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DEVC - Comité spécial

La Société de développement du Cap-Breton (spécial)

 

Délibérations du comité spécial du Sénat sur
la Société de développement du Cap-Breton

Fascicule 3 - Témoignages


OTTAWA, le mardi 25 novembre 1997

Le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton s'est réuni ce jour à 16 h 08 pour étudier les rapports d'activité de la Société de développement du Cap-Breton et d'autres questions connexes.

Le sénateur John G. Bryden (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Avant de poursuivre, je tiens à mentionner que le sénateur MacDonald avait présenté un certain nombre de requêtes lors d'une réunion antérieure du comité et je crois qu'il souhaite en parler.

Le sénateur MacDonald: Monsieur le président, j'ai reçu, par l'intermédiaire de votre bureau, les documents que nous avions sollicités. J'avais demandé la proposition, que M. Farrell a présentée. J'avais également demandé le procès-verbal de la réunion au cours de laquelle le sujet avait été abordé. J'ai aussi reçu la lettre que vous a adressée M. Shannon, dans laquelle il explique qu'il est imprudent pour lui de diffuser le procès-verbal de la réunion pour les motifs qu'il énonce. J'accepte ces motifs et je tiens par votre intermédiaire, monsieur le président, à les remercier pour la rapidité avec laquelle ils ont répondu à nos requêtes.

Le président: Notre premier témoin aujourd'hui sera M. Steve Farrell. de Donkin Resources. Je crois comprendre, monsieur Farrell, que vous avez déjà témoigné devant ce comité à un autre titre. La formule que nous essayons de suivre vous donne la possibilité de faire un exposé d'une durée maximale d'environ 15 minutes, si vous le souhaitez. Les sénateurs vous poseront ensuite des questions, les conservateurs et les libéraux à tour de rôle.

Monsieur Farrell, la parole est à vous.

M. Steve Farrell, président, Donkin Resources Limited: La mise en valeur des ressources charbonnières extracôtières au nord du Cap Percé est à l'étude depuis près de 20 ans. De 1977 à 1979, un programme de forage en mer a confirmé la présence de quelque 1,5 milliard de tonnes de charbon dans cinq veines exploitables. L'extraction a été jugée faisable dans au moins trois veines. Deux galeries ont été forées pour accéder à la veine Harbour, pour étudier les caractéristiques de la veine, et des tests ont été effectués sur des échantillons globaux prélevés de la veine Harbour en 1986. Avec l'exploitation de la mine Phalen, les galeries ont simplement été entretenues avant de laisser l'eau les envahir. En avril 1997, la société Donkin Resources Limited a obtenu une lettre d'intention menant à l'achat des concessions de charbon, advenant la faisabilité d'ouvrir une mine à Donkin.

Doug Burns, Aubrey Rogers et moi-même sommes propriétaires de Donkin Resources Limited. Ensemble, nous possédons plus d'un siècle d'expériences diverses dans l'industrie minière. Depuis les débuts du projet Donkin, DRL a étudié les données actuelles disponibles, a entrepris des études sur la qualité du charbon, a effectué une étude de marché préliminaire, a commencé à rédiger un plan de mine préliminaire et a commencé à préparer un programme d'enseignement et de formation.

Le site Donkin comprend actuellement une zone partiellement clôturée, un bâtiment abandonné, une hutte quonset et une installation monte-charge. Les galeries sont inondées et les entrées des galeries sont scellées. Devco a passé l'investissement de 80 millions de dollars par pertes et profits en raison de l'incertitude des avantages économiques futurs du projet.

Si DRL réussissait à exploiter la mine, cela représenterait pour les contribuables canadiens environ 250 emplois directs, des coûts salariaux annuels d'environ 15 millions de dollars, le paiement de taxes municipales, diverses taxes à la consommation et des redevances. DRL envisage d'offrir des actions à des investisseurs locaux afin de recueillir des fonds pour la prochaine phase qui est une étude de faisabilité détaillée.

Si la mine est exploitée, le gouvernement recevra jusqu'à 65 cents par dollar de bénéfice, comparativement aux actionnaires qui prennent les risques et recevront 35 cents. DRL et Devco se sont entendu pour accorder un contrat à John T. Boyd de Pittsburgh pour estimer la valeur de la mine Donkin.

Pour ce qui est de la qualité du charbon, la veine Harbour est caractérisée par du charbon de qualité inférieure à teneur élevée en soufre dans la sole et le plafond. L'exploitation de la mine, en laissant le charbon de la sole, donnerait un produit tout-venant qui aurait une teneur en soufre d'environ 2,6 à 3,7 p. 100. Un lavage intégral peut enlever entre 35 et 65 p. 100 du soufre. En dessous de deux pour cent de soufre, le rendement en charbon représente un important sacrifice et des coûts connexes. Le charbon de Donkin est un bon charbon thermique à faible teneur en cendres et à haute valeur calorifique. Une quantité maximale de ce charbon devrait être vendue non lavé ou partiellement lavé.

En ce qui concerne les débouchés, en raison de la tendance du charbon de Donkin à produire des scories et des quantités élevées d'oxyde de fer dans les cendres, et de sa teneur élevée en soufre, la plupart des services publics devraient mélanger le charbon de Donkin pour obtenir le produit voulu. Le prix estimatif du charbon débarqué en Europe s'élève à un 1,80 $ ccanadiens par giga-joule, ce qui représente environ 55 $ canadiens par tonne sur place.

À propos de l'enseignement et de la formation, Donkin Resources a amorcé une collaboration avec le University College of Cape Breton (UCCB) pour élaborer un programme qui renseignera nos employés sur tous les aspects de l'exploitation minière. La compagnie DRL est d'avis qu'un enseignement convenable, allié à une formation en cours d'emploi, nous permettra d'avoir une main-d'oeuvre sécuritaire et productive.

En ce qui concerne les plans de mine préliminaires, la firme SNC Lavalin a été engagée pour évaluer la viabilité de la mine. Si le projet devait se révéler viable, DRL possède une offre de SNC Lavalin pour exécuter tous les travaux de génie, la gestion du projet et trouver le financement. SNC Lavalin est la plus grosse société de travaux de génie au Canada et l'une des 10 premières au monde. Elle emploie dans le monde 1 200 personnes dans le seul secteur du génie minier. L'offre de SNC Lavalin signifie que DRL aura le personnel nécessaire pour orchestrer, gérer et financer le projet.

Le sénateur MacDonald: Je dois dire que nous avons une bonne et une mauvaise nouvelle pour vous aujourd'hui. La bonne nouvelle, c'est que nous avons eu des commentaires des syndicats mercredi dernier et qu'ils ont tous une haute estime de vous. Cependant, comme tous les habitants du Cap-Breton, je suppose, ils ont un petit peu peur des initiatives privées. Vous savez probablement qu'ils préféreraient que la mine Donkin soit exploitée sous les auspices de Devco. C'est la mauvaise nouvelle.

Nous avons maintenant reçu une copie de votre projet concernant l'étude et l'exploitation de la mine Donkin. À qui aviez-vous présenté ce projet en premier lieu?

M. Farrell: J'avais rédigé un avant-projet, que j'ai présenté par télécopieur la semaine du 3 mars au cabinet de Dave Dingwall en précisant que je voulais lui parler d'un important développement industriel mais sans mentionner la mine Donkin. J'avais osé espérer recevoir des commentaires mais, comme ce ne fut pas le cas, j'ai à nouveau envoyé un projet au cabinet de M. Dingwall le 17 mars. Ensuite, durant la semaine du 12 avril, j'ai parlé à M. Shannon et nous avons ensuite organisé des rencontres qui ont abouti à la lettre d'intention.

Le sénateur MacDonald: Vous n'avez pas reçu de réponse de M. Dingwall la première fois que vous lui avez envoyé l'avant-projet?

M. Farrell: Je n'ai eu aucune réponse jusqu'au début du mois d'avril ou un peu plus tard. En fait, je n'ai eu aucune réponse, j'ai téléphoné et on m'a répondu que le processus était enclenché et que des gens se penchaient sur la question. Les autres nouvelles que j'ai eues sont issues lors de ma conversation avec Joe Shannon à la mi-avril.

Le sénateur MacDonald: Parmi les documents que nous avons reçus se trouve une ébauche de lettre au ministre des Ressources naturelles signée de votre main, et au bas de laquelle figure une note manuscrite adressée à Bill McCann qui, je crois, est directeur général de la Direction de la politique sur les minéraux et les métaux au ministère. On peut y lire:

Copie de ce projet en vue d'effectuer une étude de faisabilité sur la mine Donkin. Le secteur devrait examiner cette question et la traiter avec beaucoup de sérieux; elle a été livrée par porteur en provenance du ministre Dingwall.

La lettre est signée par Dan Paskoski. Il faisait apparemment partie du personnel politique ou du personnel exonéré au cabinet de Mme MacLellan à cette époque.

Le président: Monsieur Farrell, avez-vous vu une copie de cette lettre?

M. Farrell: Non.

Le président: Pourrions-nous lui fournir une copie?

Le sénateur Murray: Pendant que nous y sommes, monsieur le président, la note manuscrite mentionne que le ministère des Ressources naturelles, ou l'une de ses sections, devait examiner le projet de DRL. Je voulais vous demander si vous pourriez, en tant que président de ce comité, vous renseigner pour savoir si le comité pourrait obtenir une copie de l'examen effectué par le ministère.

Le président: Certainement, je peux poser la question et je présume qu'il serait acceptable de la soulever lorsque le ministre viendra témoigner.

Le sénateur MacDonald: Monsieur Farrell, avez-vous présenté ce projet judicieux à la Cape Breton County Economic Development Authority?

M. Farrell: Je n'ai jamais eu de contact avec eux tant que nous n'avons pas eu de lettre d'intention. Cela doit remonter à quelque temps après le 16 ou le 17 avril.

Le sénateur MacDonald: Devco en a été informée le 27 mars, date à laquelle le personnel ainsi que le ministère des Ressources naturelles du Canada ont reçu une copie de l'avant-projet, mais ce n'est pas avant le 11 avril que M. Shannon, président du conseil de Devco, a reçu une copie par télécopieur et a alors communiqué avec vous pour organiser une rencontre; est-ce exact?

M. Farrell: C'était la semaine se terminant le 12 avril.

Le sénateur MacDonald: Le contact de Devco au sein du ministère, que nous ne connaissons pas, a reçu à cette date ce document du cabinet du ministre des Ressources naturelles avec l'estampille faisant état de sa réception le 21 mars. Le 11 avril, M. Shannon, ayant en mains la copie du projet reçue par télécopieur, a communiqué avec vous et a organisé une rencontre pour le 15 avril. Ces dates vous rappellent-elles quelque chose?

Le 14 avril 1997, les fonctionnaires du ministère des Ressources naturelles ont envoyé par télécopieur une copie de l'avant-projet concernant l'étude et l'exploitation de la mine aux cadres supérieurs de Devco. Rien ne dit qu'elle a été envoyée au conseil d'administration.

À propos, je suis la chronologie qui nous a été fournie par Devco à notre demande, alors n'hésitez pas à me corriger s'il y a des erreurs.

Le 15 avril, M. Shannon, M. White et M. Buchanan ont rencontré les trois mandants, à savoir vous monsieur Farrell et vos associés. Le projet a fait l'objet d'une longue discussion et vous avez envisagé des points à inclure dans une lettre d'intention. Le 16 avril, toutes les parties se sont rencontrées à nouveau pour étudier une ébauche de lettre d'intention. Le 16 avril, jour où les administrateurs de Devco se sont réunis, l'ébauche de la lettre a été distribuée à tous les administrateurs de la Société de développement du Cap-Breton.

Évidemment, vous n'assistiez pas à cette réunion, si bien que vous ne sauriez pas si c'était la première fois qu'ils voyaient l'avant-projet, n'est-ce pas?

M. Farrell: Non.

Le sénateur MacDonald: À nouveau le 16 avril, date de la rencontre des administrateurs, une réunion du conseil d'administration a eu lieu, au cours de laquelle l'un des points a été abordé et approuvé à l'unanimité: la lettre d'intention de Donkin Resources. Le même jour, Donkin Resources Limited a été constituée en société; est-ce exact?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur MacDonald: Le 17 avril, c'est-à-dire le lendemain, la Société de développement du Cap-Breton a émis un communiqué concernant la lettre d'intention de Donkin. Le même jour, c'est-à-dire le 17 avril, la Société d'expansion du Cap-Breton, filiale de l'APECA, a reçu une demande de subvention de 300 000 $ de la Cape Breton County Development Authority. L'annonce faite le lendemain, c'est-à-dire le 18 avril, par l'honorable David Dingwall précisait clairement qu'il s'agissait d'une aide fédérale pour réaliser une étude visant à déterminer la viabilité commerciale de l'ouverture d'une nouvelle mine à Donkin en collaboration avec la Cape Breton County Economic Development Authority.

Qui a entamé les pourparlers entre votre compagnie, le gouvernement, le conseil d'administration de Devco, et quel lien cela a-t-il avec la subvention de 300 000 $ de la Société d'expansion du Cap-Breton?

M. Farrell: Je me suis rendu au bureau de la Cape Breton County Economic Development Authority. Elle dispose d'un plan stratégique d'action économique qui a été rédigé en août 1994. Ce plan parle spécifiquement de Donkin, si bien que j'ai supposé que s'il existait un moyen d'obtenir une quelconque aide gouvernementale pour ce genre de projet, ce serait l'endroit idéal.

Je peux lire le texte si vous le voulez. Je peux vous en donner une copie.

Le sénateur MacDonald: Dans quel document lisez-vous?

M. Farrell: C'est le plan stratégique d'action économique de la Cape Breton County Economic Development Authority, daté du 12 août 1994, qui comporte une section sur le charbon à la page 26. La partie qui m'intéresse stipule qu'étant donné que les moyens de subsistance de centaines de familles locales dépendent de la prospérité de l'industrie des charbonnages, il faudrait examiner attentivement tous les modèles de production et de gestion, notamment la possibilité d'investissements privés et de gestion du site par le secteur privé. Ceci concerne Donkin. Ayant cela en tête, j'ai pensé que c'était le bon filon à utiliser.

Le sénateur MacDonald: Quant à la demande de prêt, il était mentionné dans la déclaration faite par M. Kavanaugh que l'injection de 300 000 $ était absolument décisive pour le projet.

Le président: Auriez-vous vu cette demande, monsieur Farrell?

