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VETE

Sous-comité des anciens combattants

 

Délibérations du sous-comité des
anciens combattants

Fascicule 1 - Témoignages du 17 octobre 2000


OTTAWA, le mardi 17 octobre 2000

Le Sous-comité des anciens combattants du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui à 9 heures afin d'examiner les soins de santé offerts aux anciens combattants qui ont servi au cours de guerres ou dans le cadre d'opérations de maintien de la paix; les suites données aux recommandations faites dans ses rapports précédents sur ces questions; et les conditions afférentes aux services, prestations et soins de santé offerts, après leur libération, aux membres de l'armée permanente ou de la réserve, ainsi qu'aux membres de la GRC et aux civils ayant servi auprès des casques bleus en uniforme dans des fonctions d'appui rapproché, et à faire rapport sur ces questions.

Le sénateur Michael A. Meighen (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président: Honorables sénateurs, nous souhaitons la bienvenue à nos témoins du Conseil national des associations d'anciens combattants du Canada.

M. H. Clifford Chadderton, président, Conseil national des associations d'anciens combattants du Canada: Honorables sénateurs, nous avons déjà transmis au comité certains documents et nous escomptons une longue et fructueuse association avec votre comité, de sorte que je ne vais pas essayer ce matin d'aborder toutes les questions qui nous intéressent, mais je vais plutôt me limiter à signaler celles qui, à mon avis, sont d'actualité. Nous avons toujours eu le sentiment que les questions posées par les sénateurs contribuaient utilement à l'élaboration des politiques futures ainsi qu'à l'orientation des discussions que nous tenons régulièrement avec nos organisations membres.

Le conseil national est composé de 38 organisations différentes, certaines toutes petites, certaines extrêmement restreintes comme les soeurs infirmières, les parachutistes et ainsi de suite. Grâce à ces organisations, nous demeurons en contact permanent avec près de 200 000 anciens combattants.

Je voudrais également saisir l'occasion pour remercier les sous-comités précédents du Sénat d'il y a plusieurs années. Ce n'est pas un secret pour ceux et celles, et ils sont nombreux, qui s'intéressent aux affaires des anciens combattants, qu'un sous-comité du Sénat s'en est pris à l'Office national du film après la sortie d'un certain film au sujet duquel le comité a déposé un rapport fort utile. La bravoure et le mépris était le titre d'un documentaire de la Société Radio-Canada qui a donné lieu à de nombreuses audiences du Sénat.

Le dernier élément d'actualité qui nous interpelle est celui des soins à long terme dans les hôpitaux pour anciens combattants. Je voudrais appeler votre attention sur l'un des documents que nous vous avons transmis et qui a pour titre «Veterans Affairs Canada Reference Documents.» Ces documents contiennent toutes les informations nécessaires sur les lits réservés aux anciens combattants dans environ 731 établissements partout au Canada. Il s'agit en l'occurrence d'une information de base indispensable au comité pour étudier ce dossier.

Je n'ai pas l'intention de vous lire de mémoires, mais j'ai quelques réflexions à vous livrer. Il y a également un mémoire distinct sur la question des civils qui ont contribué directement à l'effort de guerre et les prisonniers de guerre. J'ignore où en est rendu le projet de loi C-41, mais je pense qu'il a franchi l'étape de la troisième lecture et ce projet de loi a pour effet de donner le statut d'ancien combattant aux sept groupes de civils qui ont participé à l'effort de guerre, c'est-à-dire les travailleurs de la Croix-Rouge, les membres de la Forestry Unit, les pilotes du Ferry Command et d'autres civils encore qui, sans porter l'uniforme et sans être assujettis à la discipline militaire, ont néanmoins bien servi leur pays. Il a fallu de nombreuses années pour porter le sort de ces gens-là à l'attention des différentes administrations publiques.

Le projet de loi C-41 offre donc certains avantages à ces sept groupes. Le comité voudra peut-être examiner attentivement ce texte de loi parce que d'aucuns ont l'impression qu'il résout tous leurs problèmes. Permettez-moi de vous donner un exemple. Avant le projet de loi, si un pilote du Ferry Command avait été blessé lors de l'écrasement de son appareil à Gander, il n'avait droit à aucune pension. Les travailleurs de ces sept groupes ne pouvaient avoir droit à une pension que s'ils avaient été blessés au feu. Les pilotes du Ferry Command ont piloté leurs avions au-dessus de l'Atlantique. Ces avions n'étaient pas armés et, lorsqu'ils étaient attaqués, ils n'avaient pas la moindre chance. La plupart des blessés du Ferry Command l'avaient été lors de l'écrasement de leur appareil.

Le problème tient à ce que le projet de loi C-41 supprime cette référence aux blessures subies au combat mais sans prévoir aucune rétroactivité. Je ne prétends pas que le gouvernement devrait revenir 50 ans en arrière, mais en vertu de la Loi sur les pensions, il peut revenir en arrière de trois, voire de cinq ans. Un pilote qui a été blessé lors de l'écrasement de son avion à Gander en 1943 serait ravi que son gouvernement lui donne le statut d'ancien combattant. Il serait très heureux de pouvoir immédiatement demander une pension. Par contre, il ne sera pas très heureux lorsqu'il découvrira que cette pension n'a pas d'effet rétroactif. Nous entendrons parler de plus en plus de cas de ce genre pendant les délibérations du comité.

Le président: Je ne veux pas vous interrompre, mais pour répondre à votre question, le projet de loi C-41 a reçu hier la première lecture au Sénat et il y a consentement pour qu'il soit abordé aujourd'hui même.

M. Chadderton: En effet.

Le président: Je pense pouvoir dire sans guère de risque que tous les partis semblent d'accord pour en permettre l'adoption au cas où d'autres événements puissent venir le compromettre. Il devrait donc être adopté. Vous nous dites donc que ce projet de loi est utile mais qu'il ne va pas jusqu'au bout.

M. Chadderton: C'est bien exact. J'avais pensé que ce projet de loi aurait été promulgué au moment où nous comparaîtrions devant le comité. Par ailleurs, il sera toujours possible d'en signaler certaines lacunes que je tiens d'ailleurs à vous mentionner.

L'autre élément qui intéresse la marine marchande est que, dans le cas des pilotes du Ferry Command, des travailleurs de la Croix-Rouge et ainsi de suite, le projet de loi ne prévoit pas d'indemnisation en remplacement de la réadaptation. C'était le gros contentieux dans le cas de la marine marchande. Lorsque le gouvernement en a eu fini avec les anciens de la marchande, ils se sont retrouvés pour ainsi dire à la case départ. Ce n'est que l'an dernier que le gouvernement a fini par reconnaître qu'ils devaient bénéficier d'une mesure de réadaptation. Au lieu de faire quelque chose immédiatement, le gouvernement a voté un crédit de 50 millions de dollars, et les comités sont actuellement en train de décider de la meilleure manière de répartir cette somme.

Le point suivant est le dossier de la Force régulière. Pendant des années, si un membre de la Force régulière obtenait une pension suite à une blessure, cette pension ne lui était payée qu'au moment de sa démobilisation. Laissez-moi vous donner un exemple. À Edmonton, un expert en explosif a perdu un pouce. Il décide de rester dans les forces armées et ne touche donc pas de pension. Même si cette pension a été approuvée, il n'en voit pas la couleur et elle ne lui sera versée que lorsque le projet de loi C-41 aura été promulgué. Il touchera sa pension à partir de la date de promulgation de la loi, même si cette invalidité remonte à cinq ou dix ans.

S'agissant des prisonniers de guerre, le comité devrait entendre -- et il nous entendra à coup sûr s'il nous donne la possibilité de comparaître une autre fois -- qu'à notre avis, la disposition en question est trop rigoureuse. De trois à dix-huit mois donne un supplément de pension de 10 p. 100. De dix-huit à trente mois donne un supplément de pension de 15 p. 100. Plus de trente mois donne droit à un supplément de pension de 25 p. 100. Cela fait des années que nous faisons valoir auprès des comités du Sénat que cette disposition est beaucoup trop rigide car l'écart est trop grand. Nous préconisons pour notre part des augmentations par tranche de 5 p. 100.

