Délibérations du comité sénatorial permanent
des affaires étrangères
Fascicule 17 - Témoignages
OTTAWA, le mardi 20 novembre 2001
Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères se réunit aujourd'hui, à 18 h 15, pour examiner le projet de loi C-32, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Costa Rica.
Le sénateur Peter A. Stollery (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président: Honorables sénateurs, je déclare la séance ouverte. Nous recevons aujourd'hui M. Patrick O'Brien, député et secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, ainsi que Mme Heather Grant, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
Je vous cède la parole.
M. Patrick O'Brien, député, secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international: Honorables sénateurs, je suis heureux de représenter le ministre du Commerce international, l'honorable Pierre Pettigrew, et d'entretenir le comité au sujet de la Loi portant mise en oeuvre de l'ALE entre le Canada et le Costa Rica.
Pour commencer, je me dois de vous présenter les excuses du ministère. J'ai maintenant distribué les remarques du sénateur Austin alors que, lorsque les classeurs vous ont été remis, elles n'y figuraient pas comme cela aurait dû être le cas. Nous reconnaissons cette erreur et la rectifions maintenant.
Honorables sénateurs, j'aimerais parler des avantages du commerce pour notre pays. Ce n'est évidemment pas un secret pour personne que le Canada est un pays on ne peut plus commerçant à l'échelle de la planète. Nous dépendons du commerce dans une grande mesure et nous en tirons parti. Près de 43 p. 100 de notre PIB est directement attribuable à l'exportation des biens et services. Un emploi sur trois au Canada est maintenant relié directement à nos succès sans précédent dans le domaine du commerce international.
Le fait d'avoir compris que notre prospérité est intimement liée au commerce international nous a amenés à rechercher un système commercial international plus ouvert, fondé sur des règles claires. Si vous permettez, monsieur le président, je souhaite répéter ici les félicitations que moi-même et beaucoup de députés de la Chambre des communes des deux côtés avons adressé au ministre du Commerce international, ainsi qu'au ministre de l'Agriculture, pour le travail qu'ils ont accompli à Doha, la semaine dernière, de même que pour le rôle important qu'ils ont joué dans le but de faire accepter l'amorce d'une nouvelle ronde de négociations.
Le ministre du Commerce international est l'un des six facilitateurs qui ont contribué à concocter cet accord. Il suffit d'examiner de près les faits pour comprendre que cet accord sera à l'avantage du Canada et qu'il doit également être à l'avantage des pays en développement. Je pense que l'appui des Canadiens à l'égard du libre-échange, appui sans précédent, y est largement subordonné. L'«Agenda de Doha pour le développement», puisque telle est l'appellation retenue, indique clairement la voie que nous espérons suivre. Je vous remercie de me donner l'occasion de féliciter les deux ministres ainsi que leur personnel pour l'immense travail qu'ils ont accompli.
Honorables sénateurs, nous savons tous que la prospérité économique de notre pays dépend largement du commerce. En tant que gouvernement, nous suivons simultanément trois voies. Au plan multilatéral, nous sommes satisfaits du succès enregistré à Doha, soit l'amorce d'une nouvelle ronde de négociations OMC et nous avons l'intention de jouer un rôle important à cet égard au cours des prochains mois et années.
Le Canada estime qu'une nouvelle ronde de négociations offre le meilleur espoir d'expansion et de consolidation du système fondé sur des règles, qui donne de si bons résultats pour notre pays. J'ai parlé à des opposants à l'OMC et j'ai rencontré également des électeurs dans ma ville d'origine, London, en Ontario, lorsque la Chambre était en congé la semaine dernière, notamment un groupe du Conseil des Canadiens, qui n'en voit absolument pas l'intérêt. J'ai essayé de leur faire comprendre que s'il est un pays qui a besoin d'un système commercial fondé sur les règles, c'est bien le Canada. Étant donné que notre meilleur partenaire commercial et notre pays ami le plus proche est 10 fois plus grand que nous, nous avons besoin d'un système commercial fondé sur des règles. Comme l'a dit clairement Kofi Annan dans son allocution, un système commercial libéralisé, mondialisé, fondé sur des règles est probablement ce que nous pouvons faire de mieux pour aider les pays en développement, les pays les moins développés, les pays les plus pauvres de la planète. Je n'ai pas encore entendu d'opposants réfuter les arguments du secrétaire général; j'attends toujours et je les mettrai en demeure le moment venu.
Le Canada est très dynamique au plan multilatéral. Comme je l'ai dit plus tôt, grâce au leadership du ministre, nous jouons un rôle très constructif à l'OMC, au plan multilatéral. La deuxième voie est bien sûr la voie régionale.
Comme vous le savez tous, nous avons commencé à mettre sur pied, à l'échelle de l'hémisphère, la Zone de libre-échange des Amériques, qui en est à ses premiers balbutiements. J'ai participé comme certains d'entre vous à une rencontre à Ottawa il y a un an à peu près, avec des parlementaires de la plupart des pays des Amériques, pour lancer cette mission.
La ZLEA offre une occasion historique de regrouper les pays de l'hémisphère dans une zone de libre-échange globale qui contribuera à la création d'emplois et à la croissance au Canada comme dans toute la région. Le Mexique est l'un des pays les plus en faveur de la ZLEA. Je vous rappelle les remarques faites par le président Fox aux opposants du commerce international: «Laissez-nous décider seuls». Le président Fox a été élu démocratiquement. Il a dit: «Laissez-nous décider seuls, en tant que pays en développement, ce qui sera à l'avantage de notre peuple». Il s'agit d'un autre commentaire que nous avons transmis aux opposants du libre-échange et pour lequel nous n'avons pas vraiment reçu de réponse.
Nous appuyons avec enthousiasme les négociations ZLEA qui sont maintenant en cours. Nous continuons de jouer un rôle actif. Mon collègue, Bill Graham, député, joue un rôle clé dans cette organisation et va y contribuer de façon importante.