M. Farrell: Nous avons rempli une demande, mais je n'en ai pas de copie ici.

Le sénateur MacDonald: La demande n'a pas été faite par Donkin. Elle a été signée par le président de la Cape Breton County Economic Development Association, Ray Kavanaugh, et à l'article b) de la déclaration du demandeur, il déclare:

Je certifie que l'aide financière de la SECB sera un facteur décisif dans la décision d'entreprendre ce projet.

Cette demande est faite après la signature de la lettre d'intention et après la constitution de votre compagnie en corporation. C'est simplement une question de curiosité. Nous essayons de comprendre le déroulement des événements.

M. Farrell: Je ne pouvais qu'échafauder des hypothèses mais, à mon avis, il était inutile de demander des fonds avant d'avoir la lettre d'intention. Jusque là, tout le monde supposait que Devco étudierait la faisabilité d'ouvrir une mine. À ce moment-là, nous avions une lettre d'intention mentionnant en gros qu'elle nous cédait ce processus.

Le sénateur MacDonald: Tout cela est plausible car, de toute évidence, Devco ne savait pas que vous aviez 300 000 $ étant donné que vous n'aviez pas cette somme à ce moment-là.

M. Farrell: C'est exact, nous ne le savions pas non plus. Nous n'avons obtenu un contrat de la Cape Breton County Economic Development Authority que le 30 mai.

Le président: Sénateur MacDonald, vous avez fait mention à plusieurs reprises de cette demande. Pourriez-vous la faire distribuer aux autres sénateurs membres du comité?

Le sénateur MacDonald: Elle est en feuilles détachées mais je vais la reconstituer.

La subvention a été approuvée par la Cape Breton County Economic Development Authority et l'objectif de la subvention était indiqué clairement. Qui devait verser ce montant?

Le sénateur Murray: À qui le chèque a-t-il été émis?

M. Farrell: Il n'y a pas eu de chèque. La subvention est fonction du travail effectué.

Le sénateur MacDonald: Vous tirez des fonds?

M. Farrell: Oui, on tire des fonds. Nous avons fourni un échéancier indiquant que nous allions suivre un certain programme et, en fonction de ce programme, nous devons recevoir des fonds et fournir des rapports. Ce n'est pas encore terminé, le processus est en cours, mais nous fournirons un rapport en temps et lieu et ensuite nous tirerons d'autres montants.

Le sénateur MacDonald: Combien avez-vous tiré? Je crois savoir que vous avez investi 100 000 $ en capitaux propres.

M. Farrell: Oui. Je ne peux pas vous répondre exactement, mais je sais que c'est plus de la moitié, et nous avons vraisemblablement des engagements pour un montant supérieur à la moitié restante.

Le sénateur MacDonald: Si vous venez à manquer d'argent, avez-vous l'intention de demander des fonds supplémentaires pour achever les travaux?

M. Farrell: Nous ne manquerons pas d'argent. Nous avons fait une prévision et nous respectons nos chiffres d'assez près.

Y a-t-il un échéancier annexé quelque part au projet?

Le sénateur MacDonald: Oui, nous l'avons.

M. Farrell: Nous en sommes actuellement à l'étape du plan de mine préliminaire, qui ne sera pas achevée avant un an. Cependant, nous sommes en avance sur l'échéancier.

Le sénateur MacDonald: Le montant initial de 400 000 $ devait servir à identifier le potentiel de la mine Donkin en étudiant toutes les données disponibles?

M. Farrell: C'est exact.

Le sénateur MacDonald: Aurez-vous bientôt terminé ce travail?

M. Farrell: Nous avons étudié les données, nous avons effectué les études de marché, nous avons analysé la qualité du charbon, nous venons tout juste d'accorder un contrat à SNC Lavalin pour vérifier la faisabilité préliminaire de la mine et la phase suivante consistera à trouver des fonds pour effectuer l'étude détaillée. Ce montant ne figure pas dans le projet initial de 400 000 $. Le projet se terminera lorsque nous ferons une offre aux investisseurs.

Le sénateur MacDonald: Oui, mais lorsque vous utilisez le terme «faisabilité», ce montant de 400 000 $ n'était pas destiné à une étude de faisabilité.

M. Farrell: Non, c'est une étude préliminaire.

Le sénateur MacDonald: À la page 5 de votre projet officiel, vous déclarez au paragraphe 5:

Ce projet offre au gouvernement fédéral l'occasion d'utiliser des actifs qu'il contrôle dans le cadre d'un accord privé-public...

Le paragraphe suivant se lit comme suit:

À une époque où les gouvernements se départissent d'activités qui sortent de leur champ de compétence, ce projet offre la possibilité d'avoir accès à des capitaux privés pour exploiter la mine Donkin qui exigerait autrement des capitaux énormes et un engagement à long terme du gouvernement.

Qu'entendez-vous par «accord public-privé»?

M. Farrell: Nous avions offert trois éléments dans notre projet.

Pour vous donner un bref historique, l'hiver dernier, la compagnie Power Corporation a acheté du charbon aux États-Unis et comme mes partenaires et moi-même tirons la majorité de notre revenu de l'industrie du charbon, nous étions assez inquiets. Nous avons pensé que la mine Donkin devrait rouvrir et que cela permettrait de faire fonctionner l'industrie du charbon. Il était assez évident pour nous que le gouvernement ne rouvrirait pas la mine. Il l'avait déclaré à maintes reprises.

Nous avons décidé de rédiger un projet préliminaire pour voir s'il serait faisable de rouvrir la mine et, dans l'affirmative, nous encouragerions des investisseurs locaux de la Nouvelle-Écosse à investir dans une étude de faisabilité. Sur cette base, nous avons rédigé ce projet.

En vertu de notre projet, si nous devions effectuer une étude préliminaire et poursuivre avec une étude de faisabilité, et si l'on constatait qu'il était faisable d'ouvrir une mine potentiellement viable, Devco aurait ensuite la possibilité de nous racheter le tout.

En cas de refus, notre projet mentionnait que Devco pourrait travailler en partenariat avec nous pour gérer la mine. Comme solution de rechange, ils pourraient nous laisser gérer la mine. Nous offrions tout ce qu'ils voulaient; mais nous souhaitions amorcer le processus pour savoir si l'on pourrait ouvrir une mine gérée par des intérêts publics ou privés.

Le sénateur MacDonald: «Publics» signifie Devco?

M. Farrell: C'est exact.

Le sénateur MacDonald: Si j'ai bien lu votre projet, le montant prévu pour arriver jusqu'au début de la construction, ce que vous appelez la phase 1, coûte entre 1,5 et 2 millions de dollars, la totalité des fonds devant provenir des parties privées directement intéressées par le succès ou l'échec des charbonnages du Cap-Breton. Ensuite, si les données géologiques de base obtenues à la fin des années 70 ou au début des années 80 devaient se révéler incomplètes ou si la qualité de la veine de charbon devait se révéler de mauvaise qualité, il faudrait peut-être effectuer d'autres explorations avant d'engager des capitaux énormes dans l'exploitation de la mine. Cela ferait partie de la phase 2 et devrait coûter entre 6 et 8 millions. Enfin, pour aller de l'avant, vous mentionnez que votre société demande une entente de partenariat avec le gouvernement. À quel gouvernement faites-vous allusion?

M. Farrell: Au gouvernement fédéral.

Le sénateur Butts: J'aimerais demander à M. Farrell ce qui a provoqué un tel revirement en un an -- de la déclaration à l'effet qu'il ne serait pas judicieux d'ouvrir la mine Donkin jusqu'au projet qu'il a présenté aujourd'hui?

M. Farrell: Je n'ai jamais dit que la mine Donkin ne pourrait pas être ouverte. La dernière fois que nous nous sommes présentés devant vous, nous parlions des deux entreprises que possède Devco, les mines Prince et Phalen. Je crois qu'ils parlaient d'exploiter la mine Prince pendant seulement un tiers ou un quart de l'année et donc, à cette époque, l'accent a été mis sur la possibilité de maintenir la mine Prince en activité à plein temps.

Il faut également prendre en considération toute la question de la rentabilité de l'exploitation minière. Si ces deux mines sont en production, cela signifie qu'il faut exporter presque tout le charbon de Donkin. Des études que nous avons effectuées révèlent que nous devrions livrer le charbon en Europe au prix d'environ 55 $ la tonne ou moins, ce qui signifie qu'il faudrait le charger sur les bateaux dans le port de Sydney à un prix d'environ 42 $ la tonne.

Les coûts de main-d'oeuvre se situeraient entre 15 et 20 $ la tonne. Sur un plan économique, il est impossible de livrer du charbon au bateau pour 42 $ si la main-d'oeuvre coûte 15 ou 20 $. C'est la raison pour laquelle Donkin doit être une mine productive. Elle doit être conçue différemment.

Les Australiens et les Américains réussissent aujourd'hui à exploiter des mines souterraines. Le concept de Devco est plus européen et subit, en particulier, une influence britannique. Vous avez les spécifications du British National Coal Board sur ceci et sur cela; les moyens de transport sont britanniques, la méthode, les galeries, les pentes incurvées, et cetera, tout cela est influencé par le concept britannique. La structure de la main-d'oeuvre ressemble énormément à la méthode européenne. En fait, je ne pense pas qu'il existe une mine rentable en Amérique du Nord qui soit structurée sur le même modèle que les mines de Devco.

Pour moi, tout cela signifie que si l'on veut exporter le charbon sur le marché mondial, il faut agir comme les gens qui vendent du charbon à l'heure actuelle.

Le sénateur Butts: Êtes-vous en train de me dire que vous allez abaisser les coûts de production en ayant moins d'employés?

M. Farrell: «Extraire davantage de charbon avec le même nombre d'employés» revient à dire la même chose. Il ne faudrait pas autant de travailleurs pour extraire 2 millions de tonnes de charbon.

Le sénateur Butts: Est-ce la raison pour laquelle vous pouvez le faire et Devco non?

M. Farrell: C'est l'une des principales raisons. Les travailleurs doivent changer.

Le sénateur Butts: Changer leur attitude?

M. Farrell: Oui, essentiellement, c'est une question d'effectif.

Le sénateur Butts: Avez-vous changé d'idée à propos de la qualité dont il était question dans l'étude Boyd?

M. Farrell: La qualité du charbon de Donkin?

Le sénateur Butts: Oui.

M. Farrell: Ils ont en quelque sorte rejeté les données d'emblée en raison de leur mauvaise qualité.

Le sénateur Butts: Voulez-vous dire qu'il était question de la qualité des données, pas de la qualité du charbon?

M. Farrell: Il s'agissait des données.

Le sénateur Murray: Ils ont également posé un jugement économique, mais je ne sais pas dans quelle mesure il était bien fondé.

M. Farrell: Je crois savoir que c'est la situation du marché qui empêchait l'ouverture de Donkin.

Le sénateur Butts: Il était également question de la teneur en soufre. Lorsque M. White était ici, je l'ai interrogé sur l'exploitation minière sélective et sur la possibilité de le faire à Donkin. Dans sa réponse, il a repris mes propres termes en disant que c'était «douteux». Êtes-vous convaincu que cela est possible?

M. Farrell: Nous en sommes arrivés à une exploitation «semi-sélective» si vous voulez. L'exploitation sélective signifie laisser le charbon de qualité inférieure sur le plafond et sur la sole. Je suis convaincu que l'on peut pratiquer l'une des deux opérations susmentionnées, mais que c'est un petit peu "aléatoire" de laisser tomber les deux car on éprouverait des difficultés avec l'horizon en faisant fonctionner la machinerie.

Le sénateur Butts: C'est ce que disait l'étude Boyd.

M. Farrell: Nous avons fondé nos travaux sur la possibilité de commencer sur la sole en remontant ou de partir du plafond en descendant. Ensuite, une firme d'experts-conseils a analysé les trous, a calculé une moyenne mobile et en est arrivée à une spécification. C'est ce que nous avons utilisé pour la mise en marché.

Le soufre est un problème grave, mais ce n'est pas le seul. J'estime que 50 p. 100 des centrales au monde, et la plupart des centrales européennes, ont un sulfitage des gaz liquéfiés. Le soufre vous coûte de l'argent. Il vous oblige à payer une pénalité, mais vous pouvez vendre le charbon.

Le sénateur Butts: Espéreriez-vous le vendre sur le marché européen sans le mélanger avec un autre charbon?

M. Farrell: Nous aurions la meilleure chance de le vendre à une compagnie qui le mélangerait avec d'autres charbons pour répondre aux exigences d'un client.

Le président: Plus tôt au cours des audiences, nous avons appris que la mine Prince avait deux fois plus de charbon exploitable que prévu. On pensait qu'elle en possédait pour environ 15 ans, si bien que cela signifie qu'elle en a pour 25 ou 30 ans. D'après l'étude Boyd, encore une fois, le charbon provenant de la mine Donkin a à peu près la même teneur en soufre que celui de Prince.

D'après les témoignages que nous avons entendus, je crois comprendre que les syndicats préconisent l'exploitation de la mine Donkin pour remplacer la mine Phalen. Toutefois, il me semble que le charbon de Donkin ne remplacerait pas celui de Phalen. Est-ce exact?

M. Farrell: C'est probablement à moitié exact. Je ne m'y connais pas beaucoup en matière de lavage du charbon mais, si je comprends bien, dans le charbon de Prince les cendres et le charbon ont à peu près le même poids. Il est difficile d'enlever le soufre par lavage parce qu'il est proche des cendres et vous ne pouvez pas obtenir le charbon par flottaison parce qu'il pèse le même poids que la pierre. Cependant, vous pouvez séparer le charbon de Donkin. Il ressemble davantage au charbon de Phalen qu'à celui de Prince. Néanmoins, si vous lavez le charbon, vous commencez à perdre beaucoup du produit lorsque vous arrivez en dessous de deux pour cent de soufre.

Des études ont démontré que vous pouvez éliminer 65 p. 100 du soufre par lavage du charbon mais qu'il ne serait probablement pas rentable de le faire. Cela signifierait jeter 30 à 40 p. 100 de votre produit.

Les deux charbons ont la même teneur en soufre. C'est la lessivabilité des deux charbons qui est différente.

Le président: Si vous, ou quelqu'un d'autre, exploitiez la mine Donkin et si la mine Prince demeurait en opération, est-ce que le charbon extrait de Donkin concurrencerait celui de Prince sur le marché international?

M. Farrell: Le marché international est gigantesque et j'imagine que nous serions en concurrence, même si je ne sais pas jusqu'à quel point. Je ne sais pas si le charbon de Prince est bien accueilli sur le marché. Je crois que seulement quelques chargements de ce charbon ont été vendus, je ne peux donc pas dire comment il a été accueilli. Cependant, je peux vous dire que le charbon de Donkin serait en concurrence, mais il ne s'agirait pas d'une question de vie ou de mort.

