Délibérations du sous-comité sur
Le développement économique des autochtones
relativement aux parcs nationaux du Nord
Fascicule 2 - Témoignages du matin
OTTAWA, le lundi 18 septembre 2000
Le sous-comité sur le développement économique des Autochtones relativement aux Parcs nationaux du Nord se réunit aujourd'hui à 9 h 10 pour examiner les possibilités d'accroître le développement économique, y inclus le tourisme et l'emploi, associé aux Parcs nationaux du Nord du Canada, en respectant les paramètres des accords existants sur des revendications territoriales globales et d'autres accords connexes avec les peuples autochtones et en conformité des principes de la Loi sur les parcs nationaux.
Le sénateur Ione Christensen (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Honorables sénateurs, nous entamons notre étude des parcs du Nord et du développement économique visant les Premières nations vivant dans les parcs ou dans les alentours.
Nous sommes heureux d'accueillir M. Amos, qui nous fera le premier exposé. Vous avez la parole.
M. Bruce Amos, directeur général, Parcs nationaux, Parcs Canada: Mesdames et messieurs les sénateurs, au nom de Parcs Canada, je vous remercie de votre invitation à participer à cette étude. Nous sommes heureux de pouvoir travailler avec vous et avec vos collaborateurs.
Je travaille à Parcs Canada depuis presque 30 ans. J'ai participé à la création de la plupart des nouveaux parcs dans le Nord du Canada.
M'accompagnent aujourd'hui deux fonctionnaires autochtones qui sont des cadres supérieurs à Parcs Canada et qui ont de l'expérience du travail dans le Nord. Steve Langdon est directeur du Secrétariat des affaires autochtones du ministère et Rob Prosper est directeur du parc national des Îles-de-la-baie-Georgienne du Canada. Il n'y a pas longtemps, il était à Nahanni. Nous ferons ensemble un exposé en trois parties. Les fonctionnaires de Parcs Canada auront également l'occasion de s'entretenir avec vous lorsque vous vous rendrez à Inuvik, Iqaluit, Whitehorse et Haines Junction.
La présidente: Y serez-vous?
M. Amos: Non, je ne serai pas là. Nos fonctionnaires sur place pourront vous dire ce qu'il en est exactement.
L'Agence Parcs Canada a été créée par une loi du Parlement et a commencé ses activités en 1999. Elle relève du ministre du Patrimoine canadien, l'honorable Sheila Copps. Aux termes de la loi portant création de l'Agence, celle-ci est chargée d'administrer au nom de tous les Canadiens les parcs nationaux, les lieux historiques nationaux et les autres sites du patrimoine canadien, y compris notre réseau de rivières du patrimoine. En un sens, nous partageons cette responsabilité avec tous les Canadiens d'un océan à l'autre.
Nous sommes heureux que vous ayez décidé de concentrer votre attention sur les retombées économiques et les possibilités de développement économique dans le contexte des parcs nationaux du Nord. Nous sommes fiers du travail que nous avons accompli dans le Nord en collaboration avec les peuples autochtones, les gouvernements des territoires et les collectivités. Nous sommes impatients d'entendre vos délibérations et de lire vos recommandations, qui seront certainement utiles à nous et à d'autres qui travaillent dans le Nord en nous aidant tous à améliorer notre travail.
Nous estimons que ce que nous faisons dans le Nord, surtout en collaboration avec les peuple autochtones et leurs collectivités, constitue une importante contribution à l'initiative du gouvernement du Canada appelée Rassembler nos forces qui a été lancée en réponse au récent rapport de la Commission royale. Nous abordons toujours notre travail dans ce contexte et nous sommes convaincus d'apporter une contribution spéciale.
L'histoire des parcs nationaux remonte en 1885 avec la création du parc national Banff. À l'exception d'une petite parcelle du parc national Wood Buffalo, il n'y avait pas de parc national dans le Nord du Canada avant 1970. Trois zones dans le Nord, dont Kluane, ont été désignées réserves de parc national au début des années 70.
Les années qui ont suivi ont été consacrées aux revendications territoriales globales des Autochtones. Pendant cette période, une certain nombre de ces revendications ont été réglées. Par la suite, on a réussi à créer des parcs nationaux. Certains de ces parcs se trouvaient à l'intérieur du territoire faisant l'objet d'une revendication; d'autres ont été créés dans le cadre des revendications territoriales. Il y a aujourd'hui dans le nord du Canada 10 parcs nationaux et réserves de parc national.
Nous considérons que les parcs nationaux du nord du Canada sont le résultat d'une collaboration fructueuse entre Parcs Canada, les organismes autochtones, les collectivités locales et les gouvernements des territoires. Qu'est-ce qui explique que nous ayons pu parvenir ces dernières années à ce degré de collaboration? La création de ces parcs aurait été impossible sans l'assentiment non seulement des gouvernements des territoires mais aussi, et surtout, des organismes autochtones.
Plusieurs choses expliquent une si bonne entente. Premièrement, nous avons les mêmes objectifs en matière de conservation et de développement économique des collectivités. Deuxièmement, les activités autochtones traditionnelles se poursuivront dans ces nouveaux parcs nationaux en reconnaissance des droits énoncés dans les accords de règlement des revendications territoriales globales. Troisièmement, nous avons réussi à établir des modalités de cogestion des parcs avec les populations autochtones et d'autres intervenants.
J'aimerais souligner que chacun des nouveaux parcs nationaux dans le Nord fait l'objet d'une entente particulière pour la création d'un parc qui a été négociée avec les gouvernements des territoires et les organismes autochtones. Certaines de ces ententes ont été intégrées aux accords de règlement des revendications territoriales; d'autres ont été conclues dans le cadre de tels accords. Tous ensemble, nous faisons oeuvre de pionniers dans le Nord.
J'aimerais vous décrire brièvement les trois principaux éléments du cadre législatif et administratif dans lequel nous travaillons. Premièrement, la Loi sur le parcs nationaux fait actuellement l'objet de propositions de modification dont le Sénat est saisi sous la forme du projet de loi C-27. Cette loi et ces modifications réaffirment que la préservation de l'intégrité écologique est notre principal objectif dans la gestion des parcs nationaux. Deuxièmement, les dispositions des accords sur les revendications territoriales globales et des ententes particulières pour la création d'un parc qui ont été conclues lorsque ces parcs ont été établis constituent un important point de départ. Bien sûr, les accords sur les revendications territoriales sont protégés par notre Constitution, tandis que les ententes pour la création d'un parc sont des accords officiels entre le gouvernement et d'autres parties. Le troisième élément de base est un énoncé de principe qui fournit à Parcs Canada des lignes directrices et des plans d'action. Ce document oriente les activités que nous entreprenons avec nos partenaires.
Je tiens à mentionner le rapport sur l'intégrité écologique des parcs nationaux du Canada qui a été présenté dernièrement à notre ministre. Ce rapport et les travaux du groupe d'experts qui l'a rédigé ont porté surtout sur les parcs du Sud, où les menaces sont les plus évidentes. Les auteurs du rapport soulignent le fait que les pressions qui s'exercent sur nos parcs nationaux viennent non seulement de l'intérieur des parcs mais aussi bien souvent de forces agissant à l'extérieur des parcs, par exemple les activités industrielles en aval, les précipitations acides ou le changement climatique. Le rapport, que la ministre a accueilli très favorablement, insiste sur le fait que notre première priorité dans la gestion des parcs nationaux consiste à protéger leur intégrité écologique pour que les générations futures puissent également en jouir. Le groupe d'experts a présenté des recommandations dont la mise en oeuvre a été entamée et qui font l'objet de pourparlers avec les partenaires.
En réponse au rapport, la ministre a annoncé un plan d'action. Elle a demandé au directeur général de Parcs Canada, M. Tom Lee, de rendre public un rapport faisant état de notre progrès dans la mise en oeuvre de ces recommandations; ce rapport paraîtra en novembre. Selon nous, votre étude constitue un complément à ce travail, qui est consacré particulièrement aux parcs nationaux du Nord et aux possibilités de développement économique dans ce contexte.
Parcs Canada a défini cinq priorités générales pour le parcs nationaux. La première priorité est la préservation et le rétablissement de l'intégrité écologique de nos parcs nationaux, en accordant une attention particulière aux parcs du sud, qui sont les plus menacés. Notre deuxième priorité visera à toujours assurer des services de qualité pour les visiteurs. Troisièmement, nous continuerons à travailler à étendre le réseau des parcs nationaux en collaboration avec les provinces, les territoires et les peuples autochtones. Quatrièmement, nous adoptons d'autres mesures en vue de mettre les Canadiens en contact avec leur patrimoine dans toutes les régions du pays par l'entremise de nos programmes d'interprétation et de nos activités de diffusion externe. Cinquièmement, nous multiplierons les efforts -- et la ministre a insisté là-dessus -- pour mettre de l'ordre dans nos finances.
J'aimerais vous en dire un peu plus long sur les deux premiers points. Comme je l'ai dit, nous avons 10 parcs nationaux dans le nord du Canada. Notre but a toujours été de représenter chacun des grands écosystèmes du Canada, chacune des grandes régions naturelles dans notre réseau de parcs nationaux. Je veux surtout parler ici du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut. Nous poursuivons des activités dans d'autres régions du Nord également. Il y a cinq régions naturelles dans les territoires du Nord qui ne sont pas encore représentées. Dans l'une de ces zones, nous poursuivons activement les négociations avec les Inuits en vue d'établir un nouveau parc national. Dans deux autres des régions, des projets sont sérieusement à l'étude. Dans une quatrième zone, des terres ont été mises à part depuis un certain temps et nous adopterons les mesures nécessaires au rythme qui conviendra à la collectivité autochtone locale. En ce moment, cette population a d'autres priorités. Nous n'avons pas terminé nos études initiales dans le cas de la cinquième zone. En plus des parcs nationaux et des réserves qui ont déjà été créés et qui sont aménagés, il y a des travaux concrets qui se poursuivent dans d'autres parties du pays.
Pour ce qui est de la priorité «mettre nos finances en ordre», je reprends ce que la ministre a déjà dit: il y a trois grands domaines où Parcs Canada, sous la direction de la ministre Copps, essaie de trouver des ressources additionnelles pour le programme. Mentionnons d'abord la gestion de nos actifs, qui englobent les routes et les immeubles, et qui s'élèvent à environ 8 milliards de dollars. Comme de nombreux autres ministères gouvernementaux, nous nous efforçons de maintenir ces actifs et d'en assurer la pérennité.
Vient ensuite la création de nouveaux parcs nationaux, et aussi de parcs historiques nationaux. La ministre a clairement laissé entendre que sans ressources additionnelles, nous ne serons pas en mesure de créer de nouveaux parcs nationaux. Or, au cours des dernières années, nous avons financé la création de certains parcs nationaux et historiques en puisant dans notre budget. La ministre a clairement indiqué que cette époque était révolue. Nous ne pouvons plus avoir recours à cette pratique.
Enfin, il y a l'obtention de fonds en vue de répondre aux recommandations de la Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux du Canada. La ministre a mentionné très clairement qu'elle va présenter une demande en vue d'obtenir ces fonds.
Je voudrais, pour terminer, vous parler brièvement des occasions de développement économique. Les ententes de règlement des revendications territoriales et de création de parcs prévoient des dispositions précises qui portent sur le développement économique. J'aimerais vous donner une idée de la nature des engagements que nous avons pris relativement à la création de nouveaux parcs nationaux dans le Nord. Prenons, par exemple, l'entente signée en août dernier par la ministre en vue de la création de nouveaux parcs nationaux au Nunavut, soit Sirmilik, Auyuittuq et Quttinirpaaq. Cette entente prévoit le versement d'une subvention unique de 3 millions de dollars aux Inuits pour assurer le développement économique des collectivités touchées par l'établissement de parcs nationaux, un fonds de bourse d'études pour les jeunes Inuits, des dispositions donnant aux Inuits la priorité en ce qui concerne l'acquisition de permis d'exploitation de commerce dans le parc et l'accès aux emplois, et le financement de six études de développement touristique touchant les six collectivités inuites situées près de ces nouveaux parcs. Une somme de 250 000 $ sera consacrée à chacune de ces études; ces fonds serviront notamment à élaborer des plans de développement touristique pour les parcs nationaux. Des discussions sont en cours en vue de conclure des ententes similaires pour le nouveau parc national situé près de la baie Wager.
Les parcs nationaux entraînent divers impacts économiques, certains à cause des dépenses liées aux projets et aux salaires des employés. Ces dépenses ne sont pas énormes parce que nous n'avons pas un gros budget, sauf qu'elles représentent des coûts fixes et permanents. D'autres sont attribuables aux visiteurs qui se rendent dans les parcs nationaux, utilisent les installations locales et prennent par à des visites guidées. Ces dépenses ont un effet multiplicateur.
Il est important d'avoir des attentes réalistes au sujet du rôle que Parcs Canada peut jouer au chapitre du développement économique, et aussi au sujet des retombées économiques qu'entraîne la création de parcs nationaux. Nous essayons de ne pas surestimer ces retombées et le nombre de personnes qui visitent les parcs, parce que ces chiffres ne sont pas significatifs. Il est inutile de laisser entendre que nous allons attirer 10 000 personnes dans un parc alors qu'il n'y en aura que 500 qui vont s'y rendre. Nous réalisons, dans le cadre du processus de consultation qui précède la création d'un nouveau parc, des études d'impact économique de concert avec nos partenaires, et nous essayons d'évaluer ces impacts de façon réaliste pour que nous sachions à quoi nous attendre.
Parcs Canada doit absolument collaborer avec les autres en vue de générer des retombées économiques pour les parcs nationaux. Nous ne sommes pas une agence de développement économique en tant que telle, même si nous collaborons avec d'autres dans ce domaine. Nous devons collaborer avec les organisations autochtones, les gouvernements territoriaux, les ministères fédéraux et les collectivités pour obtenir les retombées que nous voulons.
Je me suis demandé, au moment de préparer mon exposé, s'il n'y avait pas des questions sur lesquelles vous pourriez vous pencher. Sans vouloir vous proposer des réponses, j'ai pensé qu'il serait utile, en me fondant sur mon expérience, de vous en soumettre quelques-unes. Premièrement, comment faire en sorte que le développement touristique fasse l'objet d'un effort collectif, que chaque collectivité décide du type d'activité et d'influx touristiques qu'elle désire, et auquel elle peut s'adapter? Deuxièmement, quel genre de formation, de soutien en marketing ou d'aide financière pouvons-nous offrir pour appuyer le développement de produits touristiques? Pouvons-nous fournir une aide quelconque -- du moins à l'étape initiale? Troisièmement, comment attirer les visiteurs? Quatrièmement, comment faire en sorte que les collectivités profitent des retombées que génèrent les touristes qui visitent les parcs nationaux du Nord, que ces retombées ne prennent pas le chemin du Sud ou de l'étranger? Cinquièmement, comment améliorer la collaboration de manière générale? J'ai parlé plus tôt de la nécessité de collaborer avec tous les partenaires. Que devons-nous faire pour améliorer cette collaboration? Sixièmement, comment assurer la viabilité environnementale, économique et sociale à long terme des parcs nationaux qui font l'objet de développement économique?
Je vais maintenant, avec votre accord, céder la parole à Rob Prosper, qui va nous présenter un diaporama.
La présidente: Nous devrions entendre l'exposé au complet avant de passer aux questions, parce qu'on pourrait répondre à certaines d'entre elles en cours de route.
M. Amos: On nous a demandé d'apporter des diapositives sur les parcs et les collectivités dans le Nord. M. Prosper va vous les présenter.
