Délibérations du comité spécial sur
Le projet de loi C-20
Fascicule 7 - Témoignages pour la séance de l'après-midi
OTTAWA, le lundi 19 juin 2000
Le comité sénatorial spécial sur le projet de loi C-20, Loi donnant effet à l'exigence de clarté formulée par la Cour suprême du Canada dans son avis sur le Renvoi sur la sécession du Québec, se réunit aujourd'hui à 17 h 08 pour étudier ledit projet de loi.
Le sénateur Joan Fraser (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, la douzième séance du comité sénatorial spécial sur le projet de loi C-20 est maintenant ouverte. Je vous souhaite à tous de nouveau la bienvenue ainsi qu'à nos téléspectateurs.
Nous passons maintenant à l'étape finale de notre examen du projet de loi C-20, Loi donnant effet à l'exigence de clarté formulée par la Cour suprême du Canada dans son avis sur le Renvoi sur la sécession du Québec.
Le sénateur Lynch-Staunton: Avant de passer à l'étude article par article du projet de loi, madame la présidente, puis-je maintenant présenter une motion?
Soit dit en passant, je suis membre d'office du comité, mais comme je remplace le sénateur Rivest, je ne siège pas maintenant à titre de membre d'office. Si les sénateurs Boudreau ou Hays arrivent, je siégerai comme membre d'office.
La présidente: Vous siégez donc au comité comme simple sénateur.
Le sénateur Lynch-Staunton: J'aimerais d'abord préciser que le ministre ne nous a pas dit cet après-midi qu'il était urgent que nous adoptions ce projet de loi. Comme nous le savons, il n'y a pas urgence.
J'aimerais aussi signaler qu'un certain nombre de témoins qui figuraient sur notre liste ont refusé de comparaître simplement parce que le moment choisi ne leur convenait pas. Je n'ai pas à vous les nommer. Vous avez la même liste que moi. L'un de ces témoins a dit qu'il ne pouvait pas comparaître avant le 19 juin. Un autre a dit qu'il était en Australie jusqu'au 16 juin. Un troisième ne pouvait pas venir avant juillet. Je ne sais pas exactement ce qu'il en est pour les autres, mais il est évident que des témoins qui auraient pu nous éclairer sur le projet de loi ont refusé de comparaître simplement parce que le moment choisi ne leur convenait pas.
Nous devrions donner l'occasion à ces personnes de comparaître devant le comité. Voilà donc l'objet de ma motion qu'on considérera à juste titre comme une mesure dilatoire qui vise cependant un but légitime. Bon nombre de sénateurs -- et même ceux qui appuient le projet de loi -- ont eu beaucoup de mal à en comprendre les conséquences.
Étant donné l'importance que le gouvernement en particulier attache à ce projet de loi -- un ministre a d'ailleurs dit qu'il s'agissait du plus important projet de loi depuis des décennies --, je ne pense pas qu'il convienne de passer à l'étude article par article du projet de loi à ce moment-ci. Je répète qu'il n'y a pas urgence. Personne ne prévoit la tenue d'un référendum au cours des prochains mois, et certainement pas sur la sécession.
Voilà pourquoi je propose donc:
Que l'étude article par article du projet de loi C-20 n'ait pas lieu maintenant afin que le comité puisse continuer à entendre des témoins; et
Que le comité ne fasse rapport de ce projet de loi au Sénat qu'au plus tôt le 12 septembre 2000.
J'ai des exemplaires de la motion pour les sénateurs. Je demanderais à la greffière de bien vouloir les distribuer.
La présidente: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion ou voulez-vous que nous en discutions?
[Français]
Le sénateur Nolin: Cet après-midi, nous avons entendu le ministre, en réponse à une question du sénateur Kinsella, qui faisait référence à une correspondance du premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard. Il nous a apporté des faits nouveaux, suite aux entretiens qu'il a eus avec le premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard.
En plus de cela, le premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard aurait fait adopter, dans sa législature, une résolution appuyant le projet de loi C-20, ce qui mérite, à tout le moins, qu'on l'examine. Il semble y avoir une contradiction entre le document qui a récemment été rendu public par le sénateur Kinsella et ce que le ministre nous a dit cet après-midi.
Ne serait-ce que pour ce témoin, il serait opportun qu'on ait au moins des explications un peu plus claires sur la position du gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard. Ne serait-ce que pour cette raison, je serai en accord avec la motion déposée par le sénateur Lynch-Staunton.
Le sénateur Poulin: Je suis un peu surprise d'entendre votre motion. Étant donné que le projet de loi a quand même reçu sa première lecture au Sénat le 21 mars, je pense que tous les sénateurs ont eu le temps d'y réfléchir, de l'étudier, de consulter et d'en parler. Étant donné aussi que nous avons reçu un vaste éventail d'experts comme témoins et qu'en fin de compte le projet de loi C-20 n'empêche aucune province de faire quelque soutien ou quelque geste qu'elle voudrait poser face au projet de loi C-20, je pense qu'après tout le travail effectué et par les témoins et par les sénateurs, il est maintenant temps de passer à l'adoption de ce projet de loi, article par article.
[Traduction]
Le sénateur Kroft: Honorables sénateurs, j'aimerais dire quelques mots au sujet des points abordés par le sénateur Lynch-Staunton, de la date qu'a mentionnée le sénateur Poulin et du processus que nous avons suivi. Le public a été tenu bien au fait de la position du Sénat en raison du débat assez long dont a fait l'objet le projet de loi en deuxième lecture. Tous les points de vue ont été très bien exposés, ce qui n'est pas toujours le cas.
Ce projet de loi n'a pas été rapidement renvoyé devant le comité inopinément. Les témoins qui ont comparu devant nous connaissaient bien le sujet. Le comité a profité du fait que bon nombre d'entre eux avaient suivi de près le débat sur le projet de loi. J'estime que nos travaux ont pu rapidement progresser pour cette raison.
Il ne fait aucun doute qu'un comité comme celui-ci qui étudie pareil sujet pourrait continuer de susciter l'intérêt d'un grand nombre de Canadiens pendant encore longtemps. La question de savoir si nous avons suffisamment débattu le sujet dépend du point de vue de chacun. Je suis personnellement d'avis que nous l'avons suffisamment débattu.
Le sénateur Lynch-Staunton a fait remarquer qu'un référendum ne se profilait pas à l'horizon. J'estime donc que c'est le bon moment d'étudier ce projet de loi. Si nous avions tenu ce débat et mené cette étude sous la menace d'un référendum imminent, le débat n'aurait pas été aussi calme qu'il l'a été.
Tous les intervenants ont bien fait leur travail et le moment est venu de passer à l'étape de la troisième lecture.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je me prononce en faveur de la motion. Le sénateur Lynch-Staunton a mentionné le fait qu'un certain nombre de témoins souhaitaient comparaître devant le comité. Nous pourrions profiter de leurs connaissances et de leur expérience. Un certain nombre d'entre eux ne pouvaient pas comparaître devant le comité parce que leur emploi du temps ne leur permettait pas de le faire au moment où on le leur a proposé. M. Gilles Rémillard, pour sa part, était à l'étranger. Un certain nombre d'autres témoins ont dit qu'ils pourraient comparaître devant le comité, mais pas avant une certaine date.
Parlons maintenant des provinces et des territoires. Comme les honorables sénateurs le savent, conformément au Règlement du Sénat, et contrairement aux procédures en vigueur à l'autre endroit, lorsque le Sénat est saisi d'une proposition législative qui a une incidence sur les intérêts des provinces et des territoires, nous invitons les provinces à présenter leur point de vue sur la question si elles le jugent bon.
Le comité directeur a demandé à la greffière du comité d'inviter les premiers ministres des provinces à comparaître devant le comité, ce qu'elle a fait. Certaines provinces ont répondu à notre invitation par écrit. M. le ministre Facal a répondu au nom de la province de Québec. Des extraits de sa lettre ont été cités à quelques reprises au cours de nos audiences. Comme les honorables sénateurs le savent, le Québec s'oppose complètement à ce projet de loi.
Le comité a reçu une lettre du premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard datée du 15 juin. Le sénateur Nolin a attiré notre attention sur le fait que la résolution adoptée par l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard, à laquelle le ministre a fait allusion cet après-midi, et le contenu de la lettre qu'a envoyée le premier ministre au comité ne concordent pas.
À mon avis, ces deux documents montrent clairement que les travaux de ce comité ont permis aux gens de mieux comprendre la portée du projet de loi C-20. Comme beaucoup d'autres Canadiens, le premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard voit bien que la portée du projet de loi sur la clarté est plus vaste que ce qu'il croyait au départ.
La question posée à la population de la province visée doit être claire et la majorité obtenue lors du référendum tenu sur cette question doit elle aussi être claire.
Tout le monde est en faveur de la clarté. Au départ, les discussions menées au Canada et à l'autre endroit sur ce projet de loi ne portaient que sur la clarté de la question qui serait posée lors du référendum. Il a été dit clairement que le référendum en question serait le prochain référendum au Québec.
Tous les sénateurs se souviendront de l'excellent débat qui a eu lieu au Sénat à l'étape de la deuxième lecture. Pour sa part, le comité a fait de l'excellent travail. Les travaux du comité font d'ailleurs ressortir le fait que le débat ne porte pas simplement sur la clarté de la question qui sera posée lors du prochain référendum au Québec, mais sur tout un ensemble d'autres questions. Ainsi, comme on pouvait s'y attendre, nous nous sommes notamment penchés sur l'exclusion du Sénat du processus. Cette question a aussi suscité l'intérêt des Canadiens de tout le pays et d'un bon nombre des témoins qui ont comparu devant le comité.
On a de toute évidence attiré l'attention d'un premier ministre sur le rôle véritable du Sénat dans notre système parlementaire bicaméral puisqu'il écrit ceci dans l'avant-dernier paragraphe de sa lettre datée du 15 juin:
[...] quant au rôle qui est dévolu au Sénat, je partage l'avis de ceux qui pensent que la mise en oeuvre du projet de loi C-20 constitue une menace réaliste à cet égard.
Honorables sénateurs, ce premier ministre s'est rendu compte au fur et à mesure que progressait le débat sur ce projet de loi que celui-ci ne porte pas seulement sur la clarté de la question qui sera posée lors d'un référendum. Dans ce paragraphe, il met l'accent sur le rôle que joue le Sénat dans le système bicaméral et il fait remarquer que le projet de loi constitue une menace réaliste à cet égard. Le paragraphe se poursuit ainsi:
Jusqu'à ce que d'autres dispositions soient prises, l'Île-du-Prince-Édouard devrait maintenir la position qu'elle a toujours défendue, à savoir que le Sénat joue un rôle important dans la protection des intérêts de l'île dans les deux chambres du Parlement. Dans la mesure où le projet de loi C-20 porte atteinte directement ou indirectement à la validité et au rôle du Sénat, une province comme l'Île-du-Prince-Édouard se doit d'exprimer sa préoccupation.
Honorables sénateurs, nous comprenons tous beaucoup mieux la portée du projet de loi C-20. Nous comprenons beaucoup mieux son incidence négative sur le bicaméralisme comme l'ont fait ressortir les audiences du comité ainsi que le débat en deuxième lecture.
Le sénateur Nolin a fait valoir un point extrêmement important, à savoir qu'on comprenait beaucoup mieux le sujet. Nous le comprendrions encore mieux si l'on ne nous pressait pas d'adopter le projet de loi. Il n'y a pas d'urgence. Prenons un peu plus de temps pour bien comprendre la question.
Le sénateur Murray: Madame la présidente, les députés sont rentrés chez eux pour jouir de vacances bien méritées après avoir enrichi leur régime de retraite et s'être donné une indemnité de départ plus généreuse. Ce projet de loi n'a évidemment pas encore été adopté par le Sénat, et je ne sais pas si l'on considère qu'il est aussi urgent que le projet de loi C-20.
Quoi qu'il en soit, l'un des arguments qui étaient invoqués pour nous amener à adopter rapidement le projet de loi C-20 et pour nous dissuader d'y proposer des amendements est qu'il faudrait alors rappeler les députés pendant leurs vacances bien méritées.
La proposition du sénateur Lynch-Staunton réglerait ce problème. Les députés pourraient continuer de jouir de leurs vacances et nous ferions rapport du projet de loi au plus tard à la mi-septembre. Pendant ce temps, le gouvernement pourrait peut-être revenir sur la position plutôt intransigeante qui nous a été communiquée hier par M. Dion, à savoir qu'il n'accepterait aucun amendement au projet de loi. Comme le dit le vieil adage français, «La nuit porte conseil». Par conséquent, j'appuie la proposition du sénateur Lynch-Staunton.
La présidente: Je pense que je peux maintenant mettre la question aux voix.
Sénateur Cools, vous voulez faire une remarque?
Le sénateur Cools: J'ai indiqué que je voulais le faire.
La présidente: Excusez-moi, je ne vous avais pas vue.
Le sénateur Cools: Très bien. Je pensais que vous me reconnaîtriez toujours à la couleur de mes lunettes.
J'aimerais intervenir en faveur de la proposition du sénateur Lynch-Staunton. En ce qui me concerne, nous venons à peine de commencer l'étude du projet de loi. Il est bien évident que de nombreux sénateurs viennent à peine d'en comprendre certains aspects. Je ne pense pas que ce soit d'ailleurs une bonne idée de passer directement de l'audition des témoins à l'étude article par article. Je pense qu'il vaudrait mieux donner aux honorables sénateurs le temps de réfléchir à ce qu'ils ont entendu pour qu'ils puissent ensuite porter un jugement éclairé et préparer des amendements le cas échéant.
