Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 14 - Témoignages
OTTAWA, le mercredi 13 mars 2002
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 18 h 07 pour examiner l'accessibilité, l'éventail et la prestation des services, les problèmes liés aux politiques et aux compétences, l'emploi et l'éducation, l'accès aux débouchés économiques, la participation et l'autonomisation des jeunes, et d'autres questions connexes.
Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Bienvenue, monsieur Richards. On me dit que vous avez effectué une étude en profondeur des Autochtones en milieu urbain, et je vous prie à nouveau de m'excuser puisque je ne l'ai pas lue encore.
Vous pouvez commencer votre exposé.
M. John Richards, professeur en administration des affaires, Université Simon Fraser: Honorables sénateurs, j'ai été politicien et je compatis avec vous. Aujourd'hui, je suis professeur. Dans l'exercice de ces deux métiers, nous péchons par prolixité lorsque nous avons la parole. J'aimerais pouvoir continuer pendant 50 minutes au moins, mais on m'a dit que si je dépassais les 15 minutes, ce serait déjà trop.
[Français]
Honorables sénateurs, je viens tout juste de témoigner lors d'une séance de comité de la Chambre des communes, et les membres du comité ont insisté pour recevoir ce document qui n'est pas traduit.
Je sais parler le français assez bien, toutefois je n'ai pas eu le temps de faire la traduction du document. Je veux bien vous distribuer ce document, mais ce n'est pas forcément nécessaire. Je le dis en français, pour ma défense. Je suis anglophone d'origine.
[Traduction]
Il y a 30 ans, à l'époque où je siégeais à l'Assemblée législative de la Saskatchewan, j'ai commencé à m'intéresser aux questions autochtones. J'en étais à mes premières expériences dans le domaine. Aujourd'hui, j'enseigne à l'Université Simon Fraser. Nous organisons en ce moment une excellente série de conférences. Je vais vous donner l'adresse du site Web de cette série.
Je collabore aussi avec l'Institut C.D. Howe. J'essaie de maintenir une conscience sociale au sein de l'organisme — je ne sais pas si j'y arrive —, et j'ai convaincu les membres de l'Institut que la question d'une politique en matière d'affaires autochtones était si urgente qu'ils doivent absolument se retrousser les manches collectivement et réfléchir à cette politique, même s'ils ont pignon sur rue à Bay Street.
Ainsi, la monographie dont vous parliez sera la première, je l'espère, d'une série de publications. Dans mon étude, il est question de la politique entourant les Autochtones en milieu urbain exclusivement. Je vais vous en parler pendant cinq ou 10 minutes.
Le deuxième document se penchera sur des questions de distribution du revenu, d'après les données du recensement de 1996. Nous avons mené une étude spéciale des Autochtones à partir du recensement de 1996: nous nous sommes penchés sur les données en comparant les Autochtones qui habitent sur la réserve et ceux qui habitent hors réserve; nous avons également analysé les données en fonction de la scolarité, de la province et de plusieurs autres facteurs. Je vais faire un bref survol du résumé de ces résultats.
Le troisième document portera, je l'espère, sur les Autochtones dans le système judiciaire.
Je me concentrerai sur trois thèmes: premièrement, les tendances migratoires et leurs conséquences; deuxièmement, le phénomène de la création de ghettos — parlons franchement — dans les villes de l'ouest du pays; et enfin, le pénible sujet de l'aide sociale.
Premièrement, le Canadien moyen n'a aucune idée de l'importance du mouvement migratoire des Autochtones vers les villes. Les statistiques en la matière sont complexes. En gros, d'après le recensement de 1996, tout près de la moitié de la population autochtone habitait dans les villes. Parmi ceux qui sont des Indiens de plein droit conformément à la Loi sur les Indiens, d'après les données officielles, 60 p. 100 environ habitent dans les réserves, et 40 p. 100, à l'extérieur des réserves, mais ces données ne sont pas très précises. Il est probable que nous constaterons, dans le nouveau recensement complété en 2001, que cette tendance à quitter la réserve augmente et que plus de la moitié de la population autochtone vit désormais à l'extérieur des réserves.
Les Autochtones en milieu urbain connaissent de graves problèmes, mais avant d'aller plus loin, j'insiste sur le fait que la situation est meilleure hors réserve qu'elle ne l'est dans les réserves si l'on se fonde sur des indicateurs sociaux reconnus. Globalement, le recensement de 1996 révèle que le revenu moyen des Autochtones hors réserve est plus élevé du tiers que celui des Autochtones vivant dans les réserves. Cela demeure vrai d'un niveau de scolarisation à l'autre et d'une province à l'autre. Il y a certaines différences. Nous pouvons nous attarder aux détails plus tard.
En ce qui concerne l'analyse de la situation scolaire, je mets l'accent, à l'instar de beaucoup d'autres, sur le problème de l'abandon des études secondaires. C'est M. Harvey Boston qui m'a aidé à ce chapitre. C'est un merveilleux cadre supérieur métis du gouvernement du Manitoba, et son dada, c'est vraiment de voir les étudiants terminer leurs études secondaires. M. Boston a également effectué des études statistiques spéciales pour le gouvernement du Manitoba. En bref, les deux tiers environ des Manitobains non autochtones ont complété leurs études secondaires. Vingt-cinq pour cent environ des Autochtones des réserves et 35 p. 100 environ des Autochtones vivant hors réserve ont complété leurs études secondaires. Quarante-cinq pour cent environ des Métis ont obtenu leur diplôme d'études secondaires. Ce sont les données pour le Manitoba, mais elles se ressemblent passablement d'un bout à l'autre du pays. J'ai en tête les statistiques pour le Manitoba, c'est pourquoi j'y reviens souvent.
Étant donné que les débouchés économiques sont dans les villes, ces tendances migratoires se maintiendront. Si nous réussissons, au cours de la prochaine décennie, à négocier des traités permettant le transfert de certains biens, il sera possible de créer de l'emploi. Dans ma province, bien sûr, il n'y a pas eu de traités. Je vous le dis sans détour, en tant qu'économiste, cette tendance migratoire est appelée à se poursuivre à long terme. C'est pourquoi il faut s'inquiéter beaucoup plus de la situation dans les villes. Le gouvernement fédéral se préoccupe beaucoup trop des Autochtones habitant dans les réserves. En partie, c'est une tendance naturelle puisque les Indiens sont du ressort fédéral.
En bonne partie, ce document s'articule autour d'une critique des provinces. Celles-ci, y compris la Saskatchewan, n'ont pas accordé suffisamment d'attention — loin de là — au phénomène des Autochtones en milieu urbain.
Deuxièmement, pour ceux d'entre vous qui sont autochtones ou encore originaires de l'ouest du Canada, ce qui se produit dans nos villes peut sembler élémentaire. Le problème est beaucoup plus grave dans l'Ouest à partir de Winnipeg qu'il ne l'est à l'est de Winnipeg. Selon les statistiques que l'on emploie, on constate que les Autochtones représentent de 12 à 15 p. 100 de la population du Manitoba et de la Saskatchewan. Ces proportions sont beaucoup plus importantes chez les jeunes parce qu'il y a une importante migration de sortie. Nous sommes conscients du phénomène aujourd'hui parce que le recensement fait état du déclin de la population en Saskatchewan et d'une population essentiellement stagnante au Manitoba.
