Délibérations du comité sénatorial permanent des
Peuples autochtones
Fascicule 21 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 4 juin 2002
Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones se réunit aujourd'hui à 9 h 07 pour examiner l'accessibilité, l'éventail et la prestation des services, les problèmes liés aux politiques et aux compétences, l'emploi et l'éducation, l'accès aux débouchés économiques, la participation et l'autonomisation des jeunes, et d'autres questions connexes.
Le sénateur Thelma J. Chalifoux (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente: Je vous souhaite la bienvenue à la réunion d'aujourd'hui, qui porte sur cet important programme d'action pour un changement. Comme je l'ai dit à maintes reprises, nous n'avons pas besoin d'une autre étude; par contre, il nous faut écouter et entendre ce qu'ont à dire les collectivités, les organismes et les gens à propos de ce dossier important que constituent les Autochtones en milieu urbain, surtout en ce qui concerne nos jeunes. C'est ce que nous allons faire ce matin.
Notre premier témoin, Mme Kukdookaa Terri Brown, de l'Association des femmes autochtones du Canada, nous présentera un message sans équivoque sur le souci qu'elle nourrit à l'égard des jeunes femmes autochtones en particulier.
Madame Brown, je vous prie de commencer.
Mme Kukdookaa Terri Brown, présidente, Association des femmes autochtones du Canada: Je vous remercie de m'avoir invitée à participer à cette audience sur les jeunes Autochtones en milieu urbain. Il s'agit d'un moment d'une importance critique pour qui envisage de répondre aux besoins d'un secteur important de notre société, de façon holistique et intégrée. Je vous transmets les salutations de l'Association des femmes autochtones du Canada.
L'Association des femmes autochtones du Canada, ou AFAC, est un organisme national composé de groupes provinciaux et territoriaux de femmes autochtones et qui travaille à donner aux femmes les moyens de leur épanouissement en concevant et en modifiant des lois ayant une incidence sur la vie des femmes autochtones. De même, nous favorisons la participation à un dialogue national qui crée un espace pour la pleine participation des femmes et des jeunes Autochtones dans la société canadienne.
La majeure partie de notre exposé, aujourd'hui, portera sur les défis auxquels font face les jeunes femmes autochtones. Tout en mettant en lumière les nombreux défis et obstacles auxquels font face les femmes autochtones, nous souhaitons souligner qu'elles sont nombreuses à être des modèles de comportement, des femmes d'affaires, des savantes, artistes, écrivaines, mères avec une carrière, une vision d'avenir et des connaissances.
À l'heure actuelle, les deux tiers des Autochtones du Canada ont moins de 25 ans, la concentration la plus élevée se trouvant dans les provinces des Prairies. Le taux de représentation des Autochtones est excessif dans toutes les données statistiques qui renvoient à une réalité qui ne se caractérise ni par l'espérance ni par l'équité.
Nous devons nous redonner la vitalité et l'esprit de résistance de notre jeunesse, si nous souhaitons travailler en faveur de la santé de nos collectivités, de nos familles, de nos gens. Nos communautés autochtones, dans les réserves et ailleurs, doivent investir pour préparer les jeunes leaders en leur inculquant une vision solide de ce que représentent nos valeurs, nos coutumes, nos langues et nos structures de gouvernement. De même, il nous faut reconnaître que les jeunes Autochtones représentent une population diversifiée dont les intérêts, les soucis et les contextes culturels diffèrent.
Les femmes autochtones sont doublement défavorisées dans la société canadienne du fait de leur race et de leur sexe. Les femmes autochtones sont les plus pauvres parmi les pauvres. De ce fait, elles ont besoin de l'attention immédiate des autorités fédérales, provinciales et autochtones. La situation des femmes autochtones ne peut être saisie que dans le contexte d'un ensemble de déterminants, notamment la situation socioéconomique, les conditions relatives à l'éducation et à l'emploi, les réseaux d'entraide sociale, le milieu physique, le développement des enfants et l'accès aux services de santé.
L'absence de culture et de traditions propres aux peuples autochtones qui est le fait des jeunes Autochtones déplacés bat en brèche les valeurs et les usages appropriés en ce qui concerne le rôle des femmes autochtones et, en particulier, celui des jeunes femmes. Les femmes ne sont plus considérées comme des chefs de file de la communauté, qu'il faut respecter pour leur capacité de donner naissance à un être humain. Les jeunes femmes n'ont plus pour référence les enseignements traditionnels sur la façon de devenir une femme ainsi que la valeur et le caractère sacré du corps de la femme. Or, c'est là le fondement de l'estime de soi chez la femme, de sa compréhension du rôle qu'elle joue au sein de nos sociétés. Nous devons intégrer nos aînés à ce processus d'édification des communautés.
Souvent, les jeunes femmes autochtones sont privées de la possibilité de bien se lancer dans la vie pour ce qui est de l'éducation et des connaissances pratiques élémentaires, en raison de la pauvreté, de la violence sexuelle, de la discrimination et de l'absence de formation — tout cela poussant la femme dans un cercle vicieux qui se caractérise par des emplois mal rémunérés, la violence, la toxicomanie, la prostitution, la prison, la maladie et la limitation des options.
Quand il est question de la «migration» dans les centres urbains, il vaudrait mieux, pour être plus juste, parler de «déplacement». Les jeunes femmes autochtones s'en vont en ville pour des raisons autres que celles des hommes. Les jeunes femmes autochtones vivent un risque proprement épidémique d'être l'objet de sévices ou d'attouchements sexuels rendus à l'âge de douze ans. La fréquence d'inceste, d'attouchements, d'atteinte à la pudeur et de viol est si élevée chez les femmes autochtones et est pratiquement acceptée au point où les cas sont moins souvent signalés que dans d'autres populations.
Une des plus grandes difficultés que vivent les Autochtones, à la maison comme au sein de la collectivité, c'est le manque d'éducation sexuelle de nature qualitative. Les enfants et les adolescents autochtones ont désespérément besoin d'une bonne éducation sexuelle. Résultat concret de cela: le taux élevé de grossesses chez les adolescentes, nombre de bébés naissant avec des problèmes de santé et, souvent, étant pris en charge par des familles adoptives.
Nombre des jeunes femmes autochtones déplacées des réserves vers les centres urbains sont financièrement instables et ne disposent pas d'une référence positive par rapport à elle-même. Cette instabilité et l'absence de possibilités d'emploi et d'études font qu'elles deviennent vulnérables et liées à la sous-culture criminelle.
En l'absence de la cohésion sociale qui provient d'avoir en commun une famille, une collectivité et des valeurs, les jeunes sont nombreux à «se trouver» par l'entremise de gangs de rue. Les jeunes Autochtones cherchent quelqu'un avec qui créer des liens; or, un gang de jeunes Autochtones est une sécurité. La culture qu'ils ont en commun, l'expérience raciale qu'ils connaissent et les autres formes d'oppression qu'ils peuvent vivre les conduisent à trouver une famille, en milieu urbain, dans le gang. Un sentiment d'exclusion lié à la race et au revenu figure parmi les facteurs courants qui font perdurer l'activité des gangs et la culture qui s'y rattache.
La honte d'être associé à une sous-culture criminelle ou à de la prostitution empêche les femmes de revenir à la réserve. Nombre d'entre elles trouvent des moyens plus ou moins intéressants de s'adapter au déplacement; il peut en résulter une infection à VIH, le placement des enfants en foyer nourricier, une perturbation de la santé mentale et des dépendances qui les contraignent à un travail illégal.
On pousse des adolescentes autochtones à s'engager dans le commerce sexuel, ce qui, souvent, a des conséquences tragiques. Nous sommes tous bien conscients du cas des femmes disparues à Vancouver et Saskatoon, et de tous les cas qui n'ont jamais été signalés — toutes des prostituées et, pour une grande part, des Autochtones. C'est ce qui arrive quand on permet que les femmes autochtones passent entre les mailles du filet de sécurité sociale, quand la politique sociale ne permet pas à tous de réaliser leurs droits, parce qu'ils n'ont plus d'adresse ou d'emploi, qu'ils n'ont pas accès à des services de garde d'enfants en vue d'obtenir une formation ou un diplôme, ou même de consulter un médecin.
La santé des jeunes femmes autochtones est également compromise. Il suffit de prendre connaissance de certaines statistiques pour le voir: la situation est décourageante. L'état de santé actuel des femmes autochtones a fait l'objet de plusieurs rapports. Le Bureau pour la santé des femmes de Santé Canada brosse un tableau concis des réalités que vivent actuellement les femmes autochtones sur le plan de la santé. L'espérance de vie des femmes autochtones est de 76,2 ans, par rapport à 81 ans pour les autres femmes. Chez les femmes autochtones, le taux de problèmes de circulation, de difficultés respiratoires, de diabète, d'hypertension et de cancer du col de l'utérus est plus élevé que dans la population en général. Les données actuelles laissent voir que le diabète est trois fois plus fréquent chez les Autochtones que chez les membres de la population en général. Or, la plupart des diabétiques autochtones sont des femmes — dans un rapport de deux femmes pour un homme.
Le pourcentage de femmes autochtones infectées à VIH est plus élevé — 15,9 p. 100, par rapport à 7 p. 100 pour les autres femmes. Cinquante pour cent des femmes autochtones qui contractent le sida le font par l'injection de drogues, par rapport à 17 p. 100 pour l'ensemble des femmes.
Le taux de naissance est deux fois plus élevé chez les femmes autochtones. Cinquante-cinq pour cent des mères autochtones ont moins de 25 ans, par rapport à 28 p. 100 des autres femmes; 9 p. 100 ont moins de 18 ans, par rapport à 1 p. 100 des autres femmes.