Je vous rappelle qu'il s'agit d'une situation tout à fait unique. Le projet de loi dont nous sommes saisis est quelque peu inhabituel. Certains honorables sénateurs diraient même qu'il est quelque peu irrégulier. Enfin, tout le processus qui a été suivi jusqu'ici est aussi inhabituel et irrégulier.
Nous devrions notamment tenir compte du fait que ce projet de loi au lieu d'être renvoyé devant un comité tout à fait compétent et légitimement constitué a été renvoyé à un comité spécial. Je le fais remarquer parce qu'il y a des sénateurs dont moi-même qui estiment qu'on a, ce faisant, porter atteinte à leurs droits.
Ce qui ajoute au caractère irrégulier et inhabituel du processus, c'est que la majorité des membres de ce comité, y compris la présidente, sont en fonction depuis peu. À mon avis, lorsqu'un sujet est nouveau, lorsqu'un comité se compose de nouveaux membres et que le ministre est relativement nouveau, le Sénat est doublement tenu d'accorder tout le temps et toute l'attention voulus au projet de loi qu'on lui renvoie.
Honorables sénateurs, je siège comme sénateur depuis un certain temps et j'ai participé aux discussions comme d'autres sénateurs libéraux qui ont porté sur l'Accord du lac Meech et d'autres questions importantes.
J'aimerais rappeler aux honorables sénateurs que les sénateurs libéraux se sont alors assurés que l'Accord du lac Meech soit étudié convenablement...
Le sénateur Murray: Son adoption a été retardée de six mois.
Le sénateur Cools: ... et qu'il soit débattu convenablement. Je pense que la plupart des sénateurs libéraux sont fiers de ce qu'ils ont alors fait.
Nous avons alors même entendu d'anciens premiers ministres. Vous vous souviendrez de la séance marathon devant le comité plénier à laquelle a participé le premier ministre Trudeau. Je crois que M. Trudeau nous a parlé pendant cinq ou six heures. La plupart d'entre nous -- et moi-même certainement -- étions ravis qu'un esprit aussi brillant nous entretienne de la Constitution du Canada et de toute proposition de modification. Nous nous en sommes réjouis.
À mon avis, honorables sénateurs, ce projet de loi mérite une étude aussi rigoureuse. Je ne peux m'empêcher de constater que le comité n'a invité aucun personnage politique ou parlementaire qui fasse autorité. Nous citons continuellement M. Hogg et M. Monahan, mais nous n'avons pas invité d'autorités en la matière comme le sénateur MacEachen, M. Trudeau, dont la santé laisse peut-être à désirer, et M. John Turner. Je vous parle de personnes qui sont l'incarnation même de la tradition libérale du constitutionnalisme dans ce pays. Certains pensent peut-être que cette tradition est désuète, mais je presse le comité de ne pas agir à la hâte et de contribuer ainsi au déclin de cette tradition.
Permettez-moi de poursuivre, honorables sénateurs. Les sénateurs libéraux ont beaucoup appris sur le sujet de personnes comme le sénateur MacEachen. Le comité a entendu certains témoins, mais compte tenu de l'importance du sujet dont il est saisi, j'ose dire qu'il n'a pas encore entendu les meilleurs témoins. Le comité devrait vraiment entendre certains des témoins qu'il a invités à comparaître. Tous les témoins qui ont été invités à comparaître devraient être entendus.
J'ajoute, honorables sénateurs, que de nombreuses questions n'ont pas encore été abordées. Permettez-moi de vous signaler certaines de ces questions dans l'espoir d'obtenir l'appui de notre présidente, le sénateur Joan Fraser. Je lui signale que si elle est vraiment convaincue de l'importance du sujet que nous étudions, elle devrait permettre que nous en poursuivions l'étude.
Ainsi, aucun témoin ne nous a parlé de la question des rapports qui devront exister entre les tribunaux et le Parlement. Le projet de loi est inhabituel. Il est tout à fait inhabituel. Je donne en exemple son titre, Loi donnant effet à l'exigence de clarté formulée par la Cour suprême du Canada dans son avis sur le Renvoi sur la sécession du Québec. À mon avis, honorables sénateurs, le titre lui-même du projet de loi est complètement inhabituel.
Je suis libérale et je m'exprime comme une libérale conformément à la tradition des rapports appropriés établis entre les tribunaux et le Parlement. De nombreux sénateurs peuvent ne plus y accorder d'importance mais la tradition libérale, telle qu'elle s'est développée dans la province de l'Ontario, est le fruit de l'établissement de rapports appropriés entre les tribunaux et le Parlement. Il est fort malheureux que le ministre tout au long de son témoignage n'ait jamais pensé à évoquer cette tradition libérale séculaire. Permettez-moi de vous dire que c'est le genre d'initiative que les libéraux d'antan auraient vertement condamnée, tout particulièrement des libéraux comme George Brown et toute une série d'autres que je n'hésiterais pas à citer si on me le demandait. C'est une question très importante: les rapports appropriés entre les tribunaux et le Parlement.
J'aimerais également répéter, comme j'y ai déjà fait allusion, qu'aucune autorité parlementaire n'a été appelée à témoigner -- absolument aucune autorité, par exemple, sur le droit du Parlement. Nous n'avons pas entendu un seul témoin sur le droit du Parlement. Je crois que le sénateur Kinsella a tout à fait raison de dire que ce projet de loi ne respecte pas le droit du Parlement, le rôle du Parlement et encore moins le rôle du Sénat.
J'aimerais également parler d'une autre question qui est complètement restée sous silence, à savoir la question de la prérogative royale. C'est une question que j'ai soulevée. D'aucuns la considèrent ésotérique et sibylline. Elle est ni ésotérique ni sibylline. En fait, le gouvernement a dit que c'était l'autorité primaire sur laquelle il fondait ses arguments. Il me semble que pour le moins le gouvernement pourrait invoquer cette autorité légale. Un principe de gouvernement parlementaire, un principe de gouvernement responsable veut que les ministres soient toujours prêts à citer la base juridique qui justifie leurs actions. Cette nouvelle approche est totalement inédite. C'est une approche de gouvernement responsable totalement nouvelle qui revient à dire, à toutes fins utiles, que le gouvernement peut négocier tout ce qui lui plaît. C'est quelque chose de totalement inédit dans l'histoire du gouvernement responsable.
J'aimerais également dire que ce que le ministre nous a présenté comme étant l'histoire constitutionnelle et le gouvernement parlementaire du Canada est tout simplement non fondé et démenti par l'histoire de ce pays.
J'aimerais également dire que nous avons entendu beaucoup de choses sur les droits des minorités, mais je n'ai pas vu ni entendu un seul témoin qui ait, à mes yeux, vaguement ressemblé à un membre d'une minorité. D'ailleurs, si je regarde autour de moi, j'ai l'impression d'être la seule minorité à parler. J'ai eu beaucoup de mal à me faire entendre, d'après moi, mais je ne peux m'empêcher d'observer...
Le sénateur Grafstein: Et moi?
Le sénateur Cools: Ne vous en faites pas, je ne vous oublierai pas si on me laisse le temps. Combien de temps me donnez-vous?
J'aimerais dire que Mme Finestone a parlé aujourd'hui avec éloquence des anglophones qui vivent au Québec. J'aimerais également ajouter qu'il y a des anglophones qui vivent au Québec, qui sont noirs et qui restent anglophones et que c'est un groupe dont personne n'a parlé. J'aurais pensé, madame la présidente, compte tenu de votre diligence, que vous auriez veillé à ce que des témoins soient entendus par ce comité sur cette question particulière. Je le redis simplement au cas où le sort des minorités nous intéresserait vraiment.
Je ne cesse d'entendre parler de la compassion, de l'équité et de l'égalitarisme des libéraux. Ce n'est pas l'expérience que j'ai des libéraux, mais c'est ce que je ne cesse d'entendre. Il me semble que nous aurions pu appeler des témoins représentant la position des minorités, tout au moins au Québec.
J'en profite pour faire remarquer qu'il ne s'agit que de quelques-unes des questions qui n'ont pas été abordées malgré leur importance, selon moi.
Je ferais également remarquer, madame la présidente, honorables collègues, que ce comité ne s'est pas déplacé et n'a pas demandé au Sénat l'autorisation de se déplacer lorsqu'il a été constitué. Pour moi cela veut dire, tout au moins lorsque la motion a été proposée, et je crois qu'elle a été proposée par le sénateur Hays, que le gouvernement n'avait nullement l'intention de laisser ce comité se déplacer. Je trouve cela extrêmement contestable. Je l'ai déjà dit et je le redis. Je ne comprends tout simplement pas comment un comité peut dire qu'il étudie une question très importante qui concerne l'avenir du Québec et l'avenir du Canada, sans au minimum, se réunir au Québec pour y entendre sur place des témoins.
Cette énumération de questions que je viens de faire est sommaire et loin d'être exhaustive. En guise de conclusion, je dois dire, honorables sénateurs, que nous faisons notre travail dans la précipitation pour faire aboutir cette étude à sa conclusion dans les délais les plus brefs et c'est inutile. Je n'en vois pas la nécessité. Il n'y a absolument aucune raison au monde. La Chambre des communes ne veut pas revenir, mais elle ne veut jamais revenir, ou du moins c'est l'impression que j'ai. Il n'y a absolument aucune raison au monde interdisant à ce comité de poursuivre l'étude de ce projet de loi au cours des prochaines semaines ou des prochains mois. Il n'y a pas urgence. Il n'y a absolument aucune urgence. La présidente, le gouvernement, le ministre et les partisans de ce projet de loi dans ce comité, dont je ne fais pas partie, ont été incapables de nous donner une seule bonne raison pour laquelle ce projet de loi devrait être adopté dans la précipitation.
Je crois qu'il est important de faire la différence entre les principes et les intérêts, mais il n'y a rien dans ce projet de loi qui demande à ce qu'il soit examiné dans la presse et la précipitation.
La présidente: Merci, sénateur Cools.
Le sénateur Cools: Je pourrais continuer.
La présidente: Vous avez eu 15 minutes.
Le sénateur Cools: Mais je pourrais encore continuer.
La présidente: Je suis sûre que vous le pourriez mais je crois que vous avez défendu votre point de vue avec éloquence.
Le sénateur Cools: Très bien. Le point plus important, honorables sénateurs -- et je le dis avec le plus grand sérieux -- est que ce projet de loi est unique. Le Sénat n'a jamais été saisi d'un tel projet de loi. Il se peut que voter en faveur d'un projet de loi qui exclut le Sénat ne dérange pas certains sénateurs, mais cela en dérange certains d'entre nous. Il me semble que si, comme vous le dites, et comme le ministre le dit, ce projet de loi est si important pour le bien-être du Canada, nous devrions lui consacrer le temps et l'examen qu'il mérite.
Madame la présidente, j'aimerais dire que je ne considère pas ces audiences-marathons du lundi comme répondant à la tâche. Cela dit, j'appuie la proposition de poursuite de l'examen du projet de loi du sénateur Lynch-Staunton.
La présidente: Merci, sénateur Cools. Nous mettons la motion du sénateur Lynch-Staunton aux voix.
Il propose:
Que l'étude article par article du projet de loi C-20 n'ait pas lieu maintenant afin que le comité puisse continuer à entendre des témoins; et
Que le comité ne fasse rapport de ce projet de loi au Sénat qu'au plus tôt le 12 septembre 2000.
À l'intention des sénateurs pour qui, comme le sénateur Cools l'a si gracieusement rappelé, certaines de ces procédures sont nouvelles, je me permettrais de signaler qu'en comité les votes à main levée ou par oui ou non sont acceptables. Si un sénateur le souhaite, nous pouvons également procéder par appel nominal. Dans tous les cas, les votes positifs, négatifs ou les abstentions sont tout à fait permises. S'il y a vote par appel nominal, la greffière fera l'appel des noms, en commençant par moi; et ensuite procédera par ordre alphabétique.
Il est proposé par l'honorable sénateur Lynch-Staunton que...
Puis-je m'en dispenser?
Le sénateur Lynch-Staunton: Certainement. Nous aimerions que le vote se fasse par appel nominal.
La présidente: La greffière va donc procéder à un appel nominal.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Bolduc: Oui.
Le sénateur Chalifoux: Non.
Le sénateur Christensen: Non.
Le sénateur Cordy: Non.
Le sénateur Kenny: Non.
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Kroft: Non.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
Le sénateur Milne: Non.
Le sénateur Murray: Oui.
Le sénateur Nolin: Oui.
Le sénateur Poulin: Non.
Le sénateur Sibbeston: Non.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je ne suis pas membre du comité, mais j'aimerais montrer...
La présidente: Honorable sénateur Cools, nous sommes en train de voter, procédure qui est au coeur même de la fonction du Sénat. Je vous prie de ne pas interrompre cette procédure.
Mme Heather Lank, greffière du comité: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion rejetée.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, j'aimerais...
Le sénateur Milne: Je propose que le comité termine l'étude article par article du projet de loi C-20.
Le sénateur Cools: J'ai le droit...
La présidente: Il est proposé par l'honorable sénateur Milne que le comité termine l'étude article par article du projet de loi C-20.
Le sénateur Prud'homme: Il y a eu un rappel au Règlement.
La présidente: Nous votons, sénateur Prud'homme.
Le sénateur Prud'homme: Je sais, mais je sais également que vous voulez une réunion harmonieuse et un débat harmonieux pendant les deux prochaines semaines. Le sénateur Cools avait déjà indiqué les règles il y a longtemps. Vous avez tout à fait raison de l'interrompre car on n'interrompt pas un vote. Le vote a eu lieu, c'est donc à elle d'avoir la première la parole -- je suis sûr que le Règlement est clair sur ce point -- pourquoi faire, je ne sais pas. Je suppose qu'elle veut simplement que son nom soit enregistré pour indiquer que si elle avait voté, elle aurait voté comme ça. Je crois qu'elle a le droit de le faire.