M. Rob Prosper, directeur, parc national des Îles-de-la-Baie- Georgienne, Parcs Canada: Je suis le directeur du parc national des Îles-de-la-Baie-Georgienne, qui est situé en Ontario. J'ai quitté tout récemment les Territoires du Nord-Ouest, où j'ai occupé pendant sept ans le poste de directeur du parc national Nahanni. Au cours des dix prochaines minutes, je vais vous donner une idée des paysages et de la faune qui caractérisent les parcs nationaux du Nord du Canada, et des possibilités qui s'offrent aux visiteurs qui s'y rendent. Je vais également vous parler de la gestion de l'intégrité écologique et des efforts que nous déployons pour commémorer l'histoire des Autochtones.
Quand vous allez vous rendre dans le Nord, vous allez entendre des témoins de quatre collectivités -- Iqaluit, Inuvik, White Horse et Haines Junction. Ces témoins vous parleront des huit parcs nationaux qui sont situés à proximité de leurs collectivités. Cet exposé porte sur ces huit parcs.
Le premier, le parc national Auyuittuq, est situé dans le sud de l'île de Baffin, dans l'Arctique de l'Est. Les deux collectivités adjacentes sont Pangnirtung, porte d'entrée du parc, et Qikiqtarjuaq, qui portait anciennement le nom de Broughton Island. «Auyuittuq» signifie «la terre qui ne dégèle jamais» en Inuktitut. Auyuittuq est réputé pour ses montagnes élevées, ses vastes champs de glace et ses vallées profondes. Il y a très peu de végétation, et les espèces sauvages y sont rares.
Voici Pangnirtung, porte d'entrée du parc national. C'est là que se trouve le bureau du parc, qui sert de catalyseur pour le développement économique de la collectivité, puisqu'on y trouve maintenant un atelier d'imprimerie, un atelier de tissage, un centre d'accueil, ainsi de suite.
Pour ce qui est des partenariats et de l'intégrité écologique, Parcs Canada entretient depuis longtemps de bons rapports avec les habitants de Pangnirtung. Certains de ces rapports ont été régularisés par suite de la signature, en 1999, de l'Entente sur les répercussions et les avantages pour les Inuits relativement au parc national de l'île de Baffin. De nouvelles possibilités de partenariat sont en train de voir le jour.
Voici une photo du col Asiak avec, au loin, le mont Thor. Le parc accueille chaque année environ 500 visiteurs. Comme pour tous les parcs situés dans le Nord, l'accès peut être coûteux, et la saison touristique, très courte. Les activités les plus populaires à Auyuittuq sont les randonnées pédestres, le camping et l'alpinisme.
Voici maintenant le parc Quttinirpaaq, qui est situé sur l'île d'Ellesmere, l'île la plus septentrionale du Canada. La collectivité la plus proche est Grise Fiord, mais Resolute Bay sert de porte d'entrée au parc. «Quttinirpaaq» signifie «au sommet du monde» en Inuktitut. C'est un nom tout à fait approprié. Ce parc national est sans aucun doute le plus isolé au Canada. Il a été créé en partie pour affirmer la souveraineté du Canada dans l'Arctique.
Le sénateur Cook: À quel moment de l'année ces photos ont-elles été prises?
M. Prosper: Elles ont sans doute été prises en juillet.
Quttinirpaaq est le deuxième parc national en importance au Canada, après Wood Buffalo. Il se caractérise par des montagnes escarpées, de vastes glaciers, des basses terres végétalisées et des vallées. On y trouve des centaines de sites archéologiques, preuve que l'homme a utilisé et occupé ces terres pendant des milliers d'années. Il y a également un lieu historique important à Fort Conger, lieu qui a d'abord été occupé dans les années 1880 par une expédition américaine qui effectuait une étude approfondie sur les régions polaires. Au début des années 1900, Robert Perry y a passé l'hiver alors qu'il tentait d'atteindre le pôle Nord.
Voici Kavavow Kiguktak, à l'oeuvre dans le bureau du parc du fjord Tanquary. Kavavow réside à Grise Fiord; il a travaillé comme gardien de parc à Quttinirpaaq pendant de nombreuses années.
Comme le parc Quttinirpaaq est isolé, situé dans un endroit éloigné, et que la saison touristique est très courte, il accueille moins d'une centaine de visiteurs chaque année, bien que ce chiffre puisse facilement doubler ou tripler, suivant le nombre de paquebots de croisière qui s'y rendent. Il protège un vaste territoire de même que la flore et la faune qui s'y trouve, dont le caribou Peary, espèce en voie de disparition dans presque toute la région.
La présidente: Vous avez parlé des paquebots de croisière.
M. Prosper: Oui
La présidente: Est-ce qu'il y en a beaucoup qui s'y rendent?
M. Prosper: Il y en a plusieurs.
M. Doug Harvey, Parcs Canada: Il peut y en avoir jusqu'à deux ou trois par année. Il y a parfois des brise-glace russes qui s'y rendent. Cela ne se produit pas tous les ans, mais il nous arrive d'accueillir, l'été, deux ou trois paquebots. Habituellement, le navire jette l'ancre au large des côtes et les visiteurs utilisent des hélicoptères ou des canots pneumatiques pour se rendre jusqu'au parc.
La présidente: Est-ce qu'il s'agit d'excursions d'un jour?
M. Harvey: Oui.
M. Prosper: Le parc national Sirmilik se trouve sur l'île Bylot, située à l'extrémité nord de l'île de Baffin. Les deux collectivités les plus proches sont Pond Inlet, porte d'entrée du parc, et Artic Bay. «Sirmilik» signifie «terre des glaciers», nom qui a été choisi par les résidents de la localité.
Sirmilik est le plus récent parc national du Canada, et le troisième en importance. Il est réputé pour ses fjords spectaculaires, ses vastes champs de glace et ses basses terres côtières. Les touristes se rendent à Pond Inlet depuis de nombreuses années pour admirer le paysage septentrional et se familiariser avec la culture inuite. On s'attend à ce que les activités les plus populaires à Sirmilik soient le kayak, les excursions pédestres, le camping et l'observation de la faune. Le parc national Sirmilik protège trois grandes colonies d'oiseaux de mer et constitue un habitat important pour les ours polaires, les grandes oies blanches, d'autres types d'oiseaux et les espèces sauvages. L'observation des mammifères marins et les ressources culturelles offrent au visiteur la possibilité de vivre une expérience enrichissante.
Parcs Canada est en train de s'installer à Pond Inlet. Nous allons louer un bureau dans la collectivité, près du centre d'accueil. Comme il a pour mandat, entre autres, d'assurer l'intégrité écologique, Parcs Canada tentera de trouver de nouvelles façons de collaborer avec les Inuits en vue d'atteindre les objectifs communs de conservation, d'éducation et d'écotourisme.
Avant de passer aux parcs nationaux qui sont situés dans l'Arctique de l'Ouest, j'aimerais vous dire quelques mots au sujet d'une autre initiative importante de Parcs Canada, soit la commémoration de l'histoire des Autochtones. Parcs Canada travaille depuis quelque temps déjà avec les peuples autochtones du Nord à mieux représenter l'histoire des Autochtones dans le réseau des lieux historiques nationaux du Canada. Nous voici, sur cette photo, en train de recueillir les récits oraux et les connaissances traditionnelles d'anciens, à Igloolik. Notre objectif est de mieux commémorer l'histoire des Autochtones dans le Nord. Nous avons conclu des ententes à frais partagés en vue d'ériger au Nunavut des lieux historiques nationaux qui commémorent des aspects importants de l'histoire et de la culture des Autochtones. Parmi les sites visés figurent Arvia'juaq et Qikiqtaarjuk, collectivités adjacentes à Arvia, et Passage-des-Caribous-en-Automne, près de Baker Lake. Dans les Territoires du Nord-Ouest, le mont Grizzly Bear, les collines Scented Grass, de même que la pêcherie de Déline ont été désignés lieux historiques nationaux en 1999. Ces recommandations et désignations représentent l'aboutissement de plusieurs années de recherche et de gestion coopératives entre Parcs Canada et les Dénés du Sahtu.
Passons maintenant aux parcs de l'Arctique de l'Ouest. Le parc national Aulavik est situé sur l'île Banks, dans l'Arctique de l'Ouest. Les collectivités les plus proches sont Sachs Harbour, la seule collectivité que l'on trouve sur l'île, et Inuvik, porte d'entrée du parc. Le nom «Aulavik» a été choisi par les résidents de Sachs Harbour. Il signifie «lieu de passage» en Inuvialuktun. Aulavik se caractérise par une toundra valonneuse, de vastes vallées fluviales et des bad-lands désertiques. Les riches vallées fluviales sont habitées par des caribous, des boeufs musqués, des loups et autres animaux sauvages. On voit souvent des ours polaires le long de la côte. Aulavik est occupée par l'homme depuis des milliers d'années, et il y a des douzaines de sites archéologiques dans le parc national. Voici une photo d'une ancienne cache pour nourriture. Aulavik demeure toutefois un des parcs les plus isolés et les moins visités du Canada. L'accès y est difficile et coûteux, et la saison touristique, très courte.
On trouve à Aulavik certains des habitats de boeuf musqué les plus fertiles au monde. La population animale atteint maintenant un niveau très élevé. L'homme chasse le boeuf musqué dans cette région depuis des milliers d'années. Un voyage le long de la rivière Thomsen, l'observation d'une grande variété d'animaux sauvages et les ressources culturelles impressionnantes offrent aux visiteurs la possibilité de vivre une expérience unique.
Le parc national Ivvavik est situé au nord du Yukon. Les localités les plus proches sont Aklavik, située dans le delta du Mackenzie, et Inuvik, qui est la porte d'entrée du parc. Le nom «Ivvavik» fait référence au rôle très important que joue le parc comme pouponnière de la faune, et surtout du caribou. Des montagnes escarpées, des rivières profondes et la vaste plaine côtière qui longe la mer de Beaufort caractérisent son paysage. Le parc accueille une centaine de visiteurs chaque année. Les activités les plus populaires sont la descente de la rivière Firth en radeau pneumatique, la randonnée dans les monts British et la visite d'emplacements culturels associés à l'histoire humaine de la région. Le parc national Ivvavik protège un important habitat de la harde de caribous de la Porcupine, qui se déplace entre le Canada et l'Alaska, suivant la saison. Créé en 1984 avec l'aide de l'Inuvialuit, le parc est le premier parc national établi au Canada dans le cadre d'un accord global sur les revendications territoriales.
Pour ce qui est de l'intégrité écologique ainsi que de la santé et de la survie à long terme du troupeau de caribous de la Porcupine, nous travaillons en collaboration avec le gouvernement américain ainsi que les agences des gouvernements fédéral, territoriaux et autochtones afin d'améliorer la gestion écosystémique de toutes les espèces sauvages vivant dans le parc.
Le parc national Tuktut Nogait se trouve près de la côte de l'Arctique, à l'est d'Inuvik et au nord du Grand Lac de l'Ours. Paulatuk, qui compte 250 habitants, est la localité la plus proche et le point d'accès pour la plupart des visiteurs. C'est la porte d'entrée du parc et on y trouve le nouveau bureau du parc. «Tuktut Nogait» signifie «mise bas de caribous» en Inuvialuktun, et c'est le nom que les aînés ont choisi pour désigner le parc national. Le parc protège les aires de mise bas du troupeau Bluenose de petits rennes arctiques, ainsi que d'autres attraits naturels et culturels importants.
Le parc Tuktut Nogait est l'un des parcs nationaux les plus récents du Canada. Il est réputé pour sa toundra particulière, ses canyons spectaculaires et ses innombrables étangs et lacs. En saison, on y trouve beaucoup de caribous, de boeufs musqués et de grizzlis. Nous croyons que les grandes randonnées pédestres et le camping, ainsi que l'observation et la photographie de la faune seront les activités les plus populaires. Outre les aires de mise bas des caribous, le parc Tuktut Nogait protège de grandes populations d'aigles, de rapaces et de faucons qui vivent le long des canyons. Les paysages de toundra et la faune abondante offrent aux visiteurs une expérience en milieu sauvage unique en son genre.
Le parc national Vuntut est situé au nord du Yukon, à côté du parc national Ivvavik. La localité la plus proche est Old Crow, au sud, qui est la porte d'entrée du parc. Le parc Vuntut est constitué de vastes terres humides, qu'on appelle la plaine Old Crow, et de contreforts à l'extrémité nord. La plaine est très fertile et abrite une grande population de rats musqués, des castors et d'orignaux.
Le village d'Old Crow est établi sur le bord de la rivière Porcupine qui, toute l'année, est une voie de communication importante pour les résidents. Le parc national est assez récent et n'a accueilli à ce jour que peu de visiteurs. Darrius Kassi habite à Old Crow. Il travaille comme gardien de parc et il a été prêté à la Première nation Vuntut Gwitchin dans le cadre d'un programme d'échange de deux ans. On le voit ici faire sa ronde près du ruisseau Black Fox.
Le parc Vuntut est assez étendu et protège les ressources naturelles et culturelles d'une importance nationale et internationale. On y trouve notamment un habitat important de canards, d'oies et de sauvagine, des ressources culturelles associées à l'isthme paléogéographique de Béring qui datent de 30 000 ans et un habitat important de la harde de caribous de la Porcupine, un trésor international que nous partageons avec l'Alaska. Le parc national est visé par un régime étendu de conservation dont les principaux objectifs sont la conservation et la gestion coopérative.
Le parc national Kluane est situé au sud-ouest du Yukon, à côté de l'Alaska et de la Colombie-Britannique. Ce parc a été désigné site du patrimoine mondial par les Nations Unies en 1985. Haines Junction est la porte d'entrée du parc et on y trouve le centre d'accueil et le bureau du parc.
C'est en 1972 que la réserve de parc national Kluane a été constituée en attendant le règlement des revendications territoriales autochtones; ce parc national est l'un des plus réputés au Canada en raison des paysages spectaculaires qu'offrent ses vastes champs de glace et ses glaciers impressionnants, et de sa proximité de l'autoroute de l'Alaska. Les vallées du parc sont très fertiles et le parc abrite un grand nombre d'espèces sauvages. Sur cette diapositive, on voit les champs de glace du parc Kluane et le mont Logan au loin. Le mont Logan est le plus haut sommet du Canada, et ses champs de glace sont parmi les plus importants au monde à l'extérieur des pôles. Des milliers de visiteurs se rendent chaque année aux abords du parc Kluane, mais les visites prolongées dans les secteurs plus éloignés du parc sont aussi populaires. La randonnée, le camping et la descente de la rivière Alsek sont les activités les plus pratiquées, et on y fait aussi de l'alpinisme.
Pour ce qui est de l'intégrité écologique, Parcs Canada travaille et continuera de travailler en collaboration avec les principaux intervenants pour établir des partenariats en vue d'une gestion écosystémique de la région.
Quand vous vous rendrez dans le Nord pour entendre des témoins, je sais qu'on vous parlera plus en détail de certains des sujets que j'ai abordés dans ma courte présentation. J'espère que ces diapositives ont montré que tous nos parcs nationaux font partie de l'héritage que nous réservons à nos enfants et aux générations futures. Nos parcs nationaux sont des trésors nationaux importants.
M. Steve Langdon, Secrétariat aux affaires autochtones, Parcs Canada: J'occupe le poste de directeur du Secrétariat aux affaires autochtones depuis plus d'un an. Auparavant, j'ai travaillé un certain nombre d'années à Fort Simpson comme directeur du parc National Nahanni et comme directeur du parc Churchill pendant un certain temps. Juste avant d'accéder à mon poste actuel, j'ai été directeur du parc national Gwaii Haanas pendant environ trois ans. Aujourd'hui, je vais vous parler plus en détail de gestion coopérative ainsi que du tourisme autochtone et du développement économique.