Le mouvement vers les villes entraîne l'apparition de ghettos. Du point de vue statistique, les Américains se sont préoccupés énormément du phénomène, étant donné les difficultés qu'ils ont connues à Los Angeles et dans les grandes villes du nord des États-Unis. Mon collègue, M. Michael Hatfield, de Développement des ressources humaines Canada, a du mérite. Il affirme que, si nous établissons une correspondance approximative avec l'expérience américaine, nous pouvons définir un quartier «très pauvre» comme étant un secteur de recensement — soit de 5 000 à 7 000 personnes — où le taux de pauvreté familiale s'élève à plus du double de la moyenne nationale.
Les statistiques que je vous ai distribuées révèlent dans quelle proportion les habitants de la ville vivent dans de tels quartiers. Dans les villes de l'Ouest, 8 p. 100 environ de la population non autochtone des grands centres urbains comme Winnipeg, Regina, Saskatoon, Calgary, Edmonton et Vancouver, habitent dans des quartiers qui sont «très pauvres» d'après ces critères.
La distribution de la population autochtone est très différente. Globalement, le tiers des Autochtones environ, si l'on se fonde sur le critère de l'identité, vit dans de tels quartiers. De la population d'origine mixte — c'est-à-dire ceux qui, du point de vue ethnique, sont en partie autochtones et en partie non autochtones —, le sixième environ habite de tels quartiers. C'est le double de la proportion des non-Autochtones.
Ce sont les Indiens d'origine, avec un pourcentage de 40 p. 100, qui représentent de loin la proportion la plus importante à ce chapitre. Winnipeg représente le pôle extrême de cette tendance, avec les deux tiers des Indiens d'origine habitant dans des quartiers qui sont jugés très pauvres selon cette définition.
Et pourtant, la majorité de la population dans ces quartiers très pauvres est non autochtone. Toutefois, nous assistons à une migration très importante dans l'ouest du Canada. Les gens vont et viennent de la réserve à la ville. Souvent, on peut dire qu'ils vont de Charybde en Scylla parce que la qualité de vie est peut-être légèrement meilleure dans le nord de Winnipeg que dans la réserve du nord du Manitoba ou de la Saskatchewan, mais ce n'est guère mieux. Conséquemment, après six mois à Winnipeg, la famille décide de faire une nouvelle tentative dans la réserve.
Je peux aussi vous citer des statistiques sur la mobilité. On note une très grande mobilité des gens habitant dans les quartiers pauvres et des Autochtones habitant dans ces quartiers. Ces derniers sont beaucoup plus mobiles que les non- Autochtones, et nous pouvons présumer que cela nuit à l'instruction des enfants. L'un des témoins qui comparaissaient devant les députés cet après-midi est une femme chargée de l'administration des écoles de quartiers défavorisés de Winnipeg. Elle est revenue constamment sur le thème de la difficulté qu'éprouvent les jeunes à terminer leurs études secondaires lorsqu'ils déménagent constamment. Que pouvons-nous faire? Je ne prétends pas avoir la formule magique.
[Français]
Pour vous qui parlez et lisez le français je vous suggère de lire ce livre. Cela ne concerne pas spécifiquement les problèmes des Autochtones mais en quelque sorte, les problèmes sont les mêmes pour ceux qui immigrent au Canada. Que faire? Comment intégrer les Vietnamiens à Vancouver, les Jamaïquains à Toronto et les Haïtiens à Montréal?
[Traduction]
Dans un sens, la migration chez les Autochtones est semblable. Les différences culturelles entre une réserve du nord de la Saskatchewan et Regina sont probablement plus marquées que celles que rencontre un paysan qui déménage du Pendjab à Vancouver pour y devenir chauffeur de taxi, et pourtant, nous n'en avons pas fait assez pour créer un système scolaire accueillant et adapté.
Allan Blakeney, qui m'a beaucoup appris au sujet des Autochtones, est un homme qui a beaucoup de mérite. Bien avant que l'on n'amorce une réflexion globale sur les questions d'autonomie gouvernementale et d'instruction des Autochtones, il se préoccupait déjà vivement de ces questions au début des années 70, en sa qualité de premier ministre.
Il soutient que nous sommes de nature pragmatique au Canada. Nous ne sommes pas comme les Français, d'une certaine façon. Nous n'insistons pas pour avoir un système scolaire jacobin qui soit le même de Lille à Marseille, en vertu duquel tout le monde reçoit la même leçon sur Louis XIV le 8 octobre. Nous sommes d'une grande souplesse. Nous avons des écoles de langue française et de langue anglaise. Il y a des moments de l'histoire où nous avons été divisés par nos différentes fois, aussi avons-nous accueilli l'idée d'écoles publiques confessionnelles. Qu'il s'agisse d'un système scolaire officiellement démarqué, ou d'écoles expérimentales dans le cadre du système scolaire public, il nous faut expérimenter beaucoup plus dans les villes, et il nous faut des écoles qui mettent l'accent sur la culture et l'histoire autochtones.
Les normes sont importantes. Je ne veux pas que les étudiants de ces écoles soient exemptés des cours obligatoires d'algèbre de 10e année, aussi ennuyeux soient-ils. Je veux des écoles où les anciens jouent un rôle, où les enfants autochtones peuvent tirer une fierté de leur patrimoine, où l'on accorde beaucoup d'attention et l'on crée une grande fierté. Les expériences tentées dans les quartiers défavorisés de Winnipeg, dans les académies à Edmonton, dans mon ancienne école secondaire à Saskatoon, qui est aujourd'hui une école de quartier défavorisé centrée sur les études autochtones, sont toutes valables. Honorables sénateurs, vous pouvez pousser le gouvernement fédéral à entreprendre davantage de projets pilotes de ce genre.
Il y a des problèmes indéniables. D'aucuns s'y objecteront, soutenant que cela ne fera que diviser nos races davantage. Toutefois, au fil des ans, le système scolaire — en particulier dans l'ouest du pays — s'est avéré un moyen d'intégrer les Ukrainiens, les Anglais, les Islandais et tous ceux qui sont venus s'établir dans l'ouest du Canada. C'était un geste important. Les résultats justifient l'expérience.
Nous devons encourager les parents autochtones à participer davantage à la vie de leurs enfants. À défaut de cela, les taux d'échec scolaire au niveau secondaire demeureront déplorables. La situation est meilleure dans les villes que dans les réserves, mais les taux d'échec y sont néanmoins intolérables.
Le sujet le plus difficile à aborder est l'aide sociale. À un certain niveau, le Canada a 20 ans de retard sur les États- Unis. Dans les années 50 et 60, les États-Unis ont éliminé la ségrégation officielle. On a reconnu les libertés fondamentales des Noirs, et on a créé une panoplie d'excellents programmes sociaux au début des années 60, conçus pour éliminer les effets historiques de la ségrégation américaine. Au cours des 20 dernières années, le Canada a entrepris une initiative semblable: il a tenté de réparer par voie juridique les torts du passé en éliminant les pensionnats, et plus précisément en favorisant l'égalité et la participation des Autochtones dans de nombreux aspects de notre vie.
Aux États-Unis, au cours des 20 dernières années, on a vu se dessiner une dure réalité de dépendance à l'aide sociale dans les ghettos. La dimension raciale du problème est incontournable. On ne peut discuter de la question de l'aide sociale, aux États-Unis, sans parler de race.
