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BORE

Sous-comité de la Forêt boréale

 

Délibérations du sous-comité de la
Forêt boréale

Fascicule 7 - Témoignages


TIMMINS, le vendredi 9 octobre 1998

Le sous-comité de la forêt boréale du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit ce matin, à 8 h 30, pour poursuivre son étude sur l'état actuel et les perspectives d'avenir des forêts au Canada, et plus précisément de la forêt boréale.

Le sénateur Nicholas W. Taylor (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Bonjour. Les premiers témoins à prendre la parole aujourd'hui sont Mme Brennain Lloyd de Northwatch, M. Ric Symmes de la Federation of Ontario Naturalists, et M. Jim Antler de la Northern Ontario Tourist Outfitters Association.

Madame Lloyd, nous vous écoutons.

Mme Brennain Lloyd, coordinatrice, Northwatch: Honorables sénateurs, je travaille au sein de Northwatch, une coalition de groupes communautaires qui s'occupent d'environnement et de justice sociale dans le nord-est de l'Ontario. Nous travaillons sur divers sujets qui concernent notre région. La plupart ont trait à l'utilisation des terres, la planification de l'utilisation des terres dans la gestion des forêts, l'établissement de zones protégées, la production et la transmission de l'énergie, la gestion des déchets, l'exploitation minière et l'abandon des mines. Ce sont nos principaux domaines d'intervention.

Notre action est celle d'une organisation régionale. En gros, nous estimons qu'il est impératif de tenir compte de l'environnement dans tous les aspects des prises de décisions d'ordre social et économique. Notre coalition a été créée pour faire entendre une voix représentative de la région il y a une dizaine d'années, et nous continuons à ce faire, en travaillant à la fois en tant que coalition régionale et en collaboration avec nos organisations locales.

En ce qui a trait aux forêts, nous menons notre action sur deux fronts de façon presque égale: l'une concerne la forêt protégée, nous défendons la préservation des forêts par le biais de notre réseau de zones protégées de notre patrimoine naturel; et l'autre concerne la forêt de production -- en d'autres termes, nous travaillons pour évaluer et améliorer la gestion des forêts par le biais des politiques provinciales, d'exercices de planification de l'utilisation des terres et de la planification locale de la gestion des matières ligneuses, qui se fait par district.

Je voudrais aborder trois points ce matin. Premièrement j'aimerais vous donner un aperçu de ce que nous considérons comme des problèmes très actuels et pressants en matière de gestion des forêts et de durabilité des forêts. Deuxièmement, je vous parlerai de quelques initiatives ou développements clés que nous estimons particulièrement importants pour nous en Ontario et qui présentent un intérêt pour vous, qui étudiez les forêts boréales au Canada. Et troisièmement, je ferai quelques observations à propos de la position du Canada sur la scène internationale.

J'aimerais tout d'abord vous parler des défis qui se posent dans le secteur forestier. Je vais m'efforcer d'être brève, car au lieu de dix minutes, je pourrais tout aussi bien passer dix heures, ou dix jours sur ce seul sujet. L'insuffisance de l'approvisionnement en bois d'oeuvre est probablement le point le plus important. Le deuxième sujet d'importance, pour nous qui envisageons les choses dans une perspective régionale, ce sont les niveaux d'emploi et le fait qu'ils diminuent.

En ce qui a trait à l'insuffisance de l'approvisionnement en bois, je pense qu'il est clair que les pénuries ont été sporadiques et relativement locales au cours des dix dernières années. Certaines scieries ont réduit leurs effectifs et le nombre de tours de travail. Certaines ont fermé et d'autres ont menacé de le faire. Au cours des décennies à venir, le problème de l'approvisionnement en bois prendra des proportions de crise, car la demande de bois d'oeuvre augmentera alors que la quantité disponible baissera régulièrement.

Je crois que cette crise ne surprendra personne. Nous en avons entendu parler au début des années 70, lorsque les études gouvernementales ont révélé que les réserves avaient été exagérées. Au milieu des années 80, nous avons fait réaliser une vérification indépendante ici dans le nord de l'Ontario, qui a conclu que les inventaires en Ontario étaient au mieux incertains et qu'ils ne donnaient que des estimations moyennes pour des parcelles mesurant des milliers d'hectares.

En 1994, une vérification indépendante a démontré que la forêt boréale était en train de perdre son assise économique; l'épicéa, principale espèce d'importance économique, était passé de 18 p. 100 à 4 p. 100 seulement dans la composition de la forêt. Le gouvernement de l'époque a réagi en annonçant une augmentation de 50 p. 100 des ressources disponibles, et de nouveaux panneaux à copeaux orientés sont apparus partout dans la province pour utiliser les feuillus qui poussaient alors dans les terrains déboisés là où il y avait eu jadis des forêts de conifères.

Cinq ans plus tard, ces feuillus sont utilisés. Les conifères sont sur-utilisés. Les scieries doivent s'attendre à une diminution constante de leur approvisionnement en bois au cours des 60 prochaines années. On prévoit que dans les 20 prochaines années, la demande augmentera de 50 p. 100, alors que l'approvisionnement diminuera. Cette tendance devrait se maintenir jusqu'en 2060.

S'agissant des conifères, il y aura des pénuries dans certaines régions ou localités au cours des 20 prochaines années, mais elles ne devraient se généraliser qu'en 2015.

Alors que cette crise de l'approvisionnement est imminente et que les études réalisées par le gouvernement estiment que l'on pourrait accroître la productivité de jusqu'à 30 p. 100 sur certains sites en réalisant des travaux de sylviculture comme l'éclaircissage et l'entretien des bois, l'investissement dans la sylviculture a en fait diminué de 20 p. 100 depuis 1994. Autrement dit, le risque de faire face à une pénurie de l'approvisionnement augmente alors que nous avons une solution potentielle, mais que nous sommes en train de limiter les mécanismes pour la mettre en oeuvre.

L'évolution des emplois nous inspire des craintes semblables. Bien que la diminution des emplois soit liée à la baisse de l'approvisionnement en bois, elle est bien plus liée à la mécanisation croissante. Mais je suppose que l'on vous a déjà démontré cela, et je ne vous en parlerai donc que brièvement.

Au cours des dernières décennies, les coupes de bois ont régulièrement augmenté tandis que le nombre des emplois dans l'industrie forestière diminuait régulièrement. Si ce ratio était profitable pour les grandes compagnies de l'industrie forestière, il est insatisfaisant d'un point de vue social ou écologique.

Cette tendance à la mécanisation a eu trois effets, dont aucun n'est particulièrement bénéfique pour la forêt ou pour les travailleurs de l'industrie forestière. Les machines remplacent les travailleurs à un rythme d'environ 12 pour 1. Les machines conviennent surtout aux importantes coupes par bloc et aux coupes à blanc en série, soit les méthodes les plus dommageables pour la diversité des forêts, surtout lorsqu'il s'agit de peuplements entiers. Les machines exigent des investissements de capitaux de plus en plus importants. Le coût, ne serait-ce que d'une seule machine, et la nécessité de recouvrer l'investissement pousse à accélérer le rythme de l'exploitation forestière, qui est parfois de 24 heures sur 24. Dans les scieries également, on constate une tendance à la mécanisation et à la diminution des emplois.

Lorsque l'on combine ces deux facteurs et que l'on prend en compte d'autres réalités également, on voit bien que nos terres subissent un certain nombre de pressions. J'aimerais aborder trois sujets.

Un des problèmes qui se pose a trait au réseau routier. Ce problème est directement attribuable à nos pratiques d'exploitation, nos pratiques d'exploitation mécanisées, qui ont lieu toute l'année. Le réseau comprend des kilomètres de routes qui sillonnent la majeure partie des terres boisées de l'Ontario. Il n'y a que quatre réserves naturelles dans la zone de planification boréale est qui fassent plus de 1 000 kilomètres carrés à l'extérieur du réseau de parcs actuel, et qui se trouvent au sud du 50e parallèle.

La deuxième source de préoccupation aujourd'hui est que les coupes à blanc représentent 94 p. 100 du bois récolté chaque année en Ontario. Ceci représente une hausse par rapport aux 70 p. 100 de 1970.

Et troisièmement, les feux de forêt et l'exploitation industrielle ont modifié artificiellement la composition des forêts ontariennes et considérablement réduit notamment des espèces clés comme les pins blancs et rouges, les bouleaux jaunes, les pruches et les épicéas. Il me semble évident que nos forêts ne vont pas bien. De plus, les développements et initiatives actuelles de l'Ontario ne s'attaquent pas à ces deux ou trois grands problèmes.

On peut discuter du rôle du gouvernement dans la transformation des forêts et la tendance à la mécanisation, puisque cela concerne à la fois l'industrie forestière et le monde des affaires, mais il est certain que le gouvernement a pris un certain nombre d'initiatives qui aggraveront la situation.

Parmi ces initiatives, le transfert de tenure. On assiste à un transfert massif du contrôle des terres publiques au secteur privé. Cela se fait en ce moment par le biais des permis de forêt durable, et tout indique qu'un transfert encore plus important de tenure ou de quasi-propriété se fera au profit du secteur industriel à l'issue de l'actuel exercice de planification de l'utilisation des terres.

L'exercice actuel de planification de l'utilisation des terres, auquel on a donné le titre de «Lands for Life», est en lui-même un sujet d'inquiétude. Il s'agit, en gros, d'un exercice qui a mal tourné. Avant de lancer Lands for Life, on s'était généralement entendu sur le fait que nous avions besoin d'un exercice d'aménagement solide, raisonné et informé. Or on se demande actuellement si Lands for Life répond à ces critères.

Le troisième point inquiétant, surtout pour vous qui examinez la forêt boréale, c'est le projet de développement économique des régions au nord du 50e parallèle. La condition 77 de l'approbation de l'évaluation environnementale pour la gestion des matières ligneuses, oblige à négocier avec les Premières nations afin de leur donner un accès accru aux ressources. Or, tant que nous n'aurons pas prouvé, au sud du 50e parallèle, que nous gérons nos forêts de manière à garantir leur durabilité -- et je ne crois pas que nous en ayons donné la preuve -- tant que le gouvernement n'aura pas réellement assuré cette durabilité, tant qu'il n'aura pas respecté la condition 77, je ne crois pas que le gouvernement ontarien ait le mandat de négocier au nom de la population de l'Ontario une extension de la gestion des forêts au nord du 50e parallèle.

J'aimerais conclure par quelques observations sur la position du Canada sur la scène internationale. Vous êtes peut-être au courant du travail réalisé par notre pays depuis le Sommet de Rio de 1992. Un certain nombre de tables rondes intergouvernementales sur la forêt ont eu lieu. Et nous sommes en train de mettre au point une importante tribune internationale qui porte sur des questions liées à la forêt. Je viens tout juste de participer à une séance de compte-rendu de la réunion qui a eu lieu à Genève en août-septembre de cette année. Le principal message de la délégation canadienne est que nous devrions continuer à promouvoir une convention, ce que les Services canadiens des forêts et les Affaires étrangères ont toujours encouragé, et que nous devrions continuer à recommander un type particulier de certification, à savoir celle de l'Association canadienne de normalisation.

Cela pose deux difficultés, et je vais d'abord me pencher sur la certification. La délégation canadienne a toujours pris position en faveur du système de certification de l'Association canadienne de normalisation plutôt que de celui du Forest Stewardship Council. Cela me dérange, car je ne crois pas que le gouvernement du Canada devrait favoriser, recommander ou promouvoir un système de certification. Ce n'est pas le rôle du gouvernement. Le système de certification de l'Association canadienne de normalisation est fondé sur le processus, alors que celui du Forest Stewardship Council est fondé sur la performance. Aussi, si le rôle du gouvernement du Canada est vraiment d'amener un changement dans la gestion des forêts et de favoriser la durabilité des forêts, il n'y parviendra pas en utilisant les normes de certification de la CSA, qui ne sont fondées que sur le processus; il n'y parviendra qu'au moyen d'un système fondé sur la performance. Qui prévoit des rencontres, qui garantit la réalisation des cibles et objectifs qu'une entreprise s'est fixés. Si nous voulons nous engager dans cette voie, et il est question que le gouvernement s'y engage, il conviendrait de se servir d'un système fondé sur la performance et d'objectifs fondés sur la performance.

La deuxième difficulté est liée à la création d'une convention sur les forêts. C'est ce que le Canada recommande constamment. Mais je ne crois pas qu'il a l'appui des ONG canadiennes. Il n'a pas l'appui non plus de nombre de ses homologues internationaux, comme les États-Unis et l'Australie. L'Union européenne est en train de retirer le sien. Le mouvement en faveur d'une convention sur les forêts est en train de disparaître là-bas, mais le Canada continue de promouvoir l'idée. Le message à donner au gouvernement canadien est simple: tant qu'il n'aura pas prouvé que nous sommes capables de bien gérer nos forêts nationales chez nous, tant que nous n'aurons pas mis en place un réseau de zones protégées, tant que nous n'aurons pas de gestion forestière fondée sur la durabilité, nous ne pourrons promouvoir une convention sur les forêts comme si les forêts canadiennes ne faisaient pas partie de ce problème mondial dont la délégation canadienne fait état.

M. Ric Symmes, coordinateur, Partenariat pour les terres publiques, Federation of Ontario Naturalists: Monsieur le président, je suis venu aujourd'hui au nom essentiellement de l'organisation Partenariat pour les terres publiques et je vais vous expliquer de quoi il s'agit dans un instant, mais j'aimerais d'abord vous dire un peu qui je suis.

J'ai une formation en génie industriel. J'ai passé 26 ans dans le secteur des entreprises, chez Canada Packers, où j'ai occupé différents postes de cadre, pour terminer vice-président de groupe. Parallèlement, j'ai travaillé bénévolement comme analyste des politiques pour de nombreux groupes de protection de l'environnement et occupé les fonctions de président du Sierra Club. Après 1990, je suis entré dans ce domaine à titre de conseiller et j'ai travaillé avec un certain nombre de groupes, dont mes clients ici, l'organisation Partenariat pour les terres publiques.

Je vais maintenant vous présenter ce partenariat et vous dire pourquoi Lands for Life est une initiative importante pour la forêt boréale. Je vais vous exposer les principales recommandations du partenariat et vous indiquer comment le gouvernement du Canada pourrait jouer un rôle. J'aurai peut-être ensuite l'occasion d'aborder certains autres sujets en répondant à vos questions.

Partenariat pour les terres publiques est une coalition du Fonds mondial de la nature Canada, de la Federation of Ontario Naturalists et de la Wildlands League. Ensemble, cela représente environ 52 000 membres en Ontario, qui se sont regroupés parce qu'ils poursuivaient les mêmes objectifs; cette coalition a été formée exclusivement pour travailler au projet Lands for Life.

Comme vous le savez peut-être déjà, Lands for Life est un processus d'aménagement du territoire de l'Ontario. On est en train de décider quoi faire avec 40 millions d'hectares de terres publiques, c'est-à-dire une région aussi vaste que le Yukon. Le calendrier est fou, le tout doit être terminé en l'espace de 15 mois. Je crois que nous en sommes au douzième mois à présent. Nous avons estimé qu'il s'agissait d'une entreprise énorme et importante.

Puisque les trois groupes partageaient essentiellement les mêmes objectifs, il a été décidé qu'ils travailleraient ensemble et y consacreraient une partie de leur personnel. Avec l'aide d'un certain nombre de fondations, nous avons également engagé du personnel pour travailler sur le terrain avec les collectivités pour effectuer certaines études techniques particulières, élaborer des cartes et s'acquitter d'autres activités liées à Lands for Life. Nous avons participé de très près au processus. Je suis le coordinateur provincial et j'ai donc la responsabilité de veiller au bon fonctionnement de tous ces éléments et de m'assurer que toutes ces organisations légèrement différentes travaillent de concert.

Nos objectifs sont triples. Premièrement, nous voulons assurer la protection des terres. Cela signifie que nous devons terminer le réseau des zones protégées, et nous entendons vraiment protégées, ce qui exclut toute opération minière, exploitation forestière ou construction de barrage hydro-électrique. On peut faire beaucoup de choses à l'intérieur de ce système, selon le plan d'aménagement et la désignation, mais l'important est de respecter les catégories de zones protégées de l'UICN qui excluent toute activité industrielle.

Notre deuxième objectif concerne la gestion des terres. Nous ne nous intéressons pas uniquement aux zones protégées, bien qu'elles soient très importantes. Nous devons également contribuer à la biodiversité, à la santé des communautés et des économies dans l'ensemble des terres. Nous nous intéressons à la façon dont elles sont gérées et tenons à ce que leur durabilité soit assurée.

Finalement, nous nous rendons compte, et je crois que l'on en a la preuve un peu partout dans le monde, qu'il ne peut y a voir d'environnement sain dans des collectivités appauvries. Il faut que la collectivité soit saine, ou bien, tôt ou tard, l'environnement finit par en souffrir.

Il faut que les trois buts soient liés si l'on tient à avoir une économie saine et diversifiée dans les collectivités nordiques. J'estime que le projet Lands for Life est une excellente occasion de réaliser ces objectifs.