Le président: Voulez-vous dire qu'il y aurait de la place pour les deux?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur Murray: Monsieur Farrell, vous avez 400 000 $ -- 300 000 $ de la SECB et 100 000 $ apportés par vos partenaires et vous-même. À la page 1 de votre projet, vous énumérez les travaux que vous avez l'intention de faire pour effectuer votre évaluation. Je voudrais simplement vous les nommer rapidement dans le contexte des fonds dont vous disposez.

Premièrement, en examinant, comme vous le dites, tous les renseignements et études qui existent sur Donkin, et cetera, la plupart sous le contrôle du gouvernement et de ses agences, ai-je raison de supposer que le travail sera financé à même les 400 000 $?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur Murray: Deuxièmement, vous dites que vous retiendrez les services d'ingénieurs qualifiés en vue d'effectuer les études nécessaires pour déterminer la superficie, l'emplacement et la qualité des veines de charbon dans le but d'élaborer un plan, et cetera. Je présume que les travaux seront ou sont financés à même les 400 000 $.

M. Farrell: Non. C'est pour le travail préliminaire. Ces 400 000 $ seront dépensés pour déterminer si le projet est suffisamment viable pour justifier l'étude.

Le sénateur Murray: Une autre intention consiste à identifier et à contacter les marchés potentiels pour y vendre le type et la qualité de charbon disponible dans les veines. Ce travail est-il financé à même les 400 000 $?

M. Farrell: Simplement comme travail préliminaire.

Le sénateur Murray: Qu'est-ce que cela signifie?

M. Farrell: Nous avons fait faire une étude de marché très générale pour savoir si nous pourrions vendre ce charbon.

Le sénateur Murray: Vous n'avez pas identifié de débouchés ou communiqué avec quelqu'un?

M. Farrell: Nous l'avons fait, mais pas au point d'atteindre le niveau de confiance nécessaire pour démarrer l'exploitation d'une mine.

Le sénateur Murray: Qui a effectué ce travail, monsieur Farrell?

M. Farrell: Une société du nom de Phoenix Fuels au Royaume-Uni.

Le sénateur Murray: Dans votre exposé d'aujourd'hui, vous avez parlé d'un programme d'enseignement et de formation que vous avez sous-traité à l'UCCB (University College of Cape Breton). Ce travail est-il financé à même les 400 000 $?

M. Farrell: Non.

Le sénateur Murray: D'où vient cet argent?

M. Farrell: De nos poches. Nous n'avons pas sous-traité, nous collaborons avec eux.

Le sénateur Murray: Vous avez investi 100 000 $; la SECB a investi 300 000 $; et cela fait un total de 400 000 $. Le financement de ce programme d'enseignement et de formation vient-il d'une autre source?

M. Farrell: Non, nous élaborons le programme. Personne n'est encore inscrit au programme. Nous travaillons actuellement à l'élaboration du cadre d'un programme.

Le sénateur Murray: Payez-vous l'UCCB?

M. Farrell: Non, ils élaborent le cours en collaboration avec nous. Ils donneront le cours, et quand ils le feront, ils seront rémunérés.

Le sénateur Murray: N'y a-t-il pas d'argent impliqué dans la préparation du cours?

M. Farrell: Non, seulement du temps et des efforts.

Le sénateur Murray: Monsieur Farrell, je ne suis pas certain de vous avoir bien compris, dans votre exposé d'ouverture vous avez déclaré que vous alliez signer un contrat avec John T. Boyd pour une évaluation de la mine Donkin. Avez-vous dit que vous alliez établir le contrat conjointement avec Devco?

M. Farrell: Non.

Le sénateur Murray: Accepteriez-vous de relire la phrase, s'il vous plaît?

M. Farrell: DRL et Devco se sont entendu pour accorder un contrat à la société John T. Boyd de Pittsburgh pour estimer la valeur des ressources de Donkin.

Le sénateur Murray: Ils ne travaillent pas pour rien. Le financement de cette activité provient-il des 400 000 $?

M. Farrell: Nous avons convenu de le faire, mais il n'y a pas encore de contrat.

Le sénateur Murray: Qu'avez-vous convenu exactement avec Devco? Qui paiera?

M. Farrell: Nous paierons pour cela.

Le sénateur Murray: Qui «nous»?

M. Farrell: DRL.

Le sénateur Murray: À même les 400 000 $?

M. Farrell: Ce n'était pas prévu, mais c'est possible.

Le sénateur Murray: Pourquoi fallait-il accorder le contrat conjointement avec Devco pour faire ce travail?

M. Farrell: Nous nous sommes mis d'accord.

Le sénateur Murray: Vous vous êtes mis d'accord.

M. Farrell: Sur le nom de la société.

Le sénateur Murray: Devco n'investira-t-elle aucun fonds dans cela?

M. Farrell: Non, ce que je veux dire par là c'est que nous devons mettre une valeur sur la ressource. Quelqu'un doit le faire.

Le sénateur Murray: Vous avez convenu avec Devco que la société John T. Boyd devrait faire ce travail, et que vous les paieriez, mais pas à même les 400 000 $. S'agit-il d'un énoncé convenable?

M. Farrell: Nous avons convenu d'utiliser les services de la société John T. Boyd.

Le sénateur Murray: Mais l'argent ne provient pas des 400 000 $; ou bien est-ce le cas?

M. Farrell: Nous avons 100 000 $ et plus dans la caisse maintenant.

Le sénateur Murray: Je comprends cela, mais le montant réservé pour l'étude envisagée par John T. Boyd est-il inclus dans cela?

M. Farrell: Je ne le sais pas encore. Je n'en ai pas parlé avec mon comptable. Nous ne savons pas d'où proviendra l'argent.

Le sénateur Murray: Vous avez également parlé d'un contrat avec SNC Lavalin pour une étude de la viabilité de la mine. En êtes-vous arrivé à une entente avec eux?

M. Farrell: Oui, je leur ai envoyé un bon de commande.

Le sénateur Murray: Je ne vous demanderai pas quel en sera le coût, mais ce montant proviendra-t-il des 400 000 $?

M. Farrell: Oui, entièrement.

Le sénateur Murray: Les trois quarts des 400 000 $ sont des fonds publics et un quart, soit 100 000 $, représente votre investissement; les 400 000 $ financeront donc le travail de SNC Lavalin.

Dans votre exposé d'ouverture, vous avez déclaré que le gouvernement, ou s'agissait-il de Devco, obtiendrait 65c. sur chaque dollar de bénéfice contre 35 cents pour DRL.

M. Farrell: Oui, le gouvernement. Si une société fait des profits, le taux d'imposition du gouvernement atteint 45 p. 100.

Le sénateur Murray: Existe-t-il une entente de partage des bénéfices entre vous et Devco?

M. Farrell: Non. Le gouvernement récoltera 65 cents pour chaque dollar. Ce chiffre est fondé sur un taux d'impôt sur les sociétés de 45 p. 100, à quoi s'ajoute l'impôt versé sur les dividendes.

Le sénateur Murray: Je comprends cela, monsieur Farrell. Ce que je voulais vraiment savoir, c'est si vous aviez conclu une forme d'entente avec Devco.

M. Farrell: Non, nous n'avons aucune entente.

Le sénateur Murray: D'après la lettre d'intention, vous disposiez de 60 jours pour en arriver à une forme d'entente. Avez-vous jamais conclu une entente?

M. Farrell: Le délai n'arrête pas d'être repoussé.

Le sénateur Murray: Pourquoi doivent-ils continuer de le repousser?

M. Farrell: Nous avons les audiences du Sénat et diverses activités en cours.

Le sénateur Murray: Je suis désolé de prendre autant de votre précieux temps.

Je me réfère encore une fois à votre avant-projet. J'entends parler sans arrêt de partenariat privé-public, d'accords publics-privés, d'initiatives publiques-privées, et cetera. Toutefois, dans votre avant-projet, vous parlez des options qui s'offriraient après l'achèvement de la phase 1 ou de la phase 2, et vous mentionnez que le gouvernement et(ou) la société pourrait acquérir tous les droits sur les résultats des études. Je présume que la "société" désigne Devco?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur Murray: Ensuite, vous déclarez que le partenariat peut se poursuivre tel quel et peut aller de l'avant pour exploiter et fonctionner; de quel partenariat parlez-vous?

M. Farrell: Nous envisagions une entente de partenariat. Lorsque nous avons fait la proposition, nous pensions que nous pourrions conclure une entente de partenariat.

Le sénateur Murray: Eh bien, sans vouloir mettre les points sur les i, monsieur Farrell, le partenariat actuel en termes de dollars sonnants et trébuchants est composé pour trois quarts de fonds publics et pour un quart de fonds privés. Est-ce la proportion que vous envisagez pour le partenariat futur?

M. Farrell: Non, parce que ce montant de 400 000 $ est pour la phase initiale. Avant d'avoir un plan de mine faisable et d'être prêt à exploiter une mine, il faut dépenser beaucoup plus que 400 000 $.

Le sénateur Murray: Quel genre de partenariat envisagiez-vous? Envisagiez-vous un partenariat à 50-50 ou quelque chose de plus ou quelque chose de moins?

M. Farrell: Nous étions supposés le négocier. Je ne peux pas le négocier ici.

Le sénateur Murray: À la page 7, vous déclarez que toutes les données seront analysées et que si les données géologiques de base obtenues à la fin des années 70 ou au début des années 80 devaient se révéler incomplètes ou si la qualité de la veine de charbon devait se révéler de mauvaise qualité, il faudrait peut-être effectuer d'autres explorations avant d'engager des capitaux énormes dans l'exploitation de la mine. Les explorations supplémentaires feront partie de la phase 2 et devraient coûter de 6,5 à 8 millions en plus.

Vous pourriez produire du charbon au cours de cette phase, n'est-ce pas?

M. Farrell: Il y a eu des questions à propos de la qualité des trous de forage. Entre 60 et 65 p. 100 des carottes de forage manquaient. On ne les a pas retrouvées. Nous pensions que nous devrions peut-être pomper l'eau de la mine, aller sous terre et prélever un échantillon de charbon. Il faudrait probablement creuser un mille sous terre pour obtenir cet échantillon. Au cours de cette phase, nous aurions pu tester nos plans d'exploitation minière sélective et obtenir davantage de données sur la lessivabilité et le reste, mais cela ne serait arrivé que si nous n'étions pas satisfaits des données en notre possession.

Le sénateur Murray: Je comprends cela, monsieur Farrell, mais l'objet de la discussion c'est la possibilité d'injecter un autre montant de 6,5 à 8 millions de dollars pour des explorations supplémentaires. Je ne suis pas un expert dans ces domaines. Je veux savoir si, pendant ces explorations supplémentaires, vous pourriez produire du charbon?

M. Farrell: Oui, on produirait du charbon.

Le sénateur Murray: Combien?

M. Farrell: Je peux vous donner un chiffre approximatif.

Le sénateur Murray: Très bien. Et en outre à un coût assez bas, n'est-ce pas?

M. Farrell: Non, le coût serait très élevé parce que toute l'infrastructure serait en place pour supporter une seule machine.

Le sénateur Murray: Le charbon serait-il beaucoup plus cher que celui produit au cours de la phase 3?

M. Farrell: Oui. Le chiffre que j'avais en tête à l'époque se situait quelque part entre 50 000 et 75 000 tonnes. Ceci impliquerait deux galeries d'un mille de long.

Le sénateur Murray: Voulez-vous vraiment dire que vous produiriez le charbon à perte?

M. Farrell: Oui. Nous pensions avoir besoin de 6,5 à 8 millions supplémentaires. Toutefois, ces chiffres sont approximatifs.

Le sénateur Murray: Monsieur le président, j'espère que quelqu'un donnera suite aux questions du sénateur Butts car j'estime qu'un volet crucial de la discussion consiste à savoir pourquoi Donkin peut être un projet rentable, selon M. Farrell, dans le cadre d'une société privée et ne pouvait pas l'être dans le cadre d'une société d'État.

Le sénateur Moore: J'ai posé cette même question aux témoins du syndicat. Monsieur Farrell, vous aimeriez peut-être y répondre.

M. Farrell: Certainement. La mine australienne normale par longues tailles produit en moyenne 7 000 tonnes par année-personne. Les mines américaines sont un peu plus productives. Les États-Unis ont des mines qui produisent aux environs de 20 000 tonnes par année-personne. Je n'ai pas de chiffres moyens mais j'ai certaines données sur leurs meilleures mines. Elles produisent 20 000 tonnes par année-personne. Je parle de mines par longues tailles qui sont semblables à celles du Cap-Breton. J'en ai visitées quelques-unes récemment aux États-Unis. Nous avons parcouru quatre milles et demi sous terre jusqu'à la longue taille. Elles ont au total 116 employés, partout, et elles extraient 2,2 millions de tonnes américaines par an, ce qui équivaudrait à 2 millions de tonnes canadiennes.

C'est la concurrence. Elles sont prospères en raison de leur mode de fonctionnement. Leurs moyens de transport sont bons; leurs méthodes d'abattage sont bonnes; et elles utilisent des entrées multiples. Toutefois, au Cap-Breton, nous utilisons une méthode européenne, et j'estime que nous devrons changer notre méthode d'abattage si nous voulons être productifs.

En une semaine au mois de juin, la meilleure exploitation minière par longues tailles au Royaume-Uni a produit 8 000 tonnes par jour. Au Cap-Breton, la meilleure produirait 10 000 tonnes, ce qui est comparativement un assez bon résultat, en utilisant le même type de matériel.

Le président: C'est assez intéressant. Lorsque les mines fonctionnent à pleine capacité, savez-vous combien de tonnes Devco produit par année-personne à Phalen ou à Prince?

M. Farrell: Je crois qu'ils prévoient environ 3,2 millions de tonnes par an avec 1 500 employés. Cela ferait environ 2 000 à 2 500 tonnes.

Le sénateur Moore: Qu'avez-vous dit au sujet de l'expérience vécue en Grande-Bretagne?

M. Farrell: Je me fie simplement sur certaines revues que je lis, mais la meilleure exploitation par longues tailles produisait 8 000 tonnes par jour.

Le sénateur Moore: Nous avons parlé de la production en termes de tonnes par année-personne, alors pourriez-vous nous donner les chiffres sur cette base?

M. Farrell: Je n'ai pas la production totale par mine, mais une exploitation américaine par longues tailles atteindra facilement le double de ce chiffre.

Le sénateur Murray: Chez Devco, la production par homme-poste atteignait 10 tonnes en 1996 et 8,9 tonnes en 1997, selon leur rapport annuel.