La troisième voie suivie simultanément par le gouvernement, c'est la voie qui consiste à saisir des opportunités bilatérales, comme l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Costa Rica dont nous discutons ce soir. Nous considérons qu'il faut avancer sur ces trois voies. Je tiens à dire - cela ne figure pas dans mes notes, mais j'ai entendu le ministre du Commerce international le dire souvent - qu'il apparaît très clairement que la voie multilatérale est notre priorité. Tous les efforts visent, si vous voulez, la réussite de l'OMC.
Si le Canada ne devait se fixer qu'une seule priorité, ce serait celle-ci, c'est évident. Toutefois, nous n'avons pas l'intention de ne rien faire au sujet des opportunités régionales et bilatérales qui se présentent également.
Nos rapports avec le Costa Rica témoignent d'une coopération de longue date et d'avantages réciproques. Cet accord de libre-échange ne fera que renforcer ces relations.
Le Costa Rica, qui compte 3,9 millions d'habitants, qui ne possède pas de forces armées et qui s'appuie sur des institutions démocratiques de longue date, est un important pôle de stabilité en Amérique centrale.
Les rapports sont intéressants. La population des États-Unis est 10 fois plus importante que la nôtre et le Canada est à peu près10 fois plus important que le Costa Rica. Le Canada et le Costa Rica partagent des cultures politiques semblables, puisqu'ils mettent l'accent sur le respect de la primauté du droit, la démocratie, le respect des droits de la personne et l'environnement. Ce sont nos priorités essentielles.
Nous considérons que cet accord sert les intérêts des deux pays. Le Canada jouit d'une réputation bien méritée de défenseur des petites économies et l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Costa Rica permettra de la consolider. L'entente entre le Canada et le Costa Rica prouve qu'il est possible de négocier ces genres d'accords entre une économie plus imposante et une autre plus modeste, les deux en sortant gagnantes. Nous continuons de renforcer ce point de vue avec notre principal partenaire commercial également, même si nous avons quelques problèmes avec lui, comme vous le savez.
Il y a d'autres avantages, bien sûr. Cet accord renferme également des chapitres qui créent des précédents sur la facilitation du commerce et sur la politique de la concurrence. Des accords de coopération sur l'environnement et le travail, qui complètent l'ALE, ont également été négociés parallèlement.
D'aucuns, même s'ils sont très peu nombreux, considèrent qu'il faut se débarrasser des ententes commerciales dans la mesure où elles ne renferment pas de normes liées au travail et à l'environnement.
J'ai posé cette question au président du BIT lorsqu'il était ici. Il n'a pas tari d'éloges à l'égard du Canada, si créatif dans le contexte d'ententes particulières.
À la Chambre des communes, à tout le moins, très peu pensent que nous devons intégrer des normes dans ces ententes commerciales, la plupart considérant que ce n'est pas la meilleure façon d'aller de l'avant. C'est dans cet esprit que nous avons ici négocié des accords parallèles.
Selon le Canada et le Costa Rica, un engagement de coopération en matière d'environnement et de main-d'oeuvre, jumelé à une application efficace des lois nationales, devrait aller de pair avec la libéralisation des échanges. Ces accords parallèles visent à promouvoir les valeurs communes aux deux pays, comme la primauté du droit et le développement durable.
Honorables sénateurs, j'essaie de vous décrire une relation bilatérale dynamique. Elle est de petite envergure, bien sûr. Nos relations commerciales valent près de 270 millions de dollars, mais ce chiffre augmente et nous pensons que si l'on donne à cette entente force de loi, ce que nous espérons très bientôt, cette tendance ne pourra qu'en être consolidée.
Les Canadiens saisissent de plus en plus rapidement les occasions, ce qui peut expliquer l'enthousiasme suscité par les longues consultations tenues au sujet de cette initiative. Les Canadiens ont participé en grand nombre et ont appuyé l'idée d'un ALE avec le Costa Rica. Il faut également signaler qu'un nombre relativement important de petites et moyennes entreprises se sont montrées intéressées par un tel accord. Pour ces entreprises, des chiffres comme 270 millions de dollars sont très importants. Il n'est pas étonnant qu'elles appuient un tel projet compte tenu des occasions considérables qu'offre le marché costaricien pour une quantité de produits canadiens.
Nous sommes confiants que les habitants des deux pays pourront profiter de la prospérité qu'engendre la libéralisation des échanges commerciaux en ayant un accès plus vaste aux deux marchés.
Au bout du compte, nos efforts visant à libéraliser le commerce au plan multilatéral, régional et, dans le cas du Costa Rica, au plan bilatéral, poursuivent le même objectif - un système commercial fondé sur des règles qui soit plus ouvert.
Comme je l'ai dit un peu plus tôt et comme le ministre l'a expliqué à de nombreuses reprises, ce qui compte le plus c'est que l'on s'efforce d'atteindre l'objectif numéro un du Canada dans le domaine du commerce international, soit l'instauration sous l'égide de l'OMC du système commercial fondé sur des règles qui soit le plus fort, le plus efficace et le plus juste possible.
Je siège au sein du Comité des affaires étrangères et du commerce international de la Chambre des communes. Nous avons également un sous-comité spécial du commerce, présidé par Mac Harb, dont je suis membre également et qui a tenu des audiences sur ce projet de loi. Le seul problème qui se pose, c'est la perception d'une menace pour l'industrie canadienne du sucre.
Il y a à la Chambre des communes un groupe qui défend la cause du sucre, présidé avec compétence par ma collègue,Mme Jean Augustine. Ce comité a entendu le point de vue de tous les partis qui ont été informés de ces préoccupations. Lorsque nous avons fait rapport au comité permanent, nous avons dit qu'au moment de futures négociations bilatérales, nous voulions attirer l'attention du gouvernement sur ces préoccupations.
Ce projet de loi est en fait très simple et fort positif pour les deux pays et nous espérons que les honorables sénateurs en faciliteront l'adoption. Merci de m'avoir donné l'occasion de parler au nom du ministre Pettigrew. Je me ferai un plaisir de répondre maintenant à vos questions.
