fois que M. Chadderton lui-même vous réponde.
Le sénateur Jessiman: Aurons-nous un représentant du gouverneur en conseil?
Le président: Non. Il s'agit d'un projet de loi privé.
Le sénateur Jessiman: C'est le gouverneur en conseil qui établira le règlement, et il pourrait préciser les conditions d'admissibilité.
Le président: Merci beaucoup, madame Lavell. Nous nous joignons tous au sénateur Bonnell pour exprimer tous nos voeux à M. Chadderton.
Mme Lavell: Merci.
Le président: Nous entendrons maintenant le lieutenant-général J.C. Gervais. Lui et ceux qui l'accompagnent pourraient peut-être s'avancer.
Allez-y, monsieur Gervais.
Le lieutenant-général J.C. Gervais, sous-secrétaire de la chancellerie, Résidence du Gouverneur général: Je suis un officier à la retraite et j'ai pris ma retraite il y a plus de quatre ans. Je ne fais donc plus partie des forces armées. Par ailleurs, le général Dallaire s'occupe du programme des décorations des forces armées. Il est secondé par le major Bev Brown, qui est spécialiste des décorations des forces armées.
Le sénateur Bonnell: Étaient-ils en Somalie?
M. Gervais: Non.
Le président: Avez-vous un mémoire?
M. Gervais: Oui. Je suis sous-secrétaire de la chancellerie et je travaille pour le Gouverneur général. Mon principal rôle consiste à administrer le système de décorations du Canada. Je remplis des fonctions de secrétaire pour un comité appelé comité de la politique en matière d'ordres et de décorations avec lequel nous collaborons par l'entremise du Bureau du Conseil privé pour l'approbation des médailles et des décorations. C'est la chancellerie qui fait autorité pour ce qui est du Régime canadien de distinctions honorifiques.
Je voudrais vous fournir certains renseignements au sujet du nombre de décorations qui ont été décernées depuis 1967. J'ai un exemplaire d'un récent décret qui porte sur cette question, mais on est en train de le modifier. Un nouveau décret sera bientôt publié, et je m'assurerai que le comité reçoive la liste complète des ordres et décorations approuvés depuis 1967.
Le sénateur Jessiman: Pouvez-vous me dire pourquoi cela remonte à 1967? Est-ce la dernière fois qu'on a fait une mise à jour?
M. Gervais: Avant 1967, le Canada faisait partie du régime des distinctions honorifiques du Commonwealth et n'avait pas son propre régime. Nous comptions sur le Royaume-Uni pour les décorations de guerre et autres. En 1967, nous avons institué le régime canadien de distinctions honorifiques quand l'Ordre du Canada a été créé.
Depuis, le régime a continué d'évoluer. Nous avons, par exemple, l'ordre du mérite militaire, qui a été créé en 1972; l'ensemble des décorations pour le courage, qui date aussi de la même année; de même qu'un certain nombre de médailles, comme les décorations pour services distingués, créées dans les années 80 pour reconnaître les bons et loyaux services à l'égard des services de lutte contre les incendies, de police, de la Garde côtière, de l'administration pénitentiaire et des ambulances. Au début des années 90, nous avons aussi créé les décorations de courage militaire que le gouvernement du Canada peut maintenant utiliser si les Forces canadiennes vont en guerre. Les ordres provinciaux, comme l'Ordre de l'Ontario, font aussi partie du régime national et sont inclus dans l'ordre de préséance.
Pour ce qui est de créer des distinctions honorifiques, Sa Majesté la Reine crée une décoration ou un titre honorifique sur la recommandation du premier ministre, qui a des pouvoirs de prérogative à ce sujet, et du ministre chargé du Régime canadien de distinctions honorifiques. C'est le Gouverneur général qui est chargé d'administrer les distinctions honorifiques au nom de Sa Majesté la Reine et sur les recommandations de conseils et de comités dûment constitués.
En 1980, le premier ministre de l'époque créa le comité de la politique en matière d'ordres et de décorations pour l'aider à élaborer la politique régissant le Régime canadien de distinctions honorifiques. Les principales fonctions du comité consistent à mener des études et à formuler des recommandations sur toute question qui peut lui être renvoyée à propos des distinctions honorifiques; à conseiller les ministères et organismes qui veulent formuler des recommandations au Cabinet à propos de distinctions honorifiques; et de préparer des conseils au premier ministre sur toute recommandation au Cabinet à propos des distinctions honorifiques. Le comité s'occupe aussi de faire des règlements relatifs à la préséance des ordres, décorations et médailles et à la façon appropriée de les porter. Le comité comprend les sous-chefs du Bureau du Conseil privé, du ministère du Patrimoine canadien, des Affaires étrangères et du Commerce international, de la Défense nationale et du cabinet du secrétaire du Gouverneur général.
La création d'une nouvelle distinction honorifique peut être proposée de diverses sources, en l'occurrence le premier ministre lui-même, les députés, le chef de l'état-major de la Défense, les fonctionnaires provinciaux et les organismes établis pour fournir des services fédéraux, provinciaux ou généraux. À cet égard, je signale que les décorations militaires sont créées de la même façon que les décorations civiles et que le processus d'approbation est le même.
