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APPA - Comité permanent

Peuples autochtones

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des Peuples autochtones

Fascicule 21 - Témoignages pour la séance du soir


OTTAWA, le mardi 2 mars 1999

Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones, à qui a été renvoyé le projet de loi S-14, Loi prévoyant l'autonomie gouvernementale des Premières nations du Canada, se réunit aujourd'hui à 17 heures pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Charlie Watt (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous accueillons cet après-midi des représentants du ministère des Affaires indiennes et du Nord.

Monsieur Dewar, je vous demanderais de bien vouloir nous présenter vos collègues avant de commencer.

M. Barry Dewar, directeur général, Direction générale des négociations sur l'autonomie gouvernementale, Affaires indiennes et du Nord Canada: Honorables sénateurs, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître ici aujourd'hui. Je suis accompagné de Catherine MacQuarrie et de Allan Cracower.

En avril 1997, des fonctionnaires du MAINC ont comparu devant votre comité pour informer les sénateurs des faits saillants de la démarche proposée par la politique gouvernementale relative à la reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Ils en ont aussi profité pour mettre en lumière certaines différences entre l'approche de la politique fédérale et celle proposée par le projet de loi de l'époque, le projet de loi S-12, mieux connu maintenant sous le nom de projet de loi S-14, concernant le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

Aujourd'hui, j'ai cru bon de vous faire part des changements importants qui se sont produits au cours des deux dernières années dans le cadre de la mise en oeuvre de l'autonomie gouvernementale. Cette évolution découle de trois principaux éléments: il y a tout d'abord la présentation des recommandations de la commission royale sur les peuples autochtones; vient ensuite la préparation avec les Premières nations d'un programme découlant du document intitulé: «Rassembler nos forces», document rédigé par le gouvernement en réponse au rapport de la CRPA; et, en dernier lieu, le dialogue soutenu entre les Premières nations et les gouvernements provinciaux à l'occasion des séances de négociation sur l'autonomie gouvernementale qui se poursuivent toujours partout au pays.

Le rapport de la CRPA et le document de réponse préparé par le gouvernement fédéral, intitulé: «Rassembler nos forces», mettent en lumière les défis que nous devrons relever pour établir des relations durables avec les gouvernements autonomes. Ces deux documents soulignent qu'il n'existe pas de solution miracle.

Tous ensemble, nous devons nous pencher sur les répercussions de l'application de la Loi sur les Indiens, loi qui est en vigueur depuis plus de 100 ans. Cette loi a contribué au fractionnement des Premières nations en bandes et à l'anéantissement de l'exercice traditionnel des pouvoirs. En vertu de ce régime, la structure de gouvernement des bandes était destinée à ne donner que des pouvoirs très limités et très localisés, mais n'était pas adaptée à l'attribution de pouvoirs réels et étendus aux gouvernements autonomes.

Outre le fait de devoir assumer cet héritage historique, nous devons relever le défi de mettre en application des dispositions relatives à l'autonomie gouvernementale qui sauront répondre aux besoins sociaux et démographiques d'une population autochtone qui augmente à un rythme deux fois plus rapide que l'augmentation nationale moyenne. L'augmentation prévue pour les dix prochaines années se chiffre à 20 p. 100. En moyenne, la population autochtone est beaucoup plus jeune que le reste de la population, ce qui crée une demande accrue au chapitre de l'éducation, du logement, de l'emploi et des services sociaux. De plus, cette population fait aussi piètre figure par rapport à la moyenne nationale au chapitre des indicateurs sociaux.

Voilà certains des défis auxquels nous faisons face dans l'élaboration de dispositions relatives à l'autonomie gouvernementale. Nous devons régler des questions historiques et démographiques.

Si nous voulons nous donner un aperçu de ce que nous réserve le contexte politique, nous nous devons d'examiner par où nous sommes passés au chapitre de l'autonomie gouvernementale. Relativement parlant, les efforts que nous déployons depuis approximativement 15 ans, peut-être un peu plus si nous tenons compte du travail effectué par M. Penner, sont plutôt récents si on les prend dans un contexte historique plus large.

À la fin des années 80, le gouvernement fédéral a annoncé sa politique en matière d'autonomie gouvernementale axée sur la collectivité. Nous avons entamé des négociations avec un grand nombre de bandes partout au pays. Cette politique visait à négocier une loi sur l'autonomie gouvernementale attribuant toute une gamme de compétences aux bandes instaurées en vertu de la Loi sur les Indiens, et vivant dans les réserves, qui remplacerait cette dernière loi. De plus, la nouvelle loi conférerait la capacité juridique aux bandes, et leur fournirait de nouveaux actes constitutifs.

Cette politique a connu un succès mitigé pour diverses raisons. Elle n'était pas au goût des représentants de nombreuses Premières nations, car les pouvoirs étaient délégués plus qu'ils n'étaient attribués en vertu de l'existence d'un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

De plus, autant chez les Premières nations qu'au niveau des gouvernements provinciaux, on craignait que le gouvernement fédéral utilise cette politique pour se déresponsabiliser. On a trop souvent cru que l'objectif visé était de transférer les pouvoirs et les responsabilités aux Premières nations sans s'inquiéter du renforcement des capacités, des accords financiers et des plans de mise en oeuvre qui permettraient d'instaurer des gouvernements autochtones viables capables de vraiment assurer la prestation des programmes et des services à l'intention de leurs citoyens et de répondre à leurs autres besoins.

Même si, à certains égards, le projet de loi S-14 va plus loin que le Programme de négociation de l'autonomie gouvernementale avec les collectivités, l'approche qu'il préconise ressemble beaucoup à celle du programme, en ce sens qu'elle est axée sur les bandes et qu'elle cherche à mettre en place un cadre de compétences différentes de celles prévues par la Loi sur les Indiens.

La politique relative au droit inhérent, qui a été annoncée en 1995 et dont M. Dupont a parlé à l'époque, constituait un revirement juridique et constitutionnel majeur dans la démarche entreprise pour en arriver à l'autonomie gouvernementale.

Comme M. Dupont l'avait souligné lors de sa comparution devant le comité sénatorial permanent en 1997, la politique relative au droit inhérent reconnaissait le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale comme un droit dont jouissaient déjà les autochtones en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle. Cette politique proposait de mettre de côté les débats juridiques et constitutionnels pour se concentrer sur la négociation de dispositions pratiques dans le cadre constitutionnel canadien.

Cette politique prévoyait la protection constitutionnelle de différents aspects des ententes relatives à l'autonomie gouvernementale. Elle était conçue dans le respect de la Charte des droits et libertés et des lois relatives aux questions d'intérêt national. Elle exigeait que les gouvernements des Premières nations et ceux des niveaux fédéral, provincial et territorial s'entendent, selon le cas, sur les liens à établir entre leurs différentes lois et sur les règles à appliquer pour résoudre les conflits. On voulait ainsi définir clairement, pour toutes les parties en cause, quelles lois étaient applicables, et dans quelles circonstances.

Grâce au travail que nous avons accompli à l'occasion de nombreuses séances de négociation entre les Premières nations et les gouvernements provinciaux un peu partout au pays, nous avons réussi à faire des gains substantiels dans ces différents domaines aux chapitres du langage utilisé pour la reconnaissance du droit inhérent, de la Charte des droits et des libertés et des règles relatives à l'application des lois. Sous peu, nous aurons conclu des accords de principe et des accords définitifs qui nous fourniront toute une gamme de pistes qui nous aideront à résoudre ces questions.

C'est alors que la CRPA a fait son entrée en scène. Elle exigeait des Premières nations et des gouvernements provinciaux et fédéral qu'ils ne se contentent pas simplement d'aborder la question de l'autonomie gouvernementale d'un point de vue strictement juridique et administratif. Elle proposait que nous envisagions une réforme structurale en profondeur de leurs relations, une réforme nécessaire à la mise en place de gouvernements autochtones légitimes, autonomes et viables.

La commission royale a tenu à souligner que l'attribution de pouvoirs élargis aux différentes collectivités n'entraînait pas nécessairement l'instauration de gouvernements efficaces et viables. Elle envisageait plutôt la reconstruction des nations autochtones, l'étude des systèmes de gestion publique pour en garantir la légitimité, la responsabilité et les mécanismes de réparation et l'établissement de nouvelles relations financières.

Dans son document intitulé: «Rassembler nos forces», paru en janvier dernier, le gouvernement s'engage à renouveler sa relation avec les peuples autochtones en visant quatre objectifs principaux: le renouvellement des partenariats, l'attribution de plus grands pouvoirs aux gouvernements autochtones, l'élaboration de nouvelles relations financières et enfin, le soutien aux collectivités, aux personnes et aux économies saines.

L'idée d'attribuer plus de pouvoirs aux gouvernements autochtones qui transpirait de cette réponse à la CRPA témoignait du passage d'une approche strictement axée sur les questions de compétences à une approche favorisant un examen plus large des éléments essentiels à la mise en place de relations intergouvernementales viables.

En discutant de cette approche plus globale des relations aux tables de négociation, comme nous l'avons fait à plusieurs occasions partout au pays, nous commençons à recueillir un consensus sur les éléments interdépendants qui doivent être examinés afin d'établir de nouvelles relations intergouvernementales.

J'aimerais vous parler brièvement de six de ces éléments interdépendants. Le premier est l'exercice des pouvoirs. Avec quel genre de gouvernement autochtone les gouvernements des niveaux fédéral et provincial vont-ils avoir des relations? S'agira-t-il d'administrations propres à chaque collectivité, à chaque tribu ou à chaque région? Comment les administrations des différentes collectivités et des différentes tribus se répartiront-elles les responsabilités? Comment relèverons-nous les défis politiques et fonctionnels que pose la transformation ou le remplacement des conseils de bande et de tribu ou des associations politiques mises en place en vertu de la Loi sur les Indiens, pour instaurer de nouvelles structures gouvernementales responsables et à même d'assumer toute une gamme de responsabilités liées à la gestion des affaires publiques comme, entre autres, les fonctions législatives, administratives et judiciaires? Comment pouvons-nous favoriser une telle transformation?

En matière de compétences, l'élément relatif à l'autonomie gouvernementale le plus traditionnel ayant été abordé, il faudra définir l'étendue des compétences qui seront reconnues et les liens qui uniront les lois des Premières nations à celles des gouvernements fédéral et provinciaux. Existe-t-il des conditions sine qua non à l'exercice de certains pouvoirs relatifs à la taille des entités, à la capacité, aux ressources ou aux ententes d'harmonisation avec les gouvernements des niveaux fédéral ou provincial, ou est-ce que chaque bande, peu importe son importance, peut exercer ou espérer exercer toute une gamme de compétences?

Au chapitre des programmes, est-ce que les gouvernements des Premières nations disposeront des structures, des capacités et des ressources nécessaires pour concevoir, évaluer et mettre de l'avant des programmes et services à l'intention de leurs citoyens? Que doivent stipuler les ententes au sujet de la mobilité, du transfert des programmes et des normes qui les régiront?

Au cours des 20 dernières années, on a assisté à un transfert important des responsabilités concernant la prestation de programmes aux Premières nations. Plus de 80 p. 100 des programmes sont maintenant appliqués par les conseils tribaux ou par les bandes, ce qui a engendré une certaine compétence administrative. Cependant, quand un gouvernement devient autonome, il ne doit plus se contenter de mettre en oeuvre les programmes des autres. Il doit être à même d'élaborer ses propres politiques et programmes, de les évaluer et d'établir des normes. Cette nouvelle étape n'a pas encore été franchie dans le transfert administratif actuel.

Au chapitre des accords financiers, dans le document «Rassembler nos forces», le Canada s'engage à travailler en partenariat avec les gouvernements autochtones pour développer de nouvelles relations financières qui fourniront un financement plus stable et plus prévisible permettant d'optimiser la production interne de recettes autonomes et de responsabiliser les gouvernements autochtones.

