RAPPORT SUR LA SÉCURITÉ AÉRIENNE
Rapport du Sous-comité de la sécurité des transports
du
Comité sénatorial permanent des transports et des communications
Le président du Sous-comité: L'honorable J. Michael Forrestall
Le vice-président : L'honorable Willie Adams
Juin 2000
COMPOSITION DU COMITÉ
Composition du comité 36e législature Première session
Comité sénatorial spécial sur la sécurité des transports
Président :
Sénateur J. Michael Forrestall
Vice-président :
Sénateur Willie Adams
Membres:
Sénateur Alasdair B. Graham (ou le sénateur Sharon Carstairs)*
Sénateur John Lynch-Staunton (ou Eric A. Berntson)*
Sénateur Fernand Roberge
Sénateur Mira Spivak
Autres sénateurs qui ont participé à létude :
Sénateur Lise Bacon
Sénateur Sister Peggy Butts
Sénateur Thelma Chalifoux
Sénateur Eymard G. Corbin
Sénateur Ross D. Fitzpatrick
Sénateur Janis G. Johnson
Sénateur Léonce Mercier
*Membres doffice
Composition du comité 36e législature Deuxième session
Sous-comité de la sécurité des transports
Président:
Sénateur J. Michael Forrestall
Vice-président:
Sénateur Willie Adams
Membres:
Sénateur Catherine Callbeck
Sénateur Raymond Perrault, c.p.
Sénateur Fernand Roberge
CHAPITRE 1er- INTRODUCTION
1.
Origine du Sous-comité
2. Examen du
rapport intérimaire et de ses recommandations
3.
Résumé du Rapport du Sous-comité sur la sécurité aérienne
CHAPITRE 2 - UNE CULTURE DE LA SÉCURITÉ
1. La communauté aérienne au
Canada
2. Aspects de la
déréglementation touchant la sécurité
CHAPITRE 3 - LE BUREAU DE LA SÉCURITÉ DES
TRANSPORTS
1. Introduction
2. Examens médicaux après accident
3. Effectif, formation,
rémunération
4. Collecte et analyse des données
5. Programme daide aux familles
6. Enregistreur de vol
7. Enquête sur les
accidents aériens militaires
CHAPITRE 4 - QUESTIONS DE SÉCURITÉ PROPRES AU TRANSPORT
AÉRIEN
1. Introduction
2. Impact sans perte de contrôle
(ISPC)
3. Formation
4.
Systèmes automatiques dinformation météorologique
5. Fatigue
6. Partage de linformation
7. Dépistage des drogues et
de lalcool
8. Passagers perturbateurs ou
enragés
9. Matières dangereuses
10. Avions ultra-légers
11. Appareils vieillissants
12. Conception des appareils
CHAPITRE 5 - QUESTION DE SÉCURITÉ
PROPRES AUX AÉROPORTS
1. Introduction
2. Accès aux zones
stériles
3.
Agents de sécurité jouant le rôle dagents de la paix dans les aéroports
4.
Planification des mesures durgence
5.
Sécurité-incendies dans les aéroports
6. NAV CANADA
7.
Amélioration de linfrastructure des aéroports
CHAPITRE 6 - NOTRE SYSTÈME DE
RÉGLEMENTATION
1. Le processus
de réglementation
2.
Réglementation aérienne dans le nord du Canada
3.
Nouvelle Loi sur laéronautique au Canada
CHAPITRE 7 - OBLIGATIONS
INTERNATIONALES DU CANADA EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ AÉRIENNE
Assurer la sécurité des Canadiens qui voyagent dans le monde
CHAPITRE 8 - LA VOIE DEVANT NOUS
ANNEXE I - QUESTIONS
Réponses de Transports Canada aux questions soumises par le Comité faisant suite à
la comparution de fonctionnaires de Transports Canada devant le Comité sénatorial
spécial de la sécurité des transports
ANNEXE II - Lettre du 8 juillet 1999 de lAssociation des Pilotes dAir Canada
ANNEXE III - Témoins
ANNEXE IV - Visites
ANNEXE V - Document déposé devant le Comité par Boeing Commercial Airplanes Group
Extrait des Journaux du Sénat du mardi 21 mars 2000 :
L'honorable sénateur Bacon propose, appuyée par l'honorable sénateur Joyal, c.p.,
QUE le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à examiner, afin de présenter des recommandations, l'état de la sécurité des transports au Canada et la question de la sécurité des transports au Canada et pour mener une étude comparative des mécanismes techniques, juridiques et réglementaires, dans le but de vérifier que la sécurité des transports au Canada est d'une qualité telle qu'elle répondra aux besoins du Canada et des Canadiens au prochain siècle; et
QUE les mémoires reçus et les témoignages entendus sur la question par le comité sénatorial spécial de la Sécurité des transports dans la première session de la trente-sixième législature soient déférés au Comité; et
QUE le Comité soumette son rapport au plus tard le 31 décembre 2000.
La motion, mise aux voix, est adoptée.
Le Greffier du Sénat
Paul C. Bélisle
------------------
Extrait du Procès-verbal du Comité sénatorial permanent des transports et des communications du 2 mai 2000 :
QUUN sous-comité de la sécurité des transports soit créé afin dexaminer les questions liées à la sécurité des transports qui pourraient lui être renvoyées de temps à autre par le comité.
QUE le sous-comité soit composé de cinq (5) membres, dont trois (3) constitueront le quorum.
QUE le sous-comité de la sécurité des transports soit composé dans un premier temps des honorables sénateurs Adams, Callbeck, Forrestall, Perrault, c.p., et Roberge; et
QUE les noms des remplaçants soient communiqués au greffier du sous-comité.
QUE le sous-comité soit autorisé à inviter les témoins quil juge nécessaire et à exiger la production de documents et de dossiers au besoin, de même quà les faire publier au jour le jour.
QUE le comité autorise le sous-comité à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias dinformation électroniques.
QUE létude sur létat de la sécurité des transports, qui englobe une étude comparative des considérations techniques et des structures juridiques et réglementaires, renvoyées au comité par le Sénat le 21 mars 2000, soit confiée au sous-comité de la sécurité des transports pour quil y procède et en fasse rapplort conformément au Règlement du Sénat.
Le greffier du Comité
Michel Patrice
- Nous recommandons que le gouvernement fédéral, les provinces et les acteurs de lindustrie du transport au Canada collaborent à des programmes déducation, de recherche et de publicité afin de promouvoir une culture de la sécurité dans tous les aspects de lindustrie aérienne, auprès de tous les Canadiens.
- Nous recommandons que Transports Canada revoie chaque année son rôle de contrôleur
des aspects sécuritaires de la conception, de la fabrication et de lentretien des
aéronefs, afin de sassurer quaucun intervenant ne sacrifie la sécurité sur
lautel du rendement économique.
- Nous recommandons que le gouvernement soit tenu de répondre aux recommandations du
Bureau de la sécurité des transports dans les 90 jours de leur publication, et que ces
réponses soient déposées au Sénat et à la Chambre des communes.
- Nous recommandons daccorder au Bureau de la sécurité des transports lautorité nécessaire pour faire des examens médicaux après les accidents.
- Nous recommandons que le gouvernement affecte les ressources nécessaires au Bureau de la sécurité des transports afin que ses enquêteurs puissent recevoir une formation relative à léquipement le plus avancé sur le plan technologique.
- Nous recommandons de confier au Bureau de la sécurité des transports la responsabilité de mettre en oeuvre laide aux familles et aux victimes au Canada, pour tous les modes de transport qui relèvent de lui.
- Nous recommandons que la responsabilité du Bureau de la sécurité des transports soit étendue aux enquêtes sur les accidents militaires, et que le Bureau reçoive des ressources en conséquence. Si un civil est blessé ou tué, le Bureau serait le principal responsable de lenquête.
- Nous recommandons daccorder des ressources suffisantes au Bureau de la sécurité des transports pour assumer toutes ces fonctions.
- Nous recommandons que, sous la direction de Transports Canada, tous les aéronefs conçus pour transporter plus de 40 passagers soient dotés de systèmes avertisseurs de proximité du sol améliorés et quun délai de conformité raisonnable soit fixé aux compagnies aériennes.
- Nous recommandons que Transports Canada adopte un règlement exigeant que tous les nouveaux aéronefs de fabrication canadienne, conçus pour transporter plus de 40 passagers, soient dotés de systèmes avertisseurs de proximité du sol améliorés.
- Nous recommandons que les systèmes AWOS, une fois installés, soient exploités en parallèle avec une station météorologique dotée dun personnel pendant au moins deux ans pour quon puisse vérifier lexactitude de linformation produite par ces systèmes.
- Nous recommandons que, dans les régions éloignées du Nord, NAV CANADA et Environnement Canada soient encouragés par des ressources suffisantes à maintenir ou améliorer les services météorologiques si essentiels pour la sécurité aérienne.