La présidente: Dans ce cas, sénateur Prud'homme, permettez-moi de poser la question aux membres du comité. Souhaitez-vous permettre au sénateur Cools d'interrompre la procédure de vote pour se faire entendre?
Le sénateur Cools: Ce n'est pas la coutume tant que le vote n'est pas terminé. Madame la présidente, votre décision est irrecevable.
La présidente: En vertu de quelle règle?
Le sénateur Cools: En vertu de quelle règle? En vertu du fait qu'étant donné que je vous avais indiqué ce que je voulais faire avant que le vote n'ait lieu, et que le vote ayant maintenant eu lieu, vous auriez dû me donner la parole en premier.
La présidente: Sénateur Cools, nous sommes maintenant saisis d'une autre motion.
Le sénateur Cools: Non. Elle n'a pas encore été proposée dans les règles.
La présidente: Si. Elle a été proposée dans les formes.
Le sénateur Murray: J'aimerais dire un mot à ce sujet.
La présidente: Le sénateur Murray aimerait dire un mot à son sujet.
Le sénateur Murray: Très brièvement. L'ordre du jour de notre réunion prévoit l'étude article par article du projet de loi C-20. Une motion du sénateur Lynch-Staunton proposant il y a quelques minutes de reporter l'étude article par article et de ne pas faire rapport du projet de loi avant la mi-septembre a été rejetée. Je me pose des questions sur la signification de la motion du sénateur Milne. Je ne pense pas qu'elle soit nécessaire pour nous permettre de passer à l'étude article par article du projet de loi. La question que je pose est de savoir si sa motion ne revient pas à empêcher ceux ou celles, dont je ne suis pas, qui voudraient proposer des amendements aux divers articles de le faire ou si cela ne revient pas à une clôture du débat. Quel est le véritable objet de cette motion?
Le sénateur Milne: Je propose simplement que nous terminions l'étude article par article du projet de loi C-20. Je crois comprendre que cette étude se fait article par article.
La présidente: D'après mon expérience, qui, je vous le concède, est beaucoup plus limitée que la vôtre, sénateur Murray, c'est une formule qui ne met pas un terme à la procédure d'étude article par article mais qui la lance.
Le sénateur Murray: Très bien -- à condition qu'il soit bien compris que c'est ce que cela signifie.
La présidente: Oui, mais c'est une motion qui nous a été soumise.
Le sénateur Murray: Bien.
La présidente: Qui est pour?
Des voix: Adopté.
La présidente: Qui est contre?
Des voix: Personne.
La présidente: Des abstentions?
Le sénateur Kinsella: À la majorité.
La présidente: Je déclare la motion adoptée à la majorité des voix.
Nous passons maintenant à une motion concernant l'article 1.
Le sénateur Kinsella: Madame la présidente, le Beauchesne nous permet de commencer par le corps du projet de loi. Après avoir réservé le titre, on pourrait passer au préambule. Commençons par le corps.
La présidente: D'habitude, le préambule est adopté en avant-dernier, avant le titre.
Le sénateur Kinsella: À vous d'en décider. Nous pouvons le traiter en premier dans ce cas-ci, si tout le monde est d'accord.
La présidente: Plaît-il au comité de traiter d'abord du préambule? Je pense qu'il n'y a pas de problème.
Puis-je avoir une motion portant adoption du préambule?
Le sénateur Milne: Je la propose.
Le sénateur Kinsella: Est-ce qu'on reporte tout d'abord le titre?
La présidente: Voulez-vous qu'on reporte tout d'abord le titre?
Le sénateur Milne: Je propose le report du titre.
La présidente: Le sénateur Milne propose le report du titre. La motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
La présidente: Je déclare la motion adoptée.
Le sénateur Kinsella: En ce qui concerne le préambule, honorables sénateurs...
La présidente: Nous n'avons pas encore de motion sur le préambule.
Le sénateur Kinsella: J'allais la proposer.
La présidente: Le sénateur Milne n'avait pas encore terminé avec la sienne.
Le sénateur Kinsella: Il fallait reporter le titre d'abord.
Le sénateur Milne: Le préambule est-il adopté?
Le sénateur Murray: C'est à la présidente de le demander.
La présidente: Sénateur Milne, est-ce que vous proposez l'adoption du préambule?
Le sénateur Milne: Oui.
La présidente: Le sénateur Kinsella veut prendre la parole.
Le sénateur Kinsella: Je souhaite intervenir, honorables sénateurs, car je pense qu'il faut supprimer le préambule. En effet, au septième paragraphe du préambule, à la page 2, on lit ceci: «que, compte tenu du fait que la Cour suprême du Canada a conclu qu'il revient aux représentants élus de déterminer en quoi consistent une question et une majorité claires...» et cetera; ce qu'on affirme ici n'est pas vrai.
Si les honorables sénateurs veulent se reporter au renvoi et à l'avis de la Cour suprême, au paragraphe 153, la Cour écrit -- et je cite:
[...] il reviendra aux acteurs politiques de déterminer en quoi consiste «une majorité claire en réponse à une question claire», suivant les circonstances dans lesquelles un futur référendum pourrait être tenu.
Honorables sénateurs, on nous a prouvé de façon incontestable que la Cour suprême, dans son avis, n'avait pas dit qu'il appartenait aux représentants élus de déterminer ce qui constitue une question claire. Le septième paragraphe du préambule est tout simplement faux. Ne serait-ce que pour cette raison, j'estime que le Sénat doit le supprimer.
Deuxièmement, de toute façon, le préambule ne fait pas partie intégrante du projet de loi. L'objet d'un préambule donne lieu à de nombreuses écoles de pensée. Comme ce paragraphe n'est pas conforme à ce qu'a écrit la Cour, sa suppression ne porterait pas atteinte au projet de loi. De ce point de vue du moins, ceux qui reconnaissent une valeur quelconque au projet de loi seraient en mesure d'admettre que comme ce préambule est faux, on ne perd rien en le supprimant.
La présidente: Sénateur Kinsella, je ne suis pas certaine que cette motion soit tout à fait recevable. Je vois ici le paragraphe 698(6) du Beauchesne:
Un amendement visant à supprimer un article est irrecevable, car la bonne façon de procéder consiste à voter contre cet article dans le projet de loi.
On peut en étendre le principe aux préambules. En tout cas, si vous souhaitez que le préambule disparaisse, il vous suffit de convaincre un nombre suffisant de membres du comité pour qu'ils votent contre.
Le sénateur Cools: Comment peut-il procéder ainsi si l'ensemble du préambule est mis aux voix?
La présidente: Le sénateur Kinsella proposait de supprimer tout le préambule.
[Français]
Le sénateur Prud'homme: J'appuierais cette proposition, si j'avais le droit de vote.
Après avoir attentivement lu les attendus, quand nous lisons: «Sa Majesté, sur l'avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte: [...]» nous avons l'impression que, dans tout le reste qui suit ce que je viens de citer, nous ne parlons jamais du Québec, mais d'une province. Je trouve que le titre est violent. Il n'y a aucun doute, nous aurions beau vouloir déchirer nos vêtements sur la place publique en disant que ce n'est pas le Québec qui est visé, que cela peut s'appliquer à la Colombie-Britannique, l'Alberta ou autres provinces, ce n'est pas ce que je lis -- c'est ce qui existe dans le corps du projet de loi.
Dieu sait que je ferais tout pour convaincre les Canadiens français du Québec, parce que les autres sont déjà convaincus, du bien-fondé de l'existence du Canada, mais pour ce faire, il faut des armes.
J'essaie de convaincre mes collègues de voter en faveur de la résolution du sénateur Kinsella. Il y a deux éléments dans ce projet de loi: les attendus et le titre, et le projet de loi. En ce qui concerne le projet de loi, je suis d'accord avec le gouvernement fédéral -- je ne suis pas d'accord avec le fait que le Sénat ne soit pas là. Nous avons le droit de dire que toute province qui voudrait faire telle ou telle chose devrait suivre tel règlement. Je parlerai en général, pour ne viser personne.
[Traduction]
Le début est très précis.
C'est le 10e anniversaire de la défaite de Meech. Tous les 10 ans, il se passe quelque chose qui concerne le destin du Québec. Un jour, le Québec en aura assez et dira: «Nous allons vous le dire clairement». Ceux d'entre vous qui voteront pour ce projet de loi devront essayer de convaincre le Québec de rester au Canada. Je vous ai à l'oeil.
Madame la présidente, le sénateur Lynch-Staunton a essayé d'indiquer à ses collègues les conséquences de la ligne du parti. Il importe de réfléchir. Il a fallu trois ans pour construire ce pays, et on nous dit maintenant qu'il faut faire vite.
J'ai reçu récemment la visite d'une délégation venue du Danemark. J'ai montré à mes visiteurs le bureau du Président, où l'on peut lire cette maxime de Sénèque: «Rien de ce qui est fait dans la hâte et la précipitation ne peut être bien ordonné». Voilà un principe nouveau. Personne n'évoque la nuance entre les deux.
Je regrette de n'être pas un membre en règle de ce comité, mais cela ne fait rien. C'est la règle du jeu.
[Français]
Le sénateur Beaudoin: Avant de voter, j'aimerais bien comprendre le septième attendu.
[Traduction]
[...] que, compte tenu du fait que la Cour suprême du Canada a conclu qu'il revient aux représentants élus de déterminer en quoi consistent une question et une majorité claires [...]
La Cour suprême fait référence à au moins trois reprises aux acteurs politiques dans son avis consultatif, et une fois aux représentants élus. Il faut absolument corriger le préambule qui nous est soumis. Sauf erreur de ma part, la cour n'a fait qu'une fois référence aux «acteurs politiques élus» et aux «représentants élus». De ce point de vue, il y a quelque chose de faux dans ce paragraphe.
Est-ce qu'on vote sur l'ensemble du préambule, ou sur un seul paragraphe?
La présidente: Tout d'abord, pour préciser les choses, j'ai trouvé beaucoup plus qu'une seule référence aux «représentants élus» dans cet avis. Cependant, quoi qu'il en soit, la motion porte sur l'ensemble du préambule: le préambule est-il adopté?
Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur la page 657 du nouvel ouvrage intitulé: La procédure et les usages de la Chambre des communes, qui s'avère très précieux.
Dans le cas d'un projet de loi renvoyé à un comité après la deuxième lecture, un amendement de fond au préambule n'est recevable que s'il est rendu nécessaire par l'adoption de modifications au projet de loi.
Voilà pourquoi on étudie habituellement le préambule après les articles de fond du projet de loi. Cependant, le comité a décidé qu'on allait le considérer immédiatement.
La motion mise aux voix concerne l'ensemble du préambule.
Le sénateur Beaudoin: C'est «oui» ou «non».
La présidente: Le préambule est-il adopté?
Le sénateur Kinsella: Si la présidence décide que la motion du sénateur Milne est recevable, c'est-à-dire que le préambule est adopté, j'accepte sa décision.
Je voudrais maintenant proposer l'amendement suivant:
Je propose que la motion du sénateur Milne soit modifiée par la substitution, à la ligne 15, page 2, des mots «acteurs politiques» aux mots «représentants élus».
Je pense qu'ainsi, tout sera conforme aux règles de procédure.
Je propose simplement un amendement à la motion du sénateur Milne, et je relis ma motion:
Qu'à la ligne 15 de la page 2 du projet de loi C-20, on substitue les mots «acteurs politiques» aux mots «représentants élus».
La présidente: Il s'agit de remplacer «représentants élus» par «acteurs politiques.»
Nous avons un amendement proposé par l'honorable sénateur Kinsella. Je ne suis pas certaine qu'il soit recevable, mais je lui accorde le bénéfice du doute et je mets immédiatement cet amendement aux voix.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le sénateur Kinsella nous soumet déjà une autre motion.
La présidente: Non. J'ai déclaré la première irrecevable et il a accepté cette décision.
Le sénateur Lynch-Staunton: Étant assis à côté de vous, je ferais la même chose.
La présidente: Et sinon, gare à vous, je vais m'occuper de vous.
Le sénateur Cools: Je suis un peu perdue. De quelle question débattons-nous actuellement?
Le sénateur Kinsella: De l'amendement.
La présidente: Le sénateur Kinsella a proposé un amendement qui consiste à remplacer les mots «représentants élus» à la ligne 15 de la page 2 du préambule.
Le sénateur Cools: Madame la présidente, je demande une précision: nous ne débattons plus de l'ensemble du préambule; est-ce que nous débattons seulement de cet amendement?
La présidente: Nous débattons de l'amendement.
Le sénateur Cools: À ce paragraphe.
La présidente: Je mets l'amendement aux voix.
Le sénateur Cools: Oh, non. Il faut en débattre.
La présidente: L'amendement est-il adopté?
Le sénateur Cools: Non, il faut en débattre. Il faut un débat.
Le sénateur Lynch-Staunton: Puisqu'il s'agit d'une correction, et non d'une décision politique, est-ce que quelqu'un pourrait nous indiquer si nous nous conformons à la décision de la Cour suprême en gardant les mots «représentants élus» ou si, au contraire, comme le dit le sénateur Kinsella, la Cour pensait en réalité aux acteurs politiques lorsqu'elle a évoqué la fonction de déterminer en quoi consiste une question claire? Nous reprenons les propos de la Cour suprême, et il est très important de le faire dans les termes qui conviennent.
La présidente: Nous votons sur le texte d'un projet de loi qui nous a été renvoyé pour étude. Nous étudions actuellement un amendement à une motion portant adoption du préambule. La motion d'amendement modifierait le texte du projet de loi dont nous sommes saisis.