Dans l'ensemble, l'objectif de la gestion coopérative est d'assurer la participation des peuples autochtones au processus décisionnel. La nécessité de créer et de maintenir des liens solides avec les peuples autochtones est une des priorités de Parcs Canada, et la gestion coopérative est un des moyens d'y parvenir. Pour moi, cette forme de gestion est un processus évolutif qui est devenu pratique courante dans les parcs du nord et du sud où les intérêts des Autochtones sont importants.
Nous avons convenu, de façon formelle ou non, des modalités de travail avec les peuples autochtones. Tous les accords actuels à ce sujet prévoient la représentation des peuples autochtones au sein des conseils d'administration. Les revendications territoriales ouvrent souvent la voie à la gestion coopérative en prévoyant, comme dans le cas des parcs, des types et des structures de gestion coopérative, qui peuvent toutefois différer. Par exemple, la composition des organismes peut varier. Parcs Canada a aussi conclu des ententes de gestion coopérative en dehors des revendications territoriales, surtout dans le sud. Par exemple, on a conclu une entente avec les Métis dans le cas du lieu historique national de Batoche, et des liens ont été établis avec le conseil des nations Haida pour la gestion de la réserve du parc national Gwaii Haanas.
Les modèles de gestion coopérative varient en fonction du contexte local. En effet, la gestion du parc national de Kluane n'est pas la même que celle qui existe au Nunavut. Toutes les ententes de gestion coopérative sont de nature consultative. C'est leur élément commun parce que tous les conseils d'administration et toutes les structures remplissent des fonctions consultatives auprès de la ministre.
Même si les structures diffèrent, il y a habituellement une représentation équilibrée entre les membres autochtones et ceux du gouvernement. Dans certains cas, il peut y avoir des membres non autochtones. Dans le cas du parc national Wapusk, la structure est différente étant donné que la municipalité de Churchill est représentée au conseil d'administration. Comme M. Amos l'a signalé, tous les nouveaux parcs ayant un intérêt important pour les Autochtones fonctionneront selon les principes de la gestion coopérative.
Dans le cas des parcs nationaux du Nord, comme M. Prosper l'a indiqué, il existe des structures de gestion coopérative dans les parcs nationaux de Kluane, Tuktut Nogait, Auyuittuq, Quttinirpaaq, Sirmilik, Ivvavik et Aulavik. Leurs structures, comme je l'ai dit, varient selon la nature de la revendication ou la région. Quand le comité sera sur place, les directeurs pourront mieux leur expliquer la nature et les fonctions des conseils d'administration avec lesquels ils travaillent.
Je vais maintenant vous parler de tourisme autochtone et de développement économique. Dans l'ensemble, le tourisme autochtone permet la participation des Autochtones à l'ensemble des services et des possibilités des parcs. Les activités peuvent se dérouler dans les parcs ou y être connexes. Elles devraient être compatibles avec les objectifs du parc, comme l'intégrité écologique, l'intégrité commémorative ou la présentation du patrimoine.
Je vais maintenant vous expliquer quelle est la participation des peuples autochtones jusqu'ici. Comme M. Amos l'a dit, des perspectives d'emplois directs sont offertes aux Autochtones. Parcs Canada s'occupe activement de la formation et du perfectionnement des Autochtones. Il est aussi possible de fournir des services directs.
Certains accords sur l'établissement des parcs qui découlent des revendications territoriales offrent des possibilités de participation accrue dans les parcs du Nord, à l'intention des peuples autochtones. Comme les parcs du Nord accueillent un nombre de visiteurs assez limité, les avantages touristiques sont aussi limités, mais ils sont durables, ce qui est une considération importante. Il y a aussi des perspectives pour les jeunes dans les initiatives à venir, comme l'écotourisme.
J'aimerais signaler une initiative importante prise par le ministère. En effet, une table ronde ministérielle sur le tourisme autochtone aura lieu le 14 novembre à Hamilton, conjointement avec la table ronde de Parcs Canada dont M. Amos a parlé. Cette discussion permettra au ministre d'échanger avec les intervenants autochtones et ceux du milieu du tourisme pour explorer les possibilités et les obstacles qui existent.
Parcs Canada met en oeuvre des initiatives pour favoriser le développement économique lié au tourisme autochtone. L'hiver dernier, nous avons organisé un atelier sur le patrimoine autochtone pour renseigner le personnel et les partenaires sur les possibilités, les obstacles et le succès que nous avons obtenu avec la présentation des thèmes et des messages autochtones aux Canadiens. On est actuellement en train de préparer une trousse sur les ressources pratiques à l'intention des gestionnaires locaux. On y trouvera des répertoires de partenaires possibles ainsi que les études de cas et des exemples pratiques sur des questions comme la formation à l'accueil.
En août, les ministres fédéral et provinciaux des parcs se sont réunis à Iqaluit. Le tourisme autochtone figurait parmi les principaux sujets de discussion. Ils ont parlé des enjeux, des obstacles et des facteurs de succès -- des questions qui seront toutes pertinentes quand vous vous rendrez dans le Nord.
En général, le tourisme peut être considéré comme une priorité de moindre importance dans les communautés autochtones, qui sont aux prises avec d'autres problèmes liés à la santé, aux conditions sociales et autres. Je sais qu'on s'interroge souvent dans les communautés sur l'utilité de vendre la culture comme un produit. C'est un sujet dont on discute toujours au niveau local.
Je vais maintenant aborder la question de la capacité de la communauté. Si des perspectives peuvent exister, souvent, on ne dispose pas des compétences, de l'infrastructure et de la formation nécessaires pour en tirer profit. Les non-Autochtones pensent souvent que les Autochtones s'intéressent seulement aux initiatives de nature culturelle, mais ils s'intéressent en fait à toutes les perspectives économiques associées au tourisme, comme le transport et la prestation des services. Cependant, dans le Nord, comme dans toutes les autres communautés autochtones, l'accès et la disponibilité des ressources sont toujours des facteurs dont il faut tenir compte pour qu'il soit possible de profiter des possibilités qui existent.
Établir un lien de confiance fait partie des facteurs de succès. C'est essentiel pour aller de l'avant. Il faut respecter les priorités autochtones et les processus décisionnels. Les partenaires doivent connaître la culture, les valeurs et le savoir local des Autochtones. Il est important que le personnel du parc reçoive une aide au niveau local. Concilier le point de vue des aînés et celui de l'ensemble de la communauté est aussi un facteur de succès au niveau local. Il faut avoir des objectifs précis et une vision commune. La participation directe des partenaires autochtones dès le départ est essentielle pour réussir. Pour ce qui est de la capacité de la communauté, des investissements doivent être faits pour que les gens acquièrent les compétences nécessaires. Pour assurer la durabilité des possibilités, les produits doivent être prêts à être mis en marché avant qu'on en fasse la promotion.
Le sénateur Watt: Je voudrais d'abord parler du parc national Tuktut Nogait. Le peuple Inuvialuit a été mis en cause dans un différend avec le gouvernement du Canada après la signature de l'accord sur les revendications territoriales.
Y a-t-il un organisme chargé de régler les conflits concernant la politique sur les parcs nationaux? Par exemple, une communauté autochtone établie près du parc pourrait soulever la question de l'activité économique dont elle a besoin pour que ses membres continuent à travailler. Y a-t-il un élément dans la politique qui pourrait permettre de régler ce conflit? On pourrait faire pression pour entreprendre des activités minières et à d'autres activités de même nature. Toutefois, quelqu'un doit trouver une façon de concilier les divers projets, particulièrement s'il y a des préoccupations émanant des communautés autochtones.
M. Amos: Des conflits peuvent se produire à divers niveaux de la gestion des parcs nationaux. D'abord, il faut se demander si on veut avoir un parc national. Autrement dit, les communautés sont-elles en faveur de la création d'un parc national? Quelles devraient être les limites de ce parc? Quel type de gestion coopérative devrions-nous tenter d'établir? Il s'agit là de questions importantes. En général, il est possible de répondre à ces questions au moyen d'un processus de consultation et de négociation avant la création d'un parc national. Ce sont des décisions sérieuses, prises pour longtemps, qui sont entérinées lorsque le Parlement crée le parc. Le processus de consultation s'avère généralement assez long parce que, au Canada, les communautés prennent ce genre de décisions au sérieux et veulent être certaines de bien faire les choses.
Les abords comportent des dispositions de règlement des différends au sujet de leur mise en oeuvre. Ils prévoient également des mesures qui, si les parties le désirent, permettent de revoir les conditions particulières de l'accord plus tard. Cet examen n'entraîne normalement pas la fermeture du parc national parce qu'il a lieu après la création du parc par le Parlement. L'accord prévoit un examen et un mécanisme de règlement des différends concernant la mise en oeuvre des éléments convenus.
Maintenant, pour ce qui est des questions de gestion, les processus mis en oeuvre visent à assurer que, dans la mesure du possible, il y ait consensus au sein du conseil de gestion, qui comprend toujours des représentants des communautés autochtones et autres. Nous espérons que les conseils pourront parvenir à régler les différends éventuels qui pourraient survenir. Il pourrait y en avoir au sujet des priorités en matière de dépenses pour l'année à venir, de la réalisation de certains projets de recherche ou de la nature du plan de gestion à long terme.
Nous avons réussi à faire fonctionner les conseils de gestion par consensus. Au cours de toutes mes années passées dans le domaine, je n'ai jamais eu connaissance qu'un conseil ait estimé nécessaire de demander au ministre de trancher. Nous avons toujours réussi à trouver des solutions et à proposer au ministre des recommandations faisant l'objet d'un consensus. Cela répond-il un peu à votre question?
Le sénateur Watt: En partiel. En fait, je m'intéresse davantage à la mise en oeuvre de l'accord après sa signature par les deux parties. Parfois, parce que les négociations se sont prolongées, au moment où l'entente est conclue, il n'y a plus de droit d'entrée parce que les occasions d'affaires se trouvent peut-être ailleurs ou sont meilleures. Parfois il y a une nouvelle direction ou la communauté a changé d'idée quant à la faisabilité économique d'un projet par rapport à un autre, et on s'oriente autrement. Lorsque cela se produit, il faut presque légiférer soit sur la politique, soit sur le règlement des revendications territoriales.
En tant que sénateurs, nous voyons parfois les parties vouloir revenir sur des décisions prises et nous inciter à proposer des modifications lorsque nous examinons une mesure législative ou à faire des représentations auprès du ministre en leur nom. Les membres des comités ont eu à faire face à ce problème. C'est une des raisons pour lesquelles le ministre responsable des parcs à l'époque a envisagé la possibilité de faire étudier cette question de plus près par les sénateurs pour voir ce qui pourrait arriver. Voilà pourquoi je soulève la question.
M. Amos: Je crois qu'il ne serait pas pertinent que je parle de la situation particulière que vous avez soulevée, et que le Parlement a réglée.
Le sénateur Watt: Ce qui m'inquiète, c'est qu'il n'y a pas de politique qui traite spécifiquement de la question. Je comprends que le gouvernement doive parfois refuser d'apporter des changements à ce qui a déjà été convenu. Existe-t-il un mécanisme de sécurité pour éviter les conflits dans les communautés et avec les autorités? Comment faire pour éviter ces conflits?
M. Amos: Peut-être devriez-vous demander aux communautés si cette préoccupation est généralisée.
Le sénateur Watt: Ça l'était dans une communauté.
M. Amos: Je connais cette situation. Pendant la période que j'ai passée à Parcs Canada et depuis que M. Chrétien a procédé aux premiers retraits de terres pour les trois parcs, en 1972, je n'ai pas connu de situation similaire qui soit survenue relativement aux parcs nationaux existants ou proposés dans le Nord, c'est-à-dire la situation où les parties ont conclu un accord et où l'une des parties aurait, pour les raisons que vous avez données, décidé que l'arrangement ne lui convenait plus. Il me semble que c'est assez rare, mais peut-être pourriez-vous le vérifier à l'occasion de vos audiences.
D'un point de vue de politique, une fois qu'un accord est conclu, les conditions visant des modifications éventuelles à l'accord sont décrites dans celui-ci. Nous, en tant que gouvernement du Canada et ses représentants, nous nous sentons tenus de respecter les modalités de l'accord qui a été signé. Un accord contient généralement des modalités visant les modifications. Tout accord peut être modifié par les parties, et les nouveaux accords des parcs contiennent des dispositions décrivant spécifiquement la manière de procéder.
Le sénateur Watt: Est-ce qu'un délai est fixé?
M. Amos: Il y a divers modèles. Certains accords prévoient un mécanisme de révision sur une période régulière. Certains autres prévoient une révision automatique et d'autres une révision dont conviennent toutes les parties. Les modalités de l'accord reflètent la situation que souhaitaient les parties au moment de sa signature. Notre obligation est de respecter ces accords. Pour déterminer comment un accord peut être modifié, il faut en examiner les dispositions. Nous fournirons avec plaisir des renseignements au comité à ce sujet.
Le sénateur Watt: Cela doit se faire au cas par cas?
M. Amos: Au cas par cas, selon les conditions dont il a été convenu.
Le sénateur Cochrane: Je me rappelle qu'au moment de la création de ce parc, certaines communautés voulaient en ouvrir les frontières. Cependant, ça ne s'est pas fait, la loi a été adoptée. Il a été question d'exploitation minière. Est-ce qu'il y a encore de l'exploitation minière à proximité du parc?
M. Amos: Je crois que le programme d'exploitation minière se poursuit comme à ce moment-là.
Le sénateur Cochrane: Lorsque nous avons adopté la loi pour créer ce parc, Parcs Canada a dit que 2 millions de dollars seraient octroyés pour accélérer le développement dans le parc. Si j'ai bien compris, c'est l'année dernière que cette somme a été versée. Pouvez-vous nous dire exactement comment elle a été dépensée et combien d'emplois ont été créés au parc national Tuktuk Nogait? Combien de ces postes ont été comblés par des résidents de la communauté de Paulatuk?
M. Amos: Votre question est assez détaillée et je vais m'efforcer de vous donner immédiatement les renseignements que vous demandez. Lorsque vous viendrez à Inuvik, vous rencontrerez les employés du parc qui sont chargés de la mise en oeuvre de ce programme. Ils se feront un plaisir de vous en donner tous les détails. Bien entendu, vous vous entretiendrez aussi les dirigeants de la communauté. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec les Inuvialuits et les gens de Paulatuk à la réalisation de cet engagement particulier, et nous avons décidé ensemble quels projets auraient la priorité relativement à ces fonds et quel calendrier conviendrait à l'atteinte de ces objectifs. À ce que je sache, cette coopération existe et le programme se poursuit. Je vous donnerai les renseignements précis que vous demandez.
Le sénateur Cochrane: Pourrez-vous nous donner cela avant notre départ en tournée?
M. Amos: Oui.
Le sénateur Andreychuk: Nous avons examiné la question du développement économique autochtone en rapport, en particulier, aux parcs nationaux. Vous avez parlé d'une activité économique qui nuit aux parcs et au tourisme. Quelle définition donneriez-vous à l'expression «développement économique autochtone»? Nous devrons définir cela.
M. Langdon: Il y a des possibilités dans le parc national, mais aussi dans les communautés et les régions environnantes. Au parc même, il y aura des possibilités directes d'emploi et de formation et de perfectionnement qui apportent de l'argent à la communauté. Souvent, l'effet multiplicateur de cet argent dans la communauté forme une assise économique pour les villes. Il y aussi des activités qui se déroulent relativement au parc, pour soutenir son exploitation, notamment les nouvelles possibilités liées à l'écotourisme.