- Nous recommandons que le gouvernement envisage de modifier la Loi sur laéronautique pour protéger des recours en justice ceux qui fournissent des renseignements sur la sécurité, protéger le caractère confidentiel de ces renseignements et dégager de toute responsabilité les entreprises qui fournissent ces renseignements et leurs employés.
- Nous recommandons que le gouvernement du Canada entreprenne une démarche concertée pour résoudre le problème des passagers turbulents.
- Nous recommandons de modifier de Code criminel pour faciliter la tâche des agents de maintien de lordre aux prises avec des passagers turbulents qui ne sont pas citoyens canadiens.
- Nous recommandons de modifier le Règlement de laviation canadien pour permettre aux transporteurs de refuser lembarquement à quiconque présente, selon eux, une menace pour la sécurité.
- Nous recommandons que lOACI prépare un traité international qui reconnaîtra à la communauté aérienne internationale le pouvoir et la compétence de prendre les mesures qui simposent pour régler le problème des passagers turbulents afin dassurer la sécurité des passagers et des équipages.
- Nous recommandons que les directeurs de la sécurité dans les administrations aéroportuaires canadiennes qui desservent plus de 200 000 passagers par année fassent une étude approfondie des systèmes de sécurité en vigueur dans les principaux aéroports européens, comme Heathrow et Charles-de-Gaulle, et quils élaborent et mettent en place une méthode de fouille systématique semblable à celles qui existent dans ces aéroports.
- Nous recommandons que Transports Canada révise son interprétation du paragraphe 4(3) du Règlement sur les mesures de sûreté aux aérodromes pour conférer plus de latitude aux aéroports concernant les autorisations daccès aux zones daccès restreint.
- Nous recommandons que Transports Canada autorise des contrôles ponctuels des membres du personnel aéroportuaire à lentrée des zones stériles, même sils détiennent un laissez-passer pour ces zones.
- Nous recommandons que Transports Canada désigne « agents de paix » un certain nombre demployés de sécurité des aéroports, à titre expérimental.
- Nous recommandons que Transports Canada reconsidère sa décision de réduire les exigences en matière de lutte contre les incendies dans les grands aéroports canadiens et quil dégage suffisamment de ressources, ou établisse des ententes avec les municipalités voisines, pour que des services durgence en cas décrasement soient mis en place dans tous les aéroports, principaux, régionaux ou locaux.
- Nous recommandons que le gouvernement fédéral crée un fonds de remise en état des petits aéroports en réservant à cette fin une partie des recettes de la taxe daccise sur le carburéacteur.
- Nous recommandons que Transports Canada sabstienne de recourir, pour toute question de sécurité, à la « réglementation par exemptions » prévue dans la Loi sur laéronautique.
- Nous recommandons daccorder à Transports Canada des ressources suffisantes pour développer la réglementation sur les normes de conception des aéronefs.
- Nous recommandons que Transports Canada revoie la réglementation des heures de vol des équipages et élabore des critères qui tiennent compte des particularités du Nord, à condition de ne jamais compromettre la sécurité.
- Nous recommandons que le gouvernement amorce un examen complet de la Loi sur laéronautique et de son règlement dapplication.
- Nous recommandons que, une fois lexamen ministériel terminé, la question soit renvoyée au Comité sénatorial permanent des transports et des communications pour étude avant la rédaction du texte de la nouvelle loi et de son règlement dapplication.
- Nous recommandons que le gouvernement, après étude par le Sénat, fasse rédiger le texte de la nouvelle loi et de son règlement quil renverra au Sénat pour examen.
- Nous recommandons que Transports Canada explore la possibilité de devenir membre de lÉquipe de sécurité de laviation commerciale internationale, comme nous la expliqué Boeing.
- Nous recommandons que Transports Canada sassure quon continue dimposer des vérifications de sécurité aux pays qui ont lintention de créer des liaisons aériennes avec le Canada ainsi que des vérifications de sécurité des terminaux aériens doù proviennent les aéronefs à destination du Canada, et que ces vérifications se fassent avec une diligence raisonnable, cest-à-dire que Transports Canada procède non seulement à un examen de la réglementation du pays en question, mais également à des inspections sur place pour sassurer du respect des normes de sécurité.
- Nous recommandons que Transports Canada rende obligatoire la Formation en gestion des ressources de léquipage ou, comme lappelle M. Heuttner, « la collégialité dans la cabine », et quil veille à ce que cette formation fasse partie de linstruction en vol au même titre que les autres matière enseignées comme la météorologie et laérodynamique.
- Nous recommandons que le gouvernement du Canada, par lentremise de Transports Canada, envisage de financer létablissement de centres dexcellence pour étudier la sécurité aérienne en collaboration avec certaines universités au Canada.
INTRODUCTION
1. Origine du Sous-comité de la sécurité des transports
Létude de la sécurité des transports au Canada découle de la proposition, formulée il y a près de 10 ans par le sénateur Keith Davey, dune étude complète de la sécurité du transport routier. À lépoque, le sénateur Davey sinquiétait de laugmentation du camionnage ainsi que de la détérioration des infrastructures routières, deux conditions qui créaient un environnement dangereux pour le transport routier au Canada. Le Comité spécial est encore animé de la même préoccupation et veut réparer cette négligence.
À partir de cette idée, on a créé un sous-comité du Comité permanent des transports et des communications le 2 octobre 1996. Son mandat était beaucoup plus large que celui envisagé par le sénateur Davey. Quant au Comité spécial sur la sécurité des transports, qui a entendu les témoignages résumés dans le présent rapport, il a été créé par le Sénat le 8 juin 1998 et découle directement du travail réalisé par le Sous-comité. Le Sous-comité et le Comité spécial avaient reçu tous les deux le large mandat de tenir des audiences et de formuler des recommandations sur létat de la sécurité dans tous les modes de transport au Canada. Pour réaliser cette tâche, le Comité spécial était chargé dexaminer les structures techniques, légales et réglementaires dans le but de faire en sorte que la sécurité du transport au Canada soit dune qualité suffisante pour répondre aux besoins du Canada et des Canadiens au XXIe siècle. Toutefois, le Comité spécial a dû cesser ses travaux à la fin de la première session de la présente législature. Ses travaux ont été confiés à lactuel Sous-comité de la sécurité des transports afin de compléter létude et le rapport sur la sécurité des transports au Canada.
Le présent rapport examine les témoignages entendus par le premier Sous-comité et le Comité spécial sur la sécurité aérienne, et formule des recommandations à ce sujet. Soulignons que le Rapport intérimaire du Comité spécial, terminé en janvier 1999, couvre la sécurité de tous les modes de transport et inclut quatre chapitres qui concernent particulièrement la sécurité aérienne: Questions de sécurité touchant tous les modes de transport, le Bureau de la sécurité des transports du Canada), Les questions de sécurité liées aux phares, et Les problèmes de sécurité touchant le transport aérien.
Certaines questions soulevées dans le rapport intérimaire sont reprises dans celui-ci, qui se limite à la sécurité aérienne.
Le Sous-comité a lintention de terminer son travail dici la fin de lannée et de déposer des rapports sur la sécurité des autres modes de transport au Canada : routier, ferroviaire et maritime.
2. Examen du rapport intérimaire et de ses recommandations
Le Rapport intérimaire du Comité spécial traite à plusieurs endroits de la sécurité aérienne. Ces recommandations sont laboutissement du travail réalisé par le premier Sous-comité de la sécurité des transports et des audiences tenues par le Comité spécial jusquà la fin de lautomne 1998.
Le rapport intérimaire contient les recommandations suivantes sur la sécurité aérienne:
Nous recommandons que Transports Canada revoie sa position et nous demandons instamment au gouvernement dadopter une loi semblable à la loi américaine afin dautoriser lindustrie des transports à effectuer des tests obligatoires et aléatoires de dépistage dalcool et de drogues.
Nous recommandons que lon confie au Bureau de la sécurité des transports la mise en oeuvre dun programme daide aux victimes daccident de transport et à leur famille qui concernerait tous les moyens de transport qui relèvent de sa compétence.
Nous recommandons que toutes les lignes aériennes qui exploitent un service au Canada soient tenues denregistrer le nom au complet de tous les citoyens canadiens qui voyagent à bord dun avion à destination ou en provenance du Canada et de demander à ces passagers de fournir le nom et le numéro de téléphone dune personne à contacter.
Dans le présent rapport, nous développerons ces recommandations. Nous remercions les divers témoins qui nous ont fourni des commentaires sur nos recommandations, en particulier lanalyse et le commentaire approfondis présentés par la Air Line Pilots Association (ALPA).
Outre les recommandations précitées, le rapport intérimaire traite de problèmes de sécurité qui pourraient découler dune automatisation plus poussée des phares sur la côte ouest du Canada (chapitre VI). Il traite également de la nécessité, formulée par les témoins venus du Nord du Canada, de règlements distincts pour le transport aérien au nord du 60 parallèle. La sécurité des aéroports est également un sujet important du rapport intérimaire. Nous exposons les mesures de sécurité en place aux aéroports Heathrow de Londres et Charles-de-Gaulle à Paris. Cette question sera développée dans le présent rapport.