Honorables sénateurs, nous avons entendu de nombreux témoins sur cette question, à laquelle le Sénat avait déjà consacré plusieurs semaines de débat. Nous connaissons tous l'avis de la Cour suprême. Je ne pense pas qu'il faille retarder nos travaux. Les sénateurs sont maintenant bien informés sur la question.
Est-ce que d'autres sénateurs veulent intervenir?
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est une question de fait. Peu m'importe ce qu'ont dit les juges, du moment qu'on les cite correctement.
[Français]
Le sénateur Nolin: Vous nous dites que vous n'entendrez pas de débat sur le sous-amendement.
La présidente: Je n'ai pas dit que je n'entendrai pas de débat. Je pense qu'on n'a pas besoin d'un grand débat.
Le sénateur Nolin: Ceux qui veulent se prononcer peuvent le faire?
La présidente: Oui, dans les limites raisonnables.
Le sénateur Nolin: J'aurais une opinion à donner.
[Traduction]
Le sénateur Beaudoin: Je ne pense pas que la question soit aussi simple. Regardez le texte français.
[Français]
Le sénateur Bolduc: Il n'y a pas de concordance entre les deux textes.
Le sénateur Beaudoin:Il est dit:
[...] compte tenu fait que la Cour suprême du Canada a conclu qu'il revient au président élu de déterminer[...].
Je ne peux pas me tromper. Si la Cour suprême se trompe, elle se trompe. Je ne veux pas dire qu'elle se trompe si elle ne se trompe pas.
Le sénateur Nolin: Personne n'est venu témoigner devant ce comité pour nous dire: «Voici quelle est l'opinion de la Cour suprême arrêtée sur cette portion uniquement». Personne n'est venu nous dire: «La Cour suprême a conclu que ce sont uniquement les acteurs, les représentants élus et non les acteurs politiques». Personne n'est venu tenter de nous convaincre de cette conclusion. On nous a dit que les deux expressions avaient été utilisées et qu'elles voulaient presque dire la même chose, alors qu'on sait fort bien que cela ne veut pas dire la même chose. On n'a pas vidé la question, définitivement pas.
Le sénateur Beaudoin: Je suis tout à fait d'accord avec le sénateur Nolin. Je ne veux pas qu'on dise des faussetés. Lorsqu'on porte un jugement politique, chacun vote selon sa conscience, mais lorsqu'on dit que la cour a dit telle chose, je n'aime pas me tromper. On est supposé savoir lire une décision de la cour.
Le sénateur Bolduc: Je suis membre du comité, et jusqu'à maintenant, j'ai été assez raisonnable.
[Traduction]
[...] compte tenu du fait que la Cour suprême du Canada a conclu qu'il revient aux représentants élus [...]
[Français]
Peut-on vraiment dire:
[...] compte tenu du fait que la Cour suprême a conclu qu'il revient aux représentants [...]
Ce n'est pas la même chose. Une des deux versions n'est pas correcte, je ne sais pas laquelle. C'est plus fort en français qu'en anglais. Je connais assez les deux langues pour vous dire cela.
Le sénateur Beaudoin: Il a parfaitement raison.
Le sénateur Bolduc: Si les textes ne concordent pas, c'est grave. On a vraiment besoin d'un amendement en dehors de la partisanerie.
La présidente: En dehors de la partisanerie?
Le sénateur Bolduc: Oui. On aura besoin d'un amendement, vous pouvez en être certains.On va essayer de chercher un linguiste qui va nous dira quelle est la traduction exacte. La Cour suprême a-t-elle rendu son jugement en français ou en anglais?
Le sénateur Beaudoin: Le jugement a été fait dans les deux langues.
Le sénateur Bolduc: Il faudra reprendre les textes précis en anglais et en français.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Merci, madame la présidente. Je me débats avec la proposition du sénateur Kinsella, et j'ai considéré attentivement ce paragraphe du préambule. Je dois dire que je suis étonnée, car j'ai lu le jugement avec beaucoup d'attention, et en profondeur, je dois le dire, et je n'ai rien trouvé dans cet avis qui permette d'en venir à la conclusion énoncée dans ce préambule. Par exemple, les lignes 18 et 19 parlent de la Chambre des communes comme seule institution politique élue pour représenter l'ensemble des Canadiens. Il n'est pas du tout question de la Chambre des communes dans l'avis de la Cour suprême. Il y a d'autres questions que je voudrais soulever également.
Tout d'abord, la Chambre des communes n'est pas une institution politique. La Chambre des communes est une institution parlementaire. Je remarque qu'actuellement, on a tendance à considérer -- et c'est le cas des ministres -- que les institutions politiques et les institutions parlementaires sont synonymes. Ce n'est pas du tout le cas. En fait, je pense que même ici, il est abusif de considérer la Chambre des communes ou le Sénat comme des institutions politiques.
En ce qui concerne l'expression «représentants élus», je crois qu'elle va à l'encontre du système constitutionnel canadien car le préambule dans sa forme actuelle -- et j'approuve le sénateur Kinsella qui veut le modifier -- écarterait le premier ministre du Canada et les premiers ministres des provinces puisque, pour autant que j'aie pu le vérifier, madame la présidente, leurs fonctions ne sont pas électives. Il est bien connu que dans notre système constitutionnel, les premiers ministres du Canada et des provinces sont nommés, tout comme les sénateurs. Je crois, honorables sénateurs, qu'il convient de prêter attention au fait que si un sénateur devenait un jour premier ministre du Canada, on lui porterait gravement atteinte et on limiterait ses possibilités d'action, tant au plan parlementaire qu'au plan politique, car ce sénateur premier ministre n'aurait pas un mot à dire sur cette question très importante puisqu'il ne serait pas un représentant élu.
Il y a deux éléments à considérer. Tout d'abord, les sénateurs ne sont pas élus, mais le premier ministre non plus. On ne peut pas ne pas en tenir compte ou prétendre qu'il est élu. Le premier ministre du Canada est choisi en vertu de la prérogative royale, mais il n'est que député. Aux termes de la Constitution du Canada, il est tout à fait possible de devenir premier ministre avant même d'avoir obtenu un siège à la Chambre des communes.
Par exemple, le premier ministre Bouchard lui-même a été...
La présidente: Sénateur Cools, nous avons compris.
Le sénateur Cools: Je dis pour l'essentiel que le corps du projet de loi démentit son préambule, et je ne pense pas que cela soit souhaitable.
La présidente: Merci.
Sénateur Kroft.
Le sénateur Cools: Je n'avais pas fini, et je n'ai entendu aucun sénateur se plaindre.
La présidente: Sénateur Kroft.
Le sénateur Kroft: On dirait, d'après le ton de ce débat, que nous avons trouvé une erreur dans un parchemin. Ce n'est pas aujourd'hui qu'on nous a signalé ce problème. Il est au coeur même d'un projet de loi dont nous sommes saisis depuis deux mois. Comme l'a expliqué la présidente, tous ces arguments ont été débattus en long et en large en deuxième lecture.
Avec un peu d'attention, on pourrait trouver dans la plupart des projets de loi des formules plus ou moins contestables. Tous ces arguments ont déjà été évoqués et débattus en profondeur. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'erreurs, comme on le dit ici.
La présidente: Merci, sénateur Kroft.
Je propose donc...
Le sénateur Cools: Il y a ici une demande d'intervention.
La présidente: Sénateur Sibbeston.
Le sénateur Sibbeston: Je découvre cette procédure, mais je me suis déjà occupé de législation quand j'étais ministre au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. D'après ce que je sais des préambules, en particulier dans le cas présent, il n'est pas nécessaire que le préambule reprenne mot pour mot les dispositions du renvoi. À mon avis, le préambule expose le point de vue du gouvernement sur ce qui figure dans ce renvoi, dans la mesure où il essaye de proposer une mesure législative qui y soit conforme.
Le septième paragraphe du préambule semble plus précis que les dispositions du corps du projet de loi en ce qui concerne la Chambre des communes, puisqu'il décrit les députés comme des représentants élus, et non pas comme de simples «acteurs politiques».
Ce qui me préoccupe essentiellement à ce sujet, c'est la formulation des dispositions du projet de loi. Le préambule est là pour annoncer ce qui figure dans le corps du projet de loi. Je considère que les mots «représentants élus» décrivent plus fidèlement la teneur du projet de loi. Par conséquent, je suis satisfait du libellé actuel et je ne souhaite pas qu'on l'amende.
Le sénateur Prud'homme: Quand on est unilingue anglophone, on travaille en anglais. Quand on est unilingue francophone, on travaille en français. Cependant, lorsqu'on connaît les deux langues, on peut découvrir ces erreurs. Ce que vous dites constituerait un dangereux précédent. Lorsque j'étais député, je me suis fait remarquer parce que j'écoutais l'interprétation des débats et je signalais les écarts de sens. Mais grâce à cela, on a évité bien des contestations.
Le fait de laisser passer une erreur constituerait un dangereux précédent. Notre éminent collègue a beaucoup d'expérience, mais je ne suis pas d'accord avec lui. Il vaut mieux s'en tenir à la même version du préambule dans les deux langues. Autrement, j'irai dans une partie du pays pour en expliquer ma version, et d'autres iront dans le reste du pays pour expliquer la leur. En définitive, ceux qui comprennent les deux langues se rendront compte que l'on parle ici de deux choses différentes.
Il faut faire très attention. Je m'incline toujours devant le sénateur Beaudoin pour ce qui est des détails d'ordre juridique.
[Français]
Le sénateur Beaudoin: Moi, je regardais cela, puis ils parlent d'acteurs politiques. Je regarde à l'article 153, c'est «political actors». À un autre endroit, ils parlent d'amendements constitutionnels de ses représentants élus, et l'article 46 de la Constitution dit que le Sénat a l'initiative en matière d'amendements constitutionnels. Je ne pourrai certainement pas voter contre cet amendement parce que, d'après moi, c'est «political actors».
[Traduction]
La présidente: Mettons l'amendement aux voix.
Le sénateur Kinsella propose...
Le sénateur Kinsella: Le débat sera mené à terme. J'ai le droit de prendre la parole.
Honorables sénateurs, nous avons tous constaté cette erreur depuis le début du débat à l'étape de la deuxième lecture. Nous en avons parlé à la Chambre; la question a également été soulevée ici en comité. Le moment est maintenant venu d'agir. Voilà pourquoi je me suis efforcé de déterminer si nous pouvions tout simplement laisser tomber le préambule. En effet, selon la conclusion du sénateur Sibbeston, il ne s'agit que d'une sorte de directive d'ordre politique et la partie substantielle du projet de loi vient après ce qui suit:
Sa Majesté, sur l'avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte:
Il s'agit de la partie qui précède. Il me semble que la façon la plus simple de corriger cette très grave erreur consiste à supprimer entièrement le préambule, ce qui n'aurait aucune incidence sur le projet de loi.
Le sénateur Cools: Excellente idée.
Le sénateur Kinsella: J'ose croire que nous n'en sommes pas arrivés à ce point au Sénat où nous pourrions constater une erreur tout à fait flagrante et, à cause d'une discipline imposée, et ce en dépit du fait que les sénateurs conservent leur poste jusqu'à 75 ans, faire semblant de ne pas voir une évidence qui crève les yeux.
La présidente: Merci, sénateur Kinsella.
Le sénateur Cools, suivie du sénateur Bolduc.
Le sénateur Cools: Madame la présidente, j'ai l'impression que le comité fait son travail dans des circonstances très désavantageuses, ce qui est malheureux. Lorsque nous étudions un projet de loi article par article, me semble-t-il, nous comptons habituellement sur le parrain ministériel du projet de loi pour répondre à toute question que peuvent avoir les membres du comité ou les sénateurs qui participent à la discussion. Il me semble que nous tentons maintenant de faire l'étude article par article sans que le représentant ministériel ne donne d'explications sur l'intention et le sens de chaque élément du libellé...
La présidente: Je comprends ce que vous voulez dire, sénateur Cools.
Le sénateur Cools: Non, je ne le crois pas.
La présidente: Nulle part dans le Règlement...
Le sénateur Cools: Vous êtes peut-être assez douée pour savoir ce que les gens vont dire avant qu'ils ne prennent la parole. Ce n'est pas mon cas.
La présidente: Votre raisonnement était claire comme de l'eau de roche.
Le sénateur Cools: C'est souvent le cas.
La présidente: En effet.
Le sénateur Cools: Très bien. Cependant, le fait est que je n'ai pas eu l'occasion de parler et j'aimerais terminer ma déclaration.
La présidente: Vous avez parlé abondamment.
Le sénateur Cools: Non, pas sur cet aspect, mais, si vous le souhaitez, je vais me lancer et du même coup vous lancer le défi de m'obliger à m'interrompre. Ce serait là tout un défi.
La présidente: Vous feriez alors entrave au travail du comité...
Le sénateur Cools: En effet.
La présidente: ... qui souhaite exercer son devoir de voter.
Sénateur Bolduc?
Le sénateur Cools: Madame la présidente, je m'efforçais de dire que nous devrions recevoir des explications du représentant ministériel. À titre de parrain du projet de loi, il nous doit certaines explications.
La présidente: C'est tout à fait ce que je vous avais entendu dire.
Le sénateur Cools: Le parrain du projet de loi pourrait peut-être participer à la réunion.
Le sénateur Kinsella: Où est-il?
La présidente: Sénateur Bolduc?
[Français]
Le sénateur Bolduc: Le sénateur nous a dit que cela représentait seulement l'intention du projet de loi. Sinon, on est en train de corrompre l'intention de la Cour suprême. Ce que la Cour suprême dit, c'est sérieux. Je ne suis pas un spécialiste du droit constitutionnel, mais il me semble que «political actors» puis «elective representatives» ce n'est pas la même chose. Donc, je pense que l'amendement ou le sous-amendement du sénateur Kinsella est plein de bon sens.