Le président: Le sénateur Austin qui est le parrain du projet de loi aimerait dire quelques mots.
Le sénateur Austin: Le projet de loi me plaît beaucoup. J'ai déjà exprimé mon point de vue au Sénat lors du débat en deuxième lecture si bien que je ne vais pas m'attarder sur les détails. Toutefois, monsieur O'Brien, vous avez parlé de Doha et du rôle du ministre Pettigrew. Je voulais vous demander si à Doha, le Canada a pu imposer sa position et si, à votre avis, les divers pays envisagent, dans une plus grande majorité, de réduire les tarifs et les subventions dans le secteur de l'agriculture en général. Croyez-vous que l'on ait déclenché une tendance en faveur d'une réduction des tarifs dans le secteur de l'agriculture, malgré les objections de la France et de l'Inde, par exemple?
M. O'Brien: Merci, monsieur le sénateur. Le ministre et moi-même en sommes certainement convaincus. Nous étions quelque peu pessimistes les premiers jours, puis la situation s'est améliorée. Après l'amorce d'une nouvelle ronde de négociations, le gouvernement s'est fixé comme priorité le secteur de l'agriculture, à cause de la situation injuste que vivent nos agriculteurs à l'échelle du pays.
Dans mes échanges avec le ministre à ce sujet, il s'est avéré que l'UE était la principale et la seule entité à s'y opposer - elle s'est trouvée d'ailleurs très isolée, bien sûr - évidemment, il ne faut pas oublier la politique agricole commune de l'UE. J'ai soulevé ce problème à de nombreuses occasions auprès des parlementaires de l'UE.
Nous avons le pied dans la porte et espérons que l'on arrivera à s'entendre pour envisager de réduire ces subventions, et éventuellement les éliminer. Je ne pense pas que le ministre puisse prétendre que ce sera facile ou immédiat, mais notre gouvernement considère que c'est un grand pas en avant. Nous devons saisir l'occasion et ne pas lâcher prise.
Le sénateur Austin: Est-ce que notre système de la gestion de l'offre dans le domaine de l'agriculture, appliqué aux produits laitiers, avicoles, et cetera, est mis en jeu?
M. O'Brien: Bien sûr que non. Cette question a été posée au ministre hier en Chambre. Il a répondu de manière définitive que du point de vue du gouvernement canadien, le système de la gestion de l'offre ne faisait pas l'objet des négociations. D'autres pays versent d'énormes subventions et l'heure de l'autocritique n'a pas encore sonné.
Selon nous, la situation à cet égard est unique en son genre et elle est à l'avantage de nos marchés intérieur et d'exportation. Le ministre a été catégorique sur ce point hier à la Chambre. La réponse est non.
Le président: Pour votre gouverne, monsieur O'Brien, notre comité a fait deux études approfondies sur l'Union européenne et la politique agricole est bien connue de nos membres.
Le sénateur Bolduc: Cet accord cadre en général avec les accords de libre-échange que nous avons conclus avec le Chili et Israël, n'est-ce pas?
M. O'Brien: C'est exact, monsieur le sénateur.
Le sénateur Bolduc: En tant que partisan du libre-échange, je ne m'oppose pas trop au projet de loi, même si je suis dans l'opposition. J'ai simplement un petit point d'interrogation. Je veux parler de l'article 18 où il est indiqué que le gouverneur en conseil peut modifier ou suspendre l'application d'un texte législatif fédéral.
Je trouve inquiétant que l'on puisse, par voie de règlement, modifier un texte législatif. Je sais que nous allons vous donner ce pouvoir, mais entre nous soit dit, qu'en pensez-vous? Cela se retrouve à l'alinéa 18(1)b). En d'autres termes, vous demandez au Parlement de donner au gouvernement, par l'entremise du gouverneur en conseil, la possibilité de modifier un texte législatif. Ce n'est pas ce que m'a appris le professeur Pigeon, notre regretté juge de la Cour suprême, à la faculté de droit.
Mme Heather Grant, négociatrice en chef adjointe, Accord de libre-échange entre le Canada et le Costa Rica: Honorables sénateurs, si vous permettez, je dirais, pour commencer, qu'il s'agit d'une disposition courante.
Le sénateur Bolduc: Elle doit pouvoir s'expliquer.
Mme Grant: Je ne suis pas en mesure de répondre directement pour l'instant. Je vais me reporter à mes notes pour voir si je peux donner aux honorables sénateurs un exemple du recours éventuel à une telle disposition.
Le sénateur Bolduc: Il doit bien y avoir une explication technique. En ce qui concerne le principe juridique, je crois que le sénateur Grafstein conviendra avec moi qu'il est gênant pour des législateurs de dire que nous allons l'accepter.
M. O'Brien: Monsieur le sénateur, nous allons vous donner une réponse écrite le plus rapidement possible à ce sujet.
Le président: Cette disposition est rédigée de manière à cadrer avec l'article XIII.18 de l'accord; c'est donc peut-être une exception, sénateur Bolduc.
Le sénateur Bolduc: Je sais que vous connaissez bien votre domaine. J'ai entendu votre allocution à la Chambre qui a été très convaincante. Toujours est-il que j'ai un problème. Venant de la province du Québec, je sais que la société Lantic Sugar est présente à Montréal et qu'elle n'est pas très satisfaite de l'accord. Elle a présenté un document au Sous-comité du commerce, des différends et des investissements internationaux.
Le gouvernement le savait bien et a décidé d'aller de l'avant. En ce qui concerne le Costa Rica, ce n'est pas un gros problème, car nos exportations à destination de ce pays s'élèvent à moins de 100 millions de dollars et nos importations en provenance de ce pays sont de l'ordre de 400 millions de dollars ou quelque chose d'approchant. Ce n'est pas important. Par contre, le Guatemala est sans doute le prochain pays sur la liste. Cela pourrait considérablement léser l'industrie dont nous parlons.