Le taux de mortalité imputable à la violence est trois fois plus élevé chez les femmes autochtones que chez les autres Canadiennes. Dans le cas des femmes autochtones ayant entre 25 et 44 ans, il est cinq fois plus élevé. Les femmes sont souvent les victimes de la perturbation du milieu familial, qui provient de l'alcoolisme ou d'une toxicomanie. Les séjours hospitaliers ayant pour origine un accident lié à l'alcool sont trois fois plus fréquents chez les femmes autochtones que chez les Canadiennes en général.
Plus de 50 p. 100 des Autochtones perçoivent l'alcoolisme comme un problème social au sein de leur communauté. Le syndrome d'alcoolisme fœtal et les effets qu'il peut produire figurent au premier rang des préoccupations sanitaires et sociales dans certaines communautés des Premières nations et Inuits. Le taux de suicide demeure systématiquement plus élevé chez les Autochtones que dans l'ensemble de la population canadienne, pour presque toutes les catégories d'âge. Pendant une période de cinq ans, soit de 1989 à 1993, il était trois fois plus probable qu'une femme autochtone se suicide qu'une femme non Autchtone.
L'Association des femmes autochtones du Canada souhaite présenter les recommandations suivantes. La première recommandation consiste à prévoir un financement adéquat et durable des organisations autochtones en milieu urbain, pour aider à la conception, à l'élaboration, à la mise en œuvre et à l'exécution des programmes à l'intention des jeunes Autochtones.
Deuxièmement, il faut concevoir des campagnes de promotion d'estime de soi dans le cadre de programmes périodiques de publicité et de promotion médiatique. Jusqu'à maintenant, la seule image positive de nous-mêmes qui nous est renvoyée provient du réseau APTN, et non pas des médias de masse.
Troisièmement, il faut concevoir et mettre à exécution des programmes pédagogiques en fonction des jeunes Autochtones. Ces programmes devaient être adaptés au contexte culturel et aux styles d'apprentissage, et aider à réduire le taux d'expulsion ou de décrochage des jeunes Autochtones dans les écoles ordinaires.
Quatrièmement, il faut mettre en place une approche de santé des populations, approche qui tient compte, dans son intégralité, du milieu dans lequel la santé des femmes autochtones se réalise. Le revenu et la situation sociale, les réseaux d'entraide sociale, l'éducation, le milieu physique, la biologie et l'hérédité, le développement de l'enfance et les services de santé sont des éléments clés de cette approche. L'AFAC ajoute que cette approche doit être appliquée dans un cadre contextuel qui reconnaît l'oppression dont font toujours l'objet les peuples autochtones ainsi que l'impact de la colonisation.
Cinquièmement, il faut procéder à un examen approfondi de la politique sociale en vue de mieux répondre aux besoins holistiques des jeunes Autochtones qui ne peuvent accéder à une aide de subsistance ou aux structures de soutien du réseau de la santé.
Sixièmement, l'AFAC souhaiterait qu'il y ait une meilleure concertation des efforts déployés en ce qui concerne la politique d'éducation des jeunes Autochtones en milieu urbain. De même, comme les Autochtones comptent une proportion de jeunes travailleurs qui est beaucoup plus élevée, nous aimerions que soient prises des mesures énergiques pour promouvoir l'embauche de jeunes Autochtones qui vivent en milieu urbain.
Septièmement, il faut faire en sorte que les jeunes Autochtones participent eux-mêmes au processus d'élaboration, de manière à ce qu'ils se sentent responsables de l'affaire, plutôt que de leur imposer un concept ou programme qui doit leur profiter.
Enfin, nous devons engager les jeunes Autochtones dans un dialogue. Ce sont eux qui connaissent le mieux leur réalité et qui sont en mesure d'articuler le plus efficacement leurs besoins. Nos jeunes sont notre avenir. Sans nos jeunes, nous n'avons pas d'avenir. Cela est d'une importance capitale au point où nous en sommes, étant donné le taux élevé de suicide et de toxicomanie, en plus des autres problèmes sociaux que j'ai mentionnés, il faut agir immédiatement: il y a des gens qui meurent de pauvreté dans la rue et qui connaissent des conditions sociales déplorables qui sont la honte du monde entier.
Cette terre nous appartient. Nous avons tout perdu et, maintenant, nous perdons nos enfants. Nous n'avons pas d'avenir si nous ne mettons pas en place des politiques qui sont proactives et positives du point de vue de nos jeunes. Ils devraient pouvoir avoir des avantages, comme le reste de la société canadienne, avoir une bonne estime de soi, obtenir des emplois respectables et bien rémunérés, avoir des enfants au moment où ils veulent avoir des enfants, se marier au moment où ils veulent se marier, quitter la population active quand ils souhaitent le faire et, plus que toute autre chose, être respectés par les autres.
Ce respect est d'une importance capitale. Le racisme quotidien auquel ils font face diminue l'image qu'ils se font d'eux-mêmes et mine leur sensibilité; ils perdent leurs illusions et adoptent des pratiques dont ils ont honte. Nous voulons les aider, leur dire qu'ils n'ont pas à avoir honte, parce que cette oppression nous a affectés, tous.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
La présidente: Voilà un exposé tout à fait intéressant et révélateur. J'apprécie les recommandations que formule votre organisation à l'intention de notre comité. Ce sont des recommandations d'une importance capitale, pour que nous puissions répondre aux besoins de la communauté autochtone.
Le sénateur Pearson: En écoutant cette litanie de malheurs, j'ai essayé d'envisager des idées pratiques, concrètes. Pouvez-vous décrire une communauté autochtone où la situation fortifie les jeunes, plutôt que de les désillusionner? Avez-vous une expérience concrète à faire valoir? Nous sommes à la recherche d'idées qui marchent. Nous souhaitons recommander des modèles et des pratiques qui marchent au sein de la communauté.
Mme Marlene Larocque, directrice générale, Association des femmes autochtones du Canada: Je connais un programme qui, en ce moment même, se déroule à l'Université de la Saskatchewan — le programme des peuples autochtones. Le programme est baptisé Iskewak, terme cri qui veut dire «femmes». Dans le cadre de ce programme, des jeunes Autochtones qui vivent à Saskatoon, en milieu urbain, sont jumelés avec une professionnelle autochtone qui leur sert de mentor. Ils entreprennent des activités qui favorisent leur estime de soi et jettent les fondements d'un style de vie qui conduit à la participation à la société et à l'économie, et leur donne un ensemble de valeurs différent.
Le sénateur Pearson: Une des choses que vous dites, c'est que le mentorat est important, n'est-ce pas?
Mme Larocque: Tout à fait, surtout quand les femmes autochtones servent de mentor.
Le sénateur Pearson: C'est une chose importante qu'il faut régler.
Tous ceux parmi nous qui ont eu des enfants et qui les ont vus grandir, et c'est le cas aussi des petits-enfants, savent que le défi consiste à faire en sorte que l'enfant s'épanouisse à l'intérieur aussi bien qu'au sein de la communauté, à l'extérieur, parce que c'est la capacité qu'ont ces jeunes de se prendre en main qui devient la chose la plus importante. Êtes-vous au courant d'exemples où, selon vous, cela marchait bien?
Mme Brown: Dans la région de Vancouver, il y a cinq groupes de jeunes qui se sont activés à promouvoir une image positive des jeunes et à faire en sorte que les jeunes obtiennent du travail et de la formation. Le Vancouver Native Education Centre, qui existe depuis environ 30 ans, est un exemple positif à cet égard. Son approche est holistique; les responsables y prévoient un enseignement spirituel et tiennent compte de la culture traditionnelle. Les jeunes qui fréquentent le centre fabriquent toutes sortes d'articles culturels. Ils jouent du tambour, ils chantent et ils dansent, tout en recevant une éducation, ce qui a porté fruit.
Le sénateur Pearson: Je m'intéresse au travail qui est fait auprès des enfants très jeunes. Nous savons que, pour une bonne part, la confiance en soi et l'identité plongent leurs racines dans la petite enfance. Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones, par exemple, est-il un modèle fructueux?
Mme Brown: Pas précisément, mais ce programme a été utile aux mères. Plus de 50 p. 100 des familles autochtones ont à leur tête une mère seule. Le Programme d'aide préscolaire a été très avantageux dans la mesure où il a permis à la mère de bénéficier de services nutritionnels et de soutien, et a préparé les enfants en vue de l'école.
La période qui va de la naissance à la cinquième année est une période d'une importance capitale. Il importe que les organisations chargées de fournir des services puissent durer. La perturbation du financement, l'absence de financement et l'attribution d'un financement à court terme seulement — tout cela demeure un problème pour les organisations. Il importe pour les organisations d'avoir une stabilité à long terme, plutôt qu'un financement à court terme; sinon, c'est le bouleversement total chaque fois qu'on doit engager des négociations.
Le sénateur Pearson: Nous savons que la possibilité de consulter périodiquement une infirmière en santé publique représente l'une des meilleures façons de venir en aide aux jeunes familles et aux enfants. Est-ce un modèle que l'on applique? Le modèle qui fonctionne vraiment, c'est celui où une infirmière arrive avant la naissance et continue de travailler auprès de la même famille pendant deux ans. Encore une fois, c'est une question de continuité. Cela s'est révélé extraordinairement avantageux pour les familles, que de travailler auprès des enfants. Est-ce un modèle qui est appliqué?