Les Américains bien pensants en sont venus à la conclusion que l'aide sociale doit s'accompagner d'exigences fermes en matière de travail et de formation. À l'échelle symbolique, le jalon le plus significatif est l'élimination, par Bill Clinton en 1996, de l'aide aux familles avec enfants à charge. Cette décision a été mise en oeuvre après 15 ans d'expérimentation intensive dans certains États qui ont fait parler d'eux pour cette raison.
Je ne veux pas livrer un message d'idéologie républicaine, mais il est intéressant de noter que Tommy Thompson, le gouverneur républicain de l'État du Wisconsin, qui est aujourd'hui secrétaire de l'Intérieur, a travaillé en collaboration avec des universitaires d'idéologies libérales de l'Université du Wisconsin pour élaborer les premiers projets de travail obligatoire. Le Minnesota et la Californie sont au nombre des États qui ont mis en oeuvre un tel programme, bien que certains l'ont fait de façon inefficace.
Au Canada, nous n'avons pas encore appris cette leçon. Dans les réserves, la dépendance envers le bien-être social est très forte et n'a pas évolué depuis 15 ans. En moyenne, plus de 40 p. 100 des personnes des réserves dépendent de l'aide sociale. Dans les petites réserves privées de débouchés économiques, cette situation ne devrait pas changer dans un avenir prévisible. Il importe également de comprendre que dans l'Ouest canadien, la clientèle hors réserve du bien- être social est autochtone dans une proportion d'un tiers à plus de la moitié. En Saskatchewan, les fonctionnaires estiment que cette proportion est de 60 p. 100. Celle des enfants appréhendés est de 80 p. 100. Par conséquent, la politique d'aide sociale est intimement liée à la politique autochtone.
L'Alberta est la province qui a pris les mesures les plus radicales à l'initiative de Michael Cardinal. Elle a limité considérablement l'accès à l'aide sociale pour les jeunes et les personnes réputées aptes à l'emploi. Les tableaux chronologiques par province montrent à quel point l'Alberta s'est écartée de la norme.
C'est là un sujet controversé, mais il faut l'aborder si nous voulons être honnêtes. Les cycles de dépendance intergénérationnelle au bien-être social, que ce soit dans les quartiers urbains noirs du sud de Chicago ou dans le quartier nord de Winnipeg, ont un effet destructeur au plan social. Que peut-on y faire? Selon le message conservateur, on peut, pour parler crûment, rendre l'accès à l'aide sociale plus difficile pour les personnes aptes à l'emploi. On peut aussi améliorer la formation. Enfin, on peut aider les jeunes à faire des études secondaires complètes et mettre en oeuvre des programmes d'incitation au travail.
J'ai participé à des programmes de ce genre en Saskatchewan. Il existe un programme modeste et intéressant qui accorde un supplément financier important aux familles à faible revenu avec enfants; ce programme n'est guère différent du programme national de prestation pour enfants. C'est un supplément salarial. La personne qui travaille à temps partiel dans un dépanneur pour 600 $ reçoit au bout de trois semaines un supplément de 30 p. 100 qui est versé à son compte de crédit union.
En résumé, nous constatons un fort mouvement de migration vers les villes. Le gouvernement fédéral est coupable d'avoir trop axé sa politique sur la situation dans les réserves. Il ne faut pas croire pour autant que cette situation ou que les négociations de traités sont des questions sans importance. Néanmoins, la réalité urbaine n'a pas été suffisamment prise en compte.
Par ailleurs, je reproche aux provinces, en particulier aux quatre provinces de l'Ouest, de ne pas avoir suffisamment assumé leurs responsabilités pour assurer le succès scolaire des Autochtones qui ont choisi de venir en ville.
Deuxièmement, dans ce contexte, nous sommes en train de créer, en particulier dans l'Ouest, des communautés semblables à des ghettos comportant des proportions anormalement élevées d'Autochtones. Les syndromes des quartiers de ce genre sont préjudiciables aux enfants.
Troisièmement, on ne traite pas honnêtement le sujet si on écarte la discussion sur l'aide sociale, même si c'est un sujet pénible et difficile à traiter.
La présidente Merci, c'était très intéressant. Je faisais partie du tribunal d'appel lorsque Mike Cardinal a apporté tous ces changements. Il est toujours très difficile d'aborder ces questions intergénérationnelles.
Le sénateur Pearson: Votre exposé était intéressant et clair; un vrai plaisir.
Toutes ces questions sont interdépendantes. Je voudrais vous interroger sur l'aide sociale; je sais que c'est une question délicate. Les Américains semblent avoir compris certaines choses et ils peuvent prétendre que chez eux le nombre de cas problèmes a diminué, mais des études ont montré ce qu'il en coûte à l'enfant lorsque sa mère assume deux postes de travail et qu'il reste seul.
Si l'on regarde cette problématique, il faut envisager de donner des moyens d'intervention à ceux qui s'occupent des enfants. Si nous étions prêts à financer davantage les garderies et les services du même genre, on constaterait peut-être un plus grand désir de trouver un emploi chez les femmes autochtones. Si on veut les faire travailler, il faut au moins leur permettre de s'acquitter positivement de leurs obligations parentales au lieu de les amener à délaisser leurs propres enfants pour s'occuper de ceux des autres, comme on le constate souvent.
J'aimerais savoir si vous avez recueilli de l'information dans ce domaine à l'occasion de vos études.
M. Richards: Je vais répondre brièvement, même si je ne peux prétendre donner une réponse satisfaisante.
Grâce à leurs crédits et à leur temps de recherche, les universitaires peuvent constituer des groupes pouvant atteindre 25 000 familles et suivre leur évolution pendant une génération. Je ne l'ai pas fait personnellement, mais je signale simplement qu'on fait ce genre de recherche.
Si le sujet vous intéresse, je me ferai un plaisir de vous indiquer des études qui me semblent crédibles. L'une des meilleures institutions qui étudient la pauvreté est l'Institut de recherche sur la pauvreté de l'Université du Wisconsin, où Haveman et Wolfe se sont fait connaître aux États-Unis pour ce genre de travail statistique intensif sur les conséquences pour les enfants du milieu social et des décisions prises par les parents. On peut difficilement séparer ces deux éléments.
Beaucoup de facteurs entrent en compte: le quartier, le revenu, la famille mono ou biparentale. Pour autant qu'on puisse la mesurer, la qualité des services de garderie est importante. Ces études indiquent également que le travail est un facteur déterminant. Dans la mesure où elle peut travailler, même une mère célibataire désavantagée, habitant par exemple un quartier défavorisé de Milwaukee, a une plus grande chance de voir ses enfants échapper à la dépendance au bien-être social ou aux grossesses non désirées pendant l'adolescence.
Le sénateur Pearson: Je suis d'accord avec vous, mais ce n'est pas de cela que je voulais parler.
M. Richards: Vous voulez sans doute dire que d'autres facteurs interviennent.
Le sénateur Pearson: Je veux dire qu'il faut leur offrir davantage d'emplois. Notre étude sur les mères qui travaillent au Nouveau-Brunswick et en Colombie-Britannique a fait apparaître les effets positifs du travail.
