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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule 16 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 15 juin 2000

Le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, auquel a été renvoyé le projet de loi S-20, Loi visant à donner à l'industrie canadienne du tabac le moyen de réaliser son objectif de prévention de la consommation des produits du tabac chez les jeunes au Canada, se réunit aujourd'hui à 9 h 03 pour examiner ce projet de loi.

Le sénateur Mira Spivak (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente: Nous sommes ici pour poursuivre nos discussions sur le projet de loi S-20.

Nos témoins de ce matin représentent l'Association pour les droits des non-fumeurs et la Société canadienne du cancer.

M. Ken Kyle, directeur des questions d'intérêt public, Société canadienne du cancer: Mme Fry et moi sommes venus ici pour vous donner un aperçu de la situation et faire des observations sur le projet de loi. Nous espérons que nos propos seront utiles au comité sénatorial.

Permettez-moi d'abord de situer la question dans son contexte. Comme on l'a dit, je fais partie de la Société canadienne du cancer. Au cours des 15 dernières années, j'ai passé une bonne partie de mon temps à travailler à la priorité nationale de la Société canadienne du cancer, c'est-à-dire la lutte contre cette épidémie.

La Société canadienne du cancer doit relever des défis sans précédent. Même si on a réalisé des progrès importants dans la lutte contre le cancer, l'incidence générale du cancer et la mortalité chez les personnes atteintes de cette maladie demeurent élevées. Enfin, à l'heure actuelle, un Canadien sur trois fera l'objet d'un diagnostic de cancer au cours de sa vie.

Parmi les personnes atteintes de cancer, une sur deux mourra probablement de la maladie. Le vieillissement de la population ajoutera au fardeau que crée le cancer dans les années à venir, ce qui aura d'énormes effets sur notre régime de soins de santé, à moins d'interventions majeures.

Par exemple, les taux de mortalité provoqués par le cancer du poumon continuent d'augmenter chez les femmes. Ces taux sont maintenant près de cinq fois supérieurs à ceux de 1971. Cela est dû au fait qu'au cours des dernières décennies un nombre record de femmes ont commencé à fumer. On a découvert de nouvelles preuves montrant que la fumée du tabac a doublé les risques de cancer du sein chez les femmes en préménopause.

L'augmentation du nombre des fumeurs chez les adolescents est particulièrement inquiétante, car elle aura pour effet d'accroître l'incidence du cancer dans cette génération lorsqu'elle sera d'âge moyen et vieillira. Puisque l'usage du tabac est la cause de 30 p. 100 de tous les décès provoqués par le cancer, il n'est pas nécessaire d'avoir reçu un prix Nobel de sciences pour constater que le projet de loi S-20 sera une solution importante.

Mme Lorraine Fry, directrice générale, Association pour les droits des non-fumeurs: L'Association pour les droits des non-fumeurs est persuadée que l'un des éléments les plus importants de la lutte contre le tabagisme, c'est d'informer de la population sur l'étendue et la portée réelle des risques que pose l'usage du tabac.

La plupart des gens savent maintenant que le tabac peut provoquer la maladie et la mort, mais bon nombre d'entre eux ne savent pas encore que le tabac tue un de ses utilisateurs à long terme sur deux et que, dans la moitié des cas, ces victimes meurent en moyenne 23 ans plus tôt. La plupart des gens savent que la cigarette cause le cancer du poumon, mais ils ne savent pas qu'elle cause 30 p. 100 de tous les décès par cancer. La plupart des gens savent que les cigarettes causent 30 p. 100 de tous les décès par accidents cardiaques et cérébrovasculaires, ainsi que la plupart des maladies pulmonaires chroniques et mortelles, dont l'emphysème. Ils savent que le tabagisme est la principale cause de maladies évitables au Canada et que sa fréquence prend des proportions d'épidémie.

Pour lutter contre une épidémie, il faut des programmes audacieux, innovateurs, viables et bien financés. Puisque c'est chez les enfants et les adolescents qu'on retrouve à peu près tous les nouveaux consommateurs de tabac, la prévention du tabagisme chez les jeunes doit être un élément clé de la lutte pour enrayer l'épidémie.

Nous croyons que si le projet de loi S-20 est adopté, il contribuera beaucoup à réduire le tabagisme chez les mineurs.

M. Kyle: Mardi, on a parlé un peu d'une approche complète ou d'une attaque à plusieurs volets. Au cours des nombreuses années qu'ils ont consacrées à lutter contre le tabagisme, les organismes de santé du Canada ont appris qu'il faut mener de front plusieurs attaques différentes et complémentaires pour diminuer l'usage du tabac. Ces attaques doivent avoir diverses composantes, dont la recherche, les politiques et les programmes. Elles doivent être complètes et coordonnées, et être menées simultanément à l'échelle locale, provinciale, nationale et internationale.

Le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et les groupes qui oeuvrent dans le domaine de la santé ont fait un certain nombre de recommandations sur la lutte contre le tabagisme. Ces recommandations se fondent sur une approche de santé de la population et sur des recherches exhaustives. Elles pourraient avoir un effet positif pour tous les Canadiens. On y trouve entre autres des recommandations pour prévenir l'usage du tabac chez les jeunes, pour persuader les fumeurs de cesser d'utiliser des produits du tabac et pour les y aider, pour protéger les Canadiens en éliminant l'exposition à la fumée secondaire et pour informer les Canadiens au sujet des effets du tabac sur leur santé afin qu'ils adaptent leur comportement social au caractère dangereux et toxicomanogène de ces produits.

Le Parlement a adopté de bonnes mesures législatives qui créent un cadre utile, mais il y a trop peu de ressources financières pour mettre en place les programmes nécessaires à une approche complète. En fait, la moitié des moins de 20 millions de dollars mis chaque année à la disposition de Santé Canada pour lutter contre le tabac est consacrée à l'application des lois, et une grande partie du reste sert à payer les frais généraux d'administration et les honoraires d'avocats. Trop peu d'argent est consacré aux programmes.

Nous sommes venus ici pour vous montrer à quel point il est important que le Parlement adopte le projet de loi S-20 pour combler ce vide.

Mme Fry: Permettez-moi de parler un peu de la question des prélèvements par rapport aux taxes. La fondation qui sera créée par le projet de loi sera financée par l'industrie du tabac elle-même, comme vous le savez, au moyen d'un prélèvement sur les recettes des ventes de tous les produits du tabac.

Ce prélèvement permettra d'avoir un financement prévisible grâce auquel la fondation pourra réaliser ses activités. Le montant du prélèvement sera prévisible, selon la demande de produits du tabac, et il pourra être maintenu sur une longue période.

Les taxes sont des mesures financières imposées aux Canadiens pour lever des fonds afin que le gouvernement puisse respecter ses obligations et ses engagements.

Il n'est plus possible à ceux qui planifient les programmes de lutte contre le tabac de continuer à attendre dans l'angoisse chaque année des augmentations des taxes sur le tabac pour voir si, d'aventure, il y aura une augmentation correspondante du financement fourni à Santé Canada pour lutter contre le tabagisme.

Il est essentiel que le financement soit stable. Les experts américains vous l'ont répété à de nombreuses reprises l'autre soir.

Puisque les produits du tabac créent une dépendance, le tabagisme continuera encore longtemps à être un problème de santé publique. Il faut régler le problème de façon systémique et sur plusieurs années. Les programmes doivent se fonder sur des recherches, être lancés, mis en oeuvre et évalués. Les programmes qui ne donnent pas de résultats satisfaisants seront abandonnés, et, à partir de ce que l'on sait être efficace, on pourra créer de nouveaux programmes efficients.

Il existe de nombreux exemples de programmes prometteurs qui ont connu des problèmes graves lorsque leur financement a été brusquement interrompu. M. Kyle vous en décrira plusieurs.

M. Kyle: Je vais vous parler du RYATT. Voilà une excellente initiative de lutte contre le tabagisme qui, par manque de fonds, est empêchée de produire des résultats. L'été dernier, on a demandé à la Société canadienne du cancer de participer à un comité de direction fédéral-provincial pour traiter de la question de l'accès des jeunes au tabac. Après des mois de travail et un atelier de trois jours à Ottawa, on a élaboré une stratégie nationale complète pour régler le problème de l'accès des jeunes au tabac. Cette stratégie, qui porte le nom de RYATT -- Reducing Youth Access to Tobacco -- allait bien au-delà des initiatives qui visent à améliorer le respect des lois sur les ventes de tabac aux mineurs chez les détaillants.

Nous savons que les jeunes qui commencent à utiliser du tabac achètent rarement eux-mêmes leurs cigarettes. Ils les obtiennent généralement de leurs amis. Également, là où les détaillants respectent bien les lois, les jeunes fumeurs comptent davantage sur des adolescents plus vieux, sur de jeunes adultes, parfois même sur des étrangers ou sur leurs parents, pour obtenir des cigarettes. C'est ce que nous appelons l'approvisionnement par des tiers. C'est un élément important de l'équation, dont on n'a pas tenu compte jusqu'à présent.

Cette stratégie générale fournirait également aux collectivités des ressources pour régler les problèmes particuliers à leur milieu. On leur offrirait des trousses d'information, des images prêtes à publier, des documents éducatifs, et cetera. Malheureusement, les six mois de travail et de collaboration qui ont servi à élaborer cette stratégie n'ont donné absolument aucun résultat, par manque de financement.