Les demandes en vue de créer de nouvelles décorations sont transmises au comité de la politique en matière d'ordres et de décorations, qui détermine s'il faut un examen plus approfondi avant que la demande ne soit approuvée en principe. Avant de créer une nouvelle décoration on consulte longuement les principaux intéressés. Nous analysons les coûts, nous établissons une ébauche de règlements, et cetera, et nous présentons nos conclusions au comité de la politique en matière d'ordres et de décorations pour son approbation finale.
Une fois qu'une nouvelle décoration est approuvée, la machine gouvernementale entre en jeu. On rédige des décrets du conseil et l'on prépare des lettres patentes créant la décoration. Une fois signés par le premier ministre, le décret et les lettres patentes sont envoyés au palais par le Gouverneur général accompagnés d'un dessin de la médaille ou de la décoration, vu que l'on sait à ce moment-là à quoi elle ressemblera, et d'une recommandation à Sa Majesté.
Une fois approuvé, le tout nous revient, et nous passons à la dernière étape, qui consiste à élaborer un plan de communication, si ce n'est pas déjà fait, et à fabriquer l'insigne. Le tout peut prendre de six à huit mois, selon la complexité de la décoration. Voilà donc en résumé comment on crée une nouvelle décoration, du début jusqu'à la fin.
La façon dont l'on décerne la décoration dépend du type de décoration. Par exemple, c'est le Gouverneur général qui présente l'Ordre du Canada. S'il s'agit d'une médaille de campagne, les premières seront peut-être remises par le Gouverneur général ou un autre représentant du gouvernement; s'il s'agit d'une médaille de campagne militaire, c'est, bien sûr, le chef de l'état-major qui décide comment elle sera décernée aux militaires.
Le sénateur Jessiman: Faisons-nous cavalier seul depuis 1967, ou bien faisons-nous encore partie du régime d'ordres et de décorations britanniques?
M. Gervais: Nous fonctionnons de façon autonome depuis 1967. Comme bon nombre de Canadiens portent des décorations qu'ils ont reçues en temps de guerre, nous coordonnons d'une certaine façon avec les responsables de la politique britannique les changements relatifs aux nouvelles décorations, mais nous fonctionnons essentiellement seuls. La seule chose que nous devons faire, c'est demander à la reine du Canada de créer une nouvelle décoration. Pour le reste, l'administration de la décoration relève uniquement des Canadiens.
Le sénateur Bonnell: Si je voulais recommander que l'on décerne une décoration ou une médaille à six anciens combattants de la Première Guerre mondiale qui étaient à Vimy la semaine dernière, dont l'un était âgé de 104 ans, un autre de 102 ans et le plus jeune de 98 ans, comment devrais-je procéder? Dois-je téléphoner au Gouverneur général et lui dire que ces hommes devraient recevoir une médaille? Devrais-je téléphoner au premier ministre et lui dire qu'il faudrait songer à décerner une médaille à ces hommes? Leur présence à Vimy a certainement ajouté à la dignité des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, des militaires et de tous ceux qui ont pu noter leur présence à Vimy 80 ans après la bataille à laquelle ils avaient participé. Ces hommes méritent un signe de reconnaissance quelconque. On pourrait peut-être leur décerner l'Ordre du Canada ou une autre décoration, par exemple une décoration de Vimy. Il faudrait faire quelque chose pour eux, et je voudrais savoir à qui je devrais le recommander.
M. Gervais: Vous pourriez écrire soit au Gouverneur général, soit à un parlementaire, par exemple.
Le sénateur Bonnell: Je suis moi-même parlementaire.
M. Gervais: En effet, mais si vous ne l'étiez pas, c'est ce que vous pourriez faire. Votre demande serait probablement transmise à la chancellerie où je travaille.
Le sénateur Bonnell: Pourquoi ne pourrais-je pas écrire directement à la chancellerie?
M. Gervais: Vous pourriez le faire. Je reçois beaucoup de courrier de Canadiens à propos de décorations.
Le sénateur Bonnell: Que faites-vous à ce moment-là? Étudiez-vous les demandes de ce genre?
M. Gervais: Nous examinons les réalisations de la personne recommandée et nous voyons quel genre de décoration ou de titre pourrait s'appliquer à cette personne. Nous faisons ensuite la correspondance entre la personne recommandée et les critères pour les décorations ou titres.
Un bon exemple du système est l'Ordre du Canada. Le conseil reçoit toutes sortes de recommandations pour décerner l'Ordre du Canada à certaines personnes. Si ces personnes ne satisfont pas à tous les critères, on pourra songer à leur décerner une autre décoration, comme la Décoration pour service méritoire ou le Certificat de digne citoyen, que peut décerner le Gouverneur général.
Dans le cas de ces anciens combattants, ils pourraient recevoir l'Ordre du Canada, mais la demande devrait en être faite au conseil. Sinon, il n'existe pas de décoration particulière qui puisse reconnaître leur contribution de façon spéciale.
Le sénateur Bonnell: Pourquoi pas la Décoration pour service méritoire?
