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RULE - Comité permanent

Privilèges, Règlement et procédure

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Privilèges, du Règlement et de la procédure

Fascicule 9 - Témoignages


OTTAWA, le mercredi 29 mars 2000

Le comité sénatorial permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure, auquel a été renvoyé le projet de loi S-7, Loi relative aux modalités d'octroi par le Gouverneur général, au nom de Sa Majesté, de la sanction royale aux projets de loi adoptés par les Chambres du Parlement, se réunit aujourd'hui à 12 h 10 pour examiner le projet de loi.

Le sénateur Jack Austin, c.p. (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Nous avons invité aujourd'hui le parrain du projet de loi S-7 à nous faire part de ses idées et à répondre aux questions des membres du comité au sujet de la mesure législative à l'étude. Le sénateur John Lynch-Staunton est donc notre premier témoin.

Le sénateur Lynch-Staunton: Je n'ai pas de déclaration officielle à vous faire car la question a suscité de longues discussions au Sénat et ce, à plusieurs reprises. Chers collègues, je vous remercie de votre participation. Tout le monde n'était pas d'accord au sujet du projet de loi, mais je pense que nous reconnaissons tous que la cérémonie d'octroi de la sanction royale, telle qu'elle se déroule aujourd'hui, ne rend pas justice à l'importance de la sanction royale, c'est-à-dire la troisième et dernière étape d'un long processus législatif. Selon la Constitution, le Parlement se compose de trois entités: la Chambre haute, la Chambre des communes et la Couronne. La Couronne est négligée, je dirais même amenuisée quand on regarde la façon dont se déroule la cérémonie de la sanction royale. Cette cérémonie se tient habituellement à la fin de la semaine quand les parlementaires, ce qui est bien compréhensible, veulent rentrer chez eux après avoir effectué de longues heures de travail ici.

La ou le Gouverneur général est rarement disponible pour assister à la cérémonie. Il est parfois difficile de trouver le suppléant du Gouverneur général et quand on le trouve, il arrive qu'on le fasse attendre car le Sénat se trouve alors plongé dans un long débat.

Il est arrivé dernièrement que la délégation de la Chambre des communes ne contienne aucun député, sauf le président ou le vice-président. Les tribunes sont vides, et avec raison. De nombreux sénateurs ne peuvent assister à la cérémonie, si bien que parfois, la majorité des sièges sont inoccupés.

En outre, un étranger qui se trouverait dans la tribune aurait beaucoup de difficulté à comprendre ce qui se passe en voyant le greffier s'approcher du président, revenir sur ses pas, et lire à voix haute le titre des projets de loi. Il y a ensuite une pause, après quoi le président, si le projet de loi qui reçoit la sanction royale est un projet de loi de subsides, s'adressera au suppléant du Gouverneur général. Cette cérémonie est devenue tellement routinière que la plupart des gens qui y assistent le font par devoir et non pas parce qu'ils ont suivi le processus législatif du début à la fin.

L'objectif du projet de loi que nous étudions aujourd'hui est de remplacer, dans bien des cas, la traditionnelle cérémonie par une déclaration écrite afin qu'il y ait moins de cérémonies d'octroi de la sanction royale telles que nous les connaissons aujourd'hui parce que, à mon avis, la façon dont elles se déroulent actuellement est avilissante. Le projet de loi S-7 se veut une solution de rechange mais il continuerait quand même d'y avoir une cérémonie d'octroi de la sanction royale au moins une fois par an. Le projet de loi a stimulé la discussion. Il y a d'autres solutions. Si l'on pouvait trouver une façon de rétablir les choses et de faire en sorte que la cérémonie se déroule comme elle doit se dérouler mais tout en lui donnant une plus grande visibilité, moi, je serais en faveur d'une telle solution.

J'ai lu à plusieurs reprises que le projet de loi visait à abolir la cérémonie de la sanction royale. Ce n'est pas le cas, et je n'oserais jamais proposer une telle chose. L'objectif du projet de loi est d'accorder plus d'importance à la cérémonie en en ayant moins et, lorsqu'elle se tiendrait, en en faisant plus qu'un exercice routinier. C'est là l'objectif du projet de loi et le raisonnement qui le sous-tend. Je crois que la plupart des collègues sont d'accord avec moi quant à la façon dont la cérémonie se déroule.

C'est tout ce que j'ai à dire pour l'instant, monsieur le président. Merci.

Le président: Merci beaucoup, sénateur Lynch-Staunton.

Le sénateur Di Nino: Pour faire le changement que vous recommandez, faudrait-il modifier la Constitution?

Le sénateur Lynch-Staunton: Non. La cérémonie actuelle est décrite dans un document préparé par le Sénat. C'est le Sénat qui en détermine le déroulement.

Le sénateur Di Nino: Vous dites que le projet de loi offrirait une solution de rechange qui permettrait d'atteindre le même objectif, plutôt que de changer la cérémonie elle-même. En ce sens, cela ne nécessitera pas de modification à la Loi constitutionnelle.

Le sénateur Lynch-Staunton: C'est exact.

Le sénateur Di Nino: Si la cérémonie se tenait au début de chaque session, par exemple, à 14 heures, est-ce que vos sentiments seraient toujours les mêmes?

Le sénateur Lynch-Staunton: Cela ne fait aucun doute. Si l'on pouvait réunir ici le Gouverneur général et le premier ministre à un moment où la Chambre et le Sénat siègent, ainsi que les députés et sénateurs, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas interrompre les travaux des deux Chambres pour insister sur le fait qu'il y a un autre intervenant dans le processus parlementaire. Actuellement, la cérémonie se déroule à la fin des travaux lorsque les deux Chambres ont quitté le Parlement et que la troisième cérémonie se déroule dans une salle vide.

Le sénateur Di Nino: Ce que dit le sénateur -- et j'aimerais qu'il précise sa pensée -- c'est qu'il est préoccupé par la façon dont se déroule la cérémonie actuellement qu'il considère avilissante et qu'il s'inquiète également du manque d'intérêt de la part de la Chambre des communes et du Sénat, voire du Gouverneur général, plus souvent qu'autrement. Est-ce là votre principale préoccupation?

Le sénateur Lynch-Staunton: C'en est une.

Le président: D'après ce que je comprends du projet de loi et de tout ce qui l'a précédé, si l'on remonte au sénateur Frith en 1983 et au rapport McGrath en 1985, la cérémonie de la sanction royale a fait l'objet de nombreuses discussions à diverses reprises.

