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LCJC - Comité permanent

Affaires juridiques et constitutionnelles

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles

Fascicule 12 - Témoignages du 29 mars 2000


OTTAWA, le mercredi 29 mars 2000

Le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, à qui a été renvoyé le projet de loi C-2, Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes, modifiant certaines lois et abrogeant certaines autres lois, se réunit aujourd'hui à 15 h 50 pour réexaminer le projet de loi.

Le sénateur Lorna Milne (présidente) préside la séance.

[Traduction]

La présidente: Mesdames et messieurs les sénateurs, aujourd'hui, nous accueillons M. Michael Peirce et Mme Isabelle Mondou, du Bureau du Conseil privé.

Soyez les bienvenus au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Aujourd'hui, nous entendrons des témoignages relatifs au projet de loi C-2. Nous nous en remettons à vous. Pour vous avoir parlé avant le début de la séance, je sais que vous nous invitez à vous poser des questions au fur et à mesure que nous parcourons le projet de loi, plutôt que d'attendre la fin de vos explications, au risque d'oublier certains des points qui nous préoccupent.

M. Michael Peirce, directeur, Opérations juridiques, Législation et planification parlementaire et Conseiller juridique, Bureau du Conseil privé: Nous vous présentons aujourd'hui des explications de nature technique. Le projet de loi sur lequel vous vous penchez compte plus de 500 articles. Heureusement, ils ne sont pas tous nouveaux. Nous allons essayer de vous orienter vers les modifications apportées à son contenu. Je vous donnerai également un bref aperçu de l'aspect sous lequel les amendements ont été envisagés.

On a amendé la loi en en remaniant la structure. Dans son incarnation précédente, le texte de loi abordait les dispositions financières relatives aux partis dans une section et celles portant sur les candidats dans une autre section. Or il y a parfois des liens entre ces deux réalités. On aurait cependant beaucoup de difficulté à les retrouver. Suivant les recommandations du comité de la Chambre qui avait étudié le projet de loi, nous avons décidé de remanier le texte de sorte que pour l'essentiel, il suive le déroulement du processus électoral.

Comme il est courant de le faire dans tous les projets de loi, on trouve les définitions au début. On passe ensuite aux droits électoraux. Ils ont été insérés dans la partie 1 à dessein, afin de souligner le fait que de tels droits sont primordiaux dans un texte. Il s'agit notamment du droit de vote, du droit d'avoir qualité d'électeur, du droit de voter une seule fois, et de choses de ce genre.

Les parties 2 et 3 du projet de loi portent sur ceux qui sont chargés d'administrer les scrutins, à savoir le directeur général des élections, ses collaborateurs et les fonctionnaires électoraux.

La partie 4 concerne le registre des électeurs, créé au moyen du projet de loi C-63. J'entends par là la liste électorale permanente.

Les parties 5 à 15 nous font parcourir le processus électoral, depuis l'émission du bref d'élection jusqu'au retour de ce dernier, en passant par toutes les étapes, dans l'ordre où elles se dérouleraient lors d'un scrutin.

Après cela, nous abordons des articles particuliers du projet de loi, qui s'appliquent pendant tout le processus électoral et même d'une façon permanente. Ainsi par exemple, dans la partie 16, on trouve un article sur les communications et, dans la partie 17, le régime s'appliquant aux tiers. Il s'agit de dispositions tout à fait inédites, et je suis sûr qu'elles attireront l'attention. Je ne vais pas parcourir les autres parties pour le moment. De toute façon, nous aborderons leur contenu dans quelques minutes.

Le libellé de la loi a été modifié. Lorsqu'on se penche sur le texte, on y voit non seulement un remaniement formel, mais également une modernisation de son libellé. En conséquence, bien qu'une bonne part du projet de loi ne soit pas neuve, néanmoins elle vous paraîtra telle.

Il a fallu corriger certaines erreurs qui se sont glissées au cours des 30 dernières années ainsi que des omissions, et supprimer certaines incohérences. En outre, nous avons dû donner suite à certains jugements des tribunaux, qui ont parfois eu pour effet d'annuler certaines parties de la loi. Des causes sont encore en instance, ce dont il a aussi fallu tenir compte.

Par ailleurs, nous tenions à ce que la loi soit une référence juridique complète. Nous avons donc réuni certaines lois connexes pour les inscrire dans ce projet ou, dans le cas de deux lois très désuètes, nous avons recommandé leur abrogation. Ces deux dernières sont la Loi relative aux enquêtes sur les manoeuvres frauduleuses et la Loi sur la privation du droit de vote.

La Loi relative aux enquêtes sur les manoeuvres frauduleuses prévoit surtout la tenue d'une enquête publique. Un bon nombre des pouvoirs relatifs à ces activités ont été développés au cours des ans et inscrits dans la loi électorale, parmi les pouvoirs accordés au commissaire aux élections fédérales, le fonctionnaire qui mène les enquêtes. Ni la Loi relative aux enquêtes sur les manoeuvres frauduleuses ni la Loi sur la privation du droit de vote n'ont été appliquées depuis au moins 1917.

La Loi sur les élections fédérales contestées servait à contester une élection dans le cas d'irrégularité, de fraude ou de corruption. Les autres motifs inscrits dans la loi, à savoir un rapport irrégulier, un rapport double ou l'absence de rapport sont des idées qui ont évolué, mais qui se fondaient essentiellement sur des procédures désuètes. Nous avons donc inscrit ces dispositions dans la partie 20 du projet de loi, et les avons modernisées afin qu'elles fonctionnent bien en parallèle avec la Loi électorale du Canada et les tribunaux modernes.

Si nous passons maintenant aux six premières parties du projet de loi, je vais souligner les modifications importantes de son contenu.

En vertu du projet de loi, les directeurs de scrutin obtiennent le droit de vote. Vous savez probablement qu'à l'heure actuelle ils ne l'ont pas. Ils peuvent seulement voter pour mettre fin à l'égalité des suffrages. Étant donné les dispositions de la charte, plus précisément le droit de vote figurant à l'article 3, on a jugé qu'il était inconstitutionnel de ne pas permettre aux fonctionnaires électoraux de voter, de les priver du droit de vote. En conséquence, le projet de loi leur reconnaît ce droit, et dans le cas où il y aurait une égalité de voix, on tiendrait un nouveau scrutin dans la circonscription concernée. Cela se produit très rarement dans notre pays. Avez-vous entendu parler d'un cas de ce genre?

Le sénateur Joyal: D'un cas.

M. Peirce: Nous ne pensons pas que cela créera beaucoup de situations nous obligeant à tenir de nouveaux scrutins. Cela devrait se produire très rarement.

En comité, on a ajouté une disposition de sorte à permettre au directeur général des élections d'étudier les nouveaux mécanismes de vote, y compris surtout, le vote électronique. Le directeur général des élections est donc autorisé à concevoir et à mettre à l'essai un mécanisme de vote électronique. Cela dit, la mise à l'essai ne peut avoir lieu pendant un véritable scrutin.

Le président: À quel article vous reportez-vous?

M. Peirce: Il s'agit de l'article 18.1. Vous verrez qu'à la dernière phrase, il est précisé qu'un tel processus ne peut être mis en oeuvre lors d'un scrutin officiel sans qu'on n'ait préalablement obtenu l'autorisation du comité de la Chambre des communes normalement saisi des questions électorales.

Le sénateur Fraser: Pourquoi le Sénat ne participerait-il pas à ces délibérations?

M. Peirce: Je recommande que vous posiez la question au ministre plutôt qu'à des fonctionnaires.

Le sénateur Cools: Je n'ai pas compris. De quel article s'agit-il?

La présidente: De l'article 18.1.

Le sénateur Cools: Il y a une réponse à cela.

[Français]

Le sénateur Beaudoin: Vous dites qu'il faut attendre que le ministre soit ici, mais c'est dans le projet de loi qui est devant nous. Y a-t-il une raison spéciale pour que nous attendions que le ministre arrive?