Mme Brown: Les centres de la santé font un bon travail pour ce qui est du soutien, et la continuité est une chose importante. Il est difficile pour les centres de garder dans la région les médecins et professionnels qualifiés. Dans les régions éloignées du pays, on dirait qu'il y a un médecin nouveau toutes les deux semaines; il n'y a donc aucune continuité. La continuité fait défaut.
Le sénateur Christensen: Votre première recommandation, c'était de prévoir un financement adéquat et durable aux organisations autochtones qui aident à concevoir, à élaborer, à évaluer et à exécuter les programmes à l'intention des jeunes Autochtones. Sous quelle forme voyez-vous cela? L'exécution des programmes serait-elle l'affaire des centres d'amitié? Les bandes reçoivent le financement. Toutefois, comme vous le savez bien, une fois que les gens sont persuadés de quitter la bande pour aller vivre en milieu urbain, le financement ne suit pas. Évidemment, c'est un problème. Comment pouvons-nous procéder pour que ce genre de programme existe en milieu urbain, par exemple, par l'entremise des centres d'amitié? Comment voyez-vous cela?
Mme Brown: Vous avez parlé des centres d'amitié. Ils sont efficaces. On trouve des centres d'amitié partout au Canada, à l'exemple de nos bureaux. Nous recevons du financement, que nous répartissons entre nos régions. C'est efficace parce que nous rejoignons ainsi la base, là où on a besoin d'argent et où on peut concevoir ses propres programmes. Les organisations de femmes souffrent d'un sous-financement grave. Il faut accroître la capacité.
Le sénateur Christensen: Vous avez dit que les femmes ne sont plus considérées comme des leaders respectés de la communauté. Pourquoi cela survient-il dans les régions rurales?
Mme Brown: Le déplacement des femmes en application de la Loi sur les Indiens en est une des grandes raisons. Cela s'est fait sur plusieurs générations. Les femmes sont des citoyens de second rang dans nos propres communautés, en raison de la façon dont la loi est écrite et de la manière dont les femmes y sont l'objet de discrimination. La loi ne fait pas honneur au rôle des femmes autochtones, rôle qui a été très important par le passé. Les femmes participaient à tous les secteurs de la société, aux structures économiques, politiques et sociales. Notre rôle a été réduit; nous nous battons pour nous le réapproprier.
Le sénateur Hubley: Une des jeunes femmes de l'Association des femmes autochtones du Canada qui est venue témoigner a insisté sur l'importance pour les jeunes d'avoir leur mot à dire dans les organisations et d'en faire partie. Y a-t-il des jeunes qui sont représentés au sein de votre organisation?
Mme Jelena Golic, intervenante auprès des jeunes, Association des femmes autochtones du Canada: En tant que coordonnatrice jeunesse, j'ai notamment pour rôle de présenter au gouvernement le point de vue du conseil des jeunes.
Oui, notre organisation a un conseil des jeunes, qui compte un représentant de chacun de nos bureaux régionaux des provinces et des territoires. Il y a aussi un jeune qui nous représente à l'échelle nationale. C'est là l'occasion, pour nous, de faire pression en rapport avec certains dossiers.
Notre conseil éprouve des problèmes de financement, ce qui est une menace pour le conseil des jeunes. Le conseil des jeunes est un moyen très efficace de se battre dans certains dossiers.
À l'Association des femmes autochtones du Canada, nous accordons une grande importance aux jeunes, la génération à venir. Par exemple, notre programme jeunesse comporte des bourses à l'intention des jeunes femmes autochtones. Nous essayons de mettre en place des programmes qui permettront à ces jeunes femmes d'occuper, à l'avenir, par exemple, le poste de présidente de notre organisation. Toutefois, notre conseil jeunesse ne saurait être efficace s'il ne dispose pas d'un financement adéquat. Pour nous réunir, il nous faut des fonds. Il n'est pas efficace pour nous de communiquer par courriel quand il faut mettre à l'essai une initiative gouvernementale. Se réunir face à face est beaucoup plus efficace. C'est une plainte qui revient toujours.
Quand les jeunes entendent parler d'une initiative gouvernementale, ils disent qu'ils auraient aimé être consultés. Ils aimeraient se réunir quelque part pour discuter de la question et révéler leur point de vue. C'est important pour les jeunes. C'est de cette façon que nous fonctionnons le mieux. Nous avons besoin de discuter des choses. Parfois, il est difficile de consulter les jeunes par le truchement d'une organisation nationale. Les jeunes aimeraient bien contribuer plus directement à la discussion, plutôt que d'être mis au fait des initiatives gouvernementales adoptées. À ce moment- là, ils posent souvent la question suivante: qui a recommandé cela? D'où cela vient-il?
Le sénateur Hubley: C'est certes l'idée dont nous ont fait part les jeunes dames qui ont témoigné avant vous. Étant donné les besoins uniques des femmes autochtones qui habitent dans une grande ville canadienne, les pouvoirs publics devraient-ils envisager diverses formes d'aide en matière de programmes? Je suis sûre que vous examinez de bonne foi les programmes que le gouvernement a mis en place, mais croyez-vous avoir l'occasion d'exprimer comme il se doit votre avis sur ces programmes, pour que la démarche soit fructueuse pour les femmes ou les jeunes Autochtones?
Mme Brown: Si je me fie à mon expérience, je dirais que nous n'avons pas vraiment eu l'occasion de le faire. Normalement, nous entendons parler des programmes et des politiques une fois qu'ils ont été conçus. Nous n'avons pas notre mot à dire dès le départ. Nombre de programmes posent des difficultés parce que les gens qui les conçoivent ne travaillent pas pour nous ou encore n'ont pas les mêmes intérêts que nous. Dans de nombreux cas, aucune étape n'est prévue pour un processus d'évaluation, qui nous permettrait d'entrer en jeu et de dire: «Ce type fait un excellent travail» ou «nous avons besoin d'un changement».
Dans de nombreux cas, nous constatons que l'agent de programme est très inefficace. Mon espoir, c'est que nous puissions avoir notre mot à dire dans la décision d'engager les gens chargés des programmes et des services, parce que l'attitude des gens en question revêt, elle aussi, une importance capitale.
Le sénateur Sibbeston: Vous brossez un tableau sombre de la situation. Il y a une partie de moi qui ne veut pas croire ce que vous dites ou admettre que la situation est aussi sombre que vous le faites valoir. Je suis originaire des Territoires du Nord-Ouest, là où, bien qu'il y ait des problèmes, la situation n'est pas aussi sombre que le tableau que vous brossez du reste du pays. Je ne suis pas parfaitement conscient de la situation dans le Sud et dans les zones urbaines, de sorte que je dois vous croire sur parole.
Bien que nous ayons eu des difficultés dans les Territoires du Nord-Ouest, nous avons pu réaliser des progrès considérables. Les Autochtones dans le Nord se tirent raisonnablement bien d'affaire parce qu'ils forment la majorité, et non pas la minorité de la population. Ils ont réussi des percées dans tous les aspects de la société, notamment le gouvernement. Par l'entremise de revendications territoriales, ils ont fait des progrès, utilisant les ressources et l'argent ainsi établis pour participer à la vie économique du Nord.
Le tableau que vous brossez est sombre, comme je l'ai dit. Comment se sortir de la situation que vous décrivez? Je vois que vous recommandez des choses comme un accroissement du financement et plus de campagnes de promotion, mais y a-t-il un quelconque espoir pour les Autochtones qui quittent la campagne pour s'établir en ville? Le phénomène survient quand les Autochtones quittent la réserve ou la région rurale qu'ils habitent pour une ville nouvelle, une occasion nouvelle dans la ville. Qu'arrive-t-il aux gens quand ils arrivent en ville? Y a-t-il de l'espoir? Certains, je présume, s'intègrent à la société et se font une place, alors que d'autres échouent. Les difficultés dont vous parlez, par exemple la prostitution et les problèmes de santé, sont éprouvées par des gens qui ne s'adaptent pas bien à la ville et qui ont une existence qui se situe à la périphérie de la vie urbaine.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Quel espoir peut-on avoir? Que doit faire notre gouvernement ou notre société pour corriger la situation des femmes autochtones, en particulier, pour qu'elles aient une vie bonne et qu'elles s'épanouissent?
On souhaite améliorer la situation que vous décrivez. Notre comité essaiera de formuler à l'intention du gouvernement des recommandations permettant d'améliorer la vie des Autochtones, mais cela est difficile. Pouvons- nous apporter des modifications en conséquence de nos recommandations? Que faut-il faire pour que la vie des femmes autochtones en particulier soit meilleure?
Mme Brown: Pour ce qui est du tableau sombre dont il est question, on a fait un sondage à Yellowknife, c'est un de nos jeunes qui l'a réalisé. Nous avons appris que quelque 80 p. 100 des jeunes sondés s'adonnaient à la prostitution ou à des activités relevant du commerce du sexe. Il existe nombre de réalités dont les gens ne sont pas conscients. Ce n'est pas en détournant le regard qu'on changera les choses. Le fait est que nous vivons, à un taux élevé, les pires conditions sociales au pays. Ce ne sont pas des histoires que nous racontons. Nous n'avons pas besoin d'en raconter. Les gens ont choisi de ne pas nous entendre, de ne pas voir les taux élevés de violence et toutes les conditions que nous vivons en tant qu'autochtones.
Quant à ce que nous pouvons faire pour avoir de l'espoir, certaines des recommandations sont succinctes et très bonnes. Si les responsables s'engagent à donner suite aux recommandations plutôt qu'à s'asseoir et à nous écouter, d'année en année, sans agir, les choses vont changer. Par exemple, cela fait 35 ans que nous sommes pris dans le dilemme que fait intervenir la querelle des compétences. C'est beaucoup de temps. Les choses auraient dû changer depuis. Nous sommes las de toujours répéter et répéter, de reprendre toujours et à jamais le même récit.