M. Richards: Permettez-moi de faire l'économiste, quitte à vous faire mourir d'ennui. Vous parlez du projet d'autosuffisance au Nouveau-Brunswick et en Colombie-Britannique. L'expérience portait sur environ 3 000 personnes dans chaque province. On a considéré que si ces personnes travaillaient au moins 30 heures par semaine, elles obtiendraient un supplément de salaire important, dont la moitié serait récupéré sur la tranche de rémunération supplémentaire. Voilà le principe de l'étude.
Le principe n'était pas tout à fait identique dans les deux provinces. En Colombie-Britannique, ce supplément cessait d'être versé au-delà d'un salaire annuel de 35 000 $.
Le problème, c'est que la formule avait été conçue au début des années 90, avant le Programme de la prestation nationale pour enfants. Une mère célibataire participante de Colombie-Britannique qui gagne 20 000 $ a la possibilité de gagner 100 $ de plus en faisant des heures supplémentaires au bureau. Elle risque de perdre plus de 100 $ dans le cadre du programme d'autosuffisance. Elle va d'abord en perdre la moitié, et il ne lui restera que 50 $. Ensuite, elle devra acquitter l'impôt sur le revenu et les primes d'assurance-emploi. De surcroît, l'État va récupérer les prestations pour enfants.
En Colombie-Britannique, nous avons amélioré le programme des prestations pour enfants; ainsi, la personne qui gagne 100 $ de plus est encore pénalisée davantage si l'on ajoute la récupération du programme d'autosuffisance, la récupération des prestations pour enfants et les impôts.
Le sénateur Pearson: Il n'y a pas eu de rajustements périodiques?
M. Richards: Posez-leur la question. Je crois que c'est le talon d'Achille du programme des prestations pour enfants, du programme d'autosuffisance et de tous les programmes très ciblés.
Les programmes qui visent les plus démunis ont inévitablement pour conséquence de soumettre ceux qui sont un peu moins pauvres aux taux d'imposition proportionnellement les plus élevés au Canada. La solution au problème consisterait à supprimer le programme des prestations pour enfants, ce que personne ne saurait préconiser, ou à en étendre les prestations à la classe moyenne. Par ailleurs, ces programmes ne devraient pas comporter de récupération. Ils devraient permettre aux familles disposant de 40 000 $ ou 50 000 $ de revenu de toucher d'intéressantes prestations pour enfants, comme c'est le cas dans de nombreux pays.
Nous nous écartons de notre sujet. Si vous avez l'occasion de vous entretenir avec Paul Martin, dites-lui que s'il envisage de nouvelles réductions d'impôt, elles devraient tenir compte des familles de la classe moyenne avec enfants pour que le gouvernement fédéral ne récupère pas les prestations pour enfants dans une proportion aussi élevée. C'est évidemment une mesure très coûteuse.
Le sénateur Pearson: Ma question concerne les femmes, en particulier les jeunes femmes avec enfants. Je reconnais la valeur du travail, ne serait-ce que pour l'estime de soi. Mais si l'on s'oriente vers les programmes de travail pour les femmes, il faut aussi penser aux enfants et mettre en place les mesures de soutien dont ils ont besoin. Il ne faut pas que les enfants se retrouvent à la rue pendant que leur mère travaille.
M. Richards: Je suis tout à fait d'accord.
J'ai un bon ami qui est haut fonctionnaire au ministère des Services sociaux de la Saskatchewan. Il me dit que pour lui, la priorité absolue consiste à permettre aux gens de se passer de son ministère, qu'il qualifie de ministère de la misère humaine.
Les gouvernements ont tendance à concentrer tous les programmes destinés aux personnes lourdement handicapées dans un seul ministère, où elles se retrouvent à l'écart de tout le reste de la société. Il faut des mesures d'aide à l'enfance, des suppléments de salaire et toute une gamme de programmes pour éviter les syndromes de la dépendance à l'égard de l'aide sociale.
Le sénateur Tkachuk: Monsieur Richards, je voudrais faire un commentaire, puis vous interroger sur votre recherche.
Depuis une dizaine d'années, je constate les phénomènes dont vous parlez à Saskatoon, à Prince Albert et à Regina. La population autochtone augmente dans les villes. Comme les nouveaux immigrants, les Autochtones se regroupent entre eux. Quand ils sont venus au Canada, les Ukrainiens sont allés dans l'Ouest, les Italiens à Toronto et les Chinois à Richmond. De ce fait, certains programmes importants résultent des circonstances.
Vous avez parlé des écoles. Il existe à Saskatoon et à Regina des écoles qui, bien que n'étant pas des écoles indiennes, puisqu'elles ont été créées par la Commission scolaire catholique, accueillent 85 p. 100 d'enfants autochtones. La question n'est pas de savoir s'il fallait ou non créer une école indienne. L'important, c'est la population locale. À cet endroit-là, ce sont des Indiens, et non des Blancs.
Les programmes culturels dont vous avez parlé ont été placés à l'extérieur des programmes d'enseignement. On a essayé l'autre formule, mais en vain. La danse a déjà fait partie du programme d'enseignement, mais c'est désormais une activité parascolaire. Les programmes culturels des écoles sont axés sur le patrimoine de la population. Au lieu de prévoir le cours de danse à 14 heures, il a lieu après l'école. Les parents craignaient que les enfants n'y aillent pas, mais les enseignants savaient qu'ils y assisteraient, et ils ont été aussi nombreux à y aller à 15 h 30 qu'à 14 heures, quand le cours de danse était obligatoire. Et ainsi, ils ont également réussi à apprendre les mathématiques et l'algèbre.
Je voudrais maintenant parler du niveau d'étude des enfants autochtones. Les problèmes économiques que l'on constate résultent souvent du fait que les enfants ne poursuivent pas leurs études jusqu'à la fin de la 12e année. Que fait- on pour y remédier dans les réserves? Le problème se pose aussi dans les villes, mais le gouvernement fédéral est directement responsable de la situation dans les réserves. Les enfants ne terminent pas non plus leurs études dans les réserves.
Que peut donc faire le gouvernement fédéral pour résoudre le problème dans les réserves? Si les Autochtones des réserves accordaient la priorité absolue à l'éducation, on pourrait espérer que ceux qui viennent s'installer en ville conservent le même état d'esprit. Malheureusement, si ce n'est pas la tendance dans les réserves, la situation ne s'améliorera pas en ville.
Je sais ce que vous voulez dire quand vous évoquez la compétence provinciale en matière d'éducation, mais on constate la même situation dans les réserves, qui relèvent de la compétence fédérale. Que peut-on faire pour améliorer le taux d'obtention de diplôme dans les réserves, où il est aussi mauvais qu'en ville?
M. Richards: C'est pire.
Je peux faire des remarques d'ordre général. J'ai l'avantage de travailler dans le monde universitaire, et je suis donc dispensé de la nécessité de gérer. Mes commentaires doivent être compris dans ce contexte.
Vous évoquez ce qu'il en coûte de ne pas avoir réglé la question des traités et des revendications territoriales. L'incertitude qui persiste fait partie du problème. Voilà pour ce que l'on peut dire facilement.
Par ailleurs, je considère que l'Assemblée des Premières nations s'efforce de garder un trop grand nombre d'Autochtones dans les réserves. Les Autochtones sont aussi différents les uns des autres que les non-Autochtones. Certains d'entre eux veulent conserver un style de vie traditionnel, c'est-à-dire rural, en contact étroit avec la terre et avec la culture traditionnelle, et souhaitent éviter dans la mesure du possible le destin individualiste et urbain qui est le nôtre.