Autre exemple, celui de la saga du Centre national de documentation sur le tabac et la santé. En 1988, on avait demandé à une organisation non gouvernementale du nom de Conseil canadien pour le contrôle du tabac de gérer un centre national de documentation sur le tabac et la santé. Ce centre était chargé de recueillir, de préparer, de résumer et de distribuer des renseignements sur le tabagisme aux intermédiaires du domaine de la santé. Parmi les outils offerts, il y avait une ligne téléphonique sans frais, un petit site Web et une collection de 25 000 livres qui étaient mis à la disposition des Canadiens qui vivent à l'extérieur d'Ottawa. Santé Canada a chroniquement sous-financé ce centre d'importance cruciale, en plus de ne prendre d'engagements financiers à son égard que pour une période d'un an à la fois. Cela a gravement limité l'épanouissement de ce centre de documentation.

Les groupes qui oeuvrent dans le domaine de la santé ont besoin d'un tel centre de documentation, pas seulement pour y trouver des renseignements, mais pour savoir aussi comment interpréter l'information et l'appliquer avec succès. Ce sera impossible tant qu'on ne versera pas le financement nécessaire.

Mme Fry: La surtaxe qui avait été annoncée lorsque les taxes sur le tabac ont été abaissées en 1994 est un autre exemple de financement qui avait été accordé et qui a ensuite été gravement limité. Le premier ministre avait annoncé qu'une surtaxe serait imposée sur les profits des fabricants de produits du tabac afin de lever 60 millions de dollars, sur une période de trois ans, pour financer le plus grand programme antitabac qu'ait jamais connu notre pays. Ce programme portait le titre de Stratégie de réduction de la demande de tabac. Dans les groupes de lutte contre le tabac, on l'appelait généralement SRDT.

Moins d'un an plus tard, cette promesse a été niée dans le budget fédéral du 27 février 1995. Le ministre des Finances a retiré 64 millions de dollars de ce programme dans le cadre de l'examen des programmes. Voilà que, moins d'un an plus tard, le tiers du financement était retiré. Peu après, le programme a subi un autre revers important. Un an plus tard, dans le budget du 6 mars 1996, le ministre des Finances a retiré le tiers du financement restant.

Une faible portion seulement des recettes provenant de la surtaxe, mais qui est maintenant permanente, a été et est encore utilisée à réduire le tabagisme. La surtaxe rapporte maintenant de 80 à 90 millions de dollars par année. Santé Canada reçoit moins de 20 millions de dollars de ces recettes.

M. Kyle: Mme Fry a parlé du ministre des Finances. Je vais maintenant vous parler honnêtement de préoccupations financières. Nous ne sommes pas sans savoir que ce projet de loi pose un dilemme au gouvernement. S'il est adopté, il est probable qu'un certain nombre de groupes communiqueront avec leurs sénateurs préférés afin que des prélèvements soient créés pour répondre aux voeux de l'industrie dans d'autres domaines de la politique. Cela posera des difficultés au gouvernement.

Il existe une solution à ce problème. S'il existe une volonté politique de lutter contre le tabagisme chez les jeunes, on pourrait, avec un peu de réflexion et d'efforts, élaborer des mécanismes qui permettraient au Parlement d'accepter à l'avance certains critères de participation qui s'appliqueraient à l'approbation d'un prélèvement. Par exemple, on pourrait créer un prélèvement qui servirait à financer la lutte contre des épidémies qui provoquent 20 000 décès par année, supposons.

Mais soyons honnêtes. Aucune autre épidémie que le tabagisme ne provoque 45 000 décès par an au Canada. Nous savons tous que ce prélèvement est une solution sur mesure à l'épidémie actuelle de tabagisme.

Cette épidémie n'appartient pas à la même catégorie que d'autres programmes sociaux qui connaissent peut-être un besoin criant de prélèvement. Elle est entièrement différente. Tous ceux qui examinent cette question constateront que c'est un problème particulier.

Le Parlement a jugé qu'il fallait imposer un prélèvement sur la vente des cassettes vierges, au profit des artistes du secteur de l'enregistrement. Personne ne s'oppose à ce que quelques dollars soient versés à Shania Twain ou à Céline Dion. Mais lorsqu'il s'agit de 45 000 décès par année, le problème est entièrement différent dans son ordre de grandeur et dans son importance.

Si les gens du domaine de la santé estiment que ce projet de loi est nécessaire, comme c'est le cas, si les médecins nous exhortent à continuer dans cette voie, comme c'est également le cas, si les sociétés de tabac sont prêtes à collaborer, comme elles le sont pour la plupart, s'il s'agit d'une solution à la crise financière de l'assurance-maladie, et ce l'est, si la santé est en tête de liste dans les priorités des Canadiens en matière d'intervention gouvernementale, comme c'est certain, si les fumeurs sont prêts à payer quelques cents de plus pour empêcher les jeunes de fumer, ce qu'ils sont certes prêts à faire, si le ministre de la Santé appuie les principes énoncés dans le projet de loi, comme il le fait, et si le premier ministre a promis de mettre sur pied le plus grand programme antitabac de toute notre histoire, comme il l'a fait en 1994, voici la question qu'il faudra se poser lorsque le projet de loi arrivera à la Chambre des communes: quelle sera la position du gouvernement du Canada?

Mme Fry: Je vais parler de la différence qui existe entre les organismes indépendants et le ministère de la Santé, et pourquoi nous appuyons une approche mise en oeuvre par un organisme indépendant.

Le fait que la fondation soit indépendante est très important et n'est pas sans précédent. Le Parlement a récemment créé les Instituts de recherche en santé du Canada, qui constituent une fondation indépendante.

L'avantage, c'est que les experts qui y travailleront seront libres de consacrer tout leur temps à chercher des solutions à ce problème complexe du tabagisme, puisque les programmes ne seront pas liés à l'échelon politique. Un organisme externe au gouvernement est en mesure d'essayer de nouvelles techniques innovatrices. Il peut constamment évaluer quelles techniques sont efficaces, lesquelles ne le sont pas, et apporter les adaptations nécessaires. Les politiques ne seront pas blâmés des échecs des programmes.

Il importe que l'approche ne soit pas politique, puisque personne ne comprend vraiment comment pensent les adolescents et qu'il faudra essayer différents programmes. Le tabagisme est un phénomène social complexe dans lequel s'entremêlent des facteurs physiologiques, psychologiques, culturels et sociologiques. Dans la recherche en santé, il est normal que bon nombre d'expériences échouent. Le ministre ne devrait pas avoir à défendre à la Chambre des communes chaque initiative.

Si les chercheurs font constamment l'objet de conjectures de la part des porte-parole de l'opposition, ils chercheront des solutions qui seront justes du point de vue politique plutôt que du point de vue scientifique.

L'ingérence politique a causé des problèmes dans tous les grands programmes de lutte contre le tabagisme aux États-Unis, et certainement dans ceux dont vous avez entendu parler l'autre soir. En Californie, l'assemblée législative a détourné des fonds. L'American Cancer Society a poursuivi le gouvernement de l'État, avec d'autres groupes, pour récupérer l'argent. Au Massachusetts, le gouverneur a personnellement censuré la publicité télévisée.

M. Kyle: Je vais maintenant vous parler des groupes spéciaux. Ce projet de loi permet d'offrir les fonds nécessaires pour répondre aux besoins de groupes spéciaux. Par exemple, on sait que le taux de tabagisme est plus élevé chez les francophones que chez les anglophones. Des fonds serviront également à offrir des programmes spéciaux pour aider les peuples autochtones. C'est chez les Autochtones qu'on trouve le plus grand nombre de fumeurs au Canada, comme l'a dit le sénateur Adams l'autre soir, et c'est une question qui préoccupe beaucoup la Société canadienne du cancer à titre d'organisme national.

Les enquêtes régionales en matière de santé réalisées en 1997 auprès des Premières nations et des Inuits signalaient que 62 p. 100 des membres des Premières nations fument, et ce taux est de 72 p. 100 chez les Inuits. Cela signifie qu'il y a deux fois plus de fumeurs dans ce groupe que dans l'ensemble de la population canadienne.

En outre, les jeunes commencent en moyenne à fumer dix ans plus tôt, au moins, dans ces populations.

Mme Fry: Les sommes proposées sont un autre élément important du projet de loi S-20. Bon nombre de gens se demandent s'il faut vraiment payer 360 millions de dollars pour lutter contre le tabagisme. C'est une somme énorme, mais ce n'est pas comme si cet argent était tiré de nulle part. Les experts nord-américains et ceux des Centers for Disease Control sont très compétents dans ces estimations de coûts.

Nous étions membres d'une coalition nationale de campagne d'action contre le tabac. La coalition a consacré d'innombrables heures à étudier les renseignements qui viennent non seulement des Centers for Disease Control, mais aussi de notre propre expérience, des sommes qui sont nécessaires à chaque programme pour mettre en place un système complet.

Nous ne croyons pas que la somme de 360 millions de dollars, qui serait fournie chaque année sous le régime du projet de loi S-20 pour réaliser les programmes nécessaires de sensibilisation de la population, soit exagérée. Le territoire du Canada est énorme, et les taux de tabagisme sont incroyablement élevés dans certains groupes, comme l'a fait remarquer M. Kyle. En outre, il n'y a pas de bons programmes à rabais.

Les Centers for Disease Control des États-Unis disent qu'un pays de la taille du Canada devrait dépenser de 9 $ à 24 $ par habitant pour lutter contre le tabagisme. Les 360 millions de dollars ne représentent que 12 $ par habitant. En fait, le sénateur Kenny a peut-être demandé trop peu, si les sommes levées se trouvent encore dans la tranche la plus basse de ce que recommande le CDC. Il aurait peut-être fallu demander 18 $ par habitant.

Le gouvernement fédéral perçoit 2,1 milliards de dollars par année en taxes sur les produits du tabac, dont 80 millions de dollars environ représentent les taxes sur la vente des produits à des mineurs. Le budget actuel de Santé Canada réservé à la lutte contre le tabagisme est, comme on vous l'a dit, d'à peine 20 millions de dollars par année pour combattre la cause la plus importante, mais pourtant évitable, de maladies, de mortalité et d'incapacité au Canada. Cela représente quelque 65c. par personne, à peine plus que le prix d'un timbre-poste.