L'un des éléments importants pour certaines personnes, dont certains de nos collègues, c'est qu'ils croient que tout changement apporté à la procédure actuelle amoindrira la pertinence du Sénat ou l'empêchera, d'une certaine façon, de se décrire comme partie intégrante du processus parlementaire. Je dois dire que c'est là une première réaction. Cependant, le sénateur Lynch-Staunton signale que les membres des deux Chambres semblent manifester leur intérêt pour cette question en choisissant d'occuper ou non leur siège. Autrement dit, ils n'assistent pas à la cérémonie et, partant, la cérémonie elle-même perd de l'importance et ne permet plus au Sénat de jouer son rôle à titre de volet symbolique du processus parlementaire.

Pour reprendre les propos du sénateur Lynch-Staunton, lorsqu'elle envoie son suppléant, la gouverneure générale contribue elle aussi à minimiser l'importance du processus de la sanction royale. Les gens qui sont intéressés par le processus, tant les parlementaires que le Gouverneur général, ont sans doute d'excellentes raisons de ne pas assister à la cérémonie chaque fois que le gouvernement prévoit l'octroi d'une sanction royale. Bien sûr, l'important pour le gouvernement, c'est de faire en sorte qu'un projet de loi ait force de loi, et il serait bien gênant pour un gouvernement, à l'occasion, de devoir attendre de franchir une étape de procédure afin de faire adopter une mesure législative qui peut avoir été longuement débattue et qui est considérée par le gouvernement comme étant éminemment nécessaire.

Le sénateur Lynch-Staunton: Lorsque nous avons des lois d'urgence comme des lois de retour au travail, il est parfois difficile de trouver un remplaçant pour assister à la cérémonie. La solution de rechange que je propose permettrait d'accorder immédiatement la sanction royale au projet de loi.

Le président: Comme vous l'avez dit tout à l'heure, il se peut que l'une des deux Chambres ne siège pas. Il se peut également que cela prenne plus de temps si la Chambre des communes ne siège pas pour que le Sénat étudie un projet de loi. Le gouvernement doit alors rappeler les Communes afin qu'elles siègent et qu'on puisse accorder la sanction royale.

La grande question est de savoir si un changement de procédure dans l'octroi de la sanction royale est souhaitable actuellement. Il est évident que personne n'exclut le Gouverneur général du processus de la sanction royale, pas plus qu'on ne le pourrait d'ailleurs. La Loi constitutionnelle dispose que la sanction royale doit être accordée par le Gouverneur général ou par le monarque.

La deuxième question est de voir comment on peut appliquer cette procédure et de savoir si elle peut être mise en place par le Parlement lui-même. Il n'y a rien de constitutionnel dans la façon dont la sanction royale est accordée. Je crois que tous les collègues savent que la procédure que nous suivons actuellement a été modifiée depuis longtemps dans d'autres traditions inspirées par Westminster. Le Parlement britannique, tout comme le Parlement australien et néo-zélandais, ont adopté un moyen de transmettre un message au Gouverneur général à sa résidence, ou à la reine au Palais de Buckingham, où la sanction royale est accordée et ensuite renvoyée aux Chambres du Parlement.

Est-il souhaitable de changer la pratique en cours? Je dis «changer», mais le projet de loi ne changerait pas la pratique; il offre au gouvernement une solution de rechange. Est-ce exact de dire cela?

Le sénateur Lynch-Staunton: Tout à fait.

Le président: Le gouvernement en place peut utiliser en tout temps la procédure complète s'il le souhaite. Ainsi, ce que l'on offre au gouvernement, c'est une solution de rechange, une façon plus sommaire de procéder, mais il serait obligatoire qu'une fois par an, la cérémonie complète telle qu'elle se déroule aujourd'hui se tienne, tout simplement pour en préserver l'efficacité. Je fais ces observations pour provoquer, je l'espère, la discussion.

Le sénateur DeWare: Je suis d'accord avec vous. Je crois que le projet de loi est opportun. La première fois que j'ai assisté à une cérémonie de sanction royale, bien sûr, c'était à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick, et j'étais émue d'en être témoin. J'ai déjà été aussi à l'autre extrémité, en tant que whip de mon caucus, où je me suis retrouvée à dire à certains de mes membres: «Il y aura sanction royale à 18 heures jeudi soir», quand, le moment venu, tout le monde est en route vers la maison. Les seules personnes qui y assistent sont ceux et celles qui occupent un poste de commande, et il est important pour nous d'être représentés. On se sent mal pour les gens qui sont là. Ensuite, les responsables se rendent à la Chambre des communes et essaient d'y ressusciter quelques corps, et habituellement, on se retrouve avec le président et le personnel de la Chambre. Il faut que quelques députés soient présents pour que le processus soit légal. J'aimerais que l'on change le moment auquel se tient la cérémonie. Je pense que ce n'est pas un bon moment. Si la cérémonie se tenait, comme quelqu'un l'a suggéré, à 14 heures, ou à une autre heure, je pense que cela améliorait beaucoup la situation.

Le président: Le problème, c'est que c'est la prérogative du gouvernement que de changer l'heure à laquelle se tient la cérémonie. On ne peut légiférer pour éliminer cette prérogative.

Le sénateur DeWare: Les projets de loi de subsides doivent-ils recevoir la sanction royale?

Le président: Oui, absolument.

Le sénateur DeWare: Cela se tient habituellement le dernier jour de mars. Puisque c'est la période à laquelle nous devons avoir la sanction royale, cela pourrait être une des journées prévues pour cela et nous pourrions en inclure d'autres dans ce créneau. Il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte ici. Que se passerait-il lors d'une année électorale? Il y a beaucoup de choses auxquelles il faut réfléchir. Si la cérémonie pouvait être un peu plus productive, et si toutes les parties intéressées pouvaient y jouer un rôle, je pense alors que cela serait beaucoup mieux.

Le président: Puis-je me permettre de vous dire que nous traitons ici de choix individuels; la loi ne fonctionne pas. On ne peut pas donner plus de visibilité à la cérémonie si les gens n'y assistent pas, s'ils ne sont pas intéressés.

Le sénateur DeWare: La cérémonie aurait plus de panache si elle avait lieu le mardi soir au lieu du jeudi.

Le sénateur Kroft: En ce qui concerne le rôle de la monarchie dans notre système, j'ai une opinion moins passionnée que les autres. Je ne veux pas relancer ce débat parce que même si le gouvernement était dirigé par un autre parti, nous serions toujours face au même problème. Loin de moi l'idée de proposer un changement dans notre structure parlementaire.

J'ai aussi tendance à penser que lorsque les choses s'estompent avec le temps, c'est habituellement à cause de leur cycle de vie. On en a la preuve dans d'autres pays. Pour quelque raison que ce soit, les gens ont tout simplement fondamentalement perdu intérêt dans la façon dont se déroulent les choses. Il est difficile de les forcer à s'intéresser à une chose qui n'a pas de vitalité en soi ou de volonté propre de subsister.