M. Farrell: Il y a 230 jours de travail dans l'année.

Le sénateur Moore: Avez-vous dit que la production par homme et par année atteignait 10 000 tonnes chez Devco?

Le sénateur Murray: Par homme-poste, elle atteignait 10 tonnes en 1996 et 8,9 tonnes en 1997.

Le sénateur Moore: Dans votre exposé d'ouverture, monsieur Farrell, vous avez mentionné que SNC Lavalin était un gestionnaire de projet fournissant des conseils en génie, des conseils financiers et je suppose capable d'obtenir des fonds. Avez-vous conclu une entente ou signé une lettre d'intention avec eux pour ces services ou vous occupez-vous, jusqu'à présent, simplement du contrat concernant l'étude de faisabilité préliminaire?

M. Farrell: Nous nous occupons de l'étude de faisabilité préliminaire, mais nous avons une offre de leur part pour faire le reste.

Le sénateur Moore: Ont-ils demandé à participer?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur Moore: Notre comité s'est réuni en mars 1997 et nous sommes maintenant en novembre de la même année. Durant tout ce temps, votre compagnie et vous-même avez travaillé sur ce projet. L'intérêt démontré par le Sénat pour ce projet et la rencontre avec notre comité ont-ils été utiles ou préjudiciables pour vous pour ce qui est de vos efforts, au niveau de votre potentiel de collecte de fonds en vue de faire ce que vous aimeriez entreprendre si les études de faisabilité se révélaient positives?

M. Farrell: Nous avons parlé à des gens autres que SNC Lavalin, et ils posent tous des questions concernant premièrement la productivité, deuxièmement les syndicats et troisièmement la politique.

Le sénateur Murray: Quelle est la réponse?

M. Farrell: Oui, oui et oui.

Le sénateur Buchanan: Monsieur Farrell, je suis persuadé que vous vous souvenez du rapport sur l'énergie qui a été compilé dans les années 79 ou 80. Vous faisiez partie de l'équipe du projet, avec des gens comme Coady Marsh et Bill Shaw. Je suis convaincu que vous vous souvenez que nous avons amené le navire de forage pour délimiter les veines des houillères Sydney à Donkin, et que les recommandations visaient à l'époque à poursuivre le travail impliqué dans les services et ensuite à creuser, en fin de compte, les deux galeries. Comme vous l'avez mentionné, le coût dépassait 80 millions de dollars, surtout si l'on ajoute les 6 à 8 millions pour les travaux de préparation sur le bateau de forage.

Si je me souviens bien, et j'ai vérifié quelques-uns de ces chiffres auprès de Bill Shaw, certaines des veines qui seraient exploitées sont la veine Harbour, la veine Hub et la veine Lloyd's Cove. Il y a là des veines très épaisses, certaines ayant jusqu'à 12 pieds d'épaisseur.

Je voudrais aborder la question de la teneur en soufre. Si je comprends bien, la sole et le plafond ont non seulement une teneur élevée en soufre mais produisent du charbon assez sale, et le centre de certaines de ces veines a une teneur moyenne en soufre variant entre 1 et 2 p. 100; est-ce exact?

M. Farrell: Je pense que c'est plus près de 2,4 p. 100. Il y a un gros bloc dans la veine Harbour où le centre atteint en moyenne 2 à 2,5 p. 100.

Le sénateur Buchanan: Je crois savoir que le plafond et la sole atteignent environ 4 p. 100, ce qui fait grimper la teneur moyenne en soufre.

M. Farrell: C'est exact.

Le sénateur Buchanan: Selon mes souvenirs de l'époque, et j'ai rafraîchi ma propre mémoire en jetant un oeil sur tous les rapports, on ne contestait nullement à l'époque le fait que l'exploitation de la mine Donkin était faisable, mais qu'il faudrait des études plus approfondies pour y parvenir. De nombreuses études ont été effectuées dans les années 80 avant de creuser ces galeries. Vous vous souviendrez que Devco n'était pas intéressée par la mine Donkin, et elle ne l'est toujours pas; et ce que nous avons fait, c'est d'inviter la compagnie Consolidated Coal à étudier le projet. Comme vous vous en souviendrez, ils ont eu de la chance de quitter Glace Bay vivants.

Consolidated Coal était relativement certaine que la mine Donkin pouvait être une mine autonome, sans les frais généraux de Devco, et ils étaient disposés à étudier la situation à fond jusqu'à ce que l'opposition devienne si intense au Cap-Breton qu'ils ont décidé de ne pas aller de l'avant, tout comme les gouvernements provincial et fédéral. Je pense que nous sommes assez loin de cette situation aujourd'hui, même s'il y a encore de l'opposition, comme vous le savez, à la privatisation des mines.

Êtes-vous convaincu que Devco n'est pas disposée à exploiter la mine Donkin?

M. Farrell: Oui, j'en suis convaincu. Je suis persuadé qu'ils n'ouvriront pas la mine Donkin parce que le principal facteur est le prix du charbon. Vous devez charger le charbon dans le port de Sydney à un prix variant entre 40 et 45 $ la tonne, et à moins d'un changement important au niveau des techniques, je ne pense pas que ce soit possible. On peut le faire mais il faudra modifier les méthodes de travail.

Le sénateur Buchanan: Si vous dites que Devco ne peut pas le faire ou ne le fera pas en raison du coût, pensez-vous que votre groupe soit capable de le faire?

M. Farrell: Oui, je suis persuadé que nous le pouvons. Nous prendrions modèle sur les systèmes américains et australiens.

Le sénateur Buchanan: Combien y a-t-il de charbon récupérable dans la région de Donkin?

M. Farrell: C'est une bonne question parce que nous avons connu dernièrement des explosions de pierres et des dégagements de grisou. Ils ont commencé dans la mine no 26 et on aurait dit que Lingan allait en avoir, mais ce ne fut pas le cas. Maintenant, on parle de cette possibilité à Phalen. Tous ces coups de grisou se sont produits aux environs de -700 mètres et cette cote se trouve à Donkin. Toutefois, je ne suis pas convaincu que cela arrivera.

Le sénateur Buchanan: Quel est votre avis sur l'incidence possible, négative ou positive, du transport du gaz de l'île de Sable par gazoduc jusqu'à la zone industrielle du Cap-Breton? Quelle sera son incidence sur le secteur des charbonnages?

M. Farrell: Je ne sais pas ce que sera le prix du gaz, mais je crois que Devco vend du charbon à Lingan pour environ 2,40 $ par giga-joule, alors si le gaz naturel est dans la même fourchette de prix -- et je pense que le gaz naturel n'est peut-être pas aussi efficace que le charbon -- il serait intéressant d'utiliser le gaz naturel.

Je ne sais pas très bien comment est fixé le prix du gaz. Il pourrait être saisonnier. Je pense qu'il fluctue. Ce qui me préoccupe c'est que si le prix se situe entre 2 $ et 2,50 $, il constituera une menace.

Le sénateur MacDonald: Vous avez dit, monsieur Farrell, que les gens prennent en considération trois facteurs: la productivité, les syndicats et la politique. J'aimerais en ajouter un quatrième, à savoir le rendement sur l'investissement pour les personnes qui investiraient dans cette entreprise. La seule fois où j'ai entendu parler de politique, c'est lorsque les Mineurs unis d'Amérique (MUA) ont critiqué le mode de nomination des administrateurs de Devco. Ils jugeaient que c'était du favoritisme.

Y a-t-il une possibilité que vous puissiez faire des profits rapidement et malhonnêtement?

M. Farrell: Non. La veine de charbon est uniforme, à la différence d'une mine dans laquelle vous avez une partie de haute qualité. La qualité est répartie dans toute la mine. Elle s'améliore généralement vers le nord et vers l'est, mais il n'y aura pas de poche de charbon vraiment bon que vous pourriez exploiter et vendre à un prix faramineux.

Le sénateur MacDonald: Lors de notre rencontre avec M. Drake, j'avais eu l'impression qu'une mine de très grande valeur pourrait être ouverte. Ils parlaient peut-être d'exploitation sélective. Ils disaient qu'en adoptant une méthode d'exploitation graduelle, on pourrait ouvrir une mine à Donkin qui produirait un million de tonnes d'une valeur approximative de 120 millions de dollars par an.

Le sénateur Buchanan: Cela remonte au rapport de la firme d'ingénieurs-conseils Kilborn de Montréal.

Le sénateur MacDonald: Steve Drake l'a certainement cité, comme vous l'avez fait, sénateur Buchanan.

Le sénateur Buchanan: Oui, c'est tiré de ce rapport.

M. Farrell: Il faut un bon rendement sur l'investissement. Je suis persuadé que vous savez combien rapportent les fonds mutuels, j'imagine donc qu'il faudrait offrir un rendement plus élevé sur l'investissement dans une mine de charbon avant que les gens s'intéressent à l'industrie minière. Il faudrait offrir aux investisseurs un rendement d'environ 20 p. 100.

Le sénateur MacDonald: Que pouvez-vous faire avec 120 millions?

M. Farrell: Cela représenterait probablement le coût d'investissement pour les cinq premières années d'une mine produisant deux millions de tonnes par an.

Le sénateur MacDonald: Serait-elle rentable?

M. Farrell: Je pense que oui.

Le sénateur MacDonald: Est-ce le cas seulement si vous investissez 120 millions et si vous produisez un million de tonnes?

M. Farrell: C'est très déroutant car certains rapports présentent le coût d'investissement sur 20 ans comme un montant forfaitaire, disons 450 millions de dollars. Cependant, après une période de cinq ans, la mine commencera à produire son propre capital.

Le sénateur Buchanan: Monsieur Farrell, savez-vous que, en vertu de la Nova Scotia Natural Resources Act et des concessions que possède Devco, il faut obtenir le consentement du gouvernement provincial avant que Devco soit autorisée à transférer une concession, ou n'importe quelle concession d'une ressource naturelle quelconque en Nouvelle-Écosse, y compris le charbon?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur Buchanan: Selon les dires du premier ministre MacLellan, je crois savoir que la province n'a encore jamais donné son consentement à un transfert de concession. Il a déclaré qu'à son avis Donkin représente l'avenir de Devco et qu'il doit étudier très sérieusement la question de savoir si ces concessions devraient être transférées. Êtes-vous au courant de cela?

M. Farrell: Oui, j'en ai entendu parler. Dans l'industrie minière, les gens partent à l'aventure et marquent des concessions, soit physiquement sur le terrain, soit sur une carte dans un bureau, et ils font beaucoup de travail sur la concession. Ils mettent ensuite fin à leur intérêt dans la concession et la vendent, par exemple à une compagnie d'exploration qui, à son tour, vend son intérêt à une compagnie minière. C'est ainsi que ça se passe. Pour moi, le fait que Devco nous vende ses concessions ne diffère en rien de la façon dont les affaires se déroulent dans n'importe quelle autre province du Canada.

Ce serait un grave recul pour l'industrie minière si le gouvernement refusait de transférer une concession sur laquelle quelqu'un a travaillé et souhaite vendre.

Le sénateur Buchanan: Je suis d'accord.

M. Farrell: Assurément, c'est une partie importante de l'avenir de Devco. À l'heure actuelle, elle possède deux mines. Si Phalen venait à fermer, il resterait Prince, et le charbon de cette mine doit être mélangé à quelque chose d'autre, mais je ne suis pas certain si le charbon de Donkin convient pour faire ce mélange ou non. En tout cas, si nous avions la gestion de la mine, nous serions tout à fait disposés à lui vendre du charbon pour le mélanger à celui de la mine Prince. C'est la raison d'être de l'industrie minière, vendre le produit.

Le sénateur Butts: Premièrement, monsieur Farrell, votre entente avec Devco comporte-t-elle une promesse de ne pas vendre votre charbon en Nouvelle-Écosse?

M. Farrell: Oui.

Le sénateur Butts: Deuxièmement, englobe-t-elle l'utilisation des usines de lavage et des quais internationaux de Devco?

M. Farrell: Nous l'avons proposé, mais sur une base concurrentielle. Si Devco peut nous faire la meilleure offre, alors nous les utiliserons.

Le sénateur Butts: Êtes-vous obligés d'utiliser ces installations?

M. Farrell: Cela n'aurait aucun sens de construire un quai si nous pouvons utiliser celui de Devco.

Le genre d'usine de lavage que nous utiliserions coûterait plus de 20 millions. Les chantiers pour entreposer le charbon et le mélanger sont tous disponibles à l'usine de lavage de Victoria Junction qui appartient à Devco. Elle possède une voie ferrée qui pourrait être prolongée jusqu'à notre site. Ce serait un gros avantage dans le domaine du transport, tout comme l'utilisation du quai international.

Le sénateur Butts: Est-il exact que toutes ces installations ne sont pas tellement utilisées par Devco à l'heure actuelle?

M. Farrell: Je ne pense pas qu'ils aient des projets d'exportation de charbon.

Le sénateur Butts: Avez-vous des inquiétudes à propos de l'eau qui sera pompée de la mine Donkin, l'eau qui a servi à l'inonder en 1988?

M. Farrell: Cette eau s'infiltrait dans la galerie à environ un kilomètre sous la surface. C'était de la bonne eau. D'ailleurs, je pense que vous pourriez la boire. Une étude a été effectuée avant l'inondation pour essayer d'en prédire l'incidence éventuelle et je crois que la conclusion disait que cela n'affecterait pas l'acier dans la galerie car l'eau ne serait pas acide.

Le sénateur Butts: Est-ce qu'elle dissout le soufre?

M. Farrell: Non. Elle ne croise que quelques veines et les veines n'ont que trois et quatre pieds d'épaisseur.

Le sénateur Butts: Certains ingénieurs disent que l'inondation de la mine Donkin a été la plus grande erreur jamais commise. Je suis persuadé que vous vous souviendrez qu'il y a quelque temps l'effluent d'une mine a tué tous les poissons dans un certain rayon autour de la mine.

M. Farrell: Il avait fallu assécher de nombreux ouvrages anciens de soutènement. Il s'agit seulement de deux galeries.

Le sénateur Butts: C'est seulement depuis 1988.

M. Farrell: Oui, et il faut espérer qu'il n'y a pas eu de production acide.

Le sénateur Murray: À la page 3 de l'avant-projet, vous soulignez qu'il faudrait l'approbation réglementaire de la Nouvelle-Écosse pour exploiter la mine. Autrement dit, vous ne seriez plus assujetti aux règlements fédéraux. Est-ce le cas?

M. Farrell: C'est exact.

Le sénateur Murray: Vous considérez cela comme un avantage, j'imagine?