Mme Isabelle Mondou, avocate, législation et planification parlementaire, conseillère juridique, Bureau du Conseil privé: La proposition suggérée par le comité était celle qui est dans le projet de loi, le comité n'a donc pas fait de proposition à l'effet d'inclure le Sénat.

Le sénateur Beaudoin: Sous notre loi actuelle, s'il y a une élection et égalité des votes, le président doit voter. Notre vote est secret, mais il devient à ce moment-là public. Les constitutionnalistes, au Canada, ont tous dit que cela n'a pas aucun bon sens, alors pourquoi ne donne-t-on pas le droit de vote à cet homme ou à cette dame qui est président ou présidente de la circonscription? Qu'arrive-t-il avec le nouveau projet de loi?

Mme Mondou: Cette personne va maintenant voter dans tous les cas, comme n'importe quel citoyen, et non pas seulement s'il y a une égalité des voix. Dans l'éventualité d'une égalité des voix, une nouvelle élection aura lieu. Bien entendu, un décompte se fera automatiquement pour vérifier s'il y a effectivement égalité des voix. Si tel est le cas, une nouvelle élection sera déclenchée pour ce comté.

[Traduction]

Le sénateur Cools: La question posée par le sénateur Fraser est tout à fait valide, et le comité devrait s'en saisir. Si je ne m'abuse, la Loi électorale du Canada remonte à une époque très ancienne, où le Président et le greffier de la Chambre des communes surveillaient directement les scrutins, et par voie de conséquence, la loi comporte encore des éléments adoptés il y a très longtemps. Ainsi par exemple, la Chambre des communes a des responsabilités précises en matière de surveillance des scrutins. Je pense qu'à l'origine, les scrutins se déroulaient, soit sous la surveillance du greffier, soit sous celle du président de la Chambre des communes. C'est un aspect important, car bon nombre des articles de la loi reflètent encore cette situation. Nous devrions donc étudier cela. Le comité devrait savoir si cet article du projet de loi ne porte pas atteinte au Sénat, ou s'il y a une explication historique et constitutionnelle à cet état de fait. Quelqu'un devrait venir nous expliquer cela. Je pense que le sénateur Fraser vient de soulever une question importante.

M. Peirce: Je passe maintenant à la question de la vérification des actes de candidature. Auparavant, la loi ne prévoyait pas des exigences particulières aux actes de candidature.

Le sénateur Fraser: Pourriez-vous préciser de quel article il s'agit au fur et à mesure?

M. Peirce: Certainement. Je suis au paragraphe 71(2). Selon la nouvelle disposition, l'acte de candidature doit faire l'objet d'une vérification en l'espace de 48 heures, après quoi il sera confirmé ou rejeté. Les candidats, on l'espère, présenteront leur acte de candidature tôt pour qu'il puisse être confirmé dans un intervalle de 48 heures. Ainsi, s'il y a une anomalie, les candidats seront en mesure de la corriger au lieu d'attendre d'avoir présenté leur acte de candidature et que, faute de confirmation, celle-ci soit contestée, peut-être même après l'élection.

L'autre changement concerne l'article 73 et reflète l'objectif de modernisation de ce projet de loi. En vertu de ce changement, les candidats pourraient soumettre leur acte de candidature par voie électronique. Pour se prévaloir de cette option, les candidats doivent soumettre leur candidature avant la clôture et les originaux au plus tard dans les 48 heures qui suivent, c'est-à-dire dans les délais prévus pour la vérification.

La présidente: Est-ce qu'on peut soumettre un acte de candidature par télécopieur?

M. Peirce: On peut soumettre sa candidature par télécopieur, par courrier électronique ou par n'importe quel autre moyen technologique éventuel.

Je passe maintenant à la question du droit d'accès à des immeubles pour solliciter des votes. Il s'agit de l'article 81. Les candidats ont toujours eu le droit d'entrer dans des immeubles pour solliciter des votes. Cependant, il n'y avait pas d'obligation de respecter ce droit. En refusant l'accès à des candidats, on ne commettait aucune infraction. On a donc précisé, d'une manière générale, qu'on pouvait se prévaloir de ce droit durant des heures raisonnables. Pour faire respecter ce droit, nous avons ajouté une infraction en prévoyant que les heures raisonnables se situeraient entre 9 heures et 21 heures. Toutefois, nous avons prévu une exception expresse dans le cas des immeubles où le droit d'accès pouvait compromettre le bien-être physique ou mental de quelqu'un.

La présidente: Où est-il dit qu'on a commis une infraction?

M. Peirce: Les dispositions relatives aux infractions se trouvent à la fin du projet de loi.

Le sénateur Buchanan: De quel article parlons-nous au juste?

M. Peirce: L'article 81. L'infraction en question est prévue dans l'article 486 du projet de loi. Nous avons regroupé toutes les infractions, insérées à la fin du projet de loi et ventilées par partie. Autrement dit, si vous êtes un candidat, vous n'avez qu'à consulter la partie 6 pour trouver toutes les infractions qui vous concernent.

J'ai dit tout à l'heure qu'on a prévu une exception dans les cas où l'accès à un immeuble pourrait compromettre le bien-être physique ou mental des résidents. Cela pourrait se produire dans deux cas. Le premier cas est celui des refuges pour femmes battues, où le fait d'accorder le droit d'entrée à un candidat pourrait révéler l'identité des femmes qui s'y trouvent; ces renseignements doivent être protégés pour assurer la sécurité des résidentes. Ce n'est pas le seul exemple. En effet, le deuxième cas est celui des établissements psychiatriques, où la simple présence d'un candidat dans les couloirs pourrait perturber les patients.

Le sénateur Andreychuk: Pourriez-vous m'expliquer exactement ce que prévoyait l'article 81 auparavant? Il me semble que ces dispositions sont dépassées. Autrefois, il y avait des maisons unifamiliales et des immeubles d'appartements. De nos jours, outre les immeubles d'appartements et les appartements en copropriété, il y a de nouveaux types de logements. Je ne comprends pas l'expression «il est interdit au responsable d'un». Si le propriétaire d'un immeuble d'appartements en copropriété installe des portes de sécurité qui empêchent l'accès à son immeuble, y compris aux aires communes, et si c'est ce que souhaite la majorité des résidents, cet article prévaudrait-il quand même?

M. Peirce: C'est bien cela.

Le sénateur Andreychuk: Autrement dit, il faudrait permettre à des candidats d'entrer dans un immeuble même si cela pouvait compromettre la sécurité des occupants? Si on prend toutes ces mesures, c'est pour assurer notre sécurité et notre bien-être. Je peux vous dire que dans bien des immeubles, y compris des endroits où j'ai habité moi-même et où je continue d'habiter, on ne permet tout simplement pas à qui que ce soit d'entrer. Il y a là des gens qui habitent seuls et qui ont payé pour avoir ces mesures de sécurité qui empêchent qui que ce soit d'entrer dans les lieux pour une sollicitation quelconque. Certains immeubles sont dotés d'un interphone qui contrôle l'accès. Vous semblez dire que, en vertu de l'ancienne loi, on commettrait une infraction en refusant d'ouvrir la porte.

Le sénateur Cools: Évidemment, et tant mieux. Autrement, comment est-ce que les candidats pourraient solliciter des votes dans des grands complexes, si on ne leur permet pas d'entrer?

Le sénateur Andreychuk: Il y a des systèmes d'interphone qui le permettent.

Le sénateur Cools: Si vous êtes déjà allé faire campagne dans des grands complexes, vous comprendrez qu'il faut redescendre les escaliers chaque fois qu'on veut entrer dans un appartement. Les candidats procèdent souvent étage par étage, en frappant à toutes les portes. Ils ne peuvent pas aller voir une personne puis redescendre les escaliers pour appuyer sur un bouton et dire: «Je suis un candidat, est-ce que je peux entrer?» Ceux d'entre nous qui ont déjà fait campagne savent qu'il faut se présenter au concierge de l'immeuble pour lui demander l'accès à l'immeuble en question. Évidemment, les concierges ne donnent pas l'accès au premier venu.