Jusqu'à présent, bien des décisions ont été prises de façon ponctuelle et la situation dépendait souvent de ce qui se décidait à l'échelle locale ou régionale. Il est très difficile d'avoir une vue d'ensemble lorsqu'on ne voit que les mille hectares qui se trouvent derrière chez soi, mais il devient nécessaire à un moment donné, et c'est le bon moment actuellement, de prendre du recul et de voir l'ensemble de la situation, car nous avons encore un certain nombre de choix réels qui pourraient ne plus exister à l'avenir. En fait, nous sommes convaincus que nous n'aurons bientôt plus ces choix. Il fut un temps où nous pouvions toujours aller jusqu'à la colline suivante pour trouver d'autres arbres. Or, nous sommes arrivés à cette dernière colline. Nous avons découvert la dernière forêt vierge originale et elle sera déboisée au cours des vingt prochaines années.

A cause de notre négligence, nous ne pouvons plus compter sur l'existence de régions de nature sauvage. Il ne restera d'aires de nature sauvage que si nous sommes prévoyants. Si nous voulons que des terres de la Couronne demeurent à l'état sauvage et que le public en profite, nous estimons qu'il est essentiel de planifier et de prendre des décisions maintenant, faute de quoi la nature sauvage va disparaître. En gros, il faut regarder la situation dans son ensemble et faire des choix.

Pourquoi nous faut-il faire ces choix? L'avenir n'est plus ce qu'il était et le présent n'est plus tout à fait ce qu'il était non plus. Dans le nord de l'Ontario, dans le secteur primaire, à savoir la coupe du bois, l'exploitation minière, la pêche et le piégeage, il y avait 60 000 emplois directs en 1961. En 1981, il y en avait 48 000. En 1996, ce chiffre était passé à 30 300. Entre 1996 et 1997, il avait baissé encore de 3 100 pour tomber à 27 200. Il s'agit d'une baisse importante. La tendance est nette.

Brennain Lloyd a indiqué que l'automatisation avait été l'une des causes de ce phénomène. Ce n'est pas une critique à l'endroit de l'industrie. Elle fait ce qu'elle a à faire pour accroître sa productivité et son efficacité. On suppose que c'est la chose normale à faire pour elle, mais il en résulte que les collectivités nordiques ont besoin de trouver d'autres sources d'emploi. Selon le CPRH, entre 1996 et 1997, le Nord a perdu environ 12 700 emplois, dont 3 100 dans ce secteur. Si l'on tient compte des autres emplois qui dépendent de ce secteur, dans le transport et autres domaines connexes, on peut dire probablement qu'une bonne partie de cette baisse est directement liée à ce qui se passe dans ce secteur. Il n'est pas surprenant de constater que la part des emplois dans le Nord est en diminution.

En 1961, ces secteurs primaires étaient responsables de 24 p. 100 des emplois directs. Lorsqu'on y rajoute les emplois indirects, on se rend compte qu'ils dominaient vraiment dans le tableau global de l'emploi dans le Nord. En 1997, cette part était tombée à 7,5 p. 100.

Je me rappelle l'époque où une grève chez INCO était considérée comme un vrai désastre; la dernière fois que cela s'est produit, Sudbury a à peine réagi. Elliot Lake aussi doit passer à autre chose avec la fermeture de quatre de ses cinq mines. Ce que nous disons, c'est qu'il faut faire quelque chose. Mme Lloyd a fait remarquer que les coupes de bois augmentent mais que les emplois diminuent.

Les compressions budgétaires du gouvernement sont un autre facteur important. Le fédéral a effectué des compressions. Au ministère des Ressources naturelles, qui est responsable de cette région, le nombre des emplois a chuté de 45 p. 100. Le ministère ne peut plus faire autant qu'avant. Beaucoup de gens travaillent très fort, mais ils ne peuvent pas compenser la perte de 45 p. 100 de l'effectif.

On assiste à d'importants changements en faveur de l'autoréglementation, l'autogestion et l'autosupervision. Il n'y a plus autant de gens qu'avant pour veiller sur les intérêts du public dans les forêts, qui sont à présent exploitées par des intérêts privés. Qui plus est, on parle d'engagements à long terme et certains sont en faveur d'une tenure perpétuelle, et cetera. En d'autres termes, l'industrie veut, pour des raisons qui lui sont propres, obtenir le contrôle effectif à long terme des terres sur lesquelles elle travaille.

Le problème que cela nous pose est qu'il nous faut faire des choix maintenant, sans quoi nous pourrions nous retrouver coincés dans des arrangements fonciers à long terme dont nous ne pourrons probablement pas nous retirer, ou alors à grand frais. Si nous voulons certaines terres pour en faire autre chose, il nous faudra les racheter. Il nous faudra en racheter le contrôle, alors que nous n'avons pas à le faire pour l'instant. Nous avons ce choix.

Les propriétaires des terres publiques veulent faire préserver certaines régions sauvages. Une très grande proportion d'entre eux veulent les faire protéger. Dans la documentation qui vous a été fournie, vous trouverez les résultats d'un sondage Oracle réalisé au mois d'octobre de cette année, qui comprend également certains chiffres d'un sondage de 1997. Les chiffres sont cohérents. Vous les trouverez sous le titre de «Oracle: The opinions of Ontario about the environment.»

J'aimerais surtout attirer votre attention sur certains chiffres. Lorsqu'on a demandé aux personnes interrogées si la protection de 20 p. 100 des terres suffisant, trop ou pas assez, 86 p. 100 ont répondu que c'était suffisant ou pas assez. Si vous regardez à la fin de ce document, vous verrez que ce chiffre était de 78 p. 100 dans le nord de l'Ontario.

Cette proportion est donc très élevée également dans le Nord, et il est tout simplement faux de dire que tout le monde dans le Nord veut couper les arbres ou les donner à l'industrie forestière et ne veut pas de parcs. Les gens du Nord, lorsqu'ils nous répondent chez eux ou dans nos bureaux, disent qu'ils veulent aussi des zones protégées. Pas la majeure partie des terres, mais certaines. C'est ce qui importe. Les gens à qui elles appartiennent de fait veulent qu'elles soient protégées.

Je vais à présent passer rapidement aux recommandations du partenariat. Elles sont assez nombreuses et elles sont fondées sur nos études scientifiques, nos réunions dans la collectivité et sur des analyses minutieuses. Premièrement, nous estimons essentiel de protéger de 15 à 20 p. 100 des terres en en faisant des zones où la coupe du bois, l'exploitation minière et les barrages sont interdits. Ces zones peuvent ensuite être réparties en diverses catégories. Cette proportion représente une augmentation d'environ 12 p. 100 des zones protégées. Nous estimons qu'environ la moitié de ces zones peuvent être des terres improductives, à savoir des marais et des lacs, et des régions qui ne produisent rien ou qui sont inopérantes, des régions qui ne contribuent pas à la forêt de production. Environ 6 p. 100 devront être des forêts de production. Et compte tenu de nos objectifs pour la collectivité et l'importance de préserver les emplois, nous estimons qu'il faut maintenir l'approvisionnement en bois au niveau qu'il aurait atteint autrement; il nous faudra donc trouver 6 p. 100 pour remplacer ces terres.

Il y a de nombreux facteurs qui déterminent la quantité de bois produit. La superficie en est un, mais pas nécessairement le plus important. Je suppose que vous avez été fort étonné hier soir lorsqu'un témoin vous a dit qu'il comptait doubler la production de sa forêt. On peut y parvenir grâce à diverses techniques de sylviculture, à une gestion à paliers multiples et autres techniques. Nous n'avons besoin que de 6 p. 100 de plus pour créer l'espace nécessaire aux zones élargies.

Nous pensons que cela peut se faire en partie en améliorant les techniques de sylviculture et en partie en utilisant le bois de terres privées. Il existe un certain nombre de terres privées qui sont des terres agricoles inutilisées, dans diverses régions de l'Ontario, et il est important d'en refaire des terres productives.

Nous voulons créer des emplois supplémentaires et diversifier l'économie. La solution réside dans l'accroissement du secteur des services et du tourisme. Ailleurs, il doit y avoir une industrie forestière qui garantit la durabilité des forêts et des activités minières, et il faut que les autres valeurs soient respectées. Certains arbres, par exemple, sont plus précieux sur pied qu'abattus.

Puis-je vous suggérer comment le gouvernement fédéral pourrait se rendre utile? Tout d'abord, j'aimerais préciser que le gouvernement devrait intervenir, en dépit des nombreuses suggestions voulant qu'il ne se mêle pas de cette question régionale. Il a également été suggéré que les habitants du Sud ne devraient pas s'en mêler, ni les habitants du Sud qui ont déménagé dans le Nord. On a beaucoup dit qu'il faudrait s'abstenir d'intervenir. Le fait est que nous sommes tous propriétaires et que nous sommes tous concernés.

De nombreux grands scientifiques fédéraux travaillent dans l'industrie forestière. Le gouvernement peut notamment s'assurer que ces personnes sont autorisées et encouragées à parler et à mettre leurs connaissances au profit de la forêt. Ne permettez pas qu'on les empêche ou les décourage de participer.

Le gouvernement peut également jouer un rôle en veillant à l'application des diverses lois. Par exemple, la province de l'Ontario ne fera plus appliquer la Loi sur les pêches, si cela doit nuire à la forêt. Il y a également la question des espèces migratrices et de la responsabilité du gouvernement dans ce domaine, du rôle important du gouvernement, et que lui seul peut jouer. Ne manquez pas à vos responsabilités, je vous en prie.

Pour finir, le gouvernement peut encourager l'application d'un certain nombre d'accords nationaux, dont l'Accord canadien sur les forêts, qui devait terminer le réseau des zones protégées, l'Accord minier de Whitehorse et l'Engagement relatif aux espaces en danger.

Il ne s'agit pas simplement de définir des mots et d'adopter des théories. Il s'agit de décider de façon pratique comment nous allons répartir les terres; nous avons l'occasion de faire quelque chose à ce sujet, de rappeler aux organisations du secteur industriel et autres qu'elles s'étaient engagées à compléter le réseau et que le temps est venu de le faire et qu'il n'est pas question de s'y soustraire.

Voilà les principaux points que je voulais soulever. Je répondrai avec plaisir à vos questions le moment venu.

Le président: Merci. Nous allons passer la parole à Jim Antler. Les sénateurs pourront ensuite poser des questions. Allez-y, monsieur Antler.

M. Jim Antler, analyste de la recherche, Northern Ontario Tourist Outfitters Association: Honorables sénateurs, c'est avec plaisir que nous nous présentons devant vous aujourd'hui au nom de l'industrie touristique fondée sur les ressources naturelles dans la forêt boréale de l'Ontario.

Avant de faire ma présentation, j'aimerais vous donner un bref aperçu des antécédents la Northern Ontario Tourist Outfitters Association, ou NOTO. Je crois que cela pourrait vous être utile car en consultant les renseignements sur vos audiences et vos travaux dans les Prairies en 1996, je n'ai trouvé aucune référence au tourisme. Je ne sais pas si c'est parce que vous n'avez pas pu entendre certains des groupes de la région ou non, mais j'aimerais vous dresser un tableau d'ensemble de notre industrie. C'est pourquoi je vais vous parler davantage de tourisme dans la forêt boréale que de la forêt elle-même.

La NOTO est un groupe d'intervention à but non lucratif qui représente les intérêts du tourisme fondé sur les ressources naturelles dans le nord de l'Ontario. Nous avons quelques membres dans le centre de la province, plus ou moins au sud du Parc Algonquin, mais depuis 1929, nous sommes surtout situés dans le nord de l'Ontario. Cette industrie est constituée d'une série de petites entreprises qui dépendent des richesses naturelles et ou des terres de la Couronne pour gagner leur vie. Il s'agissait généralement de camps et de chalets de chasse et de pêche. C'est toujours le gros de notre industrie, mais d'autres activités sont en train de prendre de l'ampleur.

Parmi ces autres activités on note ce que nous appelons les pavillons sans services, les camps isolés, les services aériens, les terrains de camping ou de caravaning, les fournisseurs de canoës ou équipement d'écotourisme et les entreprises de location de bateaux. Il s'agit d'activités très variées, comme je l'ai dit, et ce sont pour la plupart de petites entreprises. Ce sont souvent des entreprises familiales classiques, où mari et femme mettent à profit les ressources autour d'eux et dépendent de la gestion de la forêt pour gagner leur vie.

Je crois qu'il importe également de répartir ces entreprises en tenant compte du mode d'accès aux lieux d'exploitation, un facteur important lorsqu'on parle d'aménagement forestier en Ontario. Il y a trois catégories: le tourisme éloigné, le tourisme semi-éloigné et le tourisme accessible par la route. Notre ministère du Développement économique, du Commerce et du Tourisme, décrit le tourisme éloigné comme une activité récréative ou expérience en milieu sauvage pour les touristes, qui n'est pas accessible par la route ou la piste. L'accès se fait uniquement par air, eau ou rail. Les caractéristiques importantes de ce type de tourisme comprennent l'utilisation de ressources naturelles de première qualité, l'isolement de toute influence visuelle ou auditive artificielle et les restrictions d'accès.

Le tourisme semi-éloigné est assez similaire, à la différence près que l'on accède aux différents endroits par des routes privées, encore que cela ne soit pas fréquent, ou par des pistes. On y accède souvent également par les lacs et les rivières, ce qui nécessite du portage.

Le tourisme accessible par la route désigne, bien entendu, des activités dans des lieux facilement accessibles par des routes publiques ou privées.

Les deux intervenants qui m'ont précédé vous ont parlé un peu de Lands for Life. J'aimerais également vous en toucher quelques mots, vu son importance dans notre province. Comme vous le savez, ou allez probablement l'apprendre ce matin du président de la Table ronde sur la région boréale est, la zone d'aménagement dont Lands for Life s'occupe se divise en trois régions déterminées par les caractéristiques de leur écosystème: les Grands Lacs et le Saint-Laurent, boréale est et boréale ouest.

Ma présentation portera surtout sur les régions boréales est et ouest. Je suppose que vous savez que la zone d'aménagement n'englobe pas la totalité de la forêt boréale. Elle va en gros, je crois, jusqu'au 51e parallèle. Mais elle jouera un rôle important pour déterminer comment la région qui en résultera sera aménagée et utilisée au cours des quelque vingt prochaines années. Je ne crois pas que cette période a été fixée avec précision, mais on parle de long terme.

Je vais vous donner des renseignements sur l'industrie dans les aires d'aménagement boréales est et boréales ouest. Le ministère du Développement économique, du Commerce et du Tourisme, qui octroie les licences aux entreprises de la province, estime qu'il y a un peu plus de 1 500 propriétés et installations touristiques fixes dans cette région. Les propriétés entrant dans la catégorie des pavillons sans services comprennent les centres de villégiatures. Le plan américain est très semblable, il s'agit généralement de pavillons avec cabines multiples dans un même endroit. Les camps isolés, qui sont rudimentaires et consistent souvent en une seule cabine sur un lac, sont généralement éloignés.

Dans la région boréale est, on dénombre plus de 400 propriétés de ce type. Vous trouverez les chiffres dans les documents que je vous ai donnés. Cinquante-huit sont des plans américains, 146 sont des installations sans service, et il y a plus de 200 camps isolés.

Dans la région boréale ouest qui, selon Lands for Life, s'étend à l'ouest de la région de Marathon en Ontario, on dénombre 1 150 de ces propriétés: 219 plans américains, 323 installations sans services et 612 camps isolés. Comme vous le voyez, il s'agit d'un réseau assez vaste.

Le ministère du Tourisme a également effectué des estimations récemment et a conclu que les dépenses directes consacrées au tourisme écologique dans le nord de l'Ontario s'élèvent au total à 482 millions de dollars par an. Cela inclut les installations dont je vous ai parlé. Je voudrais préciser que cela inclut également les activités dans les parcs et les activités aquatiques de manière plus générale, comme la natation, qui font certainement partie de ce que nous faisons.

La région boréale est, où vous vous trouvez actuellement, a reçu 60 millions de ces recettes et la région ouest environ 190 millions. Je vous donne ces chiffres très rapidement pour faire ressortir l'importance du tourisme dans le nord de l'Ontario et faire bien comprendre à quel point l'aménagement des forêts revêt une importance pour cette industrie.

Puisque le temps dont je dispose pour vous parler aujourd'hui est limité, je vais me concentrer sur la question des emplois dans l'industrie. Je constate avec plaisir que le tourisme figure dans la description de ce sujet dans les documents d'information, car il s'agit sans nul doute d'une industrie importante dans la forêt boréale. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je m'étais inquiété de ne pas voir le tourisme mentionné du tout dans les documents d'information que j'avais reçus sur votre tournée dans les Prairies. Je sais bien que cette industrie est plus importante en Ontario que dans des provinces comme le Manitoba et la Saskatchewan, mais elle y est néanmoins importante également. Il existe des organisations équivalentes à la NOTO dans les Prairies, notamment la Manitoba Lodges and Outfitters Association et la Saskatchewan Outfitters Association. Je suis sûr qu'elles se feraient un plaisir de vous renseigner sur le tourisme dans ces provinces.

Nous croyons que le tourisme fondé sur les ressources naturelles est une industrie durable. Nous en avons eu la preuve au cours de ce dernier siècle, puisque certains de nos chalets sont antérieurs à notre organisation dans la province.

Ceci dit, les attitudes ont certainement évolué au cours des années en ce qui concerne la gestion et l'utilisation des ressources dont notre industrie dépendent, qu'il s'agisse du poisson, des animaux sauvages ou autre. Les gens de notre industrie ont travaillé fort avec leurs hôtes pour gérer et réduire les prises de poisson ou d'animaux. Ceux d'entre vous qui êtes de l'Ontario savent que nous avons un permis de pêche spécial qui vise à protéger la nature et qui limite davantage les prises de poisson que le permis normal. Ce permis se vend beaucoup. Notre industrie encourage ses hôtes à réduire leurs prises et à préserver la qualité des ressources que nous utilisons, car il s'agit de notre gagne-pain.