M. Farrell: Je pense que c'est un plus, oui.

Le sénateur Murray: Finalement, monsieur Farrell, je tiens simplement à vous dire que ceux d'entre nous qui s'inquiètent de cette transaction ne portent nullement atteinte à votre sincérité ou assurément pas à votre bagage et à votre expertise dans ce domaine. Nous sommes inquiets au nom de l'actionnaire, à savoir le contribuable canadien, à propos de la façon d'aliéner cet actif, et nous sommes également inquiets parce que nous sommes en politique et dans la vie politique et nous pensons que le gouvernement, par le biais de Devco, a une certaine responsabilité sociale au Cap-Breton, et c'est la raison pour laquelle nous examinons ce sujet.

Veuillez nous dire où tout cela va nous mener. Aujourd'hui, vous nous avez dit que tout en est au stade préliminaire. Vous examinez les données existantes. Vous en êtes au stade préliminaire, à étudier la superficie, l'emplacement et la qualité des veines de charbon. L'identification des débouchés n'a pas été effectuée au point où vous pourriez vous sentir à l'aise si vous deviez ouvrir une mine, et vous n'avez pas encore conclu une entente avec Devco pour laquelle 60 jours vous avaient été accordés en avril dernier.

Où tout cela nous mène-t-il? Où en serez-vous dans six mois?

M. Farrell: Si nous pensions, d'après ce que nous avons appris jusqu'à présent, que ce ne serait pas faisable, nous arrêterions de dépenser de l'argent. Notre propre argent est investi dans cette affaire et nous le respectons autant que celui du gouvernement.

Si le gouvernement fédéral et Devco n'investissent pas dans la mine Donkin, j'estime qu'ils devraient céder cet actif afin que l'industrie privée puisse le faire.

Le sénateur Murray: Vous paieriez pour l'obtenir, bien sûr?

M. Farrell: Oh oui, nous paierons la juste valeur marchande pour l'obtenir.

Le sénateur Murray: Quelle pourrait-elle être, à votre avis?

M. Farrell: Je ne sais pas encore.

Le sénateur Murray: Étant donné que le gouvernement y a injecté 80 millions, seriez-vous d'accord pour dire qu'un juste prix pourrait commencer aux environs de ce chiffre?

M. Farrell: Non, je ne suis pas du tout d'accord avec cela.

Le président: Je ne pense pas que nous vous demanderions d'entamer la négociation ici, sénateur Murray.

Avant de clore, je tiens à insister sur les commentaires du sénateur Murray. Nous nous inquiétons de l'utilisation appropriée de cette ressource. Si elle peut être exploitée et si elle peut profiter au secteur privé et à la collectivité, nous voulons le savoir.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'être venu témoigner devant nous aujourd'hui.

Je demande à M. Livingstone de bien vouloir s'avancer.

M. Livingstone a été invité à témoigner devant le comité et il a généreusement accepté de le faire dans le but principal d'informer le comité sur le gaz naturel de l'Île de Sable et son incidence sur les charbonnages, sur Devco et en particulier sur la Nouvelle-Écosse et le Cap-Breton.

Monsieur Livingstone, vous pourriez peut-être commencer votre exposé.

M. James I. Livingstone, président-directeur général, K2 Energy Corp.: Monsieur le président, sénateurs, c'est un grand honneur de pouvoir témoigner devant le comité sénatorial. Cet après-midi, mes commentaires toucheront le Projet énergétique extracôtier de l'Île de Sable (SOEP) et ses incidences sur le secteur industriel du Cap-Breton et sur les charbonnages au Cap-Breton.

Mon bagage est plutôt unique, par le fait que j'ai travaillé dans la production pétrolière dans la mer de Beaufort, au large de la côte Est du Canada, dans l'Ouest canadien et maintenant aux États-Unis. Je possède plus de 20 années d'expérience dans le secteur pétrolier et gazier. À ma connaissance, je suis le seul pétrolier auquel on ait jamais demandé de présider un bureau fédéral d'examen des incidences environnementales.

Je suis actuellement président directeur général de la société K2 Energy Corporation de Calgary, petite société pétrolière et gazière inscrite à la Bourse de Toronto. Avant K2 Energy, j'ai été président directeur général de Nova Scotia Resources Limited de 1993 jusqu'au limogeage du conseil d'administration et de moi-même en 1995. Étant né, ayant grandi et ayant étudié à Sydney, en Nouvelle-Écosse, je suis très préoccupé par les répercussions possibles du gaz naturel sur les charbonnages et l'économie du Cap-Breton.

Monsieur le président, j'appuie pleinement la mise en valeur du gaz naturel de l'Île de Sable, mais pas selon l'entente actuelle négociée par les partenaires du SOEP en Nouvelle-Écosse. Je m'oppose également farouchement à l'examen public par la Commission d'examen public conjoint et à son rapport final qui a été publié le mois dernier. Ce groupe a réalisé un processus public, pas un examen public convenable.

Les membres du comité préféreraient probablement que mon exposé soit court afin que je puisse répondre à leurs questions. Cependant, permettez-moi de décrire les volets du SOEP que je n'aime pas.

Tout d'abord, le régime des redevances est une mauvaise affaire. Les Néo-Écossais prennent des risques considérables mais obtiennent très peu de choses en retour. Pendant les trois premières années de production, la province de la Nouvelle-Écosse reçoit un pour cent des recettes brutes, puis deux pour cent des recettes brutes jusqu'à ce que tous les coûts du projet -- qui comprennent 2 milliards de dollars frais d'investissement, 130 millions de dollars par année en frais d'exploitation, des frais d'investissement préalables de 600 à 950 millions en redevances -- aient été récupérés. En plus de récupérer près de 3 milliards en coûts, les partenaires du SOEP doivent obtenir un taux de rendement simple égal à l'intérêt sur les obligations à long terme du gouvernement du Canada, plus cinq pour cent.

Pour obtenir cinq pour cent des revenus bruts, les promoteurs du SOEP doivent obtenir un rendement de 12,5 p. 100, plus le taux d'intérêt sur les obligations à long terme à dix ans du gouvernement du Canada. Pour obtenir 30 p. 100 des revenus nets, pas des revenus bruts, le même calcul s'applique. Tous les coûts du projet sont récupérés, plus le taux d'intérêt sur les obligations à long terme à dix ans du gouvernement du Canada, et un rendement de 45 p. 100. Les revenus nets désignent les revenus bruts moins les coûts d'investissement et les frais d'exploitation.

Les néo-Écossais n'ont aucune garantie d'approvisionnement en gaz naturel. Tout le gaz, y compris les 7 p. 100 de la Nova Scotia Resources Limited, sont engagés dans le gazoduc des Maritimes et du Nord-Est. Les Néo-Écossais ont cédé pour rien leur intérêt de 50 p. 100 dans le gazoduc extracôtier. À l'heure actuelle, ce dernier appartient à 100 p. 100 à des sociétés pétrolières étrangères.

Les contribuables ont payé entre 1 et 2 milliards de dollars pour trouver ce gaz par le biais du Programme d'encouragement du secteur pétrolier. Le régime des redevances n'en tient pas compte.

Le Cap-Breton n'obtiendra pas de gazoduc traversant le détroit de Canso. Le seul pipeline sera une canalisation pour les liquides extraits du gaz naturel jusqu'à Point Tupper en vue d'exporter les liquides en dehors de la province. Les sociétés néo-écossaises doivent être compétitives à l'échelle internationale pour obtenir des contrats de fabrication, de service ou d'approvisionnement.

Qu'est-ce que cela signifie pour le Cap-Breton et l'industrie des charbonnages? Tout d'abord, les revenus tirés des redevances seront insignifiants pour financer le chômage massif que le gaz naturel pourrait provoquer dans l'industrie des charbonnages. Ensuite, les habitants du Cap-Breton ne peuvent pas être compétitifs à l'échelle internationale pour obtenir des contrats de fabrication, d'approvisionnement ou de service. Pour ce faire, il faut avoir fourni ces biens et services dans le cadre d'un projet antérieur.

Le Cap-Breton n'aura pas la chance d'aménager un complexe pétrochimique car les liquides seront exportés en dehors de la province. Le Cap-Breton n'obtiendra pas de gazoduc sous le détroit de Canso alors que le matériel spécialisé se trouve dans la région pour installer la canalisation destinée aux liquides extraits du gaz naturel. La possibilité d'aménager une usine de carbure de fer ou une usine à réduction directe du minerai de fer au Cap-Breton s'est envolée car il faut un approvisionnement en gaz naturel pour ces usines.

Le secteur industriel du Cap-Breton ne bénéficiera d'aucun des avantages de ce projet, comme le démontre le plan des avantages du SOEP. La région de Halifax-Dartmouth recevra entre 70 et 80 p. 100 des avantages générés par ce projet pour la province de la Nouvelle-Écosse.

Monsieur le président, j'aimerais prendre quelques minutes pour dire aux membres de votre comité comment et pourquoi cette Commission d'examen public conjoint a déçu les habitants du Cap-Breton et en particulier ceux qui sont employés directement ou indirectement dans l'industrie des charbonnages.

Monsieur le président, je parle par expérience comme quelqu'un qui a présidé deux commissions d'examen public. Certains d'entre vous se souviendront peut-être des manchettes parues dans The Globe and Mail le 2 juillet 1990, lorsque j'ai recommandé le rejet du programme de forage dans le golfe dans la mer de Beaufort. La Commission d'examen public conjoint, présidée par M. Robert Fournier, qui est né, a grandi et a étudié aux États-Unis, a démontré l'existence de graves préjugés à l'encontre des habitants du Cap-Breton. Lorsque les Néo-Écossais m'ont demandé d'intervenir officiellement dans les audiences publiques, j'ai présenté mon avis d'intervention le dernier jour, le 8 janvier 1997. L'un des sujets que je demandais d'aborder était celui de l'incidence au niveau de l'emploi sur l'industrie des charbonnages du Cap-Breton par suite de l'exploitation du gaz naturel de l'Île de Sable. La commission a ignoré ma requête.

Lorsque j'ai présenté mon intervention officielle en avril, j'ai demandé à nouveau à la commission de se pencher sur les incidences négatives que le gaz naturel de l'Île de Sable aura sur l'industrie minière du Cap-Breton. De nouveau, la commission a ignoré ma requête. Mon dernier argument, adressé à la commission le 4 juillet 1997, avertissait les membres de ce qui suit:

Les incidences négatives sur l'industrie des charbonnages du Cap-Breton sont réelles, elles sont mesurables et il faut les aborder. Il s'agit de personnes qui doivent nourrir leurs familles et qui apportent une contribution très valable à l'économie et au tissu social de cette province. Votre commission ne peut ignorer ce fait; ces mineurs ont des droits en vertu des lois tant fédérales que provinciales. Le projet de gaz naturel de l'Île de Sable touche non seulement les mineurs mais l'ensemble du secteur industriel du Cap-Breton.

Une fois de plus, la commission a refusé de se pencher sur les incidences environnementales préjudiciables de ce projet. La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale exige pourtant de le faire. La commission d'examen socio-économique, qui a étudié la mise en valeur du gaz naturel de l'Île de Sable en 1983, a proposé comme première recommandation de rédiger un énoncé socio-économique sur les avantages du passage du charbon au gaz naturel pour la production d'énergie thermique.

Monsieur le président, je laisserai la Cour fédérale juger si cette Commission d'examen public conjoint a répondu aux exigences de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

J'aimerais maintenant vous dire ce que le gaz naturel peut faire pour le Cap-Breton et pour la Société de développement du Cap-Breton, Devco.

Tout le monde sait ce qui s'est passé en Grande-Bretagne, où l'industrie des charbonnages employait 1,2 million de travailleurs au milieu des années 70 et n'en compte plus que 20 000 à l'heure actuelle. Le gaz naturel de la mer du Nord a eu des répercussions énormes sur l'industrie britannique des charbonnages. En Allemagne, cette industrie fait face au même avenir, car il en coûte maintenant 210 $ US pour extraire une tonne de charbon allemand.

Sous réserve que le Cap-Breton puisse produire du charbon de bonne qualité à un prix compétitif, un avenir nouveau peut se présenter pour Devco et pour les mineurs de charbon du Cap-Breton. Voici quelques éléments clés que je recommanderais pour une nouvelle stratégie concernant le charbon du Cap-Breton et Devco.

Il faudrait permettre à Devco de construire un gazoduc secondaire jusqu'au Cap-Breton qui partirait de l'usine de gaz naturel Country Harbour et qui serait exempté des frais de transport par la conduite principale.

Devco deviendrait un producteur d'électricité à partir du gaz naturel et du charbon. La compagnie Nova Scotia Power serait le transporteur d'électricité, comme d'autres compagnies d'électricité en Alberta et aux États-Unis. En brûlant du gaz naturel, on pourrait réduire les émissions de CO2 émanant du charbon.

Pour éviter un monopole du gaz naturel dans la production d'électricité, il faudrait conserver le charbon comme solution de rechange.

Il faudrait accorder les droits de distribution du gaz naturel à Devco pour l'île du Cap-Breton.

Grâce à son infrastructure de quais pour le charbon, Devco devrait établir un partenariat avec le secteur privé en vue de construire une usine à réduction directe du minerai de fer ou une usine de carbure de fer. Grâce au minerai de fer du Labrador et au gaz naturel de l'île de Sable, le Cap-Breton pourrait jouer un rôle prépondérant sur ce marché.

Je recommanderais également que la Nouvelle-Écosse donne à Devco sa part de sept pour cent du gaz naturel extracôtier de la province, qui appartient actuellement à la compagnie Nova Scotia Resources Limited.

Enfin, il faudrait que la haute direction et le conseil d'administration s'adjoignent des gens d'affaires bien connus et hautement respectés à l'échelle internationale. De bons gestionnaires et de bons administrateurs reconnaissent la nécessité d'une diversification en fonction des changements qui interviennent dans l'économie mondiale.

Pour résumer, monsieur le président, le Cap-Breton peut et devrait devenir le producteur d'électricité le plus compétitif dans les Maritimes. En ayant la capacité de produire de l'électricité à partir du charbon et du gaz naturel, le Cap-Breton disposerait des outils nécessaires pour développer pleinement son économie et pour participer au marché du libre-échange nord-américain.

Dans sa forme actuelle, le SOEP pourrait malheureusement détruire l'industrie des charbonnages du Cap-Breton et l'économie du secteur industriel du Cap-Breton. La Nouvelle-Angleterre bénéficiera considérablement du gaz naturel de l'Île de Sable, mais le Cap-Breton, le Québec et l'Ontario se verront refuser cette chance.