Le sénateur Andreychuk: Et s'il n'y a pas de concierge?

Le sénateur Cools: Il y a toujours moyen de s'arranger.

La présidente: Étant donné qu'on essaie maintenant de faire respecter ce droit, je crois que le but est, et a toujours été, de permettre aux candidats de solliciter des votes. Les candidats ont toujours eu le droit d'accès à tous les électeurs. Cela a toujours fait partie de notre système d'élection démocratique. Ce nouvel ajout au projet de loi fera en sorte que ce droit sera respecté; on rend cette disposition plus musclée. J'ai déjà eu à me rendre dans des immeubles d'appartements accompagné d'agents de police, autrement le concierge ne m'aurait pas permis d'entrer.

Le sénateur Joyal: Je me souviens que, quand j'étais candidat, quand je me rendais dans un établissement où les patients n'étaient pas en mesure d'exprimer leur préférence, les personnes chargées de déterminer leur état de santé le jour du vote remplissaient une sorte de formulaire indiquant que l'occupant de la chambre X n'était pas en mesure de se prévaloir de son droit de vote. Tout dépendait de l'état de santé du patient. Cependant, si le patient était aux soins d'un membre de la famille ou d'un parent proche, c'est cette personne qui votait à la place de l'électeur invalide. La raison est simple: on parle du principe que vous avez énoncé plus tôt, à savoir qu'on ne peut priver une personne de son droit de vote s'il y a quelqu'un d'autre qui prend soin d'elle et qui pourrait exprimer sa volonté. En d'autres mots, c'est une interprétation «libérale» du droit de vote.

Le sénateur Andreychuk: Je trouve le choix de ce mot judicieux. J'aime bien ce mot. C'est quand on l'utilise dans le sens partisan du terme que cela me dérange.

Le sénateur Joyal: Je vois que le sénateur Buchanan n'a pas bronché.

Le sénateur Cools: Il en a l'habitude.

Le sénateur Joyal: Toujours à propos de cet article, je voudrais ajouter qu'en fait on ne restreint pas l'interprétation du droit de vote dans un système démocratique en privant quelqu'un de sa capacité de suffrage.

Le sénateur Buchanan: J'aime bien cet article et je vais vous expliquer pourquoi. Je me suis présenté comme candidat lors de huit élections et j'ai gagné les huit fois. De plus, j'ai gagné lors de quatre élections provinciales de suite. C'est pourquoi, je me plais à dire que je m'y connais un peu en politique. J'avais l'habitude de dire aux candidats qui se présentaient contre moi, ou à tout le moins je m'assurais qu'ils le savaient, que le moment idéal pour solliciter des votes dans une banlieue était l'après-midi à 16 heures, soit à l'heure des téléromans. Je leur disais que c'était le meilleur moment pour solliciter des votes, car c'est le moment où toutes les femmes étaient chez elles. Oui je sais ce qu'on dira, mais je ne suis pas sexiste. Je disais également à mes adversaires que les immeubles dont vous parliez tout à l'heure, c'est-à-dire ceux où la plupart des gens pensent ne pas pouvoir solliciter des votes, étaient les meilleurs endroits pour le faire.

Le sénateur Fraser: Ma question porte essentiellement sur la cohérence de ce projet de loi et découle de la question qu'on a posée tout à l'heure, à savoir où est-il dit que c'est une infraction? J'apprends qu'il s'agit là d'une infraction et j'essaie de savoir où on prévoit la sanction, et 16 pages plus tard, j'apprends que c'est une infraction passible d'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à six mois.

La présidente: À quel page trouve-t-on cela?

Le sénateur Fraser: À la page 222, paragraphe 500(3), mais le problème c'est qu'on peut être trouvé coupable d'une infraction visée par le paragraphe 486(2). Il me semble que c'est une façon assez compliquée de procéder. J'imagine facilement quelques 300 directeurs de scrutin à l'échelle du pays en train de feuilleter avec acharnement ce projet de loi. N'aurait-il pas été plus simple de tout prévoir en même temps? N'aurait-il pas été plus simple, par exemple, de prévoir dans l'article 81 quelque chose du genre «quiconque est trouvé coupable de cette infraction est passible de...»?

M. Peirce: C'est en quelque sorte ce qui était prévu avant, et on a essayé de jongler avec différentes formulations pour essayer de trouver la façon de le dire qui soit la plus conviviale. On a constaté que, auparavant, la plupart des gens parcouraient toute la loi pour trouver les infractions, car ce sont bien les infractions qui les intéressent le plus souvent. Il était difficile de trouver les infractions, puisqu'elles n'étaient pas regroupées ensemble dans une même partie.

Il y a trois étapes: on trouve l'article, puis l'infraction et enfin la sanction. Dès lors que l'on sait qu'il y a trois étapes à respecter, les choses deviennent relativement simples. Comme je l'ai déjà dit, nous avons envisagé d'autres formulations, mais nous nous sommes heurtés à un problème de taille, le volume du projet de loi. Ainsi, on a essayé de ne pas regrouper toutes les infractions, et on s'est retrouvé avec un projet de loi énorme. C'est donc pour rendre les choses plus accessibles que nous avons agi de la sorte.

Le sénateur Fraser: Pensez-vous que cette façon est la moins compliquée?

M. Peirce: Oui, c'est la moins compliquée.

Le sénateur Fraser: N'empêche que c'est encore très compliqué!

La présidente: Il y a quelque chose qui ne va pas ici. Quand on lit le projet de loi article par article, il n'y a pas un article où il est dit qu'il s'agit d'une infraction. Il faut constamment s'arrêter pour se demander «Est-ce que c'est vraiment nécessaire?»

M. Peirce: À partir du moment où dans la version anglaise on utilise le mot «shall», on doit se rendre compte qu'il s'agit d'une infraction. Logiquement, on consulte la partie réservée aux infractions.

La présidente: En fait, on n'utilise pas le mot «shall» dans cette disposition en particulier.

Le sénateur Fraser: On dit plutôt «may».

La présidente: Est-ce qu'on utilise le mot «shall»?

Le sénateur Fraser: Non, on dit bien «may».

M. Peirce: Il fallait que je prenne le pire exemple. En effet, dans la version anglaise il est dit «No one may», plutôt que «someone shall».

Le sénateur Cools: Je pense que ces dispositions concernent particulièrement les circonscriptions hautement urbanisées où il y a une forte concentration de population et d'immeubles d'appartements. Dans la circonscription de Toronto, par exemple, on trouvera 250 immeubles d'appartements. Or cela n'est pas un problème dans les circonscriptions rurales.

Cette disposition revêt une importance particulière puisqu'elle fait ressortir les enjeux politiques au niveau on ne peut plus local. Par exemple, quelqu'un qui a une allégeance politique donnée pourrait bloquer l'entrée à un immeuble au candidat d'un autre parti politique. Les choses peuvent s'envenimer à un point tel que la personne chargée de faire le recensement dans un immeuble en particulier ne frappera pas à la porte de quelqu'un qui votera pour le parti adverse. C'est sur le terrain, au niveau local, que ces dispositions du projet de loi deviennent très importantes. Je comprends donc tout à fait les objectifs visés par ces dispositions.

Ce que je ne comprends pas, en revanche, c'est l'inclusion des refuges pour femmes battues. En principe, on n'y trouve pas des personnes souffrant de troubles psychiques ou des personnes malades. Pourquoi est-ce que la loi mettrait un groupe de personnes hors de la portée du député éventuel? J'avoue ne pas comprendre.

M. Peirce: On ne cite pas nommément les refuges pour femmes battues, mais on parle des résidents dont le bien-être physique ou mental risque d'être compromis. S'il y a un risque pour le bien-être de quelqu'un, nous pensons qu'il est justifié de limiter le droit d'accès. Les cas de ce genre seront, nous l'espérons, rares, mais des gens sont venus nous dire que cela peut constituer parfois un véritable problème. L'emplacement des refuges pour femmes battues est généralement considéré comme une information protégée.