M. Gervais: La Décoration pour service méritoire a été créée en 1984, et cela fait partie des critères que nous établissons dans le cadre des règlements applicables à une décoration quelconque, et nous ne remontons pas d'habitude plus loin que la date de création de la décoration. Sinon, ce serait trop difficile à administrer. Ce que vous dites a cependant du bon. Je n'y avais pas vraiment réfléchi beaucoup jusqu'ici, mais nous pourrions peut-être faire quelque chose.
Le sénateur Cools: Le sénateur Bonnell nous dit que ces quelques anciens combattants qui restent seraient peut-être heureux qu'on reconnaisse leur contribution d'une façon quelconque. Je ne sais pas comment on doit procéder pour leur décerner une médaille, mais vu que nous avons un jeune homme avec nous qui représente la chancellerie, nous pourrions peut-être recommander qu'il songe à la possibilité que soit la Reine, soit le Gouverneur général, leur envoie une lettre.
Ces hommes sont très âgés. Il n'en reste pas beaucoup. Le sénateur Bonnell voudrait que l'on fasse un geste quelconque, et ce serait peut-être tout aussi bien qu'ils reçoivent une lettre signée par Sa Majesté ou son représentant. Seriez-vous d'accord, sénateur Bonnell?
Le sénateur Bonnell: Ce serait mieux que rien, mais nous devrions nous en occuper bientôt. Ces hommes sont maintenant âgés de 104 et de 102 ans, et ils ne seront pas avec nous très longtemps encore. Nous ne pouvons pas attendre deux ou trois élections et trois ou quatre nouveaux Cabinets, et même la nomination d'un nouveau Gouverneur général. Il faudrait s'en occuper presque tout de suite. Le représentant du chancelier est ici aujourd'hui. S'il veut bien prendre note de ma recommandation sans que je sois obligé d'envoyer des lettres à ce sujet, je lui en serais reconnaissant.
M. Gervais: Je vais m'en occuper. Je sais qu'il n'y aurait aucun problème à envoyer une lettre, mais il y a peut-être quelque chose de plus que nous pouvons faire. Je vais me pencher là-dessus et en discuter avec mes collègues. Nous ferons quelque chose pour reconnaître la contribution de ces hommes.
Le sénateur Cools: Très bien. Vous pouvez considérer que le sénateur, appuyé par moi-même, a proposé que l'on fasse quelque chose pour ces hommes et que cette recommandation a été adoptée par le comité.
M. Gervais: Oui.
Le sénateur Bonnell: Il y a quelques années le chef d'état-major avait témoigné devant le comité pendant que j'en étais président. Je lui avais dit que nous devrions avoir une médaille pour les anciens combattants de la guerre de Corée. Il a essayé de me dire qu'il y avait déjà une médaille pour les anciens combattants de la guerre de Corée. Je lui ai dit: «Vous vous trompez. Il y a une médaille des Nations Unies pour les anciens combattants de la guerre de Corée, mais le Canada n'a pas de médaille pour les Canadiens qui se sont battus en Corée, à part la médaille des Nations Unies.» Il m'a dit que je me trompais. J'ai fini par lui dire: «Très bien. Je ne peux pas me disputer avec vous, puisque vous savez tout.» Peu de temps après, le ministre des Affaires des anciens combattants, l'honorable George Hees, a décidé de remettre une petite épinglette à tous ceux qui avaient servi pendant la guerre de Corée. C'était une bonne idée, et l'épinglette était tout à fait acceptable. J'imagine que c'est le mieux que George Hees pouvait faire à titre de ministre des Affaires des anciens combattants. Il a cependant fait une erreur en décidant de faire envoyer la médaille aux anciens combattants par la poste. Est-ce une bonne façon de recevoir une décoration? L'épinglette n'a même pas été présentée à ces anciens combattants. Il n'y a pas eu de publicité à ce sujet, et l'épinglette est simplement arrivée par la poste.
Si vous avez quoi que ce soit à voir avec ces médailles, faites en sorte que cela ne se produise jamais. Si vous ne pouvez la remettre en personne ou demander à un représentant de l'administration de la leur remettre, ne l'envoyez surtout pas par courrier. Ces gens ne comprennent pas ce dont il s'agit. Ces hommes étaient prêts à donner leur vie pour préserver notre liberté, et c'est comme ça qu'on les traite -- on leur envoie leur médaille comme n'importe quel autre envoi postal.
M. Gervais: Je crois que cela ne se fait plus comme cela. Nous prenons bien garde -- du moins pour ce que nous contrôlons -- à la façon dont nous remettons la majorité de ces médailles. La logistique est un peu plus complexe, étant donné la quantité, mais soyez bien certain que nous sommes tout à fait d'accord avec vous sur le principe.
Votre intervention a donné certainement des résultats, parce qu'il y a maintenant trois médailles pour les anciens combattants de Corée.
Le sénateur Bonnell: Je le sais. Je lui ai fait peur, toutefois.
Êtes-vous en faveur de ce projet de loi?
M. Gervais: Oui, sénateur.
Le sénateur Bonnell: Appuyez-vous ce projet de loi?