Monsieur le président, ainsi que les membres de votre comité, je tiens à vous rappeler ce que stipulait l'Accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les ressources pétrolières offshore signé le 26 août 1986:

a) réaliser la mise en valeur préliminaire des ressources pétrolières dans la région extracôtière pour le bienfait du Canada dans son ensemble et de la Nouvelle-Écosse en particulier;

b) reconnaître le droit de la Nouvelle-Écosse d'être le principal bénéficiaire des ressources pétrolières dans la zone extracôtière, en harmonie avec la nécessité d'avoir un Canada solide et uni.

La dernière fois que j'ai jeté un coup d'oeil par ici, le Cap-Breton et les mineurs de charbon qui y vivent faisaient partie de la Nouvelle-Écosse; pas du Québec, ni de la Nouvelle-Angleterre. Ils font partie du Canada. Pourquoi ces deux régions se sont-elles vu refuser le gaz naturel de l'Île de Sable, cela me dépasse. Je trouve très étrange que les sociétés Mobil, Shell et Imperial Oil puissent dicter aux Canadiens où sera vendu le gaz naturel de l'Île de Sable.

Monsieur le président, ceci conclut mon exposé.

Le sénateur Buchanan: Je tiens à dire au départ que je suis absolument et totalement en accord avec les deux clauses que vous avez lues et qui sont tirées de l'Accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les ressources pétrolières offshore, et vous n'en attendiez pas moins de moi puisque, comme vous le savez, je l'ai signé.

M. Livingstone: C'est exact.

Le sénateur Buchanan: Cela figurait également dans l'accord de 1982 et le premier ministre Trudeau l'a signé.

Nous allons nous limiter au Cap-Breton, à la région du détroit de Canso et au secteur industriel du Cap-Breton. Comme vous le savez, un comité d'alliance du Cap-Breton a été mis sur pied pour examiner spécifiquement les incidences positives ou négatives du gaz naturel de l'Île de Sable sur le secteur industriel du Cap-Breton. Il est composé de représentants des gens d'affaires, des syndicats, du University College of Cape Breton, du clergé, de la chambre de commerce et de l'agence de développement économique. Cette mesure a un rapport tout particulier avec le fait que le Cap-Breton pourrait ne plus être compétitif par rapport à la région de Halifax-Dartmouth.

Comme vous vous en souvenez, l'un des points que nous avons négociés dans les années 80 était la construction d'un gazoduc traversant le détroit de Canso jusqu'à Point Tupper où se trouvaient le grand quai et les installations de l'ancienne raffinerie Gulf. Si mes souvenirs sont exacts, je ne pense pas que nous avions négocié ou exigé la construction d'un gazoduc se rendant jusqu'au secteur industriel du Cap-Breton. À l'époque, l'idée était que le gazoduc traverserait le détroit jusqu'à Point Tupper et que les liquides extraits du gaz naturel seraient utilisés dans une industrie pétrochimique. Ce n'était pas une demande, c'était une exigence du gouvernement provincial que ces liquides restent en Nouvelle-Écosse, dans cette région. Je pense que vous avez déjà mentionné être en accord avec cette idée.

M. Livingstone: C'est exact.

Le sénateur Buchanan: L'un des points que nous avons négociés dans les accords de l'époque stipulait que la Nouvelle-Écosse pourrait posséder ou avoir une option en vue de posséder jusqu'à 50 p. 100 de tous les gazoducs extracôtiers et côtiers jusqu'à la frontière du Nouveau-Brunswick, relevant de la compétence de la Nouvelle-Écosse, tel que déterminé dans l'accord sur les ressources pétrolières offshore de 1982 et de 1986.

Que dites-vous de la décision prise par le gouvernement provincial, il y a deux ans, d'ignorer ce droit et de céder cette part de 50 p. 100 à Mobil Oil, Shell, et cetera?

M. Livingstone: Sénateur Buchanan, j'estime que ce fut une décision horrible pour un certain nombre de raisons. Premièrement, il n'a rien reçu en contrepartie. Il ne s'en est pas servi comme atout pour obtenir une autre concession, comme un gazoduc traversant le détroit ou la garantie de conserver les liquides sur place. Deuxièmement, à titre de représentant d'une société pétrolière canadienne, il n'est jamais bon de voir quelque chose appartenir en totalité à de grosses sociétés. Comment peuvent entrer dans la concurrence les petites compagnies pétrolières, disons en Alberta, si elles veulent construire leur propre gazoduc? S'il fallait vendre cette part, j'aurais préféré qu'elle soit vendue à une compagnie comme Nova, IPL ou Trans-Canada Pipelines.

Le sénateur Buchanan: Mais vendue moyennant une compensation pour la Nouvelle-Écosse?

M. Livingstone: Assurément.

Le sénateur Buchanan: À l'heure actuelle, la Nouvelle-Écosse ne reçoit rien en retour.

M. Livingstone: Elle ne reçoit rien.

Le sénateur Buchanan: On m'a dit que l'une des raisons pour lesquelles la commission ne s'est pas penchée sur la question des gazoducs allant jusqu'au Cap-Breton résidait dans le fait que son mandat consistait à faire des choix fondés sur la limitation des incidences environnementales. Son mandat n'exigeait pas d'examiner les éventuelles répercussions négatives ou positives sur la Nouvelle-Écosse, y compris sur le secteur industriel du Cap-Breton et, pour cette question, la région de Halifax-Dartmouth. Est-ce le cas?

M. Livingstone: Non. La chose la plus simple aurait été de respecter le gazoduc qui avait été approuvé par l'ONE en 1983, allant de Glace Bay à Montréal, et d'avoir tenu compte strictement de sa partie extracôtière. On a déjà un gazoduc, approuvé par l'ONE au début des années 80, qui va de Glace Bay à Montréal. Cela me laisse perplexe.

Le sénateur Buchanan: S'agit-il du vieux TQ & M?

M. Livingstone: C'est exact.

Le sénateur Buchanan: L'une des principales préoccupations qui a été exprimée est que la présence d'un gazoduc allant du détroit de Canso jusqu'au secteur industriel du Cap-Breton pourrait signifier la mort de l'industrie charbonnière au Cap-Breton parce que le gaz naturel remplacerait le charbon. Les arguments avancés sont que le gaz naturel ne crée pas les mêmes problèmes environnementaux que le charbon -- ce que je ne crois évidemment pas -- et qu'il pourrait être plus efficace. J'ai entendu les deux arguments. J'ai entendu dire que le gaz naturel ne serait pas aussi efficace que le charbon, et j'ai entendu dire que le prix du gaz naturel ne le rendrait pas aussi rentable que le charbon.

M. Livingstone: Si tel est le cas, pourquoi les centrales au charbon de la Nouvelle-Angleterre se convertissent-elles au gaz naturel de l'Île de Sable?

Le sénateur Buchanan: Je suis heureux de vous l'entendre dire car, si tel est le cas, pourquoi se fait-il que 70 p. 100 de l'électricité produite en Alberta provient encore du charbon?

M. Livingstone: Je pense que c'est plus près de 90 p. 100.

Jusqu'à il y a deux ans, nous n'étions pas légalement autorisés à brûler du gaz naturel dans la province de l'Alberta. Il fallait que ce soit du charbon. Nous avons du charbon à faible teneur en soufre et des mines à ciel ouvert en Alberta. Le coût de production d'une tonne de charbon est assez minime. Nos centrales électriques sont situées très près des mines.

Le sénateur Buchanan: Les nôtres ne sont pas trop loin de Donkin. David Manning, président de l'Association canadienne des producteurs pétroliers, a déclaré la semaine dernière devant notre comité qu'il est plus rentable de faire brûler du charbon que du gaz naturel, même si le gaz naturel existe en Alberta. Êtes-vous en train de dire que le même principe ne s'appliquerait pas au Cap-Breton?

M. Livingstone: Je connais le prix d'une tonne de charbon au Cap-Breton, mais je pense que l'avenir du Cap-Breton, comme je l'ai dit dans mon mémoire, devrait résider dans l'utilisation des deux.

Le sénateur Buchanan: Voulez-vous dire mélanger du gaz naturel et du charbon?

M. Livingstone: Une production électrique séparée.

Le sénateur Buchanan: Dans des usines différentes?

M. Livingstone: Exactement.

Le sénateur Buchanan: Suggérez-vous que Lingan 1 et 2 fonctionnent au gaz naturel et Lingan 3 et 4 au charbon?

M. Livingstone: À mon avis, vous devez tout d'abord prendre en considération la région du détroit. Je crois que la plus grosse usine de pâte à papier va passer à une centrale de cogénération. Elle a déposé des documents à l'audience et témoigné en disant qu'elle peut pomper jusqu'à 40 millions de mètres cubes de gaz naturel par jour dans une centrale de cogénération. Elle utilise également de l'électricité. Cette situation changera et elle aura une incidence sur le Cap-Breton.

Le sénateur Buchanan: Si je comprends bien, la compagnie Power Corporation fera une demande pour être un distributeur en Nouvelle-Écosse et, si elle réussit, elle convertira l'usine de Tuft's Cove du pétrole au gaz naturel. Par contre, si elle n'est pas choisie pour être un distributeur, et si elle obtient un bon prix, elle procédera à la conversion. Sur un plan environnemental, cela aurait une incidence positive sur la région de Halifax-Dartmouth.

Au Cap-Breton, les MUA et d'autres personnes se sont dit préoccupés par le fait que, si cela arrive, l'usine de Tuft's Cove aura réduit considérablement sa capacité de production à cause du pétrole lourd qu'elle brûle et des problèmes environnementaux que cela crée, en particulier à Dartmouth. Ce qui les préoccupe, c'est que si l'usine commence à brûler du gaz naturel, elle augmentera immédiatement sa capacité de production à Tuft's Cove, ce qui entraînera aussitôt la réduction de sa capacité de production à Lingan et éventuellement à Point Aconi. Toutefois, cela pourrait ne pas affecter Point Aconi car il s'agit d'une usine spécialisée avec un lit fluidisé. Les MUA s'inquiètent du fait que la quantité de charbon vendue à la société Power Corporation par Devco sera réduite parce que la capacité de production des centrales Lingan sera réduite. Ils disent que la même situation surviendra dans des proportions accrues si l'une ou la totalité des centrales Lingan sont converties au gaz naturel.

M. Livingstone: Si vous expédiez du gaz naturel dans la région de Halifax-Dartmouth, pourquoi ne le prendriez-vous pas à la sortie de l'usine ou ne lui feriez-vous pas traverser le détroit de Canso pour le produire ici? D'après les droits qui ont été approuvés pour ce gazoduc, vous paierez 50 ou 60 cents, que vous transportiez ce gaz à un mille de l'usine au gaz naturel à Country Harbour ou jusqu'à Boston. Le Cap-Breton dispose d'un avantage considérable en faisant passer un gazoduc, qui se trouve à environ 40 milles de Country Harbour, sous le détroit et en produisant de l'électricité dans le détroit pour l'ensemble de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Buchanan: C'est un concept intéressant, mais qu'advientra-t-il des quelque 2 000 mineurs et des 3 000 à 4 000 emplois indirects du secteur industriel du Cap-Breton? Si vous multipliez par trois pour inclure leurs familles, vous constaterez qu'environ 20 000 personnes seront touchées par la fermeture des mines de charbon.

M. Livingstone: Je pense qu'il faut également prendre en considération les avantages de réduire les émissions de CO2 qui découleraient de l'utilisation du gaz naturel par rapport au charbon.

Le sénateur Buchanan: Savez-vous que, dans le secteur industriel du Cap-Breton, la quantité de CO2 produite par nos centrales est inférieure à 0,1 p. 100 de toute la production canadienne de CO2?

M. Livingstone: J'ai bien peur que ce chiffre soit calculé per capita.

Le président: Sincèrement, sénateur Buchanan, des témoins nous ont dit que nous sommes pratiquement arrivés au niveau maximum permissible à l'heure actuelle.

Le sénateur Buchanan: Selon l'accord canado-américain signé en 1988. Cependant, cette situation a changé avec l'arrivée de l'usine à lit fluidisé il y a quelques années. La quantité de SO2 a été réduite de 90 p. 100. Si nous ne construisons pas de nouvelles centrales -- ce que la compagnie Power Corporation n'est pas disposée à faire avec le charbon -- ce niveau devrait demeurer inchangé.

Dans les années 80 et au début des années 90, on avait envisagé d'amener le gaz naturel sur la côte près de Country Harbour et de le canaliser vers une région dans laquelle la compagnie Power Corporation construirait de nouvelles centrales au gaz naturel et exporterait sa production grâce aux lignes de transport interprovinciales jusqu'au bassin de la Nouvelle-Angleterre. Je ne sais pas si cette solution est encore envisagée.

M. Livingstone: Je pense que le Nouveau-Brunswick a devancé la Nouvelle-Écosse dans les négociations.

Le sénateur Buchanan: Il ne nous avait pas devancés dans les négociations durant les années 80.

Le sénateur MacDonald: Je dois avouer que je n'aime pas le ton de votre exposé. Vous nous dites ce qui ne va pas avec l'examen, ou le soi-disant examen, mais vous ne dites pas comment cela est arrivé ou pourquoi les Canadiens n'ont pas été impliqués. Je ne suis pas d'accord avec votre déclaration à propos de M. Fournier lorsque vous dites qu'il est né, qu'il a grandi et qu'il a étudié aux États-Unis et qu'il a des préjugés graves contre les gens du Cap-Breton. Je n'apprécie pas une remarque de ce genre. J'estime que cela déprécie votre exposé général.

Que signifie «TQ & M»?

M. Livingstone: Trans Québec & Maritimes.

Le sénateur MacDonald: Ils étaient l'un des promoteurs, n'est-ce pas?

M. Livingstone: Leur demande a été refusée. Ils n'ont pas eu l'autorisation de témoigner.

Le sénateur MacDonald: Pourquoi?

M. Livingstone: Vous devriez demander à la commission ses motifs.

Le sénateur Buchanan: Je peux répondre à la question. J'étais présent.

Le sénateur MacDonald: N'étaient-ils pas les retardataires?

Le sénateur Buchanan: Non, pas à cette époque.

M. Livingstone: Que voulez-vous dire par «retardataires»?

Le sénateur MacDonald: Il y a une demande qui n'est pas arrivée dans les délais, n'est-ce pas?

Le sénateur Buchanan: Vous voulez dire la demande actuelle?

Le sénateur MacDonald: Oui.