Le sénateur Cools: Ils sont tous dans le bottin téléphonique. Cette information n'est pas protégée du tout.

Chacun a le droit de refuser de parler à un candidat en particulier. C'est ce qui me dérange dans la première partie de cette disposition. Si un candidat frappe à la porte de quelqu'un, cette personne a le choix: elle peut ouvrir ou crier quelque chose du genre: «Vous êtes un libéral, allez-vous en! Je n'ouvre ma porte qu'aux conservateurs.»

Essentiellement, il appartient à la personne dont on sollicite le vote de parler au candidat ou de ne pas le faire. En fait, c'est ce qui me dérange. Les gens peuvent toujours dire au candidat d'aller voir ailleurs et qu'ils ne veulent pas lui donner leur appui. Ils pourraient même dire qu'ils sont des mules libérales et qu'ils refusent de parler à tout conservateur. Pour votre gouverne, une mule libérale c'est quelqu'un qui voterait libéral peu importe le candidat.

La présidente: Vous savez bien qu'il n'y a rien de tel.

Le sénateur Cools: Je ne comprends vraiment pas comment une telle disposition se retrouve dans un projet de loi.

M. Peirce: En réalité, il est question ici de différents types d'établissements.

Le sénateur Buchanan: On a eu un cas classique à Halifax, il y a environ trois élections de cela. Le candidat d'un parti donné a demandé le droit d'entrer dans un immeuble d'appartements en copropriété à Halifax. Il est même allé jusqu'à retenir les services d'un avocat. Il a fini par obtenir gain de cause. Mais les candidats des autres partis n'ont pas essayé d'entrer dans cet immeuble. Les habitants de cet immeuble d'appartements en copropriété se sont mis ensemble, ont tenu des réunions et ont déterminé qu'ils voteraient contre ce candidat qui voulait leur imposer sa volonté. Par conséquent, le candidat en question a perdu aux élections. Dans cet immeuble en particulier, 75 p. 100 des occupants ont voté contre lui. La politique pragmatique veut que l'on s'abstienne de demander de telles choses pour ne pas risquer de se mettre à dos des électeurs éventuels, et ce, peu importe le parti qu'ils appuyaient au départ.

La présidente: Ce projet de loi étant long, on ne peut consacrer une quinzaine de minutes à chaque question. Sinon, on n'en finirait jamais.

Je voudrais signaler aux sénateurs que nous avons avec nous aujourd'hui des étudiants, en première année de droit à l'Université d'Ottawa, qui sont venus voir comment nous nous comportons.

Le sénateur Poy: Monsieur Peirce, ma question porte sur le point soulevé par le sénateur Cools. Qui détermine que le bien-être des résidents d'un immeuble risque d'être compromis par les candidats? Qui choisi les immeubles auxquels on peut avoir accès et ceux auxquels on n'a pas accès?

M. Peirce: Dans un premier temps, la décision est prise par la personne qui s'occupe de l'immeuble, mais cette personne ne peut prendre de décision qui ne soit pas conforme au projet de loi. Je ne peux vous donner de réponse définitive maintenant, mais je suppose qu'Élections Canada publiera des lignes directrices sur la manière de trancher cette question.

Dans un deuxième temps, le commissaire détermine si la décision du responsable de l'immeuble était conforme à la loi. Il incombe au commissaire des élections de faire respecter la loi proposée. Si quelqu'un refuse l'accès à un candidat sans en avoir le droit, on peut entamer des poursuites contre cette personne ou utiliser des outils d'application de la loi que je décrirai plus tard. Il y a d'autres options qui sont plus souples, notamment les ententes de conformité.

Le sénateur Poy: Autrement dit, la personne qui dirige un refuge pour femmes battues peut refuser l'accès à tous les candidats, mais sa décision peut être renversée. Est-ce bien cela?

M. Peirce: Oui.

Le sénateur Poy: Et s'il s'agit d'un hôpital? Vous pardonnerez mon ignorance, mais est-ce que les candidats passent d'une chambre à l'autre? Les médecins auraient-ils le droit de dire que certains patients ne peuvent pas recevoir la visite d'un candidat?

M. Peirce: Absolument.

Le sénateur Poy: Comment ferait-il alors? Est-ce qu'il afficherait quelque chose à la porte de la chambre du patient en question?

La présidente: À l'heure actuelle, et c'est ce qu'on fait depuis des années déjà, les candidats et leurs représentants ont le droit d'aller dans des hôpitaux et des foyers de soins infirmiers pour solliciter des votes, pourvu qu'ils soient accompagnés du personnel médical.

Le sénateur Poy: À moins qu'il n'y ait une affiche sur la porte interdisant l'accès à la chambre.

La présidente: Absolument. Je conseille aux sénateurs de noter le numéro des articles qui les préoccupent pour permettre au témoin de poursuivre son exposé sans être interrompu.

M. Peirce: L'article 87 porte sur le remplacement de l'agent officiel. Auparavant, en vertu de la loi, l'agent officiel ne pouvait quitter son poste que par suite de décès, incapacité ou démission. Il n'y avait pas d'autre moyen de remplacer l'agent officiel d'un candidat. Cela a suscité de graves inquiétudes. Il va s'en dire que le candidat doit avoir une confiance immense dans son agent officiel. Si cette confiance n'existe plus, il peut être nécessaire de destituer l'agent officiel. La façon dont l'agent officiel s'occupe de l'argent pourrait faire en sorte que le candidat enfreigne la loi. Une grande confiance est donc nécessaire et l'on a jugé bon de créer le pouvoir de destituer l'agent officiel. Ce pouvoir est créé à l'article 87.

L'article 110 porte sur les listes électorales. Les partis enregistrés peuvent se servir des listes électorales pour recruter des membres. Ils peuvent aussi s'en servir pour demander des contributions. Une fois élu, le député n'a pas le droit, en vertu de la loi actuelle, de demander des contributions ou de recruter des membres pour son parti. Nous avons jugé que cela créait une incohérence entre les candidats et les partis et nous avons ajouté le recrutement des membres.

Nous passons ensuite à l'article 128, qui fixe les heures du scrutin. Comme certains d'entre vous le savent peut-être déjà, lors des dernières élections les bureaux de scrutin en Saskatchewan ont fermé après ceux de l'Alberta et de la Colombie-Britannique à cause des heures décalées du scrutin et du fait que la Saskatchewan n'adopte pas l'heure avancée. Cela signifie que lorsque le reste du pays passe à l'heure avancée, toutes les heures de scrutin avancent d'une heure, sauf en Saskatchewan. Nous avons décidé d'ajouter une disposition expresse dans le projet de loi pour fixer les heures de scrutin en Saskatchewan si l'heure avancée est en vigueur. Dans le fuseau horaire du centre en Saskatchewan, lorsque le reste du pays suit l'heure avancée, les heures de vote seront de 7 h 30 à 19 h 30; dans le fuseau des Rocheuses, elles seront de 7 heures à 19 heures.

L'idéal aurait été de mettre l'heure des Rocheuses et de la Saskatchewan au même moment que l'heure du centre, mais le résultat aurait été que les bureaux de vote auraient ouvert à 6 h 30 pour fermer à 18 h 30. Il a fallu trouver un compromis et la période de 7 heures à 19 heures permet de veiller à ce que les bureaux ne resteront pas ouverts en Saskatchewan, même dans le fuseau horaire des Rocheuses, après la fermeture des bureaux en Alberta et en Colombie-Britannique.