Ma question est plus restreinte. Peut-être pourrions-nous examiner l'intérêt que porte le Sénat lui-même à la question. Plutôt que d'examiner la question pour l'ensemble du Parlement, voyons un instant si le projet de loi sert au mieux les intérêts du Sénat en ce qui a trait aux objectifs restreints qui consistent à vouloir préserver le rôle, l'intérêt et l'efficacité de notre institution. En toute franchise, j'aurais davantage tendance à m'investir si le Sénat même risquait de perdre la possibilité de jouer un rôle. C'est ce que je pense. En ce sens, j'envisage la question de façon plus opportuniste et étroite. Sénateur, qu'est-ce que vous en pensez?

Le sénateur Lynch-Staunton: À votre avis, s'il y avait moins de cérémonies traditionnelles, est-ce que cela changerait le rôle du Sénat?

Le sénateur Kroft: Je vous ai posé la question.

Le sénateur Lynch-Staunton: Comme les médias ne couvrent pas la cérémonie de la sanction royale, la plupart des Canadiens ne savent probablement pas que cela existe, ou n'en connaissent pas la signification, ou ne savent pas qu'elle se tient au Sénat. C'est là un des problèmes de la sanction royale. Les gens n'ignorent peut-être pas totalement la cérémonie, mais ils l'ignorent en général ou s'en désintéressent. Je dis cela parce que cette cérémonie se tient de façon passive et désinvolte. Lorsqu'on leur explique que la cérémonie se tient au Sénat parce que la Couronne ne peut aller à la Chambre des communes et que les députés doivent se tenir derrière la barre, beaucoup de gens disent que c'est archaïque. Pour certains, c'est une révélation sur le fonctionnement de notre système. Pour l'instant, je ne crois pas que le Sénat soit touché d'une façon ou d'une autre. Je ne pense pas que le fait de réduire le nombre de cérémonies changerait quoi que ce soit au Sénat.

Le sénateur Losier-Cool: La première année que j'ai passée ici, j'ai fait de nombreux exposés dans les écoles secondaires au cours desquels j'ai parlé du Sénat. J'en fais encore, mais pas autant. Lorsque j'expliquais les trois principales étapes que doit franchir un projet de loi avant de devenir loi, la question de la sanction royale paraissait très intrigante. Les élèves me posaient beaucoup de questions sur la nature et le sens de la sanction royale et sur la façon dont les choses se passaient. Bien sûr, j'essayais d'accorder un peu de grandeur à l'événement lorsque je répondais aux questions. Maintenant, je ne veux pas qu'on me pose de questions là-dessus. Je suis mal à l'aise avec la façon dont la cérémonie de la sanction royale est menée dernièrement.

Est-ce que la préoccupation que nous avons a déjà fait l'objet de discussions avec les principaux intéressés, c'est-à-dire la Chambre des communes, le bureau du Gouverneur général et le Sénat, est-ce qu'on a déjà discuté de la déception que nous avons parfois à l'égard de la cérémonie même? Je sais que ce n'est pas la première fois qu'un projet de loi est déposé à ce sujet. Est-ce que les trois groupes intéressés se sont rencontrés pour discuter de la question? Savent-ils que nous aimerions que la cérémonie se déroule différemment?

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, ils le savent. Cependant, toutes les conservations que j'ai eues ont été des conversations officieuses et informelles. Je ne peux vous révéler ce dont j'ai discuté avec le personnel du Gouverneur général. On suit la question avec intérêt.

Je me demande si à un moment donné, et peut-être devrions-nous nous réunir à huis clos, nous pourrions inviter les parties intéressées à témoigner devant nous. Peut-être ont-elles des solutions à proposer et des recommandations dont nous ne sommes pas au courant. Je ne tiens pas à en dire plus des conversations privilégiées que j'ai eues avec ces gens-là.

Le président: Le sénateur Lynch-Staunton et moi-même avons eu une discussion au début de la journée au sujet de la question que vous avez soulevée, madame le sénateur. Si je me souviens bien, il était proposé dans le rapport McGrath que la question soit réglée et qu'elle fasse l'objet d'une résolution conjointe de la Chambre des communes et du Sénat. La solution définitive serait d'adopter une résolution conjointe.

À mon avis, il est maladroit d'envoyer un projet de loi, sans consultation, à l'autre endroit et de dire: «Voilà, c'est à prendre ou à laisser.» Je ne pense pas qu'une telle façon de procéder nous permettra d'arriver à notre fin, quelle qu'elle soit. À mon avis, le projet de loi est utile en ce sens qu'il nous aide à décider ce que nous voulons. Après, nous devrons établir un processus nous permettant de nous adresser aux deux autres entités du Parlement.

Si l'on invite quelqu'un de la Chambre des communes à comparaître devant nous à huis clos, le problème, c'est que tant selon les règles de la Chambre que les nôtres, la Chambre intéressée doit donner son approbation pour qu'un représentant comparaisse à l'autre endroit. Je crois que c'est donner trop d'importance à la question. Ce que je propose, c'est que nous ayons une discussion officieuse à huis clos, et non pas une séance officielle de notre comité. Cela nous permettrait peut-être de nous entretenir avec le secrétaire principal de la gouverneure générale de façon officieuse et non pas d'une façon qui engagerait qui que ce soit à l'égard de quoi que ce soit. La rencontre permettrait simplement de faire le tour des problèmes et de voir si nous pourrions rédiger une résolution conjointe qui pourrait être acceptée par toutes les parties.

Votre question va droit au coeur du problème, sénateur.

Le sénateur Grafstein: Monsieur le président, vous avez abordé le problème du processus. Avant de nous préoccuper de processus, nous devrions nous préoccuper de trouver un plan qui permettrait d'obtenir un consensus. Autrement dit, qu'est-ce que nous voulons proposer? Ensuite, il faut décider de convoquer les participants pour voir s'ils acceptent notre plan, ce qui pourrait être utile. Cependant, tenir une réunion sans leur demander de réagir à quelque chose de précis serait intéressant, mais inefficace.

J'ai divisé la question en quatre catégories et en deux parties. Je voudrais séparer une des parties des catégories, c'est-à-dire les questions urgentes ou les circonstances extraordinaires lorsque le Parlement ne siège pas. J'aimerais aborder cette question de façon distincte, bien honnêtement, parce qu'avant de parler des situations extraordinaires, nous devons parler du processus normal. Je pense qu'on peut toujours régler les questions extraordinaires, comme on l'a fait dans le passé. La véritable question est de savoir ce que nous faisons avec le processus normal -- la sanction comme telle et la cérémonie.