Pour en revenir aux possibilités relatives à l'intégrité écologique, on nous a dit que les gens devraient mieux comprendre la culture autochtone grâce à un mélange dosé d'intégrité écologique et d'intégrité culturelle, et aussi à la diffusion de ces messages. C'est une bonne occasion pour les Autochtones de participer eux-mêmes à la diffusion de ces messages.
Lorsque des gens se rendent dans ces communautés, ils ont besoin d'être hébergés, nourris, transportés et distraits. Ce sont là des choses qui présentent des possibilités économiques de tourisme.
Le sénateur Andreychuk: En ce qui concerne les activités dans le parc, vous avez la même définition pour les parcs du Nord que pour les autres parcs: toute activité devrait perturber le moins possible l'environnement écologique. Est-ce bien cela?
M. Amos: Le genre d'activités qui sont permises dans le parc est généralement défini dans le plan de gestion du parc. C'est cela, le cadre d'utilisation par les visiteurs, dans le Nord. Généralement, nous entreprenons de collaborer avec les Autochtones et les partenaires locaux à la formulation d'une vision et d'une démarche communes. C'est là qu'est établi un cadre de travail en ce qui concerne le genre d'activités acceptables.
Le sénateur Andreychuk: Je pense plus précisément au cas de Banff; même si le cadre est assez bien défini, il y a une question d'interprétation. Je comprends que le ministre a le dernier mot là-dessus. En raison des ententes conclues avec les peuples autochtones, est-ce que la démarche, dans le Nord, est différente de ce qu'elle serait, disons, à Banff où tout le monde doit défendre son point de vue devant le ministre, mais alors la politique et les questions environnementales s'en mêlent? Est-ce que la structure de prise de décisions dans le Nord est différente ou semblable à celle-là?
M. Amos: En fait, c'est très différent, en partie parce que le règlement des revendications territoriales et les accords visant la création de parcs dans le Nord définissent souvent assez clairement les objectifs des différentes parties. Le gouvernement canadien et nos partenaires autochtones dans le Nord ont bien dit qu'ils ne veulent pas répéter la situation de Banff dans le Nord. Si nos partenaires autochtones pensaient que le développement massif des installations récréatives, comme à Banff, pouvait se répéter dans le Nord, nous n'aurions pas leur coopération pour la création d'un parc national.
Leurs points de vue et nos perspectives communes sur la question sont parfois intégrés directement dans le règlement des revendications territoriales. En ce qui concerne celui d'Ivavik, il y est dit que le parc sera de nature sauvage, et nous ne pouvons pas formuler de plan de gestion qui changerait cela. C'est le premier point. Des intentions bien claires sont décrites dans les accords sur la création du parc, qui ne se trouvent pas dans les accords qui concernent des parcs plus anciens du Sud.
Deuxièmement, la structure de gestion est tout à fait différente. Les conseils de gestion coopérative ont vraiment une très grande influence. Généralement, ils recommandent le plan de gestion, qui est l'orientation à long terme que nous suivrons. Leur recommandation est enchâssée dans notre accord et, souvent, dans le règlement des revendications territoriales. Ce sont là des rôles très importants pour des organes de gestion coopérative qui engagent directement la participation des peuples autochtones qui sont les bénéficiaires des revendications territoriales. Ce procédé donne lieu à une structure de gestion différente, à une plus grande participation au niveau local et à une meilleure harmonisation des objectifs.
Le sénateur Andreychuk: Si je comprends bien, êtes-vous en train de dire que la ministre dispose de moins de pouvoir discrétionnaire une fois que les organes de gestion coopérative arrivent à telle ou telle conclusion? La ministre doit avoir de très bonnes raisons de ne pas suivre le plan, tandis que pour l'instant, elle jouit d'un pouvoir discrétionnaire plus vaste dans les régions du sud.
M. Amos: Je devrais être clair. Le pouvoir final de décision de la ministre qui lui est conféré en vertu de la Loi sur les parcs nationaux n'est pas limité par la création des conseils de gestion coopérative. C'est clairement énoncé. J'utilise le terme «influence», qui est probablement plus précis. En vertu de la loi du Parlement, la ministre dispose du pouvoir final de décision. Toutefois, lorsqu'il existe une structure qui nous permet de travailler en coopération et de rechercher un consensus, il est évident que nous tous -- y compris la ministre, j'en suis sûr -- tenons à nous servir des mécanismes de coopération pour atteindre un consensus et prendre des décisions qui respectent les responsabilités de la ministre en vertu de la loi. Elle conserve le pouvoir d'agir en cas de besoin, ce qui équivaut au respect de la loi. Les choses vont se passer différemment.
Le sénateur Watt: Étant donné la nature des négociations, beaucoup de pressions s'exercent sur les deux côtés. À certains moments, il est impossible de s'attarder sur tous les points que l'on souhaiterait. Il est très facile de s'écarter de la voie que l'on veut suivre. Suite au point soulevé par le sénateur Andreychuk, cela pourrait être l'occasion pour Parcs Canada de voir si la politique peut s'appliquer également au Nord.
Parcs Canada devient très actif. Il est bon d'assurer l'importance des diverses régions de l'Arctique. Vous êtes au courant de la pollution qui touche l'Arctique. Toutes sortes de moyens de transport ont un effet sur l'Arctique ainsi que sur la migration de certaines espèces, qu'il s'agisse de la faune et de la flore marines ou de la faune. Si le comité pouvait faire une recommandation solide au sujet d'une interaction avec la collectivité, de la tenue de consultations dans les collectivités, si l'on pouvait commencer à souligner le fait qu'il serait bon de limiter certains types de véhicules à moteur, comme les autoneiges, les hors-bord, et cetera, et s'il était possible d'exploiter certains de ces parcs selon les traditions inuites en utilisant des embarcations comme des kayaks, je crois que l'on ferait alors un pas dans la bonne direction.
La présidente: J'imagine que les conseils de gestion examinent tous ces points.
Le sénateur Watt: Ce serait plus que de la gestion, puisque la gestion traite davantage de questions qui se posent au jour le jour, une fois la politique établie. Je pense davantage à une solution permanente -- ou à long terme -- aux problèmes auxquels nous faisons face -- des problèmes environnementaux comme le réchauffement de la planète. Nous perdons des ours polaires de tous côtés. C'est le premier été où je vois autant d'ours polaires. Je suis originaire du Nord, je vis dans le Nord et je circule le long de la côte. Deux hommes venant de deux directions opposées ont compté le nombre d'ours polaires qu'ils ont vus en l'espace d'une journée; ils en ont vu 30, ce qui est incroyable. Nous avons eu beaucoup d'ours polaires cette année.
La neige est en train de fondre, la glace est en train de fondre et le réchauffement de la planète se fait ressentir. Tous ces facteurs doivent être pris en compte. Le parc veut-il examiner de près cette question ou s'y intéresser? Je ne crois pas qu'il soit possible de mettre un terme au réchauffement de la planète, mais on pourrait au moins se mettre dans une position permettant de le maîtriser et d'apporter de l'aide.
Le sénateur Cochrane: J'aimerais vous poser des questions au sujet du potentiel de développement dans la région dont nous parlons. Quels genres de développements les collectivités autochtones, notamment celles situées le plus près du parc, souhaitent encourager? Quelles propositions particulières sont envisagées aujourd'hui?
M. Amos: Il m'est difficile de répondre à cette question, car cela dépend des parcs et des collectivités. Dans les audiences que vous aurez dans le Nord, j'imagine que vous poserez directement cette question aux collectivités et à votre personnel et je crois que vous verrez que les gens s'intéressent à diverses possibilités de développement économique.
Tout d'abord, les collectivités et les organisations avec lesquelles nous travaillons considèrent les parcs nationaux comme des points d'ancrage et de partenariat pour certains genres pertinents de développement touristique. En général, cet intérêt est relié au développement économique découlant du tourisme. Les propositions spécifiques varient énormément, en partie à cause des intérêts de la collectivité et aussi en raison de la réalité géographique de la région. Dans certaines régions, c'est la descente de rivière qui est privilégiée, dans d'autres, la randonnée pédestre.
Je soulignerais également le fait que dans le cadre du dernier accord, nous avons convenu de financer des études de développement touristique pour chacune des six collectivités adjacentes aux trois nouveaux parcs nationaux. Ces études, effectuées en partenariat avec les collectivités, permettront de déterminer les possibilités les plus pertinentes, les plus durables et les plus économiquement viables. Nous essayons d'agir de manière à arriver à des genres de développement et à des propositions, non pas de façon ponctuelle, mais de manière concertée avec d'autres parties, en fonction de ce qui va marcher et de ce que la collectivité souhaite.
Le sénateur Cochrane: Est-il possible pour certains des parcs de favoriser un développement en collaboration avec le secteur privé?
M. Amos: Oui, bien que cela dépende de votre définition de «secteur privé». Beaucoup d'entreprises dans le Nord tirent avantage des possibilités reliées aux parcs nationaux et elles appartiennent certainement au secteur privé.
Le sénateur Cochrane: Pourriez-vous être un peu plus précis?
M. Amos: Je peux vous donner des exemples au parc Kluane et au parc Nahanni. Nous avons des collègues du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qui peuvent vous donner plus de détails à ce sujet, mais il existe tout un éventail de petites entreprises privées dans la collectivité, de partenariats entre secteurs public et privé et d'organisations de développement économique autochtones qui découlent des accords de règlement des revendications territoriales et qui sont des acteurs de premier plan, économiquement parlant. Vous allez certainement en entendre parler -- les lignes aériennes, les hôtels, les organismes de descente de rivière, les guides touristiques.
Le sénateur Cochrane: Qu'en est-il des droits miniers, de la prospection et de la l'extraction à l'extérieur des parcs?
La présidente: À l'extérieur des parcs?
Le sénateur Cochrane: Oui.
M. Amos: La création des parcs nationaux se fait au moment où les collectivités et les gouvernements décident des secteurs qu'ils veulent mettre de côté et protéger de tout développement industriel. Ce faisant, ils font de leur mieux -- et nous faisons de notre mieux -- pour déterminer les autres possibilités économiques, notamment en ce qui concerne l'utilisation de la terre, puisque c'est ce qui détermine les limites des parcs. Les collectivités du Nord, bien sûr, comme n'importe quelle autre, recherchent un développement économique équilibré. Elles sont intéressées par l'exploitation minière dans des secteurs à l'extérieur des parcs nationaux tout en étant intéressées par le tourisme et les possibilités d'emploi liés aux parcs nationaux.
D'après notre expérience, même si les collectivités s'intéressent aux possibilités économiques découlant de l'exploitation minière ou, plus au sud, de l'exploitation forestière, elles sont aussi des adeptes de la protection de l'environnement naturel et sont en faveur d'études d'évaluation environnementale qui leur permettent de connaître les impacts de ces propositions et de prendre des décisions éclairées.
Le sénateur Cochrane: Est-ce que Parcs Canada s'intéresse à quelque chose du genre?
M. Amos: Non.
Le sénateur Cochrane: Pourquoi pas?
M. Amos: Parcs Canada ne s'occupe pas de prospection ni d'exploitation des ressources minières à l'extérieur des parcs nationaux. Cela ne fait pas partie du mandat que le Parlement a conféré à notre agence dans le cadre de la loi. D'autres ministères fédéraux et territoriaux ont bien sûr un tel mandat et si je comprends bien, vous entendrez leurs représentants au cours de vos audiences; nos partenariats pour le développement économique visent en général les possibilités de tourisme en rapport direct avec les terres que nous sommes chargés de protéger.
Le sénateur Cochrane: Le Nord est si lointain. Les divers organismes gouvernementaux ne communiquent-ils pas entre eux pour savoir ce qui vaut le mieux pour ces régions? Votre agence et les autres ne s'unissent-elles pas pour développer ces régions?
M. Amos: Oui, nous nous consultons. Lorsque je dis que cela ne fait partie de notre mandat, je ne veux pas dire que nous ne communiquons pas avec d'autres. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, les gouvernements territoriaux et les organismes autochtones créés dans le cadre des revendications territoriales ont de vastes responsabilités en matière de développement économique. Notre rôle est plus précis, mais nous travaillons bien sûr avec tous ces organismes pour ce qui est des avantages offerts par les régions dont nous sommes directement responsables en matière de gestion.
Le sénateur Watt: Dans votre exposé, vous avez dit que vous êtes chargé de mettre de l'ordre dans les finances, entre autres. J'imagine que cela veut également dire que vous devez essayer de trouver des façons de financer les parcs de manière qu'ils puissent générer davantage de recettes. D'après vous, cela fait-il partie de votre mandat?
M. Amos: Dans le cadre de notre mandat, nous générons des recettes grâce aux visiteurs des parcs. Nous parlons ici de recettes directes, dont la plupart découlent des parcs du sud où nous avons un grand nombre de visiteurs qui paient des frais d'entrée. Nous essayons de recouvrir le coût des terrains de camping et de l'affermage des terres. Nous avons en fait doublé les recettes que Parcs Canada tire de ces sources, puisqu'elles sont passées de 35 à 70 millions ces quelques dernières années. La production directe de recettes pour Parcs Canada est un volet important des finances; elle ne détermine pas la façon dont nous travaillons, mais c'est un élément important du cadre financier.
Le sénateur Watt: Si l'une des collectivités inuites adjacentes à un parc voulait construire une maison de glace pendant l'hiver, quel ministère en serait responsable? Ce serait peut-être pour deux mois de l'année et ce serait une façon d'attirer les écotouristes. Cela relèverait-il du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ou de Parcs Canada, ou des deux?
La présidente: Cela serait-il à l'intérieur ou à l'extérieur du parc?
Le sénateur Watt: Peu importe. J'imagine que Parcs Canada serait mis en jeu.
M. Amos: J'imagine que oui. Cela pourrait se faire dans le parc, mais très souvent, ce genre de choses se fait plus près d'une collectivité; ainsi, davantage de personnes peuvent s'y rendre et cela peut entraîner quelques retombées. C'est le genre de choses auxquelles nous pourrions participer.
Le sénateur Watt: Ce serait dans le parc lui-même?
M. Amos: Dans le parc, ou même dans la collectivité. Si les gens voulaient travailler avec nous, nous le ferions. J'imagine qu'il y aurait des partenaires de la collectivité locale et du gouvernement territorial, ainsi que de l'aide apportée par d'autres ministères fédéraux comme RHDC, et cetera. J'espère que vous vous entretiendrez avec eux au cours de vos séances.
Le sénateur Watt: Cela pourrait s'appliquer à l'été, également.
La présidente: Pourriez-vous nous donner le pourcentage des parcs dans le Nord par rapport au pourcentage des parcs dans chacune des provinces? Je ne veux pas parler des lieux historiques, mais des parcs écologiques.
M. Amos: Voulez que je vous donne des chiffres ou que je parle des secteurs?
La présidente: Des chiffres.
M. Amos: Par province?
La présidente: Oui.
M. Amos: Nous avons 39 parcs nationaux et réserves, dont 10 se trouvent dans le Nord. Wood Buffalo, qui dans une large mesure se trouve en Alberta, est compté dans les 10.
La présidente: Un tiers se trouve dans le Nord?
M. Amos: Je dirais plutôt un quart, pour ce qui est des chiffres. Pour ce qui est de la superficie, les choses sont bien différentes, car les parcs du Nord ont tendance à être plus vastes.