Cet accord sera un précédent lorsque nous passerons aux négociations avec le Guatemala, et cela pourrait être défavorable. Peut-être allez-vous me dire que le gouvernement va négocier différemment, je n'en suis pas sûr. On est déjà exposé à un tel risque.
Que pensez-vous de cette situation? Je sais vous n'êtes pas du Nouveau-Brunswick, ni du Québec, mais je sais que vous pouvez probablement me répondre.
M. O'Brien: En tant que partisan des Canadiens de Montréal, j'ai un faible pour le Québec.
Monsieur le président, le sénateur vient de mettre le doigt sur l'inquiétude exprimée par plusieurs de mes collègues des deux côtés de la Chambre des communes. La première fois, ce sont les députés du parti ministériel qui ont porté ce point à mon attention.
Le sénateur Bolduc: Vous remarquerez que, contrairement à l'opposition de l'autre côté, je ne parle pas ici de questions liées à l'environnement ni de questions sociales. À mon avis, c'est un autre problème. Nous parlons de commerce.
M. O'Brien: Je comprends votre inquiétude et c'est la raison pour laquelle nous avons tenu des audiences au sous-comité. Nous avons entendu énormément de témoignages à ce sujet. Comme vous l'avez laissé entendre, monsieur le sénateur, le fait est qu'il n'y a pas de raffinerie au Costa Rica et que ce pays n'a pas vraiment de capacité en matière d'exportation. On se demande avec inquiétude où cela pourrait mener et vous avez tout à fait raison de le dire. C'est pourquoi, dans le rapport du sous-comité présenté au comité permanent, nous avons ajouté une note demandant qu'il soit tenu compte de toute inquiétude au sujet d'un éventuel précédent. Le sous-comité a adopté ce point à l'unanimité afin de le souligner pour la gouverne du comité permanent.
En fait, chaque accord bilatéral est différent. Même si beaucoup d'éléments sont semblables, il n'existe pas de modèle-type sous-entendant que tout futur accord serait conclu dans les mêmes conditions. Nous comprenons bien sûr cette inquiétude qui se manifeste des deux côtés de la Chambre.
Monsieur le sénateur, vous dites que vous êtes en faveur du libre-échange, comme le gouvernement. Si nous croyons au libre-échange, nous devons en accepter les défis.
Nous avons eu quelques problèmes avec certains de nos partenaires commerciaux qui sont en faveur du libre-échange lorsque cela leur convient et qui ne le sont plus lorsque cela ne leur convient pas. Nous sommes conscients de cette inquiétude et l'avons soulignée également.
Le sénateur Bolduc: Passons à autre chose, aucun processus officiel de consultation des provinces n'est prévu avant l'instauration du commerce. Je sais que vous consultez, car vous devez parler avec les gens d'affaires visés. Je le comprends. De façon plus générale, en Angleterre, si je ne me trompe, le système est plus ouvert, puisque le Parlement ne participe pas aux négociations. Par contre, au Canada, c'est un travail qui relève de l'exécutif et qui doit être accompli par le gouvernement.
En ce début du XXIe siècle, ne pensez-vous pas qu'il est quelque peu démodé que tous ces traités relèvent de la prérogative de l'exécutif, lequel peut ainsi prendre une décision sans appel?
Dans le système canadien, on retrouve toujours, ce que les États-Unis décrivent comme le pouvoir accordé par la procédure accélérée. C'est un pouvoir dont jouit le gouvernement de façon permanente. Nous n'avons pas le temps d'en discuter ici, mais je voulais simplement poser la question. Ne pensez-vous pas qu'un jour ou l'autre, il faudra revoir les prérogatives de l'État en ce qui concerne ces traités internationaux?
M. O'Brien: Je suis d'accord, le gouvernement devrait consulter le plus largement possible. Il devrait consulter les sénateurs et les députés également, ceux qui cherchent à jouer un rôle plus actif. J'en ai fait mention lorsque j'ai parlé de la ZLEA. Toutefois, pour être honnête, il faut dire que quelque 800 lettres ont été envoyées par le ministre du Commerce international et le ministre de l'Industrie aux sociétés, aux associations de la petite entreprise, aux organisations du travail, aux groupes de citoyens ainsi qu'aux provinces et territoires. La consultation a été assez vaste. C'est au fédéral que doit revenir la responsabilité de conclure des ententes commerciales, mais une consultation de plus en plus vaste doit bien sûr être prévue.
Nous pourrions tenir un débat des plus intéressants sur l'avenir de notre fédération, mais je crois que nous constituons sans doute l'une des fédérations les plus décentralisées du monde. Je suis d'accord avec vous: nous devons procéder à de vastes consultations. Je sais qu'il y en a déjà eu.
Le sénateur Bolduc: Il y avait 168 représentants du Canada au Qatar et pas un seul sénateur. J'aurais pensé que le sénateur Austin y serait allé, ou le sénateur Grafstein.
M. O'Brien: De nombreux sénateurs éminents des deux côtés auraient pu y participer. Chaque fois que j'ai voyagé à l'étranger dans le cadre d'une délégation canadienne, il y avait des sénateurs. En fait, on a pressenti six sénateurs et on s'attendait vivement à ce qu'au moins deux d'entre eux prennent part à la délégation.
Malheureusement, divers facteurs les en ont empêché. Toutefois, le ministre m'a informé que toutes les demandes à venir seraient déposées par l'entremise des whips du Sénat afin de garantir une représentation du Sénat. Je suis d'accord avec vous pour dire que leur présence aurait renforcé la délégation.
Le président: Cela nous a quelque peu décontenancé, puisque notre comité a travaillé sur l'Accord de libre-échange original avec les États-Unis en 1988 ainsi que sur tous les autres accords commerciaux depuis plusieurs années. En tout cas, personne ne m'a demandé d'y assister. Je ne voulais pas y aller, mais on aurait pu désigner l'un de nos collègues pour accompagner la délégation et je dois admettre que je suis bien déçu.