Nous offrons un produit à valeur ajoutée. Nous prenons les ressources naturelles et les aménageons en offrant des installations pour se loger et d'autres services. Comme vous le voyez, son utilisation génère d'importants profits. Dans bien des cas, on ne récolte même pas les ressources elles-mêmes.

Le tourisme d'aventure et l'écotourisme, qui comprend notamment le canoë, le kayac, l'observation des oiseaux ou autres animaux sauvages a beaucoup progressé. Contrairement à la chasse et à la pêche traditionnelles, ces activités ne consomment pas les ressources mais génèrent néanmoins d'importants revenus. Mais il est impératif de gérer la nature de manière à garantir la pérennité de ces activités et des ressources dont elles et nous dépendons. C'est surtout ce genre de difficultés que nous avons rencontrées en Ontario.

Notre industrie ayant besoin de ressources naturelles de qualité, de forêts bien soignées et d'un accès limité dans les régions éloignées, nous entrons souvent en conflit avec d'autres utilisateurs des ressources, le plus souvent avec ceux qui s'occupent de l'aménagement forestier. Nous sommes gênés par la construction de routes d'accès pour l'exploitation forestière à proximité des zones touristiques éloignées et par l'impact de ces nouvelles routes sur les lacs et autres ressources auparavant éloignées. Vous trouverez davantage de précisions sur nos difficultés dans notre présentation.

Nous avons travaillé par l'entremise du processus provincial d'aménagement des forêts pour tenter de régler certains de ces problèmes, mais pas toujours avec succès malheureusement. Nous finissons par devoir réaliser des évaluations environnementales et autres mesures longues et coûteuses, qui ne font rien pour résoudre le problème fondamental de l'utilisation des terres. C'est pourquoi le projet Lands for Life revêt une grande importance pour nous. Je vous ai remis mes mémoires aux tables rondes sur les régions boréales est et ouest, car vous y trouverez davantage de détails que je ne peux vous donner aujourd'hui.

Nous avons fait approuver une politique provinciale sur le tourisme fondé sur les ressources naturelles par le gouvernement de l'Ontario, pour tenter de défendre nos intérêts. Je vous en ai fourni une copie dans la documentation que j'ai remise au greffier, afin de vous donner une idée de la façon dont nous essayons de régler certains de nos problèmes au niveau provincial. Ainsi que l'a mentionné Mme Lloyd, la difficulté tient au fait qu'au nord du 51e parallèle, nous n'avons pas de stratégie de développement coordonnée dans notre province. On ne peut pas tout simplement prendre nos installations fixes pour aller les mettre ailleurs lorsque les circonstances changent. Il n'y a pas tant de possibilités dans le Nord en ce moment. Il nous faut travailler fort sur les terres actuelles pour tenter de régler les problèmes qui se posent en ce moment et protéger les ressources.

Je sais que vous visez des politiques et des programmes qui peuvent contribuer à accroître les emplois liés à la forêt. Cela nous concerne certainement. À l'échelle de la province, Lands for Life est un élément clé. Bon nombre des problèmes de ressources que nous abordons sont d'envergure régionale; mais la Loi sur les pêches et les problèmes qui se posent entre le gouvernement fédéral et l'Ontario pour savoir qui doit administrer cette loi nous intéressent sans aucun doute.

La question fondamentale, selon nous, est de savoir si les gouvernements veulent que notre industrie demeure en activité et continue de prospérer. S'ils décident que oui, alors il nous faudra trouver des moyens de garantir la préservation des ressources naturelles dont notre type de tourisme dépend. Vous pouvez consulter les documents que j'ai annexés pour obtenir davantage de précisions à cet égard.

Le sénateur Whelan: Ma question s'adresse à M. Antler. Je me rappelle être allé prononcer une allocution devant les International Wildlife Producers à Maniwaki. Je leur avais dit que je viendrais en échange d'une journée de pêche. Je me rappelle que le guide m'avait répondu: «Je ne peux pas vous emmener sur un lac où la pêche est vraiment bonne, mais là où nous allons, ce ne sera pas trop mal». Il pilotait son propre avion, un petit Cessna 172, je crois. Nous nous sommes posés avec l'avion à flotteurs sur un lac isolé, de 250 pieds de profondeur et de 120 hectares de superficie. Nous avons tiré des buissons un petit bateau équipé d'un moteur de trois chevaux et avons pêché à la traîne. Le lac était plein de petites écrevisses rouges. Nous avons attrapé toutes sortes de poissons; il a fallu les rejeter à l'eau. J'ai pêché le plus gros poisson que j'ai jamais attrapé, une truite d'environ 20 ou 21 livres. Le guide m'a dit que, d'après sa balance, le poisson que j'avais pêché devait avoir 50 ans. Il a dit que si ce lac avait été près d'une route, les poissons auraient disparu en l'espace de deux ans.

Nous avons une petite maison sur la Marten River, au niveau du Red Cedar Lake. Nous avions l'habitude d'y aller juste au moment où le soleil disparaissait derrière les arbres, et nous attrapions facilement six poissons. Lorsqu'on y va aujourd'hui, on risque de trouver six autres bateaux au même endroit. Il faudrait vraiment beaucoup de chance pour que tous attrapent six poissons.

Ne pensez-vous pas que la pêche sur la glace serait également une entreprise viable?

Je sais que la motoneige a beaucoup de succès. Même mes neveux viennent ici en hiver lorsqu'il y a de la neige.

Avez-vous des réserves ou des suggestions à soumettre à propos de la pêche blanche et autres activités du genre? Quels effets les coupes rases ont-elles sur l'approvisionnement en eau de vos lacs?

M. Antler: Oui, j'ai quelques idées là-dessus. Vous soulevez quelques points intéressants, y compris un certain nombre de sujets dont nous discutons dans notre organisation depuis de nombreuses années. Votre expérience sur le petit lac où vous êtes allé en avion est un exemple du genre de possibilités et de pêche de qualité que nous avons encore à notre portée et que nous nous efforçons de préserver dans notre province. On pourra encore vendre ce genre d'expérience pendant de nombreuses années. Les gens sont prêts à payer le prix fort pour venir pêcher là. Comme vous dites, si vous avez rejeté tous vos poissons, vous n'avez eu aucun effet sur la pêche. C'est une des questions fondamentales que nous essayons de régler.

Le sénateur Whelan: J'aimerais préciser que nous avons respecté notre quota.

M. Antler: Nous travaillons fort pour maintenir ces possibilités dans des endroits éloignés. C'est notamment pour cette raison que l'exploitation forestière nous pose des problèmes. Red Cedar Lake, par exemple, est une région bien plus accessible par la route maintenant.

Dans ces conditions, il faut faire très attention à la façon dont on gère et réglemente l'utilisation des ressources. Il ne fait aucun doute que la pêche blanche et la motoneige revêtent une grande importance pour l'industrie touristique en ce moment.

Je crois qu'il faut considérer la motoneige sous deux aspects, car il y a deux types d'utilisateurs. Il y a ceux, principalement les habitants du nord de l'Ontario et probablement certaines personnes qui viennent du Sud, qui se servent de la motoneige pour aller pêcher ou faire d'autres activités sur les lacs. Il y a également ceux qui s'en servent pour se promener. Ces derniers ne sont pas nécessairement des pêcheurs à la ligne. Ils ont peut-être tout simplement envie de faire l'aller-retour entre North Bay et Cochrane.

Nous nous inquiétons toujours lorsque les conditions de pêche ont l'air d'avoir souffert quelque part et que les choses ne sont plus comme avant. Il conviendrait peut-être de décider de soumettre à des contrôles l'utilisation de certains -- l'accès à un lac par exemple. Cette approche a été retenue dans certains cas pour tenter de protéger les zones touristiques les plus éloignées. Il existe peut-être de meilleurs moyens de gérer la pêche elle-même, en abaissant les limites ou autrement. Il y a différentes possibilités à examiner.

Pour nous, évidemment, les deux sont importants. Nous voulons nous assurer qu'il y aura encore des lacs comme celui où vous êtes allés à l'avenir; nous ne voulons pas qu'ils soient tous accessibles par la route et que les ressources n'y soient plus les mêmes que celles que vous y avez trouvées.

Le sénateur Whelan: Ma prochaine question est pour Ric Symmes, qui vient du Sud. Il vient d'Orillia, je crois. Dans votre présentation vous avez indiqué que le gouvernement fédéral devrait permettre à ses fonctionnaires d'exprimer plus librement leurs opinions. Cela n'était-il pas dans votre mémoire?

M. Symmes: C'est exact.

Le sénateur Whelan: Avez-vous des preuves que l'on empêche les fonctionnaires de s'exprimer?

M. Symmes: Certains fonctionnaires ont témoigné aux audiences de la Table ronde et se sont fait dire, par la suite, que leurs ressources seraient réduites. Ils étaient découragés. Ils étaient réellement découragés. Il s'agit du groupe connu sous le nom de Concerned Scientists of Algoma. Je ne veux pas vous donner de nom de personnes ou de lieux plus précis, mais j'en connais quelques-uns. Je ne crois pas que le fait de vous donner davantage de détails fera avancer les choses. Je crois qu'ils ont besoin d'être encouragés de manière plus positive pour faire leur travail.

Le sénateur Whelan: J'espérais que vous nous en diriez davantage.

Le sénateur Spivak: J'ai été étonnée par les chiffres sur l'emploi, qui sont semblables à ceux qui ont été avancés dans l'Ouest. Ils sont semblables à ceux de la Colombie-Britannique, en tous cas. Il y a en ce moment 27 000 emplois, ou un peu moins, selon la superficie et le genre d'investissements réalisés à la fois par le gouvernement et l'industrie. Avez-vous ces chiffres? J'aurais voulu comparer ces chiffres avec ceux du tourisme. M. Antler, je ne suis pas certaine d'avoir bien saisi le nombre d'emplois dans le tourisme et ce genre d'investissement.

Je généralise peut-être un peu trop, mais il me semble qu'on a l'air de penser que la forêt appartient à l'industrie forestière; ce n'est pas ce que disent les gens mais c'est ce qu'ils pensent réellement -- et l'on se contente de donner quelques miettes, par-ci, par-là, à l'industrie du tourisme ou des loisirs sous prétexte que nous avons absolument besoin de l'industrie forestière parce que nous avons besoin des emplois.

Il y a du vrai là-dedans, mais je ne sais pas si c'est aussi simple que cela. J'apprécierais vos commentaires là-dessus.

M. Symmes: J'aimerais préciser que les chiffres que j'ai avancés proviennent de Développement des ressources humaines Canada, qui est la ressource en matière d'emploi pour le Nord.

Le sénateur Spivak: Seulement le Nord?

M. Symmes: C'est-à-dire le nord de l'Ontario. Je ne sais pas exactement ou se situe la limite, à French River ou quelque part par là. Vous pourriez peut-être m'aider à ce sujet, monsieur Antler. Dans le Nord. J'ai pris les chiffres combinés pour l'accueil et le tourisme et, de fait, ils sont à peu près équivalents, environ 27 800 emplois directs. Cela n'inclut pas les emplois indirects.

Le sénateur Spivak: Lorsqu'on regarde la situation en termes d'emplois et d'investissement, on se dit qu'il faudrait peut-être diviser la forêt moitié-moitié, et non 15 ou 20 p. 100. Il faudrait avoir 50 p. 100 pour le tourisme, les loisirs et les activités familiales et 50 p. 100 pour l'exploitation forestière. Le seul inconvénient, c'est cet autre problème, que mes collègues ne manqueront sans doute pas de soulever, celui du manque à gagner. Des pressions énormes s'exercent pour pallier cette insuffisance.

La question est de savoir comment trouver une solution à ce problème. Les possibilités de coupes annuelles sont-elles trop élevées? Devrions-nous diminuer l'utilisation ou devrions-nous simplement faire tout ce que nous pouvons sur les terres disponibles pour combler ce manque? J'aimerais avoir votre avis sur ce sujet.

M. Symmes: Nous avons essayé de trouver une réponse cohérente à cette question. Tout d'abord, pour être bien clair, même si nous protégeons de 15 à 20 p. 100 des terres contre l'exploitation forestière et minière, des restrictions sont imposées sur l'utilisation des terres restantes. Il n'est pas permis d'y couper jusqu'au dernier arbre. S'il y a un nid d'aigle dans un arbre, celui-ci ne doit pas être coupé. Il y a des contraintes. Il y a des bandes protégées le long des routes pour que, lorsqu'on passe en voiture sur la route, on n'aperçoive pas les aires coupées à ras qui sont très laides. Il y a des restrictions sur les terres restantes. Elles ne sont pas entièrement utilisables pour la production.

Je crois que la solution raisonnable est de dire que si nous voulons favoriser la biodiversité et les emplois, il faut d'abord des terres qui soient protégées de façon relativement stricte, et ensuite certaines terres qui soient gérées et soumises à certaines restrictions, mais offrent quand même un intérêt biologique et également récréatif. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire ni pratique de vouloir une répartition de 50-50. Je crois que la protection de 15 à 20 p. 100 des terres est un maximum.

J'aimerais prendre un instant pour expliquer qu'à notre avis, pour combler le manque, il convient d'améliorer la gestion et l'entretien des forêts afin d'accroître la productivité de certains des sites à haut rendement qui restent, afin de ne pas laisser perdre les emplois qui nous restent dans la forêt, car ce sont de bons emplois, des emplois qui ont toujours bien payé dans le Nord.

Le sénateur Stratton: Lorsque vous parlez de régions de nature sauvage, vous parlez des 15 à 20 p. 100, si je comprends bien. De régions intactes. Vous n'allez rien récolter dans ces endroits. C'est bien ce que vous préconisez.

Vous avez parlé de routes. Nous avons eu hier un exemple où pour faire la récolte il a fallu construire une route d'accès. Recommandez-vous que, une fois le travail terminé, on remette la terre où elle était, que l'on restitue le terrain dans son état original, que l'on enlève la route, tout simplement pour le bien de la nature? Pour l'instant, on laisse la route telle quelle et, avec le temps, la nature reprend le dessus. Vous parlez comme si toute la région se transformait en un réseau routier.

M. Symmes: Oui. Tout d'abord, pour donner quelques précisions à propos des régions intactes, nous estimons que les régions dont nous parlons auront un impact. Nous pensons par exemple qu'elles offriront de très bonnes ressources pour le tourisme éloigné, comme celui des camps où l'on accède en avion. Bon nombre de ces endroits serviront à des fins récréatives multiples qui pourront aller de la cueillette des champignons à toutes sortes d'activités surprenantes qui fourniront des revenus. On peut y faire bien des choses. Il s'agit simplement d'interdire les activités industrielles et, car nous savons qu'il y a des routes dans certains parcs, de ne pas construire de routes.

Les routes constituent un problème majeur car elles amènent beaucoup de trafic et créent des pressions. On n'a tout simplement pas le personnel pour contrôler tout cela. Une fois que les gens peuvent entrer dans la zone, en grand nombre et avec beaucoup de facilité, avec des véhicules à moteur, les dégâts commencent. Les lacs se vident de leurs poissons en l'espace de deux ans, comme vous dites. Cela est tout simplement impossible, pratiquement, à contrôler.

Les routes sont la principale menace. D'une certaine façon, elles représentent un plus grand danger que les mines, à cause de tous les dégâts qu'elles entraînent lorsqu'elles sont construites. Dans certains cas, il serait souhaitable de les détruire, mais l'expérience a montré, en Ontario, qu'une fois une route construite, il est très difficile de la faire fermer.

Le sénateur Stratton: Je suis vraiment très étonné que personne ce matin n'ait parlé d'herbicide. On utilise des herbicides quand on plante. On nous dit qu'ils sont biodégradables, en d'autres termes, qu'ils se décomposent rapidement, mais ils se décomposent en quelque chose et modifient la composition du sol. Je ne m'inquiète pas pour l'immédiat, je m'inquiète de ce qui se passera dans 20 ou 30 ans. L'utilisation des herbicides ne vous pose-t-il aucun problème? Les herbicides utilisés sont-ils sûrs? Il ne s'agit pas d'aujourd'hui, mais de ce qu'il adviendra d'ici 20 ou 30 ans.

Mme Lloyd: Je crois que l'utilisation des herbicides fait partie de l'ensemble de la méthode de gestion de la forêt, qui consiste à couper à blanc, asperger, planter, asperger, asperger, asperger, asperger, asperger, asperger, couper à blanc, planter, asperger, asperger, asperger. Je pense que c'est l'une des difficultés de cette méthode.

Je ne peux pas vous donner une évaluation des herbicides utilisés en ce moment. Je peux vous dire que leur utilisation m'inquiète de manière générale, et leurs effets à long terme encore plus. Sont-ils biocumulatifs, sont-ils persistants, et ainsi de suite? Je pense que le problème tient autant à la méthode qu'ils permettent de mettre en oeuvre qu'à leur utilisation. Ce ne sont pas juste les pesticides eux-mêmes qui sont inquiétants mais, de manière plus générale, toute l'approche dont ils font partie.