M. Gervais: Faisant partie du secrétariat, je ne peux pas voter sur le projet de loi, mais je l'ai examiné. C'est une initiative canadienne.
Ce qui a inquiété certains et qui m'a un peu inquiété aussi, c'est la question du double emploi. Il faut faire attention à ne pas avoir trop de distinctions honorifiques pour le même service ou la même réalisation, parce que cela ne signifie plus rien. C'est le seul inconvénient que nous verrions à la chancellerie, à propos de cette distinction honorifique.
Le sénateur Jessiman: Y en a-t-il déjà une?
M. Gervais: La médaille des Nations Unies pour service dans le cadre d'une mission des Nations Unies était intégrée au Régime canadien de distinctions honorifiques. Cela reconnaît dans ce sens le service du soldat. Nous créons maintenant la médaille canadienne du maintien de la paix, si bien que le ministère de la Défense nationale, en particulier, devra réfléchir à la façon dont elle sera présentée aux soldats, afin qu'elle ait une signification et que l'on ne remette pas deux médailles pour le même service.
Peut-être y a-t-il une autre façon de contourner le problème. Nous en avons discuté avec mes collègues du ministère de la Défense nationale. Nous ne voulons pas parler de médaille commémorative, bien que, dans un sens, elle ait une valeur commémorative. Nous reconnaissons le service de soldats qui ont servi depuis le début des opérations des Nations Unies, en 1954. Il s'agit de beaucoup de monde, de plus de 100 000 personnes, ce qui représente un programme important. Dans ce sens, les anciens combattants auront été reconnus pour leur service. En créant cette médaille, nous ajoutons un contexte canadien.
Le sénateur Bonnell: Un ancien combattant à qui je parlais ne voyait aucun mal à ce projet de loi, mais se demandait s'il nous faudrait adopter une nouvelle loi chaque fois qu'il y a une nouvelle mission de maintien de la paix. Est-ce que ce projet de loi englobera toutes les missions de maintien de la paix?
M. Gervais: Habituellement, il n'est pas nécessaire de faire adopter une loi pour créer des distinctions honorifiques. J'ai décrit la façon de procéder. Nous essayerons d'adapter ce projet de loi d'initiative parlementaire au processus normal. Par exemple, nous devons créer la distinction et faire approuver l'insigne, et cetera. Nous suivrons le processus normal. Chaque fois que l'on crée une nouvelle distinction, il faut suivre ce processus. Par exemple, les médailles des Nations Unies sont créées par les Nations Unies. Lorsque le gouvernement canadien décide d'envoyer des troupes en mission, nous n'intervenons pas dans le processus que j'ai décrit ici, sauf que, lorsque les troupes reviennent, elles reviennent avec cette médaille que nous ajoutons à l'ordre de préséance. Si vous jetez un coup d'oeil sur cet ordre de préséance, que je vous enverrai, vous constaterez qu'il y a environ 26 médailles des Nations Unies qui reconnaissent leur service.
Pour répondre à votre question, nous devons normalement suivre certaines règles chaque fois -- décrets du conseil, lettres patentes -- que nous créons une nouvelle distinction honorifique.
Le sénateur Bonnell: Il n'y a pas besoin de loi?
M. Gervais: Non, pas de loi.
Le sénateur Bonnell: Je vais vous lire quelque chose que je vais proposer plus tard dans la soirée -- enfin, si c'est possible avec le système que nous avons -- afin de voir si l'on pourrait ajouter cela à nos distinctions actuelles.
Je vais suggérer que le sous-comité recommande que le gouvernement canadien crée un comité des décorations et récompenses qui inclue parmi ses membres des représentants des grandes associations d'anciens combattants au Canada; que ce sous-comité adopte les recommandations du Conseil national des associations d'anciens combattants contenues dans le rapport du sous-comité, «Fidèle à la parole donnée: d'hier à demain» et dans les mémoires soumis au sous-comité les 21 janvier et 20 avril 1997 respectivement, à propos de la création de nouvelles récompenses et médailles; et que cela complète les récompenses et médailles commémorant la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Si je présentais cette motion ce soir, cela dérangerait-il le processus suivi par votre chancellerie?
M. Gervais: Je n'y verrais pas d'objection, parce qu'il faudrait que j'en étudie les détails. J'ai écouté la motion, mais je pense que je devrais ajouter quelque chose pour la rendre plus claire. J'ai parlé du comité de la politique en matière d'ordres et de décorations et de la composition de ce comité. Les anciens combattants n'en sont pas exclus. Par exemple, j'ai vu des représentants des anciens combattants y présenter un cas particulier. Le comité peut toujours inviter d'autres personnes.
Le sénateur Bonnell: Qui n'ont pas droit de vote?
M. Gervais: On peut toujours revoir la composition et faire approuver une motion visant à ajouter d'autres membres de façon permanente. C'est toujours possible.
Le président: Lieutenant-général Gervais, vous avez dit que vous avez vu des anciens combattants au sein de ce comité. Je crois que le sénateur Bonnell pensait plus à des organisations d'anciens combattants telles que le Conseil national des associations d'anciens combattants du Canada, la Légion, et cetera, afin que ces organismes puissent être représentés au sein du comité plutôt que d'avoir de temps en temps un ancien combattant au sein du comité.