Nous reprenons avec passablement plus de détails les grandes questions de sécurité abordées dans le sous-chapitre intitulé La sécurité du transport aérien en général, comme laménagement du poste de pilotage, les impacts sans perte de contrôle, la fatigue, et le partage de linformation relative aux accidents et aux incidents.
3. Résumé du Rapport du Sous-comité sur la sécurité aérienne
Ce rapport est rédigé à partir de tous les témoignages reçus qui portaient sur la sécurité aérienne depuis le début des audiences publiques à lautomne de 1996. Depuis la publication du rapport intérimaire, le président du Comité spécial dalors, le sénateur J. Michael Forrestall, et le vice-président, le sénateur Willie Adams, ainsi que le recherchiste de la Bibliothèque du Parlement assigné au Comité spécial, John Christopher, ont participé à une conférence annuelle dune semaine sur les transports à Washington, en 1999.
Le Comité spécial a également effectué un voyage dinformation dans lOuest canadien et une longue visite des installations de lavionnerie Boeing à Seattle, dans lÉtat de Washington. En outre, il a visité les aéroports Pearson à Toronto et Dorval à Montréal. Enfin, le Comité spécial a visité lusine dassemblage de Bombardier Aéronautique à Saint-Laurent (Québec) et rencontré les responsables de la sécurité de Bombardier.
Nous souhaitons remercier tous ceux qui ont donné si généreusement de leur temps et tous les témoins qui ont répondu sans détour aux questions lors de leur comparution devant le Comité spécial à Ottawa et durant ses déplacements.
Le présent rapport exprime les opinions du Sous-comité sur limportance de développer et de maintenir une culture de la sécurité au Canada. Le Sous-comité est impressionné par le travail du Bureau de la sécurité des transports. Le rapport met en relief le dernier témoignage du Bureau et quelques nouvelles orientations pour son mandat, si les ressources financières dont il a si désespérément besoin devenaient disponibles.
Plus loin, nous traitons de questions de sécurité du transport aérien et de sécurité des aéroports, sous diverses rubriques. Nous passons ensuite en revue les lois qui régissent actuellement le transport aérien. Cela vise à la fois la Loi sur laéronautique et les mécanismes régissant le Règlement de laviation canadien (RAC).
Les deux derniers chapitres traitent de nos obligations envers la communauté aérienne internationale. Depuis quil a participé au deuxième Congrès mondial sur la sécurité à Delft aux Pays-Bas, le Sous-comité estime que le Canada a lobligation internationale de garantir à ses citoyens des voyages à létranger les plus sécuritaires possibles. En contrepartie, les Canadiens doivent être au courant des endroits qui présentent des dangers afin de bien choisir à la fois leur destination et leur transporteur.
Une partie du mandat du Sous-comité consiste à se pencher sur lavenir de la sécurité aérienne afin de déterminer quels conseils il pourrait donner pour préparer les gouvernements et les intervenants de lindustrie aux défis qui se présenteront dici 15 à 20 ans. Le dernier chapitre présente donc une analyse de lavenir.
UNE CULTURE DE LA SÉCURITÉ
1. La communauté aérienne au Canada
La communauté aérienne du Canada est la deuxième en importance au monde, précédée seulement de celle des États-Unis. Comme le signale M. Ron Jackson, sous-ministre adjoint à la sécurité et à la sûreté à Transports Canada, dans son témoignage, « nous sommes un acteur de premier ordre dans le domaine de laviation ». Il y a 62 250 licences et permis de pilote en vigueur au Canada; 38 p. 100 sont de nature commerciale, et les autres, de nature privée. Il y a 28 000 aéronefs enregistrés au Canada; du total, 22 p. 100 sont des appareils commerciaux, 77 p. 100 sont détenus par des intérêts privés et 1 p. 100 est constitué dappareils appartenant aux divers gouvernements. Il y a plus de 2 000 exploitants aériens au Canada.
Comme lexplique M. Jackson, les ventes de lindustrie aéronautique canadienne au pays ont totalisé plus de 14,5 milliards en 1998, et nous exportons pour près de 11 milliards de produits aéronautiques. Le Canada est un joueur majeur dans la conception et la fabrication de ces produits. Bombardier est aujourdhui la troisième avionnerie au monde, après Boeing et le consortium Airbus.
En outre, le Canada compte 10 600 ingénieurs en aéronautique. Ceux-ci détiennent des licences délivrées par Transports Canada qui contrôle cette profession pour faire en sorte quelle respecte les règlements du Ministère.
Étant donné limportance de la communauté aérienne au Canada, le Sous-comité sinquiète particulièrement de laugmentation des accidents davion prévue dici 2010. Comme nous la dit le général M. Gerald Marsters, expert de la sécurité dans laviation: «...il y a en ce moment près de 50 accidents mortels graves chaque année, qui font entre 1 200 et 1 500 victimes [...] Dici 2010, le nombre de vols passera à environ 30 millions, soit près du double à ce quil est actuellement » (voir le tableau 1). Par conséquent, si le nombre daccidents par million de vols reste inchangé, il doublera. Cest à dire que, « ...à léchelle mondiale, il y aura un accident grave tous les 12 à 15 jours plutôt quenviron 1 par mois »
Les États-Unis se sont engagés à infirmer ces prévisions. Le rapport intérimaire expliquait longuement pourquoi il fallait développer et maintenir une culture de la sécurité au Canada. Les sénateurs étaient alors davis, et nous le réitérons ici, que les Canadiens ont le droit de voyager et faire transporter leurs biens en toute sécurité. Nous estimons que la sécurité de tous les modes de transport est primordiale dans lesprit de tous les acteurs de lindustrie; nous sommes néanmoins heureux que le ministre fédéral des Transports ait adopté le terme culture de la sécurité dans le Plan stratégique en matière de sécurité et de sûreté dans les transports :
« Une nouvelle culture de la sécurité »
Poursuivre létablissement dune nouvelle culture en matière de sécurité :
en collaborant avec lindustrie et les autres parties intéressées au développement de systèmes et de programmes favorisant ladoption et le renforcement des pratiques sécuritaires;
TABLEAU 1
RÉSUMÉ DES ACCIDENTS DAÉRONEFS CIVILS À LÉCH. INTERN.,
1982 À 1999
(DONNÉES DE FLIGHT INTERNATIONAL)
| ANNÉE | NBRE DACCIDENTS | NBRE DACC. MORTELS |
| 1982 | 33 | 1012 |
| 1983 | 34 | 1201 |
| 1984 | 29 | 451 |
| 1985 | 39 | 1800 |
| 1986 | 31 | 607 |
| 1987 | 29 | 607 |
| 1988 | 54 | 1007 |
| 1989 | 51 | 1450 |
| 1990 | 35 | 611 |
| 1991 | 44 | 1090 |
| 1992 | 45 | 1422 |
| 1993 | 48 | 1109 |
| 1994 | 47 | 1385 |
| 1995 | 57 | 1515 |
| 1996 | 57 | 1840 |
| 1997 | 51 | 1306 |
| 1998 | 48 | 1244 |
| 1999 | 48 | 730 |
| Decade ave. | 48 | 1195 |
Note 1: Données de lancienne Union soviétique
incomplètes pour la période avant le début des années 90.
Note 2: Sont exclus les accidents dus à des actes de terrorisme, de piraterie et
dhostilité.
La sécurité nest pas la responsabilité exclusive de Transports Canada. Nous partageons tous la responsabilité de la sécurité. Cependant, nous pouvons jouer un rôle majeur dans la promotion et lépanouissement dune culture de la sécurité plus forte. »
Le Canada nest pas le seul pays préoccupé par la sécurité du transport aérien. En Grande-Bretagne, dans le 14e Rapport du Comité de lenvironnement, du transport et des affaires régionales, déposé le 21 juillet 1999, on sinquiète de lattitude complaisante des témoins de lindustrie aérienne qui se satisfont de leur bilan en matière de sécurité, mais font fi des défis de lavenir. En Australie, une étude de la sécurité du transport aérien régional par le Bureau des enquêtes sur la sécurité aérienne, commandée par le Comité permanent des transports de la Chambre des représentants, révèle plusieurs problèmes de sécurité. Enfin, aux États-Unis, la Commission nationale des transports a entrepris un examen des pratiques dentretien des avions par les compagnies auxquelles cette tâche est donnée à contrat; cette étude durera un an.
Comme le signale M. Marsters, « Les niveaux de sécurité dont nous jouissons sont remarquables, quoique le système aérien ne soit pas, en soi, sûr ». Cest pourquoi nous devons viser une culture de la sécurité qui imprègne tous les aspects de laviation.
M. Marsters nous a expliqué que cette culture de la sécurité est plus nécessaire que jamais, avec laccroissement du trafic aérien.