J'aimerais simplement rajouter quelque chose à ce que le sénateur Spivak a dit lorsqu'elle a évoqué la question de l'investissement. J'aimerais soumettre aux sénateurs une question à laquelle je n'ai pas de réponse. Quel est le rôle de l'investissement, du financement et des subventions du gouvernement fédéral dans l'industrie, et je pense plus particulièrement à sa mécanisation croissante. Je crois que le gouvernement fédéral a quelque chose à voir avec cela. L'argent du gouvernement fédéral est utilisé à cette fin. C'est une question que nous n'avons pas encore réussi à approfondir. Je pense que vous êtes mieux placé que nous pour le faire.

Le président: Nous allons y penser. Bien sûr le gouvernement fédéral puise dans une poche au moins, peut-être dans les deux, puisqu'il encaisse des impôts. Je pense que vous pouvez vous attendre à des recommandations dans ce domaine.

Le sénateur Mahovlich: J'aimerais adresser ma question à Rick Symmes. J'habite à Timmins. J'ai passé mon enfance à Schumacher. Il y a quelques années, une entreprise australienne est venue et s'est emparée de mon parc, de notre parc, et y a creusé un trou pour y chercher de l'or. L'entreprise était censée restituer ce parc dans son état original. Des gens y avaient planté des arbres. Il ne s'agissait pas d'arbres ordinaires, courants dans la région. Les dirigeants de la mine McIntyre y avaient planté des arbres. C'étaient des arbres particuliers, très importants. C'était un parc où l'on pouvait se promener tranquillement le dimanche après-midi. Il y avait un manège. Enfants, nous nous y sommes beaucoup amusés. Lorsque j'y retourne aujourd'hui, je ne reconnais plus rien. Ils sont tout simplement partis sans rien faire. Les arbustes ont repoussé, mais c'est tout. Ce n'est pas un endroit qui convient aux enfants de Schumacher.

On a construit un parc quelque part un peu plus loin et on a dit qu'il remplacerait l'autre. Je crois que l'affaire a été portée devant les tribunaux, ou du moins, c'est ce qu'on m'a dit. Je me demande simplement si votre fédération s'occupe de cette histoire, ou si vous savez quelque chose à ce sujet?

M. Symmes: Nous ne sommes pas au courant de ce cas particulier, non. Brennain en sait peut-être quelque chose. Elle est plus proche de l'endroit. Mais nous nous demandons si, d'une manière générale, il faudrait avoir le droit de creuser une mine absolument n'importe où. Il vaudrait mieux ne pas toucher à certains endroits.

Le sénateur Mahovlich: Je crois qu'il s'agissait de déchets. Nous avons pris ces déchets et nous avons construit un parc par-dessus, ou du moins mes prédécesseurs l'ont fait, pour embellir l'endroit. Ils ont pensé qu'il restait sans doute encore beaucoup d'or dans les déchets. En fait, je crois qu'ils n'ont pas trouvé grand chose.

M. Symmes: Je crois que la réhabilitation des terrains est une question à étudier.

Mme Lloyd: J'aimerais préciser que la Loi sur les mines de l'Ontario a été modifiée. Elle est plus exigeante en matière de notification du public et autres choses du genre que par le passé, mais elle est encore insuffisante, surtout en ce qui a trait au développement initial des gisements et à l'exploration des sites. Je ne suis pas au courant des détails de votre site, mais je suppose que dans le cas de la forêt boréale, ce sont les travaux d'exploration initiale, et même avancée, qui peuvent poser un problème. Les examens publics n'interviennent qu'une fois le stade de l'exploration terminé. Et il y a tous les problèmes des mines abandonnées, dont la mise hors service n'a pas été faite comme il faut, et cetera.

Le président: J'ai noté que la tenure à long terme soulève des critiques. Comment proposez-vous l'inverse -- une tenure à court terme -- qui signifie qu'on accède au terrain, on coupe tout et on sort avec? La tenure à long terme, à condition d'être revue régulièrement n'est-elle pas le seul moyen de garantir que votre objectif et les objectifs de coupe de bois et de coupe de fibre coïncident? Autrement dit, ils veulent conserver la forêt; ils veulent la renouveler. Quelle solution avons-nous sinon la tenure à long terme?

M. Symmes: Je crois que cela dépend de la façon dont on aura tenu compte des autres intérêts. Autrement dit, ne vous engagez pas avant d'avoir pris en compte tous les autres besoins clés, notamment ceux des Premières nations et des zones protégées. Le public veut des zones protégées, et ainsi de suite.

Le président: La tenure à long terme est acceptable, dans la mesure où l'on consulte tout le monde.

M. Symmes: La tenure à long terme dans certaines zones peut être acceptable si l'on s'est occupé des autres intérêts avant, notamment des zones protégées, des Premières nations, et cetera.

Mme Lloyd: Le tiraillement se situe plutôt entre le public et le privé qu'entre le court et le long terme. Mais je crois que la tenure à long terme pose également un problème. Si le contrôle du secteur privé sur les terres publiques est renforcé et qu'en même temps la durée des accords augmente, je crois que pour le public, cela signifie qu'il se passera plus de temps avant qu'il puisse donner son avis, influencer ou modifier les modalités de la tenure. Je crois que nous avions certains arrangements pour les terres de la Couronne dans le nord de l'Ontario, en vertu desquels les autorités publiques étaient les principaux décisionnaires. Si nous confions la tenure au secteur privé, le rôle du public -- le contrôle du public, l'influence du public, l'accès du public à l'information, les prises de décisions, et cetera -- diminuera.

Le sénateur Whelan: Nous avons de nombreux échanges avec les États-Unis. Ils ont une seule autorité, l'autorité fédérale, pour les forêts, l'agriculture et la pêche. Ne pensez-vous pas que ce serait une meilleure solution que ce que nous avons ici où il existe des frontières provinciales invisibles? Vous pouvez les traverser à pied sans vous en apercevoir. Vous entrez dans un territoire où la législation, les lois applicables à la pêche et à la coupe du bois sont différentes.

J'ai été ministre pendant près de 11 ans. J'ai toujours trouvé que la situation était confuse. Lorsque je traitais avec les États-Unis, je traitais avec une seule personne pour les 51 états. Je ne traitais pas avec 51 personnes. Ici, vous avez une division et on veut la diviser encore davantage. Nous avons bâti un pays avec un régime fédéral qui marche assez bien. Or, je vois toute cette confusion qui règne dans notre pays. Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?

Mme Lloyd: Je ne crois pas que tout va parfaitement bien dans les forêts américaines, et je pense donc qu'il faut faire attention avant d'adopter leur politique.

Le sénateur Whelan: Je n'ai pas dit que les choses étaient parfaites là-bas. Mais d'après votre témoignage, les choses n'ont pas l'air d'aller très bien ici.

Le président: Laissez-moi finir avant que le sénateur Whelan ne fasse disparaître toutes les provinces.

M. Antler: Très rapidement, je voulais répondre à quelques questions posées un peu plus tôt. En ce qui a trait aux emplois du tourisme, je crois que M. Symmes a parlé de 26 000 à 27 000 emplois environ. Je crois qu'il s'agit du tourisme total, pas nécessairement du tourisme fondé sur les ressources naturelles. Le chiffre de ce dernier secteur est probablement plus proche de 13 000. Si vous voulez davantage de renseignements, je peux vous procurer l'étude, mais les chiffres se recoupent.

Le sénateur Spivak: Ce chiffre est en progression, pas en diminution.

M. Antler: Oui. Contrairement aux activités plus industrielles de l'exploitation forestière ou minière, le secteur ne fait pas l'objet d'une mécanisation. Il s'agit toujours d'une prestation de services personnalisés aux clients, et la mécanisation ne peut donc avoir le même effet.

Quant au problème des routes soulevé par le sénateur Stratton, il est certain que notre organisation appuie la régénération à ces endroits et, dans certains cas, cherche à faire fermer les routes ou à les transformer. Cela nous pose des problèmes auprès des autres utilisateurs, mais c'est un combat sans relâche que nous menons ici en Ontario où il faut s'occuper des effets après coup. Les entreprises de l'industrie forestière n'ont généralement pas d'objection, une fois que leur travail est terminé, à régénérer la forêt le long des routes. Mais il y a d'autres personnes dans la province qui voudront utiliser cette route à d'autres fins. C'est là que se pose la difficulté pour les autorités qui devront décider qui écouter et quoi faire.

Le président: Merci beaucoup, mesdames, messieurs. C'est de notre faute si vous avez aussi peu de temps, mais heureusement, vous nous avez donné des mémoires écrits. Merci beaucoup d'être venus jusqu'ici. Nous l'apprécions.

M. William Thornton, directeur de la Gestion forestière, ministère des Ressources naturelles de l'Ontario: Tout d'abord, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue à Timmins au nom du gouvernement de l'Ontario. C'est un plaisir d'être ici ce matin. Je vais passer rapidement à travers les notes que vous avez déjà, je sais, afin de laisser du temps pour répondre à vos questions et traiter certains sujets soulevés précédemment ici.

Je suis directeur de la Gestion des forêts pour la province de l'Ontario. Je travaille avec le ministère des Ressources naturelles. Comme vous le savez, nous avons la responsabilité de toutes les activités se rapportant à la forêt ici dans la province. Je vais vous donner un bref aperçu du contexte et passer à travers les diverses questions que vous avez soulevées et qui ont trait à votre mandat concernant la forêt boréale.

Vous voyez derrière vous une carte qui montre la forêt boréale. C'est la partie en vert foncé. Pour vous aider à remettre les choses en contexte, sachez que l'Ontario est une vaste province d'environ 107 millions d'hectares, dont 74 p. 100 sont boisés. Nous possédons 17 p. 100 des forêts canadiennes et 1 p. 100 des forêts du monde. Toujours pour mettre les choses en perspective, sachez que cela représente en gros l'ensemble des terres émergées de la France, de la Suisse et de l'Autriche.

Vous pouvez voir sur la carte où la forêt boréale se situe. Elle s'étend de la frontière du Manitoba à la frontière du Québec, juste au sud des basses terres de la région de la Baie d'Hudson-Baie James. Sa superficie totale est de 42 millions d'hectares à peu près. La partie nord de la forêt boréale va jusqu'aux landes boréales ou toundra, et se caractérise par un faible potentiel du site et un climat subarctique.

L'une des caractéristiques de la forêt boréale est qu'elle est soumise aux perturbations et dominée par des espèces adaptées à ces conditions environnementales. Le feu, le vent et les insectes ravagent souvent de vastes régions et les espèces ont adapté leurs capacités régénératrices pour survivre à ces perturbations.

Le feu, en particulier, a déterminé l'âge et la répartition des espèces d'arbres dans la forêt boréale, en favorisant notamment une prépondérance de peuplements jeunes. Au cours des 80 dernières années, la récolte de bois d'oeuvre et les feux de forêt ont modifié la composition des espèces arboricoles et la répartition par classe d'âge de la forêt. Je ne vais pas vous énumérer ces espèces en détails. Vous avez été dans le bois hier et vous avez vu quelles espèces d'arbres se trouvent dans la forêt boréale.

J'aimerais vous parler un peu des pratiques de récolte et vous faire comprendre combien il importe que ces pratiques imitent les perturbations naturelles. Ce principe est vraiment au centre de notre théorie sylvicole, en particulier en ce qui concerne la forêt boréale. C'est pourquoi vous allez voir des coupes à blanc, car cette technique imite, dans une certaine mesure, les phénomènes naturels de la forêt boréale. J'ai pensé également que vous devriez avoir une certaine connaissance de ces perturbations qui se produisent dans la forêt. Chaque année, les feux de forêts détruisent environ 275 000 hectares, alors que les coupes ont lieu sur 200 000 hectares. En d'autres termes, la superficie de forêt brûlée chaque année est supérieure à la superficie exploitée pour la coupe du bois. Le bois est coupé sur moins d'un demi de 1 p. 100 de nos terrains boisés chaque année.

Sur les 42 millions d'hectares de forêt boréale, environ 95 p. 100 appartiennent à la Couronne, 4,5 p. 100 sont des terres privées et environ un demi de un pour cent sont des terres fédérales, soit des réserves indiennes surtout.

J'aimerais à présent vous parler de lois ontariennes très importantes, à savoir la Loi sur la durabilité des forêts de la Couronne et la Loi sur les évaluations environnementales. Il importe de noter que l'Ontario a tenu une série d'audiences qui ont duré quatre années et ont abouti, en 1994, à une décision très importante sur ce que l'on appelle l'évaluation de classe pour la gestion des matières ligneuses sur les terres de la Couronne en Ontario. Nous avons dépensé 20 millions de dollars au cours de ces quatre années pour recueillir des témoignages sur la diversité des activités forestières, y compris le processus de planification de l'aménagement des forêts, l'utilisation d'herbicides dans la forêt, et écouter ce que d'autres personnes, directement intéressées par les activités forestières ou membres du public, ont à recommander en matière de gestion des forêts.

Nous avons en même temps proposé une loi importante, la Loi sur la durabilité des forêts de la Couronne, qui est entrée en vigueur en 1995. C'est la loi la plus à jour dans ce domaine au Canada, et de nombreuses autres provinces sont venues nous voir pour nous demander conseil.

Cette loi exige que quiconque effectue des activités dans une forêt de la Couronne en Ontario, le fasse de manière à garantir la préservation de la forêt à long terme, de sorte que les générations futures puissent également en profiter pleinement. Cette loi est obligatoire. À la fois l'EA, la décision de l'Évaluation environnementale et la Couronne ont apporté des changements aux responsabilités de l'industrie forestière en donnant de nouvelles occasions au public de participer à la planification de la gestion des forêts. La loi exige, par exemple, le recours à des comités locaux de citoyens pour nous conseiller au sujet de notre planification de l'aménagement des forêts, un nouveau régime de permis pour la coupe du bois d'oeuvre, une révision des droits payés pour la récolte du bois d'oeuvre prévoyant un financement garanti pour le renouvellement des forêts et des fonds fiduciaires dont je vais vous parler, et une remise à jour du système de mise en application des règlements, mesures correctrices et pénalités.

Il importe de savoir qu'à la fois dans la décision de l'évaluation environnementale et la Loi sur la durabilité des forêts de la Couronne, on prévoit des vérifications indépendantes des activités de ces entreprises tous les cinq ans. Cela fait partie des conditions de renouvellement des permis. On a beaucoup parlé ici de tenure. En Ontario, de manière générale, les permis sont octroyés pour des périodes de 20 ans. Tous les cinq ans, la performance du titulaire du permis est soumise à l'examen d'un organisme indépendant pour vérifier s'il a bien observé les conditions du permis. Si c'est le cas, l'échéance de 20 ans est respectée. La province garde ainsi le contrôle. Il ne s'agit pas de transférer les responsabilités à l'industrie forestière. Les normes fixées pour la vérification de la performance sont rigoureuses.

Il y a un certain nombre de rapports à soumettre. Je ne vais pas les décrire tous. Les entreprises sont tenues de remettre des rapports annuels. Et il y a les vérifications quinquennales dont j'ai parlé. Nous avons l'obligation de fournir des renseignements au gouvernement fédéral qui en a besoin pour ses rapports sur l'état des forêts. Ces renseignements sont ensuite utilisés dans le cadre de tribunes nationales et internationales pour expliquer le rôle du Canada en ce qui a trait aux forêts. Nous prenons nos responsabilités très au sérieux. Nous prenons également très au sérieux nos responsabilités à l'égard de la Stratégie nationale sur les forêts. Nous en sommes signataires et notre province y participe très activement.

On vous a beaucoup parlé ce matin d'un projet qui s'appelle Lands for Life. Je ne vais pas entrer dans les détails, car d'autres intervenants le feront. Il s'agit d'un processus de planification de l'utilisation des forêts actuellement en cours en Ontario. Nous avons déjà effectué 13 mois de discussions publiques dans toute la province, du nord au sud. Trois tables rondes régionales ont été créées, qui viennent de soumettre leurs recommandations au gouvernement sur les diverses possibilités d'utilisation des terres dans la région de la province visée par cet exercice de planification.

J'aimerais vous parler des objectifs visés par cet exercice de planification. Il a tout d'abord pour but de compléter le réseau des parcs et des zones protégées de l'Ontario. Nous savons que nous devons mieux protéger notre patrimoine et ce, en vertu de principes écologiques. Nous avons déjà mis sous protection des terres de la taille de la Nouvelle-Écosse à peu près. Nous estimons qu'il faut faire davantage encore, pour des raisons écologiques.

Nous ne sommes pas en faveur d'une cible artificielle sous forme d'un pourcentage quelconque. Nous estimons qu'il faut décider des zones à protéger en tenant compte des ensembles écologiques et qu'il faut une représentation dans chacun de ces ensembles dans la province.

Le processus de planification, Lands for Life, reconnaît également les besoins du tourisme fondé sur les ressources naturelles, qui occupe une place importante dans notre économie. Nous voulons donner des assurances à ce secteur également. Le processus vise également à répondre aux besoins des utilisateurs des ressources, comme les industries forestières et minières et à leur donner certaines garanties à l'égard de leurs investissements dans la province. Nous voulons également améliorer les possibilités de chasse et de pêche du public.