Ensuite, il y a la question des lits d'hôpitaux. Si le comité veut se pencher sur cette question et sur les soins médicaux prodigués aux anciens combattants, il faut que je vous dise -- et j'espère qu'il n'y aura aucun malentendu à ce sujet -- que nos 38 organisations n'ont absolument rien à reprocher à la qualité des soins prodigués, de la nourriture ou des services infirmiers. Nous constatons par contre qu'il y a un problème beaucoup plus important, en ce sens que le ministère a quelque chose comme 4 000 lits pour lesquels il a un accès prioritaire. Il y a plusieurs années, le vérificateur général avait déclaré dans son rapport que 60 000 anciens combattants des trois guerres allaient atteindre quatre-vingts ans dans un avenir tout proche et qu'ils auraient à ce moment-là besoin d'un lit. Il y a donc une énorme pénurie.

Nous ne préconisons pas pour autant que le gouvernement se lance dans un grand programme de construction. Comme nous sommes nombreux à le savoir, le ministère a cessé de gérer des hôpitaux en 1963, à l'exception de celui de Sainte-Anne. Comment donc arriver à combler ce vide? Je pense que l'actuel ministre a déjà fait valoir une solution possible en demandant aux petits hôpitaux locaux de réserver trois, quatre ou cinq lits en priorité aux anciens combattants admissibles. S'ils y consentent, une fois qu'un ancien combattant occupera le lit en question, le ministère versera à l'hôpital 160 $ par jour, et le bénéficiaire devra simplement payer 720 $ pour pouvoir rester à l'hôpital tant et aussi longtemps qu'il demeurera admissible.

Les priorités nous posent un gros problème. La réglementation sanitaire est très claire au sujet des priorités. La première de ces priorités, ce sont les pensionnés invalides de guerre, et la seconde, les anciens combattants qui sont admissibles en raison de leur revenu. Nous les appelons couramment les bénéficiaires d'une allocation d'ancien combattant, et ce sont les gens dont le revenu est inférieur à, mettons, 1 200 $ par mois. Le troisième groupe prioritaire est celui des anciens combattants qui ont servi outre-mer et qui ne sont pas autrement admissibles, en raison de leur revenu par exemple, mais qui vont également avoir besoin d'un lit d'hôpital par l'entremise du ministère. Ces gens-là vont avoir des problèmes étant donné que les pouvoirs publics provinciaux vont leur dire: «Un instant, vous êtes ancien combattant et vous relevez donc du gouvernement fédéral.» Nous avons énormément de mal à faire entrer un ancien combattant en règle qui a servi outre-mer dans un établissement de soins à long terme parce que les gouvernements provinciaux -- du moins jusqu'à ce que les financements aient été dégelés la semaine passée -- disaient invariablement: «Non, nous devrons d'abord nous occuper de nos propres administrés, et c'est le ministère des Affaires des anciens combattants qui doit vous prendre en charge.» Voilà donc un gros problème.

Un autre problème encore est celui de la définition des «besoins en matière de santé» par rapport à la «priorité pour états de service». Le ministère donne la priorité aux besoins en matière de santé. Je vais vous expliquer un cas d'espèce. Un ancien combattant, pensionné à 100 p. 100, payait plus de 2 000 $ par mois pour sa pension dans une maison de soins infirmiers à Ottawa. Nous avons fait une demande pour qu'il puisse entrer à l'hôpital Perley-Rideau, mais nous nous sommes faits répondre qu'il y avait déjà quelque chose comme 200 personnes sur la liste d'attente. Nous avons alors demandé qui était sur cette liste d'attente et on nous a répondu qu'il y avait beaucoup de gens qui avaient des besoins médicaux. Très franchement, nous estimons que cela va à l'encontre des lois et des règlements et c'est également contraire au bon sens. La Loi sur les affaires des anciens combattants repose sur les états de service, en l'occurrence sur l'endroit où l'ancien combattant a servi et sur son état d'invalidité, et dans ce cas-ci, ses états de service donnaient à l'homme en question la priorité absolue. Malgré cela, les anciens combattants comme lui passent au second plan. Cela me répugne d'utiliser cette description, mais c'est la vérité. Trente pour cent des gens qu'on accepte dans les hôpitaux souffrent d'alcoolisme ou de cirrhose du foie. Dans certains cas, ils sont par exemple aussi victimes de la maladie d'Alzheimer. Voilà qui porte gravement préjudice à mon camarade ancien combattant.

J'étudie ce dossier depuis plusieurs années, et j'ai acquis la conviction que le ministère fait fausse route. Il devrait à mon sens donner la priorité aux pensionnés. S'il y a d'autres lits disponibles, fort bien. Mais ce n'est pas le cas. À l'heure actuelle, il y a 23 personnes sur la liste d'attente à l'hôpital Sunnybrook. Nous avons fait part de ces chiffres au comité. La liste d'attente à l'hôpital Perley-Rideau d'Ottawa compte environ 120 noms. Le ministère aurait intérêt à cesser de nous mener en bateau et à admettre qu'il doit faire quelque chose. S'il y avait 23 personnes sur la liste d'attente à l'heure actuelle à Sunnybrook -- nous avons vérifié pas plus tard qu'hier -- imaginez quelle sera la situation d'ici trois ou quatre ans lorsque l'âge moyen des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale sera de l'ordre de 82 ou 83 ans.

Nous avons déjà appelé l'attention du comité sur cette question auparavant. Selon nous, la politique n'est pas bonne et le comité devrait s'en saisir.

Vous entendrez également parler de la question des services aux personnes de marque.

Le ministère a décidé de faire d'un genre de services aux personnes de marque un projet pilote. Je vais vous expliquer de quoi il s'agit. Un ancien combattant est sur la liste d'attente pour entrer à l'hôpital Perley-Rideau. On lui dit: «Nous enlevons votre nom de la liste d'attente, nous vous renvoyons chez vous mais nous vous donnons les services voulus comme à une personne de marque». Cela veut dire que l'administration lui enverra quelqu'un pour lui faire une pédicure et pour s'occuper de lui à domicile. Elle va également lui envoyer quelqu'un pour déneiger son entrée et ainsi de suite. Nous nous sommes réjouis de cette initiative dans la mesure où il s'agissait de quelque chose de temporaire en attendant mieux parce qu'en fait, c'est bien de cela qu'il s'agissait. Ce projet n'a nullement permis de raccourcir la liste d'attente, nous avons bien vérifié. Ces services aux personnes de marque comme on les appelle sont offerts comme projet pilote dans trois régions du Canada. À notre avis, cela ne solutionnera pas du tout le problème.

Quelle est la solution? La solution a été annoncée par le ministre actuel en juin: le gouvernement fédéral devra demander aux provinces de réserver, par exemple, cinq lits supplémentaires dans la région de l'Atlantique. Le MAAC dispose de 56 lits, en vertu de contrats, au Pavillon commémoratif Caribou pour les anciens combattants. Nous croyons que le MAAC doit leur demander de retenir 20 ou 40 lits supplémentaires en vertu de ces contrats.

Il y a huit emplacements à l'Île-du-Prince-Édouard. Le MAAC a obtenu à contrat 20 lits à l'unité pour les anciens combattants de Northumberland, à Pictou. À l'heure actuelle, la liste d'attente à l'hôpital du comté de Pictou compte précisément 40 noms. Nous ne demandons pas de grandes dépenses en immobilisation. Nous savons qu'il y a des lits communautaires, mais que les provinces préféreront les réserver à leurs propres patients. Elles diront aux anciens combattants de s'adresser au MAAC. Bien sûr ça signifie que les anciens combattants se retrouvent dans une impasse.

Pour ce qui est des ententes de transférabilité, j'aimerais vous rappeler qu'en juin 1998, soit la dernière fois que nous avons comparu devant vous, nous vous avons signalé que le MAAC autoriserait les provinces et, dans certains cas l'Université de Toronto, de dénoncer ces ententes.