Le sénateur Poulin: Tout comme le sénateur Bolduc, je ne suis pas constitutionaliste, mais je me réfère premièrement à la décision de la Cour suprême et je cite, au paragraphe 62:
[...] pour bien comprendre le principe de la démocratie, il faut l'envisager comme l'assise que les rédacteurs de notre Constitution et, après eux, nos représentants élus en vertu de celle-ci ont toujours prise comme allant de soi.
Si je reviens à ce que le sénateur Sibbeston a dit, nous sommes à discuter le contexte du projet de loi C-20. Je pense que le contexte veut être fidèle à cette décision de la Cour suprême, et que nous avons la responsabilité, selon nos règles, de faire un rapport au Sénat. Nous pouvons conclure que le préambule du projet de loi C-20 est tout à fait respectueux de la décision de la Cour suprême, premièrement, et deuxièmement, il permettra à ceux et celles qui auront la responsabilité de mettre en application le projet de loi C-20, -- j'espère que cela n'arrivera pas -- de pouvoir lire le contexte dans lequel le projet de loi C-20 a été établi par le gouvernement du jour.
Le sénateur Bolduc: Pour ce qui est de cette référence à la cour, ce n'est pas dans ce cas qu'on parle du référendum sur la sécession, c'est dans un autre paragraphe.
Le sénateur Poulin: Cela traduit vraiment l'esprit, et nous sommes en train de parler du préambule du projet de loi C-20. Je voulais donc rester dans l'esprit de la décision comme dans l'esprit du projet de loi C-20. On pourra traiter plus tard du projet de loi C-20.
Le sénateur Boluc: Et bien, non. Prenez le temps de relire cela; vous vous apercevrez que ce n'est pas du tout applicable dans le cas qui nous concerne ici.
Le sénateur Poulin: Nous serons d'accord de ne pas être d'accord.
Le sénateur Nolin: Le sénateur Cools a exprimé un désir qui m'apparaît très légitime. Je ne crois pas qu'il n'y ait aucune règle qui nous empêche de faire venir un témoin, -- il y en a assez qui sont au courant de tous les mots utilisés par la Cour suprême -- on pourrait très bien en inviter un ou deux. À eux de choisir lequel d'entre eux pourrait venir nous éclairer.
Le sénateur Bolduc: On a rien qu'à demander à Mme Dawson, elle a déjà écrit des articles.
Le sénateur Nolin: Que Mme Dawson vienne répondre à nos questions. Je pense que le v<#0139>u exprimé par le sénateur Cools était très légitime, et nous devrions accéder à sa demande.
[Traduction]
Le sénateur Poulin: Demandez le vote. Ce sont des redites.
Le sénateur Cools: Je constate que le projet de loi n'est pas défendu comme il se doit. Ici, il est dit que, «compte tenu du fait...». Le sénateur Kinsella prétend que la Cour suprême n'a pas conclu ce qu'elle a conclu. On semble donc traiter d'un possible manque de probité dans le projet de loi de malhonnêteté.
Voilà une critique qui ne peut être ignorée. Ce n'est pas la façon de mener ce genre de réunion. Il faut traiter des enjeux et le faire dans le cadre du débat.
La présidente: Je crois bien que nous avons fait le tour de cette question, sénateur Cools.
Le sénateur Lynch-Staunton: Permettez-moi de citer le paragraphe 153 du renvoi sur la sécession. Il me semble clair:
Toutefois, il reviendra aux acteurs politiques de déterminer en quoi consiste «une majorité claire en réponse à une question claire», suivant les circonstances dans lesquelles un futur référendum pourrait être tenu.
Ici, dans l'«attendu», on précise que cela reviendrait à un représentant élu. Ce n'est pas la même chose. On cite mal ici la Cour suprême, à moins qu'on puisse me montrer à quel endroit la Cour suprême s'est contredite. Il faut tirer cet aspect au clair, sinon nous risquons de faire dire à la Cour suprême ce qu'elle ne dit pas.
[Français]
Le sénateur Joyal: Nous avons eu l'occasion d'interroger des témoins sur la définition de ce que pouvait être un acteur politique et un élu au sens du septième attendu du projet de loi. La majorité de ceux qui ont eu l'occasion de répondre à cette question ont fait référence au paragraphe 153 de l'opinion de la cour et en sont venus à citer le texte de la cour à l'effet que, et je cite au paragraphe 153:
Il reviendra aux acteurs politiques de déterminer en quoi consiste «une majorité claire en réponse à une question claire», suivant les circonstances dans lesquelles un futur référendum pourrait être tenu.
Nous avons posé la question à plusieurs témoins sur ce qu'ils entendaient par ce paragraphe de la cour, et ils nous ont répondu très clairement que le terme «acteur politique» était un collectif qui pouvait inclure à la fois des personnes élues et des personnes non élues directement. Par conséquent, j'en arrive à la conclusion que le septième attendu n'est pas en conformité avec le paragraphe 153. Je ne vote pas à ce comité, mais je vous exprime mon interprétation du septième attendu comme étant le contraire de ce que la cour a dit.
[Traduction]
La présidente: Il est proposé par le sénateur Kinsella:
Qu'à la ligne 15 de la page 2 du projet de loi C-20, on substitut les mots «représentants élus» par les mots «acteurs politiques» aux mots «représentants élus».
Ceux qui sont pour?
Des voix: Un vote par oui ou non.
La présidente: La greffière inscrira les résultats du vote par oui ou non.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Bolduc: Oui.
Le sénateur Chalifoux: Non.
Le sénateur Christensen: Non.
Le sénateur Cordy: Non.
Le sénateur Kenny: Non.
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Kroft: Non.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
Le sénateur Milne: Non.
Le sénateur Murray: Oui.
Le sénateur Nolin: Oui.
Le sénateur Poulin: Non.
Le sénateur Sibbeston: Non.
Mme Lank: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion rejetée.
Le préambule est-il adopté?
[Français]
Le sénateur Nolin: J'aurais d'autres commentaires à faire sur le préambule. Si nous prenons le texte du paragraphe 3 du préambule, nous y découvrons, et je cite:
Que le gouvernement d'une province du Canada est en droit de consulter sa population par référendum sur quelque sujet que ce soit et de décider du texte de la question référendaire;
Ceci qui m'apparaît très respectueux de la réalité. Par contre, lorsque nous lisons le paragraphe 1 de l'article 1 du projet de loi, nous voyons que la Chambre des communes peut, elle, déterminer par résolution si la question est claire. Madame la présidente, je vous soumets que le préambule contredit le texte du projet de loi, et donc, je milite en faveur de la motion qui avait été déposée par le sénateur Kinsella. Je dépose donc cette motion à l'effet que nous devrions voter contre le préambule, puisqu'il contredit, à tout le moins dans son paragraphe 3, le texte même du projet de loi.
[Traduction]
Le sénateur Kenny: J'invoque le Règlement, madame la présidente. Un non-membre ne peut proposer une motion.
La présidente: Le sénateur Nolin est un membre.
Le sénateur Kenny: Je m'excuse.
La présidente: Sénateur Nolin, je crois en avoir déjà parlé au sénateur Kinsella. Ceux qui estiment que le préambule ne doit pas faire partie du projet de loi voteront contre lorsque nous mettrons aux voix l'adoption du préambule.
[Français]
Le sénateur Nolin: Vous avez appelé le vote sur le préambule?
La présidente: C'est la question que je viens de poser.
Le sénateur Nolin: Avant que le vote ne se prenne, n'avons-nous pas le droit d'émettre des commentaires?
La présidente: Oui.
Le sénateur Nolin: C'est ce que j'ai fait en tant que membre de ce comité.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, le préambule propose des éléments intéressants et, dans certains cas, novateurs selon moi. Par exemple, on y précise que le gouvernement est «en droit» de faire quelque chose. Or, c'est bien la première fois que je lis un projet de loi libellé de la sorte. Dans les projets de loi, on précise habituellement que telle ou telle chose est «légale» ou «autorisée». Voilà pour une première observation.
En deuxième lieu, je ne sais trop quels pouvoirs constitutionnels ou légaux sont invoqués à cet égard. Mon intervention la plus importante, toutefois, a rapport directement avec celle du sénateur Nolin. Le préambule est directement contredit par les dispositions du projet de loi, étant donné que l'on y précise que le gouvernement de toute province -- et donc du Québec, ce que je contesterais -- est en droit de formuler le libellé de sa question référendaire. Viennent ensuite les dispositions comme telles du projet de loi. On constate ainsi que le texte des dispositions du projet de loi C-20 contredit la proposition contenue dans le préambule, étant donné que la proposition contenue dans l'article 1 et dans d'autres articles du projet de loi va tout à fait en sens contraire. L'article 1 et d'autres articles en effet imposent des limites, des conditions à «ce droit» supposé, issu du préambule.
On pourrait dire qu'il y a là contradiction, tout au moins à un niveau, mais ce que je prétends, moi, honorables sénateurs, madame la présidente, c'est que l'une des dispositions prévues vient tout simplement annuler l'autre. Voilà un problème grave que nous devrions étudier avant d'adopter le projet de loi.
La présidente: Merci, sénateur Cools.
Il est proposé par le sénateur Milne que le préambule soit adopté. Que tous ceux qui y sont favorables veuillent bien le signifier.
Des voix: D'accord.
Le sénateur Nolin: Je demande un vote par oui ou non.
La présidente: La greffière inscrira les résultats du vote par oui ou non.
Le sénateur Fraser: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Non.
Le sénateur Bolduc: Non.
Le sénateur Chalifoux: Oui.
Le sénateur Christensen: Oui.
Le sénateur Cordy: Oui.
Le sénateur Kenny: Oui.
Le sénateur Kinsella: Non.
Le sénateur Kroft: Oui.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non.
Le sénateur Milne: Oui.
Le sénateur Murray: Non.
Le sénateur Nolin: Non.
Le sénateur Poulin: Oui.
Le sénateur Sibbeston: Oui.
Mme Lank: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion adoptée.
Le sénateur Milne: Je propose que l'article 1 soit adopté.
La présidente: Il est proposé par l'honorable sénateur Milne que l'article 1 soit adopté. Que tous ceux qui sont favorables signifient leur accord.
Des voix: D'accord.
Le sénateur Lynch-Staunton: Je ne tente pas d'étirer la sauce, veuillez bien me croire. Ce sera ma dernière proposition d'importance. J'ai des notes et je serai aussi bref que possible.
Cet après-midi, le ministre a confirmé dans un échange avec le sénateur Joyal concernant le Nunavut que le projet de loi ne visait qu'une province, à savoir le Québec. Il l'a également confirmé par sa citation de Roger Gibbins de la Canada West Foundation. Si nous sommes d'accord avec lui à ce sujet, pourquoi ne pas tout simplement le dire dans le projet de loi? Le projet de loi est fondé sur l'avis de la Cour suprême sur le Renvoi sur la sécession du Québec. Dans la première partie du préambule, on renvoie à l'avis de la Cour selon lequel l'Assemblée nationale du Québec ne peut faire sécession du Canada unilatéralement.
Y a-t-il meilleure façon de confirmer ce que nous souhaitons tous, à savoir la confirmation de l'indivisibilité du pays, que d'exclure toute les provinces et territoires du projet de loi sauf le Québec? La seule province visée par ce projet de loi est le Québec. S'il n'y avait pas eu deux référendums et un débat constant à l'assemblée sur l'avenir de la province au sein du Canada, le projet de loi à l'étude ne serait pas nécessaire. Il me semble que les autres provinces et territoires pourraient se sentir blessés du fait d'être liés à l'éventualité d'une sécession dont personne ne veut. Pourquoi donc ne pas les exclure complètement et ne viser que le Québec? Du même coup, le projet de loi identifierait quelle province est visée par le projet de loi et aurait peut-être un peu plus de mordant.
J'ai préparé, madame la présidente, des amendements qui visent tous les articles et où il est tout simplement proposé, le cas échéant, de remplacer le mot «province» par les mots «province de Québec». Si cela est accepté, il faudrait amender les «attendus» en conséquence et, à ce moment-là, le projet de loi viserait officiellement et légalement le but exact qu'il doit viser, à savoir la province de Québec, et nous verrons alors la suite des choses.
La présidente: Pouvez-vous proposer un seul amendement à cet effet?
Le sénateur Lynch-Staunton: Je vais faire une proposition concernant l'article 1 et, selon le résultat, je le ferai pour l'article 2 et l'article 3. Je me limiterai pour l'instant à l'article 1, mais j'ai déjà préparé des amendements pour l'article 2 et l'article 3 et mon argumentation vise les trois articles, de sorte que je n'aurai pas à la répéter.
La présidente: Pouvez-vous donc transmettre à la greffière vos amendements concernant l'article 1, sénateur Lynch-Staunton?
Le sénateur Lynch-Staunton: Merci.
Le sénateur Prud'homme: J'ai trouvé quelque chose qui me semble avoir un sens tout à fait différent en anglais et en français.
La présidente: Il est proposé par le sénateur Lynch-Staunton:
Que, là où le mot «province» figure dans l'article 1 du projet de loi C-20, ce mot soit remplacé par les mots «province de Québec».
Ce serait le cas aux lignes 35 et 39 de la page 2; à la ligne 10 deux fois; à la ligne 15 deux fois; aux lignes 20, 21, 25, 28, 29 et 35 de la page 3; et aux lignes 3, 8 et 9 de la page 4.
Le sénateur Lynch-Staunton: Permettez-moi de préciser que je ne parle ici que de la version anglaise. Il se peut que ce ne soit pas les mêmes lignes dans la version française.
La présidente: Les changements correspondants seraient donc apportés à la version française.
Le sénateur Lynch-Staunton: Ce ne serait pas aux mêmes lignes.
La présidente: Excusez-moi. J'ai le renvoi aux lignes du texte anglais devant moi.