Le sénateur Graham: Je me réjouis de la présence de M. O'Brien, qui nous a parlé de la représentation internationale à venir et qui nous assure que le Sénat sera bien représenté.
Le sénateur Bolduc a soulevé la question du sucre. Est-ce la seule question délicate qui a été soulevée devant le sous-comité à l'autre endroit?
M. O'Brien: Non, mais c'était la principale question. Je crois qu'un seul groupe de témoins s'inquiétait des investissements, mais je n'ai jamais vraiment compris ses raisons. Nous avons conclu un accord de protection des investissements étrangers avec le Costa Rica, qui, à notre avis, sert très bien nos intérêts. Ce groupe voulait ajouter un autre chapitre sur l'investissement, ce que le gouvernement ne juge pas nécessaire, étant donné qu'existe déjà l'accord de protection des investissements étrangers. C'était la deuxième question. Elle était beaucoup moins importante parce que je crois qu'un seul groupe s'en inquiétait.
Le sénateur Graham: On nous a dit que cet accord prend modèle sur l'accord avec le Chili; est-ce exact?
M. O'Brien: Ce n'en est pas une copie conforme, mais il lui ressemble certainement dans la mesure où nous essayons de nous inspirer de tous les accords possibles lorsque nous en concluons un nouveau.
Le sénateur Graham: L'accord avec le Chili fonctionne-t-il bien?
M. O'Brien: Je demanderai à Mme Grant de répondre à cette question. Selon moi, il fonctionne très bien.
Mme Grant: En effet, notre accord avec le Chili fonctionne à merveille. Je n'ai pas de chiffres à vous présenter, mais nos échanges avec le Chili ont augmenté de façon exponentielle après la mise en oeuvre de notre accord avec ce pays. En fait, je puis affirmer que pendant la crise asiatique par exemple, les échanges entre d'autres pays et le Chili ont semblé diminuer, alors que ceux avec le Canada ont semblé demeurer relativement stables. Cette stabilité s'explique en grande partie par l'accord de libre-échange, qui a certainement orienté nos gens d'affaires, sur ce marché.
J'ajouterais que les États-Unis et le Chili sont en cours de négociations avec l'ambassadeur Zoellick, représentant américain du commerce extérieur. Si les États-Unis négocient actuellement avec le Chili, c'est parce qu'ils ont perdu une part du marché au profit des Canadiens. Nous en sommes très contents. À cet égard, j'ai des chiffres à vous communiquer. Ces chiffres montrent que les exportations canadiennes vers le Chili ont augmenté de 27 p. 100 en 2000 et qu'elles atteignent maintenant un nouveau sommet de 696 millions de dollars.
Le président: Comment ces chiffres se comparent-ils à ceux d'avant l'accord? La seule comparaison qui compte, c'est celle qui s'applique aux chiffres de l'année précédant la conclusion de l'accord.
Mme Grant: Je n'ai pas les chiffres sur le commerce avec le Chili, car je n'avais pas prévu vous les donner, mais je suis tout à fait disposée à vous les fournir si cela peut vous aider.
Le sénateur Graham: Nous savons que parfois, ces accords servent de fondement aux négociations en cours pour d'autres accords de libre-échange. Le sénateur Bolduc a fait mention du Guatemala et nous négocions sans doute avec d'autres pays d'Amérique centrale comme le Nicaragua, le Honduras et le Salvador. Peut-être pouvez-vous nous renseigner sur le déroulement de ces négociations?
M. O'Brien: On prévoit certainement entamer des négociations avec les autres pays d'Amérique centrale, mais pour l'instant, il n'y en a pas. Je crois toutefois qu'elles sont imminentes et qu'on les annoncera très bientôt. Comme le sénateur Bolduc l'a dit plus tôt, il s'agit du problème relatif à la raffinerie de sucre.
Pour répondre brièvement, il n'y a pas de négociations en ce moment, mais il y en aura très bientôt.
Le sénateur Setlakwe: Je m'inquiète des résultats tangibles obtenus à Doha et j'aimerais savoir ce que vous en pensez. Nous avons beaucoup parlé des échanges entre le Canada et les pays d'Amérique latine. En ce moment, nos exportations à destination de ces pays comptent pour environ 2 p. 100 du total de nos exportations et nous espérons atteindre les 5 p. 100 en 2005. Quant à nos exportations à destination de l'Europe, elles comptent pour 5,1 p. 100 de nos exportations totales. Nous accusons un déficit de 10 milliards de dollars vis-à-vis la Communauté européenne, avec qui nos échanges commerciaux totalisent 18 milliards de dollars.
Je crois comprendre que la France, en particulier, a accepté d'apporter certaines modifications à son système de subventions, ce qui pourrait nous être avantageux, mais selon vous, dans quelle mesure cela peut-il, à court ou moyen terme, améliorer nos débouchés commerciaux dans des pays qui sont amis du Canada, par tradition, et qui ont toujours été très proches de nous.
M. O'Brien: Tout d'abord, comme le président l'a indiqué, les membres du présent comité connaissent à fond la question du libre-échange. J'en apprendrai sans doute beaucoup ici ce soir. Les sénateurs connaissent très bien nos relations, comme vous l'avez si bien dit.
Premièrement, les échanges entre le Canada et le Costa Rica et d'autres pays d'Amérique latine, bien qu'ils ne représentent qu'un faible pourcentage, sont d'une importance symbolique. Ils témoignent en effet de notre engagement envers notre hémisphère, notre arrière cour, dans un sens. Comme vous l'avez fait remarquer, ces échanges se veulent un peu le point de départ d'un accord de libre-échange des Amériques, qui, selon nous, s'inscrit dans le cadre de l'accord de l'OMC. Ils sont tous très complémentaires et valent plus que de simples chiffres, si vous me permettez l'expression.