Lorsque les ententes de transférabilité sont intervenues et qu'on y a assujetti Sunnybrook, par exemple, une disposition prévoyait qu'un nombre donné de lits seraient mis à la disposition des anciens combattants. La disposition prévoyait aussi que, si des lits supplémentaires étaient nécessaires, on en tiendrait compte. J'ai vérifié vendredi après-midi et, actuellement, la liste d'attente de Sunnybrook compte 23 noms.

Sans les représentations de notre conseil national auprès du conseil d'administration de l'hôpital, l'hôpital Sunnybrook aurait perdu son nom. On voulait le renommer le «Women's College Hospital». Nous avons fait l'historique du nom, et le président de l'hôpital a reconnu comme nous que le nom devait rester.

Honorables sénateurs, ce début augure très mal. C'est un premier empiétement qui pourrait mener les provinces et les établissements à faire fi des contrats qui ont été signés en toute bonne foi. Le nombre de lits réservés aux anciens combattants pourrait alors baisser rapidement.

Le président: Monsieur Chadderton, pourriez-vous en venir à votre conclusion?

M. Chadderton: Oui. Monsieur le président, j'ajouterai seulement que vous avez reçu une lettre de Marian Fijal, de la Polish Combatants' Association. J'explique dans mon mémoire pourquoi, à une certaine époque, les membres de l'armée polonaise de l'intérieur avaient droit à une allocation d'ancien combattant qui leur a ensuite été retirée. Nous tenions à le souligner.

En conclusion, le problème le plus sérieux est celui des lits de longue durée pour les anciens combattants. Personne ne sait combien d'anciens combattants parmi les 60 000 recensés par le vérificateur général auront besoin de soins de longue durée. Déjà, la liste d'attente est longue. Nous pouvons donc présumer que d'ici cinq ans, les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale réclameront des soins de longue durée au ministère des Affaires des anciens combattants.

Le sénateur Pépin: Je dois reconnaître, monsieur Chadderton, que le domaine des anciens combattants est tout nouveau pour moi. Je sais ce que vous avez fait car, dans ma famille, il y avait huit jeunes hommes, dont cinq ont fait la guerre. J'aimerais que vous m'expliquiez une chose. Vous dites qu'il y a encore des hôpitaux pour les anciens combattants, l'hôpital Sainte-Anne, par exemple. Nous comprenons tous qu'ils ne suffisent pas. Comme l'a suggéré le ministre, vous aimeriez que les provinces réservent cinq lits aux anciens combattants dans les hôpitaux régionaux. Est-ce que cela suffira?

Si, dans chaque hôpital régional du pays, on réserve cinq lits aux anciens combattants, est-ce que cela suffira pour répondre à leurs besoins en soins de santé?

M. Chadderton: Je ne peux que compter sur les données du vérificateur général. Dans mon mémoire, je dis que personne ne sait combien ils sont, mais nous savons -- et nous avons envoyé une lettre à ce sujet au comité -- combien de noms figurent sur les listes d'attente. Nous estimons qu'il suffirait pour le gouvernement de demander à l'hôpital de Smith Falls, par exemple, de réserver cinq, six ou dix lits supplémentaires pour les anciens combattants pour régler le problème.

Il y a tout un écart entre le nombre de lits disponibles et le nombre d'anciens combattants -- nous le savons. Toutefois, tout ce que nous pouvons faire, c'est nous servir des données que nous fournit le ministère des Anciens combattants.

J'ajouterai en terminant que le MAAC a fait au moins cinq études sur ce sujet et en a entrepris une sixième. On y est très conscient de l'écart qui existe. J'ignore toutefois quelle en est l'ampleur. J'ignore si quelqu'un le sait. Toutefois, je sais que la liste d'attente est longue.

Le sénateur Pépin: Vous avez dit qu'il y a sept groupes de civils?

M. Chadderton: Oui.

Le sénateur Pépin: Sont-ils inclus dans le nombre des anciens combattants?

M. Chadderton: Non. Ils ne sont pas très nombreux. Il y a par exemple 41 pilotes de Ferry Command. Ils ne sont pas assez nombreux pour que l'on prévoie une solution différente pour eux.

Le MAAC a déjà montré qu'il peut en arriver à des ententes avec les petits hôpitaux. Ces hôpitaux disent: «Nous ne pouvons nous occuper de tous les anciens combattants; c'est impossible. Toutefois, nous pouvons en accueillir dix de plus et leur donner la priorité.» Entre-temps, la situation devient désespérée et je peux vous dire que les anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale sont au désespoir.

Le sénateur Pépin: Dans votre exposé, vous vous êtes dit satisfait des services dispensés, mais vous avez aussi demandé que l'on contrôle la qualité des soins. Est-ce que ce contrôle existe à l'heure actuelle?

M. Chadderton: Il existe toutes sortes de comités qui siègent ad infinitum. J'ai été membre d'un comité qui s'appelait le Comité consultatif de la gérontologie. On y trouvait tous les grands gérontologues du Canada. Toutefois, lorsque nous avons demandé des chiffres au MAAC, il semble qu'une seule personne les avait et -- sans vouloir la critiquer -- elle n'est pas chargée de contrôler quoi que ce soit. Elle ne peut dire au ministre qu'elle y a un grave problème à Portage La Prairie, au Manitoba. Tout ce qu'il peut faire, c'est recueillir des données et les remettre à ce comité.

Le président: J'aimerais avoir une précision. Monsieur Chadderton, vous avez dit que le ministre actuel a proposé ce qui vous apparaît comme une solution acceptable, à savoir la signature de contrats, par le MAAC, avec les hôpitaux locaux. Est-ce seulement une proposition? A-t-on pris des mesures pour mettre en oeuvre cette solution? Des sommes d'argent ont-elles été affectées? Est-ce que le ministère prend des mesures pour atteindre cet objectif? Ce n'était pas clair.

M. Chadderton: Je peux vous dire exactement ce qui s'est passé. Au congrès du dominion de la Légion royale canadienne en juin dernier, le ministre a annoncé l'ajout de 2 600 lits. Lorsque nous avons pris nos informations, nous avons constaté qu'il s'agissait de 2 600 lits réservés aux anciens combattants dans les hôpitaux communautaires; on a déclaré que ces 2 600 personnes relèveraient du règlement des Affaires des anciens combattants. C'est tout. En conséquence, plutôt que de payer 2 000 $ par jour, ces anciens combattants ne paient que 720 $ par jour et le MAAC, 160 $ par jour. Il y avait donc une solution. Je dis dans mon mémoire que c'est une solution coûteuse, mais autrement, le MAAC devra modifier son règlement et déclarer les anciens combattants ayant servi outre-mer non admissibles, ou prendre d'autres arrangements pour eux. Il faut choisir l'une ou l'autre de ces mesures.

Le président: Y a-t-il un critère quelconque? Vous dites que les anciens combattants doivent verser un certain montant; ce montant est-il fixe, quel que soit le revenu?

M. Chadderton: Pour ceux qui n'ont pas de revenu et qui ont droit à une allocation en raison, justement, de leur faible revenu, tels que ceux qui perçoivent une allocation d'ancien combattant, il n'y a pas de frais. Les pensionnés -- par exemple, celui qui a perdu une jambe, qui a des problèmes dans l'autre genou et qui est hospitalisé -- n'ont rien à payer non plus. Les anciens combattants ayant servi outre-mer mais n'ayant pas de pension auraient à payer 720 $ par mois pour la chambre et les repas.

Le président: On suppose que s'il reçoit une pension, c'est que son revenu personnel est faible?

M. Chadderton: En effet.

Le président: S'il ne reçoit pas de pension, c'est qu'il a un revenu et on suppose qu'il peut payer pour son lit?

M. Chadderton: C'est exact.

Le sénateur Wiebe: Je ne comprends pas très bien la distinction entre les lits qui se trouvent dans des hôpitaux, ceux qui se trouvent dans des centres de soins infirmiers et ceux qui sont de niveau I ou de niveau II. Est-ce que cette distinction s'applique partout? Aussi, les contrats que signe le ministère des Anciens combattants concernant les lits dans les hôpitaux régionaux constituent-ils une entente avec chaque hôpital ou avec le gouvernement provincial qui est responsable des soins de santé?