L'une des raisons pour lesquelles je ne suis pas d'accord pour dire qu'il serait utile de grouper les cérémonies, en un sens, au lieu de rendre la cérémonie plus significative, est que cela lui ferait perdre sa signification, si tout à coup la cérémonie devient un simple mécanisme où on énonce dix projets de loi.

La première des quatre questions à laquelle nous devrions nous intéresser, c'est le moment où se tient la cérémonie. Cela nous ramène à la thèse voulant que si la cérémonie se tenait au bon moment, les gens y assisteraient. C'est une question d'horaire, il faut voir quand tenir la cérémonie et à quelle fréquence. La question de l'horaire est importante.

La deuxième question importante est la présence de la gouverneure générale elle-même. Je crois que si le gouvernement, en utilisant son pouvoir exécutif ou sa prérogative, demandait à la représentante de la reine d'être présente, elle y serait. Elle vient lorsque le gouvernement lui demande d'être là. Elle est obligée de le faire. Si on veut obtenir la présence de la gouverneure générale, c'est au gouvernement de décider de lui demander d'être là ou non. La présence de la gouverneure générale est un problème, mais un problème qui peut être réglé si le gouvernement le veut bien.

Pour moi, la question de l'heure est une question d'information du public afin que la cérémonie ne perde pas tout son sens, au contraire, qu'elle se tienne au bon moment et qu'elle soit entourée de la publicité télévisée qui convient. Ce qui est bien, c'est que nous avons le réseau CPAC. Le Sénat a le droit, en tant que partenaire du CPAC, d'exiger que le réseau soit présent à certains événements qui peuvent alors être présentés en direct et en différé. Nous n'avons pas eu recours à CPAC parce que -- et le sénateur Lynch-Staunton a tout à fait raison -- l'heure à laquelle la cérémonie se tient et la façon dont elle se déroule s'avéreraient gênantes. Aucun des députés de la Chambre des communes ne se présente. Pas plus que les sénateurs. Le gouvernement n'intervient pas. On ne veut pas qu'une cérémonie se déroule sous l'oeil des caméras sans être convaincu que la cérémonie prend tout son sens.

Enfin, il faut s'intéresser à la question de l'information du public au sujet du contenu des projets de loi mêmes. Il y a la cérémonie, et il y a les projets de loi. J'en ai déjà parlé tout à l'heure. Nous établissons des lois, et le public ne les connaît pas. Nous avons la responsabilité d'informer la population au sujet du contenu des lois. Les quelques personnes intéressées par une loi savent de quoi il en retourne, mais pas le grand public.

Permettez-moi de revenir aux problèmes. En ce qui concerne l'heure, je propose que l'on établisse un créneau précis, et une heure qui conviendrait à tout le monde serait entre midi et 14 heures le mercredi. Je dis cela parce que pour ce qui est du gouvernement, il y a réunion du caucus. Le premier ministre a répété à maintes reprises que c'est la journée la plus importante de sa vie et qu'il est toujours là à moins d'un événement extraordinaire. Si on fixait la cérémonie au mercredi, le premier ministre serait là. Il serait facile à ce moment-là, pour les représentants du gouvernement, de terminer leur caucus et de prendre une demi-heure pour se rendre à la cérémonie. Si la cérémonie se tenait à ce moment-là, cela réglerait le problème de l'heure. Cela ne serait pas gênant. Normalement, c'est le mercredi, et non le jeudi ou le vendredi qu'il y a le plus de députés au Parlement. Cela réglerait la question de l'assistance. La cérémonie serait transmise sur le réseau CPAC. On espère que si, à la demande du gouvernement, les dates étaient fixes, les gens les connaîtraient. Elles seraient respectées, parce qu'il n'y aurait rien d'autre au programme pour cette semaine-là en particulier. Je pense que cela ne fait pas de différence pour le gouvernement que la cérémonie se tienne le jeudi soir ou le mercredi de la semaine suivante, peu importe. Rien n'empêcherait son déroulement sauf dans des circonstances extraordinaires, et à ce moment-là nous devrions établir une procédure pour y faire face.

En ce qui concerne l'information du public et le Sénat, je suis d'accord avec vous. Les membres de ma propre famille me demandent à l'occasion ce que fait le Sénat. Je leur ai expliqué, et ils ne comprennent pas tout à fait. Nous pourrions tenir la cérémonie de façon régulière et la présenter sur le réseau CPAC, et l'émission pourrait être diffusée dans toutes les écoles du pays. Cela serait facile à prévoir parce que toutes les écoles sont interreliées. On pourrait dire: «Mercredi midi, il y a sanction royale», et on pourrait en faire un événement public. On pourrait l'annoncer dans tous les journaux. Il pourrait y avoir une petite annonce dans le journal, ou une annonce télévisée ou encore un événement dont l'horaire serait prévu. On pourrait demander au CRTC de faire une annonce publique. Mais, en bout de ligne, au moins tous les enfants des écoles du pays, ou certains d'entre eux, regarderaient l'événement. Je pense que nous n'utilisons pas les réseaux qui sont à notre disposition. Au fait, cela ne coûterait pas un sou au Sénat. Il s'agit d'établir l'horaire et d'utiliser les réseaux existants pour en faire la publicité.

Lorsqu'il y a sanction royale, il faut que ce soit un événement important, et pas seulement une cérémonie, un événement qui pourrait être suivi d'une demi-heure d'entretiens avec les présidents des divers comités ou avec les parrains des projets de loi qui donneraient une explication de trois minutes sur la nature du projet de loi, sur certaines réactions. Soit dit en passant, s'il s'agissait d'un projet de loi scindé, on pourrait dire: «Voilà le problème». Nous étudions actuellement le projet de loi sur la clarté référendaire et le projet de loi sur l'Accord définitif nisga'a. Il y a beaucoup de projets de loi intéressants que le public ne connaît pas vraiment ou ne comprend pas.

On pourrait combiner tout ça et en faire une cérémonie d'une heure ou d'une heure et demie tous les trois mois. Le premier ministre ne serait pas pris dérangé, Son Excellence non plus, parce que nous leur dirions d'intégrer ça à leur horaire. En ce sens, la cérémonie pourrait prendre tout son sens.

Au fait, faire moins n'est pas nécessairement mieux. Si la cérémonie avait lieu quatre fois par année, tout serait parfait. Si le gouvernement veut une cérémonie spéciale pour un événement spécial parce qu'il a besoin de faire adopter un projet de loi d'urgence, pas de problème. Le gouvernement a tout le loisir d'en décider ainsi. Rien de ce que nous disons ici n'empêche le gouvernement d'agir de cette façon.