Nous demandons ici 360 millions de dollars. Ce qu'il faut se rappeler, lorsqu'on parle d'un programme bien géré, durable et exhaustif de lutte contre le tabagisme -- qui coûte cher, il est vrai -- c'est qu'il peut être couronné de succès et peut finir par représenter des économies pour le gouvernement.

En Californie, on a dépensé un milliard de dollars sur dix ans, et on a constaté une diminution de la consommation de 50 p. 100 de 1989 à 1999, ce qui est phénoménal. Vous voyez, cela donne des résultats! Chaque dollar consacré à la lutte au tabagisme en Californie a permis à l'État d'économiser 10 $ en coûts directs et indirects.

Au Massachusetts, on a dépensé 15 $ par habitant. Le projet de loi S-20 ne demande que 12 $ par habitant pour la mise sur pied d'un programme exhaustif de lutte au tabagisme. Au Massachusetts, on a constaté une diminution de 35 p. 100 de l'ensemble des ventes de 1993 à 1999, soit à peine cinq ans. On a également constaté une diminution de la consommation de 30 p. 100 dans les écoles intermédiaires et de 20 p. 100 dans les écoles secondaires. Le tabagisme chez les femmes enceintes a chuté de 26 à 13 p. 100, et les taux de prévalence sont passés de 22 à 18 p. 100, les taux journaliers étant à 14 p. 100. En cinq ans, l'État a vu le nombre de ses fumeurs diminuer de 200 000, et on évalue à quelque 100 000 le nombre de décès prématurés qui ont été évités.

Le gouvernement fédéral prélève quelque 90 millions de dollars par année grâce à la surtaxe imposée aux fabricants de tabac. Le 8 février 1994, lorsque le premier ministre a annoncé la baisse de la taxe sur les produits du tabac, il a expliqué que les recettes engendrées par la surtaxe serviraient à financer la campagne antitabac la plus ambitieuse qu'ait jamais connue le Canada. Je vous ai décrit plus tôt ce qu'il était advenu de ces fonds.

Le projet de loi S-20 pourrait permettre au gouvernement de remplir cet engagement.

Le projet de loi S-13, parrainé par le sénateur Colin Kenny, l'homme modeste dont nous avons parlé plus tôt, et par la députée Caroline Bennett, a trouvé un large appui dans la population et chez les parlementaires. En octobre 1998, un sondage national d'Environics constatait que les Canadiens souscrivaient dans l'ensemble au projet de loi S-13 à hauteur de 76 à 17 p. 100. Lorsque le projet de loi a été invalidé pour des raisons techniques le 6 décembre 1998, le gouvernement a affirmé qu'il souscrivait toujours aux principes du projet de loi. Le milieu de la santé attend depuis ce jour que le gouvernement remplace par une autre initiative le projet de loi S-13. Or, deux budgets ont été déposés depuis, et rien n'a été fait pour augmenter les ressources servant à combattre le tabagisme.

M. Kyle: J'aimerais terminer en vous parlant de l'imputabilité. On a prévu plusieurs dispositions qui serviraient à examiner de façon systémique la façon dont le projet de loi est mis en oeuvre: un rapport annuel doit être déposé au Parlement; les administrateurs doivent être nommés par le ministre de la Santé, qui doit rendre des comptes au Parlement; un comité consultatif proposera des noms au ministre; un comité consultatif jeunesse conseillera le conseil d'administration; les réunions du conseil d'administration devront être publiques; les contrats de programme devront être publics; il faudra évaluer les programmes qui auront été financés; et dès lors que le nombre de mineurs fumeurs sera tombé à 5 p. 100 ou moins, le prélèvement sera réduit.

Mme Fry: Je voudrais terminer, pour ma part, en vous parlant de l'industrie du tabac. Nous avons assisté récemment à une nouvelle phase de la stratégie de certaines compagnies canadiennes de tabac visant les jeunes. Lorsqu'elles ont comparu ici même, ces compagnies ont affirmé vouloir lutter contre le tabagisme chez les mineurs, et il vaut en effet la peine de souligner l'appui public qu'elles ont donné au projet de loi S-20. Mais veuillez excuser notre scepticisme: il s'agit là de la même industrie qui a déclaré clairement dans un document aujourd'hui public qu'elle était disposée à faire certaines concessions, voire à perdre la bataille, afin de gagner la guerre; autrement dit, elle était disposée à jeter un os au gouvernement. Je parle ici d'une déclaration faite en 1973 par Imperial Tobacco. Nous espérons qu'il s'agit ici d'un repositionnement véritable de la part de cette industrie, et non pas uniquement d'un autre os jeté au gouvernement.

Pour montrer sa bonne foi, l'industrie du tabac pourrait prendre immédiatement des mesures destinées à combattre le tabagisme chez les mineurs: elle pourrait suspendre sa publicité de commandite, qui est tout simplement une autre façon de faire de la publicité de marque; elle pourrait promettre de faire don des profits qu'elle tire de la vente de ses produits aux mineurs, et décider d'informer activement les jeunes des dangers d'une accoutumance au tabac; et elle pourrait promettre de faire un don chaque fois qu'un mineur devient dépendant du tabagisme -- il faudrait que ce don dépasse de loin les profits à long terme que peut représenter sur son marché l'arrivée d'un nouveau fumeur. Nous allons suivre avec grand intérêt ce que fera cette industrie, au fur et à mesure qu'elle déploiera sa stratégie.

Entre-temps, honorables sénateurs, si vous adoptez le projet de loi S-20, ce que vous ferez sans aucun doute, votre décision représentera la première étape vers un programme de lutte contre le tabagisme durable, novateur et exhaustif qui pourrait littéralement sauver des centaines de milliers de vies, puisqu'il empêchera des jeunes de s'adonner au tabagisme.

M. Kyle: Lors d'une de vos séances précédentes, on a demandé à la Société canadienne du cancer ce qu'elle pensait des déclarations de l'industrie du tabac. Nous aimerions vous distribuer un document, pour répondre à votre demande.

En second lieu, nous avons également apporté un exemplaire pour chacun d'entre vous d'un document intitulé: «Compilation of Selected Evidence Regarding the Need for Comprehensive Tobacco Control Programs».

La présidente: Merci beaucoup de votre exposé. Il y a quelque chose que je devrais savoir, mais j'avoue mon ignorance. Quelle est la part des provinces dans la taxe sur les produits du tabac? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Kyle: Le gouvernement fédéral et les provinces prélèvent des taxes d'accise, de même que d'autres taxes sur les produits du tabac. Je pourrais obtenir pour vous les chiffres exacts et vous les faire parvenir, puisque nous avons des documents portant là-dessus. Le partage est à peu près à égalité.

La présidente: Cela nous serait très utile, car chaque fois que le Conseil des ministres de la Santé se réunit les provinces réclament plus d'argent. Je ne comprends pas pourquoi elles ne proposeraient pas de leur côté des programmes de prévention, puisque la plus grande ponction dans le budget provincial de la santé est due au tabagisme.

Le sénateur Banks: Madame Fry, lorsque vous avez évoqué la possibilité que le programme qui pourrait être mis sur pied dans la foulée de ce projet de loi-ci puisse échouer, je vous ai entendue dire qu'on ne pourrait blâmer de cet échec aucune personnalité politique. Ce n'est pas tout à fait vrai: on pourrait blâmer quelqu'un, et ce quelqu'un est assis en face.

Mme Fry: Je ne parlais pas vraiment de l'ensemble du programme.

Le sénateur Banks: C'était une blague, mais elle est tombée à plat.

Le sénateur Kenny: J'ai vaguement ri.

Le sénateur Banks: J'ai une question au sujet des tiers qui fournissent des produits du tabac. Une sanction est-elle prévue à l'égard de ceux qui vendent des produits du tabac aux mineurs, des revendeurs, en fait? Si j'achète personnellement un paquet de cigarettes, mais que je le donne à un jeune de 12 ans, ai-je enfreint la loi?

M. Kyle: Ce serait contraire à une loi fédérale. La plupart des provinces ont adopté des lois interdisant aux détaillants de vendre des cigarettes aux mineurs, et les sanctions varient d'une province à l'autre.

Je préférerais que les détaillants perdent leur permis de vente après avoir été pris trois fois à vendre du tabac à des mineurs. Autrement dit, une fois sanctionnés, ils seraient obligés de réorienter leurs clients vers d'autres vendeurs de tabac.

Le sénateur Banks: Un détaillant ne serait pas sanctionné s'il me vendait un paquet de cigarettes, car j'ai l'air d'avoir 18 ans.

M. Kyle: En effet.

Le sénateur Banks: Mais si j'ai personnellement acheté en toute légalité un paquet de cigarettes et que, à l'insu du détaillant, je le redonne à un enfant de 12 ans, ai-je enfreint la loi?

M. Kyle: Il existe une disposition en ce sens dans la Loi sur le tabac. Je pourrais peut-être demander à mon collègue avocat, Me Cunningham, de vous expliquer en détail la disposition.

M. Robert Cunningham, analyste principal de la politique, Société canadienne du cancer: Les provinces considèrent comme une infraction le fait d'approvisionner en produits du tabac un mineur. La Loi fédérale sur le tabac considère également comme une infraction le fait de fournir à un mineur des produits du tabac dans un endroit public.

Le sénateur Banks: Merci.

Le sénateur Christensen: Avez-vous des suggestions à faire sur la façon de cibler par nos programmes ces fournisseurs indépendants, les tiers?