D'autres Autochtones ont le point de vue inverse. Il y a tous ceux qu'on a tendance à oublier, qui ont réussi, qui sont programmateurs, professionnels, plombiers, enseignants, bref, des gens qui ont réussi.
Malheureusement, on trouve entre les deux tout un groupe d'Autochtones hésitants. Même pour ceux qui ont réussi, la survivance culturelle est importante. Je ne prétends nullement qu'ils soient indifférents aux questions de culture et d'identité.
Je ne vois pas comment on va pouvoir infléchir véritablement le problème de la scolarisation dans les réserves à moins d'accueillir un plus grand nombre d'Autochtones dans les villes. Je ne prétends pas pour autant que ce soit une question de sociologie appliquée. C'est aux Autochtones de choisir eux-mêmes. Je ne vois pas comment on peut atteindre un niveau souhaitable de scolarisation dans les réserves isolées. On a envoyé les enfants en grand nombre dans des écoles hors réserve. J'ai connu moi-même la tradition du CCF-NPD en Saskatchewan; j'ai eu pour mentor Woodrow Lloyd, qui a été premier ministre dans les années 60 et ministre de l'Éducation pendant une bonne partie de sa carrière. Il venait d'une petite localité de la Saskatchewan. Woodrow Lloyd a obligé les non-Autochtones à fréquenter de gros collèges centralisés, quitte à ce que les élèves passent une heure par jour dans un autobus scolaire. Ce changement a suscité une vive résistance, les parents souhaitant préserver les petites écoles des villages.
Le choix n'est pas simple. Vous avez sans doute lu comme moi la série d'articles de John Stackhouse dans le Globe and Mail en décembre. L'un d'entre eux était consacré à deux familles autochtones d'Interlake. Les enfants de l'une des familles avaient fréquenté un collège hors réserve, et ceux de l'autre, le collège de la réserve. La situation hors réserve n'est pas parfaite, mais d'après ce que je comprends de l'article — vous me direz si je me trompe — elle est sans doute préférable pour ces familles d'Interlake.
Le sénateur Tkachuk: Est-ce que c'est un problème culturel? En un sens, je crois que tout relève de la culture. Je me souviens de l'époque où nous discutions de l'entente Nisga'a. Je n'ai jamais entendu un chef dire: «Je veux que les enfants de la réserve deviennent médecins ou avocats». Je n'ai jamais entendu une telle chose en huit ans de la part des témoins. Souvent, je pense que lorsque j'étais enfant, les choses étaient bien différentes. Pour l'entente Nisga'a, les témoins parlaient de ce qui allait se passer dans cette réserve. Je pensais, quant à moi, que tous ces gens avaient des enfants. Et si les enfants ne voulaient pas rester là? Et s'ils voulaient devenir informaticiens à Toronto, Vancouver, Hong Kong ou New York? J'ai parfois l'impression que tout cela, c'est culturel.
M. Richards: Jusqu'à maintenant, nous autres, les non-Autochtones, avons toujours eu tort de supposer qu'une fois qu'un Autochtone s'est fait agriculteur ou informaticien, il ne se considère plus comme autochtone et devient un bon sujet britannique.
L'un de mes bons amis et collègues, Alan Cairns, un éminent expert en science politique, a publié un livre intitulé Citizens Plus. Au début de sa carrière, dans les années 60, il a travaillé au rapport Hawthorne et a continué à s'intéresser à ce sujet jusqu'à son départ en retraite. Pour parler de l'Université Simon Fraser, je signale que jeudi dernier, nous l'avons invité à donner une conférence dans le cadre d'une série que j'ai organisée sur la politique autochtone.
Les Autochtones doivent-ils perdre leur identité lorsqu'ils partent et deviennent des médecins, des informaticiens, des enseignants ou des plombiers? Ils ne le devraient pas.
Le sénateur Tkachuk: Je suis d'accord.
M. Richards: On pourrait atténuer quelque peu ce problème si le système scolaire dans les villes était plus souple. Il s'agit en partie d'un phénomène propre aux quartiers défavorisés des centres urbains parce que les résultats y sont les pires. Il y a aussi certains quartiers des banlieues de Regina ou de Winnipeg où il y a beaucoup d'Autochtones et s'ils veulent que leurs enfants vivent ce genre d'expérience, c'est une bonne chose. Cela atténue quelque peu le problème parce qu'on a alors des Autochtones qui se disent: «Je peux aller à Vancouver et quand même conserver mon identité. Je n'ai pas besoin de l'abandonner».
Il y a encore des aspects avec lesquels nous avons de la difficulté. À mon avis, la politique fédérale attribue un trop grand nombre de ses avantages financiers aux Autochtones dans les réserves plutôt qu'à ceux en dehors des réserves. Il est possible de faire valoir que certains des avantages destinés aux Indiens visés par un traité devraient être accordés à des Indiens à titre individuel qui pourraient les utiliser de la façon qu'ils estiment appropriée.
Le sénateur Christensen: Vous avez déclaré que les Autochtones qui vivent dans des quartiers pauvres ont un niveau d'instruction et d'emploi inférieur aux Autochtones qui vivent dans de meilleurs quartiers. Comment les Autochtones diffèrent-ils des autres personnes qui vivent dans les quartiers pauvres et celles qui vivent dans les beaux quartiers? N'est-il pas vrai que quiconque vit dans ces quartiers pauvres a un niveau d'instruction et d'emploi inférieur? Lorsque vous examinez la situation, y a-t-il une particularité propre aux Autochtones qui les distingue des autres qui se trouvent dans ces deux situations?
M. Richards: Si vous avez la trousse de documents que je vous ai distribuée, vous verrez qu'au tableau 5 — tiré d'un commentaire de l'Institut C.D. Howe — on présente huit villes: Vancouver, Edmonton, Calgary, Saskatoon, Regina, Winnipeg, Toronto et Montréal. C'est à Winnipeg que le problème est le plus grave à bien des égards. Ce tableau présente une distribution cumulée pour différents groupes de personnes en fonction du niveau d'études de chacun de ces groupes. La ligne pleine pointillée désigne les Autochtones dans les quartiers pauvres. À Winnipeg, environ les deux tiers des Autochtones n'ont pas terminé leurs études secondaires.
Par définition, le maximum que l'on peut obtenir c'est un diplôme universitaire. Même dans les quartiers pauvres — la ligne pleine en noir désigne les non-Autochtones qui vivent dans les quartiers pauvres — même s'ils se débrouillent moins bien que ceux qui vivent dans des quartiers ordinaires, leur situation est nettement meilleure que celle des Autochtones dans les quartiers très pauvres.
En d'autres mots, il y a une accumulation de facteurs. Vivre dans un quartier pauvre est en soi un handicap. Vous êtes moins susceptible de vivre dans un environnement qui vous encourage à faire des études sérieuses. Vos pairs ne tiennent probablement pas autant à avoir une vie professionnelle, qu'ils soient ukrainiens, anglais ou autochtones. Cependant, le fait d'être autochtone entraîne des problèmes supplémentaires. Il peut y avoir des problèmes de dysfonctionnement familial transmis d'une génération à l'autre; la culture de la réserve peut être un facteur; il y a peut- être beaucoup de va-et-vient entre la réserve et la ville — par conséquent, il y a une aggravation des problèmes.