Nous espérons aller de l'avant avec ces nouveaux accords financiers grâce à la mise en place d'une table nationale avec l'Assemblée des Premières nations qui impliquerait toutes les Premières nations de la Saskatchewan qui sont sous l'égide de la Federation of Saskatchewan Indians. Le gouvernement de la Saskatchewan est lui aussi de la partie. De plus, dans le cadre de négociations plus poussées de l'autonomie gouvernementale, nous avons tenté de négocier toute une nouvelle gamme d'ententes financières fondées sur un modèle de formule de transfert, formule qui permettrait de s'assurer que les Premières nations disposent des ressources nécessaires pour fournir des programmes et des services comparables. Le passage du genre d'entente qui était en vigueur jusqu'à maintenant à ce nouveau genre d'entente élaborée en fonction d'une formule de transfert constitue un défi difficile à relever.

La prochaine question a trait à la mise en oeuvre. L'expérience montre que la mise en oeuvre doit être faite en fonction de plans élaborés conjointement. Nous avons en effet fait face à de nombreux problèmes dans des cas de règlement de revendications territoriales majeures où des plans de mise en oeuvre n'avaient pas été préparés. Pour atteindre l'autonomie gouvernementale, il n'est pas simplement question pour les Premières nations de ne plus se soumettre à la Loi sur les Indiens pour choisir plutôt de se soumettre à des nouvelles règles en matière de compétence préparées d'avance. Il est plutôt question d'un changement fondamental dans les relations entre les gouvernements des Premières nations et des gouvernements des niveaux fédéral et provincial. Pour effectuer une telle transition, la planification et l'attribution des ressources doivent se faire conjointement. Dans une relation, au moins deux parties sont impliquées et, dans ce cas-ci, la participation des provinces et territoires complique les choses. Il faut planifier.

En ce qui a trait aux relations découlant des traités avec les Premières nations avec lesquelles nous avons signé des traités historiques ou avec lesquelles nous en sommes venus à des accords sur les revendications territoriales, toutes les parties impliquées doivent s'interroger sur la façon dont ces nouvelles relations avec les gouvernements autonomes pourront se poursuivre dans le respect des traités existants. On étudie activement cette question aux tables de négociation de l'autonomie gouvernementale et dans le cadre de différents forums, comme le Saskatchewan Treaty Process et le Bureau du commissaire aux traités, qui cherchent à conclure des ententes sur la nature des relations basées sur les traités historiques et sur les principes inhérents à ces relations devant être transposés aux ententes d'autonomie gouvernementale.

J'aimerais maintenant vous entretenir de l'état actuel des négociations partout au pays. Des ententes sont en voie d'être conclues aux différentes tables de négociation partout au pays, ententes qui, de maintes façons, traitent des différentes composantes interdépendantes dont je vous ai déjà parlé et qui sont essentielles à l'instauration de nouvelles relations intergouvernementales. Les honorables sénateurs auront bientôt l'occasion d'examiner l'entente des Nishgas, entente qui traite de ces questions. Un certain nombre d'accords de principe ont été conclus ou le seront sous peu.

Bien qu'il soit impossible d'élaborer un modèle qui convienne à tous, les précédents qui ont été créés dans le cadre de ces nouvelles ententes peuvent servir d'exemples qui permettront d'accélérer les négociations de l'autonomie gouvernementale.

J'aimerais vous parler brièvement des instruments de reconnaissance. Il est évident que tout comme le Sénat, nous voulons trouver des façons d'accélérer l'exécution des ententes portant sur l'autonomie gouvernementale en élaborant les instruments de reconnaissance. Le plan d'action de l'Assemblée des Premières nations prévoit l'élaboration concertée d'un instrument de reconnaissance nationale. Cette élaboration n'en est qu'à ses tout débuts.

En Saskatchewan, cette question a aussi été abordée autour d'une table de négociation instaurée dans cette province qui réunit la Federation of Saskatchewan Indians, le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Saskatchewan. Dans le cadre d'autres négociations, nous cherchons à conclure des ententes qui reconnaissent les pouvoirs gouvernementaux essentiels et qui permettront de transférer de nouvelles compétences au fur et à mesure, sans qu'il ne soit nécessaire de modifier les lois ou de préparer de nouveaux projets de loi chaque fois. Cela est mis de l'avant pour les Premières nations qui désirent accéder à l'autonomie gouvernementale d'une façon progressive en assumant de nouvelles compétences petit à petit.

S'agissant du projet de loi S-14, en 1997, M. Dupont nous faisait part de certaines de ses inquiétudes au sujet du contenu du projet de loi S-12, tel qu'il était connu à l'époque. Il parlait surtout de l'éventuelle incertitude juridique relative à l'application des lois, des règles applicables à l'interaction entre les lois des Premières nations et celles des gouvernements fédéral et provinciaux et de la pertinence des différentes lois en cas de conflit. Il a aussi exprimé son inquiétude à propos des dispositions concernant la paix et l'ordre ainsi que le bon gouvernement qui risquaient d'empiéter sur certaines compétences fédérales. À titre d'exemple, il soulignait le fait que les gouvernements provinciaux et territoriaux n'avaient pas leur mot à dire dans la définition des relations entre les lois et qu'ils ne pouvaient pas apporter leur soutien à la mise en application des nouvelles ententes portant sur l'autonomie gouvernementale. De plus, il a fait remarquer que le projet de loi ne contenait aucune disposition relative au financement des gouvernements autochtones.

Je crois que vous constaterez, honorables sénateurs, que ces questions sont abordées de façon créative dans les nouvelles ententes relatives à l'autonomie gouvernementale qui leur sont soumises, et je vous inviterais à les étudier durant vos délibérations.

Allan Cracower, du ministère des Affaires indiennes, se joint à moi aujourd'hui. Sans répéter l'analyse juridique du projet de loi S-12 effectuée en 1997, il aimerait mettre en lumière les principales questions juridiques soulevées par le projet de loi S-14.

M. Allan Cracower, conseiller juridique, Affaires indiennes et du Nord Canada: Il y a de cela environ un an, j'ai eu l'honneur de comparaître devant le comité à propos du projet de loi sur l'éducation des Micmacs. Comme les membres du comité le savent déjà, ce projet de loi, tout comme le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui, traitait de l'autonomie gouvernementale. J'ai analysé le projet de loi S-14 à la lumière de ce bagage juridique et de l'expérience et des connaissances que j'ai acquises en participant aux négociations de la Loi sur l'éducation des Micmacs et de l'entente conclue entre les Premières nations et la province qui en a découlé.

Aujourd'hui, mes commentaires vont surtout chercher à mettre en évidence des questions juridiques importantes, et porter sur des lois récentes relatives au présent projet de loi. Au cours des deux dernières années, les développements juridiques n'ont cependant pas seulement porté sur des cas de jurisprudence. Barry Dewar vient tout juste de résumer l'évolution de la politique relative à l'autonomie gouvernementale des autochtones depuis la dernière fois que nous avons comparu devant le comité à ce même sujet. Cette évolution s'est traduite par la conclusion d'ententes finales et d'accords de principe. Parallèlement, on continue de trouver des solutions juridiques qui permettent aux partenaires en négociation d'en venir à des ententes sur l'autonomie gouvernementale qui soient pratiques, équitables et durables.

Les solutions trouvées aux problèmes inhérents à la question des interrelations entre les différentes lois garantissent incontestablement le succès du travail juridique présentement en cours, travail visant l'atteinte de l'autonomie gouvernementale. Jusqu'à tout récemment, la mise en application des ententes d'autonomie gouvernementale a été contrecarrée par l'omniprésence et la nature fondamentale du problème que pose la définition du champ d'application des différentes lois. Il y a de cela deux ans, mon collègue vous a décrit en détail la confusion que causait le projet de loi S-12 quand venait le temps de déterminer quand les lois des Premières nations ou les lois fédérales s'appliquaient aux citoyens autochtones. En lisant les alinéas a), b) et c) de l'article 34 du projet de loi S-12, on pourrait être tenté de croire que la loi fédérale s'applique, mais, en y regardant de plus près, il semble qu'elle ne s'applique que si l'une des trois conditions est remplie. Il en résulte une grande confusion qui oblige les tribunaux à déterminer si telle ou telle loi fédérale s'applique ou non.

Je crois que vous serez d'accord avec moi qu'il est important que les citoyens sachent quelles lois s'appliquent à eux et dans quelles circonstances, particulièrement quand deux lois contradictoires ou complémentaires peuvent s'appliquer.

Le défi est d'autant plus grand quand on sait qu'on offre aux Premières nations des pouvoirs législatifs extraterritoriaux. L'éducation constitue un bon exemple. La capacité des Premières nations de légiférer à l'extérieur de leurs limites territoriales relativement à l'éducation de leurs membres soulève des problèmes juridiques et pratiques. Légalement, l'article 93 de la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit que seules les provinces ont compétence exclusive en matière d'éducation. Constitutionnellement parlant, on peut alors se demander si le Parlement peut vraiment attribuer des pouvoirs législatifs en matière d'éducation hors réserve.

Qui plus est, même si une province accepte d'adopter une loi qui permettrait aux Premières nations de veiller à l'éducation de leurs membres vivant hors de leur collectivité, la mise en application d'une telle loi pourrait s'avérer frustrante. Les élèves autochtones et non autochtones pourraient être soumis à des lois différentes en ce qui a trait, par exemple, au programme d'études ou à la présence en classe, même s'ils sont assis dans la même classe.

La situation s'envenime encore plus si l'on tient compte, comme il se doit, de l'existence de lois provinciales. Un citoyen d'une Première nation autonome, un résident non autochtone ou une tierce partie qui cherche à faire des affaires au sein de la collectivité pourrait être soumis à trois régimes juridiques potentiellement contradictoires: celui des Premières nations, celui du gouvernement fédéral et celui des gouvernements provinciaux. Dans tous les cas, des règles claires, compréhensibles et spécifiques doivent être définies pour déterminer quelle loi a préséance dans telle ou telle circonstance et pour qui. Le projet de loi S-14 n'y parvient pas.

En plus des simples règles par défaut, les négociateurs ont constaté que des règles particulières sont souvent nécessaires afin d'instaurer un climat de confiance en ce qui a trait aux pouvoirs spécifiques comme ceux relatifs à l'éducation et à l'environnement.

Il est faux de dire qu'on doit s'en remettre aux tribunaux pour interpréter les lois concurrentes, l'une de ces lois risquant d'être favorisée au détriment de l'autre, si elles se retrouvent au centre de litiges. Bien qu'il soit quelquefois nécessaire que des différends se règlent devant les tribunaux, cela demande du temps, coûte très cher et risque de ralentir les activités économiques tant qu'un verdict n'est pas rendu. Il est habituellement préférable d'éviter les poursuites en négociant d'avance des ententes claires qui font en sorte que tout le monde y gagne, que les valeurs des Premières nations sont respectées et que les Premières nations puissent s'autogouverner tandis que le gouvernement fédéral continue de s'acquitter de ses obligations juridiques.

Il est clair que les Premières nations doivent disposer d'une vaste gamme de compétences en tant que collectivité autonome. Cependant, si l'exercice de ces pouvoirs entraîne une succession de procès destinés à régler des conflits de compétence variés et complexes, les gains découlant de l'autonomie gouvernementale, autant théoriques que pratiques, en seront amoindris, si ce n'est totalement éliminés. La question des relations et des attentes des Premières nations et des gouvernements des niveaux fédéral et provincial relativement aux lois devrait plutôt être réglée d'entrée de jeu.

Le respect des lois d'importance nationale partout au Canada constitue un autre problème connexe. Entre autres lois qui revêtent une importance primordiale à l'échelle nationale, il y a la loi pénale, les lois relatives à la protection de la santé et de la sécurité, les lois visant à répondre aux situations d'urgence et celles relatives aux obligations internationales du Canada.