M. Kyle: Oui, car cette question a longuement donné matière à réflexion. Je sais que les provinces ont rencontré le gouvernement fédéral en vue de réfléchir à l'élaboration de documents d'information destinés non seulement aux détaillants, mais également aux parents, aux familles, aux jeunes, ainsi qu'aux écoles, et cetera; toutefois, je n'ai pas beaucoup de détails là-dessus, car je n'ai pas pris part à ces réunions.

Autrement dit, le programme RYATT dont j'ai parlé plus tôt ne visait pas uniquement les détaillants. Il s'agissait d'une approche globale.

Certains de mes amis à Santé Canada ont demandé à être réaffectés ailleurs, car le ministère n'avait pas d'argent pour mettre en oeuvre le programme. Ces amis à moi avaient toutes sortes de bonnes idées à suggérer.

Le sénateur Christensen: L'information existe donc, et c'est uniquement un problème de financement.

M. Kyle: Il n'y a pas d'argent pour mettre en oeuvre le programme.

Le sénateur Banks: À votre connaissance, y a-t-il déjà eu des poursuites à l'encontre de quelqu'un, un tiers, qui aurait fourni -- je ne parle pas du vendeur -- des produits du tabac à des mineurs?

M. Cunningham: En effet, il y en a déjà eu, comme on a pu le voir récemment dans les actualités ontariennes.

Le sénateur Taylor: Le document que vous avez distribué répond justement à l'une des questions que je voulais poser.

Le document traite rapidement de la suspension éventuelle du permis de conduire. Vous expliquez que le gouvernement fédéral ne peut agir dans ce dossier, puisque le permis relève des provinces, mais vous expliquez également que le projet de loi pourrait être élargi pour permettre aux provinces d'intervenir. Si nous obtenons la coopération des provinces, on pourrait songer en effet à la suspension du permis de conduire.

J'en arrive à une autre question qui m'intrigue. Les programmes américains mentionnés sont gérés par les États. Serions-nous en train de nous tromper de cible en demandant uniquement au gouvernement fédéral d'agir?

Mme Fry: Les experts qui ont témoigné ont expliqué de façon catégorique que la meilleure stratégie possible devait être fédérale, bien coordonnée et intégrée, même si elle devait prévoir des subventions aux provinces. Il est certain que les provinces sont mieux placées pour agir dans certains domaines, car elles connaissent leur territoire géographique mieux que les autres. Toutefois, les experts ont établi clairement qu'il doit y avoir une stratégie nationale, mais qu'elle doit être intégrée et coordonnée avec les provinces, qui recevraient des subventions.

Le sénateur Taylor: Cela fait plusieurs années que la question des montants déductibles aux fins de l'impôt m'embête. Nous sommes aux prises avec une industrie qui cherche délibérément à faire de nos jeunes des toxicomanes. Or, cette industrie peut déduire les coûts de la publicité dont elle se sert pour parvenir à ses fins. Même les pires mafieux ou barons de la drogue n'ont pas cette chance et ne peuvent déduire de tels montants; et pourtant tous les intéressés semblent souscrire à l'idée que l'industrie du tabac doit pouvoir défalquer de son revenu imposable les montants que lui coûte la publicité servant à convaincre les jeunes comme les adultes de fumer.

Or, si un agriculteur décide d'ouvrir un magasin de nettoyage à sec dans une petite ville, il n'aura pas droit à une déduction de ce genre, car cela sera considéré comme injuste. Comment expliquer que l'industrie du tabac ait droit à ces déductions alors que sa publicité sert à convaincre les enfants de l'agriculteur de fumer?

Vous êtes-vous prononcés là-dessus? Je sais que cela ne se trouve pas directement dans le projet de loi, mais cela m'ennuie de voir cela.

M. Cunningham: Vous avez raison du point de vue juridique. Les fabricants de tabac ont le droit de déduire leurs dépenses de mise en marché, ce qui réduit le montant de taxes qu'ils versent au gouvernement.

Plusieurs projets de loi ont été déposés au Congrès des États-Unis en vue d'éliminer cette déduction fiscale de la publicité des produits du tabac, mais ils n'ont pas été adoptés. Il existe toutefois de la documentation là-dessus.

Le milieu canadien de la santé a déjà dit publiquement qu'il souscrivait à une proposition similaire, mais rien n'a encore été fait.

Le sénateur Taylor: On pourrait peut-être agir l'année prochaine, une fois cette initiative-ci lancée.

On parle beaucoup du syndrome de l'alcoolisme foetal, qui nuit au développement scolaire de l'enfant. Vos organisations ont-elles fait de la recherche sur ce que l'on pourrait appeler le «syndrome de la nicotine foetale»? Cela existe-t-il?

M. Kyle: Oui. Nous nous inquiétons beaucoup du tabagisme chez les femmes enceintes. On sait que le tabagisme explique le poids insuffisant d'un bébé à la naissance, et que cela cause à son tour d'énormes problèmes tout au long de la vie. Le tabagisme constitue un énorme risque pour les femmes enceintes, puisqu'il nuit au développement de leurs bébés. Je puis vous envoyer des études qui ont été effectuées là-dessus, si cela vous intéresse.

Le sénateur Taylor: Oui, je vous en remercie.

Le sénateur Adams: Monsieur Kyle, je vous remercie des chiffres que vous nous avez donnés au sujet du tabagisme deux fois plus élevé chez les Inuits ou les Autochtones que dans le reste du Canada; 72 p. 100, c'est très élevé. Il y a plusieurs mois, le ministre de la Santé proposait l'inscription sur les paquets de cigarettes de nouvelles mises en garde. Or, les mises en garde existent déjà depuis plusieurs années, et elles mentionnent notamment le cancer du poumon et autres problèmes de santé.

Chaque fois que l'on demande aux fabricants de tabac s'il y a un lien entre les deux, ils nous répondent qu'ils ne sont pas des scientifiques et ne peuvent confirmer que le tabac cause le cancer. Beaucoup de mes amis dans le Nord se meurent du cancer du poumon. Un d'entre eux a même perdu un de ses poumons, mais continue à fumer. C'est très difficile. Un des Américains qui sont venus témoigner l'autre jour nous a expliqué que sa femme se mourait du cancer du poumon et continuait tout de même à fumer, même si elle ne pouvait plus se déplacer.

Il y aura de meilleures mises en garde sur les paquets de cigarettes. Mais les gens connaissent-ils vraiment les risques? Est-ce que cela les préoccupe vraiment? Les mises en garde sur les paquets de cigarettes servent-elles vraiment à quelque chose?

M. Kyle: Nous avons fait de la recherche là-dessus, et je demanderai à notre analyste de la politique de vous parler de l'efficacité des nouvelles mises en garde.

M. Cunningham: Outre la recherche menée par Santé Canada, les groupes de consultation de jeunes et d'adultes de la Société canadienne du cancer, ainsi que les études nationales qualitatives, ont démontré clairement que les photos étaient des messages de choc beaucoup plus efficaces que le texte à lui seul. Les recherches ont également démontré que plus la mise en garde occupait de l'espace, plus efficace elle était. Voilà pourquoi les nouvelles dispositions sur l'étiquetage sont remplies de promesses, y compris pour les Canadiens qui ne parlent ni anglais ni français, puisqu'une image vaut mille mots dans toutes les langues.

Le sénateur Wilson: Vous avez dit qu'il était nécessaire d'évaluer les programmes, mais vous avez mentionné aussi la possibilité d'ingérence politique. Qui sera le chien de garde? Je sais que le grand public le sera, mais existe-t-il un groupe particulier qui surveillera de près ce qui se produira, dans la mesure où le projet de loi sera adopté?

Mme Fry: M. Kyle vous a parlé des mesures d'imputabilité. Il existera un conseil d'administration, et un rapport annuel sera aussi déposé.

Le sénateur Wilson: Qui exercera le suivi? Je sais ce que cela représente que de mettre sur pied des fondations. Qu'est-ce qui vous garantit que ce que vous proposez se produira?

Mme Fry: Le rapport annuel doit être déposé au Parlement, comme le prévoit le projet de loi.

Le sénateur Wilson: Cela veut-il dire que les parlementaires sont censés le lire et assurer une surveillance?

Mme Fry: Le ministre de la Santé nomme les administrateurs et doit rendre des comptes au Parlement. Le comité consultatif conseille le ministre et suggère des noms. S'il devait survenir de graves problèmes, vous voulez savoir qui doit assumer la responsabilité?

Le sénateur Wilson: C'est cela, oui, et j'aimerais que vous me parliez d'ingérence politique.

Mme Fry: J'imagine que la responsabilité réside entre les mains des sénateurs qui ont déposé le projet de loi, puisque le projet de loi émane d'ici. Je dirais que nous sommes les chiens de garde dans le milieu canadien de lutte contre le tabagisme. Si nous voyons que les choses tournent au vinaigre, nous agirons. Des centaines et des centaines de rapports sont déposés annuellement au Parlement. Mais ils peuvent passer complètement inaperçus.

Le sénateur Wilson: C'est exact.

Mme Fry: Toutefois, si nous pensons que les choses ne vont pas comme elles le devraient, nous pourrions toujours le signaler à l'attention du Sénat. Nous pourrions aussi le signaler aux autres parlementaires. Nous pourrions signaler le rapport annuel à leur attention et demander la tenue d'une réunion à ce sujet.

Le sénateur Wilson: Très bien. C'est ce que je voulais savoir. On publie souvent des rapports annuels en pensant que cela résout le problème, mais ce n'est pas le cas.

Mme Fry: Si cela se produisait, nous ferions partie des principaux intervenants.

Le sénateur Taylor: Le projet de loi permettrait-il d'offrir des fonds à vos organismes au titre de la surveillance? Cela aurait sans doute un effet sur votre capacité de surveillance.