«...Personnellement, jestime que la chose la plus importante que nous devons faire, face à laugmentation du trafic aérien, cest de veiller à ce que la culture de la sécurité soit profondément ancrée dans tous les aspects opérationnels de laviation. Le professeur Weiner, de lUniversité de la Floride, je crois, a présenté ce concept des quatre P. »
Lidée est que les entreprises doivent adopter une philosophie axée sur la sécurité. Il ne suffit pas que le président dAir Canada affirme: « Nous aurons des avions sûr », puis parte jouer au golf. Il doit imposer cette idée, la véhiculer dans toutes ses actions et faire comprendre à tout le monde que cest quelque chose en quoi il croit personnellement.
Une telle attitude serait transposée dans les politiques que les gestionnaires élaborent sur lutilisation des aéronefs, ce qui se répercuterait sur les procédures et, finalement, dans la pratique, cest-à-dire dans les cabines de pilotage et dans tout ce qui a trait au vol.»
Recommandation 1
Nous recommandons que le gouvernement fédéral, les provinces et les acteurs de lindustrie du transport au Canada collaborent à des programmes déducation, de recherche et de publicité afin de promouvoir une culture de la sécurité dans tous les aspects de lindustrie aérienne, auprès de tous les Canadiens.
2.Aspects de la déréglementation touchant la sécurité
Peut-être plus que tout autre secteur des transports, lindustrie aérienne vit des changements continuels depuis 15 ans. Elle a connu la déréglementation économique, l« ouverture du ciel », la vente des aéroports à des intérêts locaux, laugmentation de la concurrence, laugmentation du trafic passager et la privatisation du système de contrôle de la navigation aérienne au Canada.
Nous nous préoccupons des forces concurrentielles dans le contexte de la déréglementation économique, de la concurrence accrue et de leur effet global sur la sécurité. Un syndicat représentant environ 95 p. 100 des agents de bord au Canada, le Syndicat canadien de la fonction publique -- Division du transport aérien, a affirmé que la déréglementation économique avait eu un impact négatif sur la sécurité dans le transport aérien.
Devant nous, le syndicat a affirmé quon cherchait « lapproche la moins coûteuse à la sécurité ». Il a accusé Transports Canada dembrasser cette approche en se pliant aux diktats de lindustrie.
Ce témoignage contredit ceux de lAssociation canadienne du transport canadien, dAir Canada et de Canadien. Il remet également en question le fait de laisser les exploitants privés se fier à leur instinct dentrepreneurs pour déterminer ce qui est efficace dans un milieu hautement compétitif. Ainsi, devant le premier Sous-comité en 1996, lAdministration de laéroport de Calgary a affirmé être devenue une entreprise prospère et concurrentielle depuis que le gouvernement sétait retiré de lexploitation des aéroports.
Bien que cette analyse soit inexacte, elle montre que la déréglementation économique peut contribuer à un marché concurrentiel.
Selon Transports Canada, les données en matière de sécurité ne permettent pas de faire le lien entre la déréglementation et la diminution de la sécurité. En fait, la sécurité sest améliorée constamment depuis la déréglementation.
Dans un mémoire écrit joint à lannexe I du présent rapport, Transports Canada précise son rôle en matière de sécurité dans la construction et l'entretien des avions au Canada.
Nous sommes certes impressionnés par le travail réalisé par les employés de Transports Canada et par les témoignages des compagnies aériennes, mais nous craignons que Transports Canada relâche son contrôle sur la sécurité.
Recommandation 2
Nous recommandons que Transports Canada revoie chaque année son rôle de contrôleur des aspects sécuritaires de la conception, de la fabrication et de lentretien des aéronefs, afin de sassurer quaucun intervenant ne sacrifie la sécurité sur lautel du rendement économique.
LE BUREAU DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS
Le Sous-comité tient en haute estime le personnel -- employés et cadres -- du Bureau de la sécurité des transports du Canada. Sa réputation de travail, defficacité et de persévérance, à la poursuite du détail le plus obscur pour une enquête et pour la cause de la sécurité est bien méritée et parmi les meilleures au monde.
Dans le rapport intérimaire, un chapitre entier était consacré au travail du Bureau, ainsi quà la comparaison avec des organismes analogues aux États-Unis et à létranger.
Nous réitérons ici les inquiétudes du Comité spécial face au délai de la réponse du gouvernement aux recommandations du Bureau. Cependant, nous reconnaissons combien de temps il faut pour mener à terme une enquête approfondie sur un accident aérien complexe. Nous reconnaissons et apprécions également le soin que le Bureau apporte pour que toutes les parties concernées aient loccasion de commenter son rapport et ses recommandations avant de les rendre publiques.
Or, une fois les recommandations rendues publiques et remises au ministère des Transports, nous estimons important que Transports Canada réagisse rapidement et de façon décisive. Dans sa réponse, nous croyons que Transports Canada devrait faire intervenir le Parlement et nous répétons donc la recommandation qui se trouve dans le rapport intérimaire sur les réponses de Transports Canada.
Recommandation 3
Nous recommandons que le gouvernement soit tenu de répondre aux recommandations du Bureau de la sécurité des transports dans les 90 jours de leur publication, et que ces réponses soient déposées au Sénat et à la Chambre des communes.
On nous en voudrait de ne pas féliciter le Bureau de la sécurité des transports pour son travail dans le dossier de lécrasement de lavion de la Swissair, il y a environ un an. Le Bureau nest pas encore prêt à déposer son rapport final sur cette tragédie, mais il a fait des recommandations provisoires. Cette enquête est la plus vaste quil a jamais entreprise et nous considérons quelle est de grande qualité, et menée avec une rigueur extrême et beaucoup de compassion et de compréhension envers les familles et les personnes éprouvées.
Lors de la comparution du Bureau de la sécurité dans les transports devant le Comité spécial, M. Ken Johnson a indiqué plusieurs domaines où le Bureau pourrait selon lui intervenir dans lavenir; nous les formulons ici avec nos recommandations.
2. Examens médicaux après accident
Le Bureau aimerait voir son mandat élargi afin de pouvoir mener « des examens médicaux après laccident permettant notamment deffectuer des prises de sang ». M. Johnson a expliqué que ces examens aideraient le Bureau à déterminer la cause des accidents, car on pourrait savoir ce que les victimes ont pu absorber. Il pourrait sagir de médicaments en vente libre ou dordonnance, ou démanations dans le poste de pilotage. Le témoin a bien dit que le Bureau ne chercherait pas à faire un travail policier, comme déterminer si les pilotes avaient des facultés affaiblies.
3. Effectif, formation, rémunération
Laspect le plus important du travail du Bureau, ses recommandations, dépend des enquêtes de personnel extrêmement compétents et bien formés, qui sont « prêts à défendre leur position quand ils sont contestés par les grands fabricants davions ou les grandes compagnies aériennes ». Par ailleurs, ils doivent avoir suffisamment confiance dans leurs propres capacités pour pouvoir changer davis quand on leur démontre quils font erreur.
Ils doivent également être formés dans lanalyse des technologies les plus complexes, et pouvoir leffectuer rapidement et exactement. Comme laffirme Ken Johnson, « dans un pays aussi petit que le Canada cependant, il est difficile de trouver des gens qui sont suffisamment experts pour ajouter de la valeur aux genres denquêtes que nous effectuons.» En outre, la formation des enquêteurs pour les mettre au fait des nouvelles technologies coûte très cher. Le Bureau de la sécurité des transports a toujours dépensé une bonne partie de son budget en formation et doit continuer de le faire pour pouvoir sacquitter de son mandat avec compétence.
Le Bureau contribue également à dautres enquêtes partout dans le monde. Comme lexplique Ken Johnson, cela est une bonne chose car selon lui cette participation débouche sur de meilleures enquêtes:
« Une enquête compétente doit découvrir quels sont les problèmes de sécurité et une enquête compétente simpose pour veiller à ce quun constructeur canadien nécope pas dune enquête bâclée. Cest là un aspect important de notre travail.»
4. Collecte et analyse des données
Le Canada est presque le seul pays du monde à avoir un système de rapports confidentiels permettant aux gens qui constatent un problème de sécurité de le signaler en toute confiance au Bureau. Linformation recueillie est analysée et soumise à Transports Canada, si le Bureau établit que le Ministère doit intervenir et agir par règlement.
Cependant, si les données traitées par le Bureau sont de la plus grande qualité, cela nest pas toujours vrai des données recueillies et consignées par des organismes analogues dans le monde. Pour améliorer la sécurité du transport aérien, il est essentiel que tous les intervenants de lindustrie partagent des données aussi uniforme que possible
Le Canada devrait être à lavant-garde dans la collecte, lorganisation et la diffusion des données sur les incidents et les accidents, à léchelle de la planète.
5. Programme daide aux familles
Dans le rapport intérimaire, on recommandait un programme daide destiné aux familles et aux proches des victimes d'accidents. Depuis, il y a eu lécrasement de lavion de la Swissair, et un travail remarquable daide aux familles des victimes.