Je n'étais pas à Doha, étant donné que je remplaçais à la Chambre le ministre, qui lui, y était. Tout comme son homologue à l'Agriculture, il se dit très enthousiaste face aux progrès accomplis, car ce sont des progrès notables. L'Europe - et la France en particulier - s'est retrouvée toute seule à vouloir arrêter le temps, d'une façon. Le Japon, l'un des pays clés a, quant à lui, contribué à dénouer l'impasse. Je ne crois pas que le problème se réglera demain, mais nos agriculteurs, comme tous les Canadiens, ont de très bonnes raisons de croire qu'avec la mise en place de règles du jeu équitables, notre secteur de l'agriculture sera plus concurrentiel vis-à-vis l'Union européenne et les États-Unis.
J'aimerais simplement vous rappeler que le Comité permanent de la Chambre a effectué une étude approfondie sur nos relations commerciales avec l'Europe et qu'il est en train de monter un dossier commercial en prévision d'un accord de libre-échange avec l'Europe. Le comité pourra certainement prouver le bien-fondé d'une telle idée. Lorsque j'ai participé aux discussions, de façon officielle ou non la plupart des élus et des représentants européens se sont montrés ouverts à ce concept, mais souhaitent qu'on en établisse le bien-fondé. Nous croyons que c'est possible, et nous avons bien l'intention d'y parvenir. À cet égard, les progrès accomplis à Doha nous faciliteront beaucoup la tâche.
Le sénateur Setlakwe: Ce qui m'inquiète, c'est que, pour l'instant, la Communauté européenne dispose d'un accord de libre-échange avec le Mexique. Elle négocie aussi avec les États-Unis et le MERCOSUR, mais pas avec nous, à moins que je ne me trompe. Dans quelle mesure considère-t-on le Canada comme un facteur important dans le domaine du commerce? À mon avis, si nous concluons un accord de libre-échange avec l'Europe, nous jouirons de prodigieuses possibilités d'exportation. Je crains que le Canada ne se fasse devancer par le Mexique ou les États-Unis et que la Communauté européenne ne s'intéresse absolument pas à nous. Cela m'inquiète sérieusement.
Mme Grant: Pour donner suite aux observations de M. O'Brien, nous prenons très au sérieux le rapport du Comité permanent et nous nous efforçons de consulter un vaste échantillon de gens d'affaires. Nous voulons ainsi déterminer les avantages qu'il y aurait à entamer des négociations de libre-échange avec l'Union européenne. Nous prévoyons également tenir de vastes consultations avec les provinces au cours des prochains mois.
Le Canada a déjà effectué une étude sur l'élimination des droits tarifaires, dont le ministre Pettigrew a fait part au commissaire de l'Union européenne il y a quelques mois. Nous commençons ainsi à examiner les avantages possibles, pour les deux parties, d'éventuelles des négociations sur un accord de libre-échange. Je crois comprendre que l'Union européenne est aussi en train d'effectuer ses propres études.
Au cours des prochains mois, nous allons travailler en étroite collaboration pour essayer d'établir le bien-fondé d'une telle idée. Nous ne la mettons pas de côté, si cela peut vous rassurer.
M. O'Brien: Monsieur le président, j'aimerais juste faire trois remarques rapides. Comme nombre d'entre vous, je sais que le ministre soulève cette question chaque fois qu'il en a l'occasion. Il n'y a aucun doute là-dessus.
J'ai personnellement participé à deux missions commerciales en Europe. Ainsi, je suis d'abord allé en Europe centrale avec le ministre Pettigrew en septembre de l'année dernière, juste après ma nomination. Il y a là-bas d'excellentes occasions d'affaires que les Canadiens n'ont pas encore saisies. C'était en 2000.
En 1999, j'ai pris part au voyage du premier ministre en Irlande du Nord et en Irlande. Il y à là aussi de nombreuses occasions à saisir. Ce sont seulement deux exemples d'expériences personnelles dont je voulais vous faire part.
Je me rappelle les efforts de promotion du commerce déployés par un homme que beaucoup d'entre vous avez mieux connu que moi: l'ancien premier ministre Trudeau. Je ne crois pas que nous allons facilement nous emparer d'une énorme part des échanges commerciaux au détriment des États-Unis. En tant que pays, nous devons saisir toutes les occasions qui se présentent pour augmenter nos échanges commerciaux avec d'autres pays, comme il le souhaitait. Je voulais simplement vous donner quelques exemples de ma participation personnelle aux efforts déployés en ce sens. Merci de votre question.
Le président: J'aimerais rappeler à tous les sénateurs que le temps file; il est près de 19 heures. Ce serait bien si nous pouvions nous pencher sur le projet de loi. Il n'est pas controversé et il n'y a donc pas de raison de s'éterniser. Je ne veux pas vous couper, mais je ne pensais pas qu'autant de personnes poseraient des questions, à vrai dire.
Le sénateur Grafstein: Monsieur le président, c'est parce que vous nous stimulez et que les témoins se montrent imaginatifs que nous posons au moins quelques questions. Sinon, nous n'aurions pas ouvert la bouche.
Premièrement, je souhaite féliciter le ministère ainsi que M. O'Brien, qui le représente, pour cette approche envers le libre-échange. Nous croyons tous que nous avons un problème central, qui ne se pose pas vraiment en Amérique centrale mais au-delà, dans le contexte du MERCOSUR, et le principal obstacle au libre-échange dans le monde, c'est l'Union européenne.
Tout le monde pense que le problème se situe ailleurs, mais ce n'est pas le cas. Plus vite nous nous entendrons avec l'Amérique centrale, puis avec l'Amérique du Sud pour compenser les politiques protectionnistes de l'Union européenne, mieux ce sera. Je félicite le gouvernement pour cette approche.
Cela dit, c'est un modèle de libre-échange. Le sénateur Austin, parrain du projet de loi, et moi-même avons convenu que nous devions l'adopter ou le rejeter. Par conséquent, ce sont des questions très importantes pour moi.
Lorsque j'examine les dispositions sur les recours, je me rends compte qu'il n'en existe aucune permettant aux entreprises privées de poursuivre le gouvernement. Essentiellement, il s'agit d'une approche de pays à pays, contrairement à ce que prévoient les dispositions du chapitre 11 de l'ALENA sur les recours.