Je pense que nous pouvons combiner tout ce que veut le sénateur Lynch-Staunton. Nous pourrions faire en sorte que la cérémonie, comme il le dit, soit plus significative, plus prestigieuse, plus représentative des rôles des divers intervenants au Sénat, et nous pourrions le faire facilement. Un producteur de télévision pourrait nous arranger cela en criant ciseau. Évidemment, l'émission serait présentée en français et en anglais et la cérémonie pourrait devenir assez importante. Je crois que cela placerait le Sénat davantage au centre des affaires publiques.

Le président: Votre commentaire est intéressant. Le problème, cependant, c'est que tout ce dont vous parlez ici doit être approuvé par le gouvernement. Il faudrait convaincre le gouvernement de procéder ainsi parce que c'est le gouvernement qui contrôle la sanction royale.

Le sénateur Grafstein: Le gouvernement ne contrôle pas le moment où elle se tient.

Le président: Oui, justement. Le gouvernement décide si le Gouverneur général y assiste ou pas. Selon la coutume, le Gouverneur général peut envoyer son suppléant. Je n'ai jamais entendu dire que le gouvernement ait donné d'ordre au Gouverneur général. Je ne crois pas que l'on puisse lui donner d'ordre. On lui demande d'assister à la cérémonie. Selon la coutume, le Gouverneur général même peut ne pas se présenter mais envoyer un suppléant. Toute votre suggestion, bien qu'intéressante, suppose une nouvelle façon de voir les choses de la part des gouvernements.

Sur le plan opérationnel, sénateur Grafstein, le problème est que la Chambre se réunit à 14 heures pour la période des questions. Le déjeuner est une période très importante au cours de laquelle les ministres ou le premier ministre rencontrent le public et ils se préparent à la période des questions. Il y a là une habitude qui, je pense, devrait être changée, et il pourrait être très difficile de persuader les gens de changer leur habitude. Je pense que vous n'avez pas encore accepté que l'on ne peut changer la culture.

Le sénateur Grafstein: Monsieur le président, j'aimerais bien changer la culture parce que la culture existante est en train de se désagréger, et c'est là que, je crois, le sénateur Lynch-Staunton a raison.

Le sénateur Corbin: Comme vous le savez, je suis d'accord pour conserver la cérémonie le plus possible dans sa forme actuelle et selon la procédure actuelle et avec la participation de personnalités importantes.

De mon bureau, j'aperçois la résidence de la gouverneure générale. Lorsqu'elle est là, le drapeau est hissé. Je n'ai pas besoin de jumelles pour voir le drapeau. Nous avons déjà tenu des cérémonies de sanction royale quand le drapeau flottait au-dessus de la résidence de la gouverneure générale qui était là, mais probablement occupée. À quel point, je n'en sais rien. J'attache beaucoup d'importance à ces cérémonies.

Est-ce que nous siégeons à huis clos ici aujourd'hui? J'aimerais dire une chose, mais je vais devoir m'en abstenir pour protéger ma source.

J'attache beaucoup d'importance aux symboles nationaux, c'est-à-dire le drapeau, la Journée du Canada, notamment. Cependant, en ce qui concerne notre processus législatif, la sanction royale en est le point culminant. Elle fait partie du processus. C'est plus qu'une cérémonie, plus qu'un simple symbole. La sanction royale, c'est la dernière étape du processus législatif, sans laquelle toutes les mesures législatives qui vous sont soumises ne sont que du papier.

Je suis un peu gêné de voir que de plus en plus, les événements importants qui se passent au Parlement ne se déroulent plus à l'intérieur mais sur les pelouses. On assiste à beaucoup de manifestations très bruyantes parfois. Certaines sont importantes quant à l'avenir de notre pays alors que d'autres le sont un peu moins et pourraient être tenues ailleurs. Certes, cependant, la sanction royale est le point culminant du processus législatif et je pense que nous pourrions discuter de la mécanique de cette cérémonie. Je suis une personne raisonnable. Je sais que le sénateur Lynch-Staunton n'a pas l'intention d'éliminer la sanction royale et ce n'est pas non plus ce qu'il propose dans son projet de loi.

Nous devons être pratiques. Dans quatre ou cinq ans, nous allons devoir trouver une façon de siéger à l'édifice de l'Ouest, et cela sera très gênant pour beaucoup de personnes. Si peu de personnes assistent à la cérémonie aujourd'hui, il va y en avoir encore moins alors, sinon personne. Nous devons tenir compte de ces situations.

En ce qui a trait aux cérémonies habituelles, elles n'ont pas lieu si souvent. J'ai lu certains des commentaires dans le rapport McGrath concernant la réforme du Règlement. M. McGrath a calculé que les députés -- imaginez-vous -- perdaient 90 minutes pour se rendre à la cérémonie de la sanction royale à l'autre endroit. Je n'en suis pas scandalisé. Les députés perdent beaucoup de temps de bien d'autres façons.

C'est une question de respect de soi. Si vous consacrez tellement d'efforts ici à produire, par voie de compromis la plupart du temps, les meilleures lois possible pour le bien du pays, je pense alors qu'on devrait avoir suffisamment de respect pour soi pour assister à la dernière cérémonie qui donne force de loi aux mesures législatives afin qu'elles puissent devenir partie intégrante de la vie du pays.

Je n'en dirai pas plus. C'est ma position. Je suis ouvert, et j'accepterai certaines des suggestions qui ont été faites, mais je voudrais vraiment que la cérémonie soit conservée. Cela ne veut pas dire que je suis monarchiste. Au fait, dans l'argumentation, on nous sert toujours que la plupart des pays s'inspirant de Westminster ont abandonné ce genre de cérémonie. Quels sont les faits? Est-ce que vous avez la liste des pays?

Le président: Nous allons vous remettre le cahier d'information.

Le sénateur Corbin: Je l'ai lu. Je parle de façon générale; cependant, je n'ai pas vu si tel est le cas pays par pays. On ne parle que de Westminster, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande. Je ne remets pas votre parole en question, mais j'aimerais être rassuré que tel est le cas. Certains pays du Commonwealth sont des républiques, ça change un peu la donne. Si vous pouviez me donner des renseignements supplémentaires à ce sujet, je l'apprécierais.

Le sénateur Robichaud: Tout comme le sénateur Corbin et les autres, j'ai énormément de respect pour la sanction royale, pour la cérémonie elle-même, si elle se déroule de la façon dont elle devrait se dérouler, mais cela est devenu une honte.