À lheure actuelle, la responsabilité daider les familles est partagée entre plusieurs acteurs de lindustrie. M. Johnson a affirmé que le Bureau pourrait jouer un rôle important dans laide aux familles dans la mesure où il nest pas responsable dappliquer un plan coercitif. Comme il le dit, « à condition davoir les ressources suffisantes, nous pourrions assurer la coordination et la planification.»
Le Sous-comité croit que le Bureau et lAgence nationale des transports pourraient ensemble organiser laide aux familles, la délimiter et la distribuer.
Avec laccident de la Swissair, on a beaucoup parlé des problèmes avec les données de vol et les enregistreurs de conversations. Cest le Bureau de la sécurité des transports qui a perfectionné lenregistreur de vol, la fameuse « boîte noire ». Selon nous, il faut encourager le Bureau à poursuivre le travail dans ce domaine, en particulier dans le contexte des problèmes causés par la panne de lenregistreur de vol de la Swissair.
7. Enquête sur les accidents aériens militaires
Le Sous-comité sinquiète beaucoup du conflit dintérêts qui peut surgir lorsque larmée enquête sur ses propres accidents. Lorsquon a demandé au Bureau de la sécurité des transports de se charger de cette responsabilité dans le cadre dun mandat élargi, M. Johnson a répondu ce qui suit :
« Tout dabord, nous ne cherchons pas à inclure les militaires dans notre mandat.
Si, toutefois, le gouvernement nous demandait de le faire et sil nous donnait les ressources nécessaires, nous le pourrions sans aucun doute.
Il existe un régime semblable au Royaume-Uni. Je nen connais pas les modalités précises, mais je crois me souvenir que la Air Accidents Investigation Branch, lorganisme civil chargé denquêter sur les accidents davion, est responsable des aspects techniques des enquêtes, alors que les forces armées soccupent des aspects opérationnels. Cest ainsi que les Britanniques ont résolu le problème.
Nous pouvons mener lenquête indépendamment, lun ou lautre organisme peut sen charger ou ce peut être fait de façon conjointe. Il sagit de faire un choix. La plupart de nos enquêteurs ont déjà fait partie des forces armées.»
Recommandation 4
Nous recommandons daccorder au Bureau de la sécurité des transports lautorité nécessaire pour faire des examens médicaux après les accidents.
Nous recommandons que le gouvernement affecte les ressources nécessaires au Bureau de la sécurité des transports afin que ses enquêteurs puissent recevoir une formation relative à léquipement le plus avancé sur le plan technologique.
Nous recommandons de confier au Bureau de la sécurité des transports la responsabilité de mettre en oeuvre laide aux familles et aux victimes au Canada, pour tous les modes de transport qui relèvent de lui.
Nous recommandons que la responsabilité du Bureau de la sécurité des transports soit étendue aux enquêtes sur les accidents militaires, et que le Bureau reçoive des ressources en conséquence. Si un civil est blessé ou tué, le Bureau serait le principal responsable de lenquête.
Nous recommandons daccorder des ressources suffisantes au Bureau de la sécurité des transports pour assumer toutes ces fonctions.
QUESTIONS DE SÉCURITÉ PROPRES AU TRANSPORT AÉRIEN
1. Introduction
Comme M. Marsters la affirmé devant le Comité spécial, le transport aérien est sécuritaire, mais il ne sagit pas là dune composante inhérente de ces industries. Ce mode de transport nest pas à labri des problèmes de sécurité même si les statistiques du Bureau de la sécurité des transports montrent un déclin graduel des accidents aériens au Canada depuis 1988. Ken Johnson, un employé du Bureau, a déclaré que la sécurité dans le secteur de laviation était très étroitement liée à la « maîtrise des nouvelles technologies et aux performances humaines ». Il craint que les nouveaux appareils que lon construit maintenant pardonnent moins les erreurs de pilotage que cela ne pourrait être le cas. Comme il la déclaré :
« Dans le secteur de laviation, la maîtrise des nouvelles technologies et les performances humaines représentent des facteurs de grande importance. Les aéronefs sont complexes et rapides. Ils doivent être dotés déquipages compétents, vigilants et hautement qualifiés, et si tout fonctionne bien, il ny a pas de problème. Dans le cas contraire, il y a des problèmes. Je ne suis pas certain que tous les modèles tiennent compte de toutes les erreurs quest susceptible de commettre un personnel bien formé et compétent, qui fait de son mieux, mais commet néanmoins des erreurs. Si les modèles en tenaient compte, il y aurait moins daccidents.»
TABLEAU 2
STRATÉGIE POUR ATTEINDRE NOTRE OBJECTIF
Diminuer de moitié le taux daccidents dans le monde dici 2007
- Mettre laccent sur la réduction des impacts sans perte de contrôle, et des accidents en phase dapproche et datterrissage
- Promouvoir lapplication des interventions existantes par le biais :
- Des leaders à léchelle mondiale
- Des programmes régionaux
- Participer à lélaboration de nouvelles interventions de grande influence par lentremise des entités suivantes :
- CAST JSATs et JSITs pour CFIT, LOC, ALAR
- Programmes régionaux
- Promouvoir une meilleure utilisation des caractéristiques que possèdent déjà nos
produits
- Déterminer, développer et appliquer les caractéristiques de prévention des accidents que possèdent nos produits
Boeing Commercial Airplanes Group
Dans sa réponse écrite à des questions qui lui avaient été soumises, Transports Canada a indiqué que les trois grands problèmes de sécurité étaient les « pratiques de gestion en matière de sécurité, la technologie, et le contrôle de la sécurité dans le monde ». (Voir lannexe I)
Selon M. Marsters, les problèmes de sécurité quil a relevés continueront de se poser dans lavenir. Selon lui, limpact sans perte de contrôle (ISPC), la formation et la pénurie déquipages expérimentés, le besoin de doter les appareils de systèmes ADS-B pour quils puissent se « voir » en vol à plusieurs kilomètres les uns les autres, la prolifération des véhicules aériens télé-pilotés et la nécessité dune culture de la sécurité plus étendue au sein de lindustrie aéronautique au Canada sont les problèmes de sécurité les plus urgents aujourdhui.
Lors de la visite chez Boeing à Seattle, M. Ronald H. Robinson, directeur du groupe des appareils commerciaux, a confirmé que les plus grandes préoccupations de Boeing en matière de sécurité portaient sur les problèmes dISPC, la perte de maîtrise par un pilote et les problèmes dapproche et datterrissage.
Dautres témoins ont insisté sur des facteurs comme la fatigue. Tous se sont montrés disposés à collaborer à lexamen de toutes ces questions pour rendre le transport aérien encore plus sécuritaire quil ne lest aujourdhui.
Nous abordons maintenant des questions de sécurité soulevées au cours des audiences du Comité spécial. Nous ne voulons pas refaire ici le travail du Bureau de la sécurité des transports ou encore commenter directement ses résultats, sauf dans certains cas afin dexhorter le gouvernement à mettre en oeuvre les recommandations du Bureau.
Nous voulons toutefois attirer lattention du gouvernement sur des questions qui méritent à notre avis lexamen attentif de Transports Canada. Dans la plupart des cas, nos commentaires saccompagnent de recommandations. Cependant, labsence de recommandations ne devrait en aucun cas minimiser les questions soulevées.
2. Impact sans perte de contrôle (ISPC)
Presque tous les témoins ont reconnu que lISPC est et sera un des plus grands, sinon le plus grand, problèmes de sécurité en navigation aérienne. Comme M. Marsters la dit : « On pourrait se demander pourquoi un pilote voudrait percuter le sol en gardant le contrôle de son appareil. Cependant, cela se produit fréquemment. En fait, on sait que cest lors dimpacts sans perte de contrôle quil y a eu le plus de pertes de vie dans le domaine de laviation au cours des 20 à 30 dernières années ».
Le problème tient simplement à la complexité croissante des systèmes de bord, de plus en plus gérés par des ordinateurs sans intervention directe de léquipage; il devient alors plus facile de « perdre le nord » ou plus difficile de simplement savoir où se trouve vraiment lappareil par rapport au sol.
Les représentants de Boeing ont déclaré quil faut mettre laccent sur les ISPC pour réussir à diminuer de moitié le taux daccidents dici 2007. Pour y arriver, les compagnies aériennes doivent inclure dans leurs programmes de formation et de sensibilisation des cours de prévention des ISPC.
Transports Canada et Boeing considèrent que le système avertisseur de proximité du sol amélioré, mis au point par Allied Signal, fait partie de la solution au problème des ISPC. Ce système affiche dans la cabine le relief du terrain devant laéronef et avertit léquipage des risques dimpact.