Il est dans l'intérêt des Premières nations et de leurs citoyens, autant que dans celui de tous les Canadiens, que toutes les attentes de toutes les parties impliquées reflètent clairement que les lois qui revêtent une importance d'envergure nationale sont aussi applicables aux collectivités autonomes. L'étendue des pouvoirs relatifs à la paix et l'ordre ainsi qu'au bon gouvernement définis à l'article 8 du projet de loi constitue en fait une invitation à légiférer ouvertement sur des questions relatives à la souveraineté canadienne, ou à promulguer des lois qui pourraient entraîner des conflits avec les provinces qui, à leur tour, entraîneraient une succession de litiges.

Comme vous le savez, depuis notre dernière comparution devant votre comité, la Cour suprême a rendu son verdict dans l'affaire Delgamuukw. J'aimerais terminer en soulignant deux faits saillants de cette cause, car je crois qu'il serait pertinent que vous en teniez compte dans votre examen du projet de loi S-14.

Premièrement, grâce à l'article 16, ce projet de loi définirait les limites des terres des Premières nations où celles-ci pourraient exercer leur compétence en vertu de l'article 91.24 de la Loi constitutionnelle. La Cour suprême du Canada, dans le verdict qu'elle a rendu dans l'affaire Delgamuukw, a stipulé que les terres décrites à l'article 91.24 revenaient de droit aux autochtones. De ce fait, le projet de loi transférerait la propriété absolue des terres autochtones et permettrait aux Premières nations de légiférer partout sur ces terres. Cependant, là où elles existent, on ne connaît pas l'étendue des terres qui reviennent en titre aux autochtones. Cela pourrait entraîner une certaine confusion et d'éventuelles poursuites si une des Premières nations décidait de se soumettre au nouveau régime en réclamant des titres autochtones en dehors des limites actuelles de ses réserves.

Finalement, j'aimerais souligner comment la Cour suprême conclut les raisons qui justifient sa décision dans l'affaire Delgamuukw. Le tribunal exhorte les Premières nations et les gouvernements à négocier, non seulement pour régler leurs différends, mais aussi pour garantir le succès et l'harmonie des éventuelles ententes qui nous permettront de nous gouverner nous-mêmes. La Cour nous fait aussi remarquer que nous sommes tous ici pour rester. En d'autres mots, nous devons tous travailler ensemble dans l'intérêt supérieur des Premières nations en particulier, et de tous les Canadiens en général.

M. Dewar et moi-même sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.

Le sénateur Tkachuk: Est-ce que le ministère des Affaires indiennes et du Nord donne son accord de principe au projet de loi S-14?

M. Dewar: Nous croyons qu'il n'existe pas d'approche universelle en matière d'autonomie gouvernementale. Il existe plusieurs méthodes qui peuvent être utilisées pour en venir à des ententes d'autonomie gouvernementale. Nous vous avons fait part de certaines de nos inquiétudes relatives au projet de loi S-14 dans sa forme actuelle.

Nous croyons que certains modèles et certaines ententes présentement à l'étude pourraient répondre à quelques-unes de nos inquiétudes, dont la nécessité d'examiner la question des accords financiers et un plan de mise en oeuvre. Nous disposons de nouveaux exemples qui démontrent comment on peut régler les questions relatives à l'application des lois. Vous retrouverez dans l'entente des Nishgas quelques bons modèles qui pourraient aider à améliorer le projet de loi S-14. Nous sommes inquiets au sujet de certains problèmes inhérents à la manière dont le projet de loi est rédigé actuellement.

Le sénateur St. Germain: Est-ce que le gouvernement appuie en principe ce genre de loi habilitante? L'instigateur de ce projet de loi, le chef Walter Twinn, souhaitait le mettre de l'avant afin de contrôler les coûts, pour ainsi rendre le processus plus abordable pour un grand nombre de tribus et de nations autochtones qui, autrement, n'auraient pas pu se le permettre.

M. Dewar: Nous aimerions trouver des modèles sur lesquels pourraient s'appuyer les instruments de reconnaissance ou un modèle d'entente que les Premières nations pourraient utiliser. Cela faciliterait les choses. Comme je l'ai déjà mentionné, nous avons commencé à travailler sur le concept d'un instrument de reconnaissance nationale, mais nous sommes aussi intéressés par d'autres modèles.

Nous nous inquiétons aussi des groupes qui désirent se prévaloir de l'autonomie gouvernementale d'une manière progressive, car ils auraient besoin de revenir pour demander des modifications aux lois quand une nouvelle entente sectorielle serait conclue ou quand de nouveaux pouvoirs seraient attribués.

Le sénateur Tkachuk: Comment le projet de loi S-14 empêche-t-il tout cela?

M. Dewar: Nous ne disons pas que le projet de loi S-14 empêchera cela.

Le sénateur Tkachuk: Disons que le projet de loi S-14 est adopté. Comment empêchera-t-il ce que vous avez mentionné à propos des autres arrangements ou des autres modèles? Comment le projet de loi S-14 peut-il empêcher tout cela?

M. Dewar: Le projet de loi S-14 n'empêcherait pas la négociation d'autres modèles de gouvernement autonome avec d'autres groupes. Nous avons émis certaines réserves face au projet de loi S-14. Si vous aviez des groupes qui décidaient de se prévaloir de l'autonomie gouvernementale en vertu du projet de loi S-14 tel qu'il est présentement rédigé, nous croyons que la mise en application de ce genre d'entente pourrait poser des problèmes, des problèmes relatifs à l'application des lois et au fait qu'aucune entente de mise en application ou qu'aucun accord financier n'est prévu à l'avance pour clairement définir les attentes de toutes les parties en cause.

Le sénateur Tkachuk: Ne croyez-vous pas qu'avant de se prévaloir des dispositions de cette loi, les dirigeants d'une réserve s'occuperaient de tout cela?

M. Dewar: J'espère qu'une réserve ou une collectivité qui s'attend à effectuer un tel virage qui apportera des changements en profondeur aux relations qu'elle entretient avec le gouvernement du Canada et les gouvernements provinciaux se penchera sur ces questions.

Un des messages que j'ai essayé de faire passer au cours de mon exposé est que l'autonomie gouvernementale n'est pas seulement une autre façon d'exercer des compétences, différente de la Loi sur les Indiens. C'est une nouvelle relation. Quand elles s'engagent dans une nouvelle relation, les deux parties en sont affectées et devraient essayer de prévoir comment la transition s'effectuera.

Quand vous examinerez le projet de loi, je vous invite à jeter un coup d'oeil sur les questions relatives aux mécanismes de mise en application et de financement et à chercher le mécanisme ou l'élément déclencheur qui ferait en sorte que vous pourriez passer d'un genre de relation à l'autre.

Le sénateur Tkachuk: Vous avez parlé de relation. À quelle obligation fiduciaire le ministère des Affaires indiennes et du Nord et le gouvernement du Canada s'engagent-ils envers les Indiens?

M. Dewar: Le gouvernement a une relation de fiduciaire avec les Premières nations et les peuples autochtones. Nos obligations fiduciaires changent en fonction des circonstances. Elles varient en fonction de l'entente qui a été conclue.

Le sénateur Tkachuk: S'il y a relation de fiduciaire, est-ce avec les bandes ou avec les chefs? N'est-ce pas de cela qu'il s'agit? Qu'en est-il exactement?

M. Cracower: Pour ce qui est des obligations fiduciaires, c'est de cela dont il faudra parler s'il s'agit de terres dans une collectivité en particulier et de notre relation avec cette collectivité. Cependant, dans ce contexte, je crois que nous ne mettons pas tant l'accent sur la relation que sur le résultat final, qui est l'application de lois de cette nature, sur les problèmes constitutionnels susceptibles de se poser et d'autres questions juridiques qui pourraient empêcher l'application de ces lois.

Si vous permettez que je réponde à votre question de tout à l'heure sur la loi habilitante, je ne crois pas que le gouvernement soit opposé à une loi habilitante comme telle; ce qu'on souhaite, c'est avoir une loi efficace.

Le sénateur Tkachuk: Envers qui le gouvernement a-t-il cette obligation fiduciaire?

M. Cracower: Envers la collectivité dans son ensemble, envers les peuples autochtones.

Le sénateur Tkachuk: Vous parlez des obligations établies dans le traité?

M. Cracower: Oui, le traité renferme effectivement des obligations.

Le sénateur Tkachuk: Nous sommes saisis du projet de loi S-14 sur l'autonomie gouvernementale des Indiens. Il m'apparaît que le ministère et le gouvernement doivent faire en sorte que la relation fiduciaire dont il est question ici s'applique non seulement au pouvoir exécutif mais au Sénat et au Parlement. Nous avons l'obligation de nous assurer de faire les efforts voulus pour que cela réussisse et non le contraire.

Autrement dit, le Sénat est saisi d'un projet de loi. Nous avons l'obligation de reconnaître le droit inhérent des autochtones à l'autonomie gouvernementale. Et vous, en tant que cadre dirigeant, avez l'obligation d'apporter votre contribution. Le projet de loi est à l'étude depuis plusieurs années. Qu'avez-vous fait pour faire avancer les choses?

M. Dewar: Nous avons déjà comparu devant le comité et fait part de certaines préoccupations qui, à notre avis, devraient être prises en compte en vue d'améliorer le projet de loi. Je suis ici aujourd'hui pour faire ressortir des préoccupations, et non pour m'opposer à l'adoption du projet de loi. Diverses ententes actuellement en voie de négociation offrent des modèles constructifs pour aborder certains de ces problèmes et éviter ce que nous considérons comme étant des problèmes potentiels pour la mise en oeuvre du projet S-14 dans sa forme actuelle. Et je ne dis pas cela du tout dans un esprit d'obstruction.

Le sénateur Tkachuk: Je le comprends.

Le projet de loi avait déjà été présenté et nous avons des preuves qu'il avait reçu l'approbation du Cabinet en octobre 1991. Ensuite, il y a eu ce projet de loi, qui est semblable à celui portant sur la bande indienne de Sechelt ou d'autres projets de loi sur l'autonomie gouvernementale des Indiens qui ont été étudiés.

Certes, il n'a pas le même impact que le projet de loi sur le Yukon, qui a été examiné à la Chambre des communes et au Sénat beaucoup trop rapidement. Pourquoi hésite-t-on à négocier cette autonomie gouvernementale avec les neuf bandes?

M. Dewar: Nous avons établi des processus à l'intention des groupes participant aux négociations sur l'autonomie gouvernementale. Ces groupes peuvent demander de participer aux négociations.

Le sénateur Tkachuk: Ils ont écrit pour le faire, ils ont parlé à la ministre. Avez-vous des preuves que vous avez envoyé des lettres disant qu'il s'agit d'un processus auquel vous souhaiteriez participer et qu'il est possible de le faire? Le conseil régional a demandé que le processus soit enclenché avant que le projet de loi ne soit présenté. Je crois savoir que la demande a été refusée. La ministre a opposé une fin de non-recevoir.

M. Dewar: Je ne suis pas au courant de quelque demande que ce soit.

En ce qui concerne l'approbation du Cabinet en 1991, nous savons que la Première nation de Sawridge a entrepris des poursuites devant les tribunaux au sujet des négociations antérieures sur l'autonomie gouvernementale. Je refuse d'aborder ces questions spécifiques parce que je ne les connais pas.

Le sénateur Tkachuk: J'essaie de comprendre le problème. Je crois que le ministre Irwin a rencontré les représentants des huit réserves en mars 1994. Je crois savoir qu'il a quitté la réunion en signe de protestation. Je veux savoir pourquoi on se fait tirer l'oreille pour traiter une question comme celle-ci. Le projet de loi à l'étude n'est pas aussi important que nombre des projets de loi qui ont été adoptés jusqu'à maintenant. Les problèmes ne sont pas aussi compliqués que certains des problèmes abordés dans d'autres projets de loi sur l'autonomie gouvernementale, y compris celui qui est actuellement à l'étude au Parlement. Il a fallu beaucoup d'argent pour négocier. Je parle du projet de loi sur les Nishgas. Toutes ces questions sont mises en veilleuse.