J'aimerais voir du travail concret dès aujourd'hui, plutôt que d'attendre que d'autres études soient produites, comme l'a souligné le sénateur Chalifoux. Il ne faut pas d'autres études; il faut que de l'argent soit injecté dans la communauté pour qu'un travail efficace puisse se faire. Nous faisons un travail bénévole depuis beaucoup trop longtemps. Nous ne pouvons continuer à porter nos nations; nous ne pouvons continuer à porter nos hommes. Ils doivent se lever. Ils ne sont peut-être pas prêts à le faire, mais nous, nous sommes prêtes. Nous sommes prêtes à aller de l'avant et à mettre en place certaines des recommandations, si le gouvernement peut nous donner plus d'argent. Nous avons de très bonnes idées.
Le sénateur Sibbeston: Il y a quelques semaines de cela, on a entendu parler de femmes en Colombie-Britannique qui disaient à leurs hommes que ceux-ci étaient davantage à blâmer que le gouvernement pour ce qui est de la situation de la femme. Je ne sais pas si vous vous en souvenez. J'ai lu cela dans les journaux.
Il est facile de jeter la pierre au gouvernement et à la société, mais dans quelle mesure les problèmes en question sont- ils vraiment des problèmes internes à la société autochtone? Les hommes qui ne traitent pas très bien les femmes autochtones devraient-ils accepter le blâme? Pouvez-vous nous dire ce que vous devez faire, au sein de votre propre société, plutôt que de jeter la pierre au gouvernement?
Mme Brown: Il y a beaucoup à faire. Pour ce qui est du blâme, nous pouvons blâmer les hommes. Toutefois, nous avons une longue histoire marquée par l'oppression. Dans bon nombre de cas, les gens ne connaissent rien d'autre. C'est à cette expérience qu'ils réagissent dans nombre de cas.
Le contexte politique où évoluent les réserves découle actuellement de la loi qui régit notre vie et notre terre. En particulier, il est prescrit que nous devons nous trouver à un endroit précis pour tirer certains bienfaits ou être visés par certaines lois. Il n'y a personne dans le monde qui soit assujetti à cette forme d'oppression, mis à part en Afrique du Sud, là où les gens ont été libérés après tant d'années.
La situation politique dans les réserves pousse les femmes à s'en aller en ville. Si nous pouvions demeurer sur nos terres d'origine, je suis certaine que nous le ferions. S'il y avait des services, une communauté saine et des enfants qui ne sont pas à risque, nous y demeurions. Nous allons en ville pour obtenir une éducation et avoir accès à des occasions, pour nos enfants.
Nous recherchons les mêmes choses que d'autres trouvent sans avoir à quitter leur terre. Les autres ne sont pas forcés à quitter leur terre; ils n'ont pas à faire 2 000 milles — dans mon cas, 5 000 milles — pour obtenir un emploi et une éducation. L'université la plus proche de chez nous est située à au moins 1 500 milles. Il faut se réinstaller ailleurs, tout laisser derrière soi, pour obtenir une éducation. D'autres gens n'ont pas à faire cela.
Nos jeunes font face à des difficultés parce qu'ils sont déplacés, quand ils s'en vont ailleurs pour obtenir une formation. Dans de nombreux cas, ils finissent par avoir de mauvaises fréquentations parce qu'ils sont influençables sous certains rapports.
Parlons de l'oppression dont nous sommes l'objet.
Le sénateur Carney: Je vais revenir au thème soulevé par le sénateur Sibbeston. D'abord, quelqu'un a-t-il expliqué ce que signifie votre prénom?
Mme Brown: C'est mon nom traditionnel, celui qui m'a été donné à ma naissance. On nous donne plusieurs noms; celui-là est mon nom officiel.
Le sénateur Carney: D'où venez-vous?
Mme Brown: Je suis originaire de la partie nord de la Colombie-Britannique, près de l'Alaska Pan Handle. Nous sommes en pays taltan.
Le sénateur Carney: J'aimerais vous demander ce que vous pensez du projet de loi C-31 compte tenu de votre position sur l'oppression et la législation. J'ai été députée à la Chambre des communes et j'ai été parmi les 16 femmes qui ont fait pression pour que le projet de loi C-31 soit adopté, qui a redonné le statut d'Indien inscrit aux Indiennes qui s'étaient mariées en dehors de la réserve ou qui avaient épousé un homme autre qu'autochtone. Nous savons maintenant que certains défauts de la loi ont conduit à certaines inégalités pour les femmes, particulièrement pour ce qui touche la transmission des droits relatifs au statut d'Indien aux descendants.
Pouvez-vous nous dire quel a été l'impact de ce projet de loi et quel est votre intérêt personnel à cet égard? Comment pourrait-on modifier la loi?
Mme Brown: L'aménagement des Autochtones en milieu urbain est un phénomène de longue date attribuable à la Loi sur les Indiens. Quand le projet de loi C-31 a été édicté, on y a vu une victoire importante pour les femmes.
Le sénateur Carney: C'est ce que nous pensions, jusqu'au moment où nous avons constaté que le texte n'était pas rédigé convenablement.
Mme Brown: Quelques générations plus loin... on constate que la discrimination est déplacée de quelques générations. Encore une fois, nous sommes aux prises avec le même cas: les gens sont privés de leur appartenance à la communauté autochtone et des avantages qui en découlent.
Le sénateur Carney: Pouvez-vous expliquer comment cela fonctionne? Pouvez-vous nous donner un exemple de la façon dont les gens perdent leurs droits?
Mme Brown: L'article 6 de la Loi sur les Indiens traite du statut d'Indien. En application du paragraphe 6(1), la personne inscrite a droit à tous les avantages prévus, notamment l'accès à l'éducation, à la santé, à un logement, tout ce qui existe dans la réserve.
L'article 2 porte sur les avantages partiels. Il est question de la concentration de quantité de sang dans le cas d'un mariage à un non-Autochtone. La femme autochtone qui épouse un non-Autochtone est toujours incluse. De même, ses descendants ne sont pas touchés. Toutefois, si un descendant marie un non-Autochtone, les enfants nés de l'union ont droit seulement à des avantages partiels. Quiconque a une concentration de moins de 25 p. 100 perd tous ses droits. Dans un tel cas, les descendants ne peuvent hériter d'une quelconque partie de la maison. Ils perdent tous leurs avantages.
Le sénateur Carney: Pouvez-vous préciser la notion de quantité de sang? Je crois savoir que cela s'applique non pas aux hommes, mais seulement aux femmes.
Mme Brown: Non, maintenant, cela s'applique aux deux. Dans l'ancien temps, les femmes qui contractaient un mariage hors bande perdaient leur statut. Quand le statut de ces femmes a été rétabli, cela n'était pas le statut conféré par le paragraphe 6(1). Elles étaient défavorisées. Ce n'est pas le statut entier qui a été rétabli. Ainsi, leurs enfants ont perdu des avantages plus rapidement que cela aurait dû se passer. C'est leur statut intégral qui aurait dû être rétabli, ce qui n'a pas été le cas.
Le sénateur Carney: On nous dit que cela a créé une partie du problème de la migration. Les gens vont vivre en ville parce qu'ils n'ont pas de droits s'ils demeurent dans la réserve; est-ce bien cela?
Mme Brown: Oui.
Le sénateur Carney: Vous avez parlé de «mariage hors bande». Pour le compte rendu, pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par là?
Mme Brown: Je parle du mariage avec un non-Autochtone. Il n'y aurait pas de difficulté si la femme autochtone mariait un homme autochtone. Si la femme autochtone devait marier quelqu'un qui est, disons, à moitié autochtone ou en partie autochtone, ce serait tout à fait différent.
Le sénateur Carney: Qui établit la quantité de sang? Comment procédez-vous?
Mme Brown: Robert Nault.
Le sénateur Carney: Je sais que les conseils de bande déterminent l'appartenance. On nous dit que l'appartenance à certaines Premières nations se rétrécit beaucoup d'une génération à l'autre. Certaines nations vont même finir par disparaître en raison de l'application de cette loi. C'est la raison pour laquelle je vous demande comment cela fonctionne.
Mme Brown: Il y a une marche à suivre assez difficile quand naissent les enfants. Du fait de la loi, la femme doit fournir une preuve de paternité. Dans bien des cas, le père n'est peut-être pas là pour signer le certificat, ce qui met les enfants à risque. Il appartient maintenant au père de signer un formulaire où il dit accepter que l'enfant né de l'union devra appartenir soit à sa bande, soit à celle de la mère. Pour une grande part, la décision demeure encore l'affaire du père. L'homme peut décider de signer ou de ne pas signer le formulaire.
Les dossiers sont tous tenus aux Affaires indiennes. Il y a de nombreux formulaires à remplir. Il faut fournir des certificats de naissance. J'ai même entendu dire que, dans certains cas, il faut se soumettre à un test d'ADN.
Le sénateur Carney: Si l'enfant qui naît appartient à la catégorie prévue au paragraphe 6(2), il reçoit des avantages partiels, c'est bien cela?
Mme Brown: Oui.
Le sénateur Carney: À un moment donné, l'enfant doit quitter la réserve parce qu'il n'aurait pas droit à des avantages particuliers, c'est bien cela?
Mme Brown: Oui.
Le sénateur Carney: Pour ce qui est de certains des changements dont il est question, participez-vous à l'examen de la Loi sur les Indiens dont se charge le ministre? Votre organisation participe-t-elle activement à ce processus?