La présidente: J'ai entendu certaines critiques à propos de Parcs Canada qui essaierait d'atteindre son quota en ce qui concerne les nouveaux parcs au Canada. Comme le Nord est le seul secteur où le gouvernement fédéral est propriétaire de terres, il peut le faire. Par conséquent, le Nord devient essentiellement un parc, ce qui n'est pas possible dans d'autres régions. Ces critiques sont formulées par des promoteurs, des mineurs, des bûcherons, et cetera. Je suis sûr que ces critiques seront de plus en plus fréquentes.
M. Amos: J'aimerais répondre brièvement. Ce n'est pas en fonction de la disponibilité de terres fédérales que l'on décide de l'emplacement d'un éventuel parc. En fait, depuis pratiquement 30 ans, la création des parcs dépend d'un plan national qui divise le pays en 39 genres de paysage. Le gouvernement fédéral essaie de représenter chacun de ces paysages. Jusqu'au début des années 70, les paysages du Nord n'étaient pas représentés dans ce plan, ce qui explique la grande activité de notre agence dans ce domaine.
Pratiquement toutes les régions sont représentées dans le plan du réseau des parcs nationaux. En même temps, nous ouvrons des parcs en Colombie-Britannique et dans les basses terres du Manitoba. Nous nous intéressons activement à plusieurs autres secteurs en fonction du plan du réseau des parcs nationaux du Canada. Je devrais également citer le Labrador où nous intervenons activement.
La présidente: Nous allons entendre pas mal d'information sur les conseils de gestion et sur la façon dont ils fonctionnent dans les divers secteurs par l'entremise des accords conclus avec les Premières nations, notamment les accords liés à la récolte dans le Nord. Je suis sûre que ce sera un intéressant sujet de discussion.
Il sera également intéressant et important d'examiner les possibilités de développement économique autres que le tourisme et la culture, car les touristes sont peu nombreux et la saison touristique est courte. Un développement économique plus durable et non limité à ces trois ou quatre options s'impose.
Seriez-vous prêt à comparaître de nouveau devant nous à la fin de nos déplacements, une fois notre étude terminée?
M. Amos: Nous reviendrons avec plaisir si vous le souhaitez. Par ailleurs, M. Tom Lee, notre directeur général, se réjouit de vous rencontrer en novembre.
La présidente: Je suis sûre que nous aurons plusieurs questions à lui poser après avoir entendu le point de vue de toutes les collectivités et les représentants des divers secteurs.
M. Amos: Nous serons heureux d'être représentés à ce moment-là.
La présidente: Nos prochains témoins représentent le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Messieurs, merci d'être présents aujourd'hui; nous sommes prêts à vous écouter.
M. Bill Austin, sous-ministre adjoint, Revendications et gouvernement indien, ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien: Je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de vous parler du lien entre le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et le travail de votre sous-comité. Aujourd'hui, je vais faire état des possibilités de développement économique associées aux parcs nationaux du Nord canadien, dans le contexte des accords relatifs aux revendications territoriales globales existants et des ententes connexes avec les peuples autochtones, et en conformité avec les principes de la Loi sur les parcs nationaux. Se sont joints à moi pour fournir plus d'information sur ces questions M. David Baker, directeur général des Politiques stratégiques et du transfert des responsabilités du programme des affaires du Nord, et M. Mark Brooks, directeur général intérimaire des Programmes de développement économique.
Une des grandes priorités dans le Nord est de régler les revendications territoriales, puis de mettre en oeuvre les accords conclus. Les revendications territoriales globales reposent sur le principe que les droits des Autochtones relatifs aux terres et aux ressources sont encore valides. Les accords sur les revendications territoriales globales sont maintenant négociés de façon à clarifier les droits des groupes autochtones aux terres et aux ressources et ainsi favoriser leur croissance économique et leur autonomie. Ces accords doivent reconnaître les intérêts des groupes autochtones en ce qui concerne la gestion des ressources et la protection environnementale et garantir leur participation aux retombées économiques.
Pour concrétiser ces objectifs, les accords définissent une vaste gamme de droits et d'avantages dont les groupes de requérants peuvent se prévaloir. Ces droits et avantages comprennent généralement la pleine propriété de certaines terres de la région visée par le règlement; des droits garantis de récolte des ressources; la participation garantie à la gestion des terres, de l'eau, de la faune et de l'environnement dans la région visée par le règlement; une compensation financière; le partage des revenus provenant des ressources, des mesures spécifiques de stimulation du développement économique et un rôle à jouer dans la gestion des ressources patrimoniales et des parcs de la région visée par le règlement.
Les peuples autochtones du Nord sont encore très attachés à la terre qui leur fournit une assise socioculturelle, une base pour leurs activités économiques traditionnelles comme la récolte des ressources, ainsi que des possibilités d'exploitation des ressources souterraines comme les diamants, le pétrole et le gaz. Depuis l'introduction de la politique sur les revendications territoriales globales en 1973, et suite à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Calder, le gouvernement du Canada a accordé la priorité au règlement des revendications autochtones fondées sur les titres autochtones. Il est possible de passer outre l'absence de définition claire de ce qui constitue un titre autochtone en négociant des traités contemporains.
Les accords de règlement sont maintenant négociés de façon à clarifier les droits des groupes autochtones aux terres et aux ressources et ainsi favoriser leur croissance économique. Ces accords doivent reconnaître les intérêts des groupes autochtones en ce qui concerne la gestion des ressources et la protection environnementale et garantir leur participation aux retombées économiques. Il est important de souligner que la propriété privée est exclue de la table de négociation des accords de règlement des revendications territoriales globales. Un groupe autochtone qui veut acheter une propriété privée doit le faire de gré à gré.
Lorsque toutes les parties ont approuvé les modalités de l'accord définitif, l'accord est mis en vigueur par le biais d'une loi fédérale. Les droits que le groupe autochtone obtient des gouvernements fédéral et provinciaux ou territoriaux sont protégés par la Constitution et ne peuvent être modifiés sans le consentement du groupe autochtone.
La politique sur les revendications globales précise qu'on peut négocier des revendications territoriales avec les groupes autochtones des régions où les revendications relatives aux titres autochtones n'ont pas fait l'objet d'un traité ou d'une procédure juridique. Le gouvernement a cependant accepté de négocier un certain nombre de revendications dans des régions touchées par un traité. Il a consenti à négocier les revendications des Dénés et Métis des Territoires du Nord-Ouest en dépit de l'existence des traités 8 et 11 parce que les dispositions relatives aux terres n'avaient pas été mises en oeuvre.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, on a déjà mis en oeuvre trois accords: la Convention définitive des Inuvialuit en 1984; l'Accord relatif aux Gwich'in en 1992 et l'Accord relatif aux Dénés et Métis du Sahtu en 1994. Les négociations en sont en cours avec les Dénés et Métis Dogrib, mais une entente de principe a été conclue en janvier 2000, avec les Premières nations dénées d'Akaitcho, avec les Premières nations du Deh Cho et avec le conseil tribal des Métis de South Slave.
Au Yukon, un accord-cadre définitif a été conclu avec le conseil des Premières nations du Yukon en 1993 et sept Premières nations du Yukon ont signé des accords définitifs et des ententes d'autonomie gouvernementale -- quatre en 1995 (Vuntut Gwich'in, Nacho Nyak Dun, Tlingits de Teslin et Champagne et Aishihik; deux en 1997 (Little Salmon/Carmacks et Selkirk); et une en 1998 (Hwëch'ins de Tr'ondëk). Une autre Première nation du Yukon est à l'étape de la ratification (Première nation de White River). Des pourparlers se poursuivent avec les représentants des autres Premières nations (Carcross/Tagish, Ta'an, Kluane, Kwanlin Dun, Ross River et Liard).
Dans l'est de l'Arctique, une revendication couvrant tout le territoire du Nunavut a été réglée. L'accord définitif du Nunavut intervenu entre les Inuits de la région du Nunavut et Sa Majesté la reine du chef du Canada a été signé le 25 mai 1993 et est entré en vigueur le 10 juin 1993. Entre autres choses, cet accord ouvrait la voie à la création du nouveau territoire du Nunavut le 1er avril 1999. En vertu de la politique de 1995 sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, des dispositions en ce sens peuvent faire l'objet de négociations, au même titre que les terres et les ressources, dans le cadre des accords de règlement des revendications globales et être protégées aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle comme en faisant partie. C'est ce qui se fait pour l'accord conclu avec les Dogribs, qui sera le premier accord portant à la fois sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale dans les Territoires du Nord-Ouest. Les dispositions sur l'autonomie gouvernementale précisent comment les groupes autochtones peuvent gouverner leurs affaires internes et mieux contrôler le processus décisionnel touchant leur communauté tout en assumant davantage de responsabilités à cet égard. Les dispositions sur l'autonomie gouvernementale incluses dans les traités seront appliquées conformément au système fédéral canadien et au cadre constitutionnel, en collaboration avec les autres paliers d'administration.
Le but premier d'un règlement de revendication globale est d'éliminer toute ambiguïté concernant la propriété des terres et des ressources ainsi que le droit à l'autonomie gouvernementale, et donc de mettre en place un cadre de développement social et économique. Des consultations sont menées auprès des tiers tout au long du processus de négociation. Ces consultations portent sur les préoccupations et les intérêts de toutes les parties et favorisent l'établissement de bonnes relations entre les groupes autochtones et les communautés voisines. Le règlement est aussi équilibré que possible afin que tous puissent en profiter sur le plan économique. Le gouvernement fédéral s'est engagé à trouver des façons de veiller à ce que tous les Canadiens vivent en harmonie dans des communautés prospères et saines.
Le processus de mise en oeuvre des règlements de revendication territoriale permet aux groupes autochtones qui en profitent de même qu'aux gouvernements fédéral et territorial de négocier l'établissement de régions de gestion spéciales, d'appliquer des stratégies d'aires protégées, de négocier des ententes sur les répercussions et les avantages concernant les parcs nationaux, les parcs territoriaux et les aires de conservation, et de mettre en oeuvre des plans d'emploi des Autochtones. En d'autres termes, les accords de revendication territoriale négociés dans le Nord du Canada prévoient la négociation d'ententes sur les répercussions et les avantages ou de régimes de cogestion pour tous les parcs nationaux et territoriaux nouveaux ou existants.
Les ententes sur les répercussions et les avantages sont négociées avec les groupes autochtones et couvrent toutes les questions liées au parc projeté qui pourraient nuire au groupe autochtone visé ou qui pourraient raisonnablement avantager le groupe autochtone ou les membres de ce groupe, par exemple, en matière de formation, d'embauchage préférentiel, de bourses d'étude et de relations de travail.
Des ententes sur les répercussions et les avantages ont été signées avec les Inuits du Nunavut concernant les trois parcs nationaux situés sur l'île de Baffin qui apportent des avantages de quelque 4 millions de dollars. On négocie actuellement d'autres ententes sur les répercussions et les avantages concernant des parcs territoriaux du Nunavut et d'autres types d'aires protégées -- par exemple, des refuges d'oiseaux et des réserves nationales de faune avec le Service canadien de la faune du ministère de l'Environnement.
Voici des exemples des mesures habituellement incluses dans une entente sur les répercussions et les avantages. Premièrement, une contribution à l'objectif d'offrir aux groupes autochtones des occasions économiques associées au parc, notamment en leur donnant la priorité en ce qui concerne la demande et l'acquisition d'un permis d'exploitation de commerce dans le parc et en garantissant qu'au moins 60 p. 100 des permis seront accordés à des groupes autochtones. Deuxièmement, la passation de marchés par le gouvernement du Canada en vue de l'élaboration de stratégies de développement touristique pour les communautés autochtones touchées par l'établissement et l'exploitation du parc. Le marketing des produits touristiques doit compléter les stratégies régionales de marketing touristique faisant la promotion du tourisme autochtone durable ou y contribuer. Troisièmement, des occasions de marchés de plus de 5 000 $ offertes aux groupes autochtones et lettres d'intention envoyées aux entreprises autochtones en vue de l'obtention d'un financement commercial.
La négociation d'ententes sur les répercussions et les avantages témoigne de l'engagement du Canada à offrir davantage d'occasions aux peuples autochtones en leur garantissant le droit de participer à l'aménagement et à la gestion des aires protégées nouvelles et existantes. Les peuples autochtones ont joué un rôle important dans l'établissement de nouvelles aires protégées partout au pays et plus particulièrement dans le Nord. Sirmilik, situé à l'extrémité nord de l'île de Baffin, au Nunavut, a été créé en 1999 en vertu d'un accord intervenu entre le gouvernement fédéral et les Inuits de l'est de l'Arctique.
Les gouvernements ne sont pas autorisés à établir unilatéralement des aires protégées et des parcs. Ils doivent toujours négocier avec leurs partenaires et avec les intervenants afin de leur expliquer de quoi il retourne et d'obtenir leur appui, même si c'est là un processus long et complexe. Lorsqu'il existe des intérêts fonciers conflictuels, il faut régler la question avant de créer une aire protégée ou un parc. Les gouvernements se sont engagés à collaborer avec les partenaires et les intervenants dans leurs efforts incessants en vue d'établir davantage d'aires protégées et de parcs.
Les gouvernements de tous les paliers doivent accroître l'emploi des Autochtones dans leur aire de responsabilité. Il faut recourir de manière plus efficace à des plans de recrutement, à de la formation préalable à l'emploi ainsi qu'à des analyses et à des études portant sur le marché de l'emploi afin d'accroître le nombre des Autochtones dans les effectifs de la fonction publique.
Examinons maintenant le rôle du ministère des Affaires indiennes et du Nord dans les régions nordiques. Le ministère fournit des services au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, à titre de ministère fédéral, mais également à titre d'administration quasi provinciale. À titre de ministère fédéral, il gère le plan d'action fédéral dans le Nord, il travaille avec les habitants du Nord et d'autres partenaires à renforcer le système de conduite des affaires publiques et dans les territoires et à promouvoir le développement durable dans le Nord. En tant qu'administration quasi provinciale, le ministère est responsable de la gestion efficiente et efficace des ressources naturelles -- terres, eau, mines, et cetera -- et de la protection de l'environnement. La dévolution de ces responsabilités aux gouvernements du Nord demeure un objectif d'une grande priorité pour le ministre et le ministère.
Dans bien des régions du Nord, des régies de services publics en régime de cogestion ont la responsabilité de réglementer l'utilisation des terres et de l'eau et de faire les évaluations environnementales. Par exemple, dans la vallée du Mackenzie, les ministères et organismes doivent tenir compte des plans approuvés d'utilisation des terres dans les étapes de planification, d'évaluation et de création de nouveaux parcs. Le conseil d'examen des répercussions environnementales doit s'assurer que tout projet de création d'un nouveau parc national fait l'objet d'un examen préliminaire et, s'il y a lieu, d'une évaluation environnementale. Pour la prise de décisions, chaque conseil s'appuie sur des consultations publiques.
Pour la création de nouveaux parcs nationaux, Parcs Canada est l'autorité responsable à laquelle se joignent de nombreux ministères du gouvernement fédéral, les organisations autochtones intéressées et le gouvernement territorial concerné. Le ministère des Affaires indiennes et du Nord agit à titre de gestionnaire des terres et prend part aux processus conjoints comme l'évaluation des ressources minérales et énergétiques (ERME).