S'il s'agit d'un modèle, et si l'on tient compte de nos problèmes actuels avec les États-Unis à propos du bois d'oeuvre, en raison desquels le secteur privé pourrait avoir à poursuivre des organismes ou d'autres agences des États-Unis pour ce que je considère une conduite ultra vires, alors pourquoi avons-nous choisi de restreindre le droit des entreprises privées de poursuivre le gouvernement dans cet accord, contrairement à ce qui est prévu dans l'ALENA, sans l'appui du gouvernement et des ministères? Ce n'est pas vraiment le bon modèle à adopter si nous voulons négocier avec le Guatemala, le Nicaragua, le Honduras et le Salvador.
M. O'Brien: C'est une question importante. Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous avons conclu un APIE, soit un accord sur la protection des investissements étrangers avec le Costa Rica, qui, selon le gouvernement, offre les occasions auxquelles le sénateur Grafstein a fait allusion. Pour les détails techniques, je vais m'en remettre à Mme Grant.
Mme Grant: Comme M. O'Brien l'a dit, l'APIE couvre les rapports qui unissent le Canada et le Costa Rica au plan des investissements. Il est semblable au chapitre 11 de l'ALENA, vu qu'il prévoit un mécanisme de règlement des différends opposant un investisseur et un État. Étant donné que nous disposons déjà d'un APIE, on a décidé qu'il n'était pas nécessaire de rédiger un chapitre sur les investissements dans l'accord dont il est question.
Le sénateur Grafstein: Ce sera très important pour le secteur privé. Est-il juste de dire que le secteur privé, même si cela n'est pas explicitement précisé dans le présent accord de mise en oeuvre, pourra engager des poursuites en vertu de l'APIE de 1998?
Mme Grant: Oui, c'est juste.
Le sénateur Grafstein: Est-il exact de dire que cela n'empêchera pas le secteur privé d'alléguer que cet accord n'est pas respecté?
Mme Grant: C'est exact, et c'est propre à l'APIE.
Le sénateur Grafstein: Y a-t-il des restrictions?
Mme Grant: Je n'ai pas fait de comparaison entre les deux chapitres, mais ils sont très semblables.
Le sénateur Grafstein: Pouvez-vous nous en parler brièvement? Compte tenu de ce qui est arrivé avec le bois d'oeuvre, il est très important de ne pas restreindre les mouvements du secteur privé, lorsque les gouvernements agissent selon leurs ententes.
Nous sommes tous préoccupés par l'attitude protectionniste du MERCOSUR. Nous avons essayé, comme vous le savez, de négocier l'accès à ce marché, mais nous éprouvons un peu les mêmes difficultés qu'en Europe. Il s'agit, à mon avis, d'une excellente stratégie qui peut nous permettre de démonter les politiques protectionnistes du MERCOSUR.
Brièvement, où en sont nos négociations avec le Guatemala, le Nicaragua, le Honduras et le Salvador? À mon avis, plus nous avancerons rapidement sur le front du libre-échange dans ces pays, plus nous serons en mesure de forcer l'ouverture du MERCOSUR.
Mme Grant: Monsieur le président, comme l'a dit plus tôt M. O'Brien, nous prévoyons le lancement imminent de négociations avec les quatre autres pays d'Amérique centrale. J'imagine que nous allons nous y mettre aussi rapidement que possible.
En ce qui concerne ce que vous avez dit plus tôt au sujet de l'investissement, même si nous disposons bel et bien d'un accord sur la protection des investissements étrangers avec le Costa Rica, nous n'en avons pas avec d'autres pays d'Amérique centrale. Vous pouvez être certains, toutefois, qu'il en sera question lors des négociations.
Le sénateur Grafstein: En résumé, le ministère et le ministre souhaitent-ils lancer ces négociations aussi rapidement que possible et s'agit-il d'une priorité?
Mme Grant: Oui, c'en est une.
M. O'Brien: En ce qui concerne le chapitre 11, bien que je sois d'accord avec les points soulevés par le sénateur Grafstein, j'ai répondu au pied levé à suffisamment de questions en Chambre pour savoir que le gouvernement est convaincu que ce chapitre pourrait être amélioré. En fait, c'est ce que le gouvernement chercher à faire. Le ministre s'est montré très persuasif à cet égard.
Le sénateur Grafstein: Je conviens que la solution n'est pas parfaite et que nous devons essayer de l'améliorer et de l'étoffer. Cependant, elle existe.
Le sénateur Corbin: Qu'en coûtera-t-il pour donner suite aux dispositions administratives prévues dans le projet de loi? Vous mettez sur pied une commission, des comités, des sous-comités, et cetera. Le Canada doit assumer sa part des frais. Avez-vous déterminé les coûts ou est-ce qu'ils seront absorbés dans les coûts administratifs généraux du gouvernement du Canada?
Mme Grant: Un certain nombre des comités qui pourraient être mis sur pied sont des comités spéciaux pour ce qui est de la tenue des réunions. Nous avons très souvent tendance à nous rencontrer en marge d'autres réunions lorsque nous jugeons que c'est nécessaire. Par exemple, nous tenons parfois des réunions en vertu d'autres accords en marge de nos négociations relatives à l'ALEA. Il arrive très souvent que les négociateurs qui participent aux discussions pour le Costa Rica soient également partie prenante des négociations relatives à l'ALEA. Il va sans dire que nous prenons soins de réduire au minimum les coûts des mesures institutionnelles.
En fait, en ce qui a trait aux accords relatifs à l'environnement et à la main-d'oeuvre, nous nous sommes concertés pour réduire au minimum les aspects institutionnels du contenu de l'accord avec le Chili tout simplement parce qu'il s'agissait d'un accord très institutionnel et très coûteux à maintenir. Lorsque nous négocions ces accords, nous essayons de tenir compte de l'importance des rapports pour réduire au minimum les coûts.