Mme Brown: Nous avons demandé de participer, mais notre demande de financement n'a pas été approuvée.
Le sénateur Carney: À qui avez-vous présenté la demande?
Mme Brown: Nous l'avons présentée aux Affaires indiennes et du Nord. Notre proposition n'a pas été approuvée.
Le sénateur Carney: Pouvez-vous dire pourquoi? Nous savons que certaines organisations boycottent le processus de consultation établi par le ministre.
Mme Brown: À l'origine, nous n'avons pas qualifié l'acte de boycott, mais nous nous étions clairement accordés avec l'Assemblée des premières nations, l'an dernier, à la conférence de Halifax. Nous avons passé un moment très difficile avec nos membres, du fait d'un certain manque de compréhension. Nous ne pouvions décider d'appuyer l'initiative du gouvernement à ce moment-là.
Nous avons demandé un délai de trois mois pour réfléchir à ce que nous pouvions faire. L'APN boycottait alors la démarche, et nous nous étions accordés avec elle. Le ministère des Affaires indiennes a mal compris ce que nous voulions; ils croyaient que nous avions renoncé tout à fait à la démarche, ce qui n'était pas le cas. Nous voulions discuter davantage avec nos membres pour établir un objectif plus clair.
Le ministère est devenu mécontent, parce qu'il souhaitait conclure une entente. Tout de même, nous n'étions pas d'accord avec les conditions, qui ne traitaient pas des questions relatives aux femmes — les droits relatifs aux biens matrimoniaux, le rang de nation. L'initiative ne tenait pas compte de ces questions.
Le sénateur Carney: «Ils», qui était-ce?
Mme Brown: Le ministère, le ministère de Robert Nault. Les gens du ministère parlaient de trois secteurs clés: la responsabilisation, la qualité juridique de la nation et un autre.
À notre avis, ils ne parlaient pas des questions relatives aux femmes. Nous voulions que les questions dont nous parlions soient mises sur la table, mais ils n'étaient pas prêts à le faire. Nous avons dit que nous voulions trois mois pour réfléchir. Ils ont mal interprété ce que nous avons dit.
Ensuite, l'Association nationale des femmes autochtones a été créée. J'ai été élue en octobre. Le nouveau groupe a été financé grâce aux sommes auxquelles nous nous attendions ou que nous avions prévu obtenir pour aller de l'avant.
Le sénateur Carney: Quels sont vos projets en ce moment? Il y a un examen de la Loi sur les Indiens qui est en cours, et notre comité y participera à un moment donné. Ce sont des questions importantes qui vous intéressent, mais je ne vois pas comment vous allez pouvoir participer au débat sur ces questions clés sans financement.
Mme Brown: Nous n'avons pas participé aux travaux de leurs comités ni discuté de quelque question que ce soit parce que nous n'avions pas l'argent voulu pour le faire. Nous sommes toujours d'avis qu'ils ne parlent pas des questions clés touchant les femmes. Ils parlent de responsabilisation.
Le sénateur Carney: Qu'en est-il de l'APN? Comment pouvez-vous agir, par leur entremise?
Mme Brown: J'ai discuté avec divers chefs féminins, et nous restons en communication comme cela, mais, bien entendu, leur financement a été réduit en raison de la position politique qu'elles adoptent, aussi.
Le sénateur Carney: Vous dites au comité que, pour ce qui est de l'examen de la Loi sur les Indiens, le ministère et l'APN ne s'intéressent pas aux questions touchant les femmes. Notre comité traite de femmes et de questions touchant les jeunes. Voilà une omission importante.
Mme Brown: Tout à fait
Le sénateur Carney: J'aimerais, peut-être avec d'autres témoins aussi, explorer les raisons pour lesquelles les questions intéressant les femmes ne sont pas prises en considération dans les modifications proposées de la Loi sur les Indiens.
Mme Brown: L'initiative elle-même pose des problèmes.
Le sénateur Carney: Qu'est-ce que vous voulez dire?
Mme Brown: Leur plan d'action traite de responsabilisation et de questions juridiques. Je ne sais pas à quoi revient particulièrement leur programme d'action, mais nous pouvons présumer qu'ils souhaitent se concentrer sur la responsabilisation. Est-ce pour défaire l'ensemble? Est-ce pour influer sur le leadership ou le miner carrément? Je ne le sais pas. Notre programme d'action à nous ne se trouve pas au cœur de l'une quelconque des questions qui les intéressent.
Le sénateur Carney: Madame la présidente, je demanderais ce que peut faire notre comité ou la façon dont nous pourrions nous y prendre pour que ces questions touchant les femmes soient intégrées à la Loi sur les Indiens ou à l'examen proposé de cette loi.
Mme Brown: Un des projets que nous aimerions réaliser, c'est un projet de recherche d'envergure sur le projet de loi C-31, sur les effets qu'il a eus, après 20 ans. À ma connaissance, cela n'a jamais été fait.
Le sénateur Carney: Nous avons demandé continuellement au ministère de nous donner des renseignements là- dessus. S'il existe des renseignements, il est certain qu'ils n'ont jamais été présentés à mon bureau.
Mme Brown: J'ai demandé de rencontrer le ministre Nault, en vain. J'ai fait pression sur les ministres en rapport avec diverses questions. Il importe pour nous d'avoir l'appui de certaines personnes quand nous faisons des pressions sur le Parlement, parce que nous avons toutes ces questions qui nous intéressent.
Le sénateur Carney: Quelle est la position de la ministre d'État, Mme Ethel Blondin-Andrew?
Mme Brown: Nous l'avons rencontrée et nous avons son appui. Je ne saurais dire quelle est sa position en particulier, mais elle nous appuie. Notre organisation a 27 ans. Nous existons depuis un certain temps, et elle nous appuie.
La présidente: La loi sur la gouvernance qui est proposée et la législation qui est proposée en ce qui concerne les modifications de la Loi sur les Indiens seront renvoyées en comité, et à ce moment-là nous pourrons nous pencher sur nombre de ces questions.
Avez-vous vu le libellé provisoire des modifications qui sont proposées?
Mme Brown: Nous ne les avons pas reçus.
La présidente: On m'a fait savoir que le ministre déposera les modifications proposées au cours des deux prochaines semaines à la Chambre des communes. Je vous suggérerais de suivre sa démarche.
Le sénateur Léger: J'ai beaucoup aimé votre déclaration: «C'est notre terre. Nous l'avons perdue et maintenant nous perdons nos enfants». Je vous remercie d'avoir dit cela.
Où sont les femmes puissantes et les mères fortes? Vous dites que vous avez connu du succès avec le programme Bon départ et l'Université de la Saskatchewan. Vous avez mentionné les centres d'amitié et les bourses d'études. Est-ce qu'on vous donne suffisamment d'argent? Y a-t-il suffisamment de projets pour promouvoir la réussite de vos femmes?
Le 8 mars, à Fredericton, le lieutenant-gouverneur a invité des femmes à assister à un événement pour célébrer la Journée de la femme. Une femme de Big Cove y a assisté. Elle était tout comme nous. Elle a commencé à parler. Elle a dit qu'elle avait six filles et qu'elle en était très fière. Vers la fin, elle nous a dit qu'elle avait aussi six fils. Voilà une mère, une femme ordinaire, qui est très puissante.
Est-ce que vous recevez du financement pour vous permettre de raconter ces histoires, pour parler des femmes comme celle que j'ai rencontrée, et de vos coutumes? Y a-t-il des projets en cours qui feront état de vos réussites?
Notre façon de raconter les histoires et d'être récompensé est liée à Hollywood, à la télévision et au cinéma.
Mme Brown: On attribue quelques prix dans diverses régions. Toutefois, ce serait une bonne idée de récompenser les gens qui réussissent, comme vous l'avez mentionné. Effectivement, la situation semble sombre; cependant, il y a des femmes qui réussissent à titre de parent, en affaires, en politique ou dans d'autres domaines.
Le sénateur Léger: Il serait important de raconter ces histoires dans les régions urbaines, car, d'une certaine façon, vous y avez un public. Votre peuple est là.
Avez-vous entendu parler d'un projet où on s'attacherait à raconter les choses de votre façon? Je suis assez certaine que nous voudrions entendre cela.
Mme Brown: Oui, cela serait très utile. Toutefois, nous n'avons pas l'argent nécessaire.
Le sénateur Léger: Je crois qu'il faudrait lancer des projets, car il y a des gens extraordinaires dont l'histoire devrait être racontée.
Mme Larocque: Le projet de mentorat à l'Université de la Saskatchewan a cherché du financement pendant plus d'un an. Il était difficile d'obtenir des fonds fédéraux, car le projet était d'une portée limitée. Si nous avions choisi d'aider des femmes autochtones sans abri, nous aurions reçu beaucoup d'argent.
Nous devons poser aux jeunes femmes autochtones la question cruciale: qu'est-ce qui les a menées à choisir un mode de vie particulier?
Le sénateur Léger: C'est très intéressant. Nous n'avons pas assez d'argent; nous en sommes tous conscients. Je ne veux en rien diminuer l'importance des projets visant les sans-abri; toutefois, les projets comme ceux que je suggère permettent de comprendre les enjeux.
Le sénateur Gill: Vous avez mentionné, dans votre exposé, que vous vous répétiez depuis 30 ou 35 ans, tentant de faire connaître, avec bien peu de succès jusqu'à maintenant, vos besoins. Nous avons entendu ce commentaire de tout le monde. Je ne parle pas d'argent; je parle d'autre chose. Pourquoi avez-vous à répéter les mêmes choses, année après année?