Vous avez demandé des données sur la biodiversité. Je vais vous en parler brièvement. Comme vous le savez, les directives en matière de politiques générales sur la biodiversité proviennent de structures nationales et internationales. Encore une fois, nous prenons cela très au sérieux. Ces directives sont incorporées dans notre législation, la Loi sur la durabilité des forêts et le Manuel de planification de l'aménagement des forêts ainsi qu'aux lignes directrices qui s'appliquent à la gestion des forêts en Ontario. La loi exige que chaque plan d'aménagement réponde à des objectifs relatifs à la diversité biologique. Ces objectifs doivent tenir compte de la composition, de la structure et de la fonction des écosystèmes dans différentes échelles spatiales.

Notre planification de la gestion des forêts influe sur la composition et la structure des peuplements au moyen de pratiques sylvicoles. Vous avez vu les résultats de ce genre de pratiques hier lors de votre visite sur le terrain. Il existe de nombreuses règles et de nombreux traitements qui peuvent être appliqués sur les différents sites selon les besoins. Vous avez vu ce que cela donne.

Nous parlons, en Ontario, de l'état futur souhaitable des forêts. Lorsqu'on demande à une entreprise de préparer un plan d'aménagement forestier, on lui demande de décrire comment elle voit le site une fois la récolte terminée. Elle prévoit alors une série d'activités sylvicoles qui garantiront la régénération du peuplement coupé afin d'atteindre l'état futur souhaitable. Cet état futur doit prendre en compte non seulement l'approvisionnement en bois mais également l'habitat faunique, les activités récréatives et ainsi de suite.

Je ne vais pas passer en revue toutes les directives qui s'appliquent à la planification de la gestion des forêts. Elles sont énumérées en annexe. Il existe actuellement 19 directives concernant la faune. Dans mon mémoire, je vous donne un exemple d'application d'une directive qui doit être suivie pour l'habitat des martres. Cette espèce a besoin de grands espaces de forêt mature, et nous en tenons compte de plus en plus dans nos plans d'aménagement des forêts.

Notre approche de la gestion des forêts fait grand cas d'espèces de référence et doit veiller à ce que ces espèces particulières trouvent l'habitat qui leur convient. Nous pensons ainsi fournir des habitats qui conviendront à d'autres espèces qui ont des besoins semblables. Nous avons généralement pris comme référence des gros gibiers et d'autres espèces dont la survie à long terme est incertaine. Nous avons notamment utilisé l'orignal et le chevreuil, ainsi que des espèces vulnérables et menacées. Mais depuis peu, tout cela a changé et nous tenons plutôt compte des besoins de l'écosystème de l'environnement au lieu des besoins d'espèces particulières.

Cela n'empêche pas que nous gérions l'habitat de certaines espèces, du moment que cela ne menace pas le bien-être à long terme d'autres espèces ni le fonctionnement du système biologique. J'aimerais m'interrompre un instant, si vous le permettez. Il est intéressant de noter, si vous regardez la carte, les différentes régions de forêt de l'Ontario. Si vous regardez l'extrême sud de l'Ontario, vous apercevez une bande jaune. C'est la forêt à feuilles caduques. C'est ce qui reste. Il ne reste que 10 p. 100 de la forêt originale. Elle a disparu à cause des activités agricoles et de l'urbanisation.

Le sénateur Mahovlich: La maladie a-t-elle causé des pertes?

M. Thornton: Non, pas tant la maladie. La maladie de l'orme y est pour beaucoup.

Le sénateur Mahovlich: Est-ce qu'ils s'en remettent?

M. Thornton: Les ormes, après la maladie de l'orme, oui, mais ils demeurent fortement susceptibles de contracter la même maladie.

Le sénateur Mahovlich: Cette maladie n'a pas encore été vaincue.

M. Thornton: Non. Ce que je veux dire ici, c'est que l'on trouve dans cette section environ les deux tiers des espèces vulnérables, menacées et en danger d'extinction de l'Ontario. C'est simplement parce qu'il ne reste à cet endroit que 10 p. 100 de la forêt environ. La plupart des gens ne s'en rendent pas compte. Ils ont tendance à penser que le problème existe dans la forêt boréale. Ce n'est pas là où il existe.

Une chose importante à considérer pour le maintien des systèmes écologiques, c'est le besoin de gérer à différentes échelles spatiales. Non seulement faut-il gérer les caractéristiques particulières des habitats au niveau du peuplement des forêts, mais aussi au niveau des espaces verts, ce qui est un niveau très vaste. Le public et beaucoup de nos critiques l'oublient souvent.

Cette perspective à multiples échelles de la gestion des habitats exige que la planification au niveau de l'unité de gestion des forêts soit liée étroitement à de plus vastes systèmes d'aménagement des terres. J'ai parlé de l'application des lignes directrices sur l'habitat des martes des pins. Je n'irai pas plus en détail, sauf dire que cela a représenté un défi particulier pour nous parce que, en réservant une plus grande partie de l'ancienne forêt, le genre de forêt qui serait destinée à la coupe de bois -- nous avons eu une incidence sur les approvisionnements en bois disponibles. Ceux-ci ont ainsi pu être réduits.

Je crois comprendre que vous avez posé des questions sur les changements climatiques, et j'en glisserai donc un mot. Lorsque nous créons de l'information scientifique et technique pour guider les pratiques visant à conserver la biodiversité dans la forêt, nous commençons à penser aux incidences prévues des changements climatiques sur nos forêts. L'actuelle approche en Ontario à l'égard des changements climatiques consiste à gérer de sains écosystèmes forestiers qui sont diversifiés et résiliants. Parce que nous avons de plus en plus de preuves scientifiques du réchauffement de la planète, nous commençons à penser que nous allons peut-être devoir gérer de nouvelles conditions environnementales. Nos chercheurs scientifiques ont publié récemment un document préalable qui est percutant et qui est intitulé: «Les incidences des changements climatiques sur les forêts de l'Ontario.» Je crois que vous en avez obtenu un exemplaire.

Ce document mentionne que les incendies et les sécheresses peuvent être plus fréquents dans la forêt boréale du Nord-Ouest, lesquels peuvent être suivis d'une augmentation des foyers de maladies et d'insectes. De nouvelles associations végétales peuvent se produire. Certains écosystèmes peuvent ne pas être durables et les objectifs liés à la biodiversité peuvent devoir être modifiés. Nous tiendrons un atelier en novembre pour mettre notre personnel à jour à ce sujet. Nous respectons aussi les exigences relatives au rapport sur les changements quant à l'utilisation des terres dans les forêts, par l'utilisation de puits de carbone, comme l'exige le Protocole de Kyoto. Nous travaillons en étroite collaboration avec le gouvernement fédéral et nous participons à un certain nombre de comités que celui-ci parraine. Une fois de plus, c'est une question que nous prenons très au sérieux dans la province de l'Ontario.

J'aimerais maintenant parler brièvement de l'emploi dans l'industrie. Notre politique exige clairement que la santé à long terme de la forêt prime, mais elle reconnaît l'important rôle de la forêt pour les gens qui vivent ici et sa contribution notamment pour le nord de l'Ontario, et l'économie du Canada. En général, les collectivités qui vivent dans la forêt boréale ont des économies moins diversifiées que les collectivités du sud, et on dépend grandement de l'industrie forestière. Dans le nord de l'Ontario, près des deux tiers de la population vivent dans une collectivité où l'industrie forestière est importante pour l'économie. Dans près de 50 collectivités du nord de l'Ontario, il n'y a aucune autre industrie de base.

De nombreux résidents des collectivités forestières du nord sont beaucoup attachés à leurs lieux de résidence et de travail. La perte de possibilités d'emploi dans l'industrie forestière au sein de ces collectivités peut avoir des effets sociaux très importants.

En Ontario, nous coupons chaque année entre 23 et 24 millions de mètres cubes de bois, soit des ventes d'une valeur d'environ 15 milliards de dollars. Nous possédons 13 usines de panneaux, 40 grandes scieries, 10 usines de placages et 35 usines de pâtes et papiers. Nos usines de pâtes et papiers viennent au premier rang quant à la transformation du bois d'oeuvre en produits forestiers. Elles représentent environ les deux tiers de la valeur totale des expéditions de l'Ontario.

Le secteur forestier emploie quelque 87 000 personnes directement et 70 000 personnes indirectement, et il jouit d'un ratio assez élevé de 3,7 employés par mètre cube de bois coupé.

Je désire faire une pause ici parce que vous avez vu ce matin des chiffres nettement inférieurs. Les chiffres qu'on vous a fournis étaient incomplets et trompeurs parce qu'ils montraient seulement l'emploi dans le domaine de l'exploitation forestière. Ils ne tenaient pas compte de l'emploi dans le secteur manufacturier. Tout le monde qui travaille dans les scieries et les usines de pâtes et papiers n'était pas inclus dans ces chiffres. Il faut en tenir compte lorsqu'on examine ces chiffres. C'est pourquoi mes chiffres sont plus complets, lesquels indiquent 87 000 emplois directs et 70 000 emplois indirects.

L'autre chose que vous devez savoir, c'est que bon nombre des possibilités secondaires dans le secteur manufacturier existent grâce à l'industrie forestière. Le sud de l'Ontario en tire des bénéfices. C'est là où se trouvent les usines de fabrication de meubles. C'est là où sont souvent installées les usines de papier d'emballage, et ainsi de suite. Il faut tenir compte de cette perspective lorsqu'on parle de l'emploi dans l'industrie forestière.

J'ai mentionné notre ratio de 3,7 employés par mètre cube de bois coupé. C'est le plus élevé au Canada. Nous avons le nombre le plus élevé d'activités manufacturières à valeur ajoutée en Ontario et, une fois de plus, c'est en raison des effets de multiplication qu'il existe des possibilités secondaires dans le secteur manufacturier dans le nord et surtout dans le sud de l'Ontario. Il y a un lien très direct entre le nord et le sud de l'Ontario pour ce qui est des bénéfices tirés de l'industrie forestière. Les gens ont souvent tendance à l'oublier.

J'aimerais aussi faire une pause ici et parler un peu de l'argument relatif aux emplois. Cela fait aussi l'objet de fausses déclarations. Je crois qu'on a fait de fausses déclarations ici ce matin. Vous noterez que les critiques de l'industrie forestière invoquent rapidement l'argument des emplois, mais rarement celui des salaires et de l'investissement de qualité. Au début de la semaine, je me trouvais à Iroquois Falls. J'y ai visité une entreprise, l'Abitibi Consolidated. Le salaire moyen à cette usine est d'environ 80 000 $ pour un travailleur du papier, et il est probablement de 20 p. 100 de plus, disons 100 000 $ au total, si l'on tient compte du salaire et des avantages sociaux. Ce sont des emplois à temps plein, fortement rémunérés et hautement spécialisés.

De nombreux critiques diront que nous devrions convertir notre économie du Nord en une économie touristique axée sur les ressources. Une étude récente menée dans le nord-ouest de l'Ontario a montré que ces emplois sont saisonniers et que les salaires connexes sont nettement inférieurs, environ trois fois moins élevés. C'est un élément important lorsqu'on tente de déterminer le nombre d'emplois.

L'autre élément important dont il faut se souvenir, c'est l'investissement en capitaux. L'industrie forestière exige de nombreux capitaux. Cela a beaucoup d'effets de multiplication pour l'économie du Nord. La même usine de pâtes et papiers que j'ai mentionnée à Iroquois Falls dépense environ 40 millions de dollars par année en investissements de capitaux. Cela dépasse fortement le genre d'investissements de capitaux qu'on trouve dans le tourisme axé sur les ressources.

Je ne veux pas dire que le tourisme axé sur les ressources n'est pas valable pour le nord de l'Ontario. Il l'est. Nous devons nous assurer que celui-ci demeure une partie vibrante de notre économie, mais l'idée d'enlever en quelque sorte des emplois de l'industrie forestière et de supposer que ceux-ci seront plus que compensés par l'industrie du tourisme axée sur les ressources, par exemple, est très trompeuse. Ces industries doivent aller de pair. Leur coexistence est possible.

J'ai mentionné que nous avons un ratio de 3,7 employés par mètre cube de bois et qu'il est le plus élevé au Canada. Nous pensons qu'il faille l'augmenter encore. Nous désirons promouvoir un plus grand secteur manufacturier à valeur ajoutée dans cette province. Comme vous le savez, le Canada tire un avantage au plan de la concurrence parce qu'il est situé près du marché américain. Cela représente 90 p. 100 des exportations de l'Ontario.

Je veux dire quelques mots au sujet des droits à la Couronne. Les entreprises forestières versent des droits à la Couronne, qui sont souvent appelés «droits de coupe», pour chaque mètre cube de bois coupé. Les droits de coupe versés à la Couronne renferment trois éléments. Premièrement, il y a des droits de renouvellement de la forêt pour s'assurer que des fonds sont consacrés au renouvellement. Lorsqu'un arbre est coupé, un montant est versé dans un fonds en fiducie pour que ce secteur soit régénéré. Sénateur Mahovlich, la situation que vous avez décrite dans le parc ne se produirait pas dans le cas des forêts. Je connais aussi ce parc. J'y ai fait prendre mes photographies de mariage.

Le sénateur Mahovlich: Ne dites pas cela. S'il n'y a pas de surveillance, cela se produira.

M. Thornton: Le mécanisme utilisé en Ontario consiste à verser des montants dans un fonds en fiducie. Ces montants n'appartiennent pas à l'entreprise. Ils sont mis de côté dans un fonds en fiducie pour la forêt. Si cette entreprise devait faire faillite, l'argent demeurerait dans le fonds. Celle-ci ne peut pas présenter de réclamation à l'égard de cet argent.

Le sénateur Mahovlich: On pourrait peut-être utiliser ce fonds en fiducie pour remettre mon parc dans son état antérieur.

M. Thornton: Je ne pense pas.

Le sénateur Mahovlich: On a permis à cette société d'Australie de venir s'y installer.

M. Thornton: C'est une question à soulever auprès de nos amis de l'industrie minière.

Je désire parler un peu plus de la fiducie parce que je pense que c'est un élément particulièrement bon en Ontario qui n'existe pas dans d'autres parties de la province. Il y a aussi un deuxième fonds en fiducie. Vous avez entendu le Dr John A. Smith en parler. C'est le Forestry Futures Trust. Lorsqu'il est complètement fonctionnel, celui-ci dépense environ 10 millions de dollars par année pour fournir des incitatifs sylvicoles afin de traiter la lacune dont vous avez entendu parler.

Une troisième partie de nos droits de coupe va à la trésorerie de la province. Cette partie des droits se divise en deux éléments. Il y a un minimum fixe et des droits de valeur résiduaire. Ces droits de valeur résiduaire dépendent des marchés; par conséquent, lorsque l'économie est excellente et que des prix élevés sont payés pour les produits forestiers, nous obtenons alors au moyen de ces droits un montant plus élevé que lorsque les temps sont durs. Au total, ces droits versés au gouvernement -- non à la fiducie mais au gouvernement, à notre trésor -- se sont élevés à quelque 178 millions de dollars l'année dernière.

L'industrie forestière en Ontario n'est pas subventionnée. Par exemple, si nous prenons les chiffres de l'année dernière, nos recettes se sont élevées à quelque 143 p. 100 de nos dépenses, et le montant des droits payés par l'industrie forestière à l'Ontario est supérieur à ce que nous dépensons. À cet égard, il n'y a pas de subvention.

On m'a demandé de parler brièvement des peuples autochtones. La plupart, mais non la totalité des Premières nations de l'Ontario ont conclu des traités pour céder le titre de terres qui ne font pas partie de réserves. L'Ontario a accepté dans la plupart des cas qu'il existe des droits issus de traités de chasse et pêche pour la consommation personnelle, et un droit à la pêche commerciale de subsistance dans certains cas. Cependant, l'Ontario croit qu'il n'existe pas de droits autochtones issus des traités pour la coupe de bois commerciale. Aucune Première nation de l'Ontario n'a encore établi de clause pour soutenir l'existence d'un tel droit. Les efforts continus de l'Ontario pour accroître la participation autochtone dans le secteur forestier sont donc rattachés à un engagement à l'égard du développement économique autochtone plutôt qu'à l'égard de tout besoin perçu de remplir des obligations constitutionnelles ou découlant de traités. Cela est différent dans d'autres provinces. Par exemple, la Colombie-Britannique n'a pas de série complète de traités et, comme vous le savez, on travaille très fort pour y remédier.

Au Canada, l'existence d'un titre autochtone sur des territoires aurait une grande incidence sur la gestion des forêts. Lorsqu'un titre autochtone existe, les Premières nations doivent désirer assumer un rôle très important dans la planification de la gestion des forêts, l'attribution des forêts et même la coupe du bois. Même s'il n'y a pas de cas connu en Ontario où le titre foncier autochtone continue d'exister, il y a au moins un peuple autochtone, les Algonquins de Golden Lake, qui prétend n'avoir jamais cédé ses terres.

Par conséquent, peut-être à l'exception de la zone faisant l'objet de la revendication territoriale des Algonquins de Golden Lake, l'Ontario croit que l'actuel système d'attribution de privilèges de coupe de bois ne viole pas les droits autochtones ou les droits issus de traités. On reconnaît que les pratiques de coupe de bois peuvent avoir une incidence sur l'exercice d'autres droits, comme ceux liés à la trappe, à la chasse et à la pêche. Le système de planification de gestion forestière fournit un forum et un processus pour examiner ces valeurs et ces exigences.

Notre processus de planification inclut la détermination des valeurs autochtones, ainsi qu'un programme spécifique de consultations auprès des Autochtones pour les collectivités autochtones désireuses de participer à la planification de la gestion forestière.