Le sénateur Andreychuk: Pour que l'on se comprenne bien, la plupart des provinces suivent l'heure du centre, mais il y a une bande à l'Ouest qui adopte l'heure des Rocheuses. Toutefois, c'est à chaque localité de choisir et il peut donc y avoir des changements. J'ai essayé de déposer un projet de loi qui s'appliquerait à cette situation et on m'a dit que cela sera prévu dans ce projet de loi-ci. Par contre, j'ai constaté par la suite qu'il y a un autre problème: certaines circonscriptions sont à cheval entre l'heure avancée et l'heure des Rocheuses. Que faites-vous dans ce cas? Est-ce que la disposition s'applique à ce cas? Il est difficile de savoir où l'on se trouve. La faculté de choisir si l'on adopte l'heure avancée ou l'heure des Rocheuses ou l'heure du centre dépend des limites municipales ou provinciales et non de celles des circonscriptions fédérales. Le territoire n'est donc pas le même et certaines localités se trouvent dans au moins deux territoires.

M. Peirce: Il y a des exemples de cela. De fait, il y en a ailleurs dans le pays. Dans ce cas, le directeur du scrutin doit choisir, en consultant le directeur général des élections. C'est ainsi que le problème se règle. De plus, comme il est difficile de trouver la solution parfaite à ces problèmes et que d'autres pourront surgir si les provinces procèdent autrement, le directeur général des élections s'est également vu conférer le pouvoir d'examiner le problème et de le régler au besoin.

Le sénateur Andreychuk: L'article 130 va-t-il régler cela?

M. Peirce: Il y a l'article 130 et aussi l'article 129 qui portent sur l'heure avancée.

La présidente: Passons à l'autre article, s'il vous plaît.

M. Peirce: Nous en avons terminé avec les articles 128, 129 et 130. Ils sont regroupés. L'article suivant est le 131. Il concerne les heures de vote lors des élections partielles. S'il y a une ou plusieurs élections partielles dans le même fuseau horaire, les heures de vote sont de 8 h 30 à 20 h 30. S'il y a plus d'une élection partielle dans des fuseaux horaires différents, on suit les heures décalées prévues au projet de loi C-63.

Nous allons maintenant discuter de l'alinéa 135(1)f). Ce n'est pas un gros changement, mais il est important. Le texte permet au personnel du directeur général des élections et aux observateurs spéciaux autorisés par lui à se trouver dans les bureaux de scrutin. Par exemple, il arrive souvent que, parce que le système électoral canadien est un modèle partout dans le monde, des observateurs des pays étrangers viennent voir comment nous procédons. Cela leur permettra d'observer.

La présidente: Ils peuvent toujours venir de toute façon.

Le sénateur Andreychuk: C'est très important. Ce n'est pas seulement pour observer. Nous allons dans d'autres pays pour voir si les élections sont justes et équitables. C'est donc aussi une affaire de réciprocité. Autrement dit, nous reconnaissons que les autres peuvent aussi bien que nous venir ici voir si nos élections sont justes et équitables.

M. Peirce: Oui, nous invitons des gens à venir observer nos élections également.

La présidente: Je dois maintenant vous signaler que je dois partir à 17 heures, tout comme le sénateur Pearson. Le sénateur Beaudoin a accepté de présider la séance jusqu'à son départ, à 17 h 30. Nous n'avons pu trouver personne d'autre pour occuper la présidence après cette heure. Vous devrez donc terminer d'ici 17 h 30.

M. Peirce: Nous allons en tenir compte.

L'article 161: Inscription le jour du scrutin. Auparavant, cela n'était autorisé que dans les circonscriptions rurales. La règle s'applique maintenant uniformément. La distinction entre circonscription rurale et circonscription urbaine semble s'être estompée et nous ne sommes pas arrivés à justifier pareille distinction.

Maintenant que nous disposons d'un registre des électeurs, on ne fait appel à un répondant que lorsque la personne n'a pas son nom sur la liste ou qu'elle n'a pas de pièce d'identité. Il devrait donc être très rare qu'on ait recours à cette pratique. L'électeur et son répondant prêtent serment. Il y a deux conditions: ils doivent tous les deux appartenir à la même section de vote et une personne ne peut répondre que d'un seul électeur. Cela réduit le risque d'escroquerie.

Le sénateur Fraser: Faut-il avoir une preuve de citoyenneté canadienne?

M. Peirce: Oui.

Nous passons ensuite à la partie 11, «Règles électorales spéciales». En vertu du paragraphe 233(1.1), quiconque a qualité d'électeur peut voter en vertu des règles électorales spéciales. Pour s'en prévaloir, il fallait le faire savoir.

Les personnes en danger -- une femme dans un refuge par exemple -- peuvent donner l'adresse de leur ancien domicile plutôt que de leur domicile actuel en vertu de ces règles. Elles peuvent donc, par exemple, donner l'adresse de la maison qu'elles ont quittée au lieu de celle du refuge.

La présidente: Devront-elles pour autant voter dans leur section de vote d'origine?

M. Peirce: Non.

La présidente: Elles peuvent voter dans la nouvelle?

M. Peirce: Oui.

L'article 243.1. Il s'agit de l'aide accordée à certains électeurs, comme ceux qui ne peuvent pas lire ou écrire sur le bulletin de vote ou qui sont incapables de se rendre au bureau de vote. Une disposition de la loi actuelle vise les personnes incapables de lire ou d'écrire et une autre, celles qui sont incapables de se rendre au bureau de vote. Rien n'est prévu pour les cas où les deux situations se présentent en même temps. C'est à cela que sert l'article 243.1. Le directeur du scrutin peut se rendre chez l'électeur, remplir la déclaration et marquer le bulletin de vote devant l'électeur et un témoin choisi par celui-ci.

Le sénateur Joyal: Est-ce que c'est le jour du scrutin spécial ou le jour du scrutin?

Mme Mondou: Quand la personne est disponible.

[Français]

Mme Mondou: Cela dépend. Si la personne a choisi de voter à l'avance, elle pourra se prévaloir de ce droit par anticipation, et si elle a choisi de voter le jour du scrutin, elle pourra avoir de l'aide le jour du scrutin.

[Traduction]

M. Peirce: Ensuite, l'article 228 traite des électeurs canadiens vivant à l'étranger. Les Canadiens qui sont à l'étranger peuvent actuellement voter par la poste. Ce projet de loi leur permettra de voter dans une ambassade ou un consulat. C'est simplement pour faciliter le processus. Nous avons travaillé avec le ministère des Affaires étrangères pour nous assurer que ce serait possible.

Dans la partie 16 du projet de loi, article 322, je signale le droit des électeurs à mettre des pancartes dans leurs appartements et logements en copropriété. Certains baux ou règlements de copropriété interdisent de placer des pancartes. Cet article permettrait aux électeurs de le faire, sous réserve de restrictions raisonnables quant aux dimensions et aux emplacements.

La présidente: Y a-t-il une pénalité associée à cela?

Mme Mondou: Oui.

Le sénateur Buchanan: Qu'arrive-t-il aux pancartes placées sur ou dans un immeuble où il y a un bureau de scrutin? Quel est l'article du projet de loi qui s'appliquerait?

Mme Mondou: L'article de la loi actuelle qui interdit les pancartes dans un bureau de vote n'a pas été modifié. Il demeure en place.

Le sénateur Buchanan: Il prime sur l'article 322?

Mme Mondou: Absolument.

Le sénateur Joyal: À ce sujet, cette disposition s'appliquerait-elle dans le contexte d'un référendum national? J'aimerais une réponse claire parce que cela pourrait être très délicat en cas de référendum national.

[Français]

Mme Mondou: La loi référendaire s'inspire des dispositions de la Loi électorale et elle doit être adaptée à certaines dispositions de la Loi électorale. Et dans ce cas, ce serait au directeur général des élections d'adapter des dispositions qui ont été modifiées dans la Loi électorale, pour les appliquer à la loi référendaire. La réponse est donc oui, la loi référendaire n'est pas modifiée comme telle, mais les dispositions de la Loi électorale s'appliquent dans le contexte d'un référendum. Par conséquent, en faisant les adaptations nécessaires, cette disposition s'appliquerait effectivement.

[Traduction]

Le sénateur Buchanan: Avez-vous envisagé une contestation en vertu de la Constitution?