L'ERME a été mise sur pied en 1980 comme mécanisme visant à assurer que l'on procéderait à l'inventaire des ressources naturelles non renouvelables de certaines régions du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et maintenant du Nunavut, avant qu'elles ne deviennent officiellement des parcs nationaux. L'ERME s'assure que l'importance économique et stratégique du potentiel en ressources minérales et énergétiques est reconnue comme un facteur clé dans la prise de décision et que les ministres sont informés du choix à faire entre la valeur des terres en ce qui a trait aux critères de création d'un parc, et le potentiel d'exploration, de développement et d'utilisation des ressources minérales et énergétiques de ces terres. L'évaluation du potentiel en ressources minérales et énergétiques des terres susceptibles de devenir des parcs est faite par la Commission géologique du Canada et les résultats deviennent des documents publics.
Comme les autres organismes fédéraux, le ministère mène ces travaux sous le thème prédominant du développement durable. La stratégie de développement durable du Nord poursuit entre autres les objectifs suivants: premièrement, favoriser la conservation d'environnements naturels sains et collaborer avec les groupes s'occupant de revendications territoriales et les institutions du gouvernement populaire afin de développer des pratiques efficaces et complémentaires d'utilisation des terres; deuxièmement, encourager l'établissement dans le Nord de gouvernements qui intègrent des considérations sociales, environnementales et économiques dans leur processus de prise de décisions et intégrer les principes du développement durable dans les décisions; et troisièmement, favoriser la progression de l'autonomie économique, améliorer l'accès aux programmes de développement économique ainsi que l'exécution de ces programmes.
Plus précisément, dans le cadre de nos programmes de développement économique des Autochtones, les peuples et les entreprises autochtones du Nord ont accès à l'aide au démarrage et à l'expansion des petites entreprises afin de profiter des occasions qui leur sont offertes dans les parcs et dans d'autres secteurs. Les entreprises autochtones du Nord qui désirent étudier les possibilités d'affaires comme les coentreprises et la participation à des sociétés peuvent également recourir à l'aide au développement économique. De plus, le programme de développement économique des collectivités fournit aux agents de développement économique communautaire une aide financière leur permettant de profiter des occasions d'affaires qui s'offrent à eux.
J'espère que mon exposé vous a aidés à comprendre le lien qui existe entre votre mandat et le rôle du ministère des Affaires indiennes et du Nord. Mes collègues et moi nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Le sénateur Watt: Le ministère des Affaires indiennes collabore avec Parcs Canada dans le domaine du développement de débouchés économiques. J'ai écouté attentivement ce que vous avez dit au sujet de ce qui existe aujourd'hui, des mesures que prend le ministère des Affaires indiennes dans le contexte des parcs et de votre démarche à l'endroit des peuples autochtones.
Pour ce qui est des débouchés économiques, j'imagine qu'il faudrait dresser un inventaire pour déterminer ce qu'il en est et savoir quelles sont les ressources potentielles dans les parcs avant de faire une étude de faisabilité pour déterminer s'il est économiquement viable de s'orienter dans certaines directions. Normalement, qui assume ce coût? Si un Autochtone voulait obtenir des fonds pour faire un inventaire de la région, cela donnerait-il lieu à une collaboration entre le secteur privé et le ministère des Affaires indiennes? La prochaine étape serait de procéder à une étude de faisabilité. Comment s'y prend-on?
M. Marc Brooks, directeur général intérimaire, Direction générale du développement économique, ministère des Affaires indiennes et du Nord: Pour ce qui est d'un inventaire des débouchés potentiels, le ministère ne s'occupe pas d'études de cette nature. Supposons qu'un entrepreneur autochtone souhaite tirer parti d'une occasion d'affaires, en collaboration avec un autre partenaire, des fonds sont disponibles dans le domaine du tourisme, par exemple. Il existe également au ministère un programme de partenariat de mise en valeur des ressources. Ce programme assume au premier chef le cofinancement des études. Il n'en absorbe pas le coût intégral, mais une partie dans un contexte de partenariat. Souvent, il arrive qu'un groupe d'entrepreneurs se manifeste et fournisse des fonds, de même que certains partenaires. Nous travaillons également en harmonie avec d'autres ministères fédéraux et d'autres paliers d'administration.
Le sénateur Watt: Supposons qu'un entrepreneur local souhaite faire certaines choses, mais qu'il ne soit pas entièrement sûr de la région où il veut s'implanter parce que certains renseignements et le capital requis lui font défaut. Il serait obligé de dépenser de l'argent et de risquer des fonds pour effectuer l'inventaire. Êtes-vous en train de me dire qu'aucun ministère ne peut aider un entrepreneur à faire cet inventaire?
M. Brooks: Pour ce qui est du ministère des Affaires indiennes et du Nord, je dois répondre non; nous n'offrons pas ce service. Dans certaines de ses ententes, Parcs Canada réserve des fonds pour des études communautaires et autres choses du genre. Nous avons un programme de développement économique communautaire qui finance le travail d'agents de développement économique dans les communautés, et une partie de ce financement peut servir à effectuer ce genre d'études.
Le sénateur Watt: Qu'en est-il d'Entreprise autochtone Canada? Êtes-vous au courant?
M. Brooks: Je préférerais répondre ultérieurement. Ce programme est davantage axé vers des projets spécifiques.
Le sénateur Watt: Pouvons-nous obtenir des renseignements à cet égard à un moment donné?
M. Brooks: Nous nous en occuperons.
M. Austin: Le comité voudra peut-être interroger des représentants d'Industrie Canada.
Le sénateur Watt: C'est habituellement un obstacle qui doit être levé avant qu'un entrepreneur s'engage. Cela a toujours été un problème.
La présidente: Nous entendrons des représentants de l'Office national de développement économique des Autochtones, qui pourront peut-être nous aider. Cela est prévu pour plus tard en octobre.
Le sénateur Watt: Je signale qu'il faudra peut-être une certaine coordination entre les deux ministères ou agences, peu importe comment vous voulez les appeler, et votre ministère.
M. Brooks: Nous collaborons étroitement avec Entreprise autochtone Canada, surtout pour nous assurer qu'il n'y a pas de lacunes dans nos programmes respectifs, surtout en ce qui a trait au développement économique.
Le sénateur Cochrane: À la page 14 de votre mémoire, vous dites que l'importance stratégique et économique des ressources énergétiques et minérales potentielle est reconnue en tant que facteur dans la prise de décision et que les ministres reçoivent des conseils sur l'équilibre qu'il convient de rechercher entre la valeur des terres et d'autres facteurs. Les peuples autochtones prodiguent-ils aussi des conseils au ministre en ce qui a trait à la création, à l'exploration et au développement d'un parc? Les peuples du Nord sont-ils partie au processus?
M. David Baker, directeur général, Direction générale des politiques stratégiques et du transfert des responsabilités, ministère des Affaires indiennes et du Nord: Oui, ils participent. Nous parlons en l'occurrence d'une décision antérieure à la création d'un parc, avant que notre ministre délivre une ordonnance de retrait provisoire des terres. Dans le contexte de ce processus, la Commission géologique du Canada effectue une évaluation des ressources énergétiques et minérales. Cette information est publique. Parcs Canada se penche aussi sur la valeur culturelle et écologique associée aux parcs. Nos bureaux régionaux communiquent alors cette information aux communautés et, en consultation avec elles, nous décidons si la création d'un parc serait une initiative valable, essentiellement, pour la collectivité locale.
Selon notre politique, notre ministre délivre une ordonnance de retrait provisoire uniquement lorsque le groupe autochtone visé, le cas échéant, et le gouvernement territorial appuient la décision de créer un parc. Bien entendu, au cours de ce processus, il n'est pas uniquement question de la création du parc proprement dit, mais aussi de la délimitation de ses frontières. Essentiellement, nous déterminons quelles terres seront à l'intérieur du parc et, par conséquent, soustraites au développement énergétique et minier, et quelles terres seront à l'extérieur du parc.
Le sénateur Cochrane: Que se passe-t-il en cas de conflit au sujet de l'utilisation souhaitable d'une parcelle de terre?
M. Baker: Essentiellement, il appartient aux ministres, en consultation avec le gouvernement territorial et les collectivités visées, de trouver un moyen de résoudre le conflit. C'est une décision très difficile que nous devons prendre chaque fois qu'il y a des intérêts contradictoires entourant l'utilisation des terres. Au bout du compte, il faut que les membres de la collectivité conviennent que la création d'un parc, par opposition à d'autres utilisations potentiels, est dans le meilleur intérêt de la communauté. L'ERME est un mécanisme qui permet de fournir aux communautés le plus d'informations possibles au sujet des débouchés potentielles auxquels on tournera le dos dans le secteur énergétique et minier.
Le sénateur Cochrane: Qu'indique votre évaluation au sujet de l'exploitation rentable de ressources énergétiques ou minérales si Parcs Canada ou un autre organisme estime qu'il faudrait faire de la région un parc national?
M. Baker: Comme je le disais, il s'agit en réalité d'examiner les différentes possibilités d'utilisation des terres et de choisir la solution optimale, avec la participation de la communauté locale et du gouvernement territorial. Il peut y avoir des gagnants comme des perdants. Comme vous le savez fort bien, une fois qu'un parc est créé, on ne peut plus y exploiter normalement des ressources non renouvelables.
Le sénateur Cochrane: Mettez-vous surtout l'accent sur le développement économique? Comme vous le savez, la population du Nord habite dans une région difficile à développer. Où vous situez-vous, par rapport aux autres organismes, dans la promotion du développement économique de cette région?
M. Austin: Notre première préoccupation est d'essayer de créer un contexte économique stable qui est propice au développement. À cet égard, nous avons accordé une très haute priorité aux revendications territoriales, notamment en essayant de créer plus de certitude et un meilleur cadre de développement économique et social. Lorsque ces revendications territoriales auront été réglées -- et les accords sont des documents très longs --, il existera plusieurs obligations différentes, mais les accords établissent les règles pour faire progresser à la fois le développement social et le développement économique. Une fois cette phase terminée ou, parfois, parallèlement, nous essayons de trouver un juste équilibre entre les aspirations des localités sur le plan du développement économique et social et celles du pays. Pour déterminer où se trouve ce juste milieu, nous utilisons divers moyens, par exemple nous tenons des consultations pour trouver la meilleure façon d'aller de l'avant en dépit de priorités ou d'intérêts souvent conflictuels.
Le sénateur Watt: Les témoins actuels étaient ici, je crois, quand nous avons entendu les porte-parole de Parcs Canada qui ont précisé qu'il y a très peu de visiteurs, si visiteurs il y a, dans certains de ces parcs du Nord. Ces parcs coûtent probablement très cher à administrer et à entretenir alors qu'ils produisent très peu de recettes.
Affaires indiennes et Nord canadien a-t-il un rôle à jouer dans l'amélioration de l'accès à ces parcs? Un des facteurs expliquant la rareté des visites est le coût élevé du transport. Votre ministère a-t-il un rôle à jouer à cet égard? Un aller simple jusque chez moi à partir de Montréal coûte presque 2 000 $ actuellement. Cela vous donne une idée de ce qu'il en coûterait pour aller jusque dans l'Extrême-Arctique; un aller simple coûterait 5 000 $. La facture est plutôt salée. Je me demande si vous avez quelque chose à dire à ce sujet.
M. Baker: Nous supportons ou pouvons supporter certains genres d'infrastructures dans des localités précises grâce à notre activité de développement économique autochtone. Il existe aussi le programme de Travaux d'infrastructure Canada que le gouvernement a annoncé récemment. C'est le Conseil du Trésor qui en est responsable. Le programme offrira des montants qui sont certes faibles à chaque territoire lorsque des gouvernements territoriaux et des organismes autochtones se concertent en vue d'effectuer des projets d'infrastructure précis. Ce sont essentiellement des travaux d'aménagement de sites naturels. Je suppose que ce n'est pas vraiment ce dont vous parlez.
Notre ministre a certes le mandat de promouvoir, pour le compte du gouvernement fédéral, le développement économique du Nord canadien. Malheureusement, la dernière des ententes de développement économique est venue à échéance en 1996, suite aux compressions budgétaires. Depuis lors, ces ententes n'ont pas été renouvelées. Par conséquent, notre ministère et notre ministre ont perdu beaucoup de moyens de répondre aux besoins légitimes d'infrastructure du Nord. En fait, ils n'en sont presque plus capables. En d'autres mots, alors que dans le passé, nous avions des fonds que nous pouvions utiliser avec d'autres ministères pour mener à bien des activités dans des domaines particuliers, qu'il s'agisse de l'exploitation de ressources non renouvelables, de tourisme ou de je ne sais quoi encore, nous ne les avons plus. Il est donc difficile d'apporter une aide significative aux gouvernements territoriaux, aux organismes autochtones ou à des localités précises qui souhaitent appuyer ou faciliter le développement d'une infrastructure.
C'est une longue façon de dire que nous avons le mandat, mais que nous n'avons pas les ressources voulues pour contribuer de façon utile. Notre ministre continue de dire à la population du Nord qu'il se concertera avec ses collègues en vue de trouver des fonds à cette fin, mais pour l'instant, la caisse est vide.
M. Brooks: Si je puis renchérir, chaque fois que je me rends dans le Nord, je me rends compte à quel point la dépense est élevée pour le contribuable canadien. C'est probablement l'éternel dilemme de l'oeuf et de la poule. Nous espérons qu'à mesure que croît l'intérêt manifesté pour le Nord, les forces du marché prévaudront et qu'avec une plus grande concurrence, les coûts viendront à baisser un peu. Vous ne verrez pas notre ministère contribuer à subventionner sous quelque forme que ce soit la promotion de débouchés axés sur le marché.
Nous contribuons à préparer la table d'investissement dans l'infrastructure économique. Nous essayons de faire en sorte que les conditions soient là, y compris que l'on ait accès aux débouchés. S'il faut ouvrir une route pour donner accès à une éventuelle installation d'écotourisme, nous avons en place des programmes pour faciliter de pareils projets. Toutefois, notre ministère n'est pas là pour transporter vers le Nord la population du sud du Canada ou d'ailleurs à coût réduit.
Le sénateur Watt: Les prix de l'essence et du mazout continuent de grimper, non seulement dans le sud du Canada mais également dans le Nord. On en vient au point où le consommateur ne pourra plus en acheter.
Je sais que des programmes de subvention peuvent s'appliquer à des localités isolées, mais cette question n'a peut-être pas de rapport direct avec les parcs. Pouvez-vous me fournir de l'information à ce sujet? Prenons l'exemple de la Côte-Nord au Québec. La population là-bas bénéficie de certains genres de subventions parce qu'elle vit en localité isolée. Il semble que les collectivités du Nord n'aient pas droit à ces mêmes subventions. Pourquoi?
M. Baker: Nous pouvons aller aux renseignements. Je ne suis pas au courant de cette situation.
Le sénateur Watt: J'ai entendu dire par le téléphone arabe que des subventions s'appliquent. Quelqu'un est venu me voir, l'autre jour, et m'a dit que la population du Nord ne reçoit pas de subventions pour le transport, alors que le prix des carburants continue de monter.
M. Austin: Nous allons certes aller aux renseignements. Cette subvention n'est peut-être pas versée par notre ministère, mais elle l'est peut-être par d'autres ministères ou par la province.
M. Baker: Notre ministère participe à une forme de subvention. Je suis convaincu que vous connaissez notre programme de produits alimentaires livrés par la poste.
Le sénateur Watt: Oui, je le connais.
La présidente: Avez-vous un document que vous pourriez fournir au comité sur vos programmes de développement économique et communautaire dans la mesure où ils s'appliquent aux parcs et à notre étude particulière?
M. Austin: Ces programmes sont peut-être plus génériques, mais nous allons certes nous renseigner.
La présidente: Ceux qui n'ont pas de rapports directs ne nous intéressent pas. Nous nous intéressons uniquement à ceux qui ont une application directe dans le développement des parcs.