M. Livingstone: Je ne sais pas ce que vous voulez dire par «arrivée dans les délais».

Le sénateur MacDonald: Je trouve tout simplement incroyable que nous ayions pu, en tant que Néo-Écossais, être si incroyablement stupides, si naïfs, que nous avons pu nous faire rouler par ces grandes sociétés étrangères auxquelles vous avez fait référence. J'essaie de trouver ce qui s'est passé. Vous dites que la compagnie TQ & M n'a pas pu témoigner. S'ils avaient eu quelque chose à dire, on les aurait entendus.

M. Livingstone: Non, ils ont présenté une demande à la commission et cette dernière a décidé de ne pas les entendre. Une autre société américaine envisageait un gazoduc sous-marin et elle a été exclue. Je crois que les deux sont sur le point d'intenter une poursuite en Cour fédérale.

Le président: Je n'ai pas suivi cela de très près mais je crois savoir que, lorsque la commission était disposée à recevoir les demandes, il y avait un délai à respecter pour les présenter, et celle qui a finalement été approuvée a été déposée dans les délais et les audiences se sont poursuivies. Je crois aussi savoir que TQ & M, même si elle n'était pas aussi en retard que le merveilleux projet du Texas qui a été présenté à la toute dernière minute, demandait à la commission de retarder sa décision pour lui donner plus de temps pour présenter des observations. La commission a refusé de le faire et a poursuivi son programme selon l'échéancier communiqué à toute la population. C'est tout ce que je sais.

Le sénateur Buchanan: Monsieur le président, je pense que nous devrions parler de Trans-Maritime Pipeline, pas de TQ & M. Trans Québec & Maritime était au premier plan au début des années 80. La raison pour laquelle leur demande n'a pas été approuvée à l'époque était l'absence d'évaluation environnementale et, en outre, le gouvernement fédéral refusait à l'époque de subventionner de nouvelles lignes partant de Québec vers le sud. C'est la raison pour laquelle l'ONE l'a refusée, tout comme le cabinet fédéral. La situation actuelle fait mention de Trans-Maritime Pipeline, qui est arrivée en retard.

M. Livingstone: Monsieur le président, je ne sais pas pourquoi on est si pressé d'obtenir l'approbation. Ce processus est actuellement en panne aux États-Unis. La Federal Energy Regulatory Commission a renvoyé leur demande en disant qu'elle était incomplète. Il n'y a aucune décision émanant des États-Unis à propos de la partie du gazoduc construite aux États-Unis.

Pour revenir à votre question, sénateur MacDonald, oui de nombreuses personnes qui sont familières avec l'industrie pétrolière se demandent bien pourquoi nous céderions 50 p. 100 de la propriété d'un gazoduc pour rien, pourquoi nous accepterions une entente de redevances de un pour cent, pourquoi les néo-Écossais devraient prendre le risque sur les réserves, et pourquoi nous permettons des coûts de prédéveloppement de 600 à 950 millions. Ce projet de gaz naturel a déjà englouti 1,6 milliard de dollars de l'argent des contribuables. Lorsque j'examine l'accord qui a été signé en 1986, je ne peux pas approuver les décisions prises par Bob Fournier. Il existe des gens plus qualifiés au Canada qui auraient pu présider une telle commission. Une décision d'une telle importance pour la Nouvelle-Écosse et pour le Canada n'aurait pas dû être prise par trois professeurs d'université.

Le président: Monsieur Livingstone, vous travaillez dans le secteur pétrolier, ou votre société oeuvre dans le secteur pétrolier, est-ce exact?

M. Livingstone: C'est exact.

Le président: Y a-t-il un lien direct ou indirect entre votre compagnie ou vous-même et l'un des promoteurs concernés?

M. Livingstone: Non.

Le président: Et vous n'agissez pas comme expert-conseil ou à un autre titre en rapport avec l'un des promoteurs en présence?

M. Livingstone: D'aucune façon.

Le sénateur Murray: Monsieur Livingstone, aidez-moi à comprendre la situation actuelle. Je crois me souvenir que, lorsque l'actuel premier ministre de la Nouvelle-Écosse, M. MacLellan, était dans la course à la chefferie du Parti libéral de cette province, il avait exprimé très clairement son opposition à la politique du gouvernement précédent, le gouvernement Savage. M. MacLellan est allé jusqu'à témoigner lui-même devant la commission pendant une de ses dernières journées de séance et certaines des raisons qu'il a invoquées sont les mêmes que celles que vous avez soulevées. Est-ce exact?

M. Livingstone: Oui, certaines étaient les mêmes.

Le sénateur Murray: Est-il exact de dire que, à la fin de la journée, nonobstant la décision de l'Office national de l'énergie, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a le pouvoir d'approuver ou non l'exploitation de cette ressource?

M. Livingstone: Il a un pouvoir d'approbation. Il existe une cogestion des ressources extracôtières.

Le sénateur Murray: Si le gouvernement estime que ce n'est pas dans l'intérêt de la Nouvelle-Écosse, il a toujours la possibilité de dire non, est-ce exact?

M. Livingstone: C'est ainsi que je comprends la loi.

Le sénateur Buchanan: C'est la loi concernant l'accord sur les ressources pétrolières offshore.

Le sénateur Murray: En dehors de votre critique du marché conclu, vous avez énoncé ce que j'appellerais une vision de l'avenir pour le Cap-Breton. À première vue, c'est assez attrayant, c'est assez séduisant, mais nous n'avons aucun moyen de savoir comment cela fonctionnera ou, en fait, quelles seront les réalités économiques, et je pense qu'il serait injuste de vous demander tous ces détails.

Quant à l'idée d'autoriser Devco à construire un gazoduc jusqu'au Cap-Breton qui partirait de l'usine de Country Harbour et qui serait exempt des frais de transport par la conduite principale, comment présenteriez-vous le dossier? Comment justifieriez-vous l'exemption des frais de transport?

M. Livingstone: Le gaz ne passerait pas par la conduite principale, le gazoduc qui va jusqu'à Boston. La référence concerne les droits «timbre-poste». Lorsque vous mettez un timbre sur une lettre à Sydney, en Nouvelle-Écosse, c'est le même prix pour l'envoyer à Glace Bay ou à Vancouver. Que vous utilisiez la ligne de transport pour un mille ou que vous alliez jusqu'à Boston, vous payez le même prix. En le faisant partir de l'usine, vous n'utilisez pas la principale conduite de transport; par conséquent, vos coûts de transport du gaz naturel jusqu'au détroit sont très bas.

Le sénateur Murray: Avez-vous une idée approximative du coût? Le gouvernement fédéral devrait préciser les coûts d'investissement de ce gazoduc.

M. Livingstone: Pas forcément. Il reste de l'argent dans le fonds de développement de l'Accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les ressourcces pétrolières offshore. Il reste environ 10 à 15 millions qui n'ont pas été dépensés. On pourrait utiliser ce montant.

Le sénateur Murray: Ce montant serait-il suffisant?

M. Livingstone: Il devrait. La compagnie Mobil Oil installe une canalisation en même temps. Toute bonne entreprise citoyenne vous facturerait simplement le coût d'installation de la canalisation.

Le sénateur Murray: Dans votre mémoire, vous déclarez à la page 4:

DEVCO deviendrait un producteur d'électricité à partir du gaz naturel et du charbon. La société Nova Scotia Power serait le transporteur d'électricité, comme d'autres compagnies d'électricité en Alberta et aux États-Unis.

Comment y parviendriez-vous? La réalité, c'est que la société Nova Scotia Power est la productrice d'électricité à partir de charbon. Elle possède deux ou trois usines au Cap-Breton, une à Trenton et d'autres ici et là. Lui diriez-vous de se retirer de ce créneau ou lui achèteriez-vous? Que feriez-vous?

M. Livingstone: Les Néo-Écossais aimeraient qu'une saine concurrence règne sur le marché de l'électricité. La compagnie Power Corporation est une société privée cotée à la Bourse de Toronto. Qu'y a-t-il de mal à voir Devco construire une usine de cogénération dans le détroit de Canso?

Le sénateur Murray: Au charbon?

M. Livingstone: Non, au gaz.

Le sénateur Murray: Sur le marché concurrentiel, les deux compagnies pourraient-elles faire des bénéfices?

M. Livingstone: D'après la demande, le gaz naturel sera utilisé par les usines de pâte à papier en Nouvelle-Angleterre. Elles vont toutes se convertir au gaz naturel.

Le sénateur Murray: Combien en coûterait-il à Devco pour construire une usine de ce genre?

M. Livingstone: Une usine de cogénération coûterait environ 50 millions.

Le sénateur Murray: Devco se verrait attribuer les droits de distribution du gaz naturel pour l'île du Cap-Breton. De qui relève cette décision?

M. Livingstone: Du gouvernement provincial.

Le sénateur Murray: Dans votre mémoire, vous poursuivez en disant ceci:

Grâce à son infrastructure de quais pour le charbon, Devco devrait établir un partenariat avec le secteur privé en vue de construire une usine de carbure de fer ou une usine à réduction directe du minerai de fer. Grâce au minerai de fer du Labrador et au gaz naturel de l'Île de Sable, le Cap-Breton pourrait jouer un rôle prépondérant sur ce marché.

J'ai deux questions. Premièrement, avez-vous une idée du coût d'investissement approximatif pour une telle usine? Deuxièmement, avez-vous de bonnes raisons de croire qu'il existe un débouché pour une nouvelle usine située au Cap-Breton? Savez-vous s'il existe des études concluant que cela pourrait être une entreprise rentable?

M. Livingstone: Oui. Regardez ce qui se passe dans l'industrie sidérurgique mondiale, surtout en Amérique du Nord. Elle en est arrivée à faire fondre la ferraille, ce qui a fait monter le prix de la ferraille. Ces deux processus dont je parle font mention de concentrés de fer pour remplacer la ferraille. Vous pouvez remplacer jusqu'à 30 p. 100 de votre ferraille par ce produit. Le produit exige deux ingrédients: du minerai de fer, qui est disponible au Labrador, et du gaz naturel.

À l'heure actuelle, Nucor, première compagnie au monde pour la fonte de la ferraille, a construit une usine en République de Trinité. Je crois que les Japonais sont en train d'en construire une à Corpus Christi, au Texas, pour 1,6 milliard de dollars. J'ai collaboré avec le maire de Shelby, au Montana, pour étudier la possibilité d'amener du minerai de fer depuis le Labrador jusqu'au Montana. Je pense que Sydney, en Nouvelle-Écosse, fait des tentatives dans ce sens et que cela représente une bonne ouverture. L'infrastructure existe au quai du charbon; c'est proche du Labrador; et il faudrait approfondir l'idée.

Le sénateur Murray: Vous avez parlé d'un montant de 1,6 milliard que les Japonais dépenseront pour construire une usine de ce genre. Est-ce d'un montant de cette ampleur dont nous parlons ici en termes d'investissement en capital?

M. Livingstone: Cela dépend de la taille de l'usine que vous souhaitez. Cette usine alimentera les aciéries de Nucor en Arkansas. Les aciéries ont été attirées en Arkansas par M. Clinton, alors qu'il était gouverneur, en leur garantissant des droits d'approvisionnement en électricité pendant 15 ans à moins de deux cents le kilowatt/heure.

Le sénateur Murray: Je me réfère à nouveau à votre mémoire dans lequel vous recommandez que:

La Nouvelle-Écosse donne à Devco sa part de sept pour cent du gaz extracôtier de la province, qui appartient actuellement à la compagnie Nova Scotia Resources Limited.

Pourquoi ferait-elle cela, monsieur Livingstone?

M. Livingstone: La compagnie Nova Scotia Resources se retire des affaires. Elle est en vente depuis deux ans.

Le sénateur Murray: Donnerait-elle simplement sa part de sept pour cent à Devco?

M. Livingstone: Pourquoi pas? Cela créera de l'emploi et aidera Devco. Qu'en tirera-t-elle sur le marché?

Le sénateur Murray: Je ne sais pas.

Le sénateur Moore: C'est une bonne question. Quelle est sa valeur?

M. Livingstone: Elle a essayé de la vendre et elle n'a pas pu en obtenir son prix. Lorsque j'en étais président il y a deux ans, j'avais fixé un prix de 20 millions. Évidemment, plus on se rapproche de l'exploitation d'une infrastructure de gaz naturel et d'un projet extracôtier, plus le prix monte.

Le sénateur MacDonald: Qui sont les partenaires du projet SOEP?

M. Livingstone: La compagnie Mobil Oil détient une participation majoritaire, proche de 50 p. 100; Shell vient ensuite; et je pense qu'Imperial Oil et Nova Scotia Resources détiennent 7 p. 100.

Le sénateur MacDonald: Est-il une menace futile pour l'une de ces compagnies de dire «Décidez-vous ou nous nous retirons?»

M. Livingstone: Je préside deux commissions d'examen public. Si je présidais l'une des commissions et qu'un représentant d'une compagnie pétrolière me dise cela, l'audience serait terminée. C'est aussi simple que cela.

Ils ont déclaré publiquement que les coûts préalables à l'exploitation s'élèveraient à 600 millions de dollars. Je pense que vous pourriez mettre en vente ces concessions de gaz naturel extracôtier et que vous en tireriez plus de 600 millions aujourd'hui.

Le sénateur Moore: Pour donner suite aux questions du sénateur Murray sur l'entente et sur la possibilité de changements apportés par le premier ministre MacLellan, en tant que néo-Écossais je considère cela comme une possibilité pour la Nouvelle-Écosse de devenir au moins en partie une province nantie après avoir été une province démunie. C'est certainement une ouverture pour la prochaine génération.

Si la province de la Nouvelle-Écosse devait exiger certains changements à l'entente pour garantir de bons avantages économiques pour la province, étant donné votre connaissance de l'industrie et vos années de service en Nouvelle-Écosse, quelle serait selon vous la réponse du SOEP?

M. Livingstone: Me demandez-vous ce qui se passerait si la province voulait renégocier le marché?

Le sénateur Moore: Que se passerait-il si elle exigeait que certains changements soient apportés?

M. Livingstone: Elle y gagnerait probablement un certain respect. Il faudrait trouver les bonnes personnes pour négocier l'entente. Les compagnies pétrolières sont constamment en négociations. À mon avis, il faudrait envisager des négociations pour ramener le gazoduc à 50 p. 100 et supprimer la compétitivité internationale sur les contrats.

Le sénateur Moore: Vous avez dit que pour être compétitifs à l'échelle internationale, il faut avoir fourni ces biens et services dans le cadre d'un projet antérieur. Qu'est-ce que cela signifie?