Que tous ceux qui sont favorables à l'amendement veuillent bien le dire.
Le sénateur Murray: Je crois que ce que nous propose le sénateur Lynch-Staunton est fort valable. Le projet de loi nous propose l'idée ridicule selon laquelle les seules parties permanentes du Canada seraient peut-être les Territoires du Nord-Ouest et les terres réservées aux Indiens. Partout ailleurs au pays, les provinces peuvent s'en aller comme bon leur semble. On ne leur accorde peut-être pas le droit à la sécession, mais on leur accorde certainement le droit de tenir un référendum portant sur la sécession qui, une fois adopté, imposerait à toutes les parties l'obligation de négocier. J'estime que le sénateur Lynch-Staunton a bien raison de tenter de faire porter le projet de loi précisément sur le Québec, à savoir la seule province qui est visée par son projet de loi. Le ministre et d'autres témoins nous l'ont d'ailleurs rappelé aujourd'hui.
J'appuie les amendements proposés par le sénateur Lynch-Staunton.
Le sénateur Cools: Un principe de la rédaction législative veut que l'on emploie, dans la mesure du possible, des mots qui expriment le sens et l'intention expresse et évidente du texte de loi. Il me semble que le ministre nous a dit très clairement aujourd'hui, sans aucune hésitation ni ambiguïté, que ce projet de loi vise une seule province, le Québec. Si le ministre a fait une telle déclaration, et que le projet de loi a été préparé et rédigé sous sa surveillance, il me semble que nous devrions nous assurer que le projet de loi exprime exactement ce que le ministre nous a dit qu'il voulait qu'il exprime. Autrement dit, le projet de loi doit clairement exprimer cette intention.
Par conséquent, si «la province» signifie le Québec, alors précisons le «Québec» afin qu'il n'y ait aucune dichotomie entre l'intention et le libellé du projet de loi.
La présidente: Le sous-amendement est-il adopté? L'amendement est-il adopté?
[Français]
Le sénateur Joyal: J'aimerais rappeler à mes collègues qu'en vertu de l'article 35 de la Loi d'interprétation, lorsque le mot «province» est utilisé dans une loi du Parlement du Canada, un règlement ou tout autre instrument réglementaire, ce mot inclut les territoires du Yukon, du Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest. Tout cela est conforme à la Loi d'interprétation et n'a pas été contredit par aucun autre témoin à cette table.
La présidente: C'est une précision intéressante.
[Traduction]
L'amendement est-il adopté?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
La présidente: Vote par appel nominal? La greffière va procéder au vote par oui ou non.
[Français]
Le sénateur Beaudoin: Nous avons parlé du Nunavut. Y a-t-il qu'un témoin qui a examiné la possibilité qu'un territoire fasse sécession? Je connais l'article 35. Une province inclut un territoire, mais un territoire, ce n'est pas une province, c'est un pouvoir délégué. C'est complètement différent d'une province. Je ne peux pas voir comment un territoire pourrait faire sécession. Je soulève cette difficulté.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Je pense que le sénateur Joyal vient de soulever un point très important et intéressant. Si le sénateur Joyal a raison, cela bien entendu influe sur la nature de l'amendement que propose le sénateur Lynch-Staunton. Le sénateur Lynch-Staunton pourrait peut-être prendre un instant pour revoir le libellé exact de son amendement, ou du moins, en tant que présidente du comité, vous devriez vérifier si les observations du sénateur Joyal concernant la Loi d'interprétation et le sens du mot «province» sont exactes. Il s'agit de préoccupations très importantes.
Le sénateur Lynch-Staunton: L'amendement vise à restreindre l'incidence du projet de loi à la province en question qui, à l'occasion, décidera qu'elle veut modifier son association au reste de la fédération. Un point c'est tout. Je conviens avec le sénateur Joyal que le mot «province», en vertu de la Loi d'interprétation, inclut les territoires. Par conséquent, les territoires et les autres provinces seraient exclus de la présente loi et par conséquent, 90 p. 100 du pays serait indivisible.
La présidente: La greffière va maintenant procéder au vote par oui ou non.
Senator Fraser: No.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Bolduc: Oui.
Le sénateur Chalifoux: Non.
Le sénateur Christensen: Non.
Le sénateur Cordy: Non.
Le sénateur Kenny: Non.
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Kroft: Non.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
Le sénateur Milne: Non.
Le sénateur Murray: Oui.
Le sénateur Nolin: Oui.
Le sénateur Poulin: Non.
Le sénateur Sibbeston: Non.
Mme Lank: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion rejetée.
Il est proposé par l'honorable sénateur Milne que l'article 1 soit adopté.
Le sénateur Prud'homme: Mon collègue le sénateur Bolduc et moi-même avons discuté du paragraphe 1(2).
[Français]
Voulez-vous regarder attentivement l'article 1.(2)?
[Traduction]
S'il coïncide, en tout ou en partie, avec la tenue d'une élection générale des députés à la Chambre des communes, le délai mentionné au paragraphe (1) est prorogé de quarante jours.
Du moins si vous prenez cette version. J'en ai débattu avec le sénateur Nolin. Même le dictionnaire ne nous aide pas.
[Français]
En français, il est écrit:
S'il coïncide, en tout ou en partie [...] le délai mentionné au paragraphe (1) est prorogé de quarante jours.
Est-ce que cette phrase a le même sens qu'en anglais? Le mot «prorogé» ne devrait-il pas plutôt devenir «prolonger», et alors cela ne devrait-il pas être «prorogé de 40 jours additionnels»?
Le sénateur Beaudoin: Je ne pense pas que ce soit une erreur.
Le sénateur Prud'homme: C'est ce que je veux savoir. Proroger, selon la première définition du dictionnaire le Petit Larousse, signifie «reporter à une date ultérieure», mais selon la deuxième définition du dictionnaire, en ce qui concerne le droit constitutionnel, proroger signifie «prolonger les fonctions d'une assemblée délibérante au-delà de la date légale; suspendre et fixer à une date ultérieure les séances d'une assemblée».Vous êtes satisfait avec le fait que proroger signifie 40 jour additionnels?
Des voix: Oui.
Le sénateur Beaudoin: J'aurais écrit prolongé
Le sénateur Prud'homme: Moi aussi.
[Traduction]
La présidente: L'article 1 est-il adopté? Tous ceux qui sont pour?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
La présidente: Vote par appel nominal? Pourrais-je demander à la greffière de bien vouloir procéder au vote par oui ou non?
La présidente: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Non.
Le sénateur Bolduc: Non.
Le sénateur Chalifoux: Oui.
Le sénateur Christensen: Oui.
Le sénateur Cordy: Oui.
Le sénateur Kenny: Oui.
Le sénateur Kinsella: Non.
Le sénateur Kroft: Oui.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non.
Mme Lank: L'honorable sénateur Milne.
Le sénateur Milne: Oui.
Le sénateur Murray: Non.
Le sénateur Nolin: Non.
Le sénateur Poulin: Oui.
La présidente: Il n'est pas à sa place.
Mme Lank: Huit voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion adoptée.
Le sénateur Milne: Je propose l'adoption de l'article 2 du projet de loi.
La présidente: L'honorable sénateur Milne propose que l'article 2 soit adopté.
Tous ceux qui sont pour veuillez l'indiquer...
Le sénateur Kinsella: Pouvons-nous avoir un vote par appel nominal, madame la présidente?
La présidente: Pourrais-je demander à la greffière de procéder au vote par oui ou non?
La présidente: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Non.
Le sénateur Bolduc: Non.
Le sénateur Chalifoux: Oui.
Le sénateur Christensen: Oui.
Le sénateur Cordy: Oui.
Le sénateur Kenny: Oui.
Le sénateur Kinsella: Non.
Le sénateur Kroft: Oui.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non.
Le sénateur Milne: Oui.
Le sénateur Murray: Non.
Le sénateur Nolin: Non.
Le sénateur Poulin: Oui.
Mme Lank: Huit voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion adoptée.
Le sénateur Milne: Je propose l'adoption de l'article 3.
La présidente: L'honorable sénateur Milne propose l'adoption de l'article 3.
Le sénateur Murray: J'ai un amendement à proposer à l'article 3 du projet de loi.
Je tiens tout d'abord à préciser ce que j'ai déjà dit en deuxième lecture. Je m'oppose en principe au projet de loi. Je n'hésite donc pas à reconnaître qu'il est quelque peu contradictoire que je m'efforce de l'améliorer. Quoi qu'il en soit, il est tout à fait possible que ce projet de loi soit adopté. Par conséquent, si j'appuie ou je préconise divers amendements, c'est pour limiter les dégâts.
À cet égard, je suis stupéfait de constater que le gouvernement même n'a pas, après les représentations qui ont été faites et les témoignages que nous avons entendus, convenu d'apporter un amendement supplémentaire concernant les droits et le rôle des peuples autochtones du Québec dans ce processus. Je sais -- je pense que nous le savons tous -- en quoi consistent les dispositions constitutionnelles prévues aux alinéas 35(1)a) et b). En cas de modification au paragraphe 91.24 ou à l'article 25 de la Constitution de 1982, ou à la procédure de modification, ces dispositions prévoient que toute modification influant sur les droits des peuples autochtones du Canada nécessiterait la tenue d'une conférence constitutionnelle à laquelle leurs représentants seraient invités à participer pour discuter de cette question.
Lorsque la Chambre des communes a été saisie du projet de loi C-20, le gouvernement a reçu trois propositions d'amendement concernant les peuples autochtones du Canada. Le gouvernement en a accepté deux, c'est-à-dire les deux amendements qui prévoyaient que les peuples autochtones feraient partie des groupes de consultation que l'on écouterait, comme le Sénat, les provinces et d'autres intervenants, s'ils produisaient des résolutions formelles concernant la clarté de la question ou la clarté de la majorité.
Le gouvernement a refusé un amendement. Il a refusé un amendement qui aurait garanti aux peuples autochtones du Québec une place à la table de négociation. Je l'ai déjà dit, et je le répète, mais à mon humble avis, il est impossible de modifier le statut des peuples autochtones du Québec par rapport à la Couronne fédérale et au Parlement sans leur consentement. Il m'importe peu que le Parlement du Canada et dix provinces y consentent. Je ne crois pas que la proposition selon laquelle les peuples autochtones du Québec pourraient simplement être transférés à la sphère de compétence d'un nouveau pays étranger, la nouvelle république du Québec, soit défendable. J'estime que leur consentement est nécessaire et obligatoire.
Le ministre l'a presque reconnu; mais il ne peut pas se résoudre à le dire. En fait, il a explicitement évité la question en se réfugiant derrière l'avis consultatif de la cour:
[Français]
La cour ne l'a pas dit, je ne peux donc pas le dire.
[Traduction]
C'est la déclaration qu'il nous a faite le 29 mai.
Je sais aussi -- et permettez-moi de devancer l'objection -- que le grand chef Fontaine a indiqué que cela ne l'empêcherait pas d'appuyer ce projet de loi. Cependant, les représentants, les chefs des peuples autochtones au Québec, les peuples qui seront le plus directement touchés, adoptent un point de vue tout à fait différent. En fait, ils menacent de contester le projet de loi devant les tribunaux. M. Moses a dit:
À l'heure actuelle, le peuple cri de la baie James fait face à l'une des mesures les plus colonialistes qu'un peuple ait jamais vécue. Un gouvernement au Québec prétend pouvoir nous transférer comme du bétail dans un nouveau pays. Le gouvernement fédéral, notre soi-disant «fiduciaire», se trouve en fait à collaborer à ce processus impitoyable.
Voilà la déclaration qu'il a faite, et il a été très catégorique.
Je pense que nous pouvons rectifier la situation -- du moins je l'espère -- par un simple amendement au paragraphe 3(1) du projet de loi. Je suis désolé de ne pas en avoir des copies à faire circuler parmi les membres du comité, mais je pense que vous n'aurez aucune difficulté à le comprendre. Je lirai l'article tel qu'il existe à l'heure actuelle. Il se lit comme suit:
Il est entendu qu'il n'existe aucun droit, au titre de la Constitution du Canada, d'effectuer unilatéralement la sécession d'une province du Canada et que, par conséquent, la sécession d'une province du Canada requerrait la modification de la Constitution du Canada, à l'issue de négociations auxquelles participeraient notamment les gouvernements de l'ensemble des provinces [...]
J'amenderais ce paragraphe en ajoutant une virgule après le mot «provinces», et j'ajouterais «les représentants des peuples autochtones dans la province dont le gouvernement a proposé la tenue du référendum sur la sécession, et le gouvernement du Canada».
Voilà mon amendement, madame la présidente.
La présidente: Je tiens à m'assurer d'avoir bien compris, sénateur Murray. L'article se lirait donc comme suit «les gouvernements de l'ensemble des provinces», ajouter un virgule; «les représentants des peuples autochtones de la province dont le gouvernement avait proposé»...
Le sénateur Murray: J'ai dit «a proposé» pas «avait proposé».
La présidente: A proposé?
Le sénateur Murray: Oui, «a proposé la tenue du référendum sur la sécession».
La présidente: Très bien, «a proposé la tenue du référendum sur la sécession». Tous ceux qui sont pour? Discussion?
Le sénateur Prud'homme: Quelqu'un pourrait peut-être lire l'amendement à nouveau, lentement, parce que je tiens à m'assurer de le comprendre en français. Auriez-vous l'amabilité de le relire?
Mme Lank: Il est proposé par l'honorable sénateur Murray, c.p., de modifier le paragraphe 3(1) en ajoutant à la ligne 25, à la page 5, «Les représentants des peuples autochtones de la province dont le gouvernement a proposé la sécession». Puis le paragraphe continue ainsi, «et le gouvernement du Canada». Je vais le relire: «Les représentants des peuples autochtones de la province dont le gouvernement a proposé la tenue du référendum sur la sécession».