Le sénateur Watt: Nous savons que divers programmes existent. Souvent, quand les Autochtones essaient de s'y retrouver parmi tous ces programmes, ils découvrent que tout le monde se renvoie la balle. Avez-vous des suggestions à nous faire pour régler ce problème?
M. Baker: Nous demandons toujours aux gens de s'adresser à nos bureaux régionaux où on les aidera à régler leur problème.
Le sénateur Watt: C'est justement là le problème.
M. Austin: Sur une note plus sérieuse, le gouvernement fédéral a lancé un programme intitulé Gouvernement en direct au Canada. Il s'est fixé un programme très dynamique en vue de servir la population avec plus d'efficacité grâce à la nouvelle technologie. La population des régions éloignées pourra ainsi mieux se renseigner. C'est là un défi pour tous les gouvernements.
M. Baker: Ce n'était pas une plaisanterie quand j'ai dit que nous demandions aux gens de s'adresser au bureau régional. Que l'on fasse appel à des agents de développement économique communautaire ou à des agents qui travaillent dans les territoires, tous nos fonctionnaires sont censés aider les demandeurs à s'y retrouver dans le labyrinthe de nos programmes et à les mettre en communication avec d'autres ministères offrant les programmes qui les intéressent.
Il serait utile pour nous que, lorsque vous vous entretenez avec des personnes de ces localités, vous leur demandiez ce qu'elles pensent de la qualité du service qu'elles obtiennent au bureau régional et au sein même de la localité pour ce qui est de nos programmes, de l'accès à ces programmes et de leur pertinence.
Le sénateur Watt: Il s'agit donc davantage d'un problème de coordination.
M. Austin: Oui. J'aimerais simplement ajouter que toutes les ententes de règlement des revendications territoriales entrées en vigueur relèvent manifestement du domaine public et que des rapports annuels à leur sujet sont habituellement déposés, comme le savent les honorables sénateurs. Ces rapports mettent en valeur l'activité des divers offices et les progrès réalisés sur plusieurs fronts différents. Lorsque vous vous rendez dans différentes localités, il serait peut-être bon de jeter un coup d'oeil sur ces rapports annuels, dont bon nombre datent de plusieurs années déjà. Vous trouverez souvent des évaluations quinquennales qui ont été effectuées afin de suggérer des améliorations.
Le sénateur Watt: Je n'ai pas vu de ministre déposer de pareils rapports à la Chambre des communes. Où les trouve-t-on?
M. Austin: Je vous fournirai avec plaisir des exemplaires. De plus, nous allons vous envoyer de l'information sur les subventions, le transport et les programmes de développement communautaire économique qui ont un rapport avec les parcs.
La présidente: Je tiens à remercier les témoins d'être venus ce matin.
Nous accueillons maintenant avec plaisir M. Kevin McNamee.
M. Kevin McNamee, directeur des campagnes de protection de la faune, Fédération canadienne de la nature: Madame la présidente, je vous suis reconnaissant de me donner l'occasion de prendre la parole devant le comité sur un sujet aussi important. Pour vous donner une idée de qui je suis, depuis 18 ans, je travaille à des dossiers liés à la création et à la gestion des parcs nationaux et des aires protégées. J'ai aussi servi d'expert-conseil auprès du comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, lorsqu'il a rédigé son rapport sur les lieux protégés.
La Fédération canadienne de la nature est un groupe de conservation comptant 40 000 membres répartis un peu partout dans les provinces et les territoires du Canada. Elle tient ses assemblées annuelles un peu partout au Canada. La dernière a eu lieu à Terre-Neuve.
Nous appuyons l'accord visant à créer le parc national Sirmilik. Nous avons donné notre appui à l'accord de 1993 de règlement des revendications territoriales du Nunavut et à l'article 8, qui porte sur la création de parcs. Nous essayons de nous rendre dans les localités afin de prendre part au processus de création de parcs. Récemment, nous nous sommes rendus à Repulse Bay et à Resolute, où l'on envisage de créer deux parcs nationaux pour le Nord.
J'aimerais faire quelques suggestions en ce qui concerne votre rapport. J'aimerais qu'au début, vous reconnaissiez que la moitié presque du réseau de parcs nationaux du Canada existe parce qu'elle a l'appui des peuples autochtones. Notre réseau s'étend sur 250 000 kilomètres carrés. Plus de la moitié de cette superficie est constituée de parcs nationaux en raison du soutien des peuples autochtones. Parfois, les parcs nationaux sont prévus dans les accords de revendications territoriales des Autochtones.
Au Canada, notre attitude a changé, d'un passé d'expulsion et de retrait des peuples autochtones du sud du Canada en vue de créer des parcs nationaux au point où nous ne créons plus de parcs nationaux sans avoir l'appui des peuples autochtones. Il est important de reconnaître cette évolution.
En ce qui a trait au développement économique, j'espère que vous allez reconnaître que les parcs nationaux ne sont pas de simples endroits à visiter. Ils font partie d'un réseau que tous les pays du monde sont en train de mettre en place en vue de protéger des aires naturelles représentatives. Ce sont des endroits où la faune est protégée. En fait, certains habitants du Yukon ne veulent pas que l'on puisse se rendre -- même des chercheurs scientifiques -- dans les terrains de mise bas de la harde de caribous de la Porcupine en raison de l'impact que pourraient avoir les visiteurs. Ces parcs sont d'importantes aires fauniques. En fait, l'accord de règlement des revendications territoriales du Nunavut reconnaît que les parcs nationaux devraient servir surtout à protéger les aires de nature sauvage. C'est prévu dans l'accord même.
Les parcs sont d'importants points repères à l'aide desquels nous mesurons l'impact d'autres facteurs, par exemple des précipitations acides et du changement climatique. Nos parcs nationaux du Nord peuvent jouer un rôle très important à cet égard et l'étude de ces phénomènes pourrait produire certains avantages économiques pour la région si l'on vient y mesurer l'impact du changement climatique, sur le plan tant du savoir traditionnel que des connaissances scientifiques. Naturellement, les parcs dont d'excellentes écoles.
Je tiens à préciser officiellement que la Fédération canadienne de la nature appuie le droit autochtone de chasser, de piéger, de pêcher et de mener d'autres activités traditionnelles dans les parcs nationaux du Nord. Nous ne réclamons pas qu'on interdise de tuer des animaux à tout prix. Ces parcs sont très importants pour maintenir ces activités.
Par ailleurs, nous appuyons le recours à des accords de revendications territoriales pour créer des parcs nationaux, pour fixer les règles d'établissement d'autres parcs, et nous appuyons le recours croissant à des ententes relatives aux répercussions et aux avantages. Les parcs nationaux ne représentent pas pour nous un moyen de bloquer l'utilisation des terres. Ces parcs sont d'importants endroits à visiter pour apprendre, à condition que les activités qu'on y mène soient convenables et qu'elles soient menées dans de bonnes conditions.
J'ai cinq observations et recommandations à faire au comité. Tout d'abord, pour ce qui est du financement, comme vous l'avez peut-être déjà appris, Parcs Canada finance typiquement le processus de consultation de la communauté, les nouveaux accords d'établissement de parcs et leur mise en oeuvre. Le hic, c'est qu'en dépit d'une décennie d'engagements politiques -- vous les trouverez dans deux livres rouges des Libéraux --, il n'y a pas de source prévisible de fonds pour que Parcs Canada puisse compléter le réseau des parcs nationaux. Les trois derniers accords de création de parcs, y compris celui de Sirmilik, ont été financés en détournant de l'argent destiné à d'autres parcs nationaux. Pour financer Sirmilik, on a peut-être retiré des fonds à Kejimkujik ou à Gros-Morne, si ce n'est ailleurs, parce qu'il n'y a pas d'argent nouveau.
On n'a pas débloqué de fonds pour l'accord imminent visant à créer Wager Bay. Ce parc n'est prévu que depuis 20 ans. Il a fallu à la population locale beaucoup de temps pour se décider à négocier. De quoi aurons-nous l'air, à la ligne d'arrivée, lorsque l'entente aura été négociée et que nous découvrirons qu'il n'y a pas d'argent frais pour financer le parc?
D'après les ressources actuelles, Parcs Canada dispose de très peu de fonds pour embaucher des gens. Pour exploiter certains des nouveaux parcs nationaux et pour former et employer les Autochtones, ce qui est prévu dans les accords des répercussions et des avantages pour les Inuits en rapport avec ces parcs, il faut avoir des fonds. Notre recommandation serait que le comité appuie l'affectation de fonds, dans le budget fédéral de 2001, à la planification, la négociation, l'établissement, la gestion et l'exploitation des parcs nouveaux et existants.
Nous avons présenté des mémoires au ministre des Finances. Je vous en laisserai volontiers des exemplaires. Nous avons fait des prévisions concernant les coûts. La Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux du Canada l'a aussi fait. Je vous demanderais instamment de faire un rapport provisoire parce qu'il ne reste plus beaucoup de temps pour faire inscrire des fonds dans le budget fédéral. Parlez-en au ministre des Finances ou appelez au cabinet du premier ministre. Je fais là une demande flagrante d'appui politique pour de nouveaux fonds, mais cette année est critique pour Parcs Canada en rapport avec la question même que vous examinez.
Vous déciderez peut-être d'encourager également la ministre du Patrimoine canadien à demander des fonds pour mettre en oeuvre en priorité l'accord relatif à Wager Bay.
Ma deuxième source de préoccupation concerne le financement des études culturelles et biologiques. Durant la négociation de nouveaux parcs nationaux, une des plus importantes activités financées est l'évaluation des ressources minérales. Dans le cas de Wager Bay, un million de dollars presque d'argent fédéral a été consacré à évaluer les ressources minérales, ce qui aide et subventionne essentiellement l'industrie minière puisque l'évaluation lui dit où se trouvent les minéraux; par contre, il n'y avait presque plus rien pour l'exécution d'études culturelles et biologiques. Certains travaux concernant la tradition orale ont été faits dans le parc, et Parcs Canada a eu de la difficulté à trouver l'argent à cette fin.
Comme les évaluations des ressources minérales représentent une politique, les fonds sont là. Toutefois, l'exécution d'études culturelles et biologiques avant la création d'un parc n'est pas une politique. Notre deuxième recommandation serait que le budget fédéral rétablisse un peu l'équilibre en matière de recherche.
En troisième lieu, il en a déjà été question, mais j'aimerais proposer que l'on finance les initiatives de développement communautaire. Il est important que le comité ne donne pas de Parcs Canada l'image d'un organisme d'exploitation des ressources. Il a certes un rôle d'aide dans ce domaine, mais ce n'est pas sa vocation, pas plus qu'il n'est l'unique source de tout l'argent requis pour permettre aux localités de tirer profit des parcs.
Je suggérerais d'autres ministères fédéraux. On vous a déjà parlé de l'un d'entre eux, mais il y a également DRHC. On devrait examiner leurs subventions touchant les initiatives communautaires comme source de financement pour aider les collectivités à profiter davantage des parcs nationaux. Je sais qu'il n'est pas très populaire du point de vue politique de parler de ce ministère ces jours-ci. Cependant, beaucoup de gens d'un bout à l'autre du pays savent dans quelle mesure ces subventions aident les communautés locales et les gens qui y vivent à saisir les occasions lorsqu'elles se présentent là où il n'y a pas de capitaux du secteur privé.
On pourrait investir dans des stratégies de tourisme régional. L'accord Sirmilik prévoit une stratégie de ce genre. L'accord de 1988 relatif au parc national des Prairies contient une disposition similaire. Douze ans plus tard et on n'y a pas toujours pas donné suite en partie en raison d'un manque de fonds. Parcs Canada ne peut attribuer ses fonds qu'à un certain nombre d'endroits, mais d'autres ministères peuvent jouer un rôle. Je vous suggère de demander à des représentants du Développement des ressources humaines de venir témoigner pour vous parler de leur programme d'initiatives rurales qui pourrait être important.
Permettez-moi une remarque personnelle. Au sud du 60e, mon épouse, mon fils et moi-même sommes allés visiter une petite collectivité qui annonçait entre autres qu'elle invitait les gens à venir faire l'expérience de la culture autochtone. Ce qui m'a frappé c'est que les services de transport, d'hébergement de voyage et de restauration appartenaient pour ainsi dire presque tous, si je ne m'abuse, à une entreprise ayant son siège à Toronto.
Si les Autochtones doivent profiter de ces parcs nationaux et si les collectivités sont considérées comme des portes d'accès à ces expériences en milieu naturel, elles doivent être plus que de simples employées de l'entreprise de quelqu'un d'autre. Il faut de toute urgence se pencher là-dessus parce que le Nunavut se fait remarquer dans le monde entier. Qui fournira les capitaux? Cela est important et cadre avec à notre idée, à savoir que les gens devraient visiter les parcs. Nous ne croyons pas que tout le développement devrait s'y faire. Les collectivités devraient aussi en profiter. Si le gîte est situé simplement dans un parc et qu'il ne se trouve pas dans une collectivité, il ne sera fréquenté qu'un mois par année -- vous êtes au courant du temps qu'il y fait. Ce pendant de plus en plus de gens se rendent dans ces collectivités pendant les inter-saisons. Il est important pour ces collectivités de devenir des portes d'entrée et d'avoir accès aux capitaux si l'on veut éviter que la même vieille histoire se répète, à savoir que les gens du Sud possèdent les entreprises et les Autochtones n'obtiennent que quelques emplois.
Vous pourriez aussi peut-être songer à faire des démarches pour qu'un des parcs nationaux devienne un site du patrimoine mondial en vertu de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel. Le parc national Yellowstone, les pyramides et la Grande barrière sont tous des sites du patrimoine mondial, ce qui permet de les faire connaître. Il n'y a pas de site du patrimoine mondial dans l'Arctique. Le fait d'avoir un site de ce genre dans cette région ne donnerait pas le droit aux Nations Unies de nous dicter notre conduite. Essentiellement, cela indique aux gens qu'il s'agit d'un endroit très intéressant.
Nous devrions aussi songer à une façon d'amener les gouvernements et les peuples autochtones à raconter comment ils collaborent pour établir ces nouveaux parcs. Lorsque vous écoutez les nouvelles, vous entendez parler de Burnt Church de même que de toute autre question sur laquelle notre culture et la culture autochtone sont divisées, mais il existe des cas incroyables de réussite, dans les régions septentrionale et nordique du Canada, où les peuples autochtones et le gouvernement fédéral collaborent afin de protéger les lieux. Tout le monde demande comment nous pouvons coopérer et ce que nous pouvons faire. Nous avons de solides exemples d'endroits où de grandes choses ont été réalisées. Vous devriez inciter les gens à raconter ces histoires parce que nous n'en entendons pas parler. Au moment de la création d'un parc, on publie un communiqué et tout s'arrête là. Il y a des histoires qui devraient être racontées.
Enfin, en ce qui concerne une question précise, je proposerais que le comité -- peut-être au moyen d'une lettre -- demande au président Clinton à court terme, avant qu'il ne quitte la présidence, de faire un monument national de la plaine côtière de la réserve faunique nationale de l'Arctique. C'est une question de parc national pour le Canada. C'est une question de cogestion entre les peuples autochtones du Canada et le gouvernement fédéral.