M. Kyle: Permettez-moi de répondre à cette question. La Société canadienne du cancer n'a jamais reçu de financement du gouvernement. Nous recueillons nos fonds grâce à une campagne annuelle de sollicitation porte-à-porte, à la vente de jonquilles, et cetera. Santé Canada nous a demandé à l'occasion d'évaluer un programme scolaire, par exemple. Toutefois, nous serions tout à fait prêts à suivre cette situation.

D'après les témoignages, l'American Cancer Society de la Californie ne reçoit pas d'argent du gouvernement. D'après les discussions que j'ai eues avec certains des témoins qui font partie de ce programme d'État, je puis dire que c'est un élément que nous devons surveiller de près. Cela me préoccuperait.

Nous estimons pour notre part que nous avons une surveillance à exercer dans ce dossier. La lutte contre le tabagisme est l'une des cinq priorités nationales de la Société canadienne du cancer. Notre conseil national examine chaque année quels sont les taux de tabagisme et quels sont nos résultats. Nous exerçons un effort continu et ciblé. Vous soulevez toutefois un bon argument. Nous devrons suivre cette question.

Mme Fry: L'Association pour les droits des non-fumeurs ne reçoit pas actuellement de financement de Santé Canada. Cela ne nous a certes pas empêchés d'exprimer clairement ce qui doit être fait, à notre avis, pour lutter contre le tabagisme. Il faut toutefois noter que nous recevons des fonds pour la réalisation de projets particuliers qui ne font pas partie de nos activités de défense des droits ou de nos campagnes de lobbying contre le tabac.

Notre organisme effectue beaucoup de recherches. Nous avons de nombreuses activités autres que le lobbying et la défense des droits, et Santé Canada nous verse des fonds pour ces activités. Cet argent ne sert jamais à payer nos activités de lobbying et de défense des droits. Je suppose qu'il en serait de même si notre financement venait de la fondation plutôt que de Santé Canada.

Le sénateur Taylor: Merci. Je pensais qu'il faudrait apporter à ce sujet un amendement à un moment donné, mais nous verrons bien ce qu'il faudra faire lorsque nous en serons là.

Il y en aura bien d'autres pour vous dénoncer si vous recevez de l'argent et si vos analyses ne sont pas suffisamment rigoureuses.

Le sénateur Banks: Nous nous sommes laissés entraîner dans un tourbillon de questions supplémentaires. Outre le danger qu'a constaté le sénateur Wilson, il en existe un autre dans ce que vous dites, madame Fry. Vous dites que même si votre financement venait de ce prélèvement, dans le nouveau régime, vous continueriez d'exercer une surveillance. Les gouvernements de tous les ordres ont toujours tendance à se retirer du financement s'ils peuvent trouver quelqu'un d'autre pour le faire.

Le sénateur Taylor: On dit que les gouvernements se «déchargent».

Le sénateur Banks: Peu importe. Croyez-vous que cela pourrait se produire? Vous inquiétez-vous de ce que, lorsque vous ferez du porte-à-porte ou vendrez des jonquilles, les gens refuseront de faire des dons ou d'acheter parce que vous n'aurez plus besoin d'argent, puisque vous recevrez déjà un financement à partir de ce prélèvement?

Je conviens que 360 millions de dollars, si c'est bien la somme, devrait suffire à mener une campagne nationale efficace. Cela ne m'inquiète pas, parce qu'une campagne nationale permet de réaliser des économies d'échelle.

La présidente: La Californie compte autant d'habitants que le Canada.

Le sénateur Banks: Oui, c'est vrai, mais elle ne peut pas faire autant d'économies d'échelle au titre de la portée des médias.

Je crains que vos autres sources de revenu ne diminuent à cause de ce prélèvement, que ce soit l'argent qui vient du gouvernement ou celui qui vient de la population.

M. Kyle: D'après une recherche effectuée par la Société canadienne du cancer, la plupart des gens achètent des jonquilles ou font des dons pour aider les familles frappées par le cancer. Nous offrons une gamme complète de services aux patients, dont, entre autres, le transport gratuit aux établissements de chimiothérapie. Je ne crois pas que l'argent versé par une fondation au titre de la lutte contre le tabagisme empêcherait la population de vouloir aider à trouver un remède et aider les familles aux prises avec le cancer grâce à des services de soutien émotionnel et d'autres mesures de ce genre.

Je ne crois pas que cela nuira à nos levées de fonds.

Mme Fry: À mon avis, ce projet de loi et la nouvelle fondation amélioreront nos chances d'avoir un financement continu. Nous sommes reconnaissants de ce qu'à l'heure actuelle Santé Canada finance trois organismes nationaux de lutte contre le tabac. Hier soir, on nous a dit exactement à quoi servait cette somme d'un peu moins de 20 millions de dollars et à quel point la situation est désespérée à Santé Canada. C'est presque un miracle que le ministère réussisse chaque année à trouver l'argent nécessaire pour financer ces trois organismes.

Le sénateur Banks: Croyez-vous que le ministère continuera de les financer si le projet de loi est adopté et a force de loi?

Mme Fry: Nous aurons la possibilité d'obtenir de l'argent par la fondation. Il y a de meilleures possibilités d'obtenir un financement continu, comme en ont d'autres excellents organismes de santé dans tout le Canada -- si le budget est de 360 millions de dollars plutôt que d'environ 19 millions de dollars. Il y aura une caisse plus importante où aller chercher le financement. Certaines dispositions du projet de loi permettraient de financer des organismes qui possèdent les compétences nécessaires pour lutter contre le tabagisme. Notre organisme possède 25 ans d'expérience et de connaissance.

Le sénateur Banks: Je comprends, mais croyez-vous qu'une fois ce programme en place tout ira bien, qu'il y aura 360 millions de dollars de disponibles et que Santé Canada continuera d'offrir aux trois organismes dont vous avez parlé un financement d'environ 20 millions de dollars par année -- en sus de l'argent provenant des taxes? Croyez-vous que cet argent continuera d'être versé pour financer les programmes de lutte contre le tabac de ces organismes?

Mme Fry: Le ministère ne verse qu'un peu plus d'un million de dollars pour financer les organismes de lutte contre le tabagisme. Les 18 autres millions de dollars servent à une foule d'autres choses -- il y a des versements aux provinces pour l'exécution des lois, le paiement des honoraires judiciaires pour défendre la loi, et toute une gamme d'activités de programmes. Si la fondation est créée et que son mandat consiste en partie à recevoir les demandes de financement des organismes, il se pourrait bien que Santé Canada cesse de financer les organismes de lutte contre le tabagisme. Toutefois, c'est la fondation qui reprendrait cette fonction. S'il y a 360 millions de dollars de disponibles plutôt que 19 millions de dollars, il y a bien plus de chances d'avoir un financement continu.

Le sénateur Banks: Prévoyez-vous que le gouvernement essaiera de se retirer de ce financement d'un million de dollars?

Mme Fry: Lorsque la fondation sera créée, il faudra coordonner ce que Santé Canada continuera de faire et ce que fera la fondation. Puisque la fondation sera un organisme de financement, il serait logique qu'elle finance les organismes de lutte contre le tabac.

Le sénateur Taylor: La réponse du conseiller juridique au sujet des déductions fiscales était très intéressante. Est-il possible de savoir quel montant les sociétés de tabac déduisent chaque année de leur revenu au titre de la publicité?

M. Cunningham: D'après les renseignements que nous possédons, les dépenses de commercialisation de ces sociétés étaient de 150 à 200 millions de dollars par année, en 1997.

Le sénateur Taylor: Cela signifie que ces 200 millions de dollars sont déduits dans le calcul des bénéfices?

M. Cunningham: C'est exact.

Le sénateur Taylor: Puisqu'elles paient un impôt sur le revenu de 50 p. 100, cela signifie que la population du Canada paie non seulement les autres coûts, mais donne aussi à ces sociétés une prime de 100 millions de dollars pour leur publicité.

M. Cunningham: Les contribuables canadiens subventionnent la mise en marché des produits du tabac.

Le sénateur Taylor: Cela représente environ 100 millions de dollars. C'est un renseignement très intéressant.

La présidente: L'un des modèles qui nous ont été présentés par les Américains, et celui qui m'a le plus impressionnée, c'est celui de la Floride. Ce qui m'a frappée, c'est que ce genre de modèle puisse effectivement captiver l'imagination du pays tout entier peut-être plus que tout autre.

Que pensez-vous de l'idée de permettre aux jeunes gens de diriger des activités et d'utiliser des organismes comme le vôtre pour mettre ce genre de plans à exécution?

Mme Fry: Je pense que chaque cas est un cas d'espèce. Les programmes mis en place en Floride l'ont été dans la fonction publique, mais, à l'époque, le gouverneur a vraiment montré l'exemple de façon extraordinaire dans la lutte contre le tabagisme. La personne qui vous a entretenus du programme réalisé en Floride, M. Chuck Wolf, était le chef de cabinet du gouverneur avant de prendre la direction du programme.

Le cas de la Floride était très particulier dans la mesure où les milieux politiques s'étaient vraiment mobilisés autour du programme, un programme que je ne connais malheureusement pas en détail. J'aurais par ailleurs quelques hésitations concernant un conseil d'administration. Les États-Unis ont beaucoup d'avance sur nous pour ce qui est de reconnaître l'ampleur et la nature du risque en cause. Je serais probablement plus favorable à l'idée de commencer par un conseil consultatif des jeunes, comme le prévoit le projet de loi, par un conseil d'administration composé d'adultes et de jeunes gens. Je n'aurais pas de difficulté à y voir deux représentants jeunesse plutôt qu'un. À ce moment-là, nous pourrions peut-être tenter quelque chose de plus imaginatif dès lors que la fondation aurait été créée et aurait commencé à fonctionner.