Mme Brown: Il est évident à mes yeux qu'il ne semble pas y avoir l'engagement ou la volonté politique nécessaires pour s'attaquer aux vraies questions. Nous allons peut-être voir des changements proposés au moment du discours du Trône ou quand il y aura une élection en vue, mais la volonté diminue alors. Il nous faut nous asseoir et nous engager les uns face aux autres, pour dire que nous allons nous entendre. Oui, c'est un processus qui exige du temps.
Le sénateur Gill: Croyez-vous qu'il s'agit d'un manque de volonté de la part du gouvernement, ou encore est-ce que ce sont les gens responsables qui ne comprennent pas la situation des femmes dans les réserves? Est-ce un manque de connaissance, un manque de respect?
Mme Brown: C'est une partie de tout cela. Un partenariat auquel tous les gens s'engagent ferait la différence. Quand on parle de connaissance et de formation, il faut dire que la capacité n'y est pas. Les pauvres n'ont pas beaucoup d'énergie ou de moyens; ils ne peuvent venir tout le temps frapper à votre porte pour faire pression. Nous n'avons pas les moyens nécessaires pour aller frapper à votre porte, et nous n'avons pas de grande stratégie de lobbyisme. Parfois, nous avons les moyens voulus; d'autres fois encore, nous ne les avons pas. C'est variable. Nombre de facteurs entrent en ligne de compte.
Le sénateur Gill: Les jeunes emménagent en ville partout au pays. Y a-t-il des jeunes qui reviennent dans leur communauté? Ils sont si nombreux à s'en aller et, peut-être, à ne pas y retourner. Pourquoi?
Mme Brown: Les conditions dans les réserves ne sont pas idéales. S'ils veulent avoir accès à des occasions, ils doivent s'en aller, pour obtenir une formation et une éducation. Souvent, ils ne reviennent pas. Il est difficile de revenir une fois qu'on a quitté une communauté, parce qu'on ne veut plus vivre dans un tel milieu. Les conditions peuvent varier d'un cas à l'autre. Quand il y a eu violence sexuelle et des choses du genre, il est très difficile pour la personnes de revenir. Les communautés sont peu nombreuses. Il est difficile d'y retourner quand il y a eu un cas d'inceste, de mauvais traitement infligé à un enfant, de rejet. Les facteurs sont nombreux.
Mme Larocque: Étant quelqu'un qui a quitté sa communauté et qui n'y est jamais retourné, je peux dire qu'il y a de nombreuses questions qui entrent en jeu. Il y a le manque d'occasions, le manque de logements. Je ne peux avoir ma propre maison à la réserve; la loi m'empêche de le faire. Ma communauté est isolée; elle est située dans le nord de la Saskatchewan. L'enseignant, l'infirmière peuvent avoir un emploi dans la réserve; sinon, il faut s'allier avec certaines familles pour avoir du travail. Cela n'encourage pas les jeunes à revenir. Nous y retournons pour rendre visite aux gens, mais pas pour y vivre.
Le sénateur Gill: Quelle serait votre préférence? Pour répondre à vos besoins, devez-vous vivre dans un centre urbain ou dans la réserve, dans votre environnement et dans votre région?
Mme Larocque: Je préférerais voir l'édification de communautés saines dans les réserves elles-mêmes et en dehors de celles-ci, mais pas forcément pour mes besoins, mais plutôt pour les besoins de tous les membres de la communauté. Ce sont de beaux endroits où vivre.
Mme Brown: Surtout ma ville natale!
La présidente: J'aimerais aborder la question de la discrimination pratiquée envers les jeunes dans les centres urbains. Avez-vous fait des études là-dessus? En avez-vous fait l'expérience personnellement? Quelle est votre opinion pour ce qui est de la discrimination dans les centres urbains?
Mme Brown: Je connais d'abord et avant tout la région de Vancouver, pour ce qui est du milieu urbain. Nombre de jeunes quittent l'école à un très jeune âge parce qu'il y a beaucoup de discrimination dans les écoles. J'ai connu cela étant jeune, et mes enfants l'ont connu aussi. Cela existe toujours. Souvent, le jeune Autochtone n'a pas l'impression d'être dans son milieu à lui. Ce n'est pas qu'il y ait forcément un racisme flagrant, mais cela peut prendre des formes subtiles. Par exemple, les cours d'histoire ne disent rien sur nous. Nous n'avons pas droit à des images positives ou à des récits positifs à notre sujet. Les jeunes Autochtones sont très «déplacés» dans les écoles.
À propos de la discrimination, je suis au courant de l'affaire de quelques jeunes Autochtones de Vancouver qui ont été harcelés, à tel point que l'une d'entre elles s'est suicidée. L'autre, un jeune homme, a été tué après avoir été harcelé pendant de nombreuses années à l'école. Cela est toléré depuis trop longtemps. Il y a eu une certaine conscientisation récemment à ce sujet, mais le point de vue autochtone n'a pas été exprimé. Les gens ne savent pas que ces incidents touchaient des enfants ou des adolescents autochtones. La discrimination est flagrante.
Il y a deux solutions envisagées. À Toronto, il y a l'école autochtone. Certains disent que cela ne fonctionnera peut- être pas. Je crois que c'est une façon possible de procéder. Les gens n'ont pas à être inscrits de force à une telle école, mais c'est une option pour nos enfants, car nombre d'entre eux n'obtiennent pas une éducation adéquate dans les écoles ordinaires en ce moment. Il y a beaucoup de difficultés à surmonter.
La présidente: Vous lisez dans mes pensées. L'Amiskwaciy Academy — école autochtone — est située à Edmonton. J'aimerais connaître votre point de vue sur les écoles autochtones.
Il y a eu toute une discussion et tout un débat à propos de cette école, on disait qu'elle favorisait la ségrégation, des choses comme ça. Dans l'ensemble de l'Ouest canadien, en Alberta et en Colombie-Britannique, il y a bien des écoles d'immersion française.
J'aimerais savoir ce que vous pensez d'un système d'écoles séparées pour les Autochtones.
Mme Brown: Je suis en faveur de cela, parce que j'ai vu les difficultés qu'éprouvent les enfants en milieu urbain. Ce n'est quand même pas tout le monde qui préférera ce genre d'écoles. J'ai trois enfants, tous ayant fréquenté l'école ordinaire, de sorte que je suis consciente de ce qui s'y passe, surtout à l'école secondaire. C'est une zone de guerre. Nous voulons éliminer cela. Les gangs sont très actifs. Je n'affirme tout de même pas que cela n'arriverait jamais si nous étions chargés de diriger les écoles.
Il y a aussi des écoles autochtones en Colombie-Britannique, dans la région de Mount Currie, qui présentent un bon bilan. Tous les enseignants ont un diplôme; ils sont formés pour mettre à exécution un programme d'études efficace. Ce n'est pas tout le monde qui sera en faveur de ce genre d'école, mais il devrait y avoir cette possibilité.
La présidente: Encore une fois, cela m'amène à parler de la situation en ce qui a trait aux gangs.
Savez-vous dans quelle mesure le phénomène des gangs de filles est fréquent? Quelle est l'incidence de cela sur les jeunes femmes, surtout dans l'ouest du Canada, là où il y a tant de gangs?
Mme Brown: Je ne sais pas s'il y a des gangs où il n'y a que des filles. Tout de même, les activités des gangs parviennent à attirer un nombre élevé de jeunes Autochtones. Pour ce qui est de la région de Vancouver, surtout, je sais très bien qu'il y a le trafic de la drogue et de la prostitution.
Mme Larocque: Les filles autochtones finissent par se retrouver là-dedans en tant que prostituées; en dernière analyse, toutefois, la décision de le faire n'est pas vraiment la leur.
La présidente: Autrefois, je fréquentais le centre de jeunes contrevenants d'Edmonton, endroit où j'ai fait beaucoup de bénévolat. Cela m'a vraiment troublée, à l'époque, de constater le nombre de jeunes femmes autochtones qui s'y trouvaient, dont bon nombre avaient commis des actes criminels violents. J'entends parler de jeunes femmes qui forment leur propre gang et participent à des crimes violents. Ce sont des filles qui n'ont que 13 ou 14 ans. Il serait bon de faire des recherches et des études sur les jeunes femmes parce que cela m'inquiète beaucoup, en tant que femme autochtone, de voir que nos filles font cela.
Je serai présente à la collation des grades demain, à l'Université de l'Alberta; à ce moment-là, nombre de jeunes hommes et de jeunes femmes autochtones se verront remettre leur diplôme. Demain, trois autochtones verront souligner leurs études doctorales; il y a donc de l'espoir pour les jeunes. Grâce à des femmes fortes et à des organisations fortes comme la vôtre, nous avons beaucoup d'espoir, mais il y a encore beaucoup de chemin à parcourir.
Mme Larocque: Il est extrêmement important de demander aux gens dont c'est la collation des grades, et surtout les titulaires d'un doctorat, quel a été le facteur déterminant dans leur choix et leur style de vie.
La présidente: C'est une bonne idée.
Le sénateur Christensen: Nous avons discuté aujourd'hui de la question de l'argent et de la nécessité de trouver des fonds pour renforcer les programmes et le système d'éducation, pour permettre aux Premières nations de mieux comprendre leur culture et d'être fiers de leur culture. Ce sont deux secteurs où les progrès ont été constants.