Le sénateur Murray: À titre d'explication, sénateur Beaudoin, il s'agit de l'amendement proposé au paragraphe 3(1). Le libellé que j'utilise, notamment, «les peuples autochtones de la province dont le gouvernement a proposé la tenue du référendum sur la sécession», c'est une phrase que j'ai simplement reprise du paragraphe 2(3). J'ai simplement emprunté à la même formulation.
[Français]
La présidente: Je suppose que la version française serait aussi puisée à la même source.
[Traduction]
Le sénateur Murray: Je pourrais en donner une traduction simultanée mais il vaut mieux pour vous que je m'abstienne.
La présidente: C'est pour les greffiers qui essaient de suivre.
[Français]
Le sénateur Prud'homme: Sénateur Murray, si vous lisez encore l'article 2(3) du projet de loi, là où vous voulez en venir, ce sont aux résolutions basées sur des déclarations officielles des représentants des peuples autochtones du Canada. Vous voulez vous inspirer de cet article pour faire un ajout à l'article 3(1). Ai-je bien compris?
Le sénateur Murray: Oui.
Le sénateur Prud'homme: Si vous utilisez la même phraséologie, vous ajoutez «les représentants des peuples autochtones de tout le Canada» alors que vous voulez «les peuples autochtones de la province visée». Ai-je bien compris ce vous voulez faire?
Le sénateur Murray: Vous avez très bien compris.
Le sénateur Prud'homme: Donc, il faut faire attention de ne pas dire qu'il y a la même chose dans l'article 2(3) lorsqu'on parle des peuples autochtones de tout le Canada.
[Traduction]
Je tiens simplement à m'assurer d'avoir bien compris. Je crois comprendre ce que vous voulez, mais ce n'est peut-être pas ce que mes collègues vont en conclure s'ils lisent le paragraphe 2(3) attentivement. Cela indique que tout ce que vous voulez précisément, à savoir, «les Autochtones de la province...»
Le sénateur Murray: Ce que je tâche de préciser pour plus de certitude, si je puis dire, c'est d'assurer une place à la table des négociations aux représentants des peuples autochtones dont le consentement, à mon avis, serait requis dans le cas d'un tel amendement.
La présidente: Pour que cela soit bien clair, du moins je l'espère, je pense que la phrase que vous cherchiez dans la version française proviendrait de la version française du paragraphe 2(3) qui se lirait comme suit:
[Français]
Article 2, paragraphe trois.
Les représentants des peuples autochtones de la province dont le gouvernement a proposé la tenue du référendum sur la sécession [...]
Le sénateur Murray: Exactement.
[Traduction]
Le sénateur Chalifoux: J'ai examiné la situation. Nous avons un petit caucus autochtone, mais nous en avons discuté. J'ai examiné la situation en long et en large. J'ai examiné la Constitution et la teneur du projet de loi. À mon avis, ce projet de loi porte sur deux aspects: la clarté de la question et la majorité.
Les droits des peuples autochtones du Canada -- et tout le monde a parlé de l'article 35 de la Constitution -- sont déjà prévus par la Constitution pour laquelle nous nous sommes battus en 1982 afin de nous assurer que tous les peuples autochtones sont présents à la table. J'ai examiné cet aspect, et les dispositions du paragraphe 3(2) du projet de loi permettent de le vérifier, plus précisément le passage qui se lit comme suit «toute modification des frontières de la province, les droits, intérêts et revendications territoriales des peuples autochtones du Canada et la protection des droits des minorités». Ils doivent être présents à la table.
Un grand nombre d'entre vous étaient présents lorsque j'ai interrogé certains des constitutionnalistes à ce sujet. Un grand nombre d'entre eux ne s'étaient même pas rendu compte des répercussions que les traités auraient à cet égard, dans cette éventualité. Selon certains des spécialistes, il faudrait recourir au droit international. Je suis fermement convaincue que les droits des peuples autochtones de notre pays sont protégés par la Constitution, et qu'ils seront présents à la table. Ils ont les mêmes droits que nous avons au Sénat d'être consultés sur la question. Ils se situent au même niveau. Lorsqu'il s'agit des négociations, ils sont automatiquement assurés d'une place à la table grâce à la Constitution. Voilà pourquoi je ne peux pas appuyer l'amendement. Je ne suis pas une spécialiste, mais d'après moi, après avoir lu toutes ces dispositions, j'estime que la Constitution protège nos droits.
Le sénateur Joyal: Je tiens à dire au sénateur Chalifoux que j'aimerais partager sa conviction selon laquelle la présence des peuples autochtones à la table est garantie, mais l'étude spéciale que le Conseil privé a commandée au professeur Buchanan est arrivée à la conclusion inverse, à savoir que l'article 35 ne garantit pas clairement une place à la table.
Je partage avec le sénateur Chalifoux et les autres sénateurs d'origine autochtone leur préoccupation à ce sujet, mais une étude par un professeur de renom qui s'est intéressé de très près à cet aspect là a été publiée aujourd'hui dans le journal et il est arrivé à la conclusion inverse. Je tenais simplement à le préciser.
Le sénateur Sibbeston: Dans une certaine mesure, je me réjouis que le sénateur Murray fasse la promotion de la cause des peuples autochtones. J'ai soulevé cette question lorsque les chefs autochtones ont comparu devant nous il y a un peu plus d'une semaine. Mon opinion à ce moment-là, après avoir lu le projet de loi et la Constitution, c'était que le gouvernement a prévu la participation des Autochtones dans la même mesure qu'elle est prévue en vertu de la Constitution. Je considère que ce projet de loi prévoit la participation des peuples autochtones et n'accorde rien de moins que ce qui est prévu par la Constitution. L'article 35.1 serait invoqué si les droits issus de traités des peuples autochtones ou tout autre droit prévu par le paragraphe 91.24 était touché.
Le paragraphe 35(1) prévoit simplement la tenue d'une conférence, sans que les peuples autochtones aient nécessairement le dernier mot ou un veto. Cette disposition garantit simplement qu'ils seront invités à une conférence du gouvernement fédéral et des provinces. Je me demande si l'amendement proposé par le sénateur Murray ne se trouve pas à aller au-delà de ce qui est autorisé par la Constitution.
J'ai abordé la question l'autre jour avec les dirigeants autochtones. Je leur ai demandé s'il ne serait pas préférable de reporter cela à plus tard. Quand les Autochtones seront reconnus comme fondateurs de notre pays et formeront un troisième ordre de gouvernement, ils pourront alors être reconnus et mentionnés dans la Constitution, particulièrement dans les articles relatifs aux modifications.
Quand j'ai lu les dispositions de la Constitution relatifs à la procédure d'amendement, j'ai constaté que les provinces et le gouvernement fédéral seulement sont mentionnés. Aucune mention n'est faite des peuples autochtones. J'espère qu'un jour, de notre vivant, ils le seront.
Si le sénateur Murray propose que les peuples autochtones soient associés aux négociations, sans toutefois avoir un droit de veto, ça va. Toutefois, s'il propose de donner aux Autochtones un plus grand rôle, et notamment un veto sur d'éventuelles modifications constitutionnelles, alors il propose une procédure qui n'est pas actuellement prévue dans la Constitution.
Si je me réjouis de voir le sénateur Murray défendre la cause des peuples autochtones, je me demande néanmoins si ce qu'il propose est possible aux termes de la Constitution. Au lieu d'examiner cette question maintenant, il serait sans doute préférable de l'inscrire à l'ordre du jour de futures conférences constitutionnelles.
Le sénateur Kinsella: Je vous avoue bien franchement être très étonné par les arguments présentés pour opposer la motion et l'amendement du sénateur Murray. Nous avons fait énormément de progrès depuis le début des années 80 en reconnaissant le droit des peuples autochtones à participer à part entière au processus de modification de la Constitution. Les arguments paternalistes qui viennent d'être présentés en opposition à la motion du sénateur Murray me donnent l'impression d'être retombé dans le passé.
Voyons ce que propose le paragraphe 3(2). C'est une proposition négative:
Aucun ministre ne peut proposer de modification constitutionnelle portant sécession d'une province du Canada, à moins que le gouvernement du Canada n'ait traité [...]
Le projet de loi énonce diverses conditions.
Honorables sénateurs, l'énumération des principaux participants aux délibérations sur les modalités que proposerait le gouvernement du Québec dans le contexte de la sécession du Québec et qui toucherait aux Cris, se rattache directement au droit de ces derniers à l'autodétermination.
Si nous étions plus nombreux dans cette pièce à avoir du courage, nous voterions en faveur de l'amendement du sénateur Murray. Un tel amendement remédierait aux problèmes mentionnés par le grand chef des Cris. Le grand chef a mentionné la possibilité d'une contestation du projet de loi, tel qu'il est libellé, car il est contraire à la Constitution du fait qu'il les exclut de toute participation directe aux négociations envisagées.
J'appuie cette motion et l'amendement.
[Français]
Le sénateur Nolin: Pour répondre à une des questions du sénateur Sibbeston, je pense que le mot important, c'est le mot «participer». L'alinéa b) de l'article 35.1, de la Loi constitutionnelle de 1982 n'oblige les participants gouvernementaux à inviter les peuples autochtones à la table afin qu'ils participent aux négociations. Vous allez dire que si on les invite, ils vont participer. On peut en déduire cela, mais il n'y a aucune obligation constitutionnelle à les laisser participer: ils peuvent être invités et être uniquement des témoins à une négociation formelle à laquelle participeront les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral.
L'amendement qui est suggéré, et qui est fort à-propos, inclut la participation auxnégociations des peuples autochtones directement affectés par la décision de la sécession d'une province. Il s'agit d'une nette amélioration par rapport à l'alinéa b) de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.
Pour reprendre un point soulevé quant aux droits issus de traités, l'amendement ne fait pas référence à ces droits. C'est là le plus gros problème des peuples autochtones dans le cas de la césession d'une province. Qu'arrive-t-il aux droits issus de ces populations autochtones? Qui va les négocier? On a entendu les témoignages de certains représentants qui sont venus de façon très honnête témoigner à l'effet qu'ils avaient été trahis dans le passé par le gouvernement fédéral, qui a le devoir et la responsabilité de faire respecter ces droits. Il ne l'a pas fait et il leur a dit: «Ne vous en faites pas, on va s'occuper de vous. Ne vous préoccupez pas de l'avenir. On s'en occupe.» Les autochtones se sont fait avoir. Je pense que l'amendement fait le pas minimal. Les inviter, c'est une chose; ce droit existe déjà. Toutefois, ils n'ont pas le droit de participer à la négociation. L'amendement vise à les inclure dans la négociation. Selon moi, c'est le minimum que l'on doive faire. J'appuierai l'amendement.
[Traduction]
Le sénateur Chalifoux: Honorables sénateurs, sauf le respect que je dois au sénateur Nolin, je me permets de signaler qu'il y a des années, la majorité des Autochtones n'avaient pas accès au système scolaire de l'homme blanc. Nous l'avons maintenant. Nous avons de merveilleux dirigeants dont certains ont comparu devant notre comité.
Si les dirigeants autochtones du Québec sont en mesure de négocier à l'avenir, ce sera grâce aux traités ratifiés par la Couronne il y a de nombreuses années, y compris la Loi sur les Cris et les Naskapis. Le droit international le confirmera. C'est expliqué dans un des témoignages.
J'ai une confiance absolue dans les dirigeants autochtones de tout le pays. Nous avons maintenant des avocats constitutionnalistes, hommes et femmes, très instruits qui seront en mesure de présenter les arguments beaucoup mieux que nous n'avons su le faire dans le passé.
La Constitution dit que le premier ministre du Canada invite les représentants des peuples autochtones à participer aux travaux relatifs à ces questions. Or, le paragraphe 35(1) de la Charte canadienne des droits et libertés dit que les droits existants -- ancestraux ou issus de traités -- des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés. C'est dans la Constitution. Par conséquent, je ne vois pas l'utilité de l'amendement.
[Français]
Le sénateur Beaudoin: À l'article 35.1 b), le mot "participer" est là en noir et en blanc, et dans ce sens, le sénateur Chalifoux a parfaitement raison. Je n'ai pas d'objection à ajouter ce mot à la fin de l'article 3 (1) du projet de loi C-20. Est-ce que cela rend la participation amérindienne plus évidente? Peut-être, je ne m'y objecte pas. Toutefois, on ne pourrait pas, dans un projet de loi comme celui-ci, amender la Constitution. On ne le dit pas depuis le début, mais je suis toujours un peu scandalisé quand on allait un peu contre la Constitution. On ne peut donc pas changer l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 sans faire un amendement constitutionnel. Cependant, ajouter ce mot, à la fin de l'article 3 (1), ne me gêne pas. De toute façon, les représentants des peuples autochtones seront ipso facto invités à participer à ces discussions. C'est tout ce que j'ai à dire à ce sujet.
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston: Je félicite le sénateur Murray d'avoir voulu ajouter une disposition traitant des droits des Autochtones, mais j'estime, après avoir pris connaissance des dispositions, que les peuples autochtones ont déjà des garanties dans la Constitution et notamment une disposition qui l'emporte sur ce projet de loi et qui garantit la participation du gouvernement fédéral, des provinces et des peuples autochtones.
La Constitution prévoit déjà la participation des peuples autochtones. Ils n'ont pas de droit de veto sur une modification constitutionnelle, et même si ce serait bien de l'avoir, je ne crois pas que cela soit nécessaire car le paragraphe 35(1) de la Constitution a une très grande portée. Il y a des peuples autochtones dans toutes les provinces et leurs droits sont donc automatiquement visés. L'article 35 garantit non seulement les droits issus de traités mais aussi ceux obtenus dans le cadre de règlements des revendications territoriales. Sa portée est très grande. L'amendement du sénateur Murray m'apparaît superflu.