M. Richard Sowden, président, Division de la technique et de la sécurité, Association des pilotes dAir Canada, est davis quil ne faut pas uniquement compter sur la technologie de pointe pour éviter les ISPC. Il a déclaré :
« Lon manquerait de vision si lon comptait sur la technologie pour éliminer le problème des "impacts sans perte de contrôle". LISPC est une question complexe faisant intervenir des améliorations aux règlements, des changements technologiques et de la formation. Plusieurs choses peuvent être faites. Nous pourrions assurer de meilleures approches technologiques en matière daides à latterrissage pour les aéronefs. Par exemple, les approches de précision qui dessinent une trajectoire verticale et une trajectoire horizontale pour labord de la piste affichent une incidence sensiblement inférieure daccidents de type ISPC. Les approches non précises qui ne donnent pas la composante verticale, connaissent un taux daccident beaucoup plus élevé. Il faudrait donc prévoir davantage dapproches de précision.
Lautre solution serait dutiliser la technologie actuelle lors dapproches non précises, comme on les appelle, sans guides verticaux, et dobtenir de NAV CANADA et de Transports Canada quils adoptent lidée de donner un angle constant de descente jusquà la piste.
Le processus actuel suppose une série détapes à diverses altitudes. Cest la mauvaise interprétation de ces altitudes, peut-être du fait quun pilote fatigué fixe la mauvaise altitude, qui mène à ce genre daccidents.»
(TABLEAU 3)
STRATÉGIE DE LOACI
2.Objectifs stratégiques*
2.1Les objectifs du présent Plan daction stratégique sont de promouvoir la sécurité et lefficience de laviation civile internationale et les principes approuvés dans la Convention relative à laviation civile internationale. À cette fin, lOrganisation de laviation civile internationale entend :
Favoriser lapplication maximale des normes et des pratiques recommandées de lOACI à léchelle mondiale.
Élaborer et adopter des versions nouvelles ou modifiées des normes, des pratiques recommandées et des documents apparentés de manière ponctuelle afin de répondre aux besoins changeants.
* de lOACI
TABLEAU 4
Mesures prises par lOACI concernant les impacts sans perte de contrôle
- Élaboration de normes et de pratiques recommandées
- Exigence dun Système avertisseur de proximité du sol pour tous les aéronefs à turbine et piston
- Système avertisseur de proximité du sol et Predictive Terrain Hazard Warning (système SARP proposé)
- Avertissement daltitude minimale de sécurité (proposition de lannexe I)
- Critères établis pour les approches non précises du Système mondial de navigation par satellite, pour les aéronefs avec système de gestion de vol incorporant des composantes de navigation verticale
- Approches stabilisées
- Définition du contenu des manuels dinstructions pour éviter les impacts sans perte de contrôle et les approches stabilisées (avec un plan de procédures dutilisation normalisées)
- Distribution de matériel déducation et de formation sur les impacts sans perte de contrôle
TABLEAU 5
Le problème numéro un lapplication à léchelle mondiale
- Des interventions importantes sont possibles
- Impact sans perte de contrôle :
- Système avertisseur de proximité du sol amélioré production et modification
- Approches de précision (LNAV/VNAV, RNAV/RNP, GPS, etc.)
- Gestion du personnel affecté aux aéronefs
- Systèmes davertissement daltitude minimale de sécurité
- Approches stabilisées
- Formation dintervention lors dimpact sans perte de contrôle
- Perte de contrôle :
- Gestion du personnel affecté aux aéronefs
- Modification des aéronefs
- Inverseur de poussée, pylônes
- Approche et atterrissage :
- Approches de précision (LNAV/VNAV, RNAV/RNP, GPS, etc.)
- Crew Resource Management
- Facteurs humains :
- Maintenance Error Decision Aid (MEDA)
- Procedural Event Analysis Tool (PEAT)
- Divers :
- Programmes dassurance de la qualité des opérations aériennes
- Mode C/TCAS
- Programme d'entretien de sécurité
- Les organes de réglementation sont bien placés pour agir
Boeing Commercial Airplanes Group
Recommandation 5
Nous recommandons que, sous la direction de Transports Canada, tous les aéronefs conçus pour transporter plus de 40 passagers soient dotés de systèmes avertisseurs de proximité du sol améliorés et quun délai de conformité raisonnable soit fixé aux compagnies aériennes.
Nous recommandons que Transports Canada adopte un règlement exigeant que tous les nouveaux aéronefs de fabrication canadienne, conçus pour transporter plus de 40 passagers, soient dotés de systèmes avertisseurs de proximité du sol améliorés.
Des témoins ont indiqué que la meilleure façon daméliorer la sécurité consistait à bien former le personnel du transport aérien. Selon le Bureau de la sécurité des transports, il faudrait que les enquêteurs reçoivent une formation poussée pour pouvoir analyser avec pertinence les pièces complexes provenant daéronefs impliqués dans des accidents. Le Bureau est aussi davis que les « équipages doivent recevoir une formation très poussée » pour pouvoir connaître à fond le matériel complexe dont sont dotés les aéronefs, surtout dans les situations dimprévus.
M. Marsters a fait le lien entre la formation et la pénurie déquipages expérimentés. Selon lui, le personnel reçoit une formation suffisante pour intervenir à des altitudes inhabituelles. Il semble évident que les pilotes qui nont pas connu le plaisir de faire des tonneaux, voire de faire de lacrobatie aérienne, ne possèdent pas les qualités quil faut pour voler à des altitudes inhabituelles. Il a terminé son témoignage en disant: « Selon moi, la pénurie de pilotes bien entraînés constitue un problème grave et un énorme défi pour lavenir.»
Son opinion est partagée par le Bureau de la sécurité des transports dans son rapport sur lécrasement dun Canadair dAir Canada à laéroport de Fredericton le 10 décembre 1997. Le Rapport denquête sur accident aéronautique du Bureau révèle dans sa conclusion , Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs, ceci :
29.Ni Bombardier Inc., ni Transports Canada, ni Air Canada ne se sont assurés que la réglementation, les manuels et les programmes de formation permettaient aux équipages de conduite dacquérir les connaissances nécessaires pour faire la transition au vol à vue pour latterrissage ou pour exécuter une remise des gaz, et ce en toute sécurité et avec régularité, dans les conditions qui prévalaient lors du vol de laccident, notamment compte tenu du régime de lavion au moment où la remise des gaz a été entreprise.
Sous la rubrique « Autres faits établis », on peut lire:
- Les membres de léquipage de conduite navaient pas reçu de formation
pratique sur le fonctionnement des issues de secours dans le cadre de leur programme de
formation initial, même si cétait obligatoire en vertu de la réglementation.
- Le programme de formation initial dAir Canada à lintention de ses
équipages de conduite ne comprenait pas de formation pratique sur le fonctionnement des
issues de secours daile et de la trappe dévacuation du poste de pilotage.
- La formation annuelle aux procédures durgence donnée par Air Canada à ses équipages de conduite sur le fonctionnement et lutilisation des issues de secours ne comprenait pas la formation pratique exigée tous les trois ans. La formation annuelle portant sur les issues de secours comprenait uniquement des démonstrations.
Ces lacunes de formation ont été corrigées, mais cet accident et le rapport du Bureau illustrent limportance dune bonne formation pour la sécurité des passagers.
Nous comprenons que la formation est un élément qui peut être sous-traité par les compagnies aériennes. Nous exhortons Transports Canada à demeurer vigilant afin dassurer au Canada les normes de formation les plus rigoureuses; Transports Canada pourrait peut-être, de concert avec lindustrie aérienne, examiner limposition dune formation uniformisée.
4. Systèmes automatiques dobservation météorologique (AWOS)
Le rapport intérimaire du Comité spécial renferme un chapitre complet sur les AWOS et sur le rapport avec lélimination du personnel des phares de la côte Ouest. On a conclu à lépoque que « le moratoire sur lautomatisation des phares doit être maintenu tant quon naura pas prouvé que les systèmes automatiques dobservation météorologique sont toujours fiables, en particulier par mauvais temps ».
Nous sommes également au fait du rapport du Comité parlementaire spécial sur les phares présidé par la sénatrice Pat Carney, c.r., de la Colombie-Britannique, et de ses deux rapports sur les phares et les AWOS.
LAir Line Pilots Association (ALPA) a soutenu devant le Comité spécial que, comme la technologie du système de détection des AWOS en est toujours à ses balbutiements, elle manque de précision, surtout en ce qui a trait à la visibilité. LAssociation conclut ainsi son analyse de la technologie AWOS :
« Nous sommes davis que le principal système dobservation météorologique ne devrait pas reposer sur cette technologie telle que nous la connaissons aujourdhui. Pour linstant, lobservation humaine, avec toutes les subtilités et les précisions quelle suppose, demeure au coeur du système.»
La Canadian Owners and Pilots Association (COPA) soppose elle aussi aux AWOS comme seuls instruments dobservation météorologique. Selon lAssociation, ils ne répondent pas aux besoins de sécurité des utilisateurs. La COPA a ensuite expliqué que les photographies radar et satellite sont offertes aux utilisateurs disposés à les acheter et sont donc transmises sur des sites dinformation Internet en retard.