Nous avons examiné le financement sous plusieurs rapports et, certes, il y a de bonnes sommes d'argent qui sont versées. Comment canaliser ce financement? Il semble aller aux bandes et aux programmes d'envergure, mais les petits programmes doivent bénéficier de fonds provenant soit des bandes, soit des programmes d'envergure. L'argent ne semble pas se rendre jusqu'à ces groupes. L'administration semble le dévorer; l'argent ne va pas là où il devrait aller, où il peut aider les gens.
Comment surmonter cette difficulté? Il y a beaucoup d'argent qui est versé, mais il ne semble pas se rendre là où le besoin se fait sentir. Comment faire en sorte qu'il se rende vraiment là, sans créer une énorme bureaucratie pour s'en charger?
Mme Brown: Cela est dû au fait, en partie, que, parfois, la capacité d'accéder aux fonds n'existe pas. Les groupes ne sont peut-être pas conscients des ressources existantes et ne savent peut-être pas comment accéder aux ressources, c'est- à-dire comment rédiger une proposition ou traiter avec l'administration. Il faut bâtir cette capacité. Cela aiderait à faire parvenir l'argent là où le besoin se fait sentir.
Le seul financement auquel ont accès les organisations de femmes, du côté du ministère des Affaires indiennes et du Nord, est celui qui est prévu dans le cadre du programme d'emplois d'été pour étudiants. Nous n'avons pas d'accès à d'autres sources de financement. Nous sommes exclus tout à fait du financement; nous n'en avons reçu aucun. Plutôt, l'argent est remis aux bandes indiennes dans les réserves. Nous ne sommes pas admissibles à ce financement. Notre source principale de financement est DRHC, qui se charge de programmes d'emploi, et Condition féminine Canada.
Le sénateur Christensen: Ce ne sont pas des programmes autochtones; ce sont des programmes généraux.
Mme Brown: Il y a à Condition féminine Canada un volet de financement pour les Autochtones, qui s'est révélé efficace au moment de soutenir les organisations de femmes autonomes, ce qui est pour nous un élément clé. Les groupes autonomes font un travail nettement plus concerté et nettement plus efficace.
Le sénateur Christensen: Que recommandez-vous en ce qui concerne le programme d'éducation? Je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'un système d'écoles séparées serait peut-être une option; tout de même, ce n'est pas forcément la solution à tous les problèmes, parce qu'il y aurait alors tout le problème du financement et la tâche des gens aptes à enseigner dans les situations de ce genre.
Que recommanderiez-vous pour les cours d'histoire dans les écoles, pour qu'il y ait plus des renseignements voulus sur le rôle joué par les Premières nations en Amérique du Nord et partout dans le monde?
Mme Brown: L'histoire des Premières nations et le rôle historique qu'elles ont joué seraient utiles sous de nombreux rapports dans la vie des jeunes. Ce serait très bénéfique si cela était un élément clé du programme d'études.
Comment faire cela? Il existe de nombreux historiens autochtones capables de raconter l'histoire authentique, de notre point de vue. Ce n'est pas forcément la seule histoire, mais de notre point de vue, ce serait important.
Le sénateur Carney: J'aimerais parler de l'éducation; toutefois, je veux préciser, pour le compte rendu, que notre étude, qui porte sur les jeunes Autochtones en milieu urbain, comprend les facteurs qui mènent à la migration vers les centres urbains. Dans le contexte, le projet de loi C-31 est un élément capital, et c'est ce pourquoi j'en ai parlé. C'est un facteur de la migration et c'est un facteur pour ce qui est de la question importante qu'a posée le sénateur Sibberston; c'est-à-dire: dans quelle mesure ces problèmes autochtones sont-ils des problèmes internes de la société autochtone?
Il est extrêmement paternaliste, voire oppresseur de notre part de laisser entendre que la société non autochtone est apte à proposer la solution à tous les problèmes autochtones. Nous avons parfois tendance à croire, d'après les questions que nous posons, que nous sommes aptes à résoudre tous les problèmes de la société non autochtone. Or, cela est dégradant, cela est faux. Je le dis, pour le compte rendu.
La présidente du comité assistera à la cérémonie de remise des diplômes à l'Université de l'Alberta, et c'est merveilleux. Cette semaine, j'ai assisté à une cérémonie de la commission scolaire de Vancouver, pour la «collation des grades» de tous les élèves des Premières nations en septième année, assemblés à un endroit, honorés, avec un festin et des certificats de réalisation. La raison de cela, me dit-on, c'est qu'on veut renforcer leur sentiment d'avoir accompli quelque chose rendu à la septième année et les encourager à poursuivre leurs études. Selon vos dossiers, les deux tiers des enfants autochtones ne terminent pas leurs études secondaires.
Madame Brown, êtes-vous au courant de ce programme? Est-il utile? Permet-il aux jeunes de ne pas décrocher?
Mme Brown: C'est un très bon programme. Mes enfants relèvent de la commission scolaire de Burnaby, où il y a eu une cérémonie semblable. Cela a eu une influence très positive. Ils ont honoré les enfants et organisé à leur égard un beau festin. Ils ont invité des aînés à assister à la cérémonie, et chacun des enfants a reçu une plume d'aigle, ce qui est un grand honneur. Les enfants flottaient sur un nuage. Il y avait des prix de présence, de réalisation et ainsi de suite. C'était pour l'ensemble des élèves de la septième année. Cela a été une expérience très positive.
J'ai parlé à un diplômé de Terrace qui a affirmé qu'il était très beau de voir les activités qui ont été organisées à l'occasion de la collation des grades à l'école secondaire.
Le sénateur Carney: Ces mesures provisoires représentent des façons de soutenir les enfants et de les encourager à poursuivre leurs études.
Je voulais signaler que la raison pour laquelle j'ai été appelé à participer aux travaux de ce comité est liée au contenu canadien, ce qui veut dire que ce sont non seulement les communautés autochtones qui accordent de la valeur aux jeunes Autochtones, mais aussi un pays qui s'appelle «Canada». Le Canada les honore et a besoin d'eux.
Est-ce là un élément utile aux élèves, d'avoir l'impression qu'il y a une société plus vaste à laquelle ils peuvent participer?
Mme Brown: Oui. C'est un très bon message pour eux.
Le sénateur Carney: Cela me permettra d'obtenir plus d'appuis quand je prononcerai mon discours.
Quelles autres mesures peut-on prendre pour soutenir l'image des femmes autochtones dans les écoles? Je sais que vous avez besoin de modèles à suivre, nous avons tous besoin d'un modèle à suivre, mais y a-t-il autre chose? Vous parlez de la publicité dans les médias et ainsi de suite, mais que pouvez-vous faire à l'interne? Nous pourrions demander à la mère mentionnée par le sénateur Léger de le faire — elle a eu six filles —, mais que pouvez-vous faire à l'interne, au sein de la société autochtone, pour favoriser l'estime de soi des femmes?
Mme Brown: Nous avons parlé du rôle des femmes pour ce qui est des questions internes, au sein de nos communautés. Nombre de nos communautés découlent d'une culture matrilinéaire et matriarcale, de sorte que le rôle des femmes a été «déplacé», car il n'y a pas de place pour cela dans la Loi sur les Indiens. J'adhère à ce genre de préceptes, à ce genre de façon d'être. Ce serait important pour réétablir et renforcer le rôle de nos femmes. C'est un élément clé parce que nous avons été maltraitées pendant beaucoup trop longtemps. Une bonne part de cela provient de la Loi sur les Indiens, qui a signifié le début du patriarcat au sein de nos communautés.
Le sénateur Carney: Au sein de votre association, que faites-vous pour amener les jeunes femmes à participer au processus politique et pour les conscientiser à ces questions? Je pose la question parce que je constate — qu'on me dit — que les femmes âgées jugent convenable le statu quo, parce que c'est comme cela qu'elles ont été élevées, c'est comme cela que le monde est. Que faites-vous pour éduquer les jeunes femmes autochtones, dans les centres urbains en particulier, pour leur dire qu'elles ont un rôle plus large à jouer ou que cela échappe à vos ressources pour l'instant?
Mme Brown: Cela n'échappe pas entièrement à nos ressources, mais nous avons dû nous battre. Nous avons eu de la difficulté à mettre sur pied notre conseil jeunesse. Les jeunes sont nombreux à travailler à notre bureau, de sorte qu'il est important qu'ils aient pour mentors des femmes au sein de la direction qui participent aux travaux de notre organisation, parce que nous nous concentrons sur des questions particulières dont ils n'entendraient pas forcément parler ailleurs.
Pour moi-même, je n'ai pas vraiment l'occasion de travailler à la base, de voyager et de rencontrer ces femmes pour leur parler et engager un dialogue. Je ne suis pas sûre que les femmes âgées acceptent davantage la situation. Peut-être n'avons-nous pas eu avec elles cette discussion politique. Les femmes participent tant aux affaires de la communauté, elles appuient vraiment les affaires communautaires, elles s'occupent de la famille, elles soutiennent toute la structure sociale, si bien que cela prend tout le temps qu'elles ont à leur disposition.
Le sénateur Carney: Vous avez parlé de la discrimination dans la région de Vancouver et de la violence faite aux jeunes Autochtones. Un des cas les plus médiatisés à Vancouver, en ce moment, est celui d'un jeune non-Autochtone qui a été battu par des jeunes Autochtones de Musqueam. Les auteurs de cet acte criminel ont reçu une peine légère, c'est-à-dire la détention à domicile. Ce sont des adolescents et non pas des adultes aux yeux des tribunaux.