M. Chadderton: Pour répondre à la deuxième question, ces ententes interviennent avec les provinces qui autorisent ensuite chaque hôpital à réserver des lits aux anciens combattants, en vertu du contrat. Il ne s'agit que de lits pour des soins de longue durée et non pas de soins aux malades chroniques ou de soins actifs.

Le sénateur Atkins: Vous avez parlé des prisonniers de guerre et du pourcentage d'augmentations de pension. Pourquoi préférez-vous une augmentation de 5 p. 100?

M. Chadderton: Les diverses associations de prisonniers de guerre faisant partie du conseil national -- ce qui ne comprend pas les anciens combattants de Hong Kong qui, eux, sont satisfaits -- tels que les prisonniers de guerre de l'ARC, se plaignent qu'un homme comptant plus de 90 jours de service obtient une pension de 10 p. 100, alors que celui qui en compte 85 n'en aura aucune. C'est leur premier grief. Deuxièmement, ceux qui comptent de 90 à 900 jours obtiennent tous la même chose. Encore une fois, on estime que ces chiffres ne sont pas magiques et qu'ils ne permettent pas de tenir compte des problèmes de chacun. Ils estiment toutefois que des augmentations graduelles de cinq mois et de 5 p. 100 seraient plus justes.

Le sénateur Atkins: Seulement pour les prisonniers de guerre?

M. Chadderton: Oui. En vertu de la Loi sur les pensions, les prisonniers de guerre ont droit à des prestations d'invalidité, mais l'article 72 accorde aussi une pension additionnelle aux prisonniers de guerre. Notre organisation estime depuis longtemps que l'écart entre les différents groupes est trop grand -- 5 p. 100, 10 p. 100, 25 p. 100, c'est trop. À notre avis, la solution serait simple pour le gouvernement. Le moment est bien choisi d'agir, car le gouvernement est à revoir le barème d'invalidité. Ce serait un bon moment de se demander s'il est juste d'avoir seulement trois groupes ou si on ne devrait pas plutôt en prévoir six.

Le sénateur Atkins: N'est-il pas juste de croire que les effets ne sont pas les mêmes pour celui qui a été prisonnier de guerre pendant, disons, 900 jours?

M. Chadderton: Je vous répondrai brièvement. Revenons aux anciens combattants de Hong Kong. Leur pension est fondée sur le fait qu'aucun expert médical au Canada n'a pu affirmer avec certitude qu'ils avaient souffert de leur séjour de 43 mois dans un camp de prisonniers. Qu'en est-il de ceux qui ont été emprisonnés en Allemagne? Ils n'ont pas eu la vie facile, nous le savons, mais ils relevaient de la Convention de Genève. Ils ont donc été assez bien traités. On n'en a pas fait des forçats. Une commission qui s'est penchée sur la question a jugé que les prisonniers de guerre qui ont été «en taule» si j'ose dire ont subi des effets à long terme tels que le gouvernement devrait leur accorder une indemnité. Toutefois, ces effets n'ont pas été précisés. Aujourd'hui, nous savons ce qu'est le syndrome de stress post-traumatique, mais ce n'était pas le cas il y a cinq ans. Le gouvernement a stipulé que celui qui avait été emprisonné en Allemagne pendant deux mois n'a droit à rien. Celui qui a passé neuf mois dans la même prison a droit à une pension de 15 p. 100. On juge en général que l'écart est trop grand.

Ce problème n'est pas énorme comparé à tous les autres qui nous assaillent, à moins d'être prisonnier de guerre.

Le sénateur Atkins: Je suppose que vous avez contribué énormément à la préparation du rapport du sénateur Phillips intitulé «Relever la barre»?

M. Chadderton: Je l'espère, monsieur.

Le sénateur Atkins: Que vaut ce rapport aujourd'hui à votre avis?

M. Chadderton: La réunion la plus importante que j'ai eue avec le comité est celle où nous avons parlé des lits de soins de longue durée. Nous avons également parlé de «l'ancien combattant fantôme», une expression dont le comité a longuement discuté. L'ancien combattant fantôme a servi à l'étranger pendant quatre ans, et à l'époque ne présentait aucun symptôme. Il ne touchait pas de pension et ne souffrait d'aucune invalidité ouvrant droit à pension. Il était en mesure de gagner sa vie. Or, cet ancien combattant est aujourd'hui âgé de 84 ans et il a besoin d'un lit de soins de longue durée.

Nous l'avons appelé «ancien combattant fantôme» en raison d'une question posée par le sénateur Pépin. En fait, personne ne sait vraiment combien ils sont dans ce cas, mais nous savons qu'ils existent. Nous savons que la liste d'attente compte entre 300 et 400 noms. L'âge moyen est de 79 ans. D'ici trois à quatre ans l'ancien combattant fantôme qui a servi son pays au sein du Black Watch ou du Bomber Command, ou encore dans la marine ou la marine marchande, dira que le moment est venu où il a besoin que son pays lui fournisse ces soins à long terme, mais ce dernier l'aura abandonné.

Le sénateur Atkins: Dans l'ensemble, le rapport est-il toujours d'actualité?

M. Chadderton: Ce rapport renfermait bon nombre d'excellentes recommandations. En février dernier, j'ai visité pratiquement d'un bout à l'autre l'hôpital de Sunnybrook. Je n'ai entendu aucune plainte. La nourriture et les services infirmiers s'étaient nettement améliorés et, pour ma part, je pense que c'est entièrement dû à l'intervention du sous-comité du Sénat. Avant que le sénateur Phillips et son comité se rendent dans les hôpitaux et mettent à jour tous ces problèmes, il y avait un certain laisser-aller. Les repas étaient réchauffés et la nourriture était exécrable. Il y avait un manque de soins. Le comité a tout changé à cet égard.

Le sénateur Atkins: Combien de recommandations a-t-on mises en vigueur?

M. Chadderton: Lorsque j'ai examiné le mandat de votre comité, j'ai compris que je ne pourrais traiter que des faits saillants ce matin. Je pourrais en tout cas déposer un rapport vous indiquant quelles recommandations étaient excellentes, lesquelles n'ont pas pu être mises en oeuvre, etc. C'est très facile à faire.

Le président: Nous avons demandé au ministère des Affaires des anciens combattants de nous présenter un état de la situation sur ce rapport. Lorsque nous l'aurons reçu, ce qui ne saurait tarder, du moins nous l'espérons, nous vous le ferons parvenir.

M. Chadderton: Entendu.

Le président: En fait nous l'avons reçu hier. C'est un petit secret que j'espérais garder jusqu'à la fin de la réunion. Nous distribuerons le document plus tard.

Le sénateur Wiebe: Ma province de la Saskatchewan semble consacrer beaucoup d'efforts et de ressources aux soins à domicile. Vous avez dit plus tôt que les services aux personnes de marque, les trois projets pilotes sur les soins à domicile, ne répondent pas à vos attentes. À quels genres de problèmes vous heurtez-vous?

M. Chadderton: La preuve, c'est que la liste d'attente n'a pas du tout diminué. À Perley-Rideau, ici à Ottawa, la liste d'attente comptait environ 220 noms il y a deux ans et elle est toujours la même aujourd'hui. C'est une bonne chose d'offrir ces services à ces personnes, mais ce n'est pas une solution à long terme. La majorité d'entre elles ont déjà un certificat médical affirmant qu'elles ont besoin de soins de longue durée. Les retirer de la liste d'attente et leur offrir des soins à domicile est une bonne chose, cela ne fait aucun doute, mais ce n'est pas une solution durable.

Le sénateur Wiebe: Les soins à domicile que reçoivent ces personnes sont-ils excellents?

M. Chadderton: Oui, tout à fait.

Le président: Nous devons pour le moment mettre un terme à cette intéressante discussion. Merci, monsieur Chadderton et monsieur Forbes, d'avoir comparu devant le comité. Je suis sûr que nous aurons l'occasion de vous rencontrer à nouveau avant longtemps, que des élections aient lieu ou non. Les problèmes dont vous avez parlé ne vont pas disparaître d'eux-mêmes et notre comité désire faire tout son possible pour vous venir en aide.