Je ne dis pas que le fait de vivre dans un quartier pauvre soit le seul facteur qui compte. De toute évidence, il y a d'autres facteurs qui interviennent, mais c'est un des facteurs qui a de l'importance. Nous devrions nous soucier de ce qui se passe à l'ouest de Saskatoon, à l'extrémité nord de Regina, à l'extrémité nord de Winnipeg, et cetera.
Le sénateur Christensen: Vous avez aussi parlé de créer des systèmes scolaires urbains séparés particulièrement pour les enfants autochtones. Quelle a été la réaction des milieux autochtones compte tenu de l'expérience vécue par ceux qui ont fréquenté les pensionnats?
M. Richards: De toute évidence, nous nous opposons à l'idée de contrainte lorsque nous parlons de l'expérience désastreuse vécue par ceux qui ont fréquenté les pensionnats.
La femme responsable du système scolaire du centre-ville de Winnipeg l'a exprimé très clairement:
Je ne m'intéresse pas à proprement parler à un système scolaire officiellement distinct, mais je tiens beaucoup à ce qu'il existe des écoles particulières dans le système public qui sont considérées conviviales, souples et qui encouragent la présence des étudiants autochtones.
Elle a mentionné quelques écoles du centre-ville de Winnipeg. Je connais certaines écoles à Vancouver, l'académie à Edmonton et ma propre école secondaire. Ce sont des maisons de transition et des expériences honorables. Elles vont à l'encontre de l'idée d'un système scolaire unique pour tous, idée qui tient à coeur à beaucoup de gens. Je crois que c'est une expérience valable, à condition qu'elle soit facultative.
Le sénateur Christensen: Vous dites qu'il ne s'agirait pas forcément d'une école autochtone mais qu'il s'agirait d'une école dans le système du centre-ville qui offrirait des programmes de cours plus axés sur les Autochtones et qui conviendrait davantage aux enfants autochtones. D'autres enfants pourraient aussi fréquenter cette école, mais on encouragerait davantage les enfants autochtones à les fréquenter.
M. Richards: Oui, et ces écoles n'existeraient pas uniquement au centre-ville. On pourrait en avoir une ou deux dans des banlieues de la classe moyenne. Le thème invoqué pour justifier ce genre d'initiative est tout d'abord la présentation culturelle autochtone. Il faut que les Autochtones soient sûrs que lorsqu'ils quittent Nisga'a, les terres du Nord pour se rendre à Vancouver ou à Prince George, ils pourront conserver leur culture et leur identité autochtones s'ils le veulent.
Le deuxième point correspond à ma propre interprétation — il existe toute une documentation assez vague dont se servent les administrateurs scolaires et que je ne prétends pas bien connaître — à savoir qu'il faut obtenir la participation des parents parce que cela est utile. Plus vous incitez les parents à s'intéresser aux résultats scolaires de leurs enfants, meilleures seront leurs chances de terminer leur 12e année. Si l'école est prête à favoriser la participation des anciens et des Autochtones de diverses façons, les jeunes auront plus de chances de terminer leurs études.
Les résultats obtenus dans le cadre du système actuel sont déplorables. Je m'inquiéterais davantage des problèmes que pourrait poser un système distinct si le système actuel était efficace. Compte tenu de son inefficacité — tant dans les réserves que dans les villes — je crois qu'il faut mettre de côté certaines des hypothèses que nous avions comme Canadiens à propos de la valeur d'un système unique, et qu'il ne faut absolument pas hésiter à expérimenter.
Le sénateur Christensen: Vous avez sûrement eu l'occasion de lire le livre de Hugh Brody intitulé The Other Side of Eden.
M. Richards: Je suis au courant de ce livre mais je ne l'ai pas lu. Vous pensez que je devrais le faire.
Le sénateur Christensen: Je l'ai recommandé à plusieurs autres personnes qui l'ont lu et qui ont pratiquement eu une révélation. Sur le plan culturel, il fait ressortir les problèmes entre la culture des chasseurs-cueilleurs et la culture agricole.
Bien que l'on ait toujours considéré les chasseurs-cueilleurs comme des nomades qui ne se sont jamais enracinés et qui préfèrent errer et les agriculteurs comme des gens établis, en fait c'est l'inverse. Ce sont les chasseurs-cueilleurs qui se sont fixés dans certaines régions et qui sont très heureux d'y demeurer. Inversement, les agriculteurs conquièrent de nouvelles terres, établissent des fermes, prolifèrent et délogent les autres. J'aimerais connaître votre opinion là-dessus.
M. Richards: Il s'agit d'événements cruels. Au cours des 500 dernières années, les agriculteurs sont venus ici et ont pris les terres et ne sont pas partis. Souvent, lorsque des étudiants viennent me dire qu'ils s'intéressent aux questions autochtones, je leur dis d'abord d'aller voir quelques bons films comme Pow Wow Highway ou Smoke Signals ou de lire un livre de Thomas King afin de se familiariser avec ce phénomène et cette réalité différente de l'identité.
[Français]
Le sénateur Gill: Monsieur Richards, j'aimerais vous poser une question sur l'assistance sociale dont vous avez parlé. Avant les années cinquante et soixante, les programmes d'assistance sociale n'existaient pas.
M. Richards: Vous avez raison.
Le sénateur Gill: Vous semblez suggérer que pour essayer de réduire ce problème d'assistance sociale, il faudrait peut-être parler de programmes de formation ou de programmes d'emploi, pour essayer de réduire le nombre de prestataires de l'assistance sociale.
J'ai parfois l'impression que les Autochtones sont peut-être pris dans un genre de corridor dont ils ne peuvent pas sortir depuis les années cinquante. On a créé certainement des situations, mais on a créé beaucoup de problèmes chez les Autochtones. D'abord, il y a eu l'avènement de l'assistance sociale et l'éducation, sous prétexte que les jeunes doivent aller à l'école, et les chasseurs ont arrêté de chasser et la sédentarisation s'est installée.
J'ai comme l'impression que depuis ce temps on est comme dans un corridor dont on ne peut pas sortir, et qu'on continue à soigner la maladie sans jamais penser à soigner les symptômes.
M. Richards: Qui sont, selon vous?
Le sénateur Gill: La Loi sur les Indiens a plus de cent ans; et les conseils de bande ont été institués par la Loi sur les Indiens. Les conseils de bande sont peut-être au détriment des nations autochtones. J'ai l'impression que maintenant on est dans ce corridor et on ne peut plus en sortir. Alors, qu'est-ce qu'on fait? On essaye de régler les problèmes, et c'est comme une escalade tout le temps.
J'ai parfois l'impression qu'au Canada, il y a deux groupes. Les autochtones, au début, étaient absents et on n'a jamais appris à composer avec l'existence et la culture des Autochtones. On veut toujours essayer de faire la promotion de la culture autochtone, mais on n'est pas prêt à en faire la promotion chez les non-autochtones. J'ai l'impression qu'on a des solitudes au pays, et pour essayer de régler ce problème, en fait, on apporte des remèdes.