M. Gervais: Je vais vous dire ce que j'en sais. J'ai vu plusieurs changements apportés au système des distinctions honorifiques depuis que je suis là. J'ai traité avec des associations d'anciens combattants par l'intermédiaire du sous-ministre des Anciens combattants. J'ai discuté avec les présidents de ces associations des préoccupations qu'ils avaient. Plutôt que d'inviter ces diverses associations qui m'écrivent ou qui écrivent au ministère des Anciens combattants, je recommanderais que nous travaillions par l'intermédiaire du ministère en demandant à un représentant de ce ministère de siéger au comité pour représenter leurs intérêts.
Le sénateur Jessiman: N'y a-t-il pas déjà un représentant des Anciens combattants?
M. Gervais: Il n'y a pas de membre permanent des Anciens combattants. Toutefois, il y a un membre de la Défense nationale. Les intérêts des Anciens combattants sont défendus par ce représentant de la Défense nationale, mais si vous voulez qu'ils soient plus directement représentés, vous pourriez peut-être envisager ma recommandation.
Le sénateur Jessiman: Combien y a-t-il de membres au sein du comité?
M. Gervais: Il y a le membre du Conseil privé, un membre du ministère du Patrimoine, un membre des Affaires étrangères, un membre de la Défense nationale et un du Bureau du secrétaire du Gouverneur général.
Le sénateur Jessiman: Cinq, donc.
Le sénateur Bonnell: À l'heure actuelle, le représentant de la Défense nationale et des Anciens combattants est le même, si bien que cela fonctionne assez bien. Après le 2 juin, ce pourrait être différent. Il pourrait y avoir un ministre de la Défense nationale et un autre des Anciens combattants et de la Santé, ou vice versa. Nous ne savons pas ce que nous réserve l'avenir.
Le président: Ma question fait suite à la suggestion du sénateur Bonnell à propos des anciens combattants de Vimy.
Si je comprends bien, votre bureau estime que ce projet de loi suit la procédure normale. C'est bien cela?
M. Gervais: Il n'a pas suivi la procédure normale, parce que lorsqu'il a été présenté, bien que nous ayons pu donner notre avis, nous n'avons pas eu le temps de tout examiner, comme je vous le disais tout à l'heure.
Par exemple, parce que nous voulions éviter tout double emploi, nous avons dû en discuter et nous avons aussi dû parler des coûts.
Le président: Je vous parle simplement de la voie à suivre pour un projet de loi d'initiative parlementaire. Cela vous semble-t-il satisfaisant?
Le sénateur Jessiman: Puis-je poser une question? Si le projet de loi est adopté, êtes-vous ensuite tenus d'émettre une médaille et de l'intégrer au système? Par exemple, qu'en est-il si vous en arrivez à la conclusion que cela fera double emploi? Avez-vous la possibilité de ne pas émettre une telle médaille?
M. Gervais: Je ne jouis pas de ce pouvoir.
Le sénateur Jessiman: Quelqu'un est-il habilité à refuser de le faire une fois que le projet de loi est adopté?
M. Gervais: Nous devrions demander l'avis du Bureau du Conseil privé pour voir si les prérogatives du premier ministre et de la reine ne seraient pas en ce sens lésées. Nous en avons discuté, mais je n'ai pas encore eu de réponse définitive. Peut-être que c'est une des choses qu'il faudrait examiner.
Le sénateur Jessiman: Nous risquons de mettre ces gens dans une situation difficile si cela fait double emploi.
Le président: En réponse à une question vous avez déclaré que ces médailles devraient peut-être devenir des médailles commémoratives. Je me disais que ce serait peut-être une bonne façon d'honorer les anciens combattants survivants de Vimy. Il y en a plus que les six qui ont fait le pèlerinage il y a environ 10 jours. Nous pourrions honorer tous les anciens combattants en en faisant une médaille commémorative.
M. Gervais: Je suggérerais que l'on ne considère pas les anciens combattants de Vimy dans le contexte de ce projet de loi. Il s'agit d'un groupe différent, qui doit recevoir une distinction différente.
Le sénateur Jessiman: Il faut espérer que vous pourrez le faire rapidement.
Le président: Une médaille commémorative exige-t-elle la même chose que les autres médailles?
M. Gervais: J'utilise le terme «commémorative» pour expliquer qu'il n'y a pas double emploi. Nous y avons réfléchi, mais avons estimé qu'il n'était pas nécessaire de parler dans le projet de loi de médaille «commémorative». C'est en souvenir de gens qui ont servi. Je pense à ceux qui ont servi dans des missions de maintien de la paix, tel que défini par les Nations Unies. Je ne pense pas qu'il serait approprié de remonter au-delà du début de la participation du Canada aux opérations de maintien de la paix, c'est-à-dire dans les années 50.
N'oublions pas non plus que cette médaille sera également décernée pour des missions futures.
Le sénateur Jessiman: Ce projet de loi ne s'applique pas aux anciens combattants de Vimy.
Le sénateur Cools: Le projet de loi ne peut s'appliquer à eux parce que cette médaille ne peut être remise rétroactivement.