Voilà ce que je vous dirais donc à brûle-pourpoint. Ce que la Floride a réussi à faire est fabuleux, mais la Floride n'est pas le Canada. Le Canada est loin derrière pour ce qui est de la prise de conscience générale, et le programme qui a cours en Floride conviendrait peut-être mieux comme une deuxième phase, lorsque la fondation aura pris son envol.

M. Kyle: Je suis d'accord avec Mme Fry. Si la fondation a les coudées franches et s'il n'y a pas d'ingérence de la part de l'État, il serait possible à ce moment-là de financer certains projets et certains groupes pilotés par des jeunes gens, et on verrait bien à ce moment-là ce que cela donnerait. C'est précisément pour cela qu'il faut prendre du champ par rapport au gouvernement. Si les jeunes sortent des sentiers battus et font quelque chose d'un peu inusité, vous ne voudriez pas que les partis d'opposition prennent à partie le ministre de la Santé aux Communes par exemple. Moi je serais tout prêt à permettre aux jeunes gens de faire une demande de financement et de faire concurrence aux autres groupes.

Le sénateur Banks: Dans le droit fil de votre question, madame la présidente, il me semble que ce qu'on vous a dit à propos du programme réalisé en Floride vous pose problème en ce sens que, puisqu'il s'agit d'un programme qui vise les jeunes gens, il devrait être placé sous la direction d'un groupe de jeunes, le pouvoir ou la responsabilité qui en découle ne devant ainsi ni être dilué, ni contrôlé. En effet, si je me souviens bien, on nous avait dit qu'à moins que la fondation ne donne véritablement des moyens d'action aux intervenants qui feraient partie du programme, ces derniers baisseraient les bras. Voilà l'impression que j'ai eue, et il me semble que vous nous dites maintenant: «Non, il faut que cela reste sous le contrôle de quelqu'un d'autre.»

J'aimerais donc savoir si quelqu'un a déjà une idée de la composition de l'équipe qui serait amenée à diriger la fondation. Quels seraient les intervenants? Avez-vous des noms en tête, et s'agirait-il d'autre chose que d'un conseil d'administration, à l'instar du modèle qui existe en Floride?

Mme Fry: Selon le texte actuel du projet de loi, il y aurait un conseil consultatif de jeunes chargé de conseiller le conseil d'administration, lequel compterait un jeune.

Je ne suis pas du tout opposée au modèle de la Floride. Je trouve au contraire qu'il est extraordinaire. M. Wolf a fort bien dit qu'il y avait des experts pour les conseiller sur les projets proposés. Ces gens-là ne travaillent pas dans l'abstrait. Ils ont des experts pour les conseiller, pour les aider.

Je veux simplement dire que la situation aux États-Unis est très différente de ce qu'elle est au Canada. Il y a eu aux États-Unis énormément de poursuites et autres règlements -- le bill McCain, la réglementation de la FDA. Il y a eu aux États-Unis toute une série de développements extraordinaires qui ont permis de faire changer à la fois le contexte et le niveau de sensibilisation de la population dans le dossier du tabagisme chez les enfants, et en particulier une série de grosses campagnes publicitaires dans les médias. Il y a eu le «train de la jeunesse» et toutes ces autres initiatives qui ont été décrites par Chuck Wolf. Il y a eu énormément de battage dans les médias, des annonces publicitaires à la télévision et, même avant cela, une foule d'autres choses. Ainsi, les adultes comme les jeunes ont pris conscience du problème du tabagisme, de l'ampleur et de la gravité du risque, et cetera. Nous, au Canada, nous sommes un peu en retard. Nous devons maintenant préparer le terrain et faire en sorte que la fondation commence par améliorer le degré de sensibilisation de la population. Je ne vois pas pourquoi vous ne pourriez pas avoir un degré de participation et de contrôle beaucoup plus important de la part des jeunes. Cela serait-il utile?

Le sénateur Taylor: Oui.

Mme Fry: Nous sommes différents. Comme nous n'arrêtons pas de le dire, nous ne sommes pas des Américains. Nous nous plaisons souvent à penser que nous sommes en avance sur eux, mais ici je ne pense pas que ce soit le cas. Nous sommes en retard.

Le sénateur Banks: Ce projet vise la jeunesse. Il y a une chose que nous savons tous, du moins lorsqu'on a des cheveux comme les miens, c'est que nous ne comprenons pas les jeunes. Ils se comprennent eux-mêmes mieux que nous. Je ne suis nullement un écolo, peu s'en faut, mais il n'empêche que c'est vrai. C'est ce que nous montre le modèle de la Floride. Ne serait-il pas possible de leur donner tout l'appui, toute l'expertise et toute l'orientation nécessaires, plutôt que de leur imposer un contrôle paternaliste, afin précisément qu'ils puissent en profiter pour relever le gant?

Mme Fry: Cela mérite qu'on s'y attarde. L'un des risques d'un conseil consultatif, et nous l'avons déjà vu jadis, c'est qu'il provoque parfois chez certains un sentiment de marginalisation, mais aussi que les décisions sont prises ailleurs. Il serait peut-être préférable de procéder ainsi dans un deuxième temps plutôt qu'au moment de la mise en route.

La présidente: Je vous remercie d'être venus ce matin témoigner devant nous. Nous allons maintenant entendre le sénateur Nolin et le sénateur Colin Kenny nous récapituler leur argumentation.

Sénateurs, la parole est donc à vous avant que nous concluions cette étude.

[Français]

Le sénateur Nolin: Vous avez, avec beaucoup d'assiduité et de courage, entendu une série de témoins qui vous ont démontré que cette malédiction qu'est la propagation du tabagisme chez les jeunes est certainement une malédiction qu'on peut à tout le moins tenter, et même réussir à contrer.

Vous avez aussi, j'espère, été convaincus que la recette miracle pour réussir cet objectif est une infusion importante de fonds qui serviraient à financer une série de programmes positifs. J'ai écouté plus tôt la discussion autour de l'implication des jeunes dans la programmation de ces divers types d'outils qui devraient être rendus disponibles via la fondation, et je suis fort aise de voir l'allure de la discussion qui prévalait.

Nous avons tous été agréablement surpris par la prise de position des trois manufacturiers canadiens des produits du tabac. Nous devons prendre bonne note de leurs témoignages et ne pas hésiter à requérir leurs services, qu'ils nous ont offerts, dans la poursuite de notre croisade. Je laisse maintenant la parole au sénateur Kenny.

[Traduction]

Le sénateur Kenny: Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant vous. Je voudrais remercier le comité, qui a procédé à un examen aussi approfondi du projet de loi. Je vous remercie d'y avoir consacré autant de temps et d'assiduité.

Avant de revoir avec vous certains des éléments saillants du projet de loi, je voudrais vous dire quelques mots au sujet de certains des témoins que vous avez entendus et faire valoir à ce sujet quelque chose d'utile, étant donné que la question s'est posée dans le contexte de la responsabilité. Si le projet de loi aboutit -- et j'ai cette conviction -- en quoi les différents groupes auront-ils un rôle à jouer pour en suivre l'exécution?

Vous avez entendu des témoins qui ont vertement critiqué les agissements du gouvernement, mais qui, pourtant, reçoivent des subventions de l'État. Ils ont été extrêmement courageux. Honnêtement, ces gens risquent de perdre leurs subventions. Ce que je sais de la collectivité, c'est que les choses avancent rondement. Les gens ne mettent pas de gants. Ils donnent franchement leur avis, peu importent les conséquences.

Vous avez entendu des gens qui pourraient fort bien voir un gouvernement, par esprit de vengeance, s'en prendre à leur financement. Nous devons être vigilants à ce sujet. Certains témoins nous ont offert leur position en toute franchise, sachant fort bien qu'il pourrait y avoir un bureaucrate ou quelqu'un au gouvernement qui, dès demain, décider de serrer la bride à leur financement. Je pense que nous avons l'obligation de rester attentifs à cela.

S'agissant maintenant de surveiller les résultats après l'adoption du projet de loi, si adoption il y a, c'est précisément là le rôle des sénateurs. Nous sommes parfaitement libres d'ouvrir et de rouvrir n'importe quel dossier. C'est cela la beauté du Sénat. Il est arrivé que des comités du Sénat reconvoquent des témoins et apportent à l'occasion des correctifs lorsque les choses n'évoluaient pas comme ils l'auraient voulu. L'avantage que nous avons par rapport à l'autre Chambre, c'est que nous pouvons reconvoquer des témoins et les reconvoquer encore si quelque chose ne va pas ou si on ne nous donne pas les réponses que nous voulons. Je pourrais vous citer de nombreux exemples dans ce sens, des cas où nous avons réussi à faire changer les choses lorsque le rapport initial avait été ignoré. Dans notre système, voilà un rôle qui convient parfaitement au Sénat, un rôle que nous devrions être prêts à assumer.

Pour ce qui est maintenant du projet de loi, je pense que les sénateurs ont en général une bonne idée de ses éléments principaux et de sa structure. Je ne pense donc pas qu'il soit utile que j'en redonne une description détaillée.

Le témoignage donné par Chuck Wolf à propos de la situation et du modèle qu'on trouve en Floride avec la participation des jeunes a suscité énormément d'intérêt.

Je voudrais ajouter quelques éléments pour votre gouverne. En fait, il s'était agi d'une initiative du gouverneur Lawton Chiles, qui avait gagné son sobriquet, «Walkin' Lawton», en parcourant à pied tout l'État de la Floride et en menant une campagne populiste extrêmement réussie qui lui avait permis de se faire élire.

Ce n'est pas par hasard que Chuck Wolf faisait partie du groupe. C'est un superbe communicateur, et il avait un superbe programme.