Cette situation est inquiétante dans les régions éloignées où les messages météo sont peu fréquents et où les aides à la navigation sont rares. Ces régions ne sont en général desservies que par de petits avions qui volent à basse altitude. La COPA craint que, dans un effort pour réduire les coûts, NAV CANADA, de concert avec Environnement Canada, réduise le filet de sécurité déjà ténu offert par les observations météo, dont dépendent étroitement les pilotes de petits appareils qui desservent les régions éloignées de ce vaste pays.
NAV CANADA souligne dans son témoignage que Transports Canada a levé le moratoire sur linstallation de systèmes AWOS en 1998. Toutefois, NAV CANADA a dit clairement :
« Notre position est que lon ne veut pas se servir du AWOS comme dun système autonome, à moins que nos clients veulent quon le fasse. Même dans ce cas, nous ne le ferions quaprès une étude aéronautique comme celle à laquelle jai fait allusion, soit une étude qui examine toutes les répercussions au niveau de la sécurité. En outre, la mise en oeuvre du AWOS serait assujettie à une étude climatologique effectuée par Environnement Canada.»
Recommandation 6
Nous recommandons que les systèmes AWOS, une fois installés, soient exploités en parallèle avec une station météorologique dotée dun personnel pendant au moins deux ans pour quon puisse vérifier lexactitude de linformation produite par ces systèmes.
Nous recommandons que, dans les régions éloignées du Nord, NAV CANADA et Environnement Canada soient encouragés par des ressources suffisantes à maintenir ou améliorer les services météorologiques si essentiels pour la sécurité aérienne.
La fatigue a été mentionnée comme facteur pouvant compromettre la sécurité. Un équipage fatigué ne peut de toute évidence être vigilant, et un manque de vigilance peut compromettre la sécurité dun vol.
Transports Canada reconnaît les problèmes associés à la fatigue tant chez les pilotes que chez les agents de bord. Des règlements concernant la question des temps de vol et de service des agents de bord sont en préparation.
Boeing et Transports Canada ont fait part des études de la NASA sur la fatigue et de ses recommandations quant à lefficacité dune période de repos contrôlée dans le poste de pilotage.
LAssociation des pilotes dAir Canada a expliqué en détail comment lapplication à la lettre des normes du Règlement de laviation canadien (RCA) peut priver les pilotes de périodes de repos suffisantes pour piloter un appareil avec vigilance et donc en toute sécurité. Selon lAssociation, le RAC « ignore le gros des recherches scientifiques et maintient pour les agents de bord des limites de temps de service dépassées et non sécuritaires.»
Le Syndicat canadien de la fonction publique a aussi indiqué au Comité spécial que les temps de vol et de service pouvaient influer sur la performance des agents de bord. On nous a fait comprendre que la partie du RAC qui est en préparation concernant les agents de bord est « totalement inacceptable ».
Nous reconnaissons quil faut réglementer les temps de vol et de service pour donner aux passagers lassurance que les équipages sont toujours vigilants. LALPA propose une solution intéressante :
« LALPA recommande de songer à un système progressif concernant les règlements sur les périodes de travail, comportant des réductions de leur durée selon lheure du début de chaque période, ainsi que le nombre et le type de secteurs exploités. De tels systèmes sont en place ailleurs dans le monde et la FIAPL les préconise. Il faudrait mettre laccent sur les programmes daugmentation de membres déquipage sur les vols de longue distance et garantir lexistence de bonnes installations de repos avant denvisager dallonger les périodes de travail. Les normes sappliquant aux équipages de réserve devraient être soigneusement étudiées afin de prévoir des périodes de repos appropriées et éviter que cela ne donne lieu à des risques daccident.»
Nous exhortons tous les intervenants du transport aérien à travailler ensemble afin détablir des limites de temps de vol et de service appropriées pour tous les équipages. Pour faciliter ce travail de longue haleine, nous avons annexé au présent rapport un résumé comparatif préparé à notre intention par lAssociation des pilotes dAir Canada (annexe II). À notre avis, les éléments comparables présentés par la Grande-Bretagne et les États-Unis devraient être pris en compte dans le dialogue sur la question de la fatigue.
Dans le rapport intérimaire, on insistait sur la nécessité de partager linformation sur la sécurité dans lindustrie aérienne. Ce nest quen étudiant les incidents et les accidents que les organismes de réglementation peuvent formuler et adopter des recommandations qui amélioreront la sécurité du transport aérien. Cependant, on ne peut adopter de règlement que si tous les incidents et accidents sont signalés. Il est important de savoir à cet égard quelle méthode le Bureau de la sécurité des transports utilisera pour recueillir linformation et y donner suite.
Lors de la Deuxième conférence mondiale sur la sécurité dans les transports tenue à Delft, aux Pays-Bas, on a proposé que lOACI recueille et traite les données des pays membres sur les accidents et les incidents.
NAV CANADA a institué un système de déclaration non punitif. Le RAC exige que NAV CANADA note tous les incidents et accidents, et les signale à Transports Canada pour analyse. NAV CANADA a indiqué quil tentait de convaincre lindustrie de partager linformation pour améliorer la sécurité.
Pour sa part, lAssociation des pilotes dAir Canada a traité en détail des problèmes juridiques liés à la déclaration des incidents ou des accidents.
« Lune des plus grosses questions ici est la responsabilité quant aux renseignements fournis. Il y a au sein de lindustrie une sérieuse crainte que la divulgation de renseignements crée un problème de responsabilité potentielle de lexploitant -- en dautres termes, que ces renseignements puissent être utilisés contre l'exploitant en cas de poursuite devant les tribunaux.
Lon a vu des cas du genre au sud de la frontière, et je songe ici tout particulièrement à laccident de lAmerican Airlines à Cali, en Colombie. Dans cette affaire, les avocats de laccusation ont agressivement recherché les données en matière de sécurité dun programme dAmerican Airlines intitulé ASAP.
Il y a une façon de régler cela. Notre association, en collaboration avec notre employeur, tente dobtenir non seulement des assurances, sur le plan politique, auprès de Transports Canada, mais également des documents juridiques ou incitatifs protégeant le caractère confidentiel des renseignements en matière de sécurité.
Si nous allons nous occuper de programmes de collecte et de diffusion des données, nous craignons que celles-ci soient utilisées pour attaquer notre société et nos membres. Cest là le noeud du problème : la responsabilité liée aux renseignements. Si nous parvenons à trouver un moyen juridique de les protéger -- et il faudrait que cela soit inclus dans la Loi sur laéronautique -- alors nous pourrons traiter de la question.
Si vous permettez que je vous parle un petit peu plus de son importance, si vous prenez larbre ou la pyramide statistique dinformations que vous utilisez pour améliorer la sécurité aérienne, nous nous sommes traditionnellement fondés sur les accidents et les incidents. Les cyniques parmi nous appellent cela la "méthodologie des pierres tombales". Nous ne récupérons quenviron 5 à 10 p. 100 des données. Pour ce qui est des catastrophes frisées, 80 à 90 p. 100 des données disponibles nous font défaut. Ces catastrophes manquées sont importantes, étant donné quelles peuvent nous fournir des renseignements essentiels susceptibles de nous aider à améliorer le système de sécurité.»
Recommandation 7
Nous recommandons que le gouvernement envisage de modifier la Loi sur laéronautique pour protéger des recours en justice ceux qui fournissent des renseignements sur la sécurité, protéger le caractère confidentiel de ces renseignements et dégager de toute responsabilité les entreprises qui fournissent ces renseignements et leurs employés.
7. Dépistage des drogues et de lalcool
Dans le rapport intérimaire, on analysait en détail la question de la toxicomanie et de lalcool dans lindustrie des transports. Il était recommandé que Transports Canada revoie sa position et autorise des test obligatoires et aléatoires de dépistage de drogues et dalcool dans lindustrie.
Nous avons conclu que la mesure ne simpose pas dans l'industrie aérienne au Canada. Même si nous revenons sur lidée dimposer des test aléatoires, nous sommes toujours davis que le Bureau de la sécurité des transports devrait avoir le pouvoir deffectuer des examens médicaux après un accident.
Nous sommes préoccupés par leffet que les médicaments en vente libre et dordonnance pourraient avoir sur la performance. Nous exhortons Transports Canada détudier les effets de ces médicaments sur la vigilance du personnel responsable de la sécurité dans lindustrie aérienne.
8. Passagers perturbateurs ou enragés
Lindustrie du transport aérien au Canada est maintenant confrontée au problème des passagers turbulents et à la façon dintervenir. Nous sommes heureux dapprendre que tous les secteurs de lindustrie participent à un groupe de travail de Transports Canada qui fera des recommandations pour résoudre le problème.