Le sénateur Bonnell: Il y a quelque chose dans ce projet de loi qui peut soustraire le Conseil privé et quiconque d'autre à toute responsabilité. L'article 9 stipule que:
La présente loi n'a pas pour effet de porter atteinte au droit du Gouverneur général d'exercer toutes les attributions de Sa Majesté à l'égard de la médaille canadienne du maintien de la paix.
Le Gouverneur général conserve tous ses pouvoirs.
M. Gervais: C'est exact.
Le président: Merci beaucoup d'être venu ce soir.
Le major-général Roméo Dallaire, chef d'état-major auprès du sous-ministre adjoint (Personnel), ministère de la Défense nationale: Le ministère de la Défense nationale appuie entièrement le projet de loi C-300 tel que modifié.
Nous aimerions également vous signaler que ce projet de loi comporte un élément des plus inhabituels pour ce qui est des ordres et des décorations. Il prescrit que ces médailles soient présentées, et non pas simplement envoyées. Dans bien des cas, comme l'a dit le sénateur Bonnell, on a envoyé des médailles par la poste. Ce projet de loi présente donc une toute nouvelle dimension. À partir de ce projet de loi, nous n'enverrons plus jamais de médailles par la poste. Un représentant du gouvernement remettra officiellement ces médailles et celles qui suivront. C'est quelque chose de très positif.
Ce projet de loi devrait nous aider dans des cas où des individus, même s'ils avaient pris part à diverses missions, ne répondraient pas à certains critères. Ainsi, certains pilotes ne passent pas plus d'un mois à la fois sur le théâtre des opérations avant d'être retirés. Les groupes précurseurs sont appelés à aller sur place, souvent au risque de leur vie, pour aider au démarrage de la mission, avant d'être retirés. C'est parce qu'ils ne restent pas sur le théâtre des opérations pendant les trois mois qui sont la norme qu'ils ne reçoivent aucune médaille des Nations Unies.
Cette médaille-ci nous permettra de reconnaître leur participation à une mission de maintien de la paix. Nous considérons que ce projet de loi est un pas dans la bonne direction et nous permettra de reconnaître beaucoup de ceux qui n'ont jamais fait l'objet d'une quelconque mention jusqu'à maintenant.
Le projet de loi nous permet également de souligner la participation de membres d'organisations non gouvernementales qui risquent volontairement leur vie lors de missions humanitaires et de reconnaître leurs services.
Je répète, en guise de conclusion, que c'est un pas dans la bonne direction. Nous espérons pouvoir profiter au maximum des dispositions du projet de loi pour reconnaître ceux qui ont servi au péril de leur vie, mais dont les efforts n'ont jamais été reconnus de façon correspondante.
Le major B. Brown, Direction de l'histoire et du patrimoine, Décorations et récompenses, ministère de la Défense nationale: Je dirige le Programme des décorations et récompenses des Forces armées canadiennes, et c'est moi qui aurai la tâche d'attribuer les médailles si le projet de loi est adopté.
Quelque 100 000 Canadiens auront droit à cette récompense, dont environ 30 000 font encore partie des forces armées. Les 70 000 autres personnes ont déjà pris leur retraite.
De la mission de maintien de la paix des Nations Unies, nous sommes passés à la simple mission de maintien de la paix, étant donné que les Forces canadiennes ont participé à cinq missions internationales qui n'étaient pas parrainées par l'ONU. Nous avons participé à deux missions en Indochine et au Vietnam. Actuellement, nous avons une mission d'observateurs de la force multinationale établie en permanence au Sinaï, et nous participons à une mission de l'OTAN en Yougoslavie. Nous avons également pris part à la mission de surveillance de la Communauté européenne. Nous voulions donc pouvoir offrir une médaille à tous ceux qui ont pris part à ces missions, tout autant qu'à ceux qui avaient pris part aux missions de l'ONU.
Comme l'a signalé le général, tous ceux qui ne sont pas restés suffisamment longtemps sur place, sur le théâtre des opérations, pour avoir droit à une médaille de l'ONU auront droit à celle-ci.
Cela signifie évidemment plus de travail pour mon personnel et pour moi-même, mais nous nous en réjouissons, car c'est du travail utile. Nous appuyons sans réserve le projet de loi.
Le sénateur Jessiman: Vous dites que la médaille sera présentée, et non pas envoyée. J'ai lu le projet de loi rapidement, mais je vois que le seul endroit où l'on parle de présenter une médaille, c'est lorsqu'il s'agit de la présenter à un proche parent. Partout ailleurs on parle d'attribuer la médaille. On ne dit nulle part ailleurs que la médaille doit être présentée, sauf s'il s'agit d'un proche parent. Mais je n'ai peut-être pas bien lu.
M. Dallaire: Nous devrions en fait nous reporter aux amendements du 12 mars.
Le sénateur Jessiman: S'agit-il d'un amendement que je n'aurais pas reçu? Le projet de loi a été adopté le 19 mars.
M. Dallaire: Dans les amendements qui ont été présentés en comité le 12 mars, comme on le trouve dans le compte rendu officiel, il avait été suggéré d'élargir le libellé et de parler de «récipiendaire» plutôt que de «proche parent».