M. Chadderton: La plupart des problèmes dont j'ai fait part au comité ont été portés à l'attention du ministère des Affaires des anciens combattants il y a plus d'un an. Nous savons qu'il lui est parfois difficile de mettre en oeuvre certaines solutions. Le ministère a certaines limites du point de vue législatif. Il faudra peut-être adopter une nouvelle législation. Le ministère fait du bon travail.

Le président: Je suis sûr que les responsables seront heureux de l'entendre. Je vous remercie.

Je demande maintenant au deuxième groupe de témoins de se présenter.

Nous devons avancer rapidement car il y a quelques questions d'ordre administratif à régler et il nous faut prévoir du temps pour les questions.

Nous avons reçu et lu la documentation que vous nous avez envoyée.

M. Robert Cassels, président du Bureau national, Les Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes au Canada: Comme vous l'avez lu dans notre mémoire, où nous donnons notre avis sur les soins de santé et les prestations auxquels ont accès tous les anciens combattants, nos préoccupations actuelles portent principalement sur les anciens combattants en centres hospitaliers de longue durée, administrés par les provinces et sur le rôle du ministère des Affaires des anciens combattants en ce qui concerne la qualité de ces services. Le Bureau de services juridiques des pensions, les pensions et les anciens combattants des Forces canadiennes qui ont participé à des crises et à des conflits nationaux et mondiaux de l'époque moderne sont également des sujets de préoccupation dont nous traiterons dans le présent document. Voici un résumé de ce que souhaitent les Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes au Canada.

Tout d'abord, le ministère des Affaires des anciens combattants devrait établir un plan d'urgence pour le cas où un grand nombre d'anciens combattants admissibles feraient valeur leur droit à un lit d'accès en priorité. J'ai écouté ce qu'a dit M. Chadderton qui a abordé bon nombre de points soulevés dans notre mémoire. M. Chadderton et moi en avons parlé à de nombreuses reprises.

En second lieu, le ministère devrait répondre aux besoins des anciens combattants en augmentant l'accès aux services de soins infirmiers dans les établissements de soins actifs et de soins de longue durée et, s'il y a lieu, indemniser les dispensateurs de soins bénévoles sous une forme ou sous une autre.

Troisièmement, le ministère devrait surveiller la qualité des soins dispensés aux anciens combattants dans les établissements de soins de longue durée en faisant des visites fréquentes, non annoncées, pour évaluer les services en fonction de normes de soins.

Quatrièmement, le ministère devrait adopter le programme de base comme norme de soins nationale pour les établissements de soins aigus et de longue durée accueillant des anciens combattants.

Cinquièmement, le ministère devrait désigner des membres de son personnel pour jouer le rôle de défenseurs des anciens combattants patients d'établissements de soins de longue durée qui n'ont personne pour défendre leurs intérêts.

Sixièmement, le ministère devrait augmenter immédiatement les ressources du Bureau de services juridiques des pensions afin qu'il dispose de suffisamment d'agents du contentieux pour régler les demandes.

Septièmement, le Bureau de services juridiques des pensions devrait redevenir une entité indépendante distincte.

Huitièmement, le Sous-comité des anciens combattants devrait donner suite aux recommandations que son prédécesseur a formulées dans son rapport de février 1999 intitulé «Relever la barre» en ce qui concerne les pensions et la possibilité d'une discrimination systémique dans l'octroi des pensions de la part du ministère et du Tribunal des anciens combattants (révision et appel).

M. Ambroziak, qui participe à de nombreux comités dans la région d'Ottawa ainsi qu'au comité gérontologique, répondra à certaines de vos questions.

Nous avons joint à notre mémoire un document sur le personnel des forces armées. Le ministère envisage de constituer un conseil consultatif des Forces canadiennes qui doit entrer en activité les 1er et 2 novembre. Ce conseil s'occupe des membres des forces armées. Entre les forces armées et les Affaires des anciens combattants, on essaie de voir qui doit s'occuper des anciens combattants et les modalités de ces services. Le comité doit se réunir pour la première fois les 1er et 2 novembre prochains à Charlottetown, et je serai présent. Par la suite, j'aurai sans doute une meilleure idée de ses intentions et de la façon dont le gouvernement compte charger ce comité de s'occuper du personnel des forces armées actuellement en service, ainsi que des membres qui ont été blessés dans des zones de service spécial, sur terre et en mer.

M. Peter Ambroziak, secrétaire-trésorier national, Les Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes au Canada: Nous avons essayé de faire ressortir les points saillants du rapport Phillips, intitulé «Relever la barre»; ce rapport très exhaustif a en tout cas «réveillé» le ministère et lui a servi de guide. Certaines des recommandations n'ont pas été encore mises en vigueur. Vous avez dit que vous aimeriez savoir où en sont les choses à ce sujet. Certaines recommandations exigent un travail continu. Ce ne sont pas des solutions uniques aux problèmes, surtout pour ce qui est du contrôle de la qualité des soins et des normes appliquées.

Nous avons discuté de la question des normes avec le ministère. Ce dernier a réagi, mais ce qu'il propose ne permettra pas, à notre avis, aux anciens combattants patients d'établissements de soins de longue durée d'obtenir les services qu'ils méritent. Depuis plusieurs années, nous harcelons le ministère au sujet de cette question des normes et il hésite à s'y attaquer vraiment pour toute une foule de raisons. Je crois que les fonctionnaires sont les mieux placés pour expliquer leur réticence, mais je peux affirmer qu'ils n'ont pas vraiment agi.

Le président: S'agit-il simplement de normes médicales ou d'autres normes également?

M. Ambroziak: Il s'agit des normes relatives aux soins dispensés aux anciens combattants en ce qui a trait à la nourriture, aux chambres et à toutes sortes de choses. Nous nous occupons de tous les services que l'on s'attend à obtenir pour son oncle ou son grand-père lorsqu'il est patient de ce genre d'établissement.

M. Cassels: M. Chadderton a parlé de sa visite à l'hôpital de Sunnybrook. Nous sommes également allés dans cet hôpital en compagnie du président provincial de l'Ontario, qui passe beaucoup de temps dans cette région. Par le biais du Commandement ontarien de l'armée, de la marine et des forces aériennes, les unités de Toronto passent beaucoup de temps à Sunnybrook pour organiser pour eux des jeux de courses de chevaux, des barbecues, ou autres. Nous avons donné des télévisions, des réfrigérateurs et des fours à micro-ondes. Ils ont fait des dons allant de 8 000 à 10 000 $ pour l'achat de certains articles pour les anciens combattants hospitalisés à Sunnybrook et à Parkwood, à London. Ils passent beaucoup de temps à Sunnybrook. Nous avons commencé vers 8 h 30 ou 9 heures du matin et y sommes restés jusqu'à 16 heures. Nous avons visité l'hôpital au complet. Nous sommes allés dans les salles où ont lieu les activités artisanales et nous leur avons parlé, ainsi qu'au personnel. Nous avons parlé aux responsables des affaires des anciens combattants et ensuite au personnel de Sunnybrook qui dirige l'aile K de l'hôpital. Nous avons déjeuné avec le président du comité qui s'occupe des questions concernant les anciens combattants. Il rencontre les responsables du ministère en cas de problèmes. Nous avons déjeuné avec des anciens combattants et le repas était excellent. Les soins qu'ils reçoivent sont très bons. Ils étaient installés dans l'une des nouvelles ailes qui a été modernisée et les chambres étaient très belles. Aucun des anciens combattants ou des patients de cet hôpital que nous avons rencontrés lors de notre visite n'a formulé la moindre plainte.

Cela s'est passé après la publication du rapport du sénateur Phillips et les choses avaient changé. On nous a dit que la situation avait bien changé, et comme l'a déclaré M. Chadderton, c'est en grande partie dû au rapport du comité du Sénat, qui a recommandé que certaines mesures d'amélioration soient prises, ce qui a été fait. Je ne dis pas qu'il en va de même dans tous les hôpitaux du pays, car je ne les ai pas tous visités, mais il y a une nette amélioration à l'hôpital de Sunnybrook.