La plaine côtière est limitrophe du Yukon et de l'Alaska. La harde de caribous de la Porcupine, que les Inuvialuit et la population d'Old Crow voulaient protéger en établissant un parc national, se déplace du Yukon à l'Alaska et vice-versa. Les lieux de mise-bas sont situés tant au Yukon qu'en Alaska. À la demande pressante des Inuvialuit et des Vuntut, nous avons créé deux parcs nationaux afin de protéger notre moitié de ces lieux de mise-bas, cette aire de croissance. Les Américains songent à consacrer leur moitié au forage pétrolier et gazier. Trente années d'études ont confirmé que, s'ils mettent leur plan à exécution, la harde sera décimée et la culture de même que l'économie des Autochtones anéantie. Lorsque les peuples autochtones dépendent du caribou, cela fait partie de leur économie même si cela ne correspond pas à l'idée que nous nous en faisons.
Cette région doit être protégée et je crois que, parce que vous examinez des questions qui intéressent les Autochtones, un message adressé par votre comité au président Clinton aurait un certain poids. C'est une question pour laquelle les peuples autochtones se battent depuis longtemps et j'estime qu'elle relève de votre mandat.
Je vous remercie de l'occasion que vous nous avez offerte de comparaître devant vous. Si je peux vous être utile de quelque autre manière, qu'il s'agisse d'autres documents ou d'exemples, je le ferai avec plaisir.
La présidente: Merci beaucoup de cet exposé constructif.
Le sénateur Watt: Vous avez soulevé quantité de points importants que nous devons prendre comme point de départ afin de ne pas manquer notre coup. Nous devrions essayer de faire tourner la roue un peu plus vite dans l'intérêt des gens qui vivent dans ces régions isolées.
Je conviens certes avec vous que les activités économiques liées aux parcs n'ont pas à se passer dans les parcs eux-mêmes, mais dans les collectivités voisines de manière à multiplier les retombées économiques et les activités dans les collectivités, étant donné qu'on pourrait les utiliser de manière saisonnière pour certaines autres activités.
Comme je l'ai dit aux témoins qui vous ont précédé, le problème c'est que les fonds manquent pour effectuer l'inventaire. C'est très important. Faute de capitaux à consacrer à l'inventaire, rien ne se produira.
Je vais vous demander de préciser votre pensée en ce qui concerne l'utilisation des parcs pour une surveillance accrue de ce qui se passe dans l'Arctique. Nous avons tous entendu dire que le réchauffement de la planète est de plus en plus perceptible dans le Nord à l'heure actuelle en raison du comportement du climat. Quant à moi, j'ai constaté des températures très chaudes cet été, des températures encore jamais atteintes. C'était plus chaud même qu'à Montréal et à Ottawa. C'était très inconfortable. Les gens, les animaux et la végétation sont tous touchés. Vous avez parlé de mettre au point un système de surveillance. Je le vois plus comme un fil conducteur. Je ne pense pas que nous puissions en fait influer sur ce qui est déjà en cours, parce qu'il est presque trop tard. Nombreux sont les gens qui le disent depuis un certain temps, mais il semble que leurs propos tombent dans l'oreille d'un sourd. Pourriez-vous nous en dire plus en ce qui a trait aux choses précises que vous aimeriez voir en ce qui a trait aux parcs, en matière de surveillance de ce qui se passe là-bas?
M. McNamee: Je n'appellerais pas nécessairement cela mon idée. Parcs Canada, les universités canadiennes et certaines collectivités autochtones locales participent à la surveillance. Des membres de notre propre organisation qui s'intéressent aux oiseaux surveillent bénévolement les indicateurs précis de la nature -- les oiseaux, la forêt, la qualité de l'eau et que sais-je encore -- afin de voir si d'autres substances que nous rejetons dans l'air et dans l'eau se manifestent.
La science a tendance à laisser entendre que nous traitons le nord du Canada presque comme s'il s'agissait d'une poubelle. Un grand nombre de contaminants montent vers le nord en raison des conditions atmosphériques. Il est très important que nous comprenions bien de quelle manière ces choses affectent tout, à partir de minuscules organismes comme le lichen, l'aliment de base des caribous jusqu'à ces grosses créatures comme les ours polaires, qui sont touchés par la contamination par les BPC.
L'idée serait de fournir des fonds pour entreprendre des programmes de recherche à long terme et mettre sur pied des programmes de surveillance auxquels pourraient participer des étudiants des universités qui sont en train de voir le jour dans le Nord. L'important, c'est de faire en sorte que les Autochtones participent à ces programmes et expériences d'apprentissage. Il est vrai que ces programmes coûtent très cher dans le Nord. Toutefois, c'est quelque chose qu'il faut, à mon avis, examiner.
Le rapport de la Commission sur l'intégrité écologique des parcs nationaux du Canada, qui a été rendu public en mars 2000, contient un chapitre sur la surveillance, les mesures qui doivent être prises et les questions à considérer. Vous voudrez peut-être l'examiner pour avoir des idées.
Le sénateur Watt: Quel ministère devrait s'occuper directement de cette surveillance? Santé Canada, Environnement Canada, Affaires indiennes et du Nord?
M. McNamee: Ce sont les principaux ministères concernés.
Le sénateur Watt: Les ministres attitrés devraient se rencontrer et essayer de faire quelque chose.
M. McNamee: Et Parcs Canada devrait participer à l'effort parce qu'il possède le mandat législatif d'intervenir dans ce domaine.
Le sénateur Watt: Pouvez-vous nous soumettre des recommandations précises par écrit?
M. McNamee: Au sujet des ministères concernés?
Le sénateur Watt: Oui, et sur la façon dont les parcs peuvent participer à l'établissement de données, d'inventaires et autre chose du genre dans le domaine de l'environnement.
M. McNamee: Je peux, bien sûr, essayer de le faire. Il est important par ailleurs d'obtenir la collaboration des universités, parce qu'elles font beaucoup de recherche dans ce domaine. Il faut également faire appel à la collaboration d'autres groupes, car vous ne voulez pas que les fonctionnaires soient les seuls à s'occuper de cette tâche. De nombreuses autres personnes, y compris les collectivités, doivent participer à cet effort. Il y a également la question de savoir comment intégrer les considérations d'ordre écologique dans tout cela.
Le sénateur Watt: J'ai une autre question, que je voulais poser au début. Quels rapports votre organisme entretient-il avec Greenpeace, les associations de défense des droits des animaux, les divers groupes de protection qui nous ont nui sur le plan économique, notamment dans le domaine de la chasse du phoque?
M. McNamee: Nous entretenons avec eux des rapports officieux. Nous participons à des réunions et des conférences à l'échelle nationale. Nous sommes extrêmement prudents quand nous établissons des alliances. Dans certains cas, nous ne collaborons pas avec eux.
Certaines associations sont contre la chasse, point à la ligne. Nous sommes d'accord avec elles. Toutefois, nous reconnaissons que cette activité est importante pour les collectivités autochtones.
Je vais être franc avec vous. Nous collaborons de façon formelle avec une coalition qui tente d'encourager le gouvernement fédéral à mettre davantage l'accent sur l'environnement dans son budget. Il est important pour nous de collaborer ensemble dans ce domaine. Greenpeace a d'ailleurs décidé de concentrer ses efforts sur certains programmes, comme celui des changements climatiques.
Je dirais que nos rapports avec ces groupes sont officieux. Pour ce qui est de notre programme touchant la faune, il n'y a aucune collaboration à ce chapitre.
Le sénateur Watt: La collaboration se fait au cas par cas.
M. McNamee: Nous collaborons ensemble dans un domaine, et c'est celui du budget vert.
Le sénateur Cochrane: Vous nous avez demandé de communiquer avec le président Clinton et de solliciter son aide dans le dossier touchant l'Alaska. Je tiens à vous rappeler que le comité ne déposera aucun rapport à ce sujet tant que les élections aux États-Unis n'auront pas eu lieu. Le président Clinton sera en poste jusqu'en janvier. Toutefois, un nouveau président sera choisi avant cela.
M. McNamee: J'en suis conscient, sénateur. Voilà pourquoi j'ai proposé qu'on écrive une lettre. Je sais qu'une centaine de parlementaires ont déjà signé une lettre qui a été adressée au président Clinton il y a plusieurs mois de cela. Elle a été livrée personnellement à la Maison Blanche par Louise Hardy, députée du Yukon. Le Canada a signé un traité et plusieurs autres accords dans ce domaine. C'est un dossier politique qui a une longue histoire. Je proposais uniquement que vous écriviez une lettre.
La présidente: Vous avez parlé des sites du patrimoine mondial. Faisiez-vous allusion à l'Arctique? Il y a quelques sites au Yukon -- Two Rivers et une partie de Kluane.
M. McNamee: Kluane est désigné site du patrimoine mondial. Autant que je sache, il n'y a pas d'autre parc du Yukon qui porte cette désignation. Two Rivers est désigné site du patrimoine canadien. Il n'y a pas, au Canada, de site du patrimoine mondial au-delà de la limite de végétation des arbres. C'est quelque chose que la Convention du patrimoine mondial a déjà signalé à plusieurs reprises.
Je ne dis pas que le gouvernement fédéral devrait proposer une telle désignation. Il serait bien que l'initiative vienne des collectivités, qui pourraient la soumettre au gouvernement fédéral qui, lui, se chargerait d'y donner suite.
La présidente: Il est très difficile pour les petites collectivités de mettre sur pied des infrastructures, que ce soit dans le domaine de l'éducation ou du tourisme, au moyen de capitaux qui ne viennent pas de l'extérieur. Les ententes sur les revendications territoriales leur permettent de toucher des fonds par le biais des programmes de développement économique. Comment les petites collectivités peuvent-elles obtenir des fonds qui leur permettraient, dans les faits, de contrôler leur propre destin?
M. McNamee: Je ne suis pas bien placé pour répondre à cette question.
La présidente: Avez-vous des suggestions à faire ou quelque chose à nous proposer?
M. McNamee: Le gouvernement fédéral constitue, bien entendu, une source parmi d'autres. Vous pourriez peut-être essayer de voir ce que prévoient les ententes sur les revendications territoriales, et ce que les gouvernements territoriaux sont prêts à investir dans ce domaine.
Vous pourriez également, selon le type de projet en cause, consulter l'Institut Sonoran aux États-Unis. Il a examiné de près la question de savoir comment les collectivités peuvent tirer parti des ressources naturelles qui sont situées près de leur localité, et où elles peuvent trouver le financement nécessaire pour les exploiter. L'Institut a analysé la situation de l'ensemble des collectivités, y compris celles de Alaska. Les exemples touchant l'Alaska pourraient être révélateurs.
Je n'en suis pas sûr, mais il y a peut-être quelques fondations qui seraient intéressées à participer à ce projet. Si ces sources de financement existent, alors il est important de montrer que d'autres paliers de gouvernement, y compris les Autochtones, les collectivités et les groupes d'intérêt eux-mêmes, font partie de la solution financière. Il serait peut-être bon de consulter l'Institut Sonoran parce qu'il a examiné le cas de l'Alaska. Nous pourrions vous fournir les noms de certaines personnes-ressources.
La présidente: Mais comment intégrer le tout? Comme vous l'avez indiqué, nous savons que les ententes sur les revendications territoriales touchant les parcs autorisent la pratique de la chasse et la récolte. Or, comment peut-on mettre en oeuvre de telles ententes dans les collectivités où d'autres intérêts s'y opposent? Je fais allusion notamment au Yukon, où les Premières nations sont en situation minoritaire. Ceux qui sont au pouvoir ne sont pas membres des Premières nations et ne peuvent pratiquer la chasse ou la récolte dans le parc. Quel est votre avis là-dessus?
M. McNamee: Nous sommes confrontés à ce problème dans le parc Wolf Lake que nous proposons de créer dans le sud du Yukon. Les Autochtones et les non-Autochtones cherchent à conserver ce droit. En fait, les Autochtones vont le conserver en vertu de l'entente qui a été signée. Il m'est difficile de répondre à cette question, sénateur, puisque ce sont le genre de choses qui doivent être réglées entre gouvernements à la table de négociation.
Les groupes de conservation doivent tenir compte du point de vue des non-Autochtones. Prenons l'exemple du parc national Wapusk, au Manitoba. Ce parc, qui a été créé en 1996, a ceci de particulier qu'il est administré en vertu d'une entente sur les droits fonciers issus des traités qui a été conclue avec la province du Manitoba. L'entente prévoit que les Autochtones et les non-Autochtones peuvent maintenir leur mode de vie traditionnel. Pour ce qui est des non-Autochtones, les négociateurs ont accepté d'éliminer progressivement ces activités après 35 ans. Vous pourriez peut-être jeter un coup d'oeil à cette entente.
Le sénateur Watt: Vous avez parlé, dans votre exposé, de l'absence de visibilité qui existe une fois le parc créé. On n'entend plus parler de celui-ci une fois le processus terminé. Est-ce que cela est dû au fait qu'ils ne font rien de particulier? S'ils voulaient établir une liste détaillée des activités qu'ils veulent entreprendre dans chacun des parcs, y compris la mise en place de réseaux de surveillance de l'environnement et autre chose de ce genre, il serait possible de trouver un moyen de rendre ces renseignements publics. Ce ne sont certainement pas les moyens qui manquent. Êtes-vous d'accord pour dire qu'ils vont éprouver des difficultés tant qu'ils n'auront pas établi de liste détaillée des activités qu'ils comptent offrir dans chacun des parcs?
M. McNamee: Je faisais allusion à quelque chose de particulier. Je pense qu'il faudrait expliquer aux Canadiens comment le parc a été créé pour qu'ils sachent que les Autochtones et les non-Autochtones au sein du gouvernement collaborent ensemble en vue de protéger quelque chose. Les gens entendraient ainsi parler de ce que nous avons accompli ensemble au lieu de toujours entendre parler de ce qui nous divisent.
Parcs Canada n'a peut-être pas transmis le message dans certains cas parce que le parc n'était pas prêt à accueillir des visiteurs. Nous n'avons pas établi de plan directeur pour Sirmilik, et nous n'avons pas établi les inventaires. C'est peut-être encore trop tôt. Toutefois, le site Web de Parcs Canada donne la liste des parcs où on peut pratiquer le kayak et autres activités. Il se peut par contre que les gens s'attendent à ce que Parcs Canada transmette le message.
J'ai vu quelques articles dans des revues américaines au sujet des activités en plein air qui peuvent être pratiquées au Nunavut, et les parcs nationaux n'y étaient même pas mentionnés. Nous avons là-bas des endroits magnifiques et ils ne sont même pas mentionnés. C'est difficile pour le gouvernement du Nunavut qui vient à peine d'être mis en place et qui a des dossiers plus importants à régler. Néanmoins, cela devrait faire partie de ses priorités.
Le sénateur Cochrane: J'ai plutôt l'impression que c'est l'administration locale qui devrait s'en occuper avec Parcs Canada. Nous pourrions peut-être nous pencher là-dessus lors de notre visite, madame la présidente. L'administration locale devrait, dans l'intérêt des résidents, prendre l'initiative d'intervenir dans ce dossier.
M. McNamee: Pour revenir à l'exemple que vous avez soulevé, toutes les discussions entourant le parc Wolf Lake, au Yukon, portent sur ce qui se faisait il y a vingt ans. Or, les parcs ne sont plus créés de la même façon.
J'encourage le comité à aborder cette question dans son rapport pour que les collectivités cessent de penser que Kluane est l'unique modèle à suivre. Il y a des collectivités dans le Yukon qui pensent que le parc Wolf Lake verra le jour dans un contexte différent. Il est important de leur expliquer comment les choses ont évolué. On a parfois tendance à croire que Kluane a la réponse à toutes les questions.
La présidente: Merci d'avoir comparu devant le comité et de nous avoir fait part de vos observations.
Le comité suspend ses travaux.