Le sénateur Corbin: Ma deuxième question porte sur l'eau qui figure sous la rubrique des «dispositions générales», à la page 5. L'article 7 dispose que:
Il demeure entendu que ni la présente loi ni l'accord ne s'appliquent aux eaux de surface ou souterraines naturelles, à l'état liquide, gazeux ou solide.
Est-ce que cela est conforme aux dispositions relatives à l'eau d'autres ententes, plus précisément étant donné qu'elles s'appliqueraient aux eaux frontalières entre le Canada et les États-Unis?
Mme Grant: Je crois que oui.
Le sénateur Corbin: En d'autres mots, pourquoi l'eau est-elle mentionnée ici précisément?
Mme Grant: Je crois que c'est pour qu'il soit clairement établi que cet accord ne s'applique pas le moins du monde à l'eau. Notre gouvernement est souverain en matière de gestion de l'eau à son état naturel et l'exercice de cette souveraineté n'est nullement entravé par nos accords commerciaux.
Le sénateur Corbin: Cette disposition pourrait-elle avoir un effet sur l'eau embouteillée à l'état naturel?
Mme Grant: Cette disposition englobe les eaux de surface ou souterraine naturelles. En ce qui concerne l'eau embouteillée, sénateur, je préférerais que rien ne soit consigné au procès-verbal à cet effet.
Le sénateur Corbin: L'eau embouteillée est bonne, n'est-ce pas? Si elle est embouteillée, elle est commercialisable?
Le président: C'est de l'eau de surface en bouteille.
M. O'Brien: J'ai participé aux délibérations consacrées à cette question. Le sénateur a évoqué un point important. Je ne pense pas qu'il existe nulle part de l'eau à l'état naturel en bouteille. Dès que vous l'embouteillez, elle n'est plus à l'état naturel. C'est toujours de l'eau. Cette question est susceptible de faire l'objet d'un débat.
Le sénateur Corbin: Si je voyais une disposition de ce genre dans un accord commercial entre le Canada et les États-Unis, je ne sourcillerais pas, mais le Costa Rica est tellement loin. Est-il nécessaire d'inclure un article de ce genre dans la mesure législative? Pourquoi s'y trouve-t-il? C'est ce que je ne comprends pas.
M. O'Brien: Sénateur, comme nous le savons tous, toute la question de l'eau et de son exploitation possible est controversée et très contestable au Canada. L'impression c'est qu'une déclaration comme celle-ci renforce la position du gouvernement du Canada.
Le sénateur Corbin: Il ne s'agit donc pas d'une interdiction en ce qui a trait à l'exportation d'eau. Que dit cet article? Il ne dit rien.
Mme Grant: Le mot important est «naturelles».
Le sénateur Corbin: C'est un truisme qui ne mène nulle part, ne vient de nulle part. C'est le genre de chose que vous dites pour une plus grande certitude, mais cela ne mène à rien.
Y a-t-il quelque chose dans cette mesure législative qui affaiblit le pouvoir du gouvernement canadien de légiférer dans son propre domaine de compétence?
M. O'Brien: Pas à ma connaissance.
Mme Grant: Non.
Le sénateur Corbin: En vertu des règles de l'OMC - et je suppose que vous essayez d'harmoniser un accord de ce genre avec les règles plus globales de l'OMC - les initiatives législatives nationales seront grandement affaiblies par l'adoption d'accords mondiaux. Pouvez-vous m'assurer que, dans ce cas, nous continuerons d'agir comme nous le faisons à l'heure actuelle au Canada quel que soit le contenu de cet accord?
M. O'Brien: Sénateur, je ne suis pas avocat, encore moins un avocat spécialisé en droit commercial.
Le sénateur Corbin: Je ne suis pas avocat. Je dois poser des questions très simples.
M. O'Brien: Je crois comprendre que cela ne limite aucunement notre souveraineté. Cependant, si vous me permettez de faire allusion à vos observations, sénateur, nous ne voyons pas ceci comme quelque chose que nous essayons de copier à l'OMC. Il s'agit d'un accord bilatéral, un des éléments de notre approche en trois volets à savoir, bilatéral, régional et multilatéral et c'est une priorité.
Si des pays membres de l'OMC perdent une partie de leurs pouvoirs ou signent un accord multilatéral de bon gré, nous disposons alors de précédents dans les secteurs de l'économie, de la défense, et cetera. Ces pays individuels jugent de toute évidence que, pour le bien commun, ils sont prêts à sacrifier une partie de leur souveraineté. Il y a de nombreux exemples où le Canada et d'autres pays ont agi de la sorte. J'ai assisté aujourd'hui à une réunion où nous parlions de la NORAD. C'est un exemple dans le secteur de la défense.
Le président: Honorables sénateurs, est-ce que nous passons à l'étude article par article du projet de loi C-32?
Des voix: D'accord.
Le président: L'adoption du titre est-elle reportée?
Des voix: D'accord.
Le président: L'adoption du préambule est-elle reportée?
Des voix: D'accord.
Le président: L'adoption de l'article 1 est-elle reportée?
Des voix: D'accord.
Le président: L'article 2 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 3 à 15 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: L'article 16 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: L'article 17 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: L'article 18 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 19 à 25 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 26 à 30 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 31 à 46 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 47 à 50 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 52 et 53 et l'article 51, pris isolément, sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: Les articles 54 à 59 sont-ils adoptés?
Des voix: D'accord.
Le président: L'article 60 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: L'annexe I est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: L'annexe II est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: L'annexe III est-elle adoptée?
Des voix: D'accord.
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Le préambule est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: L'article 1 est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Êtes-vous d'accord pour que ce projet de loi soit adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport de ce projet de loi sans amendement à la prochaine séance du Sénat?
Des voix: D'accord.
Le président: Honorables sénateurs, je vous remercie. Je remercie également nos témoins.
J'ai une courte observation à faire aux fins du compte-rendu. Le sénateur Bolduc remplace temporairement le sénateur Andreychuk au comité de direction.
La séance est levée.