Le sénateur Atkins: Vous nous dites que notre comité peut avoir une certaine incidence sur toutes les décisions relatives aux mesures d'aide à l'intention des anciens combattants?

M. Cassels: Oui. Vous avez l'occasion d'étudier la question et vous pouvez leur en parler, tout comme nous le faisons. Ils semblent vous écouter plus que nous. C'est parfois l'impression que nous avons.

Le sénateur Atkins: Mais il faut également que les fonctionnaires écoutent.

M. Cassels: Oui.

Le sénateur Atkins: Sans vouloir critiquer les précédents ministres des Affaires des anciens combattants, j'ai l'impression que le ministre actuel a mieux réussi que les autres à obtenir des fonds du gouvernement. Est-ce le cas?

M. Cassels: J'ai eu l'occasion de travailler avec M. Baker depuis qu'il détient le portefeuille des Affaires des anciens combattants, car j'étais le premier vice-président de l'armée et de la marine. Étant de l'Ontario, on m'envoyait à Ottawa pour siéger au comité. J'ai fait partie du Comité sur la marine marchande, ainsi que Cliff, Chuck Murphy et Larry Murray. M. Baker m'a semblé être un excellent ministre. Lorsqu'il vous dit qu'il va faire quelque chose, vous pouvez le croire. Il a demandé à Larry Murray de discuter avec Cliff, Chuck Murphy et moi-même pour essayer de trouver une solution pour la marine marchande. Le problème existait depuis 1990. Nous avons eu de nombreuses réunions à ce sujet. Chuck, Cliff et moi avons décidé qu'il valait mieux nous enfermer dans une salle et ne pas en ressortir tant que nous ne serions pas d'accord. Le ministre nous a alors dit que lorsque nous nous serions mis d'accord, nous devrions aller le trouver et qu'il ferait en sorte d'y donner suite. C'est ce qu'il a fait. Les mesures sont toujours en cours et, selon certaines rumeurs, il faudrait demander des fonds supplémentaires.

Lorsque ce ministre vous dit qu'il va faire quelque chose, il le fait.

J'ai constaté que les autres ministres vous disent qu'ils vont essayer, mais dès qu'ils tombent sur un os, c'est remis aux calendes grecques.

Le sénateur Atkins: Au fur et à mesure que le temps passe depuis que nos forces ont participé à ces conflits, trouvez-vous que l'on apprécie moins la contribution des anciens combattants?

M. Cassels: Je ne crois pas, non. On fait actuellement des efforts pour informer les élèves canadiens. Le ministère a mis des vidéos à la disposition des conseils scolaires ainsi qu'à diverses associations d'anciens combattants qui les transmettent aux conseils scolaires, pour que les enfants en sachent davantage et découvrent ce que les Canadiens ont fait par le passé pour défendre la liberté dont nous jouissons aujourd'hui ici.

Le sénateur Pépin: Je suis heureuse d'apprendre qu'il y a des vidéos pour les écoles parce que c'est un sujet extrêmement important pour les enfants.

Vous avez dit que vous donnez des fours à micro-ondes et des frigos. Donnez-vous aussi des ordinateurs? Ce serait excellent pour les anciens combattants, à mon avis.

M. Cassels: Oui, j'avais oublié, désolé.

Le sénateur Pépin: Je sais où on peut en obtenir. Si on peut en obtenir pour les jeunes et les écoles, on devrait essayer d'en faire autant pour les anciens combattants.

M. Cassels: Oui. Un de nos camarades qui n'a plus de bras peut se servir d'un ordinateur avec un crayon dans la bouche.

Le sénateur Pépin: Pour ceux qui sont presque invalides, ce serait merveilleux. Ils auraient moins le sentiment d'être isolés.

Le président: Concernant vos recommandations au sujet du Bureau de services juridiques des pensions, est-ce à dire que, d'après vous, celui-ci serait plus efficace ou énergique dans sa défense des droits des anciens combattants s'il redevenait une entité distincte?

M. Cassels: Pas plus tard qu'hier, je lisais une lettre de Ron Beal, président de l'Association des vétérans militaires de Dieppe. Il parlait d'un des membres de l'association blessé pendant qu'il était prisonnier de guerre -- une balle s'était logée à un huitième de pouce de sa colonne. Il revenait à peine d'une audience en révision. Il a toutes sortes de problèmes. Il n'y a aucun dossier parce que personne n'a été témoin de la fois où il a été frappé par une crosse de carabine ou subi d'autres mauvais traitements. Il n'y a aucun dossier. Il a donc essuyé un troisième refus de suite. Il venait de voir la même personne que la fois précédente. J'ai essayé, et j'ai constaté qu'il n'y a aucun moyen de lui faire changer d'avis. Il lui a déjà répondu non. Il faut présenter les mêmes éléments à celui qui vous a déjà dit non. Il refuse de bouger. Selon nous, il devrait y avoir une entité distincte des Affaires des anciens combattants pour effectuer une révision à la suite d'un appel.

Le président: Savez-vous d'où vient le changement? Pourquoi il n'est plus indépendant? Des justifications ont-elles été données? Quand cela s'est-il passé?

M. Cassels: Lors de notre comparution devant le Sous-comité du Sénat au début des années 90, nous avons recommandé que le Bureau redevienne une entité distincte. C'est arrivé avant que je devienne président, entre 1990 et 1992.

Le président: Dans un mémoire, il a été recommandé que s'il y avait un doute, l'affaire devrait être tranchée en faveur de l'ancien combattant.

M. Cassels: Oui, une disposition sur le bénéfice du doute accordé au demandeur. Cela revient à ce dont je parlais. Le ministère nous dit souvent depuis dix ans que le bénéfice du doute ira au demandeur, à l'ancien combattant, mais ça ne semble pas être le cas. D'après tous les échos que nous entendons des anciens combattants qui font une demande -- et le principal cas est celui dont je viens de parler -- il ne semble pas que cela se fasse ainsi. Il présente à nouveau son cas à la même personne qui lui a dit non.

Cette personne s'est vu refuser le bénéfice du doute quand la première décision a été rendue. En appel, l'affaire sera entendue par les mêmes personnes. Ils diront non encore une fois parce que la même preuve sera présentée. S'il y avait une entité distincte, disons quelqu'un qui n'est pas un employé de la commission, peut-être pourrait-il dire: «Je comprends les épreuves que cet homme a traversées. Nous allons lui donner le bénéfice du doute». C'est ainsi que l'affaire devrait être traitée. Nous estimons qu'une entité distincte pourrait atteindre cet objectif.

Le sénateur Atkins: Si je me rappelle bien, monsieur le président, quand le projet de loi a été adopté, il y a eu tout un débat sur cette question au Sénat. Nous n'avons absolument pas réussi à leur faire changer d'idée.

Le président: Vous faites allusion à la disposition sur le bénéfice du doute?

Le sénateur Atkins: Oui, et la séparation des deux offices.

Le président: Peut-être est-il impossible de répondre à cette question, et c'est peut-être même une question que l'on ne devrait pas poser, et je ne veux nullement faire un procès d'intention à quiconque, mais compte tenu de l'affaire que vous venez de décrire, avez-vous l'impression que la personne a perdu sa cause par pur légalisme? Dans tout procès sur une affaire criminelle au Canada, le procureur doit prouver au-delà de tout doute que l'accusé a commis le crime qu'on lui reproche. À votre avis, la personne a-t-elle perdu sa cause parce qu'elle n'a pas réussi à prouver que la blessure avait été subie dans des circonstances donnant droit à pension; ou bien ne l'a-t-on pas crue?