M. Livingstone: Quelqu'un doit payer pour la courbe d'apprentissage. Combien d'habitants du Cap-Breton ou de la Nouvelle-Écosse ont déjà vu un treillis ou une partie du matériel à haute pression qui serait utilisé? Quelques-uns des meilleurs soudeurs viennent du Cap-Breton, mais il faut du temps pour apprendre à maîtriser les nouveaux matériaux et les nouvelles spécifications. Les gouvernements peuvent négocier le coût de cette formation. Le coût peut être récupéré du côté des avantages par le fait que, lors du projet suivant, dans le golfe du Mexique ou ailleurs, vous pourrez dire que vous possédez l'expérience nécessaire pour construire un type particulier de treillis ou de module, en respectant les délais et le budget. Le gouvernement mexicain ne vous laissera pas apprendre pendant l'exécution de son projet. C'est de cette façon que l'Écosse est devenue ce qu'elle est aujourd'hui. Elle a adopté la ligne dure pour les avantages tandis que nous ne l'avons pas fait, si bien que nous ne sommes pas compétitifs à l'échelle internationale. Si vous pensez que vous pouvez concurrencer la Corée pour fabriquer des modules, je suis désolé de vous dire que vous faites fausse route.

Le sénateur Moore: Est-il trop tard pour faire certaines des choses que vous suggérez ici?

M. Livingstone: Il n'est pas trop tard. Le gouvernement fédéral devra donner son approbation à ce projet, tout comme la province.

J'y suis favorable. Je suis moi-même un homme du secteur pétrolier. J'ai signé un marché de 50 ans avec les Indiens pieds-noirs au Montana avec un taux de redevance de 35 p. 100 des recettes brutes. Ils ne prennent pas le risque de savoir si je suis rentable ou non. Ils veulent l'argent dès le départ. C'est la même chose en Alberta et en Saskatchewan. Si vous voulez prélever la ressource, vous devez payer au départ. Vous pouvez travailler avec les compagnies pétrolières. Il y a beaucoup d'argent dans ce secteur. Toutefois, le marché qu'ont obtenu les Néo-Écossais n'était pas bon et il faut le réexaminer.

Le sénateur Moore: Parmi vos collègues, comment perçoit-on ce genre de marché, sur une échelle de 1 à 10?

M. Livingstone: La plupart des gens pensent que c'est un marché formidable pour les actionnaires de Mobil, Shell et Imperial Oil. C'est tout ce que j'en dirai.

Le sénateur MacDonald: Si le soi-disant «marché du SOEP» venait à s'effondrer, pensez-vous que beaucoup de compagnies se présenteraient avec une offre qui vous plairait? Y aurait-il une queue?

M. Livingstone: Je ne dis pas que les sociétés feraient la queue si le marché venait à s'effondrer. Nous avons une loi qui s'occupe des licences de découverte importante. C'est arrivé parce que, quand nous sommes allés dans la mer de Beaufort, nous avons pris des engagements de plusieurs milliards de dollars en vue de mettre au point du matériel et une technologie spécialisés. Nous avons demandé au gouvernement fédéral si nous pourrions garder indéfiniment ce que nous trouvions, et nous lui avons précisé que nous ne serions peut-être pas capables d'exploiter nos gisements pendant 10 ou 20 ans. Le gouvernement du Canada nous a accordé des licences de découverte importante qui nous permettaient de conserver ce pétrole et ce gaz indéfiniment sans avoir à l'exploiter ou à y investir.

Les sociétés de la côte Est ont obtenu le même marché. Même si ce marché s'écroule, les mêmes personnes conserveront la propriété de ces concessions. Elles peuvent les conserver pour toujours. Le seul moyen de changer cela consisterait à légiférer pour supprimer les licences de découverte importante. À ma connaissance, le Canada est l'un des rares pays au monde qui en a. Si vous possédez une entente de concession et si vous ne l'exploitez pas, généralement elle retourne au gouvernement.

La plupart des gens ne connaissent pas les statistiques. Entre 70 et 80 p. 100 du pétrole mondial est aujourd'hui géré par des sociétés d'État.

Le sénateur Murray: Alors, qui a l'avantage dans une hypothétique renégociation? On peut détenir les concessions pour toujours, comme vous le dites, à cause de la loi régissant les licences de découverte importante. Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse et le gouvernement fédéral ont le pouvoir de vie et de mort sur son exploitation dans un avenir rapproché; est-ce exact?

M. Livingstone: Oui.

Le sénateur Murray: S'agit-il d'une impasse ou bien l'une ou l'autre des parties a-t-elle l'avantage pour provoquer une renégociation?

M. Livingstone: Vous ne pouvez pas provoquer de renégociation à moins que le processus en cours ne soit arrêté pour une raison quelconque, comme une contestation judiciaire ayant entraîné l'invalidation de la loi.

Le sénateur Murray: Qu'en est-il d'une simple décision du gouvernement de la Nouvelle-Écosse à l'effet qu'il ne permettra pas de poursuivre le marché sur la base actuelle et qu'il veut renégocier?

M. Livingstone: C'est ce qui s'est passé avec Hibernia. Il faudrait déclarer carrément que le marché n'est pas satisfaisant et les négociations reprendraient.

Avec le problème des émissions de gaz à effet de serre, ce gaz naturel n'en deviendrait que plus précieux. La concurrence pour ce gaz sur le marché de la Nouvelle-Angleterre vient du golfe du Mexique ou de l'Ouest canadien. Le problème, c'est qu'on se trouve à l'extrémité du gazoduc. Il est possible que le gaz n'arrive pas en Nouvelle-Angleterre. De cette façon, c'est une conduite réservée.

La situation a changé. Plus j'y pense, plus je me rends compte que ce gaz naturel pourrait être utilisé au Canada. La situation d'Hydro Ontario a changé tout le tableau. En tant que Canadien, je suis inquiet et je ne pense pas qu'il existe un calendrier magique stipulant que nous devons commencer en 1999. Le projet a été retardé aux États-Unis, si bien qu'on pourrait le reporter d'une autre année.

Hydro Ontario se dirige maintenant vers un marché déréglementé. Nous avons aujourd'hui la possibilité d'exploiter une ressource dans les Maritimes, en particulier en Nouvelle-Écosse et plus précisément au Cap-Breton, et cette option n'a pas été étudiée. J'ai essayé de faire une intervention lors de l'audience de l'ONE. Lorsque vous dépensez votre propre argent pour assister à une audience de l'Office national de l'énergie, il n'est pas facile de se faire dire que votre demande est irrecevable. Ils ont refusé d'écouter les suggestions concernant une usine de carbure de fer. Il est particulièrement frustrant d'entendre le président d'une commission de l'ONE dire à un jeune homme de Sydney, en Nouvelle-Écosse, qu'il met leur patience à l'épreuve en essayant de justifier l'étude de l'impact de ce projet sur l'industrie minière au Cap-Breton. Ce n'est pas correct.

Comme je l'ai déjà mentionné, j'ai présidé deux audiences publiques. Le but de ces audiences n'est pas d'entrer dans une salle avec 50 avocats et d'intimider les gens, c'est d'obtenir l'avis du public et de déterminer l'impact du projet sur l'île du Cap-Breton.

De l'autre côté, il y a la société Power Corporation. Qu'elle suggère ou non d'utiliser le charbon, n'importe qui d'autre peut se présenter et installer des unités de production indépendante d'électricité. Pour 50 millions de dollars, vous pouvez assurément accélérer la production d'électricité.

Le sénateur Butts: N'est-il pas vrai, monsieur Livingstone, que la commission de cinq membres dont vous avez fait mention, bien que présidée par un Américain, comportait trois membres de l'ONE?

M. Livingstone: Non. Il y avait deux membres à plein temps de l'ONE et M. Fournier est venu s'y ajouter comme troisième.

Le sénateur Butts: Le président de l'ONE nous a dit ce matin que trois des cinq membres étaient de l'ONE. Lorsque je lui ai posé une question à ce sujet, il ne m'a pas laissé espérer qu'il y aurait une autre audience sur le même sujet ou qu'ils étaient disposés à faire des changements. Il nous a dit carrément que la majorité des membres de l'ONE avait pris cette décision.

Après les commentaires que nous avons entendus au cours des deux ou trois derniers jours, j'ai un peu de difficulté à accepter la suggestion que Devco devrait assumer toute la responsabilité pour le charbon et le gaz naturel.

Est-il possible que nous puissions avoir une étude intéressante des incidences relatives du gaz naturel et du charbon sur l'emploi, l'environnement, les coûts, et cetera? Ce serait précieux pour le Cap-Breton. Vous avez présenté un bon argument en disant que nous devrions laisser Devco abandonner le charbon et passer au gaz naturel, mais je ne suis pas certain des coûts relatifs ou des incidences environnementales, et j'ai assurément des doutes sérieux au sujet de l'emploi.

Le sénateur MacDonald: Monsieur Livingstone, quelle est la position de la compagnie Nova Scotia Power, qui est une société privée? Je suis persuadé que chaque habitant de la Nouvelle-Écosse aimerait avoir le gaz naturel chez lui. Quelle a été la position adoptée par la compagnie Nova Scotia Power? De quel côté se rangeait-elle?

M. Livingstone: Comme le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, elle n'arrêtait pas de changer d'avis sur la question des droits à payer. Elle n'arrivait pas à se décider pour savoir si elle appuierait les droits entre points fixes, dans le cadre desquels vous payez simplement pour le coût de la canalisation, ou si elle préférerait les droits timbre-poste. À la dernière minute, une entente est intervenue lui permettant d'obtenir un rabais sur les droits timbre-poste. La compagnie Nova Scotia Power n'a pas aimé cela.

J'ai lu que la compagnie Nova Scotia Power est disposée à pomper environ 90 millions de mètres cubes de gaz naturel par jour de Tuft's Cove et de Trenton. La portion de Trenton provoquerait une perte de ventes d'environ un million de tonnes de charbon à Devco.

Les sociétés de production d'électricité deviennent uniquement des transporteurs d'électricité. Nous avons déréglementé le secteur des pipelines au Canada et les sociétés de pipelines transportent du gaz naturel et du pétrole. C'est leur rôle. D'autres compagnies trouvent la ressource. L'Alberta sera complètement déréglementée d'ici la fin de l'année. Cela signifie que si une compagnie de la Floride veut vendre de l'électricité à la ville de Calgary à un prix moins cher d'une fraction d'un cent, c'est de là que la ville de Calgary l'achètera.

Je travaille dans le secteur pétrolier. Nous bénéficions d'une formidable subvention cachée dans notre industrie, sous la forme d'actions accréditives. Les contribuables canadiens paient pour cette subvention. Elle n'est pas très bien connue, mais des centaines de millions de dollars sont injectés chaque année dans l'industrie pétrolière par le biais d'actions accréditives. Ce que nous transférons aux acheteurs, c'est le coût des puits de forage. En retour, ils obtiennent un crédit d'impôt et des actions de la compagnie.

Les lignes directrices fédérales concernant les actions accréditives s'appliquent maintenant à la production d'électricité. Dans une compagnie productrice d'électricité, il n'y a pas de risque comme dans le forage d'un puits de pétrole ou dans l'industrie minière. Cela permettra d'obtenir des capitaux sur la rue Bay.

Le problème de Devco ne se situerait pas au niveau des capitaux à trouver pour y parvenir; il consisterait à négocier la meilleure entente pour obtenir les outils dont le Cap-Breton a besoin. Ensuite, il suffirait de décider si l'on veut privatiser Devco ou la conserver comme société privée. Algoma Steel, qui est gérée par les employés, fait du bon travail.

Le sénateur Butts: En toute équité pour la Commission d'examen public conjoint, ses cinq ou six dernières recommandations traitaient du fait qu'elle n'avait reçu aucun mémoire du Cap-Breton, que personne n'était venu leur parler de la formation professionnelle ou de l'industrie pétrochimique.

M. Livingstone: Savez-vous pourquoi?

Le sénateur Butts: Je ne sais pas pourquoi. Tout ce que je dis, en toute équité, c'est qu'ils ont mentionné cela dans leur rapport.

M. Livingstone: L'avis publié dans le journal pour que les gens puissent soumettre des observations concernant ce projet a été publié entre le 18 décembre et le 8 janvier. La plupart des gens l'ont manqué parce que la publication s'est faite pendant les fêtes de Noël.

Lorsque je travaillais chez Gulf Oil, nous nous sommes rendus dans les collectivités du Nord et nous avons informé les gens sur ce que nous faisions et sur la façon de demander à faire des présentations lors des audiences. Le fardeau incombe au promoteur. Oui, les habitants du Cap-Breton ont raté l'occasion, mais quelqu'un aurait dû ouvrir l'oeil et les avertir.

Le sénateur Butts: Oui. Les leaders du Cap-Breton auraient dû ouvrir l'oeil.

Le président: Les habitants du Cap-Breton ont peut-être raté l'occasion, mais je ne pense pas qu'ils soient sur leur déclin. Les gens qui ont assisté à nos audiences ne ratent généralement pas les événements qui affecteront leurs moyens de subsistance. Il est peu probable que des gens comme Steven Drake ne se présentent pas. Il doit y avoir une autre explication.

Le sénateur Butts: Le Cap-Breton était plongé dans les élections municipales et le gouvernement au pouvoir était au beau milieu d'une campagne à la chefferie.

Le sénateur Moore: Monsieur Livingstone, du côté positif de votre rapport, vous avez émis diverses idées de développement économique pour le Cap-Breton, qui auraient évidemment un impact sur le reste de la province. Avez-vous présenté ces idées à la Commission d'examen public conjoint?

M. Livingstone: Le président a jugé ma demande irrecevable.

Le sénateur Moore: Vous êtes-vous présenté avec un mémoire écrit comme vous l'avez fait aujourd'hui?

M. Livingstone: Oui. Je l'ai inclus dans la documentation que je vous ai remise.

Le sénateur Moore: Votre mémoire écrit adressé à la Commission d'examen public conjoint a-t-il été inclus dans son procès-verbal ou faisait-il partie de son compte rendu officiel?

M. Livingstone: Oui.

Le sénateur Moore: J'ai un exemplaire du rapport. La recommandation 22 a trait à ce que le sénateur Butts a dit à propos de l'absence d'observations des néo-Écossais au sujet des ouvertures économiques. J'ai trouvé cela absolument incroyable. Après vous avoir entendu aujourd'hui, je mets en doute la crédibilité de cette déclaration.

M. Livingstone: Dans la documentation que j'ai apportée pour les sénateurs, j'ai inclus mon avis d'intervention, une copie de mon intervention officielle faite en avril et une copie des mes conclusions finales. Vous pouvez voir où j'ai soulevé cette question.

J'ai également comparu à l'audience et contre-interrogé les représentants de la province de la Nouvelle-Écosse pendant deux heures.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Livingstone.

L'ordre du jour étant épuisé, la séance est levée.

La séance est levée.


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