Il n'est pas inutile non plus de rappeler que, le jour où le gouverneur Chiles est décédé, le nouveau gouverneur, Jeb Bush, a mis la hache dans le programme. Il l'a démantelé et l'a éliminé. Cela, c'est une partie de l'histoire qu'on n'a jamais sue. Je voudrais signaler qu'il y a également deux autres programmes qui ont été extrêmement productifs, en Californie et au Massachusetts, mais qui ne suivent pas le même modèle. Cela ne veut pas dire que je ne sois pas d'accord avec ce qui a été fait en Floride, mais nous avons en l'occurrence ici quelque chose qui va beaucoup plus loin. Lorsqu'on passe de 66c. par habitant à 12 $ par habitant, lorsqu'on fait passer le programme du secteur public au secteur privé, nous demandons au système de s'adapter assez considérablement à quelque chose qui est radicalement différent de ce à quoi on avait coutume de s'attendre.

Je demanderais donc ceci aux membres du comité: voulez-vous ajouter encore une bureaucratie supplémentaire, et pensez-vous que cela rendra les choses plus faciles?

Je pressens déjà un grand nombre de problèmes. Je vous signale que le conseil d'administration devra avoir un membre issu de la jeunesse. Le conseil d'administration pourrait fort bien être composé entièrement de jeunes gens, mais il faut qu'au moins un de ses membres soit issu de la jeunesse. Selon le texte actuel du projet de loi, c'est le ministre qui nommera les membres du conseil.

Le comité a le loisir de formuler une recommandation. Nous avons manifestement dans nos attributions la possibilité de modifier le projet de loi si le comité le souhaite. Je vous demande de tenir compte de ce que vous a dit M. Wolf à ce sujet, en l'occurrence qu'il était l'un des trois. Vous avez également eu des exposés sur deux autres programmes fort réussis.

Je recommanderais au comité, s'il y consent, de ne pas procéder à l'examen article par article après cette séance-ci, mais plutôt de conserver le projet de loi en instance pendant tout l'été. Nous devons encore recevoir un certain nombre de mémoires. En procédant de la sorte, nous pourrions également en demander d'autres pendant l'été, ce qui est d'ailleurs l'une de nos prérogatives si nous souhaitons nous en prévaloir. Ainsi, nous aurions également l'occasion de convoquer ou de reconvoquer certains témoins pendant l'été si nous le voulions.

Nous en convenons tous, il est peu vraisemblable que le projet de loi puisse être renvoyé par le Sénat à la Chambre des communes, étant donné l'ampleur de notre programme législatif actuel. Il serait donc préférable de conserver le projet de loi en instance jusqu'au mois de septembre et de conclure nos travaux à ce moment-là, au lieu de nous hâter de le faire maintenant, avec pour seul résultat que le projet de loi ne bougerait pas de toute manière, mais que nous n'aurions pas non plus la possibilité de faire quoi que ce soit si quelque chose survenait d'ici trois ou quatre mois.

Personnellement, je me sentirais plus à l'aise si le comité l'avait toujours à son programme pendant l'été.

Mon collègue, le sénateur Nolin, et moi-même serions heureux de répondre maintenant à vos questions.

La présidente: Avant de donner la parole au sénateur Sibbeston, je vous demanderais de bien vouloir préciser un point. Il est évident que personne qui siège au conseil d'administration d'un organisme, quel qu'il soit, ne peut recevoir de subventions de l'organisme en question. Y a-t-il quelque chose à ce sujet dans le projet de loi, ou y avez-vous pensé?

Le sénateur Kenny: Nous y avons beaucoup réfléchi, madame la présidente, et je pourrais probablement vous citer de mémoire la disposition en question à la virgule près.

Pour l'essentiel, s'agissant des règles de gouvernance, aucun membre du conseil ne peut participer à quelque décision que ce soit concernant l'octroi d'une subvention. Les membres du conseil ne peuvent pas participer à la discussion, ils ne peuvent pas participer aux délibérations conduisant à l'octroi d'une subvention. Ils doivent donc s'exclure des discussions.

C'est déjà ce qui se passe dans le cas des banques, par exemple, puisqu'on demande aux membres du conseil de sortir de la salle lorsque le conseil se saisit d'un dossier dans lequel ils ont un intérêt. Nous avons des dispositions similaires au Sénat.

L'article 25 dit ceci:

(1) Chaque membre du conseil d'administration est tenu de déclarer par écrit à celui-ci tout intérêt qui pourrait donner lieu à un conflit d'intérêts par rapport à la charge qu'il occupe auprès de la Fondation.

(2) Tout poste, charge, contrat ou autre intérêt que le membre détient directement ou indirectement, soit personnellement, soit par l'intermédiaire d'une personne liée, et dont il a connaissance doit être déclaré conformément au paragraphe (1).

(3) La déclaration prévue au paragraphe (1) est fait au moment où la personne devient membre du conseil d'administration et chaque fois qu'un intérêt dont la déclaration est obligatoire est acquis ou porté à l'attention du membre.

(4) Le membre à l'égard duquel un contrat, une subvention, un projet ou toute autre question à débattre au conseil d'administration créerait un conflit d'intérêts est tenu, avant les délibérations sur le sujet, de déclarer la nature et l'étendue de son intérêt personnel et de se conformer aux consignes données par le conseil d'administration en application du paragraphe (5).

(5) Le conseil d'administration donne des consignes au membre qui a déclaré l'existence d'un conflit d'intérêts et détermine si celui-ci peut prendre part aux délibérations sur la question à l'étude ou s'il doit soit s'abstenir d'y participer ou de voter sur la question, soit quitter la réunion.

(6) Si le conseil d'administration juge que les intérêts personnels du membre créent un conflit d'intérêts par rapport à la charge qu'il occupe auprès de la Fondation, il peut exiger que celui-ci choisisse de mettre fin au conflit d'intérêts ou de démissionner dans un délai déterminé.

(7) Le conseil d'administration peut établir des lignes directrices sur les conflits d'intérêts ainsi que des mécanismes supplémentaires pour leur résolution, notamment des méthodes de dépistage des sources potentielles de conflits d'intérêts.

Par ailleurs, les réunions du conseil sont transparentes, étant donné qu'elles sont publiques. Les subventions le sont aussi, car elles aussi sont rendues publiques. Je pense que nous avons fait de notre mieux pour vider les questions de conflits d'intérêts.

Le sénateur Sibbeston: J'aimerais demander au sénateur Kenny si tout cela est bien réel. Je sais que vous avez déjà suivi une fois tout le processus et que vous avez échoué. Pensez-vous qu'il y ait encore l'un ou l'autre élément technique ou l'une ou l'autre circonstance qui risque également de vous mettre en échec?

Vous avez l'appui du Sénat, je n'en doute pas, mais avez-vous également celui du gouvernement? Pensez-vous pouvoir mobiliser l'appui d'un nombre suffisant de députés pour garantir l'adoption de ce projet de loi, et, dans l'affirmative, celui-ci a-t-il des chances d'aboutir?

Le sénateur Kenny: Les questions que vous posez ne sont pas faciles, sénateur.

Je puis vous dire que je suis absolument persuadé que ce projet de loi est adéquat sur le plan de la procédure et que les vices que le Président de la Chambre des communes avait signalés dans le projet de loi S-13 ont été éliminés. Le préambule du projet de loi et son article 3 règlent les problèmes de procédure que posait le projet de loi S-13 lorsqu'il avait été soumis à la Chambre des communes.

En revanche, je ne pense pas qu'il vienne à l'esprit de personne de dire que le projet de loi S-13 a échoué pour des raisons de procédure. Nous savons tous que le ministre de la Santé, et en fait n'importe quel autre ministre, aurait facilement pu régler le problème en disant simplement: «J'ai ici en poche une motion des voies et moyens et, si notre Président croit vraiment que ce projet de loi est une mesure fiscale, je vais la sortir de ma poche en ma qualité de ministre pour permettre au projet de loi d'aller de l'avant.»

La dernière fois, le projet de loi n'a pas pu poursuivre sa route faute d'une volonté politique suffisante. C'est du moins mon opinion.

Je pense que vous voyez maintenant quelque chose dont j'ai déjà parlé. Le Sénat a le pouvoir de se saisir autant de fois qu'il le veut de dossiers comme celui-ci. Je pense également qu'à l'heure actuelle ce genre de mesure rallie davantage le soutien populaire. Je crois également que les parlementaires comprennent aussi beaucoup mieux le dossier.

Pour être franc avec vous, un parlementaire comprend le dossier du tabac de la même façon que l'homme de la rue. Ce n'est que lorsque les sénateurs entendent des exposés comme ceux qui nous ont été faits par les milieux de la santé et par des experts américains qu'ils arrivent à comprendre vraiment l'ampleur du problème, à concevoir le nombre de victimes que fait le tabac, ce que cela coûte, et parviennent également à comprendre qu'il y a une solution réaliste. Aux États-Unis, cela ne fonctionne pas uniquement dans un État, mais dans plusieurs.

Il y a des gens raisonnables dans l'autre Chambre. S'ils savaient ce que nous avons appris ils penseraient comme nous. Si tous les députés des Communes avaient eu la possibilité d'entendre ce que vous avez entendu depuis deux semaines, le projet de loi ferait son chemin, je n'en doute nullement. À supposer que ce comité soit favorable au projet de loi et que le Sénat l'appuie lui aussi, ce que j'espère d'ailleurs, nous avons à ce moment-là trois mois pour familiariser les membres de l'autre Chambre avec le dossier.

Je ne pense pas que le problème se posera au niveau de la procédure. Le problème sera à mon avis de voir si nous aurons suffisamment de temps pour transmettre aux membres de l'autre Chambre l'information que nous avons reçue depuis deux semaines.