Je n'utilise pas le mot «honte» à la légère. Je me souviens d'une cérémonie d'octroi de la sanction royale il y a quelques années. Soit dit en passant, j'assiste pratiquement toujours à la cérémonie. Il faut que j'aie vraiment une bonne raison pour ne pas y être. Il y a quelques années, lors d'une cérémonie d'octroi de la sanction royale, il n'y avait qu'une poignée de sénateurs et de députés. Je me souviens d'un député nouvellement élu du Bloc québécois qui, après la cérémonie, est sorti en criant presque: «Quelle honte! C'est humiliant!» Il l'a dit en français. J'étais fâché, mais il n'était pas loin d'avoir raison, parce que c'était une honte. Il y avait moins de six personnes présentes. Si nous avons tant de respect pour la cérémonie de la sanction royale, pourquoi n'y assistons-nous pas?

Maintenant, il y a la question de l'heure. Ça pourrait être mieux. Si nous décidons de maintenir la cérémonie de la sanction royale, faisons en sorte qu'elle ait un sens. Faisons bonne impression auprès des gens, faisons bonne impressions à nous-mêmes d'abord, et ensuite aux membres de l'autre endroit, si bien que tout le monde voudra être là. Que l'on change l'heure, que l'on engage un orchestre pour attirer les gens, qu'on présente un spectacle, je n'en sais rien. Non, j'exagère. Cependant, nous devons améliorer la formule.

Je terminerai en posant la question suivante: quelle est la différence entre votre formule, sénateur Lynch-Staunton, et celle qu'avait présentée le sénateur Royce Frith il y a quelques années? Est-ce que vous le savez?

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, et je l'ai cité dans mon discours comme étant l'instigateur de tout cela. Je ne crois pas qu'il soit allé aussi loin. Il a fait une recommandation mais n'a pas présenté de proposition concrète, d'après mon souvenir.

Le sénateur Grafstein: C'est exact, il a énoncé des généralités, des principes.

Le sénateur Lynch-Staunton: Oui, tout comme le rapport McGrath et le comité Molgat. Ces derniers se sont dit qu'il devrait y avoir une résolution conjointe, comme l'a signalé le président, et bien sûr nous devons travailler en collaboration avec la Chambre à ce sujet, mais si notre initiative sert de catalyseur, très bien.

Le président: Comme nous le précisions dans notre note d'information du 8 novembre 1999, l'ancien sénateur Frith, en avril 1983, a déposé un avis d'interpellation. Il n'a pas présenté de projet de loi. Essentiellement, il a lancé le débat, mais n'a pas présenté de projet de loi.

Ce qu'il faut dire, c'est que Royce Frith préconisait l'établissement de procédures de rechange pour la sanction royale, et il a fait état des changements apportés à la pratique parlementaire dans d'autres pays du Commonwealth. Il estimait que l'octroi de la sanction royale par écrit pourrait être adopté au Canada. Ses propositions sont donc semblables aux dispositions générales incluses dans le projet de loi S-7.

Le sénateur Robichaud: Comme solution de rechange, on pourrait recourir aux services du courrier ou d'un messager du Président du Sénat et du Président de la Chambre des communes que l'on enverrait à Rideau Hall. Je ne crois pas que cela suffirait. Lorsqu'il y a prorogation, le premier ministre se rend à Rideau Hall et cela est très important. La prorogation est plus importante qu'un projet de loi. Le premier ministre s'acquitte de cette fonction en se rendant à Rideau Hall.

Je pense que nous devrions avoir plus que cela, mais je ne suis pas certain de ce que devrait être la procédure. Je n'irais pas aussi loin que le sénateur Grafstein, mais nous devrions proposer d'autres mesures.

Un sénateur a dit que le Gouverneur général est trop occupé pour assister à la cérémonie. Je ne suis pas d'accord. Je pense que le Gouverneur général devrait trouver le temps d'assister à la cérémonie de la sanction royale au lieu d'y déléguer un juge de la Cour suprême.

Le sénateur Rossiter: J'aime bien certaines des idées qu'a proposées le sénateur Grafstein. Le réseau CPAC serait un excellent outil de communication. Des enregistrements pourraient être mis à la disposition des ministères de l'Éducation -- pas nécessairement envoyés aux écoles, mais pour que quelqu'un sache qu'ils existent.

À l'instar du sénateur DeWare, moi aussi je me souviens de la première fois où j'ai assisté à la cérémonie d'octroi de la sanction royale. J'avais envie de dire: «Est-ce rien que cela?» Dans ma province, le lieutenant-gouverneur se déplace toujours pour entendre la réponse au discours du Trône. Je ne pense pas que l'heure ou la journée soit le problème. Comme l'a dit le sénateur Robichaud, le Gouverneur général fait partie de tout le processus parlementaire. Donc, à moins de quelque chose de très grave, le Gouverneur général devrait être capable de se présenter au Sénat une fois par année. Une fois que l'on connaît le calendrier législatif, on pourrait s'entendre sur une heure ou une journée de concert avec le bureau du Gouverneur général. Plusieurs jours sont consacrés au débat sur le discours du Trône, et on pourrait faire de même pour fixer une date précise pour la sanction royale.

Le sénateur Kroft: Toute la procédure que décrit le sénateur Grafstein est tout simplement renversante quand on pense à l'engagement que l'on devrait obtenir à cet égard. Si nous croyons qu'il est ici essentiel de souligner le caractère symbolique que revêt cette cérémonie, croyez-vous qu'il vaudrait la peine de faire comme vous avez proposé, c'est-à-dire de réduire le nombre de cérémonies? Par exemple, après tous les compromis, disons que la cérémonie n'aurait lieu qu'une fois par année, mais une fois par année ce serait une façon symbolique de nous rappeler le processus en cause. Seriez-vous d'accord?

Le sénateur Grafstein: J'y ai pensé. Le symbolisme serait bien servi, mais que dire de l'information du public? Par exemple, vous vous retrouvez tout à coup avec dix projets de loi qui attendent tous la sanction royale. Nous avons produit plus de lois à notre époque que par le passé. L'Assemblée législative de l'Ontario siège 40 jours par année et n'adopte pas tellement de lois. Quant à nous, cependant, nous en adoptons de plus en plus. J'ai mis une semaine à lire un projet de loi que le président a déposé récemment. Si on accumule trop de projets de loi, on en diminue l'importance, le fond et le contenu. C'est la raison pour laquelle je propose que l'on tienne quatre cérémonies par année.