Il y en a qui mentionnent qu'on a un budget de sept milliards de dollars, mais on doit augmenter ce budget parce que celui-ci n'est pas suffisant. J'aimerais votre point de vue là-dessus. Je pense que tout le monde est de bonne volonté et essaye d'apporter des solutions. Tout le monde suggère des solutions, on dit qu'il faut du travail au lieu de l'assistance sociale, et il faut de l'éducation aussi. Mais le mal est là, si l'on considère le taux d'assistés sociaux et le taux de suicides qui augmentent.
M. Richards: Oui, vous avez raison.
Le sénateur Gill: Est-ce qu'on continue à faire ce qu'on faisait avant ou si on change complètement nos orientations à la base? Qu'en pensez-vous?
M. Richards: Je suis non-autochtone. Je suis né en Angleterre; je suis Anglais tricoté à 100 p. 100. Donc, tout ce que j'ai dit, c'est une qualification. Je vais commencer in citant Mike Cardinal que vous connaissez peut-être.
[Traduction]
Avant les années 50, les collectivités autochtones du nord de l'Alberta étaient indépendantes du gouvernement et complètement autosuffisantes. Tout le monde travaillait, il n'y avait pas d'aide sociale, nous avions notre propre système de santé, l'alcoolisme et la dislocation de la famille étaient des phénomènes très restreints, les gens pratiquaient leur culture et vivaient de la terre. Nous avons changé cela, animés de bonnes intentions mais en 20 ans, c'est-à-dire en 1970, un pourcentage très élevé des membres de ces collectivités a commencé à dépendre de l'assistance sociale.
[Français]
Et vous abordez ce phénomène historique. Après la Deuxième Guerre mondiale, on a décidé que l'on devrait accorder à tous ceux qui étaient Canadiens, qu'ils soient francophones Québécois, anglophones ou autochtones, les mêmes prestations. Donc, les réserves reçoivent l'aide sociale, les pensions de vieillesse, et toutes les prestations qui existent dans un état providence.
Cela a eu comme conséquence la disparition des activités traditionnelles de la chasse et de la pêche. Vous connaissez sans doute ce phénomène mieux que moi. Je me souviens quand j'étais jeune lorsque je voyageais dans le nord de la Saskatchewan, les aînés parlaient avec grande fierté de ce qu'ils faisaient; de pêcher dans le Lac Orange au mois de janvier lorsqu'il faisait moins 20 ou moins 30 degrés. C'est pas quelque chose que j'aimerais faire pour gagner ma vie. Étant donné cette alternative, l'aide sociale est bien plus attirante, mais à la longue elle a créé un désastre social, surtout pour les hommes.
Je pense qu'en ce sens, les hommes ont plus un sens sociétaire que les femmes. Les femmes peuvent toujours élever leurs enfants, tandis que les hommes ont perdu leur raison d'être, en quelque sorte, avec la disparition des activités traditionnelles qui ont fait en sorte qu'ils aient un prestige, une confiance en soi.
Je suis universitaire, et si je ne pouvais pas exercer mon métier, cela me coûterait cher en terme d'attitude psychologique.
Quoi faire? On peut le constater comme analyse. Et M. Brody peut en parler de façon un peu romantique, mais dans la mesure où je prône quelque chose de concret pour les réserves, je dirais qu'il faut accorder plus de bénéfices aux Autochtones sur une base individuelle et baisser les montants transférés aux conseils des bandes.
C'est dur. Cela implique des conflits dans les bandes, mais je pense que nous, les non-autochtones leur devons une compensation majeure, étant donné ce qu'on a fait à leur vie collective et économique pendant les 400 dernières années.
Le livre blanc n'était pas une question de survie comme projet. On a décidé d'aller à l'encontre de ce qu'on allait accorder, c'est-à-dire fournir de l'argent techniquement aux chefs et aux conseils de bande qui, dans bien des cas habitaient là où il n'y a pas de base économique dans la réserve, ils fournissent cet argent en fonction d'aide sociale, et cela amène le népotisme, une perte de confiance en soi si on ne fait pas partie des familles de l'élite.
À la longue, je vois mal comment augmenter l'imputabilité — ce qui est le mot clé — dans les réserves aussi longtemps que la majorité des fonds, essentiellement des transferts, passent par les chefs et les bandes.
Il y a une boutade de la part de certains qui disent: «No democrary without taxation», et comme le disait effectivement Allan Blaikley quand j'étais jeune: «Quand on prend ses distances et qu'on regarde ce qu'est la politique, au moins la moitié des débats politiques tournent autour de la question: Combien devrait être dépensé et qui devrait payer les taxes?» Il peut survenir bien des différends entre les gens à ce sujet.
Devrait-on taxer plus, dépenser plus? Taxer moins, dépenser moins? Moi, je payerais moins; vous plus.
Cela fait partie des communautés saines. Aussi longtemps que les Autochtones dans les réserves n'ont pas accès individuellement à de l'argent, ils ne pourront pas exercer ces fonctions au sein de la communauté de façon saine.
Le sénateur Gill: Mais à ce moment-là qu'est-ce qu'on fait? Vous dites qu'il n'y a pas de démocratie sans taxation; pas de démocratie si les gens ne peuvent pas se prononcer sur leurs leaders. Si la population n'a pas la chance d'élire ses leaders, qu'est-ce qu'on fait de la démocratie dans les communautés? J'ai été chef chez-moi déjà. Alors, vous comprenez qu'il y a quelque chose qui ne marche pas.
M. Richards: Je vous retourne la question, sénateur Gill.
Le sénateur Gill: Il est vrai que du côté communauté il y a peut-être un manque d'institutions pour permettre à la population d'exercer certains contrôles. Je suis d'accord là-dessus. Il faudrait créer des institutions sur la base des nations au lieu de sur la base d'une communauté. Je vous l'ai dit tantôt; les réserves ont été créées par la Loi sur les Indiens. Les bandes indiennes n'existaient pas avant.
M. Richards: D'accord.
Le sénateur Gill: Alors, s'il y avait des nations indiennes au pays et alors, si on commençait à les réinstaller, mais il se fait tard et peut-être qu'on pourrait avoir la discussion une autre fois. Il y a un problème. Parce qu'on n'est pas content d'un leader ou d'un leadership, on va contourner le problème. Je ne pense pas qu'on règle la situation en faisant cela. On va en rediscuter plus tard.
M. Richards: Vous avez abordé une question très profonde.
[Traduction]
Le sénateur Léger: Vous avez parlé de la fierté et de la façon de la faire naître. Je conviens avec vous que la famille doit être présente. Lorsque j'étais enseignante, nous devions enseigner aux enfants comment aller travailler. Ils n'avaient jamais vu leur père ou leur mère travailler. Cela revient à cette question de fierté dont vous parliez.
Vous avez cité la création d'un système unique d'éducation. Cela existe déjà chez des non-Autochtones au niveau des écoles privées. Il serait normal d'élargir ce système.
Vous citez des chiffres concernant la proportion des personnes qui ne résident pas dans les réserves et qui ont reçu de l'aide sociale de 1992 à 1997. Je viens de l'Est et j'ai été estomaquée de constater où se classaient les provinces de l'Atlantique. Nous pensions que les problèmes se situaient dans l'Ouest. Nous étudierons l'Est à un autre moment.
La présidente: Aimeriez-vous commenter, monsieur Richards? C'est intéressant. Tout le monde parle de l'Ouest, mais il y a des problèmes dans l'Est, dans les Maritimes. Pourriez-vous commenter vos constatations en ce qui concerne la proportion d'Autochtones qui vivent hors des réserves, qui sont prestataires d'aide sociale?