M. Peirce: Oui.

Le sénateur Buchanan: Les baux et les règlements de copropriété relèvent de la responsabilité provinciale. Comment une loi sur les élections fédérales peut-elle primer sur les baux ou règlements de copropriété?

M. Peirce: Nous savons que l'essence même du projet de loi vise les élections.

Le sénateur Beaudoin: C'est un projet de loi qui porte sur les élections.

Si je comprends bien, il y a une restriction à l'article 322.

M. Peirce: En effet.

Le sénateur Beaudoin: Quelle est cette restriction?

M. Peirce: Les dimensions et l'emplacement des affiches doivent être raisonnables.

Le sénateur Beaudoin: Qui décide ce qui est raisonnable?

Le sénateur Andreychuk: Les tribunaux.

Le sénateur Beaudoin: Si je me souviens bien, aux termes de la Loi électorale du Canada, le commissaire d'Élections Canada a des pouvoirs énormes. Il peut adapter la loi en cas de référendum ou dans toute autre situation mutatis mutandis. Je crois qu'il a actuellement ce pouvoir. Par exemple, si quelque chose n'est pas clair, il peut décider.

M. Peirce: C'est exact.

Le sénateur Fraser: La décision peut être contestée.

Le sénateur Beaudoin: Oui, elle peut être contestée devant les tribunaux.

La présidente: Comme nous ne pouvons en finir avec ces témoins aujourd'hui, nous prévoirons une autre réunion avec eux.

Je demanderais maintenant au sénateur Beaudoin de bien vouloir assumer la présidence.

Le sénateur Gérald-A. Beaudoin (vice-président) occupe le fauteuil.

Le vice-président: Il est entendu que l'on n'exclut pas la possibilité de revenir sur certains articles dont nous avons déjà discuté.

Le sénateur Joyal: Puis-je poser une dernière question à nos témoins?

Le vice-président: Oui.

Le sénateur Joyal: Le dernier référendum au Québec a été mené en vertu de la Loi québécoise sur les référendums. C'est une question très débattue parce que cela porte sur la liberté d'expression. Une personne a-t-elle le droit d'utiliser ses locaux pour faire de la publicité sur son choix? Je m'interroge sur la différence de liberté d'expression entre la tenue d'un référendum en vertu d'une loi provinciale et d'une loi fédérale. C'est une question très importante. Le Sénat a pour mandat de protéger les droits fondamentaux et les libertés des citoyens dans le contexte de l'exercice démocratique des droits.

J'aimerais que vous examiniez la question. Nous savons tous que certains citoyens mettent le drapeau canadien sur leurs balcons. On a demandé si les baux et les règlements de copropriété les y autorisaient et si c'était considéré comme de la propagande.

Le vice-président: Il y a un précédent. Je me souviens que durant le dernier référendum, l'autorité fédérale représentait toutes les provinces et, au Québec, c'était l'autorité provinciale. Cela n'a pas posé de problèmes.

Est-ce prévu dans cette nouvelle loi électorale?

M. Peirce: Nous préparerons quelque chose qui répondra à vos questions.

Le vice-président: Merci. S'il y a eu un précédent, cela signifie que cela peut se reproduire. C'est très important. Nous oublions fréquemment que le gouvernement fédéral a le droit de tenir un référendum qui pourrait concerner tout le Canada et qu'il peut le faire n'importe quand sur n'importe quel sujet relevant de sa compétence.

Le sénateur Buchanan: La Nouvelle-Écosse a une Loi sur les condominiums, une Loi sur les propriétaires et les locataires et une Loi sur la location. Toutes ces lois énoncent les droits des locataires et des propriétaires. Si je me souviens bien, un de ces droits est d'avoir des articles, dans les baux et règlements de copropriété, qui garantissent le respect de la vie privée dans le complexe concerné. Il s'agit d'une question provinciale. Les baux et les règlements de copropriété relèvent du gouvernement provincial.

Vous nous avez dit que les projets d'articles dont vous parliez ne seraient pas rejetés par les tribunaux en cas de contestation en vertu de la Constitution, qui ne sont pas ultra vires, n'est-ce pas?

M. Peirce: C'est exact.

Le sénateur Buchanan: Pourquoi?

M. Peirce: Il s'agit là d'élections fédérales et uniquement d'élections fédérales. Il n'est pas question de réglementer la location en général ni les logements en copropriété. C'est simplement dans le contexte d'élections fédérales sans empiétement sur les domaines de compétence provinciaux.

Le sénateur Buchanan: Et si un propriétaire de condominium prétend que l'autorité fédérale empiète sur un champ de compétence provincial parce qu'un règlement de propriété lui donne le droit que l'on respecte sa vie privée chez lui? Il est propriétaire du condominium.

M. Peirce: Il s'agit là d'une loi sur les élections fédérales.

Le sénateur Buchanan: Oui, mais pour ce qui est de cette clause, le gouvernement fédéral dépasse son champ de compétence.

M. Peirce: Nous estimons que les tribunaux maintiendront la loi électorale.

Le vice-président: Sénateur Buchanan, je ne pense pas que cela pose de problèmes majeurs. Ces lois existent depuis plus d'un siècle et le Québec a un Code civil depuis plus d'un siècle. La Loi sur les établissements provinciaux au Québec doit s'appliquer pour les locations, le logement, et cetera. Je ne me rappelle pas qu'il y ait eu de cas semblables. Il appartient aux autorités fédérales, bien sûr, d'adapter leurs lois pour couvrir tous les cas. Toutefois, je ne veux pas dire qu'il ne peut y avoir de problèmes. Il peut toujours y en avoir.

Le sénateur Buchanan: Ces articles sont nouveaux si bien qu'il ne peut y avoir de jurisprudence.

Le vice-président: Les baux n'ont pas tellement changé.

Le sénateur Joyal: Je crois que le sénateur Buchanan a raison. Il n'y a pas eu de cas semblables, mais on peut faire une comparaison avec d'autres initiatives fédérales qui ne sont pas considérées comme des initiatives directes visant à réglementer le domaine qui relève exclusivement de l'article 92.

Nous avons discuté du pouvoir corollaire qui découlerait de la principale responsabilité aux termes de l'article 91.

Le vice-président: Vous parlez de la compétence accessoire.

Le sénateur Joyal: Oui, ou de ce que nous appelons «les pouvoirs incidents». C'est essentiellement sur cette base que l'on présenterait l'argument.

Le sénateur Buchanan: Si quelqu'un vient me demander de m'occuper de la question, j'accepterai certainement.

Le vice-président: S'il vous plaît.

M. Peirce: Considérons maintenant ensemble un certain nombre d'articles, de 323 à 328. Ils portent sur l'interdiction de publicité le jour du scrutin, de nouveaux sondages électoraux et la propagande électorale.

Dans le projet de loi initial, il y avait une période d'interdiction de 48 heures. Cela a été changé à l'étape du comité et c'est maintenant limité au jour du scrutin. Cette même période s'applique aux sondages d'opinions, comme avant, ou à la propagande politique.

La période d'interdiction s'appliquera aux partis politiques, aux candidats et aux tiers.

Il faut comprendre le contexte qui est celui des décisions rendues par les tribunaux. L'interdiction de publication des sondages électoraux a été rejetée par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Thomson. Celle-ci a mené à raccourcir la période en question. On est passé d'une période de 72 heures à une période limitée au jour du scrutin.

Nous avons aussi ajouté l'obligation de publier la méthodologie du sondage. Ce que la cour a déclaré dans l'affaire Thomson, c'est qu'il était normal d'interdire les sondages, mais elle a posé la question suivante: si l'on veut vraiment atteindre l'objectif visé, ne faudrait-il pas exiger que la méthodologie soit indiquée afin que les gens puissent évaluer la validité des sondages? La Cour suprême a jugé que la période devrait être raccourcie et que l'on devrait exiger que lors de la publication d'un sondage, pour les premières 24 heures, celui qui le publie ou le diffuse fournisse certains renseignements sur sa méthodologie.