Je ne suis pas d'accord avec le président lorsqu'il parle de ce changement de culture, et ainsi de suite. Aujourd'hui, je pourrais être présent à quatre déjeuners. Cependant, je dois choisir celui qui est le plus important pour moi. Si la cérémonie de la sanction royale était prévue quatre fois par année, on pourrait probablement ne pas y recourir aussi souvent à cause du manque de contenu. À la fin de l'année, on se retrouvait probablement avec trois ou peut-être deux cérémonies qui pourraient être beaucoup plus significatives. On pourrait toujours invoquer la procédure extraordinaire parce qu'il faut ce qu'il faut. Il pourrait y avoir aussi une cérémonie différente pour les projets de loi adoptés d'urgence parce qu'il faut leur accorder la sanction royale.

Je me souviens d'avoir déjà été rappelé en plein milieu de l'été pour une urgence nationale qui n'en était pas. Des projets de loi ont été adoptés à ce moment-là. Le pays a concentré son attention là-dessus pendant un instant parce que c'était un moment important. D'une façon ou d'une autre, nous devons sensibiliser davantage le public. Le fait de tenir une cérémonie sans contenu, c'est comme avoir un repas sans le plat principal.

Le sénateur Di Nino: J'ai beaucoup de sympathie pour la position du sénateur Lynch-Staunton. Il a bien cerné la question, et de façon succincte. Votre suggestion m'intrigue. Vous parlez d'autre chose que de la sanction royale, vous parlez d'un forum -- on l'espère un forum éducatif -- qui pourrait être tenu dans les écoles ou avec les parties s'intéressant à la question. Comme vous le savez, les émissions qui sont produites sur CPAC sont répétées constamment. Chaque fois que vous participez à l'une de ces émissions, les gens vous disent qu'ils vous ont vu à la télévision, même si l'émission peut être vieille d'un an. Cependant, il vaut la peine d'utiliser ce réseau pour éduquer le public et l'instruire. La rediffusion des cérémonies ne serait pas nécessairement divertissante, mais pourrait revêtir une certaine valeur pour différentes personnes.

Vous proposez quatre cérémonies par année. Est-ce que vous proposez une combinaison des idées du sénateur Lynch-Staunton et des vôtres? C'est-à-dire, êtes-vous d'accord avec le sénateur Lynch-Staunton que, dans certains cas, la méthode proposée dans le projet de loi pourrait être utilisée, mais qu'il y aurait des cérémonies quatre fois par année auxquelles participeraient et la Chambre des communes et le Sénat? Les deux y participeraient -- disons pendant trois minutes chacun et peut-être dans un débat de dix minutes -- et on pourrait utiliser cela comme outil d'information pour ceux qui s'intéressent aux questions en jeu et qui veulent voir ce que fait le Parlement. Ce serait une combinaison des deux, c'est-à-dire qu'on changerait les choses, qu'on ne laisserait pas les projets de loi s'accumuler et attendre la sanction royale quatre fois par année, parce qu'à ce moment-là on se retrouve avec le même problème, on aurait cinq, six, sept ou huit projets de loi auxquels il faudrait accorder la sanction royale. Ai-je raison?

Le sénateur Grafstein: C'est une question d'équilibre. J'ai dit quatre parce qu'on ne peut pas avoir une cérémonie toutes les fois. J'ai dit que quatre me semblaient un minimum. La cérémonie pourrait ne pas avoir lieu à l'automne parce qu'il n'y a pas de loi à adopter, mais je propose une cérémonie au début de la session, une autre en milieu de session, une l'hiver et une dernière au printemps. Il pourrait aussi y en avoir une pour sanctionner tous les projets de loi à la fin de la session. Cela ferait un total de cinq cérémonies. Je ne pense pas que ce soit un grand changement dans la pratique, mais un changement dans le calendrier. On pourrait appeler cela la Journée de la sanction royale, faire de la publicité et la presse pourrait dire: «Aujourd'hui, c'est la Journée de la sanction royale». On peut changer les perceptions et les pratiques du public beaucoup plus facilement aujourd'hui avec l'Internet et le CPAC que ce n'était le cas il y a 20 ans. Établir une nouvelle façon de procéder, ce n'est pas long.

Le sénateur Di Nino: Monsieur le président, l'idée me plaît suffisamment pour proposer que si nous devons avoir une réunion officieuse à huis clos avec des membres de l'autre endroit et d'autres parties intéressées, c'est là une question qui pourrait être examinée, nonobstant les commentaires intéressants que vous avez faits concernant les difficultés que ce genre de système pourrait rencontrer. Je crois que l'idée du sénateur Grafstein devrait être explorée dans le cadre de discussions informelles avec certains des autres intervenants.

Le président: Je vous remercie de votre commentaire. Si nous pouvions raviver l'intérêt pour la cérémonie de la sanction royale auprès du Gouverneur général, de la Chambre des communes et du gouvernement, ce serait très souhaitable. Je pense que nous avons beaucoup de travail à faire, mais il vaut la peine d'essayer. Je vais essayer d'organiser ces discussions.

Est-ce que vous avez des observations à faire sur le projet de loi et son contexte, sénateur Joyal?

Le sénateur Joyal: Monsieur le président, les observations du sénateur Rossiter sur le rôle du Gouverneur général dans notre processus législatif sont très importantes parce que nous voulons adapter le principe de la monarchie constitutionnelle, eu égard à l'aspect législatif, au symbolisme rattaché à la présence du Gouverneur général lors de sanction d'un projet de loi. Combien de Canadiens le comprendraient? Si nous devions mener un sondage auprès des membres des deux Chambres, je pense que nous serions surpris des réponses que nous recevrions.

Il est important pour chacun de nous de comprendre le système dans lequel nous vivons. Il y a beaucoup de préjugés au sujet de ce système. Certains pensent que la reine coûte très cher aux Canadiens. On peut imaginer toutes les choses qu'on entendrait si on faisait des sondages auprès des Canadiens sur cette question.

J'endosse totalement les objectifs de ce projet de loi. Nous ne devons pas laisser les choses aller comme elles vont. Nous devons nous poser la question suivante: En tant que parlementaires, quelle est notre responsabilité?

Il serait bon que le comité entende le témoignage de M. David Smith, de l'Université de la Saskatchewan. M. Smith a fait des études très poussées et publié des ouvrages sur le caractère même de notre monarchie constitutionnelle. Il serait bon que nous puissions lui demander son opinion sur la façon d'accroître la visibilité de notre système au sein de la population canadienne.

Il serait bon également de pouvoir rencontrer nos homologues de l'autre endroit. C'est toujours frustrant de s'engager dans une telle discussion quand vous avez l'impression que le niveau d'ignorance des gens qui y participent est presque un obstacle à la réussite de ces discussions. Et je dis cela avec tout le respect que je dois aux parties intéressées. Je ne prétends pas tout connaître sur la question, je vous en assure, honorables sénateurs.