J'essaie de comprendre pourquoi le projet de loi S-14 est si problématique. Les populations en cause sont importantes, et neuf bandes souhaitent résoudre le problème.

Pourriez-vous vous informer et nous dire pourquoi on hésite à négocier avec ces neuf bandes? Cela serait utile. Cette négociation aurait pu se faire il y a des années.

Vous avez parlé de la contribution du gouvernement fédéral à l'éducation des Indiens et des problèmes d'éducation en vertu de l'article 93. Vous avez dit également que d'après les dispositions du projet de loi à l'étude, la bande indienne serait responsable de l'éducation à l'extérieur de la réserve. Comment le Parlement sera-t-il redevable des centaines de millions de dollars des contribuables qui ont été dépensés à ce jour pour l'éducation à l'extérieur des réserves, y compris les paiements versés à des intermédiaires à l'époque des pensionnats?

M. Cracower: Je parlais d'adopter des lois pouvant s'appliquer aux membres à l'extérieur des réserves dans la province. Je ne parle pas ici d'aide financière, il s'agit là d'une question qui pourrait être d'ordre administratif. Je parle ici plutôt du pouvoir que conférerait cette mesure législative et qui permettrait aux Premières nations d'établir, comme je l'ai dit tout à l'heure, les programmes d'études, les normes sur la fréquentation scolaire, la durée de l'année scolaire, ainsi que la durée du semestre pour l'obtention des diplômes, et cetera, toutes des questions qui pourraient entrer en conflit avec les lois provinciales.

Le sénateur Tkachuk: Mais quelle est la différence entre maintenant et alors? C'est la Loi sur les Indiens qui s'applique encore.

M. Cracower: Je parle ici de la situation à l'extérieur de la réserve.

Le sénateur Tkachuk: Les parties vont devoir négocier, elles ne peuvent s'occuper d'éducation à l'extérieur de la réserve. Une fois qu'elles sortent de leur territoire, ce sont les lois provinciales qui s'appliquent. Ne croyez-vous pas que le gouvernement provincial dispose là d'un outil extraordinaire pour négocier avec les Indiens en matière d'éducation? Quelle mesure les Indiens pourraient-ils adopter qui causerait des problèmes à l'extérieur de la réserve? Donnez-moi un exemple, s'il vous plaît.

M. Cracower: Ce n'est pas tant que les mesures causeraient des problèmes. Je ne peux vous parler que de l'aspect pratique du projet de loi sur l'éducation des Micmacs, et plus particulièrement comment on en est arrivé à l'adopter. Les négociations se sont faites avec les Premières nations en tant que communauté, dans ce cas-ci, il s'agissait de 13 Premières nations. Tout comme ce que prévoit le projet de loi que vous étudiez actuellement, les Premières nations avaient le choix, rien n'a été imposé à personne. En fait, les Premières nations n'ont pas toutes adhéré aux dispositions établies.

Par ailleurs, pendant que le gouvernement fédéral négociait avec les Premières nations, nous étions également en contact et nous travaillions en étroite collaboration avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse. En bout de ligne, nous nous sommes retrouvés avec une entente tripartite qui reconnaissait la portée des compétences des Premières nations en matière d'éducation à l'extérieur de la réserve. Cela ne s'appliquait qu'à l'aide accordée aux étudiants du postsecondaire. Non seulement cette entente a été sanctionnée par le Parlement, mais elle l'a été également par l'assemblée législative de la province. Si vous voulez, la question des liens entre les lois a été abordée et un pouvoir spécifique a été accordé aux Premières nations pour leur permettre d'adopter des lois régissant l'éducation et prévoyant qu'elles avaient la suprématie dans ce domaine. Leurs lois devaient avoir préséance sur d'autres lois portant sur la réserve. En ce qui concerne l'éducation à l'extérieur de la réserve, l'entente prévoyait uniquement des dispositions concernant les étudiants du postsecondaire. Elle évitait tout conflit potentiel.

Essentiellement, c'est ce que nous disons pour le projet de loi actuel. Il n'est pas question de nous y opposer, mais bien plutôt de venir ici pour l'examiner en toute neutralité, de soulever les problèmes sur les répercussions possibles de son libellé actuel et de sa mise en oeuvre ultérieure.

Le sénateur St. Germain: Pour ce qui est des questions d'ordre juridique, avez-vous établi en détail ce qui pourrait vous préoccuper? Je n'accuse personne ici, mais il semble que le ministère préférerait oublier l'affaire plutôt que de faire des efforts pour arriver à une entente.

Beaucoup d'argent a été consacré à cela. Des fonds privés recueillis par les deux parties ont été utilisés pour réaliser cette initiative. Dans certains cas, il s'agit d'entités économiquement viables.

Est-ce que vous avez étudié le projet de loi S-14 en détail et dressé la liste de vos préoccupations d'ordre juridique?

M. Cracower: Comme je l'ai dit, il est évident que nous avons examiné le projet de loi S-14. Ce que nous vous présentons aujourd'hui, je le répète, c'est certaines des préoccupations d'ordre juridique. Il y a aussi des problèmes techniques que nous n'avons pas abordés et qui pourraient être réglés facilement à l'étape de la rédaction.

Pour ce qui est des questions importantes, oui, nous les avons mises sur la table.

Le sénateur St. Germain: En ce qui concerne l'aspect du financement dont vous avez parlé, pourquoi le financement normal qui s'applique actuellement aux bandes indiennes ne s'applique-t-il pas dans ce cas, c'est-à-dire aux négociations sur l'autonomie gouvernementale?

M. Dewar: Les Premières nations qui accepteront cette entente continueront d'avoir accès au financement normal du ministère et ce, selon les critères habituels de financement des programmes. Cependant, en adoptant l'autonomie gouvernementale, les Premières nations accepteront inévitablement de nouvelles fonctions tant sur le plan législatif qu'administratif. Inévitablement, les parties devront faire face à une augmentation des coûts.

Dans certains cas, les Premières nations auront les ressources. Cependant, pour la plupart d'entre elles, il faudra voir comment ces ententes pourront être rendues viables sur le plan économique afin qu'elles puissent exercer leurs compétences et assurer les programmes et les services dont elles auront la responsabilité en vertu des nouvelles ententes.

Le sénateur St. Germain: Là encore, il m'apparaît que vous dites une chose alors que le ministère fait le contraire. Quelqu'un a dit que la ministre s'était retirée des discussions en signe de protestation. Les parties doivent avoir la volonté de s'entendre. La demande a été faite. Je crois que le sénateur Tkachuk vous a demandé de préciser si les obstacles sont réels ou non.

Est-ce que vous cherchez à faire avancer les choses ou si vous tirez de votre côté? J'aimerais bien le savoir. Nous avons examiné le projet de loi. S'il renferme des questions qui sont tellement préoccupantes ou qui sont tellement énormes qu'elles doivent être abordées d'un point de vue juridique, alors très bien. Mais les parties sont-elles disposées à s'entendre et à ratifier une version finale qui serait acceptable pour le ministère?

Le ministère m'apparaît toujours très paternaliste là-dedans. Il dit vouloir donner le pouvoir à la collectivité mais en réalité, il ne lui permet pas d'établir ses propres lois pour régir les activités de ses membres. Je ne vous pose pas la question l'esprit tordu ou méchamment. Je vous pose la question afin que nous puissions aller de l'avant et, espérons-le, adopter ce projet de loi de façon ordonnée. Les bandes ont indiqué clairement qu'elles souhaitaient l'adoption de ce projet de loi.

Mme Catherine MacQuarrie, directrice, Direction des politiques sur les fonctions gouvernementales autochtones, Affaires indiennes et du Nord Canada: Honorables sénateurs, je suis un peu confuse. Lorsque vous nous demandez si les parties sont disposées à aller de l'avant, je ne suis pas sûre -- et je vous le demande bien honnêtement -- si vous faites référence à la situation dont a parlé tout à l'heure le sénateur Tkachuk concernant un groupe particulier de bandes qui veulent signer une entente, ou si vous parliez en général de trouver un mécanisme quelconque de mise en oeuvre d'une entente sur l'autonomie gouvernementale.

Le sénateur St. Germain: Est-ce qu'une mesure législative présentée par une bande en particulier, à l'extérieur des paramètres établis par le ministère, peut être adoptée ou si elle doit provenir du ministère qui exige d'être consulté? C'est la question que je vous pose. Les choses semblent s'arrêter après un moment.

Je suis de la Colombie-Britannique et je vois ce qui se passe chez nous. Les parties ont décidé d'aller de l'avant et tout va comme prévu, mais manifestement, le ministère s'est impliqué dès le tout début. Ici, y a-t-il résistance parce que le ministère n'a pas été impliqué dès le début? A-t-il lui-même créé l'impasse à laquelle nous semblons être arrivés? Je pense que la question est raisonnable. Je suis ici depuis assez longtemps pour savoir un peu comment les choses se passent.

Mme MacQuarrie: Compte tenu des circonstances particulières -- et il s'agit ici d'une instance judiciaire particulière qu'aborde le projet de loi -- il est très difficile de vous répondre par l'affirmative ou par la négative. Quand M. Dewar parle d'un nouveau départ dans tout le pays pour aborder des situations différentes, je dois dire que le ministère cherche véritablement à trouver des approches différentes. M. Dewar pourrait probablement vous parler plus en détail d'un groupe de négociation qui examine actuellement une loi-cadre en vertu de laquelle, après une certaine période, la Première nation intéressée serait en mesure d'assumer d'autres compétences.

La réponse générale à cette question est que, oui, nous sommes disposés à examiner divers types d'ententes. Certes, nous allons examiner celles proposées par les Premières nations, nous allons travailler avec elles de façon ouverte et franche pour en voir les bons côtés. Par contre, nous voulons aussi être francs au sujet des défis juridiques auxquels nous faisons face en ce qui concerne les liens entre les lois et l'application de la Charte.

Le sénateur Tkachuk: Nous avons parlé de responsabilités administratives et financières -- autrement dit, toutes ces choses qui normalement sont soulevées durant les négociations. Je ne comprends pas ce que vous essayez de me dire ni ce que vous essayez de dire au peuple indien. Si le projet de loi à l'étude était adopté ou légèrement amendé pour répondre à certaines des préoccupations soulevées, est-ce que vous êtes en train de me dire que les Indiens vivant dans la réserve de Sawridge ou l'une des huit autres bandes vont se précipiter pour faire adopter un projet de loi sur l'autonomie gouvernementale sans organiser cette autonomie, et que les hommes blancs devront faire le travail à leur place? Êtes-vous en train de me dire que ces gens-là n'établiront pas eux-mêmes ce dont ils ont besoin? Êtes-vous en train de me dire qu'ils n'adopteront pas la même démarche qu'on suivrait normalement lorsqu'on veut organiser une ville, ou un village? Qu'arrive-t-il si des autochtones de Banff, en Alberta, décident qu'ils veulent l'autonomie gouvernementale, qu'ils tiennent un référendum et qu'ils entreprennent toutes les négociations en ce sens? Pourquoi les Indiens ont-ils besoin que le ministère intervienne pour participer avec le gouvernement provincial aux négociations sur l'éducation? Pourquoi ces gens-là auraient-ils besoin du ministère des Affaires indiennes?