M. Cassels: D'après ce qu'il a dit à Ron Beal, ils auraient dit que cela a quelque chose à voir avec l'âge et l'arthrite. Il refuse de retourner les voir pour dire: «La blessure initiale consistait en ceci ou cela et est à l'origine de tous les problèmes dont je souffre depuis». Il n'était jamais retourné voir la commission avant parce qu'il ne pensait pas avoir droit à quoi que ce soit. Quand le problème s'est manifesté, son médecin lui a dit: «Vous devriez vous renseigner pour savoir à quel traitement vous avez droit». Il est allé voir le médecin, qui lui a dit ce qu'il devait faire. Il a donc présenté une demande qui a été rejetée par la commission. J'ai écouté M. Beal donner sa version de ce qui est arrivé aux prisonniers de guerre, les vétérans de Dieppe. Il nous a raconté leur longue marche d'un bout à l'autre de l'Europe, enchaînés aux poignets et aux chevilles. S'ils ne marchaient pas assez vite, les soldats les poussaient à coup de crosses dans le dos. Un traitement pareil peut déclencher des problèmes de santé plus tard, en vieillissant. Ils n'en souffraient pas au moment de leur démobilisation, mais maintenant qu'ils sont octogénaires, ils souffrent de toutes sortes de maux et le ministère leur dit: «Ce qui vous serait arrivé n'est pas indiqué au dossier. Cela n'a pas été consigné quand vous avez été démobilisé». On enlève donc le bénéfice du doute à l'ancien combattant. Le médecin dit: «Oui, le problème remonte à cette blessure ancienne». Mais on l'envoie voir un autre médecin, qui déclare que c'est peut-être de l'arthrite. Il perd alors la pension ou les traitements auxquels il aurait eu droit pour cette pathologie. Il n'y a rien par écrit. Tout ce que nous avons, c'est la parole de l'ancien combattant. Il est le seul à pouvoir vous le raconter, parce qu'il était là; nous n'y étions pas.

Le sénateur Wiebe: Dans votre exposé, ainsi que lors de votre comparution précédente, j'ai entendu beaucoup d'inquiétudes au sujet des soins dispensés aux soldats qui ont servi outre-mer. Mais qu'en est-il de la personne qui a le même âge aujourd'hui et qui n'a pas servi outre-mer?

M. Cassels: Il ne devrait pas y avoir la moindre discrimination. Ils devraient tous être placés sur le même pied. Ils devraient recevoir le même traitement que les autres anciens combattants, parce qu'ils ont tous servi à la même époque.

Le sénateur Wiebe: Nous pouvons donc dire «Tous les anciens combattants»?

M. Cassels: Oui. À de nombreuses reprises, nous avons précisé dans nos mémoires «Service au Canada seulement». Cela a été accepté il y a deux ou trois ans, ou il y a peut-être un peu plus longtemps. Ils ont dit: «Oui, nous allons les englober dans le programme destiné aux anciens combattants et nous allons nous occuper d'eux au même titre que les autres personnes et les faire bénéficier des Services aux personnes de marque et de tout le reste».

Comme M. Chadderton l'a dit tout à l'heure, les Services aux personnes de marque sont très bien au début, mais si les anciens combattants ont besoin de soins de longue durée après la fin de ce programme, alors ils doivent avoir une certaine assurance que des services leur seront offerts à ce moment-là.

Dans le cadre des services aux personnes de marque, on s'occupe de l'ancien combattant pendant qu'il est à la maison. Nous étudions également le Programme pour l'autonomie des anciens combattants, parce que si l'ancien combattant meurt, sa veuve est rayée du programme après un an. Elle s'est occupée de lui pendant de longues années et voici que tout à coup, alors qu'elle est octogénaire, elle doit tondre elle-même la pelouse et s'occuper de toutes les tâches que le PAAC prenait en charge.

Le sénateur Wiebe: Je crois fermement que si nous devons dépenser de l'argent, ce devrait être pour des solutions durables et non pas à court terme. Ceux qui ont servi au cours des deux guerres mondiales et durant la guerre de Corée ne seront bientôt plus de ce monde, étant donné leur âge. Nous avons tendance à ne pas accorder suffisamment d'importance aux réservistes, qui sont de plus en plus appelés à servir dans le cadre de missions de maintien de la paix de l'ONU. J'ai le sentiment que si nous devons dépenser de l'argent à long terme, nous devons accorder aux réservistes les mêmes avantages. Qu'en pensez-vous? Ayant rencontré autant des réservistes que des soldats des forces régulières, je sais qu'il y a une certaine jalousie et une rivalité entre les deux. Y aurait-il un problème à accorder les mêmes avantages aux réservistes à l'avenir?

M. Cassels: Nous avons déclaré dans notre mémoire que les gens qui servent actuellement au sein des Forces canadiennes doivent être couverts d'une façon ou d'une autre. Nous y travaillons et le conseil consultatif des Forces canadiennes qui doit être mis sur pied se penchera sur la question. Les Forces canadiennes réduisent le nombre de militaires actifs et augmentent le nombre des réservistes. Ces derniers sont envoyés à l'étranger dans le cadre de missions de maintien de la paix. Si l'on envoie des gens à l'étranger pour s'occuper de telles missions, il faut leur donner la même couverture, parce qu'on leur demande de faire le même travail. Ils mettent leur vie en jeu, tout comme les soldats de la régulière qu'ils côtoient, même s'ils ne font pas partie des effectifs du service actif. Il faut donner aux réservistes la même couverture et les mêmes avantages parce qu'ils font le même travail.

Le sénateur Wiebe: Qu'en est-il du réserviste qui n'a pas l'occasion de servir dans une mission de maintien de la paix de l'ONU ou de l'OTAN, mais qui est appelé à servir au Canada, par exemple pendant la tempête de verglas ou les inondations au Manitoba? Faudra-t-il faire toutes sortes de distinctions, ou bien pouvons-nous tous les mettre dans la même catégorie et dire: «Vous êtes réserviste et à ce titre, vous êtes prêt à servir votre pays, que ce soit au Canada ou à l'étranger, et en raison de cet engagement, vous aurez droit à tels ou tels avantages»?

M. Cassels: Je dois convenir avec vous qu'ils devraient être inclus, parce que ces gens-là ont offert leurs services et se sont dit prêts à aller en mission. C'est la même chose que le «service au Canada seulement» pour l'ensemble des anciens combattants. Nous les avons couverts. Il faudrait couvrir les réservistes de la même manière.

Vous avez évoqué les effectifs des Forces canadiennes. Les sénateurs Meighen et Atkins et moi-même avons fait deux ou trois pèlerinages, par exemple l'année dernière, quand nous sommes allés en Italie. Nous étions accompagnés de militaires en service actif. Ils n'avaient pas 10 ans de service dans les forces armées, mais ils avaient trois ou quatre médailles pour avoir servi dans différents conflits. Ces jeunes gens, qui avaient probablement 23 ou 24 ans, ont déjà des médailles pour avoir servi au Kosovo, en Bosnie ou ailleurs, mais ils n'ont même pas 10 ans de service. Je trouve ça incroyable. Je l'ai particulièrement remarqué pendant le voyage en Italie parce que j'ai voyagé à bord de l'autobus à quelques reprises pour mieux les connaître. Chuck Murphy, qui était alors président de la Légion, et moi-même avons insisté pour nous déplacer à bord de l'autobus pour côtoyer les militaires actifs et les entendre raconter leurs histoires.

Il y avait un type qui s'était blessé à la jambe en faisant des manoeuvres. Sa jambe le faisait souffrir et il boitait. La marche forcée a aggravé sa blessure et il a dû rester derrière. Il était sur le point d'être libéré des forces armées parce qu'il n'était pas capable d'assumer ses fonctions, et il ne devait toucher aucune pension. Il était de 2RCR à Petawawa. C'était l'un des types qui avaient quatre médailles, mais pas de CD. Il n'avait pas servi 10 ans dans les Forces armées canadiennes, mais il avait déjà trois ou quatre médailles sur sa tunique pour avoir servi à l'étranger pour maintenir la paix, parce que cela fait partie des fonctions des Forces armées canadiennes. Quand on rencontre ces gens-là, qu'on constate ce qui leur arrive et qu'on les écoute raconter leur histoire, on comprend pourquoi on commence à mettre sur pied des comités comme le Comité consultatif des forces armées.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, le rapport du sénateur Phillips a débouché sur bien des choses, mais il reste encore beaucoup à faire. Je suis certain que vous l'avez lu et que vous y avez choisi des axes d'intervention.