Le sénateur Murray: Je tiens à rassurer le sénateur Sibbeston. Je ne propose pas que les peuples autochtones et leurs dirigeants aient un droit de veto sur les modifications constitutionnelles, car je ne crois pas qu'ils doivent avoir un tel droit de veto, ni qu'ils soient obligatoirement partie aux discussions et aux négociations, sauf quand leurs intérêts sont directement touchés. J'ai déjà, dans une autre incarnation, soutenu le contraire. Plus récemment, au cours d'une session précédente où nous avons examiné un projet de loi sur les vetos régionaux, j'ai eu un échange assez vif avec Ovide Mercredi sur cette question.
Je soutiens toutefois, et j'espère que le sénateur Sibbeston et le sénateur Chalifoux et les autres diront comme moi, que les peuples autochtones du Québec -- et c'est d'eux que nous parlons -- ne pourraient pas, sans leur consentement, être transférés de la juridiction de la Couronne et du Parlement fédéraux à une autre juridiction.
Bien que nous ne puissions le faire ce soir, il serait intéressant d'essayer de deviner ce que serait la décision de la Cour suprême du Canada, telle qu'elle est actuellement constituée, si nous lui posions la question. Il est aussi intéressant d'essayer de deviner ce qui se produirait si le gouvernement du Québec, présent ou futur, déclarait unilatéralement l'indépendance, tentait d'obtenir la reconnaissance internationale de son nouveau statut, avec, un pas derrière, les peuples autochtones du Québec clamant: «Nos droits sont bafoués». J'ose croire que la reconnaissance internationale d'une déclaration unilatérale d'indépendance serait peu probable, en pareilles circonstances.
J'ai été intrigué de voir que le gouvernement a accepté deux amendements à la Chambre des communes touchant au rôle et aux droits des peuples autochtones du Québec et du Canada tandis qu'il a refusé le troisième amendement qui aurait garanti aux peuples autochtones du Québec une place à la table des négociations. Je me demande pourquoi, et le gouvernement ne m'a pas encore donné une explication satisfaisante de son refus d'accepter cet amendement.
Le sénateur Chalifoux nous a dit, et le sénateur Sibbeston l'a aussi mentionné, qu'il existe dans la Constitution une disposition, que j'ai moi-même citée plus tôt, le paragraphe 35(2), je crois, qui prévoit que le premier ministre doit inviter les représentants des peuples autochtones du Canada à participer aux travaux relatifs aux questions qui les intéressent directement. Les sénateurs Chalifoux et Sibbeston demandent pourquoi modifier le projet de loi étant donné que cette disposition figure dans la Constitution. La formule de modification de la Constitution exige le consentement de toutes les provinces ou de certaines d'entre elles dans diverses proportions. Or, le gouvernement a jugé cela insuffisant dans ce cas-ci. Il a précisé, au paragraphe 3(1), que la sécession d'une province requerrait la modification de la Constitution du Canada à l'issue de négociations auxquelles participeraient les gouvernements de l'ensemble des provinces et du Canada. J'ose dire que nous le savions déjà. Pourquoi fallait-il le préciser ici?
Je pense que pour dissiper tout doute, nous devrions inclure là les représentants des peuples autochtones du Québec ou de la province dont le gouvernement propose un référendum sur la sécession.
Le sénateur Chalifoux a aussi mentionné l'article 3(2), auquel je ne propose pas d'amendement. Cependant, si je représentais les peuples autochtones, je ne serais pas trop rassuré par les dispositions de cet article. Il requiert que le gouvernement du Canada traite, dans le cadre de négociations, parmi d'autres choses, des droits, des intérêts et des revendications territoriales des peuples autochtones du Canada. Qu'entendons par traiter? J'aurais été beaucoup plus à l'aise et rassuré par un énoncé plus ferme de ce que je crois être un fait, à savoir, que dans toute négociation en vue d'une sécession, il est certain que l'État fédéral et le Parlement ne peut pas céder sa compétence en ce qui concerne des peuples autochtones de la province en question sans leur consentement.
Je ne veux pas être plus catholique que le pape ou plus autochtone que nos amis autochtones présents à cette table. Néanmoins, vous comprendrez, étant donné l'expérience passée, pourquoi je crois qu'il serait constructif de modifier l'article 3(1) de la manière que j'ai suggérée, c'est-à-dire pour garantir que, dans toute négociation, les représentants des peuples autochtones de la province dont le gouvernement a proposé un référendum sur la sécession seraient nécessairement inclus.
[Français]
Le sénateur Prud'homme: Ce sera court. J'ai beau essayer de chercher toutes les définitions, mais au sujet de la protection des droits des minorités, je dois dire que jusqu'à maintenant, je n'ai eu aucune satisfaction. Finalement, si j'ai bien compris, plus personne ne va parler. Tout le monde aura le droit d'être consulté, d'être assis, mais le seul peuple que l'on veut reconnaître s'exprimer clairement, c'est le peuple canadien-français du Québec, dont je fais partie.
[Traduction]
La présidente: Que tous ceux qui appuient l'amendement l'indiquent dans un vote par appel nominal. La greffière procédera maintenant au vote par oui ou non.
Le sénateur Fraser: Non.
Le sénateur Beaudoin: Oui.
Le sénateur Bolduc: Oui.
Le sénateur Chalifoux: Non.
Le sénateur Christensen: Non.
Le sénateur Cordy: Non.
Le sénateur Kenny: Non.
Le sénateur Kinsella: Oui.
Le sénateur Kroft: Non.
Le sénateur Lynch-Staunton: Oui.
Le sénateur Milne: Non.
Le sénateur Murray: Oui.
Le sénateur Nolin: Oui.
Le sénateur Poulin: Non.
Le sénateur Sibbeston: Non.
Mme Lank: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion rejetée.
L'honorable sénateur Milne propose que l'article 3 soit adopté. Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien le dire.
Le sénateur Kinsella: Je demande un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
La présidente: Je demande à la greffière de bien vouloir procéder au vote par oui ou non.
Mme Lank: Honorable sénateur Fraser.
Le sénateur Fraser: Oui. Je suis en faveur de l'adoption de l'article 3.
Le sénateur Beaudoin: Non.
Le sénateur Bolduc: Oui.
Le sénateur Chalifoux: Oui.
Le sénateur Christensen: Oui.
Le sénateur Cordy: Oui.
Le sénateur Kenny: Oui.
Le sénateur Kinsella: Non.
Le sénateur Kroft: Non.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non.
Le sénateur Milne: Oui.
Le sénateur Murray: Non.
Le sénateur Nolin: Non.
Le sénateur Poulin: Oui.
Le sénateur Sibbeston: Oui.
Mme Lank: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion adoptée.
Le sénateur Milne: Je propose que le titre soit adopté.
La présidente: L'honorable sénateur Milne propose que le titre soit adopté.
Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien le dire.
Le sénateur Murray: Nous avons le même problème avec le titre qu'avec le préambule, car on y prétend qu'il découle de l'avis de la Cour suprême du Canada.
Je pose donc cette question au sénateur Kinsella et à mes collègues conservateurs. Est-ce que nous voulons contester l'énoncé selon lequel le projet de loi donne effet à l'exigence de clarté formulé par la Cour suprême du Canada dans son avis?
La présidente: Sénateur Murray, je me permets de vous interrompre un instant pour vous lire un extrait du texte de Marleau et Montpetit.
Le sénateur Murray: De qui s'agit-il? C'est le greffier de l'autre endroit.
La présidente: Comme vous le savez, à moins d'indication contraire, nous suivons les mêmes règles. On y dit:
[...] Le titre ne peut être modifié que si les amendements apportés au projet de loi le justifient.
Je pense que cela s'applique à notre comité.
Le sénateur Prud'homme: Vous pouvez dire que c'est ce que vous désirez, mais je détesterais que nous établissions un précédent ici en disant que c'est la façon dont on procède à la Chambre, de sorte que c'est aussi la façon dont on procède au Sénat.
C'est un très bon manuel. J'en ai acheté un exemplaire. C'est un excellent manuel de procédure bien rédigé, mais il n'a rien à voir avec nous. Si nous commençons à l'utiliser, nous établirons un précédent pour l'avenir en disant que ce livre s'applique, avec les adaptations nécessaires, au Sénat. Ce n'est certainement pas notre intention. Sauf le respect que nous avons pour les auteurs, que nous connaissons très bien, ils n'ont rien à voir avec le Sénat.
À titre de présidente, vous pouvez rendre une décision, comme vous l'avez fait. Si certains ne sont pas satisfaits, ils peuvent protester. Vous pouvez exprimer votre opinion. Vous pouvez consulter Beauchesne ou notre Livre rouge, mais je vous prie de ne pas établir de précédent en disant que nous devons suivre la procédure de la Chambre des communes.
La présidente: Sénateur Prud'homme, je vous prie de croire que je n'aurais pas cité ce livre si je n'avais pas déjà entendu le Président de la Chambre le faire. Je rappelle à tous les sénateurs que Beauchesne est également un manuel de la Chambre des communes.
Le sénateur Cools: Ce n'est pas non plus très pertinent au Sénat. On a soulevé la question à maintes et maintes reprises. Le fait est que vous ne voulez pas que le titre soit modifié. C'est là la véritable question. Je vous assure, madame la présidente, que s'il y avait suffisamment de voix autour de cette table pour faire adopter une telle motion, vous verriez à quel point cette citation est pertinente.
La présidente: C'est certain, étant donné que le comité est maître de sa propre destinée.
Le sénateur Kinsella: S'agit-il d'un rappel au Règlement?
La présidente: Je signalais cette règle au sénateur Murray, qui avait fait certaines observations. Il n'y a pas eu de question sur laquelle je devais rendre une décision. Aucune motion n'a été proposée. J'aidais seulement le sénateur Murray dans ses réflexions. Nous voterons maintenant sur le titre.
Le sénateur Kinsella: J'aimerais participer à ce débat, par lequel nous essayons d'aider le sénateur Murray dans ses réflexions, ce qui est très difficile à faire. Il me semble que ce n'est pas un principe satisfaisant que de se soumettre à un manuel de procédure de l'autre endroit, même si certains soutiennent que les décisions importantes devraient vraiment être prises seulement à la Chambre des communes. Je dis simplement, pour les fins du compte rendu, que je ne suis pas de cet avis.
Le sénateur Murray: Vous pourrez toujours essayer lors de la troisième lecture.
La présidente: Je vous signale l'article 1(1) de notre propre Règlement:
Dans tous les cas non prévus au Règlement, [...]
... ce qui ne concerne pas les amendements proposés aux titres de projets de loi, autant que je sache...
[...] le Sénat ou ses comités suivent, avec les adaptations nécessaires, les coutumes, usages, formalités et procédures de l'une ou l'autre des Chambres du Parlement du Canada.
Le sénateur Cools: Nous devrions peut-être changer cela.
La présidente: C'est peut-être à un autre comité qu'il incomberait de le faire.
Le sénateur Beaudoin: Je veux intervenir sur cette question. Le titre se lit ainsi:
Loi donnant effet à l'exigence de clarté [...]
Écoutez bien ce qui suit.
[...] formulée par la Cour suprême du Canada dans son avis sur le renvoi sur la sécession du Québec.
À mon avis, ce n'est pas exactement ce qu'est le projet de loi C-20. C'est un projet de loi qui vise à donner effet à l'exigence de clarté dans les négociations qui doivent se dérouler au sujet de la clarté et de la légalité d'une sécession. Dans ce sens, je ne peux pas voter en faveur de cette motion.
La présidente: Vous n'avez pas à voter en faveur de la motion. Nous pouvons mettre la motion aux voix et vous pouvez voter contre.
Le sénateur Beaudoin: C'est une procédure très étrange.
La présidente: Que tous ceux qui sont en faveur de l'adoption du titre veuillent bien le dire.
La greffière procédera au vote par oui ou non.
Le sénateur Fraser: Oui.
Le sénateur Beaudoin: Non.
Le sénateur Bolduc: Non.
Le sénateur Chalifoux: Oui.
Le sénateur Christensen: Oui.
Le sénateur Cordy: Oui.
Le sénateur Kenny: Oui.
Le sénateur Kinsella: Non.
Le sénateur Kroft: Oui.
Le sénateur Lynch-Staunton: Non.
Le sénateur Milne: Oui.
Le sénateur Murray: Non.
Le sénateur Nolin: Non.
Le sénateur Poulin: Oui.
Le sénateur Sibbeston: Oui.
Mme Lank: Neuf voix contre 6.
La présidente: Je déclare la motion adoptée.
Le sénateur Milne: Je propose que le projet de loi C-20 soit adopté.
La présidente: L'honorable sénateur Milne propose que le projet de loi C-20 soit adopté. Tous ceux qui sont en faveur de la motion?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Kinsella: À la majorité.
La présidente: Je déclare la motion adoptée à la majorité.
Dois-je faire rapport du projet de loi au Sénat sans amendement?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
La présidente: Je déclare la motion adoptée à la majorité.
Ceci met fin, honorables sénateurs, à l'étude du projet de loi article par article.
Honorables sénateurs, je tiens à vous remercier tous pour votre travail vraiment remarquable, soutenu et assidu au comité. Vous avez énormément facilité ma tâche.
En notre nom à tous, je tiens à offrir nos remerciements à tout notre personnel, y compris les recherchistes de la Bibliothèque, qui ont fait un excellent travail pour nous.
Sénateur Cools, vous aurez le mot de la fin.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je tiens seulement à répéter au sénateur Fraser et aux autres membres du comité que j'aurais vraiment être membre du comité ayant droit de vote. C'est une affaire qui me restera longtemps sur le coeur.
La séance est levée.