Le sénateur Jessiman: Mais le texte dit bien que la médaille sera présentée au proche parent. Mais partout ailleurs, lorsque l'on parle de récipiendaire toujours vivant, on dit qu'elle sera attribuée. J'imagine que c'est le terme qui avait été utilisé auparavant. Vous dites, pour votre part, que la médaille sera présentée; mais à moins que cela ne se trouve ailleurs, je ne l'ai pas vu dans le libellé du projet de loi.
M. Dallaire: Nous nous reportons au compte rendu de la séance du comité. C'est le terme que nous allons utiliser dans l'interprétation du mot «attribuer», dans le cadre de la politique du ministère de la Défense; si nous devions nous limiter à ce qui se trouve dans le projet de loi, cela ne s'appliquerait qu'à cette médaille-ci. Nous affirmons pour notre part qu'il s'agit là de la politique que nous voulons appliquer dans toutes les Forces armées canadiennes et en vue de l'attribution future de médailles et de récompenses.
Le sénateur Bonnell: Mais ce qui se dit en comité sénatorial ou en comité de la Chambre des communes n'a aucun fondement en droit. Pour que cela soit exécutoire, il faut que cela se trouve dans le texte du projet de loi, et tout le reste importe peu, même si c'est dit en comité.
Le sénateur Jessiman: Non, c'est le ministère qui va adopter une politique. Elle pourrait être changée, mais elle pourrait être également rejetée.
Le sénateur Cools: Nous prenons bonne note du commentaire du général. Ce qu'il essaye de nous expliquer, c'est qu'il a tenu compte de ce qu'il considère être comme les souhaits des membres du comité et que le ministère a décidé d'appliquer une politique à l'échelle du ministère portant que dès lors qu'on attribue une médaille cette médaille sera «présentée». Nous devrions nous en réjouir, et ne pas rouvrir le dossier.
Le sénateur Bonnell: Ce n'est pas grave. J'espère que ce témoin fera mieux que le chef des services militaires, qui m'a menti. J'espère que vous allez appliquer la politique rigoureusement.
M. Dallaire: Je ne puis croire qu'il vous a menti. Je pense plutôt que c'est une erreur d'interprétation. Toutefois, soyez assuré que si ce n'est pas inscrit dans la loi, cela ne sera pas fait. Mais il s'agit au contraire d'une de ces propositions très sensées. Or, affirmer que nous n'en ferons rien signifie que nous avons perdu tout contact humain avec la réalité de nos gestes. Il ne s'agit pas de jeter une médaille à la figure de qui que ce soit. Plusieurs députés, sénateurs, hauts fonctionnaires et représentants de différents niveaux du gouvernement local pourraient fort bien présenter la médaille, ce qui vaudrait mieux que de demander au facteur de l'apporter au destinataire. Nous voulons changer d'attitude par une nouvelle politique.
Le sénateur Cools: Je propose que le projet de loi C-300 soit adopté sans amendement.
Le sénateur Bonnell: Nos deux témoins d'aujourd'hui semblent eux aussi avoir été bien récompensés, si l'on en juge par le nombre de médailles.
Êtes-vous d'accord avec ma proposition de saluer les anciens combattants de la Première Guerre mondiale qui ont fait du Canada une véritable nation à Vimy, il y a maintenant 80 ans? Cette année, ils sont retournés sur place dans leur chaise roulante. Dès qu'ils sont arrivés au pied du monument de Vimy, ils se sont extirpés de leur chaise roulante et ont défilé en montant l'escalier comme si l'on était encore en 1917, en respectant le tempo de la musique, pour aller déposer une gerbe. Ne devrait-on pas les récompenser eux aussi?
M. Dallaire: Votre collègue a bien expliqué qu'élargir le projet de loi à d'autres récompenses, ce serait mêler les pommes et les oranges. Rappelez-vous que nous étions en guerre à l'époque de Vimy. Dans le cas qui nous occupe, nous parlons d'un pays, le Canada, qui est en paix et qui participe à des opérations de maintien de la paix et à des opérations d'assistance humanitaire. Et nous pensons que cette décision se justifie amplement.
Toutefois, votre proposition illustre que nous avons perdu tout contact avec la réalité humaine, puisque rien de cela n'a été encore entrepris. Quelqu'un, soit le chef d'état-major de la Défense ou notre commandant en chef, voire même le Gouverneur général, devrait peut-être faire un effort spécial en vue de reconnaître ces hommes qui ont défilé avec les quelques centaines de militaires qui étaient aussi présents.
Ayant moi-même visité le plateau de Vimy lors des cérémonies de commémoration, j'ai pu voir à l'oeuvre nos magnifiques et courageux anciens combattants. Nous avons même perdu certains d'entre eux au cours de la cérémonie de commémoration du 50e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, en Hollande. Ceux qui étaient à Vimy auraient pu fort bien, eux aussi, y passer à cause des efforts qu'ils ont déployés et de tout le stress accompagnant les célébrations.