Je ne comprends pas le paternalisme dont vous faites preuve ici. Ou bien je n'ai pas toutes les données du problème, ou bien je vous ai mal comprise. Vous voulez faire tout le travail à leur place. Comme je l'ai dit au Sénat, les Indiens ne sont pas notre fardeau. Nous avons l'obligation fiduciaire de leur fournir un instrument pour qu'ils obtiennent l'autonomie gouvernementale. Et nous avons devant nous cet instrument que nous devrions tous tendre à faire adopter en toute diligence. Le peuple indien déterminera ce dont il a besoin. Il décidera de toutes ces questions, n'est-ce pas? Les Indiens ne vont pas se précipiter, ils ne vont pas tenir un référendum sans réfléchir à la question. Ils ne se lèveront pas un matin pour dire: «Il nous faut un référendum sur le projet de loi concernant l'autonomie gouvernementale, après quoi nous déciderons ce qui en est.» Ne croyez-vous pas qu'ils vont discuter de toutes ces questions auparavant? Ne pouvons-nous pas les laisser agir par eux-mêmes, bon sang? Pourquoi sommes-nous dans le portrait?

M. Dewar: Je ne crois pas que mon approche soit paternaliste. Nous disons que nous sommes disposés à conclure de nouvelles ententes, que cela nous intéresse, de nouvelles ententes qui ne découleront plus de la Loi sur les Indiens mais de nouvelles ententes sur l'autonomie gouvernementale. Nous voulons travailler avec les groupes autochtones pour négocier des instruments qui rendront cette réalité possible et viable.

Actuellement, nous participons à plus de 80 négociations dans tout le pays qui visent expressément cet objectif. Ce ne sont pas là des instruments de paternalisme que nous essayons d'imposer. Les parties présentent leurs propositions et leurs intérêts respectifs, et nous sommes à la recherche de solutions. À notre avis, pour ce qui est des approches et des instruments, nous croyons avoir obtenu certains succès.

Il n'est pas question ici de paternalisme et de vouloir tout faire. Comme je l'ai dit, nous cherchons à créer une nouvelle relation. Il y a au moins deux parties dans cette relation -- trois, constitutionnellement, avec les provinces -- et il est raisonnable que toutes expriment leurs attentes quant au fonctionnement de cette nouvelle entente.

Le sénateur Tkachuk: Neuf bandes -- d'après ce que vous dites -- veulent établir une relation d'autonomie gouvernementale.

Ces bandes-là pressentent la ministre qui, à ce qu'on me dit et à ce que je sache, n'est peut-être pas particulièrement intéressée par leur demande, même si on lui a fourni un modèle. Ces neuf bandes réussissent ensuite à amener un sénateur comme moi à déposer le projet de loi au Sénat parce qu'elles n'ont pas réussi à intéresser le gouvernement à leur cause. Réfléchissons à cette question. Je me suis impliqué, j'ai beaucoup appris, j'ai ensuite déposé le projet de loi au Sénat, je crois, il y a cinq ans, soit en 1994.

Le ministère des Affaires indiennes, la ministre et le gouvernement savent que ces neuf bandes veulent établir l'autonomie gouvernementale dans leurs réserves. Ils le savent. Pourtant, jamais personne ne m'a fait signe. Personne ne m'a écrit pour me dire: «Sénateur Tkachuk, nous pouvons y arriver directement, vous n'avez pas besoin de vous y intéresser.» Personne non plus n'a écrit aux neuf bandes pour leur dire: «Voici, vous avez beaucoup de travail à faire, la route sera longue. Mettons-nous à table et établissons cette relation, signons une entente.»

Fondamentalement, tout le travail était fait. Les bandes l'ont fait elles-mêmes. Je ne comprends pas.

Premièrement, vous me dites que vous voulez établir cette relation. Vous dites que vous voulez des modèles. Vous avez l'obligation de le faire, mais je n'ai jamais vu un seul modèle que vous ayez fourni, sauf des modèles individuels pour certaines bandes. Depuis le temps qu'on discute de cette question, et cela fait bien des années, il n'y a jamais eu de modèle d'autonomie gouvernementale.

Le président: Sénateur Tkachuk, vous allez trop loin.

Le sénateur Tkachuk: Je veux savoir pourquoi cette question n'a jamais été réglée par le ministère des Affaires indiennes et le gouvernement du Canada. Pourquoi n'a-t-on jamais répondu ni à moi, ni aux neuf bandes indiennes?

Ma question est raisonnable, n'est-ce pas, monsieur le président?

Le président: La question est raisonnable dans la mesure où vous ne faites pas la morale aux témoins.

Le sénateur Tkachuk: C'est le vieux professeur en moi qui parle. Si je vous ai fait la morale, je m'en excuse.

Pourrais-je avoir une réponse à cette question?

M. Dewar: Comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne connais pas les circonstances entourant les demandes de ces Premières nations qui voulaient soit négocier, soit mettre de l'avant ce projet précis d'autonomie gouvernementale. Je vais devoir prendre d'autres renseignements.

Le sénateur Gill: Sur la seule question des compétences, il semble que la situation ait évolué depuis 20 ou 30 ans. Sait-on aujourd'hui avec plus de certitude si le gouvernement fédéral a compétence sur ces Inuits et ces Indiens inscrits?

M. Al Broughton, avocat-conseil, Affaires indiennes et du Nord Canada: La réponse simple est oui. Le Parlement a compétence sur les Indiens et les terres réservées aux Indiens en vertu de l'article 91.24. En général, cela inclut les Inuits.

Le sénateur Gill: Et pour leur éducation? Est-ce la même chose? Le gouvernement fédéral a-t-il compétence sur l'éducation des Indiens et des Inuits? Je parle ici d'éducation, mais ça pourrait être n'importe quoi d'autre.

M. Cracower: En ce qui concerne l'éducation, comme j'ai essayé de le préciser tout à l'heure, le gouvernement a compétence en vertu de l'article 91.24, dont vous parlez, mais comme je l'ai aussi signalé, l'article 93 de la Constitution accorde aux provinces un pouvoir législatif exclusif en matière d'éducation. Par conséquent, certains pourront prétendre qu'il s'agit là de compétences communes. C'est pourquoi nous insistons sur l'importance qui existe de travailler en étroite collaboration avec les provinces pour s'assurer que la mise en oeuvre d'une loi de ce genre ne pose pas de problèmes de compétences qu'on ne puisse régler.

Le sénateur Gill: Il y a quelque temps, le gouvernement provincial utilisait cette prérogative pour empêcher le ministère des Affaires indiennes de conclure des ententes directement avec les Indiens. Le gouvernement provincial prétend qu'il s'agit de sa compétence et que le gouvernement fédéral doit le consulter avant de prendre quelque mesure que ce soit concernant l'éducation des Indiens.

J'imagine que les choses n'ont pas tellement changé depuis. Les questions de compétence sont très importantes. Nous parlons de transfert de responsabilités et d'autonomie gouvernementale, deux choses qui ont un impact sur les gens qui vivent à l'extérieur des réserves.

Actuellement, certaines négociations portent sur les Métis, les Indiens hors réserve et les Inuits. Tant qu'on ne saura pas clairement qui a compétence sur les gens et sur leurs activités, c'est eux qui vont en subir les conséquences. Cela est très important.

M. Dewar: La question des compétences est en général l'un des obstacles majeurs à la mise en place de l'autonomie gouvernementale. Nous voulons une entente qui reconnaisse que les Premières nations ont compétence sur leurs citoyens, du moins sur la réserve, et dans certains cas, à l'extérieur des réserves.

Personne ne s'entend sur la portée de l'article 91.24 et sur les pouvoirs que cette disposition confère au gouvernement fédéral. Certaines provinces sont peut-être très heureuses que le gouvernement fédéral exerce ce pouvoir en vertu l'article 91.24 de façon très large et qu'il adopte des lois pour les Premières nations dans une foule de domaines. Par contre, d'autres gouvernements provinciaux pourraient juger qu'une telle mesure empiète sur leurs compétences et s'opposeraient à de telles ententes.

Pendant des années, nous avons tenté de conclure de nouvelles ententes constitutionnelles qui reconnaissent l'autonomie gouvernementale. Nous savons quels problèmes se sont présentés. C'est pourquoi, lorsque la politique sur les droits inhérents a été annoncée en 1995, nous n'avons pas concentré le débat constitutionnel sur les articles 91.24 et 92, mais bien plutôt sur des ententes pratiques où toutes les parties -- les Premières nations, le gouvernement fédéral et les provinces -- s'entendent sur l'autorité qui a le droit d'adopter des lois et sur les lois qui auront préséance en cas de conflit entre deux lois.

On retrouve cela dans certaines ententes. Par exemple, dans le traité des Nishgas, la Première nation dispose d'un pouvoir discrétionnaire en matière d'éducation sur les terres qui lui appartiennent. Ses lois ont préséance en cas de conflit avec une loi fédérale ou provinciale. Les trois parties se sont entendues, donc, nous savons qu'il n'y aura pas de contestation judiciaire ou constitutionnelle. C'est l'objectif que nous visons dans les négociations sur l'autonomie gouvernementale. Pour ces raisons délicates, il est important que les gouvernements provinciaux, lorsque la chose est possible et qu'ils le souhaitent, soient aussi parties aux accords.

Le sénateur Gill: Ce transfert de responsabilités varie probablement d'une région à l'autre, mais pour ce qui est des budgets, dans quelle mesure peut-on parler de transfert de responsabilités? Les budgets ont toujours été administrés par le ministère des Affaires indiennes. Quel pourcentage de ces budgets est maintenant administré par les Premières nations elles-mêmes?

M. Dewar: D'après ce que je sais, environ 80 p. 100 du budget des programmes du ministère est maintenant géré directement par les Premières nations qui administrent les programmes et non par le personnel du ministère.

Le sénateur Gill: J'imagine alors que les gens ont fait la preuve qu'ils sont capables d'administrer leurs propres affaires. Il faut être très prudent ici, mais les gens ont fait leurs preuves. Bien sûr, il y a de mauvais gestionnaires, mais en général, les gens sont capables de gérer leurs affaires eux-mêmes. Parfois, il semble qu'on est trop prudents, qu'on essaie d'éviter toutes les erreurs. C'est ce que je pense.

Même si on a accordé ce niveau de gestion aux peuples autochtones, on a toujours de la difficulté à répondre à leurs besoins. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord doit répondre aux besoins des gens qu'il est censé servir, et il doit être autorisé par quelqu'un à ce faire. Je pense ici au ministre des Affaires indiennes et du Nord, au Parlement et à d'autres institutions. Comment pouvons-nous évaluer, dans la pratique, si les gens font un bon travail quand ceux qui reçoivent les services ne disent rien?

Que recommanderiez-vous à l'avenir pour nous assurer que les gens sont satisfaits et que nous ne répétions pas les erreurs du passé?

M. Dewar: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Le transfert des responsabilités s'est traduit par la constitution d'un énorme pouvoir administratif dans de nombreuses collectivités des Premières nations, mais il faut maintenant passer à la prochaine étape, c'est-à-dire appuyer la constitution d'un pouvoir de gestion. Certaines collectivités y sont parvenues, d'autres ont encore du travail à faire.

Les bandes reconnues par la Loi sur les Indiens ont essentiellement atrophié le développement de systèmes de fonctions gouvernementales qui étaient généralement conçus pour l'administration au niveau local. Manifestement, certaines Premières nations ont largement outrepassé leurs pouvoirs. Souvent, lorsque nous transférons des responsabilités pour l'administration des programmes, nous y associons des pouvoirs administratifs mais pas des pouvoirs de gestion. Nous n'avons pas modernisé les règles électorales et les régimes de responsabilité de ces administrations. Nous n'avons pas encouragé les Premières nations à restructurer leurs administrations, à y intégrer leurs systèmes traditionnels de responsabilité.

La raison pour laquelle nous croyons que l'autonomie gouvernementale est si importante, c'est que ces gouvernements doivent être responsables à l'endroit de leurs peuples. Ce sont leurs peuples qui décident si les programmes et les services sont administrés de façon adéquate, s'ils répondent à leurs besoins, et ils peuvent tenir leurs gouvernements responsables. C'est vraiment l'orientation que nous souhaitons appuyer.