Presque tous les bois de la Couronne de l'Ontario qui sont accessibles pour la coupe font l'objet d'engagements pris avec des sociétés forestières existantes. Toute initiative pour accroître l'attribution du bois de coupe aux Premières nations exigerait donc une réduction correspondante de l'attribution des sociétés forestières existantes. Parce que les sociétés forestières ont un important intérêt dans leur droit d'occupation, elles chercheraient certainement à obtenir des indemnisations pour ces réductions.

Vous avez entendu parler de la condition 77. C'est une obligation que nous avons d'accorder aux collectivités des Premières nations une plus grande part des bénéfices économiques de la gestion forestière. Nous comptons beaucoup sur l'industrie forestière comme principal fournisseur de possibilités de développement économique aux collectivités autochtones de l'Ontario. Nous faisons aussi beaucoup en tant que province et le gouvernement fédéral en fait aussi beaucoup. Le programme forestier des Premières nations en Ontario du gouvernement fédéral s'élève à environ 1,5 million de dollars par année et il a été utile pour ce qui est de l'acquisition des compétences et de la création d'une infrastructure commerciale en foresterie. Nous encourageons aussi l'investissement du gouvernement fédéral et du secteur privé. Nous avons un certain nombre d'initiatives concernant des programmes de lutte contre les incendies avec les Premières nations ici, et nous fournissons ce service aux collectivités des Premières nations et nous concluons des accords avec le gouvernement fédéral concernant la lutte contre les incendies dans les réserves et à proximité de celles-ci.

Finalement, j'aimerais parler des questions fédérales- provinciales que vous avez indiquées. Nous entretenons une très bonne relation de travail avec le Service canadien des forêts ici. Nous avons récemment signé, en mars 1998, un protocole d'entente qui couvre bon nombre de nos relations. Un aspect particulièrement positif de ce protocole d'entente est le travail que nous effectuons sur un réseau de surveillance de la santé dans les forêts, pour lequel nous partageons les ressources, tant financières qu'humaines, pour surveiller la santé des forêts. Nous avons connu certains excellents résultats à ce sujet. Durant la tempête de verglas, certains travaux ont pu être effectués dans l'est de l'Ontario.

Je tiens à mentionner que nous apprécions le travail du Service canadien des forêts qui a coordonné les activités nationales. Son travail sur la forêt modèle du lac Abitibi, qui est située pas très loin d'ici, est un très bon exemple de son engagement à l'égard d'une bonne gestion des forêts.

Parce que je sais que vous désirez poser des questions, je m'arrêterai donc ici et je serais heureux d'y répondre.

Le sénateur Whelan: Hier, monsieur le président, si vous vous rappelez, j'ai posé à un représentant de l'Ontario une question sur l'abandon du programme de distribution d'arbres gratuits. J'aurais dû indiquer qu'il s'agissait de la région du sud-est de l'Ontario où la forêt occupe seulement 10 p. 100 de la superficie. On laisse surtout les feuillus dans cette région. Vous avez appuyé le programme auquel la province a décidé de mettre fin, qui consistait à fournir des arbres pour reconstituer les terres forestières et à ajouter à celles-ci?

M. Thornton: Nous n'y avons pas mis fin au sens où les arbres ne sont plus accessibles. Nous avons dit aux propriétaires fonciers qu'ils devraient les acheter du secteur privé. Nous avons fermé nos pépinières. Nous les avons vendues à des intérêts privés qui rendent maintenant ces semis accessibles au public.

Le sénateur Whelan: Ils doivent maintenant acheter les arbres. Vous avez mis fin au programme de distribution d'arbres gratuits.

M. Thornton: C'est exact.

Le sénateur Whelan: De nombreux visiteurs viennent dans nos villes, par exemple, Toronto et les plus grandes villes. Lorsqu'ils montent dans la tour du CN ou à d'autres endroits du genre, ils déclarent «votre ville a l'air d'une forêt» et c'est le cas. À certains endroits, on ne peut pas voir les maisons en raison des arbres. N'avez-vous jamais songé au nombre de kilomètres carrés de forêts qui se situent dans des zones urbaines, des arbres qui dégagent de l'oxygène vivifiant?

M. Thornton: Non. Nous n'avons pas la compétence à cet endroit. C'est la responsabilité de l'administration municipale. Je sais que c'est considérable. Si vous parlez à la Ville de Toronto, par exemple, un certain nombre de leurs arboristes ont été très préoccupés de la santé de la soi-disant «forêt urbaine», ce qui est le terme utilisé pour décrire cela. Ils font un bon travail pour fournir un couvert arboré dans la Ville de Toronto.

Le sénateur Whelan: J'ai un autre commentaire sur la maladie de l'orme. J'ai dit à quelqu'un que l'une des dernières choses que j'ai faites avec une scie à chaîne a été de couper une grande partie d'une forêt de 35 acres située sur ma ferme, qui avait été inondée par le libre-échange -- je veux dire la maladie de l'orme. Vous savez, il y a beaucoup de choses comme cela. J'ai de fortes réserves concernant certaines choses, comment elles sont venues en Amérique du Nord, et les dommages qu'elles continuent de causer. Nous avons des arbres qui deviennent environ de cette taille et qui ensuite sont frappés par la maladie, et ils s'en remettront. Ils dureront peut-être 10 ou 15 ans et seront ensuite détruits de nouveau par la maladie. C'est une chose terrible.

Le président: Merci, sénateur Whelan. Je suis sûr que le président Clinton serait heureux d'apprendre que la maladie de l'orme hollandais est une maladie américaine.

Le sénateur Whelan: Elle est venue de Hollande et elle est passée aux États-Unis et ensuite au Canada.

Le président: Elle est entrée en douce par la porte arrière.

Le sénateur Mahovlich: Je disais juste que Toronto est une région extraordinaire pour la forêt et, en particulier, nos cimetières. Ils renferment de nombreuses espèces. Si vous voulez passer un dimanche après-midi, des visites des cimetières de Toronto sont organisées. C'est une belle façon de passer une journée.

Le président: Y a-t-il une preuve de l'origine de la tombe en ce qui concerne le type d'arbre qui y pousse?

Le sénateur Mahovlich: Mes parents sont enterrés au nord de Toronto, autoroute 7 et rue Yonge. Il y a un bel érable plane «Crimson King» juste à côté de leur tombe. Je vais souvent l'admirer. Chaque année, il devient plus gros et il s'améliore. Il est très beau.

Je veux revenir à la question de subventionner nos exportations. Nous les subventionnons réellement, parce que notre dollar se situe à 60 cents. Nous devons faire bien attention de ramener notre dollar à son niveau antérieur. Au Canada, notre attitude était que c'était bon pour nos exportations, mais lorsque nous regardons tout le tableau, nous laissons partir ce bois dans le monde entier sans obtenir réellement ce que nous méritons pour celui-ci.

Je désire faire un commentaire aussi sur l'excellent travail de M. Naysmith et de certains de ses collègues. Je pense que c'est fantastique, et cela m'a réellement éclairé quant au travail effectué actuellement. Je suis plus positif qu'avant de venir ici, parce que j'ai entendu tellement de choses négatives sur nos forêts durant les 10 ou 20 dernières années. Je pense pouvoir retourner à Toronto et au gouvernement en ayant réellement une bonne attitude à l'égard de nos forêts et de l'avenir de notre pays. La forêt représente plus d'emplois que toute autre industrie et j'ai beaucoup aimé venir passer la journée à Timmins.

Le président: Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de faire un commentaire à ce sujet. Vous ne pouvez pas vraiment ajouter quelque chose à cela.

Je note la frontière nord de la forêt boréale. Y a-t-il un indice que le réchauffement climatique fasse passer cette frontière nord dans les basses terres?

M. Thornton: L'une des incidences du réchauffement climatique que nous prévoyons est une fonte accrue de la calotte polaire. Les niveaux d'eau augmenteront à cet endroit, et vous verrez donc l'eau avancer sur les côtes situées le long de la baie d'Hudson et de la baie James, par exemple.

Le président: Cela n'aidera pas la forêt à se déplacer vers le Nord.

Le sénateur Spivak: Dans votre exposé écrit, il y a un commentaire étonnant. Celui-ci laisse entendre que si l'on augmentait l'allocation de coupe des Premières nations, il y aurait des indemnités pour les sociétés forestières. Sur quoi fondez-vous votre déclaration? Il y a eu des décisions judiciaires qui montrent l'importance des utilisations traditionnelles. En fait, la plus récente décision constituerait une très bonne base pour la preuve sur l'utilisation du sol. Je suis simplement curieuse de savoir si vous soutenez entièrement cette déclaration.

M. Thornton: Ce que je voulais dire dans mon exposé, c'est que nos obligations découlent de deux sources, à savoir des obligations constitutionnelles à l'égard des Premières nations et des obligations relatives aux traités. Pour ce qui est des obligations relatives aux traités, elles sont claires: il n'existe aucun titre. En ce qui concerne la coupe de bois, s'il existe des décisions de la Cour suprême sur les droits constitutionnels des Premières nations de couper du bois, nous serions alors tenus de suivre l'orientation des tribunaux. À notre avis, cela reviendrait essentiellement à enlever du bois aux sociétés qui auraient déjà obtenu un permis pour celui-ci. Ce faisant, nous nous attendrions que les sociétés forestières demandent des indemnités si elles perdaient du bois de cette manière.

Pour mettre cela en perspective, une situation semblable existe en ce qui concerne les pêches commerciales sur les Grands Lacs, pour lesquelles les tribunaux nous ont indiqué qu'il existe une obligation de fournir des possibilités de pêche commerciale aux Premières nations. Par conséquent, nous rachetons des permis que détiennent des pêcheurs non autochtones.

Le sénateur Spivak: A-t-on cessé de rejeter tous les effluents des usines de pâtes et papiers dans les Grands Lacs?

M. Thornton: A-t-on cessé? Non. Ont-ils été réduits considérablement et répondent-ils aux normes provinciales? Oui. Lorsqu'ils ne répondent pas aux normes, bien sûr, des programmes de surveillance sont en place et des accusations sont portées contre les entreprises en raison de ces excès.

Le sénateur Spivak: L'état des Grands Lacs exige que l'on cesse de rejeter ces effluents. Le gouvernement de l'Ontario prévoit-il quand cela se produira?

M. Thornton: La discussion sur les rejets d'effluents porte sur la quantité.

Le sénateur Spivak: Le rapport de la Commission mixte internationale pour les Grands Lacs a indiqué très clairement que ceux-ci doivent cesser, sinon la santé des Grands Lacs ne pourra pas être maintenue.

M. Thornton: On peut rejeter de l'eau traitée dans les Grands Lacs.

Le sénateur Spivak: Bien sûr, mais je parle de rejeter des toxines dans les Grands Lacs. C'est ce dont je parle.

M. Thornton: Oui. On les surveille. Un programme de surveillance est en place, comme vous le savez, et tous les excès doivent être signalés et faire l'objet de mesures, non seulement par l'industrie forestière mais aussi par les municipalités relativement au traitement de leurs déchets.

Le sénateur Mira Spivak (vice-présidente) occupe le fauteuil.

La vice-présidente: Bienvenu, monsieur Quinney. Je pense que nous devrions commencer parce qu'il nous reste très peu de temps.

M. Terry Quinney, coordonnateur provincial, Service des pêches et de la faune, Ontario Federation of Anglers and Hunters: Je suis, de par ma formation, un biologiste et un écologiste de la faune, et un ex-professeur adjoint de zoologie à l'Université de Guelph.

L'Ontario Federation of Anglers and Hunters est une organisation de conservation non gouvernementale qui se consacre à la santé de l'environnement, du poisson, de la faune et à leurs habitats, et elle s'occupe de promouvoir des activités récréatives et traditionnelles connexes, comme la pêche et la chasse. Vous savez, je l'espère, que les retombées économiques de la pêche et de la chasse publiques provenant des terres publiques de la province de l'Ontario sont de plus de 4 milliards de dollars par année et créent plus de 100 000 emplois.

Notre organisation compte 80 000 membres cotisants et environ 600 clubs affiliés dans toute la province de l'Ontario. Nous avons des filiales dans toutes les provinces et tous les territoires.

Au nom de mon organisation, je vous remercie de me donner la possibilité de m'adresser à vous ce matin. Je désire aussi exprimer une fois de plus nos remerciements au sénateur Whelan, qui est un partisan de la protection de l'environnement et un ami de l'Ontario Federation of Anglers and Hunters depuis de nombreuses années.

J'aimerais aussi en profiter pour souhaiter la bienvenue au nouveau sénateur de l'Ontario, le sénateur Mahovlich. À titre d'organisation, nous serons heureux de travailler en étroite collaboration avec vous.

La protection des valeurs et des bénéfices de nos forêts publiques est extrêmement importante pour nos membres. La gestion des forêts publiques pour que la génération actuelle et les générations futures puissent en tirer le plus d'avantages possibles est notre objectif global. Ce matin, brièvement, j'aimerais vous présenter les approches possibles pour la protection de la diversité biologique dans les forêts boréales de l'Ontario et, en fait, dans le reste du Canada.

D'abord, je vous ai fourni deux documents. L'un d'eux est un document technique intitulé «Practical Integration of Landscape Ecology Principles in an Operational Forest Management Plan», dont les auteurs sont Edward Hanna et Mike Martel. J'ai noté dans la documentation que vous avez fournie que vous aviez visité, il y a quelques années, les opérations forestières de Meadow Lake, en Saskatchewan. Nous appuyons fortement l'approche de gestion des Mistik en ce qui concerne leurs pratiques d'aménagement forestier à cet endroit. Nous aimerions que ce type de modèle se répande dans tout le pays et, en fait, qu'il soit adopté dans la province de l'Ontario.

Ce que je veux dire, c'est que ce document technique fournit la justification scientifique, si vous voulez, de l'approche que nous suggérons et préconisons dans la province de l'Ontario aussi. Je n'ai aucunement l'intention de vous faire la lecture de ce document technique. Je vous prierais de le faire durant vos délibérations. Lorsqu'il rédigera son rapport, si votre personnel aimerait que nous lui venions en aide, nous serions heureux de le faire. Il suffit de nous téléphoner.

Le deuxième document, je l'ai intitulé «Practical Approaches to the Conservation of Biological Diversity». Pour ne pas prendre trop de temps, je n'en ferai pas une lecture intégrale, mais j'aimerais parcourir rapidement certaines pages pour vous donner les points saillants.

De toute évidence, la protection de la diversité biologique est une question d'intérêt public extrêmement importante, non seulement en Ontario mais dans tout le Canada. Je pense pouvoir dire sans me tromper que ceux qui s'intéressent à la forêt s'entendent pour dire que la protection de la diversité biologique est très importante pour l'avenir de nos forêts. À la page 3 de mon document, nous mentionnons qu'on confond malheureusement la protection de la biodiversité et la création de zones protégées à des fins exclusives. La biodiversité ne sera pas protégée grâce à un réseau de zones protégées représentatives, et nous sommes fondés au plan écologique de faire cette déclaration.

À la page 4, nous notons que la création de nombreuses zones protégées représentatives par crainte d'une perte sur le plan de la biodiversité à un moment donné, en raison d'une activité indéterminée encore à proposer, comporte un coût élevé pour les possibilités quant aux bénéfices abandonnés sur le plan des ressources. Des zones protégées représentatives découragent fortement la création d'utilisations mieux adaptées et plus compatibles au plan écologique. Plutôt, ces zones protégées représentatives encouragent en fait fortement l'utilisation du reste du territoire de manière plus intensive et moins souple.

Si on accepte la réalité écologique que le cycle des écosystèmes, les composantes des écosystèmes, est en fait dispersé dans tous les espaces verts, dans toute la forêt, et que celui-ci change constamment en raison des forces écologiques naturelles, telles la succession et les perturbations naturelles comme les incendies de forêt ou les insectes, la protection de la diversité biologique d'une perspective écologique exige alors de gérer tous les espaces verts. C'est probablement le message le plus important que nous aimerions vous transmettre ce matin.

Est-ce que cela veut dire que tout le territoire doit être réservé pour des zones protégées à utilisation exclusive? Non. La totalité du territoire n'a pas besoin d'être préservée en zones protégées à utilisation exclusive. Plutôt, elle doit être mieux gérée pour que les caractéristiques et la dynamique écologiques fondamentales soient protégées de façon raisonnable.

Dans le document technique de Hanna et Martel, on trouve une stratégie pratique de gestion de l'ensemble des espaces verts pour conserver la diversité biologique tout en permettant le maintien de multiples utilisations de ce territoire. Nous appelons cela une approche de gestion totale des espaces verts ou une approche des «réserves flottantes».

Pour maintenir ce cycle écologique, la protection de la diversité biologique exige que des activités particulières en matière d'exploitation forestière et minière soient conçues et exécutées dans un contexte d'espaces verts. Les propositions des secteurs forestier et minier doivent montrer que des zones écologiques comparables existent dans les espaces verts et qu'elles y demeureront probablement durant les activités forestières ou minières. Voilà les réserves flottantes auxquelles nous faisons allusion. Elles servent de zones de vérification scientifique pour la durée des produits forestiers ou miniers. De plus, des plans après perturbation, des choses comme des plans de régénération, des plans de fermeture, ont été conçus. C'est le point très important que le sénateur Mahovlich a soulevé. Ils doivent être conçus. Ils doivent être réalisés pour remettre le site perturbé dans le cycle écologique naturel des espaces verts. Ce sont là les deux composantes essentielles de cette approche de gestion totale des espaces verts.