Le vice-président: Soyons clairs. Avant la décision, c'était 72 heures.

M. Peirce: C'est exact.

Le vice-président: Dans le projet de loi, c'est combien?

M. Peirce: C'est juste le jour du scrutin.

Le vice-président: Quand cela commence-t-il?

M. Peirce: À minuit.

Le vice-président: La veille au soir.

M. Peirce: Jusqu'à la fermeture du scrutin, le jour du scrutin. Cela fait moins de 24 heures.

Le sénateur Buchanan: Internet est-il couvert?

M. Peirce: Internet est également couvert, mais je veux que l'on sache que sont expressément exclues les pages Web personnelles, les sites personnels sur Internet. La définition publicité électorale se trouve à l'alinéa 319d).

Le vice-président: Cela s'applique-t-il à Internet?

Le sénateur Buchanan: Si le candidat a sa propre page Web, il peut y faire de la publicité.

Le sénateur Joyal: Cela vous inclurait-il?

Le sénateur Buchanan: Si j'étais candidat, oui.

M. Peirce: En effet.

Le sénateur Fraser: J'ai beaucoup de difficulté à comprendre en ce qui concerne les sondages d'opinions. Je pense à l'article 326. Si je comprends bien, cela interdirait la publication de sondages ayant fait l'objet de fuites, c'est-à-dire, de sondages partiels. Je ne vois pas en quoi c'est justifié. En tant qu'ancienne journaliste, je pense à des tas de situations où la publication de tels éléments de sondages, même s'ils étaient incomplets, servirait l'intérêt public, contribuerait à l'information publique. Ceci l'interdit carrément. Pourquoi? Ce doit être parce que sans moyen d'évaluer le sondage, il est quelque peu dangereux de le publier.

Le sénateur Fraser: Permettez-moi de monter ici une petite hypothèse. Supposez que je sois une journaliste qui couvre le parti A et que celui-ci fasse campagne sur une formule particulière comme la «souveraineté-association». Supposons que l'on me fournisse des documents ayant fait l'objet d'une fuite et que pour protéger l'identité du coupable, je ne reçoive pas le document au complet. Si ce document démontre que la formule du parti A est peut-être soigneusement choisie parce que nous voyons que les gens ne comprennent pas ce que cela signifie, que si on reformule les questions, on obtient des résultats différents, que l'on me donne des photocopies des résultats des sondages, probablement d'une firme de sondages réputée et qu'ainsi je ne puisse les publier. Cela parce que je n'ai pas la page couverture qui indique, par exemple, que 2004 répondants ont été interviewés entre le 3 et le 5 décembre, d'après la méthode statistique XYZ. Tout ce que j'ai c'est le contenu du sondage qui pourrait être utile pour que le public évalue l'honnêteté du parti A. Ai-je le droit de le publier?

M. Peirce: Vous pourriez faire un reportage là-dessus. Pour ce qui est de publier le sondage même, il me semble que cela serait en effet couvert par cet article et donc interdit.

Le sénateur Fraser: Il serait préférable pour moi de rapporter ce que mes lecteurs considéreraient comme une rumeur plutôt que des informations que j'ai entre les mains.

M. Peirce: Des informations qu'ils ne sont pas en mesure d'évaluer, en effet.

Le sénateur Fraser: Cela me dérange beaucoup.

Je m'intéresse également beaucoup à l'article 3 qui stipule que, sur demande, le demandeur doit fournir un exemplaire du compte rendu des résultats qui doit comprendre un certain nombre de choses. Tout d'abord, qui doit-il fournir, à n'importe qui?

M. Peirce: À quiconque en fait la demande.

Le sénateur Fraser: Cela inclus les comptes rendus de sondage sur un sujet particulier. Il peut arriver que ces sondages soient plus épais que ces cahiers d'information.

M. Peirce: Ils peuvent demander des frais.

Le sénateur Fraser: Je le sais, mais je crois que l'on risque de gros abus à cet égard.

Le paragraphe stipule aussi que le compte rendu doit comprendre la date et le moment de la journée où se sont déroulées les entrevues.

Mme Mondou: Peut-être puis-je expliquer cela. Par exemple, disons que vous interviewez tout le monde à la même heure de la journée. Vous avez peut-être interviewé des gens à domicile, ce qui peut vous donner un résultat particulier. Si vous n'interviewez pas des gens à différentes heures, cela peut être trompeur. Supposons qu'on ait appelé les gens à 7 heures du matin et qu'il n'y avait personne. Toutefois, le sondage indique quelque chose de différent. Si vous n'avez pas ces renseignements, vous risquez de mal interpréter les résultats. C'est ce que les spécialistes nous ont dit.

Le sénateur Fraser: Mon expérience des spécialistes est ce qu'ils décident de 77 catégories de gens qu'ils veulent atteindre un dimanche et qu'ils continuent à les appeler toute la journée jusqu'à ce qu'ils aient le quota nécessaire dans chaque catégorie.

Cette disposition m'ennuie moins que la précédente qui interdirait la publication d'un sondage qui a fait l'objet d'une fuite. Je regrette de dire que votre explication ne m'a pas convaincue.

Le sénateur Joyal: J'essaie de me rappeler les principes énoncés par la Cour suprême dans l'affaire Thomson que l'on a citée. D'après ce que disait le sénateur Fraser, la cour est partie du principe que la liberté d'expression devait être interprétée aussi largement que possible. Je me demande si les conditions énumérées à l'article 326 assureraient ce qui est raisonnable dans une société libre et démocratique. Comme vous le savez, il y a toujours une limite aux libertés énoncées, énumérées et confirmées dans la Charte des droits. Ce sont des limites raisonnables dans une société libre et démocratique.

Sachant comment la cour a interprété cette limite à l'interdiction des sondages, je ne suis pas convaincu que cet article ne sera pas contesté.

Supposons qu'il s'agisse d'un sondage fabriqué par quelqu'un qui a intérêt à le rendre public. Je préférerais que ce pseudo-sondage soit publié avec la réserve: «aucune indication sur la méthodologie», plutôt que d'être interdit de publication.

Je suis personnellement convaincu que cela soulève un problème fondamental en vertu de la Charte.

Le vice-président: Je pense qu'il serait préférable de poser la question au ministre demain. C'est un des amendements les plus importants qui est proposé. Cela fait suite à la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Thomson. Évidemment, pour ma part, j'aimerais que le ministre réponde à cette question demain. Je crois que nos témoins reviendront demain avec le ministre.

M. Peirce: C'est exact.

Le sénateur Buchanan: Je ne sais pas si des sondages aident ou gênent lors des élections, mais je vous raconterai une petite anecdote. Vous pourrez la vérifier.

Tous les samedis avant les élections de 1988 en Nouvelle-Écosse, trois candidats libéraux faisaient distribuer par des jeunes un exemplaire gratuit du Daily News aux gens qui faisaient la queue en voiture dans la région de Sackville-Bedford. Nos élections avaient lieu le mardi. Le samedi précédent, les voitures se suivaient pare-chocs contre pare-chocs sur la grand route. Lorsque les automobilistes s'arrêtaient au feu, on leur lançait un exemplaire gratuit du Daily News. La distribution s'est poursuivie pendant plus d'une heure jusqu'à ce quelqu'un remarque que la manchette disait: «Buchanan aurait 8 p. 100 de plus que les libéraux.» La distribution gratuite de ces journaux a duré plus d'une heure.

Quand nous en avons entendu parler, nous nous sommes dits que nos candidats de la région de Sackville et Bedford étaient très malins. Or, c'était des libéraux qui faisaient cela. Nous avons remporté tous les sièges de la région, mais je ne pense pas que le sondage nous ait aidés. Qu'en pensez-vous?