Le sénateur Gill: Seriez-vous plus à l'aise d'être comptable dans une société qu'au ministère? Avec le transfert des responsabilités, la plupart des programmes seront un jour gérés par les peuples autochtones.

Le sénateur Pearson: Ce que je comprends de la relation de «fiduciaire», c'est que le gouvernement fédéral est responsable de tous les peuples autochtones, qu'ils soient ou non membres de conseils de bande. Est-ce exact?

M. Broughton: Il est clair que la relation de fiduciaire est une relation établie entre le gouvernement fédéral et tous les peuples autochtones. Comme nous l'avons déjà dit, les obligations fiduciaires sont un peu différentes, mais la relation de fiduciaire, c'est une relation avec les peuples autochtones.

Le sénateur Pearson: Dans nos discussions, ici, au sujet de l'exercice des pouvoirs par les autochtones, certains ont parlé de responsabilité, de démocratie et d'égalité. Certaines dispositions du projet de loi S-14 concernant la question de la responsabilité m'inquiètent, comme d'autres dispositions également, parce que certaines de ces questions sont liées.

Ai-je raison de dire que le paragraphe 19(1) du projet de loi S-14 permet à la Première nation qui opte pour ce régime d'aliéner ou de grever d'une sûreté ses terres, et que les dispositions sur la cession prévues par la Loi sur les Indiens ne s'appliquent plus?

M. Dewar: C'est exact.

Le président: Vous en êtes bien certain? La réponse est-elle un «oui» ferme?

Le sénateur Pearson: La disposition stipule que la Première nation a «... le pouvoir plein et exclusif qui lui est dévolu d'aliéner ou de grever d'une sûreté ses terres et les droits afférents...», et cetera. Vous nous avez dit que selon vous, une fois que la Première nation accepte l'autonomie gouvernementale, elle aura le pouvoir d'aliéner ses terres, de les grever d'une sûreté, de les vendre ou d'en disposer à sa guise.

Ensuite, on dit: «La Première nation ne peut exercer qu'en conformité avec sa Constitution et ses lois le pouvoir plein et exclusif.» La Constitution, d'après ce que je comprends, telle qu'on l'explique à l'annexe I en page 23, est établie par les électeurs. Et un «électeur» est une personne qui vit sur les terres et qui est âgée de 21 ans ou plus. J'ai déjà fait part de ma préoccupation concernant cette dernière nécessité.

Des témoins nous ont dit que certaines personnes qui sont devenues membres, particulièrement en vertu du projet de loi S-31, ne seront pas des électeurs. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Broughton: Je ne peux pas vous parler des détails précis concernant l'appartenance à une Première nation. En vertu de la Loi sur les Indiens, les Premières nations peuvent ou non contrôler les questions d'adhésion. Si tel est le cas, le gouvernement fédéral n'a rien à dire. Si une Première nation n'assume pas ce degré de contrôle, alors, être membre d'une Première nation signifie être inscrit en vertu de la Loi sur les Indiens, et alors là il y a un contrôle d'exercé.

Pour répondre simplement à votre question, même la description de résidence à l'alinéa a) de la définition «d'électeur» exclurait fort probablement certains membres de la Première nation.

Le sénateur Pearson: Je crois que les gens n'auront rien à dire sur la façon dont les terres qui devraient leur appartenir seront aliénées parce qu'ils ne seront pas considérés comme des électeurs, et cela me gêne.

Le sénateur Tkachuk: Pourriez-nous nous expliquer les alinéas 4(2)a) et b)?

M. Broughton: Je ne suis pas certain de pouvoir vous donner une interprétation précise. Je crois que cette disposition signifie que pour voter sur une proposition -- c'est-à-dire lorsque vient le temps de voter si oui ou non les Premières nations optent pour l'application du projet de loi -- ceux qui ont droit de vote seront ceux qui ont droit de vote pour choisir l'organe exécutif de la collectivité. En vertu de la Loi sur les Indiens, je présume que cela voudrait dire le conseil de bande.

L'alinéa b) ajoute que les personnes seront habilitées à voter au référendum si elles sont reconnues par la majorité des personnes visées à l'alinéa a). C'est ce que je comprends, mais je ne suis pas certain que ce soit le meilleur moment et le meilleur endroit pour vous donner une interprétation précise des dispositions du projet de loi.

Le sénateur Tkachuk: Je comprends. Je me disais que ce serait peut-être une bonne idée si vous pouviez le lire et nous donner certaines réponses.

Le sénateur Pearson: Les témoins pourraient peut-être revenir ultérieurement et clarifier cette question pour nous. J'ai passé en détail les diverses dispositions du projet de loi. Il m'apparaît que le seuil ne soit pas suffisamment élevé pour ce qui est de l'aliénation de terres ou de biens qui appartiennent aux Premières nations. Certaines personnes seront désavantagées et n'auront rien à dire. Je n'en suis pas certaine. Si vous ne pouvez nous donner de réponse maintenant, j'aimerais que vous examiniez la question et que vous nous reveniez là-dessus ultérieurement.

M. Dewar: Faire en sorte que la transition du régime actuel à un nouveau régime se fasse dans la légitimité pour toutes les personnes visées constitue un défi de taille tant pour les Premières nations que pour le gouvernement fédéral. Le processus de ratification permettant de passer d'un régime à un autre peut avoir un impact sur les droits des gens ou sur leurs droits aux terres ou aux actifs qui sont dans les réserves, sur leurs droits politiques au sein de la collectivité, ou même sur leur appartenance à la collectivité, selon la façon dont les accords sont conçus -- et je ne parle pas ici du projet de loi que vous étudiez aujourd'hui.

Ce processus d'approbation est un élément clé pour assurer la transition vers un nouveau régime d'autonomie gouvernementale. Il comporte plein de défis pour les Premières nations qui doivent aborder la question de la légitimité de la Loi sur les Indiens et des règles d'appartenance établies en vertu de cette loi, les effets du projet de loi C-31 et les différences dans la collectivité quant à savoir qui est membre légitime et qui devrait avoir son mot à dire dans certains processus. Plein de défis se posent également au gouvernement canadien. Nous savons que les tribunaux sont actuellement saisis d'affaires portant sur les droits des citoyens à l'extérieur des réserves. Il y a aussi les questions relatives à la Charte pour savoir si tous les citoyens visés par l'entente ont été traités de façon équitable ou s'ils ont été victimes de discrimination.

Il n'y a pas de solutions faciles. Elles se trouvent de bien des façons. Le défi est entier pour les deux parties.

Le sénateur Pearson: C'est ce que nous ont dit clairement les témoins qui ont comparu devant nous.

Aux articles 19 à 26 concernant la responsabilité, le terme «électeur» est le terme clé. Vous pouvez consulter les livres si vous êtes électeur, mais pas si vous êtes simplement un membre de bande. Voilà ce qui me préoccupe. Je crains que ces dispositions ne respectent pas les droits de toutes les personnes intéressées.

Le sénateur Chalifoux: Je me suis souvent posé la question au sujet de l'autonomie gouvernementale. Si le projet de loi à l'étude est adopté, le ministère des Affaires indiennes pourra-t-il se retirer du financement des programmes ou de tout autre financement? En ce qui concerne les accords financiers, le ministère abandonne-t-il ses responsabilités? De même, quel effet le projet de loi aura-t-il sur les programmes et la situation financière des gens dans les collectivités?

M. Dewar: Bien honnêtement, je ne crois pas que l'on ait fait l'analyse permettant de répondre à cette question. Je pense que les Premières nations continueraient d'avoir accès aux programmes fédéraux, mais nous n'avons pas fait l'analyse nécessaire pour vous donner une réponse précise quant à savoir si le projet de loi aurait un impact sur l'admissibilité à certains programmes.

Le sénateur Chalifoux: Autrement dit, même si une Première nation n'est plus assujettie à la Loi sur les Indiens, elle sera toujours sous la responsabilité des Affaires indiennes en ce qui concerne ses programmes. Est-ce bien ce que vous dites?

M. Dewar: La majeure partie du financement de nos programmes ne découle pas de dispositions précises de la Loi sur les Indiens. Nous finançons des programmes pour divers services. Et ces services sont offerts aux Premières nations qui sont des bandes en vertu de la Loi sur les Indiens. Je ne sais pas si une bande qui signerait cette nouvelle entente serait admissible ou si nous devrions changer nos critères de financement des programmes.

Le sénateur Chalifoux: En vertu de la Loi sur les Indiens, le gouvernement est responsable de l'éducation, des services médicaux; le gouvernement doit veiller à tous les besoins des gens dans une réserve. Si les bandes décident de se soustraire à la Loi sur les Indiens, cela les empêchera effectivement d'avoir accès à ces services parce que c'est ce qui est prévu dans la loi. Si elles se retirent, qu'adviendra-t-il?

M. Dewar: C'est pourquoi nous estimons que toutes les parties auraient intérêt à clarifier quelles ententes concernant le financement des programmes implique la nouvelle autonomie gouvernementale. On devrait préciser à l'avance dans quelle mesure le gouvernement fédéral doit apporter des changements à ces règles pour appuyer ces changements.

M. Cracower: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, est-ce que la répartition des fonds se fait selon des critères administratifs ou juridiques? Par exemple, s'il y a un droit conféré par un traité, il s'ensuivrait alors que nous avons l'obligation de continuer de prendre des dispositions. On devrait procéder au cas par cas.

Le sénateur Chalifoux: Devriez-vous alors inclure les traités signés avec les Premières nations?

M. Cracower: Peut-être.

Le sénateur Chalifoux: J'ai une petite-fille qui est née dans une bande à Hobbema. Comme sa mère est morte et qu'elle ne vivait pas sur la réserve -- elle vivait avec moi -- je n'ai pas eu droit à quelque crédit que ce soit pour son éducation, même les premières années.

Il semble que le ministère des Affaires indiennes ait décidé de commencer à céder ses obligations aux Premières nations. L'adoption de ce projet de loi en témoignera-t-elle?

Le sénateur Adams: Est-ce que le projet de loi S-14 renferme des mesures pour ces neuf bandes à l'avenir? Que se passera-t-il? Ces gens-là auront peut-être une industrie pétrolière, gazière et forestière. Je ne sais pas ce qui en est des mines. Qu'arrive-t-il s'ils adoptent l'autonomie gouvernementale et que tout à coup, leur économie s'effondre? S'ils laissent tomber le traité, deviendront-ils simplement des citoyens canadiens? Il arrive parfois que les réserves pétrolières et gazières se tarissent. Si rien d'autre n'est offert à ces collectivités, leur avenir est réduit à néant. Elles vont toujours être propriétaires des terres, mais que leur arrivera-t-il?

Le Nunavut est peut-être un peu différent. Si l'industrie minière s'établit là-bas, ce sera bon pour l'économie.

Je ne connais pas exactement l'étendue des terres que possèdent ces neuf bandes, mais qu'arrivera-t-il dans 50 ou 100 ans? L'économie sera peut-être en expansion, mais qu'arrivera-t-il si elle s'effondre?

M. Dewar: J'ai peut-être utilisé le terme «viable» à plusieurs reprises dans mon témoignage. C'est peut-être simplement une question d'habitude. Cependant, l'un des objectifs de l'autonomie gouvernementale est d'en arriver à une nouvelle relation financière. Beaucoup de Premières nations ont dit qu'avant d'assumer les compétences et les responsabilités qui les accompagnent, soit assurer les programmes et les services, elles veulent changer le type actuel de mécanismes de provisionnement. Elles veulent l'assurance qu'elles auront, au cours des années, les ressources nécessaires pour offrir des programmes et des services à leurs citoyens qui soient de niveau comparable à ceux offerts aux autres Canadiens. Cela est vrai. Elles veulent cette assurance, peu importe que la situation économique soit bonne ou mauvaise. Si elles ont leurs propres ressources, elles vont les utiliser pour le bien-être des leurs. Cependant, elles veulent aussi l'assurance que si elles se soustraient à l'application de la Loi sur les Indiens et qu'elles assument les responsabilités de la prestation des services à leurs citoyens, elles peuvent compter sur les transferts fédéraux ou provinciaux dans les périodes difficiles pour leur permettre d'offrir des programmes et des services comparables.