Le général Gervais et moi-même venons d'échanger une note disant que nous allons nous occuper de ce dossier, lui de son côté, et moi du côté du ministère. Mais si rien n'a encore été fait à ce sujet, c'est vraiment notre faute, et cela démontre un manque de considération humaine.
Le sénateur Cools: Le comité en entier vous appuie, vous qui occupez un poste élevé dans les forces armées, car nous sommes convaincus que toute démarche qui pourra remettre à l'honneur vos hommes et vos femmes est bien justifiée et de bon aloi.
Si vous affirmez que désormais vous appliquerez une nouvelle politique à l'échelle du ministère, nous ne pouvons qu'applaudir. Les forces armées de notre pays ont évidemment besoin de se faire remonter le moral. Nous vous en félicitons.
Je répète ma motion, à savoir que nous adoptions le projet de loi C-300 sans amendement.
Le président: D'accord?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Le sénateur Cools: Je suggère également que l'on inclue les recommandations dans le rapport du comité, comme l'a suggéré le sénateur Bonnell.
Le président: Au lieu d'avoir une suggestion, nous devrions peut-être en faire une motion officielle, pour le bénéfice des rapporteurs.
Le sénateur Bonnell: Je souscris à la motion de sénateur Cools visant à adopter le projet de loi sans amendement.
Le sénateur Jessiman: C'est déjà fait; nous parlons maintenant des recommandations.
Le sénateur Bonnell: Nous pourrions annexer à notre rapport la recommandation suivante:
Le sous-comité des affaires des anciens combattants recommande au gouvernement du Canada de constituer un comité des décorations et récompenses qui inclurait parmi ses membres des représentants des grandes associations d'anciens combattants du Canada.
Le sénateur Cools: Nous devrions également féliciter le ministère d'avoir adopté comme politique de présenter les décorations en personne aux membres des forces armées, dans la mesure du possible.
Nous faisons donc rapport du projet de loi, et nous incluons dans le rapport la suggestion du sénateur Bonnell, de même que des félicitations à l'intention du ministère pour avoir pris cette initiative.
Le sénateur Jessiman: Vous ne direz rien dans votre recommandation au sujet des anciens combattants de Vimy?
Le sénateur Bonnell: Non, c'est tout à fait autre chose.
Le sénateur Cools: La personne qui représente la chancellerie a pris note du geste de reconnaissance qui pourrait être fait à l'égard des soldats de Vimy.
Le président: Sommes-nous d'accord?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Bonnell: Je propose que nous adoptions le projet de loi sans amendement en y ajoutant la recommandation suivante:
Le sous-comité sénatorial des affaires des anciens combattants recommande au gouvernement du Canada d'inclure au sein de son comité des récompenses des représentants des grandes associations d'anciens combattants du Canada et des représentants du ministère des Anciens combattants.
Le sénateur Cools: Le ministère en fait déjà partie.
Le sénateur Bonnell: Non, c'est le ministère de la Défense nationale, et il n'a rien à voir avec les anciens combattants.
Le président: Allez-y.
Le sénateur Bonnell: C'est tout. Nous pourrions arrêter ici.
Le greffier a tout en main. Avez-vous besoin de ce qui suit?
Le président: J'aimerais bien y jeter un coup d'oeil, car on y fait mention des autres rapports du comité.
Le sénateur Bonnell: Je continue donc:
et,
le sous-comité entérine les recommandations du Conseil national des associations d'anciens combattants (que l'on retrouve dans le rapport du sous-comité intitulé Fidèle à la parole donnée: d'hier à demain, ainsi que dans les mémoires présentés au sous-comité [...]
Mais, au fait, que disent ces mémoires?
Le sénateur Cools: Peu importe. Il faut que cela soit inscrit dans notre rapport. Nous pourrions peut-être dire que le sous-comité fait trois recommandations, puis les énumérer.
Au fond, le sous-comité reprend les recommandations. Ces deux paragraphes vont ensemble. Au deuxième, on pourrait dire que «le sous-comité recommande au gouvernement du Canada de constituer un comité des décorations et récompenses dont certains des membres seraient des représentants des grandes associations d'anciens combattants».
Le sénateur Bonnell: Mais n'avez-vous pas dit que ce comité est déjà formé et que le ministère de la Défense nationale y siège déjà, mais pas le ministère des Anciens combattants?
Le sénateur Cools: Vous avez commencé par recommander la formation d'un comité, et vous voulez maintenant changer d'avis?
Le sénateur Bonnell: Je change d'avis parce que personne ne nous a dit que le comité existait.
Le sénateur Cools: Nous recommandons que ce ministère y participe. Bien. Je suis sûre que le greffier pourra s'y retrouver.
Le président: Qui appuie la motion?
Des voix: D'accord.
Le président: Adopté.
Demain, nous aurons l'occasion de présenter ce rapport-ci et le rapport du comité.
Le sénateur Bonnell: Je propose que nous fassions rapport du projet de loi C-300 demain au comité plénier, c'est-à-dire au comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
Le président: On se demandait si la séance n'avait pas été reportée à mercredi, mais nous irons aux renseignements.
Le sénateur Bonnell: Je propose que nous le fassions dès que possible.
La séance est levée.