Croyez-vous que le système devrait comporter des sanctions moins lourdes envers les Autochtones, par rapport aux non-Autochtones, pour être utile à la société autochtone? On semble croire que les jeunes Autochtones qui commettent des actes violents, comme c'est le cas ici, peuvent légitimement recevoir une peine moins sévère que s'ils n'étaient pas autochtones. De fait, cela faisait partie des modifications apportées par le Sénat à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Il y a des Autochtones qui croient que ce n'est pas utile, que le fait de dire aux jeunes Autochtones qu'ils vont s'en tirer à bon compte s'ils commettent des crimes n'est pas utile à la société autochtone. Avez-vous des idées personnelles là-dessus?
Mme Brown: Nous dénonçons la criminalité et la violence sous toutes leurs formes. Nous ne voulons pas voir cela. Malheureusement, le racisme et la discrimination ont donné des jeunes qui sont très en colère et qui ont beaucoup d'hostilité et de haine.
C'est un cas exceptionnel, tout de même. Il est rare que les Autochtones s'en tirent à bon compte. La plupart des Autochtones purgent une longue peine pour avoir commis un crime d'ordre mineur, en comparaison avec les autres membres de la population; je ne crois pas que cela soit très présent.
Le sénateur Pearson: J'aimerais revenir aux observations que vous avez formulées au sujet de l'éducation sexuelle. C'est une question importante. C'est également une question difficile et pas seulement au sein de la communauté autochtone.
J'ai travaillé avec Cherry Kingsley aux questions touchant l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Il semble que la notion d'une saine sexualité soit quelque chose que nous devrions tous inculquer à nos enfants. Connaissez-vous des cas, au sein de la communauté autochtone, où la question a été abordée de manière saine, en ce qui concerne l'éducation?
Mme Golic: Je me souviens que nous avons eu une discussion à ce sujet, durant les discussions avec les membres de notre conseil jeunesse, avec une des délégués de la Nouvelle-Écosse, qui parlait de son école à elle. Cela varie d'une école à l'autre. Je ne suis pas sûr de connaître un exemple qui provienne d'une communauté en particulier.
À l'inverse de certains de nos délégués, qui proviennent de régions éloignées comme le Labrador, là où on n'a pas accès à l'éducation sexuelle et où il n'y a pas de dépliants sur l'éducation sexuelle, la déléguée de la Nouvelle-Écosse avec qui j'ai eu la conversation m'a dit qu'il n'y en avait pas suffisamment. Nous savons tous combien de dépliants sont produits. Les jeunes dans certaines de ces régions éloignées n'ont pas accès à cette information. La déléguée de la Nouvelle-Écosse a affirmé que son école tenait des ateliers et distribuait des dépliants sur l'éducation sexuelle. La question n'a rien d'un tabou à l'école de cette déléguée. Celle-ci croyait que c'était utile pour les jeunes Autochtones en milieu urbain aussi. Tout de même, cela dépend de l'école.
Cette adolescente a affirmé qu'une des façons d'améliorer la situation dans les écoles consiste à aborder le conseil étudiant et à lui donner pour consigne de demander que l'éducation sexuelle soit inscrite au programme d'études. Il n'est pas facile de faire inscrire l'orientation professionnelle au programme d'études; il est encore plus difficile de le faire dans le cas de l'éducation sexuelle. Si je me fie aux conversations que j'ai eues avec nos jeunes, toutefois, l'éducation sexuelle n'est pas toujours exclue du programme d'études. Dans certaines communautés, dans certaines écoles, il y a de l'éducation sexuelle.
Pour ce qui est de notre organisation dans son ensemble, les jeunes affirment que la grossesse chez les adolescentes est un gros problème, surtout à Edmonton à la conférence nationale sur la stratégie jeunesse autochtone. Elle a affirmé que, dans son coin, les cas de grossesse chez les adolescents ne représentent pas une grande difficulté parce qu'ils ont accès à de l'éducation sexuelle. Il existe certains exemples positifs.
Le sénateur Pearson: C'est bon. Savez-vous que l'Association des femmes autochtones du Québec, l'AFAQ, a produit une brochure intéressante sur la sexualité? Je souhaite signaler cela à notre comité parce qu'il s'agit d'une ressource très utile. Voilà une des questions qu'il nous faut examiner sérieusement afin de déterminer les modèles qu'il conviendrait de diffuser dans notre rapport.
Le sénateur Léger: Nous parlions il y a un instant de l'histoire des peuples autochtones et du fait que celle-ci soit présentée de votre point de vue et non pas du nôtre. Est-ce possible en tant que projet? À l'heure actuelle, dans les écoles urbaines, partout où il y a des Autochtones présents au cours d'histoire, le manuel relatera l'histoire des peuples autochtones. Devrions-nous recommander que l'histoire des Autochtones pour tous les Canadiens, figure dans le programme d'études générales et non pas seulement celui des peuples autochtones?
Je crois qu'un projet comme celui-là pourrait être lancé immédiatement. Peut-être que les choses évoluent plus rapidement aujourd'hui en raison de tout le travail qui a été fait auparavant. Les cours d'histoire pourraient être mis en place presque tout de suite, et ils seraient différents dans les nombreuses régions du pays.
La présidente: Comme le comité a pour tâche de concevoir un plan d'action pour que les choses changent, quels seraient les deux projets les plus importants, à cet égard, que le comité, à votre avis, pourra examiner?
Mme Brown: La question du financement revêt une importance capitale. Les gens ne peuvent s'organiser, se rencontrer ou réaliser des projets sans financement. La deuxième question touche l'éducation des jeunes Autochtones, l'idée de faire en sorte qu'ils n'abandonnent pas leurs études pour qu'ils puissent s'épanouir, avoir une bonne estime de soi et de bons espoirs pour l'avenir, comme toute autre personne au sein de la société canadienne.
Mme Larocque: Il est difficile de classer les recommandations par ordre d'importance. Je dirais que la santé, et la santé sexuelle en particulier, des femmes autochtones revêt une importance capitale. L'emploi chez les jeunes Autochtones est également très important; nous devons avoir des jeunes qui travaillent. Je suis originaire de Saskatoon, là où il y a beaucoup de jeunes Autochtones dans les centres commerciaux. On ne voit pas de jeunes Autochtones qui travaillent au centre commercial, par exemple. Il importe qu'il travaille et qu'ils acquièrent les aptitudes nécessaires pour diriger.
Mme Golic: L'administration des services de santé de base et des services de santé mentale par l'entremise des centres jeunesses est importante. Les jeunes autochtones souhaitent avoir un endroit où se tenir et passer du temps, ils en ont besoin, pour être dissuadés de s'engager dans un comportement destructeur. Les centres de cette nature seraient importants. Il y en a d'excellents en ce moment. Ce serait un défi à relever: combler les lacunes relevées, évaluer les cas fructueux et s'assurer de diffuser le tout dans différentes communautés.
Les études postsecondaires sont également importantes pour que les Autochtones puissent en arriver au même point que leurs modèles de comportement. Les gens sont nombreux à dire qu'ils souhaiteraient qu'il y ait plus de bourses d'études pour les jeunes Autochtones. J'en connais quelques-unes, mais, encore une fois, il y a le problème de l'accès. Souvent, il n'y a pas suffisamment de renseignements sur les bourses offertes. Une amélioration à cet égard — pour s'assurer que les jeunes Autochtones savent ce qui leur est offert — serait extrêmement avantageuse.
Les jeunes Autochtones aimeraient qu'il y ait une meilleure coordination des dossiers de la santé, de l'éducation et de l'emploi. Souvent, tout cela est relié. Prenez, par exemple, le cas d'une adolescente enceinte qui n'arrive pas à trouver du travail et qui devient dépressive. Les questions qui entrent en ligne de compte touchent la santé, l'éducation et l'emploi. Il faut une meilleure coordination de ces choses au sein des communautés.
La présidente: De nombreuses organisations autochtones ont conçu des programmes d'études assez poussés. Néanmoins, les provinces dont le ministère est chargé de mettre en application les programmes d'études, dans les écoles, ne s'en sont pas servi. Comment croyez-vous que votre organisation pourrait négocier cela et collaborer avec le service chargé des programmes d'études dans chacune des provinces, puisqu'il s'agit d'une compétence provinciale? Comment croyez-vous que votre organisation pourrait travailler avec eux pour les encourager à faire cela et s'assurer que toute cette question est bien soulevée?
Un bon exemple à cet égard: en Colombie-Britannique, nous nous sommes occupés de l'élaboration d'un programme d'études pour la division scolaire de Prince George. Au cours d'un atelier, les enseignants nous ont dit qu'il y avait, sur la tablette, cinq ou six très bons programmes d'études. Croyez-vous que votre organisation pourrait travailler dans ce contexte?
Mme Brown: Oui. Nous avons de nombreux projets de recherche et nous disposons de nombreux renseignements que nous pourrions fournir.
La présidente: Je vous remercie tous d'avoir fait en sorte que la séance d'aujourd'hui nous instruise et nous éclaire.
Mme Brown: Nous nous attendions à une audience d'une demi-heure seulement. Merci d'avoir passé tant de temps avec nous.
J'aimerais dédier notre séance à la jeune femme qui a été repêchée dans la rivière des Outaouais l'autre jour. Ce genre de tragédie est devenu beaucoup trop courant parmi nos jeunes — des jeunes femmes qui sont assassinées et qui n'ont jamais eu l'occasion de grandir, de se réaliser, de réaliser leurs rêves.
J'aimerais aussi dédier la séance aux femmes disparues dans le Downtown Eastside de Vancouver. Soixante pour cent des disparues sont de jeunes femmes autochtones. Nous tenons à vous le rappeler. Les gens vont courir un grand risque si nous n'agissons pas.
La séance est levée.