Nous constatons que cette stratégie de gestion totale des espaces verts fournit des incitatifs positifs pour accroître notre connaissance écologique, pour promouvoir la protection efficace et, en fait, pour remettre le plus tôt possible les sites perturbés dans leur état écologique antérieur. Par ailleurs, cela nous permet d'utiliser judicieusement nos ressources naturelles.

À la page 11, nous résumons les raisons de cette solution de rechange à la sagesse traditionnelle, au statu quo.

À la page 12, nous résumons les moyens. Pour appliquer cette nouvelle approche, ce nouveau paradigme, d'abord et avant tout, l'industrie forestière doit faire de la protection de la diversité biologique sa principale exigence. Cela doit être le principal facteur qui oriente sa gestion et ses activités. Cela aurait préséance, par exemple, sur l'approvisionnement en bois des usines. Cela ne veut pas dire que l'approvisionnement en bois de ces usines ne va pas être un important élément à prendre en considération. Il l'est; mais la principale chose à prendre en considération devrait être la protection de la diversité biologique.

Des sites exceptionnels, de grande valeur et uniques sont situés dans les espaces verts. Bien sûr, ceux-ci exigent une gestion exceptionnelle. Des zones protégées à frontières préétablies sont souvent justifiées pour ces sites en raison de leur caractère permanent et de leur nature délicate. Cependant, ces sites exceptionnels représentent une faible partie de tous les espaces verts, probablement 1 p. 100 environ. Ces sites exceptionnels nécessitent une gestion spéciale, soit par des zones protégées représentatives, soit par la gestion de la totalité des espaces verts/des réserves flottantes.

Permettez-moi de résumer. Le besoin de protéger la diversité biologique ne pose pas de problème. Le problème, c'est comment mieux le faire sur ces terres publiques. Jusqu'à maintenant, on a largement accepté le besoin de zones protégées représentatives pour protéger la biodiversité. Autrement dit, vous réservez de 20 à 30 p. 100 du territoire, sans y permettre les industries forestières, les industries minières, l'industrie hydroélectrique. Ensuite, sur les 70 p. 100 qui restent, les activités de toutes celles-ci sont réalisées, ce qui donne lieu en fait à une utilisation plus intensive du reste du territoire.

À mon avis, le résultat final, c'est que la protection de la diversité biologique exige que la totalité du territoire soit gérée judicieusement. Nous croyons que des outils pratiques ont été créés, en fait, à cette fin précise.

Pour conclure, la sagesse traditionnelle préconise de réserver de 20 à 30 p. 100 de nos terres publiques afin de les protéger, essentiellement, pour des activités récréatives élitistes, et de permettre ensuite des activités intensives réalisées par les industries sur les 70 p. 100 du territoire qui restent. Nous réfutons cette sagesse traditionnelle. Nous demandons qu'on fasse preuve d'une certaine créativité. Il existe plus qu'une façon de faire les choses en l'occurrence. Ce n'est pas une question d'une option unique, ou ce n'est pas noir ou blanc, lorsqu'il s'agit de la gestion des terres publiques et des biens publics. En d'autres termes, pour permettre ces bénéfices multiples, des approches créatives sont nécessaires. Il y a d'autres choix que la société peut faire. À mon avis, la solution ne consiste pas à avoir de plus en plus de parcs, et ce sans fin. La solution, c'est une nouvelle approche et une nouvelle façon de penser.

Le sénateur Nicholas W. Taylor (président) occupe le fauteuil.

Le président: Merci beaucoup. J'invite madame Thib-Jelly et M. Randy Pickering à faire leur présentation.

Mme Bettyanne Thib-Jelly, présidente, table ronde sur la forêt boréale est, Lands for Life: Je suis une fille du nord de l'Ontario. Je suis née à Haileybury et j'ai vécu à Callander, Schumacher et Englehart, où j'ai été membre du conseil pendant 18 ans. Je suis mairesse depuis huit ans. J'ai été enseignante pendant 36 ans. La diversification du développement économique et la conservation sont mes priorités.

Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour présenter aux membres de votre sous-comité mon point de vue sur l'initiative du gouvernement de l'Ontario en matière de planification de l'utilisation des terres, Lands for Life. Les recommandations des trois tables rondes de Lands for Life ont été remises au ministre des Ressources naturelles et elles devraient être rendues publiques dans les prochaines semaines. Par conséquent, mes commentaires d'aujourd'hui porteront sur les objectifs de Lands for Life, sur certaines observations faites par des habitants de l'Ontario sur cette question et sur le processus entrepris par le gouvernement et les tables rondes. Nous vous fournirons un exemplaire des recommandations des tables rondes dès qu'elles seront rendues publiques.

En Ontario, les terres de la Couronne comprennent des forêts, des minerais, des lacs et des rivières. Elles contiennent l'habitat de milliers d'espèces de plantes, d'animaux et de poissons. Il s'agit d'une richesse naturelle que nous partageons. Lands for Life représente l'engagement du gouvernement de l'Ontario à l'égard de la protection et de la conservation à long terme de nos ressources naturelles. Par l'intermédiaire de Lands for Life, la population a son mot à dire sur ce que l'on peut faire ou non sur les terres de la Couronne, car elle participe à un processus de planification qui mènera à ces importantes décisions. Lands for Life complétera le système des parcs et des zones protégées de l'Ontario, offrira de nouveaux débouchés touristiques axés sur les ressources, apportera une plus grande certitude aux utilisateurs des ressources et ouvrira de nouvelles possibilités de loisirs de plein air, comme la chasse et la pêche.

Lands for Life représente une superficie de 46 millions d'hectares, c'est-à-dire presque le double de l'ensemble des provinces de Terre-Neuve, de Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard. Une table ronde régionale a été mise sur pied pour chacune des trois régions de planification, les régions boréale ouest, boréale est et Grands-Lacs-Saint-Laurent. À chaque table ronde siègent des gens qui vivent dans la région de planification et qui ont été nommés par le ministre des Ressources naturelles pour formuler des recommandations sur la planification de l'utilisation des terres. Les trois tables rondes ont entamé leurs travaux en juin 1997 et ont présenté leurs recommandations provisoires au ministre le 31 juillet 1998.

En Ontario, la dernière planification générale de l'utilisation des terres entreprise date du début des années 80. Depuis lors, notre société a beaucoup évolué. Les besoins des utilisateurs ont changé de même que notre connaissance de l'environnement, de nos ressources ainsi que nos pratiques de gestion. L'obtention des ressources fait l'objet d'une concurrence de plus en plus forte, mais sans que nous disposions des mécanismes nécessaires pour résoudre rapidement les conflits. Les différents au sujet des décisions relatives à l'utilisation des terres finissent de plus en plus devant les tribunaux, ce qui entraîne des retards coûteux et une incertitude croissante au sujet de l'avenir.

Les questions liées à l'utilisation des terres sont très complexes, et il nous faut un nouveau processus pour déterminer le meilleur moyen de protéger nos terres pour les générations futures.

À l'issue de la phase 1 de Lands for Life, le gouvernement approuvera des stratégies régionales d'utilisation des terres qui comprendront des décisions globales sur l'utilisation des terres et l'affectation des ressources pour les trois grandes régions de planification. Compte tenu des grandes superficies en cause, la phase 2 de Lands for Life portera sur l'élaboration de stratégies sous-régionales qui établiront la gestion détaillée et l'orientation de l'utilisation des terres pour 12 à 15 unités de planification écologiques qui recouvrent l'ensemble de l'Ontario.

J'utiliserai l'exemple de la région de planification de la forêt boréale est et la table ronde sur la forêt boréale est, dont j'ai eu l'honneur d'être présidente, pour illustrer l'ampleur des questions de planification auxquelles nous avons été confrontés et pour vous donner une idée de l'évolution du processus.

La participation du public a été un élément très important de l'élaboration des recommandations concernant la planification de l'utilisation des terres dans la région boréale est. Dès le début, nous avons encouragé le public à communiquer avec nous par lettre, courrier électronique, télécopieur et courrier vocal et à faire des présentations à la table ronde. Nous avons reçu environ 1 500 lettres, télécopies et présentations individuelles, que nous avons examinées.

De plus, la table ronde sur la forêt boréale est a reçu près de 4 000 réponses à un questionnaire dans lequel on posait au public des questions précises sur les objectifs fixés par la table ronde et sur les cinq options préliminaires d'utilisation des terres qui ont été publiées le 26 mars 1998. Pour analyser l'information, nous avons étudié en détail les commentaires constructifs du public et les références à des endroits particuliers de la région boréale est. De plus, nous avons préparé un résumé de l'ensemble des réponses à ce questionnaire. Les membres de la table ronde se sont servis des résultats de cette analyse pour élaborer les recommandations.

La table ronde a également pris des mesures concrètes pour rencontrer directement les membres du public et écouter ce qu'ils avaient à dire. Deux séries d'audiences publiques ont eu lieu dans diverses collectivités de la région boréale est. La première série de rencontres publiques a eu lieu à l'automne 1997. Nous avons été accueillis dans les collectivités de Timmins, Kapuskasing, Cochrane, Hearst, Englehart, Manitouwadge, Chapleau, Marathon et Wawa. La table ronde a entendu 199 présentations, et un total de 766 personnes ont assisté à ces rencontres.

De plus, la table ronde a également participé à des audiences publiques mixtes, qui se sont déroulées à London, Ottawa, Toronto et Kingston. Une deuxième série d'audiences publiques a eu lieu aux mois de mars et avril 1998. Ces audiences ont également été organisées dans divers endroits de la région de planification, notamment White River, Chapleau, Timmins, Iroquois Falls, Constance Lake First Nation, Smooth Rock Falls et Kirkland Lake. Nous avons visité à peu près toute la région. Nous nous sommes également rendus une seconde fois à Toronto, London, Kingston et Ottawa.

Environ 850 personnes ont assisté aux audiences dans le sud de l'Ontario et à peu près 3 600 dans la région boréale est.

La table ronde a étudié tous les aspects des contributions publiques et a essayé d'utiliser au mieux les nombreux points de vue. L'ensemble des contributions du public a permis d'établir une base de connaissances précieuses qui nous ont aidés à formuler les recommandations provisoires en essayant d'établir un équilibre entre la protection et l'utilisation des ressources naturelles dans la région boréale est.

Voici quelques exemples de ce que les gens nous ont dit. Parmi ceux qui ont parlé d'environnement, plusieurs groupes souhaitaient protéger les terres humides, les anciennes forêts et les zones où se trouvent des types de végétation unique ou limitée. On nous a fréquemment demandé de limiter le nombre des routes dans les zones protégées et de faire en sorte que ces zones soient suffisamment vastes pour contenir des processus naturels représentatifs.

Soucieux de stabilité économique et communautaire, les conseils municipaux, les chambres de commerce et les sociétés de développement économique ont insisté sur le fait que les mines et la foresterie sont les industries de base du nord de l'Ontario et que le tourisme joue aussi un rôle important. Toute décision qui nuit à leurs activités aura un effet direct négatif sur les collectivités qui en dépendent.

Les propriétaires de chalet et autres utilisateurs des terres de la Couronne à des fins récréatives ont souligné le fait que les activités forestières les empêchent de profiter pleinement de leurs loisirs lorsqu'elles sont autorisées à trop se rapprocher des zones d'utilisation. La plupart favorisent le concept d'utilisation multiple, mais acceptent que l'on impose des limites à certaines utilisations et industries.

L'industrie forestière a fait valoir qu'elle avait beaucoup changé au cours des deux dernières décennies et qu'elle s'est montrée souple et prête à gérer la forêt en vue d'une multitude d'avantages. Aujourd'hui, l'industrie est limitée par la superficie actuelle et par le nombre des nouveaux règlements et règles. Toute nouvelle réduction aura des effets économiques préjudiciables.

Certains groupes, organisations et particuliers autochtones n'acceptent pas l'hypothèse que le gouvernement de l'Ontario a le droit d'énoncer des politiques sur l'utilisation des terres. Certains souhaitent la tenue de négociations entre gouvernements sur ces questions, mais seulement une fois que leurs revendications territoriales auront été réglées.

L'industrie de la prospection et de l'exploitation minières préconise fortement l'utilisation multiple, faisant valoir qu'elle peut exister en harmonie avec d'autres utilisateurs. Une mine n'utilise actuellement qu'une superficie de terre très limitée. L'exploitation minière est une utilisation temporaire des terres et il existe déjà des lois rigoureuses concernant la remise en état.

Parmi ceux qui souhaitent davantage de parcs et de zones protégées, beaucoup voudraient que l'on fixe un pourcentage pour les terres réservées, allant de 10 à 20 p. 100 de l'ensemble. Ceux qui préconisent la présence d'importantes zones de nature sauvage aimeraient qu'elles soient exploitées dans le cadre de processus naturels.

Les pêcheurs à la ligne, les chasseurs et les trappeurs sont généralement en faveur d'un accès illimité à toutes les ressources naturelles. Beaucoup estiment que la valeur monétaire de leurs activités n'est pas bien calculée et n'est donc pas bien comprise en terme de contribution économique.

L'industrie du tourisme demande que l'on protège les installations éloignées de l'accès par la route et qu'elle participe davantage aux décisions sur l'utilisation des terres qui nuit à ses installations. Toutes les activités ont besoin d'être protégées de l'intrusion de l'exploitation minière et forestière.

Voilà donc un petit échantillon des réponses du public au processus de planification de Lands for Life. Je suis sûre que votre sous-comité a déjà entendu des commentaires semblables de la part de citoyens de l'Ontario aux tables rondes et, comme les tables rondes, vous savez que les solutions ne sont pas simples.

Dans leurs recommandations au ministre des Ressources naturelles, les tables rondes ont tenté de concilier de nombreux intérêts concurrents. Elles ont tenté de maintenir un équilibre précaire entre les besoins d'aujourd'hui en matière d'utilisation des terres et des ressources et les besoins des générations futures. Ce faisant, les tables rondes ont été particulièrement sensibles aux situations économiques et sociales de nos collectivités du Nord.

En tant que présidente d'une table ronde, j'ai été impressionnée par le temps et l'énergie que tous les membres ont consacrés à cette tâche difficile. J'aimerais souligner le travail du personnel dévoué et professionnel du ministère des Ressources naturelles qui a aidé la table ronde pendant tout ce processus passionnant et informatif. Leurs idées et leurs opinions nous ont aidés dans notre réflexion tout au long de cette entreprise.

J'ai été également impressionnée par l'intérêt manifesté par les très nombreuses personnes et organisations qui ont participé au processus de planification de Lands for Life. Les tables rondes ont dû faire face à d'énormes difficultés, et les attentes de tous les intervenants étaient très élevées.

Lands for Life pourrait bien être le processus de consultations publiques le plus important et le plus général sur la planification de l'utilisation des terres qui ait jamais eu lieu en Ontario. Bien entendu, certaines critiques ont été exprimées et, comme dans n'importe quel processus, certaines sont justifiées. Tous les participants ont beaucoup appris et continueront d'apprendre, mais je crois fermement qu'en fin de compte, il en résultera des décisions sur une meilleure utilisation des terres pour l'ensemble de la population de l'Ontario.

Je termine ici mes remarques. Je serai heureuse de répondre à des questions générales sur le processus de planification de Lands for Life et le travail des tables rondes. Si vous avez des questions plus précises, M. Pickering sera mieux en mesure que moi d'y répondre.

Le président: Merci. Nous allons attendre la période des questions.

M. Tony Belcourt, représentant la nation métisse de l'Ontario. Je suppose que ce sont les membres de la nation métisse qui sont derrière vous. Assurez-vous de lire ce qu'ils vous ont dit de dire.

M. Tony Belcourt, membre du Conseil des gouverneurs, Métis national Council: Il me faudra alors plus de dix minutes.

Merci monsieur le président de me donner l'occasion de faire une présentation. J'espère que vous conviendrez que le Métis National Council doit faire une présentation et que nous devrions disposer de plus de dix minutes.

J'aimerais rappeler ce que vous avez dit lorsque M. Jacques Carette, directeur général à Ressources naturelles Canada a comparu ici. J'aimerais vous citer, sénateur Taylor:

Vous avez parlé de gestion forestière, mais vous n'avez pas mentionné les peuples autochtones. On entend des voeux pieux à leur sujet dans chaque exposé, mais lorsqu'il s'agit de faits concrets, c'est-à-dire comment ils s'intègrent au développement des concessions et de la forêt, il semble rait qu'il n'y a rien du tout, sauf quelques conseils concernant l'emplacement des chevreuils et des orignaux. Il n'y a aucun effort véritable de gestion conjointe, ni par le gouvernement fédéral ni par les gouvernements provinciaux, pour aménager ce qui leur appartient essentiellement.

Le président: C'est ce que j'ai dit?

M. Belcourt: C'est ce que vous avez dit, monsieur.

Le président: Cela me paraît plutôt bien.

M. Belcourt: En effet. Au cours du peu de temps qui m'est imparti, j'espère faire comprendre aux membres du comité l'importance critique de votre comité et de vos travaux ici pour la nation métisse. Ailleurs, le président du comité a dit, le jeudi 13 mars:

Des membres des réserves des Premières nations très au nord de Edmonton nous ont également appris que les métis avaient été exclus de la stratégie de conservation de l'Alberta.