M. Richards: C'est la façon dont le ministère des Affaires indiennes présente les statistiques. Les quatre provinces de l'Atlantique n'ont pas été fragmentées; c'est la façon dont elles sont présentées.
Le Canada atlantique est la plus pauvre des régions canadiennes. Dans un certain nombre de cas, les conflits sont plus graves parce que l'accès à certaines ressources — comme c'est le cas à Burnt Church — signifie simultanément l'accès à la ressource même et l'accès aux transferts conditionnels comme l'assurance-emploi. L'un ne va pas sans l'autre.
Le taux d'emploi chez les non-Autochtones du Canada atlantique est inférieur à la moyenne canadienne et le taux de dépendance de l'aide sociale y est supérieur à la moyenne canadienne. Si je me souviens bien, à Terre-Neuve il est de 11 p. 100, tandis que la moyenne nationale est de 7 p. 100.
Proportionnellement, les problèmes de chômage et de dépendance des transferts sont plus complexes et répandus dans la majeure partie de la communauté de la région atlantique du Canada. Dans un certain sens, ils sont les plus aigus parmi la population autochtone.
Après avoir indiqué que la proportion dans la région atlantique du Canada est de 80 p. 100, je suis tout aussi horrifiée de constater que dans mon ancienne province de la Saskatchewan, la proportion est nettement supérieure à 60 p. 100.
La présidente: Faites-vous un parallèle entre le ralentissement économique en Saskatchewan et le boom économique de l'Alberta?
M. Richards: Je ne fais pas cette comparaison. Cependant, lorsque j'ai dit qu'en raison des problèmes que connaissent les quartiers pauvres il est difficile pour les jeunes de finir leurs études, je ne veux pas dire qu'il n'y a pas d'autres facteurs importants. Il y a toutes sortes d'autres facteurs qui interviennent.
L'Alberta de toute évidence s'est débrouillée beaucoup mieux que les deux autres provinces des Prairies, ce qui est attribuable en partie aux réformes qui ont été apportées. Le taux d'emploi chez les Autochtones des quartiers pauvres est intéressant. Quel pourcentage des Autochtones vivant dans les quartiers pauvres d'Edmonton et de Calgary travaillent, comparativement aux Autochtones vivant à Saskatoon, Regina et Winnipeg dans des quartiers tout aussi pauvres? On constate un nombre nettement plus grand d'Autochtones qui travaillent dans les villes de l'Alberta. Dans quelle mesure cela est-il attribuable à la prospérité que connaît l'Alberta et dans quelle mesure cela est-il attribuable à la plus grande difficulté d'accès parmi les personnes aptes au travail?
J'ai fait une petite analyse statistique en utilisant l'expérience de l'Alberta et les taux de chômage dans ces huit villes. Si cela était principalement attribuable à la vigueur de l'économie locale, on pourrait s'attendre à ce que le taux d'emploi dans un quartier pauvre pour les Autochtones et les non-Autochtones augmenterait si le taux de chômage dans la ville était plus bas.
Cette expérience ne permet pas d'en apprendre beaucoup. Le taux de chômage relatif à Montréal, Toronto et ailleurs ne permet pas vraiment d'expliquer la différence des taux d'emploi ailleurs. De toute évidence, l'Alberta se démarque. Ce n'est peut-être pas attribuable aux réformes. Il y a peut-être d'autres facteurs qui interviennent; cependant, les réformes en font partie.
La situation qui existe en Alberta est principalement attribuable aux réformes Cardinal. Beaucoup de personnes y ont participé. Je lui attribue simplement un certain nombre de mesures. Je crois toutefois que les réformes ont été l'alpha et l'oméga.
La présidente: En 1985, l'ex-sénateur Gitter a fait une étude sur le racisme en Alberta. Cette étude a permis de constater que de tous les groupes en Alberta, ce sont les Autochtones qui faisaient l'objet de la plus grande discrimination.
M. Richards: Comment a-t-on mesuré ce phénomène?
La présidente: Je n'arrive pas à me souvenir exactement comment l'étude a été faite, mais c'était la constatation du rapport. Nous faisons de plus en plus l'objet de discrimination latente dans ce pays. Je le sais, à cause de mes enfants, de mes petits-enfants et de mes arrière-petits-enfants. Je le sais en raison des tendances et des problèmes que je constate dans ma propre collectivité et dans le travail que je fais.
Lorsque vous avez déclaré que même dans les quartiers les plus pauvres, le taux de chômage chez les Autochtones était plus élevé que chez d'autres personnes pauvres, croyez-vous que le racisme joue un rôle à cet égard?
M. Richards: Oui, je le crois. Dans le document que je vous ai distribué, vous verrez au tableau 3A qu'on y indique le revenu moyen pour les Autochtones selon le lieu et le niveau d'instruction. Ces données sont tirées du Recensement de 1996.
Il faut examiner ce tableau en groupes de trois. En ce qui concerne les trois du bas, on indique pour tous les Canadiens qui n'ont pas terminé la 9e année, si vous examinez leur revenu moyen et l'établissez à 100, les Autochtones dans les réserves gagnaient environ 60 p. 100 de ce montant, et il était de 70 p. 100 pour les Autochtones qui vivent hors des réserves.
Heureusement, à mesure que le niveau d'études augmente, l'écart diminue quelque peu. Pour les personnes qui ont un ou plusieurs diplômes universitaires, l'écart est plus petit entre les Autochtones et les non-Autochtones dont le niveau d'études est le même. Cependant, un écart demeure, et de toute évidence cela est attribuable en partie au racisme.
La présidente: S'il n'y a pas d'autres questions ou observations, je tiens à vous remercier infiniment. Votre exposé nous a beaucoup éclairés. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir ici nous communiquer ce genre d'information. Nous travaillons à ce plan d'action pour le changement depuis plus de deux ans parce que nous avons constaté qu'une telle initiative était nécessaire. Nous avons fini par nous y mettre.
M. Richards: Il y a beaucoup plus de choses à dire que ce dont nous avons parlé ce soir.
La présidente: Sans aucun doute.
Le sénateur Christensen: J'ai trouvé intéressante l'utilisation du terme «migration». La migration est un terme qui n'est pas souvent utilisé lorsque l'on parle des Autochtones. Il s'agit de personnes qui immigrent d'un endroit à l'autre.
M. Richards: L'une des statistiques que je ne vous ai pas donnée, et je me ferai un plaisir de le faire, c'est la ventilation des statistiques sur la migration dans ces huit villes. Ici encore, on examine les personnes qui vivent en milieu urbain. On constate immédiatement que dans ces quartiers du centre-ville, la mobilité chez les Autochtones est deux fois plus élevée que chez les non-Autochtones. Cela ne doit pas inciter les enfants à terminer leurs études. Il y a beaucoup de va-et-vient.
La présidente: C'est ce que nous avons dit. Nous avons tant parlé de la migration de gens au sein de notre propre pays à qui on n'offre aucun service de soutien pour les aider à s'adapter.
M. Richards: Nous parlons constamment des problèmes des Vietnamiens qui s'établissent à Vancouver, mais nous ne pensons pas à cet aspect.
La présidente: Je vous remercie. Si le temps nous le permet, j'espère que nous aurons l'occasion de vous inviter à nouveau.
La séance est levée.