Comme l'ont dit les sénateurs Corbin et Robichaud, quand on discute d'institutions et de symbolisme, on doit savoir exactement de quoi il en retourne et quelles seront les répercussions de nos décisions. Il est opportun d'aborder la question de la sanction royale. Quelque chose se passe chez nous, et nous n'en sommes pas satisfaits. Je suis frustré quand j'assiste à la cérémonie de la sanction royale quand j'ai l'impression que rien ne se passe.

Comme l'a dit le sénateur Grafstein, il serait bon que quelqu'un explique de façon sommaire l'objectif des projets de loi qui reçoivent la sanction royale. Le rôle du Sénat ne serait pas diminué, car cela se fait dans nos murs.

Je ne veux pas contribuer à amoindrir le rôle du Parlement, et je m'en voudrais également de ne pas être clair quant aux répercussions du projet de loi. J'ai l'impression qu'on a la chance d'établir un consensus entre le Sénat et l'autre endroit, et que ce projet de loi pourrait nous faciliter la tâche dans une certaine mesure.

Nous devons préciser clairement les ramifications qu'aura ce projet de loi, car il porte également sur la personnification du pays symbolisée par le Gouverneur général et la Couronne. C'est là un élément très important. Je ne suis pas contre le projet de loi en principe, mais nous devons être certains de bien comprendre les enjeux et de voir comment nous pouvons profiter de la possibilité que nous offre le sénateur Lynch-Staunton d'améliorer les choses.

Le sénateur DeWare: Un des membres du comité a posé la question suivante tout à l'heure: que fait le Sénat? Je pense que nous constituons le secret le mieux gardé depuis plus de 100 ans. La communication, c'est la clé de l'information. Au comité de la régie interne, lorsqu'on établit les budgets, on insiste pour y inclure des crédits pour les communications. On n'a pas de contrôle sur la façon dont l'argent est utilisé. Nous pourrions avoir la chance de faire quelque chose au sujet des communications et d'envoyer le message au public. Dans l'ensemble, nous pourrions améliorer notre position grâce à certaines des suggestions qui ont été faites.

Le président: Aux États-Unis, tout le monde le sait lorsqu'une mesure législative importante est adoptée, c'est le président qui la signe. Le président a peut-être 50 plumes à donner, et il le fait toujours de façon très cérémonieuse. Ces procédures sont souvent télévisées aux États-Unis.

Le sénateur Grafstein: Je crois aussi qu'on explique le projet de loi lors de la cérémonie.

Le président: Oui, le projet de loi n'est pas expliqué par les intervenants autour de la table, mais par le commentateur qui dit ceci: «Le président signe actuellement cette mesure législative qui a fait l'objet de discussions et finalement d'un compromis, et voici ce que le projet de loi renferme.» La procédure est ainsi prévue. La promulgation d'un projet de loi est habituellement un processus bipartite.

Sénateur Lynch-Staunton, j'aimerais que vous nous fassiez part de vos réflexions à l'égard des commentaires de vos collègues.

Le sénateur Lynch-Staunton: Les observations de tous les honorables sénateurs sont très utiles. Je les en remercie tous. Il est bien évident que nous avons tous les mêmes préoccupations.

J'admire beaucoup le système américain. Il m'arrive à l'occasion de proposer d'incorporer à notre système certains de ses éléments. Mais, tant que nous avons notre système, nous nous devons de le respecter au plus haut point. Si nous pouvons accroître le respect du troisième élément du Parlement, nous aurons alors atteint un objectif important qui a été négligé pendant trop longtemps.

La suggestion d'entendre un professeur versé dans la question et d'inviter des représentants de la Chambre des communes, peut-être au début, permettra de réaliser quelque chose de constructif.

C'est grâce à vous que tout va démarrer.

Le président: Quant à la façon de procéder, je m'en charge. Je comprends ce qui a été dit ici. Je pourrais résumer en disant que je perçois un désir véritable de la part de tous les membres du comité de faire en sorte que le processus soit significatif et plus efficace. Prochaine étape: la consultation.

Le comité de direction, les sénateurs Grimard, Corbin et moi-même, aurons un petit entretien et nous déciderons comment aborder le processus de consultation avec les autres parties du Parlement qui, bien que la Constitution en prévoie trois, sont en réalité quatre. Il y a aussi le gouvernement qui a un rôle très important à jouer là-dedans. Si nous abordons la question en incluant les intervenants dans l'analyse et l'élaboration d'une réponse, plutôt que de leur présenter simplement notre point de vue, je pense que nous pourrons réaliser certains progrès, c'est d'ailleurs ce que le comité essaiera de faire, sénateur Lynch-Staunton.

Le sénateur Di Nino: J'aimerais aborder une question tout à fait différente. Le mercredi, c'est la journée du caucus. Je tiens à préciser que moi aussi, je crois que le travail des comités est probablement le meilleur travail qui se fait au Sénat, mais il est parfois difficile de venir à un comité à midi, surtout quand votre chef est en train de parler et que vous devez quitter la pièce, ce qui fait qu'on est parfois un peu en retard. Je pense que le mercredi est une bonne journée et que les choses fonctionnent bien en général. J'étais au caucus aujourd'hui et je me suis dit qu'il fallait que je quitte la réunion à 12 h 05 pour assister à la nôtre. Le sénateur DeWare l'avait fait un peu avant moi.

Est-ce que vous avez déjà songé peut-être à tenir la réunion le jeudi, lorsque nous n'avons pas de réunion de comité et que le Sénat siège à 14 heures au lieu de 13 h 30? Je ne veux pas trop insister. Je trouve seulement un petit peu difficile de siéger le mercredi parce que notre caucus se tient habituellement jusque vers midi. Je crois savoir que les sénateurs des deux côtés estiment que le caucus est probablement la réunion la plus importante que nous ayons en tant que groupe.

Le président: Nous avons hérité de ce créneau de l'ancienne plage de séances du comité. Lorsque nous avions besoin de temps supplémentaire pour entendre les témoins ou pour examiner des questions de privilège, nous nous réunissions le mardi de 18 heures à 20 heures. C'est probablement un créneau régulier que nous pourrions adopter, si les collègues le souhaitent. Jeudi matin c'est bien pour moi, mais il y a peut-être des conflits. Je crois que le Comité des banques siège à ce moment-là.

Le sénateur Di Nino: Je parlais du jeudi à l'heure du déjeuner.

Le sénateur Kroft: J'ai des comités jusqu'à 13 heures le jeudi.

Le président: Nous allons examiner la question.

La séance est levée.


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