Je pense, monsieur, et membres du comité, que si vous regardez les témoignages et les exposés qui ont été faits au comité, que j'ai pu consulter jusqu'à présent dans l'Internet, vous verrez qu'on a beaucoup parlé des Premières nations, de l'importance de la forêt pour les Premières nations et du rôle des Premières nations dans la conservation et la gestion des forêts. Mais il n'est nulle part question des métis et il n'en sera pas question à moins que nous nous présentions nous-mêmes.

J'aimerais vous parler des métis. Je sais, sénateur Taylor, que vous me connaissez bien, mais ce n'est peut-être pas le cas des autres membres du comité. Il est dit ici qu'environ 500 collectivités des Premières nations vivent dans la forêt boréale. Il n'y est pas du tout question des collectivités métisses. Si vous allez voir le secrétariat des Affaires autochtones de l'Ontario au centre-ville de Toronto et demandez les renseignements sur les peuples autochtones de l'Ontario, vous trouverez des cartes qui vous montrent les collectivités des Premières nations. Vous n'en trouverez pas qui indiquent les collectivités métisses. En fait, on ne trouve nulle part le mot «métis». Nous sommes partie à une affaire judiciaire, une affaire de chasse, à Sault Ste. Marie. Si vous en lisez la transcription, vous verrez que le gouvernement de l'Ontario a déclaré, dans ses témoignages entre juin et septembre, qu'il n'y a pas de collectivités métisses en Ontario et que, s'il y en a, les gens qui y vivent et qui pourraient s'appeler des métis n'ont pas de droits.

Les livres d'histoire de cette province ne mentionnent absolument pas notre peuple. Et on ne parle pas non plus des 5 000 $ de prime demandés pour la tête de Riel par la législature à Queen's Park.

Nous sommes des citoyens et nous payons des impôts de toutes sortes: taxe de vente provinciale, TPS, impôts sur le revenu, impôts fonciers, que nous soyons locataires ou propriétaires. Pourtant, nous ne pouvons pas être représentés. Je ne peux pas rencontrer les ministres du gouvernement de l'Ontario car nous sommes officiellement non existants. C'est la situation tragique dans laquelle nous nous trouvons.

On parle dans ces témoignages de l'importance des droits de chasse, des droits autochtones et des droits issus de traités pour les Premières nations. Ces intérêts sont tout aussi importants pour les métis que pour les Premières nations. Pourquoi sommes-nous reconnus comme l'un des peuples autochtones dans la Constitution du Canada si nous ne sommes pas du tout pris en compte? Je demande au comité de s'intéresser aux Métis plus longtemps que pendant les dix minutes qui me sont imparties aujourd'hui.

J'aimerais mentionner quelques faits. Vous avez parlé des obligations fiduciaires du fédéral à l'égard des peuples autochtones. Mais l'on ne parle jamais des obligations fiduciaires à l'égard des métis. Il y en a pourtant. Elles doivent être déterminées et prises en considération.

On parle constamment de l'appui au développement pour les Premières nations. Il existe un programme de foresterie des Premières nations. Des fonds sont affectés au développement économique et à la recherche, mais rien de cela n'existe pour les métis. On parle de perte de piégeage et de ce que cela signifiera pour les Premières nations, mais rien sur les conséquences pour les métis.

J'aimerais que le comité se rende compte que quelque chose d'insidieux est en train de se produire au niveau fédéral. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord perpétue le mythe selon lequel les peuples autochtones du Canada sont les Premières nations. D'autres sont intégrés sans le vouloir à cette tromperie. Le peuple métis du Canada existe. Nous existions dans nos collectivités bien avant que les autres collectivités soient établies, il y a des centaines d'années, dans ce qui deviendrait la province de l'Ontario. C'est une réalité historique.

L'autre réalité, c'est que nous sommes bien vivants et toujours ici. Pour des raisons administratives, le ministère des Affaires indiennes et du Nord a éliminé notre peuple des listes, bien qu'elles aient été parties aux traités, en inventant des prétextes fallacieux. Nous avons maintenant un ministère qui traite avec un certain segment de la population autochtone du Canada et ignore les autres. Nous sommes sans terres sur notre propre terre, nous sommes des hors-la-loi sur notre propre terre.

Je voulais terminer en vous demandant d'avoir la possibilité de faire une présentation plus officielle à votre comité.

Le président: J'allais prendre une minute afin qu'il n'y ait pas de malentendu au sujet des dix minutes de présentation qui vous sont accordées. Nous sommes venus à Timmins pour entendre la population locale. Les organisations nationales, comme les organisations métisses, autochtones et autres, seront invitées à Ottawa pour une étude plus approfondie. Nous essayons ici de nous concentrer sur Timmins. Je tiens à bien préciser que nous entendrons une présentation des métis sur la question globale. En fait, le Sénat entendra les métis dans deux comités. Le comité des autochtones examine également le fait que les métis sont mentionnés dans la Constitution mais ne sont pas pris en compte. Je veux que toutes les personnes présentes comprennent bien que nous ne vous limitons pas à dix minutes en ce qui concerne le Sénat. Vous aurez d'autres occasions au cours des deux prochains mois pour présenter votre cause. Il s'agit ici uniquement de Timmins et des problèmes du nord de l'Ontario.

M. Belcourt: C'est par l'intermédiaire de notre Conseil des Métis de Timmins que nous avons appris que le comité tenait des audiences. J'aimerais souligner au comité la gravité de notre situation dans la province de l'Ontario. En tant que membre du Conseil des gouverneurs du Conseil national des métis, je peux parler également de ce qui se passe au niveau national, mais j'aimerais maintenant me concentrer sur ce qui se passe ici.

Nous avons entendu parlé du sous-comité de la forêt boréale. Il y a également deux comités de Lands for Life. Je ne crois pas une seconde que ces comités tiennent compte du fait que cette terre est la nôtre. Je ne crois pas une seconde que le gouvernement de l'Ontario a des intentions aussi honnêtes et franches que j'aurais pu l'espérer. Nous entendons parler de travaux de ces comités, mais il en va bien autrement des règlements.

Dans l'affaire dont j'ai parlé tout à l'heure, on a présenté, en 1988, une preuve selon laquelle les métis ne devraient pas être reconnus. Cette preuve s'inspirait de l'histoire des Traités de Robinson de 1850 et de la Commission Borron de 1885, 35 ans plus tard. Les Traités de Robinson ont été signés par 1 422 personnes dont la liste se trouve à Sault Ste. Marie. Deux cent des noms figurant sur ces traités reconnus par la Commission Borron étaient des métis.

En 1885, Borron écrivait que les Métis devaient être éliminés des listes de signataires des traités. D'après lui, si M. Robinson avait su quelle était la fécondité et la longévité des Métis français, un homme de sa sagesse n'aurait jamais eu l'intention de les voir figurer sur ces listes. Par conséquent, ils devaient en être rayés. C'est ce qui a mené finalement au projet de loi C-31, puisque les femmes indiennes avaient été éliminées des traités, ainsi que tous leurs enfants, et que l'ensemble de notre peuple avait été dépossédé pendant 150 ans. C'est une terrible tragédie, mais au sujet de laquelle nous sommes mieux en mesure aujourd'hui de nous exprimer.

Pour terminer, j'aimerais rappeler au comité que nous souhaitons présenter notre point de vue ici au Canada et nous souhaitons que l'on trouve une solution aux problèmes des Métis. Si nous n'obtenons pas gain de cause au Canada, nous irons ailleurs. Le comité sait très bien que le Canada est signataire de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique et de l'article qui exige que l'on tienne compte désormais du savoir traditionnel dans l'aménagement des ressources naturelles. Nous avons des règlements dans ce pays que nous sommes obligés de contester devant les tribunaux car les gouvernements ne les connaissent même pas.

J'aimerais répéter vos propres mots. Ces gens sont ici parce que c'est leur terre et que ce qui s'y passe perturbe considérablement nos vies. Vous avez déjà entendu des témoignages sur les dommages causés aux animaux et à la végétation dans les forêts, sur les dommages causés aux écosystèmes et sur les conséquences sur nous-mêmes. Qui sait à quel point ces dommages seront dévastateurs pour nous? Nous devons participer à notre avenir.

Vous étudiez l'état de la forêt boréale et de son avenir. Nous devons être pris en compte. Nous aimerions avoir le soutien du comité pour ce faire.

Le président: Merci beaucoup. Comme je l'ai dit, vous aurez encore l'occasion de participer au niveau national lorsque nous tiendrons ces audiences à Ottawa. Nous sommes cependant heureux d'avoir votre contribution.

Le sénateur Mahovlich: J'aimerais faire une observation au sujet des peuples autochtones et des Métis. Je ne connais pas bien tous vos problèmes, mais j'aimerais louer votre travail et vous dire de continuer. Je suis né ici, et à l'école publique de Schumacher, notre moto était «Ensemble nous pouvons». C'est ainsi que nous allons coordonner nos efforts dans notre province, au Canada et dans le reste du monde. Nous devons oeuvrer ensemble.

Le président: Voilà qui est bien dit.

Je m'adresse maintenant à madame la mairesse. Vous parliez du comité que vous présidez. Avez-vous établi un processus officiel pour inclure les métis et autres peuples autochtones?

Mme Thib-Jelly: Des présentations nous ont été faites. Bentley Cheechoo représentait le groupe autochtone, mais il était prévu à la fin du processus, vers la fin juin ou même la fin mai. Il s'est retiré. Wally McKay, qui représentait également le groupe autochtone de la forêt boréale ouest, a été retiré. Mais nous avons grandement bénéficié de leur contribution et de leur perspective, et Bentley Cheechoo est devenu un membre très utile de notre comité.

Le président: Votre comité sait-il, comme M. Belcourt l'a dit, que la Constitution a été, je ne dirais pas changée, mais peaufinée pour s'assurer que les Métis fassent partie de nos peuples autochtones? Cela semble particulièrement difficile à faire comprendre. On pense toujours qu'ils n'existent pas.

Mme Thib-Jelly: Je pense que nous avons fait des progrès remarquables dès le début. Lorsque nous sommes allés à Constance Lake, on nous a fait de bonnes présentations. On nous a invités à nouveau dans une autre région près de Wawa, mais à ce moment-là, Bentley Cheechoo n'était plus avec nous et nous n'avons pas pu nous y rendre, mais nous estimions que nous faisions des progrès.

M. Belcourt: Simplement pour mémoire, monsieur le président, j'aimerais dire que les représentants des Premières nations font, selon moi, un excellent travail pour représenter leur peuple, mais que la nation métisse est représentée par la nation métisse.

Le président: Oui. Il y a les peuples autochtones qui comprennent les Premières nations et il y a les Métis et les Inuits. Il faut sensibiliser les Canadiens à ce sujet. Bien des gens qui sont venus peut-être d'Australie pensent que le terme «aborigène» est péjoratif. Mais ici nous avons des autochtones. Et en dessous il y a les Inuits, les métis et les Premières nations. Dans ce cas-ci, les Inuits n'interviennent pas à Timmins, mais votre comité estime-t-il qu'il pourra prendre en compte tous les peuples autochtones?

Mme Thib-Jelly: Notre phase 1 est maintenant terminée. Compte tenu des recommandations que nous avons formulées au cours de cette phase, il est possible que cela ait lieu à la phase 2. Nous avons fait des recommandations dans ce sens en effet.

Le sénateur Stratton: J'aimerais poser une question à M. Quinney. Si je lis le document «Practical Integration of Landscape Ecology Principles In An Operational Forest Management Plan», est-ce que je vais comprendre l'application pratique de ce dont vous parlez?

M. Quinney: Oui.

Le sénateur Stratton: Est-ce possible sans avoir à se rendre là-bas?

M. Quinney: Oui, mais il vous faudra peut-être une assistance technique supplémentaire. Il est évident que la pratique de la foresterie moderne, comme vous le savez tous, exige une grande expertise et une grande compétence techniques. Je suis sûr que vous pourrez comprendre l'essentiel, même s'il s'agit de personnel technique et d'un document technique.

Le sénateur Stratton: Est-ce un exemple concret de ce dont vous parlez?

M. Quinney: Oui, et cela se passe à Meadow Lake, en Saskatchewan.

Le sénateur Stratton: C'est ce que je pensais. Certains sénateurs s'y sont rendus. Malheureusement ce n'était pas mon cas.

Le sénateur Whelan: Je suis sûr que M. Tony Belcourt est au courant de notre dernière nomination au Sénat. Nous avons un sénateur métis de l'Alberta.

Le président: Le sénateur Chalifoux aurait dû être ici aujourd'hui, mais il y a eu un contre-temps.

Le sénateur Whelan: Nous avons deux sénateurs autochtones. Le Sénat est donc peut-être mieux représenté. Le traitement injuste reçu par les Métis a été porté à notre intention. Je connais un peu la question après avoir été si longtemps dans la vie publique. Je continue à leur dire que s'ils obtiennent gain de cause, je réclamerai moi aussi un statut. Il y a des ancêtres indiens des deux côtés de la partie française de notre famille, qui étaient des anciens colons du comté d'Essex, il y a environ 300 ans.

Serait-il approprié de demander au groupe qui accompagne M. Belcourt de se nommer? Cela est-il convenable?

M. Pierre-Paul Dallaire, président du Conseil des métis de Timmins: Pierre-Paul Dallaire, président local de conseil, ONM.

M. Guy Lefebvre, représentant, région trois, nation métisse de l'Ontario: Guy Lefebvre, représentant ONM, région numéro trois.

M. Paul Rondeau, membre, nation métisse de l'Ontario: Paul Rondeau, ONM, Timmins.

M. Ed Gervais, vice-président, région trois, Timmins, nation métisse de l'Ontario: Ed Gervais, vice-président de la région trois, Timmins.

M. Emery Gervais, représentant, région de Niagara Falls, nation métisse de l'Ontario: Emery Gervais, représentant de la région Niagara Falls.

M. Fern Rondeau, membre, nation métisse de l'Ontario: Fern Rondeau, ONM, Timmins.

Mme France Picotte, coprésidente, nation métisse de l'Ontario: France Picotte, coprésidente, nation métisse de l'Ontario.

M. Pierre Lefebvre, membre, nation métisse de l'Ontario: Pierre Lefebvre, ONM, Timmins.

M. Gilbert Gervais, membre, nation métisse de l'Ontario: Gilbert Gervais, membre de la nation métisse de l'Ontario.

M. Brian Gaza, représentant, Iroquois Falls, nation métisse de l'Ontario: Brian Gaza, représentant de Iroquois Falls.

Mme Oline Sabourin, membre, nation métisse de l'Ontario: Oline Sabourin, ONM, Iroquois Falls.

Le président: Vous êtes très bien représenté.

Le sénateur Whelan: Je pense que le comité doit maintenant assurer le suivi de votre présentation d'aujourd'hui.

J'aurais une question pour M. Terry Quinney. Lorsque vous résumez votre travail, vous dites «acceptation générale des travaux». Vous m'avez entendu aujourd'hui poser une question sur la différence de statut selon la province. Sans le savoir, nous nous trouvons dans une province différente où il existe des règles et des règlements différents pour la pêche, la chasse, l'exploitation touristique, l'industrie forestière, et cetera. Je suis un vrai fédéraliste et j'ai été élevé comme Canadien, pas seulement comme Ontarien ou autre. J'ai donc une opinion très arrêtée sur la question. Je répète toujours que les États-Unis d'Amérique, notre principal partenaire commercial, n'ont qu'un secrétaire en charge de la foresterie et de l'agriculture pour 51 États, ce que l'on pourrait assimiler à 51 provinces. La population y est pourtant beaucoup plus importante. La population de la Californie est plus grande que celle du Canada. Avez-vous une opinion là-dessus?

M. Quinney: Simplement ceci: je pense que l'histoire de notre pays a montré que malgré les diverses compétences, nous pouvons nous rassembler en vue d'objectifs communs et nous pouvons réussir en établissant des partenariats. Je parle des partenariats entre les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que des organismes non gouvernementaux, l'industrie forestière, tous les intervenants. Je suis tout à fait prêt à appuyer et à préconiser ces partenariats, quelle que soit la compétence finale.

Le sénateur Whelan: Madame la mairesse, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Thib-Jelly: À propos de votre question à M. Quinney?

Le sénateur Whelan: Oui.

Mme Thib-Jelly: En Ontario, nous nous sommes tellement concentrés sur cette initiative de Lands for Life que je dois admettre que nous n'avons pas examiné la question pour l'ensemble du Canada. Mais si ce processus donne des résultats, comme je le pense, c'est quelque chose que nous pourrions alors envisager pour l'ensemble du pays.

Le sénateur Whelan: Peut-être M. Belcourt aimerait-il faire un commentaire, car le peuple métis peut avoir une idée plus arrêtée là-dessus. Vous avez parlé de l'injustice du système fédéral et du système provincial dans le traitement des métis.

Le président: N'oubliez pas que ce groupe a fait plus pour développer le système provincial que n'importe quel. Si ce n'était de Louis Riel, nous n'aurions pas des provinces indépendantes dans l'Ouest. Nous ferions partie des États-Unis.

J'aimerais demander à M. Quinney s'il y a une région dans le monde qui a essayé de faire quelque chose de semblable à ses réserves flottantes.

M. Quinney: Oui, il y a un projet en ce moment à Meadow Lake, en Saskatchewan.

Le président: Merci, monsieur Quinney et merci à tous d'être venus.

La séance est levée.


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