Le problème se pose surtout sur les vols internationaux. M. Sowden de lAssociation des pilotes dAir Canada nous a expliqué la situation :
« Une question qui se rattache à la sécurité et qui a fait lobjet de beaucoup de discussions est celles des passagers perturbateurs ou enragés. Cest un très grave problème. Jai déjà été capitaine dun avion dans lequel se trouvaient de tels passagers. Ce nest pas juste que les médias en font davantage état; je peux vous confirmer que le taux dincidences statistiques de ce problème est plus élevé, bien que je naie pas les chiffres.
Il y a à cet égard des problèmes dordre juridique. Nous avons déjà eu des problèmes. Par exemple, un vol en partance de la Jamaïque a dû se détourner sur Miami à cause dun passager violent. Lorsque nous avons atterri, le pilote a dit "faites descendre cette personne, portez des accusations contre elle, faites quelque chose". Le pilote sest fait dire quon ne pouvait rien faire. Cétait un appareil enregistré au Canada; le passager nétait pas un citoyen américain; il navait pas blessé un citoyen américain; et lincident ne sétait pas produit dans lespace aérien américain. Les autorités ont dit : « Excusez-nous, mais ce nest pas notre problème ». If faut quil y ait un effort mondial concerté en vue délaborer des moyens de poursuivre les passagers perturbateurs qui mettent en danger le vol.
Si nous avions un problème avec un passager canadien entre Toronto et Fredericton, nous pourrions nous en occuper. Les choses se corseraient un petit peu si cette personne était originaire des États-Unis, du Mexique, de la Grèce ou dailleurs. Cest une question difficile. Il faut quil y ait un effort concerté pour élaborer des textes de loi et des protocoles tels que ces personnes puissent être poursuivies, car à lheure actuelle, ce nest pas ce qui se passe.»
Nous appuyons ceux qui cherchent une solution législative à ce problème. Il est intolérable de penser que les préposés aux passagers subissent de mauvais traitements comme ceux-là. Nous sommes en faveur de lemploi de menottes à bord des avions si cest là le bon moyen pour maîtriser les passagers turbulents.
Recommandation 8
Nous recommandons que le gouvernement du Canada entreprenne une démarche concertée pour résoudre le problème des passagers turbulents.
Nous recommandons de modifier le Code criminel pour faciliter la tâche des agents de maintien de lordre aux prises avec des passagers turbulents qui ne sont pas citoyens canadiens.
Nous recommandons de modifier le Règlement de laviation canadien pour permettre aux transporteurs de refuser lembarquement à quiconque présente, selon eux, une menace pour la sécurité.
Nous recommandons que lOACI prépare un traité international qui reconnaîtra à la communauté aérienne internationale le pouvoir et la compétence de prendre les mesures qui simposent pour régler le problème des passagers turbulents afin dassurer la sécurité des passagers et des équipages.
Dans le rapport intérimaire, on traitait brièvement du transport des matières dangereuses sur route et de la nécessité du transport aérien des biens pour les habitants et les transporteurs du Nord.
Quand un avion transporte des marchandises dangereuses, la sécurité peut être compromise comme le montre lécrasement dun Valu Jet dans les Everglades, en Floride, causé par de mauvaises conditions de stockage de bouteilles doxygène dans une soute dépourvue de dispositifs de lutte contre les incendies.
La solution aux problèmes de ce genre pourrait être aussi simple que celle proposée par lAssociation des pilotes dAir Canada :
« Si lappareil nest pas équipé comme il se doit, alors il vous faut examiner quels produits dangereux vous transportez, surtout sils sont susceptibles de poser un risque de combustion. Si lappareil nest pas muni du matériel approprié, alors la seule solution sûre est de ne pas les transporter. En passant, il y a un très grand nombre de transporteurs américains que ne transportent pas du tout de produits dangereux, quels quils soient.»
Dans notre pays, Transports Canada est responsable de réglementer le transport aérien des matières dangereuses. Les résultats de lévaluation de sécurité de lOACI sur Transports Canada vont tout à fait dans le sens du travail fait par le Ministère en matière de transport de marchandises dangereuses.
De plus, Boeing a informé le Comité spécial des précautions quelle conseille aux compagnies aériennes de prendre pour le transport des marchandises dangereuses. À noter que la loi exige que quiconque manipule, offre de transporter ou transporte des matières dangereuses doit être formé par une personne compétente en matière de manutention de matières dangereuses ou doit travailler directement sous sa supervision.
À noter également que Transports Canada a inclus, dans les normes de conception des nouveaux modèles davions de transport, des critères pour les revêtements qui limitent la pénétration des flammes et des critères de détection et de suppression des flammes. En outre, le Ministère est en voie dadopter un règlement qui exigera, dans les trois ans suivant lentrée en vigueur du règlement, que des revêtements et dispositifs de détection et de suppression des flammes soient installés dans la plupart des appareils exploités aux termes de la partie VII du Règlement de la Loi sur laéronautique.
Nous exhortons Transports Canada à continuer dans cette voie et, si possible, à réduire le délai dadaptation des appareils existants.
Dans le rapport intérimaire, on traitait brièvement de la question des avions ultra-légers munis dun parachute. On a ainsi appris au cours de rencontres avec les Américains que lécrasement lan dernier de 82 appareils ultra-légers dotés de parachutes navait fait aucun blessé grâce au déploiement des parachutes.
Cette question a été soulevée avec Transports Canada et divers témoins. Ces parachutes ou systèmes de récupération balistique (SRB) peuvent être installés à bord des appareils.
Les SRB peuvent sauver des vies, s'ils sont installés correctement et ne sont déployés que dans les « bonnes » situations durgence. Transports Canada a expliqué quun SRB pouvait offrir des avantages de sécurité en cas datterrissage impossible ou comme mesure de « dernier recours » en cas de défaillance de structure en vol.
Les fabricants et les exploitants dappareils ultra-légers semblent préférer augmenter la sécurité en faisant appel à des éléments plus résistants et efficaces pour améliorer lensemble de la structure de lappareil plutôt que dy ajouter du poids sous la forme dun SRB qui ne saurait être utile que dans un nombre limité de cas.
Le secteur des ultra-légers voudrait que Transports Canada étende le permis des ultra-légers au transport de passagers.
Dans son témoignage, la Canadian Owners and Pilots Association a précisé au Comité spécial que le Cirrus, le plus récent appareil léger en instance dhomologation aux États-Unis, est équipé dun parachute déployable de série. Ce dernier est conçu pour se déployer à la moindre défaillance. Toutefois, son prix est élevé et représente quelque 15 p. 100 du coût de lappareil.
LAssociation a déclaré quil serait pratiquement impossible déquiper après coup un appareil ultra-léger dun parachute, car il faudrait démonter lappareil, puis le remonter, opération qui risquerait de compromettre plutôt que daméliorer la sécurité.
Aux États-Unis, la FAA suit de près lexpérience du Cirrus à parachute déployable afin de déterminer sil sagit dun succès ou si la technologie présente des problèmes.
Nous exhortons Transports Canada à suivre également la situation car, à notre avis, des vies pourraient être sauvées si on exigeait que les ultra-légers soient équipés dun parachute capable de se déployer dans des situations dextrême urgence.
Il est connu que bien des appareils continuent de voler au-delà de leur durée utile prévue. À cet égard, Boeing a entrepris un programme mondial dexamen régulier de létat de la structure et de tous les systèmes des appareils vieillissants. La société a en outre soumis certains appareils à des essais de fatigue et à des contrôles sur table pour compléter les données recueillies.
Aux États-Unis, la FAA a formé le Ageing Transport Systems Rule Making Advisory Committee. Au Canada, Transports Canada contrôle la sécurité des appareils canadiens en procédant à des inspections et en approuvant les programmes dentretien des compagnies. Les inspecteurs et les ingénieurs de Transports Canada inspectent les appareils au hasard lors des grandes révisions.
Comme les problèmes de câblage et les accidents très médiatisés ont été nombreux depuis quelques années, la FAA a étendu ses programmes dinspection des appareils vieillissants aux systèmes électriques, pneumatiques et hydrauliques.
Nous avons appris que Transports Canada participe de près à toutes ces activités et communique régulièrement avec tous les exploitants canadiens de flottes pour suivre la situation et pour corriger tout problème avant quil ne compromette la sécurité.
Nous exhortons Transports Canada à continuer de contrôler les appareils vieillissants au Canada pour garantir la sécurité des passagers et rendre publics chaque année les résultats de ses études sur les problèmes liés aux appareils vieillissants.
Durant la visite chez Bombardier, le Comité spécial a été informé des longs délais que Transports Canada imposait à cette société avant dapprouver la conception de ses nouveaux appareils. Ces délais peuvent être très coûteux dans un marché fortement concurrentiel. Le Comité spécial est porté à croire que ce problème est attribuable à un manque de ressources de Transports Canada. Ce ministère doit disposer de ressources suffisantes dans ce secteur si nous souhaitons que le Canada soit réellement concurrentiel à léchelle internationale dans la conception et la fabrication dappareils.