M. Peirce: Je ne peux pas répondre dans ce cas particulier.

Le sénateur Fraser: Il est normal de demander, quand c'est possible, la publication d'information technique. Il s'agit évidemment d'information pertinente. J'aimerais avoir plus de précisions sur ce qui justifie l'interdiction de la publication lorsqu'il n'est pas possible d'avoir cette information technique et, en particulier, l'imposition d'une telle interdiction durant toute la campagne. Ce serait peut-être un peu plus facile à comprendre pour les 72 dernières heures, mais pour toute la campagne, cela me semble difficile à justifier.

M. Peirce: Je voudrais préciser un ou deux détails. Tout d'abord, l'interdiction ne porte que sur 24 heures.

Le sénateur Fraser: L'interdiction de publication d'un sondage ayant fait l'objet d'une fuite s'applique à toute la période électorale.

M. Peirce: Seulement les 24 premières heures.

Le sénateur Fraser: Une fuite, par définition, est transmise au grand public.

Le vice-président: Une fuite, c'est autre chose.

Le sénateur Fraser: C'est ce qui m'inquiète. Si un organe de nouvelles réputé a demandé un sondage, il peut donner à la population toutes les données techniques qu'elle veut. Je m'inquiète des limites à la possibilité de publier des indications sur des informations peut-être partielles, mais très importantes.

M. Peirce: Il faut parvenir à un juste équilibre. Pouvons-nous trouver un système qui tient compte de cela tout en exigeant la publication? Sinon, nous risquons de nous retrouver avec simplement des sondages ayant fait l'objet de fuites.

Le sénateur Fraser: Non, avec des sondages médiatiques innombrables, comme actuellement.

M. Peirce: Pour que les choses soient bien claires, et je passe maintenant à l'article 327, les sondages qui ne sont pas statistiquement valides peuvent tout de même être publiés. On exige simplement que l'on indique qu'ils ne sont pas fondés sur une méthode statistique reconnue.

Le sénateur Fraser: Ce n'est pas ce qui me préoccupe.

M. Peirce: Je répondais au sénateur Joyal.

La sénateur Joyal: Cela ne change rien à ce que je disais à propos des sondages ayant fait l'objet de fuites. Les principes ne changent pas. Le principe et la définition de ce qui est raisonnable dans une société libre et démocratique ne changent pas. C'est essentiellement la limite que vous avez choisie pour définir cet article. Je ne voudrais pas vous blesser, mais c'est la façon dont vous avez interprété les limites raisonnables dans une société libre et démocratique. C'est essentiellement ce à quoi vous pensiez lorsque vous avez rédigé cet article.

Le sénateur Fraser dit que les mêmes principes doivent s'appliquer dans toutes les circonstances. On ne peut définir une façon d'appliquer le principe dans une série de sondages par rapport à une autre. Cela doit correspondre à l'interprétation que nous donnons de la liberté d'expression. Je ne trouve toujours pas cela très clair. Il faudra que je relise cela et que je relise l'arrêt Thomson pour m'assurer que ce que nous suggérons ne pourrait pas être contesté par la cour.

M. Peirce: Je vais passer aux tiers. Ce nouveau régime des tiers à la partie 17 fait l'objet de toute cette partie. Cela commence à l'article 349 et cela va jusqu'à l'article 362.

Il s'agit de quelque chose de nouveau. Tout d'abord, qu'est-ce qu'un tiers? Un tiers est une personne ou un groupe, à l'exception d'un candidat, d'un parti enregistré et d'une association de circonscription d'un parti enregistré qui fait de la publicité électorale. La publicité électorale consiste essentiellement à favoriser ou contrecarrer un parti enregistré ou l'élection d'un candidat, notamment par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat. Cela couvre la publicité à la télévision, à la radio, dans les périodiques, les panneaux d'affichage, les affiches, les banderoles et Internet.

Les tiers qui dépensent plus de 500 $ en publicité électorale doivent être enregistrés auprès du DGE. Ils sont tenus de faire certaines déclarations. Ils doivent déclarer toute contribution de plus de 200 $ reçue au cours des six mois précédant l'émission du bref d'élection et durant la période électorale qui vise des activités électorales -- publicité électorale, notamment. Si un tiers ne peut indiquer quelles activités peuvent être qualifiées d'électorales, il doit indiquer toutes les contributions de plus de 200 $ reçues au cours de cette période. Il doit aussi déclarer ses dépenses publicitaires durant la période électorale. Si ces dépenses dépassent 5 000 $, un rapport vérifié devra être présenté.

Il existe donc des limites de dépenses pour la publicité électorale, dont vous avez déjà beaucoup entendu parler. La limite nationale est de 150 000 $ pour chaque tiers. Ils peuvent soit faire de la publicité à l'échelle nationale sur des questions nationales, soit faire de la publicité dans leur circonscription au niveau de la circonscription.

Le sénateur Joyal: Ce montant de 150 000 $ s'applique-t-il au niveau de la circonscription?

M. Peirce: Ce montant de 150 000 $ est le total maximum pour toutes les circonscriptions. Pour chaque circonscription, la limite est de 3 000 $.

Le vice-président: Que se passe-t-il si le montant dépasse 1 000 $?

M. Peirce: Il y a alors un rapport vérifié.

Le vice-président: Pourrait-il s'agir de n'importe quel montant, même de 1 million de dollars? Si l'unique exigence c'est d'avoir un rapport vérifié?

M. Peirce: Non, il faut un rapport vérifié si on dépense plus de 5 000 $, mais le montant à l'échelle nationale est limité à 150 000 $.

Le vice-président: C'est la limite.

M. Peirce: Oui. Vous ne pouvez pas dépenser plus, indépendamment du rapport vérifié. La limite de 3 000 $ s'applique aussi à chaque élection complémentaire.

Des sanctions sont prévues en cas de collusion. L'interdiction est prévue au paragraphe 496(2) du projet de loi. Les sanctions prévues au paragraphe 500(5) du projet de loi comprennent entre autres une peine, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, de 2 000 $ ou un an d'emprisonnement ou, par mise en accusation, de 5 000 $ ou de cinq ans d'emprisonnement. Le paragraphe 500(6) du projet de loi prévoit aussi une sanction supplémentaire. Ceux qui dépassent ou contournent les limites de dépenses, peuvent se voir imposer une amende dont le montant est cinq fois plus élevé que l'excédent du montant de la limite de dépenses.

Le sénateur Fraser: Quel est l'article du projet de loi portant sur la collusion?

M. Peirce: L'article qui porte expressément sur la collusion? Je dois vérifier.

Mme Mondou: Il s'agit de l'article 351 du projet de loi.

M. Peirce: Cela nous amène au système d'administration financière, et c'est peut-être le moment de conclure pour aujourd'hui.

Le vice-président: Il est maintenant 17 h 30. Nous poursuivrons demain à 10 h 45 en compagnie du ministre. Je crois que vous accompagnerez le ministre.

M. Peirce: C'est exact.

Le vice-président: Nous aurons besoin de passer au moins une heure de plus avec vous.

Le sénateur Joyal: Si nos témoins reviennent demain, serait-il possible d'obtenir un tableau qui indique, sous forme de résumé, les dispositions proposées qui traduisent les décisions de la Cour suprême concernant la Charte des droits?

M. Peirce: Bien sûr.

Le vice-président: C'est une bonne suggestion. Habituellement nous avons de la documentation, les témoins parlent pendant environ 10 ou 15 minutes, puis nous posons des questions. Aujourd'hui, nous avons procédé différemment et cela nous a donné plus de temps.

Le sénateur Fraser: Serait-il aussi possible de nous fournir une comparaison entre le régime prévu dans ces dispositions, relativement aux tiers, et le régime en vigueur au Québec depuis un certain temps?

M. Peirce: Cela nous prendra un peu de temps.

Le sénateur Fraser: Je ne vous demande pas quelque chose de très détaillé ni de juridique, mais j'aimerais avoir un aperçu de la façon dont les deux régimes fonctionnent et les principales constatations découlant de l'expérience du Québec. Je ne vous demande pas de le justifier. Je pense que les limites imposées aux tiers sont appropriées, mais il serait utile d'avoir cette information.

Le vice-président: Je vous remercie.

La séance est levée.


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