Le sénateur Atkins: Quand on parle de soins à domicile, je suppose que beaucoup d'anciens combattants, si on leur donnait le choix, préféreraient bénéficier des services aux personnes de marque plutôt que d'être hospitalisés dans un établissement de soins prolongés?

M. Cassels: Je le pense. Je connais à Stratford deux ou trois personnes qui bénéficient de ce programme. Elles préfèrent rester à la maison. Autrement, il leur faudrait aller à l'hôpital Parkwood à London ou encore à Sunnybrook à Toronto, c'est-à-dire loin de leur famille. Stratford se trouve à une heure 25 minutes de Toronto ou à 45 minutes de London. Elles préfèrent rester chez elles dans le cadre de ce programme le plus longtemps possible.

Le sénateur Atkins: Cela coûte-t-il moins cher?

M. Cassels: J'incline à le croire, parce que le programme fournit des services au foyer. On paie quelqu'un pour tondre le gazon, pelleter la neige et faire le ménage. Je pense qu'on donne maintenant une somme annuelle pour payer ces divers travaux. Le montant semble suffisant pour certains, quoique d'autres ne sont pas de cet avis.

Le sénateur Wiebe: M. Chadderton a évoqué trois régions du pays où le service aux personnes de marque donne lieu à des projets pilotes. Savez-vous quelles sont ces régions?

M. Cassels: Non.

M. Ambroziak: Camp Hill à Halifax, Perley-Rideau à Ottawa et George Derby, je crois, en Colombie-Britannique. Ce sont les trois établissements qui avaient les plus longues listes d'attente. On a donc tenté de trouver une solution rapide en mettant à profit ce programme, permettant ainsi aux personnes visées de rester chez elles plus longtemps et de retarder l'éventualité de l'hospitalisation de longue durée.

Le sénateur Wiebe: Qui s'occupe de ces services aux personnes de marque?

M. Ambroziak: Le ministère des Affaires des anciens combattants.

Le sénateur Wiebe: Il serait utile que notre comité ait un rapport provisoire du ministère sur le fonctionnement de ce programme. Cela nous éclairerait peut-être en vue de formuler nos recommandations.

Le sénateur Pépin: J'ai une question sur les jeunes réservistes qui sont allés au Kosovo. Pouvons-nous consulter des dossiers pour voir si nous pouvons faire quelque chose pour eux? Il doit y avoir un dossier pour chacun d'eux.

M. Cassels: Oui. Il y a un dossier pour chaque personne qui sert dans la milice, tout comme dans le cas des forces régulières. Auparavant, c'était classé par numéro de service, mais c'est maintenant classé par numéro d'assurance sociale. On peut avoir accès à leurs dossiers en s'adressant au ministère de la Défense nationale et l'on y trouve tous les renseignements, depuis la date de leur enrôlement. On peut connaître toutes leurs affectations. S'il y a la moindre blessure ou quoi que ce soit de signalé, c'est au dossier. Par contre, si la personne en question n'a rien signalé et vient affirmer après coup que telle ou telle chose s'est passée, c'est là que nous avons des problèmes. Le ministère dit: «Vous ne l'avez pas signalé à l'époque». Supposons qu'au moment de son départ de la réserve, une personne déclare se sentir très bien. On lui demande si elle a subi des blessures et elle répond que non. Six ans plus tard, le ministère dira: «Vous n'avez pas signalé le moindre problème au moment de votre libération et nous ne pouvons donc rien faire pour vous». La loi stipule que si rien n'est consigné au dossier au moment du départ des forces armées, ou si le militaire ne l'a pas signalé au moment de son départ, alors on ne peut rien faire après coup.

Le sénateur Atkins: À vrai dire, après la Seconde Guerre mondiale, beaucoup d'anciens combattants voulaient tout simplement être démobilisés et s'en retourner chez eux.

Le sénateur Pépin: Oui, et il n'existe pas de dossiers.

Le président: S'agit-il maintenant d'un nouveau genre de blessures découlant de nos efforts dans le domaine du maintien de la paix? Je crois comprendre qu'il s'agit de blessures physiques semblables à ce qu'on a connu pendant les grandes guerres, mais y a-t-il des blessures qu'on ne reconnaissait pas à l'époque ou y a-t-il d'autres genres de blessures qu'on reconnaît maintenant mais qui ne sont pas physiques?

Si c'est le cas, est-ce qu'on les traite de façon adéquate, à votre avis?

M. Cassels: Récemment, on constate beaucoup de syndrome de stress post-traumatique. Cela va mener à beaucoup de controverse plus tard. On n'a pas eu beaucoup de cas jusqu'ici.

M. Ambroziak: Si l'on compare le vécu des casques bleus à celui des anciens combattants des Première et Seconde Guerres mondiales ainsi que de la guerre de Corée, beaucoup de soldats, de marins et d'aviateurs font maintenant leurs devoirs avec les mains attachées derrière le dos. Il y a les règles d'engagement et ainsi de suite. Ils doivent endurer plus d'abus. Ils doivent faire preuve d'une plus grande retenue que les anciens combattants d'une autre époque.

L'exemple classique serait le général Roméo D'Allaire. Il avait les mains liées. Il ne pouvait rien faire. Puisqu'il était bon soldat, il a fait ce qu'on lui a dit de faire. Malheureusement, c'est cela qui a mené à sa perte. On ne peut faire endurer ce genre de choses aux gens sans créer de problèmes, mais c'est ce qui arrive à nos gens qui servent sous l'égide des Nations Unies.

M. Cassels: Les soldats servent dans une région pendant six mois ou un an. Puis, parce qu'on manque de personnel au sein de nos forces armées, ces gens-là doivent partir ailleurs moins de six mois plus tard. Avant qu'ils puissent se réadapter à la vie de famille, ils doivent partir de nouveau.

Les jeunes gars des forces armées ont soulevé ce point. Ils veulent un répit de six mois, minimum, avant d'être appelés à servir ailleurs et endurer de nouveaux stress. Après un certain temps, ce stress marque tous ceux qui doivent l'endurer à répétition.

Le président: Merci beaucoup, messieurs Cassels et Ambroziak.

Passant maintenant aux travaux du comité, il nous faut une motion pour faire déposer les documents fournis par M. Cassels au nom des Anciens combattants de l'armée, de la marine et des forces aériennes au Canada à titre de pièces auprès du greffier du comité.

Le sénateur Atkins: J'en fais la proposition.

Le sénateur Pépin: Je l'appuie.

Le président: C'est d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté. Quelqu'un doit aussi proposer que la documentation remise par M. Chadderton du Conseil national des associations d'anciens combattants au Canada soit déposée comme pièce auprès du greffier du comité.

Le sénateur Pépin: J'en fais la proposition.

Le sénateur Wiebe: Je l'appuie.

Le président: D'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

La plupart des sénateurs ont eu l'occasion d'étudier le budget. Le total est de 23 000 $. Cela défraierait notre visite à Charlottetown. Il se pourrait que nous ne partions pas en novembre ou en décembre. Personne ne peut prédire ce genre de choses. S'il y a des élections, il faudra attendre la rentrée parlementaire et la reconstitution du comité.

Il faut donc une motion pour autoriser, en ma qualité de président, à présenter cette demande de budget au comité principal pour son approbation.

Le sénateur Pépin: J'en fais la proposition.

Le sénateur Wiebe: Je l'appuie.

Le président: C'est d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté.

Enfin, il y a quand même des bonnes nouvelles, comme je le disais tout à l'heure. Nous avons obtenu une réponse du ministère des Affaires des anciens combattants concernant les recommandations qui se trouvent dans «Relever la barre: Une nouvelle norme de santé pour les anciens combattants». Quelqu'un propose-t-il de déposer cette pièce auprès du greffier?

Le sénateur Pépin: J'en fais la proposition.

Le sénateur Wiebe: Je l'appuie.

Le président: C'est d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Adopté. Nous ferons parvenir un exemplaire de cette réponse du ministère à quiconque en fera la demande.

La séance est levée.


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