Dans les négociations financières à l'échelle nationale et les mécanismes qui sont prévus dans les premières ententes sur l'autonomie gouvernementale, vous verrez qu'on y parle de péréquation comme c'est le cas dans les ententes fédérales- provinciales qui commencent à voir le jour, on parle de l'assurance de négocier des transferts pour permettre la prestation de programmes et de services. C'est ainsi que l'on tente d'aborder la question dans les ententes qui nous sont actuellement soumises.

Le sénateur Andreychuk: Mes questions concernent la façon normale de procéder au Sénat lorsque des projets de loi nous sont renvoyés par l'autre endroit. En ce qui concerne le projet de loi S-14, je ne veux pas savoir quelles sont les considérations de principes qui entrent en jeu ou la façon de les aborder. Je veux savoir si le gouvernement estime que ce projet de loi est constitutionnel. Sinon, quelles dispositions ne le sont pas? La Charte des droits et libertés s'applique-t-elle? Sinon, j'aimerais savoir pourquoi. J'aimerais aussi savoir quelles sont les autres dispositions que vous estimez ou non être légalement constitutionnelles. Plutôt que de connaître les questions de principes, je veux connaître les points de vue pratiques. Si le projet de loi émane de la Chambre des communes ou du Sénat, sera-t-il conforme à nos lois? Je crois savoir que ces choses gênent le gouvernement, mais j'aimerais avoir une opinion juridique d'un représentant du gouvernement quant à savoir si le projet de loi est conforme à la Constitution.

Deuxièmement, j'aimerais savoir s'il y a des questions dans ce projet de loi qui, à votre avis, ne sont pas réalisables sur le plan administratif, non pas parce qu'elles n'ont pas été négociées ou qu'on n'y a pas réfléchi, mais je veux savoir si vous croyez qu'elles sont pratiques ou non. Par exemple, dans la Loi sur le Nunavut, est-ce qu'il y a des choses qui ont été négociées mais qui, à votre avis, peuvent être applicables avec le temps, à ce moment-là la date de mise en oeuvre devrait être reportée. Autrement, nous devons nous en remettre à nos propres décisions judiciaires, et je ne suis pas certaine de vouloir faire cela. Je veux connaître le point de vue d'un représentant du gouvernement et savoir si le projet de loi est conforme ou s'il pourrait être contesté.

Il devait s'agit d'une mesure législative générique, mais il semble que l'on parle en réalité de neuf bandes. Dans quelle mesure le projet de loi entre-t-il en conflit avec le droit coutumier des neuf bandes ou avec la Loi sur les Indiens sur laquelle on s'est basé? Quels en sont les avantages?

Plusieurs approches sont possibles, mais je ne vois pas d'approche systématique, d'après ce que vous nous avez dit aujourd'hui. J'aimerais d'abord avoir un point de vue juridique et ensuite un point de vue administratif.

Ma dernière question est la suivante: croyez-vous que le projet de loi porte sur la dévolution ou la délégation de pouvoirs? Transfère-t-il des pouvoirs, et dans ce cas il s'agira alors d'un modèle d'autonomie gouvernementale, ou délègue-t-il des pouvoirs qui sont maintenant exercés par le gouvernement fédéral? Je me souviens que Mme Twinn, dans l'un de ses premiers mémoires, a dit qu'il ne s'agissait pas entièrement d'un projet de loi sur l'autonomie gouvernementale et qu'il permettait aux bandes indiennes de prendre des décisions pour elles-mêmes sans se reporter à la Loi sur les Indiens. Qu'elles voulaient que ces pouvoirs leur soient délégués. Il y a eu une discussion sur la possibilité pour elles d'exercer ces pouvoirs comme le font les municipalités, pourtant, je vois des choses ici qui sont plus qu'une délégation de pouvoirs, ce sont des transferts de pouvoirs.

Je ne sais pas si vous pouvez répondre à mes questions aujourd'hui. J'aimerais que l'on examine le projet de loi article par article.

M. Cracower: Nous pouvons faire des commentaires. Je ne suis pas certain que nous pouvons vous donner une opinion en tant qu'avocats du ministère de la Justice. Il s'agit d'une question technique.

Le sénateur Andreychuk: Si vous ne donnez pas d'opinion, alors sur quoi pouvez-vous vous baser pour contester certaines des hypothèses? Le projet de loi vous cause certaines difficultés. Sur quelle base contestez-vous les hypothèses si vous n'êtes pas capables de l'analyser?

M. Cracower: En ce qui concerne le mandat confié au ministère de la Justice concernant la Loi sur le ministère de la Justice, quant à savoir également si nous avons la capacité de le faire, je ne dis pas que nous ne le ferions pas si, en fait, nous en avions les moyens.

Le sénateur Andreychuk: Savez-vous si le ministère de la Justice a déjà fait l'analyse? Je m'adresse au gouvernement, mais tout à coup, vous me parlez du point de vue du ministère. Cela veut-il dire que nous devons demander au ministre de la Justice de faire le genre d'analyse que l'on obtient normalement pour un projet de loi afin d'être sûr qu'il est conforme à la Charte des droits et libertés et aux responsabilités fiduciaires, et cetera?

M. Broughton: Je dois vous répondre de deux façons. Premièrement, je ne crois pas que nous soyons en mesure de faire cette analyse ici même, aujourd'hui. Deuxièmement, M. Cracower a dit que normalement, notre ministère n'offre pas d'opinion à des comités parlementaires. Cela nous cause un problème.

Le sénateur Andreychuk: Si le projet de loi était adopté dans sa forme actuelle, quelles seraient les dispositions que vous contesteriez? Puis-je résumer en disant que certains éléments de la mise en oeuvre n'ont pas été négociés et que vous commenceriez, une fois le projet de loi en vigueur, par établir les modalités pratiques de la mise en oeuvre? Est-ce bien cela?

M. Cracower: J'ai parlé tout à l'heure de certaines préoccupations d'ordre juridique concernant les liens entre la loi et les questions d'importance nationale comme la paix, l'ordre et le bon gouvernement. Ces questions sont troublantes pour nous en ce qui a trait à leur certitude et à leurs effets. Si le projet de loi était mis en oeuvre, quelles seraient les contestations judiciaires?

Le sénateur Andreychuk: Pourtant, vous ne pouvez pas me dire aujourd'hui s'il y aurait ou non des contestations devant les tribunaux. Le gouvernement a adopté le Fond des bourses du millénaire et les provinces s'y sont opposées en disant qu'elles n'en avaient pas discuté, qu'elles n'avaient rien négocié. Les négociations ont dû se faire après coup. Certains diront que ce n'est peut-être pas la façon souhaitable de procéder, mais personne n'a contesté la validité de la loi.

Dans ce cas, vous dites qu'il serait souhaitable de négocier certaines de ces questions. Je suis d'accord avec vous qu'il serait peut-être préférable de connaître ces choses-là à l'avance, mais cela amoindrit-il la crédibilité de la loi ou la rend-il plus difficilement applicable?

M. Cracower: Tout ce que je peux vous dire, c'est que le Parlement est l'autorité suprême et qu'il peut adopter les lois qu'il veut. Quant à savoir si une loi est constitutionnelle ou pas, c'est un autre problème.

Le sénateur Andreychuk: C'est ce que je veux savoir. Est-ce que le projet de loi est constitutionnel? Les choses qui me préoccupent au sujet de la Constitution sont-elles protégées dans cette loi? Je veux avoir votre avis. Vous dites que vous ne pouvez pas me le donner.

Je vais résumer ce que vous dites. Vous auriez préféré une solution négociée à une loi du Parlement. Cela vous simplifierait la vie et vous croyez que ce serait plus sûr pour les autochtones et les non-autochtones. Ce qui m'amène à penser que nous avons besoin de l'intervention de la ministre. Je sais que M. Irwin et moi connaissons certaines pistes qu'il a laissées dans la négociation. J'aimerais savoir si la position de la ministre actuelle est la même que celle de M. Irwin. Est-elle disposée à s'asseoir et à négocier certaines de ces questions en se servant du projet de loi comme document-cadre?

Je crois que j'ai répondu à mes propres questions.

Le sénateur Tkachuk: J'ai des questions précises concernant des réserves que vous avez énoncées dans la présentation initiale. Vous pouvez y répondre maintenant ou m'écrire plus tard; cela n'a pas d'importance.

Certaines préoccupations ont été soulevées au sujet des pouvoirs extraterritoriaux et des compétences administratives, par exemple en ce qui concerne les programmes de santé et d'éducation. Comment avez-vous réglé le problème avec la Bande indienne de Sechelt ou du Yukon? Je crois que les deux ont des pouvoirs extraterritoriaux et ont conclu des ententes administratives en matière d'éducation, de soins de santé, et cetera, n'est-ce pas? J'inclus la Loi sur les Indiens dans ma question.

M. Dewar: Je ne sais pas exactement comment le problème de l'extraterritorialité a été réglé dans ces ententes. Je vais vous donner une réponse plus précise plus tard.

En ce qui concerne les membres de la Bande de Sechelt vivant à l'extérieur de la réserve, je sais que la province a envisagé des ententes concernant le district municipal de Sechelt qui vont au-delà des limites de la Loi sur les Indiens. Il y a eu coordination.

La mise en oeuvre des accords sur l'autonomie gouvernementale du Yukon, qui assurent effectivement compétence sur les membres des Premières nations au Yukon, n'est pas tellement avancée. Il y a des problèmes de protocoles entre les Premières nations et le gouvernement territorial quant aux aspects pratiques de la mise en oeuvre.

Je répète, je ne connais pas suffisamment les détails pour répondre à votre question aujourd'hui, nous y répondrons donc par écrit.

Le sénateur Tkachuk: L'autre question concerne, plus particulièrement, des lois de compétence qui peuvent causer des conflits avec les provinces dans les réserves. Le ministère a-t-il consulté les provinces lorsqu'il a modifié la Loi sur les Indiens en 1985 pour élargir le pouvoir des bandes indiennes d'adopter des lois dans des domaines de compétence provinciale? Cela a-t-il causé beaucoup de problèmes? Y a-t-il eu des consultations?

M. Broughton: À ce que je sache, il n'y a pas eu de consultations, mais je ne connais pas très bien le processus. Je ne sais pas non plus si la Loi sur les Indiens prévoyait l'application extraterritoriale de lois.

Le sénateur Tkachuk: La Loi sur les Indiens a été modifiée en 1985 pour élargir le pouvoir des bandes indiennes d'adopter des lois dans des domaines de compétence provinciale. Les provinces n'ont pas été consultées. Je me trompe peut-être et c'est pourquoi je vous pose la question.

M. Broughton: À ce que je sache, il n'y a pas eu de consultations.

Le sénateur Tkachuk: Cela n'a-t-il pas causé beaucoup de problèmes? Lorsqu'elles adoptent ces lois, les bandes indiennes sont-elles capables de régler les problèmes avec les provinces?

M. Broughton: Je ne sais pas comment les choses se sont passées.

Le sénateur Tkachuk: Au sujet de l'autonomie gouvernementale, nous avons entendu les témoins du Congrès des Peuples autochtones le 10 février 1999. M. Richard Long, qui témoignait, était contre le projet de loi S-14. En fait, il a passé la majeure partie de son temps à parler du projet de loi S-14. Il a dit qu'il avait ramassé 418 000 dollars pour s'opposer aux Twinn. Je crois qu'ils sont financés par le ministère des Affaires indiennes, n'est-ce pas? Ils étaient de l'Alberta, je pense, et représentaient le Congrès des Peuples autochtones. Pouvez-vous me dire combien d'argent ils ont reçu?