Si les députés comprennent le dossier de la même façon que nous avons pu le comprendre, je pense que le projet de loi aboutira. Je le crois de toutes mes forces.

Le sénateur Sibbeston: J'ai fini par me convaincre des mérites du projet de loi. J'ai fini par reconnaître qu'il fallait essayer de réduire la consommation de tabac au Canada.

Le fait que vous ayez ainsi dû passer vous-mêmes aux actes a-t-il eu une incidence quelconque sur le gouvernement? Vous êtes-vous demandé pourquoi le gouvernement ne l'a pas fait lui-même, alors qu'il est tellement évident que s'il l'avait fait il y aurait trouvé son intérêt, étant donné que chaque dollar investi dans ce dossier se traduirait par une réduction de 10 $ de la facture des soins de santé par exemple?

Je me demande pourquoi le gouvernement ne l'a pas fait lui-même. S'agit-il d'une question de raisonnement ou d'un malentendu? Pourquoi avez-vous dû vous-mêmes prendre l'initiative plutôt que le gouvernement? Je pense que c'est le gouvernement qui aurait dû intervenir.

[Français]

M. Nolin: Vous nous mettez dans une position un peu difficile sénateur Sibbeston. Il est difficile pour nous de vous dire ce que pense le gouvernement. Vous avez dépeint un portait qui pourrait nous amener à conclure et en déduire, comme vous, les mêmes conclusions.

Nous ne prêterons pas au gouvernement de mauvaises intentions. L'information ainsi que sa qualité détiennent la voie du succès. Vous l'avez dit vous-même: j'ai été amené à conclure que ce projet de loi était valable. Pourquoi? Parce que vous avez été proprement informé. Au gouvernement, c'est la même chose. Personne n'a la science infuse au gouvernement et dans aucun gouvernement d'ailleurs. Ici, c'est la même chose.

Il est certain qu'au gouvernement il y a des gens mieux informés sur la question. Pourquoi n'ont-ils pas agit? Soyons positifs et espérons que la prochaine fois, cela fonctionnera. Comme le disait le sénateur Kenny: ici, on est résistant. Lorsqu'on a une idée dans la tête, on la garde et on revient à la charge régulièrement et pour longtemps.

[Traduction]

Le sénateur Adams: Il ne reste qu'à la Chambre des communes qu'un jour et demi avant l'ajournement estival. Nous savons que nous n'avons pas le temps d'envoyer ce projet de loi aux Communes. Lorsque des élections sont déclenchées, les projets de loi meurent au Feuilleton. J'ignore si le premier ministre va changer d'avis et déclencher des élections pour l'automne. Il ne nous a encore rien dit. Il faut donc attendre. Dans l'intervalle, vous dites quant à vous au sénateur Sibbeston qu'il arrive que certains projets de loi soient redéposés sous un numéro différent, et que cela ne pose pas de problème. Je détesterais voir ce projet de loi-ci mourir au Feuilleton. Lorsque nous étudions des projets de loi du gouvernement concernant la santé, il nous arrive de demander au ministre de comparaître. Pensez-vous que le comité pourrait ainsi inviter le ministre compétent à comparaître d'ici à l'automne?

Le sénateur Kenny: Sénateur Adams, vous êtes un parlementaire chevronné et rusé, et vous avez parfaitement raison. Nous avons vu bon nombre d'excellents projets de loi mourir au Feuilleton. Je vais répondre à votre question sous deux angles.

Dans la première partie de votre question, vous me demandiez, je crois, si je craignais de voir ce projet de loi mourir au Feuilleton. C'est le cas. Par contre, je crois qu'il faudrait davantage s'attendre à des élections au printemps qu'à l'automne. Si des élections ont lieu à l'automne, j'ai le sentiment que les audiences du comité auront néanmoins servi à inscrire le dossier du tabac à l'agenda de la nation. J'ai la conviction que, dans chaque circonscription, les électeurs demanderont aux candidats quelle est leur position dans ce dossier. Si des élections ont lieu pendant l'automne, les journalistes vont demander aux chefs des partis quelle est leur position dans le dossier du tabac. Les membres du comité auront mis la question sous les feux de la rampe, de sorte qu'elle ne pourra pas être esquivée pendant la prochaine campagne électorale. Il y a des gens, dans la population, qui vont signaler publiquement quels sont les candidats qui sont favorables à un programme complet de lutte contre le tabagisme et ceux qui ne le sont pas. Les candidats aux élections vont pour leur part faire l'impossible pour faire connaître leur position.

S'agissant maintenant d'inviter le ministre, le comité directeur a inscrit le nom de celui-ci sur sa liste, et le greffier lui a envoyé une invitation à comparaître. Par contre, les ministres n'ont pas coutume de comparaître devant les comités sénatoriaux qui étudient des projets de loi d'initiative parlementaire. Si M. Rock est toujours le ministre compétent à la fin de l'été -- car il y a toujours la possibilité d'un remaniement ministériel, nous le savons -- peut-être voudra-t-il reconsidérer la chose, mais ce n'est pas la règle.

Je dois également vous rappeler que des ministres avaient également été invités à comparaître lors de l'étude du projet de loi S-13, mais qu'ils avaient décliné cette invitation. Depuis que je suis sénateur, et je ne le suis pas depuis aussi longtemps que vous, je n'ai jamais vu de ministre comparaître à l'occasion de l'étude d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Le ministre préfère attendre que ces projets de loi soient étudiés à la Chambre.

Le sénateur Adams: Mais c'est un bon projet de loi, et peut-être pourrions-nous trouver le moyen d'en faire plutôt un projet de loi des Communes. Le Sénat a entendu de nombreux témoins et a compilé une documentation très utile.

Serait-il possible que le Sénat convertisse ce projet de loi en un projet de loi du gouvernement afin qu'il ne périsse pas aux Communes?

Le sénateur Kenny: Le projet de loi du Sénat dont vous parlez était un projet de loi du gouvernement. Au Sénat, beaucoup de projets de loi sont d'initiative ministérielle. Si un ministre a effectivement comparu en comité, c'est parce qu'il s'agissait d'un projet de loi d'initiative ministérielle.

La coutume dont je vous parlais concerne les projets de loi d'initiative parlementaire, qu'ils soient issus du Sénat ou de la Chambre des communes. Dans ces cas-là, les ministres n'ont pas l'habitude de comparaître comme témoins.

Toutefois, cela dit, rien ne me réjouirait plus que d'apprendre que notre greffier aurait reçu un coup de téléphone du cabinet du ministre lui disant que celui-ci aimerait comparaître pour nous entretenir du projet de loi. Je suis persuadé que la présidente et le comité directeur vous exhorteraient à revenir pour une séance extraordinaire à laquelle le ministre viendrait nous entretenir. Je sais que personnellement je serais très heureux d'entendre ce qu'il aurait à dire, mais je n'ai pas été étonné qu'il nous dise non, étant donné que ce n'est pas la coutume.

Le sénateur Adams: Vous avez parlé de la possibilité d'une élection générale. Selon votre entendement des choses, serait-il possible que certains politiciens utilisent ce dossier pendant leur campagne? Auraient-ils intérêt à faire comprendre qu'ils appuient le projet de loi S-20?

Le sénateur Nolin: Ce projet de loi est bon pour tout le monde.

Le sénateur Kenny: M. Kyle nous a donné une liste relativement longue de gens qui semblent beaucoup aimer ce projet de loi, et je pense qu'il a raison. Ce projet de loi reçoit de plus en plus d'appui.

Je crois savoir que la Société canadienne du cancer va d'ailleurs procéder à un genre de sondage ou d'étude pour déterminer le niveau de soutien que reçoit une mesure comme celle-là, et nous pourrions peut-être demander à M. Kyle de faire part des résultats au comité lorsqu'ils seront rendus publics dans le courant de l'été. En fait, la seule question qui demeure sans réponse après le témoignage de M. Kyle est: qui au juste est contre le projet de loi?

Le sénateur Adams: Vous avez déposé ce projet de loi au Sénat sous votre signature. Allez-vous écrire aux candidats pour leur demander d'appuyer votre projet de loi?

Le sénateur Kenny: Je n'ai encore demandé le soutien de personne dans l'autre Chambre. J'ai jugé que, tant que ce comité ne se serait pas prononcé, ce serait prématuré, mais par contre j'entends sans cesse dire qu'il y a des députés qui reçoivent du courrier à ce sujet. Je considère cela comme la preuve que la population est favorable. Les gens ne prennent pas la peine d'écrire à un parlementaire s'ils ne considèrent pas que le problème est inquiétant.

Le sénateur Adams: Il y a toujours un ou deux projets de loi d'initiative parlementaire issus des Communes qui sont en instance au Sénat. Si certains députés se représentent aux élections, allez-vous vous mettre en rapport avec eux pour leur offrir d'appuyer leur projet de loi s'ils appuient le vôtre? Allez-vous le faire?

Le sénateur Kenny: Il faudrait que je sache de quoi il s'agit au juste dans chacun de ces projets de loi avant d'accepter de le faire.

Le sénateur Nolin: J'espère quand même que le Sénat n'est pas un marché financier.

La présidente: Merci, sénateurs. Pour ce qui est maintenant de nos travaux futurs, le sénateur Adams a écrit au comité pour lui demander d'étudier le projet d'éolienne de la Nation Peigan, car les travaux sont en suspens à cause d'un problème technique concernant les crédits d'impôt. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais, s'il n'y a pas d'objection de votre part, je me proposerais d'écrire aux ministères compétents pour leur signaler qu'il s'agit d'un projet excellent et leur demander de trouver une solution au problème.

Le sénateur Taylor: Je voudrais préciser qu'il s'agit du projet de la Nation Peigan, mais il sera situé dans la réserve indienne Peigan.

La séance est levée.


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