M. Dewar: À ce que je sache, nous ne finançons pas le Congrès des Peuples autochtones. Je crois que le financement leur vient du Patrimoine canadien et, dans une certaine mesure, du Conseil privé. Je n'en sais vraiment rien.

Le sénateur Tkachuk: Le gouvernement fédéral finance le congrès.

M. Dewar: Vous voulez savoir combien d'argent le gouvernement fédéral verse au Congrès des Peuples autochtones?

Le sénateur Tkachuk: Oui, et qui le congrès représente. Qui sont ses membres et combien sont-ils?

L'une des préoccupations que vous avez soulevées concerne la compétence législative des provinces et du gouvernement fédéral. Vous nous dites que ces problèmes ne sont pas réglés. Pourriez-vous nous dire en quoi cela se compare aux liens qui existent entre les compétences législatives du Yukon? Pouvez-vous nous donner un aperçu de la Loi sur le Yukon à cet égard? Comment cette loi aborde-t-elle le problème? N'est-ce pas exactement la même chose que le projet de loi S-14?

M. Dewar: Je ne peux répondre en détail à toutes les questions concernant la Loi sur le Yukon, mais je vous donnerai une réponse générale et peut-être que je vous fournirai plus tard d'autres détails.

D'après ce que je comprends, la loi sur l'autonomie gouvernementale établit certaines compétences, j'entends par là des pouvoirs d'adopter des lois pour les gouvernements des Premières nations dans divers domaines. Elle renferme aussi certaines dispositions sur la résolution de conflits et le caractère primordial des lois. Cependant, certaines questions n'ont pas encore été négociées. Elles n'ont pas été finalisées dans tous les cas.

En ce qui concerne les lois territoriales, ce que je comprends, c'est que lorsqu'une Première nation adopte une loi, la loi territoriale cessera d'avoir effet ou de s'appliquer à la Première nation. C'est dire que c'est la loi de la Première nation qui a préséance sur la loi territoriale. Cette entente a été négociée dans le cadre d'un accord tripartite impliquant le gouvernement territorial. Toutes les parties ont convenu que c'étaient là les règles qu'elles étaient disposées à respecter. Elles ont examiné les conséquences de leur décision.

Le sénateur Tkachuk: Vous pourriez peut-être proposer certains amendements au projet de loi qui le rendraient plus acceptable compte tenu que vous y avez opposé certaines objections. Cela nous serait utile.

Les programmes et les services nous préoccupent. Pourriez-vous nous donner une ventilation de certains programmes et services actuellement offerts par le gouvernement fédéral, les diviser en deux catégories, c'est-à-dire ceux qui reposent sur des politiques et ceux qui relèvent d'obligations découlant des traités?

Pour ce qui est de l'éducation, pourriez-vous répartir les fonds fédéraux qui sont accordés aux Indiens qui vivent dans des réserves et hors des réserves comparativement au financement global? Je pense que nous dépensons probablement plus d'argent pour l'éducation des Indiens à l'extérieur des réserves que pour ceux qui sont dans les réserves.

M. Cracower: Je vous renvoie à ce que j'ai dit tout à l'heure à Le sénateur Andreychuk quant à savoir si nous pouvons ou non vous proposer des dispositions précises mais de façon différente. Si nous en avons la capacité, nous le ferons certainement.

Le sénateur St. Germain: Est-ce qu'il y a des mesures que nous devrions prendre qui vous faciliteraient le travail? Devrions-nous demander la présence de la ministre? Ma question est la même que celle de sénateur Andreychuk et du sénateur Tkachuk. Que devons-nous faire si votre ministère ne peut pas répondre à nos questions? Pouvez-vous nous dire ce que vous aimeriez que nous fassions qui faciliterait le travail de votre ministère pour répondre à notre demande.

M. Dewar: On nous a posé aujourd'hui un certain nombre de questions qui demandent un suivi. Nous avons pris note de ces questions. C'est la première fois que je comparais devant un comité. Je ne sais pas quel protocole il faut respecter concernant le suivi à faire. Comment procède-t-on normalement pour faire un suivi?

Le président: Je crois que le ministère de la Justice ne donne pas d'avis juridiques ou de conseils sur des projets de loi qui n'émanent pas du gouvernement. Vous pouvez communiquer avec le légiste du Sénat et envoyer vos réponses au greffier de notre comité. Je pense que c'est la procédure à suivre.

Le sénateur Andreychuk: Nous savons comment on a toujours procédé. Je comprends pourquoi les ministères ne veulent pas donner d'opinions sur des projets de loi qui ne viennent pas d'eux. Je pense qu'on a ici un petit dilemme. Si on nous répond en disant que non, nous avons notre politique, et nous devons la respecter. J'aimerais que quelqu'un entreprenne une discussion au ministère et nous fasse rapport pour nous dire que non, c'est toujours le cas, la Justice, et par conséquent d'autres ministères, ne critiqueront pas des projets de loi qui ne proviennent pas du gouvernement.

Le sénateur Chalifoux: L'article 30 porte sur la Loi canadienne sur les droits de la personne. On y dit ceci:

La Loi canadienne sur les droits de la personne ne s'applique pas aux actes accomplis sous le régime de la présente loi.

Pourriez-vous examiner cette disposition pour savoir si elle est contraire à la loi? Après tout, nous sommes tous citoyens canadiens. Je sais que maintenant, en vertu de la Loi sur les Indiens, cela ne s'applique pas. C'est là une forme de discrimination qui devrait être corrigée.

Le paragraphe 32(1) dispose ceci:

Sauf disposition contraire de la présente loi, ni les dispositions de la Loi sur les Indiens ou de toute autre loi spécifiquement applicables aux Indiens ou à une bande, tribu ou nation indienne, ni les règlements pris sous leur régime, ne s'appliquent à la Première nation, à ses citoyens, à ses terres, à ses fonds ou à ses biens.

Est-ce que cette disposition dit que le ministère des Affaires indiennes n'est pas tenu de leur fournir du financement?

Je ne vous demande pas de répondre maintenant, mais j'aimerais que vous examiniez la question et que vous fassiez parvenir votre réponse au greffier qui nous la transmettra.

Le sénateur Tkachuk: De plus, la Loi canadienne sur les droits de la personne ne s'applique pas à une mesure prise en vertu du projet de loi parce qu'actuellement, la même chose est prévue dans la Loi sur les Indiens. Cependant, si le gouvernement du Canada décidait de modifier la Loi sur les Indiens pour déterminer que les Premières nations seront assujetties à la Charte des droits et libertés, il serait simple de changer cette partie du projet de loi également.

Le sénateur St. Germain: Ai-je raison de dire que le ministère de la Justice et le MAINC feront rapport au greffier quant à savoir s'ils peuvent proposer des amendements au projet de loi pour le rendre conforme à la Constitution et à la loi?

Le sénateur Tkachuk: Nous n'avons pas de problème constitutionnel, ni de problème d'ordre juridique. Vous n'aimez tout simplement pas certaines parties du projet de loi.

Le sénateur St. Germain: Ce n'est pas ce qu'ils ont dit.

Le sénateur Tkachuk: J'ai déjà entendu un de leurs témoignages et ils n'ont jamais parlé de problème constitutionnel.

Le sénateur Mahovlich: La partie dont a parlé le sénateur Chalifoux pourrait être inconstitutionnelle.

Le sénateur Tkachuk: Cette disposition se trouve dans la Loi sur les Indiens.

Le sénateur Mahovlich: Nous contestons cela aussi.

Le sénateur Tkachuk: Cela changerait automatiquement les choses. Il s'agit d'un projet de loi du Parlement. Ce n'est pas quelque chose qui ne peut pas être changé par le Parlement. Si c'était modifié dans la Loi sur les Indiens, ça serait changé ici, n'est-ce pas?

M. Cracower: Vous avez posé plusieurs questions. J'aimerais peut-être répéter que mes commentaires ont permis essentiellement de mettre en lumière, en partie, les commentaires que mon collègue a faits ici il y a deux ans. Essentiellement, nous avons dit qu'il y a des problèmes, qui seraient peut-être d'ordre constitutionnel, ce qui veut dire qu'ils pourraient être contestés devant les tribunaux et peut-être considérés comme ultra vires.

Le sénateur Tkachuk: Toute loi peut être contestée devant les tribunaux. On ne peut jamais garantir qu'une loi ne sera pas contestée devant les tribunaux d'une façon ou d'une autre.

M. Cracower: Je croyais que vous aviez dit qu'il s'agissait d'une question de politique de notre part qui nous permettait de venir témoigner devant vous et de soulever certaines préoccupations. Moi je dis que cela va au-delà de la politique.

Le président: Je crois comprendre que les témoins ne sont pas certains quant à leurs responsabilités en ce qui concerne l'information demandée. Ils comparaîtront à nouveau devant nous pour nous donner cette réponse. Nous allons peut-être devoir demander aux représentants des Affaires indiennes et du Nord et de la Justice de revenir et de clarifier certaines questions auxquelles on n'aura pas répondu clairement.

Et notre greffier pourra recevoir toute information écrite que vous aurez, si vous ne jugez pas que ce n'est pas de votre responsabilité. On pourra aussi demander à notre personnel juridique au Sénat d'examiner les questions qui ont été soulevées par les sénateurs.

Le sénateur Pearson: Vous pourriez convoquer un expert constitutionnel comme témoin.

Le président: C'est exact. Je me demande s'il sera nécessaire d'entendre à nouveau les témoins que nous avons reçus il y a deux ou trois semaines, ou si nous devrions nous concentrer sur les représentants du ministère de la Justice et des Affaires indiennes et du Nord pour l'instant?

Le sénateur Tkachuk: Je crois qu'il est important que les promoteurs du projet de loi, dont je suis, aient la possibilité de répondre à certaines des questions soulevées aujourd'hui sur divers sujets d'importance. Nous y répondrons par écrit. Ensuite, j'aimerais avoir la possibilité de répondre aux questions qui restent en suspens. Comme il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, je pense que je devrais avoir une dernière chance pour me défendre, et je demanderai peut-être de l'aide pour le faire parce que je n'ai pas eu l'aide d'un ministère pour rédiger le projet de loi. On pourrait ensuite poursuivre notre étude. Il n'y aura peut-être pas de questions en suspens. Vous serez peut-être d'accord. Cependant, je ne veux pas fermer la porte à cette possibilité.

Le sénateur St. Germain: Petite clarification, après le témoignage que vous avez donné aujourd'hui, ce dont vous vous êtes bien acquittés et je vous en remercie d'ailleurs, pourquoi n'auriez-vous pas la permission de préparer des amendements que vous recommanderiez au projet de loi dans sa forme actuelle?

Le président: Honorables sénateurs, pourquoi ne reporterions-nous pas cette question? Je ne crois pas que nous obtiendrons d'autres réponses que celles qu'on a déjà reçues. Je ne crois pas que le ministère de la Justice ou le ministère des Affaires indiennes soient obligés de répondre à certaines questions qui ont été soulevées. Il faut leur donner la chance d'aller à nouveau soumettre les très importantes questions qui ont été abordées. Et qui doivent être réglées. Pour l'instant, je ne suis pas certain de savoir quelle est la responsabilité des témoins en ce qui a trait aux réponses aux questions du comité. Certaines personnes-ressources me disent qu'ils ne peuvent y répondre directement, qu'ils doivent suivre les voies habituelles. Si tel est le cas, pourquoi ne pas leur permettre de prendre nos questions avec eux et de nous revenir.

Le sénateur Tkachuk: Je suis d'accord. Le gouvernement a l'obligation d'agir de façon honorable à cet égard, et je suis certain que c'est ce qu'il fera. Nous attendrons les réponses. Nous essaierons de formuler des réponses nous aussi après quoi nous procéderons à l'étude du projet de loi article par article.

La séance est levée.


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